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HAUTE ECOLE GALILEE – INSTITUT DES HAUTES ETUDES DES COMMUNICATIONS SOCIALES
José Manuel Durão Barroso le pire ou le meilleur pour l’Europe ?Analyse de la presse européenne et internationale
Travail présenté dans le cadre du Mémoire de fin d’études pour l’obtention du Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées en Journalisme Européen
Roxane MICHELBruxelles – Septembre 2007
DESS Journalisme Européen Année Académique 2006-2007
IHECS Formation27, rue des Grands Carmes
1000 – Bruxelles
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Remerciements
Je tiens à remercier en premier lieu Monsieur Jean Lemaître, mon promoteur, qui m’a
aiguillée dans mes recherches et donnée de multiples pistes de travail. Je souhaite lui exprimer toute
ma gratitude pour sa rapidité, son écoute, ses apports pertinents et pour sa disponibilité à toute
épreuve.
Je souhaite par ailleurs remercier le service Media Monitoring de la DG Communication de
la Commission européenne et plus particulièrement M. Luis Simoes sans qui ce travail n’aurait pas
pu voir le jour. Grâce à lui, j’ai eu accès à une multitude d’articles, d’interviews, d’éditos du monde
entier ayant trait à José Manuel Barroso. Cet apport a été un gain de temps incroyable. Son aide a
facilité mes recherches et largement amoindri les coûts financiers que pouvait engendrer une telle
étude.
J'exprime enfin toute ma reconnaissance à toute l’équipe de l’IHECS : Pierre de Greef,
Stéphane Wanufel, Sophie Henrard, Pierre de Villers… pour leur sympathie communicative et
leurs réponses à mes questions multiples et variées tout au long de cette année.
Un grand merci à toute l’équipe!
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Avant-propos
Mon travail de fin d’études propose de percevoir qui se cache derrière le Président de la
Commission européenne, José Manuel Durão Barroso. En d’autres termes, découvrir qui est
l’homme politique et comment il a géré ses trois premières années de mandat (2004-2007). Cette
analyse a été effectuée au moyen de la presse européenne et internationale et dans une moindre
mesure via d’autres sources telles que les discours politiques, les blogs et les sites Internet
(Europa).
Dès le début de mes recherches, je me suis rendue compte qu’il était très difficile de trouver
des informations sur le « personnage » Barroso, notamment sur la manière dont il était perçu dans la
presse européenne et internationale. J’ai cependant eu la chance d’avoir accès à une multitude
d’archives et de sources lors de mon stage au sein du service Media Monitoring de la DG
Communication de la Commission européenne.
Je tiens à signaler que je ne connais pas toutes les langues issues de mes sources. Je parle
couramment l'anglais et le français est ma langue maternelle. Je possède en outre de bonnes bases
en espagnol et suis capable de comprendre les textes rédigés en portugais. De ce fait, les traductions
des articles issus de la presse anglo-saxonne et hispanophone ont été opérées par mes soins. Quant
aux autres articles (Polonais, Hongrois, Italien…), j’ai eu la chance de me les procurer au service de
presse de la CE, où ils étaient d’ores et déjà traduits en anglais. Il m’a donc suffi de les traduire
ensuite en français.
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Sigles et Abrévations
AFP Agence France Presse
ALDE Alliance des Libéraux et des Démocrates pour l’Europe
CE Commission européenne
FIG Figaro (Le)
FT Financial Times
IHT International Herald Tribune
M Monde (Le)
PAC Politique Agricole Commune
PE Parlement européen
PSD Parti social-démocrate
TCE Traité Constitutionnel européen
UE Union européenne
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Introduction
« José Manuel Durão Barroso, qui garde jalousement son jardin secret, a ce petit côté Janus qui le
rend difficile à cerner, lui qui a le chic pour apparaître là où on ne l'attend pas forcément: militant
maoïste puis dirigeant d'un Parti social-démocrate en réalité de droite, européiste convaincu élevé
à la lumière du fédéraliste Dusan Sidjanski tout en s'affichant atlantiste fervent, propulsé à la tête
du gouvernement portugais à la faveur d'une débâcle socialiste plus que de sa propre victoire, allié
à un petit parti de droite populiste opposé en son temps à l'euro »
VERHEST Sabine
(La Libre Belgique,
19.11.04, Belgique)
Pour comprendre l’œuvre politique de José Manuel Durão Barroso, il est primordial de
connaître son parcours. Né à Lisbonne le 23 mars 1956, M. Barroso est diplômé en droit
(Lisbonne), en études européennes et en sciences politiques (Genève). Il a par ailleurs suivi des
cours à Columbia (New York) ainsi qu’à Georgetown (Washington) (http://ec.europa.eu). Membre
du Parti social-démocrate (PSD) depuis 1980, il a été député président de la commission des affaires
étrangères du Parlement portugais de 1995 à 1996, puis Secrétaire d'État aux affaires intérieures,
étrangères et à la coopération ainsi que Ministre des affaires étrangères.
Vice-président du Parti populaire européen (PPE) de 1999 à 2002, il est ensuite élu Premier
ministre du Portugal (avril 2002). La première défaire notable dans sa carrière politique a lieu aux
élections européennes de juin 2004, lorsque le Parti socialiste obtient un total de douze députés sur
vingt-cinq. Derrière un itinéraire apparemment sans faille, où M. Barroso semble avoir gravi les
échelons un à un, se cache en fait un parcours atypique et bien souvent versatile.
L’itinéraire politique du Portugais se caractérise par des virements à cent quatre-vingt
degrés, des retournements de veste aisément comparables à de l’opportunisme. Dans sa jeunesse, il
se positionne du côté de l'extrême-gauche radicale de l'échiquier politique. Lors de la Révolution
des Oeillets (1974), il a tout juste dix-huit ans, mais occupe déjà un poste à responsabilités, celui de
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président des étudiants maoïstes (MRPP). Politiquement engagé, il apparaît à cette époque comme
«le leader maoïste le plus dogmatique que j'ai connu en ce temps» (La Libre Belgique, 19.11.04,
Belgique), se rappelle Paulo Casaca, alors étudiant en économie, maoïste passé ensuite au Parti
socialiste. Ses convictions de jeunesse ont bien évolué. Quelques années plus tard, M. Barroso
n'hésite pas à soutenir le socialiste Mario Soares avant de basculer vers le Parti social-démocrate de
centre droit! Durant son mandat de Premier ministre du Portugal, il mène une politique très libérale
et atlantiste. Nommé deux ans plus tard à la tête de la Commission européenne (2004), il est
vilipendé pour son ultra-libéralisme. Le bilan de ses trois années de mandat est mitigé. Victime de
nombreuses crises, il a essuyé de multiples échecs.
Ce travail de fin d’études propose de découvrir qui est le Président de la CE ainsi que de
percevoir comment il a réagi aux crises successives de ces trois dernières années. Pour ce faire, j’ai
épluché la presse européenne et internationale, de manière à produire un portrait le plus exhaustif
possible. Etre à la tête de l'exécutif a rendu M. Barroso grandement médiatique. La presse s'en est
donnée à cœur joie. Les médias ont dressé une multitude de portraits et de caricatures pouvant être
tour à tour impitoyables ou positifs. Les qualificatifs sont nombreux: « caméléon, opiniâtre,
ponctuel, habile, polyglotte, autoritaire, américanolâtre, néolibéral » (Expresso, 17.03.05,
Portugal). Néolibéral, voilà l'adjectif qui insupporte le Président au plus haut point. Réaction
étrange, si l'on considère le fait que le consensus autour de sa nomination se soit fait « sur sa
détermination à tenir fermement le cap du libéralisme à l’échelle européenne » (L’Humanité,
30.06.04, France).
Le nom du Président peut être la réponse au mystère qui l'entoure. En portugais, Durão
Barroso signifie littéralement: « très dur (Durão) et argileux (Barroso). José Manuel Très Dur
Argileux. Une contradiction ontologique qui vous forge un homme. De quelle matière est donc fait
le président de la Commission européenne ? » ( Les coulisses de Bruxelles, 04/07/2007, Barroso, le
portrait qui a déplu). C'est à cette question que je vais tenter de répondre tout au long de cette
étude.
A peine nommé à la tête de la CE, M. Barroso affirme son souhait d'être proche des citoyens
européens. Il désire que l'on se souvienne de lui. Pour construire cette relation de 'proximité', il est
« prêt à faire le sacrifice de son second patronyme (Durao) pour que son nom puisse être plus
aisément mémorisé par les quelque 400 millions d'Européens » (La Nouvelle République du
Centre-Ouest, 01.07.04, France). Tel John Lennon, affirmant au milieu des années 1960 que les
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Beatles étaient « plus populaires que le Christ », M. Barroso n'hésite pas lors de sa nomination à
comparer sa popularité à celle du Pape... «Quand vous êtes élu pape, vous avez un nouveau nom»
(La Nouvelle République du Centre-Ouest, 01.07.04, France) déclare-t-il. La comparaison a le
mérite d’être audacieuse.
A son arrivée à Bruxelles, la plupart des journalistes sont sous le charme, véritablement
conquis. Le Portugais réussit le pari de séduire « le millier de journalistes accrédités auprès de la
Commission par son habileté, sa décontraction et son aisance dans différentes langues (des atouts
par rapport à ses prédécesseurs) » (Expresso, 17.03.05, Portugal). Malheureusement, toutes les
bonnes choses ont une fin. Les journalistes déchantent rapidement. Cette période « faste » est
actuellement belle et bien révolue. Les apparitions de son porte-parole Johannes Laitenberger,
l’«interface visible du président avec la presse, sont régulièrement critiqués par les journalistes
pour l'inconsistance de leurs réponses, leur propension à éviter tous les sujets sensibles ainsi que
par le favoritisme dont bénéficieraient certains médias » (Expresso, 17.03.05, Portugal). Le
Président a semble-t-il perdu toute crédibilité médiatique.
Contrairement à ce qui a pu être colporté, M. Barroso n’est pas arrivé à la tête de la CE par
hasard. En dépit des erreurs qu'il a pu commettre, son talent politique n'est plus à démontrer. Il a
extrêmement bien assimilé les règles de la rhétorique et de la communication politique. Outre son
éloquence et son humour naturels, il voltige avec aisance du français au portugais en passant par
l’anglais. Il «déboule avec l'assurance d'un fonceur et jongle avec un auditoire pas forcément
acquis à sa cause» (La Libre Belgique, 19.11.04, Belgique). Eloquent, il est capable de séduire un
public qui est bien souvent sceptique, opposé à sa politique, ses méthodes, ses idéaux et ses projets.
L'éloquence ne fait pas tout. M. Barroso est confronté à un problème récurrent depuis le
début de son mandat. A savoir, « l'absence d'échéances de grande envergure » (Expresso, 17.03.05,
Portugal). Comment succéder dignement à ses prédécesseurs qui avaient pu brillé par leurs
chantiers politiques de grandes ampleurs ? Romano Prodi venait tout juste de lancer l’euro (2002) et
avait engendré l’élargissement à dix nouveaux Etats membres (2004). Jacques Delors avait quant à
lui mis en place le Marché Unique. Quelles grandes actions politiques M. Barroso a-t-il
concrètement mené à terme durant ces trois dernières années?
Depuis ses débuts houleux de 2004 jusqu’en 2007, les crises n’ont pas cessé de se succéder.
Le Portugais a bien eu du mal à s'en dépêtrer ainsi qu'à y réagir en temps et en heure. Ce thème sera
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la problématique et le fil conducteur de mon étude. Je propose ainsi d’étudier le personnage Barroso
au travers des difficultés qui l’ont ébranlé depuis 2004. A savoir : son « faux départ » ; la non
ratification du TCE, l’élargissement et la directive Bolkestein ; la Stratégie de Lisbonne, la question
du budget 2007-2013 ainsi que la guerre en Irak et les défis environnementaux. José Manuel Durão
Barroso est-il le pire ou le meilleur pour l'Europe?
I/ La Nomination de José Manuel Durão Barroso
«Il est très résistant, il n'abandonne jamais malgré les attaques dont il est l'objet »,
Carlos Coelho, eurodéputé, coreligionnaire du PSD,
(La Libre Belgique, 19.11.04, Belgique)
A) de Premier Ministre du Portugal à Président de la Commission européenne
« J'ai eu la grande chance de prendre les rênes de la Commission européenne au moment où
l'Union doit répondre à ces défis, et en premier lieu aux attentes des citoyens européens »
M. José Manuel Durão Barroso,
(Les Echos, 17.05.05, France)
1) M. Barroso un « morceau » de dernier choix ?
La nomination de José Manuel Durão Barroso à la tête de la CE a créé la surprise. Pour la
grande majorité des médias européens et internationaux, c'est un choix de dernier recours.
Fortement critiquée, cette ascension ne se déroulera pas sous des astres favorables.
Le Portugais devait normalement entamer son mandat le 1er novembre 2004, mais c'était
sans compter les querelles occasionnées directement et indirectement par sa présidence. Il est en
effet amusant, voir pathétique de se rappeler, que quelques jours avant sa désignation, les vingt-cinq
États membres n'avaient pas réussi à se mettre d'accord sur un candidat. Les noms qui circulaient
étaient nombreux. Les rumeurs enflaient. Les favoris étaient au nombre de deux : le Premier
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ministre Belge Guy Verhofstadt et le Commissaire européen Britannique sortant Chris Patten.
Pourquoi avoir désigné un homme inconnu du grand public et des politiques européennes ? Le
Premier ministre Portugais avait certes été vu au coté de MM. Blair, Bush et Aznar lors de
pourparlers en faveur de la guerre en Irak. Mais cet élément jouait-il réellement en sa faveur ?
Sa 'bonne fortune' a pour origine les discussions opposant le couple franco-allemand aux
Britanniques durant le Sommet de juin 2004. D'un côté, les Britanniques posèrent leur véto vis-à-vis
du candidat franco-allemand, le Belge Guy Verhofstadt et de l'autre, l'Allemagne et la France
s'opposèrent fermement au candidat britannique Chris Patten. Les chefs d'Etat choisirent de camper
sur leurs positions respectives. Résultat, les deux candidats pressentis sont évincés. M. Barroso
apparaît alors comme une alternative possible à l'impasse. Une bonne fée se serait-elle penchée sur
son berceau? Pourquoi les chefs d'Etat et de gouvernement ont-ils fait ce choix? Pour faire face à
cette difficulté, les dirigeants européens proposèrent une alternative 'capable' de contenter le plus
grand nombre. Le Premier ministre Britannique Tony Blair « a alors soufflé le nom de son ami José
Manuel à ses partenaires » (Les coulisses de Bruxelles, 04.07.2007, Barroso, le portrait qui a
déplu). Etrangement, G. Schröder et J. Chirac ont laissé faire. Seule la gauche du PE a refusé toute
confiance, ce qui n'a pas vraiment eu de poids puisque la grande majorité du Parlement était à
droite.
L a désignation du Portugais suscite de multiples reproches. M. Barroso apparaît dans les
médias comme un « dernier choix ». La presse internationale se déchaîne. En France, on assure que
cette préférence « ressemble fort à un compromis par défaut après les successives évictions des
candidats soutenus par les "grands" européens » (L’Humanité, 30.06.04, France). Pour les
Portugais, il est de notoriété publique que « Durao Barroso est apparu à la dernière minute comme
un candidat de second choix, comme le plus petit dénominateur commun entre les nombreux chefs
d'Etat et de gouvernement de l'Union. Une fois écartées les candidatures les plus brillantes, par le
jeu de veto croisés du groupe aligné sur le Royaume-Uni et de celui affidé au couple franco-
allemand, il ne restait plus personne de valable sur les décombres du champ de bataille
communautaire» (Publico, 08.07.04, Portugal). Les critiques vont bon train. Pour beaucoup de
Portugais, Barroso n'a « aucune raison de se féliciter d'avoir accepté sa nomination au poste de
président de la Commission européenne. Il a réussi l'exploit d'apparaître comme un pis-aller, alors
que les meilleurs candidats au remplacement de Romano Prodi avaient été écartés ou avaient
décliné l'offre» (Público, 08.07.04, Portugal). A peine nommé, M. Barroso est déjà dans une
position délicate et bancale. Il le sait. Pour être respecté, il devra faire ses preuves.
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Une telle aubaine n'arrive pas deux fois. Le Portugais saisit sa chance. Il échappe ainsi à sa
propre défaite, à la véritable 'raclée' qu'il vient de subir aux élections européennes. Son parti vient
tout juste de perdre un nombre notable de sièges au PE. Cet échec symbolise largement le
mécontentement populaire vis-à-vis de son gouvernement. Heureusement pour lui, sa bonne étoile
joue en sa faveur. Le PE accepte sa désignation, grâce notamment au soutien que lui a apporté le
PPE (principal groupe du Parlement).
A peine l'aval du PE obtenu, le personnage Barroso est controversé. Ses détracteurs le
décrivent comme manquant fortement de personnalité. La plupart d'entre eux le perçoivent comme
une marionnette dont les plus grands pourraient jouer à leurs guises. Ces trois dernières années ont
prouvé le contraire. J’ai eu la chance de voir et d’écouter M. Barroso à deux reprises à la salle de
presse du Berlaymont. Charismatique, il est à la fois éloquent, polyglotte et dispose largement
d'autorité. Il sait manier les mots et jouer avec. Etre pour on contre ses idéaux, sa politique et sa
façon d’arriver à ses fins est une chose, n'empêche que le Portugais est un grand communicateur
politique, qui connait les complexes rouages de la rhétorique.
A l’époque de sa désignation, l’UE a réellement besoin d’un personnage politique de grande
envergure à la tête de l'exécutif européen. Le Portugais sait se faire entendre. Dans son pays, le
peuple le qualifie même d'autoritaire. Réussira-t-il à se faire entendre à l’échelle européenne? Pas
sûr, car en dépit de ses capacités certaines, nombreux sont les pays qui le considèrent comme un
symbole de médiocrité, de faiblesse et de complaisance. Il semble que choisir M. Barroso comme
président de la CE n'est pas une option anodine. A travers ce choix, les chefs d'Etat et de
gouvernement ont voulu renforcer leur autorité. Ils se sont dit qu'ils pourraient profiter du Portugais
pour asseoir leur pouvoir et imposer leurs règles. Paradoxalement, il était aussi important de
renforcer le rôle de l'organe exécutif Européen pour arriver à rapprocher les citoyens de l'Europe.
A ce moment-là, les portraits façonnés par la presse sont extrêmement contradictoires. D'un
côté, les Français le présentent comme un « atlantiste convaincu mais accommodant et peu enclin à
provoquer des conflits » (FIG., 30.06.04, France). Plus positifs, les Suisses (bien que hors UE)
décèlent en lui « un candidat de compromis, (...) européen et atlantiste » (Le Temps, 28.06.04,
Suisse). Pourquoi formule-t-on autant de critiques alors qu’en 2004 M. Barroso n’a pas encore eu
l’occasion de faire ses preuves au niveau européen ? Sûrement parce qu’il a eu à un moment donné
une « faiblesse », un esprit anti-européen, totalement non conforme aux idéologies européennes.
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Oui, il fait parti de ceux qui ont soutenu les Etats-Unis pour la guerre en Irak. Pire, son soutien n’a
pas respecté la logique européenne d’un compromis entre les quinze. M. Barroso a préféré snober
l'UE en soutenant les USA, sans passer par la concertation européenne préalable. Parallèlement, ce
choix lui a tout de même valu le soutien du Royaume-Uni, de l'Espagne... Le désaccord des Etats
membres vis-à-vis du conflit a quelque peu compromis la bonne marche de la construction
européenne.
Les débuts de M. Barroso ont été rudes. Les erreurs se sont enchainées. Les prémisses de
son mandat sont en quelque sorte le reflet de sa politique : une succession de mésaventures et
d’échecs. Le Président n'est toutefois pas entièrement coupable de tout ce dont on l’accuse. Le
facteur 'pas de chance' y est aussi pour beaucoup. A son arrivée à la tête de l’exécutif, l’UE était
dans une période critique. Les défis à relever n'avaient jamais été aussi nombreux. La période était
sombre suite aux débats suscités par l'élargissement, le TCE, la directive Bolkestein… Réussir
autant de paris relevait du miracle. A ces difficultés s'ajoutèrent les critiques portugaises à son
encontre. Les blâmes de la majorité de ses compatriotes fusèrent, notamment par rapport au fait
qu'il aurait « abandonné » son pays.
2) Désertion de sa patrie dans un moment critique
« Être Européen ne veut pas dire que l’on abandonne son pays natal ou sa patrie. Au contraire,
les deux vont de pair et c’est pourquoi il est important que ceux qui aspirent à des postes à
responsabilité déclarent également leur allégeance à leur pays d’origine. Si celui-ci est au cœur de
l’Europe, au centre de l’Union européenne, c’est également une forme d’allégeance au travail
commun d’unification de l’Europe, dont nous voulons tous qu’il aboutisse au succès ».
M. Hans-Gert Pöttering,
Alors président du groupe du PPE-DE au PE et actuellement président du PE,
(21.07.04)
M. Barroso est Premier ministre du Portugal depuis deux ans lorsqu'il est nommé chef de
l'exécutif européen. C'est par un beau jour ensoleillé (17 novembre 2004), qu'il quitte son Portugal
natal pour se rendre à Bruxelles. Ce départ indigne la majorité des Portugais, qui l’apparentent à un
abandon, une désertion, une preuve de lâcheté. Le souci est qu'il quitte un pays en proie à de
multiples crises. L'édito de Público est cinglant et démonstratif du désarroi d'une nation : « Durao
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Barroso devrait avoir honte! » (Público, 08.07.04, Portugal). La presse portugaise se déchaîne,
l'accuse de trahison. Elle compare son départ à une « débandade ». La migration de M. Barroso
dans la capitale européenne n'est cependant pas une option anodine. Quelques semaines auparavant
(13 juin 2004), il avait subi une lourde défaite aux élections européennes. Cet échec illustrait
largement le mécontentement populaire vis-à-vis du gouvernement en place. Fuir est une issue
accommodante. Calculateur, M. Barroso voit sa fraîche nomination comme une opportunité inouïe
de se dérober de ses prérogatives. Ambitieux, il se voit déjà 'en haut de l’affiche', haut représentant
de l’UE sur la scène internationale. Il est temps pour lui d'accéder à la plus haute fonction
européenne. Il a d'ores et déjà gravi patiemment tous les échelons. Il aime le pouvoir, «ses idées
sont desséchées par les manœuvres politiciennes, les stratégies de conquête du pouvoir et les
ambitions personnelles». C'est «un personnage constamment disposé au compromis et prêt à
négocier tout et le reste y compris l'essentiel, poursuit l’éditorialiste Tavares: « rien n'est sacré,
rien n'est définitif, tout est négociable (...) Quand il parle aux socialistes, il est socialiste. Quand il
parle aux libéraux, il est libéral. Il dit aux gens ce qu'ils veulent entendre» (Les coulisses de
Bruxelles, 04.07.2007, Barroso, le portrait qui a déplu) explique Martin Schultz du groupe
socialiste du PE. Le Portugais serait-il un caméléon pragmatique?
Infatigable, il se défend. Il dispose pour se faire d'une éloquence naturelle et d’un discours
convaincant. Il gère parfaitement les outils de la rhétorique antique ou l’art de persuader. Comme
Quintilien, il distingue les cinq éléments majeurs de la rhétorique : inventio, dispositio, elocutio,
actio, memoria. L’inventio représente l’art de trouver des arguments. Il suffit d'analyser son
discours de départ adressé aux Portugais pour constater sa force. M. Barroso déploie une multitude
d'arguments visant à toucher le pathos de son peuple. Il a décidé de partir « dans l’intérêt des
Portugais » (José Manuel Durão Barroso,Speech to the nation on accepting the invitation to serve as
President of the European Commission, Lisbonne, 29.06.04) pour leur intérêt général, pour les aider
au niveau européen… Le Portugais use largement de la dispositio. Son discours suit un
enchaînement logique. Les idées qu'il développe sont claires, précises, concises et très bien
organisées. L'élocutio touche au style, aux sons et aux rythmes. Dans ce domaine M. Barroso est un
champion, il joue avec les mots grâce à une aisance naturelle. Le quatrième élment est l'actio qui
s’apparente au métier d’acteur. Le Portugais étudie tout ses mouvements, sa gestuelle, sa
prononciation, sa posture… Lors de ses discours, M. Barroso joue en permanence avec son regard,
ses mains et son corps. Tel un mannequin, il n'hésite pas à prendre des poses et à jouer avec les
objectifs. En véritable professionnel de l’art oratoire, il dispose enfin du cinquième élément issu de
la rhétorique antique: la memoria qui représente la mémoire. M. Barroso lit très peu ses notes. Il
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feint en permanence d'improviser ce qu'il dit.
Persuasif, le Portugais connaît les rouages complexes de la communication politique. Il en
use et en abuse. Il utilise en abondance les symboles. A Lisbonne, pour son départ, il explique aux
Portugais la prééminence qu’ils ont pour lui dans son cœur (pathos). « Je voudrais annoncer en
premier ma décision à vous, Portugais, ici à Lisbonne » (Discours de M. Barroso, 29.06.04). Tel
Moïse libérant les Israéliens d’Egypte, il se présente comme le sauveur de l'Europe toute entière.
« Je prends cette décision à un moment crucial de l'Union européenne, avec l'élargissement à 25
Etats membres et la Constitution européenne »(Discours de M. Barroso, 29.06.04) annonce-t-il.
Pour légitimer son choix, il se montre comme le protecteur des Portugais face à la 'méchante'
Europe. Cette position est contradictoire au poste qu’il est prêt à occuper à Bruxelles? Il n'en à que
faire, il n'a peur de rien. « Cette décision n'a pas été facile, en la considérant, j'ai pensé à vous, les
Portugais, et comment je pourrais vous protéger dans le futur » commente M. Barroso. « Quand un
politique prend des responsabilités dans son pays, il les prend aussi au niveau de l'UE [et que]
travailler pour le projet européen signifie aussi travailler pour le Portugal » ajoute-t-il (Discours de
M. Barroso, 29.06.04). Ses belles paroles ont l'avantage d'être convaincantes. Elles n'empêcheront
toutefois pas au Portugal de sombrer dans des crises de succession et économique.
Dès cette désignation, le Président socialiste Jorge Sampaio est contraint de trouver au plus
vite un remplaçant au Premier ministre. Deux solutions s'offrent à lui: la dissolution ou la
nomination. Ces possibilités divisent. La polémique s'envenime et entraîne « des spéculations quant
au futur remplaçant » (L’Humanité, 30.06.04, France). Le maire de Lisbonne et vice-président du
PSD, Pedro Santana Lopes apparaît comme le successeur probable, mais cette alternative suscite
une crise gouvernementale. La ministre des finances Manuela Ferreira Leite « la "Thatcher"
portugaise, qualifie de "coup d’État au sein du parti" la nomination sans l’aval des militants d’un
successeur éventuel à M. Durao Barroso. Selon elle, "en l’absence d’un congrès, personne n’a de
légitimité pour nommer un nouveau président du PSD et par conséquent un premier ministre"»
(Público, 08.07.04, Portugal). Outre cette crise gouvernementale, le départ du Premier ministre a
aussi provoqué un malaise au sein de son propre parti le Parti social-démocrate (centre-droit).
Un nouveau Premier ministre est nommé: Pedro Santana Lopes. Rapidement déchu, il subit
son un échec cuisant en février 2005. Il annonce alors « la démission du gouvernement, décidée
après une réunion d'urgence » (La Presse Canadienne, 11.12.04, Canada). La crise politique
s’installe et s’accentue. Jorge Sampaio est contraint de dissoudre le Parlement, de convoquer des
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élections anticipées pour remplacer... le remplaçant de M. Barroso. Cette décision est prise suite aux
« querelles intestines », aux « gaffes publiques » et aux « problèmes d'organisation » (La Presse
Canadienne, 11.12.04, Canada) qui ont porté un coup fatal à l'image déjà titubante du
gouvernement.
Comme si toutes ces conséquences dues au départ de Barroso n'étaient pas suffisantes, la
crise au Portugal est multiple. Le taux de chômage est en hausse et le taux de croissance en baisse.
Le pays est rappelé à l'ordre par la Commission pour non-respect des critères du Pacte de stabilité et
de croissance. Que importe. M. Barroso a préféré profiter « sans vergogne de la première
opportunité pour fuir ses responsabilités » (Público, 08.07.04, Portugal). Son choix relève-t-il de
l'inconséquence politique? Sa carrière doit-elle passer avant l’intérêt général de ses citoyens?
B) Un incipit difficile : le choix des commissaires
« Mal née, mal formée, la Commission Barroso n'a pas survécu
Au premier coup de froid. »
Jean Quatremer,
(Libération, 28.10.2004, France)
1) Barroso et ses commissaires: un choix discutable
« Les Thatchériens prennent le pouvoir en Europe »
(Daily Telegraph, Royaume-Uni
cité dans Ouest France, 12.11.2005, France)
Comme si la crise engendrée au Portugal n’était pas suffisante, des controverses éclatent à
Bruxelles. Le sort s’acharne sur le déveinard M. Barroso. Quelques jours après que le PE ait donné
son aval à sa nomination (22 juillet 2004) avec 413 voix sur les 711 eurodéputés ayant participé au
vote (251 contre et 44 abstentions), il est contraint de renoncer à présenter son collège de
commissaires. La cause ? Plusieurs commissaires pressentis ont été épinglés lors des auditions par
les commissions parlementaires. C'est le cas de l’Italien Buttiglione, dont les déclarations
controversées sur la famille et l'homosexualité ont provoqué un tollé. C'est aussi celui de la
Néerlandaise Neelie Kroes qui a siégé dans plusieurs conseils d'administration de grandes
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entreprises. Pas très fair-play lorsqu'on envisage de la mettre à la Concurrence. La Danoise Mariann
Fischer Boel (Agriculture), la Lettone Ingrida Udre (Fiscalité) et le Hongrois Lazslo Kovacs
(Energie) sont eux aussi dans la ligne de mire. M. Barroso tente de passer en force. Erreur. «Pourvu
que le début de cette présidence ne soit pas le reflet de ce qui nous attend pendant cinq ans »,
ironise Jean Quatremer. Rien n’est moins sûr.
M. Barroso a une qualité (ou un défaut ?) : il est extrêment têtu. Il s’accroche, tente de
passer en force en sous-estimant l’opposition parlementaire. Le plus contrariant est son irrespect du
PE en tant que Parlement, c’est-à-dire comme symbole de la représentation du peuple européen et
par définition comme allégorie de la démocratie. Le Portugais manque terriblement de sens
démocratique. Sa devise semble être : 'ça passe ou ça casse'. Une fois désigné, il essaie en effet de
faire accepter coûte que coûte ses commissaires. Rapidement, il annonce « sa » couleur. Sa
sélection discutable s'avère peu judicieuse et politiquement incorrecte. Les postes clés sont confiés à
des libéraux affirmés. Bien que marquée à droite, la CE est néanmoins relativement bien pondérée
(dix conservateurs, sept libéraux, six sociaux-démocrates et deux indépendants). L'acceptation de
son collège de commissaires est un défi de taille qui n'est pas gagné.
L’investiture du collège se présente comme il suit. Une fois le nouveau Président de la
Commission approuvée par le PE et le Conseil, il est chargé de constituer le collège des
commissaires. Ce dernier fait l’objet d’un vote d’approbation en session plénière. Tous les
commissaires (excepté le Président) font l'objet d'auditions individuelles devant les commissions
parlementaires compétentes. Chacun est invité à faire une déclaration et à répondre aux questions.
Le PE peut élire ou rejeter la Commission (dans sa totalité), à la majorité des suffrages
exprimés. Une fois approuvé par le PE, les commissaires sont nommés par le Conseil européen à la
majorité qualifiée.
Le premier blâme vis-à-vis de la sélection effectuée par le nouveau Président de la CE
provient à nouveau du côté franco-allemand. M. Barroso a en effet attribué le portefeuille des
Transports au Français Jacques Barrot et celui de l'Industrie à l'Allemand Gunther Verheugen. Le
couple franco-allemand n’est pas ravi de se voir ainsi reléguer au second plan en n'obtenant pas des
postes clés. Cette « annonce (...) a créé un malaise en France et, dans une moindre mesure, en
Allemagne, le couple moteur de la construction communautaire ne se retrouvant guère dans cette
distribution » (Libération, 28.10.04, France). Etrangement, M. Barroso a choisi d'avantager les trois
commissaires Baltes qui accumulent le Budget, la Fiscalité, la lutte Antifraude et l'Administration,
15
« alors que leurs populations cumulées sans parler de leurs PIB n'atteignent même pas celle des
Pays-Bas » (Libération, 28.10.04, France). Dans un article intitulé, « Les libéraux en force à
Bruxelles », le Monde s'insurge. Pour le journaliste, cette nouvelle Commission « présente deux
caractéristiques principales: elle est de sensibilité nettement libérale et les postes les plus convoités
échappent aux « grands » pays » (Monde, 14.08.04, France). La CE n’est « pas encore en poste, et
déjà sous le feu des critiques! » (Euractiv, 27.09.04, Are the economics of the new Commission too
Liberal?). M. Barroso a commis des impairs en selectionnant ses commissaires. A-t-il été
complètement libre de ces choix? N'ont-ils pas été dictés par les chefs d'Etat?
A première vue, il semble que le Président ait tenté de mettre tous les Etats membres sur le
même pied d’égalité. Il a essayé d’assimiler les populations des nouveaux Etats membres et de
reculer la prédominance des plus forts dans le but de parvenir à une certaine homogénéité. Utopie ?
En tous les cas, ce choix est perçu comme une véritable aberration. Diplomatiquement risqué, cette
option est grossière puisqu'elle crée le mécontentement des deux grands (France et Allemagne).
Cette sélection lui fait perdre sa crédibilité déjà ébranlée. Il a par ailleurs risqué de gâter sa
légitimité dans le cas où le PE rejetterait sa sélection. Mais le Portugais n’en a que faire. Il ignore
trivialement le couple franco-allemand et rend ouvertement hommage à la politique libérale anglo-
saxonne. Le contrecoup est cinglant. Les députés allemands et français des groupes socialistes,
démocrates et libéraux posent leur veto au premier collège proposé par le Président. Bien que seul
M. Buttiglione fasse l’objet d’un vote négatif, de nombreuses réserves sont émises à l’encontre
d’autres commissaires.
2) Une femme d’affaires en charge de la Concurrence : le cas Nellie Kroes
Les critiques émises portent sur la nomination de commissaires pour des motifs bien précis.
Le cas Nellie Kroes, la Néerlandaise pressentie au portefeuille de la Concurrence est éloquent. Ses
antécédents professionnels parlent pour elle. Ancienne femme d'affaires, elle pourrait être en proie à
de nombreux conflits d'intérêts. Elle a en effet détenu un mandat d'administratrice dans pas moins
de quarante-trois grandes entreprises, dont Volvo, Thales, Corio... « Certains membres du
Parlement ont des réserves sur le passé de Nellie Kroes dans le monde des affaires, la candidate
hollandaise pour le portefeuilrle le plus puissant de la Commission : la concurrence, et ils ont
suggéré mercredi qu’elle pourrait être transférée vers un autre portefeuille » (International Herald
Tribune, 28.10.04, Etats-Unis). Aux Echos d'ajouter qu'un tel choix « suscite des interrogations »,
16
du fait qu'elle est appartenue « au conseil de surveillance d'une dizaine de grandes entreprises »
(Les Echos, 17.09.04, France). Ce choix met un peu plus dans l'embarras le Président.
Un scandale n'arrivant jamais seul, le passé de la Néerlandaise remonte à la surface. La
presse internationale annonce rapidement qu’elle a été mise en cause aux Pays-Bas pour la gestion
douteuse de son patrimoine immobilier ainsi que pour les relations d'affaires qu'elle entretenait avec
le promoteur Jan-Dirk Paarlberg, qui serait selon la justice proche d'une organisation criminelle
locale ! En dépit de toutes ces critiques, M. Barroso maintient le cap. Sa fermeté paie, puisque le PE
accepte la femme d’affaires au poste de la Concurrence, à l'unique condition qu'elle délègue « les
dossiers qui port[ent] sur des entreprises dans lesquelles elle a exercé des responsabilités, voire
leurs concurrents directs » (Les Echos, 17.09.04, France). En ne cédant pas en dépit des critiques,
le Président a fait preuve de puissance et de force. Il a eu raison de ses détracteurs. Cette victoire
symbolise son autorité et sa fermeté. Pour le cas Kroes, il a gagné, mais pour M. Buttiglione il a dû
abdiquer.
3) Un réactionnaire, homophobe et conservateur en charge de la Justice, des Libertés et de la Sécurité : le cas Rocco Buttiglione
Homme politique italien de sensibilité démocrate-chrétienne, Rocco Buttiglione est de prime
abord pressenti par MM. Barroso et Berlusconi pour le poste de commissaire de la Justice, des
Libertés et de la Sécurité. Il est légitime de se demander si Barroso a pesé le pour et le contre d’une
telle décision. Peu judicieux, ce choix entraîne de vives polémiques à travers le monde entier. Les
prises de position publiques de l'Italien sont bien souvent virulentes. Hostile à l'homosexualité, il la
considère comme « un péché en tant que chrétien ». Réactionnaire et ultra-conservateur, il assure
que la famille existe « pour permettre aux femmes d'avoir des enfants et d'être protégées par un
homme qui prenne soin d'elles »! Bien entendu, de tels idéaux ne font qu'accentuer la polémique et
décliner l'image déjà bien bancale du Président de la CE. A nouveau, il campe sur ses positions et
décide de ne « pas sacrifier M. Buttiglione, estimant qu'il est victime du «politiquement correct»
(M., 21.10.04, France). Sous les multiples pressions, R. Buttiglione est contraint de présenter sa
démission. Il est remplacé par Franco Frattini.
Autre argument funeste, M. Buttiglione est à cette époque Ministre du gouvernement de M.
Berlusconi. Ce dernier est alors impliqué dans de multiples affaires juridiques. Comble du comble,
17
M. Barroso choisit R. Buttiglione à la tête du portefeuille Justice et Affaires Intérieures. Le symbole
est malheureux, aberrant. L'Italien est de plus un catholique convaincu et un ami proche du Pape
Jean-Paul II. Les faits parlent pour lui. Comment pourrait-il être apte à combattre les
discriminations? Le résultat est couru d'avance, le 11 octobre 2004, la Commission des Libertés
civiques, de la Justice et des Affaires intérieures du PE vote par 27 voix contre 26 une motion de
défiance à l'égard de l'Italien. Pour la première fois depuis la création de la procédure des auditions
préalables, la Commission des Libertés du PE émet un avis défavorable. La décision finale
appartient cependant au PE dans son ensemble qui a le droit d’entériner la Commission dans sa
globalité ou de la rejeter en bloc. Pour éviter un tel rejet, R. Buttiglione présente sa démission.
Incriminer totalement le Président de la CE est une erreur. Ce sont les chefs d'Etat et de
gouvernement qui désignent leurs candidats au poste de commissaire. M. Barroso n’a pas eu une
marge de manœuvre importante au départ. Pour M. Buttiglione, c’est Berlusconi alors au pouvoir en
Italie, qui a proposé cet homme, proche des ses idées politiques et largement apparenté à son
gouvernement. Il pensait ainsi pouvoir agir en connivence avec M. Buttiglione qu’il connaissait et
dont il partageait les idées. Parallèlement, M. Barroso ne s'y est pas opposé. Il a même défendu
l'Italien jusqu'au bout. La faute est partagée.
Pour le cas Buttiglione, la persévérance de M. Barroso n’a pas payé. En le soutenant, il a
uniquement réussi à se mettre à dos les travaillistes ainsi que tous les partisans des libertés
fondamentales. Coriace et têtu, le Président a affirmé qu’il était prêt à faire « tout ce qui est
nécessaire et efficace pour le remporter sur les députés » (IHT, 28.10.04, Etats-Unis). Il a tout
tenté. Il a même « essayé de persuader le PE de voter en faveur de ses commissaires » (FT,
22.10.04, Royaume-Uni). En vain. M. Barroso espère retomber sur ses pattes. Même après la
démission de l’Italien, il s’entête. Il refuse “toutes excuses ou regrets sur sa conduite du cas
Buttiglione » (IHT, 23.11.04, Etats-Unis). Il assure qu'il a « toujours fait les bons choix ». Il
s'enfonce en ajoutant pour sa défense « que le fait d'avoir retiré sa Commission avant que le
Parlement ait voté n'était pas une crise en elle-même, mais une manière d'échapper à ce qui aurait
pu être une crise sérieuse avec un tel vote » (IHT, 23.11.04, Etats-Unis). Epaulé par son éloquence
naturelle, il se défend comme il peut. S’il n’a pas retiré son collège, c’est simplement parce qu’il
voulait « prendre en compte la puissance des voix des parlementaires qui supportaient Buttiglione,
et celle du PPE ou des députés hongrois et polonais qui étaient en faveur du Commissaire aux
fortes idées catholiques » (IHT, 23.11.04, Etats-Unis).
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N’empêche que le Président de la CE a capitulé face aux eurodéputés hostiles à son équipe.
Il lui devient urgent de trouver rapidement une issue à cette crise inédite dans l'histoire de l'UE. Ce
coup de théâtre pose en effet des problèmes pour la signature à Rome de la Constitution
européenne. Il prolonge en outre de plusieurs semaines le mandat de la Commission de Romano
Prodi. Pour la Croix, «voilà une entrée en matière ratée, sauf à considérer que l'épisode - un
Parlement censurant un exécutif - traduit, au fond, l'émergence d'un fonctionnement démocratique
dans les structures européennes. Victoire «démocratique» donc pour les opposants à la
Commission proposée par José Manuel Barroso» (La Croix, 28.10.04, France). Le 18 novembre, le
PE approuve le collège des commissaires. Sans Buttiglione. Mais Barroso a à moitié réussi son pari.
Explications.
4) La validation du collège des commissaires : un pari à moitié réussi
Après quelques petits remaniements, la Commission Barroso est enfin acceptée. La menace
de censure du PE n'a pas joué en sa faveur. Dans une position difficile, le Portugais perd de sa
crédibilité. Pour se relever de cet échec il tente tout ce qui est en son pouvoir. En vain. Désorienté,
il se défend devant le PE « j'ai besoin de plus de temps pour trouver une solution » (IHT, 28.10.04,
Etats-Unis). Désespéré, il en appelle « à la raison les parlementaires prêts à faire tomber tout son
exécutif, en énumérant les «difficiles tâches » à affronter par l'Union européenne» (FIG., 22.10.04,
France). Il tente également d'effrayer les parlementaires en invoquant que les « les conséquences
d'un vote négatif seraient plus néfaste que n'importe quelle autre solution » (FIG., 22.10.04,
France). Pour sa défense, M. Barroso rappelle qu’un « Président de Commission, à la différence
d’un Premier ministre national, n’a pas, au début, de majorité au Parlement ; il doit partager la
responsabilité du choix des 24 membres de son exécutif, avec autant de gouvernements » (Ouest
France, 20.11.04, France).
Parallèlement, pour faire bonne figure, il se dit « très confiant » face à l'obtention du
« soutien d'une majorité claire » (FIG., 22.10.04, France). Pour faire oublier l’affaire Buttiglione, il
clame que « la nouvelle Commission sera absolument opposée à toute forme de discrimination
fondée sur l'orientation sexuelle, le sexe ou les convictions religieuses » (FIG., 22.10.04, France).
Le Portugais propose enfin une nouvelle liste de vingt-quatre commissaires. Cette fois-ci, la pilule
sera sans aucun doute plus facile à avaler. La distribution des postes est pondérée. La gauche obtient
deux vice-présidences sur cinq avec G. Verheugen (Entreprise et Industrie) et M. Wallström
19
(Communication). Cette dernière est chargée de remplacer le Président en cas d'absence. Elle
représente en outre la Commission au Conseil Affaires générales (au Conseil des Ministres).
5) L’affaire de financement des partis politiques : le cas Jacques Barrot
Jamais deux sans trois. M. Barroso est à nouveau éclaboussé par un scandale en provenance
directe de l'un de ses commissaires: le français Jacques Barrot (Transports). Summum
cauchemardesque, le scandale éclate le jour même de l'investiture du collège de commissaires.
L'origine de ce qui sera appelée 'l'affaire Barrot' est le député Nigel Farrage. Le Britannique fait une
allusion à la peine de prison (huit mois avec sursis) infligée à Jacques Barrot pour son implication
dans une affaire de financement des partis politiques (2000). Cette « controverse autour de Jacques
Barrot est délicate à gérer pour la Commission, dont les eurodéputés n'ont voté l'investiture
qu'après trois semaines de crise sur sa composition » (FIG., 23.11.04, Monde). Jacques Barrot
envoie une lettre d'explication au PE. Il y « assure qu'il n'avait aucune raison de faire état d'une
peine qui, suite à l'amnistie dont il avait bénéficié, avait été entièrement effacée par la justice
française » (Euractiv, 23.11.04, L'affaire Barrot prend une tournure juridique). A nouveau, le
Président se range du côté de son commissaire. Pour ne pas perdre la face, il lui renouvelle sa
confiance. Il est cependant bien moins catégorique qu'il put l'être pour M Buttiglione.
Le groupe libéral (ALDE) du PE demande la démission du Français. M. Barroso dépassé par
les évènements n’arrive pas à gérer la crise. Il se dit prêt à envoyer Jacques Barrot s'expliquer seul
devant le Parlement. En somme, prêt à le jeter seul dans la 'fosse aux lions'. En période de crise, les
'vieux dossiers' ressurgissent. Les Britanniques s'en donnent à cœur joie: « l'autorité et la crédibilité
de Barroso se sont affaiblies après qu'il fut forcé de retirer son groupe initial lorsque les
parlementaires s'indignèrent contre l'homophobe Rocco Buttiglione au poste de commissaire de la
justice. Cette fois-ci il a effectivement renvoyé la balle à la Cour du Parlement, le défi est de
recréer la paralysie institutionnelle qu'avait causé l'affaire Buttiglione » (The Guardian, 23.11.04,
Royaume-Uni). A l'International Herald Tribune d'ajouter que cette « controverse n'aide pas dans
un moment où les européens deviennent de plus en plus sceptique à propos de l'accroissement du
pouvoir à Bruxelles » (IHT, 23..11.04, Etats-Unis). Englouti par le scandale, beaucoup se
demandent comment le Président va réussir à refaire surface. C’est sans compter sur les sept vies du
Portugais.
20
C) Les commissaires durant leurs mandats
1) Des commissaires intenables!
Même une fois acceptée, la Commission Barroso fait des siennes. Les 'frasques' se
poursuivent. La cacophonie prend place dans le collège. Elle y règne en maître. Apparemment, le
Président manque d'autorité. Les commissaires s'apparentent à une classe d’élèves agités dont le
professeur démissionnaire (alias Barroso) n’essaierait même plus de les tenir. Certains d'entre eux
s'expriment sur des sujets sans rapport avec leur domaine. Meglena Kuneva (Protection des
Consommateurs) dénonce par exemple en 2007 -à la place de Nellie Kroes (Concurrence)-, les liens
exclusifs existant entre le baladeur numérique d'Apple, l'iPod et le site de musique en ligne iTunes.
D'autres commissaires n'hésitent pas à émettre des opinions sensiblement divergentes de la ligne
officielle. Dans son blog officiel, Margot Wallström, se dit en faveur de Ségolène Royal, candidate
socialiste aux présidentielles françaises. Elle n'hésite pa non plus à diffuser (avec l'accord de M.
Barroso) son 'EU tube', un clip porno-soft visant à promouvoir... l’Europe! Les 'scandales' dont M.
Barroso a fait les frais depuis 2004 n'ont eu cesse de l'affaiblir. Ce phénomène est expliqué par
Expresso: « beaucoup de médias européens estiment que Barroso est en train de perdre une de ses
batailles les plus chères : la conquête de la presse européenne » (Expresso, 17.03.05, Portugal).
2) 2006 le retour à la case 2004 : le cas Varujan Vosganian
Les vieux démons de M. Barroso le poursuivent. En 2006, il vit un véritable retour à la case
départ avec Varujan Vosganian pressenti au poste de commissaire en charge du Multilinguisme.
Cette nomination du sénateur libéral roumain est contestée à cause de son 'profil européen'
incertain, son passé trouble (il aurait été informateur de la Securitate) et ses liens supposés avec un
groupuscule d'extrême droite ultra orthodoxe. Le 28 octobre, sa candidature est retirée. Il est
remplacé par Leonard Orban. L'affaire a eu des retombées néfastes sur M. Barroso, alors qu'il n'était
pas impliqué dans cette nomination. Peu importe, les médias le critiquent à nouveau.
21
II – L’échec de la Constitution européenne
A) Avant le 'NON'
Les crises successives de ces trois dernières années rabaissent inexorablement la crédibilité
du Président. Le débat engendré par la non ratification du TCE ne fait qu’accroître cette assertion.
L'homme est tout de même prévoyant. Sentant la non ratification approcher, il tente le tout pour le
tout. Douze jours avant le référendum français (29 mai 2005), il écrit un article virulent dans les
Echos. Il y tente de persuader les citoyens européens que le TCE leur apportera une bouffée d’air
frais, de nombreux bienfaits. Il en appelle à l’union des Européens, « dans cette Europe « unie dans
sa diversité » selon le préambule de notre futur Constitution commune, chaque citoyen européen
doit pouvoir se sentir porteur d'une « identité multiple », aux niveaux local, régional, national et
européen » (Les Echos, 17.05.05, France).
Les Français et les Néerlandais rejettent le TCE en bloc. Alors que l'issue française est
attendue, beaucoup prévoient déjà la non ratification. Le Monde annonce au Président de la CE que
la « Constitution risque d'être rejetée en France, une partie de la gauche lui reprochant la faiblesse
de son volet social » (M., 22.09.04, France). Le quotidien demande au principal intéressé quelles
sont ses réactions. « Je ne veux pas rentrer dans les débats nationaux. J'espère seulement qu'ils
porteront sur les mérites de la Constitution et ne se limiteront pas à des débats de politique
politicienne nationale. Ce ne serait pas sérieux. (...) Une Constitution ne définit pas un programme
politique, mais un ensemble de règles » (M., 22.09.04, France) réplique-t-il. Cette confiance est
feinte. M. Barroso est en réalité soucieux des conséquences désastreuses que pourraient avoir le
'non' sur l’Union européenne, les institutions et sur sa politique. Telle une vision prophétique, le
Devoir affirme que «le non s'incruste» (Le Devoir, 16.04.05, Canada) dès avril. Les Français sont
peu enclins au « oui ». L’Europe tremble. Elle a de quoi. Le Président de la République française
Jacques Chirac s'emploie à dramatiser les conséquences que pourraient avoir un tel choix. Quant à
M. Barroso, il fait bonne figure. Il affirme que « l'issue du référendum en France pour la
Constitution sera positif » (Lietuvos Rytas, 6.05.05, Lituanie). Discutable. Il sait que certains
problèmes nationaux pourraient empêcher la ratification. En janvier 2005, il explique qu’«il existe
un risque que le débat sur la Constitution ne réponde pas aux véritables questions posées par le
texte et fasse l’objet d’autres polémiques. Or celles-ci ne doivent pas contaminer la discussion »
(FIG., 12.01.05, France).
22
B) Les conséquences du « NON »
« Pour ma part, je partage cette formule du poète Lautréamont: "le doute est un hommage rendu à
l'espoir". Le temps est venu de renouer avec la confiance »
José Manuel Barroso,
Discours: « Etat de l'Union et avenir de l'Europe », Université Catholique de Louvain (UCL),
8.11.2006.
Le 'non' éclate en France et aux Pays-Bas. La crise institutionnelle jaillit. Elle se répand
comme une traînée de poudre. On débat. On propose. On s’insurge. On réfléchit. On reconstruit.
Les doutes s’installent. L’UE est dans un cul-de-sac. Pour le Président de la CE il ne sert à rien de le
nier, « l'échec du traité constitutionnel en France et aux Pays-Bas a plongé l'Europe dans le
doute » (Discours: « Etat de l'Union et avenir de l'Europe », UCL, 8.11.2006). Pour rassurer les
euro-citoyens, M. Barroso tente à nouveau de paraître confiant. « Je voudrais vous adresser
aujourd'hui un double message: l'évolution des derniers mois prouve sans ambiguïté que l'Europe
continue à avancer résolument et les chantiers ambitieux qui s'ouvrent devant nous appellent une
mobilisation et une réaction de grande ampleur » (Discours: « Etat de l'Union et avenir de
l'Europe », UCL, 8.11.2006) explique-t-il. Justement, sa Commission a-t-elle généré cette
« mobilisation »? A-t-elle eu une « réaction de grande ampleur »? La CE n'a pas réussi à contrer les
échecs successifs dus au 'non'. Abattu, M. Barroso finit par avouer que la rupture sur le TCE « a
remis en question la crédibilité de l'UE » (IHT, 13.04.07, Etats-Unis). L'image et le pouvoir des
institutions se sont affaiblis. Le Président n’a rien proposé de convaincant. En dépit du refus du
TCE, il désire qu'«une grande partie du traité [soit] gardée » (IHT, 13.04.07, Etats-Unis).
C) Des tentatives de solution loupées
«La Constitution doit être abandonnée. Tous les débats sur sa relance sont une grande perte
d'énergie, de temps et d'argent. (…) Il est temps de donner à la constitution un enterrement décent
et de passer à un véritable programme de réformes en Europe».
Député européen conservateur Timothy Kirkhope
(Cité dans Euractiv, “Le Plan B d'Andrew Duff pour sauver la Constitution”,
20.10.2006).
23
1) La Pause de « réflexion »
Comment réagir à la crise dans laquelle le TCE a plongé l'UE? Question difficile. En tous
les cas, proposer une pause de « réflexion » n’a pas été une bonne solution. Cette pause a largement
été considérée comme un choix attentiste, un signe de faiblesse. A la suite de la non ratification, M.
Barroso a subi de nombreuses pressions. En accord avec le Conseil européen, la 'pause' a été
déclarée. Cette option a largement été vilipendée par la presse internationale et les milieux
politiques. Faiblesse? Attentisme? Anémie européenne? Dans un article pertinemment intitulé « à la
recherche d'un plan B », le Devoir explique que « deux semaines après le choc référendaire (...), la
vérité est enfin sortie de la bouche du Président de la Commission européenne. José Manuel Durao
Barroso a appelé à «une pause» dans le processus de ratification de la Constitution européenne,
que d'aucuns considèrent aujourd'hui presque morte » (Le Devoir, 16.06.05, Canada). Cette
solution n'a pas été politiquement fiable. Les détracteurs du Président ont vu dans cette 'pause' un
désir de sa part de s'assurer une fin de mandat tranquille. Il n'en est rien puisque 2007 semble être
une année placée sous le signe de l'action.
Cette prudence, M. Barroso va néanmoins la payer chère. Sur le plateau de France 3, il
explique que « la meilleure solution - mais je ne veux pas entrer dans la compétence des États
nationaux - peut être la prudence. Je conseillerai au moins une pause, une réflexion, de se donner
du temps» (Le Devoir, 16.06.05, Canada). Cette inaction ne jouera aucunement en sa faveur. Il fait
comme il peut, il s'écrie que « l'Europe ne doit pas s'arrêter! L'UE doit surmonter la
mondialisation sur les bases des traités existants, étant donné que la Constitution ne sera pas dans
un futur proche » (Le Devoir, 16.06.05, Canada). Oui mais comment?
Dans Libération Jean Quatremer s’indigne. Il dénonce le fait que M. Barroso se repose sur
ses lauriers. Il critique son comportement et sa «pause de réflexion». A son avis, «Barroso, s’est
empressé d’enterrer une Constitution dont il n’a jamais été un grand fan car elle réduisait
l’influence du Portugal et se montrait un peu trop fédéraliste (…). Le Président de la Commission,
incapable de dessiner une voie de sortie à la crise sans précédent que connaît l’Union, a vu là un
moyen de ne pas rouvrir de grande bataille théologique et de s’assurer une fin de mandat
tranquille» (Libération, 19.08.06, France). Même ressentiment chez Anthony Browne du Times.
Selon le journaliste, le Président de la Commission porte peu dans son cœur cette Constitution. Il
faut dire que le Portugais est allé jusqu’à admettre que l’Union européenne fonctionnait très bien,
malgré la non ratification. «No way back for European constitution » (The Times, 02.09.05,
24
Royaume-Uni) s’est-il écrié. Il a ajouté que plutôt que d’avoir des débats sans fin sur les
institutions, mieux valait travailler avec ce que l’on avait.
Le journaliste Guy Valence analyse la politique de l'autruche du Portugais. « Depuis six
mois, l'Europe se tait. On pourrait croire qu'elle s'est cloîtrée pour réfléchir, pour méditer sur une
nouvelle mécanique institutionnelle. Rien de tel. Elle se tait parce qu'elle n'a rien à dire, rien à
proposer, rien à réformer. Les partisans du oui avaient raison : il n'y avait pas de plan B. Mais,
comme tout le monde s'en moque, les « nonistes » triomphent doublement. Si encore la Commission
de Bruxelles occupait le terrain par la qualité de ses propositions ou le prestige de ses dirigeants !
Mais Barroso, après avoir méthodiquement rogné l'influence de la France, se contente de gérer les
affaires courantes à la tête d'une équipe sans relief » (L’Expansion, 01.06, France). Le Président
n’a pas assuré ses arrières avec un plan B. Il n’a rien à proposer. Il va lui être difficile de s'en sortir.
Le problème majeur est qu'il ne propose rien de convaincant. Il tente quelques réformes
institutionnelles en passant outre le 'non'. Il obtient en effet « le feu vert, en coulisses, de plusieurs
Etats membres, notamment de la France, qui fait circuler son propre «plan B» dans les capitales.
Sur un plan technique, il s'agit de faire passer dans le domaine communautaire certaines matières
jusqu'ici soumises au droit de veto, comme la justice pénale » (L’Expansion, 01.06, France). Sans la
ratification de la Constitution de nombreux projets ont été avortés. Le président réussira-t-il à passer
outre ?
2) A quand la période d’action ?
Désespéré, critiqué, M. Barroso presse les chefs de l'UE « d'adopter une feuille de route
pour le prochain sommet, afin de trouver un accord sur la Constitution non ratifiée » (IHT,
13.04.07, Etats-Unis). Idée honorable, mais le Président manque cruellement de diplomatie.
Dernièrement (mai 2007), il a organisé un mini sommet à huit clos. Il y a convié quelques dirigeants
européens pour discuter de
l'issue du TCE. Erreur
grossière, certains chefs
d'Etat se retrouvent sur le
banc de touche. Le manque
de jugeote de M. Barroso
entraîne une crise
25
diplomatique. Le Portugais est obligé de faire machine arrière. Il revient sur sa position. « Des
responsables de l'UE et des diplomates ont reconnu que M. Barroso a dû renoncer à cette
rencontre prévue les 12 et 13 mai, à Sintra, au Portugal, les pays non invités ayant protesté contre
ce "brainstorming" en petit comité » (Nouvel Observateur, 26.04.07, France). Pas très sérieux
comme histoire.
Selon une de ces porte-parole, le Président souhaitait simplement "une réunion en petit
comité afin de mener une réflexion efficace" sur la relance institutionnelle, les politiques
européennes ainsi que le climat. Rapidement, le projet sème la confusion. Le choix de la date est
peu propice puisque le nouvel élu français n'est pas encore entré en fonction. Est-ce finalement un
choix stratégique de M. Barroso? Nul ne le sait, mais il est légitime de se poser la question. Surtout
qu'« au QG des deux candidats à la présidentielle, à Paris, on affirmait n'être pas au courant » (M.,
26.04.07, France). Autre erreur, le Premier ministre Guy Verhofstadt déclare ne pas avoir reçu
d'invitation... Interrogée par l'AFP, Leonor Ribeiro da Silva porte-parole du Président explique que
ce dernier n'est « "pas content des réactions" suscitées par l'annonce mercredi de son intention
d'organiser un mini sommet » (La Croix, 25.04.07, France). A lui de se demander pourquoi.
Néolibéral, M. Barroso a accordé la priorité aux réformes économiques durant son mandat.
Il semble cependant qu’il est enfin pris conscience « qu'il est temps d'agir sur le plan politique et
institutionnel » (FIG., 09.05.06, France). Sa période 'attentiste' semble révolue. «Nous sortons de la
période de réflexion. Et nous entrons dans une phase d'action politique» (FIG., 09.05.06, France)
déclare-t-il. Son « objectif est d'avoir un nouveau traité en 2009 » (M., 13.04.07, France). Il a pour
ce faire « engagé les dirigeants européens à suivre une feuille de route ambitieuse [en] les mettant
en garde contre la rediscussion de points déjà convenus » (Euractiv, 16.04.07, Barroso réclame un
nouveau traité européen pour 2009). Espérons que la présidence Portugaise pour le second semestre
2007 lui soit favorable. Probable.
III – Elargissement : 15 + 10 + 2 = 27 !
« Nous prendrons en compte la capacité d’intégration de l’Europe avant d’accepter de
nouveaux pays. Tout ce qui concerne les frontières est une véritable décision politique qui relève de
l’Europe. Mais il est de notre devoir de montrer qu’on gagne avec l’élargissement. Aujourd’hui, les
26
Américains, les Russes et même les Chinois nous regardent avec respect parce que nous sommes
les plus forts. » »
José Manuel Barroso,
(Paris Match,
25.07.06, France)
A) Le « NON ! » lié à l'élargissement
Les réformes institutionnelles sont le deuxième grand enjeu de taille que devait surmonter
M. Barroso. Si le TCE avait été ratifié, l’UE aurait subi des réformes. Pour que l’Europe des 27
fonctionne au mieux, une nouvelle Constitution s’avère dorénavant plus que nécessaire. L’UE-27
est difficilement gouvernable avec les institutions et les processus décisionnels actuels. La tâche est
cependant complexe. La double claque franco-néerlandaise a paralysé le débat. Les élargissements
de 2004 et de 2007 ont fait comprendre le besoin urgent de réforme. L’approfondissement doit
désormais passer avant l’élargissement. Cela les politiques l’ont bien compris et M. Barroso le
premier. Réaliste, il assure qu’il est dorénavant indispensable de « faire la réforme institutionnelle,
bloquée par les « non » français et néerlandais, avant tout élargissement » (Le Point, 05.10.06,
France). « Certains veulent l'élargissement sans approfondissement. Je ne suis pas d'accord. J'ai le
devoir d'attirer l'attention des dirigeants et des citoyens européens pour leur dire qu'on ne peut pas
continuer sur la voie de l'élargissement sans consolider nos institutions » (Le Point, 05.10.06,
France) explique-t-il.
Les conséquences du 'non' ont été dramatiques. Ce refus a jeté un voile sombre et pour
certains funeste sur l’UE. Le débat engendré a été houleux, animé et sans précédent. Selon le
Temps, « l'Europe, telle qu'elle s'est développée ces derniers mois, fait peur à certains - à l'Ouest
du moins, à tort ou à raison » (Le Temps, 14.04.05, Suisse). Les citoyens des Etats de l’Ouest sont
effrayés par les élargissements successifs à l’Est de 2004 et 2007. En seulement trois années, douze
Etats ont adhéré. Les citoyens de l’Ouest n’ont pas eu le temps de s’habituer, de s’intégrer, de se
sentir proche des nouveaux arrivants. La CE a mené de multiples campagnes de communication. En
vain. Le déficit communicationnel suivant la non ratification prouve les difficultés que M. Barroso a
pour communiquer avec 492 millions de citoyens. La seule issue pour le Président est de négocier
un nouveau traité, une « Constitution renégociée, après le Traité de Nice, pour mieux s'adapter à
l'élargissement, s'avère nécessaire. L'Europe en a besoin, essentiellement pour éviter une paralysie
27
du système de prise de décisions entre Etats » (Le Temps, 14.04.05, Suisse). Chose faite, après des
négociations difficiles au Sommet de juin 2007.
B) De 15 à 27 : le début de la fin ?
Le quotidien Neue Zürcher Zeitung, considère qu’en matière d’élargissement, le Président
de la Commission s’est laissé porter (ou emporter) par les évènements. Sans approfondissement, les
adhésions roumano-bulgares seront les dernières possibles. Le journaliste Allemand, Reinhold
Gemperle, affirme que «José Manuel Barroso s'est révélé incapable d'élaborer une stratégie
d'élargissement convaincante et mûrement réfléchie» ( Neue Zürcher Zeitung). Même son de cloche
pour Michael Moravec, du quotidien Der Standard qui écrit: «l’attitude de la Commission Barroso
sur l’élargissement est à la fois confuse et contradictoire. Elle ne dévoile aucune stratégie» (Der
Standard, 9.11.06, Autriche). Voilà le mettre mot de la politique du Portugais : la non-stratégie.
La nuance reste néanmoins de rigueur, puisque l'élargissement de 2004 n’est pas une
conséquence immédiate de la Commission Barroso. C'était cependant à lui d’engendrer
l’assimilation de ses citoyens, de faire 'passer la pilule'. Plutôt que de s’occuper de la croissance, de
l’économie et de la compétitivité, le Président n’aurait-il pas mieux fait de travailler sur
l’intégration et de répondre aux nombreuses craintes de ses citoyens ? « Si alimenter la croissance
européenne est important, en faire la priorité absolue comme l'a fait le Président portugais de la
Commission sans se demander d'abord comment réaliser vraiment l'élargissement et répondre aux
craintes qui l'accompagnent, c'est saper les bases mêmes de ce qui peut aider l'Europe à se tourner
vers la croissance » (Le Temps, 14.04.05, Suisse). M. Barroso doit travailler à rapprocher l'Ouest et
l'Est. Il ne paraît pas en avoir conscience. Dans un article qu’il a écrit pour les Echos, il affirme que
« la réconciliation politique entre Européens a eu lieu. La réconciliation du continent européen
avec son histoire et sa géographie est en cours: après l'élargissement de mai dernier à dix
nouveaux membres, nous serons vingt-sept en 2007 avec l'adhésion de la Roumanie et de la
Bulgarie » (Les Echos, 17.05.05, France). Cette attitude positive, quelque peu simpliste ne reflète
en rien le sentiment des citoyens européens.
Pour prouver qu’il a raison, M. Barroso est prêt à tout. La Commission va jusqu’à
« omettre » dans son rapport d’évaluation les éléments prouvant que la Roumanie et la Bulgarie
n’étaient pas prêtes à adhérer. Elle « a donné l'impression de vouloir se débarrasser d'un paquet
28
devenu encombrant. De chercher à prendre de vitesse une opinion publique de plus en plus rétive à
l'élargissement » (FIG., 29.09.06, Monde). Selon la CE, le « diagnostic de l'état de préparation des
deux capitales serait neutre et objectif »(FIG., 29.09.06, France). La perplexité est de rigueur à la
lecture des documents, notamment en ce qui concerne le dossier sensible de la corruption. « Les
experts qui suivent jour après jour les vicissitudes des réformes judiciaires bulgares écrivaient
initialement que les « progrès réalisés » à Sofia étaient « limités ». Une fois que le texte fut relu,
jusqu'aux plus hautes hiérarchies de la Commission, ce constat fut ainsi reformulé : dans la lutte
contre la corruption, « des progrès ont été réalisés »... Les exemples de ce type fourmillent. Comme
l'explique un proche de l'exécutif : « On écrit d'abord une chose, puis son contraire» (FIG.,
29.09.06, France). Ce camouflage provient de M. Barroso ainsi que des vingt-cinq Etats membres
qui ont donné leur accord tacite en coulisse.
Le Président de la CE use et abuse de la non ratification du TCE. Le 'non' a bon dos. M.
Barroso le sait. Il s’en sert de paravent pour expliquer tous les maux qui sévissent en Europe. Il se
cache derrière les 'problèmes institutionnels' qui deviennent le bouc émissaire, la cause de tout et
n’importe quoi. En dépit des problèmes liés à l’élargissement de 2007 et du refus du TCE, le
Portugais affirme « qu'il est un grand succès ». Il ajoute « qu'agrandir l'Union -si cela est bien
organisé- produit une situation où tout le monde est vainqueur, à la fois pour les Etats membres
existants et ceux le devenant. L'élargissement stimule la croissance économique, la cohésion
sociale et renforce le rôle et l'influence de l'UE dans le monde » (Discours de M. Barroso,
« Presentation of Bulgaria and Romania accession report », 26.09.06, PE, Strasbourg).
Les faiblesses roumano-bulgares sont toujours notables. Les deux pays sont en outre les plus
pauvres de l'UE-27. Il est légitime de se demander pourquoi leur adhésion n’a pas été retardée d’un
an comme le permettent les dispositions d’adhésion. M. Barroso nie « l'idée selon laquelle l'UE
allait maintenant marquer «pause» dans le processus d'élargissement tout en reconnaissant, ce qui
ressemble à un aveu, qu'il ne saurait être question de nouvelles adhésions avant que n'ait été
trouvée une solution à l'impasse constitutionnelle dans laquelle se trouve l'Europe » (Le Devoir,
28.09.06, Canada). Le ras le bol de l’élargissement n'est pas prêt de s’apaiser. Les candidats à
l’adhésion sont mal partis. Les Européens ne sont pas encore disposés à accueillir la Turquie,
l’Albanie et les anciens pays de l’ex-Yougoslavie dans l’UE.
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C) La directive Bolkestein et ses conséquences sur l’élargissement
La controverse suscitée par l’ouverture du marché des services en Europe (directive
Bolkestein) est intimement liée à l’élargissement. Lorsque le Néerlandais Frits Bolkestein, (alors
commissaire européen en charge au Marché intérieur, à la Fiscalité et à l'Union douanière) présente
en janvier 2004 son texte, l'Europe ne compte encore que quinze membres. Les négociations
d’adhésion avec les dix sont néanmoins terminées. C'est pourquoi, les Européens se montrent
véritablement effrayés par la probable vague déferlante de « plombiers polonais » vers l’Ouest.
Néanmoins, « contrairement à ce que prédisaient les pessimistes, les foules de travailleurs de l'Est
n'ont pas déferlé sur les pays qui avaient laissé l'accès ouvert à leur marché de l'emploi. Au
contraire, les études démontrent plutôt qu'il est difficile de faire bouger les Européens qu'ils soient
de l'Est ou de l'Ouest » (Le Temps, 14.04.05, Suisse). Etrangement, M. Barroso ne s’est pas servi de
cet argument pour contrer ses détracteurs.
Les manifestations publiques se sont succédées contre ce que certains appelaient la directive
« Frankenstein ». Cette agitation a « contraint José Manuel Barroso à déployer tous ses talents
d'illusionniste » (FIG., 18.03.05, France). Selon le Figaro, sa méthode politique est identifiable :
« dans un premier temps, il délivre des mots choisis, adaptés à un auditoire sélectionné (…). Dans
un second temps, le président de la Commission feint de s'étonner des réactions hostiles et minimise
la portée de ses propos. Dans un troisième temps, il profite de la présence d'un nouvel auditoire
pour amender son discours, alternant cette fois demi-concessions, admonestations, flatteries et
prêches en faveur du modèle social européen. Au final, chacun s'y retrouve » (FIG., 18.03.05,
France). Le Portugais serait-il opportuniste ou fidèle à ses idées politiques ? Les faits sont parlants:
le même homme a été maoïste, socialiste, chrétien et (ultra)libéral! « Autre reculade manifeste:
Bruxelles s'est résolue à réduire le champs d'application de la directive. Outre la kyrielle de
services qui étaient déjà exclus de la directive (transports, réseaux d'eau ou d'électricité...), les
services de santé, les remboursements de soins transfrontières, les logements sociaux, les agences
d'intérim... » (Le Parisien, 04.04.06, France). Contenter le plus grand nombre reste LE choix le plus
judicieux à effectuer.
D) Les candidats à l'adhésion: la Croatie et la Turquie
« Dans le meilleur des scénarios, la Croatie devrait adhérer vers 2009-2010. Je pense donc
30
qu'on peut avoir réformé les institutions sans altération fondamentale de ce calendrier» (Le Point,
05.10.06, France). L'approfondissement et l'élargissement semblent impossible dans un laps de
temps si restreint. Laissons néanmoins au Président le bénéfice du doute. Il est légitime de douter
puisque la crise entraînée par les élargissements de 2004 et de 2007 est très prégnante. A cela
s'ajoute les gaffes publiques de M. Barroso. « Nous avons besoin de prendre en compte l'opinion
public, ce qui ne signifie pas que nous ayons à le suivre » (Gazeta Wyborcza, 17.06.06, Pologne)
dit-il. S’il agit pour le bien commun et l’intérêt général, M. Barroso ne doit-il pas prendre en
compte l’opinion des principaux intéressés, à savoir les citoyens européens ? Pour les rassurer M.
Barroso affirme haut et fort que les « peurs liées à l’élargissement sont infondées »
(Népszabadasag, 30.08.05, Hongrie). Même si c’est le cas, rassurer les citoyens européens reste la
meilleure solution.
La candidature d'adhésion de la Turquie est quant à elle largement vectrice de polémiques.
Le Président de la CE s'avoue très préoccupé, « j'ai le regret de le dire, mais les choses vont mal
avec la Turquie. Nous sommes dans un moment très critique. Je ne vois pas en ce moment les
progrès que j’attends. J'espère que la présidence finlandaise réussira à éviter un arrêt traumatique
des négociations. Je suis sincèrement préoccupé » (Corierre della Sera, 26.10.06, Italie). Pour le
pays, rien n'est gagné. Après l'ouverture à l'Est, les Européens ne sont pas prêts à ouvrir leurs
frontières à un pays composé majoritairement de musulmans. L'opinion publique prend le dessus
sur les dirigeants européens favorables à cette adhésion.
IV – Les trois chevaux de l’apocalypse : la Stratégie de Lisbonne, le néo-
libéralisme et le Budget 2007-2013
Parmi les chantiers les plus difficiles à mettre en œuvre, l'agenda économique et social
remporte de loin la palme. Stratégie de Lisbonne, problème d’ultralibéralisme et négociations du
budget 2007-2013 sont les trois défis que M. Barroso a bien eu du mal à affronter. L'ultra libéral M.
Barroso a partiellement réussi le pari. Si l’on considère la difficile négociation du budget de l’Union
pour la période 2007-2013, elle « montre que Barroso n'est pas le facilitateur que l'on imaginait».
Quant à la Stratégie de Lisbonne, elle ne sera pas accomplie à la période prévue.
31
A) Les négociations tendues du Budget 2007-2013
La question du budget 2007-2013 a été difficile et les négociations engendrées très tendues.
« Si nous voulons une Europe ambitieuse, il faut en avoir les moyens » (Ouest France, 20.11.04,
France) argumente M. Barroso. Certes, mais ses détracteurs voulaient 'simplement' un nouveau
remaniement du budget, ou plus précisément le destiner à d’autres politiques et mieux l’équilibrer.
A elle seule, la PAC absorbe 40% du budget, répartis en fonction des besoins propres à chaque
Etats membres, d’où les querelles suscitées. Pour sa défense, le Président explique que « si nous
sommes convaincus que l’action européenne est une valeur ajoutée, il faut y mettre le prix » (Ouest
France, 20.11.04, France). L'évaluation du prix est une tâche extrêmement ardu et le consensus
difficile à obtenir.
Lors des négociations budgétaires, le Président explique que « le sommet commence et nous
devons décider du budget de l'UE à long terme. L'impasse actuelle est néfaste, et quelques projets
doivent être annulés, sinon un accord ne pourra être obtenu » (Svenska Dagbladet, 02.12.05,
Suède). Le budget proposé par M. Barroso est difficile à défendre. Il désire en effet l'augmenter à
1.14 % du PIB, alors que 40% est dépensé dans la PAC. Cette option ne convient pas aux
Britanniques qui en bénéficient guère, en dépit de leur large contribution. Ce ne sont pas les seuls à
critiquer. Les vingt-cinq n'arrivent pas à se mettre d'accord. Selon la Tribune, « si cette négociation
devait à nouveau capoter en ce mois de décembre, l’Europe s’enfoncera dans la crise » (La
Tribune, 08.12.05, France). Peu subtile, le Président de la CE affirme qu’« aucune institution n’a le
statut de vache sacrée » (La Tribune, 08.12.05, France). Pourtant il a raison, «un budget de 1% est
insuffisant. Il n’est pas réaliste d’avoir plus d’ambition pour l’Europe à 25, bientôt 27, avec moins
de moyens. On ne peut pas sans effort supplémentaire répondre aux attentes de nos concitoyens»
(M., 22.09.04, France). M. Barroso a réussi son pari, les Etats membres y ont mis (partiellement) le
prix.
La question de l’orientation du budget se pose également au niveau des aides régionales qui
représentent une forte portion des dépenses. La Roumanie et la Bulgarie étant les Etats les plus
pauvres de l'UE, ils en sont les principaux bénéficiaires. Pour contenter les Hongrois, Barroso leur
affirme que « les nouveaux Etats membres ont apporté plus de dynamisme dans la vie de l’Europe,
ce qui doit être récompensé grâce au support de leur développement » (Magyar Nemzet, 07.12.05,
Hongrie). « L’Europe a besoin d’un budget ambitieux et juste. Pour cela un accord doit être atteint
32
au Sommet » (Magyar Nemzet, 07.12.05, France), explique-t-il. Qu’en est-il dans les faits ?
Explications.
M. Barroso a partiellement gagné. Bien que le budget voté (2007-2013) ne représente pas
1.14 du PIB de chaque Etats, le budget de 2007 correspond déjà à 1,08 % du revenu national brut
(RNB) de l'UE. Il consacre plus de « fonds à la compétitivité et la cohésion dans l'UE-27 ». Il
s’élève donc « à 126,5 milliards d'euros en crédits d'engagement, ce qui représente une hausse de
5,0 % par rapport à 2006 » (http://ec.europa.eu/budget/budget_detail/current_year_fr.htm). Au
travers du budget 2007, on peut constater que M. Barroso a réussi son pari, puisque les dépenses
octroyées à la compétitivité et la cohésion ont largement accru (43%). Le Portugais se donne les
moyens pour atteindre les objectifs de la Stratégie de Lisbonne. Les chiffres annoncés pour le
budget 2007 sont cependant peu clairs. L'opacité semble voulue. Prenons simplement l'exemple de
la 'case' croissance durable, qui représente 43% du budget. Elle comporte à la fois les termes :
« investir dans la compétitivité » et « favoriser la cohésion entre les régions ». Les 40% des
dépenses sont-elles octroyées à la compétitivité et 3% dans les politiques de cohésion régionale ou
l'inverse?
Pour la première fois, dans le budget 2008, les dépenses engagées pour les politiques en
faveur de la croissance et de l'emploi représenteront la part la plus élevée du budget, devant celles
consacrées à l'agriculture et aux ressources naturelles. Tel est le principal message qu'adresse la
Commission dans ses propositions budgétaires pour 2008. S'établissant à 129,2 milliards d'euros en
crédits d'engagement, le budget augmente de 2 % par rapport à 2007. Les crédits de paiement sont
fixés à 121,6 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 5,3 %. M. Barroso se donne les
moyens de ses ambitions.
B) La Stratégie de Lisbonne : une utopie irréalisable pour 2010 ?
Le Président de la Commission a relancé la Stratégie de Lisbonne, pour une « économie de
la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010 ». Pour lui et son
commissaire M. Frattini, « cette stratégie libérera le potentiel de dynamisme économique que
recèle l’Europe. Elle renforcera son attractivité comme pôle d’investissement et marché du travail,
en faisant de la connaissance et de l’innovation les moteurs d’une croissance et d’une création
33
d’emplois durables » (FIG., 31.05.05, France). Concrètement, sur le terrain, la stratégie est-elle en
proie d’atteindre ses objectifs pour 2010 ? Il faudrait un miracle. M. Barroso est trop optimiste voir
utopiste. La Stratégie est en outre « un vaste programme, durement critiqué par la gauche, qui la
juge trop favorable aux marchés » (Expresso, 17.03.05, Portugal). Rapidement, le Président prend
conscience de l’étroitesse de son échéance. Il renvoie la faute aux autres et « concède que les chefs
de l’UE ont été « trop ambitieux » en prenant comme date cible 2010 » (FT, 20.08.04, Royaume-
Uni). Il ajoute que « le but de devenir l’économie la plus compétitive dans le monde est une des
choses que nous pouvons achever, et nous ne devons pas être découragés » (FT, 20.08.04,
Royaume-Uni). Il est important de signaler que la Stratégie de Lisbonne a été adoptée en 2000, sous
la charge de Romano Prodi. L'Italien a sans aucun doute une part de responsabilité dans la faiblesse
des résultats.
C) Barroso l’ultralibéral?
A peine nommé, le nouveau Président de la CE annonce 'sa' couleur. Il promet que « les
réformes économiques seront au cœur des cinq années de mandats» (FT, 20.08.04, Royaume-Uni).
Ses « intentions ne pourraient pas être plus claire ou d’un point de vue business plus amical » (FT,
20.08.04, Royaume-Uni). Selon le journaliste Thomas Fuller (IHT, 03.02.05, Etats-Unis), la volonté
de déréglementation lancée par M. Barroso n'est destinée qu’à créer un cadre favorable aux
entreprises. Le crédo se précise. Le couple franco-allemand est mécontent. Il a perdu du terrain.
L’Europe évolue lentement mais surement vers une économie de marché. L’UE est en pente raide
vers un libéralisme pur et dur. Dans ce domaine, M. Barroso possède des arguments de défense
extrêmement réaliste. « La mondialisation va se produire qu’on le veuille ou non. Cette évolution
est largement déterminée par des mouvements qu’on ne contrôle pas politiquemuent : les progrès
technologiques » (La Croix, 14.12.05, France) explique-t-il. Face aux défis que suscite la
mondialisation, il faut désormais apporter des réponses. Le Président y est prêt. Il légitime ses choix
de façon judicieuse, « c’est pour le consommateur que l’Europe se bat, et nous sommes tous des
consommateurs. La Commission est le numéro un au monde comme régulateur de prix » (Paris
Match, 25.07.06, France).
34
V – Guerre en Irak et Problèmes environnementaux : les soucis de Barroso
A) Les relations américo-européennes et la guerre en Irak
M. Barroso entretient de très bonnes relations avec le Président des Etats-Unis. Vu la côte de
popularité de Georges W. Bush en Europe, cela ne joue guère en sa faveur. Enthousiaste à l’idée de
l’accueillir à Bruxelles, le Portugais a affirmé « très sincèrement, George Bush est beaucoup mieux
en privé qu’il n’apparait à la télévision ». « C’est une homme chaleureux, sympathique, spontané »
(FIG., 18.02.05, France), a-t-il ajouté. Les deux hommes s’appelleraient même par leurs prénoms.
Faut dire que M. Bush le lui doit bien. Il l’a d’ailleurs « remercié pour les 200 millions d’euros que
la Commission a débloqués pour l’Irak » (FIG., 18.02.05, France). Son soutien aux Etats-Unis dans
le conflit irakien, voilà le souci majeur du Portugais ainsi qu'une des causes de sa non popularité.
Ce point sensible est à considérer. Atlantiste convaincu, Barroso a « adopté une position
nettement proaméricaine au moment de l’intervention en Irak » (Euractiv, 27.09.04, Are the
economics of the new Commission too Liberal?). De ce fait, dès son arrivée à la tête de l’exécutif
européen, le monde entier s'inquiètait de la coloration idéologique de la nouvelle Commission.
Alors qu’il était Premier Ministre du Portugal (mars 2003), Barroso a réuni aux Açores George W.
Bush, Tony Blair et José Maria Aznar. Aux eurodéputés qui essaient de lui faire dire qu'il a eu tort,
il assure: «je ne suis pas un va-t-en guerre», mais «s'il y a une guerre entre un allié du Portugal et
un Etat comme celui de Saddam Hussein, je ne peux pas rester neutre» (La Libre Belgique,
19.11.04, Belgique).
M. Barroso défend sa position: « il n'y a aucune contradiction entre partisans de
l'intégration européenne et l'atlantisme » (L’Humanité, 23.08.04, France). Il se veut proche des
Etats-Unis. « Vous pouvez construire l’Europe soit comme un complément, soit comme un
contrepoids par rapport aux Etats-Unis. C’est stupide de la voir comme un contrepoids. Dans
certains pays européens, il existe l’idée que nous serons indépendants si nous faisons contrepoids.
C’est stupide » (IHT, 03.07.04, Etats-Unis) affirme le Président. Entretenir de bonnes relations
diplomatiques avec les Etats-Unis est primordiale. Il est important d'être leur allié pour mener à
bien une politique libérale, pour atténuer le sentiment anti-américain qui sévit dans le monde
entier… Le Président de la CE l’a bien compris.
35
B) Défis environnementaux
Ces dernières années, personne n’a pu y échapper. Dans le monde entier, mais aussi aux
quatre coins de l’Europe, le thème politique 'fashion' du moment c’est l’environnement. Dans ce
domaine là, M. Barroso est à la pointe de la mode. Il a bien compris que les enjeux
environnementaux marchaient bien avec les euro-citoyens. Il se voue ainsi une nouvelle passion
pour ce thème, car la question environnementale est peu sujette à débat et opposition. Tout le
monde s’accorde sur les nombreux défis environnementaux. La gauche comme la droite en usent et
en abusent. Peu de personnes aujourd’hui vous affirmeront que le changement climatique n’est pas
un problème majeur.
1) M. Barroso glisse doucement vers la cause environnementale
M. Barroso a bien compris le filon 'écolo'. C’est pourquoi, il a glissé sur la vague en temps
voulu. L'ironie de l'histoire est que durant la controverse suscitée par le projet REACH, M. Barroso
a contribué à plomber la première proposition, qui était plus favorable aux environnementalistes.
Peu importe. En 2007, il est un autre homme. La Stratégie de Lisbonne priorité suprême de la
Commission en 2004 est difficilement applicable? Il suffit de trouver un nouveau cheval de bataille.
La solution gagnante? Un thème quasi-consensuel: les problèmes énergétiques, le changement
climatique et le développement durable ! Pour prouver sa bonne foi, le Président de la CE en
appelle à « une réaction à l'échelle européenne. La dimension européenne est essentielle, car les
actions individuelles des Etats membres, chacun de leur côté, seront inefficaces »
(http://ec.europa.eu/news/around/061204_fra_fr.htm, 14.12.06, « Environnement: le Président
rencontre Nicolas Hulot »). M. Barroso deviendrait-il un écolo ?
Prêt à tout, le Portugais n'hésite pas à se faire photographier au côté du Premier ministre
Danois Fogh Rasmussen (24 au 26 juin 2007) sur un traineau au Groenland. L'objectif de la visite
est d’observer les conséquences dues au changement climatique. Le Président explique que « le
Groenland est en première ligne de la bataille contre le changement climatique. Il en éprouve déjà
certains effets profonds. Nous risquons littéralement une fonte des glaces, si nous n'agissons pas
tout de suite, non seulement pour le Groenland mais aussi pour l'Europe et le reste du monde. Rien
ne remplace l'observation directe » (Actu environnement, 21.06.07, J. M. Barroso et Fogh
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Rasmussen se rendront au Groenland). M. Barroso serait-il un nouveau Nicolas Hulot? Il l’a en
tous les cas rencontré (2007) pour discuter des défis environnementaux…
2) Paradoxe quand tu nous tiens…
M. Barroso est dorénavant engagé dans la cause environnementale. Paradoxalement, il ne
l’est pas personnellement dans la vie de tous les jours. A Jean Quatremer de nous rappeler que le
Président roule « en 4X4 Volkswagen, un engin qui consomme 13,2 litres au cent en ville et rejette
265 grammes de CO2, le principal gaz à effet de serre, soit presque deux plus que l’objectif de 140
grammes fixé, en 1998, par…l’exécutif européen» (Les coulisses de Bruxelles, 06.06.06, Mon
beauf). Pour 'féliciter' cette action, le 26 mai 2006, Agir pour l'Environnement, le Réseau Action
Climat France et Transport and Environment (T&E) a remi officiellement la palme d'Or du Prix
Tuvalu du dérèglement climatique au Président. Ce prix est décerné à l'acteur politique ou
économique de l'année ayant démontré son incapacité à agir en faveur de la lutte contre le
dérèglement climatique. Comment peut-on sensibiliser les euro-citoyens aux enjeux climatiques
tout en conduisant un 4x4 gourmand en carburant ? Mystère. Il semblerait que le mot d’ordre du
Président soit: 'faites ce que je dis mais pas ce que je fais'...
3) Sommet de mars 2007
Au sommet de Bruxelles, les vingt-sept ont adopté une stratégie ambitieuse de lutte contre le
réchauffement climatique. « L'Union a établi une série d'objectifs contraignants en matière de
politique énergétique pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et inciter les plus gros
pollueurs de la planète, Etats-Unis et Chine en tête, à suivre son exemple » (L’Express, 09.03.07,
France). Les dirigeants européens se sont (pour une fois) mis d’accord sur l’importance d’un accord
visant à inciter les plus gros pollueurs - Etats-Unis, Chine, Russie et Inde - à prendre au sérieux le
menace du réchauffement de la planète. « Nous pouvons une fois de plus dire au reste du monde:
'l'Europe prend les devants, vous devriez nous rejoindre' » (L’Express, 09.03.07, France), a déclaré
M. Barroso. Cette nouvelle initiative joue en faveur du Portugais. Elle démontre des désirs de réels
progrès en matière d'environnement.
37
Conclusion
A la vue des malencontreuses aventures du Portugais, il est facile de vilipender, de crier à
l’erreur de nomination. Il est aisé de penser que plutôt que de proposer un plan B à la Constitution,
il aurait mieux fallu proposer un plan C à la désignation du Portugais.
L'étude du 'phénomène' politique Barroso est complexe. Après documentation et réflexion,
on se rend compte que dresser un portrait du Portugais est extrêmement difficile. Il s'avère
extrêmement difficile d'avoir une opinion tranchée. J'ai décidé de laisser au lecteur le choix de
répondre à la problématique de départ: 'M. Barroso est-il le pire ou le meilleur pour l'Europe'. Mon
étude m'a démontrée que rien n'est catégorique. M. Barroso n'est ni pire, ni meilleur. Seulement un
politique en proie à de multiples conflits d'intérêts. Rien est noir ou blanc! La politique est un
domaine difficile où le parcours est souvent semé d'embûche.
M. Barroso est actif, réactif et pro-actif. Il a souvent des difficultés à faire rapidement face
aux crises. Normal, si l'on considère le fait qu'il doit gérer les conflits d'intérêts de vingt sept pays!
Le Portugais est un politique extrêmement compétent, doué d'expérience et connaissant bien les
difficiles rouages de son métier.
Le portrait de M. Barroso est plein de contrastes. Mais quel personnage politique a suivi un
parcours carré? Difficilement cernable, le Portugais semble tel un caméléon s'adapter aux situations
qui se présentent à lui. En dépit des critiques, des crises, des scandales, M. Barroso est toujours
retombé sur ses pattes. Il est toujours à la tête de la CE. D'après les rumeurs de couloirs de la CE, il
pourrait d'ailleurs effectuer un second mandat dès 2009.
Rien n'est plus aisé que de critiquer. Il est néanmoins important d'observer les faits. M.
Barroso n'a pas choisi le contenu du TCE. Il l'a hérité de la Commission R. Prodi. Il en va de même
pour l'élargissement. On peut critiquer ses choix en fonction d’où l’on se positionne sur l’échiquier
politique, ses erreurs quelquefois grossières, mais il a les épaules pour porter l’Europe. C’est vrai, il
n’a pas encore mené des politiques de grandes envergures. Mais à l’heure où je rédige ce mémoire,
les principes d'un nouveau traité ont été accepté au Conseil européen (bien que rien n'est été
officiellement signé), des progrès dans le domaine des défis liés à l’environnement menés, la
communication sur l’Europe se fait de plus en plus entendre…
38
L'optimisme est de rigueur. M. Barroso a encore deux années pour faire ses preuves. La
prochaine présidence du Conseil de l’UE du second semestre 2007 (le Portugal) devrait en tous les
jouer en sa faveur. Le programme du Portugal ne manque pas d’ambition : « un nouveau traité, la
préparation de la prochaine étape de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi, la
justice, la liberté et la sécurité dans un espace Schengen sans frontières élargi, ainsi que les
relations de l'Union avec le reste du monde, et en particulier avec l'Afrique »
(http://ec.europa.eu/commission_barroso/president/focus/eu2007pt/index_fr.htm, 29.06.07, Une
Union plus forte pour un monde meilleur). Voilà de quoi redorer son blason… Sa politique reste à
suivre à la loupe.
39
Epilogue
J’ai dû faire des choix, pour des questions de pertinence et de respect des critères
d’évaluation (notamment par rapport à la limitation du nombre de pages). J’ai par exemple décidé
de ne pas m'étendre sur la controverse suscitée par Reach, mais de traiter plus en détails des crises
majeures s’étant succédées sous le mandat de M. Barroso. Un mandat de trois ans à la tête de la CE
est en réalité très long. Il m’aurait fallu de ce fait un Travail de Fin d’Etudes d’environ 150 à 200
pages pour être la plus complète possible.
Cette étude a été longue à mener, puisque les sources pertinentes étaient difficiles à trouver
et plutôt rares. En effet, à mon grand étonnement, la presse européenne et internationale parle peu
de M. Barroso en tant qu’homme politique à proprement parler.
Je tiens à souligner que je me suis réellement passionnée pour ce travail de fin d’études. Il
est devenu à mes yeux un passe-temps pour lequel j’ai éprouvé beaucoup de plaisir. Ma passion
pour la politique européenne et internationale, ainsi que le plaisir que j'ai pu avoir à effectuer cette
étude ont remis en question mes ambitions. L'année prochaine, je pense d'ailleurs effectuer un
Master II en politique internationale à l'Université Libre de Bruxelles pour me réorienter dans le
futur dans la communication politique. Une de mes ambitions serait d'écrire les discours des
politiques et pourquoi pas leurs biographies. Quoi de plus passionant que de suivre un homme
politique durant son mandat, à travers ses échecs, ses peurs, ses doutes?
40
Sources
Presse
Belgique
Libre Belgique (La), 19/11/2004, VERHEST Sabine, l’énigme Barroso.
Canada
Devoir (Le), 16/04/2005, TRUFFAUT Serge, Le mouton noir, p. 4.
Devoir (Le), 16/06/2005, RIOUX Christian, A la recherche du « plan B »: l'Europe en crise se
dirige vers une « pause » du processus référendaire, p.1.
Devoir (Le), 28/09/2006, TAILLEFER Guy, Indigestion européenne, p. 6.
Presse Canadienne (La), 11/12/2004, le Premier ministre portugais annonce la démission de son
gouvernement.
Tribune (La), 5/11/2004, Europe: un remaniement de Barroso, p. 2.
Etats-Unis
International Herald Tribune, 3/07/2004, VICONUR John, Barroso's ways of building Europe, p.1.
International Herald Tribune, 28/10/2004, BOWLEY Graham, Barroso backs down on EU team, p.
1.
International Herald Tribune, 23/11/2004, BOWLEY Graham, EU chief vows to champion reforms,
p. 1.
International Herald Tribune, 13/04/2007, EU chief Barroso wants June summit to agree on a
« road map toward a European Constitution ».
41
France
Croix (La), 28/10/2004, QUINIO Dominique, Commission européenne. La fête amère, p. 1.
Croix (La), 14/12/2005, Interview de Barroso, Barroso confiant dans la « force de l’Europe ».
Croix (La), 25/04/2007, Mini sommet sur la Constitution au Portugal: Barroso fait marche arrière.
Echos (Les), 17/09/2004, Concurrence: Barroso prend la défense de sa commissaire, p. 1.
Echos (Les), 17/5/2005, BARROSO José Manuel, L'Europe, le rêve et la nécessité, pp 13-14.
Figaro (Le), 30/06/2004, José Manuel Durao Barroso, un atlantiste à Bruxelles, p. 1, 5.
Figaro (Le), 13/08/2004, Le nouveau visage de la Commission européenne, p. 1, 5.
Figaro (Le), 22/10/2004, La future équipe Barroso sous le coup d'une censure des députés,
Commission européenne. La fête amère, p. 1, 7.
Figaro (Le), 23/11/2004, Les déboires de Jacques Barrot, commissaire européen, p. 1, 5.
Figaro (Le), 12/01/2005, AVRIL Pierre, José Manuel Barroso emboîte le pas à Jacques Chirac sur
la Constitution, p. 5.
Figaro (Le), 18/02/2005, BOUILHET Alexandrine, Barroso: “Bush est plus sympa qu’à la télé!”,
p. 7.
Figaro (Le), 18/03/2005, AVRIL Pierre, Directive Bolkenstein: Barroso persiste et signe, p. 5.
Figaro (Le), 31/05/2005, BARROSO José Manuel et FRATTINI Franco, Quel partenariat pour le
renouveau européen?, p. 15.
Figaro (Le), 28/11/2005, BARROSO José Manuel, le partenariat euro-méditerranéen, pour le
dialogue et l’action, p. 22.
Figaro (Le), 9/05/2006, BOUILHET Alexandrine, Constitution: José Manuel Barroso active le
« plan B ».
Figaro (Le), 29/09/2006, AVRIL Pierre, L'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie met en
lumière le grippage de l'Union, p. 15.
Humanité (L’), 30/06/2004, CEIBE Cathy, l’Europe précipite une crise politique au Portugal.
Humanité (L’), 23/08/2004, OKBA Lamrani, La Commission européenne veut s'affranchir du
social, p. 13.
Libération, 28/10/2004, QUATREMER Jean, Une crise qui muscle le Parlement, p. 2.
Monde (Le), 2/03/2004, BARROSO José Manuel, Approfondissons l'Union européenne bien sûr,
42
mais comment?, p. 1.
Monde (Le), 14/08/2004, Les Libéraux en force à Bruxelles, p. 1.
Monde (Le), 22/09/2004, FERENCZI Thomas, LEPARMENTIER et RICARD Philippe, Turquie,
France: les critiques et le plaidoyer de M. Barroso, Interview de Barroso.
Monde (Le), 21/10/2004, Europe: controverse autour des valeurs chrétiennes, p. 1.
Monde (Le), 23/10/2004, Epreuve de force entre Barroso et les eurodéputés, p. 1.
Monde (Le), 7/02/2007, RICARD Philippe, L'Allemagne freine sur la réduction des émissions de
CO2 des automobiles.
Monde (Le), 13/04/2007, UE Barroso souhaite un nouveau traité constitutionnel dès 2009.
Monde (Le), 26/04/2007, RICARD Philippe, José Manuel Barroso annule une initiative de mini
sommet.
Nouvelle République du Centre-Ouest (La), 1/07/2004, Laisser un nom, p. 1.
Parisien (Le), 4/04/2006, GARACH Christophe, Bruxelles ne veut plus de la directive Bolkenstein,
p. 6.
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Ouest France, 12/11/2005, Union: Bourlanges tire à vue sur Barroso, p. 2.
Tribune (La), 8/12/2005, Il faut plus d’esprit européen, Interview de Barroso.
Hongrie
Magyar Nemzet, 7/12/2005, BARROSO José Manuel, Az EU-nak igazsagos koltségvetésre van
szuksége, (The EU needs a just budget).
Italie
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Corriere della Sera, 26/10/2006, SARCINA Giuseppe, Europa e Turchia? Rischi di un trauma,
(Interview de Barroso, Europe et Turquie? Risque de traumatisme), p. 1, 7.
43
Lituanie
Lietuvos Rytas, 6/05/2005, Bruselis nespleia optimizmo del ateities, Interview de Barroso, p. 8.
Pologne
Gazeta Wyborcza,, 17/06/2006, NIKLEWICZ Konrad, Rozszerzenia UE trzeba konsultowac,
(Interview de Barroso, EU enlargements need to be consulted), p. 7.
Wycinki Prasowe, 2/12/2007, EC president: Poland can rely on Brussels.
Portugal
Expresso, 17/03/2005, DE ROSARIO Daniel, Les cents jours de Durao Barroso: le président qui
ne voulait pas être néolibéral, p. 20.
Royaume-Uni
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solve their problems.
Financial Times, 22/10/2004, O'DOHERTY John and PARKER George, Barroso struggling for
votes after bid to sway MEPs over Buttiglione fails, p. 1.
Financial Times, 22/10/2004, O'DOHERTY John and PARKER George, Incoming Brussels chief
scrambling for supporton controversial team selection, p. 1.
Financial Times, 2/02/2005, Barroso to focus on jobs and growth, p.11, 12, 16.
Guardian (The), 23/11/2004, GOW David, EU transport chief clings on to his job.
Independent (The), 18/02/2005, CASTLE Stephen, Barroso sings the praises of Bush to sceptical
Europeans, p. 26.
Times (The), 19/11/2004, WATSON Rory, MEPs give new team approval.
44
Suède
Svenska Dagbladet, 2/12/2005, BARROSO José Manuel, EU:s trovaedighet i fara, (The EU's
credibility is at risk), p. 5.
Suisse
Temps (Le), 28/06/2004, Avec le Portugais Barroso, la Commission européenne tient enfin son
président, p. 1.
Temps (Le), 14/04/2005, SULSER Eléonore, Le « non » français, symptôme d'un élargissement mal
digéré?.
Temps (Le), 7/06/2007, WERLY Richard, La porte du G8 reste ouverte pour un accord a minima
sur le climat.
Hebdomadaire - Mensuel
Courrier International, 8/07/2004, MOREIRA Vital, Durão Barroso devrait avoir honte!, extrait de
Público (Lisbonne), p. 24.
Expansion (L’), 01/2006, VALANCE Georges, L'Europe en manque de France, p. 3., n° 0704.
Express (L’), 9/03/2007, L’Union européenne en pointe sur le changement climatique.
Nouvel Observateur (Le), 26/04/2007, Barroso contraint de modifier la forme du sommet à huit
clos sur la Constitution européenne.
Paris Match, 25/07/2006, Interview de Barroso, l’Europe a visage humain, pp 50-53.
Point (Le), 5/10/2006, BEYLEAU Pierre et FRANCO Alain, Les quatre vérités de Barroso,
(Interview), pp68-70.
45
Agence de Presse
AFP Infos Economiques, 16/11/2004, UE: le commissaire hongrois Kovacs défend son passé
politique devant le PE.
Discours
Speech to the nation on accepting the invitation to serve as President of the European Commission,
(Comunicação ao País sobre a aceitação do convite para a presidência da Commissão Europeia) by
José Manuel Durão Barroso, Lisbonne, 29 juin 2004.
Discours de M. Hans-Gert Poettering Président du Groupe du PPE-DE au Parlement européen, 21
juillet 2004.
Speech: « Presentation of Bulgaria and Romania accession report », by José Manuel Barroso,
European Parliament, Strasbourg, 26/09/2006.
Discours « Etat de l'Union et avenir de l'Europe », par José Manuel Barosso, Université Catholique
de Louvain, 8/11/2006.
Autres Sources
Euractiv, 27/09/2004, MORSELLI Lorenzo, Are the economics of the new Commission too
Liberal?, (translated by Matthams Kate).
Euractiv, 23/11/2004, L'affaire Barrot prend une tournure juridique.
Euractiv, 16/04/2007, Barroso réclame un nouveau traité européen pour 2009.
46
Blog- http://bruxelles.blogs.liberation.fr / Les coulisses de Bruxelles, QUATREMER Jean,
04/07/2007, Barroso, le portrait qui a déplu.
http://www.actu-
environnement.com/ae/news/climat_barroso_ramusen_reunion_groenland_2899.php4, Article
intitulé : Climat : J. M. Barroso et Fogh Rasmussen se rendront au Groenland, 21/06/2007. Actu-
Environnement
EUROPA
http://ec.europa.eu/commission_barroso/president/focus/eu2007pt/index_fr.htm - Article intitulé:
Une Union plus forte pour un monde meilleur, 29/06/2007.
http://ec.europa.eu/commission_barroso/president/personal/profile/index_fr.htm
http://ec.europa.eu/budget/budget_detail/current_year_fr.htm
http://ec.europa.eu/budget/budget.fr
47
TABLE DES MATIERES
AVANT-PROPOS .............................................................................................................................. 3
SIGLES ET ABRÉVATIONS ........................................................................................................... 4
INTRODUCTION .............................................................................................................................. 5
I/ LA NOMINATION DE JOSÉ MANUEL DURÃO BARROSO ................................................ 8
A) DE PREMIER MINISTRE DU PORTUGAL À PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE..............................81) M. BARROSO UN « MORCEAU » DE DERNIER CHOIX ?.................................................................................82) DÉSERTION DE SA PATRIE DANS UN MOMENT CRITIQUE.............................................................................. 11B) UN INCIPIT DIFFICILE : LE CHOIX DES COMMISSAIRES............................................................................141) BARROSO ET SES COMMISSAIRES: UN CHOIX DISCUTABLE........................................................................... 142) UNE FEMME D’AFFAIRES EN CHARGE DE LA CONCURRENCE : LE CAS NELLIE KROES..................................... 163) UN RÉACTIONNAIRE, HOMOPHOBE ET CONSERVATEUR EN CHARGE DE LA JUSTICE, DES LIBERTÉS ET DE LA SÉCURITÉ : LE CAS ROCCO BUTTIGLIONE....................................................................................................174) LA VALIDATION DU COLLÈGE DES COMMISSAIRES : UN PARI À MOITIÉ RÉUSSI................................................ 195) L’AFFAIRE DE FINANCEMENT DES PARTIS POLITIQUES : LE CAS JACQUES BARROT.......................................... 20C) LES COMMISSAIRES DURANT LEURS MANDATS.......................................................................................211) DES COMMISSAIRES INTENABLES!...........................................................................................................212) 2006 LE RETOUR À LA CASE 2004 : LE CAS VARUJAN VOSGANIAN............................................................21
II – L’ÉCHEC DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE ......................................................... 22
A) AVANT LE 'NON'............................................................................................................................22B) LES CONSÉQUENCES DU « NON »......................................................................................................23C) DES TENTATIVES DE SOLUTION LOUPÉES.............................................................................................. 231) LA PAUSE DE « RÉFLEXION »............................................................................................................... 242) A QUAND LA PÉRIODE D’ACTION ?.........................................................................................................25
III – ELARGISSEMENT : 15 + 10 + 2 = 27 ! ................................................................................ 26
A) LE « NON ! » LIÉ À L'ÉLARGISSEMENT............................................................................................. 27B) DE 15 À 27 : LE DÉBUT DE LA FIN ?...................................................................................................28C) LA DIRECTIVE BOLKESTEIN ET SES CONSÉQUENCES SUR L’ÉLARGISSEMENT.............................................30D) LES CANDIDATS À L'ADHÉSION: LA CROATIE ET LA TURQUIE................................................................30
IV – LES TROIS CHEVAUX DE L’APOCALYPSE : LA STRATÉGIE DE LISBONNE, LE
48
NÉO-LIBÉRALISME ET LE BUDGET 2007-2013 ..................................................................... 31
A) LES NÉGOCIATIONS TENDUES DU BUDGET 2007-2013..........................................................................32B) LA STRATÉGIE DE LISBONNE : UNE UTOPIE IRRÉALISABLE POUR 2010 ?................................................33C) BARROSO L’ULTRALIBÉRAL?..............................................................................................................34
V – GUERRE EN IRAK ET PROBLÈMES ENVIRONNEMENTAUX : LES SOUCIS DE BARROSO ........................................................................................................................................ 34
A) LES RELATIONS AMÉRICO-EUROPÉENNES ET LA GUERRE EN IRAK...........................................................35B) DÉFIS ENVIRONNEMENTAUX................................................................................................................361) M. BARROSO GLISSE DOUCEMENT VERS LA CAUSE ENVIRONNEMENTALE.......................................................362) PARADOXE QUAND TU NOUS TIENS…..................................................................................................... 373) SOMMET DE MARS 2007......................................................................................................................37 ........................................................................................................................................................... 37
CONCLUSION ................................................................................................................................ 38
EPILOGUE ....................................................................................................................................... 40
SOURCES ......................................................................................................................................... 41
PRESSE................................................................................................................................................. 41Belgique..............................................................................................................................................41Canada................................................................................................................................................ 41Etats-Unis........................................................................................................................................... 41France................................................................................................................................................. 42Hongrie............................................................................................................................................... 43Italie....................................................................................................................................................43Lituanie...............................................................................................................................................44Pologne............................................................................................................................................... 44Portugal ..............................................................................................................................................44Royaume-Uni..................................................................................................................................... 44Suède.................................................................................................................................................. 45Suisse..................................................................................................................................................45HEBDOMADAIRE - MENSUEL................................................................................................................... 45AGENCE DE PRESSE............................................................................................................................... 46DISCOURS..............................................................................................................................................46AUTRES SOURCES.................................................................................................................................. 46
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