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BIMESTRIEL D'INFORMATIONS CRITIQUES ET INDÉPENDANTES SURLES OGM

Journal éditépar l'association

ACTUALITE ▪ LES ÉTATS POURRONT-ILS VRAIMENT INTERDIRE LESOGM IMPORTÉS ? P.3 ▪ SCIENCE DIVISÉE : LE POLITIQUE DOIT ÉCOU-TER LES CITOYENS P.5 ▪ SEMENCES ▪ SEMENCES EN AMÉRIQUE LA-TINE : VERS UNE PRIVATISATION GÉNÉRALE P.8 ▪ ENTRETIEN ▪PACIFIQUE : VERS UNE MEILLEURE INFORMATION SUR LES OGMP.11 ▪

bioversity

internationalMAI / JUIN 201 5 - 4 euros l'unité

N°1 34

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LE CHIFFRE DU BIMESTRE

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

BRÈVES ▪ 2

Les moustiques génétiquement modifiés n’ont pas été retenuspar les autorités malaisiennes dans la lutte contre la dengue. Latechnologie a en effet été considérée comme « coûteuse et in-efficace » par le ministère de la Santé. Après les îles Caïmans,la Malaisie avait été le deuxième terrain de jeu de l’entreprisebritannique Oxitec, qui avait lâché des mil l iers de moustiques(Aedes aegypti) génétiquement modifiés pour tenter d’endiguerl ’épidémie de dengue. Le professeur Subramaniam, ministre dela Santé, précise que la proposition de tester ces insectesbiotechnologiques dans quatre états malais coûterait 25 mil l ionsd’euros. Sa préférence va donc vers « des insecticides quipeuvent pénétrer dans les murs pendant plus de trois mois,couplés avec l’utilisation d’une pilule anti-moustique ou unepeinture anti-moustique », le tout, en l ien avec une campagnede sensibi l isation, notamment pour tenter d’él iminer les pointsd’eau stagnante, qui favorisent le développement d’Aedes.En jui l let 201 4, c’était la Province de Malacca, en Malaisie, quiavait déjà officiel lement pris position contre ces moustiquesGM. Le premier ministre de la province, Datuk Seri Idris Haron,avait précisé que ce n’était pas le coût de ces lâchers qui l ’avaitamené à se montrer réticent, mais la crainte que la solutiontransgénique engendre d’autres problèmes.Ce changement de stratégie nationale s’opère dans un contextede recrudescence de la dengue (+50% au premier trimestre201 5 par rapport à celui de 201 4).

L’entreprise Cibus a mis aupoint un colza rendu résistantaux herbicides par mutagé-nèse dirigée. Cette techniquefait partie du paquet des nou-vel les techniques de biotech-nologie dont le statut légaln’est pas encore connu.L’Union européenne doit eneffet toujours répondre si ouiou non les produits issus deces modifications du vivantdonnent des OGM. En atten-dant cette réponse, Cibus faitdu porte-à-porte auprès dedifférents États membres pourconnaître leur position natio-

nale. Ainsi, l ’Al lemagne, leRoyaume-Uni, la Suède et laFinlande ont déjà officiel le-ment répondu à Cibus. Deleur côté, les Pays-Bas et laRépublique tchèque avaient,eux, adopté une position deprincipe sans avoir été inter-pelés par Cibus. Bilan : la Ré-publique tchèque défend quela mutagénèse dirigée donnedes OGM, mais les cinqautres estiment que cette bio-technologie n’a rien à faireavec la législation « OGM ».En savoir plus : www.infogm.org/article5792

MOBILISATION

En 201 2, l ’Appel de Poitierssouhaitait déjà restreindre ledéveloppement des variétésrendues tolérantes aux herbi-cides (VrTH) : i l pointait dudoigt des OGM qui ne disentpas leur nom, l ’augmentationdes quantités d’herbicides uti-l isées, inhérents à ces planteset l ’absence de toute évalua-tion des risques avant mise enculture commerciale. LesVrTH sont des colzas et destournesols modifiés par muta-génèse pour qu’ils tolèrent desherbicides spécifiques qui, au-trement, leur auraient été fatals.En décembre 201 4, ce collec-tif a demandé au premier mi-nistre, Manuel Valls, d’adopterun moratoire sur la vente et laculture de ces VrTH, « en at-tendant les évaluationséquivalentes à celles régle-mentairement obligatoires pourles OGM », au sens desplantes transgéniques. I l de-mande au gouvernementd’être cohérent avec son inter-diction des OGM et sa volontéaffichée de réduire l ’usage des

pesticides en promouvantl ’agro-écologie ; et avec l’opi-nion publique, largement né-gative sur les OGM.Face à l’ inaction du gouver-nement, l ’Appel de Poitiers adéposé un recours en mars201 5 devant le Conseil d’État.Le suivi des surfaces de VrTHcultivées en France est dél i-cat. Le ministère de l’Agricul-ture nous a précisé que1 7 000 hectares de colza (1 %de la sole totale) et 11 0 000hectares de tournesol (1 7%de la sole totale) rendus tolé-rants à un herbicide ont étésemés en 201 4.Le collectif rappelle l 'expertiseInra/CNRS qui concluait en201 3 que « la caractéristiquede tolérance aux herbicides,introduite par manipulationgénétique pourrait être diffu-sée à d’autres plantes, culti-vées ou sauvages ».Le 4 avril 201 5, des Fau-cheurs ont « neutral isé » uneparcelle d'expérimentation decolza VrTH appartenant auGEVES en Anjou.

Nous étions habitués, par les vendeurs de maïs GM, à consi-dérer le pollen de cette céréale comme voyageant peu.. .quelques dizaines de mètres. En France, les recommantationsen 2007 étaient de séparer les champs GM et non GM de 50mètres. Ce mythe vient de prendre du plomb dans l'aile : uneétude de l’Université de Brême, basée sur un travail de dix ans,a établi en 201 4 que le pollen de maïs peut se retrouver jusqu'à4,5 km de sa source. Ceci confirme l'étude de Brunet qui, en2004, établissait que du pollen de maïs viable se retrouvaitjusqu'à 1 800 mètres d'altitude. L'Agence européenne de sécu-rité des aliments a même décidé de l'étudier de près.

BRÈVES

BESTIAIRE

Du colza VrTH devant le Conseil d'Etat (photo-montage)

ChristopheNoisette

Erwan Guerin

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Un moustique s'abreuvant de la rosée du matin

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ACTUALITÉ ▪ 3

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

La proposition de la Commission instaurera un mécanisme simi-laire à celui intégré récemment à la directive 2001 /1 8 (4), pourles cultures de plantes génétiquement modifiées (PGM). Aveccette nouvelle proposition, les États disposeraient d’unedeuxième voie pour interdire l ’uti l isation d’OGM dans l’al imenta-tion humaine et animale, en plus de la mesure d’urgenceexistante. Maintenant que la Commission européenne a présentéofficiel lement cette proposition, el le va être discutée par les Étatsmembres et le Parlement européen. Une procédure qui pourraits’avérer longue, cel le sur la culture ayant pris quatre ans.

Objectif : interdire nationalementla commercialisation d’une PGM

La procédure adoptée en janvier 201 5 et concernant la cultured’OGM permet aux États d’agir soit au cours de la procédured’autorisation soit à son issue. Dans la proposition présentée le22 avri l et concernant les importations à destination de l’al imen-tation humaine et/ou animale, l ’ interdiction ne pourrait être prisequ’une fois l ’OGM autorisé (même si l ’État membre a la possibi l i-té d’informer de ses intentions d’interdire en cours de procédured’autorisation). La Commission européenne ne détail le pas lesarguments qui pourraient être évoqués à l’appui d’une interdic-tion, la justification devant être développée au cas par cas. Seulrequis : les arguments en lien avec les risques pour la santé hu-maine ou l’environnement ne pourront pas être pris en compte, àl ’ instar de la procédure d’interdiction pour la culture, ces argu-ments restant réservés à l’Agence européenne de sécurité al i-mentaire (AESA). Pour rappel, les États membres peuventuti l iser ces arguments scientifiques, mais uniquement dans lecadre d’une procédure d’urgence et clause de sauvegarde.

Quels impacts sur l’alimentation des Européens ?

En pratique, cette proposition aura un impact très l imité sur lesdenrées destinées à l’al imentation humaine. Du fait d’un étique-tage obligatoire des aliments qui contiennent plus de 0,9%d’OGM, et d’une opinion publique largement opposée à les re-trouver dans l ’assiette, de tels produits ont peu à peu été élimi-nés des étals des supermarchés et ne concernent qu’unetrentaine de produits (5). La cinquantaine d’OGM autorisée pourl ’al imentation humaine permet donc surtout qu’en cas de conta-mination par ces OGM-là, les produits contaminés ne soient pasretirés de la vente. En effet, un produit al imentaire qui contient unOGM non autorisé, quel le que soit sa quantité, doit être retiré dumarché. Si l ’OGM est autorisé et présent en quantité inférieure à0,9%, le consommateur n’en saura rien. Enfin, au-delà de 0,9%,l ’étiquetage est obligatoire. Or, la proposition de la Commissioneuropéenne ne permettra d’interdire que les denrées étiquetées(avec plus de 0,9% d’OGM par ingrédient). L’ interdiction d’unÉtat ne concernera en définitive que très peu de produits. UnOGM interdit dans un État pourra continuer à être présent dans

LE 22 AVRIL 201 5, LA COMMISSION EUROPÉENNE A FORMALISÉ UNE PROPOSITION DE MODIFICATION DU RÈGLEMENT 1 829/2003QUI FOURNIRAIT AUX ÉTATS MEMBRES UN NOUVEL OUTIL POUR INTERDIRE LES OGM POUR L'ALIMENTATION HUMAINE OU ANIMALE

(1 ). DANS LA FOULÉE, ELLE A VALIDÉ L'AUTORISATION DE 1 9 NOUVEAUX OGM (CF. ENCADRÉ PAGE 4), POUR L'ALIMENTATION HU-MAINE ET ANIMALE, QUI VIENNENT S'AJOUTER À LA CINQUANTAINE D'OGM DÉJÀ AUTORISÉS POUR CES DEUX USAGES. SELON MAR-GRETHE VESTAGER, COMMISSAIRE EN CHARGE DE LA CONCURRENCE, CETTE PROPOSITION EST LA PRINCIPALE SUITE DONNÉE PAR

LA COMMISSION EUROPÉENNE À SON ANNONCE DE VOULOIR MODIFIER LA PROCÉDURE D'AUTORISATION DES OGM (2) COMME

JEAN-CLAUDE JUNKER, PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE, S'Y ÉTAIT ENGAGÉ (3).

des denrées alimentaires sous forme de traces (c’est-à-dire à untaux inférieur à 0,9 % par ingrédient). . .

En revanche, l ’ interdiction d’OGM pour l ’al imentation animalepeut davantage bouleverser le marché. L’Europe souffre actuel-lement d’un déficit de protéines végétales pour nourrir le bétai l . . .El le importe donc massivement du soja (sous forme de grainesou de tourteaux) pour nourrir ses animaux, lequel soja est princi-palement transgénique. Ainsi, l ’ interdiction d’un OGM au niveaunational concernera principalement les importateurs et les fabri-cants d’al iments pour bétai l . Or, les al iments pour animaux sontnécessairement étiquetés lorsqu’i ls contiennent des OGM, maisle type d’OGM présent (Mon81 0, Mon863, etc.) n’est jamais ex-pl icité sur l ’emballage. Les importateurs devront-i ls faire destests qualitatifs pour identifier l ’OGM présent dans leurs importa-tions ?À moins d’une obligation d’étiquetage identifiant précisément leou les OGM présents dans un lot importé, i l sera quasimentimpossible pour les éleveurs de savoir s’ i ls uti l isent un OGMinterdit pour nourrir leurs animaux. I ls pourront donc acheter unproduit contenant un OGM interdit sans le savoir. Seront-i ls res-ponsables ?Ainsi, la mise en place d’une interdiction des OGM dans l’al imen-tation animale doit nécessairement s’accompagner d’unestructuration des fi l ières pour permettre que l’offre d’al iments quine comportent pas des OGM interdits puisse suivre la demande.Une tel le mesure peut diffici lement se faire du jour au lendemain.La Commission européenne demande d’ai l leurs aux Étatsmembres de laisser un « délai raisonnable » aux opérateurs,sans toutefois préciser quel doit être ce délai et comment lemettre en œuvre.

Un casse-tête qui favorisera l’entrée d’OGM ?

Mais c’est loin d’être la seule difficulté posée par ce projet de ré-glementation. C’est un véritable casse-tête qui risque de semettre en place : chaque État ou chaque région pourrait avoir sapropre politique vis-à-vis d’un ou plusieurs OGM. Une disparitéque l’on imagine diffici lement l isible pour les opérateurs et quirisque d’instaurer des distorsions de concurrence, pourtantcontraires aux principes de l’UE. I l faudrait donc a minima quecette proposition de la Commission s’accompagne de l’obl igationd’étiqueter les produits issus d’animaux nourris aux OGM. Sansun tel étiquetage, les opérateurs se retrouveront avec descontraintes supplémentaires, sans pouvoir valoriser leurs pro-duits et sans information des consommateurs. D’autre part, ceprojet ne permettra pas aux États membres d’interdire des pro-duits issus d’animaux qui auraient été nourris avec des OGMinterdits sur leur territoire, en provenance d’autres pays de l’UE. . .Seuls opérateurs pouvant a priori valoriser leurs productions : lesfrançais, al lemands ou autrichiens, qui disposent d’un étiquetage« sans OGM » national et pour autant qu’i ls en respectent les

ACTUALITÉ ▪ 4

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

conditions ; et les fi l ières bio européennes dont le cahier descharges exclut les OGM.

Le contrôle du respect d’une interdiction à l’échelle nationale ourégionale pourrait également s’avérer diffici le dans la mesure oùla différenciation d’un produit animal en ce qui concerne son ali-mentation ne peut se faire que par la traçabil ité écrite. . . En effet,un œuf issu d’une poule nourrie aux OGM ne peut se distinguerd’un autre œuf issu d’une poule nourrie sans OGM.

Le projet de la Commission européenne n’en est qu’au début,mais soulève déjà de nombreuses questions quant à sa faisabil i-té. Par la voix de José Bové, les Verts au Parlement européenexpliquent que ce projet est « conforme à l’objectif de la Com-mission européenne qui veut faciliter l’entrée des OGM dansl’UE », dénonçant par ail leurs l ’ incohérence d’un système qui

amènerait un État membre attaqué devant l ’OMC à être défendupar « un Commissaire européen qui se sera prononcé en faveurde cet OGM » (6). Greenpeace et Amis de la Terre Europecraignent également une accélération des autorisations face àdes États l ivrés à eux-mêmes (7) (8).

Outre cette accélération crainte par la société civi le, i l est envisa-geable que cette proposition confirme un objectif de central isa-tion des autorisations au seul niveau européen comme Inf’OGMen avait fait l ’hypothèse en décembre 201 4 (9).

PAULINE VERRIÈRE

1 , Les notes sont en l igne sur http: //www.infogm.org/article5799

1 9 OGM AUTORISÉS :LA COMMISSION DONNE DES GAGES À L’INDUSTRIE

Le 24 avri l 201 5, la Commission européenne a autorisé l ’ importation de 1 9 plantes génétiquement modifiées (PGM), deux jours aprèsque la Commission ait proposé aux États membres un outi l supplémentaire pour interdire nationalement l ’ importation d’OGM (cf. ar-ticle en pages 3-4). Une décision qui constitue un signal pol itique pour les entreprises de biotechnologie, les États-Unis et les Étatsmembres de l’Union européenne. Ces 1 9 autorisations portent à 70 le nombre d’OGM autorisés à l’ importation dans l’Union euro-péenne, dont une majorité pour l ’al imentation humaine et animale. 44 OGM restent en attente d’une décision finale.Par suite d'absence de majorité qualifiée lors des votes des États membres, la Commission européenne avait hérité de la décision fi-nale d'autoriser ou non 1 9 PGM : dix nouvelles autorisations d’importation à destination de l’al imentation humaine et animale, deuxnouvelles autorisations pour l ’ importation seule (des œil lets) et sept renouvellements d’autorisation pour l ’al imentation humaine et ani-male. Par cette décision, la Commission européenne met donc un terme à 1 7 mois sans décision d’autorisation, la dernière décisionremontant à novembre 201 3. Dans le paquet des autorisations données se trouve celle de renouvellement d’autorisation du maïsNk603, objet depuis 201 2 d’une controverse scientifique quant aux impacts sanitaires sur le long terme liés à sa consommation suite àl ’article de G.-E. Séral ini . Une controverse qui avait amené la Commission européenne à mettre en place une étude sur les effets àlong terme d’OGM. En décidant d’autoriser ce maïs, la Commission européenne fait donc le pari que cette étude conclura à l’absenced’impacts…

Un louvoiement difficile à suivrePropositions d'interdiction le 22 avri l , autorisations le 24 : comment comprendre le calendrier de la Commission européenne ?D’une part, le groupe de lobby des entreprises de biotechnologies EuropaBio et d’autres avaient, en octobre 201 4, déposé une plainteauprès de la médiatrice européenne, pour dénoncer les délais de traitement de plusieurs demandes d’autorisation d’OGM. Sans enjeujudiciaire, cette plainte constituait néanmoins un signal clair que les entreprises ne souhaitaient plus que l’Union européennemaintienne ce qu’el les considéraient être un moratoire de facto, à savoir plusieurs mois sans décision du fait de travaux législatifs encours.D’autre part, la Commission européenne est engagée dans une négociation sur un partenariat transatlantique pour le commerce etl ’ investissement avec les États-Unis (TAFTA). Par cette décision, la Commission européenne fait donc le choix d’envoyer un signal augouvernement étasunien et aux entreprises : l ’Union européenne ne fermera plus son marché aux importations d’OGM.Un signal que constate d’ai l leurs l ’eurodéputé José Bové qui considère que « le Président de la Commission européenne Jean-ClaudeJuncker se couche devant le lobby des entreprises transgéniques [. . . ] Il fait une concession majeure pour faciliter la signature de l’ac-cord de libre-échange avec les USA ».

Comment la CE veut-elle revoir les procédures d’autorisation ? En reprenant la main !La Commission européenne ayant fait adopté par les États membres en janvier 201 5 une nouvelle procédure d’interdiction nationalede mise en culture d’OGM, tout le monde s’attendait à ce que sa première décision d’autorisation concerne le maïs TC1 507 plutôt queles OGM destinés à l’ importation. Dans un premier temps, la Commission contente donc les entreprises de biotechnologie, avec lesimportations, sans mécontenter les États membres ni surtout leur population, en n’autorisant pas une nouvelle PGM à la culture.

Suite à sa prise de fonction comme Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker annonçait en 201 4 que la Com-mission allait revoir les procédures d’autorisation des OGM et le 22 avri l , el le présentait un nouvel outi l pour interdire nationalementles importations d’OGM. Mais en guise de révision des procédures, la Commission européenne pourrait bien avoir décidé de changerde politique. Si la Commission Barroso attendait la fin des discussions sur des textes législatifs (comme sa proposition d’interdictionsur la culture) pour décider ensuite des autorisations, la Commission Juncker, el le, affiche clairement qu’el le n’attendra pas. C’estdonc une reprise voire une accélération du calendrier de traitement des demandes qui est mise en œuvre. On en vient presque à dou-ter de la sincérité de la proposition du 22 avri l…

ERIC MEUNIER

ACTUALITÉ ▪ 5

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

LES IMPACTS SANITAIRES OU ENVIRONNEMENTAUX DES PLANTES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉES (PGM) SONT UN DES SUJETS

RÉCURRENTS DU DÉBAT QUI DURE DEPUIS PRESQUE 20 ANS. MALGRÉ UN FOURMILLEMENT DE PUBLICATIONS SCIENTIFIQUES, DÉ-BATS OU AVIS PUBLIÉS PAR DES AGENCES NATIONALES D'EXPERTISES, LA CONTROVERSE SCIENTIFIQUE RESTE DE MISE, ET FACE À

ELLE, LE MONDE POLITIQUE SE DOIT DE SORTIR CE DÉBAT DU SEUL CÉNACLE SCIENTIFIQUE.

L'année 201 4 commençait avec un avis du Haut Conseil desBiotechnologies (HCB) qui relativisait la portée d'un article tropsouvent présenté « comme une preuve définitive de l’innocuitédes Plantes Génétiquement Modifiées (PGM) », celui d'AgnèsRicroch (1 ). El le se terminait avec la publication d'une autreméta-analyse, cel le de Qaim et al. (2), censée apporter la preuvedéfinitive des bénéfices, notamment économiques, l iés à laculture de plantes génétiquement modifiées (PGM).

Méta-analyse scientifique : d'importants biais

En novembre 201 4, les chercheurs Qaim et Klümper publiaientun article intitulé « Une méta-analyse des impacts des culturesgénétiquement modifiées ». Méta-analyse ou travail bibl iogra-phique ? Le HCB a déjà, lors de son travail sur l 'article d'A. Ri-croch, rappelé ce que sont scientifiquement parlant, desméta-analyses : « elles visent à répondre à une question très ci-blée en santé humaine et dans le domaine des tests diagnostics.Ces revues sont rédigées par des équipes pluridisciplinairesinternationales selon une méthodologie statistique rigoureuse »(3). Et de renvoyer aux lignes directrices de l 'Agence euro-péenne de sécurité des aliments (AESA) (4). Selon l 'AESA, uneméta-analyse nécessite des questions précises, une méthode desélection des articles détai l lée et une synthèse détai l lée desrésultats à la base de l'analyse. Dans le cas de l'article de Qaimet Klümper, ces critères semblent remplis bien que la notion de« questions précises » soit assez floue. Les auteurs se sont at-tachés à étudier des articles portant sur plusieurs OGM (soja,maïs, coton), disposant de plusieurs caractéristiques, pour ré-pondre à plusieurs questions concernant « les im-pacts de l'adoption des OGM sur le rendement, laquantité de pesticides, le coût des pesticides, lecoût total de la production et les profits pour lesagriculteurs ». Des questions pour le moins largeset générales. . .

Les chercheurs ont donc d'abord sélectionné 1 47articles publiés dans la l ittérature scientifique (surplusieurs dizaines de mil l iers) en retenant commecritères que les articles soient construits à partir dedonnées issues de sondages auprès d'agriculteursou d'essais en champs n'importe où dans le monde,et qu'i ls s'intéressent aux impacts du soja, maïs oucoton GM, à l 'uti l isation de pesticides et aux béné-fices des agriculteurs. On peut d'ai l leurs noter icique 1 0% des articles uti l isés (1 5 articles) ontcomme co-auteur Qaim, un des auteurs de la méta-analyse. Les deux chercheurs de l 'universitéGeorg-August à Goettingen en Allemagne,concluaient que leur « méta-analyse met en évi-dence des preuves robustes des bénéfices liés auxcultures GM pour les agriculteurs des pays déve-loppés et en voie de développement ». Selon eux,les cultures GM auraient permis de réduire de 37%les quantités de pesticides uti l isées, d'accroître de

FACTOR GMO : l'étude finale ?

Alors que plusieurs projets commandés par la Commission européennedoivent théoriquement apporter des réponses quant aux impacts à long termedes OGM (1 ), l ’association nationale pour la sécurité génétique (NAGS), enRussie, a initié en novembre 201 4 une étude, Factor GMO (2), des impactssanitaires d' « un maïs génétiquement modifié tolérant un herbicide et des ni-veaux réalistes d’herbicide à base de glyphosate ». Cette PGM, dont l 'identitén'est pas précisée, sera donc l 'objet d'analyse de toxicologie, sans indication àce stade ni de la durée, ni de la race de rats qui sera uti l isée. Seule ambition :suivre « un protocole dont l’échelle, la rigueur et l’étendue des mesures répon-dront aux et dépasseront les normes internationales ». Cette étude sera dotéed'un budget d'environ 25 mil l ions de dollars. Les responsables précisent sur lesite internet qu' « aucun financement [n'est] issu de l’industrie qui produit descultures génétiquement modifiées et leurs pesticides associés ». En février201 5, « le président fondateur de la banque internationale privée suisse d’af-faires et de services de conseil financier, Najadi & Partners AG, M. Pascal Na-jadi, est [devenu] le premier membre du conseil public et donneur » de GMOFactor. Ce cabinet est spécial isé dans le conseil en fusions et acquisitions ourestructuration d'entreprises. Mahmoud Kabil , acteur égyptien et ambassadeurde l 'Unicef, a aussi rejoint le Conseil publ ic de cette étude.1 , http: //www.infogm.org/spip.php?article5764

2, http: //factorgmo.com

22% les rendements et d'augmenter de 68% les profits engran-gés par les agriculteurs. « Rigoureuse » pour l 'ISAAA (5), dé-montrant « une fois de plus » les effets positifs des OGM pourEuropaBio (6), cette étude présente des conclusions qui méritentnéanmoins d'être relativisées, aux dires de Jack Heinemann,scientifique de l 'Université de Canterbury en Nouvelle-Zélande,dans un article publié en novembre 201 4 (7).

Première remarque : les études sélectionnées ne reflètent pas laréalité des PGM et donc l 'extrapolation réalisée par les auteursest abusive. Heineman a étudié un tiers des articles sélectionnés(les 55 premiers, pour être précis) par les scientifiques alle-mands, ce qu'i l considère comme un échanti l lonnage plus quesignificatif. Conclusion : la quasi-total ité des articles étudiésportent sur trois pays uniquement, l 'Afrique du Sud, les États-Unis et l 'Inde. Alors que les auteurs annoncent avoir retenu desarticles s'intéressant à des situations de terrain « n'importe oùdans le monde », général iser trois pays aux 28 qui cultivent desPGM (selon l 'Isaaa) en 201 4 paraît donc abusif, d'autant que lespays qui cultivent largement des PGM comme le Brésil , l 'Argen-tine ou le Canada n'en font pas partie. Autre biais : 60% desétudes portent sur une seule saison de culture, et 1 00% sur troiscultures (coton, maïs et soja) laissant donc de côté les culturesde canola, betterave, luzerne et papaye GM. Un biais commentépar les auteurs eux-mêmes dans leur article, dû au fait que « lenombre d'études d'impacts disponibles pour ces autres culturesest très petit ». Dernier biais : 80% des études s'intéressaientaux PGM Bt (qui produisent un ou plusieurs insecticides) alorsque la majorité des PGM cultivées commercialement sont tolé-

ACTUALITÉ ▪ 6

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

sont de la même race, le nombre de rats est le même, le régimealimentaire auquel Séral ini a soumis « ses » rats est meil leur etenfin, les critiques sur le travail statistique de Séralini sontvalables pour de nombreuses (si ce n'est toutes) études desentreprises.

C'est pourquoi, dans une lettre du 1 9 décembre 201 4 (1 4), lechercheur G.-E. Séral ini dénonce le manque de transparence : sil 'Anses a demandé à G.-E. Séral ini toutes les données brutes deson travail , el le n'a jamais rendu publiques celles fournies par lesentreprises. G.-E. Séral ini demande finalement « la révélationpublique immédiate, en 2014, de toutes les données que pos-sède l’Anses lui ayant permis de ne pas croire à un risque desanté publique pour ce maïs [NK603] transgénique ou pour leroundup ».Le chercheur français a-t-i l raison de dénoncer « deux poidsdeux mesures » ? Les faits semblent lui donner raison. La revuequi dépublia Séral ini n'a pas jugé bon d'en faire autant avec l 'ar-ticle de Zhu. Or, selon le GIET, les conclusions de cette étude - àsavoir l 'innocuité sanitaire du maïs GM tolérant les herbicides àbase de glyphosate - n’étaient pas justifiées par les analysesconduites, notamment du fait de l ’absence d’information sur lapuissance statistique de l’étude menée (1 5). Comment avancersereinement dans un tel débat scientifique ?

300 scientifiques dénoncentun consensus inexistant

Aux États-Unis, au moment de l 'autorisation de la pomme cis-génique « Arctic » (1 6), les médias en ont profité pour affirmerqu'i l existait maintenant un consensus scientifique sur les risquesl iés aux OGM. De quel consensus parle-t-on ? Existe-t-i l vrai-ment ? Trois cents « scientifiques, médecins, académiciens etexperts des disciplines relevant des aspects liés à l’évaluationscientifique, légale, sociale et sanitaire des organismes généti-quement modifiés » ont alors publié une tribune dans le journal

rantes à un ou plusieurs herbicides… Sur ce point, Matin Qaim aprécisé à Inf'OGM que « pour ce qui est des données sur laquantité de pesticides, nous avions 108 observations pour descultures résistantes aux insectes et 13 pour des cultures tolé-rantes aux herbicides. Pour celles sur le coût lié aux pesticides,nous avions 145 observations pour des cultures résistantes auxinsectes et 48 pour des cultures tolérantes aux herbicides ». Cequi confirme donc le biais dénoncé.

Deuxième remarque : les chercheurs, précise Jack Heinemann,n'ont jamais essayé de faire la part entre les bénéfices l iés auxvariétés mises en culture et leur caractère GM, précisant que « lecaractère GM peut être corrélé avec un meilleur rendement maiscette corrélation n'est pas la démonstration que ce caractère GMest la cause d'un bénéfice ». Enfin, Jack Heinemann soulignequ'une étude de quatre ans sur du coton GM (tolérant des herbi-cides et/ou résistant à des insectes) dans l 'état de Georgie auxÉtats-Unis n'a pas été retenue par les chercheurs al lemands. Orcette étude concluait que les cultures GM n'étaient pas « supé-rieures » aux cultures conventionnelles (8)… Dommage queQaim et Klümper n'expliquent pas pourquoi cette étude n'a pasété retenue, car ses conclusions sont importantes : « les béné-fices sont plus liés aux rendements [des variétés étudiées] qu'àla technologie de transgenèse ». En d'autres termes, c'est le tra-vail de sélection des cultivars qui a induit des bénéfices pour lesagriculteurs, pas leur caractère transgénique de tolérance à desherbicides ou résistance à des insectes.

Qaim est un habitué des extrapolations et des controverses mé-diatiques. En 2003, i l n'hésitait pas à affirmer que le rendementdu coton Bt en Inde était de 80% supérieur à celui du cotonconventionnel. Cet article (9) avait largement été critiqué, mêmepar des partisans des biotechnologies végétales, car i l se basaitsur peu de données, provenant de plus uniquement des résultatsd'essais réalisés par Monsanto et Mahyco, sa fi l iale indienne.

I l faut noter ici que le Comité scientifique du HCB n'a, pour lemoment, pas encore été saisi pour se pencher sur la méta-ana-lyse de Qaim afin d'établ ir son sérieux, contrairement à ce quiavait été fait pour l 'article de G.-E. Séral ini en 201 2 (1 0) ou, suiteà une saisine de la sénatrice Marie-Christine Blandin, pour l 'ar-ticle d'Agnès Ricroch (11 ). . .

Séralini et Zhu : deux poids, deux mesures ?

Le cas de l'article de G.-E. Séral ini et de son équipe a refait laUne en décembre 201 4. Publié en septembre 201 2, dépublié ennovembre 201 3, republié en juin 201 4 dans la revue Environ-mental Sciences Europe (1 2), cet article est de ceux qui dé-frayent la chronique. Suite à cette re-publication, la direction desfraudes (DGCCRF) a demandé à l'Anses de « préciser si cesnouveaux éléments sont de nature à remettre en cause l'avis ini-tial de l'Agence du 19 octobre 2012 ». Et l 'Anses de répondrenégativement, confirmant donc son avis antérieur qui estimaitque le travail présenté ne permettait pas de conclure à une toxi-cité du maïs génétiquement modifié NK603, traité ou non avecl’herbicide Roundup (1 3). L'Anses a notamment réagi aux nou-veaux traitements statistiques des données « sur les incidencesde tumeurs » en considérant que cette nouvelle information« n'apporte donc pas d'élément probant par rapport auxquestions » soulevées dans son avis de 201 2.

Ce nouvel avis n'éteint donc pas la controverse née fin 201 2 etdont Inf'OGM s'était fait l 'écho, à savoir que les critiques portéesà l 'étude de Séralini sont valables pour toutes les analyses four-nies par les entreprises pour obtenir une autorisationcommerciale. Car les rats uti l isés par Séral ini et les entreprises

L'élu peut-il se cacher indéfiniment derrière la littérature scientifique ?

EvanBench

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ACTUALITÉ ▪ 7

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

Environmental Sciences Europe (1 7) pour affirmer et démontrerque ce fameux consensus n'est qu' « une construction artificiellefaussement perpétuée ». Les auteurs et signataires rappellentdonc qu'i l n'existe aucun consensus, que ce soit pour affirmerl 'absence de risque ou l 'inverse. L'absence de consensus au ni-veau sanitaire vient notamment de l 'absence d'étude épidémiolo-gique – étude impossible à faire scientifiquement en l 'absenced'étiquetage en Amérique du Nord rappellent les auteurs -, du faitque plusieurs groupes d'experts (la société royale canadienne oul 'association britannique médicale) ont émis des réserves, et dufait que « plusieurs centaines d'articles » se voient attribuer à tortla conclusion d'absence d'impact des OGM sur la santé. Enfin,ces risques potentiels des OGM sont, selon les signataires, à labase même des accords internationaux qui régissent l 'évaluationdes risques pré-commercial isation tels que le Protocole de Car-thagène ou les l ignes directrices d'évaluation des risques l iés auxOGM du Codex Alimentarius.

Revenant sur l 'exemple de la pomme Arctic, Michael Hansen, del 'Union étasunienne des consommateurs (Consumers union), ex-pl ique que « aucune étude publique indépendante n'a étéconduite sur la sécurité sanitaire de la pomme Arctic et pourtant,certains médias affirment qu'il est prouvé qu'elle est sans risque.Nous demandons aux médias de faire état de la science sur lesOGM, notamment en ce qui concerne les inquiétudes émises pardes scientifiques sur les aspects sanitaires et environnemen-taux ». Pour les auteurs et trois cents signataires, « les résultatsde recherches scientifiques sur la question sanitaire des OGMsont nuancés, complexes, souvent contradictoires ou nonconcluants […] et, en général, soulèvent plus de questions qu'ilsn'apportent de réponse ». A l'instar des entreprises, ces scienti-fiques souhaitent donc que les décisions relatives aux OGMsoient basées « sur des résultats scientifiques solides, obtenusde manière honnête, éthique, rigoureuse, indépendante, trans-parente. . . ».

A elle seule, la « bonne science » ne suffit pas

Si tout le monde souhaite finalement avoir des données scienti-fiques issues d'une « bonne science », ces controversesmontrent que cette « bonne science » a plusieurs visages et quele consensus n'est pas de mise… si toutefois i l est possible. S'i lest vrai que l 'Organisation Mondiale du Commerce (OMC)impose que les décisions politiques soient prises sur la base dedonnées scientifiques – au risque sinon d'être considéréescomme des entraves au commerce – le fonctionnement de nossociétés a bel et bien mis la balle dans le camp du politique : lesgroupes d'experts (pas que scientifiques d'ai l leurs !) conseil lent,le politique décide. Et ce monde politique, comme la sociétédans son ensemble, se doit de ne pas considérer les seules don-nées scientifiques. La science est un outi l de décision pour lespolitiques, mais i l ne faut pas oublier que le dossier OGM estégalement, sinon surtout, une question de choix sociétal. Gar-dons en mémoire que la recherche ne peut apporter que descertitudes « momentanées », toujours sujettes à remise encause. El le vit des questions que les chercheurs se posent. Etd'autre part, cette même recherche est ancrée dans un contextesocio-politique : el le est dépendante des financements… et c'estl 'industrie qui a le plus d'argent à mettre dans cette batai l le. Surce dernier point, les signataires de la tribune sur l 'absence deconsensus rappellent d'ai l leurs qu'en 2007, un article (1 8)montrait que les désaccords « parmi les scientifiques sur lesrisques environnementaux des OGM [peuvent] être mis en corré-lation avec leurs sources de financement ». Et de résumer que« les scientifiques recevant des financements de l'industrie [. . . ]étaient très susceptibles d'avoir une attitude positive envers lescultures génétiquement modifiées [. . . ] tandis que les scientifiques

financés par l'État et travaillant indépendamment des sociétésdéveloppant des cultures GM [. . . ] étaient plus susceptiblesd'avoir une attitude "plutôt négative" ». Une problématique de« noyautage » de la recherche par l 'industrie qu'Inf'OGM a déjàabordée (1 9).

Pour revenir à la seule question des données scientifiques pu-bl iées, tout le monde semble se retrouver sur le terrain de lanécessaire qualité scientifique du travail effectué et des articlespubliés. Mais le débat OGM nous a permis d'être témoin quecette qualité n'est pas jugée de la même manière selon les résul-tats. Ces « biais » du monde de la science (controverse, dépen-dance au financement, lecture partiel le ou partiale des articles…)représentent une limite importante quant à son rôle dans un dé-bat de société. I l est dès lors nécessaire de rappeler que le rôledu monde politique est de baser ses décisions sur des choixréels de société, à partir de considérations sociales, éthiques,économiques et scientifiques. Mais pas sur une seule de cescomposantes. Pour se faire, le monde politique dispose de plu-sieurs outi ls tels que les conférences de citoyens. Outi l de choixdémocratique, ces conférences permettent de sortir les décisionsd'un débat tel que celui sur les OGM du seul cadre des expertset des politiques. Mais ces citoyens, réunis sur un thème particu-l ier, feront face aux mêmes limites inhérentes à la science. L'am-bition d'un débat serein ne doit donc pas se trouver uniquementau niveau des données scientifiques. Une chose dont Inf'OGMest sûre : i l faut, avant tout débat, un accord des citoyens à lafois sur la question posée, et sur les modalités du débat, en bref,un « débat sur le débat ». L'Anses s'est d'ai l leurs dite intéresséepar cette approche.

ERIC MEUNIER

1 , http: //www.infogm.org/article5651

2, « A Meta-Analysis of the Impacts of Genetical ly Modified Crops »,

Qaim M. et al. , PLoS ONE, 201 4, 9(11 ): e111 629. doi:1 0.1 371 /jour-

nal.pone.0111 629

3, http://www.infogm.org/IMG/pdf/hcb_cs_snell_blandin_201 40311 .pdf

4, « Application of systematic review methodology to food and feed

safety assessments to support decision making », EFSA Journal

201 0; 8(6):1 637

5, http: //www.isaaa.org/resources/publications/briefs/49/

factsandfindings/default.asp

6, Green Biotech rEvolutions Newsletter, EuropaBio, janvier 201 5

7, « Correlation is not causation », Heinemann J, http: //rightbio-

tech.tumblr.com/post/1 036658421 50/correlation-is-not-causation

8, « Economic comparison of transgenic and nontransgenic cotton

production systems in Georgia ». Jost, P. et al. , 2008, Agron J 1 00,

42–51 .

9, http: //www.infogm.org/article1 021

1 0, http: //www.infogm.org/article5256

11 , cf. note 1

1 2, « Republished study: long-term toxicity of a Roundup herbicide

and a Roundup-tolerant genetical ly modified maize », Séral ini GE et

al. , Environmental Sciences Europe, Juin 201 4, 26:1 4,

1 3, Avis de l 'Anses du 2 décembre 201 4, www.anses.fr/sites/de-

fault/fi les/documents/BIOT201 4sa01 55.pdf

1 4, http: //cri igen.org/manifestation/67/display/

Droit-de-reponse-du-Pr-Seral ini-a-l-avis-de-l-ANSES

1 5, http: //www.infogm.org/article5592

1 6, http: //www.infogm.org/article5449

1 7, « No scientific consensus on GMO safety », Hilbeck A. et al. , En-

vironmental Sciences Europe (201 5) 27:4

1 8, Kvakkestad, V. , et al. (2007). Scientistsʼ perspectives on the deli-

berate release of GM crops. Environmental Values 1 6(1 ): 79–1 04.

1 9, http: //www.infogm.org/article5773

EvanBench

SEMENCES ▪ 8

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

Les pays d'Amérique latine n'échappent pas à l 'obl igation faitepar l 'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) (1 ), dans sonarticle 27-3b des accords sur la propriété industriel le (ADPIC), deprotéger les variétés végétales commercial isées : « les Membresprévoiront la protection des variétés végétales par des brevets,par un système sui generis efficace, ou par une combinaison deces deux moyens ».I ls peuvent donc le faire soit par des brevets, soit par un systèmequi leur est propre (sui generis), ce qui se traduit, pour la plupartd'entre eux, par leur adhésion au système UPOV (2) (Union pourla protection des obtentions végétales, dans ses versions de1 978 ou 1 991 , voir tableau page 9 et encadré ci-dessous). I lspeuvent donc aussi en théorie combiner ces deux moyens. Eneffet, l 'interdiction de breveter une variété végétale n'empêchenullement le brevet sur un gène (ou plutôt sur une « unité fonc-tionnelle d'hérédité ») ou sur un procédé d'obtention microbiolo-gique, à l 'instar de ce que permettent les lois de l 'Unioneuropéenne. Du coup, la plante qui contient le « gène » brevetéest propriété légale du détenteur du brevet. Certains pays ce-pendant l 'interdisent (voir infra).

On notera dans le tableau (en page 9) que sept pays (35%)n'adhèrent pas du tout à l 'UPOV (les plus petits, avec leur statutde « pays moins avancés », n'ont pas les mêmes obligations àcourt terme), parmi lesquels deux grands pays : le Vénézuela etCuba (3). Dix pays (50%) sont à l 'UPOV dans sa version de 1 978et trois (1 5%) à l 'UPOV de 1 991 . Mais l 'UPOV ne fait pas tout : lacoexistence de l'agriculture industriel le avec les semences pay-sannes dépend certes des lois nationales de propriété indus-triel le, mais aussi d'autres lois (commercial isation / catalogue,sanitaire, biosécurité. . . ), notamment celles qui reconnaissent etprotègent ou criminal isent les systèmes semenciers« informels », semences paysannes ou créoles.

Rappelons la différence majeure entre les deux versions del 'UPOV : celle de 1 991 introduit la notion de « variété essentiel le-ment dérivée » (VED), laquelle, si el le est trop proche de la va-riété de départ, doit alors faire l 'objet d'un paiement à l 'obtenteur.Par ail leurs, dans la version 78, l 'agriculteur, selon leslois nationales en vigueur (4), pouvait parfois garderune partie de sa récolte pour multipl ier la semencepour son usage propre, ce qui devient plus diffici leavec la version 91 , mais continue toutefois à dé-pendre des lois de chaque pays (5). Dans l 'Union eu-ropéenne, qui a adopté l 'UPOV 91 , un règlement de1 994 autorise les semences de ferme de variétésprotégées par un Certificat d'obtention végétale(COV), pour 21 espèces (un décret français du 3 août201 4 a fait passer le nombre d’espèces reproduc-tibles à la ferme en France de 21 à 34), en contrepar-tie de royalties versées aux obtenteurs. Avec l'UPOV91 , les durées de protection sont passées, pour laplupart des variétés, de 1 5 à 20 ans, et les protec-tions s'appliquent aussi aux produits issus des varié-

L'AMÉRIQUE LATINE PRODUIT PRÈS DE 40% DES CULTURES TRANSGÉNIQUES MONDIALES (NOTAMMENT « GRÂCE » AU BRÉSIL ET À

L'ARGENTINE), TOUT EN INTERDISANT, POUR CERTAINS PAYS, COMME L'ARGENTINE, LA BREVETABILITÉ DES PLANTES ENTIÈRES.DEPUIS QUELQUES ANNÉES, LE CONTEXTE LÉGISLATIF AUTOUR DES SEMENCES EST EN PLEINE ÉVOLUTION. APRÈS ENQUÊTE,INF'OGM N'A PU QUE CONSTATER QUE, LÀ AUSSI, LA PRIVATISATION EST EN MARCHE, MÊME SI CERTAINS PAYS (ÉQUATEUR,VENEZUELA. . . ) COMMENCENT À ORGANISER LA RÉSISTANCE. . .

tés protégées (par exemple, de la farine) (6). En bref, la conven-tion UPOV de 1 991 , plus stricte que celle de 78 sur l 'uti l isationd'une variété, tend à se rapprocher du système des brevets (7).Et el le définit, avec la notion de VED, le partage des droits de l i-cence entre le détenteur du COV sur une variété et celui du bre-vet sur un des « traits » de chaque plante de cette variété. . . Lespays qui ont adhéré à l 'UPOV avant 1 991 sur la base de laconvention UPOV 78 ne sont pas obligés d'adopter la conventionde 91 . Par contre, depuis 1 991 , tout nouvel adhérent est obligéd'adopter la nouvelle convention. Le cercle des pays souhaitantrespecter les droits des agriculteurs ne peut donc plus s'élargir àl 'intérieur de l 'UPOV et i l ne s'est doté, actuel lement, d'aucunautre l ieu de coordination.

Résistances civiles contournéespar les traités bilatéraux

La résistance à entrer dans le système UPOV de 1 991 est sou-vent le fait de la société civi le dont l 'appui aux organisations depetits agriculteurs est déterminant, car el le voit d'un mauvais œilla confiscation accrue des semences par quelques semenciers(voir la résistance au Chil i (8), ou en Colombie où c'est la Courconstitutionnelle qui a déclaré en 201 2 l 'adhésion à l 'UPOV 91comme inconstitutionnelle, à cause du manque de consultationdes communautés indigènes et afrocolombiennes (9)).Les quatre pays de la Communauté andine (CAN) (Bolivie, Co-lombie, Équateur et Pérou) ont quant à eux adopté en 1 993 unesorte de version intermédiaire entre UPOV 78 et UPOV 91 (déci-sion 345/93 de la CAN (1 0)), notamment en continuant àpermettre à l 'agriculteur la multipl ication gratuite de la semencepour son usage propre (chapitre V, article 2611 ), mais en ral lon-geant en même temps la durée de protection et en introduisant lanotion de variété essentiel lement dérivée. Rappelons cependantque d'autres lois nationales, comme en Colombie, peuvent res-treindre les droits des agriculteurs.

Cependant, les Traités bilatéraux de libre commerce (TLC) quele Pérou et la Colombie ont ensemble signé avec les États-Unis

SUI GENERIS NE VEUT PAS FORCÉMENT DIRE UPOV

I l n'y a aucune obligation d'uti l iser le système UPOV : certains pays, commel'Inde, ont mis en place leur propre système de protection des obtentionsvégétales, où le paysan peut continuer à « vendre les semences comme ill'a toujours fait, dans la mesure où il ne mentionne pas la marque d'originedéposée » (1 ). Ashish Kothari de Kalpavriksh, un membre du comité prépa-ratoire de l 'avant-projet de Loi sur la Biodiversité en Inde, détai l le lesentraves de l'UPOV : « l'option apportée par l'UPOVn'est pas souhaitablepour l'Inde… [parce qu'elle ignore] les intérêts et les droits de millionsd'agriculteurs qui ont sélectionné et amélioré des semences pendant desmilliers d'années ».1 , Gouvernance de l'agriculture et mouvements paysans en Inde,

Lutringer Christine, Karthala, 201 2, p.1 65

SEMENCES ▪ 9

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

d'une part, et l 'Union européenne d'autre part, obl igent ces paysà adhérer à l 'UPOV 91 (ou à adopter un système de protectiondes variétés par brevets), rendant du coup cette décision 345/93caduque (le Pérou a adhéré à UPOV 91 , les trois autres pays ré-sistent encore).

S'i l était plus facile, i l y a quelques années, pour une transnatio-nale semencière d'imposer des règles mondiales via l 'OMC, onsait que ces négociations sont provisoirement bloquées (1 2). Cesont donc les Traités bilatéraux qui les remplacent. Dans cestraités, les droits de propriété intel lectuel le vont souvent plus loinque les ADPIC (1 3), en permettant par exemple une prolongationde la protection par un brevet si un nouvel usage est découvert(pour un médicament par exemple). . . Et i l est toujours plus facilede négocier un accord entre deux parties qu'entre 1 60 pays.

Partout, de nouvelles lois sur les semencesen discussion

Si les premières lois sur la protection des semences ont étéimpulsées par l 'Institut Inter américain de coopération pour l 'Agri-culture (I ICA) et la Fondation Rockefel ler au moment de la révo-lution verte (années 70), on assiste à une vague de révisions deces lois, al lant toutes dans le sens d'une privatisation accrue dessemences par les droits de propriété industriel le des entreprisessemencières. En voici quelques exemples (1 4).

Avec la signature d'un accord de libre commerce avec les États-Unis, le Mexique a promulgué une loi sur les semences en 1 996,proche de UPOV 78. Le gouvernement a tenté en 201 2 d'al lervers UPOV 91 et de reconnaître la propriété intel lectuel le desplantes transgéniques, mais la mobil isation de la société civi lel 'en a, pour le moment, empêché. Comme elle a empêché leGuatemala, en septembre 201 4, d'approuver la nouvelle loi deprotection des obtentions végétales, grâce au vote majoritaire dela Cour constitutionnelle du Guatemala. I l faut dire qu'aux plusforts moments de mobil isation, des mil l iers de personnes étaientdans la rue et devant l 'Assemblée nationale durant deux se-maines.

Vers une protection du petit agriculteur ?

La Colombie adhère à UPOV 78. La loi principale sur les se-mences est la Résolution 970/201 0 (1 5), qui encadre la produc-tion, importation, exportation, commercial isation, certificationvariétale et sanitaire et uti l isation des semences. Ces conditionss'imposent aussi aux semences de ferme ou créoles au point derendre leur uti l isation souvent impossible. A tel point qu'i l n'existeplus de variétés autochtones de riz ou de coton (la Colombie estpourtant centre d'origine d'une variété de coton) (1 6). Après quele gouvernement, en s'appuyant sur les aspects sanitaires decette loi, ait confisqué des semences de ferme et paysannes en201 2-201 3 (1 7), la population s'est révoltée et le gouvernement a

suspendu pour deux ans l 'application de cette loi,promettant d' « établir de nouvelles règles sur unusage des semences "qui n’affecteraient pas lespetits agriculteurs" ».

Au Brésil , la situation de la protection des se-mences est complexe. En effet, la coexistence dedeux secteurs opposés - les immenses exploita-tions agricoles d'un côté, et les petits paysans del'autre - a obligé le gouvernement à légiférer en te-nant compte de cette situation. La loi nº9.456 du28 avri l 1 997 sur les cultures végétales, dans sonarticle 37-2 (1 8), stipule que la semence autoch-tone est reconnue pour les organisations de l 'agri-culture famil iale, et que les paysans peuvent lareproduire l ibrement. . . s'i ls prouvent qu'el le estexempte de contamination génétique ! Pas évidentdonc, les laboratoires n'étant ni nombreux ni gra-tuits ! Mais par ail leurs, la loi de semencesn°1 0.711 de 2003 reconnaît l 'existence des« cultivars locaux, variétés traditionnelles etcréoles » et autorise les membres de communau-tés paysannes à « multiplier ces semences etplants, à les donner, échanger et commercialiserentre eux » ; ces semences devraient être inscritessur un registre spécifique au catalogue officiel bré-si l ien (1 9), mais les modalités ne sont pas encoredéfinies.Et depuis 201 3, un programme national d’achatspublics offre un débouché important aux paysansqui développent leurs propres semences. Grâce àce programme, le gouvernement achète des se-mences paysannes directement aux paysans etpaysannes et les met à disposition d’autres paysansgratuitement, contournant ainsi le marché, ce dontse plaint le gouvernement des États-Unis (20).Par ail leurs, à l 'instar de l 'Argentine, les semences,transgéniques ou non, ne peuvent être brevetéesau Brésil , même par l 'intermédiaire d'un gène bre-veté inséré, la loi excluant de la brevetabil ité toutou partie de plantes ou d’animaux (cf. article 1 8 de

TABLEAU 1 : SITUATION DES PAYS D'AMÉRIQUE LATINE + CUBA

1 , http: //www.upov. int/export/sites/upov/members/fr/pdf/pub423.pdf

2, Isaaa, 201 4 sauf mention contraire

3, http: //www.chilebio.cl/pt_situacion_chile.php

4, http: //viacampesina.org/fr/images/stories/pdf/lvc-grain-semencieres-qui-

criminal isent-les-paysannes-et-les-paysans-resistances-et-luttes.pdf

5, http: //fundacion-antama.org/la-superficie-mundial-de-cultivos-biotecnologicos-

supera-las-1 70-mil lones-de-hectareas-en-201 2/

6, http: //www6.rel-uita.org/radiorel/texto/25.htm

7, http: //www.ral lt.org/PAISES/LATINOAMERICA/HONDURAS/ESTADO%20ACTUAL

%20TRANSGENICOS%20HONDURAS.pdf

SEMENCES ▪ 1 0

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

la loi 9279/96 sur les brevets). Malheureusement, une entreprisecomme Monsanto peut (et ne s'en prive pas) détourner cetteinterdiction, en brevetant aux États-Unis et en faisant valoir la« priorité unioniste » devant les instituts nationaux en charge dela propriété industriel le (INPI) brésil ien et argentin qui assure lavalidité du brevet dans le monde entier (21 ). Un autre moyen uti-l isé « est d’identifier le gène par sa protéine, donc comme sub-stance chimique brevetable » (22).

Dans sa loi sur les semences 385/94, le Paraguay permet àl 'agriculteur (article 35) de « semer et conserver le produit de sarécolte pour son usage propre, ou pour la vente de matière pre-mière ou d'aliment ». Si les agriculteurs profitent de cette situa-tion, de grands groupes également, qui, à l 'instar du GroupeFavero, produisent du soja transgénique. . . de Monsanto, maisparaît-i l pour des petites parcelles ! (23)

Des contrats pour lier les paysans

En Argentine, la loi sur les semences 20.247/73 date de 1 973 eta été révisée une première fois en 1 991 pour y incorporer deséléments sur la propriété intel lectuel le se rapprochant de l 'UPOV1 978, à laquelle l 'Argentine adhère par la suite (en 1 994 avec laloi 24.376). Suite à l 'adoption de cette législation, le nombre devariétés protégées passe de 26/an (de 1 982 à 1 991 ) à 70/an (de1 992 à 2001 ) (24). El le pourcentage de variétés certifiées aug-mente lui aussi, passant de 1 8% à 82% pour le blé et de 35% à94% pour le soja, suite à l ’ introduction des règles UPOV (25).Les agriculteurs peuvent cependant continuer à semer leurspropres semences, les échanger ou les offrir, mais, contraire-ment au Brésil , pas à les vendre comme semences (26). Depuis201 2, cette même loi est de nouveau en processus de révision(cf. ci-dessous), mais l 'opposition du secteur paysan est forte.D'autre part, la loi N° 24.572 de 1 995 interdit de breveter toutematière vivante préexistante dans la nature, c'est-à-dire « la tota-lité du matériel biologique et génétique existant dans la nature ousa réplique, dans les processus biologiques implicites de la re-production animale, végétale et humaine, en incluant les proces-sus génétiques relatifs au matériel capable de conduire sapropre duplication en conditions normales et libres comme cellesque l'on trouve dans la Nature » (article 7b). En Argentine, la ma-tière vivante ne peut être considérée comme une invention,même si el le a été isolée, purifiée ou caractérisée (27), et lesméthodes naturel les d'obtention d'un être vivant ne sont pas bre-vetables. A contrario, les méthodes non naturel les,comme le processus de fabrication des plantes trans-géniques, sont brevetables (28). . . mais pas leurs pro-duits (29) : les plantes transgéniques ne sont doncpas brevetables, et ce, quel que soit le procédé d'ob-tention.Quand en jui l let 201 2 Monsanto demande un brevetsur une plante transgénique de maïs, le ministre del 'Agriculture annonce en août l 'ouverture de la révi-sion de la loi semences, pour pouvoir protéger les se-mences transgéniques. Tollé de la société civi le, desorganisations paysannes, y compris de la FédérationAgraire Argentine (FAA), l 'une des organisations agri-coles les plus importantes du pays : cel les-ci argu-mentent que la loi privatise les semences, empêchentles agriculteurs de reproduire leurs semences, ren-forcent le rôle des multinationales et favorisent l 'intro-duction de plantes transgéniques. Qu'à cela netienne, dans le même temps, Monsanto introduit unenouvelle semence de soja aux gènes empilés, tolé-rant des herbicides et produisant un insecticide Bt : lesoja RR2 Pro intacta. Et puisque la loi n'est pas en-core votée, Monsanto impose des contrats aux agri-

PAS DE BREVET SUR LES PLANTES EN AMÉRIQUE LATINE

En dehors de la protection des variétés végétales via l 'UPOV, i l existe doncaussi le système des brevets. Mais, comme dans l 'UE, aucun pays d'Amé-rique latine n'admet de brevets sur les variétés végétales, ce qui est trans-crit dans la loi : au Mexique par exemple, les brevets sur les variétésvégétales sont interdits par l 'Article 1 6. V de la Loi de Propriété industriel le ;idem au Costa Rica et dans la Communauté Andine : Article 1 .4 de la Loisur les brevets d'invention du Costa Rica et Article 20. c) de la Décision An-dine 486) ; et l 'Argentine interdit de breveter tout type de matériel vivant (Loides brevets d'invention, article 6. g) (1 ). Ce qui n'empêche pas, on l 'a vu,que certains pays, à l 'instar de ce qui se passe dans l 'Union européenne,acceptent les brevets sur les transgènes… donc sur les plantes où ils sontinsérés.Brevets ou pas, on constate que la production de PGM, comme en Argen-tine, au Brésil ou encore au Paraguay ou Uruguay est bien développée. Lessemenciers, comme au Brésil , inondent en effet d'abord le marché, puistrouvent d'autres montages, comme les contrats privés, pour recouvrer leursroyalties.1 , Normativas sobre semil las en América latina. . . , op.cit, p.1 2

culteurs qui souhaitent uti l iser ses semences, les obligeant entreautres à payer une redevance, à géolocaliser leurs parcelles etbien sûr à ne pas les ressemer l 'année suivante (30). Faut-i l queles agriculteurs soient acculés, ou bien tirent-i ls des bénéfices decourt terme pour ces semences ? : quoiqu'i l en soit, Monsantoaffirmait en mars 201 5 que « 70% des producteurs qui utilisentcette technologie ont déjà payé la redevance » (31 ). Et pour ceuxqui refusent, Monsanto s'est entendu avec les principaux expor-tateurs pour qu'i ls facturent eux-mêmes les royalties ou, dans lecas contraire, qu'i ls refusent les cargaisons. La Fédérationargentine agraire (FAA) dénonce vigoureusement ces ententeset envisage de porter plainte si le gouvernement argentin nebouge pas (32).

Garantir la souveraineté semencière

L'Équateur est en transition pour sa législation sur les se-mences. Si la loi de 1 976 est pour le moment toujours en vi-gueur, la nouvelle Constitution garantit la souverainetéalimentaire, la promotion de l 'agriculture paysanne et de l 'agroé-cologie (articles 281 et 633). El le interdit les droits de propriétéintel lectuel le sur l 'agrobiodiversité, les connaissances tradition-nel les et les produits dérivés des ressources génétiques (articles322 et 402), ainsi que l 'usage des semences et cultures trans-géniques.Autre cas intéressant, le Vénézuela. I l a abandonné la Commu-nauté andine (CAN) entre autres pour ne pas avoir à appliquerl 'UPOV 91 suite au TLC avec les États-Unis. Une nouvelle loi surles semences est en discussion (34), afin de garantir la souverai-neté alimentaire et d'interdire l 'usage des OGM (35).

La plupart des pays latino-américains vont donc vers un renfor-cement de la privatisation des semences, mais un certainnombre tentent de maintenir un espace légal spécifique aux se-mences autochtones : le Brésil , avec son agriculture duale, enest un bon exemple. Les cas plus atypiques de l'Équateur et duVénézuela, avec de prochaines promulgations de lois quisemble-t-i l seront différentes, puisque basée sur la souverainetéalimentaire, sauront-el les montrer une autre voie ?

FRÉDÉRIC PRATAvec l'aide de Guy Kastler, Réseau Semences Paysannes

1 , les notes sont sur notre site http: //www.infogm.org/article5800

INTERVIEW ▪ 11

Inf'OGM, le Journal, n°1 34, mai / juin 201 5 - http: //www.infogm.org

DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES, L'ASSOCIATION STOP OGM PACIFIQUE SENSIBILISE LES CITOYENS ET ÉLUS DU PACIFIQUE À LA

QUESTION DES OGM. INF'OGM L'A INTERROGÉE SUR SES PRINCIPALES ACTIONS ET AVANCÉES OBTENUES.

Inf'OGM : Depuis plusieurs mois, Stop OGM Pacifique travaille à l'élaboration d'une réglementa-tion sur les OGM en Nouvelle-Calédonie. Où en est l'adoption de cette réglementation ?

Stop OGM Pacifique est née du constat du manque d'information en Nouvelle-Calédonie, mais également dans d'autres territoires duPacifique, et d'un flou juridique en ce qui concerne les OGM. Pourtant, une part importante de l 'al imentation des calédoniens provient deproduits importés d'Europe, mais également de pays où les OGM sont couramment cultivés et consommés, sans faire l 'objet d'un éti-quetage spécifique (Austral ie, Nouvelle-Zélande, États-Unis. . . ). Dans ce contexte, nous avons travail lé à l 'élaboration d'un texte pourencadrer les OGM en Nouvelle-Calédonie. Un premier texte a été adopté en 201 4 pour interdire l 'importation de semences fruitières etde céréales. Une première victoire pour nous, mais une victoire incomplète, car les semences maraîchères ne sont pas concernées parcette interdiction. . . Pour autant, cette réglementation va entraîner la réalisation de tests des semences de papaye et de blé. Nonconcassé, ce dernier, bien que destiné à l 'al imentation humaine et animale, entre dans le champ d'application de l 'interdiction. Ces tests,dont on attend les résultats, permettront d'avoir une idée plus précise sur la nature du blé d'Austral ie.

Les aliments vendus en Nouvelle-Calédonie doivent-ils être étiquetés lorsqu'ils contiennent des OGM ?

Un autre texte est en attente de validation et concerne la mise en place d'un étiquetage des aliments. Si les produits en provenance del'Union européenne sont soumis aux règles européennes, ce n'est pas le cas des autres produits. Et beaucoup de produits pourraientêtre concernés. La question des OGM devait ainsi être intégrée à un texte plus global sur l 'étiquetage en Nouvelle-Calédonie en attentede vote par le Congrès, mais de nouvelles élections ont renversé gouvernement et Congrès et les textes en attente doivent recommen-cer le processus législatif. Le Congrès travail le à un texte spécifique à l 'étiquetage des OGM qui reprend dans ses grandes lignes lesdispositions du texte initial sur la question.

Autres projets de l 'association : les cantines sans OGM. Nous avons récemment contacté de nombreuses communes pour diffuser del 'information sur cette question et pour prendre position en faveur de l 'exclusion des OGM au menu des enfants. Notre recommandationest d'exclure les produits contenant des OGM mais également les produits d'animaux nourris aux OGM. Nous avons beaucoup de re-tours positifs de la part des communes, notamment la communauté de communes Grand Nouméa (près de 30 000 repas par jour), etel les commencent à travail ler à cette possibi l ité notamment auprès de leur prestataire, la Sodexo, qui a le monopole sur l 'île. À terme,nous souhaitons sensibi l iser plus largement et parvenir à toucher collèges, lycées, hôpitaux. En tous les cas, le travail est en marche !

Suite à un cyclone et aux nombreuses destructions provoquées, le Vanuatu traverse une gravecrise. Stop OGM Pacifique s'est rendu sur les lieux.

En effet, la chambre de l'agriculture de la Nouvelle-Calédonie a demandé au gouvernement et au Congrès de débloquer des fonds pouracheter des semences à distribuer aux famil les et paysans du Vanuatu (environ 1 00 000 euros ont été débloqués). Stop OGM Pacifiquea immédiatement demandé plus de transparence en ce qui concerne la nature des semences données, sans aucun retour de la part dela chambre de l'agriculture. Nous avons décidé de nous rendre sur place et, en l ien avec des membres ni-Vanuatu de Stop OGM Paci-fique, nous avons obtenu les accréditations pour participer au comité de gestion de la crise, chargé de répartir localement l 'aide interna-tionale. Avec l'appui des autorités locales, nous avons finalement pu constater qu'i l s'agissait principalement de semences hybrides etune incertitude quant au caractère transgénique des semences de papayes (alors qu'i l reste de nombreuses papayes sur place), lescertificats d'importation n'ayant pas été fournis par la chambre de l'agriculture.En tout état de cause, i l s'agit de semences non adaptées à la réalité agricole locale. I l s'agit d'une aide à court terme qui va surtout faireentrer les paysans dans un système de dépendance. Stop OGM Pacifique demande également une plus grande transparence sur leprix d'achat de ces semences : 1 00 000 euros pour 300 kg de semences, contre une tonne initialement annoncée par la chambre del'agriculture. La chambre de l'agriculture a préféré attaquer violemment Stop OGM Pacifique plutôt que de répondre aux questions po-sées. Nous avons décidé d'attaquer la chambre en diffamation. . . On nous a notamment accusés d'ingérence, pourtant nous étions ac-compagnés de partenaires locaux et c'est sur les actions de la Nouvelle-Calédonie que nous demandons plus de transparence.

Quelles sont vos autres actions dans le Pacifique ?

Stop OGM Pacifique constate une situation similaire sur les différents territoires visités : Vanuatu, I les Salomon, Samoa, Fidj i . . . I l y a unmanque flagrant d'information, i l n'y a pas de réglementation et i l y a une importante importation de semences (notamment de papayeen provenance d'Hawaï). Mais sur tous les territoires visités, i l y a une demande d'information et de prise en main de cette question.Notre objectif est de constituer un réseau de personnes relais dans l 'ensemble des territoires pour échanger information et retours d'ex-périence, mais à chaque territoire de se doter de la réglementation la mieux adaptée à sa réalité.

Interview de Claire Chauvet et Fred Guérin, Stop OGM Pacifique

BP 1 8624 - 98857 Nouméa cedex - Nouvelle-Calédonie - stopogmpacifique@hotmail . fr - tél . : +687 52 201 4 - http: //www.stopogmpacifique.org

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gènes de Los Banos aux Phil ippines),mais aussi leur faiblesse en terme de di-vorce avec l'environnement (donc de nonadaptation future), l 'auteur plaide pour uneconservation-reproduction dynamique insitu, en coévolution dans les champs despaysans.

Si les semences paysannessont encore util isées par « lamajeure partie de la populationagricole de la planète », ellesn'en sont pas moins toutes envoie de privatisation (voir articleen pages 8-1 0 sur la situationlatino-américaine) parle biais, ici du cata-logue officiel des va-riétés (notammentdans l'Union euro-péenne), là par lesbrevets (notammentaux États-Unis), oude plus en plus parles deux systèmes

superposés, un gène brevetédans une plante ouvrant le droità un semencier de revendiquerla propriété de la plante.Dénonçant ces systèmes et les cas debiopiraterie qui en découlent, l 'auteur dé-fend « les semences paysannes dans latransition écologique de l'agriculture »(chapitre 6), grâce à un système semen-cier autonome et localisé, reposant surdes semences reproductibles adaptées ausein de réseaux de paysans. Sa longueexpérience de terrain permet à l'auteurd'i l lustrer judicieusement chaque thèmeabordé. La conclusion est d'actualité puis-

qu'elle porte sur le réchauffement clima-tique. Sans surprise, après une comparai-son entre les potentialités desbiotechnologies et des semences pay-sannes, ce sont ces dernières qui, pourl'auteur, feront partie de la solution.

Brac de la Perrière Robert Ali,Semences paysannes, plantes de

demain, Paris : ECLM, 201 4, 226 p.,20 euros

DES CÉRÉALES AU MUSÉUM

Le Muséum d’Histoire natu-rel le de Toulouse organise les1 8 et 20 juin un grand col-loque consacré aux céréales.Christophe Noisette y présen-tera les plantes trans-géniques. Ces plantes-làsont-el les une réponse auxquestions soulevées parl ’agriculture chimique ? Lesbrevets sur les gènes sont-i lsjustifiés ? Les OGM sont-i ls,au contraire, la cerise sur le

gâteau de l’agriculture productiviste ? LesOGM permettront-i ls de changer deparadigme ou renforceront-i ls celui ac-tuel lement dominant ?

« Colloque « Céréales », MNHN,Toulouse, du 1 8 au 20 juin 201 5,http://www.museum.toulouse.fr.Inscription gratuite auprès de :[email protected]

BB1 34

UN PLAIDOYER POUR LESSEMENCES PAYSANNES

Phytogénéticien des plantes, R.A. Brac achoisi de consacrer sa vie professionnelleau service de la biodiversitécultivée, chemin qu'i l ex-plique en partie dans sonavant-propos par l'influenced'un professeur de géné-tique, Jean Pernès, « exem-plaire [sur la] co-évolutiondes plantes domestiquéesavec les savoirs-faire descommunautés paysannes ».Co-fondateur d'Inf'OGM, dontil fut un très proche compa-gnon de route les premièresannées, R.A. Brac a déjàécrit de nombreux ouvragessur le thème des OGM et desbrevets. Mais il s'intéresseaussi à la face positive de ce combat,celle des semences paysannes, notam-ment dans le cadre de l'association BEDE(biodiversité, échanges et diffusion d'ex-périences), et en collaboration étroite avecle réseau semences paysannes.Sa dernière livraison est justement un vi-brant plaidoyer pour ces semences pay-sannes, dont il s'attache à décrire, nonseulement les menaces dont elles fontl'objet, mais aussi les conditions de leurrenouveau. Soulignant la fragil ité des sys-tèmes de conservation ex situ (avecl'exemple de la destruction en une après-midi, par un typhon, de la banque de