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Faculté de théologieet de sciences religieuses
SCR-1000 [SCR-16968]INTRODUCTION À L’ÉTUDE DES RELIGIONS
Module 2
Les religions amérindiennes
André Couture, PhD
5/17/2018 Module 2 AmerindiensDV - slidepdf.com
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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Table des matières
Objectifs d’apprentissage .................................................................................................................... 3
Marche à suivre suggérée pour ce module ........................................................................................ 3
Selon vous… ......................................................................................................................................... 4
Introduction ......................................................................................................................................... 5
1. Remarques concernant la nature des religions amérindiennes .............................................. 6
1.1 Des religions traditionnelles? ................ ........... .......... ........... ........... .......... ........... ........... . 6
1.2 Des religions primitives? .......... ........... .......... ........... .......... ........... .......... ........... .......... ...... 7
1.3 Des religions animistes? ........... ........... .......... ........... ........... .......... ........... ........... .......... ..... 8
1.4 Des spiritualités? .......... ........... .......... ........... .......... ........... .......... ........... .......... ........... ..... 10 2. Autres difficultés soulevées par l’étude des religions amérindiennes ................................. 11
2.1 Une grande diversité culturelle et linguistique................................................................. 11
2.2 L’absence de textes écrits .......... ........... ........... .......... ........... ........... ........... ........... .......... . 12
2.3 L’absence d’institutions séparées pour la religion ........... ........... ........... ........... ........... .... 12
2.4 Une culture religieuse ouverte aux innovations ............................................................... 13
2.5 Une inévitable approximation .......................................................................................... 14
3. Les cosmologies amérindiennes : à la limite de la croyance et de la raison ....................... 15
3.1 Une vue d’ensemble des cosmologies amérindiennes ...................................................... 15 3.2 Qu’est-ce qu’une cosmologie? ......................................................................................... 15
3.3 L’animisme : une façon originale de concevoir le monde ........... ........... ........... ............ .. 16
3.4 La place des héros culturels .......... ........... ........... ........... .......... ........... ........... ........... ....... 20
4. Le chamane et son rôle social .................................................................................................. 20
5. Des rituels particuliers pour construire une harmonie bien spécifique.............................. 22
6. Conclusion ................................................................................................................................ 23
Exercices ............................................................................................................................................. 24
Livres cités (dans l’ordre où ils apparaissent dans le texte) ........................................................... 26
Bibliographie ...................................................................................................................................... 27
Corrigé du « Selon vous… » ............................................................................................................. 28
Corrigé des exercices ......................................................................................................................... 29
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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Objectifs d’apprentissage
À la fin de ce module, vous serez en mesure :
de critiquer les appellations de « religions traditionnelles », de « religionsprimitives » et de « religions animistes » pour parler des religionsamérindiennes;
de distinguer la spiritualité amérindienne des religions amérindiennes;
d’expliquer ce que l’on entend par « cosmologie amérindienne »;
d’expliquer ce qu’est un chamane;
de décrire quelques rituels amérindiens.
Marche à suivre suggérée pour ce module
Répondez d’abord aux questions « Selon vous… » et comparez vos réponses avec celles du
corrigé des Selon vous… à la fin du module.
Lisez l’introduction et le point 1 du module, ainsi que le complément qui se trouve auxpages 32-38 de Sur la piste des dieux [SPD].
Lisez les points 2 à 5, ainsi que les passages de SPD et les textes du Recueil, tel qu’indiqué.
Relisez ensuite l’ensemble des pages 53-72 de SPD.
Faites les Exercices à la fin du module 1, puis vérifiez votre compréhension de la matière enconfrontant vos réponses aux réponses du corrigé, à la fin du module.
Note : Les pages 39-51 de SPD portent sur les religions d’Afrique noire et sont facultatives;elles nous apporteraient un complément d’information sur les religions ethniques.
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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Selon vous…
1. Les religions amérindiennes sont-elles des « religions traditionnelles »?
2. Est-il légitime de parler de « religions animistes » pour désigner les religions
amérindiennes?
3. Quelles sont les difficultés que peut soulever l’étude des religions amérindiennes?
4. Qu’est-ce qu’une cosmologie?
5. Qu’est-ce qu’un chamane?
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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Introduction
Le but de ce module est d’illustrer ce que sont les religions à portée ethnique en présentant
un cas particulier, celui des religions amérindiennes. Dans la première édition de Sur la
piste des dieux (SPD), j’avais choisi de présenter uniquement les religions d’Afrique Noire.
Je vous encourage à lire ce chapitre, qui couvre les pages 39 à 51 de ce livre et qui vous
permettra d’élargir vos connaissances. Ces pages ne font toutefois pas partie de la matière
du cours.
Dans le cadre du cours, vous aborderez les religions amérindiennes, ou mieux l’univers des
religions amérindiennes. J’utilise évidemment le terme de « religion » de façon analogique,
et surtout comme un repère permettant d’attirer l’attention sur un certain nombre de réalitésfaisant partie intégrante de la vie de ces communautés. La religion ne désigne pas ici une
réalité à part, mais parfaitement intégrée à la vie de tous les jours. Nous y reviendrons. Les
explications que vous trouverez à la suite vous renverront régulièrement aux textes du
Recueil ainsi qu’au chapitre que j’ai consacré à la religion huronne-wendate dans la seconde
édition de SPD (p. 53-72).
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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0B1. Remarques concernant la nature des religions amérindiennes
Face aux religions à portée ethnique, nous nourrissons souvent à notre insu un certain
nombre de préjugés. Nos ancêtres européens sont venus sur le continent nord-américain en
conquérants et ont colonisé bon gré mal gré la région. Depuis quelques siècles, nous avons
l’impression d’être chez nous ici, alors que les nations amérindiennes affirment à grands cris
qu’elles étaient les premiers occupants avant d’avoir été conquises et parquées dans des
réserves. Le discours politique, social, économique, religieux de la majorité des Québécois
comme des Canadiens laisse encore trop souvent entendre que les Européens ne pouvaient
pas ne pas intervenir pour « sauver » ces peuples de leur ignorance, de leur incapacité, de
leur dénuement.
Il faut également être conscient qu’une certaine anthropologie et qu’une certaine histoire des
religions sont nées dans un contexte colonial et sont venues, comme malgré elles, justifier
« scientifiquement » une situation politique qu’une grande majorité d’Européens du 19 e
siècle n’était pas prête à remettre en cause. Les appellations de « religions traditionnelles »,
de « religions primitives », de « religions animistes », par lesquelles on désigne souvent cet
ensemble de religions, cachent en fait des affirmations qui sont pour le moins discutables.
Pour des raisons tout à fait différentes, l’appellation de « spiritualité amérindienne », qui
peut à certains égards paraître très positive, ne me semble pas non plus acceptable dans le
cadre de ce cours.
6B1.1 Des religions traditionnelles?
Le mot « tradition » peut s’employer dans deux sens diamétralement opposés. Pour les uns,
la « tradition », c’est ce que l’on se « transmet » (du latin tradere, transmettre) de génération
en génération, comme des légendes, des rites, etc. Pour les autres, la « tradition », c’est
plutôt ce qu’on ne remet jamais en cause, ce que l’on admet sans réfléchir, ce qui est vieux
jeu, dépassé.
Il est évidemment possible d’utiliser l’appellation de « religions traditionnelles » dans un
sens positif. Les religions amérindiennes sont alors traditionnelles parce que leurs croyanceset leurs rites concernant le monde invisible font partie des traditions qui se transmettent à
chaque nouveau membre du groupe. Mais alors, est-ce là un terme qui permet de spécifier
les religions amérindiennes en tant que telles? Toute religion repose sur une « certaine »
tradition. Parler des religions amérindiennes comme étant traditionnelles ne dit d’elles rien
qui ne s’applique qu’à elles. C’est tout simplement répéter une généralité. En fait, le plus
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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souvent, quand on parle de « religions traditionnelles », ce qu’on veut dire, c’est bien plutôt
que ces traditions sont naturellement figées, statiques, incapables d’évoluer (voir SPD 32-
33). Les religions amérindiennes sont au contraire ouvertes aux innovations, comme on le
verra au point 2.4.
7B1.2 Des religions primitives?
Le mot « primitif » n’est pas, en soi, négatif. Je vous conseille de consulter immédiatement
votre dictionnaire au mot « primitif » pour vous rendre compte des virtualités de ce terme.
On parle de l’Église chrétienne primitive au sens de l’Église telle qu’on la trouvait au début
de la chrétienté et qui a donné naissance aux communautés les plus diverses. En grammaire,
les temps primitifs d’un verbe sont ceux à partir desquels sont formés les autres temps. Une
langue primitive est une langue mère, première, une langue dont d’autres langues sontdérivées. Mais on parle également de « sociétés primitives » au sens de celles qui n’ont pas
encore franchi la révolution industrielle amenée par le progrès des sciences en Europe aux
17e et 18e siècles. On préfère maintenant parler de sociétés préindustrielles. Les sociétés que
l’on qualifie de primitives sont ordinairement peu étendues et en relatif isolement; elles
subsistent de chasse, de pêche, d’agriculture; elles ne connaissent pas l’urbanisation et la
stratification sociale plus complexe qu’elle suscite. Ce sont habituellement des sociétés sans
écriture et donc sans texte écrit. S’il est vrai que le terme « primitif » peut avoir un contenu
objectif, on a aujourd’hui tendance à l’éviter en raison des harmoniques négatives qu’il
véhicule. Parler d’un peuple primitif, c’est en fait presque toujours vouloir dire qu’il est
arriéré et attardé. On dit le plus souvent d’une religion qu’elle est primitive pour soulignerl’indigence où celle-ci se trouve en matière de croyances et de pratiques et pour affirmer la
supériorité d’une autre religion que l’on souhaite promouvoir.
Par-delà son contenu objectif, le terme « primitif » a parfois voulu sous-entendre que
certains peuples n’avaient pas encore accédé à la pensée rationnelle et donc qu’ils se
laissaient guider uniquement par l’émotion et les sentiments. Dans La Pensée sauvage,
l’anthropologue Claude Lévi-Strauss a bien montré qu’il pouvait exister une « pensée »
spontanée ou sauvage par opposition à une « pensée » cultivée ou domestiquée en vue d’un
meilleur rendement. Même si elle utilise des symboles moins économiques que les symboles
mathématiques et algébriques, une telle pensée sauvage n’est pas moins rationnelle. Les
religions qui se construisent dans un tel environnement et qui visent entre autres l’harmonie
cosmique n’en sont pas moins des témoignages éloquents des capacités de la raison
humaine.
On peut finalement noter la tendance à remplacer aujourd’hui « primitives » par
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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« premières », comme dans « premières nations » ou « religions premières » (en fait, une
traduction de l’anglais primal). Le terme « premières » a l’avantage d’insister sur la
chronologie et d’éviter les connotations négatives du mot « primitives ». Il ne spécifie pas
suffisamment à mon avis les utilisateurs de ces religions et reste trop vague. Voir SPD 33-
35.
8B1.3 Des religions animistes?
« Animistes » est le terme toujours utilisé dans beaucoup de livres généraux et de travaux de
statistiques pour désigner les religions des premières nations américaines. Statistique
Canada utilise plus judicieusement « Religion amérindienne et inuit ». Le terme
« animisme » est une invention de l’anthropologue anglais Edward B. Tylor (1832-1917),
qui a publié plusieurs grands essais de synthèse, en particulier Primitive Culture (Londres,Murray, 1871). Même si Tylor « voulait montrer que la religion primitive était rationnelle,
qu’elle découlait d’observations, si insuffisantes fussent-elles, et de déductions logiques
qu’on en faisait, si erronées fussent-elles, enfin qu’elle constituait une ébauche de
philosophie de la nature » (E. E. Evans-Pritchard 1971 : 33), ses réflexions s’inscrivent dans
une perspective évolutionniste aujourd’hui dépassée.
Pour vous faire une idée de cette théorie, vous lirez le résumé qu’en a fait Jean Poirier dans
son Histoire de l’ethnologie (Recueil de textes). Le schéma qui suit vous aidera à mieux
saisir les grandes lignes de cette typologie et la place qu’y occupe l’animisme (Figure 1).
Il devrait maintenant apparaître clairement que parler des religions amérindiennes, des
religions africaines ou de quelque autre religion que ce soit, comme de religions animistes,
c’est bel et bien faire de leurs adeptes des « attardés » qui n’en sont qu’à la première étape
de leur développement religieux. C’est, inconsciemment bien sûr, poser un jugement de
valeur qui va dans le sens de la phrase de Dominique Zahan que j’ai placée en exergue de la
première partie de SPD, p. [25]. Sans que l’on s’en rende compte, en utilisant une telle
appellation, on accepte un certain jeu de pouvoir qui date de la période coloniale. En
m’inspirant de Philippe Descola, j’utiliserai cependant le mot « animisme » dans un tout
autre sens dans la suite de cette présentation. Il ne faudrait pas confondre ces utilisations.
Lire SPD 34-38; d’autres remarques suivront au point 3.3.
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Animisme Après la découverte dans le sommeil de l’existence d’un principe dconscience dans le rêve que l’âme est un double de l’être, les humque tous les êtres qu’ils voient en rêve possèdent une âme.
Culte desancêtres ou
mânes
L’animisme ouvre la voie au culte des ancêtres, i.e. de certaines âmes humaines plus puissantes que les leur rende un culte.
Cultes depossession
C’est également l’animisme qui expliquerait l’aptituprendre possession de certains vivants. Le fétichismde certaines âmes ou esprits à s’incarner dans des ob
Polythéisme En évoluant, l’animisme conduit à la croyance en delune, vent, orage, feu, etc.). Ces divinités ont souventendance à s’organiser en panthéon.
Divinitéséthiques
Les divinités du polythéisme finissent par se spirituamorales : dieux de la guerre, de la paix, du bien, du de l’amour, etc.
Monothéisme La découverte d’un dieu unique apparaît comme l’ureligieux.
Figure 1 : L’animisme et l’évolution des religions d’après Tylor
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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9B1.4 Des spiritualités?
On a pris l’habitude depuis quelques décennies de se référer aux religions amérindiennes par
l’appellation de « spiritualité amérindienne ». Dans un article se proposant de faire le bilan des
recherches thématiques sur les Amérindiens, Gabriel Lefebvre parle même d’un certain tabou
concernant le mot « religion », que l’on n’ose pas vraiment utiliser. Il donne les explications
suivantes :
Pour désigner la religion en dehors de ses cadres institutionnels ou de ses expressionsapparentes, le terme « spiritualité » a été de plus en plus préféré. Le mouvement ne vientcependant pas de la recherche qui aurait trouvé là un terme plus juste, maisvraisemblablement plutôt d’une culture désireuse de retrouver sa dimension « religieuse »sans avoir à recourir à cette manière encore problématique de la désigner. Il est en tout casdifficile, à travers l’examen des diverses publications dans le domaine de la recherche sur
les Amérindiens, de déterminer une motivation d’ordre épistémologique au fait de préférerle terme « spiritualité » à celui de « religion ». Ainsi, lorsque Louise Fournel (1993) [« ArtMohawk 92 : spiritualité de l’art amérindien », Religiologiques 6, p. 223-243] écrit, dansun numéro de Religiologiques consacré aux traditions amérindiennes, sur la dimension« spirituelle » de l’art amérindien, ou quand Michel Noël (1997) [« L’animal généreux : leregard de l’Amérindien », Cap-aux-Diamants, 51, p. 10-13] décrit la relation entre lanature et les Amérindiens comme étant « spirituelle », le terme semble synonyme de« religieux ». Achiel Peelman (1995), invité à faire le bilan de la situation amérindiennedans une revue à plus large public que les périodiques spécialisés, Présence Magazine [4,24, p. 3-4, article intitulé « L’avenir amérindien du Canada »] y parle de la « spiritualité »des Amérindiens. (Lefebvre 2001 : 28-29)
Dans l’article liminaire d’un numéro de Recherches amérindiennes au Québec consacré aux
phénomènes religieux chez les Amérindiens, Joëlle Rostkowski a résumé ainsi le sens desrevendications qui se cachent sous ces prétentions spirituelles : « À travers les expressions
contemporaines de spiritualité, les Indiens [Amérindiens] s’efforcent d’affirmer leur identité
menacée, de défendre leur mémoire collective, de définir les contours de leur résistance à
l’uniformisation et à la mondialisation » (2000 : 7). S’il est exact que l’utilisation du terme
« spiritualité » pour parler des « religions amérindiennes » est liée à une recherche d’identité tout
à fait légitime, cela veut également dire que l’on se trouve alors dans le domaine de la rhétorique
(i.e. des moyens de persuader les autres de la qualité de ses valeurs), et non dans celui de
l’analyse scientifique des religions. Autrement dit, quand les Amérindiens d’aujourd’hui parlent
de « spiritualité », c’est parce qu’ils refusent implicitement une certaine « religion » qui a pudevenir pour eux une sorte de carcan insupportable et qu’ils veulent affirmer aux yeux de tous
qu’ils détiennent eux aussi des valeurs spirituelles tout à fait valables.
Choisir dans un cours d’introduction à l’étude des religions de parler des « religions
amérindiennes », c’est se donner un outil de recherche permettant d’examiner non seulement la
dimension d’expérience spirituelle des religions amérindiennes, mais également leurs dimensions
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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mythique, doctrinale, éthique, rituelle, sociale (revoir le Module 1, Point 3.2 et 3). Du point de
vue qui est celui de ce cours d’introduction, ne considérer la religion que sous sa dimension
spirituelle, ce serait une façon subtile de l’hypothéquer d’une grande partie de ce qu’elle est. On
ne rend pas plus justice au christianisme en s’imaginant qu’il puisse exister sans spiritualité,
qu’on ne rend justice aux religions amérindiennes en les réduisant à n’être que des spiritualités.
En dépit des justifications que l’on donne de l’utilisation du terme « spiritualité » pour désigner
les religions amérindiennes, il ne me paraît guère possible de légitimer une telle pratique du point
de vue des sciences des religions, et c’est pour cela que je continuerai ici à parler des religions
amérindiennes pour parler des religions diversifiées des nations amérindiennes, comme on parle
des religions d’Afrique Noire pour désigner les religions des différents peuples d’Afrique noire.
Dans le cas des religions à portée ethnique, il est toujours préférable de préciser le nom de
l’ethnie dont on parle (la religion des Micmacs, des Innus / Montagnais, des Mohawks, etc.).
Mais on comprendra aussi que l’on doive, par mesure d’économie, prendre le risque d’utiliser une
désignation plus large qui est celle de « religion des Amérindiens » ou de « religions
amérindiennes ». Lire également SPD 57-59.
1B2. Autres difficultés soulevées par l’étude des religionsamérindiennes
10B2.1 Une grande diversité culturelle et linguistique
Dans l’ensemble du Canada seulement, l’univers des « premières nations » comporte une dizaine
d’aires culturelles (ou aires écologiques) différentes. Le texte de Pierrette Désy (qui a été
professeure à l’Université du Québec à Montréal) dans le Dictionnaire des mythologies de YvesBonnefoy (Recueil de textes) contient un tableau de la distribution ethnique des tribus
amérindiennes pour l’ensemble de l’Amérique du Nord et une carte géographique permettant de
visualiser les aires culturelles. Vous voudrez bien vous y reporter pour vous faire une idée de
cette complexité.
Le tableau indique également les grandes familles de langues que l’on retrouve dans chaque aire.
Cette diversité linguistique très grande sous-tend des visions du monde et des pratiques
extrêmement variées. Dès l’introduction d’un article important visant à faire le bilan des études
anthropologiques concernant les religions amérindiennes au Canada, Marie-Françoise Guédon
(professeure d’anthropologie de la religion au Département des sciences religieuses de
l’Université d’Ottawa) l’a également souligné avec force.
La première réalisation de l’anthropologie est sans doute de nous faire prendre consciencedu fait que les sociétés amérindiennes, au Canada seulement, sont composées de centainesde communautés culturellement et linguistiquement distinctes, plus de 80 dialectesregroupés en une dizaine de familles linguistiques, aussi différentes les unes des autres quele japonais l’est de l’espagnol, chacune supportant sa propre série de philosophies, de
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
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visions du monde, de systèmes de valeurs et de pratiques rituelles : Algonquins (desMiqmaqs et des Abénaquis aux Pieds-Noirs, en passant par les Montagnais, les Cris et lesOjibwais), Dénés, Inuits, Iroquois et Hurons, Kutenais, Sioux (représentés par lesDakotas), Salishs, Tlingits, Tsimshians, Wakashans. Si l’anthropologie des Amérindiensdoit s’enorgueillir d’une chose, à mon avis, c’est d’avoir réussi à prendre conscience decette richesse, de cette immense distance culturelle qui sépare non seulement les
Européens des Amérindiens mais aussi les Amérindiens les uns des autres. Des culturesextérieurement semblables, comme chez les Cris et les Dénés, tous deux peuples dusubarctique, n’ont linguistiquement rien en commun, et vivent dans des mondes spirituelsà part. [Pour faciliter la lecture, j’ai régularisé l’orthographe des noms de nations, et lesmajuscules.] (Guédon 1994 : 265-266)
Pour vous faire une idée de la diversité des communautés amérindiennes que l’on trouve au
Québec seulement, lisez maintenant le document intitulé « Profil des nations autochtones du
Québec » (Recueil de textes).
11B2.2 L’absence de textes écrits
Les nations amérindiennes sont composées essentiellement de chasseurs (les Algonquins du Nord
en sont), mais aussi d’agriculteurs (les Hurons-Wendats et les Mohawks étaient des chasseurs,
mais connaissaient la culture du maïs). Ce sont des sociétés sans écriture, dont les traditions se
sont conservées oralement. Il existe souvent des sources écrites les concernant, mais elles sont
tardives et d’interprétation délicate. Voici à ce sujet les propos de Frédéric Laugrand, professeur
d’anthropologie à l’Université Laval.
La dernière difficulté, et non des moindres, concerne les sources disponibles et lediscernement nécessaire pour aborder ces traditions. À l’exception de nombreux objetscultuels rapportés par les voyageurs et des témoignages relativement tardifs d’Amérindiens
et d’Inuits, il n’existe bien souvent que des écrits de seconde main, tous postérieurs auxpremiers contacts avec les Européens. Recueillis par des explorateurs, des marchands, desmissionnaires [note : La richesse des sources missionnaires est à souligner…], desanthropologues et plus tard par des Amérindiens [note : L’apport des ethnologuesamérindiens est considérable…], ces récits requièrent bien des décodages et des mises encontexte afin d’identifier les grilles interprétatives et épistémès [ensemble spécifique deprincipes qui régissent la connaissance]. En dépit du nombre astronomique des documentsaccessibles, la qualité demeure très inégale. (Laugrand 2000 : 174-175)
Il faut également souligner ici que la plus grande partie des travaux concernant les religions
amérindiennes sont le fait d’anthropologues. C’est donc pas vraiment l’histoire, mais
l’anthropologie qui vous servira dans ce Module 2.
12B2.3 L’absence d’institutions séparées pour la religion
Comme cela est typique des religions à portée ethnique, chez les Amérindiens également, la
religion ne fait pas l’objet d’institutions qui seraient différentes de celles d’une société que l’on
pourrait qualifier de « profane » ou de « séculière ». Il faut être conscient que les langues
amérindiennes ne font pas la distinction entre le sacré et le profane, entre le domaine religieux et
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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le domaine de la vie ordinaire. Dans un certain sens, on pourrait dire que tout est ici sacré, mais
j’éviterai d’utiliser cette opposition qui n’est pas attestée en tant que telle dans les langues
amérindiennes et qui n’est vraisemblablement pas pertinente. Ces langues n’ont pas non plus de
nom spécial pour désigner le domaine spécifique de préoccupations que l’on qualifie ici de
« religieuses », et qui font partie intégrante de la vie normale d’une nation. Si l’on parle de la
religion des Innus, des Hurons, ou de la religion des nations amérindiennes, c’est parce que l’on
utilise un concept opérationnel que l’on a consciemment construit (cf. Module 1) pour procéder à
l’analyse d’un domaine spécifique de préoccupations que l’on rencontre chez les Amérindiens
comme ailleurs.
Ce qu’il faut réaliser, c’est que le monde ou le cosmos, tel qu’il apparaît aux yeux de chaque
Amérindien recouvre d’emblée le visible et l’invisible. Les Esprits sont tout aussi réels que les
humains. Et cela signifie du même coup, qu’une action proprement humaine ne peut pas ne pas
tenir compte des partenaires invisibles. Les sociétés amérindiennes prévoient une ou des
fonctions de spécialistes pouvant intervenir dans l’invisible et que l’on appelle des chamanes. Lescroyances et les rites touchant les rapports du visible avec l’invisible sont d’emblée des facteurs
de cohésion et de solidarité sociale. Ils sont nécessaires à la paix, à la prospérité, à l’harmonie de
chaque nation. Un commentaire au film Mémoire battante d’Arthur Lamothe met bien en relief
cet aspect de la vision du monde des Montagnais et des sociétés amérindiennes en général.
Comme l’ont déjà remarqué plusieurs ethnologues […], et comme le démontre ce film,parler de religion comme d’un secteur d’activité humaine distinct ne correspond pas à lafaçon d’être de ces gens. Le matériel et le spirituel s’interpénètrent, sont indissociables.Chasser, ou tout simplement vivre, n’est pas strictement un acte de productionéconomique, mais plutôt un acte social concernant non seulement la communauté humainemais aussi celles des animaux, des êtres autres qu’humains; assurer la survie physique,
c’est assurer la continuité de relations harmonieuses entre les différentes communautésconstituant l’univers montagnais. On ne saurait prétendre connaître cette société sans luireconnaître d’abord cette spécificité. (Jean-René Proulx 1988 : 51)
13B2.4 Une culture religieuse ouverte aux innovations
On dirait que moins la religion se trouve définie par des frontières précises, que moins on la
conçoit comme un domaine à part de la société dite séculière, plus elle est ouverte aux emprunts,
aux ajouts, aux cumuls, aux syncrétismes. La règle en ce domaine n’est pas d’abord la fidélité à
une tradition clairement exprimée, mais l’efficacité dans la sauvegarde de l’harmonie du groupe.
Les Amérindiens sont ordinairement prêts à intégrer, et sans aucune gêne, tout ce qui peutaméliorer le sort de leur nation. Les spécialistes n’hésitent pas à affirmer que l’innovation est
chose courante dans l’histoire de ces cultures. Dans un article sur « La tradition et la rencontre de
l’autre » auquel je vous ai déjà renvoyé dans le cadre du Module I, je citais à ce sujet les
remarques de l’anthropologue Herskovits concernant les poteaux que l’on appelle des totems.
Herskovits a bien décrit les processus de réinterprétation qui font partie du dynamisme dechaque culture. L’être humain est capable d’innover à l’intérieur même de sa culture, de sa
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SCR-1000 [SCR-16968] Introduction à l’étude des religions
14
tradition religieuse, de trouver de nouvelles solutions à des problèmes inédits. Mais engénéral, rappelle l’anthropologue, il « trouve plus simple d’adopter ce qu’un autre afabriqué que de résoudre lui-même ses problèmes » [note : M. J. Herskovits, Les bases de
l’anthropologie culturelle, Paris, Payot, 1952, p. 192]. On aurait pu croire que le poteautotémique appartenait à la plus vieille tradition des Amérindiens de la côte nord-ouest duPacifique. En fait, il n’a commencé à se multiplier qu’après 1830. Ce poteau exhibe des
symboles et illustre des mythes particuliers à ces peuples, mais suppose aussi l’innovationtechnique que représentent les outils en acier introduits en grand nombre à la fin du siècleprécédent, ainsi que l’amélioration du niveau de vie et les loisirs qu’a apportés cettenouvelle source de richesse. Il s’agit d’un cas où la contribution de l’Occident a étéparfaitement assimilée et intégrée par une culture différente [note : ibid ., p. 171-172].
Ce que, du point de vue des religions missionnaires comme le catholicisme ou le protestantisme,
on appelle des conversions, s’interprète très différemment si l’on se place du point de vue des
peuples qui, tout au long de leur démarche de conversion, n’ont jamais cessé d’essayer d’intégrer
la culture de l’autre et de tirer le maximum de la force spirituelle de l’autre sans pour autant se
trahir eux-mêmes. L’analyse des conversions amérindiennes montre que les autochtones n’ont
jamais été purement passifs, et qu’aux stratégies des missionnaires ils répondaient par leurspropres stratégies faites entre autres de résistances et de choix délibéré. On comprend alors tout
ce que l’entreprise missionnaire peut avoir d’ambigu pour ces peuples. À ce sujet, on pourra se
reporter à un livre important de F. Laugrand (2002); voir aussi Désveaux pour les emprunts
(Recueil de textes).
Si l’on est conscient que les peuples amérindiens ont toujours tenté d’être créatifs et d’inventer
même quand on les forçait à copier, il apparaîtra peut-être moins opportun, quand on aborde les
religions amérindiennes, de tenter de différencier ce qui est ancien de ce qui relève d’influences
récentes. Tout en cherchant dans le cadre de ce cours à présenter certains éléments typiques de
ces religions, on réfléchira aux remarques fort pertinentes de M.-F. Guédon qui insiste pour direqu’en fait les religions amérindiennes n’ont jamais été parfaitement pures.
À l’ignorance qui fait dire qu’il n’y a plus rien à étudier, que les autochtones sont touschrétiens, ou que, de toute façon, leurs pratiques religieuses ne sont intéressantes quelorsqu’elles sont « authentiquement amérindiennes », c’est-à-dire vécues en dehors de toutcontact avec d’autres sociétés (vision utopique et réductrice s’il en est), il est possible derépondre par une vision dynamique et concrète des traditions amérindiennes. (Guédon1994 : 273)
Lire Désy 15-16 (c’est la fin du premier texte de Désy, Recueil, p. 37-38).
14B2.5 Une inévitable approximation
Quand on veut décrire les religions amérindiennes avec précision, on se heurte inévitablement au
fait que les cultures amérindiennes sont multiples, beaucoup plus diversifiées qu’on se l’imagine
et que la dimension religieuse de ces cultures n’est pas un domaine que l’on pourrait mettre à
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Module 2 : Les religions amérindiennes
15
part. On comprendra alors que la suite de ce module ne peut constituer qu’une approximation. Le
travail qui se fera dans le cadre de ce module n’est en fait qu’un début de réflexion que vous
pourrez poursuivre à l’Université Laval en suivant par exemple le cours ANT-22816 Cosmologies
amérindiennes, donné par Frédéric Laugrand.
2B3. Les cosmologies amérindiennes : à la limite de la croyance etde la raison
15B3.1 Une vue d’ensemble des cosmologies amérindiennes
Lisez d’abord les deux courts textes que Pierrette Désy a consacrés aux mythes amérindiens dans
le Dictionnaire des mythologies (Recueil de textes). Ces textes vous permettront de vous faire
une première idée de la diversité des récits que les Amérindiens ont créés pour parler des origines
de leur monde.
De tels récits ont fait l’objet d’un énorme travail de réflexion de la part des anthropologues.
Claude Lévi-Strauss a été en ce domaine un pionnier et un inspirateur. Impossible de ne pas
penser aux quatre livres des Mythologiques (1. Le cru et le cuit , 1964; 2. Du miel aux cendres,
1966; 3. L’origine des manières de table, 1968; 4. L’homme nu, 1971), à Histoire de Lynx (1991),
à La voie des masques (1979), etc. Les textes des anthropologues E. Désveaux et P. Descola
(Recueil de textes), que vous avez également à lire, s’inspirent évidemment de ces travaux. Ils
vous introduiront à un langage qui ne vous est pas familier. Je voudrais dans les deux paragraphes
qui suivent faciliter votre lecture en explicitant ce que veut dire le mot « cosmologie » et en
expliquant le sens que Descola donne au terme « animisme ».
16B3.2 Qu’est-ce qu’une cosmologie?
C’est littéralement un « discours (logos) sur le monde (cosmos) ». Et le monde qui est celui des
légendes amérindiennes n’est pas le monde en général, mais un monde bien spécifique. C’est en
fait le monde particulier dans lequel telle nation particulière a appris à vivre, i.e. à chasser, à
cueillir, à semer, pour se nourrir, pour se vêtir, etc. Ce que Thomas et Luneau disaient du monde
dans le contexte des tribus africaines peut vous faire également réfléchir quand vous abordez le
domaine amérindien. « …le monde, qui n’excède jamais les horizons de l’existence quotidienne,
permet à l’homme de savoir qui il est et trouve en lui le lieu véritable de son unité. Ce monde-làest parole à propos de cet homme » (Thomas et Luneau 129). Il est évident qu’en raison des
moyens de communications modernes, le monde des Amérindiens s’est considérablement élargi,
comme celui de nous tous. Mais pour comprendre le grand parler des anciens, il faut le replacer
dans son contexte premier.
Le monde dont il s’agit ici est complexe. (1) Ce sont les territoires de chasse, de pêche, de
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cueillette qui sont l’habitat de ces nations, un monde fait d’espaces en grande partie forestiers,
habités par d’autres êtres vivants et par une foule de forces invisibles. (2) C’est aussi une société
possédant un système de parenté particulier, une division en clans multiples représentés par des
animaux ou totems, etc. (3) C’est enfin tout le jeu des forces cosmiques, i.e. le mouvement des
astres et son influence, l’alternance des saisons, les forces telluriques, etc. Voilà pourquoi
Désveaux précise dès le début de son texte sur « Les pensées indigènes de l’Amérique du Nord »
(Recueil de textes) que le discours mythique amérindien se développe en fait à un triple niveau et
en utilisant à chaque niveau des codes différents : (1) le niveau écologique (celui de l’habitat ou
de l’environnement), où l’homme peut entre autres être assimilé à un loup; (2) le niveau social
(celui de l’organisation sociale — système de parenté, divisions claniques, lignées, etc.), où des
totems animaux renvoient à divers segments sociaux et où l’on parle de guerre dans un langage de
mariage exogamique; et (3) le niveau cosmique (le jeu des astres, l’alternance des saisons, les
rapports entre la terre et le ciel, etc.), où apparaissent la tortue et l’ours. Il place au troisième
niveau ce que l’on appelle aussi le principe d’entropie, i.e. la conviction que l’ordre du monde
n’est jamais acquis et pourrait s’écrouler si l’on ne procède pas aux rituels appropriés.
Une cosmologie implique forcément une réflexion sur le monde, une conception particulière du
monde. Ce discours sur le monde n’est jamais désordonné même si le langage dans lequel il
s’exprime peut sembler étrange et, à première vue, léger ou peu sérieux. Avant de parler
d’harmonie cosmique à construire par des rituels (point 5), vous devez prendre conscience que les
Amérindiens ont une conception du monde très spécifique qui se transmet grâce à des récits
mythiques et vous rendre compte que ce langage a sa logique propre. Comme pour n’importe quel
autre peuple, mais avec un accent bien particulier, les anthropologues considèrent les légendes et
histoires diverses racontées par les Amérindiens comme étant des mythes. Le mythe, pour eux, ce
n’est pas une construction vaine ou illusoire. Au contraire, dès le début du deuxième paragraphede son texte, Désveaux affirme que « La préoccupation sous-jacente de tout discours mythique est
de définir la nature des relations qui permettent d’inscrire tout individu dans l’ordre du monde ».
Ces légendes sont donc la façon qu’ont les Amérindiens de parler de leur conception du monde.
Ils y transmettent un certain nombre de leurs convictions fondamentales touchant la vie en
général. De même qu’en linguistique on parle de phonème, de lexème, l’analyse structurale des
mythes appelle « mythème » chacune des unités de sens minimales dont est composé un mythe.
Les légendes amérindiennes peuvent s’analyser en mythèmes qui s’opposent les uns aux autres,
se répondent les uns aux autres, se transforment les uns dans les autres selon des règles logiques
relativement simples. Lévi-Strauss a montré dans ses Mythologiques que les mythes desAmérindiens de l’ensemble de l’Amérique formaient un système cohérent. Vous trouverez un
aperçu de la cosmologie des Wendats dans SPD 59-62.
17B3.3 L’animisme : une façon originale de concevoir le monde
Dans l’article qui figure dans le Recueil de textes, Philippe Descola refuse de considérer
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l’animisme comme une forme primitive de religion (comme nous l’avons fait au point 1.3). Il
retient le terme, mais en lui conférant un sens beaucoup plus large, et dit que l’animisme, « c’est
une manière de concevoir le monde, et de l’organiser ».
En effet, dans un essai important, Par-delà nature et culture (2005), Descola a montré que
l’opposition nature / culture ne suffit plus aujourd’hui à rendre compte de la diversité des cultures
et de leurs façons de s’insérer dans le monde. L’anthropologie doit se défaire de « son dualisme
constitutif » (p. 12), qui consiste à s’imaginer que la seule démarche rationnelle consiste à
opposer la nature à la culture et à penser que la véritable culture s’acquiert en dominant et en
maîtrisant tout ce qui n’est pas humain. « Dans de nombreuses régions de la planète, — note
Descola — humains et non-humains ne sont pas conçus comme se développant dans des mondes
incommunicables et selon des principes séparés; l’environnement n’est pas objectivé comme une
sphère autonome; les plantes et les animaux, les rivières et les rochers, les météores et les saisons
n’existent pas dans une même niche ontologique définie par son défaut d’humanité » (p. 56).
Descola reconnaît évidemment la légitimité du point de vue occidental courant qui consiste à
penser que les humains partagent avec les non-humains une même matière physique sans pour
autant accepter que les humains puissent communiquer avec les non-humains au plan de l’esprit.
Partant du fait que, même s’ils se perçoivent tous comme un mélange d’éléments physiques et
d’éléments psychiques, les humains peuvent concevoir différemment leurs différences et leurs
ressemblances avec les non-humains, Descola construit une typologie relativement simple qui
veut présenter ensemble les principaux schèmes possibles d’intégration de leur expérience. Il
distingue l’animisme, le naturalisme, le totémisme et l’analogisme.
L’animisme dont il parle se retrouve en particulier dans les sociétés amérindiennes.Encore une fois, il n’est pas question ici d’un certain type de religion, mais plus
généralement d’une façon de concevoir les rapports entre les humains et les non-humains.
Il y a animisme quand les humains et les non-humains partagent une même intériorité et
peuvent par conséquent échanger librement entre eux au plan spirituel, bien qu’il y ait
entre tous ces êtres des différences au plan de cette forme extérieure qu’on appelle le
corps (Descola en parle comme des physicalités).
Le naturalisme courant dans les sociétés occidentales soutient un point de vue
diamétralement opposé : les humains sont en continuité avec les non-humains au plan des
« physicalités » (ils obéissent aux mêmes lois physiologiques, génétiques, partagent unmême écosystème), mais se séparent radicalement sur le plan de l’esprit et des
expressions culturelles dont cet esprit est capable.
Par totémisme, Descola ne désigne pas la logique classificatoire qu’a analysée Lévi-
Strauss dans Le totémisme aujourd’hui (1962), mais le fait que plusieurs sociétés « dotent
les plantes et les animaux d’un principe spirituel propre et estiment qu’il est possible
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d’entretenir avec ces entités des rapports de personne à personne — d’amitié, d’hostilité,
de séduction, d’alliance ou d’échange de services — qui diffèrent profondément de la
relation dénotative et abstraite entre des groupes totémiques et les entités naturelles qui
leur servent d’éponymes » (p. 177-178).F
1F Ce totémisme, dont certains formes se
rencontrent par exemple chez les Algonquins du Nord, suppose l’acceptation d’une
continuité tant au plan physique que spirituel entre un groupe d’humains et le groupe de
non-humains.
À l’opposé du totémisme, Descola place ce qu’il appelle l’analogisme. « J’entends par là
un mode d’identification qui fractionne l’ensemble des existants en une multiplicité
d’essences, de formes et de substances séparées par de faibles écarts, parfois ordonnées
dans une échelle graduée, de sorte qu’il devient possible de recomposer le système des
contrastes initiaux en un dense réseau d’analogies reliant les propriétés intrinsèques des
entités distinguées » (p. 280). Ici, tous les groupes d’êtres sont différents tant au plan des
intériorités que des physicalités, et l’on cherche à les relier entre eux par des jeuxd’analogies qui peuvent mettre en jeu les similitudes entre le macrocosme et microcosme.
Ces quatre façons de penser le monde dans son ensemble ne sont pas exclusives les unes des
autres.
Rappelons donc que les modes d’identification ne sont pas des modèles culturels [...]localement dominants, mais des schèmes d’intégration de l’expérience qui permettent destructurer de façon sélective le flux de la perception et le rapport à autrui en établissant desressemblances et des différences entre les choses à partir des ressources identiques quechacun porte en soi : un corps et une intentionnalité. Les principes qui régissent cesschèmes étant universels par hypothèse, ils ne sauraient être exclusifs les uns des autres et
l’on peut supposer qu’ils coexistent en puissance chez tous les humains. L’un ou l’autredes modes d’identification devient certes dominant dans telle ou telle situation historique,et se trouve donc mobilisé de façon prioritaire dans l’activité pratique comme dans les
jugements classificatoires, sans que ne soit pour cela annihilée la capacité qu’ont les troisautres de s’infiltrer occasionnellement dans la formation d’une représentation, dansl’organisation d’une action ou même dans la définition d’un champ d’habitudes. Ainsi, laplupart des Européens sont-ils spontanément naturalistes — et je ne m’exclus pas du lot —en raison de leur éducation formelle et informelle. Cela n’empêche pas certains d’entreeux, en certaines circonstances, de traiter leur chat comme s’il avait une âme, de croire quel’orbite de Jupiter aura une influence sur ce qu’ils feront le lendemain, ou encore des’identifier à tel point à un lieu et à ses habitants humains et non-humains que le reste du
1
Les mythes amérindiens peuvent servir à penser l’organisation sociale des groupes (tel groupe distinguepar exemple des clans de l’aigle, de l’oie, du génie des eaux, du brochet, de l’esturgeon). En identifiant lessegments de leur société aux êtres familiers qui peuplent leur environnement et qui deviennent alors destotems, les Amérindiens font voir l’organisation sociale qui est la leur. Claude Lévi-Strauss a montré defaçon décisive que le totémisme répondait d’abord à une logique classificatoire. « Au moyen d’unenomenclature spéciale, formée de termes animaux et végétaux (et c’est là son unique caractère distinctif), leprétendu totémisme ne fait qu’exprimer à sa manière – on dirait aujourd’hui, au moyen d’un codeparticulier – des corrélations et des oppositions qui peuvent être formalisées autrement [...] On comprendenfin que les espèces naturelles ne sont pas choisies parce que ‘bonnes à manger’ mais parce que ‘bonnes àpenser’. » ( Le Totémisme aujourd’hui, 1962, p. 128-129)
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monde leur paraît être d’une nature entièrement différente de celle du collectif auquel ilssont attachés. Ils n’en sont pas devenus pour autant animiques, analogiques ou totémiques,les institutions qui encadrent leur existence et les automatismes acquis au fil du tempsétant suffisamment inhibants pour éviter que ces glissements épisodiques dans d’autresschèmes n’aboutissent à les doter d’une grille ontologique tout à fait distincte de celle envigueur dans leur entourage. (Descola 2005 : 322)
Descola résume son point de vue dans le tableau suivant (Figure 2, figurant en p. 176). En lisant
le court texte de cet auteur qui se trouve dans le Recueil, vous en apprendrez davantage. Je cite
dans la bibliographie un autre texte de vulgarisation qu’il a publié dans la revue La Recherche.
Figure 2 : Les quatre manières de concevoir et d’organiser le monde selon Descola
ressemblancedes intériorités
différence desphysicalités
animisme totémisme
ressemblancedes intériorités
ressemblancedes physicalités
différencedes intériorités
ressemblancedes physicalités
naturalisme analogisme
différencedes intériorités
différencedes physicalités
Les Amérindiens conçoivent donc et organisent le monde de façon animiste. Contrairement à lapensée occidentale qui opère des séparations tranchées entre les êtres humains et les non-
humains, les Amérindiens ne séparent pas la nature de la culture, le monde des animaux (du
moins ceux qu’ils reconnaissent comme étant vraiment « animés ») du monde humain. Ils ne font
pas de distinctions tranchées entre les humains d’une part, et les espèces animales et végétales qui
font partie de leur environnement d’autre part. Au contraire, toutes ces réalités, qu’elles forment
un écosystème très diversifié comme en Amérique du Sud ou un écosystème très uniforme
comme au Canada, s’inscrivent dans un vaste continuum. Malgré des différences importantes
selon les aires culturelles, les entités qui font partie de ces écosystèmes demeurent animées par les
mêmes principes et par une même sociabilité. L’homme n’apparaît pas ici comme un maître qui
dominerait les animaux qui lui seraient naturellement subordonnés.
Les Amérindiens perçoivent donc les vies qui forment ce vaste continuum dont ils font partie
comme un lieu de circulation, d’interrelations, d’échanges, de transformations. Autrement dit, les
individus ne sont pas conçus comme fermés sur eux-mêmes, mais constamment ouverts les uns
sur les autres. De sorte que, dans leurs mythes, les Amérindiens « animent » les substances, les
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entités animales, etc., les mettent en scène, n’hésitent pas à leur faire jouer des rôles sociaux, à
leur attribuer des comportements éthiques. Dans une perspective plus philosophique qu’anthropo-
logique, on désigne aussi cet animisme sous l’expression de « pensée circulaire ». Par exemple,
Georges E. Sioui dira des Wendats (anciennement surnommés les Hurons) :
Les Wendats, comme tous les peuples à pensée circulaire, regardaient l’univers commeune grande chaîne de relations entre une infinité d’êtres appartenant à une seule grandefamille. Tous ces êtres différents sont des expressions d’une même Grande Volonté quiproduit le mouvement et la vie, et la place des humains dans ce Cercle n’est pas plus oumoins importante que celle des autres formes de vie; tous sont libres et égaux : hommes,femmes, animaux, végétaux, minéraux, air, soleil, eau, terre, feu, astres, esprits : en unmot, la Création. (Sioui 1994 : 224-225)
Le cercle est sans doute très significatif dans la pensée des Amérindiens, quoiqu’il me paraisse
abusif de faire de tous les cercles qui se rencontrent dans les cultures amérindiennes (tambours,
tentes, cycles saisonniers, etc.) des signes d’une pensée circulaire.
18B3.4 La place des héros culturels
Le texte de Pierrette Désy intitulé « Amérique du Nord. Mythes et rites amérindiens » contient
une section portant sur les « Héros culturels et décepteurs ». Ces héros, qui peuvent prendre des
formes animales, ont pour mission de guider les humains dans un monde qui risque toujours de
s’effondrer. Ils sont également à mettre en relation avec le principe d’entropie présentée au
point 3.2. Voir SPD 62-64.
3B4. Le chamane et son rôle social
« Chamane » ou « chaman » est un mot obscur utilisé par les Toungouses, un peuple de chasseurs
vivant en Sibérie, et qui nous est arrivé par la littérature ethnologique soviétique. On ne connaît
pas le sens véritable de ce mot qui a été popularisé par un ouvrage célèbre de Mircea Eliade, Le
Chamanisme et les techniques archaïques de l’extase (1951), dont les thèses sont aujourd’hui
contestées ou à tout le moins relativisées.
Particuliers aux groupes de chasseurs-cueilleurs (sibériens, amérindiens, australiens, coréens, etc.)
vivant en rapport étroit avec la nature, les chamanes sont, pour reprendre les mots de Danièle
Vazeilles dans son petit livre Les chamanes (1991), des prophètes et guérisseurs inspirés, desfigures charismatiques et religieuses ayant le pouvoir de maîtriser les esprits (p. 108). Hommes ou
femmes selon les cultures, les chamanes sont capables de voyager dans le monde des esprits et
même de ruser avec eux. Contrairement aux prêtres des sociétés agricoles qui offrent en sacrifice
aux dieux des victimes animales dont le groupe se considère possesseur, les chamanes s’excusent
de devoir parfois tuer des animaux sur lesquels ils n’ont aucun droit (p. 117). Protecteurs de
l’héritage oral de ces sociétés (p. 113) les chamanes s’accommodent d’un monde imparfait,
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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souvent involontairement créé par un personnage mythique de type trickster (ou décepteur) et n’y
interviennent que pour le réparer de façon ponctuelle (p. 68-69, 113). F. Laugrand le décrit encore
de la façon suivante.
Personnage aux facettes multiples et aux compétences diverses (thérapeute, ventriloque,
gymnaste, etc.), le chaman était un intermédiaire privilégié entre les mondes humains etnon humains. Initié à la langue chamanique, maître du tambour et véritable médiateur, sonrôle consistait à intervenir lors des grands déséquilibres : remédier aux pénuries de chasse,rétablir un temps météorologique favorable, guérir épidémies et épizooties, tuer les espritsmalveillants, etc. En somme, sa fonction était précisément d’éviter l’entropie. (Laugrand2000 : 190)
Marie-Françoise Guédon a fait des recherches parmi les Nabesnas, une nation apparentée aux
Athapascans du Nord (côte nord-ouest, Alaska). Elle a écrit dans Recherches amérindiennes au
Québec un court texte sur leur chamanisme. Même si les pratiques varient en fait beaucoup d’une
ethnie à une autre, vous trouverez là une excellente introduction au rôle complexe que joue ce
personnage.
Il faut toutefois bien distinguer le chamanisme dont il est ici question du chamanisme spirituel, ou
néochamanisme, qui en est un avatar moderne.
Accommodée à toutes les sauces, la référence chamanique connaît en effet une telleinflation qu’une nouvelle terminologie paraît inévitable. Ainsi le terme de« néochamanisme » désigne maintenant une autre nébuleuse qui comprend tous cesmouvements qui s’emploient à bricoler les traditions chamaniques pour en produire desversions édulcorées et occidentalisées. Danièle Vazeilles, Merete Jacobsen et Alice Kehoeont étudié cette exportation massive du chamanisme amérindien en Europe et dans lesAmériques, y compris dans les grands centres urbains. Nombre d’Amérindiens animentdes formations en tant que guides spirituels (Harley Swift Deer, Rolling Thunder, Black
Horse Charvers, etc.). Des psychologues et des médecins alternatifs, formés pour la plupartà la Foundation for Shamanic Studies de M. Harner, créent aussi leurs propres instituts,réseaux et associations de chamanisants (Hugo-Bert Eichmuller en Allemagne, MarioMercier et Aigle Bleu en France et au Québec). Tous prétendent offrir une formationchamanique, promettent aux adeptes la guérison et l’accession à « une conscience élargiede la réalité », à la « véritable conscience chamanique ». Il en résulte une myriade de livreset de programmes faisant la promotion de voyages initiatiques au Mexique ou au Pérou,qui attirent des milliers de touristes en quête de valeurs et d’expériences spirituelles.(Laugrand 2006-2007 : 42)
Lire également SPD 66-69.
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22
4B5. Des rituels particuliers pour construire une harmonie bien
spécifique
Alors que le mythe parle de réalités diverses, discontinues, à l’intérieur du cosmos, le rituelF
2F tente
au contraire bien concrètement de tisser des liens, d’établir des alliances, de construire uneharmonie (qui peut être symbolisée par le cercle) entre des éléments qui ont plutôt tendance à
séparer les vivants et à accentuer le désordre. Bien qu’ils se fondent sur des croyances qui sont
justifiées par le mythe, les rituels sont des actions particulières entreprises dans un but spécifique.
Contrairement à la mythologie qui peut se lire à l’intérieur d’un système cohérent de transfor-
mations couvrant l’ensemble des Amériques, les rituels apparaissent plutôt comme des techniques
particulières qui ont vraisemblablement voyagé d’une nation à une autre et ont fini par s’imposer
dans une région (par exemple, la tente tremblante dans l’est de la région subarctique, la danse du
soleil dans la région des Plaines américaines).
Les rites les plus répandus restent les offrandes ou les libations. Ils consistent à abandonner desbiens personnels à des partenaires invisibles en retour des faveurs que ceux-ci font aux humains
dans le but de tisser des liens et de s’assurer de leur bonne collaboration. Les humains prient,
chantent, invoquent les esprits invisibles au son des tambours, les esprits invisibles se manifestent
par des rêves, des visions, des révélations, le tout se déroulant dans le contexte d’échanges qui a
été décrit au point 3. F. Laugrand note à ce sujet :
En retour des dons faits aux humains, qui parvenaient ainsi à vivre (confection devêtements, d’armes, d’amulettes, etc.) et à se nourrir, les animaux exigeaient de se fairehonorer par des contre-dons. Ceux-ci pouvaient prendre la forme de biens matériels ou deservices, les communications entre les deux mondes se faisant, d’un côté, par les prières,
les chants et les invocations, de l’autre, par les visions, les rêves et les révélations. À cetégard, l’importance accordée au rêve est l’un des traits les mieux partagés par les traditionsamérindiennes et inuites. Fort répandues en Amérique du Nord, les offrandes et libations, ycompris les festins qui ont tellement marqué les missionnaires de la Nouvelle-France,relèvent d’une logique similaire. De nature différente, ces offrandes aux esprits allaientd’une simple portion de tabac ou de nourriture, comme chez les groupes algonquins, à destueries rituelles (exemple du chien blanc chez certains groupes) et même à des amputationshumaines, comme chez les Sioux et les Mandans où les guerriers sectionnaient leursphalanges. (Laugrand 2000, 189-190)
La deuxième partie du texte d’Emmanuel Désveaux montre l’importance de « la quête de
visions » en contexte rituel amérindien. Ce texte parle à la suite brièvement du rituel de « la tente
tremblante » et de « la danse du soleil ».
Vous trouverez également un texte sur les rites d’initiation : Louis-Philippe Vaillancourt,
2 Un rituel est un ensemble de rites. Voir le Module 1, point 3.2 où, avec Jacques Vidal, j’avais défini lesrites comme « des pratiques périodiques à caractère public assujetties à des règles précises dont l’efficacités’exerce en particulier dans le domaine de l’invisible ».
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Module 2 : Les religions amérindiennes
23
« Initiation chez les Indiens Cris québécois », Recherches amérindiennes au Québec, 5, n° 1, p.
41-43) et deux textes sur les rituels entourant la mort chez les Hurons : (1) Lucie Ouimet et
Françoise Jammes, « Agochin Atiskein : Le festin des âmes. Rites hurons lors de la période du
contact », Frontières 10, n° 2, hiver 1998, p. 21-26; et Nicole Beaudry et Robert Larocque, « La
fête des morts chez les Hurons », Frontières 11, n° 3, p. 39-42. Le premier texte insiste sur une
des fonctions de ce rite qui est l’intégration à la vie sociale. Le rituel d’initiation comprend
ordinairement des rites qui ont pour but de permettre au nouvel adulte de s’allier les esprits et
d’entrer ainsi dans le jeu des forces qui seront désormais son lot quotidien; il comprend
également des enseignements destinés à lui faire saisir les valeurs essentielles de la vie de son
groupe. Les deux autres textes vous permettront de vous rendre compte que les rituels funéraires
ont tendance à ralentir le temps de cette transition. Il décompose la mort en étapes successives
(séparation d’avec le défunt, accès du défunt au village des morts, célébration d’une nouvelle
cohésion sociale) et aide les personnes à en accepter les conséquences. Dans ces rituels, pour
reprendre une réflexion de l’anthropologue Laburthe-Tolra à propos des Beti du Cameroun, « le
défunt ne meurt pas, mais devient de plus en plus mort ».
Lire également SPD 69-72.
5B6. Conclusion
Tout n’a pas été dit dans cette brève présentation. Il a surtout été question des dimensions
mythique et rituelle des religions amérindiennes. Les sections traitant de la pensée mythique et de
la fonction du chamane ont également mis en évidence la dimension sociale de ces religions. Les
Amérindiens ont aussi des croyances qu’ils ne sont pas prêts à remettre en cause concernant lesforces invisibles, les esprits des animaux, le grand esprit, etc. Il va sans dire que plus une religion
est vivante, plus est importante sa dimension d’expérience spirituelle, toujours nécessaire pour
que les croyances, les légendes et les rites soient vraiment significatifs aux yeux d’un groupe.
L’animisme de Tylor donne l’impression que les religions amérindiennes n’ont pas encore accédé
à la dimension éthique. Il paraît au contraire évident que ces communautés véhiculent dans leurs
légendes comme dans leurs rituels des valeurs de bien-être, de paix, de patience, d’énergie, qui
demanderaient à être développées pour elles-mêmes (relisez à ce sujet la finale du texte de M.-F.
Guédon (p. 16 : « Le chamane ne se comporte pas en moralisateur... »).
Pour vous faire une meilleure idée de ce à quoi pouvait ressembler concrètement la dimensionreligieuse de la société huronne-wendate, vous pouvez maintenant lire d’une traite SPD 53-72.
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Exercices
1. Quelles sont les fonctions du mythe dans les cosmologies amérindiennes?
2. Quelles sont les principales caractéristiques qui définissent les cosmologies
amérindiennes?
3. Quels rôles joue le chamane dans les sociétés amérindiennes?
4. À quoi sert le rituel dans les religions amérindiennes?
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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5. Décrivez le rituel funéraire huron (de l’annonce du décès à la grande Fête des morts).
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Livres cités (dans l’ordre où ils apparaissent dans le texte)
TYLOR, Edward B. (1971). Primitive Culture, Londres, Murray.
EVANS-PRITCHARD, E. E. (1971). La religion des primitifs à travers les théories des
anthropologues, Paris, Payot.
LEFEBVRE, Gabriel (2001). « Les traditions amérindiennes : analyse thématique », dans L’étude
de la religion au Québec. Bilan et prospective (J.-M. Larouche et G. Ménard, dir.), Québec, Les
Presses de l’Université Laval, 25-37.
ROSTKOWSKI, Joëlle (2000). « Introduction. Spiritualité et affirmation identitaire », Recherches
amérindinnes au Québec 30, n° 1, 2000, 3-7.
GUÉDON, Marie-Françoise (1994). « Anthropologie et religions amérindiennes au Canada »,
Studies in Religion / Sciences Religieuses 23, n° 3, 265-277.
LAUGRAND, Frédéric (2000). « Les religions amérindiennes et inuites », dans Un monde de
religions. Tome 3 : Les traditions de l’Asie de l’Est, de l’Afrique et des Amériques (M. Boisvert,
dir.), Québec, Presses de l’Université du Québec, 171-214,
PROULX, Jean-René (1988). « Acquisition de pouvoirs et tente tremblante chez les Montagnais.Documents tirés de Mémoire battante d’Arthur Lamothe », Recherches amérindiennes au Québec
18, n° 2-3, 51-59.
COUTURE, André (1997). « La tradition et la rencontre de l’autre », dans Encyclopédie des
religions (F. Lenoir et Y. Tardan-Masquelier, dir.), Paris, Bayard Éditions, 1361-1388.
LAUGRAND, Frédéric (2002). Mourir et renaître. La réception du christianisme par les Inuit de
l’Arctique de l’Est canadien. Québec, Les Presses de l’Université Laval.
THOMAS, Louis-Vincent et René LUNEAU (1980). La terre africaine et ses religions : traditionset changements, Paris, L’Harmattan.
DESCOLA, Philippe (2005). Par-delà nature et culture, Paris, Gallimard.
LÉVI-STRAUSS, Claude (1985). Le totémisme aujourd’hui, Paris, P.U.F.
SIOUI, Georges E. (1994). Les Wendats. Une civilisation méconnue, Sainte-Foy, Presses de
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Module 2 : Les religions amérindiennes
27
l’Université Laval.
ELIADE, Mircea (1951). Le Chamanisme et les techniques archaïques de l’extase, Paris, Payot.
VAZEILLES, Danièle (1991). Les chamanes, Paris, Cerf.
LAUGRAND, Frédéric (2006-2007). « Le chamanisme, une religion introuvable », Les Grands
Dossiers des Sciences Humaines nº 5 [L’origine des religions], 40-44.
Bibliographie
Vous trouverez un complément bibliographique dans SPD 237-238, auquel vous ajouterez les
titres suivants :
« 20 clés pour comprendre le chamanisme », hors-série no 8 (Frédéric Lenoir, dir.) publiépar la revue Le monde des religions, s.d.
DESCOLA, Philippe (1996). « Les cosmologies des Indiens d’Amazonie. Comme pour leurs frères
du nord, la nature est une construction sociale », La Recherche, nº 292, 62-67.
DÉSVEAUX, Emmanuel (1995). « Les Indiens sont-ils respectueux de la nature? », Anthropos 90,
435-444.
SAVARD, Rémi (2004). La forêt vive : récits fondateurs du peuple innu. Montréal, Boréal, 2004.
Vous trouverez encore des bibliographies élaborées dans L’étude de la religion au Québec. Bilan
et prospective (J.-M. Larouche et G. Ménard, dir.), Québec, Les Presses de l’Université Laval,
p. 22-24, 34-37, 45-48.
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Corrigé du « Selon vous… »
1. Il est certes possible de voir les religions amérindiennes comme des « religions
traditionnelles », dans le sens où leurs croyances et leurs rites concernant le monde
invisible font partie des traditions qui se transmettent à chaque nouveau membre du
groupe. Mais toute religion repose nécessairement sur une « certaine » tradition et, en ce
sens, dire des religions amérindiennes qu’elles sont « traditionnelles » ne dit rien de
spécifique. Dès le point 1.1 du Module 2 et les pages 32-33 de SPD, vous verrez les
limites qu’impose une telle appellation et les préjugés qu’elle entretient.
2. Non, puisque cette appellation ne rend pas compte de la diversité et de la complexité de
ces religions. Parler de « religions animistes » pour désigner les religions amérindiennes,
c’est inconsciemment s’inscrire dans une perspective évolutionniste, aujourd’huidépassée, qui réduit ces religions à n’être qu’au stade embryonnaire de leur
développement religieux. Il vous sera possible de mieux saisir la portée d’une telle
appellation dès le point 1.3 du module et les pages 35-35 de SPD. Le point 3.3 du module
et l’article de Philippe Descola qui se trouve dans le Recueil vous permettront également
d’aborder le terme « animisme » dans un sens beaucoup plus large, laissant de côté son
acception étroite et péjorative.
3. Une des premières difficultés que rencontre celui ou celle qui désire étudier les religions
amérindiennes est la diversité culturelle et linguistique des différentes nations
amérindiennes, comme vous pourrez le constater en lisant le document intitulé « Profildes nations autochtones du Québec » et le texte de Pierrette Désy, « Amérique du Nord.
Mythes et rites amérindiens » qui se trouvent dans le Recueil. Mais il n’est pas que cette
complexité qui puisse faire obstacle au chercheur. Le point 2 du module vous montrera
que l’absence de textes écrits, l’absence d’institutions séparées pour la religion et le
caractère souvent innovateur des religions amérindiennes sont d’autres difficultés dont il
est important de prendre conscience avant d’amorcer l’étude des religions amérindiennes.
4. Une cosmologie, c’est littéralement un « discours (logos) sur le monde (cosmos) », qui
s’appuie sur une conception particulière de l’univers. Au point 3 du module et dans le
texte de Emmanuel Désveaux, « Les pensées indigènes de l’Amérique du Nord », vousverrez que les Amérindiens ont une conception du monde très spécifique qui utilise un
langage qui a sa logique propre. Vous trouverez l’une de ces cosmologies dans SPD 59-
62.
5. Comme pour les religions, il ne peut y avoir une seule et bonne définition du chamane. Il
en existe plusieurs (le point 4 du module vous en propose deux). Habituellement, le
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Module 2 : Les religions amérindiennes
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chamane apparaît comme un personnage religieux aux fonctions multiples, qui agit
comme intermédiaire entre le monde des esprits et le monde d’ici-bas et qui intervient
ponctuellement afin de rétablir l’équilibre dans l’univers. Vous trouverez dans SPD 66-69
des indications à ce sujet en contexte huron-wendat. Le texte de Marie-Françoise
Guédon, « Du rêve à l’ethnographie. Explorations sur le mode personnel du chamanisme
nabesna », vous permettra de comprendre davantage la nature et le rôle de ce personnage.
Corrigé des exercices
1. Les cosmologies amérindiennes sont construites à partir d’histoires et de légendes, que
l’anthropologie a tôt fait de définir comme des « mythes ». Ces mythes n’ont pas pour
seule fonction de raconter une histoire; ils viennent cristalliser la conception du monde
des Amérindiens, tout en transmettant un certain nombre de leurs convictions
fondamentales touchant la vie en général. Parce que les Amérindiens identifient lessegments de leur société aux êtres familiers qui peuplent leur environnement et qui
deviennent alors des totems, leurs mythes servent également à penser l’organisation
sociale des groupes. Pour compléter votre réponse, référez-vous au point 3.2 du Module 2
et au texte de Emmanuel Désveaux, « Les pensées indigènes de l’Amérique du Nord »,
qui se trouve dans le Recueil. Également à SPD 59 s.
2. Les cosmologies amérindiennes proposent une vision du monde non dualiste. Alors que
la pensée occidentale opère des séparations tranchées entre les êtres, les cosmologies
amérindiennes ne séparent pas la nature de la culture, le monde animal du monde humain.
Toutes ces réalités s’inscrivent dans un vaste continuum, où les individus sontconstamment ouverts les uns sur les autres dans un vaste lieu de circulation, d’échanges,
de transformations. Dans cet univers, les êtres et les substances agissent dans un réseau
d’interrelations, à l’intérieur duquel les Amérindiens décèlent spontanément des
phénomènes d’analogies et de correspondances qui atténuent les angoisses et les craintes
de la vie quotidienne. Suivant cette pensée, les différentes entités du monde dans ces
cosmologies peuvent se voir attribuer des rôles sociaux et des comportements éthiques.
Pour compléter votre réponse, consultez les mêmes références que pour la question 1.
3. En tant qu’intermédiaire entre le monde des esprits et le monde humain, le chamane joue
un rôle de médiateur chez les Amérindiens. Parce qu’il possède le pouvoir d’interagir
avec les esprits et de les maîtriser, le chamane assure également une fonction de
protecteur dans la communauté. On fait appel à lui pour pallier aux catastrophes et aux
déséquilibres qui peuvent se produire dans cet univers en constante transformation. Le
chamane est aussi un guérisseur, puisqu’il possède le pouvoir de soigner les maladies.
Pour compléter votre réponse, référez-vous au point 4 du module, à SPD 66-69, et au
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texte de Marie-Françoise Guédon, « Du rêve à l’ethnographie. Explorations sur le mode
personnel du chamanisme nabesna ».
4. Le rituel se veut un moyen de tisser des liens, d’établir des alliances, de construire une
harmonie (souvent symbolisée par le cercle) entre des éléments qui ont plutôt tendance à
séparer les vivants et à accentuer le désordre. Par exemple, une des fonctions du rituelhuron de la Fête des morts est de raffermir les liens entre les divers clans, villages et
tribus. Il a également pour fonction d’assurer le transfert des âmes du défunt dans l’au-
delà de façon à ce que celui-ci ne reste pas prisonnier d’une zone d’ambivalence et
d’incertitude. Vous aurez sans doute remarqué que les rituels ralentissent en quelque
sorte le temps du passage (celui de la mort en est un), permettant au groupe d’en mieux
vivre toutes les conséquences. Pour compléter votre réponse, référez-vous au point 5 du
module, à SPD 69-72, et aux textes suivants dans le Recueil : (1) « Les pensées indigènes
de l’Amérique du Nord » de Emmanuel Désveaux, (2) « Initiation chez les Indiens cris
québécois » de Louis-Philippe Vaillancourt, (3) « Agochin Atiskein : Le festin des âmes.
Rites hurons lors de la période du contact » de Lucie Ouimet et Françoise Jammes,
(4) « La fête des morts chez les Hurons » de Nicole Beaudry et Robert Larocque.
5. Les funérailles avaient lieu environ trois jours après l’annonce du décès par le chef du
village et ses aides. Durant cette période, des proches de la famille restaient auprès du
corps, que les Hurons habillaient, décoraient et repliaient en position fœtale. À l’occasion
des funérailles, auxquelles les gens des villages voisins étaient invités, un « festin » était
préparé. Ce repas, dit « festin des âmes » ou « festin des funérailles », servait à nourrir les
invités mais aussi à « nourrir le mort », ou plutôt à « nourrir ses âmes ». Selon la pensée
amérindienne, chaque être était doté de plusieurs âmes qui, après le décès, quittaient le
corps du défunt mais restaient auprès de lui jusqu’au cimetière, où le festin se terminait
par l’inhumation du corps. La famille endeuillée recevait alors des cadeaux. À cette étape
qui durait dix jours et que les Hurons appelaient « grand deuil », suivait le « petit deuil »
qui s’étalait sur une année entière au cours de laquelle les proches devaient rendre visite à
la tombe du défunt et organiser des festins en son honneur. Ils devaient également obéir à
certaines règles : le veuf et la veuve devaient, par exemple, ne pas se remarier et ne
jamais prendre part à d’autres festins que ceux préparés pour le défunt. Durant les années
qui suivaient ce « petit deuil », la famille continuait de se rendre au cimetière pour
« nourrir le défunt », qui se préparait à faire le voyage vers le « Village des morts ». C’est
au terme du deuil que ce voyage est possible, soit à la grande Fête des morts qui a lieuenviron tous les dix ans. Cette fête, qui durait dix jours, était l’une des plus importantes
pour la société huronne. Tous les corps des personnes décédées après la dernière Fête des
morts étaient retirés du cimetière et l’on enfouissait tous les ossements dans une fosse
commune. Pendant dix jours, les familles se réunissaient pour participer à des festins, des
danses et des chants. Pour compléter votre réponse, référez-vous à SPD 69-72, au texte
de Lucie Ouimet et Françoise Jammes, « Agochin Astikein : Le festin des âmes. Rites
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hurons lors de la période du contact », et à celui de Nicole Beaudry et Robert Larocque,
« La fête des morts chez les Hurons ». Vous n’avez pas à connaître tous les détails de ce
rituel, mais vous devez être en mesure d’en décrire les principales étapes.
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