View
220
Download
0
Category
Preview:
Citation preview
Une sélection proposée par l’équipe du SquareDes romans, des policiers, des textes de voyage,
des essais, des bandes dessinées et des livres pour enfants…
La Gazette du Squareun été 2015
Jessie Burton, Miniaturiste, Gallimard, 22,90 €1686. Petronella n’a que 18 ans quand elle se marie avec Johannes Brandt,
riche commerçant d’Amsterdam. Ce dernier souvent absent, elle se console
avec son cadeau de mariage : la reproduction miniature de sa nouvelle de-
meure. Mais, ce chef-d’œuvre est plus qu’un jouet. Mêlant récit d’initiation,
étude des mœurs et envoûtante fresque familiale, Jessie Burton signe un
roman clair-obscur. Dans un style qui conjugue ingénuité et intelligence,
perfection historique et profondeur poétique ; passant des questionnements intimes aux
scènes publiques, elle englobe tout. Ses mots débordent des canaux et entraînent dans une
entêtante course contre la noyade. Un premier roman palpitant.
Emmanuelle Pagano, Ligne & Fils, POL, 15 € L’eau creuse, taille les paysages et sa puissance emporte tout. Une femme
renoue les fils de son histoire familiale. Une lignée dont le destin est lié à la
force de l’eau, une famille née d’un moulinage, ces moulins des vallées de
l’Ardèche où l’on file la soie. En arpenteuse sensuelle, Emmanuelle Pagano
dit l’intrication des hommes et des lieux qui les font et commence, avec
superbe, une trilogie des rives.
Anthony Doer, Toute la lumière que nous ne pouvons voir, Albin Michel, 23,49 €
Le prix Pulitzer de cette année nous raconte l’histoire de Marie-Laure, petite
fille aveugle contrainte de fuir Paris pour Saint-Malo. Elle s’installe chez
son grand-oncle avec en sa possession un diamant appartenant à la famille
royale de France. À un millier de kilomètres de là, en Allemagne, le jeune
Werner, orphelin, élevé au pensionnat, développe un talent rare pour la
mécanique et les sciences et intéresse rapidement la Wehrmacht bien malgré lui. Mais c’est
à Saint-Malo que Marie-Laure et Werner se rencontreront. Ni vraiment saga historique ni
vraiment enquête policière, ce roman n’est pas sans rappeler une œuvre telle que L’Adieu
aux armes en son temps, une belle simplicité pour un très beau livre.
Peter Schneider, Les amours de ma mère, Grasset, 20 €Peter Schneider a 9 ans lorsque sa mère décède, mais c’est 60 ans plus tard
qu’il découvre qui elle fut vraiment. Lors de déménagements, l’écrivain
n’a eu de cesse de transporter des boîtes à chaussures dans lesquelles
figuraient des lettres de sa mère. Aussi fut-il étonné de constater que
ces lettres étaient des lettres d’amour poignantes adressées à un certain
Andreas, son amant et meilleur ami de son père. Aujourd’hui, Schneider
raconte cette femme qu’il a peu connue. Avec beaucoup de tact et d’amour, le fils ne règle
pas ses comptes, bien au contraire, il retrouve enfin sa mère avec bonheur.
L i t t é ra t u re
Kim Leine, Les prophètes du fjord de l’éternité, Gallimard, 29 €Groenland, fin du xviiie siècle. Morten Pedersen Falck, jeune pasteur qui
se rêvait médecin à Copenhague, se retrouve missionnaire dans le Grand
Nord. Il était admirateur de la philosophie des Lumières et épris de liberté.
Désormais, il se heurte aux autochtones obtus et dépravés. Il s’englue
dans une nature hostile et fétide, où plane l’ombre de La Veuve. La glace
craque et respire. Les hommes s’oublient et se révèlent à eux-mêmes. En
architecte de talent, Kim Leine plonge dans les crevasses intimes, se suspend aux menues
confidences et défie l’abîme. Il sublime l’inexorable : son écriture viscérale s’illumine quand
les âmes se révoltent. Un roman abyssal.
Vincent Almendros, Un été, Minuit, 11,50 €Une croisière sur un voilier dans la baie de Naples. Deux frères, deux
femmes : des combinaisons passées et à venir. Tout se joue en plein soleil
dans le huis clos d’un bateau, ce lieu étriqué, suffocant, glissant au mi-
lieu d’une immensité liquide. Une écriture brûlante, à tordre la tension,
mais qui a la grâce pour chanter la beauté des méduses et suffisamment
d’élégance pour se jouer de nous dans une fin étonnante !
Marie Vieux-Chauvet, Amour, Colère et Folie, Zulma, 11,20 €Haïti sous la dictature de Duvalier. L’île tout entière est assiégée par des
diables menaçants. La maison devient l’unique espace de liberté, mais aussi
un véritable laboratoire de l’apocalypse en germe dans le reste de la société.
Amour, le monologue carbonisé de désir et de haine d’une vieille fille. Colère,
le récit cynique d’une martyre, offerte en pâture jusqu’à en mourir. Folie, le
délire cauchemardesque de trois poètes exécutés. Les trois narrateurs, « araignées noires
tapies dans l’ombre » observent, lucides : il faut accepter la peur ou résister. Marie Vieux-
Chauvet dynamite les cloisons, leurs pensées deviennent cris de révolte. Amour, Colère et
Folie… Et Cataclysme.
Henri Calet, Huit quartiers de roture, le dilettante, 20 € « J’aime ces faubourgs pauvres où il n’y a rien à voir. On croise le mini-
mum de gens, on se sent presque seul, on s’enfonce dans une agréable
mélancolie, au risque d’y perdre pied insensiblement. » Des balades à la
paresseuse, dans un Paris populaire, les XIXe et XXe, comme seul Calet
les composait. Des instants glanés au coin des rues, des images retrou-
vées d’un passé familial. Sourires, tendresse, une phrase à sa propre
suspension pour dire la beauté du rien, c’est toute la magie de Calet, pure et intacte,
offerte dans cet inédit.
L i t t é ra t u re
Julia Székely, Seul l’assassin est innocent, Phébus, 19 €Il y a le père absent et passionné de jeux illicites ; la mère frivole et passion-
née par Monsieur Robert ; la sœur narcissique et passionnée par les révoltes
clandestines. Et puis, il y a le Petit, malingre et innocent, qui n’est passionné
par rien du tout. Cette famille désunie, où chacun a sa voix mais où personne
ne parle, va soudain se réunir autour d’une victime… Dans un décor de plus
en plus abscons, les coïncidences se confondent avec les malentendus et
l’ironie se pare de sarcasme. Avec la précision d’une impressionniste, Julia Székely plonge
alors dans des esprits rongés par l’aplomb et saisit l’indicible. Un roman implacable.
Richard Collasse, Seppuku, Seuil, 21 €
Seppuku ou le roman des violences d’un siècle, qui nous mène du Berlin
des années 1936 à 1945, vu par les yeux d’un enfant d’un médecin nazi,
jusqu’au Japon des années 1960, en passant par le Paris de la Libération et
la guerre de Corée. Une réflexion sur l’écartèlement d’hommes pris entre
engagement personnel et appartenance à l’histoire. Un roman monté ciné-
matographiquement, autour de 35 carnets intimes, terriblement haletant,
jusqu’à son dénouement, bouleversant.
William Saroyan, Papa, tu es fou, Zulma, 7,95 €Pour les dix ans de son fils, Papa lui lègue son dernier roman, Le métier qui va
avec et lui propose de venir vivre avec lui. À la fois fantasque et sérieux, ce
père débrouillard lui enseigne l’essentiel de l’existence : l’écoute de soi-même
mais aussi d’autrui. Du livre à la lune, de la bicyclette à la voiture, de la mer à
la pluie, il égrène alors leur quotidien comme autant d’indices pour y arriver.
S’inspirant directement de son fils, William Saroyan décrypte singulièrement la relation
père-fils. Papa tu es fou, un ouvrage tendre où la réflexion respectueuse tutoie la perplexité
poétique, et où le rire franc sublime tout.
Nikos Kazantzaki, Alexis Zorba, Cambourakis, 24 €Le mythique Alexis Zorba réédité. Plus qu’un roman, ce texte est à lui seul
un hymne à l’homme libre. Lorsqu’un jeune homme érudit, studieux
rencontre Alexis Zorba dans un café dans le port du Pirée, c’est sa vie qui
s’en trouve bouleversée ad vitam aeternam. Pendant cinq années, ils ne
se quitteront plus, parcourant l’Europe entière, mentor et élève feront
de leur parcours hédoniste une philosophie de vie malgré les épreuves.
Chef-d’œuvre lumineux, grand livre du xxe siècle porteur d’envies et de joies, à lire, relire,
s’en imbiber à outrance toute sa vie durant.
L i t t é ra t u re
Kelly Dowland, Jackie, Sabine Wespieser poche, 7 €Jackie, Grand’ma, a cent un ans. Elle veut mourir mais elle n’y arrive pas.
Depuis dimanche, elle a une embolie pulmonaire. Alors Kelly, sa petite-fille,
a décidé d’écrire jusqu’au bout, jusqu’à ce qu’elle « ferme les yeux. Et clac.
Elle est off. OFF ». Malgré la situation, cette blonde excentrique n’en perd pas
pour autant son humour ravageur. Passant en revue souvenirs, anecdotes quotidiennes et
réflexions plus ou moins métaphysiques, elle croque son entourage. D’une plume impé-
tueuse, elle épingle toutes leurs vertus. D’un ton plein d’empathie, elle détrône leurs travers.
Un récit qui aurait pu faire pleurer, mais qui fait mourir de rire !
Wallace Stegner, Lettres pour le monde sauvage, Gallmeister, 22 €Il est un des très grands écrivains américains, son influence sur la littérature
américaine de la seconde moitié du xxe siècle est considérable. On compren-
dra pourquoi en lisant ce livre, fait de textes courts bouleversants. Une lettre
à sa mère poignante, et des thèmes chers à l’écrivain, la route, les arbres,
la dignité humaine. Son écriture classique si belle, toute en humilité, force
l’admiration tant par la forme que par le fond. En plus de ce recueil, il est
vivement conseillé d’emporter Vue cavalière et La vie obstinée, deux romans indispensables
disponibles en format de poche.
Paula Hawkins, La fille du train, Sonatine, 21 €Depuis le train qu’elle prend chaque matin, une fille observe le jardin d’un
pavillon de banlieue et le couple qui y vit. Mais un jour la femme dispa-
raît, sa photo fait la une de tous les journaux. La fille qui observe c’est
Rachel, celle qui a disparu, Megan. Elles ne se sont jamais rencontrées,
pourtant Rachel pourrait bien être mêlée à la disparition de Megan. Un
premier roman parfaitement maîtrisé dans lequel Paula Hawkins nous en-
traîne dans la chute vertigineuse de son héroïne. Un thriller idéal pour les vacances, nuits
blanches garanties !
Olivier Barde-Cabuçon, Humeur noire à Venise, Actes Sud, 22 €Avec Humeur noire à Venise, Olivier Barde-Cabuçon poursuit les aventures
de Volnay dit « le commissaire aux morts étranges ». C’est à Venise que
Volnay est attendu, à la demande de son ancien amour Chiara, pour éviter
le meurtre d’un comte alors que sous les ponts vénitiens trois cadavres sont
retrouvés pendus. C’est une ambiance singulière et prenante qui règne dans
ce roman policier dont La Sérénissime du XVIIIe est la véritable héroïne.
Po l i c i e r s
L i t t é ra t u re
Mike Nicol, Du sang sur l’arc-en-ciel, Seuil, 22,50 €Le Cap, Fish Pescado, détective privé, accepte d’enquêter sur la mort d’un
jeune homme dans une course de voitures illégale. Cette affaire met en
cause l’ex-directeur de la police nationale qui possède encore des relations
pour étouffer l’histoire. La tâche du détective s’avère plus que délicate,
voire impossible. L’objectif de Mike Nicol est bien de nous décrire une
Afrique du Sud post-apartheid toujours aussi pauvre, violente et corrom-
pue. Un très très bon polar.
Jake Hinkson, L’enfer de Church Street, Gallmeister, 15 € Un étrange marché. Au braqueur qui l’agresse sur un parking, Geoffrey
Webb propose 3 000 dollars en échange de cinq heures de route vers
l’Arkansas. Il ne souhaite qu’une seule et unique chose, se confesser,
libérer son esprit. Roman noir, cynique et drôle, L’Enfer de Church Street est
un petit ovni dans le genre polar, qui trouvera sa place dans le domaine
inclassable mais indispensable.
Dolores Redondo, De chair et d’os, Mercure de France, 25,50 €C’est un vrai thriller glaçant et impossible à lâcher qui nous est proposé ici.
L’inspectrice de Pampelune Amaia Salazar doit faire face à des meurtres à
caractère sexuel commis sur des femmes. Si tout porte à croire à la culpa-
bilité de leurs maris, des rituels macabres orientent l’enquête dans une
autre direction, celle d’un tueur en série. Ingrédients classiques et déjà lus
pourrait-on croire, mais Dolores Redondo est douée et subtile. Son roman
est passionnant, fascinant même. La traque menée par son personnage devient addictive
pour nous lecteurs, gage d’une vraie réussite.
Ian Manook, Les temps sauvages, Albin Michel, 22 € Sale temps pour l’inspecteur Yeruldelgger ! Pris au piège de ce qui ressemble
fort à un complot, il est accusé du meurtre de son ancienne indic, alors que
ses coéquipiers doivent enquêter sur des morts étranges survenues dans la
steppe. D’Oulan-Bator – capitale de la Mongolie asphyxiée par la pollution et
la corruption – au port du Havre – lieu de trafics en tous genres - en passant
par la Chine et la Russie, Ian Manook nous embarque dans une aventure
glaçante et palpitante. Un polar original qui rafraîchira votre été.
Po l i c i e r s
Paolo Rumiz, Le phare, voyage immobile, Hoebecke, 16 €Habitué des voyages au long cours – on se souvient de sa descente du Pô
et de son périple sur les traces d’Hannibal –, Paolo Rumiz, grand reporter
au quotidien La Repubblica, nous embarque cette fois-ci sur une île. Il y
partage un phare avec ses deux gardiens. Loin de la frénésie de Trieste, sa
ville natale, l’écrivain a décidé de s’offrir une cure de solitude. Dans l’esprit
de Pessoa et de son Voyage immobile, Paolo Rumiz observe et pense notre
monde, la mer, les oiseaux, les tempêtes et les instants précieux comme
celui d’un risotto partagé. Mêlant contemplation et érudition, on plonge en un récit plein
de tendresse pour ce qui nous entoure et nous habite. De la sorte, l’écrivain nous invite
à nous retrouver, à nous déconnecter et à nous écouter. Avec ce nouveau recueil, Paolo
Rumiz vient de recevoir le prix Nicolas Bouvier 2015 décerné lors du festival Étonnants
Voyageurs de Saint-Malo.
Pierre Cendors, L’invisible dehors, Isolato, 18 €Pierre Cendors décide au printemps 2011 de s’envoler vers l’Islande.
« J’ignorais ce qui m’attendait là-bas. Comme Martin Buber, je pourrais
écrire aujourd’hui : tous les voyages ont des destinations secrètes dont le
voyageur n’a pas conscience. » Pendant un mois, il marche en direction
du nord, et très vite il est emporté dans un ailleurs. « Certains lieux sur
terre coïncident avec les contrées sauvages de l’esprit. » De cette marche
sans but est né ce carnet, à la fois voyage intérieur et poème du chemin. À sa lecture, on
est happé par une langue du vide, traversé par un temps inépuisable, et bousculé par des
rencontres. L’invisible dehors possède le souffle du grand large, la beauté du chaos sauvage et
ainsi nous est donnée la chance de « retrouver avec l’errance un souffle-source » où l’homme
et le cosmos, où le dedans et le dehors ne font plus qu’un.
Joël Vernet, Nous ne voulons pas attendre la mort dans les maisons, Zoé, 5 €
Ce court et délicieux texte est un véritable manifeste pour les chemins
buissonniers, une invitation à la curiosité, à arpenter le monde. Non pas
celui des musées et autres lieux touristiques, mais celui des « sentes
étroites du bout du monde », celles qui partent derrière les terrains va-
gues. L’auteur nous raconte l’appel de cet ailleurs dès son plus jeune âge.
Il nous parle de ces voyages qui nous arrachent à notre propre langue, « nous obligent à ne
plus entendre que la musique chantante de la langue étrangère ». Éloge de la vie nomade,
de l’insouciance qui, loin des salons de cuir, permet d’ouvrir, « de pousser la porte et d’aller
voir ailleurs le tremblement de toute vie ».
Te x t e s d e voyag e
Bertrand Vergely, La tentation de l’homme-Dieu, Le Passeur, 15 €Bertrand Vergely s’interroge sur notre société qui semble refuser la notion de limite et se
caractériser par le règne sans partage de l’illimité. De ces fantasmes et de cette démesure,
il pointe les effets dramatiques. À ses yeux, le règne de l’illimité est un triple refus. Refus de
la mort, refus de la naissance naturelle et de la différence sexuée et enfin refus
du risque. La fabrication de l’homme-Dieu passe donc par l’asservissement
à l’illimité, mais aussi à ce que prévalent en toutes circonstances l’égalité et
la sécurité. Or le monde pensé ainsi lui semble être une manière de céder au
nihilisme et au désespoir, et par conséquent c’est un monde qui ne peut que
devenir un théâtre de cruauté. Bertrand Vergely insiste donc sur le besoin d’un dieu fait
homme, ainsi que sur son humilité pour retrouver un sens à nos limites.
Pierre-Henri et François Tavoillot, L’abeille et le philosophe, Odile Jacob, 23,90 €De toutes les époques, les philosophes ont cherché dans la ruche les réponses à leurs interro-
gations, les secrets de la nature et les articulations de la culture. La ruche a toujours fasciné
par son organisation. Les anarchistes y voient le symbole d’une organisation
coopérative parfaite, les marxistes l’utilisent pour montrer la spécificité du travail
humain, les libéraux, on se souvient de La Fable des abeilles de Bertrand Mandeville,
s’en inspirent pour montrer les vertus de l’abeille politique, et en particulier
comment la prospérité d’une nation vient rarement de ses qualités morales.
Bref, « l’abeille a toujours été perçue comme une sorte de miroir de l’humanité et comme le
baromètre de son destin ». Située à de multiples carrefours (animal/végétal, nature/culture,
sauvage/domestique), elle n’en finit pas de nous piquer de curiosité et d’intérêt.
Benjamin Stora, Les clés retrouvées, Stock, 17 €Les clés retrouvées ou une mémoire retrouvée, la part de Maghreb, d’Orient que
les juifs d’Algérie ont oubliée ou effacée après leur exil en France en 1962. Dans
un récit intime magnifique, celui de son enfance à Constantine, Benjamin Stora
transmet par les sens, la cuisine, les odeurs, la chaleur, ce que fut la culture juive
algérienne – une vie prise entre l’Orient et la passion républicaine. Se dessine alors un monde
disparu, pluriel, celui de Constantine, où juifs et musulmans partageaient la même langue…
Frank Westerman, La vallée tueuse, Bourgois, 20 €D’abord un fait. Un jour de l’été 1986, dans une vallée perdue au Cameroun,
hommes et animaux meurent soudainement. Aucune trace de destruction,
seul bouleversement, les eaux d’un lac qui ont baissé et sont devenues rouges.
Un fait demeuré inexpliqué. Dans une formidable enquête, Frank Westerman
convoque toutes les explications que les hommes ont déployées, science,
mythes, croyances. Comment faire pour remettre de l’ordre dans un monde qui nous dépasse ?
E s s a i s
Frantz Duchazeau, La main heureuse, Professeur Cyclope, 17 €
L’adolescence est un âge où la vie n’attend pas ! Alors oui, Frantz et Mike
vont sécher les cours et parcourir 100 km sur une vieille mob pourrie
pour aller voir LE concert de la Mano Negra à Bordeaux. De pannes en
déconvenues, la chance finira par leur sourire et une chose est sûre, ils ne
regretteront pas le voyage ! Avec cet album tout droit sorti de sa mémoire,
Duchazeau confirme son talent unique pour raconter et surtout dessiner la musique.
Nicolas de Crécy, La république du catch, Casterman, 20 €Il fallait un nouveau défi à Nicolas de Crécy pour reprendre le chemin
de la bande dessinée, et c’est au Japon qu’il l’a relevé. Pendant un an,
il s’est astreint au rythme de travail effréné des mangakas en publiant
25 planches par mois pour la revue nippone Ultra Jump. Le résultat :
un album hybride qui mêle l’univers étrange, peuplé de monstres at-
tachants, de l’auteur et polar ultra-noir où les mafieux font la loi. Pari
osé et retour au 9e art réussi pour Nicolas de Crécy !
Joël Alessandra, Petit-fils d’Algérie, Casterman, 19 €Fils et petit-fils de pieds-noirs, Joël Alessandra a toujours entendu parler
de l’Algérie mais n’y était jamais allé. Pour comprendre qui était sa famille
et le déracinement qu’elle a vécu au moment de l’indépendance, il s’est
donc rendu à Constantine et nous livre un carnet de voyage intime où se
mêlent photos d’archives et sublimes aquarelles.
Marion Montaigne, Bizarrama culturologique, Delcourt, 16,50 €
Les sept péchés capitaux, le Père Noël, l’Australie ou encore DSK, décidé-
ment Marion Montaigne ne recule devant rien pour étancher notre soif de
connaissances tout en nous faisant rire. Un inventaire loufoque, intelligent
et décalé par l’auteure de Tu mourras moins bête.
Jirô Tanigushi, Elle s’appelait Tomoji, Rue de Sèvres, 17 €
À travers cet hommage qu’il rend à Tomoji Uchida, fondatrice du temple
bouddhiste qu’il fréquente avec sa femme, Jirô Tanigushi signe là une ma-
gnifique et bouleversante chronique familiale dans la campagne japonaise
des années 1920.
B a n d e s d e s s i n é e s
Anne Kövecses, Tant et tant de choses…, Seuil jeunesse, 15,90 €, dès 2 ans
Voici un imagier plein d’entrain et de fraîcheur qui sait éviter le côté
austère et trop pédagogique du manuel d’alphabétisation pour la toute
petite enfance. Grâce à un petit jeu de « cherche et trouve », à des ques-
tions simplement posées et à la fantaisie d’illustrations aux tonalités
joyeuses et dynamiques, l’enfant aura plaisir à feuilleter et reconnaître
les scènes de sa vie quotidienne. Un graphisme faussement naïf qui joue sur des effets
de contraste et qui permet au très jeune lecteur d’avoir entre ses mains un véritable
petit trésor.
Nadine Brun-Cosme, Olivier Tallec, Moi devant, Père Castor, 13,50 €, à partir de 4 ans
Trois amis, Léon le grand, Max le second et Rémi le petit. Trois compères
qui marchent en file indienne en ordre décroissant. Mais un jour, Max
veut voir le monde de ses propres yeux et pour cela passer devant… Une
belle histoire contée par Nadine Brun-Cosme qui parle d’émancipation et
d’amitié avec des personnages délicats et cocasses, et sublimée comme toujours par les
crayonnés et pastels lumineux d’Olivier Tallec.
Cléa Dieudonné, La Mégalopole, L’Agrume, 16 €, à partir de 6 ans
C’est l’histoire d’un extraterrestre ou plutôt d’un « ambas-
sadeur » qui vient visiter La mégalopole. Il est accueilli à
bras ouverts et on part avec lui à la découverte de cette
immense ville. Tout l’attrait de cet album tient dans son
originalité puisqu’on déplie ses pages en accordéon, à la verticale, jusqu’à obtenir une frise
dessinée de 3 mètres ! Les petits lecteurs se régaleront à observer les mille détails de cet
album atypique et coloré, dans lequel l’auteure a mis tout son talent !
Murielle Szac, Le feuilleton d’Ulysse, Bayard jeunesse, 19,90 €, pour tous les enfants et leurs parents
Après Hermès, Thésée, Muriel Szac poursuit sa lecture, réécriture de la my-
thologie grecque et nous emmène cette fois-ci dans les voyages d’Ulysse.
Cent épisodes envoûtants conçus pour une lecture à voix haute, où les
aventures épiques d’Ulysse se succèdent sans répit et laissent un audi-
toire captivé. Merveilleuses et pleines d’esprit, les histoires éclatent par leurs nuances et
leur poésie. La rencontre d’un mythe et d’une conteuse exceptionnels.
Je u n e s s e
Éric Sanvoisin, Olivier Latyk, Le buveur de dictionnaires, Nathan, 5,70 €, de 7 à 9 ans
Le jour où Odilon cède à la tentation de « boire » un mot intrigant du dic-
tionnaire, une joyeuse pagaille s’installe dans son langage. Seule solution,
demander de l’aide à son tonton Draculivre et rendre visite à l’étrange
orthopailleur. Une aventure réjouissante, des jeux de mots désopilants,
tous ces ingrédients du sixième opus de la série du Buveur d’encre procurent une lecture
pleine d’humour et de malice.
Françoize Boucher, Le livre qui t’explique tout sur les copains, Nathan, 10,90 €, à partir de 8 ans
Après avoir expliqué avec succès à nos chers bambins comment fonction-
naient les parents, les relations fille-garçon, les livres et même le bonheur,
Françoize Boucher s’attache cette fois-ci à leur parler d’amitié. Au fil de
petites mises en scène désopilantes, questionnaires, vignettes explicatives,
toutes les interrogations concernant les relations difficiles, fusionnelles
et même envahissantes entre copains seront évoquées, décryptées et parfois résolues. La
mise en page au graphisme et aux couleurs psychédéliques donne, sans aucun doute, à ce
petit ouvrage un air de bonne humeur.
Caroline Carlson, La très honorable ligue des pirates (ou presque), Bayard jeunesse, 13,90 €, de 10 à 12 ans
Que faire quand on est une demoiselle de bonne famille, descendant de
l’amiral Westfield, amiral dans la marine royale, et que son vœu le plus cher
est d’intégrer la « très honorable ligue des pirates » ? C’est pourtant ce que
va tenter Hilary en s’enfuyant de l’institution pour jeunes filles vertueuses
avec dans ses bagages sa confidente et amie Garg, une gargouille versatile et magique.
Voici un avant-goût du premier tome de cette pétillante et pittoresque aventure marine.
Le ton léger, l’humour constant et le rythme rapide font tout le charme de cette trilogie
plaisante et facile à lire.
Susin Nielsen, On est tous faits de molécules, Hélium, 14,90 €, à partir de 13 ans
C’est l’histoire d’une famille qui se recompose, Stewart et son père s’ins-
tallent avec Ashley et sa mère. Lui est un jeune surdoué de 13 ans un peu
simplet et d’apparence fragile, elle une adolescente populaire et d’appa-
rence imperturbable. C’est l’histoire d’une famille où les apparences sont
trompeuses. Les éléments du puzzle, mis en place dès le début de ce roman
à deux voix, se recomposent peu à peu pour donner une histoire attachante qui parle de
justice et de tolérance, de solitude et d’amitié, de cruauté et de tendresse. Une réussite.
Je u n e s s e
Sur nos murs cet été, deux expositions :
• avec le concours des éditions du Seuil, des photographies du projet France(s) territoire liquide. 30 ans après la mission de
la Datar, une exploration collective, multiple, du paysage. Comme le présente J.-C. Bailly, « métaphoriser le territoire
par la liquidité, c’est affirmer la possibilité de secouer les perceptions qui ont cours » ;
• et avec les éditions Noir sur Blanc, des reproductions du catalogue de l’exposition Les Cahiers dessinés, ou le choix
subjectif et amoureux d’un œil, celui de Frédéric Pajak.
© D
R
Horaires d’été du 6 juillet au 29 aoûtdu mardi au samedi
10 h -13 h | 14 h -19 h
2 place Dr Léon Martin 38 000 GRENOBLET 04 76 46 61 63 www.librairielesquare.fr
Recommended