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UNIVERSITE Michel Montaigne - BORDEAUX 3
UFR Sciences des Territoires et de la Communication
Institut des Sciences de l’Information et de la communication
MEMOIRE RECHERCHE Master 2 Ingénierie de la recherche en sciences de l’information et de la communication
spécialité Communication Réseaux et Société
Rôle socio culturel des communautés
virtuelles de patients dans le suivi des
maladies chroniques Vers un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?
Soutenu par Géraldine GOULINET – Juin 2013
Sous la direction de: Didier PAQUELIN, professeur des Universités
Membre du jury : Gino GRAMACCIA, professeur des Universités
2
Remerciements
« Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles
que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons
pas qu’elles sont difficiles »
Cet hommage à Sénèque me permet d’ouvrir cette page de remerciements que
je dédie particulièrement à mon mari et mes enfants. Une reprise d’étude après
un parcours professionnel n’est jamais simple.
Se remettre dans un processus intellectuel où toute pensée doit être démontrée
alors que la vie professionnelle nous oblige à agir plus qu’à réfléchir, cet
exercice m’a amené à reconfigurer mon mode de pensée, à réinventer ma
conception de la communication, à redéfinir mon projet de vie.
Sans l’appui quotidien de mes proches qui m’ont soutenue dans toutes les
étapes de cet engagement, à « oser » cette reconversion personnelle et
professionnelle, la tâche aurait été plus difficile.
Un grand merci également à mon directeur de mémoire, Didier Paquelin et à
Gino Gramaccia qui m’ont accompagnée et guidée, chacun à leur manière,
dans ce parcours naissant.
Leurs encouragements à poursuivre mes recherches au-delà de ce mémoire
ont été des signes précieux pour continuer dans cette voie et gagner en
motivation comme en conviction.
3
Avant-propos
Elaborer ce projet de recherche a nécessité maintes fois une adaptation de son
angle d’étude. Au carrefour de plusieurs sciences : biologie, sociales,
éducatives, information et communication, l’objet aurait nécessité un travail
clinique sur un corpus de patients afin de lui donner une dimension et un relief
en accord avec la réalité.
C’est pourquoi mon analyse devait porter initialement sur une plateforme web
d’éducation thérapeutique intitulée CEPIA utilisée par le Centre d’Education
Thérapeutique d’Aquitaine. Elle devait me permettre d’observer les usages et
les pratiques en recherche action.
L’annulation de la commande au cours de mon mémoire m’a contrainte à
reconsidérer l’angle d’analyse et définir une nouvelle problématique sur la
question des TIC dans le suivi des maladies chroniques.
En l’abordant par l’approche des sites de communautés virtuelles de patients,
en recherche descriptive, mon objectif aujourd’hui est de relier ces résultats à
un projet futur mettant en scène l’étude des perceptions de patients.
4
Sommaire
INTRODUCTION GENERALE
I. Mutation du processus communicationnel de la relati on
médecin patient à l’ère du numérique
1. Les asymétries de la relation médecin patient
2. Le numérique et les mutations du processus communicationnel
II. Construction d’une médiation numérique au sein des
pratiques éducatives
1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, enjeux croisés
2. Education et santé, les perspectives de l’éducation thérapeutique ............
III. Place et rôle socio culturel des communautés virtue lles des
patients dans le dispositif éducatif
1. De la communauté à la communauté virtuelle de patients
2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WORLD
CONCLUSION GENERALE
Bibliographie
Table des matières
Annexes
5
Liste des abréviations
HAS : Haute Autorité de Santé
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ETP : Education Thérapeutique du Patient
CNOM : Conseil National de l’Ordre des Médecins
TIC : Technologies de l’Information et de la Communication
ASIP santé : Agence des Systèmes d’Information Partagés de Santé
CNOM : Conseil National de l’Ordre des Médecins
CNAM : Caisse Nationale d’Assurance Maladie
IGAS : Inspection Générale des Affaires Sociales
ALD : Affection longue durée
CM : Case Management
DM : Desease Management
CCM : Chronic Case Management
PM : Population Management
CGEIET : Conseil Général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des
technologies
INPES : Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé
CISS : Collectif Inter associatif Sur la Santé
6
INTRODUCTION GENERALE
La santé c’est "pouvoir tomber malade et s’en
relever; c’est un luxe biologique".
Cette citation de Georges Canguilhem1 pour définir la santé comme « une
capacité à surmonter les crises » est un choix fondé pour introduire les
principaux questionnements soulevés par l’objet de ce mémoire de recherche.
Tout d’abord, parce ce que, pour le philosophe, la notion du rapport de l’être
humain à sa vie est le fruit d’une expérience vécue où la maladie, n’est pas un
phénomène anormal mais « la capacité à vivre une autre vie ». Ainsi ce n’est
pas une partie de la vie d’un individu mais l’ensemble de l’organisme qui se
trouve transformé par le pathologique, nécessitant pour le malade,
l’engagement d’une nouvelle réalité.
Mais au delà de la perception du patient face au pathologique, c’est toute la
posture relationnelle du médecin face au malade que se trouve revisitée par
son approche : « C’est donc bien toujours en droit, sinon actuellement en fait,
parce qu’il y a des hommes qui se sentent malades qu’il y a une médecine, et
non pas parce qu’il y a des médecins que les hommes apprennent d’eux leurs
maladies ».
Cela étant, cette transformation est-elle « intrinsèquement biologique » ou
l’environnement n’a-t-il pas une incidence directe ou indirecte sur ces
changements ? C’est là les questions posées dans les « nouvelles réflexions
concernant le Normal et le Pathologique ». En corrélation des travaux de Michel
Foucault, Canguilhem s’interroge en effet sur la dimension sociale des
changements survenus en raison du Pathologique.
Prenant comme parti pris que « l’homme se débat avec un milieu qui n’est pas
un pur donné mais qu’il construit », santé et maladie sont abordées de manière
1 Georges Canguilhem (1904-1995) philosophe et médecin français, spécialiste d’épistémologie et d’histoires des sciences. Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique (1943), réédité sous le titre Le Normal et le Pathologique, augmenté de Nouvelles Réflexions concernant le normal et le pathologique (1966), 9e rééd. PUF/Quadrige, Paris, 2005.
7
globale sur fond de société. Ainsi et au-delà de la médecine pure, le Normal et
le Pathologique s’inscrivent dans système social normé et organisé, capable
d’intégrer une approche globale centrée sur l’individu (Emile Durkheim, 1897)
avec une démarche holistique tenant compte des facteurs externes (Talcott
Parsons, 1951). Le « corps, l’esprit et le milieu » s’appréhendent de manière
multidimensionnelle au regard de facteurs curatifs, préventifs, éducatifs ou
sociaux.
L’introduction de ce projet de recherche en référence à cet auteur permet donc
d’aborder cette réflexion sous le prisme de la sociologie de la maladie, de la
médecine et de la santé où la question sociale sera plus particulièrement
examinée sous l’angle de la communication médecin malade, de l’éducation du
patient et de l’usage des technologies de l’information et de la communication
dans ce processus communicationnel.
Pour conduire celle-ci, l’axe d’étude portera sur le vécu et l’auto-suivi des
maladies chroniques à partir des communautés virtuelles de patients en vue de
répondre à la problématique suivante : quel(s) rôle(s) socio culturels jouent les
communautés virtuelles de patients atteints de maladies chroniques dans la
construction d’un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?
Par le caractère durable et évolutif, souvent associées à une invalidité et à la
menace de complications graves, les maladies chroniques engendrent des
incapacités et des difficultés personnelles, familiales et socioprofessionnelles
importantes. Ce retentissement de la maladie sur la vie quotidienne et sur la
participation à la vie sociale engage aussi, une dépendance vis-à-vis d’une
thérapeutique, d’une technologie médicale, de l’intervention de professionnels
par le besoin de soins médicaux ou paramédicaux, d’aide psychologique,
d’éducation ou d’adaptation. De plus, l’intérêt pour la prise en charge des
maladies chroniques répond à des enjeux politiques et socio-économiques
forts.
En effet, selon un rapport de Juin 2011, la Caisse Nationale d’ Assurance
Maladie (CNAM) annonce les faits suivants : « 1 Français sur 6, soit 9 millions
8
de personnes, souffre d'une maladie chronique grave comme le diabète, le
cancer, l'hypertension ou la schizophrénie. Et ces chiffres sont en hausse : le
nombre de personnes atteintes de ces pathologies chroniques augmente
d’environ 4% chaque année depuis 2005. (…). Les patients touchés par une
affection de longue durée (ALD) représentent 15,5% de la population du régime
général, le diabète venant de prendre la première place des affections avec 1,9
million de malades, soit une augmentation de 6,5% l'an dernier et un coût
estimé à environ 10 milliards d'euros par an. Si la tendance se poursuit, les
ALD atteindront les 17 % en 2014 2 ».
Parallèlement, l’usage des TIC (technologies de l’information et de la
communication) dans le secteur de la santé est aujourd’hui un fait avéré. Il
constitue en effet une source d’information sur la santé de plus en plus utilisée
par les individus dans différents pays (McDaid et Pack, 2010) et se trouve
mobilisé à différentes étapes du processus de soins, avant et après la
consultation d’un professionnel de la santé, tout au long de la prise en charge
médicale, par les malades comme par les proches. (Christine Thoër, 2012).
A partir des cadres théoriques de référence portant sur la relation médecin-
patient et sur les usages et appropriations de l’internet-santé, la première partie
de ce mémoire cherchera à comprendre la mutation du processus
communicationnel à l’ère du numérique. Du modèle paternaliste au modèle
interactionniste (Anselm Strauss, 1992) qui institutionnalise d’une part le
malade chronique d’un statut de « consommateur » au concept
« d’empowerment » (Wallerstein & Bernstein, 1988, Lackey, Burke, Peterson,
1987) il sera cherché à démontrer d’une part, la participation de la personne, au
moyen d’une prise de conscience de son état et d’autre part la volonté à agir
pour l’améliorer.
2 COLLEN, Vincent. Diabète, cancer : un Français sur six est pris en charge au titre d’une maladie chronique. In : Les Echos.fr [en ligne]. 29 juin 2011. [Consulté le 4 février 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.lesechos.fr/29/06/2011/LesEchos/20963-15-ECH_diabete--cancer---un-francais-sur-six-est-pris-en-charge-au-titre-d-une-maladie-chronique.htm.
9
L’autre point d’interrogation visera plus particulièrement l’interaction de ce
processus avec l’usage numérique afin de corréler avec la littérature les
phénomènes susceptibles d’impacter les comportements des médecins comme
des patients (Jacques Perriault, 2002, Antonio Casilli, 2009).
Ces transformations du système de santé (prévalence croissante des maladies
chroniques, nouvelles modalités de prise en charge et nouveaux usages de
l’internet-santé) posent aussi la question des nouvelles compétences du
médecin et du patient en matière de démarche éducative.
Dans cette logique, c’est la question de l’apprentissage pour assurer la
compréhension des évènements de la vie, pour faire des choix raisonnés et
volontaires (Gilles Hardley, 2009) et pour développer des compétences
spécifiques (Bruner, 1966, Ausubel, 1978, Vygotsky, 1920) qui sera étudié en
deuxième partie de ce mémoire afin d’analyser plus particulièrement la place et
le rôle des communautés virtuelles de patients au sein des pratiques
éducatives et notamment celle de l’éducation thérapeutique du malade
chronique.
Par définition, l’éducation thérapeutique du patient participe à l’acquisition et au
maintien de compétences pour lui permettre de préserver son capital santé. Il
s’agit d’un processus éducatif participatif visant l’appréhension de la maladie
tout en prenant en compte ses caractères psychosociologiques, son vécu et
son environnement. Grâce à l’auto surveillance globale de la maladie, l’auto
mesure de données para cliniques simples, l’adaptation éventuelle des
médicaments, la connaissance et l’action sur les facteurs de risques, la
réalisation de gestes techniques de soins, la prévention de complications
évitables, l’évolution progressive de son environnement, le patient acquière
connaissances et compétences lui permettant de devenir « acteur de sa
santé ».
Après le diagnostic médical de la pathologie, le schéma méthodologique retenu
pour la mise en place d’un processus d’éducation thérapeutique s’appuie
d’abord et prioritairement sur la participation des malades aux décisions
médicales ou/et médico sociales.
10
Dans ce cadre, le prisme des technologies et notamment celles de l’information
et de la communication interfère directement sur l’objet de cette étude. Bien
que peu d’études soient menées sur l’usage d’internet auprès des patients
atteints de maladies chroniques, les tendances confirment, malgré tout, une
connexion aux sites communautaires et aux blogs en ligne comme dispositif
numérique principal d’accès à l’information et de partage de connaissances. Et
les motivations de connexion à ce média sont quasi identique que celle d’un
internaute en recherche classique : mieux comprendre ou en savoir plus sur le
diagnostic du médecin, rechercher des témoignages de personnes souffrant
des mêmes pathologies ou être capable de poser des questions précises au
médecin avant d’aller le voir, telles sont les raisons majeures d’un accès au
web selon la dernière étude menée en Mars 2010 par l’organisme « The Pew
Internet & American Life Project3».
Pour mesurer la construction des savoirs et des compétences d’auto-soins et
d’adaptation (HAS, 2007) des patients membres de ces communautés
virtuelles, l’étude portera plus spécifiquement sur l’analyse sémiotique de trois
sites internet français : BE PATIENT, CARENITY et PATIENTSWORLD qui
seront appréhendés comme dispositifs sociotechniques au travers desquels il
sera plus particulièrement étudié les usages et les pratiques sociales (Christine
Barats, 2013).
Pour ce faire, la méthodologie de l’observation ethnographique en ligne
(Josiane Jouet, 2013) permettra, par l’immersion, d’étudier les formes
d’interactions et de transactions (Peter Stockinger, 2004) au sein de ces
communautés en posant comme grille de lecture la recherche d’indicateurs
techniques et sociaux proposés par le dispositif web et ceux déployés dans les
programmes d’éducation thérapeutique.
Partant de l’hypothèse que l’acquisition de connaissances et de compétences
du patient ne s’intègrent plus dans une simple relation pédagogique entre
apprenant (patient) et enseignant (professionnel de santé) mais dans un 3 SUSANNAH, FOX et PURCELL, Kristell. Chronic Disease and the Internet | Pew Research Center’s Internet & American Life Project. In : [en ligne]. [Consulté le 4 février 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.pewinternet.org/Reports/2010/Chronic-Disease.aspx.
11
système ouvert (web), la question d’un changement possible de paradigme lié
aux pratiques des communautés virtuelles de patients dans l’application des
programmes d’éducation thérapeutique reste entière.
En s’interrogeant sur les conduites d’acteurs en interaction avec le dispositif et
les logiques d’usage, il s’agira de saisir le sens des phénomènes de
communication complexes des trois sites web composant le corpus de cette
étude par la méthodologie de l’analyse sémiotique situationnelle théorisée par
Alex Mucchieli (2007) et modéliser par Marie-Caroline Heïd (2009) dans son
application aux dispositifs socio-techniques.
La troisième partie de ce mémoire tentera donc de répondre à cette
problématique en dégageant deux tendances : l’émergence de nouvelles
fonctions référentielles au sein de la relation thérapeutique et l’apparition de
nouvelles postures éducatives.
12
I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique
Introduction du chapitre Afin de poser les principes fondamentaux de notre angle d’étude, il revient déjà
de se questionner sur les concepts de médecine, de maladie et de malade
dans sa perspective sociale et anthropologique. Cela pour nous permettre
d’analyser et de comprendre plus particulièrement le processus de
communication qui relie le médecin au malade et de caractériser le rôle
d’internet dans celle-ci.
La finalité de cette première partie de mémoire est de qualifier les mutations,
c’est-à-dire les changements, les transformations, les déplacements opérés
avec l’arrivée des dispositifs numériques, pour intégrer les hypothèses
dégagées, à leur application dans les pratiques éducatives du suivi des
maladies chroniques.
Par définition, la médecine est une science, un art, et une technique dont l'objet
est à la fois l'étude du corps humain et de son fonctionnement, ainsi que la
conservation et le rétablissement de la santé4 . Elle est personnifiée par le
médecin, considéré comme l’expert que l’on consulte lorsqu’on est malade5.
Avec l’usage, c’est la personne habilitée à exercer la médecine après avoir été
admise à différents examens sanctionnant plusieurs années d'études
médicales. Enfin, la maladie dans son sens commun, est un état affectant le
corps de l’individu et qui impose de consulter le médecin pour le guérir.
Ce rappel étymologique permet de mettre en relief la dimension sociale et
anthropologique dans laquelle s’exerce la pratique médicale, en fonction des
exigences et des attentes liées à l’environnement et au système de santé
défini. Il invite à s’interroger sur la pratique médicale elle-même et son rapport à
la maladie et au malade.
4 http://www.techno-science.net/?onglet=glossaire&definition=5955 5 du latin medicus –médecin- ou « apte à guérir » ; « qui soigne, guérit »
13
Enfin, il caractérise la posture du médecin et du malade en fonction des
motivations, des perceptions individuelles et collectives.
Sans engager une énumération exhaustive des préceptes qui ont construit la
sociologie de la médecine et de la santé, nous retiendrons les pensées de
Talcott Parsons, Eliot Freidson et Anselm Strauss qui ont marqué son histoire
et son évolution, résumées notamment par le sociologue canadien Marc
Renaud (1985)6 . En abordant la maladie comme une conduite et le malade
comme un objet social, l’intérêt pour notre étude est de corréler les travaux de
ces auteurs qui ont contribué à modéliser la relation médecin-patient avec
l’apparition dans le système de santé de la diffusion massive d’Internet comme
source d’information. En effet, l’augmentation au cours des 20 dernières
années de services interactifs et des sites internet dédiés à la santé semblerait
coïncider avec le désir (réel ou supposé) des patients d’assumer plus de
responsabilités dans la gestion de leur propre santé, voire de leur maladie,
renforçant ainsi l’idée de consommateurs actifs de soins et d’information de
santé. Ainsi, il sera recherché comment interagit le média « Internet » en tant
que source d’information et comment ce dernier s’inscrit-il aujourd’hui dans le
processus communicationnel de la relation médecin-patient.
La question développée à partir de ces cadres de référence est de comprendre
comme s’opère cette mutation dans la gestion des perceptions et des
motivations entre le médecin et le patient pour construire des identités
susceptibles de modifier le rôle et les fonctions de chacun. Pour construire cette
hypothèse, la référence à Antonio Cassilli et ses travaux sur la corporiété
(2009) et à Anthony Giddens sur la réflexivité permettront, entre autre, d’y
répondre.
1. Les asymétries de la relation médecin patient
6 RENAUD, Marc et RENAUD, Marc. De la sociologie médicale à la sociologie de la santé [en ligne]. Chicoutimi : J.-M. Tremblay, 2006. [Consulté le 8 avril 2013]. ISBN 1554420075. Disponible à l’adresse http://classiques.uqac.ca/contemporains/renaud_marc/socio_med_socio_sante/socio_med_socio_sante.html.
14
A. Contextualisation et approches théoriques Comment définir la relation entre le médecin et le patient ? Est-ce un processus
de communication visant uniquement la transmission d’information d’une
personne à une autre ? Pour la psychologie sociale, la communication est un
des modes d’expression de la relation. C’est un moyen à travers lequel des
relations se construisent et se développent. Aussi, avant d’analyser les
modalités de cette communication, attachons nous à formaliser le cadre
contextuel de la relation afin d’apporter un éclairage complémentaire sur la
relation elle-même. Si le contexte révèle le caractère spécifiquement social
d’une relation, nous retiendrons celui du « rôle « afin de comprendre le rapport
établi entre individualité et contexte.
Le rôle désigne un type de comportement adopté par un individu suivant un
ensemble de normes sociales en réponse à des attentes d’autrui dans un milieu
donné. Un aspect particulier de l’étude des rôles sociaux porte sur la façon dont
ils sont appris et intériorisés en fonction d’une culture donnée.
De ce point de vue, il n’existe pas de relation sans rôle. De ce fait, le terme de
relation « médecin/malade » révèle le fait que l’on est dans un cadre social
particulier qui est celui du contexte thérapeutique; et dans un tel contexte, les
caractéristiques individuelles sont structurées, voire transformées par leur
inscription et leur absorption dans un rôle : le rôle de malade, d’un côté, et celui
du médecin, de l’autre.
Si, l’héritage de l’hippocratisme7 a permis de signifier la relation thérapeutique,
les sociologues se sont davantage intéressés à la relation sociale, c’est à dire à
la rencontre entre deux acteurs (le malade et le médecin), tous deux membres
de groupes sociaux divers et engagés dans une action réciproque (le soin).
C’est en 1951 que Talcott Parsons donne le coup d’envoi à la réflexion
sociologique sur la maladie à travers son ouvrage « The social system ». Avant
lui, il n’y avait que très peu de corrélations entre les variables sociales et
7 Aphorismes d’Hippocrate. Il se distingue par sa volonté de théoriser la pratique médicale, en établissant des procédures et des règles fondées à partir de l’observation des maladies, de leurs contextes, de leurs évolutions Cette méthode d’apprentissage de la médecine, fondé sur des maximes et le par cœur perdurera tout au long de l’histoire du métier de médecin. L’ouvrage constitue une sorte de compilation des réflexions hippocratiques. Proposition sur la thérapeutique, sur le régime des malades: " Pour les maladies extrêmes, ce sont les traitements d'une rigueur extrême qui ont la meilleure efficacité." (Aphor. 1ere section, 6).
15
biologiques, en se basant uniquement sur le discours du médecin. Ce que Marc
Renaud confirme comme la règle que « quelqu’un est perçu comme malade
uniquement quand il se dit malade ou se comporte à la façon d’un malade »
devient le fondement des recherches sociologiques visant à comprendre les
raisons du hiatus potentiel entre « l’être » et le « faire », entre l’expérience de
la maladie et la conduite du malade.
L’intuition de Parsons est que le rapport d’un individu à sa maladie est, d’une
certaine manière, la manifestation du rapport que cet individu entretient avec
les valeurs de la société. Dans ce contexte, la maladie, définie comme une
déviance par rapport aux normes sociales, les individus doivent remplir des
fonctions et des devoirs où la médecine permet le contrôle de l’ordre social.
Avec l’hypothèse que le médecin et le malade ont un même but - la guérison -
son approche fait émerger un concept totalement nouveau, celui du rôle du
malade. Assermenté de droits et de devoirs, le patient se voit reconnu dans sa
maladie (bien qu’exempté de ses responsabilités) avec l’obligation de
rechercher l’aide compétente et de coopérer avec le médecin. Cette vision
« paternaliste » de la relation décrit un modèle asymétrique (le médecin est
l’expert qui prend la décision), consensuel (chacun accepte le rôle de l’autre,
puisqu’ils sont complémentaires) et s’inscrit dans la droite ligne des principes
hippocratiques de bienséance8.
L’attribution d’un rôle dédié aux malades amène à s’intéresser plus
spécifiquement « à la gestion des rapports que l’homme entretient avec la
maladie » 9 et plus particulièrement aux comportements de ces derniers,
forgeant ce que David Mechanic identifie comme « Ilness behavior » (1995) et
Erving Goffmann nomme « illness career ».10
8 Dans ce schéma, le médecin entre dans une morale du « bien faire » avec l’obligation d’adapter ses gestes à la fragilité et l’extrême dépendance de celui qui souffre afin de favoriser la guérison du malade. Si ce dernier est exempt de responsabilité, c’est sur le médecin que repose cette dernière au point de décider du bien à la place du malade. 9 MASSÉ, Raymond. Les mirages de la rationalité des savoirs ethno médicaux. In : Anthropologie et Sociétés. 1997, Vol. 21, n° 1, p. 53. DOI 10.7202/015461ar. 10 Avec le concept de carrière, Goffman entendait mettre l'accent sur les aspects « moraux » du rapport à la maladie ou à l'institution, le cycle des modifications qui interviennent dans la personnalité de l'individu avec la prise en charge par le système de soins.
16
Ainsi cette perspective reconnaît d’une part le pouvoir du médecin, en termes
d'expertise technique et de statut, et d’autre part le pouvoir du malade, en
terme de perception et de variations comportementales selon l’influence de
facteurs psycho sociologiques, culturels ou économiques. C’est en raison de
ces derniers que la théorie de Parsons trouve ses limites et ce, pour deux
raisons majeures selon Marc Renaud : « sans remettre fondamentalement en
cause l’existence d’un tel rôle de malade, les études montrent qu’en réalité les
gens ne réagissent pas tous de la même manière devant les mêmes
symptômes et que ce concept s’applique mieux au cas de maladie aigüe… Il ne
permet pas de comprendre les affligés de maladies chroniques. Ici en effet, la
maladie n’est pas temporaire et le malade doit donc s’ajuster à une condition
plus ou moins permanente ».
Ce cadre d’analyse ouvre le champs de la réflexion quelques années plus tard
à deux psychiatres, Thomas Szasz et Mark Hollander qui reprennent ce modèle
et proposent dès 1956 plutôt trois modèles de relations thérapeutique,
directement liés à l'état du malade :
- dans le cas de blessures graves, du coma ou d'un patient soumis à une
anesthésie, la relation prend la forme "activité-passivité" : le malade est un objet
passif, alors que le médecin est totalement actif ;
- dans des circonstances moins graves, le malade est capable de suivre en
partie les conseils du praticien et d'exercer une part de jugement, la relation
fonctionne alors sur le mode de la "coopération guidée" ;
- dans le cas des maladies chroniques qui s'étalent dans la durée (diabète par
exemple), le médecin et le malade ne se rencontrent qu'occasionnellement et le
rôle du médecin consiste à aider le malade à se prendre lui-même en charge. Il
s'agit d'une relation qui prend la forme de la "participation mutuelle".
En ouvrant la perspective que la maladie n’est le seul objet social mais que le
malade peut en être également un produit, amène au tournant des années
1970, une nouvelle façon d’aborder la relation médecin-patient.
Sous l’impulsion des mouvements sociaux et contestataires de l’époque
s’élevant contre le pouvoir médical11, les travaux d’Eliot Freidson s’appuient sur
11 PIERRET, Janine. Entre santé et expérience de la maladie. In : Psychotropes. 22 octobre 2008, Vol. Vol. 14, n° 2, p. 47-59. DOI 10.3917/psy t.142.0047.
17
l’hypothèse que les différents groupes sociaux (les malades/les médecins) ont
des intérêts divergents. Considérant ces derniers comme des acteurs qui
développent des stratégies en fonction de leurs propres intérêts, le sociologue
dans son ouvrage « la profession médicale » 12 fait apparaitre un nouveau
concept, celui d’une communauté professionnelle détentrice d’un savoir acquis
lors de sa formation et considérée comme « experte » face à une communauté
de profane qui consulte le médecin qu’elle juge « que selon des critères extra-
professionnels ».
Sa logique d’opposition faisant de la relation médecin-patient un modèle
conflictuel met en exergue les systèmes d’interactions et/ou
d’interdépendances liées aux savoirs et aux compétences attribuées à chacun :
« Alors que le médecin partage des connaissances spécialisées, une identité et
un loyalisme avec ses collègues plutôt qu’avec les profanes, c’est de ces
mêmes profanes que dépend son existence. Alors qu’il n’a aucun pouvoir pour
les obliger à utiliser ses services, il dépend du libre choix de clients éventuels
(…) L’exercice de la médecine consiste, par essence, en l’action réciproque de
deux séries de normes différentes et parfois contradictoires »13
Aux antagonismes culturels (culture professionnelle et culture profane) qui
impactent les logiques des acteurs (logique de soin pour le médecin et respect
de la vie quotidienne pour le patient), le sociologue met particulièrement en
évidence la notion d’autonomie professionnelle du médecin.
Perçue comme la capacité acquise par la médecine au début du 20ème siècle
d’évaluer et de contrôler elle-même l’aspect technique de son travail à partir de
ses compétences scientifiques, cette autonomie considérée comme
« technique » favorise le contrôle dominant de la profession y compris sur 12 La profession médicale, Paris, Payot, 1984, 369 p. Traduction française de : Professiono f Medicine. A Study of the Sociology of Applied Knowledge (New York, Dodd, Mead and C°,1973) par A. Lyotard-May et С.Malamoud; préface de С. Herzlich 13 LUNATIC. Eliot Freidson – Influence du client sur l’exercice de la médecine | Bafouillages. In : Bafouillages [en ligne]. [Consulté le 8 avril 2013]. Disponible à l’adresse : http://blog.bafouillages.net/2007/06/12-eliot-freidson-influence-du-client-sur-l-exercice-de-la-medecine/. \line{}Blog consacré aux sciences humaines et sociale en général, à la sociologie en particulier\line
18
l’environnement socio-économique. C’est en ce sens que son ouvrage analyse
le pouvoir dédié à la profession médicale au sens de communauté 14 (intérêts
partagés et d’identité commune) alors que l’autonomie du malade est
davantage perçue, non en qualité de compétences, mais en capacité de
décision et de négociation uniquement lors de la consultation. Ce constat repris
par Isabelle Baszanger (1986) spécifie l’asymétrie relationnelle en indiquant
que « toutes les interactions médecins-malades sont sous-tendues par un
conflit de perspectives qui vient renforcer la nature structurelle dissymétrique
des positions de chacun dans cette relation ».
Cette divergence d’intérêts, porteuse de conflits qui définissent les situations
d’actions est le cœur de la théorie de l’ordre négocié soutenue par Anselm
Strauss (1978). Si cet auteur a concentré une partie de sa réflexion aux
questions des mécanismes organisationnels, c’est sous l’angle de
« trajectoire » que nous focalisons l’attention.
Strauss remarque en observant le déroulement de l'activité médicale qu'elle
s'inscrit dans un processus complexe, orientée vers la réalisation d'un objectif,
qui engage le malade et les acteurs dans sa réalisation.
Partant de cette base, il définit une unité d'analyse qui lui semble fondamentale
pour étudier la production et la négociation de l'ordre social, la trajectoire.15.
La définition de Strauss indique donc que l'ensemble des acteurs est impliqué
dans le travail médical, aussi bien le médecin que le patient lui-même. En effet,
la coopération que peut apporter le patient dans le bon déroulement de l'activité
médicale est fondamentale – et de même, le médecin travaille à ce que le cours
de la maladie évolue favorablement. Complétant la théorie de Parsons, Strauss
montre donc que le patient doit jouer son rôle en suivant certaines normes, qui
sont propres à son statut de malade.
14 GOODE, William J. Community within a community: the professions. American Sociological Review, 1957, vol. 22, no 2, p. 194-200. 15 « Le terme de trajectoire, (...) fait référence non seulement au développement physiologique de la maladie de tel patient mais également à toute l'organisation du travail déployée à suivre ce cours, ainsi qu'au retentissement que ce travail et son organisation ne manquent pas d'avoir sur ceux qui s'y trouvent impliqués. », (Strauss, p. 143)
19
Complexifiées par ces incessantes négociations entre les différents acteurs qui
entrent dans sa réalisation, les trajectoires sont affectées par de fortes
contingences telles que les évolutions technologiques, nécessitant une
adaptation permanente. Si le diagnostic médical permet d’établir un schéma de
trajectoire, les complications médicales, les erreurs, le possible refus de
coopération du patient, rendent la progression de la trajectoire plus ou moins
indéterminée. Strauss remarque alors que le médecin, pour appliquer le
schéma de trajectoire, doit tenter de visualiser certaines phases de la trajectoire
pour que l'assemblage des efforts collectifs soit relativement ordonné. C’est
dans ce processus d'articulation que réside pour une grande part la réussite
médicale et la mise en place d'un ordre social.
Face aux différentes sources d'aléas, les acteurs doivent adopter des
stratégies d'articulation et recourir fréquemment à la négociation pour
réarticuler le travail lorsque celui-ci est fragilisé. De ce point de vue, le rôle du
patient est très important puisqu'il permet souvent, par les négociations qu'il
tente pour améliorer son état, de réenclencher un processus d'articulation,
notamment lorsque la trajectoire prend une tournure critique.
Les modèles de Parsons et de Szasz et Hollander nous invitent à percevoir le
sens de la relation, organisée du médecin vers le malade. L’asymétrie nait d’un
phénomène de subordination qui d’ailleurs est largement décrit par Freidson.
La perception d’Anselm Strauss transforme l’orientation de cette asymétrie qui
sera d’ailleurs modélisée par Emmanuel et Emmanuel en 199216 en favorisant
la participation du patient aux décisions médicales, (C.Fournier et S.Kernazet,
2007).
Figure 1 : Comparaison des différents modèles de la relation m édecin-patient retenus
par Emanuel et Emanuel (1992) .
INFORMATIF INTERPRETATIF DELIBERATIF PATERNALISTE
Valeurs du Définies, fixées et En construction Ouvertes à un Objectives et
16 Emanuel EJ, Emanuel LL. Four models of the physician-patient relationship. JAMA 1992 ; 267(16) :2221-6
20
patient communiquées par
le patient
et conflictuelles,
nécessitant une
élucidation
développement et
à une révision à
travers un débat
moral
partagées par le
médecin et le
patient
Devoirs du
médecin
Fournir une
information
factuelle pertinente
Mettre en œuvre
l’intervention
choisie par le
patient
Elucider et
interpréter les
valeurs du patient
utiles
Informer le
patient
Mettre en œuvre
l’intervention
choisie par le
patient
Articuler et
convaincre le
patient des
valeurs les plus
admirables
Informer le patient
Mettre en œuvre
l’intervention
choisie par le
patient
Promouvoir le
bien-être du
patient
indépendamme
nt des
préférences qu’il
exprime
Conception
de
l’autonomie
du patient
Choix et contrôle
du soin médical
Compréhension
de soi utile au
soin médical
Auto-
développement
moral utile au soin
médical
Assentiment à
des valeurs
objectives
Conception
du rôle du
médecin
Expert technique
compétent
Conseiller Ami ou
enseignant
Gardien, tuteur
Cette approche « centrée sur le patient », soulevée dans l’article de Cécile
Fournier et Sandra Kernazet17 « prend en compte l’expérience unique vécue
par le malade: le médecin n’est plus amené à établir un diagnostic mais à créer
un espace de travail non directif dans lequel le patient pourra cheminer vers un
changement souhaité ».
Maintenant que nous avons pu sérier le concept de relation et sa
contextualisation au regard des cadres théoriques de référence, comment peut-
on définir le processus communicationnel de cette relation pour comprendre
l’analyse des mutations possibles à l’ère du numérique ?
17 FOURNIER, Cécile et KERZANET, Sandra. Communication médecin-malade et éducation du patient, des notions à rapprocher : apports croisés de la littérature. In : Santé Publique. 15 décembre 2007, Vol. Vol. 19, n° 5, p. 413 �425. DOI 10.3917/spub.075.0413.
21
A cela, il paraît nécessaire de clarifier que la notion de processus de
communication qui sera plus spécifiquement abordée, est celle qui propose une
approche centrée sur la transmission d’informations dans les interactions
homme-machine.
En introduction de son ouvrage, Constantino Landolo 18 affirme que
« L’instrument essentiel par lequel s’instaurent et se développent les relations
et les interactions humaines est la communication, c’est-à-dire la capacité de
transmettre aux autres des idées, des faits, des sentiments, des concepts ; et
de les recevoir de la part de ceux qui nous les transmettent. »
De fait, la communication ne peut se limiter au transfert d’une information entre
une source et une cible qui la reçoit. Loin d’être un système linéaire, de
conception télégraphique et sans ancrage social (Shannon et Warren, 1975),
elle s’inscrit dans un processus d’interactivité circulaire (Norbert Wiener, 1950)
constitué d’une boucle de rétroaction (feed back positif ou négatif) où le
langage constitue en lui-même un élément complexe (Roman Jakosbson,
1963) intégré dans un système d’information.
L’intérêt de poser le modèle de Jakobson, en vis à vis des théories de la
sociologie de la santé, est qu’il vise à saisir la communication humaine dans
toute sa complexité. Aux trois éléments de base (Emetteur/récepteur/message),
il dégage six facteurs auxquels il fait correspondre six fonctions communicatives
spécifiques.
- La fonction expressive :
Elle renvoie à l’émetteur et concerne la personnalisation du message. Le
message ne décrit plus seulement une réalité objective mais est imprégné par
les manifestations physiques et psychologiques de l’émetteur.
- La fonction conative :
Elle concerne l’effet du message sur le destinataire. Dans le message, il s’agit
des éléments destinés à susciter une réaction de la part du récepteur (émotion,
action, réponse verbale...)
18 LANDOLO, Costantino et VITALI, Martine. Guide pratique de la communication avec le patient : techniques, art et erreurs de la communication. Paris : Masson, 2007. ISBN 9782294701450 2294701453.
22
- La fonction phatique :
Elle est assurée par tous les éléments du langage permettant de vérifier si le
message est bien transmis et compris. Cette fonction est essentielle pour
permettre de maintenir des échanges comportant le moins possible de
malentendus entre les interlocuteurs.
- La fonction métalinguistique :
Elle s'exerce lorsque l'échange porte sur le code lui-même et que les
partenaires vérifient qu'ils utilisent bien le même code. Cette fonction consiste
donc à utiliser un langage pour expliquer un autre langage.
- La fonction référentielle :
Elle indique le contexte par rapport auquel le message prend du sens.
- La fonction poétique :
Elle s’exerce sur le message en lui-même dont la forme a une valeur
expressive propre. Cette valeur varie selon les mots choisis, l’intonation, les
mimiques.
Appliquées à la communication verbale, les fonctions de Jakobson s’intègrent
dans le cadre de la relation interpersonnelle entre le médecin et le malade.
Intégrées au dispositif socio-technique19 que représente le web, elles sont une
grille d’analyse de contenu (texte, image et signe) permettant de décoder les
modalités de communication et de saisir les médiations techniques qui s’y
opèrent à travers les différentes fonctionnalités proposées, organisées et
structurées.
L’inscription de ce processus dans une interaction homme-machine renvoie de
fait à l’approche cybernétique de la communication née avec l’Ecole de Palo
Alto et théorisée par Norbert Wiever20.
19 Cette appellation fait référence aux réflexions de Laurence Monnoyer-Smith qui appréhende le web dans son approche dédiée aux sciences de l’information et de la communication « comme un complexe hétérogène de pratiques, d’organisations, de savoirs et de machines qui vise à saisir la dimension communicationnelle des médiations techniques à l’œuvre et en son sein. L’originalité des SIC réside dans son aptitude à tenir ensemble la dimension technique du web replacé dans son environnement sociotechnique ainsi que l’ensemble complexe des médiations sociotechniques qui le font exister ». 20 Norbert Wiener, mathématicien américain, théoricien et chercheur en mathématiques exposa ses théories sur la cybernétique dans son livre « Cybernetics or Control and Communication in the Animal and the Machine » en 1948.
23
Hasard ou non, il s’avère que les premiers travaux sur la cybernétique ont été
déployés en psychiatrie et se sont traduit par le fait que le thérapeute ne
considérait plus son patient comme un individu isolé sur lequel il devait poser
un diagnostic psychiatrique mais s'intéressait aux interactions du patient avec
son environnement.
En passant d'une explication individuelle, linéaire et diachronique à une
explication systémique, circulaire et synchronique, l’émergence du web devient
un outil communicant 21 et l’individu un être social22, défini par ses relations
d’échanges et « branché » à un vaste réseau de communication : « L’homme
n’est donc plus individu face à la société, mais un élément qui vit par la société.
La personnalité, le caractère, les sensations, les sentiments ne sont plus
constitutifs de l’homme. Seul compte sa capacité à communiquer ». 23
B. Internet et santé : de la pratique aux usages Depuis plus de vingt ans, les technologies de l’information et de la
communication ont connu, dans le domaine de la santé, un développement
considérable, notamment en ce qui concerne internet.
Cet engouement rejoint les motivations liées à l’usage du web en général où les
conditions de vie (la santé en faisant partie) et l’éducation apparaissent comme
des préoccupations d’intérêt public majeures. C’est en tout cas ce que
démontre l’enquête mondiale sur son utilisation, proposée par l’organisme
21 Wiener ne fait pas de différence entre les êtres naturels (humains par exemple) et les êtres artificiels (machines); ils ne sont pas comparés par leur nature apparente, mais uniquement de par leur comportement effectif. Il pense que la société peut uniquement être comprise à travers l’étude des messages et des facilités de transmission qui lui sont propres. 22 Breton explique que selon Wiener « L’homme n’est plus en tant qu’être un centre d’où tout part et ou tout revient, comme dans les conceptions classiques, mais il représente un élément intermédiaire du vaste processus de communications croisées qui caractérisent une société. (1997) 23 BRETON, Philippe. L’utopie de la communication entre l’idéal de la fusion et la recherche de la transparence. In : Quaderni. 1996, Vol. 28, n° 1 , p. 125�133. DOI 10.3406/quad.1996.1147.
24
Internet Society en 201224. Elle confirme que les personnes interrogées se
disent très enthousiastes sur son rôle potentiel à résoudre certains fléaux et
que les renseignements présents sur le web permettraient également
d’améliorer les conditions de vie, selon 63% des sondés.
Cette utilisation serait-est liée historiquement à la recherche et la transmission
d’information en matière de santé ? En effet, si le médecin constituait
(Boltanski, 1971) et constitue encore aujourd’hui la principale source
d’information des patients25 (Kivits, 2006), les connaissances en matière de
santé se transmettent parallèlement, grâce au processus de socialisation, au
sein de la famille, à l’école et à travers les médias traditionnels écrits ou
audiovisuels. L’apparition de dispositifs appuyés sur les TIC devient un vecteur
d’information au même titre que les autres médias, à la fois en tant que
producteur et récepteur de celle-ci (Kivits, 2012).
Par ailleurs, les travaux menés depuis les années 2000, notamment dans le
domaine des sciences sociales, cherchant à signifier l’utilisation massive de
l’internet santé, ont permis de corroborer cette problématique avec d’autres
thèmes tels que la nouvelle autonomie du patient ou l’acquisition de nouveaux
savoirs (Kivits, 2012).
Cette double intention amène à considérer internet-santé sur deux angles
particuliers : le regard des « Medias Studies » c’est-à-dire l’étude de cette
technologie comme une expérience de la vie quotidienne, intégrée aux
pratiques des utilisateurs qui, selon Silverstone et Hirsch26 se sont appropriés la
« culture technologique ». Dans le cadre de notre étude, cela rejoint les travaux
24 ANON. Étude : l’usage d’Internet dans le monde en 2012. In : Le blog du Modérateur [en ligne]. [Consulté le 9 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.blogdumoderateur.com/etude-usage-internet-dans-le-monde-en-2012/. 25 Guide HAS 2012 : RECOMMANDATION DE BONNE PRATIQUE MEDICALE : Délivrance de l’information à la personne sur son état de santé 26 SILVERSTONE, Roger. Consuming technologies: media and information in domestic spaces. New York [u.a. : Routledge, 1994. ISBN 0415117127 9780415117128.
25
de Mallein et Toussaint27 qui ont particulièrement étudié le rôle de ce média par
l’analyse des différents modes d’appropriation et des conditions sociales de son
intégration.
L’autre regard est que l’internet-santé, en tant qu’objet technologique, ne peut
être ignoré tant il (re)questionne les thèmes classiques de la sociologie de la
santé, abordé dans le précédent chapitre, tels que les relations médecin-
patient, les savoirs profanes, le vécu des maladies. En ce sens, la
problématique n’est plus centrée sur l’outil mais sur l’individu.
Ce positionnement ancre fortement les usages d’internet dans un contexte
« santé », reliant toutes les actions individuelles ou interindividuelles à un cadre
social défini, l’action devant être également expliquée par des facteurs
structurels. Autrement dit, il s’agit de trouver dans l’usage conçu en tant
qu’action, sa signification sociétale.
Ainsi, au regard des études et enquêtes menées sur l’utilisation d’internet-
santé, il s’agit bien là d’une pratique non seulement avérée mais totalement
insérée dans un environnement socio-culturel grâce aux espoirs des progrès
sociaux, au développement de la technologie comme à la démocratisation de
l’accès à internet28.
Pour comprendre plus en détail les pratiques individuelles et collectives des
dispositifs numériques appliqués à la santé, Madeleine Akrich et Cécile Méadel
(2004) ont synthétisé les auteurs qui ont tenté de classifier les typologies
d’applications selon des logiques variées :
27 MALLEIN, Philippe et TOUSSAINT, Yves. «L’intégration sociale des technologies d’information et de communication: une sociologie des usages», Technologies de l’information et société, Québec, Vol. 6, n 4, pp. 315-335. TECHNOLOGIES D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION, QUOTIDIEN ET MODES DE VIE (URBAINS): CONTOURS ET RESULTATS DE LA, 2005, p. 250. 28 Une étude conduite dans 7 pays européens indique que proportion des personnes utilisant internet santé (au sein de l’ensemble de la population) est passée en moyenne de 42,1% en 2005 à 53,3% en 2007. ANON. Internet et santé: acteurs, usages, et appropriations. Québec : Presses de l’Université du Québec, 2012. Collection Santé et société. ISBN 9782760535213. \line{}RA773.6 .I56 2012\line
26
• La logique médicale de Vincent Hazebroucq (2003 )29
Il distingue ainsi 7 familles d’utilisation : échanger les avis entre professionnels,
assister à distance les patients, surveiller à domicile, pratiquer des actes
médicaux à distance, organiser la circulation des données dans un réseau de
santé, délivrer des enseignements et participer à la gestion des systèmes de
santé.
• La logique de relations de Gunther Eysenbach (2001)
Son choix, classer les applications en fonction de la nature des relations
qu’elles construisent et les répartir en trois catégories empruntées au
commerce électronique, le B2C : interactions entre professionnels (B de
Business) et patients (C de Consumer), le B2B : relations et échanges de
données entre professionnels et le C2C : échanges entre patients seuls. Ses
idées et son approche sont à l’origine du concept de « Medecine 2.0 »
Figure 2 : Modélisation du concept de Medecine 2.0 (e-santé) par Gunther Eysenbach
29 Rapport sur l’état des lieux, en 2003, de la télémédecine française
27
Selon le modèle dépeint dans la Figure 1, cinq aspects majeurs apparaissent
dans la construction du Web 2.0 en santé selon Gunther Eysenbach. Autour
des services médicaux, de la prise en charge en soin, de la recherche
scientifique, on voit en effet se profiler des pratiques émergentes que sont :
1) le réseau social,
2) la participation,
3) l’apomediation30,
4) la collaboration
5) l’ouverture des données
• La logique par projets expliquée par Madeleine Akri ch et Cécile
Méadel
Face à la recherche d’une rationalisation de l’organisation sanitaire et de
l’amélioration des soins (permettant de renforcer la coordination des
professionnels et de mobiliser plus rapidement l’expertise des spécialistes), la
mise en place de dispositifs numériques sont, pour les patients, un moyen
d’accès à l’information médicale, d’acquisition de compétences susceptible de
remettre en cause le modèle asymétrique de la relation médecin-patient.
Pour ramener ces typologies de pratiques au sujet de notre étude, nous
retiendrons donc plus particulièrement les deux dernières approches afin
d’orienter l’angle de recherche, non dans le sens du rapport descendant
«médecin/patient », mais dans une dynamique ascendante du patient vers le
médecin, au travers l’usage des communautés virtuelles de patients atteints de
maladies chroniques.
C’est pourquoi cherchons à combiner les deux théories des usages, l’une
axées sur l’étude du média, l’autre sur les motivations des individus, pour
analyser dans un premier temps ce qui peut avoir été transformé, supprimé,
30 Terme forgé pour éviter l’usage de l’expression Web 2.0 dans les débats académiques, qui signifie l'état que tient ce média à relier les gens et les informations (faire de la médiation) sans pour autant être acteur volontaire de ce contact. Gunther Eysenbach (2008) “Medicine 2.0: Social Networking, Collaboration, Participation, Apomediation, and Openness”, Journal of Medical Internet Research. ANON. Débuguer nos cancers. In : [en ligne]. [Consulté le 11 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://owni.fr/2012/10/02/debuguer-nos-cancers/. \line
28
maintenu ou créé dans le processus de communication de la relation médecin-
patient avec l’usage des TIC.
Autour des trois principaux usages liés à Internet-santé que sont : la recherche
d’information, l’échange d’expériences et la participation à la construction des
savoirs (Kivits, 2012), tentons de rapprocher le modèle de relation médecin
patient Emanuel et Emanuel (1992) avec la grille d’analyse sociologique de
l’usage des TIC réalisée par Mallein et Toussaint (1994) afin de mettre en
évidence l’importance des significations d’usages dans l’appropriation du
dispositif socio-technique et ce, pour nous permettre d’identifier les éléments de
la mutation.
2. Le numérique et les mutations du processus commu nicationnel
A. Du physique au virtuel : la fin de l’hégémonie paternaliste au transfert de postures relationnelle s
La conception d’un médecin « gardien, tuteur » face à un patient consentant tel
que modélisé par Emanuel et Emanuel (1992), nous l’avons vu, trouve ses
limites théoriques avec l’approche conflictuelle d’Eliot Freidson. Elle s’entend
également par son contexte historique qui a progressivement déconstruit le
pouvoir médical et la médicalisation de la société pour organiser un nouveau
contrat entre société et médecine (Janine Pieret, 2008).
En posant les questions d’autonomie, de responsabilité et de droit au cœur
d’une médecine du risque et non plus d’une médecine de la maladie, « la
question de l’information, de l’éducation et de responsabilisation devient une
préoccupation centrale et ce, d’autant que le développement d’association de
malades et d’usagers conduit à s’interroger sur son impact et son effet (….) On
assiste alors au développement de prises de paroles hétérogènes et à des
29
configurations variables entre les acteurs selon les problèmes (médecins,
scientifiques, politiques, médias, industriels, malades…)31 .
Renforcé par les crises sanitaires et le développement de maladies de longue
durée (VIH, cancer, maladies chroniques), ce n’est donc pas dans un
processus linéaire mais dans un esprit de revendications d’autonomie et de
savoir profane du corps (mouvements revendicatifs des années 1980 de
résistance civile électronique) de la part des communautés de patients contre
les institutions médicales que s’est ainsi construite la culture numérique.
L’arrivée d’internet-santé contribue définitivement à supprimer cette vision
subordonnée du patient au médecin, pleinement garant de son bien-être,
indépendamment des préférences qu’il exprime.
Dès lors, les 1er hackers mettent leurs compétences informatiques au service
des malades, le médecin devient alors une ressource parmi d’autre,
concurrencée par les communautés en ligne, les forums de discussions, ou les
bases de données ouvertes32.
Si l’arrivée des dispositifs numériques entraîne la suppression du modèle
paternaliste, ils pérennisent la vision informative soutenue par Emanuel et
Emanuel (1992) et ce, en raison du maintien d’une posture d’expertise
médicale acquise avec l’appropriation des nouvelles technologies. Nous
entendrons d’ailleurs ici la notion « d'appropriation » la mise en évidence la
disparité des usages et des usagers en montrant la construction sociale de
l'usage, notamment à travers les significations qu'il revêt pour ce dernier
(Millerand, 2008).33
Adossée à la grille d’analyse sociologique des TIC, telle que définie par Mallein
et Toussaint (1994), la perception de cette technologie dans le processus
communicationnel s’insère dans une rationalité de la cohérence socio- 31 PIERRET, Janine. Entre santé et expérience de la maladie. In : Psychotropes. 22 octobre 2008, Vol. Vol. 14, n° 2, p. 47-59. DOI 10.3917/psy t.142.0047. 32 CASILLI, Antonio A. Usages numériques en santé : conflictualité épistémique et sociale dans les communautés de patients en ligne. In : Internet : des promesses pour la santé ? 2011, p. 181-191. 33 MILLERAND, Florence. Usages des NTIC : les approches de la diffusion, de l’innovation et de l’appropriation (2e partie). In : Commposite. 28 mai 2008, Vol. 3, n° 1, p. 54-73. \line
30
technique dans le sens où « le nouveau dispositif trouve sa place dans un
ensemble social, culturel, technique, organisationnel, relationnel préexistant. »
Intégration sociale des technologies d’information et de communication : une sociologie des
usages – Mallein et Toussaint, 2004
Figure 3 : Concepts clés des deux rationalités
Usage et rationalité de la cohérence socio -
technique
Usage et rationalité de la performance
techno-sociale
Banalisation Idéalisation
Hybridation Substitution
Evolution sociale Révolution sociale
Identité active Identité passive
Le rapport sur l’état des lieux, en 2003, de la télémédecine française rédigé par
le Dr Vincent Hazenbroucq est l’exemple d’une appropriation de l’internet-santé
pour une pratique médicale. Au même titre que les progrès médicaux ont
permis aux médecins d’assurer compétence et expertise auprès des patients
pour leur assurer la meilleure intervention dans un cadre concerté et négocié
(Alsem Strauss), la e-santé devient l’instrument de contrôle du soin médical.
L’information, le partage d’information, quelle soit médicale ou de santé34 par le
praticien restent dans ce cadre précis, sous surveillance du professionnel de
santé : « La télémédecine n’est cependant pas une innovation de la Société de
l’information, puisque de nombreuses expérimentations exploitant notamment
la télévision analogique datent des années 1950, et que de nombreux projets
de recherche ont été développés, en vue de la conquête de l’espace, dès les
34 ROMEYER, Hélène. TIC et santé : entre information médicale et information de santé. In : tic&société [en ligne]. 13 octobre 2008, n° Vol. 2, n° 1. [Con sulté le 3 mai 2013]. DOI 10.4000/ticetsociete.365. Disponible à l’adresse : http://ticetsociete.revues.org/365. \line « Sous l’effet des technologies d’information et de communication (TIC), deux types distincts d’informations à propos des thématiques de santé émergent : information de santé (grand public, non spécialisée) et information médicale (professionnelle). Gagnant peu à peu les supports de presse, cette distinction est extrêmement prégnante sur l’Internet. Ces deux informations renvoient par ailleurs à de nouveaux usages en matière d’informations sur la santé et à une certaine forme d’industrialisation d’une information jusque-là publique et scientifique, tout du moins en France ».
31
années 1970. La National Aeronautics and Space Administration (NASA)
cherchait alors à garantir la surveillance médicale et la santé des futurs
astronautes et a financé de nombreuses études de télémédecine. Cependant,
les possibilités ouvertes par deux avancées techniques plus récentes,
initialement distinctes mais désormais confluentes, ont déclenché une véritable
renaissance de la télémédecine clinique ».
En ce sens, la place du patient est strictement encadrée dans un modèle où les
compétences sont placées du côté des professionnels, ceux-ci ayant de plus le
monopole de la définition de l’information pertinente pour le patient.
La capacité d’action du patient est limitée à ce que le médecin veut bien lui
octroyer. Il peut être associé au suivi dans le cas d’une télésurveillance mais
son rôle est clairement défini comme celui d’un auxiliaire médical dont la
coopération permet le bon fonctionnement du dispositif, à l’exclusion de toute
participation, à l’interprétation et encore moins à la prise de décision (Akrich et
Méadler, 2004). L’asymétrie de relation médecin patient, identifiée dans le
cadre d’une communication interpersonnelle physique se trouve ainsi
transférée, dans les pratiques médicales, avec l’usage des dispositifs
numériques.
Pour autant, si les usages d’internet-santé semblent s’opérer dans un
continuum de pratiques, des résistances au changement persistent. Dans son
blog, Sia Partners35, pose plusieurs remarques à l’action menée par l’ASIP
Santé (Agence des Systèmes d’information Partagés), organisme public chargé
d’accompagner l’émergence de technologies numériques en France : « La e-
santé, bien que fortement encouragée par le gouvernement, peine à trouver sa
place dans le système de santé français. Or, contrairement aux idées reçues, le
frein n’est pas nécessairement financier. Certes, investir dans les technologies
de l’information a un coût, mais la vraie difficulté est en réalité culturelle.
35 ANON. Stratégie RH, le portail RH & Change de Sia Conseil. In : [en ligne]. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://rh.sia-partners.com/20120918/la-e-sante-en-france-une-revolution-culturelle-a-operer/. Société de consulting experte dans l’organisation, les transformations, le management, les systèmes d’informations. http://www.sia-partners.com/
32
Remettre en cause les pratiques et les habitudes des praticiens revient peu ou
prou à remettre en cause leur métier et de fait, leur rôle dans la société ».
Aussi, l’une des transformations majeures détectée avec l’émergence du
numérique dans le processus communicationnel de la relation médecin patient
ne serait pas fondamentalement d’ordre technologique mais d’ordre socio-
culturel, par une reconfiguration identitaire de l’un et de l’autre.
B. Des transformations identitaires à la création d e
« l’empowerment » du patient
La caractéristique essentielle du changement opéré par les TIC provient
incontestablement de la visibilité technologique offerte de passer d’une sphère
privée à une sphère publique. Dès lors que la médecine est devenue une
institution de contrôle médical dans les années 1950, dès lors que la logique
médicale se trouve remise en question dans les années 1970, dans son
autonomie et sa toute puissance à gérer la santé publique (Janine Pierret,
2008), internet santé remodèle incontestablement les frontières spatio-
temporelles de l’espace public et de l’espace domestique. A ce titre, il propose
une nouvelle vision de la modernité dans le sens où le progrès réalisé vient
s’opposer à la culture antérieure d’un système, circonscrit dans son
organisation informationnelle.
Formalisée par les travaux d’Antony Giddens (1990), il met en valeur trois
notions essentielles à la dynamique de la modernité36 :
36 La théorie de la modernité de Giddens tente d'expliquer les changements intervenus, avec la globalisation du monde, dans les relations sociales. Les conséquences de ces ruptures sont analysées à trois niveaux: • Celui des institutions de la modernité, • Celui des transformations de l'intimité, du soi, • Celui des relations sociales. Son objectif est de proposer un tableau d'ensemble des relations sociales, sans penser la "société" comme un tout unique, en réunissant dans une même analyse les faits sociaux dans leur diversité.
33
• La séparation du temps et de l'espace,
• Les mécanismes de délocalisation des relations sociales,
• L'appropriation réflexive des connaissances
La référence à cet auteur justifie d’une part, les changements opérés avec
l’arrivée du web dans ses critères spatio-temporels, nous venons de le voir, et
permet d’autre part, d’appréhender la notion d’appropriation réflexive des
connaissances au travers les notions d’individualité et d’auto-identité.
Ainsi, en mettant l'accent sur le processus d'individualisation, c'est à dire la
construction de l'individu, de l'identité, et d'un style de vie, la modernité, telle
que conçue par l’auteur, n’est pas le déclin de liens sociaux, mais leur
transformation, via les mécanismes de modification de l'intimité.
L’autre notion clé que nous retiendrons est celle de l’auto identité. Par la
réciprocité des attentes et la confiance mutuelle dans ses proches, l'individu
assure le développement de l'identité du moi (l'acquisition d'une identité
sociale), et la diffusion du rôle.
Ce bouleversement des rapports constitue l’un des phénomènes de brouillage
expliquant d’une part les transformations identitaires des acteurs mais
également les motivations d’usage en fonction de ces derniers. Ce que Josiane
Jouët37 appelle « un mouvement spatial qui conduit à la fois à transporter son
univers privé dans l’espace public et à accéder à l’espace public à partir de
chez soi » devient le lieu de nouveaux comportements et modes opératoires
(Florence Millerand, 1999).
Pour compléter cette approche, la référence aux traces mémorielles faisant de
« l’usage une sorte de rétroaction qui influe sur celui qui s’en sert et crée une
empreinte qui modifie progressivement le milieu »38 (Jacques Perriault, 2008)
37 JOUËT, Josiane. Retour critique sur la sociologie des usages. In : Réseaux. 2000, Vol. 18, n° 100, p. 487-521. DOI 10.3406/reso.2000.2235. 38 BOENISCH, Gilles. Jacques Perriault, La logique de l’usage. Essai sur les machines à communiquer. In : Questions de communication. 1 août 2009, n° 15, p. 503 �504. \line{}
34
nous ramène au schéma de Emanuel et Emanuel (1992) sur la relation
médecin-patient dans son modèle interprétatif.
Opportunité d’un nouvel ordre négocié pour les médecins, les TIC offrent donc
des perspectives nouvelles au sein des pratiques médicales dans le rôle de
conseiller, d’accompagnement et de soutien psychologique des malades,
notamment à travers leurs échanges avec d’autres patients concernés par la
même maladie.
Lors de la troisième édition des débats du CNOM (Conseil National de l’Ordre
des Médecins) organisée en mai 2010 , autour du Docteur Jacques LUCAS,
Vice - Président du CNOM et du Docteur François STEFANI, Vice - Président
de la section éthique et déontologie du CNOM sur la thématique : « Vers une
meilleure intégration d’internet à la relation médecin-patient », il est affirmé que
« l’outil leur offre des clés pour leur permettre de mieux dialoguer avec leurs
médecins et de bâtir ainsi une relation constructive ».
Afin que les professionnels de santé puissent appréhender l’usage d’Internet au
sein de leur relation avec leurs patients, le Docteur Lucas, émettra même le
souhait que « les facultés de médecine intègrent une formation sur les
Technologies de l’Information et de la Communication, dont Internet, dans le
cursus universitaire ».
Cette position affirmée de vouloir inscrire l’usage des TIC dans l’enseignement
médical démontre l’existence de « patterns d’usage » dans le rapport au
pouvoir entretenu au sein d’un groupe comme le reflet de phénomène de
reproduction « héréditaires », détaillé par Proulx et Laberge. (Millerand, 1999).
Ainsi, la valeur du médecin conseil, chargé du « pouvoir » et du « savoir » lui
permettant d’informer le patient et de mettre en œuvre l’intervention choisie par
lui, serait décuplée avec les capacités technologiques du web.
A cette appropriation médicale s’oppose celle des patients, fondée sur une
identité active face à la technologie, comme principe de revendication libertaire
et d’autonomie (Mallein et Toussaint, 1994).
35
Facteur d’émancipation du patient, internet santé reconfigure donc également
pour eux le processus communicationnel : « Internet est plus qu’un moyen de
diffuser de l’information médicale. Il devient l’environnement dans lequel les
rôles traditionnels et les relations entre professionnels de la santé et les
usagers apprécient d’avoir un contrôle croissant sur la sélection, la diffusion et
même l’interprétation des informations médicales » 39(Wikgren, 2001).
La question du devoir d’information par le médecin et d’association à la prise de
décision, légitimée en France par la loi dite Kouchner du 4 mars 200240, pose
les principes fondamentaux de cette démarche active à l’accès aux
informations, qu’elles soient d’ordre médical ou de santé (Romeyer, 2008).
La capacité offerte par internet de rechercher de l’information, d’échanger sur
des expériences et de construire des savoirs devient « la mise en jeu d’une
identité personnelle et d’une identité sociale (…) l’appropriation procède alors
d’une double affirmation : de la singularité et de l’appartenance qui relie au
corps social » (Josiane Jouët, 2000).
De fait, à la compréhension du « moi », utile au soin médical tel que décrit dans
le modèle interprétatif de Emanuel et Emanuel, se juxtapose la capacité d’auto-
développement moral, utile au soin, comme nouvelle conception de l’autonomie
du patient, schématisée dans le modèle délibératif et défini également par
Antony Giddens sous l’idée « d’auto-identité ».
Par conséquent, l’épaisseur sociale laissée par l’histoire de la sociologie de la
santé et la reconnaissance du malade dans une expertise 41 se trouve
surdimensionnée avec le numérique dans la création d’une nouvelle identité du 39 WIKGREN, Marianne. Everyday health information exchange and citation behaviour in Internet discussion groups. In : The New Review of Information Behaviour Research. 2003, Vol. 4, n° 1, p. 225 �239. DOI 10.1080/14716310310001631543.
40Synthèse disponible sur le site : http://www.uvp5.univ-paris5.fr/staticmed/e-dosmed/cours/informationpatient/informationPatient.htm 41 Rapport de la mission « Nouvelles attentes du citoyen, acteur de santé » initiée par le Ministère de la Santé et des Sports. Document général mission 3 _ P2011 - Rapport_nouvelles_attentes_du_citoyen-2-2.pdf [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_nouvelles_attentes_du_citoyen-2-2.pdf
36
patient, identité réelle et identité virtuelle, toutes deux investies d’un pouvoir
d’action et de décision.
Par ailleurs, la naissance de cette nouvelle corporiété du patient constituée du
malade et de son autre virtuel42 (Antonio Cassilli, 2009) doté « d’autonomie et
de capacitation » fait émerger une nouvelle forme de relation apomédiée, c’est-
à-dire « non pas la renonciation complète du médecin et de son rôle de
médiateur entre le patient et son corps, mais plutôt d’une médiation à distance
qui (…) ne voit pas la disparition de la figure de l’expert mais sa relégation en
toile de fond ».
Cette « capacitation » issue d’une situation (la maladie) ou d’un environnement
aliénant (relation asymétrique du patient « profane » face au médecin
« expert ») apparaît comme la réponse à un sentiment d’impuissance ou
d’incapacité (powerlessness) vécue aussi bien par un groupe que par l’individu.
Cette perception a donné naissance à la notion d’empowerment qui se met en
place à partir du moment où l’individu a pris conscience de sa situation et
souhaite la modifier pour mieux contrôler sa vie 43(Aujoulat, 2007).
Formalisée par Le Bossé et Lavallée 44 (1993), la notion d’empowerment doit
prendre en compte simultanément des conditions structurelles et individuelles
du changement social. Ainsi, « l’exercice effectif d’un pouvoir d’action dépend à
la fois des possibilités (les ressources, mais aussi le cadre législatif et le
contexte politique) offertes par l’environnement et des capacités des personnes
à exercer ce pouvoir (les compétences, mais aussi le désir d’agir, la perception
des possibilités d’action, la capacité de projection) ». 42 CASILLI, Antonio A. Usages numériques en santé : conflictualité épistémique et sociale dans les communautés de patients en ligne. In : Internet : des promesses pour la santé ? 2011, p. 181�191.
43 DIAL: L’empowerment des patients atteints de maladie chronique : des processus multiples : auto-détermination, auto-efficacité, sécurité et cohérence identitaire [en ligne]. S.l. : s.n., [sans date]. [Consulté le 17 avril 2013]. Disponible à l’adresse : http://dial.academielouvain.be/handle/boreal:5226?site_name=UCL. 44 LE BOSSÉ, Yann. De l’« habilitation » au « pouvoir d’agir » : vers une appréhension plus circonscrite de la notion d’empowerment. In : Nouvelles pratiques sociales. 2003, Vol. 16, n° 2, p. 30. DOI 10.7202/009841ar.
37
De fait, la notion d’empowerment ne consiste pas simplement le fait d’être actif.
L’action est ici « un outil d’acquisition de pouvoir qui ne conserve sa pertinence
que dans la mesure où elle s’inscrit dans une logique d’influence personnelle
ou collective sur l’environnement ».
Défini autour de quatre composantes essentielles : la participation, la
compétence, l'estime de soi et la conscience critique (conscience individuelle,
collective, sociale et politique), l’empowerment est structuré de manière
individuelle, organisationnelle ou collective, on parle d’empowerment
communautaire (Aujoulat, 2002).
Appliquée à la santé communautaire45, attachons-nous à détailler les notions
d’empowerment individuel et communautaire afin de les appliquer à l’objet de
notre étude.
L’empowerment individuel ou psychologique désigne la capacité d’un individu à
prendre des décisions et à exercer un contrôle sur sa vie personnelle. Comme
le sentiment d’efficacité ou l’estime de soi, l’empowerment met l’accent sur le
développement d’une représentation positive de soi-même (self concept) ou de
ses compétences personnelles. En plus, l’empowerment individuel inclut
l’analyse et la critique du contexte social et politique, le développement des
ressources et des compétences individuelles et collectives nécessaires à
l’action sociale.
45 Cours - Santé Publique : Notions de base. In : [en ligne]. [Consulté le 13 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.infirmiers.com/etudiants-en-ifsi/cours/cours-sante-publique-notions-de-base.html. La santé communautaire nécessite la participation des membres de la communauté à la gestion de leur santé individuelle et collective. Il y a une notion d’engagement de chaque individu. La démarche participative est importante en santé communautaire. Les savoirs des destinataires de l’action sont primordiaux. L’action communautaire se construit dans l’échange et implique un transfert de compétences du professionnel vers le profane (le destinataire de l’action) mais aussi du profane vers le professionnel de santé. Les professionnels sont des personnes ressources et mettent leurs compétences au service de la communauté.
38
Une communauté « empowered » est une communauté dans laquelle les
individus et les organisations utilisent collectivement leurs compétences et leurs
ressources pour satisfaire leurs besoins respectifs. Ils s’entraident, résolvent
leurs conflits et accroissent leur influence sur la qualité de vie de la
communauté. Une communauté empowered est en capacité d’exercer une
influence sur les décisions et les changements au sein du système social dont
elle fait partie.
Pour corréler à ces notions, Nina Wallerstein dans son article de revue
« Empowerment to reduce health disparities » 46(2002) réalise à la demande de
l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en 2006, une étude intitulée
« Quelle est la preuve de l’efficacité de l’habilitation à améliorer la santé » dans
laquelle elle met en valeur la notion d’empowerment qui confirme : « un
partenariat proactif et une stratégie d'auto-soins permettant d’améliorer les
résultats de santé et la qualité de vie des malades chroniques ».
En considérant l’empowerment comme un processus d’acquisition du pouvoir
par l’émancipation et la compétence des individus au regard du système 47, la
vision de « vivre avec la maladie » devient le « pouvoir de mener le plus
possible une vie normale en participant activement à la prise en charge et au
suivi, en recevant ou recherchant des informations permettant d’être associés
au choix les concernant, en pouvant établir une communication directe avec les
personnes confrontées aux mêmes réalités pour capitaliser les savoirs profanes
et partager les expériences ». (Rapport de la mission « Nouvelles attentes du
citoyen acteur de santé », 2011).
46 WALLERSTEIN, N. Empowerment to reduce health disparities. In : Scandinavian Journal of Public Health. 1 septembre 2002, Vol. 30, n° 59 suppl, p. 72-77. DOI 10.1177/14034948020300031201. 47 L’EMPOWERMENT, DE LA THEORIE A LA PRATIQUE - La Vie des idées. In : [en ligne]. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.laviedesidees.fr/L-empowerment-de-la-theorie-a-la. \line
39
Synthèse du chapitre
En conclusion de cette partie, plusieurs éléments doivent retenir notre attention.
La mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient, à
l’ère du numérique, s’inscrit dans un contexte socio-culturel lié aux
transformations du rôle de chacun, sur fond de débat de société, dont
l’appropriation technologique devient le support d’émancipation identitaire et de
revendication de compétences.
Confortée par l’augmentation de la prise en charge des maladies chroniques,
elle ajoute, une valeur temporelle et relationnelle significative qui la différencie
d’autant plus de la prise en charge des maladies aiguës, de part l’implication
nécessaire à la compréhension de la maladie qui devient durable. En terme
d’usages, la recherche d’information, l’échanges d’expériences, la participation
à la construction des savoirs sont d’autant plus prégnants dans le cadre des
maladies chroniques que se greffe un facteur d’incertitude majeur48(Vaillant,
2006).
L’apprentissage de la maladie, dans le sens « apprendre à vivre sa maladie »
et « apprendre à vivre avec sa maladie », devient ici un enjeu majeur que nous
proposons de développer dans la deuxième partie de ce mémoire, à travers
l’étude des pratiques éducatives en santé, et plus spécifiquement celle de
l’éducation thérapeutique.
La question du rapport entretenu avec les dispositifs sociotechniques, dans ce
cadre, devient le sujet essentiel du chapitre suivant, qui l’envisage aussi bien
en terme de défi politique, social et sanitaire qu’en terme de valeur
communicationnelle et éducationnelle.
48 VAILLANT, Marie-France. La culture de santé par l’éducation thérapeutique à l’hôpital : des usages qui réinterrogent la relation médecin - soignant - patient. In : Les cultures de la santé. Nouveaux imaginaires et nouveaux usages [en ligne]. S.l. : s.n., 2 juin 2006. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00372418.
40
II. Construction d’une médiation numérique au sein des pratiques éducatives
Introduction du chapitre
Pour analyser et comprendre comment peut se construire une médiation
numérique au sein des pratiques éducatives, il est nécessaire de s’intéresser
aux notions fondamentales qui constituent la relation pédagogique entre le
médecin et son patient.
Pour en assurer l’étude, il semble nécessaire de revenir aux fondements
psychosociaux conduisant à l’empowerment du patient, c’est-à-dire au pouvoir
d’agir, afin de les confronter aux stratégies éducatives sensées influencées les
comportements de santé.
De fait, pour nous permettre de mieux appréhender le cadre conceptuel de
l’éducation thérapeutique, l’apport des théories de l’enseignement et de
l’apprentissage entre les différents modèles issus des approches behavioristes,
cognitivistes, constructivistes et socioconstructivistes de la littérature sont à
rapprocher des différentes notions entendues entre éducation et santé afin de
définir plus précisément le cadre de l’éducation thérapeutique.
La deuxième notion importante de ce chapitre porte sur la définition que nous
faisons du terme médiation numérique. Étymologiquement, le mot renvoie au
latin « mediare » (partager par le milieu, être placé au milieu, se trouver entre,
intervenir, s’interposer). Selon la professeure Ghislaine Azémard49, en sciences
de l'information et de la communication, la médiation peut se définir comme «un
procédé de communication et de transmission qui utilise un ou plusieurs
intermédiaires, qui peuvent être de nature différente. La médiation permet de
rendre accessibles des informations par différents processus de codage-
décodage50». Pour compléter cette définition, et ne pas la cantonner à un
49 UNIVERSITE PARIS 8. Elle dirige la Chaire Innovation Transmission et Edition Numériques à la Fondation Maison des sciences de l'homme. Ses recherches sont spécialisées dans le secteur des e-médiations interactives, scientifique, culturelle, pédagogique et territoriale, et menées dans le cadre du programme de recherche et de création numérique LEDEN. 50 MEDIATION [en ligne]. S.l. : s.n., 2013. [Consulté le 16 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=M%C3%A9diation&oldid=92337448. \line{}
41
usage purement instrumental, ajoutons-lui celle de Philippe Cazeune51 qui la
caractérise comme « une démarche visant à accompagner des publics variés
vers l’autonomie, dans l’usage quotidien des technologies, services et médias
numériques ».
A ce titre, deux idées majeures guident la suite de ce mémoire, l’une au sens
« médiatisation » (média/vecteur intermédiaire au sein de la relation éducative
entre le patient et le médecin) et l’autre au sens « appropriation » de la
technologie dans le cadre d’une action pédagogique.
51 SAVOIR EN ACTES. In : [en ligne]. 8 mai 2013. [Consulté le 15 mai 2013]. Disponible à l’dresse : http://blog.savoirenactes.fr/. \line{}
42
1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, e njeux croisés
A. Etat des lieux et cadre de référence
Définir ce que l’on regroupe sous le terme de maladie chronique est un
prérequis essentiel pour comprendre comment s’articule sa prise en charge.
De manière générale, toute maladie chronique peut être caractérisée par un
ensemble de particularités incluant : ses causes, sa sévérité ou sa gravité, sa
durée d’évolution ou son ancienneté, notamment sa possibilité de guérison, de
rémission, de rechute ou d’évolution par poussées, et enfin ses conséquences,
en particulier sur le fonctionnement de l’individu.
Si plusieurs approches ont été utilisées pour caractériser les maladies
chroniques, nous retiendrons celle par les conséquences qui, basée sur un
modèle biopsychosocial 52 , répond le mieux aux problématiques de santé
publique (représentation centrée sur une vision globale de l’individu) et permet
d’envisager l’ensemble des maladies chroniques sur un socle commun en
termes de conséquences, de prises en charge médicale, psychologique,
sociale, économique et professionnelle.
À la lumière des réflexions précédentes, le Haut Conseil de la santé publique
propose dans son rapport de novembre 2009 « La prise en charge et la
protection sociale des personnes atteintes de maladie chronique » d’utiliser une
définition transversale, telle que proposée par les auteurs du Plan pour
l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies
chroniques 2007-2011, et caractérisée par :
● la présence d’un état pathologique de nature physique, psychologique ou
cognitive, appelé à durer ; 52 http://rms.medhyg.ch/numero-258-page-1511.htm Le modèle biopsychosocial est à la fois un modèle théorique, c’est-à-dire un ensemble cohérent et articulé d’hypothèses explicatives de la santé et de la maladie, et un outil clinique, (ensemble de moyens diagnostiques et thérapeutiques directement applicables). En pratique clinique, ce modèle intègre en permanence les perspectives biologique, psychologique et sociale et nécessite une participation active du patient, dont le corollaire est une importance accrue des aspects éducationnels.
43
● une ancienneté minimale de trois mois, ou supposée telle ;
● un retentissement sur la vie quotidienne comportant au moins l’un des
trois éléments suivants :
● une limitation fonctionnelle des activités ou de la participation sociale,
● une dépendance vis-à-vis d’un médicament, d’un régime, d’une
technologie médicale, d’un appareillage ou d’une assistance personnelle,
● la nécessité de soins médicaux ou paramédicaux, d’une aide
psychologique, d’une adaptation, d’une surveillance ou d’une prévention
particulière pouvant s’inscrire dans un parcours de soins médico-social.
En terme de poids économique, la prise en charge représentait en 2006, 29%
de la population de l’Union Européenne âgée de 15 ans et plus. En France,
près d’1 Français sur 7 (soit 8,3 millions de personnes en 2008) bénéficie du
dispositif des affections de longue durée (ALD) qui représentaient, à elles
seules en 2007, 64% des dépenses totales de l’Assurance Maladie.
La prise en charge de ces pathologies, a montré des défaillances d’un point de
vue clinique et organisationnel, ce qui a conduit à mener en 200953, une vaste
enquête téléphonique pour examiner et comparer auprès des patients, les
conditions de prise en charge de quelques maladies chroniques (hypertension
artérielle, maladie coronarienne, diabète, arthrite, asthme, bronchite chronique,
cancer, dépression).
Réalisée auprès de 8 pays, dont la France, cette étude a vérifié qu’au delà de
la perte d’efficience organisationnelle et économique, il existe des manques
structurels certains pour assurer de manière coordonner la prise en charge de
ces pathologies. Dès lors, un grand nombre de pays occidentaux mettent en
œuvre des dispositifs de prise en charge structurée et coordonnée en vue
d’améliorer les parcours de soins.
53 C. SCHOEN, R. OSBORN, S. K. H. HOW, M. M. DOTY, AND J. PEUGH, "In Chronic Condition: Experiences of Patients with Complex Health Care Needs, in Eight Countries, 2008," Health Affairs Web Exclusive, Nov. 13, 2008, w1–w16.
44
Cette démarche initialement développée aux Etats-Unis a donné naissance à 4
concepts organisationnels54 (case management - CM, desease management
DM, chronic care management - CCM, population management – PM), tous
inscrits dans un contexte de développement des soins intégrés.55
Dans le cadre de notre étude, intéressons-nous plus particulièrement au
modèle de desease management, qui, dans les années 1990, a cherché à
cibler plus spécifiquement les patients atteints de maladies chroniques.
Dans le rapport publié par Pierre Louis Bras, Gilles Duhamel et Etienne Grass
en 2006 au nom de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) sur le
thème « Améliorer la prise en charge des maladies chroniques : les
enseignements des expériences étrangères de desease management », les
auteurs font référence à l’association américaine de desease management
(DMAA) qui proposait de définir le concept comme « un système coordonné
d’intervention et de communication en matière de soins, dirigé vers les
populations pour lesquelles les efforts des patients eux-mêmes ont un impact
significatif ».
En ce sens, le DM :
• soutien la relation entre le médecin et le patient dans le cadre d’un
plan de soin
• se concentre sur la prévention des complications en utilisant des
recommandations scientifiquement fondées et des stratégies visant à
accroitre les capacités des patients à se prendre en charge
(empowerment)
• évalue ses résultats humains, cliniques et économiques de manière
continue dans le but d’améliorer globalement la santé des patients.
54 BRUNN, Mathias et CHEVREUL, Karine. Prise en charge des patients atteints de maladies chroniques. Concepts, évaluations et enseignements internationaux. In : Santé Publique. 1 mars 2013, Vol. Vol. 25, n° 1, p. 87-94 . 55 L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit les soins intégrés comme le contrôle par un même acteur du financement et de la production des soins (de l’organisation des services participant au diagnostic, la prise en charge et la promotion de la santé).
45
En 2002, la revue « The American journal of managed care56 » complètera
cette définition en s’intéressant plus particulièrement aux composants d’un
programme de DM qui vise particulièrement :
• le processus de formation favorisant la prise en charge des patients
et de leur santé (patient self management) autour de la prévention
primaire, des programmes de modification des comportements et des
dispositifs de surveillance de l’observance
• le système de retour d’information, de contrôle et de surveillance
continue (routine/reporting/feedback)
• l’usage adéquat des TIC
Loin de cohabiter au contact d’un système sous tendu par le DM, les dispositifs
numériques s’y insèrent totalement comme en témoigne les résultats du rapport
mené en 2012 par Robert Picard au nom du Ministère de l’Economie et des
Finances et du Redressement Productif sur le thème « De l’information du
patient à la démocratie sanitaire : enjeux et conditions d’un usage efficient des
technologies ».
Conforté par le cadre réglementaire, notamment la loi du 4 mars 2002 qui
légifère la question de l’information comme un droit acquis au patient de tenir
un rôle plus actif dans sa prise en charge, attitude qui constitue un élément de
pronostic essentiel, le code de déontologie médicale se voit modifié avec
l’obligation faite aux médecins d’informer le patient pour aboutir à une «décision
partagée ».
En France comme dans d’autres pays de la communauté européenne, la Haute
Autorité de Santé (HAS), produit en 2010 un rapport sur sa stratégie en matière
d’information du public qui en exprime clairement l’importance : «
L’information du public est devenue un enjeu essentiel du système de santé et
de son évolution, car le patient devient un acteur à part entière dans le
processus de soin ; il est obligatoirement consulté avant toute intervention mais
surtout, il est de plus en plus actif lors de sa prise en charge par le système de
56 WP, WELCH, C, BERGSTEN, C, CUTLER, C, BOCCHINO et RI, SMITH. Disease management practices of health plans. In : The American journal of managed care. avril 2002, Vol. 8, n° 4, p. 353 �361.
46
soins, donnant souvent son avis, discutant parfois les informations des
praticiens. En outre, et de façon très positive, la compréhension de son état de
santé et des prescriptions qui lui sont faites, est un facteur de plus en plus
important de la qualité et de l’efficacité des traitements. Ces observations,
valables dans une grande diversité de situations, revêtent une importance
particulière dans le cas des maladies chroniques ».
La question des technologies au service de l’information du public apparaît, dès
lors, dans ce cadre politique et réglementaire. Ainsi, dès 2004, le législateur
confie à la HAS, la mission d’établir une procédure de certification des sites
Internet santé à destination du grand public57 en lien avec la fondation suisse
Health On the Net (HON) (La Santé sur Internet) chargée d’assurer la
certification des sites.
Mais au-delà de la valeur d’enjeux politiques, économiques, sociaux et
sanitaires pour les autorités publiques, le défi technologique majeur soulevé
avec leur usage des dispositifs numériques est celui des nouvelles
connaissances profanes et des limites des connaissances professionnelles
pour les patients et le citoyen. A ce titre, le rapport confirme que : « l’utilisation
de l’Internet par une large majorité de nos concitoyens s’accompagne
d’interactions avec des personnes souffrant des mêmes pathologies. Les
échanges, confrontations, vérifications, retours d’expériences associées à ces
pratiques constituent, in fine, un nouveau champ de compétence en santé
qu’on qualifie parfois de «profane». Cette compétence s’articule, se confronte
parfois, voire s’oppose à la compétence des professionnels, et revendique une
légitimité acquise dans le vécu de la personne au quotidien ».
Ainsi, il est constaté dans le rapport que :
- Les réseaux sociaux technologiques concernant la santé, stimulés
par l’abondance d’informations de santé mise à disposition du public,
sont les lieux privilégiés d’émergence de ces nouvelles
connaissances.
57 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004
47
- Les professionnels qui modèrent ces réseaux, ou qui plus simplement
les visitent ou les observent, témoignent de la richesse qu'ils en
retirent au niveau de la compréhension des patients, des
observations qu'ils réalisent et éventuellement croisent entre eux. En
tant qu'acteurs de ces réseaux, ils peuvent assurer avec efficacité
leur mission d'information, mais aussi être interpelés sur leurs
propres croyances, lorsqu'émergent des pratiques partagées issues
du sens commun qui ne rejoignent pas les données techniques dont
ils disposent.
Une affirmation soutenue par l’approche sociologique de l’innovation que
Gérald Gaglio 58 observe également : « Les informations glanées, les
expériences recueillies et les relations nouées sur Internet semblent
complémentaires et non concurrentes au savoir, aux prescriptions, à la
fréquentation des médecins…/… Les médecins pourraient considérer l’activité
de prise d’informations sur Internet comme un complément utile de leurs
interventions auprès des malades et de leur entourage : le partenariat entre
patients et médecins promu par le droit se déplace hors les murs du cabinet
médical et se distribue ».
Pour conforter ces éclairages, le rapport de Robert Picard présente l’intérêt
d’entériner ces postulats en corroborant ces derniers avec l’étude conduite par
le CGEIET 59 (Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des
technologies) afin de recueillir le témoignage de patients sur les motifs qui les
conduisent à mobiliser les dispositifs numériques comme source d’information.
Les résultats de l’enquête menée auprès d’un représentant d’une association
58 GAGLIO, Gérald. Consommation d’informations sur Internet et modulation de la relation aux médecins. Le cas d’aidantes de malades atteints d’une pathologie lourde. In : Sociologies pratiques. 17 mai 2010, Vol. n° 20, n° 1, p. 63 �74. DOI 10.3917/sopr.020.0063.
59 « La diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française », Rapport 2012, réalisé pour le CGEIET et l’ARCEP – www.credoc.fr et http://www.cgeiet.economie.gouv.fr/
48
de patient atteint d’une maladie chronique, en l’occurrence le diabète, éclairent
sur certaines motivations dont :
• Conscience et responsabilité
« Les citoyens atteints de maladie chronique évoluent globalement dans le
sens d’une conscience et d’un sens de leur responsabilité accrus
(…).Nombreux sont les patients qui connaissent mal leur maladie, alors même
qu’un patient informé gère mieux son capital santé. »
• L’intérêt accordé aux technologiques
« Les technologies, celles de l’information et des communications notamment,
sont porteuses de nouvelles réponses. Ainsi, le coaching à distance est bien
perçu. Il permet un meilleur engagement du patient.
Les outils de la télémédecine sont rares, et sont vus comme devant encore faire
leur preuve. Ils doivent être accompagnés d’une formation. Concernant plus
spécifiquement les services d’information, les sites internet Santé, les blogs, ont
du succès ».
• Enjeux et risques de l’information
« Les services d’information à destination du public modifient la relation patient-
soignant (..). Le médecin traitant doit prendre en compte cette nouvelle donne.
L’information rendue accessible au patient peut favoriser l’automédication, ce
qui peut être risqué. Les connaissances profanes se développent au travers
des réseaux sociaux, ce qui est positif : mais il faut en même temps veiller à
leur exactitude lorsqu’elles évoquent le domaine médical ».
• La question de la confiance
« Les patients attendent des technologies simples, à leur portée. Ils ont besoin
de sentir qu’ils restent pris en charge. Les associations peuvent y contribuer. Il
faut veiller à la personnalisation des technologies et à la prise en compte du
49
contexte du patient. Le patient doit aussi être conforté dans la confiance qu’il
donne aux technologies (..). »
La convergence des points de vue, tant au niveau des chercheurs que des
patients eux-mêmes pose maintenant la question du rapport entretenu avec
l’outil technologique. Comment caractériser ce lien qui unit les individus au
dispositif socio technique ? Est-ce uniquement la relation médecin patient qui
est aujourd’hui médiatisé par cet artefact technologique ou ce dernier devient-il
un objet transitionnel éducatif ?
B. De la relation à la médiation
La question de l’instrumentalisation de la communication ou communication
instrumentée est un phénomène qui trouve ses sources avec l’histoire de
l’homme : « il n’est aucune action, aucune conduite humaine qui n’échappe au
processus d’instrumentation à travers la médiation d’artefacts techniques »
commente à ce sujet Daniel Peraya dans son article « Regard critique sur les
concepts de médiatisation et de médiation, nouvelles pratiques, nouvelles
modélisations ».60
Il prend pour preuve les travaux de Leroi Gourhan sur l’étude anthropologique
des premiers hommes et de leurs rapports à l’outil technique qu’il définit comme
"exsudé de la main de l’homme et donc comme une extension qui la prolonge,
augmentant de ce fait ses capacités ».
Aussi, l’outil technologique que représente un dispositif numérique serait, dans
ce sens, une nouvelle forme de médiation, c’est-à-dire de mise en relation entre
l’objet, l’action et le sujet. Ce que Daniel Peraya confirme en indiquant que
« tout dispositif médiatique doit être considéré comme un outil cognitif dans sa
double dimension matérielle et symbolique ». En effet, s’intéresser au statut de
l’artefact technique revient à rechercher les interactions induites ou déduites sur
l’environnement et sur l’action elle-même, médiatisée par cet objet technique.
60 PERAYA, Daniel. Un regard critique sur les concepts de médiatisation et de médiation. Nouvelles pratiques, nouvelle modélisation. In : [en ligne]. [Consulté le 25 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://w3.u-grenoble3.fr/les_enjeux/2008-supplement/Peraya/
50
Cette approche considérée comme processus instrumental de la médiation,
devient, selon Yves Lenoir61 « un moyen de négociation, faisant appel à des
techniques et poursuivant l’atteinte d’objectifs déterminés ».
Conceptualisée selon différents types par cet auteur, revoyons ici les
caractéristiques essentielles du terme pour mieux assimiler ces fondements au
sujet de notre étude (Fig.6)
Figure 6 : Concepts associés à la médiation instrumentale (Yves Lenoir, 2003)
TYPE Caractéristiques
CONCILIATION Formelle ou informelle
N’exige pas de tierce personne
But : trouver des points communs et concilier
les intérêts entre les parties
NEGOCIATION Formelle ou informelle
N’exige pas de tierce personne
But : établir un accord (éventuellement une
coopération)
ARBITRAGE Formelle
Exige une tierce personne qui à le pouvoir de
décision
But : trouver une solution rapide au conflit
RESOLUTION de CONFLITS Formelle
Exige une tierce personne qui a le pouvoir de
décision
But : supprimer les conflits
Le complément de cette grille à notre lecture nous éclaire, au delà du rapport à
l’outil lui-même, sur les conditions de la relation. Au regard des éléments
61 Yves LENOIR, Docteur en sociologie et directeur du Centre de Recherche sur l’intervention éducative – Université de Sherbrooke. (Microsoft PowerPoint - M\351diation-Pr\351sentation.ppt) - Mediation.PDF [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 15 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.crie.ca/Communications/Documents_disponibles/Mediation.PDF
51
produits dans la première partie de ce mémoire, nous y voyons notamment,
dans les concepts de négociation et de conciliation, les fondements
intrinsèques qui déterminent l’évolution de la relation médecin patient au cours
des dernières années, amplifiée par le caractère durable des maladies
chroniques.
Elle nous permet aussi de mesurer la particularité des liens entretenus entre, et
avec, le dispositif socio technique que représente le web. Car ce sont, en
l’occurrence, ces valeurs matérielles et symboliques qui distingue internet de
l’outil technique traditionnel. Entendu alors comme un « complexe hétérogène
de pratiques, d’organisations, de savoirs, de normes et de machines qui
instancie l’ensemble des formes sociosémiotiques qui s’expriment notamment
dans les écrits d’écran » 62 (Laurence Monnoyer-Smith, 2013), les
fonctionnalités de partage et de mise en réseau induites par le web, nous
renvoient, de fait, à la notion fondamentale de la relation, comme acte social.
Issu d’un processus communicationnel, dont le langage n’est plus ici, inscrit
dans un cadre interpersonnel physique mais un schéma discursif virtuel, la
médiation, en fonction des auteurs, est, pour certains, un intermédiaire, un objet
de relation, un objet transitionnel ou une fonction d’interface (Guy Gimenez,
2002). Entre ces différentes conceptions, le point commun résulte de
l’articulation entre le sujet (le patient/le médecin), l’objet (l’information, le savoir,
le médecin), et l’outil technologique, ce qui détermine la nuance entre
médiatisation et médiation.
Si la première renvoie, selon Daniel Peyara à l’idée de média, entendu au sens
de support de transmission (l’auteur illustre d’ailleurs cette idée par l’expression
« médiatiser un contenu »), la seconde se réfère à l’idée de médium que
l’auteur, en référence à Yves Lenoir, identifie comme démarche extrinsèque,
centrée sur la dynamique des individus dans leur rapports sociaux et ayant
pour objet la réalisation de l’être humain en société : « tout être humain se
62 BARATS, Christine. Manuel d’analyse du Web en sciences humaines et sociales. Paris : Armand Colin, 2013. ISBN 9782200286279 2200286279.
52
construit en construisant la réalité dans le temps et dans l’espace et vise une
certaine forme d’émancipation sociale ».
Intégrés dans le champ d’une relation pédagogique, hypothèse retenue dans ce
chapitre, comment définir l’accès au savoir et la transmission des
connaissances au sein de cette triangulation ?
Dans l’article « Médiation, médiations… 63» les auteurs, en référence à Linell
(2009), et Vygotski, réaffirment que « la connaissance du monde nous vient de
manière nécessairement médiatisée, (…), et qu’on peut donc remplacer le
terme de construction de connaissances par médiation de connaissances ». De
fait, cette manière qui consisterait à mettre en média une connaissance serait à
la fois une médiatisation de contenus et un processus éducatif au sein de la
relation pédagogique, agissant sur les comportements cognitifs et relationnels
des individus.
Avec le postulat qu’ « apprendre est une production de soi par soi, mais cette
autoproduction exige le recours à la médiation de l’autre (et du monde) » selon
Yves Lenoir, il est maintenant nécessaire de définir ce que nous entendons par
éducation et pratiques éducatives afin de poursuivre notre raisonnement.
2. Education et santé, les perspectives de l’éducat ion thérapeutique
A. Education et santé, les apports conceptuels Le rapprochement des deux termes trouve donc une partie de sa justification
dans le premier chapitre de ce mémoire, à travers notamment les évolutions du
rôle du patient, devenu acteur, puis décideur de sa santé, et inscrit dans une
dynamique d’expérience de vie individuelle et collective, dont la maladie fait
partie.
En effet, de part la condition d’une relation asymétrique entre le savoir expert et
le savoir profane, de part l’existence sociale et culturelle de la communauté des 63 DESSUS, Philippe, PUIMATTO, Gérard et GRANDBASTIEN, Monique. Médiation, médiations…. In : Distances et médiations des savoirs. Distance and Mediation of Knowledge [en ligne]. 18 février 2013, Vol. Vol. 1, n° 2. [Co nsulté le 27 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://dms.revues.org/255.
53
patients face à la communauté médicale, la relation entre eux n’est pas de
l’ordre de l’enseignement 64 mais bien de l’éducation au sens de guider,
conduire, faire produire et faire se développer65 les compétences du patient
(apprenant) nécessaires à la compréhension de ce qu’il vit, avec l’adaptation de
comportements de santé adéquats au maintien d’un état de complet bien-être
physique, mental et social tel que définit par l’OMS, dans un système qui, de
surcroit, doit prendre en compte aujourd’hui l’usage des TIC.
Si la notion d’éducation, dans le cadre de notre objet d’étude, s’envisage
comme « le moyen d’apporter les éléments nécessaires à la constitution de
l’individu dans ses pratiques et l’ensemble des processus de changement
auxquels l’individu et la société sont confrontés »66 (Chantal Aymard, 2004) ,
l’action éducative se construit en référence à différents modèles et différentes
conceptions de l’éducation qu’il convient de poser pour nous permettre de
mieux approcher cette notion avec celle de la santé et de la maladie.
En effet, deux conceptions de l’éducation sont à mettre en parallèle. La
première, orientée « science de la santé », trouve sa légitimité dans
l’apprentissage des compétences et des comportements favorables, relayée
par les professionnels du soin. La seconde, dirigée « science de l’éducation »,
aborde la santé comme un des volets et des thèmes de l’éducation et va plutôt
étudier le processus instruction-apprentissage entre l’enseignant et l’apprenant.
L’intérêt de croiser ces deux approches est double. Il s’agit d’une part de
comprendre la construction du savoir entre le médecin et le patient autour de la
maladie (qui devient le sujet d’enseignement et d’apprentissage) dans le 64 Enseigner, c'est transmettre à la génération future un corpus de connaissances (savoir et savoir-faire) et de valeurs considérées comme faisant partie d'une culture commune. Le terme enseignement, de son côté, se réfère plutôt à une éducation bien précise, soit celle « de la transmission de connaissances » à l'aide de signes (Signes et enseignement dérivent d'ailleurs de la même racine latine). 65 Le mot « éducation » est directement issu du latin educatio de même sens, lui-même dérivé de ex-ducere (ducere signifie conduire, guider, commander et ex, « hors de ») : faire produire (la terre), faire se développer (un être vivant). 66 EYMARD, Chantal. Essai de modélisation des liens entre éducation et santé. In : Questions vives, recherches en éducation. 2004, Vol. 3, n° 5, p. 13-34 .
54
processus communicationnel, et d’autre part de s’intéresser aux
comportements issus de ces apprentissages.
Aux vues de cette mise en perspective, cela doit nous aider nous interroger sur
le rôle et la place occupée par les communautés virtuelles de patients dans ce
processus éducatif et ce, en fonction de l’angle d’étude.
Le tableau schématique des principaux courants théoriques conçu par
Anastissis Kozanitis67 (2005) est utile pour définir l’angle par lequel les sciences
de l’éducation ont un apport intéressant pour la santé (Fig.4).
Figure 4 : Représentation schématique des principaux courants théoriques de
l’enseignement et de l’apprentissage
Socio-
constructivisme
Constructivisme Cognitivisme Béhavioriste
Enseigner c’est…
Organiser des
situations
d’apprentissage
propices au dialogue
en vue de provoquer
et de résoudre des
conflits socio-
cognitifs
Offrir des situations
obstacles qui
permettent
l’élaboration de
représentation
adéquates du monde
Présenter
l’information de façon
structurée,
hiérarchique,
déductive
Stimuler, créer et
renforcer des
comportements
favorables appropriés
Apprendre c’est…
Co-construire ses
connaissances en
confrontant ses
représentations à
celle d’autrui
Construire et
organiser ses
connaissances par
son action propre
Traiter et
emmagasiner des
nouvelles
informations de façon
organisée
Associer par
conditionnement, une
récompense à une
réponse spécifique
Méthodes pédagogiques appropriées
Apprentissage par
projets, discussions,
exercices, travaux
Apprentissage par
problèmes ouverts,
étude de cas
Exposé magistral,
résolution de
problèmes fermés
Programme
d’autoformation
assistée par
67 Conseiller pédagogique au Bureau d’Appui Pédagogique de l’Ecole Polytechnique de Montréal. Consultable http://www.polymtl.ca/bap/ress_peda/docs_consult.php
55
ordinateur
Adossée à notre étude, cette grille de lecture nous permet aisément de rendre
lisible la transformation du processus communicationnel de la relation médecin
patient, qui, au cours de l’histoire, est passée d’une vision behavioriste à une
approche socioconstructiviste, transfert légitimé par l’évolution des modèles
conceptuels de la santé (du biomédical à un modèle biopsychosocial).
Dans son essai de modélisation des liens entre éducation et santé, Chantal
Eymard (2004) traduit les approches cognitivistes, constructivistes et socio-
constructivistes qui ont influencé l’approche en santé de la manière suivante :
• L’approche cognitiviste ou le modèle de l’instruction
L’éducation est caractérisée par la volonté de transmettre la culture scientifique.
L’action éducative est ici intentionnellement exercée sur l’être humain pour
l’amener à être ce qu’il est, pour le construire à des bonnes pratiques. Dans
cette approche, l’éducabilité est étroitement liée au développement de
l’intelligence, par l’inculcation des savoirs savants cumulée aux savoirs de
l’apprenant, afin de l’amener à accroitre son potentiel de connaissance. Adapté
à la santé, il s’agit de favoriser la transmission des normes et des bonnes
pratiques au travers la sphère familiale, scolaire ou de soin, grâce à la
communication d’informations et au phénomène d’ancrages (David Ausubel,
1978).
• L’approche constructiviste ou le modèle du développement du sujet
Centrée sur le sujet qui apprend, ce dernier est rendu acteur des situations qu’il
vit. La démarche éducative vise ici, et selon l’auteur, à passer d’une relation
pédagogique une relation éducative au sens retenu par Marcel Postic 68 :
« Quand au lieu de se réduire à la transmission du savoir, elle engage des
êtres dans une rencontre où chacun découvre l’autre et se voit soi-même,
commence une aventure humaine ».
68 POSTIC, Marcel. La Relation éducative [en ligne]. S.l. : Presses Universitaires de France - PUF, 2001. ISBN 2130523358. Disponible à l’adresse : http://www.amazon.fr/La-Relation-%C3%A9ducative-Marcel-Postic/dp/2130523358/ref=wl_mb_hu_c_2_dp#reader_2130523358.
56
En privilégiant la mise en avant des savoirs construits par l’expérience du sujet
au détriment des savoirs savants, la relation éducative développe la
connaissance de soi et favorise les apprentissages sociaux. Contextualisée à la
santé, cette approche s’oriente plus vers une action de promotion que de
prévention 69 , bénéfique à l’identification des potentialités individuelles et
collectives comme à la prise de décision.
• L’approche socio-constructiviste ou le modèle de l’interaction
sociale
Initiée par Lev Vygostsky 70 , l’approche socio-constructiviste est un modèle
d’enseignement-apprentissage pour lequel trois éléments didactiques sont
indissociables pour permettre le progrès :
- la dimension constructiviste qui fait référence au sujet qui apprend.
- la dimension socio qui fait référence aux partenaires en présence : la
communauté d’apprenants et l’enseignant.
- la dimension interactive qui fait référence au milieu dans lequel s’organisent
les situations et l’objet d’apprentissage.
Pour résumer cette lecture, Chantal Eymard indique que « l’éducation n’est pas
ici transmission de savoirs savants, ni seulement développement des
potentialités du sujet, elle développe la capacité du sujet à problématiser et à
inventer des réponses ».
Par le déploiement de la capacité d’agir de l’individu apprenant, la conception
de la connaissance est ici définit, tant par les savoirs construits, que par les
savoirs expérientiels de l’individu et des membres de la société.
69 Selon l’OMS, la promotion de la santé a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l'améliorer. La prévention quant à elle, est l'ensemble des mesures visant à éviter ou à réduire le nombre et la gravité des maladies ou des accidents. 70 Psychologue russe (1896-1934). Ses travaux sur l’apprentissage social ont été initialement publiés dans les années 1920, la contribution à la psychologie occidentale moderne n’a été reconnue qu’à la suite de la traduction en anglais de ses travaux vers la fin des années 1970.
57
La santé est ici un projet de société, où l’apprenant est accompagné dans
l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de ce dernier.
A partir de cette présentation chronologique, prenons appui sur les travaux de
Alain Deccache et Philippe Meremans (2000)71 qui ont utilisé ces différentes
approches pour catégoriser les logiques d’instruction et d’apprentissage en
fonction des modèles d’éducation :
Modèle d’éducation Modèle de santé
Biomédical Biopsychosocial
Logique d’instruction
(fondée sur l’enseignant)
Type 1 : enseignement de
savoirs médicaux
Modèle Behavioriste
Enseignement à la prévention
(bénéfice-risque). L’éducation
vise la transmission des
savoirs et des comportements
de prévention recommandés.
Type 2 : enseignement des
savoirs de santé à la fois
physique, mentale, sociale
Modèle cognitiviste
Les savoirs à transmettre
restent prédéfinis mais par des
experts travaillant en
complémentarité. L’éducateur
est un enseignant, un expert.
Logique d’apprentissage
(fondée sur l’apprenant)
Type 3 : apprentissage de
savoirs médicaux
Modèle constructiviste
L’éducation s’élabore autour
d’un apprentissage participatif
dans lequel les apprenants
contribuent à leur propre
formation notamment en
définissant eux-mêmes leurs
objectifs et les moyens
d’apprendre. L’éducateur est
encore un expert mais aussi
un facilitateur, un animateur
Type 4 : apprentissage de
savoirs de santé à la fois
physique, mentale et sociale
Modèle socioconstructiviste
L’éducation se fonde sur une
logique globale de la santé et
de la maladie. La participation
occupe une place majeure qui
se définie à la fois comme une
possibilité de négocier les
sujets de santé, les contenus
et les méthodes. L’éducateur
tient le rôle d’une personne
ressource, facilitateur et d’aide
71 Alain Deccache et Philippe Meremans. L’éducation pour la santé des patients au carrefour de la médecine et des sciences humaines. In : Brigitte Sandrin Berthon. L’éducation pour la santé au secours de la médecine. Paris : Puf, 2000, p. 147.
58
capable de s’adapter aux
attentes et choix de
l’apprenant.
à l’empowerment du public.
B. Formalisation de l’éducation thérapeutique
La formalisation de cette démarche permet de rejoindre les préoccupations
éducatives vues par la « science de la santé » qui elle, va davantage orienter
son étude sur les facteurs d’influences et de genèse des comportements de
santé, afin de chercher à comprendre les liens de causalités entre individu et
maladie, entre risque et maladie, entre comportement, risque et conséquence.
La démarche éducative se fixe prioritairement sur le besoin éducatif, dans
l’objectif de poser un diagnostic éducatif et/ou comportemental.
Dès lors, trois niveaux de lecture encadrent le périmètre de cette conception de
l’éducation : l’éducation pour la santé des patients, l’éducation du patient à sa
maladie et l’éducation thérapeutique du patient.
• L’éducation pour la santé des patients
Formalisée par le Dr Lawrence W.Green72, l’éducation pour la santé est « une
combinaison d’expériences d’apprentissages conçue pour faciliter les
adaptations volontaires du comportement conduisant à la santé ». Pour
démontrer son raisonnement, l’auteur donnera un complément d’explication à
chaque terme :
« Combinaison » : dénote l'importance de la complémentarité des méthodes
éducatives. Chaque méthode correspond à certains objectifs d'apprentissage.
Une combinaison de ces méthodes permet d'atteindre l'ensemble des objectifs
du projet d'éducation pour la santé.
« Expériences d'apprentissage » : insiste sur la nécessité d’une pédagogie
active permettant l’intégration, la réappropriation des éléments cognitifs
(connaissances), affectifs (attitudes et valeurs) et psychomoteurs (habilités)
favorisant la réalisation d’un comportement.
72 Green L.W., Kreuter M.W., Deeds S.G., Partridge K.B. (1980) Health Education Planning – adiagnostic approach, Mayfield Publ., USA, pp. 306. Visible également sur le site http://www.lgreen.net/precede.htm
59
« Faciliter » : situe le rôle de l’éducateur dans sa fonction de guide qui doit
respecter la personnalité de l’éduqué, voire favoriser son accession à
l’autonomie, à l’auto-détermination.
« L'adaptation volontaire » : spécifie d'abord que tout individu possède un
mode de vie qui est façonné par son hérédité, son développement, sa culture,
et son environnement. Il ne s’agit pas pour l’éducateur, de poser des solutions
toutes faites, mais de donner des outils au sujet pour l’aider à trouver une
approche qui tienne compte de son histoire, de ses valeurs et de ses
connaissances.
« Comportement conduisant à la santé » : les comportements visés, dans un
projet d'éducation pour la santé, sont tous les comportements qui permettent
d'améliorer la santé.
• L’éducation des patients à la maladie
S’adressant plus particulièrement aux malades chroniques, il s’agit
d’accompagner le patient dans la prise de conscience de son état et la
reconnaissance de son positionnement actuel. En s’intéressant à la façon dont
ce dernier accepte son état et gère ses problèmes au quotidien (gestion du
traitement mais aussi prévention des complications et rechutes, impact de la
maladie sur la vie personnelle, familiale, professionnelle, sociale), l’action
éducative dans ce contexte, cherche à stimuler, intégrer et responsabiliser le
patient en évaluant notamment sa motivation, ses croyances, ses valeurs et ses
perceptions afin de positionner l’orientation des changements de
comportements de santé et leur stabilité dans le temps.
Définie par Alain Deccache et Eric Lavendhomme 73, cette conception renvoie
l’idée d’une « l'éducation du patient comme un processus par étapes, intégré
dans la démarche de soins, comprenant un ensemble d'activités organisées de
sensibilisation, d'information, d'apprentissage et d'aide psychologique et
sociale, concernant la maladie, les traitements, les soins, l'organisation et
procédures hospitalières, les comportements de santé et ceux liés à la maladie,
destinés à aider le patient (et sa famille), à comprendre la maladie et les
73 DECCACHE, Alain et LAVENDHOMME, Eric. Information et éducation du patient: Des fondements aux méthodes. S.l. : De Boeck Université, 1989. ISBN 9782804112677
60
traitements, collaborer aux soins, prendre en charge son état de santé et
favoriser un retour aux activités normales ».
• L’éducation thérapeutique des patients, malades chr oniques
Son objectif est de former les patients à l’autogestion, à l’adaptation du
traitement à leur maladie chronique, et à leur permettre de faire face au suivi
quotidien dont l’intérêt est de produire un effet thérapeutique complémentaire à
ceux de toutes les autres interventions.
Décrite dans les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS)
comme une démarche pédagogique structurée afin d’aider les patients à
acquérir les compétences dont ils ont besoin (auto soins et adaptation74 ) pour
suivre les traitements qui leur sont prescrits, elle s’organise dans une
planification en quatre étapes, modélisées par J.F. d’Ivernois et R. Gagnayre
(1995) : le diagnostic éducatif, le contrat, la mise en œuvre de l’éducation et
son évaluation.
Le diagnostic éducatif : il permet la connaissance du patient, d’identifier ses
besoins, ses attentes, formuler avec lui des compétences à acquérir ou à
mobiliser et à maintenir en tenant compte des priorités du patient.
Le contrat ou programme ETP : il s’agit de négocier les compétences à
acquérir au regard du projet du patient et de la stratégie thérapeutique, afin de
planifier un programme individuel.
Mise en œuvre du programme : par la sélection des contenus à proposer lors
de séances d’ETP, des méthodes et des techniques participatives
d’apprentissages, il convient de planifier et réaliser les séances avec
l’alternance de séquences individuelles et collectives.
74 HAS : les compétences d’autosoins sont les décisions que le patient prend avec l’intention de modifier l’effet de la maladie sur sa santé (World Health Organization, 2004). Les compétences d’adaptation sont des compétences personnelles et interpersonnelles, cognitives et physiques qui permettent au personnes de maîtriser et de diriger leur existence, et d’acquérir la capacité à vivre dans leur environnement et à modifier celui-ci. Elles font partie d’un ensemble plus large de compétences psychosociales (World Health Organization, 2003)
61
L’évaluation : réalisée individuellement, elle est l’occasion de mettre en valeur
les transformations intervenues chez le patient : acquisition de compétences,
vécu de la maladie au quotidien, autodétermination, capacité d’agir etc.
En synthèse, le schéma proposé ci-dessous permet de visualiser la démarche
éducative en fonction de l’orientation donnée à l’enseignement-apprentissage
en santé :
http://www.educationdupatient.be/cep/pages/educationpatient/ep12.htm
62
Synthèse du chapitre
Que retenir de cette mise en perspective conceptuelle à travers la science de la
santé, celle de l’éducation et le rapport à la technologie ?
Tout d’abord, elle nous confirme bien que la relation médecin patient, de part
les conditions liées à l’aspect durable de la maladie chronique, s’inscrit dans un
principe éducationnel. Dans ce cadre, la construction des connaissances
permettant au patient d’acquérir les compétences nécessaires en autonomie et
en auto-efficacité, comme levier à l’incertitude dans lequel il se trouve plongé,
s’inscrit dans un processus qui prend en compte toutes ses composantes
physiques, psychiques et sociales ainsi que son environnement.
Favorisé par les conditions socio-culturelles qui ont marqué l’évolution de la
médecine, le « pouvoir d’agir » des patients, construit sur le principe de la
revendication et du désir de participation, pose aujourd’hui la question
essentielle de la place et du rôle de ce pouvoir « expérientiel », dans la
construction du savoir intégré aux dispositifs éducatifs.
L’éducation thérapeutique, dont l’objectif est de « former » le patient à prendre
en charge sa maladie, repose autant sur ces perceptions intuitu personae que
sur l’apprentissage des techniques et des comportements favorables à sa
santé.
Par ailleurs, la virtualisation des échanges, notamment par l’intermédiaire de
sites internet dédiés, interroge doublement sur les rapports à la technologie et
ses incidences sur le modèle éducatif. Les spécificités du dispositif
sociotechnique que représente le web, comme support d’une communication
instrumentée, est également objet de relation dans la construction des
connaissances, de part ses fonctionnalités sémio cognitives et le rôle
d’interface social entendu au sein du réseau informel et virtuel qu’il entretient.
Les chapitres précédents ont relevé de manière générale ces changements
socio-culturels, cette évolution dans les pratiques relationnelles et éducatives
63
ainsi qu’une prise en considération des usages liés à l’arrivée des dispositifs
sociotechniques.
Intéressons-nous plus spécifiquement maintenant à la place et au rôle joué par
les communautés de patients et comment la virtualité de ces dernières peut
aujourd’hui nous interroger sur un changement possible de paradigme.
64
III. Place et rôle socio culturel des communautés
virtuelles des patients dans le dispositif éducatif
Introduction du chapitre
La notion déterminante est ici celle apportée à la définition de « communautés
et de communautés virtuelles ». En effet, l’expression renvoie à plusieurs
orientations qu’il est intéressant de détailler pour l’adapter aux réflexions de
notre étude. Si le terme signifie l’idée d’un groupement de personnes unies par
des liens d'intérêts, des habitudes communes, des opinions ou des caractères
communs (communauté d’intérêt), il renvoie également à la notion d’identité
dans la manière de penser de plusieurs personnes75.
Par ailleurs, notons qu’en psychiatrie, puis dans d’autres institutions de prise en
charge de patients tels que les alcooliques ou les toxicomanes, ce terme
s’inscrit dans les pratiques médicales visant, « l'effacement des rapports
traditionnels entre soignants et soignés, ainsi que la participation active des
soignés au fonctionnement de l'institution, en vue de favoriser leur
apprentissage social, considéré comme principal processus thérapeutique, ou
de changement imposé de façon quasi autoritaire, en faisant intervenir la
pression du groupe ».
Appliquée au cadre numérique, la communauté virtuelle est une notion récente
qui se définie, selon Howard Rheingold 76 , comme « des regroupements
socioculturels qui émergent du réseau, lorsqu'un nombre suffisant d'individus
participent à ces discussions publiques pendant assez de temps, en y mettant
suffisamment de cœur, pour que des réseaux de relations humaines se tissent
au sein du cyberespace." Si l’auteur valorise ici la valeur collective attribuée à la
congruence des rapports sociaux entretenus par l’intérêt des individus face au
groupe dans lequel ils se reconnaissent, le prisme de cet aspect est à mettre en
75 Dictionnaire Larousse 76 RHEINGOLD, Howard. Les communautés virtuelles. Paris; Reading, Mass.; New York : Addison-Wesley France, 1995. Mutations technologiques. ISBN 2879080894 9782879080895.
65
parallèle avec celui de la communauté, afin de nous éclairer sur les motivations
et les intentions d’actions de ces dernières.
Face à un environnement ou les frontières spatio-temporelles sont
reconfigurées par « un rapprochement des personnes intéressées par le libre
partage des idées et des informations, dans les domaines les plus divers,
tissant entre ceux qui y participent, y échangent et s’y entraident des liens
affectifs ou professionnels », bâtissant des complicités actives, bien " réelles ",
à travers d'innombrables échanges virtuels, en quoi les intentions d’actions des
communautés virtuelles de patients dans le cadre du suivi des maladies
chroniques ont-elles un impact sur les pratiques éducatives, notamment celle
de l’éducation thérapeutique ?.
C’est précisément ce sur quoi portera notre terrain de recherche à partir de
l’étude de trois sites internet proposant une fonctionnalité communautaire où il
sera observé les interactions entre le dispositif technique et la construction des
savoirs nécessaires, notamment par les conditions expérientielles qu’il propose.
Pour conduire cette analyse, il sera confronté, par la méthode d’observation
ethnographique en ligne, les formes d’interaction et de transactions au sein de
ces communautés en posant comme grille de lecture la recherche d’indicateurs
techniques, sociaux et d’adoption de la technologie proposés par les dispositifs
web et ceux déployés dans les programmes d’éducation thérapeutique.
1. De la communauté à la communauté virtuelle de pa tients
A. Evolution socio culturelle de la reconnaissance du
savoir expérientiel
66
Pour Emmanuelle Jouet77, dans sa synthèse formulée sur « Construction et
reconnaissance des savoirs expérientiels des patients », c’est en 1934, au sein
du mouvement des Alcooliques Anonymes, qu’ont été posées, les pierres
angulaires d’un nouveau type d’échanges fondé sur des pratiques informelles
et non formelles entre patients.
En reprenant les travaux de Pierre Lascoumes78, l’entrée en scène de la parole
du patient s’inscrit dans une volonté de faire face « à la faiblesse des réponses
médicales et à l’importance des problèmes psychosociaux auxquels ils étaient
confrontés, conduisant de petites minorités à s’auto-organiser ».
C’est ainsi que ce modèle d’organisation va s’étendre à d’autres groupes,
comme les usagers de drogues dans les années cinquante et les personnes
atteintes par le VIH dans les années quatre-vingt.
Ce type d’interaction, basé sur l’entraide, le partage d’informations entre
malades, la formation entre pairs, en développant l’approche globale de la
personne, a peu à peu remis en cause, puis bouleversé, la toute puissante
expertise médicale, comme source de guérison et de gestion de la maladie. Il a
aussi permis d’aller à la rencontre des malades sur les lieux mêmes de leurs
addictions. Loin de rester un phénomène isolé et indépendant, Emmanuelle
Jouet en rappelle d’ailleurs les principes structurels : « l’organisation de ce
mouvement s’est formalisée selon des modèles déjà opérationnels, comme
ceux des sociétés savantes ou des grandes sociétés caritatives79. »
Parallèlement aux mouvements issus des corporations associatives et
humanitaires, la communauté médicale, sur fond de remise en cause du
modèle organique (biomédical) s’inspire du concept de « relation d’aide » pour
revisiter, elle aussi, son approche du soin. L’apport psycho-humaniste de Carl
77 JOUET, Emmanuelle, FLORA, Luigi Gino et VERGNAS, Olivier Las. Construction et reconnaissance des savoirs expérientiels des patients. In : Pratiques de Formation - Analyses [en ligne]. juin 2010, Vol. 2010, n° 58-59. [Consul té le 28 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00645113. 78 LASCOUMES, Pierre. L’usager, acteur fictif ou vecteur de changement dans la politique de santé ? In : Les Tribunes de la santé. 1 décembre 2003, Vol. no 1, n° 1, p. 59-70. DOI 10.3917/seve.001.70. 79 Ces organisations (comme la Croix Rouge) sont nées vers le début du XIXe siècle, avec initialement un rôle uniquement caritatif pour aider les malades et déshérités sans pour autant intervenir sur le plan des soins délivrés dans les établissements publics de santé.
67
Rogers comme une relation dans laquelle « l’un au moins des deux
protagonistes cherche à favoriser chez l’autre la croissance, le développement,
la maturité, un meilleur fonctionnement et une plus grande capacité d’affronter
la vie » 80est l’exemple de ce changement, favorisant le passage du modèle bio
médical au modèle biopsychosocial énoncé dans le chapitre précédent.
Mettre le patient au centre du dispositif de soins devient un objectif déterminé,
tant au niveau politique (en santé publique et communautaire), qu’au niveau
thérapeutique et préventif : tout ce qui concerne l’information et l’éducation du
malade devient au niveau sociétal, le pilier des nouvelles politiques de santé
publique, pendant que les revues de littérature tendent à montrer que
l’éducation du patient améliore la qualité des soins et devient un facteur
bénéfique crucial dans la prise en charge. Les approches de la santé et de
l’éducation exposées dans le chapitre précédent en sont l’exemple.
La nécessité non seulement d’informer mais d’éduquer le patient afin d’être au
plus près d’un consentement dit « éclairé », légiféré par la loi du 4 mars 2002,
devient la clé de voute de la reconnaissance individuelle et collective du pouvoir
donné aux patients, fruit de cette contingence entre les deux communautés
(médicale et profane).
Le renforcement des droits individuels (information, consentement, accès direct
aux informations médicales, non-discrimination, etc.), celui des droits collectifs
(agrément des associations, statut des représentants, création d’une instance
de conciliation régionale, participation aux conférences régionales, etc.), et
deux procédures, l’une de conciliation en cas de conflit, l’autre d’indemnisation
des victimes d’aléas thérapeutiques, illustrent la volonté de reconnaître la
communauté des patients comme acteur de santé.
La création du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss) en juin 1996,
regroupant aujourd’hui vingt-six des principales associations nationales de
80 VAILLE, Hélène. Le Développement de la personne. In : Sciences Humaines [en ligne]. [Consulté le 28 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.scienceshumaines.com/le-developpement-de-la-personne_fr_12966.html. \line{}1951-1961 Carl rogers\line
68
personnes malades et de personnes handicapées démontre, par sa forte
représentativité nationale, sa capacité à agir tant au niveau de maladies
spécifiques (diabète, cancer, myopathies, mucoviscidose, VIH) qu’en matière
de handicaps (physique ou mentaux).
Soutien psychologique, social et parfois médical apporté aux personnes
atteintes, et contrairement au lieu commun qui veut que chaque groupe soit
enfermé dans le particularisme de ses besoins et l’égoïsme de ses
revendications (Pierre Lascoumes, 2003), ces associations, conscientes que
seule, une action collective soutenue, était susceptible de mener à bien un vrai
travail transversal aux différentes pathologies qu’elles représentent,
s’organisent donc pour partager de nombreux problèmes de santé.
Christian Saout, président du Ciss, insiste d’ailleurs sur « l’expertise profane
dont nous nous revendiquons : tirer de l’expérience de la représentation de tous
les enseignements pour améliorer le fonctionnement de ce l’on appelle la
démocratie ».
Outre la reconnaissance statutaire d’un mouvement collectif, c’est donc aussi la
reconnaissance identitaire du patient expert 81 qui reconfigure les habitudes
éducatives des professionnels.
Cette reconnaissance d’un savoir développé par l’expérience du vécu de la
maladie pose les bases de nouvelles pratiques émergentes comme le constate
Emmanuelle Jouet : « et, dès lors que les soignants ne sont plus considérés
comme les seuls « experts », l’apprentissage de nouvelles modalités de relation
au sein du système de santé avec les soignés et leurs proches devient
doublement délicate. D’un côté, les médecins craignent des exigences
irréalistes et, de l’autre côté, les associations et leurs membres veulent à tout
prix faire entendre de nouvelles prérogatives ».
Par l’accession à toutes sortes de sources, y compris scientifiques, les
associations s’organisent pour analyser, intégrer puis diffuser des informations
81 L’expression « Patient expert » utilisée dans le rapport du Department of Health est en fait apparue à la fin des années quatre-vingt au sens de patient « éduqué ».
69
cruciales pour leur communauté. En ce sens, elles développent et nourrissent
des réseaux pour constituer de réelles communautés de pratiques, apportant
une expertise de terrain afin d’officier, autant dans l’accompagnement des
usagers venant à leur rencontre, que dans la gouvernance des politiques de
santé et des établissements ou programmes de santé.
Pour preuve, en France, les recommandations de la Haute Autorité de la Santé
et les livrets d’information de l’INPES – Institut National de Prévention et
d’Education à la Santé - sont élaborés en tenant compte de leur expertise.
L’arrivée d’internet, dispositif socio technique de relation sociale, facteur
exponentiel d’accès à l’information et au partage d’expérience, nous invite
forcément à réfléchir sur les incidences directes et/ou indirectes liées à la
constitution de ces communautés de pratiques et nous interrogent sur le
changement possible de paradigme du modèle éducatif. Ce que Emmanuelle
Jouet dans sa synthèse évoque également : « Aujourd’hui, le e-patient a accès
à quantité d’informations et peut en produire sur des forums publics ou sur son
propre blog ou site. (…). Il prend ainsi une posture iconoclaste aux frontières
des concepts de communautés d’apprentissage et de communautés de
pratiques (Lave et Wenger, 1991) ».
B. Du réel au virtuel : modélisation des communautés de patients
Si nous sommes en mesure d’évaluer la formalisation du phénomène groupal
et collectif organisé entre patients et structures connexes, voyons maintenant
ce qui la distingue du simple regroupement d’individus.
Pour ce faire, prenons appui sur les travaux de Robert MacIver 82qui fonde sa
définition de la communauté sur la relation sociale. Pour l’auteur, la
communauté prend la forme de réseaux « car elle est créée par cette activité
de l’esprit des hommes par laquelle ils entrent incessamment en relation les
82 MACIVER, Robert Morrison. Community: a Sociological Study: Being an Attempt to Set Out the Nature and Fundamental Laws of Social Life. S.l. : Routledge, 1970. ISBN 0714615811.
70
uns avec les autres ». Si la communauté repose sur la volonté des êtres
humains à réaliser leurs intérêts communs et de ce qui les lie ensemble, elle
s’organise par la mobilisation des acteurs en son sein.
L’article de Cherry Chrecker 83 , « qu’est-ce la communauté » aborde cette
notion au delà de l’importance accordée à l’interaction : « il est impossible de
comprendre la communauté, de savoir ce qu’elle est, sans tenir compte du
sens qui lui est attribué par les membres. Les gens construisent la communauté
de manière symbolique et en font une source et un réceptacle de sens, et un
repère de leur identité »
Communauté de pratique, d’apprentissage, d’intérêt : comment définir cette
communauté de patients qui s’est construite au fur et mesure des évolutions
socio culturelles ? Intéressons nous maintenant aux nuances que revêtent les
différentes approches pour chercher à l’appliquer à notre objet d’étude.
C’est en reprenant comme terrain d’étude ethnographique le fonctionnement
des alcooliques anonymes que Jean Lave et Etienne Wenger, en 1991,
théorisent l’idée de communauté de pratiques dans le paradigme de
l’apprentissage situé (situated learning). Ce que les auteurs souhaitent avant
tout démontrer, n’est pas tant sur la structure de la communauté et l’étude fine
de ce qui en constitue les pratiques, mais l’affirmation d’un apprentissage social
qui « n’est ni un transfert de connaissances d’une situation à l’autre, ni le
traitement d’informations, mais une façon de participer à des pratiques sociales,
un statut, un mode d’appartenance à une communauté, une façon d’en être ».
Pour comprendre le mécanisme de cet apprentissage situé, les auteurs
s’intéressent au caractère informel et aux automatismes structurels des
interactions entre experts (membres plus anciens Alcooliques Anonymes) et
nouveaux venus, dans la construction du savoir expérientiel (apprendre à
83 Qu’est-ce la communauté - Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 29 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf.
71
raconter son histoire autant qu’exprimer son vécu), les modalités de
participation et les formes d’engagement.
Les observations réalisées leurs permettent de dresser le constat suivant :
« l’apprentissage (learning) est un processus de participation à des groupes
sociaux, c’est à dire des communautés de pratiques, participation qui est, au
départ « périphérique et légitime » mais qui augmente peu à peu dans
l’engagement et la complexité »84. Ce point de vue permet donc de revisiter la
vision de l’apprentissage comme un mode de participation à des groupes
sociaux.
En définissant la pratique comme « les compétences, les tâches, les actions
mises en œuvre, les significations, les relations, les artéfacts, les conventions,
les valeurs, les représentations qui permettent de rendre l’expérience
possible » Etienne Wenger en 1998, permettra ensuite de mieux cerner les
éléments mobilisés au sein de la communauté.
En précisant la notion de pratique, cet auteur, en référence aux travaux
précédents, conceptualise la notion de participation à laquelle il ajoute celle de
la négociation du sens, vecteur d’identité. Ainsi, la pratique est considérée
comme la source de cohésion au sein de la communauté, forgée par, ce que
l’auteur défini, engagement mutuel, entreprise commune et répertoire partagé.
Avec le regard ethnographique, le chercheur, loin de vouloir seulement
observer les interactions quotidiennes qui contribuent à réifier la communauté
(engagement et relations mutuelles), rejoint indirectement les préceptes
d’emporwement entendus par Isabelle Aujoulat qui ont été détaillés dans le
chapitre précédent. A cela, relayons lui seulement l’idée de répertoire partagé.
En effet, pour Wenger, l’engagement au sein d’une pratique commune crée
avec le temps, les ressources collectives (répertoire partagé) de la
communauté de pratique. Les outils (documents), les gestes, les codes, les
84 BERRY, Vincent. Les communautés de pratiques : note de synthèse. In : [en ligne]. [Consulté le 10 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.academia.edu/1127961/Les_communautes_de_pratiques_note_de_synthese.
72
routines, deviennent les éléments mêmes de la pratique, les fondements à la
structure communautaire qui entretiennent le sentiment d’appartenance.
En cernant mieux le concept de communauté, qu’en est-il de la communauté
virtuelle ? Son fonctionnement est-il similaire, ou l’artefact technologique que
représente le web, en modifie-t-il le sens ?
La notion de communautés, appelées virtuelles selon l’expression popularisée
par Howard Rheingold, est une notion phare d’Internet. Outil communautaire
par excellence, Internet est, selon Pierre Levy85 « le dispositif technique idéal
pour l’émergence et la consolidation des communautés les plus diverses,
permettant à un collectif d’entrer en communication avec lui-même ». Ce lien
entre le réseau technique et la notion de communauté parait étroit, ancien et
historique.
Pour mieux en saisir les contours, l’ouvrage de Serge Proulx86 « communautés
virtuelles : penser et agir en réseau » nous éclaire sur ce qui renforce et
distingue les deux termes.
La différenciation majeure entre la communauté et la communauté virtuelle est
avant tout formelle. C’est en fait sur le principe du corps, du lieu et de
temporalité des échanges que se particularise la communication en ligne de la
communication en face à face. L’espace spatio-temporel qui était une norme
sociale dans les pratiques des communautés réelles (temps de la rencontre,
lieu de la rencontre) se trouve effectivement reconsidérée dans un contexte
hyper connecté.
Il n’en demeure pas moins que la communauté virtuelle offre des potentiels
supplémentaires (en rappel l’étymologie du terme virtuel « ce qui a de la vertu,
de la puissance ») qu’il est intéressant de notifier en comparaison avec les
motifs et les fonctions occupées par la communauté, telle que définie plus haut.
85 Pour un modèle scientifique des communautés virtuelles. Chapitre 7 « communautés virtuelles : penser et agir en réseau ». 86 PROULX, Serge, POISSANT, Louise et SENECAL, Michel. Communautés virtuelles: penser et agir en réseau. Québec : Presses Université Laval, 2006. ISBN 2763783848
73
Nous en retiendrons deux essentielles en référence à Serge Proulx et à Michel
Sénécal.
• De l’intérêt à la construction de l’appartenance
La communauté virtuelle est avant tout une communauté d’intérêt. C’est, en
effet, ce que Rheingold fait ressortir comme étant les composantes
indispensables à sa constitution : « plusieurs individus, des rapports sociaux,
un intérêt face au groupe, le tout s'inscrivant dans une dynamique temporelle ».
Cette caractéristique, reprise également par Proulx va jusqu’à concevoir le
partage d’un authentique projet collectif : « la communication de groupe
médiatisée par l’informatique constitue un environnement social et symbolique
dans lequel les participants peuvent développer un sentiment d’appartenance
au groupe et s’y construire une identité collective qu’elle soit communautaire ou
sociale ».
Ce processus de « conscientisation collective de collectifs d’usagers
connectés » trouve sa représentation dans la conception des logiciels sociaux
(social software) et de dispositifs collaboratique (computer supported
coopérative work) qui, selon l’auteur « tentent notamment d’inventer des
dispositifs orientés activement vers une facilitation au groupe ».
• De l’interactivité à l’interaction
Pour Michel Sénécal, dans la communauté virtuelle, l’interactivité associée
communément à des interventions techniques ne peut se distinguer de
l’interaction qui s’inscrit davantage dans une dimension sociale : « toutes deux
s’avèrent indissociables car elles sont conjointement évoquées quand le sens
et l’usage de l’une et de l’autre ne sont pas tout simplement interchangeables ».
Ainsi, l’interactivité technique proposée par le dispositif socio technique valorise
l’interaction de l’homme à l’interface, tout en stimulant l’interaction humaine des
hommes entre eux à travers la machine. Suivant cette perspective critique, la
quête de l’interactivité dans les usages des médias est envisagée comme un
élément du discours contestataire du « sens unique » des médias de masse.
Ce que l’auteur assure en affirmant que cette interactivité « n’est pas sans lien
avec le processus d’appropriation sociale de la technique et de la participation
74
du citoyen (individus et groupes d’intérêts communs) à la fabrication et à la
diffusion des messages ».
Au delà de l’appartenance, la communauté virtuelle, par son processus
d’interactivité et d’interaction amplifie en cela, la dimension d’une
reconnaissance statutaire et identitaire telle que nous l’avons détaillé pour la
communauté.
S’il est justifié que les communautés virtuelles font émergées un nouveau type
de dispositif de médiation qui « suscitent non seulement la multiplication des
échanges d’information entre les personnes mais aussi une transformation
qualitative de la nature de ces interactions » (Serge Proulx) l’intérêt maintenant
est de nous interroger plus précisément sur les communautés virtuelles de
patients atteints de maladies chroniques.
Si nous avons pu démontrer le rôle socio culturel tenu par les communautés de
patients, qui au-delà d’une convergence d’intérêt à su structurer une
communauté de pratiques et d’apprentissage à travers la valorisation des
savoirs expérientiels, qu’en est-il des communautés virtuelles ? La médiation
des connaissances reconnue à travers le dispositif socio technique, tel que
nous l’avons démontré en deuxième partie de ce mémoire, est elle également
observable dans le cadre des communautés virtuelles de patients, au point
d’engager un processus d’apprentissage social revisitant le modèle actuel
d’éducation thérapeutique ?
Pour y répondre, appuyons nous sur l’analyse ethnographique en ligne de trois
sites web dédiés à des communautés d’intérêts (Serge Proulx, 2006) : Carenity,
Be Patient et Patientworld afin d’y chercher les réponses possibles.
2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WO RLD
A. Méthodologie de recherche, limites, résultats
75
L’ethnographie en ligne, fondée sur l’étude descriptive et analytique des écrits
numériques des internautes, est une méthode qui a été développée par Josiane
Joët et Carole le Caroff 87et qui semble totalement approprié à notre recherche.
En effet, l’objectif étant la compréhension des communautés virtuelles de
patients atteints de maladies chroniques à travers leur modes de participation,
grâce à l’affichage des participants et aux fonctionnalités proposées par les
concepteurs du site web, nous positionnons notre angle de recherche sur une
représentation globale du collectif, et à l’instar de l’ethnographie classique, sur
l’invisibilité des interactions et des relations sociales.
Par l’accession « in situ » des échanges et des dynamiques sociales qui se
nouent en temps réel grâce à la connexion aux plateformes observées, nous
allons donc rechercher, à travers la construction d’une grille d’analyse
composée d’indicateurs qui attestent de l’imbrication étroite de la technique et
du social, de mettre en parallèle les compétences du professionnel de santé (le
médecin) et celles de l’éduqué (le patient) dans le cadre d’un processus
d’éducation thérapeutique et, ce à partir de la revue de littérature suivante :
- le guide des recommandations de la Haute Autorité de Santé de Juin 2007
« Education thérapeutique du patient, comment la proposer et la réaliser »
- « Education thérapeutique : mise en pratique des modèles en 5
dimensions » par Grégoire Langer, André Giordan, Monique
Chambouleyron et Aline Lassere-Moulet 88
- Le tableau synthétique présentant la logique d’instruction et d’apprentissage
en fonction des modèles d’éducation modélisé par Alain Deccache et
Philippe Meremans en 200089
87 BARATS, Christine. Manuel d’analyse du Web en sciences humaines et sociales. Paris : Armand Colin, 2013. ISBN 9782200286279 2200286279. 88 LAGGER, Grégoire, GIORDAN, André, CHAMBOULEYRON, Monique, LASSERRE-MOUTET, Aline et GOLAY, Alain. Éducation thérapeutique 2e partie : Mise en pratique des modèles en 5 dimensions. In : Médecine. 1 juin 2008, Vol. 4, n° 6, p. 269 �273. DOI 10.1684/med.2008.0299.
76
- La grille d’observation du dispositif socio technique proposée par Josiane
Jouët en 2013
- L’analyse sémiotique des sites web, description, évaluation et conception de
Peter Stockinger, réalisé par l’Equipe Sémiotique Cognitive et Nouveaux
Médias (ESCoM) en 2004
Pour baliser notre recherche, nous nous contenterons d’observer à partir de la
page d’accueil de chacun de ces sites, le processus de navigation et les
interactions de la page dédiée à la communauté de patients diabétiques. Le
choix de cette pathologie est justifié pour plusieurs raisons majeures :
- La forte prévalence de cette pathologie au regard du chiffre total du nombre
de personnes atteintes de maladies chroniques en France en 2011 (15
millions de personnes) dont 2,9 millions atteints de diabète 90 (source
Laboratoire Roche)
- Le caractère endémique de cette pathologie qui a connu une
progression fulgurante en l’espace de quelques années. Ainsi et d'après les
données publiées dans le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire
(BEH) de l'Institut de veille sanitaire, "le nombre de diabétiques traités en
France est supérieur à l'hypothèse la plus haute prévue par certains experts
pour 2016. En effet, entre 2000 et 2009 le nombre de diabétiques est passé
de 1,6 million (2,6% de la population) à 2,9 millions (4,4%) ».
- Un diagnostic qui tend à se généraliser à toutes les tranches
d’âges. Avec une proportion estimée à 14,2% pour les 65-74 ans et à 14,8%
pour les plus de 75 ans contre seulement 0,4% des moins de 44 ans
89 DECCACHE, Alain, MEREMANS, Philippe. L’éducation pour la santé des patients au carrefour de la médecine et des sciences humaines. In : Brigitte SANDRIN BERTHON. L’éducation pour la santé au secours de la médecine. Paris : Puf, 2000, p. 147. 90 Source Laboratoire Roche. http://www.fondationroche.org/fr/medias/actu_chiffres_cles_maladies_chroniques.html
77
touchés par le diabète, on note néanmoins une forte augmentation du
diabète de type 1 chez l'enfant de moins de 4 ans et l'apparition de plus en
plus fréquente de diabète de type 2 ou diabète gras chez l'adolescent. Ces
deux phénomènes pourraient être directement attribués à la hausse de
l'obésité infantile. La France suit ainsi ce qui se passe aux Etats-Unis,
tendance que l'on retrouve aussi dans tous les autres pays occidentaux.91
Le choix des sites web dédiés Carenity, Be Patient et Patient World repose sur
les principes entendus par Serge Proulx dans son ouvrage « Communautés
virtuelles : penser et agir en réseau » et qui a permis de définir l’environnement
sociotechnique des communications en ligne.
En effet l’auteur met en lumière 6 principaux types d’environnements socio
techniques propre aux communautés en ligne : les réseaux locaux
communautaires, les babillards électroniques, le MUD (multi user domain), le
clavardage, les forums de discussion et les sites web dédiés à des
communautés d’intérêts tels que ceux que nous nous proposons d’étudier.
A partir de sa cartographie, voyons en quoi ces trois sites répondent aux
critères définis par Serge Proulx en fonction de leur carte d’identité.
CARENITY : http://www.carenity.com/
91 Source e-santé.fr http://www.e-sante.fr/attention-forte-augmentation-diabete-type-1-chez-enfant-diabete-type-2-chez-adolescent/actualite/1248
78
Mise en ligne en avril 2011, Carenity est édité par Else Care, société
entièrement indépendante de l'industrie de la santé et contrôlée par son
fondateur, Michael Chekroun.
La volonté du site est de favoriser la mise en relation de patients et proches de
malades concernés par une même maladie, partant du constat de l'inégale
qualité de l'information de santé disponible sur le web. Pour ce faire Carenity
propose à ses membres trois services principaux :
• La mise en relation d'hommes et de femmes atteints d'une
même maladie grâce à des fonctionnalités communautaires : création de
groupes d'amis, fil d'actualité, forums, messagerie privée, base de
connaissance partagée, etc.
• Des outils simples de suivi de sa santé : indicateurs de suivi
de ses traitements et de ses symptômes développés sous la supervision
de médecins référents. Un tableau de bord facilite le suivi de sa santé
dans le temps et, une fois présenté à son médecin, peut enrichir le
dialogue patient-praticien.
• La mise en ligne d'enquêtes anonymes dont les résultats
agrégés sont fournis aux chercheurs et aux industriels pour favoriser la
79
mise au point d'une meilleure offre de soins et de services médicaux qui
bénéficiera in fine aux malades.
La finalité réclamée du site est de permettre l’amélioration des connaissances
des besoins et des usages des patients pour, en retour, proposer une meilleure
offre de soins et de services. Le partenariat affiché avec des associations de
patients et le soutien de médecins via un comité scientifique et éthique sont les
garants du sérieux et de l’expertise engagés par le site internet.
BE PATIENT : http://www.bepatient.fr/
80
La société BePATIENT est née de la volonté de son fondateur Frédéric
Durand-Salmon et de son équipe, de valoriser plus de 20 années
d´expériences concernant la gestion des données cliniques dans le cadre du
dossier patient hospitalier et de la recherche clinique. La plateforme est mise en
ligne depuis 2011. La mission que s’est donné le site est de permettre à chacun
de disposer des compétences et des outils pour promouvoir sa santé et sa
qualité de vie.
Pour ce faire, BePATIENT se considère comme une plateforme « eSanté »
proposant aux patients un bouquet de services, prioritairement dans le cadre
des maladies chroniques, de leur prévention et de leur surveillance en vue de
rendre celui-ci plus autonome et acteur de sa santé. Elle est proposée en direct
aux patients et à leurs proches, via des programmes spécifiques conçus par
BePATIENT et ses partenaires, sur le thème d'une pathologie précise. Elle peut
être adaptée aux besoins spécifiques d'une association de patient, d'une
fondation, d'un réseau de soins, d'une communauté de professionnels de santé
(médecins, pharmaciens), de la médecine du travail, d'un réseau hospitalier,
d'une organisation alternative spécifique (EHPAD, HAD, santé carcérale...).
Trois grands modules composent le site en terme d’offre de service :
• Une offre en télésanté
A partir des dernières technologies internet et de communication, les usagers
peuvent bénéficier d’un accompagnement en télé-monitoring et coaching santé,
renseigner leur carnet de santé mobile et le partager avec les professionnels de
santé. Deux rubriques proposent de manière gratuite ou payante des
prestations en télésanté : Pocket Santé (outils pratiques pour bien suivre sa
santé) et Webstore Santé (produits et services en ligne : consultation médicale,
dispositifs médicaux connectés). L’apport de ces applications doit favoriser
l’acquisition des compétences du patient en auto soins et en adaptation.
• Une offre de réseau social communautaire
Les mises en relations proposées concernent autant les professionnels de
santé, les patients experts que les patients entre eux. La recherche et la mise
81
en réseau s’effectuent à travers l’annuaire des membres, la messagerie
sécurisée et la participation à des forums, modérés par les experts du site.
L’interactivité de la relation médecin patient est constamment recherchée ainsi
que la valorisation du partage d’expériences entre patients eux-mêmes.
• Une offre en prévention et en éducation
De la formation à l’accompagnement, de la sensibilisation à l’éducation
thérapeutique du patient, le site propose et offre des solutions d’aide, de
soutien et de formations adaptées aux besoins du patient. L’une des
spécificités du site est la revendication du concept de patients experts. S’il n'est
pas nécessairement atteint de la même pathologie, le patient expert
BePATIENT a reçu une formation qui lui permet de répondre aux questions
concernant tous les aspects transversaux de la maladie chronique. La mise en
relation s’effectue à partir d’un formulaire à disposition sur le site, qui reste
l’intermédiaire de la demande.
PATIENTSWORLD : http://www.entrepatients.net/fr
Mise en ligne en 2012, ce site intitulé à l’origine Entrepatients change de nom
en 2013 pour devenir Patientsworld. Cette plateforme, éditée par la société
Patientsworld dont le fondateur est Denis Granger, se veut un service conçu
82
pour les patients et leur entourage mais aussi pour toutes les structures qui leur
apportent une aide, des services et un appui au quotidien.
Indépendante, entièrement dédiée à l’information, à l’échange et à
l’accompagnement des patients dans leur prise en charge et leur suivi
thérapeutique, elle met à leur disposition, ainsi qu’à celle de leur entourage
(famille, amis, aidants), un espace qui leur offre l’opportunité :
• De rejoindre et de participer à l’animation , par leurs
expériences, leurs vécus et leurs témoignages, d’une ou de plusieurs «
communautés » structurées par pathologie.
Outre les accès classiques aux communautés, à la messagerie ou aux
forums de discussions, le site propose le service Healthbox, qui permet, en
plus d’une auto mesure de s’évaluer par rapport à sa communauté de
référence.
• De consulter des articles, des témoignages , des
informations en lien avec la ou les pathologies qui les concernent,
directement ou indirectement.
• D’accéder à des services interactifs d’e-santé en lien avec
leur pathologie.
Regroupés dans la rubrique intitulée le Store, les applications concernent le
coaching, les serious game, les matériels para médical, les applications
pour stmarphones et tablettes numériques.
• De rechercher des partenaires de santé par le biais d’un
annuaire.
Outil de compréhension des patients, de leurs attentes et leur quotidien, la
plateforme web met également à la disposition d’industriels (laboratoires, agro-
alimentaire, bien-être et beauté) un outil d’observatoires et d’études afin de leur
permettre d’accompagner le patient dans une meilleure compréhension de sa
maladie, et d’un mieux-vivre avec celle-ci, d’apporter des astuces, de réels
services et des outils spécifiques, à l’utilisation quotidienne lors de maladies
83
chroniques et construire des liens privilégiés avec les autres partenaires de la
spécialité concernée (sociétés savantes, associations de patients).
Pour pouvoir bénéficier d’un certain nombre de services : coaching
personnalisé via téléphone ou chat vidéo, conférences spécifiques, vidéos,
documentations complètes ou applications pour mobiles (exemples donnés à
titre indicatif), l’internaute sera amené, selon les accords et partenaires choisis
échéants, à s’abonner ou acheter les produits concernés.
84
Cartographie de l’environnement socio technique de CARENITY, BE PATIENT et PATIENTSWORLD selon S. Proulx
Type d’environnement socio technique Serge PROULX
Fonctionnalité CARENITY, BE PATIENT et PATIENTSWORL D
Sites dédiés à des
communautés d’intérêts
Babillards Electroniques Communication effectuée en temps différée. Les usagers déposent les messages selon leur disponibilité. Ils sont regroupés autour d’un thème
MUD (multi user domain) L’inscription au site permet de cibler la communauté dans laquelle nous souhaitons nous
85
Sites dédiés à des
communautés d’intérêts
Espace virtuel qui se déroule dans un environnement peuplé d’avatars où plusieurs participants peuvent échanger. Les avatars sont des représentations textuelles ou visuelles d’usagers. Ces environnements sont structurés par un ensemble de règles et de codes.
engager. En fonction de ce dernier, la plateforme nous indique le nombre d’usagers connectés à cette communauté afin d’organiser sa liste d’amis à partir de profil configuré à l’aide d’un avatar visuel et textuel.
86
Sites dédiés à des
communautés d’intérêts
Forum de discussions Sont des lieux d’expression collectives situées sur le site. Ces environnements permettent l’échange de messages en temps différés (interaction asynchrone) entre usagers, chaque abonné recevant l’ensemble des messages de la liste.
C’est la fonctionnalité centrale du site qui requiert notamment l’inscription par un mot de passe pour se connecter aux espaces de discussion portant sur une thématique particulière.
87
Sites dédiés à des
communautés d’intérêts
88
Autres services interactifs
CARENITY : - Propose des fonctionnalités de gestion documentaire et de curation afin de
constituer sa « banque d’information » (ma bibliothèque). - Facilite les échanges d’expériences autour de la maladie entre membres de
la communauté (ma pathologie et moi, conseils pratiques, les traitements diabète type 2) - Anime un blog et des enquêtes régulières - Organise des rencontres « réelles » entre membres des communautés pour
mieux cerner les attentes et besoins des membres de la communauté en ligne - Propose une ouverture sur la vie quotidienne (espace détente : recettes de
cuisine, voyages, petites annonces) - Invite les membres des communautés à participer à des études de
recherche clinique ou audit. BE PATIENT : - Propose des fonctionnalités de suivi de santé (Pocket santé : planning,
gestion des mesures, rappel des rdv, suivi des graphiques) - Favorise les échanges avec les professionnels de santé et les patients
experts - Permet l’auto évaluation des connaissances (quizz santé, fiches pratiques) - Facile l’accès à l’information en fonction des centres d’intérêt (Live santé :
resté informé sur ma maladie) - Offre un service Store de solutions connectées en santé (télésurveillance,
coaching, téléconsultation médicale) dans un espace dédié et payant (Web store santé) - Anime une web TV avec des conférences débat et une émission dédiée aux
patients PATIENTSWORLD : - Organise en complément des fonctionnalités communautaires une
plateforme santé générique (dossiers, sondages, vidéo, fil d’actualité) - Met gratuitement à disposition un suivi quotidien de santé avec le
programme PEPS (HealthBox). A l'aide de modules dédiés, l’usager peut renseigner quotidiennement les informations relatives à un élément clef de sa santé et s’auto évaluer par étalonnage avec les membres de sa communauté.
- Offre un service Store de solutions connectées en santé (télésurveillance, chat, coaching, téléconsultation) dans un espace dédié et payant (Store)
- Dispose d’un moteur de recherche annuaire pour organiser la relation avec
89
les professionnels de santé (Annuaire)
90
Avec cette lecture des éléments contextuels nous permettant de présenter les
sites dans leur environnement sociotechnique, nous pouvons d’ores et déjà
établir des liens de concordance avec les fonctions éducatives, mises en
évidence par les différentes théories des sciences de l’éducation, énoncées au
chapitre précédent.
Aussi, proposons nous maintenant de justifier l’hypothèse d’une fonction
éducative au sein des communautés virtuelles de patients à partir du tableau
synthétique présentant la logique d’instruction et d’apprentissage en fonction
des modèles d’éducation et modélisé par Alain Deccache et Philippe
Meremans.
91
Analyse des fonctions éducatives des sites BE PATIE NT, CARENITY et PATIENTSWORLD à partir sur tableau de Deccache et Meremans
Modèle d’éducation Modèle de santé
Biomédical Fonctions mobilisées
dans les sites
Biopsychosocial Fonctions mobilisées
dans les sites
Logique d’instruction (fondée sur l’enseignant)
Type 1 : enseignement de savoirs médicaux Modèle Behavioriste Enseignement à la prévention (bénéfice-risque). L’éducation vise la transmission des savoirs et des comportements de prévention recommandés.
Carenity : La rubrique info Santé propose : - un lexique médical en
partenariat avec Vidal - Des fiches maladies - Des indications sur les
symptômes, traitement et prévention
Be Patient : La rubrique Fiche pratique propose - des fiches de
recommandations de l’HAS
PATIENTSWORLD : Les fiches santé de la rubrique santé organisée sous la forme d’un glossaire par pathologie et organisé selon la même structure : - épidémiologie, chiffres clés prévention, causes, symptômes et recommandations HAS
Type 2 : enseignement des savoirs de santé à la fois physique, mentale, sociale Modèle cognitiviste Les savoirs à transmettre restent prédéfinis mais par des experts travaillant en complémentarité. L’éducateur est un enseignant, un expert.
Carenity : Le blog de la communauté réalisé en lien avec les associations de patients Be Patient : l’espace LIVE SANTE regroupant : - Les derniers infos
rassemblées par les experts
- L’agenda évènementiel des congrès, réunions et débats publics
- L’accès aux vidéos PATIENTSWORLD : les dossiers santé réalisés avec les partenaires et l’espace vidéo.
Logique d’apprentissage (fondée sur l’apprenant)
Type 3 : apprentissage de savoirs médicaux
Carenity : Rubrique « ma pathologie et moi » et « ma bibliothèque » fondée sur le
Type 4 : apprentissage de savoirs de santé à la fois physique, mentale et sociale
Carenity : Les 3 badges indiquent votre niveau d'implication dans votre
92
Modèle constructiviste L’éducation s’élabore autour d’un apprentissage participatif dans lequel les apprenants contribuent à leur propre formation notamment en définissant eux-mêmes leurs objectifs et les moyens d’apprendre. L’éducateur est encore un expert mais aussi un facilitateur, un animateur capable de s’adapter aux attentes et choix de l’apprenant.
principe du forum de discussion et sur la curation des sources d’information en fonction des besoins des internautes. BePatient : L’espace Coaching Santé et Pocket Santé permettant : - la mise en relation avec les
experts et les professionnels en fonction des besoins et favorise la participation aux forums de discussion
- la sélection des outils de suivi de santé
- Les outils payant du Webstore
- Tests de connaissances quizz
PATIENTSWORLD : La Healthbox qui permet à l’internaute de s’auto évaluer tout en se comparant avec sa communauté - les outils payants du store
Modèle socioconstructiviste L’éducation se fonde sur une logique globale de la santé et de la maladie. La participation occupe une place majeure qui se définie à la fois comme une possibilité de négocier les sujets de santé, les contenus et les méthodes. L’éducateur tient le rôle d’une personne ressource, facilitateur et d’aide à l’empowerment du public
communauté. - Partagez son expérience, - Aidez la communauté à
mieux comprendre sa maladie
- Multipliez les échanges avec les membres.
- Participation à des sondages, enquêtes
BePatient : L’organisation d’un module de formation de 6 jours pour devenir Patient Expert. 2 sessions organisées en 2012. Exclusivité Bepatient. PATIENTSWORLD : L’inter-contribution de tous les membres de la communauté aux questions posées au sein du groupe de discussion sans modération par l’administrateur du site.
93
L’apport de ce tableau synthétique nous indique bien que les communautés
virtuelles de patients mobilisent des fonctions éducatives au regard des
applications développées par chaque site observé. L’intérêt maintenant est de
s’intéresser de plus près à ces dernières afin d’étudier les actions de médiation
au sein des pratiques éducatives, à partir de ces dispositifs socio techniques.
Pour chercher à déterminer quels types de compétences ont été
particulièrement mobilisés, comment ces dispositifs socio techniques
s’inscrivent dans une pratique d’apprentissage social et quels usages sont
développés par l’adoption technologique, il a été nécessaire de construire une
grille d’analyse à partir du modèle développé par Josiane Jouët.
Les indicateurs retenus pour réaliser notre observation portent sur les fonctions
majeures des sites dédiés aux communautés d’intérêts, tels que nous avons pu
les identifier à la lecture de Serge Proulx dans sa présentation des différents
types d’environnements sociotechniques de communication en ligne que nous
formalisons sous les entités suivantes :
- Contributions : en rapport avec la fonction de babillage
électronique
- Personnalisation et Partage : en rapport avec la fonction MUD
qui formalise l’avatar et la capacité pour plusieurs usagers d’échanger en
ligne
- Discussion : en rapport avec les forums de discussions
La grille de lecture permet à la fois d’observer les fonctionnalités techniques
des sites et les actions de lien social opérés pour chacun des critères retenus.
Afin de répondre à la problématique d’un changement possible de paradigme
dans le modèle d’éducation thérapeutique, cette grille est complétée par
l’attribution des référentiels de compétences « éducateur » tels que définis par
Grégoire Langer, André Giordan, Monique Chambouleyron et Aline Lassere-
Moulet en proposant une modélisation à partir des 5 dimensions psycho-
sociales (cognitive, affective, perceptive, infra et méta-cognitive). Pour
rechercher les compétences « éduqué », la grille s’appuie sur le référentiel de
l’HAS et les différentes approches liées à l’étude des comportements de santé.
94
Chaque grille présentée en annexe a porté sur l’analyse de la page réservée à
la communauté de diabétique pour les 3 sites.
95
B. Discussion En synthèse des éléments observés, il est à noter que la grille a pu être
renseignée à 90% à partir des indicateurs et référentiels retenus avec la
répartition suivante : 100% pour Carenity et Patientsworld et 70% pour
BePATIENT.
L’absence d’évaluation pour ce site résulte d’un même facteur : la fonctionnalité
web dédiée au forum de discussion est d’une part à ce jour très faible
(seulement 8 ouverture de thèmes) et d’autre part modérée par les
professionnels ou experts reconnus BePATIENT avec qui il est nécessaire
d’effectuer une demande d’amitié pour accéder au contenu. Dans la mesure où
les échanges au sein de ce site semblent se constituer autour des émissions
webTV et dès lors que cette application n’a pas été retenue comme un élément
d’observation de l’environnement socio technique, nous n’avons donc pu
effectuer une analyse de ces critères.
Cette absence d’étude fait, par ailleurs, émerger les spécificités propres à
chaque site qui se revendique « plateforme de communautés virtuelles de
patients ». Pour Carenity et Patientsworld, la vocation d’être un espace
d’échanges, de partage d’information, de connaissances et d’expériences, est
totalement remplie.
La différence mineure entre les deux sites réside dans les formes d’interactions
entre les utilisateurs qui selon la logique de relations de Gunther Eysenbach
(2001) est de l’ordre du C2C (échanges entre patients seuls) pour Carenity et
B2C (échanges entre patients et professionnels) pour Patientsworld. Nous
retrouvons également cette logique pour BePATIENT qui a totalement organisé
son site sur le principe d’un lien constant avec les modérateurs professionnels
de santé de la plateforme ou encore avec les patients experts.
Ces spécificités de logique ne sont pas sans conséquences sur l’ergonomie et
les fonctions du langage appliqué au site telles que définies par Jakobson. La
relation C2C des patients entre eux fait émerger des fonctions expressives et
conatives très développées dans Carenity, quelles soient textuelles ou
visuelles. Dans notre grille, elle se traduit par une forte prise en compte de la
96
dimension émotionnelle et affective qui favorise l’empathie. Les accroches
« vous n’êtes plus seuls face à la maladie », « Je suis là pour vous aider » en
message de l’administrateur de la communauté ainsi que toutes les
fonctionnalités permettant de liker un contenu, de souhaiter la bienvenue en
sont les exemples.
En revanche, les sites BePATIENT et patientsworld favorisent davantage les
fonctions référentielles et phatique qui se traduisent par « Que voulez-vous
faire aujourd’hui » ou « c’est plus simple en se connectant ».
La question de la médiation est également mise en exergue à travers cette
grille de lecture. En fonction de la logique de relation retenue par les trois sites,
la forme de la médiation au sein des pratiques éducatives évolue. Si les trois
sites ont chacun développé une application à leur plateforme permettant de
valoriser les compétences en auto soins du patient afin d’acquérir autonomie et
de s’autoréguler, BePATIENT semble se rapprocher du concept de
médiatisation des connaissances c’est-à-dire de mise en ligne d’outils
permettant cette autogestion alors que Carenity et Patientworld s’inscrivent plus
dans le concept de médiation des connaissances, les outils pouvant être
discuter et partager avec la communauté pour enrichir le savoir expérientiel
qu’offre cette dernière.
Enfin la question de la communauté comme vecteur d’apprentissage social est
au centre du fonctionnement des sites Carenity et Patientsworld. La valorisation
pour chacun d’eux des contenus par thèmes, par membres, par fil de
discussion organisée pour Carenity autour de l’idée « moi et ma communauté »
(ma bibliothèque, ma pathologie et moi, mon forum) et pour Patientsworld dans
le sens « la communauté pour moi » reprend l’idée de l’individu, qui s’intègre et
est intégré par l’approbation des membres. C’est par l’inscription des règles,
des codes et procédures de lien social que se construit l’apprentissage à
travers la perception de ces comportements.
Enfin, la mise en adéquation des compétences éducateur avec celles de
l’éduqué nous permet de positionner maintenant le curseur général en fonction
du modèle d’apprentissage tel que défini par Deccache et Meremans.
97
Ainsi et en complément de la grille précédemment réalisée sur la modélisation
des logiques d’instruction et d’apprentissage, BePATIENT semble davantage
répondre à des critères constructivistes et behavoristes. Sa position sur la
formation de patients experts (module de 6 jours) en est une preuve : il n’est
pas rechercher en priorité l’apprentissage social par la construction de savoirs
expérientiels provenant des communautés de patients, mais l’accompagnement
de ces derniers, par des pairs devenus experts, dans la gestion de la maladie.
Assez proche du modèle actuel d’éducation thérapeutique, le site ne permet
pas, en l’état des éléments disponibles, la construction d’un réseau social de
patients lui permettant l’engagement à la communauté d’intérêt. Par ailleurs,
l’accessibilité aux échanges rendue payante pose la question de la place de ce
dispositif numérique en transversal avec le suivi et la prise en charge médicale.
En revanche les sites Carenity et Patientsworld proposent une nouvelle
approche de l’éducation qui étaye d’ailleurs son succès. La dynamique des
échanges entre membres, la création de nouveaux forums de discussions,
engage ces dispositifs dans un modèle socioconstructiviste.
La prise en compte des dimensions sociales, affectives et physiques de
l’environnement et de l’individu, la valorisation au sein des groupes de
discussion d’une relation d’aide, de partage d’expériences mais également de
partage de savoir à travers l’expression des symptômes, des traitements et des
complications avec l’ouverture de son suivi santé aux membres de la
communauté, dimensionne une nouvelle approche de l’éducation thérapeutique
par l’empowerment individuel et collectif.
98
CONCLUSION GENERALE
La grille d’observation en ligne constituée permet de mettre en exergue
plusieurs éléments clés de notre problématique :
- le facteur socio culturel voit, avec l’arrivée du numérique, une mutation du
processus communicationnel de la relation médecin patient.
- le facteur technologique modifie les pratiques éducatives et la forme des
communautés d’intérêts.
Dès lors, il apparaîtrait l’émergence de nouvelles fonctions référentielles au sein
de la relation thérapeutique et l’apparition de nouvelles postures éducatives
inhérentes à l’usage de dispositifs socio-techniques.
Pour saisir les significations attachées aux conduites d’acteurs en interaction
avec le dispositif et mettre en relief les logiques d’usage (tout en tenant compte
du poids de la technique), nous conclurons notre étude sur la projection de
l’analyse sémiotique situationnelle développée par Alex Mucchielli (2007) du
site PATIENTSWORLD qui répond en tout point à notre problématique et ce
pour 3 raisons :
- il répond à la logique d’une relation entre patients et professionnels et
permet donc de justifier les changements communicationnels avec l’arrivée
de dispositifs socio techniques.
- il intègre toutes les fonctionnalités d’un environnement socio technique de
communication en ligne (forum, clavardage, mud…).
- Il propose des applications permettant à l’usager de s’étalonner par rapport
au groupe (self efficacity) avec l’application Heathbox et de mesurer ces
croyances relatives à la santé par sondage individuel et par comparaison
avec ceux de la communauté. En cela, il répond donc aux exigences de
l’apprentissage social formalisé par les communautés de patients.
99
Cette théorie propose en effet une méthode pour appréhender les phénomènes
humains comme une construction de sens en situation pour l’acteur. La
situation ici, qui conclurait notre étude, serait d’envisager la conception d’un
nouveau modèle d’éducation thérapeutique.
A partir du tableau systémique réalisée par Marie-Caroline Heïd et Valérie
Méliani 92 , ce dernier permet au chercheur de dégager les usages normés
portés par le dispositif dans un contexte en immersion, de renseigner la grille
sémiotique situationnelle selon les cadres et les niveaux identifiés par Alex
Mucchielli pour permettre de modéliser le phénomène de communication.
En conséquence de cette projection, la grille appliquée au site
PATIENTSWORLD se structure de la manière suivante :
Niveaux
Cadres
Micro -situationnel Interaction de l’usager avec le site
Méso-situationnel Interaction de l’usager avec les autres usagers à travers le site web
Macro -situationnel Interaction de l’usager avec l’extérieur du site web
Identitaire
Enjeux, intentions, projets, finalités
incitation à l’activité de se s’informer : rubrique santé qui reprend les fiches santé, les médicaments, les vidéos, les actualités. Incitation à participer : inscrivez vous, renseignements du profil sur son mur Contact, accès Abonnement à la newsletter, envoi de post sur sa messagerie personnelle
Possibilité de devenir prescripteur d’info pour d’autres usagers : relations professionnelles vers patients et patients entre patients Possibilité d’échanger des discussions avec d’autres usagers : commentaires, le chat (à partir de Facebook et tweeter) le partage de lien, photos, le suivi santé (traitements, symptômes, complications) Heathbox : se comparer avec la communauté dans le suivi de sa santé (nutrition, sommei)
Annuaire des professionnels Information sur l’agenda évènementiel : journées de prévention Lien sur les vidéos : autour d’un sujet et par thématique Sondage : lien sur des sujets de sociétés. Prise de position. Evaluation des résultats avec ceux de la communauté
Qualités des relations
Ambiance, climat,
Incitation à rentrer en relation : entre les patients et avec les professionnels
Incitation à entrer en communication avec d’autres membres : les communautés les plus
Relations avec autres partenaires : Espace Store, lien avec associations de patients,
92 B2.5-T_Heid - Heid.pdf [en ligne]. [Consulté le 5 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.trigone.univ-lille1.fr/complexite2010/actes/Heid.pdf
100
degré de proximité/distance
(rechercher) Possibilité d’accéder à PATIENTSWORLD sans aller sur le site : boite mail, Facebook, Tweeter,
actives, les derniers posts de commentaires
établissements référencés
Normes
Règles partagées
Reconnaissance et importance de chaque individualité : accès personnalisé aux informations, adaptation des contenus en fonction des difficultés d’apprentissage Loging obligatoire de connextion
Normes d’échanges , de partages d’information, co-construction du contenu informationnel dans les forums de discussion et « normalisme » des fiches santé sous la même charte : comprendre, soigner, vivre avec, Actus et dossiers Avatars des membres de la communauté Charte de confidentialité dans la diffusion des informations
Ouvrir le débat sur le bien être et la santé de manière général. Proposer un espace éducation et prévention en santé Favoriser l’interaction avec les professionnels tout en maintenant la dynamique relationnelle entre membres patients Favoriser l’implication des proches par l’accessibilité et la possibilité de recommandations sur les réseaux sociaux thèmes actu et dossiers, vidéos
Positionnement
Places, statuts, rôles
L’usager acteur de sa santé, pouvoir d’agir et de faire
Un statut de relation d’aide, de soutien et de conseil des autres membres de la communauté Un statut d’appui et de consulting des professionnels.
Le 1er réseau social santé en France Vocation d’éducation et de prévention en santé
Temporel
Contexte historique Passé/présent/futur
Accès aux informations en interactions asynchrone.
Possibilité de chater avec patients et professionnels (version payante)
Partage sur les réseaux sociaux
Les potentiels d’apprentissage social à travers d’une part l’accès, le partage
d’information et d’autre part les échanges de savoirs expérientiels, la capacité
d’empowerment individuel et collectif et la reconfiguration des rôles et des
statuts apparaissent plus précisément avec ce tableau systémique.
L’ensemble de ces éléments semblerait donc préfigurer un changement de
paradigme offrant, à travers les fonctionnalités d’un site de communautés
virtuelles de patients tel que PATIENTSWORLD un nouveau modèle
101
d’éducation thérapeutique qui pourrait, à chaque séquence de la prise en
charge, intervenir dans le dispositif.
- Au niveau du diagnostic éducatif (patient/médecins/objectifs négociés) pour
mieux intégrer les connaissances du patient, l’identification de ses besoins
et de ses attentes et formuler avec lui les compétences à acquérir à travers
une interface dédiée à la relation médecin/patient
- Au niveau du programme personnalisé d’ETP et des priorités
d’apprentissage par l’évaluation des compétences d’auto soins et
d’adaptation nécessaires au travers l’accès et le partage de son suivi de
santé (médicaments, symptômes, complications)
- Au niveau de la mise en œuvre des séances d’ETP collectives et/ou
individuelles qui permettrait de résoudre les difficultés organisationnelles de
possibilités locales (accessibilité géographique, disponibilité des
professionnels de santé) et d’optimiser les outils pédagogiques sous une
forme interactive (éducation par le jeu, MUD, Moodle93..)
- Au niveau de l’évaluation individuelle de l’ETP par un retour personnalisé,
valorisé dans le fil de discussion et étalonné dans le cadre de
l’apprentissage social avec les autres membres de la communauté.
Ces éléments restent encore à l’état de recherche qu’il serait maintenant
intéressant de mettre en application dans le cadre d’une étude sur une cohorte
de patients avec la participation d’une structure organisatrice d’éducation
thérapeutique.
93 Moodle. Wikipédia [en ligne]. 2013. [Consulté le 4 juin 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Moodle&oldid=93515820 Moodle est une plateforme d'apprentissage en ligne (en anglais : e-learning) sous licence libre servant à créer des communautés s'instruisant autour de contenus et d'activités pédagogiques. Le mot « Moodle » est l'abréviation de Modular Object-Oriented Dynamic Learning Environment : « Environnement orienté objet d'apprentissage dynamique modulaire ».
102
L’intérêt serait maintenant de valider la problématique d’un rôle éducatif au delà
de son implication socio culturelle, ce que nous avons tenté de démontrer dans
ce mémoire.
Car c’est fondamentalement à partir du contexte socio culturel que se
construisent les pratiques éducatives en santé à partir de la sociologie de la
médecine, de l’éducation, et maintenant des usages technologiques.
En cela et en conclusion de ce mémoire, la théorie de l’intelligence collective
développée par Pierre Levy94, par son vision holistique fondée sur le principe
que chacun sait quelque chose, propose une nouvelle approche des
technologies au service du savoir et de la connaissance : « L’intelligence
collective n’est donc pas la fusion des intelligences individuelles dans une sorte
de magma communautaire mais, au contraire, la mise en valeur et la relance
mutuelle des singularités. »
Or et pour l’auteur « l’interconnexion des ordinateurs peut être un instrument
au service de l’intelligence collective. (…).Dans le « cyberespace », chacun est
potentiellement émetteur et récepteur dans un espace qualitativement
différencié, non figé, aménagé par les participants, explorable. Ici, on ne
rencontre pas les gens principalement par leur nom, leur position géographique
ou sociale, mais selon des centres d’intérêt, sur un paysage commun du sens
ou du savoir. (…).
Le « cyberespace » manifeste des propriétés neuves, qui en font un instrument
de coordination non hiérarchique, de mise en synergie rapide des intelligences,
d’échange de connaissances et de navigation dans les savoirs. Son extension
s’accompagne d’une rupture de civilisation rapide, profonde et irréversible. (…).
Pourquoi ne pas saisir ce moment rare où s’annonce une culture nouvelle pour
94 http://www.monde-diplomatique.fr/1995/10/LEVY/1857 Pierre Lévy est titulaire d'une chaire de recherche du Canada en Intelligence Collective à l'université d'Ottawa. Un des principaux objectifs est de constituer une nouvelle couche sémantique du Web permettant de visualiser les processus d'intelligence collective à partir des données circulant dans le cyberespace. LÉVY, Pierre. L’Intelligence collective: pour une anthropologie du cyberspace. Paris : La Découverte/Poche, 1997. ISBN 2707126934 9782707126931.
103
orienter délibérément l’évolution en cours ? A raisonner en termes d’impact, on
se condamne à subir. La technique propose, mais le citoyen dispose. Cessons
de diaboliser le virtuel (comme si c’était le contraire du réel !).
Le choix n’est pas entre la nostalgie d’un réel daté et un virtuel menaçant ou
excitant, mais entre différentes conceptions du virtuel. L’alternative est simple.
Ou bien le « cyberespace » reproduira le médiatique, le spectaculaire, la
consommation d’informations marchandes et l’exclusion à une échelle encore
plus gigantesque. C’est, en gros, la pente naturelle des « autoroutes de
l’information ». Ou bien nous nous mobilisons en faveur d’un projet de
civilisation centré sur l’intelligence collective : recréation du lien social par les
échanges de savoir, reconnaissance, écoute et valorisation des singularités,
démocratie plus ouverte, plus directe, plus participative.
Les Arbres de connaissances sont une illustration pratique de ce projet95 .
Poussant à partir des auto-descriptions des personnes, l’arbre des
connaissances rend visible la multiplicité organisée des compétences
disponibles dans une communauté. Lisible sur écran, cette carte dynamique
des savoir-faire d’un groupe ne résulte pas d’une quelconque classification a
priori des savoirs : elle est l’expression, évoluant en temps réel, des parcours
d’apprentissage et d’expérience des membres de la collectivité. (…).
Dans tous les cas, les individus gagnent une meilleure appréhension de leur
situation dans l’espace du savoir des communautés auxquelles ils participent et
peuvent élaborer en connaissance de cause leurs propres stratégies
d’apprentissage. Tant il est vrai que l’intelligence collective, projet humaniste,
ne peut être qu’au service ultime des citoyens.».
95 Les arbres de connaissances, ou arbres de compétences, sont une marque déposée de la société TriVium), qui a mis au point, dans ce but, le logiciel Gingo. Il s’agit d’une méthode informatisée pour la gestion globale des compétences dans les établissements d’enseignement, les entreprises, les bassins d’emploi, les collectivités locales et les associations. Elle est expérimentée sur plusieurs terrains en Europe et particulièrement en France (grandes entreprises, PME, universités, organismes de logements sociaux, etc.). Grâce à cette approche, chaque membre d’une communauté peut faire reconnaître la diversité de ses compétences, même celles qui ne sont pas validées par les systèmes scolaire et universitaire classiques.
104
105
Bibliographie
OUVRAGES
1. BARATS, Christine. Manuel d’analyse du Web en sciences humaines et sociales. Paris : Armand Colin, 2013. ISBN 9782200286279 2200286279.
2. BONNEVILLE, Luc. Introduction aux méthodes de recherche en communication. G.Morin, [sans date]. ISBN 978-2-89101-948-0.
3. BOUTILLIER, Sophie, GOGUET D’ALLONDANS, Alban, LABÈRE, Nelly et UZUNIDIS, Dimitri. Méthodologie de la thèse et du mémoire. Levallois-Perret : Studyrama, 2012. ISBN 9782759015962 2759015963.
4. DECCACHE, Alain et LAVENDHOMME, Eric. Information et éducation du patient: Des fondements aux méthodes. De Boeck Université, 1989. ISBN 9782804112677.
5. ÉVEILLARD, Philippe. Éthique de l’Internet santé. Paris : Ellipses Édition Marketing S.A., 2002. La bioéthique en question. ISBN 2729809465 9782729809461.
6. GROSJEAN, Michèle et LACOSTE, Michèle. Communication et intelligence collective : le travail à l’hôpital. Paris : Presses universitaires de France, 1999. ISBN 2130497365 9782130497363.
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MEMOIRES, THESES et RECHERCHES
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118
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE .......................................... ............... 6
I. Mutation du processus communicationnel de la relati on
médecin patient à l’ère du numérique .............. .......................... 12
Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 12
1. Les asymétries de la relation médecin patient ..... ............................. 13 A. Contextualisation et approches théoriques ............................................ 14 B. Internet et santé : de la pratique aux usages ......................................... 23 2. Le numérique et les mutations du processus communic ationnel ... 28 A. Du physique au virtuel : la fin de l’hégémonie paternaliste au transfert de postures relationnelles .................................................................................. 28 B. Des transformations identitaires à la création de « l’empowerment » du patient ........................................................................................................... 32
Synthèse du chapitre .............................. ....................................................... 39
II. Construction d’une médiation numérique au sein des
pratiques éducatives .............................. ..................................... 40
Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 40 1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, enje ux croisés ..... 42 A. Etat des lieux et cadre de référence ...................................................... 42 B. De la relation à la médiation .................................................................. 49 2. Education et santé, les perspectives de l’éducation thérapeutique 52 A. Education et santé, les apports conceptuels .......................................... 52 B. Formalisation de l’éducation thérapeutique ........................................... 58
Synthèse du chapitre .............................. ....................................................... 62
III. Place et rôle socio culturel des communautés virtue lles des
patients dans le dispositif éducatif .............. .............................. 64
119
Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 64 1. De la communauté à la communauté virtuelle de patie nts ............... 65 A. Evolution socio culturelle de la reconnaissance du savoir expérientiel .. 65 B. Du réel au virtuel : modélisation des communautés de patients ............. 69 2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WORLD ............ 74 A. Méthodologie de recherche, limites, résultats ........................................ 74 B. Discussion ............................................................................................. 95
CONCLUSION GENERALE .......................................... ................ 98
Bibliographie ..................................... ......................................... 105
Table des matières ................................ ..................................... 118
Annexes ........................................... ........................................... 120
120
Annexes - Infographie Laboratoire ROCHE sur les chiffres clés des maladies
chroniques en 2010
- Grille d’analyse CARENITY
- Grille d’analyse BE PATIENT
- Grille d’analyse PATIENTSWOLRD
- Analyse sémiotique des sites web : description, évaluation et conception
- Guide de recommandations de l’HAS « Education thérapeutique du patient,
comment la proposer et la réaliser ? »
- Education thérapeutique, mise en pratique des modèles en 5 dimensions
121
UNIVERSITE Michel Montaigne - BORDEAUX 3 UFR Sciences des Territoires et de la Communication Institut des Sciences de l’Information et de la communication
Géraldine GOULINET – 2012/2013
MEMOIRE RECHERCHE Master 2 Ingénierie de la recherche en sciences de l’information et de la communication spécialité Communication Réseaux et Société
Rôle socio culturel des communautés virtuelles de p atients dans le suivi des maladies chroniques : Vers un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?
Résumé : En même temps que ce sont modifiées les relations médecin-patient avec les évolutions socio-culturelles, passant d’un modèle biomédical à un modèle biopsychosocial, la reconnaissance du patient, dans sa globalité, lui a permis d’acquérir un « pouvoir d’agir ». Par ailleurs, l’émergence d’internet, a formalisé la mutation de ce processus communicationnel en lui permettant un accès direct à l’information, au savoir médical et à l’apprentissage de sa santé. La forte proportion des maladies chroniques a surenchéri ce phénomène en engageant les pouvoirs publics a développé une éducation thérapeutique afin que ce dernier puisse développer des compétences en auto-soins et en adaptation, sous couvert de l’enseignement des professionnels. Or, le pouvoir donné aux patients d’expression, d’échanges, de partage d’expériences et de connaissances a forgé une culture communautaire basé sur l’entraide et l’apprentissage social autour d’intérêt et d’engagement commun. Avec le numérique, l’arrivée de sites web dédiés aux communautés virtuelles de patients interrogent sur la place qu’occupent maintenant ces dispositifs dans la relation éducative, qui semblent favoriser l’émergence d’usages et des pratiques en devenir. Mots clés : maladies chroniques, éducation thérapeutique, communauté virtuelles, relation médecin patient, emporwement, apprentissage social. Summary : while these are changed relations doctor-patient with the socio cultural changes, from a bio model medical model biopsychosocial, recognition of the patient, in its entirety, it allowed to acquire an "authority to act". Moreover, the emergence of the internet, has formalised the mutation of this communicative process allowing him direct access to information, medical knowledge and learning of his health. The high proportion of chronic disease have been outbid this phenomenon by engaging the public authorities has developed a therapeutic education so that it can develop skills in self-care and adaptation, under the guise of teaching professionals. However, the power given to patients of expression, Exchange, sharing of experiences and knowledge has forged a community culture based on mutual help and social learning around interest and common commitment. With digital, the arrival of web sites dedicated to virtual communities of patients questioned the role now these devices in the educational relationship, which seem to promote the emergence of usages and practices become. Key words : chronic diseases, therapeutic education, virtual community, patient physician relationship, emporwement, social learning.
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