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Académie de Paris
Inter-Région Île-de-France
Coordonnateur : Professeur Benoit PLAUD
Année 2017
Mémoire pour l’obtention du
Diplôme d’Études Spécialisées d’Anesthésie Réanimation
Présenté et soutenu le 14 septembre 2017 par
Bénédicte JEANNIN
Évaluation de la prescription des carbapénèmes dans un service de
réanimation polyvalente
U.F.R. de Médecine : Université Paris Descartes
Directeur du mémoire : Docteur Gaëtan PLANTEFEVE
Service : Réanimation Polyvalente
Relu et validé par : Professeur Philippe MONTRAVERS
Rapporteur : Professeur Benoit PLAUD
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RÉSUMÉ
INTRODUCTION : L’usage des carbapénèmes est croissant, d’où l’émergence de nouvelles résistances
bactériennes à l’origine d’impasses thérapeutiques. L’objectif principal est d’évaluer la conformité des
prescriptions des carbapénèmes dans un service de réanimation polyvalente. L’objectif secondaire est
d’en évaluer l’impact sur l’évolution des patients.
PATIENTS ET MÉTHODES : Cette étude rétrospective monocentrique a inclus tous les patients
hospitalisés entre 2011 et 2015 et ayant reçu des carbapénèmes. Les patients avec des données
manquantes > 20% étaient exclus. Les prescriptions des carbapénèmes étaient classées d’après les
recommandations de la SPILF, selon leurs conformités en ciblant l'indication (critères A) et la
réévaluation (critères B).
RÉSULTATS : 3236 patients ont été admis en réanimation sur cette période. 226 patients ont reçu des
carbapénèmes. 270 prescriptions de carbapénèmes ont été analysées. 238 (88%) prescriptions étaient
conformes sur l’indication des carbapénèmes et 239 (89%) sur la réévaluation. 191 (85%) patients
recevaient des carbapénèmes conformément aux recommandations. Il existait une surmortalité des
patients avec une prescription conforme (p = 0,04).
DISCUSSION : Le taux élevé de prescription conforme peut s’expliquer par les indications larges des
carbapénèmes en réanimation en particulier chez les patients en choc septique. La surmortalité des
patients avec une prescription conforme s’explique probablement par la gravité des infections. Afin
d’atteindre 100% de conformité, la mise à jour régulière des connaissances sur la prescription des
carbapénèmes, la collaboration avec les équipes de bactériologie et d’infectiologie, une prescription
informatisée ou papier avec un rétrocontrôle sont des pistes à proposer.
CONCLUSION : La prescription des carbapénèmes apparaît souvent conforme aux recommandations
dans ce service de réanimation. Des pistes d’amélioration sont cependant possibles.
MOTS CLEFS : réanimation ; prescription ; antibiotique ; carbapénèmes
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TABLE DES MATIÈRES
ABRÉVIATIONS ........................................................................................................................... 4
INTRODUCTION .......................................................................................................................... 5
1. LES CARBAPENEMES ................................................................................................................... 5 1.1. SPECTRE D’ACTIVITE ...................................................................................................................... 5 1.2. MECANISME D’ACTION ................................................................................................................... 5 1.3. DIFFERENTS CARBAPENEMES : IMIPENEME, MEROPENEME, DORIPENEME ET ERTAPENEME ... 6 1.4. ÉMERGENCE DE NOUVELLES RESISTANCES ................................................................................... 7 2. LA PRESCRIPTION DES CARBAPENEMES EN REANIMATION .......................................................... 7 3. LES OBJECTIFS DE L'ETUDE ........................................................................................................ 8
PATIENTS ET MÉTHODES ........................................................................................................ 9
1. TYPE D'ETUDE ............................................................................................................................. 9 2. CRITERE D'INCLUSION ................................................................................................................ 9 3. CRITERES D’EXCLUSION ............................................................................................................. 9 4. ÉTHIQUE ..................................................................................................................................... 9 5. METHODE DE RECUEIL DES DONNEES ......................................................................................... 9 6. CRITERES D’EVALUATION DES PRESCRIPTIONS DES CARBAPENEMES ....................................... 10 7. ANALYSE STATISTIQUE ............................................................................................................. 12
RÉSULTATS ............................................................................................................................... 14
1. SELECTION DE LA POPULATION ................................................................................................ 14 2. CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION .................................................................................. 15 3. ANALYSE DE CONFORMITE DES PRESCRIPTIONS ....................................................................... 17 4. IMPACT DE LA CONFORMITE DE LA PRESCRIPTION DES CARBAPENEMES .................................. 18
DISCUSSION ............................................................................................................................... 20
CONCLUSION ............................................................................................................................ 25
BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................... 26
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ABRÉVIATIONS
AmpC : Bêtalactamase chromosomique de type AmpC
ANSM : Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé
BLSE : Bêtalactamases à Spectre Élargi
CAZ-R : Résistant à la Ceftazidime
DDJ : Dose Définie Journalière
EHPAD : Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes
GRAM : Coloration qui permet d’identifier et de classer les bactéries
I : Sensibilité Intermédiaire à un antibiotique
IC 95% : Intervalle de Confiance à 95%
IGS2 : Indice de Gravité Simplifié (score de gravité générale)
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
PLP : Protéines de Liaison à la Pénicilline
SLD : Soins Longue Durée
SOFA : Sequential Organ Failure Assessment (score de défaillance viscérale)
SPILF : Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française
R : Résistant à un antibiotique
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INTRODUCTION
Ces dernières années, l’usage des carbapénèmes est croissant, avec pour conséquence
l’émergence de nouvelles résistances à l’origine d’impasses thérapeutiques [1, 2]. La tendance
actuelle, telle que dictée par le Ministère de la Santé est de limiter l'utilisation inappropriée
d'antibiotiques en particulier des carbapénèmes afin de diminuer l'émergence de bactéries
résistantes et de préserver l'écologie bactérienne [3]. D’après le rapport de l’Agence Nationale
de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM), entre 2000 et 2015, la
consommation des carbapénèmes à l’hôpital par rapport aux autres antibiotiques a triplé,
passant de 0,5% à 1,6% [4].
1. Les carbapénèmes
1.1. Spectre d’activité
Les carbapénèmes sont des antibiotiques à large spectre, de la famille des bêtalactamines. Ces
antibiotiques sont actifs sur les bactéries à GRAM positif, GRAM négatif, aérobies et
anaérobies [5]. Ils permettent de traiter les bactéries ayant des résistances associées aux
antibiotiques de la famille des bêtalactamines en raison de leur large éventail d'activités
antibactériennes et de leur stabilité intrinsèque contre les attaques hydrolytiques de nombreuses
bêtalactamases, y compris les bêtalactamases à spectre élargi (BLSE) et les bêtalactamases
chromosomiques AmpC [6, 7]. En revanche, les carbapénèmes ne sont pas actifs contre
Enterococcus faecium, Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline et Stenotrophomonas
maltophilia [8]. Ces antibiotiques sont peu actifs sur Clostridium difficile [5].
1.2. Mécanisme d’action
Chez les bactéries à GRAM négatif, les carbapénèmes agissent en inhibant la synthèse de la
paroi cellulaire bactérienne en se liant à des protéines de liaison à la pénicilline (PLP) de haut
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poids moléculaire. Cela explique leur activité bactéricide. Chez les bactéries à GRAM positif,
ils ont peu ou pas d’activité sur les PLP de faible affinité (PLP2a des staphylocoques et PLP5
des entérocoques), ce qui explique leur absence d’activité sur les staphylocoques résistants à la
méthicilline et leur faible activité sur les entérocoques. Comme tous les antibiotiques de la
famille des bêtalactamines, ils ont une activité « temps-dépendante ». Par ailleurs, leur efficacité
est majorée par une augmentation de leur concentration sans effet plafond. Ce sont donc des
antibiotiques à effet mixte, à la fois « concentration et temps dépendant » [5]. Les carbapénèmes
ont une diffusion adéquate dans la majorité des tissus et leur élimination est essentiellement
rénale [8].
1.3. Différents carbapénèmes : imipénème, méropénème, doripénème et ertapénème
L’imipénème, le méropénème et le doripénème ont des demi-vies in vivo d'environ 1 heure,
tandis que l’ertapénème a une demi-vie d'environ 4 heures, ce qui le rend approprié pour une
unique administration quotidienne [8]. L’imipénème, le méropénème et le doripénème sont des
molécules de référence pour le traitement des infections nosocomiales à risque élevé de bacille
à GRAM négatif résistant de type BLSE, notamment respiratoires, intra-abdominales, de la
peau et des tissus mous. Leur utilisation dans le cadre des infections communautaires ne se
justifie qu’en cas de notion de colonisation ou d’infection préalable par des entérobactéries
BLSE, ou en présence de facteurs de risque particuliers [5]. L'imipénème est légèrement plus
efficace contre les organismes à GRAM positif et le méropénème est légèrement plus efficace
contre les organismes à GRAM négatif. A noter une activité sensiblement supérieure du
méropénème et du doripénème sur Pseudomonas aeruginosa [5]. Le méropénème est indiqué
pour les méningites (principalement post-opératoires) car cette molécule ne présente pas de
toxicité neurologique contrairement à l’imipénème. Par rapport à l'imipénème, au méropénème
et au doripénème, le spectre d'activité de l'ertapénème est plus limité principalement parce qu'il
manque d'activité contre Pseudomonas aeruginosa, Acinetobacter baumannii et les
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entérocoques [5, 8]. Le spectre antimicrobien unique et les propriétés pharmacocinétiques de
l'ertapénème le rendent plus adapté au traitement des infections acquises dans la communauté
et à la thérapie antimicrobienne intraveineuse ambulatoire. L’indication principale est
l’infection urinaire à entérobactéries productrices de BLSE en l’absence d’alternative, où sa
demi-vie prolongée autorise une administration uniquotidienne, notamment lorsqu’un
traitement de relais est indiqué [5].
1.4. Émergence de nouvelles résistances
En raison des défis croissants représentés par les BLSE et les organismes multirésistants, les
carbapénèmes assurent un rôle plus important dans le traitement des infections graves [6]. Leur
usage est croissant ces dernières années, mais leur utilisation excessive et inappropriée pourrait
entrainer l'émergence de nouvelles résistances [9]. Les bactéries acquièrent ou développent
différents mécanismes de résistance aux carbapénèmes : des changements structurels au sein de
leurs PLP, l’acquisition d’enzymes comme les métallo-bêtalactamases capables de dégrader
rapidement les carbapénèmes ou des changements dans la perméabilité de la membrane par la
perte de pores membranaires externes spécifiques [6, 8]. Sont ainsi apparues des entérobactéries
productrices de carbapénèmases dans certains pays d'Europe mais aussi dans le reste du monde
(Iran, Chine, Pakistan, ...) qui inactivent toutes les carbapénèmes [1]. Plusieurs cas d'épidémies
hospitalières ont déjà été signalés en France depuis 2004, associés au transfert de patients en
provenance de ces pays [5]. Ces résistances sont à l'origine d'impasses thérapeutiques. C’est
également un problème de santé public, avec un impact financier important.
2. La prescription des carbapénèmes en réanimation
Selon les recommandations, devant une suspicion d'infection sévère en réanimation, des
prélèvements bactériologiques sont réalisés, puis une antibiothérapie probabiliste large spectre
est initiée [10]. Cette antibiothérapie est ensuite secondairement adaptée en fonction des germes
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identifiés et de leur profil de sensibilité. L’un des objectifs est de limiter l’émergence et la
propagation des pathogènes multi-résistants [11]. Des recommandations nationales ont été
élaborées pour inciter les établissements de santé à mettre en œuvre des politiques pour la
maitrise des thérapies antibiotiques (Plan National d’alerte sur les antibiotiques 2011-2016).
Pour aider les professionnels de santé dans l'évaluation de ces prescriptions, un groupe de travail
de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF) a développé un outil
d'évaluation : la « fiche d'évaluation des prescriptions des carbapénèmes » [12]. Cette fiche
proposée en 2014, a également été validée par le comité de coordination de lutte contre les
infections nosocomiales du Sud-Ouest (Clin Sud-Ouest), et l'Observatoire National de
l'Épidémiologie de la Résistance Bactérienne aux Antibiotiques de France (ONERBA France).
Cette évaluation a pour objectif d'analyser la conformité de l'indication des prescriptions des
carbapénèmes et la conformité de la réévaluation à 48 - 72 heures ou à la réception de
l'antibiogramme [12]. Les informations recueillies concernant les prescriptions non conformes
ont pour but d'identifier les axes de travail pour réduire ou améliorer la prescription des
carbapénèmes.
3. Les objectifs de l'étude
L’objectif principal de l’étude est d’évaluer la conformité des prescriptions des carbapénèmes
selon les recommandations dans un service de réanimation polyvalente sur une période de cinq
ans. L’objectif secondaire de l’étude est d’évaluer l’impact de cette conformité de prescription
des carbapénèmes sur l’évolution des patients.
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PATIENTS ET MÉTHODES
1. Type d'étude
Cette étude sur dossier est non interventionnelle, rétrospective et monocentrique. Elle a été
réalisée dans le service de réanimation polyvalente de l’hôpital d'Argenteuil, qui comprend 12
lits d’hospitalisation.
2. Critère d'inclusion
Tous les patients hospitalisés dans le service de réanimation polyvalente de l’hôpital
d'Argenteuil du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2015 et ayant reçu au moins une dose de
carbapénèmes ont été inclus.
3. Critères d’exclusion
Les patients dont les données manquantes étaient supérieures à 20% du cahier de recueil ont
été exclus.
4. Éthique
Cette étude a été réalisée en colligeant les données sur dossiers de manière rétrospective, sans
intervention. Cette cohorte anonymisée rétrospective et non interventionnelle ne rentrait pas
dans le champ d’application de la loi Jardé, applicable depuis le 16 Novembre 2016.
5. Méthode de recueil des données
Tous les dossiers des patients hospitalisés dans le service de réanimation polyvalente à l’hôpital
d'Argenteuil entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2015 ont été consultés, les données
suivantes ont été recueillies et analysées :
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- Les caractéristiques de la population : sexe, âge, et le motif médical ou chirurgical
d’hospitalisation en réanimation ;
- Les caractéristiques de l’hospitalisation : durée de séjour en réanimation, durée de séjour
à l’hôpital, décès dans le service de réanimation et à l’hôpital ;
- La gravité du patient : score IGS2 (Indice de Gravité Simplifié) à l’admission en
réanimation, score SOFA (Sequential Organ Failure Assessment) à l’admission en
réanimation, nécessité d’une ventilation mécanique et/ou de catécholamine et/ou de
l’hémodialyse au cours du séjour en réanimation ;
- Les caractéristiques du traitement par carbapénèmes : la durée du traitement, les doses
reçues, exprimées en dose définie journalière (DDJ) selon la définition de
l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (dose moyenne quotidienne d’un traitement
d’entretien pour un adulte de 70 kg). Les DDJ selon l’OMS pour l’imipénème et pour
le méropénème sont de 2 grammes [14] ;
- Le type d'infection et sa documentation microbiologique ;
- La prescription probabiliste ou documentée ;
- Les critères de qualité de la prescription : prélèvements réalisés avant le début de
l'antibiothérapie, réévaluation de l’antibiothérapie à 48 heures, désescalade de
l’antibiothérapie.
6. Critères d’évaluation des prescriptions des carbapénèmes
Les prescriptions des carbapénèmes ont été classées en suivant la « fiche d'évaluation des
prescriptions des carbapénèmes » selon les recommandations de la SPILF [12]. Cette fiche
évalue la conformité des prescriptions des carbapénèmes en ciblant l'indication (critères A) et
la réévaluation à 48 - 72 heures ou à la réception des résultats de l'antibiogramme (critères B).
Ainsi, le groupe « conforme » réunissait l’ensemble des patients avec une prescription de
carbapénèmes conforme aux recommandations et le groupe « non conforme » l’ensemble des
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patients avec une prescription non conforme aux recommandations. Les deux groupes ont alors
été comparés sur des données d’évolution : mortalité et durées de séjours en réanimation et
hospitalières.
Tableau I : Critères A : Conformité de l'indication de prescription des carbapénèmes
TRAITEMENT PROBABILISTE AU MOMENT DE L'INITIATION DU TRAITEMENT PAR CARBAPENEME :
Critères majeurs : tableaux cliniques
A1 Choc septique ou sepsis grave
A2 Neutropénie fébrile
A3 Endophtalmie
Critères mineurs : facteurs associés au tableau clinique
A4 Traitement antérieur par céphalosporine de troisième génération ou fluoroquinolone dans
les 3 mois
A5 Hospitalisation à l'étranger dans les 12 mois
A6 Patient vivant dans un Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes
(EHPAD) médicalisé ou dans un Soins Longue Durée (SLD) et porteur d'une sonde urinaire
à demeure et/ou d'une gastrostomie
A7 Récidive précoce d'une infection traitée par piperacillin et tazobactam pendant au moins
3 jours
A8 Échec de traitement par antibiotique large spectre
A9 Antécédent d'identification d'une entérobactérie BLSE, ou hyperproductrice de
céphalosporinase et de sensibilité intermédiaire (I) ou résistant (R) au céfépime, ou
Pseudomonas aeruginosa résistant à la ceftazidime (CAZ-R), sur un prélèvement quel que
soit le site
A10 Choc septique et/ou pneumopathie
A11 Épidémie infection à entérobactéries BLSE en cours dans le service
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TRAITEMENT DOCUMENTE AU MOMENT DE L'INITIATION DU TRAITEMENT PAR CARBAPENEME :
A12 Infection à Entérobactérie BLSE, ou hyperproductrice de céphalosporinase et I ou R au
céfépime, ou Pseudomonas aeruginosa, ou Burkholderia cepacia, ou Acinetobacter
baumannii CAZ-R, et contre-indication à l'alternative de l'antibiogramme ou pas d'alternative
CONFORMITE : A1 Oui et au moins un des critères de A4 à A9
A2 Oui et au moins un des critères de A7 à A11
A3 ou A12 Oui
Tableau II : Critères B : Conformité de la réévaluation à 48 - 72 heures ou à la réception de l'antibiogramme
B1 Réévaluation à 48 - 72 heures ou à la réception de l'antibiogramme réalisé
B2 Arrêt de l'antibiothérapie ou du carbapénème possible et réalisé
B3 Infection non documentée et motif de prescription initiale conforme et ne correspondant
pas à (A2 et A9) ou (A2 et A11)
B4 Infection documentée à Entérobactérie BLSE, ou hyperproductrice de céphalosporinase
et I ou R au céfépime, ou Pseudomonas aeruginosa, ou Burkholderia cepacia, ou
Acinetobacter baumannii CAZ-R, et contre-indication à l'alternative de l'antibiogramme ou
pas d'alternative
CONFORMITE : B1 Oui et B2, ou B3, ou B4 Oui
7. Analyse statistique
Les résultats sont exprimés en médiane (écart interquartile) [valeur minimum - valeur
maximum] pour les variables quantitatives et en valeur absolue et pourcentage (%) pour les
données qualitatives. Les intervalles de confiance à 95% [IC 95%] sont calculés selon la
procédure de Wilson avec une correction de la continuité. Les variables quantitatives sont
comparées deux à deux avec un test de Mann-Whitney. Les données qualitatives sont
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comparées avec un test exact de Fischer adapté à la taille des effectifs. Une valeur de p
strictement inférieure à 0,05 est considérée comme statistiquement significative.
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RÉSULTATS
1. Sélection de la population
Entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2015, 3236 patients ont été hospitalisés en
réanimation polyvalente à l’hôpital d’Argenteuil. Parmi ces patients, la moitié (50,5%) ont reçu
des antibiotiques et 226 patients ont reçu au moins une dose de carbapénèmes. Trente et un
patients ont reçu plusieurs fois des carbapénèmes durant la même hospitalisation. L'imipénème
était le principal carbapénème prescrit. Les rares cas de prescription de méropénème
concernaient des troubles neurologiques liés à la maladie initiale ou apparus secondairement
sous imipénème. Le diagramme de flux est présenté en figure 1.
Figure 1: Diagramme de flux
3236 patients hospitalisés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2015 en réanimation polyvalente à
l'hôpital d'Argenteuil
1603 (49,5%) patients sans antibiotique
1633 (50,5%) patients avec antibiotique
1407 (82,6%) patients ont reçu d'autres antibiotiques
que des carbapénèmes226 (13,8%) patients
ont reçu des carbapénèmes
270 prescriptions de carbapénèmes
analysées
Aucune prescription de doripénème ou d'ertapénème
248 prescriptions d'imipénème
22 prescriptions de méropénème
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2. Caractéristiques de la population
L’ensemble des caractéristiques des 226 patients est présenté dans le tableau III. Il y avait 147
(65%, [58 - 71]) hommes et 79 (35%, [29 - 42]) femmes. L’âge des patients variait de 22 à 91
ans avec une médiane à 67 ans. La gravité des patients était élevée avec un IGS2 médian à 53
et un SOFA médian à 9. La majorité des patients était hospitalisée en réanimation pour une
raison médicale (60%). La plupart des 270 prescriptions étaient probabilistes (77%) et
essentiellement pour des infections pulmonaires (44%) ou intra abdominales (27%). La
documentation microbiologique retrouvait dans 37% des cas des bactéries sans indication de
carbapénèmes, dans 30% des cas des entérobactéries BLSE ou hyperproductrices de
céphalosporinase, et dans 9% des cas Pseudomonas aeruginosa quel que soit leur profil de
sensibilité.
Tableau III : Caractéristiques de la population
Caractéristiques Valeurs
Ratio homme / femme []
Âge (années) []
IGS2 à l’admission en réanimation []
SOFA à l’admission en réanimation []
Nombre de patients avec un motif d’hospitalisation médical []
Nombre de patients avec un motif d’hospitalisation chirurgical []
Nombre de patients sous ventilation mécanique en réanimation []
Nombre de patients sous catécholamines en réanimation []
Nombre de patients nécessitant de l’hémodialyse en réanimation []
Prescriptions des carbapénèmes (270 prescriptions) :
Prescriptions probabilistes []
Prescriptions adaptées d’emblée à l’antibiogramme du pathogène []
147 / 79
67 (19) [22 - 91]
53 (31) [7 - 110]
9 (7) [0 - 18]
135 (60%) [53 - 66]
91 (40%) [34 - 47]
171 (76%) [70 - 81]
152 (67%) [60 - 73]
67 (30%) [24 - 37]
209 (77%) [71 - 82]
61 (23%) [18 - 29]
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Types d’infections pour les 270 prescriptions :
Infections pulmonaires []
Infections intra-abdominales []
Bactériémies isolées sans porte d’entrée retrouvée []
Infections urinaires invasives []
Infections d'origine inconnue []
Infections cutanées ou des tissus mous []
Infections urinaires (cystites ou infections sur sonde urinaire) []
Neutropénies fébriles []
Infections ostéo-articulaires []
Infections liées au cathéter []
Infection neuro-méningée []
Documentations microbiologiques pour les 270 prescriptions :
Entérobactéries BLSE ou hyperproductrice de céphalosporinase et de
sensibilité intermédiaire ou résistante au céfépime [
Pseudomonas aeruginosa [
Bactéries n’étant pas une indication des carbapénèmes [
Aucune bactérie identifiée sur les prélèvements microbiologiques [
Absence de prélèvement microbiologique [
121 (44%) [38 - 50]
72 (27%) [22 -33]
21 (8%) [5 - 12]
18 (7%) [4 - 11]
14 (5%) [3 – 9]
7 (2,5%) [1 - 5]
6 (2%) [1 - 5]
4 (1,5%) [1 - 4]
4 (1,5%) [1 - 4]
2 (1%) [0 - 3]
1 (0,5%) [0 - 3]
81 (30%) [25 - 36]
25 (9%) [6 - 13]
99 (37%) [31 - 43]
50 (19%) [15 - 24]
15 (5%) [3 - 9]
Variables quantitatives exprimées en médiane (écart interquartile) [minimum - maximum] Données qualitatives exprimées en valeur absolue (pourcentage) [intervalle de confiance à 95%]
La DDJ d’imipénème était de 1,27 gramme et celle du méropénème était de 2,12 grammes.
Au total 100 (44%, IC 95% [38 - 51]) patients sont décédés, dont 90 (40%, IC 95% [34 - 47])
d’entre eux en réanimation et 10 (4%, IC 95% [2 - 8]) après la sortie de réanimation. La médiane
de la durée de séjour en réanimation était de 17 jours (écart interquartile à 25 et extrêmes entre
1 et 102 jours).
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3. Analyse de conformité des prescriptions
Selon les critères A (conformité de l'indication de prescription des carbapénèmes), 238 (88%)
prescriptions étaient conformes. Selon les critères B (conformité de la réévaluation de la
prescription à 48 - 72 heures ou à la réception de l'antibiogramme), 239 (89%) prescriptions
étaient conformes.
Tableau IV : Analyse de la conformité des prescriptions des carbapénèmes
Effectif
(n = 270)
Selon les critères A* :
Prescriptions conformes []
Prescriptions non conformes []
Absence de critères majeurs []
Présence de critères majeurs mais absence de critères mineurs []
Selon les critères B** :
Prescriptions conformes []
Prescriptions non conformes []
Non évaluable (décès du patient avant 48 heures) []
238 (88%) [83 - 92]
32 (12%) [9 - 17]
16 (6%) [4 - 10]
16 (6%) [4 - 10]
239 (89%) [85 - 92]
9 (3%) [1 - 6]
22 (8%) [5 - 12]
Données qualitatives exprimées en valeur absolue (pourcentage de la population) [intervalle de confiance à 95%] *Critères A, critères de conformité de l'indication de prescription des carbapénèmes **Critères B, critères de conformité de la réévaluation de la prescription à 48 - 72 heures ou à la réception de l'antibiogramme
Parmi les 226 patients inclus, 191 (85%, IC 95% [80 - 89]) patients ont reçu au moins une dose
de carbapénèmes conformément aux recommandations (en regroupant les critères A et B),
constituant le groupe « conforme ». Une désescalade antibiotique a eu lieu chez 90 (47%, IC
95% [85 - 94]) patients, la désescalade n’a pas eu lieu chez 84 (44%, IC 95% [78 - 89]) patients,
et était non évaluable chez 17 patients en raison de leur décès précoce. Trente-cinq (15%, IC
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95% [11 - 21]) patients ont reçu à tort des carbapénèmes, constituant le groupe « non
conforme ». Une désescalade antibiotique a eu lieu chez 28 (80%, IC 95% [63 - 91]) patients,
la désescalade n’a pas eu lieu chez 6 (17%, IC 95% [7 - 34]) patients, et était non évaluable
chez un patient en raison de son décès précoce.
4. Impact de la conformité de la prescription des carbapénèmes
La comparaison du groupe « conforme » avec le groupe « non conforme » a permis de mettre
en évidence une surmortalité chez les patients avec une prescription conforme (p = 0,04).
Aucune autre différence statistiquement significative n’a pu être mise en évidence pour les
autres critères d’évolution et de gravité.
Tableau V : Comparaison du groupe de patients avec une prescription de carbapénèmes conforme aux recommandations avec le groupe de patients avec une prescription non conforme.
Conforme
(n = 191)
Non conforme
(n = 35)
p
Mortalité en réanimation []
Mortalité à 28 jours []
Durée d’hospitalisation en réanimation (j)
Durée d’hospitalisation (j)[
IGS2 à l’admission []
SOFA à l’admission []
Patients sous ventilation mécanique* []
Patients sous catécholamines* []
Patients nécessitant de l’hémodialyse* []
84 (37%) [30 - 44]
70 (31%) [25 - 38]
13 (20) [1 - 102]
25 (36) [1 - 218]
54 (30) [7 - 110]
9 (7) [0 - 18]
148 (78%) [71 - 84]
131 (69%) [62 - 75]
59 (31%) [25 - 38]
6 (3%) [0 - 17]
6 (3%) [0 - 17]
12 (20) [2 - 80]
38 (42) [2 - 218]
48 (26) [10 - 99]
7 (6) [1 - 17]
23 (66%) [48 - 81]
21 (60%) [42 - 76]
8 (23%) [11 - 41]
[0,04
[0,12
[0,82
[0,16
[0,10
[0,31
[0,14
[0,33
[0,42
Données qualitatives exprimées en valeur absolue (pourcentage de la population) [intervalle de confiance à 95%] Variables quantitatives exprimées en médiane (écart interquartile) [minimum - maximum] (j) : jours * : au cours du séjour en réanimation
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Dans le groupe « conforme », la médiane de la durée de traitement était de 4 jours (écart
interquartile à 5 et extrêmes entre 1 et 38 jours). La médiane de la durée d’hospitalisation sans
carbapénèmes était de 8 jours (écart interquartile à 15 et extrêmes entre 0 et 69 jours). Dans le
groupe « non conforme », la médiane de la durée de traitement était de 3 jours (écart
interquartile à 3 et extrêmes entre 1 et 25 jours). La médiane de la durée d’hospitalisation sans
carbapénèmes était de 10 jours (écart interquartile à 17 et extrêmes entre 0 et 71 jours).
Cent trente-cinq (60%, IC 95% [53 - 66]) patients sur les 226 patients étaient en état de choc
septique, dont 122 (90%, IC 95% [85 - 93]) patients dans le groupe « conforme » et 13 (10%,
IC 95% [7 - 15]) patients dans le groupe « non conforme ».
L’évolution du nombre de patients dans les groupes « conforme » et « non conforme » au cours
des années de recueil est présentée dans la figure 2. Aucune variation n’a été constatée entre
2011 et 2015.
Figure 2: Nombre de patients ayant des prescriptions conformes et non conformes en fonction des années de recueil
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
50
2011 2012 2013 2014 2015
Prescriptions conformes
Prescriptions non conformes
Nombre de patients
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DISCUSSION
Cette étude réalisée sur 5 ans en réanimation polyvalente retrouve une prescription
d’antibiotique pour 50,5% des patients, avec 13,8% de carbapénèmes, soit un total de 270
prescriptions de carbapénèmes chez 226 patients. La prévalence des prescriptions de
carbapénèmes en réanimation est mal connue. Les données sont rares et variables en particulier
d’un pays à l’autre. Dans une étude de prévalence des antibiotiques au sein de 314 hôpitaux
français en 2010, la prescription de carbapénèmes concernait 1,4% des infections
communautaires et 5,9% des infections nosocomiales [14]. Les auteurs ne précisaient pas les
chiffres spécifiques à la réanimation, mais ils notaient que 49% des patients de réanimation
recevaient des antibiotiques, ce qui est proche des chiffres de notre étude. En 2009 et 2011
l’équipe de Curcio analysait la prévalence des prescriptions d’antibiotiques dans 43 unités de
soins intensifs d’Amérique Latine [15, 16]. En 2009, sur 510 patients admis, 231 (45%)
recevaient des antibiotiques, dont 43% des carbapénèmes [15]. En 2011, sur 1664 patients
admis, 688 patients recevaient des antibiotiques, dont 22% des carbapénèmes [16]. Malgré la
diminution entre 2009 et 2011, les auteurs retrouvaient une prévalence de la prescription de
carbapénèmes plus élevée que dans notre série.
L'imipénème est le principal carbapénème prescrit dans ce service. Selon les recommandations
de la SPILF de 2014, 88% des indications des prescriptions de carbapénèmes étaient conformes
et 89% des prescriptions étaient conformes après la réévaluation à 48 - 72 heures ou à la
réception de l’antibiogramme [12]. Au total, selon les critères d’adéquation, 191 (85%) patients
avaient une prescription de carbapénèmes conforme. La seule différence statistiquement
significative qu’a pu mettre en évidence la comparaison du groupe « conforme » avec le groupe
« non conforme » est une surmortalité chez les patients avec une prescription conforme (p =
0,04). Ce résultat s’explique probablement par le fait que les patients du groupe « conforme »
étaient atteints d’infections plus graves, mais cette hypothèse n’a pas pu être confirmée en
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raison du trop grand nombre de données manquantes pour établir un score de gravité à la
prescription des carbapénèmes. La comparaison des principaux marqueurs de gravité comme
le recours à la ventilation mécanique, aux catécholamines ou à l’hémodialyse ne montrait pas
de différence statistiquement significative entre les groupes « conforme » et « non conforme ».
La surmortalité dans le groupe « conforme » reste surprenante. Méthodologiquement, le lien de
causalité entre conformité de la prescription de carbapénèmes et surmortalité ne peut être
affirmé. D’autres études seront nécessaires pour explorer ce résultat.
Bien que le pourcentage de prescriptions conformes aux recommandations n’atteigne pas le
chiffre cible de 100%, la prescription de carbapénèmes apparait le plus souvent conforme dans
notre série avec un taux de 85%. Plusieurs études françaises ont cherché à évaluer la conformité
des prescriptions des carbapénèmes. Une étude réalisée par Jary et al au CHU de Besançon,
évaluait la prescription des carbapénèmes sur 2 mois sur l’ensemble de l’hôpital [17]. Le même
outil d’évaluation de conformité de prescription des carbapénèmes de la SPILF était utilisé. La
conformité atteignait 33,3%. Les auteurs ne détaillaient pas les évaluations pour chaque service
de l’hôpital, il n’y avait donc pas les données spécifiques de la réanimation. Dans une autre
étude française réalisée dans les services du CHU de Lyon Sud (hors réanimation) sur 6 mois,
les auteurs retrouvaient 60,3% de conformité des prescriptions des carbapénèmes [18]. Les
auteurs ne précisaient pas les modalités suivies pour cette évaluation. Les taux de conformité
observés dans notre étude étaient plus élevés que dans ces 2 études françaises. Ce résultat
s’explique de plusieurs manières : l’étude a été réalisée en réanimation, avec une équipe
médicale très présente, sensibilisée à la prescription des antibiotiques, et qui fait
quotidiennement un bilan des résultats microbiologiques de chaque patient avec le biologiste.
Pour les cas les plus compliqués, l’équipe mobile d’infectiologie est disponible pour discuter
de façon collégiale avec les biologistes et les réanimateurs pour décider de l’antibiothérapie la
plus adaptée. De plus, notre population de patients est le plus souvent sévère, avec notamment
de nombreux chocs septiques, un des critères majeurs de la grille d’évaluation.
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Cependant, le taux de conformité dans notre service n’atteignait pas 100%. Afin de l’améliorer
ce résultat, plusieurs pistes sont possibles. La sensibilisation des médecins par des mises à jour
régulières sur la prescription des carbapénèmes est une piste. En 2015, l’équipe d’infectiologie
du CHU de Bordeaux avait évalué la prescription des carbapénèmes sur l’ensemble de l’hôpital
avant et après la sensibilisation sur la prescription des carbapénèmes [19]. Alors que le nombre
d’admissions était stable sur les 2 périodes, la prescription des carbapénèmes avait diminué de
16%. Une autre piste pourrait être la consultation systématique d’un infectiologue lors de la
prescription des carbapénèmes en réanimation. Mais la prescription urgente en cas de choc
septique ou de sepsis sévère risque de rendre cette consultation impossible en particulier en
période nocturne ou de week-end. Enfin, une prescription informatisée des antibiotiques avec
un rétrocontrôle et en particulier des carbapénèmes pourrait être une aide à l’obtention d’une
conformité de 100%. L’outil informatique « Antibiogarde » actuellement disponible sur
l’hôpital d’Argenteuil ne permet pas ce contrôle des prescriptions. L’idée d’une fiche papier
spécifique pour la prescription des carbapénèmes est à l’étude.
Dans notre série, 89% des prescriptions étaient conformes après réévaluation de
l’antibiothérapie. L’objectif de la réévaluation de l’antibiothérapie et de la réalisation d’une
désescalade antibiotique est d’obtenir 100% de conformité, afin de réduire le spectre d’activité
des antimicrobiens et ainsi prévenir l'émergence de la résistance bactérienne. Cette hypothèse
est controversée dans la littérature. En 2013, Armand-Lefèvre et al évaluaient dans deux unités
de réanimation françaises le portage rectal de bactéries à GRAM négatif résistantes à
l’imipénème chez 523 patients [20]. Les auteurs retrouvaient que le principal facteur de risque
de cette colonisation était l’exposition à l’imipénème. Ils ajoutaient que même une durée brève
d’exposition (1 à 3 jours) majorait le risque de colonisation. Bien que cette étude ne fasse que
le lien entre exposition à l’imipénème et colonisation, elle est un argument fort pour diminuer
la consommation des carbapénèmes y compris dans les antibiothérapies probabilistes courtes.
L’impact entre l’exposition aux carbapénèmes et une infection secondaire à des bactéries
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résistantes n’était pas testé dans cette étude.
Un travail plus récent a repris 14 études dans le but d’analyser la désescalade de
l’antibiothérapie prescrite en probabiliste [21]. Les auteurs constataient une très grande
variabilité des définitions de la désescalade. Le principe de la désescalade était plus
fréquemment appliqué lorsque les antibiotiques prescrits en probabiliste étaient à large spectre
ou lorsqu’une association d’antimicrobiens avait été instaurée. Aucune des 14 études n’a été
méthodologiquement construite pour étudier le bénéfice de la désescalade sur l’apparition de
résistance aux antibiotiques. Une méta-analyse Cochrane en 2012 a évalué l’efficacité et la
sécurité de la désescalade antibiotique chez des patients en sepsis, sepsis sévère ou choc
septique [22]. Les auteurs ont inclus les essais contrôlés randomisés qui comparaient la
désescalade antibiotique selon les résultats des cultures microbiennes, à la poursuite de
l’antibiothérapie initiale sans désescalade. Après l’analyse de 436 références, aucun essai
contrôlé randomisé n’a pu être inclus. Les auteurs ont conclu qu’il n’était pas possible de
recommander ou de ne pas recommander la désescalade antibiotique chez des patients en sepsis,
sepsis sévère ou choc septique [22]. Il semble cependant adapté de réaliser une réévaluation de
l’antibiothérapie. En 2015, Weiss et al ont proposé une définition de la désescalade antibiotique
avec une classification à 6 rangs des bêtalactamines selon leur spectre et leur pression de
sélection bactérienne [23]. Puis ces mêmes auteurs ont secondairement évalué
rétrospectivement les effets de la réévaluation des prescriptions d’antibiotique sur l’émergence
de résistance bactérienne chez des patients atteint de pneumopathie acquise sous ventilation
mécanique à bacilles à GRAM négatif [11]. Sur les 182 patients inclus, la désescalade
antibiotique était réalisable chez 131 (72%) patients et réalisée chez seulement 70 (38%)
patients. Elle avait lieu dans les 72 heures dans 61 cas. Cette désescalade n’a pas eu d’impact
sur la durée sans antibiotique, y compris la durée sans carbapénèmes, ni sur l’acquisition de
colonisation par des bactéries résistantes à certains antibiotiques. Il apparait difficile de
démontrer l’importance de la désescalade des antibiotiques dans les 48 - 72 heures pour limiter
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l’apparition de résistance bactérienne, mais il semble adapté de réévaluer précocement
l’antibiothérapie.
Notre étude présente plusieurs limites. D’une part, il s’agit d’une étude rétrospective et
monocentrique. Les données ont été analysées sur la base des informations disponibles pour
chaque patient, après la fin de leur hospitalisation. Ainsi, certaines informations
complémentaires manquaient comme l’indication ou la justification de la prescription de
carbapénèmes. De plus, certaines données pertinentes, comme un score de gravité à la
prescription des carbapénèmes n’ont pas pu être recueillies devant trop de données manquantes.
Par ailleurs, dans la fiche d’évaluation proposée en 2014 par la SPILF, les auteurs précisent que
l’évaluation des dossiers doit être réalisée de manière prospective par une équipe
pluridisciplinaire (la personne qui mène l’enquête, le médecin prescripteur et le référent
antibiotique de l’établissement) [12]. Nous n’avons pas pu nous conformer à cette
méthodologie. Les dossiers ont été évalués par une seule personne et de manière rétrospective.
Enfin, l’effectif de patients analysés est probablement trop faible pour retrouver une différence
significative au niveau de l’évolution des patients en fonction de leurs prescriptions conformes
ou non conformes. Nous avons néanmoins des effectifs comparables aux deux études françaises
qui évaluent la prescription des carbapénèmes. Faudel et al évaluent 156 prescriptions de
carbapénèmes et Jary et al font leur évaluation sur 103 prescriptions de carbapénèmes [17, 18].
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CONCLUSION
Cette étude a permis d'évaluer la conformité de la prescription des carbapénèmes en réanimation
polyvalente à l’hôpital d’Argenteuil sur 5 ans. Cette prescription apparait le plus souvent
conforme avec un taux de 85%. Les résultats de notre étude ne permettent pas de démontrer un
bénéfice individuel à la prescription conforme des carbapénèmes.
Cette étude a été réalisée en réanimation, un service sensibilisé à la prescription des
antibiotiques, ce qui peut expliquer le chiffre important de prescriptions conformes. Afin
d’améliorer ces prescriptions pour atteindre 100% de conformité, la mise à jour régulière des
connaissances des médecins sur la prescription des carbapénèmes, la collaboration avec les
équipes de bactériologie et d’infectiologie, une prescription informatisée avec un rétrocontrôle
ou une fiche papier de prescription spécifique sont des pistes à proposer.
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