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Faculté de Droit et Science Politique Mémoire réalisé dans le cadre du Master 2 Droit Maritime et des Transports Le contrat de gestion du navire ou Contrat de shipmanagement Année universitaire 2010 – 2011 Sous la direction de Maître Christian Scapel Présenté par Roseline Guitard

A le contrat de shipmanagement

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Page 1: A  le contrat de shipmanagement

Faculté de Droit et Science Politique

Mémoire réalisé dans le cadre du

Master 2 Droit Maritime et des Transports

Le contrat de gestion du navire ou

Contrat de shipmanagement

Année universitaire 2010 – 2011

Sous la direction de

Maître Christian Scapel

Présenté par

Roseline Guitard

Page 2: A  le contrat de shipmanagement

SOMMAIRE

Sommaire

Liste des abréviations

Introduction

PARTIE 1 L’ACTIVITE DE SHIP MANAGEMENT : DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES AU

CONTRAT

Chapitre 1 Les différents types de gérances

Section 1. La gestion technique et la gestion commerciale du navire

Section 2. Le cas particulier de la gestion de l’équipage

Chapitre 2 Les droits et obligations des parties Section 1 Les droits et obligations du ship manager

Section 2 Les obligations de l’armateur

PARTIE 2 LA RESPONSABILITE DES PARTIES AU CONTRAT

Chapitre 1 Les responsabilités des parties au contrat Section 1 La mise en jeu de la responsabilité du ship manager

Section 2 La responsabilité du propriétaire de navire dans le contrat de shipmanagement

Chapitre 2 La couverture des risques Section 1 L’assurance du navire

Section 2 La couverture de l’équipage

Chapitre 3 La fin du contrat Section 1 La résiliation aux torts d’une partie

Section 2 La résolution des conflits

PARTIE 3 LA CONFORMITE AUX CODES QUALITE/ SECURITE

Chapitre 1 Les problématiques de qualité/ sécurité/ sureté au regard du contrat de ship

management Section 1 Le code ISPS

Section 2 L’incidence du code ISM sur le shipmanagement

Section 3 La certification de la qualité

Chapitre 2 Personnel et environnement Section 1 Le facteur humain dans la conduite du navire

Section 2 La réglementation relative à la pollution

Page 3: A  le contrat de shipmanagement

Liste des abréviations

AFNOR Association Française de la Normalisation

BIMCO The Baltic and International Maritime Council

BV Bureau Veritas

CA Cour d’appel

DMF Droit Maritime Français

FFSA Fédération Française des Sociétés d’Assurance

H&M Hull & Machinery

IMO International Maritime Organization

ISM International Safety Management code

ISMA International Ship management Association

ISPS International Ships and Port Facilities Security code

ITIC International Transport Intermediaries Club Ltd

LMAA The London Maritime Arbitrators Association

MLC Maritime Labour Convention

OIT Organisation Internationale du Travail

OMI Organisation Maritime Internationale

OPA Oil Pollution Act

Op. cit Opus citatis (ouvrage cité)

RC Responsabilité civile

RG Risques de guerre

SMC Safety Management Certificates

SOC Chambre sociale, Cour de Cassation

STCW Standards of Training, Certification and Watchkeeping for seafarers

USD United States Dollar

Page 4: A  le contrat de shipmanagement

Je tiens tout d’abord à exprimer mes sincères remerciements envers

Maître Scapel, Pierre Bonassies ainsi que l’ensemble du corps professoral

du Master II Droit Maritime et des Transports pour cette année si riche en

enseignements.

Pour sa disponibilité, sa patience et son aide tout au long de cette année

je tiens également à remercier Marjorie Vial.

Je remercie tout particulièrement le Capitaine Kuba Szymanski, secrétaire

général d’Intermanager pour son extrême disponibilité, son soutien et ses

précieux conseils lors de la rédaction de ce mémoire.

Enfin, je tiens à remercier mon père ainsi que mon maître de stage pour

leurs relectures et leurs conseils avisés tout au long de la rédaction de ce

mémoire ; mes parents pour leur infinie patience et leur soutien.

Page 5: A  le contrat de shipmanagement

Abstract

Ce mémoire a pour objet l’étude du contrat Shipman récemment modifié par la BIMCO aux

fins de refléter le cours des pratiques actuelles dans l’industrie maritime. Cet imprimé

constitue la forme la plus connue et la plus utilisée en la matière et est par ailleurs perçue

comme « la loi du shipmanagement ». Cet accord offre aux utilisateurs toute une gamme de

services optionnels y compris les dispositions les plus complètes en matière de gestion

d’équipage.

Ce mémoire projette d’analyser les mécanismes contractuels des clauses de ce contrat et de la

mise en perspective de celles-ci au regard des pratiques observées depuis l’apparition de ce

secteur d’activité.

Page 6: A  le contrat de shipmanagement

INTRODUCTION

“ L’exploitation des navires se caractérise aujourd’hui par une course au gigantisme

naval et par une sophistication des unités qui s’accompagnent, fatalement, d’une montée

vertigineuse des prix et d’une “financialisation” des entreprises d’armement. Ainsi, de

l’armement traditionnel, on bascule vers l’organisation de gigantesques holdings financiers

propriétaires d’immenses flottes. Et comme l’observe pertinemment le Profeseur Vigarié, les

conséquences sont alors importantes car « le désir de répartition des risques et de recherche

des profits a conduit à diversifier les investissements au-delà de l’horizon marin ; l’armement

n’est plus que l’un de ces domaines diversifiés [….], l’armateur financier risque d’être

d’avantage responsable d’un capital plutôt que d’un navire. Il gère le premier d’abord, et ne se

sent plus comme autrefois « citoyens des mers ». Les armateurs financiers, faute de

compétence navale, se trouvent ainsi le plus souvent, dans l’obligation de confier la gestion de

leurs navires à de véritables entreprises maritimes couramment appelées sociétés de « ship

management »1. ”

I Historique du shipmanagement :

Suite au choc pétrolier de 1979 qui vient faire vaciller une économie déjà fragile, la crise

financière des années 80 touche tous les secteurs d’activité ce qui se traduit dans l’industrie

maritime par une volonté des armateurs de diversifier leurs activités et par l’apparition de

nouveaux investisseurs qui n’ont pour simple ambition que de réaliser des opérations

spéculatives en attendant une conjoncture meilleure pour revendre leur navire acquis à « bas

prix ».

Aux fins de gérer ces nouvelles flottes, les banquiers ou armateurs financiers font appel à un

nouveau type de société en train de voir le jour : les sociétés de ship management.

1 M. Ndende, La mutation des enterprises du secteur des transports maritimes, Lamy Line, DMF 1992 n°159

Page 7: A  le contrat de shipmanagement

Le ship management a été définit par John Spruyt comme un accord entre un propriétaire de

navire et un ship manager (gestionnaire) professionnel concernant l’exercice d’un ou de

plusieurs services précis pour la gestion effective et profitable d’un ou de plusieurs navires.

« The professional supply of a single or range of services by a

management company separate from the vessel’s ownership where

‘professional supply’ means that the supplier (shipmanager) provides

sercice(s) to the user (shipowner) according to contracted terms and in

return for a management fee. In doing so, the shipmanager is required to

ensure that the vessel always complies with international rules and

regulations, is run in a safe and cost efficient manner without threat to

the environment and is maintened so as to preserve as far as possible its

asset value”.

De cette définition ressort que les sociétés de ship management peuvent offrir toute une

gamme de services regroupés en quatre grandes familles :

•la gestion commerciale du navire ou Commercial management

•la gestion technique ou Technical management

•la gestion de l’équipage ou Crew management

•la gestion administrative 2

La première société de gestion de navire a vu le jour en 1958 au sein de la compagnie

d’armement Denholm de laquelle s’est détachée une société indépendante Denholm

Shipmanagement. En effet, les gestionnaires de navires autrefois intégrés aux sociétés

armatoriales et parties intégrantes de celles-ci ont commencé à se détacher progressivement

formant ainsi des sociétés spécialisées mettant leur savoir faire au service de ces nouveaux

armateurs dépourvus de toutes connaissances maritimes.

Le développement de ces sociétés spécialisées a été relativement rapide toutefois leur succès

est relatif. Au fil des années, l’image de ces sociétés s’est ternie, ces dernières étant

impliquées dans la gestion de « navires poubelles » ou de navires sous pavillon de

complaisance ne répondant pas aux normes de sécurité, qualité, navigabilité. Ne s’étant pas

toujours illustrées par le respect du droit maritime, plusieurs mesures ont été prises aux fin de

2 Voir Tableau en Annexe

Page 8: A  le contrat de shipmanagement

redorer leur blason. Un organisme professionnel est ainsi crée en février 1991 : l’International

Ship management Association (ISMA) qui s’est donné pour objectif de « promouvoir la

qualité de services, fixer des normes de qualité de la gestion, surveiller la qualité de la gestion

ou de promouvoir la formation des navigants ». Cet organisme a été favorablement accueilli

par la Bimco.

Le ship management, terme reconnu en droit français par un arrêté du 23 novembre 1973, est

aujourd’hui un secteur à part entière de l’industrie maritime. Cette acceptation se matérialise

notamment au travers de l’attention portée par différentes organisations et institutions à ce

secteur d’activité. Des conférences ont régulièrement lieu dont la prochaine : la « 21st

International Ship management Business Conference 2011 » organisée par la Lloyd’s List en

partenariat avec Informa, Maritime Events (NBDP Renvoi programme de la conférence en

annexe).

II Une relation contractualisée:

Avec le recours à ces nouveaux types de services, l’armateur s’éloigne de sa fonction

traditionnelle et il n’est pas toujours facile de savoir si un navire a été confié à un

gestionnaire. Les éléments de la gérance doivent donc être précisés. En effet, il n’y a de

gérance que si le prestataire de services demeure indépendant et ne se confond pas avec un

salarié de l’armateur ou avec l’armateur lui-même. Il n’y a de plus gérance que s’il existe un

lien de nature contractuelle unissant les deux parties3.

Du fait de la multiplication de cette activité et des contrats, chaque société éditant le sien, le

« Baltic and International Maritime Council » (Bimco) a voulu harmoniser ce secteur en

expansion en créant un contrat type aujourd’hui vu comme la loi du ship management. A ainsi

été adopté à Londres le « Bimco Standard Ship management agreement » en 1988 plus connu

sous le nom de « Bimco Shipman ». Par ce contrat, est régulé le mandat de gestion de navires

où le manager assume l’obligation, en contrepartie d’une somme d’argent, de réaliser tous les

actes matériels et juridiques qui peuvent être nécessaires pour mener à bien l’exploitation du

navire au nom et pour le compte du navire, dans le respect constant des termes du contrat.

Cette première version fut très bien acceptée et adoptée par la communauté maritime toutefois

à l’image de ce droit en perpétuelle évolution et sujet aux profondes remises en question

3 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y. Tassel,

Droits maritimes 2009/2010, Dalloz action, 2ème ed., n°333.15 p.275

Page 9: A  le contrat de shipmanagement

notamment suite aux catastrophes maritimes, le contrat fut revu en 1998 afin de l’adapter aux

nouvelles normes internationales.

Au cours de la dizaine d’années écoulée depuis le « Shipman 98 », de nombreux changements

sont intervenus dans l’industrie maritime et l’on a pu en apprendre d’avantage la relation

armateur/ ship manager.

En 2007, le comité documentaire de la Bimco a estimé que cet imprimé qui constitue l'une des

formes contractuelles la plus utilisée en la matière devait bénéficier d’une révision permettant

de refléter les changements de la pratique. Cette mise à jour avait également pour but de

s’assurer que les principes fondamentaux du Shipman étaient conservés par les ship managers

qui utilisent pour beaucoup, une version du contrat amendée par leurs soins.

La nouvelle version du « Shipman 98 » nommée « Shipman 2009 » a donc été revue tant au

niveau de la forme qu’au niveau du contenu pour tenir notamment compte de l’entrée en

vigueur des codes ISM et ISPS. Les objectifs clefs de cette révision sont de :

•Mettre à jour le contrat pour refléter la pratique commerciale en cours ainsi que tout

changement dans la loi ;

•S’assurer que les principes et la structure de base du contrat soient maintenus ;

•Améliorer la clarté et la portée du contrat ;

•Harmoniser quand cela est possible les dispositions de l’imprimé « Shipman » avec

celle du contrat type « Crewman »4.

La forme du contrat a été revu au fin de rendre l’imprimé plus clair et plus pratique à utiliser

sur ordinateur, les échanges se faisant de plus en plus en plus par voie électronique. Le

contrat qui comprend toujours une première partie composée par les ‘Box’ a été dans la

deuxième partie divisée en 5 sections :

•Section 1 – Basis of the Agreement

•Section 2 – Services

•Section 3 – Obligations

•Section 4 – Insurance, Budgets, Income, Expenses and Fees

•Section 5 – Legal, General and Duration of Agreement.

4 Renvoi Partie 1/ Chapitre 1/ Section 2 Le crew management

Page 10: A  le contrat de shipmanagement

III La qualité juridique de ship manager :

Selon l’article 2 de la loi du 3 janvier 1969 relative aux bâtiments de mer, l’armateur est, sauf

preuve du contraire, le propriétaire du navire. Cette preuve peut venir d’un contrat

d’affrètement ou d’un contrat de ship management transférant la gestion du navire au

gestionnaire. Toutefois, l’éclatement de la notion d’armateur peut engendrer une confusion

vis-à-vis du tiers au contrat. Défini par certains auteurs comme un armateur pour le compte

d’autrui5, par quels moyens le tiers peut-il être sûr que la personne avec laquelle il contracte

est le propriétaire du navire? « Concrètement, le marin ne connait que l’entreprise qui l’a

recruté, le fournisseur de soutes ne connaît que l’entreprise de gérance qui a commandé la

fourniture6 »

7 or comme développé ci-après, le gestionnaire est amené à contracter

directement avec des tiers sans que ces derniers soient nécessairement informés de l’existence

d’une délégation de gestion. Deux catégories de tiers se dessinent d’ailleurs: les tiers étrangers

aux deux parties du contrat de gestion ou les tiers cocontractants du ship manager et donc

étrangers seulement à l’armateur. Le marin ou le fournisseur de soutes sont ainsi des

cocontractants du ship manager mais des tiers vis-à-vis de l’armateur. Inversement, le ship

manager n’est pas partie aux contrats que le propriétaire conclut avec les tiers. Aussi doit-il

les avertir en signant les contrats avec la mention ‘as agent only’»8. L’article 3 du Shipman

2009 (Article 3 du Shipman 98) dispose par ailleurs explicitement que le ship manager ne doit

agir qu’en tant que tel.

Selon Gaute Gjelsten et Torgeir Wilumsen, il est nécessaire que le ship manager précise bien

qu’il agit pour le compte d’un armateur lors de relations avec les tiers car s’il ne le fait, il sera

de ce fait dans l’obligation de payer le tiers. Cette règle fut confirmée par un arrêt de la

Supreme Court of Norway en 1980, Fekete Case relative à la fourniture de soutes9. Dans cet

affaire, un ship manager avait passé commande pour du carburant sans expliciter son statut de

5 P. CHAUMETTE, Note sous Soc 26 septembre 2007, Société Saint Tropez Gulf Holidays c/ Mme Doualle

(n°06-43998), Marin ou pas marin : comment trancher ?, DMF 2008 n°688. 6 Une nuance doit être apportée à cette affirmation. Les soutes ne sont pas toujours commandées par le ship

manager mais aussi par l’affréteur ou encore le sous-affréteur. Le fournisseur ne pouvant s’y reconnaître dans

ces chaines contractuelles exige le plus souvent que la somme soit versée avant toute livraison ; en l’espèce par

le ship manager. 7 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y. Tassel,

Droits maritimes 2009/2010, Dalloz action, 2ème ed., n°333.24 p.276.

8 I. Corbier, Armateur – Octobre 2002, Répertoire de droit commercial, Dalloz, Edition 2011, Section 1

Identification de l’armateur, B. Gestion du navire 9 En l’espèce, un ship manager avait passé une commande de combustibles auprès d’un fournisseur sans préciser

qu’il agissait « as agent only ». La responsabilité du gestionnaire fût retenue alors même que le fournisseur savait que celui-ci n’était pas le véritable propriétaire du navire. Ce cas illustre parfaitement l’importance, pour

le ship manager, de préciser sa qualité de simple mandant agissant pour le compte de l’armateur.

Page 11: A  le contrat de shipmanagement

mandataire. Le gestionnaire fut reconnu responsable même si le tiers savait en l’espèce que ce

n’était pas le propriétaire du navire. La leçon à retenir ici est de toujours bien spécifier que le

contrat est signé pour le compte d’un autre et de nommer cette personne. Ce n’est toutefois

pas toujours suffisant pour écarter la responsabilité du ship manager. Le challenge réside en

droit maritime dans sa nature internationale. Ainsi lorsque l’ordre est donné depuis la

Norvège et que le prestataire de services se trouve dans un autre pays, le gestionnaire court

toujours le risque de signer un contrat gouverné par une loi étrangère. En effet, le contrat est

généralement régit par la loi du pays avec lequel il a les liens les plus étroits ce qui correspond

souvent au pays du prestataire de services. Le ship manager encourt de plus le risque d’être

poursuivi dans le pays dans lequel le service est effectué. Par exemple, l’article 526 du code

de commerce espagnol énonce que le ship manager et le propriétaire du navire sont

conjointement et solidairement responsable et ceci pour n’importe quel ordre du gestionnaire

pris dans l’intérêt du navire. Les ship managers peuvent réduire ces risques en spécifiant

clairement qu’ils n’agissent qu’en tant que mandataire de l’armateur et de choisir la loi de leur

pays comme loi du contrat10.

Quant au contrat de shipmanagement, il est difficile de le qualifier. Il tient – d’un point de vue

juridique – du contrat de mandat, du contrat d’entreprise11 et selon V.P Cuif, du contrat de

louage d’ouvrage en raison du grand nombre de prestations matérielles pouvant être

accomplies12. Il se rapproche cependant plus du mandat, le ship manager agissant au nom et

pour le compte du propriétaire du navire ce qui revient à agir en tant que mandataire de

l’armateur.

IV L’activité des sociétés de ship management:

Ces sociétés qui ont pour rôle de s’occuper du navire c'est-à-dire d’engager un équipage,

effectuer l’entretien, l’avitaillement et armer ce navire afin de faire en sorte qu’il soit exploité

pour la plus longue période possible peuvent être classées en plusieurs catégories. Peuvent

notamment être distinguées les sociétés de ship management créées par des armateurs (société

de ship management intégrées ou in-house management) et d’autre part, les sociétés qui

gèrent des navires appartenant véritablement à autrui (sociétés indépendantes ou third party

management).

10 Gaute Gjelsten, Torgeir Wilumsen, The pitfalls of third party ordering, Lloyd’s Ship Manager (LSM)

11 M. NDENDE, op.cit.

12 V. P.-F. CUIF, Le contrat de gestion 2004, Economica

Page 12: A  le contrat de shipmanagement

Malgré la mauvaise image dont elles ont pâties par le passé, le nombre de navires en gestion

n’a cessé d’augmenter. « A l’heure actuelle plus de 800 sociétés de shipmanagement opèrent à

travers le monde et gèrent près du quart de la flotte mondiale ». Ce chiffre augmente

d’environ 3,5% par an depuis le début des années 90. A cette date en effet, il n’y avait que

500 sociétés de ship management qui géraient environ 15% de la flotte mondiale13.

Au regard de l’importance de ces groupements et de l’utilisation du contrat type de la Bimco

dans leur relations, il convient de s’intéresser aux relations contractuelles qu’entretiennent

propriétaires de navires et ship managers ainsi que le formalisme documentaire qui est

pratiqué lors de la conclusion des contrats de gérance.

Il conviendra donc d’étudier les différents services que peuvent offrir les sociétés de ship

management et les droits et obligations qui pèsent sur elles de ce fait (Partie 1) avant que

d’étudier le régime de responsabilité de ces sociétés, régime particulier en ce que certaines

responsabilités sont fonction de la gérance exercée (Partie 2). La mauvaise image dont a

souffert les sociétés de ship management les ont de plus conduit à mettre en place une certaine

transparence dans leur mode de fonctionnement et à respecter plus farouchement les normes

internationales tant sur le sujet de la qualité/sécurité/sureté que sur celui de la pollution,

grande préoccupation contemporaine (Partie 3).

13 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y.

Tassel, Droits maritimes 2009/2010, Dalloz action, 2ème ed., n°333.31 p.276.

Page 13: A  le contrat de shipmanagement

PARTIE 1

L’ACTIVITE DE SHIPMANAGEMENT

Page 14: A  le contrat de shipmanagement

Autrefois dénommé ‘ship husband’, le gestionnaire aujourd’hui devenu ‘ship manager’ a pour

principal avantage de ‘prendre en charge’ divers éléments couteux nécessaires à l’exploitation

d’un navire, laissant au propriétaire la possibilité de se focaliser sur autre chose. La

restructuration de la gamme de prestation « à la carte » du Shipman 2009 soit les articles 4.

Technical management, 5. Crew management et 6. Commercial management permet en cela

de refléter la fréquence d’utilisation de ces services dans la pratique (Chapitre 1).

L’étude des modalités d’exécution du contrat de gestion de navire implique également que

soient précisées les obligations respectives des parties. Bien que le shipmanager semble avoir

plus de droits à première vue de part la rédaction du contrat, la révision de l’imprimé a été

faite dans une volonté de « striking a fair balance between the rights and obligations of the

owners and the managers » (Chapitre 2).

Page 15: A  le contrat de shipmanagement

CHAPITRE 1 LES DIFFERENTS TYPES DE GERANCES :

La gestion du navire est une fonction importante de l’armateur. Trop souvent, cette fonction

est dissimulée sous une autre activité : celle du transport de marchandise or celle-ci suppose

toute une gestion du navire en amont. Qu’elle soit exercée par une société interne ou

indépendante de la société d’armement, la gestion de navire peut se décomposer en trois

principaux « volets » que sont donc : la gestion technique, la gestion commerciale (Section 1)

et la gestion de l’équipage (Section 2).

SECTION 1. LA GESTION TECHNIQUE ET LA GESTION COMMERCIALE DU NAVIRE :

L’exploitation du navire mêle plusieurs approches qui, dans le cadre du ship management font

l’objet d’une division des taches. Et « la gérance technique et la gérance commerciale

participent de cette division dans l’unité »14. Tandis que la gestion technique porte sur les

données mécaniques par lesquelles le navire est rendu opérationnel (§1), la gestion

commerciale porte elle, sur le fret (§2).

§1 La gestion technique du navire :

1. Définition du service :

Cette gestion porte sur les données mécaniques assurant le bon fonctionnement du navire. La

gestion technique du navire est la combinaison de plusieurs fonctions à la fois indépendantes

et interdépendantes. L’achat d’un navire mettra par exemple en exergue l’état de

conservation, la qualité des prestations du manager et le maintien de sécurité. Dans ce but de

bonne navigabilité du navire, le ship manager s’engage à :

Conserver de la cote attribuée par une société de classification15. Le ship manager

s’engage à contrôler et à laisser les autorités de l’Etat du pavillon inspecter le navire. En cas

de nécessité, celui-ci doit effectuer les réparations et éventuellement mettre le navire en cale

sèche. Comme pour la gestion technique, la mise en cale sèche demande une bonne

planification permettant de le laisser à l’arrêt le moins de temps possible et à moindre coût

14 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y.

Tassel, Droits maritimes 2009/2010, Dalloz action, 2ème ed., n°333.11 p. 274

15 Définition : Voir 3

ème Partie/ Section 3 La certification de la qualité/ 3. La certification des sociétés de

classification

Page 16: A  le contrat de shipmanagement

pour le ship manager. Le ship manager peut voir sa responsabilité engagée en cas de non-

respect de cette obligation.

L’établissement du budget technique c'est-à-dire l’achat des pièces détachées et autres

consommables, l’approvisionnement en huiles et carburant ou encore l’avitaillement.

La souscription d’une assurance corps et machine (Hull & Machinery)16 couvrant à la

fois la perte, l’avarie et le dommage subis par le navire ainsi que la gestion des sinistres.

2. Les changements et apports sous le contrat Shipman 2009 :

La gestion technique est définie sous la clause 3.2 du contrat Shipman 98 devenu la clause 4

dans le Shipman 2009. Cette nouvelle clause est ainsi rédigée :

4. Technical Management

(only applicable if agreed according to Box 6).

The Managers shall provide technical management which includes, but is not

limited to, the following services:

(a) ensuring that the Vessel complies with the requirements of the law of the

Flag State;

(b) ensuring compliance with the ISM Code;

(c) ensuring compliance with the ISPS Code;

(d) providing competent personnel to supervise the maintenance and general

efficiency of the Vessel;

(e) arranging and supervising dry dockings, repairs, alterations and the

maintenance of the Vessel to the standards agreed with the Owners provided

that the Managers shall be entitled to incur the necessary expenditure to ensure

that the Vessel will comply with all requirements and recommendations of the

classification society, and with the law of the Flag State and of the places where

the Vessel is required to trade;

(f) arranging the supply of necessary stores, spares and lubricating oil;

(g) appointing surveyors and technical consultants as the Managers may

consider from time to time to be necessary;

16 Renvoi Chapitre 2 La couverture des risques/ §2 La couvertures des ‘corps’ de navires

Page 17: A  le contrat de shipmanagement

(h) in accordance with the Owners’ instructions, supervising the sale and

physical delivery of the Vessel under the sale agreement. However services

under this Sub-clause 4(h) shall not include negotiation of the sale agreement

or transfer of ownership of the Vessel;

(i) arranging for the supply of provisions unless provided by the Owners; and

(j) arranging for the sampling and testing of bunkers.

L’un des changements le plus notables entre le Shipman 98 et le Shipman 2009 est un

changement de forme : les différents services proposés sont à présent listés individuellement

et forment à présent des clauses autonomes. L’ordre a également été inversé, la gestion

technique étant maintenant présentée et définie en première. Ce changement s’explique du fait

que cette gestion est le principal service et le plus souvent demandé par les armateurs.

Des clauses du Shipman 98 ont également été déplacées pour être intégrées à la clause 4 du

Shipman 2009 aux fins de rendre l’ensemble plus logique et d’intégrer à la gestion technique

tous les services qui peuvent relever de celle-ci. Ainsi ont été déplacées pour être intégrées à

la clause 4 du Shipman 2009 :

La clause 4.2 du Shipman 98 relative aux obligations du manager en cas de gestion

technique (nouvelle clause 4(a)) qui dispose que le ship manager doit s’assurer du respect des

lois de l’Etat du pavillon.

La clause 3.6 Achat et Vente du navire (nouvelle clause 4(h)) car a été estimé que le rôle du

gestionnaire technique s’étendait à la supervision de la vente et de la livraison du navire.

Toutefois, comme dans le Shipman 98, les opérations de négociation ou de transfert de

propriété ne relève pas des fonctions du ship manager .

La clause 3.7 Dispositions complémentaires (nouvelle clause 4(i)) car cela reflète la pratique

actuelle selon laquelle le ship manager se charge de l’avitaillement pour le compte de

l’armateur.

La Bimco insiste sur le « International Safety Management code » (ISM) et le « International

Ship and Port Facility Security code » (ISPS) dans les clauses 4(b) et 4(c) en les citant

directement, ce qu’elle ne faisait pas dans la version de 1998. Le code ISM apparait

Page 18: A  le contrat de shipmanagement

aujourd'hui comme faisant partie intégrante de la gestion technique obligeant ainsi les navires

à se mettre en conformité avec ce code17.

Enfin, le sous-alinéa 4(j) du Shipman 2009 impose au ship manager de prélever des

échantillons pour l’analyse des soutes carburants. Cette obligation qui n’était qu’une

disposition facultative dans le Shipman 98 a également été insérée dans la clause 6. (b), clause

relative à la gestion commerciale.

§2 La gestion commerciale :

1. Définition :

« Il s’agit [en l’espèce] de s’assurer que le navire navigue commercialement, c'est-à-dire reste

sur le lège le moins de temps possible ». Trouver le fret est la première fonction de la gérance

commerciale. Gérer le fret est son corollaire»18.

Pour mener à bien la gestion commerciale, le ship manager devra suivre les instructions

données par l’armateur. Le ship manager est, dans ce cas, celui qui contracte avec les parties,

les entreprises de manutention et les commissaires d’avaries pour l’exploitation normale du

navire, celui qui établit les budgets et réalise le bilan comptable, s’occupe des affaires

bancaires. Il est alors aussi celui qui souscrit une assurance corps et machine auprès d’un

assureur standard, qui démêle les questions juridiques, qui assigne ou défend un navire ou son

armateur devant la justice ou encore obtient la main levée suite à la saisie du navire.19

2. Les changements et apports sous le contrat Shipman 2009 :

Elle est définie sous la clause 3.3 devenue clause 6 dans le contrat Shipman 2009.

6. Commercial Management

(only applicable if agreed according to Box 8).

The Managers shall provide the following services for the Vessel in accordance

with the Owners’ instructions, which shall include but not be limited to:

(a) seeking and negotiating employment for the Vessel and the conclusion

(including the execution thereof) of charter parties or other contracts relating

17 Renvoi Partie 3

18 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y.

Tassel, op.cit., n°333.14 b) p. 275 19 L. Fontestad Portales, El transporte maritimo de mercancias u sys incidencias procesales, Thèse, Université

de Malaga, p89.

Page 19: A  le contrat de shipmanagement

to the employment of the Vessel. If such a contract exceeds the period stated in

Box 9, consent thereto in writing shall first be obtained from the Owners;

(b) arranging for the provision of bunker fuels of the quality specified by the

Owners as required for the Vessel’s trade;

(c) voyage estimating and accounting and calculation of hire, freights,

demurrage and/or despatch monies due from or due to the charterers of the

Vessel; assisting in the collection of any sums due to the Owners related to the

commercial operation of the Vessel in accordance with Clause 11 (Income

Collected and Expenses Paid on Behalf of Owners); If any of the services under

Sub-clauses 6(a), 6(b) and 6(c) are to be excluded from the Management Fee,

remuneration for these services must be stated in Annex E (Fee Schedule). Se

Sub-clause 12(e).

(d) issuing voyage instructions;

(e) appointing agents;

(f) appointing stevedores; and

(g) arranging surveys associated with the commercial operation of the Vessel.

Dans la nouvelle rédaction du contrat de Shipman, le préambule de la clause a été amendé aux

fins de préciser que le ship manager doit se conformer aux instructions données par

l’armateur. De plus, la liste des services relevant de la gestion commerciale n’étant pas

exhaustive, d’autres prestations pourront être demandées par l’armateur.

Comme pour la clause relative à la gestion technique, la clause 3.3 du Shipman 98 a fait

l’objet de modifications. La clause 3.8 relatives aux soutes a ainsi été intégrée à la clause sur

la gestion commerciale (nouvelle clause 6b)) car ce qui était considéré comme un service

optionnel sous le Shipman 98 est désormais considéré comme inhérent à cette gestion. Il

relève à présent de l’obligation du ship manager de « faire le plein » du navire en veillant d’y

mettre la bonne qualité de carburant.

Sur le fond, la clause 6(c) du Shipman 2009 a été revue et clarifiée au profit du ship manager.

Celui-ci doit à présent aider, dans le cadre de la gestion commerciale, l’armateur à la collecte

les impayés, sommes dues ou fret et non plus s’arranger pour que l’armateur récupère ces

sommes. Les services énoncés aux clauses 6(b) et 6(c) peuvent par ailleurs être exclus de

l’accord. Cette exclusion fait d’ailleurs l’objet d’un écrit à l’annexe E du contrat Shipman aux

fins d’éviter la dissimulation de commissions. A contrario, si ces services sont sollicités, ils

Page 20: A  le contrat de shipmanagement

peuvent faire l’objet d’une rémunération supplémentaire qui doit elle aussi inscrite à l’annexe

E.

Bien que prévue dans le contrat de la Bimco, une remarque peut être faite concernant

cette gestion commerciale. En effet on voit mal d’importantes sociétés d’armement comme

par exemple les grandes entreprises européennes de transport de marchandises conteneurisées

déléguer la recherche de contrat à une société tierce de shipmanagement. Dan le cadre d’une

relation contractuelle avec une entreprise de manutention par exemple, c’est l’armateur ou

l’affréteur qui nomme un « safe berth » et qui s’occuper d’organiser les opérations de

chargement, déchargement. Le ship manager ne se contente que de s’assurer, par

l’intermédiaire du capitaine du navire, que ces opérations sont effectuées dans les règles de

l’art et de préserver les intérêts de l’armateur en prenant par exemple les réserves en cas

d’avaries provoquées au navire ou de constatation de cargaison abimée au chargement. La

délégation de cette gestion peut toutefois parfaitement trouver sa justification dans le cas où le

navire appartiendrait à un armateur financier dépourvu de toute compétence navale.

§3 La gestion administrative :

Le ship manager peut également offrir des services complémentaires tels que la gestion des

opérations d’affrètement ou la surveillance dans la construction du navire. Le contrat de la

Bimco permet en effet d’ajouter aux trois principales gestions que sont la gestion technique, la

gestion de l’équipage et la gestion commerciale des services annexes comme par exemple

l’accomplissement de formalités administratives, la souscription d’assurances ou encore la

gestion des opérations de vente ou d’achat de navire.

SECTION 2. LE CAS PARTICULIER DE LA GESTION DE L’EQUIPAGE :

Représentant de loin la partie la plus importante de la gestion de navire dans le monde, la

gestion de l’équipage qui consiste notamment à traiter toutes les questions pouvant toucher à

l’équipage doit faire l’objet d’une étude plus approfondie. Cette gestion renvoi en effet à la

conclusion d’un autre contrat de la Bimco : Crewman A ou B.

1. Définition

Page 21: A  le contrat de shipmanagement

« Jusque vers les années 80, le contrat d’engagement était toujours conclu entre un marin et

un armateur »20 Les quelques obligations particulières auxquelles peut être soumis l’armateur

du fait du poids de l’histoire et du contexte particulier dans lequel s’exécute le contrat

d’engagement maritime peut se résumer en une formule : « payer, soigner et rapatrier »,

« trilogie classique de ses obligations21 ». Mais depuis l’éclatement de la fonction armatoriale,

le ship manager, crew manager en l’espèce, qui gère et exploite le navire pour le compte du

propriétaire peut également jouer le rôle d’intermédiaire dans cette relation

employeur/employé.

Dans le cadre de cette gestion, la société de ship management dans ce cas dénommée société

de manning, prend en main toutes les opérations sociales : il recrute les marins, prend en

charge la rémunération et même le rapatriement de ces derniers à la fin du contrat. Si ce

service est inclut dans le contrat type Shipman et que dans la pratique, certains armateurs ne

se contentent que de ce contrat type, la Bimco préconise cependant l’utilisation d’un autre

contrat également utilisé mondialement : le ‘Crew management agreement’ soit Crewman A –

Cost Plus fee soit Crewman B – Lump sum22. La Bimco qui a modernisée son contrat

Shipman en a également profité pour revoir ces deux contrats en 2009 espérant que par

l’harmonisation des dispositions des contrats types, les parties cessent de n’utiliser que le

contrat type Shipman.

En l’espèce, le contrat choisi détermine la relation entre le shipmanager et l’équipage. Si le

choix est fait de soumettre la relation contractuelle au Crewman A – Cost plus fee, le crew

manager agit dans ce cas, pour le compte et dans l’intérêt de l’armateur. « Aucun lien

contractuel n’existe entre l’équipage et le ship manager. L’équipage a un employeur de fait -

le manager dont il reçoit les ordres – et un employeur de droit – le propriétaire du navire »23.

Dans le second cas, Crewman B – Lump sum, le crew manager agit en son nom propre

devenant ainsi l’employeur de fait et de droit de l’équipage. La société de manning est alors

considérée comme une entreprise de travail maritime. « Elle doit être agréée par les autorités

de l’Etat où elle est établie, conformément à la convention n°179 de l’OIT [relative au

recrutement et au placement des gens de mer], ratifiée en 2004 par la France »24. Si tel n’est

20 20 P. BONASSIES, C.SCAPEL, Traité de Droit maritime, LGDJ, 2

ème ed.

21 P. CHAUMETTE, Les marins sont-ils encore à bord , DMF 2005 n°663

22 Voir Annexes

23 I. Corbier, Armateur – Octobre 2002, Répertoire de droit commercial, Dalloz, Edition 2011, Section 1

Identification de l’armateur, B. Gestion du navire 24 P. Chaumette, Le registre international français des navires (RIF), Lamy Line, DMF 2005 n°660

Page 22: A  le contrat de shipmanagement

pas le cas de l’entreprise, l’armateur doit, selon l’article 9 de la loi du 3 mai 2005, vérifier

que l’entreprise en respecte au moins les exigences. Selon les termes de cette même

convention (article 8) est considérée comme entreprise de travail maritime toute personne

physique ou morale dont l’activité est de mettre à disposition d’un armateur des navigants

qu’elle embauche en fonction de leur qualification et rémunère à cet effet.

Les sociétés dites de manning dont l’activité est, selon la loi du 3 mai 2005, de mettre à la

disposition d’un armateur des navigants « ne sont [souvent] pas soumises aux obligations

imposées aux armateurs des pays maritimes traditionnels en matière de nationalité de

l’équipage »25, ces dernières s’immatriculant sous des pavillons de complaisance ou pavillons

bis. Les gestionnaires ont volontiers recours au recrutement d’une main d’œuvre bon marché

en provenance de pays en voie de développement leur permettant de verser des salaires

dérisoires, comportement qui bien que permettant à l’armateur de réduire ses coûts, a entrainé

un climat de méfiance. Certains armateurs européens insistent toutefois pour qu’une partie de

l’équipage soit européenne. Le crew manager doit alors veiller à ce qu’il n’y ait pas de « choc

culturel » et veiller au respect des différences inter ethniques du point de vue alimentaire par

exemple. « Un manager compétent capable de bien intégrer les équipages et les nationalités se

montre un bon investissement pour le propriétaire »26.

2. Les changements et apport sous le contrat Shipman 2009 :

La clause 5. (a) Crew management du Shipman 2009 énonce que :

5. Crew Management and Crew Insurances

(a) Crew Management

(only applicable if agreed according to Box 7)

The Managers shall provide suitably qualified Crew who shall comply with the

requirements of STCW 95. The provision of such crew management services

includes, but is not limited to, the following services:

(i) selecting, engaging and providing for the administration of the Crew,

including, as applicable, payroll arrangements, pension arrangements, tax,

social security contributions and other mandatory dues related to their

employment payable in each Crew member’s country of domicile;

25 I. Corbier, op.cit.

26 A. Ene, Evolution récente du shipmanagement, Mémoire CDMT 1993.

Page 23: A  le contrat de shipmanagement

(ii) ensuring that the applicable requirements of the law of the Flag State in

respect of rank, qualification and certification of the Crew and employment

regulations, such as Crew’s tax and social insurance, are satisfied;

(iii) ensuring that all Crew have passed a medical examination with a qualified

doctor certifying that they are fit for the duties for which they are engaged and

are in possession of valid medical certificates issued in accordance with

appropriate Flag State requirements or such higher standard of medical

examination as may be agreed with the Owners. In the absence of applicable

Flag State requirements the medical certificate shall be valid at the time when

the respective Crew member arrives on board the Vessel and shall be

maintained for the duration of the service on board the Vessel;

(iv) ensuring that the Crew shall have a common working language and a

command of the English language of a sufficient standard to enable them to

perform their duties safely;

(v) arranging transportation of the Crew, including repatriation;

(vi) training of the Crew;

(vii) conducting union negotiations; and

(viii) if the Managers are the Company, ensuring that the Crew, on joining the

Vessel, are given proper familiarization with their duties in relation to the

Vessel’s SMS and that instructions which are essential to the SMS are

identified, documented and given to the Crew prior to sailing.

(ix) if the Managers are not the Company:

(1) ensuring that the Crew, before joining the Vessel, are given prope

familiarisation with their duties in relation to the ISM Code; and

(2) instructing the Crew to obey all reasonable orders of the Company in

connection with the operation of the SMS.

(x) Where Managers are not providing technical management services in

accordance with Clause 4 (Technical Management):

(1) ensuring that no person connected to the provision and the performance of

the crew management services shall proceed to sea on board the Vessel without

the prior consent of the Owners (such consent not to be unreasonably

withheld); and

(2) ensuring that in the event that the Owners’ drug and alcohol policy requires

measures to be taken prior to the Crew joining the Vessel, implementing such

measures;

Page 24: A  le contrat de shipmanagement

La clause relative à la gestion de l’équipage est sans doute celle qui a le plus changé dans le

Shipman 2009. Ces changements ont été opérés aux fins de rendre les dispositions du contrat

Shipman plus claires et plus adaptées lorsqu’elles sont utilisées conjointement avec le

Crewman. La clause 4 du contrat crewman relative à l’assurance de l’équipage a notamment

été intégrée à cette clause.27

La clause 5(a)(i) a été étoffé par rapport à l’ancienne version et ce aux fins de préciser les

obligations du crew manager qui sont le suivantes : recruter et former l’équipage, payer les

salaires et charges sociales ou encore organiser les changements d’équipage. De plus, le temps

de travail du marin étant réglementé strictement par l’OIT, les roulements d’équipage pour

assurer la sécurité et la gestion du navire doivent être pris en compte.

La clause 5(a)(iii) relative à la certification médicale à également été revu, la clause 3.1(iii) du

Shipman 98 ne reflétant plus la réalité de la pratique. Ainsi la période de 3 mois a été

remplacée par une période basée sur la présence du marin à bord. Les certificats médicaux

sont à présent valides du moment où le marin rejoint l’équipage et ce jusqu’à la fin de la

période de service. De plus, les parties peuvent prévoir dans la nouvelle version du contrat de

mettre en place des normes médicales supérieures ce qui est à l’avantage des Etats qui

peuvent avoir des législations nationales plus strictes.

La clause 3.1 (iv) du Shipman 98 relative à la langue de travail a également été amendée dans

un but de clarification. En effet, la langue commune de travail peut ne pas être l’anglais. La

clause fait uniquement état de la nécessité d’une langue commune à tout l’équipage nécessaire

à la bonne compréhension et le bon échange lors des opérations maritimes. Cet équipage doit

néanmoins avoir une maîtrise de l’anglais suffisante pour être en conformité avec l’obligation

de sécurité notamment pour les membres de l’équipage pouvant être amenés à utiliser les

moyens de communication du bord.

27 Renvoi Chapitre 2 La couverture des risques/ Section 2 La couverture de l’équipage

Page 25: A  le contrat de shipmanagement

CHAPITRE 2 LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES

L’étude des modalités d’exécution du contrat de gestion implique que soient énoncées, d’une

part, les obligations du ship manager (Section 1), d’autre part, les obligations de l’armateur

(Section 2).

SECTION 1 LES DROITS ET OBLIGATIONS DU SHIPMANAGER

1. Les obligations :

Les obligations du ship manager sont principalement listées à l’article 8 du contrat.

Concrètement, les obligations du gestionnaire sont des obligations découlant de la délégation

d’une prestation ou peuvent provenir de taches que l’armateur a volontairement souhaité

déléguer.

« Le ship manager a notamment une obligation d’agir avec soin (general duty of care) : S’il a

un pouvoir d’appréciation personnel et d’initiative, le ship manager « doit exécuter on contrat

avec compétence et diligence et accomplir sa mission de la manière la plus conforme aux

intérêts du mandant ». Celui-ci doit promouvoir et protéger les intérêts du propriétaire qui fait

en effet confiance au gestionnaire qu’il a choisi pour ses compétences. Pour autant, le ship

manager n’est tenu que d’une obligation de moyens et non de résultat28.

The Managers undertake to use their best endeavours to provide the

Management Services as agents for and on behalf of the Owners in accordance

with sound ship management practice and to protect and promote the interests

of the Owners in all matters relating to the provision of services hereunder.

Une précision doit être apportée quant à l’utilisation des termes “sound management practice”

soit les bonnes pratiques du shipmanagement. Ces bonnes pratiques ne dépendent en effet pas

de l’interprétation discrétionnaire que pourrait en faire un gestionnaire. Lors d’un différend,

l’appréciation de ce que sont de bonnes pratiques sera soumise à l’appréciation souveraine des

juges qui peuvent eux-mêmes appuyer leur interprétation sur le témoignage d’experts aux fins

28 I. Corbier, op.cit.

Page 26: A  le contrat de shipmanagement

de déterminer ce que sont ces bonnes pratiques dans le cadre de ce secteur d’activité. Il n’y a

donc pas dans ce cadre de textes et l’appréciation se fait au cas par cas.

Le ship manager prospecte également les marchés, conclut les contrats d’affrètement et de

transport, assure le navire, accomplit les formalités administratives, s’occupe des opérations

de vente ou d’achat de navire et, même parfois, tient une partie de la comptabilité de

l’armateur. Ces taches ne deviennent par ailleurs obligation que dans le cadre de la nature de

la gestion déléguée. Ainsi le shipmanager ne prospectera les marchés que si lui a été confiées

la gestion commerciale du navire. De même contracter des assurances ou gérer les litiges sont

des prestations optionnelles.

Le manager a également des obligations financières vis-à-vis du propriétaire. Le contrat de

Shipman est en effet un contrat conclu à titre onéreux ce qui confère un droit à rémunération

au ship manager toutefois, l’entretien et toutes les opérations afférentes et nécessaires à

l’exploitation d’un navire ne sont pas comprises dans ces « fees » et font l’objet d’un

deuxième arrangement financier entre les parties. Selon le type de gestion déléguée, le ship

manager pourra être amené à payer des coûts fixes, des coûts liés aux voyages comme les

soutes, ou des coûts « normaux » de gestion comme les équipages ou encore les prime

d’assurances. L’avantage de passer par des sociétés de ship management est ici visible en

particulier pour les petits armateurs. Ces sociétés gèrent pour les plus importantes des

centaines de navires ce qui leur permet de par leur importance et leur influence d’obtenir des

avantages financiers qu’un armateur seul n’aurait pas pu avoir. Dans le but de prévoir ces

dépenses qui incombent à l’armateur, le gestionnaire a l’obligation de présenter annuellement

un budget qui doit être annexé au contrat (Annexe C). Le désaccord des parties sur le budget

alloué pour l’exploitation du navire peut conduire à la rupture des relations contractuelles.

A l’échelle de la problématique sécurité/ sureté, le gestionnaire a l’obligation de respecter les

lois de l’Etat du pavillon dans l’accomplissement de sa mission et s’il est en charge de la

gestion technique du navire, il doit accepter d’être désigné par le propriétaire du navire

comme étant la « Company » au regard du code ISM ce qui entraine une série d’obligations

supplémentaires étudiées dans la 3ème partie de ce développement.

Le ship manager qui a donc plusieurs obligations a toutefois le devoir d’assumer ses

obligations dans les limites du contrat, le risque étant de se retrouver en position de rupture de

Page 27: A  le contrat de shipmanagement

contrat s’il exerce des actions en dehors de l’autorité qui lui est impartie, que ce soit de façon

implicite ou explicite. 29

2. Les droits :

Le premier droit du ship manager est fondamental et constitue une des bases de la relation,

c’est celui d’être payé par l’armateur. Les services rendus par le gestionnaire ne sont en effet

pas des services rendus à titre gratuit. Le montant de la rémunération est déterminé

annuellement et doit être spécifié dans la Box 14 Annual management fee. Le contrat de

Shipman énonce à cet égard à l’article 12 a) que :

2. Management Fee and Expenses

(a) The Owners shall pay to the Managers an annual management fee as stated

in Box 14 for their services as Managers under this Agreement, which shall be

payable in equal monthly instalments in advance, the first instalment (pro rata

if appropriate) being payable on the commencement of this Agreement (see

Clause 2 (Commencement and Appointment) and Box 2) and subsequent

instalments being payable at the beginning of every calendar month. The

management fee shall be payable to the Managers’ nominated account stated in

Box 15.

Le ship manager peut cependant retirer d’autres revenus de la gestion des navires.

L’article 16 du Shipman 2009 (ancien article 10 du S98) prévoit également un droit

relativement limité et encadré de sous-traitance pour le ship manager sous réserve de l’accord

du propriétaire. La limitation de ce droit est notamment due au fait que l’armateur choisit le

gestionnaire en raison de ses qualités. Il est à noter que même en cas de sous-traitance, le

gestionnaire reste responsable de la bonne exécution de ses obligations.

SECTION 2 LES OBLIGATIONS DE L’ARMATEUR :

Les obligations de l’armateur dépendent, dans le contrat Shipman 2009, de la gestion opérée

par le ship manager. Il est donc dans un premier temps important de bien faire attention aux

services offerts par le ship manager car en fonction de la gestion déléguée et ceci est

29 A. Ene, Mémoire op.cit.

Page 28: A  le contrat de shipmanagement

particulièrement vrai pour la gestion technique, les obligations de l’armateur changent.

L’article 9 distingue ainsi selon que le ship manager ait la gestion technique ou non :

(b) Where the Managers are providing technical management services in

accordance with Clause 4 (Technical Management), the Owners shall:

(i) report (or where the Owners are not the registered owners of the Vessel

procure that the registered

owners report) to the Flag State administration the details of the Managers as

the Company as required to comply with the ISM and ISPS Codes;

(ii) procure that any officers and ratings supplied by them or on their behalf

comply with the requirements of STCW 95; and

(iii) instruct such officers and ratings to obey all reasonable orders of the

Managers (in their capacity as the Company) in connection with the operation

of the Managers’ safety management system.

(c) Where the Managers are not providing technical management services in

accordance with Clause 4

La clause 9 (b)(i) énonce ainsi que l’armateur, en cas de délégation de la gestion technique

doit déclarer à l’administration de l’Etat du pavillon le gestionnaire technique comme étant la

« Company ». Cette obligation s’impose à l’armateur qu’il soit ou non le propriétaire du

navire. Dans le deuxième cas, l’armateur doit s’assurer que le véritable propriétaire c'est-à-

dire le propriétaire inscrit sur les registres ait fait le nécessaire auprès des autorités.

L’armateur dans le cadre de la gestion technique doit également s’assurer du respect des

normes STCW et doit s’assurer que les équipages obéissent au shipmanager dans le cadre du

plan de gestion de la sécurité. Il doit également s’assurer dans ce cas que l’équipage soit

familiarisé avec le système de gestion de la sécurité ou Safety Management System (SMS).

En cas de non délégation de la gestion technique, l’armateur a une obligation d’information

du gestionnaire quant à l’identité de la « Company » et tout changement relatif à cette

dernière doit être notifié le plus rapidement possible. L’Etat du pavillon doit également être

informé des changements et doit les ratifier ce qui donne lieu à une obligation de notification

de l’acceptation au ship manager.

La même distinction est faite selon que le gestionnaire ait la gestion de l’équipage ou non.

Cette distinction est nouvelle puisqu’introduite lors de la révision du Shipman 98. Ainsi, si le

shipmanager est également le crew manager, l’armateur aura pour obligations d’informer le

Page 29: A  le contrat de shipmanagement

ship manager si le navire doit passer dans une zone à risque et de payer pour les coûts

supplémentaires que pourra engendrer cette traversée. L’armateur a également une obligation

quant aux conditions de vie à bord de l’équipage qui doivent remplir certaines conditions.

Que le ship manager soit ou non le crew manager ou le gestionnaire technique, l’armateur a

des obligations financières vis-à-vis de son cocontractant. La première et principale obligation

est de payer le ship manager (article 9a)). Cette rémunération est généralement forfaitaire et

payée trimestriellement. Le contrat Shipman 2009 est toutefois venu introduire une nouvelle

disposition : le ship manager peut, en cas de paiement non effectués à la date convenue,

demander des intérêts au propriétaire. Dans le cadre de cette obligation pécuniaire, l’armateur

doit fournir les fonds nécessaires à l’exploitation du navire comme par exemple pour la

fourniture de soutes.

L’armateur a également l’obligation de contracter les assurances auprès du P&I et d’un

assureur commercial en vertu de l’article 10 du Shipman 2009 toutefois, il peut au titre de

l’article 7 (ancien article 3.4 du Shipman 98) demander au ship manager de les contracter à sa

place.

7. Insurance Arrangements

(only applicable if agreed according to Box 11).

The Managers shall arrange insurances in accordance with Clause 10

(Insurance Policies), on such terms as the Owners shall have instructed or

agreed, in particular regarding conditions, insured values, deductibles,

franchises and limits of liability.

Page 30: A  le contrat de shipmanagement

PARTIE 2

LA RESPONSABILITE DES PARTIES AU

CONTRAT

Page 31: A  le contrat de shipmanagement

L’un des problèmes qui existait avant la création du contrat Shipman était la différence qu’il

existait entre la responsabilité d’une société de ship management in-house et celle d’une

société de ship management indépendante. Le contrat édité par la Bimco a toutefois permis

d’unifier ces pratiques et de mettre en place un régime de responsabilité unique. L’unification

de ces différents régime de responsabilités devait en particulier permettre que le navire ne se

retrouve pas dans une situation qui ne relève ni de la responsabilité de l’armateur ni de celle

du ship manager (Chapitre 1).

A cet égard, les parties doivent prendre soin de couvrir les risques lié aux dommages que

pourrait causer et/ou subir un navire ou un équipage. La Bimco pose a cet égard une

obligation stricte d’assurances pour les partie (Chapitre 2).

Page 32: A  le contrat de shipmanagement

CHAPITRE 1 LES RESPONSABILITES DES PARTIES AU

CONTRAT

Le contrat de ship management pose le problème de la qualité du ship manager qui peut être

vu comme un armateur à la carte. De ce fait peut se poser la question de savoir si le transfert

de la qualité d’armateur peut également entrainer le transfert des responsabilités de ce dernier

vers son gestionnaire. Rien n’est moins sûr. Il conviendra donc d’étudier successivement le

domaine de responsabilité du ship manager (Section 1) et de celui de l’armateur (Section 2).

SECTION 1 LA MISE EN JEU DE LA RESPONSABILITE DU SHIPMANAGER

« Quel est le régime de la responsabilité contractuelle du gérant (§1), et comment ce dernier

peut-il s’en décharger (§2) ?»30Ces deux questions seront successivement étudiées.

§1 La responsabilité du ship manager

A. Régime de « responsabilité générale »

1. Entre les parties au contrat :

De manière générale et comme dans tous les contrats, la responsabilité du ship manager peut

être engagée en cas de manquement à ses obligations. Même si le ship manager a un pouvoir

d’appréciation personnelle et d’initiative, celui-ci doit accomplir sa mission de la façon la plus

conforme aux intérêts du mandant. L’article 22 du contrat de la Bimco, dans sa nouvelle

version, prévoit que le ship manager n’est pas responsable des dommages, avaries ou

dépenses de quelque nature que ce soit, survenus dans l’accomplissement de ses prestations.

Le contrat ne change rien en l’espèce selon Isabelle Corbier, il laisse à la charge du

propriétaire toutes les obligations qu’il aurait assumées s’il avait géré lui même son navire31.

Le contrat de shipmanagement s’analysant comme vu plus haut, comme un contrat de mandat,

le mandataire reste responsable envers le mandant du dommage causé par sa faute, même si

elle n’est ni dolosive, ni lourde, ni grave (art 1992 al 1er cciv). Ainsi « chaque fois qu’une

30 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y.

Tassel, op.cit., n°333.04 p. 274 31 I. Corbier, op.cit.

Page 33: A  le contrat de shipmanagement

faute est commise par le ship manager dans l’accomplissement de son mandat, faute ayant

causé un dommage à un tiers, sa responsabilité viendra doubler celle de l’armateur »32.

2. A l’égard des tiers :

A l’égard des tiers, le ship manager n’engage sa responsabilité contractuelle

qu’exceptionnellement. Est en effet prévu à l’article17 c) du Shipman 2009 que le propriétaire

doit garantir le ship manager contre toutes les réclamations des tiers. La société Bibby Ship

management fait d’ailleurs état de cette obligation de protection de l’amateur dans ses

conditions générales33 et énonce ainsi que :

the Client shall indemnify and keep indemnified Bibby Ship Management

(Group) Limited against any claims made by third parties in respect of any such

loss or damage

Le ship manager reste toutefois personnellement responsable vis-à-vis des tiers en cas de

délit ou quasi-délit commis dans l’exécution de sa mission.

De même, si le ship manager ne signale pas aux tiers qu’il n’agit qu’en tant qu’agent – ‘as

agent only’- comme en dispose l’article 3 du contrat Shipman 2009, celui-ci peut voir sa

responsabilité engagée.

B. Un régime de responsabilité particulier à chaque type de gestion :

1. Responsabilité de la société en cas de gestion commerciale :

Sur le plan de la responsabilité, la mise en cause d’une société de ship management est plus

difficile que celle d’un gérant. « La société de ship management ne pourra ainsi voir sa

responsabilité engagée, dans le cadre d’une gestion commerciale, qu’en cas de faute lourde ou

intentionnelle et jamais pour de simples erreurs commerciales »34.

Dans le cas où la société de shipmanagement ne s’occuperait que de la gestion nautique, celle-

ci ne pourra voir sa responsabilité engagée qu’en cas de faute lourde ou intentionnelle.

32 P. BONASSIES, C. SCAPEL, op.cit. n°279 p.196

33 Voir Annexes

34 M. Ndende, La mutation des enterprises du secteur des transports maritimes, Lamy Line, DMF 1992 n°159

Page 34: A  le contrat de shipmanagement

La responsabilité de la société de ship management peut également découler d’une

distinction : selon que les actes aient été décidés dans le cadre strict de la gestion ou décidés

dans le cadre de son titre de représentant de l’armateur. « Tous les contrats conclus pour le

compte de l’armateur ne pourront alors engager que la responsabilité de ce dernier,

exactement comme s’il gérait lui même son navire »35. En résulte que tout accident qui

surviendrait et causerait un dommage à l’équipage engagé pour le compte de l’armateur ou au

navire relèverait de la responsabilité de l’armateur devant alors assumer les possibles conflits

de travail et devra indemniser pour le préjudice subi.

2. Responsabilité en cas de gestion technique :

Comme vue précédemment en cas de gestion technique, la responsabilité du ship manager

peut être quelque peu modifiée du fait, entres autres, de sa désignation en tant que ‘Company’

au titre du code ISM. On peut estimer que « lorsque c’est la totalité de la gestion technique

qui est assumée par le ship manager, […] la responsabilité de celui-ci doit être assimilée à

celle d’un armateur, sans toutefois nécessairement effacer celle de l’armateur en titre »36.

3. Responsabilité en cas de manning :

Dans le cadre de la gestion de l’équipage, le ship manager est responsable personnellement

vis-à-vis des tiers au contrat. Cette responsabilité est généralement limitée à sa faute lourde et

a fortiori à sa faute intentionnelle. Certains contrats y ajoutent un plafond de responsabilité

qui se justifie doublement compte tenu de la valeur élevée des navires qui sont gérés et de

l’impossibilité pour le ship manager de s’assurer au-delà d’un montant relativement faible37.

Les marins employés par la société de manning sont couverts par une clause spécifique. Le

contrat comprend une clause Himalaya à l’article 17 (d) du Shipman 2009 (ancien article 11.4

Shipman 98) rédigée comme suit :

(d) “Himalaya” - It is hereby expressly agreed that no employee or agent of the

Managers (including every sub-contractor from time to time employed by the

Managers) shall in any circumstances whatsoever be under any liability

whatsoever to the Owners for any loss, damage or delay of whatsoever kind

arising or resulting directly or indirectly from any act, neglect or default on his

part while acting in the course of or in connection with his employment and,

35 M. Ndende, op.cit.

36 P. BONASSIES, C. SCAPEL, op.cit. n°279 p.196

37 JP. Beurier, P. Chaumette, P. Hesse, AH. Mesnard, M. Ndende, G. Proutière-Maulion, R. Rezenthel, Y.

Tassel, op.cit., n°333.25 p. 276

Page 35: A  le contrat de shipmanagement

without prejudice to the generality of the foregoing provisions in this Clause 17

(Responsibilities), every exemption, limitation, condition and liberty herein

contained and every right, exemption from liability, defence and immunity of

whatsoever nature applicable to the Managers or to which the Managers are

entitled hereunder shall also be available and shall extend to protect every such

employee or agent of the Managers acting as aforesaid and for the purpose of

all the foregoing provisions of this Clause 17 (Responsibilities) the Managers

are or shall be deemed to be acting as agent or trustee on behalf of and for the

benefit of all persons who are or might be their servants or agents from time to

time (including sub-contractors as aforesaid) and all such persons shall to this

extent be or be deemed to be parties to this Agreement.

Cette clause dispose que les employés du ship manager disposent des mêmes « protections »

contractuelle vis-à-vis de leur responsabilité que le gestionnaire.

§2 La limitation de responsabilité

Si on estime que la responsabilité du ship manager peut être assimilée à celle d’un armateur,

on doit également pouvoir estimer que celui-ci pourra bénéficier de la même limitation de

responsabilité dont bénéficie l’armateur du fait de la Convention de 197638.

1. La force majeure :

L’article 17 (a) du contrat Shipman 2009 énonce :

(a) Force Majeure - Neither party shall be liable for any loss, damage or delay

due to any of the following force majeure events and/or conditions to the extent

that the party invoking force majeure is prevented or hindered from performing

any or all of their obligations under this Agreement, provided they have made

all reasonable efforts to avoid, minimise or prevent the effect of such events

and/or conditions:

(i) acts of God;39

(ii) any Government requisition, control, intervention, requirement or

interference;

(iii) any circumstances arising out of war, threatened act of war or warlike

operations, acts of terrorism,

sabotage or piracy, or the consequences thereof;

38 « Convention sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes » du 19 novembre 1976.

39 P. BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit. n°1075. La notion d’Acte de Dieu est une vieille notion de la Common

law qui n’a fait l’objet d’aucune définition ou jurisprudence. A ce titre le Doyen Rodière évoquait la foudre. « Il

est sur que, du point de vue du droit français, le caractère divin de l’acte de Dieu, s’il s’en trouvait, en ferait

nécessairement un évènement de force majeure non imputable » au shipmanager.

Page 36: A  le contrat de shipmanagement

(iv) riots, civil commotion, blockades or embargoes;

(v) epidemics;

(vi) earthquakes, landslides, floods or other extraordinary weather conditions;

(vii) strikes, lockouts or other industrial action, unless limited to the employees

(which shall not include the Crew) of the party seeking to invoke force majeure;

(viii) fire, accident, explosion except where caused by negligence of the party

seeking to invoke force majeure; and

(ix) any other similar cause beyond the reasonable control of either party.

Définit par G. Cornu comme « un événement imprévisible, irrésistible qui, provenant d’une

clause extérieure au débiteur d’une obligation ou à l’auteur d’un dommage le libère de son

obligation ou l’exonère de sa responsabilité »40, cette clause fait partie des clauses modifiées

lors de la révision du contrat par la Bimco.

La nouvelle rédaction de la clause est basée sur le modèle de la Chambre Internationale de

Commerce (ICC International Chamber of Commerce) créée en 2003 et non plus sur le

modèle « standard » crée par la Bimco encore utilisée dans de nombreux autres contrats.

Légèrement revu par rapport au contrat Shipman 98, la nouvelle clause prévoit que dans

certains cas énumérés à l’article 17(a) (i) à (ix), les parties ne seront pas responsables des

dommages matériels ou corporels dans la mesure où elles ont tout tenté pour éviter ou tout du

moins du moins prévenir ou minimiser les conséquences de l’évènement.

Pus récemment et du fait de l’actualité au Japon, la Bimco, par une circulaire spéciale du 28

avril 2011 a rajouté une nouvelle clause intitulée « Bimco Radioactivity clause for Time

Charter Parties » suite aux évènements de Fukushima. A voir si cette clause ne fait pas l’objet

dans le future d’une introduction dans tous les contrats de la Bimco comme évènement de

force majeur.

2. En cas de manquement à ses obligations contractuelles :

En cas de manquement à ses obligations, le ship manager peut, selon les contrats voir la limite

de sa responsabilité varier depuis l’absence totale de responsabilité jusqu’à la limitation pour

un montant maximum déterminé ce qui est en l’espèce le cas dans le contrat de la Bimco.

40 G. Cornu, Vocabulaire juridique, 7

ème édition, 2006, PUF

Page 37: A  le contrat de shipmanagement

(b) Liability to Owners

(i) Without prejudice to Sub-clause 17(a), the Managers shall be under no

liability whatsoever to the Owners for any loss, damage, delay or expense of

whatsoever nature, whether direct or indirect, (including but not limited to loss

of profit arising out of or in connection with detention of or delay to the Vessel)

and howsoever arising in the course of performance of the Management

Services UNLESS same is proved to have resulted solely from the negligence,

gross negligence or wilful default of the Managers or their employees or agents,

or sub-contractors employed by them in connection with the Vessel, in which

case (save where loss, damage, delay or expense has resulted from the

Managers’ personal act or omission committed with the intent to cause same or

recklessly and with knowledge that such loss, damage, delay or expense would

probably result) the Managers’ liability for each incident or series of incidents

giving rise to a claim or claims shall never exceed a total of ten (10) times the

annual management fee payable hereunder.

En effet, sa responsabilité ne peut dépasser dix fois ses honoraires annuels. Cette limitation

qui instaure un équilibre entre les fonds reçus par le ship manager et le montant des primes

d’assurances joue que le dommage ait été causé par sa propre négligence ou par la négligence

de ses préposés.

Le gestionnaire peut également se voir indemniser s’il est reconnu ne pas avoir commis de

faute ayant entrainé un dommage. Si le montant d’un sinistre survenu dans le cadre de ses

attributions dépasse le montant de la limitation, le propriétaire du navire doit indemniser le

ship manager. Cette clause d’indemnisation ne s’applique toutefois pas si la limitation de

responsabilité est écartée.

Cette limitation à dix fois les honoraires annuels a été mise au place aux fins de créer un juste

équilibre entre les fonds reçus par le gestionnaire d’une part et la partie de ces fonds reversés

à des fins d’assurance d’autre part.

§3 La mise en jeu de la responsabilité du shipmanager dans la pratique

En pratique, la responsabilité du gestionnaire est rarement recherchée celui-ci agissant en tant

que mandataire de l’armateur. De plus, les entreprises maritimes ont généralement recours à

l’arbitrage en cas de différend. La clause est contenue à l’article 23 du Shipman 2009 (ancien

article 19 du Shipman 98). Quelques importantes décisions concernent néanmoins la

responsabilité du ship manager.

Page 38: A  le contrat de shipmanagement

Un arrêt de la House of Lords des 2,3,4,5 et 9 avril 1984 relatif au droit du propriétaire du

navire d’invoquer la limitation de sa responsabilité peut ainsi être cité. Dans les faits, des

dommages avaient été causé à un pipeline sous-marin par l’ancre du « Marion ». Le capitaine

du navire utilisant d’anciennes cartes de navigations – et ce en dépit de l’existence de cartes

plus récentes à bord du navire - sur lesquelles l’oléoduc ne figurait pas, avait jeté

involontairement l’ancre sur l’installation. La société de shipmanagement qui avait recruté le

capitaine fut reconnue coupable aux motifs qu’elle n’avait pas suffisamment contrôlé ce qui

se passait à bord de ses navires. Le gestionnaire et le propriétaire assurés par le même P&I

Club41, le club dut verser 25 millions de dollars en réparation des dommages au lieu du

million que le propriétaire aurait pu invoquer s’il n’avait pas été déchu de son droit à invoquer

la limitation de responsabilité, ce dernier ayant délégué la gestion de l’équipage à la société de

ship management. C’est une chance pour le gestionnaire que les deux parties aient été

assurées par le même P&I car si tel n’avait pas été le cas, le ship manager aurait perdu tout

moyen de limiter sa responsabilité et tout moyen de défense envers le propriétaire, les

propriétaires de l’oléoduc étant des tiers au contrat de gestion. Le ship manager n’aurait pu se

retourner contre le propriétaire qu’en qualité de co-assuré42.

Plus récemment, une shipmanagement fut condamnée pour son rôle dans l’accident d’un

porte-conteneurs. En novembre 2007, Le ‘Cosco Busan’ heurta une pile du Oakland Bay

Bridge à San Francisco, heurt occasionnant des dommages au pont, au navire et le

déversement de plusieurs tonnes de carburants dans la baie. La société Fleet Management Ltd

basée à Hong Kong fut accusée par les juges fédéraux américains de fausses déclarations, de

« négligence criminelle » et de falsification de documents. La société du bord aurait en effet

falsifié la planification du voyage du navire pour en cacher les vraies données. Fleet

Management Ltd a du verser 10 millions de dollars de dommages et intérêts selon le

département de la justice américaine43.

SECTION 2. LA RESPONSABILITE DU PROPRIETAIRE DU NAVIRE DANS LE CONTRAT DE SHIP

MANAGEMENT :

41 Renvoi Chapitre 2 La couverture des risques

42 A. Ene, op.cit.

43 Article de la Bimco de Février 2010

https://www.bimco.org/Members%20Area/News/General_News/2009/08/18_Cosco_Busan_oil_spill.aspx

Page 39: A  le contrat de shipmanagement

La responsabilité de l’armateur peut provenir de différentes sources selon que le navire ait

subi ou ait causé un dommage. En général, peuvent être distinguées deux types de

responsabilités : la responsabilité extracontractuelle par laquelle l’armateur est responsable

tant de sa faute personnelle que de la faute de ses préposés ou de celle du navire et la

responsabilité contractuelle par laquelle l’armateur est responsable de la bonne exécution des

dispositions des contrats conclus par lui ou par ses préposés ou représentant. Dans ce cas, le

régime contractuel applicable détermine alors les modalités de la responsabilité de l’armateur.

A l’égard du ship manager l’armateur peut être principalement responsable du non paiement

de la rémunération. Sa responsabilité est dans les autres cas la responsabilité « normale »

qu’encourt l’armateur.

A l’égard des tiers, propriétaire du navire et ship manager peuvent se voir condamner

solidairement. C’est en effet ce qu’il est ressorti d’un arrêt CA Paris 2 mars 1993 : les deux

parties ont été tenu pour responsable, le premier pour avoir frété un navire en état

d’innavigabilité, le second pour avoir fourni un équipage incompétent.

CHAPITRE 2 LA COUVERTURE DES RISQUES :

Indispensable pour le propriétaire du navire, l’assurance n’en est pas moins indispensable

pour le ship manager qui doit aussi penser à sa responsabilité propre à l’égard de leur

cocontractant et des tiers et donc à couvrir les risques liés aux dommages que pourrait subir et

/ou causer un navire ou un équipage. Seront donc étudiées successivement l’assurance du

navire (Section 1) et l’assurance de l’équipage (Section 2).

SECTION 1 L’ASSURANCE DU NAVIRE :

Pour couvrir tous les risques qu’un navire peut subir ou peut causer, il est nécessaire que

l’armateur et le ship manager souscrivent des garanties auprès d’un P&I Club44 (§1) et d’un

assureur « traditionnel » au titre d’une police corps et machines (§2).

44 Protection and Indemnity Clubs. Voir ci-dessus paragraphe 1.

Page 40: A  le contrat de shipmanagement

§1 Les P&I Clubs :

3. La couverture P&I :

L’article 10 a) ii) du Shipman 2009 pose une obligation de couverture auprès d’un P&I :

(ii) protection and indemnity risks (including but not limited to pollution risks,

diversion expenses and, except to the extent insured separately by the Managers

in accordance with Sub-clause 5(b)(i), Crew Insurances;

Les ‘Protection and Indemnity Clubs’ ont historiquement été crées au milieu du XIXème

siècle en Angleterre afin de couvrir la responsabilité civile des armateurs et des affréteurs de

navires que les assureurs traditionnels ne garantissaient pas. Ces clubs sont des mutuelles

d’armateurs prenant en charge les risques de responsabilité notamment celles non prises en

charge par l’assurance corps (responsabilité civile, une partie des avaries communes,

l’abordage ou encore la pollution) ainsi que les risques financiers consécutifs45.46 Ces

contrats sont historiquement renouvelés au 20 février 12 :00 GMT pour une période d’un an ;

date qui marquait la reprise de la navigation dans la mer Baltique (fonte des glaces).47 95% de

la flotte mondiale est aujourd’hui assurée en P&I ceci s’expliquant par le caractère

incontournable de celle-ci. Par exemple, il est nécessaire pour naviguer dans les eaux

américaines de posséder un COFR48 hors si l’armateur n’est pas couvert par un P&I, il ne peut

obtenir ce certificat et ne peut donc pas se rendre aux Etats-Unis ce qui le limite

géographiquement et commercialement.

Au début de chaque nouvel exercice, le conseil d’administration du Club (Board) constitué

des principaux armateurs se réunit pour décider du montant des primes. Le principe veut que

le montant de la prime payée soit « égal » aux sinistres indemnisés. Etant toutefois quelque

peu difficile d’envisager le montant des sinistres pour l’exercice à venir, la facturation de cette

prime, le plus généralement exprimée en dollars, est ‘flexible’. Sera ainsi appelée un premier

montant de la prime en début d’année : l’Advanced Call correspondant à un pourcentage

fonction du Club, correspondant au total des sinistres payés lors de l’exercice précédent. Sont

également déterminés en début d’année, les Deferred Call qui sont budgétisés et qui sont

45 Les DIC – Dommages immatériels consécutifs par opposition aux DINC – Dommages immatériels non

consécutifs. 46 P. BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit., n°1331 p915

47 Site FFSA, L’assurance de responsabilité civile des armateurs et transporteurs maritimes

48 COFR - Certificate Of Financial Responsability. Ce certificat est délivré par le Corps de Garde-côtes des

Etats-Unis – United States Coast Guard (USCG) – pour une période de 3 ans.

Page 41: A  le contrat de shipmanagement

généralement appelées sur les exercices suivants. Ces deux ‘calls’ sont une estimation de ce

qui pourra être rappelé à la fin de l’exercice (Estimated Total Call). Le surplus des cotisations

n’est pas ‘rendu’ à l’armateur mais va alimenter une cagnotte (Free reserve) c'est-à-dire un

fond de réserve du club.

Dans le cadre de cette assurance qui peut être souscrite par l’armateur ou par le gestionnaire,

le ship manager doit, dans le premier cas, apparaitre en tant que co-assuré49 pour bénéficier de

la pleine couverture. Ce statut est important pour le gestionnaire car celui-ci se voit confier

plusieurs tâches de l’armateur avec les responsabilités y afférentes et encourt donc de gros

risques commerciaux en cas de non désignation comme tel. Le statut de co-assuré lui donne

en effet le bénéfice de la couverture pleine et entière.

Selon la Bimco, il est en effet très important que le ship manager apparaisse bien comme co-

assuré car dans beaucoup de juridictions le ship manager apparait comme le « ship

operator »50 du navire. Ainsi si le propriétaire omet de nommer le gestionnaire en tant que co-

assuré, ce dernier devra le demander car le coût d’une couverture P&I et Corps& Machines

prise séparément n’est pas économiquement intéressant. Ces coûts prohibitifs sont d’autant

plus inutiles que le ship manager peut être nommé en tant que co-assuré, sans aucun frais

supplémentaires sur les polices du propriétaire51. L’inverse peut également être vrai et les

coûts être excessifs pour un petit armateur dont les navires seraient gérés par une des grandes

sociétés de ship management. La société Marfret, transporteur de marchandises

conteneurisées, passe ainsi par son ship manager, V.ships pour s’assurer car cette dernière

mutualise ses risques dans la flotte ce qui lui revient moins cher.

De nombreux exemples illustrent l’importance d’être co-assuré pour le ship manager comme

l’exemple d’un navire ayant coulé suite une explosion due à la maintenance du navire à

l’extérieur d’un port et ayant entrainé la mort de trois personnes. En l’espèce, le ship manager

qui supervisait les opérations était rapidement devenu la cible à abattre des assureurs. Co-

49 La notion d’assuré additionnel et différente de la notion de co-assuré. Dans le premier cas, le shipmanager

bénéficie de la couverture pleine et entière alors que le statut de co-assuré ne lui permet que de rediriger un

recours qui serait fait à tort contre lui alors qu’il aurait du être exercé contre l’armateur. 50 Le shipmanager peut être le ship operator du navire toutefois le ship operator n’est pas forcément le

shipmanager. Le ship operator peut être l’armateur ou encore l’affréteur à temps. 51 “Ship managers need to be co-assured because the economics of ship management are based on a

management fee structure that does not envisage the manager purchasing separate P&I and hull and machinery

cover. The costs to the shipmanager of obtaining separate insurance to cover his interests up to the full value of

the ship (for hull risks) and for all liabilities that might possibly be passed to him (for P&I risks) are prohibitive

and unnecessary – especially as this cover is available to the owners for no additional cost as part of their

standard marine insurances”. Article de la Bimco, Bimco’s view on the importance of co-assurance, Octobre

2005, site internet de la Bimco

Page 42: A  le contrat de shipmanagement

assuré sur les polices d’assurances du propriétaire, il a bénéficié de l’assistance de la

protection des assureurs P&I et corps et machines. S’il ne l’avait pas été, il n’aurait pu

bénéficier d’aucun degré de protection s’exposant ainsi à être potentiellement responsable des

dommages corporels, du sauvetage, de l’enlèvement de l’épave ainsi que de nombreux autres

coûts. La perte aurait alors été considérablement plus élevée que le montant de la

rémunération du ship manager52.

Certains assureurs comme l’ITIC font d’ailleurs de la désignation « co-assuré » une obligation

notamment dans le cadre de la RC53 professionnelle des métiers maritimes. Non pas pour

éviter aux ship managers de voir leur responsabilité recherchée mais pour les protéger contre

tout sinistre qui pourrait mettre en jeu leur responsabilité alors que le dommage relèverait de

la responsabilité seule et exclusive du propriétaire. Ce statut évite également à l’ITIC de

couvrir la navigation.

Cette position de co-assuré sur la police P&I a néanmoins une contrepartie. Le gestionnaire

pourra en effet être tenu pour solidairement responsable en cas de non-paiement des primes

dues au titre de la couverture si elles ne sont pas réglées par l’armateur.

Le gestionnaire qui accepte d’être tenu pour responsable en cas de non-paiement des primes

bénéficiera au regard des pratiques (non uniformisées) des P&I Club d’un statut ‘complet’ de

co-assuré.

L’article 10 c) du Shipman 2009 énonce ainsi que :

(c) the Owners’ Insurances name the Managers and, subject to underwriters’

agreement, any third party designated by the Managers as a joint assured, with

full cover. It is understood that in some cases, such as protection and

indemnity, the normal terms for such cover may impose on the Managers and

any such third party a liability in respect of premiums or calls arising in

connection with the Owners’ Insurances.

If obtainable at no additional cost, however, the Owners shall procure such

insurances on terms such that neither the Managers nor any such third party

shall be under any liability in respect of premiums or calls arising in connection

with the Owners’ Insurances. In any event, on termination of this Agreement in

accordance with Clause 21 (Duration of the Agreement) and Clause 22

(Termination), the Owners shall procure that the Managers and any third party

designated by the Managers as joint assured shall cease to be joint assured

52 Article de la Bimco, op.cit.

53 Responsabilité civile

Page 43: A  le contrat de shipmanagement

and, if reasonably achievable, that they shall be released from any and all

liability for premiums and calls that may arise in relation to the period of this

Agreement;

Il est à noter que l’alinéa 2 vient contredire les usages en énonçant que ni le manager ni les

tiers ne peuvent être tenus pour responsable en cas de rappel de primes. Les P&I Club se

réservent toutefois le droit de demander le paiement de la prime au co-assuré peu important

les arrangements contractuels entre le gestionnaire et le propriétaire.

Le problème a été soulevé par la Bimco de savoir ce qu’il se passe lorsque le P&I demande au

manager de payer après la fin du contrat de ship management. En effet, s’il est mis fin au

contrat de gestion suite à une faute de l’armateur (Article 22 a) Owners’ or managers’default),

le ship manager peut se retrouver dans l’obligation de payer du fait de sa qualité de co-assuré.

Puisque le montant total de la prime due ne peut être quantifié qu’une fois l’exercice clos, le

manager est potentiellement exposé au risque d’un paiement de prime et ce que l’armateur

fasse le nécessaire pour le retirer de la couverture ou jusqu’à la date de fin de la police soit le

20 février de l’année suivante. Reconnaissant que d’autres mécanismes existent, la clause a

été amendée dans la dernière version du contrat pour exiger des armateurs qu’ils libèrent le

ship manager de toute responsabilité future si cela est « raisonnablement réalisable ». La

Bimco recommande vivement, à ce titre, que les gestionnaires prennent leurs dispositions

pour couvrir ce risque potentiel.

4. Freight, Demurrage and Defence :

Le nouveau contrat Shipman 2009 fait état d’une couverture supplémentaire mais accessoire à

l’article 10 a) iv) :

(iv) such optional insurances as may be agreed (such as piracy, kidnap and

ransom, loss of hire and FD & D) (see Box 12)

La police FD&D – Fret, Surestaries et Défense – est apparue au 19ème siècle mais ne s’est

développée qu’au 20ème

dans le but de répondre à la demande croissante des armateurs et

opérateurs maritimes de garantie pour les services juridiques, la prévention des pertes, les

réclamations et une assistance pour les coûts engendrés par les litiges. Alors que le P&I ne

couvre que les responsabilités ‘réelles’ et les frais juridiques qui en découlent, la FD&D

couvre propriétaires et opérateurs au titre des frais juridiques et autres frais engagés pour leur

Page 44: A  le contrat de shipmanagement

défense contre les réclamations découlant de leurs activités commerciales ou de la gestion des

sinistres. Le ship manager n’est pas uniquement protégé en tant que défendeur, il l’est

également en tant que demandeur car ce peut être une couverture d’attaque.

Cette couverture, non obligatoire, est discrétionnaire pour les assureurs. Elle est en effet

laissée à l’appréciation des assureurs qui vont considérer si le ship manager attaque à tort ou à

raison. Un accord écrit du P&I Club est nécessaire avant d’entreprendre toute démarche car

sinon, il n’est pas certain que les frais soient pris en charge.

Durant la révision du contrat Shipman, la Bimco a considéré qu’il était bon d’inclure cette

assurance au contrat pour l’armateur et d’en faire bénéficier le ship manager en tant que co-

assuré. Un problème est toutefois apparu dans la pratique : en nommant le gestionnaire co-

assuré, cela empêche l’assurance de jouer en cas de différend armateur versus ship manager,

ce type de litige étant de facto exclus par les assureurs. Il est donc préférable que gestionnaire

et armateur contractent chacun leur propre FD&D pour bénéficier pleinement des garanties

offertes. Ce choix optionnel doit apparaître clairement dans la Part I de l’accord Shipman

2009 Box 12. Optional Insurances.

5. La RC professionnelle :

Le ship manager peut également souscrire une assurance couvrant les risques professionnels –

Professional Indemnity Insurance – ou une assurance erreurs et omissions – Error & Omision

Insurance (E&O) – qui vont permettre au gestionnaire d’être couverts pour les réclamations

faites par le propriétaire du navire contre lui jusqu’à un certain plafond, les réclamations des

tiers contractants contre lui ou encore contre les réclamations des tiers contre lui non

couvertes par le P&I .

§2 La couverture des ‘corps’ de navires

6. L’assurance Corps et Machines :

L’article 10 a) i) dispose que :

(a) at the Owners’ expense, the Vessel is insured for not less than its sound

market value or entered for its full gross tonnage, as the case may be for:

(i) hull and machinery marine risks (including but not limited to crew

negligence) and excess liabilities;

Page 45: A  le contrat de shipmanagement

Un changement notable a été apporté dans le wording de cette clause par rapport au contrat de

Shipman 98. Etait fait référence dans cette version à « l’habituelle couverture corps et

machines ». Le terme « habituel » a été retiré au profit de l’expression « with the best practice

of prudent owners » soit les meilleures pratiques d’un propriétaire prudent qui contracte avec

des assureurs fiables et de bonne réputation54.

Sub-clauses 10(a)(i) through 10(a)(iv) all in accordance with the best practice

of prudent owners of vessels of a similar type to the Vessel, with sound and

reputable insurance companies, underwriters or associations (“the Owners’

Insurances”);

Il est important que le ship manager soit nommé en tant que co-assuré55 sur cette police car si

le navire subit des dommages peut importe qui est responsable, l’assureur indemnise et ne

cherche pas à se retourner contre le ship manager.

La police corps et machines a été modifiée au 1er juillet 2010 pour prendre la forme d’un

« package » de garanties. Sont ainsi compris dans cette couverture : les dommages aux

navires, les dommages aux tiers en cas d’abordage avec un autre navire ou de heurt avec un

objet fixe ou flottant (couverts en H&M et P&I), la contribution à l’avarie commune ainsi que

les frais de sauvetage et d’assistance. De cet ensemble sont exclus certains risques qui devront

être couverts par une autre assurance ou qui devront être rachetés auprès de l’assureur corps et

machines.

7. Les couvertures additionnelles:

Des couvertures annexes peuvent venir se greffer à cette assurance. Ainsi l’armateur peut

souscrire une garantie dite de Bonne arrivée régit en droit français par l’article L 173-7 du

code des assurances. Cette garantie représente un capital souscrit par l’assuré qui lui sera

versée par les assureurs en cas de délaissement ou de perte totale résultant d’un évènement

garanti au titre de la police H&M56. Cette assurance répond au besoin d’une garantie

complémentaire car la perte du navire suite à un évènement maritime entraîne préjudices et

difficultés d’exploitation pour l’assuré. De tels dommages immatériels ne sont pas couverts en

H&M : le capital garanti sur bonne arrivée ne se confond pas avec la valeur agréée, il lui est

54 Théorie du bon père de famille c'est-à-dire d’une personne qui agit avec prudence et diligence

55 Voir la note de bas de page sur la différence entre les notions de co-assuré et assuré additionnel

56 Site internet du groupe Eyssautier, Corps et moteurs, http://www.groupe-eyssautier.com/produits/corps.html

Page 46: A  le contrat de shipmanagement

complémentaire. Cette assurance est généralement consentie pour un capital de l’ordre de 10 à

20% de la valeur agréée du navire57.

L’armateur peut en effet vouloir s’assurer contre les risques de guerre (War risks) exclus de la

couverture classique. A l’intérieur de ce risque se distinguait la piraterie dite lucrative garantie

au titre des risques ordinaires et la piraterie dite politique garantie au titre des risques de

guerre. Cette distinction n’est plus faite depuis le 1er juillet 2010 ce qui est à l’avantage de

l’assuré car en RG58, il n’y a pas de franchise.

Les actes de piraterie et plus généralement les actes illégaux peuvent faire l’objet d’une

couverture dite K&R – Kidnap & Ransom ou Kidnapping & Rançon. Cette assurance couvre

l’armateur en cas de ‘consequential losses’ résultant d’une demande directe de rançon suite à

des actions illégales commises contre le propriétaire, le navire ou l’équipage. Sont couverts

tous les cas de kidnapping et de rançons qui impliqueraient le navire de l’assuré ou son

équipage ou les personnes légalement présentes à bord au moment de l’incident et/ou leurs

actifs sans tenir compte du motif de l’attaque.

Le propriétaire peut également se prémunir contre les pertes de revenus que peuvent entrainer

des accidents ou des pannes entrant dans la police corps et machines ou couverts au titre des

risques de guerre. Cette garantie « pertes pécuniaires » (Loss of Hire) permet de déterminer

une indemnité journalière forfaitaire déterminée au jour de la souscription et permettant une

prise en charge partielle de la perte de revenus.

SECTION 2 LA COUVERTURE DE L’EQUIPAGE :

8. La crew insurance :

L’article 5 b) du Shipman 2009 énonce que :

(b) Crew Insurances

(only applicable if Sub-clause 5(a) applies and if agreed according to Box 10)

The Managers shall throughout the period of this Agreement provide the

following services:

57 Site FFSA, L’assurance corps de navires

58 Risques de guerre

Page 47: A  le contrat de shipmanagement

(i) arranging Crew Insurances in accordance with the best practice of prudent

managers of vessels of a similar type to the Vessel, with sound and reputable

insurance companies, underwriters or associations. Insurances for any other

persons proceeding to sea onboard the Vessel may be separately agreed by the

Owners and the Managers (see Box 10);

(ii) ensuring that the Owners are aware of the terms, conditions, exceptions and

limits of liability of the insurances in Sub-clause 5(b)(i);

(iii) ensuring that all premiums or calls in respect of the insurances in Sub-

clause 5(b)(i) are paid by their due date;

(iv) if obtainable at no additional cost, ensuring that insurances in Sub-clause

5(b)(i) name the Owners as a joint assured with full cover and, unless otherwise

agreed, on terms such that Owners shall be under no liability in respect of

premiums or calls arising in connection with such insurances.

(v) providing written evidence, to the reasonable satisfaction of the Owners, of

the Managers’ compliance with their obligations under Sub-clauses 5(b)(ii),

and 5(b)(iii) within a reasonable time of the commencement of this Agreement,

and of each renewal date and, if specifically requested, of each payment date of

the insurances in Sub-clause 5(b)(i).

Cette assurance qui constitue un régime de protection sociale des équipages et qui, dans la

pratique n’est malheureusement pas toujours complète, vient en complément des couvertures

que peut souscrite un ship manager auprès d’un P&I Club. Celui-ci peut en effet souscrire une

couverture P&I en la limitant uniquement à l’équipage couvrant ainsi les cas de « Crew

negligence » et l’ « Employer’s liability » ou responsabilité de l’employeur.

Une critique peut alors être émise : en effet si le ship manager est co-assuré sur la couverture

P&I de l’armateur, il n’est pas forcément nécessaire qu’il contracte sa propre assurance car

cela viendrait faire doublon.

9. La crew negligence 59

Dans la pratique, l’ITIC60 a vu une augmentation des cas de recours contre les ship managers

ayant pour but la reconnaissance de la négligence de l’équipage.

59 C.KIRK, Exclude crew negligence from your management contract, Journal of the Institute of Chartered

Shipbrokers

60 L’International Transport Intermediaries Club.

Page 48: A  le contrat de shipmanagement

La plupart des contrats de gestion se font sur la base du contrat Shipman, contrat plus ou

moins amendé. Ce qui inquiète toutefois Charlotte Kirk est la disparition de la ‘Crew

negligence clause’ des contrats car selon cette clause Bimco, il est clair que le ship manager

n’est pas tenu pour responsable de la négligence de l’équipage (ce qui relève du P&I) mais

pourrait être tenu comme tel s’il a été négligent dans la fourniture de l’équipage. Le fait que

le chef mécanicien commette une erreur ne veut pas dire que le gestionnaire ait été négligent.

Ainsi si cette clause n’est pas incluse au contrat, le ship manager pourra voir sa responsabilité

recherchée.

Cette clause est d’autant plus importante si le manager est l’employeur de l’équipage

(Crewman B) car dans ce cas, il est responsable en cas de faute.

Il est également important d’inclure cette clause pour que le gestionnaire puisse, en cas de

pollution, se retourner contre un armateur réticent à engager sa responsabilité en cas de faute

de l’équipage en particulier si celui-ci avait été directement choisi par le manager.

Dans la pratique, cette clause offre un degré de protection plus élevé au ship manager.

Toutefois, la même remarque que précédemment peut être faite à savoir que si celui-ci est co-

assuré, il n’est pas nécessaire d’inclure une telle clause, les risques étant couverts au titre de la

couverture P&I.

CHAPITRE 3 LA FIN DU CONTRAT DE SHIPMAN

L’inexécution par une partie de ses obligations peut conduire les parties à rompre leurs

relations contractuelles (Section 1) toutefois, le défaut d’une partie dans l’exécution de ses

obligations ne constitue pas la seule source de différends pouvant jaillir en cours de contrat.

C’est pourquoi la Bimco a prévu plusieurs procédures permettant de régler au mieux et au

plus vite ces disputes (Section 2).

SECTION 1 LA RESILIATION AUX TORTS D’UNE PARTIE :

L’article 22 énonçant les causes de résiliation du contrat a fait l’objet de légère modification.

La Bimco, dans cette version, ne fait plus la distinction formelle entre les fautes de l’armateur

Page 49: A  le contrat de shipmanagement

et celles du ship manager. Si ce dernier conserve des causes de résiliation qui lui sont propres

(§2), ces causes ont été rédigées de façon à pouvoir être appliquée par les deux parties

indistinctement (§1).

1. Les causes de résiliation commune aux deux parties :

L’article 22 a) du Shipman 2009 (Ancien articles 18 du Shipman 98) énonce ainsi que :

22. Termination

(a) Owners’ or Managers’ default.

If either party fails to meet their obligations under this Agreement, the other

party may give notice to the party in default requiring them to remedy it. In the

event that the party in default fails to remedy it within a reasonable time to the

reasonable satisfaction of the other party, that party shall be entitled to

terminate this Agreement with immediate effect by giving notice to the party in

default.

Les parties peuvent mettre fin au contrat en cas de manquement d’une partie à ses obligations

sous réserve que la partie ni remédie pas dans des délais raisonnable et à la satisfaction

raisonnable de l’autre partie. Cette résiliation a un effet immédiat.

En cas de manquement à l’obligation d’assurance par l’une des parties, le cocontractant peut

mettre le fautif en demeure de rectifier la situation dans les 10 jours qui suivent à défaut de

quoi celui-ci peut mettre fin au contrat immédiatement.

Dans le cadre de ses obligations financières, le ship manager a l’obligation de soumettre à

approbation un budget annuel pour la gestion du navire à l’armateur. Si les parties se trouvent

dans l’impossibilité de s’accorder sur le budget, il peut être mis fin au contrat sous réserve

d’un préavis d’un mois ce qui aura pour effet de mettre fin au contrat à l’échéance de la

période budgétaire en cours. Cette résiliation du contrat peut également intervenir dans le cas

où les parties tomberaient en désaccord sur un changement de pavillon qui, cela a été vu, peut

entrainer la baisse des coûts grâce à l’utilisation des pavillons de complaisance ou sur une

réduction de la rémunération du ship manager.

La mise en redressement ou en liquidation judiciaire, la dissolution et la faillite d’une des

parties sont également considérés comme une raison valable à la fin des relations

contractuelles et ce même dans le cas de la nomination d’un administrateur judiciaire.

Page 50: A  le contrat de shipmanagement

2. La résiliation du contrat par le shipmanager :

Du fait de l’article 22 b) i), si l’armateur ou l’armateur de navires associés (Annexe D) ne

règlent pas les sommes dues au titre du contrat comme par exemple la rémunération du ship

manager, celui-ci peut mettre fin à la relation contractuelle. Un délai de 10 jours après

notification à l’armateur doit être respecté. Le ship manager peut également mettre fin au

contrat si le navire est saisi par les créanciers.

En vertu de l’article 22 b) ii), le ship manager peut également mettre fin au contrat s’il estime

que l’usage dont fait l’armateur du navire est douteux évitant ainsi d’être considéré comme

complice et de voir sa responsabilité engagée au pénal. En effet si le navire est employé pour

des opérations de transport de produits de contrebande ou toute opération commerciale à

caractère illégale, le gestionnaire peut mettre fin immédiatement à la relation contractuelle.

3. La résiliation extraordinaire :

L’article 22 c) du Shipman 2009 soulève un cas de terminaison extraordinaire du contrat. Sa

lecture doit être complétée par celle de l’article 22 d):

(c) Extraordinary Termination

This Agreement shall be deemed to be terminated in the case of the sale of the

Vessel or, if the Vessel becomes a total loss or is declared as a constructive or

compromised or arranged total loss or is requisitioned or has been declared

missing or, if bareboat chartered, unless otherwise agreed, when the bareboat

charter comes to an end.

(d) For the purpose of Sub-clause 22(c) hereof:

(i) the date upon which the Vessel is to be treated as having been sold or

otherwise disposed of shall be the date on which the Vessel’s owners cease to

be the registered owners of the Vessel;

(ii) the Vessel shall be deemed to be lost either when it has become an actual

total loss or agreement has been reached with the Vessel’s underwriters in

respect of its constructive total loss or if such agreement with the Vessel’s

underwriters is not reached it is adjudged by a competent tribunal that a

constructive loss of the Vessel has occurred; and (iii) the date upon which the

Vessel is to be treated as declared missing shall be ten (10) days after the

Vessel was last reported or when the Vessel is recorded as missing by the

Vessel’s underwriters, whichever occurs first. A missing vessel shall be deemed

lost in accordance with the provisions of Sub-clause 22(d) (ii).

Page 51: A  le contrat de shipmanagement

En effet en cas de dommages tels au navire que celui-ci serait déclaré en “perte totale”, notion

qui doit être validée par les assureurs et n’est en aucun soumise à l’appréciation

discrétionnaire de l’armateur, il peut être mis fin à la relation contractuelle. Cette résiliation

extraordinaire recouvre également les cas où :

•Le navire serait vendu, la date de vente pouvant alors correspondre à la date à laquelle

le propriétaire n’est plus inscrit comme tel sur les registres d’immatriculation du navire.

•Il aurait fait l’objet d’une réquisition

•Il est déclaré manquant. Le navire est à ce titre considéré comme manquant à

l’expiration d’un délai de 10 jours suivant son dernier contact. Un navire peut également être

considéré comme perdu s’il est déclaré en ‘perte totale’.

4. Conclusion

Quel que soit la cause entrainant la fin du contrat – excepté le cas de faute du ship manager-,

l’armateur a une obligation financière qui survit à la fin du contrat ce qui apparait comme

étant une indemnisation du ship manager. En effet, la rémunération du ship manager est due

pour une période pour laquelle les parties se sont accordées et inscrite à la Box 19 ou à défaut

d’accord pour une durée de 90 jours suivants la date effective de résiliation.

Cette période de rémunération post-rupture a fait l’objet d’une modification dans le contrat

Shipman 2009. Aux fins d’harmoniser ce contrat avec le contrat Crewman, la période de 90

jours initialement prévue n’intervient en effet qu’à défaut d’accord entre les parties sur le

nombre de mois durant lesquels une rémunération additionnelle sera versée.

Cette rémunération additionnelle doit être versée quelle que soit la gestion exercée par le ship

manager. Cependant en cas de crew management, l’armateur a une obligation supplémentaire,

il doit payer les coûts y afférant pour la période inscrite à la Box 19 et doit participer, s’il y a

lieu, au paiement des indemnité de départ de marins dans la limite du montant indiqué à la

Box 20 Severance Costs. Le gestionnaire a dans ce cadre, l’obligation de minimiser les

indemnités de départ.

Page 52: A  le contrat de shipmanagement

SECTION 2 LA RESOLUTION DES CONFLITS :

Le contrat de Shipman offre aux parties une relative liberté dans le choix de la loi à laquelle

seront soumises les relations contractuelles (1) et dans le choix de l’arbitrage (2).

1. La loi

Comme dans tout contrat, le choix de la loi applicable relève de la volonté des parties.

Toutefois l’article 23 du Shipman 2009 propose aux parties d’opter entre la loi anglaise, la loi

américaine ou une autre loi choisie par les parties. La loi anglaise comme dans nombres de

contrats de la Bimco est toutefois clairement mise en avant ce qui s’explique notamment par

le fait que la Common law reste dans grands nombres de cas la loi de référence du droit

maritime.

2. Arbitrage

S’agissant de litiges d’ordre privé, la caractéristique du contentieux maritime vient de la place

qu’occupe le recours à l’arbitrage notamment en matière internationale.

« Dans le domaine maritime, de très nombreux contrats comportent systématiquement des

clauses compromissoires prévoyant le recours à l’arbitrage61 » et le contrat Shipman de la

Bimco n’y fait pas exception.

La clause compromissoire qui a pour avantage de permettre aux parties de contourner les

procédures longues et tortueuses des tribunaux a été rédigée, en cas de choix de la loi

anglaise, en étroite collaboration avec la London Maritime Arbitrators Association – LMAA –

et avait pris pour appui l’English Arbitration Act de 1996 n’a pas fait l’objet de changements

majeurs de par la révision du contrat Shipman. Les modalités de cette loi sont reprises par la

clause 23 a) notamment en ce qui concerne la nomination des arbitres. Chaque partie nomine

un arbitre et notifie ce choix à l’autre partie dans un délai prescrit afin de lancer la procédure.

Le troisième arbitre requis est quant à lui nominé par les deux premiers arbitres. La réputation

de la LMAA joue un grand rôle dan la prédominance de la Common law en droit maritime

dans la mesure où elle sait préserver les traditions intactes tout en les adaptant à la réalité de

l’économie maritime, réalité qui a entrainé l’apparition de ces nouveaux armateurs financiers

sans connaissances aucunes du milieu maritime62.

61 P. BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit., n° 112 p 84

62 P.A. DOUSSEAUD, La charte-partie Baltime 1939 (révisée en 2001), Mémoire CDMT 2009

Page 53: A  le contrat de shipmanagement

Concernant la procédure d’arbitrage, les articles 23 a) alinéa 5 et 23 b) alinéa 2 font tous les

deux états d’une ‘Small Claims Procedure’ soumise selon la loi choisie à la LMAA ou à la

Society of Maritime Arbitrators qui répond à un besoin du commerce international :

l’existence d’un mécanisme de résolution rapide des litiges clairs et simples qui doivent être

réglés rapidement et générer peu de coûts pour les parties.

In cases where neither the claim nor any counterclaim exceeds the sum of USD

50,000 (or such other sum as the parties may agree) the arbitration shall be

conducted in accordance with the LMAA Small Claims Procedure current at the

time when the arbitration proceedings are commenced.

Il est connu et reconnu que les contentieux peuvent être couteux, long et dont l’issue est

incertaine. Face à une réclamation modeste, une partie peut croire qu’il est préférable de

régler le problème par elle-même ou d’abandonner ses revendications en raison des frais de

procédures important qui peuvent être engagés et qui seraient disproportionnés par rapport à

la demande. C’est dans le but d’éviter qu’une partie ne renonce à ses prétentions que la

LMAA à crée des procédures pour les cas ‘moyens’ et pour les ‘petits’ cas. Qu’entend t- on

toutefois par petits litiges ? Comme en dispose l’article 23a) et b), les demandes

reconventionnelles ou réclamations ne doivent pas excéder un montant de 50 000 USD.

Après accord de parties par consentement mutuel ou du fait de l’introduction de la clause au

contrat, comme c’est le cas pour le contrat Shipman, une partie propose un arbitre choisi

parmi la liste des membres de la LMAA. Dans les 14 jours suivant l’acceptation du candidat

d’un commun accord, le demandeur envoi une lettre de réclamation accompagnée de pièces

justificatives. En cas de désaccord sur l’arbitre, c’est le président de la LMAA qui le nomine

sur demande de l’une des parties. En soumettant leur litige à cette procédure, les parties

doivent renoncer à leur droit de faire appel devant les tribunaux. Cette décision est donc

définitive ce qui rend cette procédure singulière et unique. Le seul recours à disposition des

parties est un appel devant la Cour suprême Anglaise.

Créée en 1989, cette procédure permet donc d’éviter d’avoir à engager des avocats couteux et

de se lancer dans d’interminables procédures. Ces débats dirigés par les deux parties

concernées se déroulent sous le contrôle d’un seul arbitre ayant un pouvoir souverain

d’appréciation quant à l’application des dispositions de la ‘Small Claim Procedure’.

L’arbitrage n’est toutefois pas la seule voie que peuvent emprunter les parties.

Page 54: A  le contrat de shipmanagement

3. Une procédure alternative à l’arbitrage : la médiation :

La nouvelle version de l’imprimé Shipman offre aux parties la possibilité de régler leurs

litiges par le biais de la médiation. Cette alternative a été introduite à l’article 23 d) du contrat

et dispose que :

(d) Notwithstanding Sub-clauses 23(a), 23(b) or 23(c) above, the parties may

agree at any time to refer to mediation any difference and/or dispute arising out

of or in connection with this Agreement.

(i) In the case of a dispute in respect of which arbitration has been commenced

under Sub-clauses 23(a), 23(b) or 23(c) above, the following shall apply:

(ii) Either party may at any time and from time to time elect to refer the dispute

or part of the dispute to mediation by service on the other party of a written

notice (the “Mediation Notice”) calling on the other party to agree to

mediation.

(iii) The other party shall thereupon within 14 calendar days of receipt of the

Mediation Notice confirm that they agree to mediation, in which case the

parties shall thereafter agree a mediator within a further 14 calendar days,

failing which on the application of either party a mediator will be appointed

promptly by the Arbitration Tribunal (“the Tribunal”) or such person as the

Tribunal may designate for that purpose. The mediation shall be conducted in

such place and in accordance with such procedure and on such terms as the

parties may agree or, in the event of disagreement, as may be set by the

mediator.

(iv) If the other party does not agree to mediate, that fact may be brought to the

attention of the Tribunal and may be taken into account by the Tribunal when

allocating the costs of the arbitration as between the parties.

(v) The mediation shall not affect the right of either party to seek such relief or

take such steps as it considers necessary to protect its interest.

(vi) Either party may advise the Tribunal that they have agreed to mediation.

The arbitration procedure shall continue during the conduct of the mediation

but the Tribunal may take the mediation timetable into account when setting the

timetable for steps in the arbitration.

(vii) Unless otherwise agreed or specified in the mediation terms, each party

shall bear its own costs incurred in the mediation and the parties shall share

equally the mediator’s costs and expenses.

(viii) The mediation process shall be without prejudice and confidential and no

information or documents disclosed during it shall be revealed to the Tribunal

except to the extent that they are disclosable under the law and procedure

governing the arbitration.

Page 55: A  le contrat de shipmanagement

(Note: The parties should be aware that the mediation process may not

necessarily interrupt time limits.)

Dans la pratique, cette méthode gagne du terrain dans l’industrie du shipping, la médiation

permettant aux parties de gagner du temps et de l’argent ainsi que de nombreux autres

avantages. Ceux-ci résident pour partie dans la forme même de la médiation qui sous entend

la réunion des parties autour d’une table afin de parvenir à un accord de principe. Les points

forts de cette procédure sont le faible coût en raison de la rapidité des discussions et de la

procédure qui n’excède généralement pas une journée. La confidentialité que permet cette

procédure représente de plus un critère indispensable dans un marché hautement

concurrentiel.

Dans la pratique, les parties ne peuvent avoir recours qu’une fois le processus d’arbitrage

initié. Cette procédure est en effet une procédure additionnelle qui vient s’inscrire en parallèle

de la procédure d’arbitrage. Elle ne peut être utilisée pour interrompre le processus d’arbitrage

mais offre de nombreuses alternatives afin de résoudre tout ou partie d’un litige. « Cette

situation s’explique notamment par le fait que les rédacteurs ont seulement cherché à prévenir

des contradictions et confrontations entre ces deux modes de réconciliation d’un point de vue

purement procédural. Les parties sont libres de recourir à la médiation et d’en définir les

règles alors que l’arbitrage comprend quant à lui un cadre règlementaire prédéfini, auquel les

parties sont contraintes d’adhérer 63».

La compatibilité et l’emboitement de ces deux procédures se justifie notamment par le fait

qu’elles recherchent toutes deux le même résultat : la réconciliation des parties et la poursuite

de la gestion.

63 P.A. DOUSSEAUD, op.cit.

Page 56: A  le contrat de shipmanagement

PARTIE 3

LA CONFORMITE AUX CODES

QUALITE/SECURITE/SURETE

Page 57: A  le contrat de shipmanagement

De part la mauvaise réputation dont ils pâtissaient, les ship managers ont dus montrer patte

blanche et démontrer que non seulement ils offraient un management permettant à l’armateur

de réduire sensiblement les coûts en raison de l’optimisation du choix des pavillons ou de la

provenance des équipages mais qu’en outre, tous ces services respectaient les différentes

règles et normes établies par les organismes internationaux. Dans ce but, les sociétés se sont

dotées de différents systèmes permettant de garantir aux armateurs l’application effective des

normes de qualité/sécurité/sureté ou encore de protection de l’environnement.

Le contrat Shipman a notamment été révisé afin de tenir compte et d’intégrer les changements

opérés en matière de sécurité/ sureté depuis la fin des années 90. Cet imprimé tient dorénavant

compte des codes ISM et ISPS. L’introduction du terme « Company » au contrat constitue

d’ailleurs la pierre angulaire de la révision.

Parallèlement aux normes internationales, les sociétés de ship management ont mis en œuvre

des schémas de certification ‘internes’ dans le but de se démarquer par rapport à leurs

concurrents car , « then owners and Charterers will have some way of sorting the management

sheep from the goats […] and will be able gradually to support these owners and managers

who can demonstrate that they are doing the job well 64»

64 Eric Kruse, Barber International

Page 58: A  le contrat de shipmanagement

CHAPITRE 1 LES PROBLEMATIQUES DE QUALITE/ SECURITE/

SURETE AU REGARD DU CONTRAT DE SHIPMANAGEMENT

Si les sociétés de ship management appliquent les mêmes normes que les autres sociétés de

l’industrie maritime en matière de sécurité/sureté, ce domaine d’activité a du fait de la

mauvaise image dont elle a souffert mis en place tout un système de certification de la qualité

dans le but d’améliorer leur réputation vis-à-vis de l’opinion publique.

SECTION 1 LE CODE ISPS

L’article 4 c) du Shipman 2009 énonce que le gestionnaire technique doit respecter les

dispositions du code ISPS dont l’application dépend de la jauge brute du navire et de la

détermination de la ‘Company’.

Suite à une conférence diplomatique en décembre 2002 (entré en vigueur le 1er juillet 2004),

l’International Ships and ports facilities security code ou code international pour la sureté de

navires et des installations portuaires a été adopté et intégré à la Convention SOLAS.

Ce code s’applique au navire transportant des passagers et à tout navire de charge d’un

tonnage supérieur à 5 000 unités de jauge brute.

Le code ISPS prévoit que « les compagnies maritimes doivent établir pour chacun de leurs

navires un plan de sureté, indiquant entre autres, les mesures propres à empêcher

l’introduction à bord d’armes, substances ou engins dangereux, établir des procédures

d’intervention en cas de menace contre la sureté comme des procédures d’évacuation »65.

Dans le cas où la société de ship management serait désignée comme étant la ‘Company’,

l’armateur doit en informer l’Etat du pavillon. Dans le cas où l’armateur n’est pas le véritable

propriétaire du navire, l’affréteur coque nue, par exemple, doit alors s’assurer que ce dernier a

fait le nécessaire auprès des autorités de l’Etat du pavillon afin d’assurer le respect du code.

Dans la pratique, un agent de sureté de la Compagnie – ou CSO, Company Security Officer -

est dans ce cadre désigné et doit s’assurer que les normes de sureté sont respectées et que le

plan de sureté du navire ait été préparé.

65 P. BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit. n°33 p.26

Page 59: A  le contrat de shipmanagement

Les sociétés de ship management qui font de la gestion technique ou commerciale doivent

particulièrement veiller au respect des dispositions de ce code. Les devoirs et responsabilités

du CSO sont définis à l’article 11, Part A du Code. Cette liste non exhaustive énonce que cet

agent doit :

1. Informer des menaces auxquelles le navire pourrait être exposé

2. S’assurer que les inspections de sécurité du navire soient effectuées

3. S’assurer du développement, de l’approbation et de la mise en œuvre du plan de

sureté des navires

4. Organiser des audits internes

5. Sensibiliser à la sécurité et à la vigilance

6. S’assurer que le personnel responsable de la sécurité du navire ait été formé de

manière adéquate

7. Assurer une communication efficace entre les agents de sureté du navire et les

agents de sureté des installations portuaires – ou PFSO : Port Facility Security

Officer66. (NBDP).

En cas de gestion commerciale d’un navire, le ship manager devra garder une trace écrite des

ports dans lesquels le navire à fait escale et devra être gardé à bord du navire, une liste des dix

dernières fois où le navire a eu recours aux installations d’un port dans le cas où ces

installations seraient susceptible de se voir appliquer le code ISPS. Cela ne signifie pas que le

ship manager est responsable vis-à-vis de l’armateur en cas de problème dans un port mais

celui-ci devra demander l’autorisation préalable du propriétaire en cas d’escale dans un port

non conforme au code. Tout potentiel problème dans un port non conforme devra également

faire l’objet d’une notification au propriétaire. Du fait de son degré supposé de compétence, le

ship manager doit veiller au respect du code et peut être tenu pour responsable en cas de

pertes. L’ITIC a par exemple déjà été confronté à des propriétaires transférant

contractuellement la responsabilité sur le ship manager pour les pertes dues au retard ou à la

défaillance d’autres individus dans la mise en œuvre du code. Le gestionnaire ne doit toutefois

pas supporter une telle responsabilité et l’ITIC conseille à ses membres de lui soumettre

d’abord la clause litigieuse avant de signer quoi que ce soit.

SECTION 2 L’INCIDENCE DU CODE ISM SUR LE SHIP MANAGEMENT

§1 Historique :

66 ITIC, Article : Impact of the ISPS Code on members of ITIC, http://www.itic-insure.com/

Page 60: A  le contrat de shipmanagement

1. Au commencement : le ‘Code of ship management standards’

En 1988, les cinq sociétés leaders en matière de ship management connues sous le « Groupe

de cinq » se sont réunies pour discuter de la possibilité d’améliorer les normes dans ce secteur

d’activité. De ces débats, est ressortit le Code of Ship Management Standards, unanimement

accepté par les membres de l’association qui s’était formée entre temps : l’International Ship

Managers’ Association (ISMA) aujourd’hui dénommée ‘Inter Manager’67. A l’origine de cette

création, la volonté de ces sociétés de réguler de ‘l’intérieur’ ce secteur d’activité afin d’éviter

de se voir imposer des règles des règles en dehors des réalités maritimes et des réelles

problématiques du ship management.

Le but de cette association était d’améliorer les standards du ship management et de mettre en

place une industrie plus sûre, plus respectueuse de l’environnement, plus digne de confiance

et mieux contrôlée. L’amélioration de ces standards devait permettre de corriger l’image

négative dont pâtissait ces sociétés auprès des affréteurs qui faisaient du ship management une

alternative bon marché au management des armateurs traditionnels68 augmentant ainsi leur

crédibilité et leur respectabilité.

Le code de l’ISMA, aujourd’hui reconnu comme « the most comprehensive quality code for

shipping in the world », a enclenché un mouvement de recherche de la qualité avec des

sociétés de classification édictant leur propre code ou des armateurs adaptant des codes

existants au shipping ; la reconnaissance « ultime » venant de l’OMI adoptant le code de

l’ISMA et l’intégrant au chapitre IX de l’un des piliers du droit de la sécurité maritime : la

Convention SOLAS69 adoptée en 1974.

2. Le code ISM

En effet, ce qui est aujourd’hui devenu le code ISM fut adopté en réponse à la pression

exercée par les sociétés maritime suite à différentes tragédies maritimes ayant entrainées des

pertes de vies humaines et des dommages à l’environnement.

En 1989, l’OMI adopta des directives sur la gestion de l’exploitation sécuritaire des navires et

la prévention de la pollution puis l’international Safety Management code (ISM Code)70 ou

Code international de gestion de la sécurité des navires et de prévention de la pollution fut

67 http://www.intermanager.org/

68 A. Ene, op.cit.

69 Convention for the Safety of Life at Sea ou Convention pour la sauvegarde de la vie humaine en mer

70 The International Management Code for the Safe Operation of Ships and for Pollution Prevention

Page 61: A  le contrat de shipmanagement

adopté en 1993 par l’OMI (Résolution A. 741) aux fins de mettre en place au sein des

compagnies maritime un système de gestion pour la sécurité de l’exploitation du navire et

pour la prévention de la pollution. L’adoption de ce code fait notamment suite au désastre du

car ferry « Herald of Free Enterprise » en mars 198771.

Relativement récent puisqu’entré en vigueur le 1er juillet 2002, le code avait à l’époque

généré de vif débats. Considéré comme flou, lourd et statique, ce code pour beaucoup ne

collait pas avec un monde maritime en constante évolution. Les ship managers considéraient

de plus qu’il ne pouvait y avoir qu’un seul système de management mis en place par le

manager lui même, personne d’autre72.

Ce code avait par ailleurs été rejeté dans son intégralité par les armateurs Grecs; ces derniers

justifiant ce rejet par la nuée d’interprétations qu’allait entrainer l’adoption de ce code dans

chaque Etat alors que le droit maritime, international par nature, nécessite une interprétation

uniforme des règles notamment en matière de sécurité.

Le code ISM a posé, parmi d’autres, le problème de savoir si le degré de responsabilité du

ship manager allait changer selon que celui-ci soit la ‘Company’ ou non devenant, dans le

premier cas, le responsable en cas de non respect des règles. Si le code n’établit pas un régime

propre de responsabilité, la compagnie doit gérer le navire selon certaines règles. Cette

compagnie peut être le :

« Propriétaire du navire ou tout autre organisme ou personne telle que

l’armateur gérant ou l’affréteur coque nue auquel le propriétaire du navire a

confié la responsabilité de l’exploitation du navire qui, en assumant cette

responsabilité, a accepté de s’acquitter de toutes les taches et obligations

imposées par le code ISM »73.

Cette définition par laquelle le code assimile l’armateur-gérant et l’affréteur coque-nue au

propriétaire est à présent inclut à l’article 1 du contrat Shipman 200974, toujours dans cette

71 Ce roulier a fait naufrage le 6 mars 1987 au large du port de Zeebrugge entrainant la mort de 193 morts. Le

navire avait appareillé alors que ses portes étaient ouvertes laissant l’eau envahir le pont principal. Déstabilisé

par le volume d’eau et par le glissement des véhicules non saisis, le navire a coulé en mois de deux minutes. 72 « They can only be one management system and that is laid down by the management company, nobody else”.

Citation tirée du mémoire de A. Ene, op.cit. 73 Article 2 du code ISM.

74 Article 1, alinéa 7: “ISM Code” means the International Management Code for the Safe Operation of Ships

and for Pollution Prevention and any amendment thereto or substitution therefor.

Page 62: A  le contrat de shipmanagement

volonté de la Bimco de refléter la pratique commerciale en cours et rendre en compte les

législations nouvelles.

2.1 Le code ISM dans le contrat Shipman 2009 :

Ce code est introduit à l’article 1 du contrat via la définition du terme « company » ainsi

définit par la Bimco :

“Company” (with reference to the ISM Code and the ISPS Code) means the

organization identified in Box 5 or any replacement organization appointed by

the Owners from time to time (see Sub-clauses 9(b)(i) or 9(c)(ii), whichever is

applicable).

La société de shipmanagement ainsi désignée voit quelques changements quant à ses

responsabilités notamment lorsqu’il y a délégation de la gestion technique. Le ship manager

ainsi désigné aura alors la charge de mettre en place les mesures du code ISM et de s’y tenir

sous peine de voir sa responsabilité engagée, responsabilité qui dans ce cas, s’assimile à celle

de l’armateur.

2.2 Le rôle du Capitaine

Le Capitaine a un rôle clef dans la gestion du navire en ce qu’il est le représentant à bord de

l’armateur. Il et le responsable de l’expédition maritime dans tous ses aspects et est la

personne désignée au titre du code ISM. Selon ce même code, il relève de la compétence de la

compagnie d’établir la responsabilité du capitaine pour mettre en œuvre la politique de la

compagnie, encourager l’équipage à appliquer cette politique, donner les ordres de manière

claire, vérifier la satisfaisances de spécifications, passer en revue le Safety Management

System (SMS) ou système de gestion de la sécurité et signaler les lacunes75. Il a donc

l’autorité supérieure et la responsabilité de prendre de décisions concernant la sécurité, la

sureté et la prévention de la pollution en mer, en drydock, au port qu’il y ait ou non à bord un

pilote, un superintendant ou un représentant de l’armateur et de demander l’assistance de la

Compagnie si cela s’avère nécessaire. Il est important qu’il y ait une bonne entente et une

bonne communication entre le Capitaine et le ship manager en particulier s’il est son

employeur de droit car le Capitaine est au cœur du service rendu et doit au travers des

discussions avec ce dernier ou via ses représentants être à l’écoute en permanence et essayer

75 Cours de Droit de la sécurité maritime de M. Botalla-Gambetta

Page 63: A  le contrat de shipmanagement

de connaître ses besoin, ses attentes et son opinion et les transmettre aux service à terre

concerné.

Le Capitaine, en tant que personne désignée à bord, au titre du code ISM, conduit

périodiquement des revues de système de gestion de la qualité et de sécurité signale les

lacunes et émets des propositions d’amélioration à la Compagnie.

2.3 En conclusion

Controversé lors de son adoption, le code ISM ne fait toujours pas l’unanimité parmi les

professionnels. Rob Grool, directeur du groupe Wallem Group exprimaient ses doutes sur la

réelle contribution de ce code à rendre les navires plus surs76. Acceptant le « quality

management system » qui est nécessaire pour promouvoir les standards et les procédures, Rob

Grool pense néanmoins que quand l’ISMA fut créée, c’était pour réguler de l’intérieur une

industrie qui ne s’auto régulait pas. Le système de documentation qui demande que le navire

et le gestionnaire soient parfaits et qui impose le reporting de tous les incidents et accidents à

toutes les parties de façon que les autres puissent en tirer le leçons peut se retourner contre la

société et montrer à quel point les compagnies de ship management et les personnes sont

‘imparfaites’. Le code ISM est selon lui, en partie un échec de ce point de vue.

Un des échecs du code réside également dans sa mise en œuvre plus ou moins bien faite dans

l’industrie. Il n’est pas reconnu comme suffisant par les pétroliers, pas plus d’ailleurs que

l’action des pavillons et des sociétés de classification qui imposent à leurs ship managers le

TMSA, sorte de ″mélange amélioré″ entre les normes ISO et le code ISM77. Le code ISM

vient à ce propos d’être amendé pour insister notamment sur l’évaluation des risques :

A l’inverse, pour Soe Lwin78, les bénéfices d’un bon système de gestion de la sécurité sont

multiples et incluent : l’harmonisation des lois nationales avec les exigences internationales ;

un personnel motivé qui travaillent pour l’amélioration du système permettant une réduction

des dommages corporels, une meilleure protection de l’environnement en particulier

maritime ; une augmentation des profits via la réduction des pertes et des recours ; des

montant d’assurances revus à la baisse ; des opérations planifiées et contrôlées, la gestion

76 Rob Grool, Ship management. The ISM Code : is it a ‘dog’s breakfast’ ?, LSM November 2002

77 The Tanker Management and Self Assessment. Ce programme fournit aux propriétaires, ship operators et ship

managers une structure afin de les aider à évaluer l’efficacité de leur gestion de la sécurité et ce grâce à des outils

appropriés permettant d’identifier rapidement les failles de leur système. Un système similaire a récemment été

mis en place par Intermanager : le KPI project (Renvoi 4. Le projet KPI). 78 Captain Soe Lwin, M.sc Master Mariner, Shimanagement and the ISM Code

Page 64: A  le contrat de shipmanagement

contrôlée de la croissance des actifs. Reste à espérer que tous les armateurs et les ship

managers reprennent l’objectif de l’OMI : « Safer shipping and cleaner oceans » (Une

navigation plus sûre et des océans plus propres) grâce à l’application du code ISM.

SECTION 3 LA CERTIFICATION DE LA QUALITE

« La qualité est l’aptitude d’un produit à satisfaire ses utilisateurs79 »

1. L’assurance Qualité

« L’assurance Qualité est l’ensemble des mesures pré établies et systématiques dont

l’application et le contrôle donnent confiance (=assurent) qu’un produit répond à ce qu’on en

attend (=qualité).80 »

Apparue durant la révolution industrielle et n’étant pas à l’origine adapté au secteur de

l’industrie maritime, ce système a été ajusté et mis en place en complément du code de

l’ISMA. La mise en place de cette assurance de la qualité s’inscrit toujours dans cette volonté

des sociétés de ship management de rendre leur fonctionnement transparent et de montrer à

leurs clients qu’elles sont dignes de confiance.

Le code de l’ISMA représentait déjà « un système complet de contrôle et d’assurance qualité

pour les activités en mer aussi bien que dans les bureaux à terre 81».

2. Les normes ISO

L’organisation internationale de normalisation (International Standard Organisation ISO) est

un organisme édictant des normes souvent hautement spécifiques pour divers secteurs de

l’industrie. Les normes ISO qui définissent des exigences ou donnent des lignes directrices

sur les bonnes pratiques du management sont parmi les plus connues de l’offre de l’ISO82. Ce

sont ces normes que les sociétés de ship management appliquent aux fins de garantir et

améliorer les standards et les méthodes d’opération. Il est cependant à noter que le code ISM

couvre 80% de la norme ISO ; ce qui n’est pas prévu au code, c’est la satisfaction du client.

79 Définition de l’AFNOR (Association Française de la Normalsation)

80 Cours de Corpet, Normes & Assurances qualité

81 A. Ene, op.cit.

82 Site internet ISO, Normes de management et Leadership. www.iso.org

Page 65: A  le contrat de shipmanagement

Les sociétés de ship management appliquent plus particulièrement la série des normes ISO

9000 relatives au management de la qualité et ISO 14000 relative au management

environnemental.

Les normes ISO 9000 traite du management de la qualité, termes recouvrant ce que

l’organisme fait pour satisfaire aux exigences qualité des clients, aux exigences

règlementaires applicables tout en visant l’amélioration de la satisfaction des clients et

l’amélioration continue de sa performance dans la réalisation de ces objectifs. Ces normes

représentent un « consensus international sur les bonnes pratiques du management de la

qualité ».

La famille des normes ISO 14 000 recouvre quant à elle « ce que la société fait pour réduire

au minimum les effets dommageables de ses activité sur l’environnement et améliorer en

permanence sa performance environnementale ». Cette certification ne s’intéresse toutefois

qu’aux efforts de l’entreprise soit à la prise de conscience de celle-ci de l’écart entre les

exigences règlementaires et sa situation ; elle ne s’intéresse pas à la règlementation existante

en matière d’environnement.

L’application de ces normes est consacrée par la délivrance de certificat attestant de la

conformité des sociétés à ces normes est le fait d’organismes certificateurs généralement

accrédités par le COFRAC83 « qui certifient ainsi que la société est apte à fournir un produit

et/ou un service conforme aux exigences de ses clients et aux règlementations qui la concerne

et à améliorer la satisfaction de ses clients. Cette certification apporte une reconnaissance

nationale et internationale à la société84 ».

3. La certification des sociétés de classification

La société de classification est dans le milieu maritime généralement associée à la conception

et à la construction du navire, au suivi de l’exploitation du navire durant toute sa vie justifiant

le maintien de sa classification par des visites périodiques ou occasionnelles. Ces sociétés ont

cependant une autre casquette : ce sont des organismes de certification de l’assurance qualité.

Ces sociétés jouent un rôle fondamental : elles établissent un climat de confiance entre les

83 Comité Français d’Accréditation

84 Article de l’Afnor, Assurance Qualité, Qu’est-ce que la certification ? Les normes ISO 9000

Page 66: A  le contrat de shipmanagement

armateurs, les assureurs, les chargeurs, les autorités portuaires et les autorités maritimes de

l’Etat du pavillon85.

Afin d’émettre les certificats, les sociétés de classification s’appuient sur les normes ISO et

sur les dispositions du code ISM. Le Det Norske Veritas (DNV) a été la première société de

classification à proposer ses services de certification aux sociétés de ship management au

début des années 90 suite à une demande expresse du gouvernement norvégien.

La procédure de certification se décompose en plusieurs étapes et a pour objectifs de faire en

sorte que le système de documentation satisfasse aux exigences des critères de la certification,

de s’assurer que le système soit mis en œuvre au travers de la société et qu’il soit efficace.

Une fois la politique de gestion définie, le ship manager doit mettre en œuvre les moyens qui

vont lui permettre d’atteindre ses objectifs. La société de classification procède premièrement

à une évaluation effective du système passant par un examen critique de la documentation.

Elle évalue les capacités de gestion de la société en matière de sécurité, qualité et de

prévention de la pollution mais ne cherche pas à évaluer l’adéquation technique des

procédures d’exploitation et des individus. Il est procédé à des audits permettant l’évaluation

de l’ensemble de la chaine de gestion. L’organisme vérifie également que les équipages

possèdent les brevets requis et qu’une langue de travail ait été choisie. Il ne lui appartient pas,

sur ce dernier point, de s’assurer que les ordres soient correctement reçu et exécuté en bout de

chaine. Des actions correctives peuvent être menées tout au long du processus qui aboutit à

l’émission d’un certificat86.

Chez certains armateurs français, les vérifications Document of Compliance (documentation

ISM) et ISO sont menées conjointement par le Bureau Veritas et le Pavillon. Pour couvrir

l’ISO, le BV pose une série de questions supplémentaires sur la réalisation du contrat et la

satisfaction des clients. Il est procédé de la même manière à bord du navire pour le Certificat

de Management de la Sécurité (ISM-SMC) et l’ISO.

Afin de venir en aide aux ship manager, le Lloyd’s Register group a publié un ensemble

complet de directives dans le but d’atteindre la plus grande conformité de l’industrie du ship

management avec des normes ISO parfois très techniques.

85 MM. Damien, Aide-Mémoire Transport & Logistique, Edition Dunod, 2001

86 A. Ene, op.cit.

Page 67: A  le contrat de shipmanagement

4. Le projet KPI87

“…a joint industry initiative for excellence in ship management.”

Ce projet est à l’initiative des 18 plus grandes sociétés de ship management dont V Ships88 ou

encore Eurasia International Limited89 et de certaines sociétés armatoriales qui se sont

accordées en novembre/ décembre 2004 afin de coopérer pour l’établissement de standards

internationaux d’indicateurs clés de performance ou KPI dans le secteur du management. Les

armateurs étaient présents dans le but de s’assurer que ces indicateurs soient relativement

faciles à utiliser dans la pratique, qu’ils ne soient pas trop couteux à mettre en place et

renvoient une image représentative et transparente des performances.

Les objectifs du KPI sont :

•L’amélioration de la réputation des sociétés de ship management vis-à-vis de

l’opinion publique

•Améliorer les performances avec les compagnies maritimes

•Standardiser les indices de performances maritimes

•Relever les meilleures pratiques afin que les autres sociétés puissent prendre exemple

•S’auto réguler car l’auto régulation et une défense contre la sur régulation et permet

de s’appuyer sur des normes réellement adaptées, puisque basées sur la pratique, au milieu

concerné.

Cette initiative est surement la tentative la plus remarquable d’auto régulation depuis

l’introduction du code de l’ISMA et doit permettre aux sociétés gestionnaires de navire

d’augmenter leurs profits et leur compétitivité et de s’améliorer par l’évaluation comparative,

l’identification de leurs forces et des opportunités.

Cet outil de mesure de la qualité se décompose comme suit :

87 KPI - Key Performance Indicator

88 V Ships, société monégasque indépendante qui gère environ 900 navires (site V ships, août 2011) dont 350 en

full management et qui s’appuie sur un pool de 22 500 marins. ISEMAR, Note de Synthèse n°81, Les acteurs de

l’industrie maritime mondiale en 2004-2005, Janvier 2006 89 Eurasia shipmanagement, filiale du groupe allemand Bernard Schulte, s'est installée en 1981 à Hong Kong et gère environ 430 navires avec un réservoir de main d'oeuvre de 6000 marins. ISEMAR, op.cit.

Page 68: A  le contrat de shipmanagement

The Shipping KPI standard – Concept.90

Les ‘Shipping Performance Indexes’ (SPI) ou indicateurs de performance du secteur maritime

sont des expressions agrégées de performance d’un domaine particulier. L’objectif est ici de

de fournir aux tiers des informations sur la performance globale d’un navire.

Les ‘Key Performance Indicators’ (KPI) ou indicateurs clés de performance sont aussi

l’expression des performances dans un domaine particulier. Ces indicateurs sont par exemple

le budget, la planification des passages en cale sèche ou encore la disponibilité du navire. Un

KPI est une méthode numérique objective de calcul de la performance, c’est la clé de

l’objectif commercial stratégique. Il est axé sur les résultats d’une activité et non sur son

déroulement car cela limiteraient notamment le calcul dans le temps. L’objectif de cette

mesure est l’amélioration constante et permet de faire une analyse comparative interne et

externe.

Les ‘Performance Indicators’ (PI) ou indicateurs de performance sont quant à eux la base sur

laquelle est calculée la valeur des KPI. Ces indicateurs sont les paramètres directement

observables comme le nombre de marins licenciés, le nombre de collisions ou d’incendies à

bord d’un navire.

90 Reproduit avec l’aimable autorisation du Capitaine Kuba Szymanski, secrétaire général d’Intermanager.

Page 69: A  le contrat de shipmanagement

Le besoin de ces indicateurs provient du développement continu d’une industrie maritime qui

se veut plus sûre grâce à l’application des normes dont il est fait une étude, non exhaustive,

dans cette partie. Du point de vue des ship managers, ce projet qui est déjà en place va se

traduire par une demande croissante et bientôt systématique de rapports de la part des acteurs

concernés du monde maritime comme par exemple les propriétaires de navires, les assureurs,

les P&I, les autorités portuaires ou encore les autorités de l’Etat du pavillon91.

CHAPITRE 2 PERSONNEL ET ENVIRONNEMENT

Le rôle du facteur humain dans la survenance des accidents a été l’un des facteurs qui a mené

à pointer du doigt les sociétés de ship management qui, pour réduire au maximum leurs coûts

avaient recours à des marins inexpérimentés en provenance de pays du tiers monde. La

volonté de ces sociétés d’améliorer leur image les a toutefois conduit à prendre des mesures et

a mieux respecter les normes internationales tant sur la formation des gens de mer que sur la

prévention de la pollution.

SECTION 1 LE FACTEUR HUMAIN DANS LA CONDUITE DU NAVIRE

Dès l’apparition des premières sociétés de shipmanagement, ces sociétés ont eu recours à une

main d’œuvre bon marché en provenance de pays en voie de développement afin de réduire

leurs coûts, système dont les armateurs se complaisaient de part notamment le climat

économique auquel ils devaient faire face : une demande de transport insuffisante, des

équipages trop chers ou encore une surabondance de navires. Ces équipages sous-qualifiés ont

toutefois rapidement été pointés du doigt. Un nombre important d’accidents sont en effet le

fait d’une erreur humaine plutôt que de défaillances techniques ou structurelles du navire. La

provenance des marins n’est pas le seul facteur qui a conduit les armateurs à se méfier de ces

sociétés de manning. Afin de réduire les coûts, la taille des équipages l’a été également

entrainant à la diversification des tâches des marins et à l’allongement de leur temps de

travail. De plus comme vu précédemment, la pluralité des cultures présentes dans cet espace

91 En savoir plus sur le Projet KPI : www.shipping-kpi.com

Page 70: A  le contrat de shipmanagement

confiné qu’est le navire provoque parfois des conflits qui s’en ressentent sur la discipline et

l’organisation à bord.

Or « on peut aisément concevoir que, dans une situation d’urgence, la présence à bord de

marins compétents et expérimentés représente un sérieux atout pour la sécurité ». Des

mesures ont été prises tant par les sociétés de maning que par les organismes internationaux

pour solutionner ce problème de sous-qualification des équipages. A l’échelle du secteur

privé, certaines sociétés ont ainsi ouvert leur propre centres de formation ( §1) tandis qu’au

plan international, l’OMI adoptait, en 1978, la Convention internationale sur les normes de

formation des gens de mer, de délivrance de brevets et de veille dite Convention STCW92

(§2).

§1 La réponse des ship managers au manque de qualification des équipages :

Le manque de marins qualifiés dans les années 80 a conduit les sociétés maritimes et

notamment celles de ship management, dans le but de redorer leur blason, à trouver des

solutions à la formation des équipages ; les centres de formations existants étant engorgés.

Certaines sociétés ont ouvert leurs propres centres de formation dans les principaux pays

fournisseurs de main d’œuvre (Philippines, Inde, Chine, …). D’autres, se sont associés avec

les gouvernements de ces pays pour former les recrues. D’autres enfin ont ouverts des agences

locales afin de pouvoir fournir régulièrement des équipages qualifiés. Certaines sociétés de

ship management sont même allées jusqu’à créer des sections de formations spécialisée en

prévention de la pollution afin d’avoir des équipages connaissant et appliquant la loi

américaine OPA93.

Il est à noter que les normes de formation de ces sociétés dépassent bien souvent les normes

établies par l’OMI94. Cette volonté d’amélioration et de respect des normes de sécurité/sureté

est en constante amélioration et touche tous les secteurs de l’industrie maritime. Certaines

compagnies pétrolières, effectuant des opérations à risques en particulier au niveau

environnemental, ont donné plus de place à leurs programmes de formation et les sommes

investies notamment par les Japonais et les Norvégiens sont la preuve du sérieux de

l’industrie maritime.

92 Standard of training, Certification and Watchkeeping for seafearers

93 Oil Pollution Act

94 A. Ene, op.cit.

Page 71: A  le contrat de shipmanagement

§2 Les normes internationales relatives aux gens de mer :

1. Le code STCW

Pointé à l’article 1er du contrat de Shipman 2009 et déjà présente dans le Shipman 98, la

convention STCW n’a de vocation à être appliquée dans le cadre d’une délégation de gestion

que si le ship manager s’est vu confier la gestion de l’équipage. En effet, si le crew

management n’a pas été confiée à ce dernier, l’obligation de respecter cette convention

incombe à l’armateur.

En 1978, l’OMI réunit une conférence ayant pour sujet la formation des gens de mer. A

l’issue de cette conférence, a été adoptée la Convention internationale sur les normes de

formation des gens de mer, de délivrance de brevets et de veille dite Convention STCW. Cette

convention amendée en 1995 et de nouveau modifiée en août 2010 lors de la Conférence

Internationale de Manille a pour double objectif de :

« Définir les connaissances minimales que les Etats signataires devront exiger pour la

délivrance des brevets de capitaine, second ou officier mécanicien et

Prescrire les règles à suivre pour la veille à bord des navires.95 »

Cette convention a donc pour principe l’internationalisation de la norme de compétence qui

passe par une uniformisation mondiale du contrôle de conformité.

2. La convention MLC

La Bimco invite également le ship manager, dans la définition de la « STCW 95 » (article 1),

à prendre considération toute nouvelle norme destinée à s’appliquer en complément de cette

Convention comme par exemple la Convention internationale sur le travail maritime96 adoptée

par l’OIT97 le 7 février 2006 (pas encore entrée en vigueur). Cette convention s’applique à

tous les navires affectés à des activités commerciales et aux gens de mer98.

« Quatrième pilier de la réglementation internationale du secteur maritime en complément des

conventions fondamentales de l’OMI99 elle garantit les conditions de travail égales pour tous,

95 P.BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit., n°32

96 Maritime Labour Convention (MLC)

97 Organisation internationale du travail

98 C'est-à-dire aux « personnes engagées ou travaillant à quelque titre que se soit à bord ‘un navire entrant dans le

champ d’application de la convention ». 99 Convention SOLAS (sauvegarde de la vie en mer), STCW (renvoi partie) et MARPOL (pollution maritime)

Page 72: A  le contrat de shipmanagement

permettant ainsi aux armateurs [et aux ship managers] d’opérer dans des conditions égales de

concurrence. Les Etats qui ont ratifiés cette convention doivent certifier ‘socialement’ les

navires battant leur pavillon. 14 points à respecter permettent de satisfaire les droits

fondamentaux que sont :

•le droit à un lieu de travail sûr et sans danger

•les conditions d’emploi doivent être équitables

•les conditions de travail et de vie à bord doivent être décentes

-le droit à la protection de la santé, aux soins médicaux et à des mesures de bien être et

autre forme de protection sociale. 100»

SECTION 2 LA REGLEMENTATION RELATIVE A LA POLLUTION :

Le droit américain n’a pas hésité à sanctionner sévèrement les sociétés de ship management

en cas de pollution. L’Oil Pollution Act adopté en 1990 qui « représente une avancée

considérable du droit maritime a l’avantage d’associer dans l’obligation de réparer tous ceux

qui tirent un profit – si légitime soit-il- d’une activité spécifique101 », ici la gestion du navire.

Système proche des Conventions de 1969, 1971 et 1992, cet acte dispose que le ship manager

sera responsable comme l’armateur propriétaire et devra assumer de manière illimitée la

réparation des dommages102. Cette loi est au centre d’un débat animé car quand elle est

applicable, chaque ship owner ou ship operator peut faire l’objet d’une responsabilité

individuelle. Cette loi a augmenté le montant de l’indemnisation due en cas de responsabilité

lorsqu’une pollution est la conséquence d’un manquement à un code de sécurité ou à une

norme de construction ou d’opération. De plus, la responsabilité du ship manager semble, en

cas de pollution par les hydrocarbures dans les eaux américaines illimitée. L’affaire du

« Cosco Busan » qui a conduit la société de ship management a verser plus de 10 millions de

dollars de dommages et intérêts en est une bonne illustration103.

Dans la même optique de protection de l’environnement, a été adoptée le 2 novembre 1973, la

Convention Internationale pour la prévention de la pollution par les navires dite Convention

Marpol 1973/78. Cette Convention fait suite au naufrage du Torrey Canyon (1967) et de

100 Armateurs de France, Convention MLC : les mêmes droits pour tous les gens de mer, site armateurs de France

(www.armateursdefrance.org). 101 P.BONASSIES, C.SCAPEL, op.cit.

102 M. NDENDE, op.cit.

103 Renvoi Partie 2/Chapitre 1/ Section 1/ §3 La mise en jeu de la responsabilité du ship manager dans la pratique

Page 73: A  le contrat de shipmanagement

l’Amoco Cadiz (1978). Elle vise à prévenir la pollution en jouant sur la structure du navire et

en interdisant les rejets à la mer. Toutes les pollutions sont identifiées et particulièrement

celles provoquées par les hydrocarbures, les produits chimiques, les vrac nocifs ou encore les

produits nuisibles en colis.

Armateur pour le compte d’autrui, la société de ship management se doit de respecter les

même textes et mettre en place les mêmes mesures de sécurité/sureté/ qualité à bord du navire

comme s’il en était le ‘véritable armateur’ à défaut de quoi celui-ci peut donc voir sa

responsabilité largement engagée.

Page 74: A  le contrat de shipmanagement

CONCLUSION

L’importance du Shipman comme accord standard pour la délégation de gestion de navire à

un tiers ne peut être sous estimée. Depuis sa première publication en 1988, l’imprimé de la

Bimco a en effet connu un grand succès et a été parfaitement accepté par les armateurs et les

gestionnaires. En outre, l’absence d’un droit national ou international couvrant ce secteur a

permis au Shipman de s’imposer à une écrasante majorité comme le document de référence

dans les relations armateur/ ship manager. A l’origine, le comité documentaire de la Bimco

s’était donné pour but de créer un document fournissant des dispositions contractuelles claires

afin d’établir un juste équilibre entre les droits et obligations respectifs des parties et d’éviter

ainsi autant que possible les causes de litiges. Il serait juste de dire que cet objectif a été

atteint avec succès et les améliorations apportées à ce contrat ont permis de mieux refléter ce

que ce secteur d’activité est aujourd’hui devenu et de cerner les questions et les problèmes

réels auxquels les ship managers modernes doivent faire face.

Si les droits nationaux et internationaux ne semblent pas vouloir légiférer sur le ship

management, l’Union européenne a toutefois commencé à s’intéresser à ce domaine d’activité

notamment au travers d’impôts et des taxes qui peuvent être payées par ce type de sociétés. A

ainsi été publiée une Communication de la Commission établissant des orientations en

matière d’aide d’Etat aux sociétés gestionnaires de navires (2009/ C 132/06). « Cette

communication porte sur le droit qu’ont les sociétés qui assurent la gestion de l’équipage et la

gestion technique de navires de bénéficier d’une réduction de l’impôt sur les sociétés ou de

l’application de la taxe au tonnage. [ …] La communication s’applique à la gestion de

l’équipage et à la gestion technique, qu’elles soient assurées séparément ou collectivement

pour le même navire ».

Bien que ces sociétés suscitent encore un malaise car ayant été fréquemment épinglées dans

de graves sinistres maritimes ou dans des montages sociétaires préjudiciables aux créanciers

laissant parfois dubitatif sur leur éthique, les sociétés de ship management s’illustrent

aujourd’hui par leur volonté de transparence et dans leur implication dans le développement

de systèmes sophistiqués de gestion. La concurrence est vive entre ces sociétés de sorte

Page 75: A  le contrat de shipmanagement

qu’elles sont en permanence incitées à être plus efficaces et plus innovantes. Beaucoup de

grandes sociétés de ship management sont aujourd’hui très appréciée des armateurs pour leur

efficacité ou encore la qualité de la formation de leur propre personnel naviguant ou non. Et,

le transport devenant de plus en plus spécialisé, les ship managers s’adaptent en conséquence

afin d’être en mesure de fournir les meilleurs services à chaque type de flotte.

Page 76: A  le contrat de shipmanagement

BIBLIOGRAPHIE

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Site de la FFSA www.ffsa.fr

Site de l’ITIC, assurance www.itic-inure.com

Site Internet Lamy Line www.lamyline.com