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4 | EUROPA STAR PREMIÈRE PAR RETO SCHNEIDER, FONDATEUR ET CEO DE RS PARTNER, CABINET DE CONSEIL EN RESSOURCES HUMAINES SCIALISÉ EN HORLOGERIE Le 15 janvier dernier à 10h30, le communiqué de la BNS tombait, froid et implacable. L’horlogerie suisse, troisième secteur d’expor- tation après la pharma et les ma- chines-outils, en a eu, dans un pre- mier temps, le soue coupé. Elle qui vend à l’étranger 95% de sa pro- duction, dont près de 30% en zone euro, n’a pas tardé à réagir. Par la voix de sa présidente Elisabeth Zölch Bührer, la Convention patro- nale de l’industrie horlogère suisse (CP), qui regroupe les trois quarts des entreprises de la branche, a ap- pelé les milieux politiques à «mettre sur pied des conditions-cadres, en particulier avec l’exécution de l’ini- tiative sur l’immigration de masse, an de permettre à la branche hor- logère de maintenir ou de retrou- ver une place concurrentielle sur le marché international». Car bien que la branche ait bouclé l’année sur un nouveau record de 22,2 milliards de francs d’exporta- tions horlogères (+1,9%), l’environ- nement s'est clairement détérioré, achant même une croissance négative sur le mois de décembre (-2,5%). C’est dans ces circonstances qu’est venue s’ajouter l’annonce de l’abandon du taux plancher. Nick Hayek, président de la direc- tion générale de Swatch Group connu pour son esprit d’indépen- dance vis-à-vis du monde bancaire, n’a pas mâché ses mots en parlant de «tsunami», selon ses dires, pour la branche et en menaçant de reti- rer son groupe de la Bourse suisse. Entre le 14 et le 16 janvier, l’action passait de 457 à 355 francs, soit une chute de 22%. Dans le même temps, l’action Richemont passait elle-aussi de 91 francs à 70 (-23%). H. Moser & Cie à Schaouse, propriété de la holding familiale vaudoise MELB employant 55 per- sonnes, a réagi vertement: dans une «lettre ouverte à Monsieur omas Jordan, Président de la BNS», le CEO Edouard Meylan a tenu à souligner que les premières commandes avaient été annulées quelques heures seulement après l’annonce de l’institution. Puis d’in- terpeller le banquier: «Pourquoi ne pas tout simplement déménager à deux kilomètres, en Allemagne, et continuer notre activité dans l’Union européenne?» Pas de quoi inquiéter cependant Pierre-Yves Donzé, professeur associé à l’Université de Kyoto et expert en horlogerie, qui écrit dans Le Temps du 3 février: «C’est à une baisse de la protabilité qu’il faut s’attendre, et c’est sans doute dans ce sens qu’il faut comprendre l’eondrement des actions Swatch et Richemont à la Bourse suisse après l’annonce de la BNS. Cependant, le taux de prot des géants du luxe a connu ces der- nières années une croissance extrê- mement forte, si bien qu’il apparaît assez peu probable qu’une diminu- tion du bénéce se transforme en menace existentielle.» De fait: si le taux a été bloqué à 1,20 franc depuis l’automne 2011, il ne faut pas oublier que l’euro valait 1,60 franc en 2007! Or, le renchérisse- ment constant de la monnaie hel- vétique n’a pas empêché l’industrie horlogère de croître comme jamais. Selon les statistiques de la FH, entre 2005 et 2012, les exportations au niveau mondial sont passées de 12,4 à 21,4 milliards de francs (+72%)! En fait, force est de constater que l’horlogerie suisse jouit d’une posi- tion hors norme et sans pareille. Alors que l’industrie suisse dans son ensemble évoque des mesures radicales, telles que licenciements, baisses des salaires, paiements des frontaliers en euros ou encore délo- calisations, les horlogers, eux, sont en position de pouvoir d’abord son- ger à ajuster leurs prix (+5 à 7% en moyenne). Pierre-Yves Donzé poursuit ainsi dans Le Temps: «Les principaux groupes horlogers établis en Suisse n’ont plus de concurrents à l’étranger. La cherté soudaine du franc ne pro- te ainsi pas directement aux hor- logers d’autres nations, comme cela avait été le cas avec Seiko et Citizen au cours des années 1970. (…) La position de niche particulière de la plupart des fabricants suisses fait que ces derniers ne verront pas une baisse de leur compétitivité.» PUBLICITÉ WWW.ZENITH-WATCHES.COM | WWW.ROLLINGSTONES.COM F O L L O W Y O U R O W N S T A R EL PRIMERO CHRONOMASTER 1969 TRIBUTE TO THE ROLLING STONES Le quasi-monopole des horlogers suisses DOSSIER FRANC FORT Le renchérissement constant de la monnaie helvétique n’a pas empêché l’industrie horlogère de croître comme jamais entre 2007 et 2012.

4 DOSSIER FRANC FORT Le quasi-monopole des … · nale de l’industrie horlogère suisse (CP), qui regroupe les trois quarts des entreprises de la branche, a ap-pelé les milieux

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Page 1: 4 DOSSIER FRANC FORT Le quasi-monopole des … · nale de l’industrie horlogère suisse (CP), qui regroupe les trois quarts des entreprises de la branche, a ap-pelé les milieux

4 | EUROPA STAR PREMIÈRE

PAR RETO SCHNEIDER, FONDATEUR ET CEO DE RS PARTNER, CABINET DE CONSEIL EN RESSOURCES HUMAINES SPÉCIALISÉ EN HORLOGERIE

Le 15 janvier dernier à 10h30, le communiqué de la BNS tombait, froid et implacable. L’horlogerie suisse, troisième secteur d’expor-tation après la pharma et les ma-chines-outils, en a eu, dans un pre-mier temps, le souffle coupé. Elle qui vend à l’étranger 95% de sa pro-duction, dont près de 30% en zone

euro, n’a pas tardé à réagir. Par la voix de sa présidente Elisabeth Zölch Bührer, la Convention patro-nale de l’industrie horlogère suisse (CP), qui regroupe les trois quarts des entreprises de la branche, a ap-pelé les milieux politiques à «mettre sur pied des conditions-cadres, en particulier avec l’exécution de l’ini-tiative sur l’immigration de masse, afin de permettre à la branche hor-logère de maintenir ou de retrou-ver une place concurrentielle sur le marché international».

Car bien que la branche ait bouclé l’année sur un nouveau record de 22,2 milliards de francs d’exporta-tions horlogères (+1,9%), l’environ-nement s'est clairement détérioré, affichant même une croissance négative sur le mois de décembre (-2,5%). C’est dans ces circonstances qu’est venue s’ajouter l’annonce de l’abandon du taux plancher. Nick Hayek, président de la direc-tion générale de Swatch Group connu pour son esprit d’indépen-dance vis-à-vis du monde bancaire,

n’a pas mâché ses mots en parlant de «tsunami», selon ses dires, pour la branche et en menaçant de reti-rer son groupe de la Bourse suisse. Entre le 14 et le 16 janvier, l’action passait de 457 à 355 francs, soit une chute de 22%. Dans le même temps, l’action Richemont passait elle-aussi de 91 francs à 70 (-23%). H. Moser & Cie à Schaffhouse, propriété de la holding familiale vaudoise MELB employant 55 per-sonnes, a réagi vertement: dans une «lettre ouverte à Monsieur

Thomas Jordan, Président de la BNS», le CEO Edouard Meylan a tenu à souligner que les premières commandes avaient été annulées quelques heures seulement après l’annonce de l’institution. Puis d’in-terpeller le banquier: «Pourquoi ne pas tout simplement déménager à deux kilomètres, en Allemagne, et continuer notre activité dans l’Union européenne?»Pas de quoi inquiéter cependant Pierre-Yves Donzé, professeur associé à l’Université de Kyoto et expert en horlogerie, qui écrit dans Le Temps du 3 février: «C’est à une baisse de la profitabilité qu’il faut s’attendre, et c’est sans doute dans ce sens qu’il faut comprendre l’effondrement des actions Swatch et Richemont à la Bourse suisse après l’annonce de la BNS. Cependant, le taux de profit des géants du luxe a connu ces der-nières années une croissance extrê-mement forte, si bien qu’il apparaît assez peu probable qu’une diminu-tion du bénéfice se transforme en menace existentielle.»De fait: si le taux a été bloqué à 1,20 franc depuis l’automne 2011, il ne faut pas oublier que l’euro valait 1,60 franc en 2007! Or, le renchérisse-ment constant de la monnaie hel-vétique n’a pas empêché l’industrie horlogère de croître comme jamais.

Selon les statistiques de la FH, entre 2005 et 2012, les exportations au niveau mondial sont passées de 12,4 à 21,4 milliards de francs (+72%)! En fait, force est de constater que l’horlogerie suisse jouit d’une posi-tion hors norme et sans pareille. Alors que l’industrie suisse dans son ensemble évoque des mesures radicales, telles que licenciements, baisses des salaires, paiements des frontaliers en euros ou encore délo-calisations, les horlogers, eux, sont en position de pouvoir d’abord son-ger à ajuster leurs prix (+5 à 7% en moyenne).Pierre-Yves Donzé poursuit ainsi dans Le Temps: «Les principaux groupes horlogers établis en Suisse n’ont plus de concurrents à l’étranger. La cherté soudaine du franc ne pro-fite ainsi pas directement aux hor-logers d’autres nations, comme cela avait été le cas avec Seiko et Citizen au cours des années 1970. (…) La position de niche particulière de la plupart des fabricants suisses fait que ces derniers ne verront pas une baisse de leur compétitivité.»

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Zenith_HQ • Visual: U12_EP6 • Magazine: Europa_Star_Edition_Interational (CH) • Language: EnglishDoc size: 193 x 253 mm • Calitho #: 02-15-106453 • AOS #: ZEN_09102 • TS 20/02/2015

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Le quasi-monopole des horlogers suissesDOSSIER FRANC FORT

Le renchérissement constant de la monnaie helvétique n’a pas empêché l’industrie horlogère de croître comme jamais entre 2007 et 2012.