Apprendre Enseigner Se Former en Mathematiques

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Apprendre Enseigner Se Former en Mathematiques

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  • DOCUMENTS ET TRAVAUX DE RECHERCHE EN DUCATION

    INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE PDAGOGIQUE

    Apprendre, enseigner, se former en mathmatiques : quels effets des ressources ?

    Actes des journes mathmatiques de lINRP 9-10 juin 2010

    Sous la direction de : Ghislaine GUEUDET (CREAD, IUFM Bretagne-UBO, responsable)

    Gilles ALDON (LEPS, Eductice-INRP)

    Jacques DOUAIRE (LDAR, IUFM Versailles Universit Cergy-Pontoise)

    Jana TRGALOVA (LIG, Eductice-INRP)

    Comit scientifique et d'organisation : Ghislaine GUEUDET (CREAD, IUFM Bretagne-UBO, responsable)

    Gilles ALDON (LEPS, Eductice-INRP)

    Jacques DOUAIRE (LDAR, IUFM Versailles Universit Cergy-Pontoise)

    Jana TRGALOVA (LIG, Eductice-INRP)

    Carl WINSLW (Universit de Copenhague)

  • INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE PDAGOGIQUE, Lyon, 2010

    ISBN : 978-2-7342-1202-7

    Rf. : BR 068

    Crdits dillustrations

    Contribution Michela Maschietto : Laboratorio delle Macchine Matematiche,

    Dipartimento di Matematica, Universit de Modena e Reggio Emilia (via Campi

    213/b, 41100 Modena Italia)

    Autres contributions : illustrations des auteurs, tous droits rservs

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 3

    Table des matires

    Introduction 5

    Confrences

    Enseignants et lves dans le laboratoire de mathmatiques Michela Maschietto, Universit de Modne et Reggio Emilia, Italie

    9

    Lconomie des parcours dtude et de recherche au secondaire Marianna Bosch, Facultat dEconomia IQS, Universitat Ramon Llull, Barcelone, Espagne

    19

    Recherches sur l'enseignement des mathmatiques et quipes de professeurs associs l'INRP : genses de ressources et de rseaux Luc Trouche, Eductice, INRP, France

    35

    Ateliers

    Thme 1 : Ressources, dmarches dinvestigation et rsolution de problmes 49

    ECCE maths 51

    EXPRIME 57

    ERMEL 61

    (CD) AMPERES 65

    ResCo 71

    Synthse thme 1 77

    Thme 2 : Ressources, usage des technologies en mathmatiques et en sciences et dmarches dinvestigation

    81

    ADIEM 83

    Pairform@nce 87

    TREMA-1 93

    De e-CoLab EdUmatics 99

    Casyope 103

    InterGeo 109

    Conception collective de ressources pour la mise en place des dmarches dinvestigation Rim Hammoud (LEPS Lyon 1 et INRP)

    113

    Sesamath : conception collective de ressources, repres et distance Hussein Sabra (LEPS Lyon 1 et INRP)

    119

    Synthse thme 2 123

    Thme 3 : Ressources, critres de qualit pour la conception et les usages 127

    DEMOZ 129

    GDoN 133

    InterGeo 139

    Synthse thme 3 145

    Conclusion 149

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 4

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 5

    Introduction

    Apprendre, enseigner, se former en mathmatiques : quels effets des ressources ?

    C'est cette question qui a t mise l'tude lors des 5e journes mathmatiques de l'INRP qui se sont tenues Lyon en juin 2010. Ces 5e journes s'inscrivent naturellement dans une histoire, celle des journes mathmatiques de l'INRP dbutes en 2006. La question pose tmoigne de cette inscription, en particulier en soulignant l'intrt port aux ressources. La thmatique des ressources a toujours t au cur des journes de l'INRP, elle est plus gnralement centrale dans cet institut, comme le rappelle Luc Trouche dans sa confrence.

    Enseigner, se former sont aussi deux dimensions qui ont toujours fait partie du questionnement de ces journes. Les ressources conues sont labores des fins d'enseignement et/ou de formation d'enseignants. L'objectif final, de la formation comme de l'enseignement, est certainement lapprentissage des lves. Cependant la question de l'apprentissage n'est pas souvent voque dans les textes de prsentation des journes mathmatiques qui se sont succdes d'anne en anne. Ceci constitue une premire rupture qui tait propose ici aux intervenants et participants.

    Une seconde rupture est la proposition faite chacun d'interroger les effets des ressources, ou, du moins, d'identifier dans ses travaux si des lments permettent d'clairer les effets des ressources impliques, et comment de tels effets sont pris en compte.

    Il s'agit d'amorcer une rflexion allant dans la direction de l'efficacit des ressources et de leurs usages. Il semble ncessaire de prendre en compte les effets produits pour tudier la qualit des ressources et de leurs usages, thme propos pour un des ateliers (atelier 3).

    Par ailleurs, il tait propos aux participants qui le souhaitaient de s'intresser aux dmarches d'investigation en mathmatiques, et aux ressources pouvant tre associes ces dmarches (atelier 1). Parmi ces ressources, un intrt spcifique tait port aux ressources numriques et leurs apports possibles pour les dmarches d'investigation (atelier 2).

    Le regard port sur ces dmarches tait motiv par diffrents facteurs. D'une part ces dmarches sont mises en avant par l'institution, elles occupent une place importante dans les proccupations des professeurs enseignant les mathmatiques, diffrents niveaux scolaires. D'autre part, peut-tre en consquence de ce premier facteur, de nombreux groupes de l'INRP prennent en compte dans leurs travaux des lments qui s'apparentent des dmarches d'investigation : dmarche exprimentale, rsolution de problmes etc. Enfin, voquer les effets des ressources est sans doute moins complexe lorsque l'on fait porter le questionnement sur des lments prcis, par exemple : est-ce que tel dispositif de formation a fait voluer les pratiques des professeurs vers la mise en uvre en classe de dmarches d'investigation ? Est-ce que telle ressource en ligne a permis d'accompagner les lves dans une dmarche de rsolution de problmes ?

    Ces actes rendent compte de la manire dont ces questions ont t travailles lors des journes, dans les confrences et dans les ateliers. On trouvera ainsi ici les textes des trois confrences proposes aux participants lors des journes :

    la confrence de Michela Maschietto, propos de laboratoires de mathmatiques dvelopps en Italie, et de formations proposes aux professeurs pour l'usage de ces laboratoires avec leurs lves (et en particulier des machines pour l'enseignement de la gomtrie). Cette confrence met en vidence l'apport possible d'artefacts, relevant de technologies tant anciennes que nouvelles, pour l'apprentissage des mathmatiques. Ces artefacts jouent un rle essentiel dans le laboratoire de mathmatiques, en rendant l'exprimentation par les lves la fois possible et ncessaire. Ils requirent cependant une formation spcifique des professeurs, ainsi que des ressources d'appui ;

    la confrence de Marianna Bosch sur les parcours dtude et de recherche (PER). Cette confrence souligne les contraintes institutionnelles de diffrents niveaux qui psent sur limplmentation de ces parcours, en s'appuyant sur l'exemple de la mise en uvre d'un parcours dans l'enseignement secondaire en Catalogne ;

    la confrence de Luc Trouche, dj voque ci-dessus, qui replace ces journes 2010 dans la perspective des journes qui ont prcd, et questionne plus gnralement les collectifs et les rseaux intervenant dans le travail en mathmatiques l'INRP, et leurs volutions.

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 6

    On trouvera galement les textes correspondant aux trois ateliers brivement voqus ci-dessus :

    atelier 1 : Ressources, dmarches dinvestigation et rsolution de problmes

    atelier 2 : Ressources, usage des technologies en mathmatiques et en sciences et dmarches dinvestigation

    atelier 3 : Ressources, critres de qualit pour la conception et les usages

    Ces textes rassemblent les interventions des participants ; ils prsentent plus gnralement le travail qui a t men au sein de ces ateliers, en soulignant en particulier les lments de synthse qui se dgagent des changes.

    En ouverture de ces journes, Marc Fort, reprsentant l'inspection gnrale de mathmatiques, a attir l'attention des participants sur les mathmatiques comme discipline toujours en dveloppement. Il a galement soulign les volutions de la relation entre professeurs et lves, ses nouvelles formes permises par le numrique, en classe et hors classe. Ces dimensions vives des mathmatiques et de leur enseignement taient bien prsentes dans ces journes ; ces actes, nous l'esprons, le donneront voir.

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    Confrences

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    Enseignants et lves dans le laboratoire de mathmatiques

    Michela Maschietto

    Universit de Modena e Reggio Emilia - Italie

    Cette contribution prsente certains aspects dun projet de formation professionnelle sur le laboratoire de mathmatiques, centr sur lutilisation dartefacts particuliers pour lenseignement et lapprentissage des mathmatiques, nomms machines mathmatiques. Elle constitue en mme temps loccasion dune prise en compte de la question des ressources dans le laboratoire de mathmatiques.

    1. Le laboratoire de mathmatiques: quelques lments historiques et thoriques

    1.1 Lide de laboratoire de mathmatiques dans lenseignement des mathmatiques

    Lide de laboratoire de mathmatiques est prsente depuis le dbut du XXe sicle dans les

    rflexions sur lenseignement des mathmatiques (Maschietto & Trouche 2010), o elle a t reprise divers moments. Dans le panorama actuel, la rfrence au laboratoire de mathmatiques est prsente dans les documents nationaux de divers pays europens, et mme dans des documents de la Commission Europenne (par exemple, le rapport Rocard, Rocard et al. 2007). Cette ide de laboratoire a t, et est souvent, associe lutilisation dartefacts dans lapprentissage et lenseignement des mathmatiques. En particulier, plusieurs contributions au groupe de travail 4 du Symposium ICMI

    1 (Rome 2008) et au numro spcial de ZDM The International Journal on

    Mathematics Education (Bartolini & Borba 2010) y sont consacres, o lattention est porte sur le rle de mdiation des technologies en didactique des mathmatiques.

    Dans la situation spcifique de lItalie, le laboratoire de mathmatiques est propos dans les documents de la Commission de lUnion Mathmatique Italienne (UMI-CIIM) charge de la rdaction dindications pour le curriculum des mathmatiques pour tout niveau scolaire (AA.VV. 2004). Dans le document pour lenseignement secondaire (Matematica 2003), le laboratoire de mathmatiques est dfini comme une srie de suggestions mthodologiques finalises par la construction de significations mathmatiques. Il est caractris par le recours aux outils (par exemple logiciels, calculatrices, objets manipulables) dans le travail mathmatique. Dans la liste propose, on trouve des artefacts pour la gomtrie (dont des exemples sont illustrs par les Figures 1 et 2), nomms machines mathmatiques. Ils sont dvelopps par le Laboratorio delle Macchine Matematiche (abrg MMLab dans la suite) de lUniversit de Modena e Reggio Emilia

    2 (Bartolini Bussi &

    Maschietto 2006). Cest sur les machines mathmatiques que portera cet article.

    a b c

    Figure 1. Pantographes pour a) la symtrie axiale, b) lhomothtie (Scheiner), c) tirement (Delaunay)

    1 http://www.unige.ch/math/EnsMath/Rome2008/welcome.html

    2 Site du MMLab: http://www.mmlab.unimore.it;

    voir aussi http://www.dma.ens.fr/culturemath/materiaux/materiaux-index.htm#masch

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 10

    a b

    Figure 2. Traceurs de courbes : a) parabole en fil tendu (Kepler), b) ellipse paralllogramme crois (Van Schooten)

    Le laboratoire de mathmatiques reprsente un lment clef dans les indications ministrielles italiennes, en tant que dispositif pdagogique, tout niveau scolaire.

    1.2 Quelques rfrences en didactique des mathmatiques pour le laboratoire de mathmatiques

    Dans un laboratoire, le document de la Commission UMI-CIIM prvoit des artefacts, des sujets (enseignants et lves) et des relations entre eux. Pour tudier le laboratoire comme un dispositif didactique, il est utile de le considrer comme un espace phnomnologique denseignement et dapprentissage structur par lutilisation de technologies et la prsence de processus complexes (Chiappini & Reggiani 2003). Les technologies peuvent tre numriques ou mcaniques classiques. La question cruciale est alors celle de caractriser cet espace, sa structure, les interactions entre les sujets et les processus qui vont tre sollicits.

    Une des rfrences thoriques pour le laboratoire de mathmatique est le cadre de la mdiation smiotique, dorigine vygotskienne, dvelopp par Bartolini Bussi & Mariotti (2008). Les lments essentiels de cette approche sont :

    - des artefacts culturels sont prsents en classe, lis un certain savoir mathmatique ;

    - quand un artefact est introduit en classe, on sollicite un certain travail smiotique et on vise un lien avec une certaine connaissance mathmatique ;

    - le travail conduit avec les artefacts est structur par des consignes prcises ; cependant, la seule manipulation dun artefact nest pas suffisante lacquisition des mathmatiques dont il est porteur ;

    - la structure didactique qui soutient le travail avec les artefacts correspondants suit un cycle didactique, compos des travaux individuels, collectifs et en petit groupe ;

    - lvolution des produits ( textes situs ) du travail smiotique fait avec lartefact est dirige vers des textes mathmatiques.

    Lenseignant joue un rle essentiel dans lorganisation des consignes et dans les discussions partir des travaux des lves, visant la construction de significations mathmatiques.

    Cette approche est partiellement croise avec lapproche instrumentale (Rabardel 1995). Pour un approfondissement sur ce point, voir Maschietto & Trouche (2010).

    1.3 Diffrentes formes de laboratoire de mathmatiques

    Certains travaux sur lenseignement des mathmatiques (Bartolini & Maschietto 2006, Garuti et al. 2007, Maschietto & Martignone 2008, Kahane 2006) mettent en vidence diverses formes de laboratoire de mathmatiques, selon le choix de variables comme la gestion de la classe, le type de travail demand aux lves, la dure et le lieu. En ce qui concerne les machines mathmatiques, dont linstitution de rfrence est le MMLab de lUniversit de Modena e Reggio Emilia, les formes de laboratoire suivantes peuvent tre distingues :

    1. laboratoires dans les locaux du MMLab ;

    2. laboratoires dans les classes ;

    3. laboratoires dans la formation professionnelle.

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 11

    Cette contribution se centrera sur la troisime forme, ce qui permettra cependant de revenir la deuxime. La premire forme reprsente une construction originale du MMLab

    3 (Maschietto 2005). Il

    sagit dune sance de laboratoire de mathmatiques (ce nous appelons session de laboratoire) dune dure totale de deux heures. Celle-ci est compose de trois moments (prsentation historique des machines mathmatiques, travail des lves en petit groupe sur des machines, prsentations collectives de travail conduites par chaque groupe). Elle est gre par le personnel du MMLab.

    2. Le laboratoire de mathmatiques dans la formation professionnelle

    Le laboratoire, en tant que dispositif pdagogique, est prsent dans la formation initiale des matres dcoles depuis 10 ans en Italie. la Facult dEducation de lUniversit de Modena e Reggio Emilia, le laboratoire pour les mathmatiques a pris la forme de laboratoire de mathmatiques (Bartolini Bussi & Maschietto 2008), en accord avec le document de la Commission UMI-CIIM. Une formation continue sur le laboratoire de mathmatiques avec les machines mathmatiques a t propose dans le cadre du projet Science et Technologies Action 1

    4, financ par le conseil administratif de la Rgion Emilia-

    Romagna ( laquelle Modena appartient), dmarr au dbut 2009 et termin en juin 2010. La finalit du projet tait la diffusion de la pratique du laboratoire de mathmatiques dans lenseignement secondaire (de la classe de sixime la seconde), mme si des professeurs dcole y ont particip. En particulier, ce projet avait deux objectifs : dune part dfinir un modle de formation des enseignants propos du laboratoire de mathmatiques, dautre part constituer des salles didactiques dcentralises (Frabboni 2005) dans la Rgion mme et quipes avec des machines mathmatiques.

    La formation propose des lments structurant une approche du travail avec des artefacts en didactique des mathmatiques dans lenseignement, en accord avec les rfrences thoriques esquisses dans (1.2) : analyse des artefacts, expriences de sances de laboratoire par les enseignants eux-mmes, rflexions sur les potentialits et utilisation didactique, gestion didactique. On dtaillera cela ci-dessous.

    Ce projet a aussi entran tout un travail sur les ressources concernant les machines mathmatiques et le laboratoire. En particulier, mais on reviendra sur ce point dans la suite, deux types de transformations ont t introduits : une transformation des fiches utilises dans les sessions au MMLab et une transformation/conception de ressources par les enseignants en formation, la suite dun travail collaboratif.

    2.1 Lorganisation de la formation

    Le dispositif de formation se composait de deux phases : une premire phase de formation en prsence et une deuxime phase dexprimentation en classe de parcours didactiques portant sur la mthodologie du laboratoire avec les machines mathmatiques. Pour la deuxime phase, des tuteurs des enseignants taient prvus. Dans la deuxime anne, pour le site de Modena, la formation a t accompagne dans toutes ses phases par une plateforme (Figure 3) inscription rserve. Elle tait compose de trois sections : FORUM, FORMATION et EXPERIMENTATION. Une quatrime section (TUTEUR) a t cre lusage des formateurs et des tuteurs. La disponibilit de la plateforme pendant la premire phase de la formation avait aussi pour objectif de permettre le processus de gense instrumentale (Rabardel 1995), afin que celle-ci devienne un instrument de travail pour les enseignants, en vue de la deuxime phase. En effet, comme certains enseignants lont dclar, lutilisation dune plateforme demande du temps et de lnergie, mme sils reconnaissaient les avantages quelle apportait. En outre, il faut aussi considrer les rapports personnels dlicats de chaque enseignant aux technologies numriques.

    3 http://educmath.inrp.fr/Educmath/ressources/documents/machines-mathematiques/

    4 http://www.mmlab.unimore.it/on-line/Home/ProgettoRegionaleEmiliaRomagna.

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    Figure 3. Page daccueil de la plateforme

    2.1.1 La formation en prsence

    La premire phase de la formation tait constitue de sept sances en prsence, organises autour des pantographes pour les transformations gomtriques (Figure 1), des traceurs de courbes (Figure 2), de la rgle et du compas et dune machine arithmtique (Zero+1, voir Figure 4b). Chaque sance prvoyait une premire partie de travail des enseignants sur une des machines mathmatiques, une deuxime partie de discussion sur le travail conduit et sur la mthodologie du laboratoire.

    Dans la premire partie des sances, les enseignants taient confronts une machine mathmatique, laide dune fiche dexploration (Figure 4b) contenant des questions-clefs (Comment la machine est-elle faite ? Que fait-elle ? Pourquoi le fait-elle ?), dans une situation de laboratoire (Figure 4a). Les questions contenues dans les fiches permettent de mettre en vidence la structure, les mathmatiques en jeu, avec le but aussi de soutenir la gense instrumentale chez le professeur. Dans cette premire phase, les enseignants taient en position lves vis--vis des machines. Ensuite, une discussion collective permettait de pointer des caractristiques du travail fait. Dans cette phase dexploration, lhtrognit des groupes (par rapport lcole dappartenance : cole primaire, collge, lyce, institut professionnel) a toujours permis un change fructueux.

    a b

    Figure 4. Sance de formation sur la machine Zero+1 : a) travail en petit groupe, b) fiche dexploration

    La deuxime partie des sances tait centre sur les potentialits didactiques des machines, sur la mthodologie du laboratoire (en accord avec les cadres thoriques, 1.2) et sur les ventuelles implmentations en classe. Les dernires sances ont t aussi ddies lorganisation de la deuxime phase de la formation.

    Pendant les sances en prsentiel, les enseignants ont pu exprimenter des sances de laboratoire de mathmatiques, ce qui leur a permis de se rendre compte des types de processus susceptibles dtre en jeu quand on propose la construction des mathmatiques par la mdiation dartefacts. Il nous semble que lors du passage dune machine lautre, les enseignants ont commenc sapercevoir quun schme dexploration des machines tait en train de se dvelopper, comme un

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    professeur en tmoigne : la mthodologie de travail nous semble consolide, on discute sur lobjet comme artefact et comme instrument .

    Comme il a t prcis, une plateforme a soutenu les deux phases de la formation et en a permis le suivi. En ce qui concerne la premire, les enseignants ont exploit la section FORMATION et le FORUM. La section FORMATION a t conue et utilise pendant la premire partie de la formation pour recueillir le matriel produit pour et dans les sances de formation. La section a t structure au fur et mesure de lavance de la formation. Avec les ressources utilises par les formateurs, pour chaque sance un espace wiki tait disposition des groupes denseignants chargs de rdiger un compte rendu de la sance mme. La cration de cet espace avait pour objectif de favoriser la participation des enseignants dune part, de laisser trace des droulements des sances du point de vue des participants, dautre part. Un dossier tait disposition pour tout matriel (fichier de gomtrie dynamique, photos).

    2.1.2 La prparation des parcours en classe

    Pour la deuxime phase, les enseignants se sont rpartis en quatre groupes thmatiques, selon les contenus mathmatiques et/ou les machines mathmatiques auxquelles ils taient intresss. Les groupes taient : transformations gomtriques, rgle et compas, sections coniques et machine arithmtique (Zero+1). Chaque groupe thmatique a travaill de faon autonome, coordonn par un enseignant-tuteur. Tous avaient un espace rserv sur la plateforme. Trois groupes sur quatre ont articul des moments en prsence avec le travail sur la plateforme. Un groupe, pour des questions qui relevaient des rapports personnels linformatique, a travaill surtout en prsence et par courrier lectronique.

    Par exemple, le groupe de travail sur les transformations gomtriques a dmarr la prparation des exprimentations dans les locaux du MMLab. Les enseignants ont examin certaines machines, choisi quelles machines proposer aux lves et avec quelles fiches. Ils ont aussi tabli un calendrier de prt de machines mathmatiques au MMLab. Les interactions se sont poursuivies sur la plateforme, sur deux lments : la prparation des fiches et le matriel pour des travaux pratiques, ainsi que pour lvaluation des comptences acquises

    Un journal de bord sur le travail conduit en classe tait demand la fin de la formation.

    2.2 Ressources

    Comme nous lavons anticip, la formation a entran un travail au niveau des ressources (Gueudet & Trouche 2009) dans le laboratoire avec les machines mathmatiques.

    La planification de la formation a conduit la conception de ressources pour la formation ( destination des formateurs) et de ressources pour les enseignants pour leurs exprimentations en classe. Nous ne rentrons pas ici dans lanalyse de ces ressources, mais nous centrons notre attention sur ltude du lien entre ces ressources-l et les ressources conues par les enseignants, ce qui nous semble tre li au processus de gense documentaire du professeur (ibid.).

    Dun point de vue gnral, la formation propose a mis en jeu divers niveaux constitutifs dune ressource, sur lide densemble de ressources (ibid.) :

    - le niveau des supports matriels utiliss : les machines mathmatiques, les fiches pour lexploration des machines (dfinies pour les sessions de laboratoire au MMLab, 1.3), les livres, les fichiers de gomtrie dynamique, mais aussi les suggestions de parcours ;

    - le niveau des contenus mathmatiques (transformations gomtriques, sections coniques, constructions gomtriques la rgle et au compas, criture et proprits des nombres, mais galement argumentation et preuve) ;

    - le niveau des lments relatifs lexploitation en classe et la planification de parcours (la mthodologie du laboratoire).

    Dans la deuxime phase de la formation, les enseignants ont dvelopp des documents partir des ressources disponibles (sur la plateforme et appartenant leur propre ensemble de ressources). Ce dveloppement a pris place en particulier lors dun travail collaboratif conduit au sein des groupes. Une partie de ce travail, effectu par les enseignants dans le but de construire un parcours pour leurs lves, est visible dans la grille de planification que chacun a rendue avant le dbut des sances en classe. Une premire analyse de ces grilles montre que les enseignants sont partis du travail partag

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    au sein de chaque groupe thmatique ( 2.1.2), mais quils lont adapt leur classe. Cela semble li un processus de conception pour lusage (Folcher 2003).

    Comme exemple du travail dimplmentation en classe du laboratoire de mathmatiques, considrons le cas du groupe sur les sections coniques. Cet exemple nous semble montrer des lments du travail des enseignants pour et dans le laboratoire de mathmatiques, ainsi que leur travail documentaire partir des ressources disponibles. Le travail collaboratif, men dans le groupe thmatique rassemblant les enseignants intresss au sujet des coniques a produit un parcours, dont la premire sance (Figure 5a) se droulait dans les locaux du MMLab (Figure 5) et les autres dans ltablissement scolaire (dans la salle de classe ou dans une salle ad hoc). Deux enseignants (sur trois) ont dcid de dmarrer avec le traceur dellipse en fil tendu (ellipse du jardinier, Figure 6), tandis que la machine choisie par tous tait le traceur de parabole en fil tendu (voir Figure 2a).

    a b

    Figure 5. Sance dans les locaux du MMLab

    a b

    Figure 6. Sance dans les locaux du MMLab

    Des fiches lve ont t prpares, partir des fiches donnes dans la formation et dautres supports contenus dans le site du MMLab. Dans les grilles de planification, dautres ressources apparaissent, comme les logiciels de gomtrie dynamique. Celles-l montrent la contribution personnelle de chaque enseignant. Pour la premire sance, une ressource disponible tait le diaporama utilis lors de sessions de laboratoire au MMLab, ainsi que le MMLab mme avec ses modles des cnes (raliss avec des fils tendus qui constituent la surface conique, Figure 5b). Ce diaporama a t labor par les enseignants mmes en fonction de la classe et du temps disponible. Par exemple, lenseignant du lyce classique a ajout la version grecque des dfinitions de cne donnes dans les Elments dEuclide.

    Chaque groupe thmatique a produit des ressources qui ont t mises sur la plateforme.

    3. Le laboratoire de mathmatiques dans les classes

    Comme exemple de laboratoire de mathmatiques conduit dans le cadre de la formation, nous proposons les lments essentiels dun parcours sur les sections coniques, propos dans un institut professionnel. Il a t organis en cycles didactiques (1.2).

    Sance 1. Cette sance sest droule dans le MMLab. Aprs une introduction historique sur les sections coniques, lenseignante a dmarr le travail sur le traceur de parabole en fil tendu (Figure 2a)

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    par deux fiches lve (Figures 7 et 8) concernant lexploration de la machine et la mise en vidence de sa structure. Les lves ont travaill en petit groupe. A la fin de la sance, lenseignante a recueilli les observations et amen les lves partager un vocabulaire commun.

    En ce qui concerne les fiches, la premire (Figure 7) prsente deux consignes pour les lves ( Dcris soigneusement la machine en utilisant des dessins si ncessaire et Mesure les composantes de la machine ) et prvoit des espaces pour les rponses et, surtout, pour des dessins ventuels.

    Figure 7. Fiches 1a Figure 8. Fiche 1b

    La deuxime fiche (Figure 8) est conue comme contrle, et pour llve et pour lenseignant, pour assurer le reprage des composantes de la machine.

    Sances 2 et 3. Ces sances taient centres sur le fonctionnement de la machine (Figure 9) et sur la justification de ce fonctionnement (Figure 10) (questions : Que fait-elle ? Pourquoi le fait-elle ? 2.1.1).

    Les lves ont toujours travaill en petit groupe sur les fiches ( Figure 9). Cest sur ces fiches, qui demandaient une conjecture sur la nature de la courbe trace et une argumentation, que les potentialits mais aussi la complexit de la gestion de sances de laboratoire se sont manifestes. La prsentation des rponses aux fiches sur les tracs obtenus par la machine a induit les lves se rpartir entre ceux qui soutenaient que la courbe tait une parabole et ceux qui par contre soutenaient quil sagissait dune ellipse. Une discussion collective est ne autour de ce sujet, o des processus dargumentation ont t mis en place par les lves.

    Figure 9. Fiches 2 Figure 10. Fiche 3

    Elle est faite en bois avec une tige aussi en bois, au centre, peu prs, il y a un clou qui fonctionne comme un point de rfrence pour y mettre un fil qui arrive une ligne droite (tige) de fer, formant un triangle, avec deux feuilles fermes avec du scotch.

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    Sance 4. A la suite de la discussion ne pendant la sance 3, lenseignante a modifi la fiche prvue pour cette quatrime sance afin de faire produire des textes collectifs aux lves (travail en petit groupe) sur les contenus des sances prcdentes, en les incitant modifier les paramtres de la machine (par exemple la longueur du fil ou la position du foyer).

    Sance 5. La rdaction dun texte collectif de la classe tait lobjectif de cette sance.

    4. Commentaires et perspectives

    Dans cet article, nous avons amen quelques contributions au sujet de la formation professionnelle des enseignants propos du laboratoire de mathmatiques et des ressources le concernant. Le projet, dans lequel la formation a t dveloppe, avait pour finalit de promouvoir la diffusion de la pratique didactique du laboratoire, comme un espace de construction de significations mathmatiques et dmergence de processus dexploration, dargumentation et de preuve.

    La formation propose reprsente un objet assez complexe, o les enseignants participants ont d se confronter des processus de gense instrumentale (par rapport aux machines mathmatiques) et des processus dappropriation et de conception de ressources afin de proposer un laboratoire leurs classes. En outre, ils ont d sapproprier une mthodologie de conduite de classe, celle du laboratoire de mathmatiques ( 1.2), qui tait parfois loigne de leur pratique professionnelle. Elle a introduit un nouveau type de travail parmi les enseignants, de nature collaborative. Ceci a permis la conception de parcours partags par les enseignants intresss au mme contenu mathmatique.

    Les grilles de planification des expriences en classe et les journaux de bord, rendus par les enseignants la fin du parcours et disponibles sur la plateforme, rendent compte du travail documentaire du professeur. Ils montrent des processus de conception de ressources pour ses propres cours, mais aussi la conception de ressources dune sance lautre. Une enseignante a crit : Chaque exploration propose par les fiches peut tre le dbouch pour des dveloppements imprvus proposs par les lves : il faut sen rendre compte en cours et changer ce que lon a prvu pour saisir loccasion . Ces textes semblent montrer aussi des gestes professionnels qui sont caractristiques des enseignants et dautres gestes qui semblent provenir de la mthodologie du laboratoire.

    Les journaux de bord tmoignent de la richesse des parcours proposs par rapport aux processus mis en uvre par les lves, ainsi que de la complexit de la gestion didactique. Leur analyse montre, en particulier, la prsence dautres processus, qui ntaient pas suffisamment pris en compte dans la formation : lorchestration instrumentale (Trouche 2001, Drijvers et al. 2010), surtout quand dautres outils que les machines ou dautres espaces que la salle de classe sont considrs, en est un exemple. Lanalyse des fiches dlves et des vidos des sances montre comment la mthodologie du laboratoire, ainsi que le temps donn lexploration des machines, semble permettre aux lves de rentrer dans une dmarche de formulation de conjectures et de preuve (lies au fonctionnement de la machine et sa justification). Les textes des lves, ainsi que les discussions, reprsentent, en accord avec les rfrences thoriques du laboratoire ( 1.2), le matriau partir duquel lenseignant peut construire les mathmatiques contenues dans les machines mmes. Dans cette construction se joue lefficacit du laboratoire des mathmatiques comme espace denseignement et dapprentissage.

    Remerciements

    Je remercie tous les enseignants qui ont travaill dans le projet pendant cette anne scolaire, en particulier Fulvia Baccarani et Giuliana Bettini.

    Rfrences

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  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 19

    Lcologie des parcours dtude et de recherche au secondaire5

    Marianna Bosch

    Facultat dEconomia IQS, Universitat Ramon Llull (Barcelone)

    Les expriences menes en Catalogne depuis 2004 sur la mise en place de parcours dtude et de recherche (PER) dans des tablissements du secondaire et en premier cycle universitaire montrent quel point lintroduction de nouveaux dispositifs denseignement perturbe les conditions traditionnelles de lenseignement et comment elle provoque de nouveaux besoins mathmatiques et didactiques. Lanalyse de ces conditions cologiques, qui ne peut rester enferme dans cette cologie particulire quest le travail scolaire en classe de mathmatiques, permet de montrer les contraintes institutionnelles qui psent sur limplmentation des PER et de signaler quelques opportunits daction pour avancer dans la cration de nouvelles ralits didactiques situes dans la zone de proche dveloppement de lordre de choses existant.

    1. Lcologie du didactique

    Linnovation en matire denseignement se ralise la plupart des fois dans des conditions trs locales, et cela dun double point de vue : elles sont souvent mises en place par un nombre rduit de professeurs dans un petit nombre de classes et elles naffectent chaque fois quune partie limite du curriculum de ltape ducative considre. Le passage de lexprimentation locale limplmentation gnralise de ces activits pose toujours de grandes difficults. On a souvent constat que les pratiques denseignement mises en place dans des situations particulires ne sont pas faciles diffuser pour quelles puissent tre reprises de faon durable et gnralise dans des conditions sensiblement diffrentes. Tel est le cas, par exemple, des activits de modlisation et des pratiques dinvestigation dans la classe (voir, par exemple, Burkhartd, 2006, ou Barquero, Bosch, Gascn, 2010). Mais on a jusquici peu tudi de manire systmatique le problme des conditions ncessaires pour quun certain type dactivit ducative puisse vivre dans une classe, en remplaant par exemple celui traditionnellement tabli dont on ne connat pas plus les conditions qui le soutiennent et lui permettraient ou lempcheraient dvoluer. Pour la didactique des mathmatiques, ltude des conditions qui permettent, et des contraintes qui entravent, la mise en place et le dveloppement des pratiques didactiques et mathmatiques constitue une ligne de recherche fondamentale. Cest ce quon appelle lcologie du didactique.

    Bien que la recherche en didactique se soit souvent centre sur ltude de cette cologie particulire quest la vie de la classe de mathmatiques dans un tablissement scolaire, on sait, depuis la mise en vidence des phnomnes de transposition didactique (Chevallard, 1985), que les conditions que peut crer un professeur dans sa classe et les contraintes qui dlimitent sa marge de manuvre ne peuvent sapprhender sans aller voir ce qui se passe au-del de la classe, dans les institutions qui la surplombent et sont constamment en interaction avec elle. Depuis quelques annes, la Thorie Anthropologique du Didactique (TAD)

    6 propose danalyser cette cologie en recourant ce quon

    appelle lchelle des niveaux de (co)dtermination didactique (voir figure 1). Cette chelle prend comme rfrence le niveau de la discipline o sigent les conditions spcifiques de lenseignement dun contenu particulier pour nous, les mathmatiques et qui constitue, en un sens, le terrain privilgi de la recherche et de linnovation didactique. Mais ce niveau vit en interaction constante avec les niveaux suprieurs, celui de la pdagogie qui comprend les conditions qui affectent la diffusion de toutes les disciplines, celui de lcole o lon trouve ce qui fait la spcificit de lenseignement et lapprentissage scolaire dune discipline, puis les niveaux plus gnriques qui sont ceux de la socit et de la civilisation. Les sous-niveaux du secteur, domaine, thme et question font rfrence aux diffrentes divisions qui structurent les organisations mathmatiques enseignes de manire varie selon les institutions denseignement considres (par linfluence, en particulier, des niveaux suprieurs de lchelle), et qui introduisent des rapprochements ou, au contraire, des distinctions.

    5 Certains des dveloppements prsents ici sont paratre dans les actes de la XV

    e cole dt de Didactique des

    Mathmatiques de 2009.

    6 On peut trouver un grand nombre darticles sur la TAD au site: http://yves.chevallard.free.fr/

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 20

    Civilisation

    Socit

    cole

    Pdagogie

    Discipline

    Secteur

    Thme

    Question

    Figure 1. Lchelle des niveaux de co-dtermination didactique

    Les conditions cres aux diffrents niveaux de lchelle de codtermination didactique sont ce qui permet quune activit denseignement et dapprentissage puisse avoir lieu et puisse voluer dans une certaine direction. Mais, par le mme mouvement, elles empchent dautres types dvolutions et lmergence dautres types de pratiques. Lanalyse de lcologie du didactique constitue de ce point de vue un lment essentiel de toute innovation ducative si lon veut dpasser le niveau local de lexprimentation dun nombre rduit dactivits dans un petit nombre de classes diriges par des professeurs particuliers.

    Nous verrons ici un exemple dune telle analyse dans le cas de limplmentation dun nouveau dispositif denseignement, un parcours dtude et de recherche, dans une classe de 4

    e dun collge de

    Barcelone. Les modifications que provoque ce dispositif dans le contrat didactique habituel de la classe mettront en vidence aussi bien les conditions qui ont pu tre cres pour la mise en place de la nouvelle activit, que les contraintes manant des diffrents niveaux de codtermination didactique qui en empchent un fonctionnement normalis.

    2. Limplmentation de parcours dtude et de recherche au Secondaire

    Depuis cinq ans, notre quipe de recherche travaille avec un groupe de professeurs de diffrents tablissements de la rgion mtropolitaine de Barcelone sur la mise en place dactivits dtude et de recherche (AER) et de parcours dtude et de recherche (PER) autour de lenseignement de lalgbre au collge et au lyce

    7. Nous ne dvelopperons pas ici les notions dAER et de PER qui ont t

    introduites en TAD depuis quelques annes comme dispositifs didactiques permettant de penser lenseignement actuel des mathmatiques avec toutes ses variantes (depuis la leon en classe jusquaux activits de recherche hors-classe comme les TPE) pour le faire voluer vers un paradigme qui repose plus sur une pistmologie du questionnement du monde que sur celle du monumentalisme dominant aujourdhui lenseignement secondaire

    8.

    Nous indiquerons simplement quaussi bien les AER que les PER prennent comme point de dpart une question problmatique Q pas ncessairement mathmatique dont ltude conduit la rencontre dun certain nombre dorganisations praxologiques (mathmatiques et autres) qui fonctionnent comme outils de production de rponses R la question Q de dpart, ainsi qu dautres sous-questions R, R, etc. qui en dcoulent. La diffrence entre une AER et un PER est quune AER reste gnralement associe un thme ou organisation mathmatique dtermine du curriculum, au

    7 En Espagne, lenseignement secondaire est divis en deux tapes: quatre annes denseignement secondaire

    obligatoire (ESO) pour les lves de 12 16 ans et deux annes de baccalaurat (bachillerato) pour les lves de 16 18 ans.

    Il existe pourtant un tablissement unique pour les deux tapes, appel institut denseignement secondaire . Certains

    tablissements, comme celui que nous considrerons ici, sont des institut-cole qui intgrent lenseignement primaire (3-12

    ans) et le secondaire (12-18).

    8 Voir ce propos Chevallard (2004, 2005, 2006a, 2006b, 2007).

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 21

    sens o la rponse R produire requiert fortement la mobilisation des contenus de ce thme ou organisation mathmatique. Par contraste, le PER maintient un caractre beaucoup plus ouvert et large : le produit final R

    obtenir comme rponse Q nest pas dtermin (ni mme prvisible)

    lavance et le processus dtude engendr par Q doit pouvoir conduire rencontrer une multiplicit de sous-questions et de rponses partielles. Si lon considre ces sous-questions et rponses comme des germes dAER, alors on peut dire qu travers un PER les AER peuvent acqurir un haut niveau dintgration par le fait de fonctionner comme outils dlaboration de R

    . On sloigne ainsi du

    monumentalisme des savoir dont lobjectif est de faire visiter aux lves un certain nombre duvres culturelles sans grande connexion les unes avec les autres, pour avancer vers le paradigme du questionnement du monde o les savoirs sont des objets questionner, dconstruire et reconstruire, dont la valeur ne peut pas tre une donne en soi mais doit tre toujours reconquise, selon leur capacit soit questionner ltat des choses prvalant, soit apporter des rponses ces questions.

    linstar du Voyage Ithaque tel que nous le raconte le pote grec Konstantinos Kavafis, cest en visant la construction de la rponse R

    Q que le PER nous fera rencontrer des savoirs et savoir-

    faire de faon plus ou moins brutale selon les besoins et moyens dont on disposera, et les sages auprs de qui on pourra sinstruire :

    Quand tu partiras pour Ithaque, souhaite que le chemin soit long, riche en pripties et en expriences. [] Souhaite que le chemin soit long, que nombreux soient les matins d't, o (avec quelles dlices !) tu pntreras dans des ports vus pour la premire fois. Fais escale des comptoirs phniciens, et acquiers de belles marchandises : nacre et corail, ambre et bne, et mille sortes d'enttants parfums. Acquiers le plus possible de ces enttants parfums. Visite de nombreuses cits gyptiennes, et instruis-toi avidement auprs de leurs sages. []

    9

    Or, la diffrence des belles marchandises que doit acqurir Ulysse, les savoirs et savoir-faire dont on aura besoin tout au long du PER ne seront pas visits par leur importance ou beaut, mais par leur capacit produire des rponses la question Q de dpart.

    Nous nous arrterons ici sur lun des PER expriments dans le cadre dun projet de recherche en didactique centr sur lenseignement de la modlisation algbrique et fonctionnelle tout au long de lenseignement secondaire. Nous nous proposons, dans ce projet, dexprimenter diffrents dispositifs didactiques des AER et des PER qui permettent dintroduire lalgbre comme un outil de modlisation et de dvelopper cet outil tout au long de lenseignement obligatoire jusqu larticuler avec la modlisation fonctionnelle au lyce. Le PER que nous considrerons ici a t expriment pendant deux annes scolaires dans des classes de 3

    e et de 2

    e de deux instituts diffrents de

    Barcelone. Le problme de lanalyse, valuation et dveloppement du PER nous conduirait nous questionner, par exemple, sur le pouvoir gnrateur de la question initiale, sur les diffrentes voies possibles pour le parcours, les sous-questions qui peuvent (ou devraient) apparatre et leur possibilit dmergence, les lments du milieu qui peuvent tre mis disposition des lves etc. Nous laisserons ces questions de ct pour nous concentrer ici sur les aspects de lcologie du didactique que la perturbation introduite par le PER permet de mettre en vidence. Mais, avant cela, nous prsenterons une brve description de la question initiale, de son pouvoir gnrateur de nouvelles questions et, surtout, son lien avec ce que nous considrons comme les diffrentes tapes du processus dalgbrisation.

    3. Le PER Plans dpargne et les tapes du processus dalgbrisation

    Le PER sur les plans dpargne part dune question initiale qui au dpart semble pouvoir se rsoudre par des calculs arithmtiques simples mais dont ltude requiert dentrer dans un processus de modlisation du systme initial (faire des conomies partir de diffrentes options dpargne) qui fait avancer dans les diffrents niveaux du processus dalgbrisation. Nous illustrerons ces niveaux en parcourant rapidement la question effectivement pose aux lves, qui est la suivante

    10 :

    Les 30 lves de 5e veulent commencer conomiser de largent pour leur voyage de fin dtudes la fin de la 2

    de. Ils ont prvu

    de partir une semaine au mois de juin 2013 Paris.

    Ils ont fait un calcul approch des dpenses dun lve [qui montent 600 ]. Ils devraient pouvoir disposer de largent en janvier 2012 pour payer la rservation lagence de voyages. Ils veulent commencer lpargne en janvier 2010 et se demandent comment faire.

    9 Traduction de Marguerite Yourcenar.

    10 Voir le document pour les lves dans lannexe 1.

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 22

    Ils considrent lide de faire un premier versement maintenant (par exemple, de 200 personne) et de linvestir dans un plan dpargne la banque [qui] offre 4 plans diffrents pour des versements 3 ans :

    PLAN DPARGNE A

    On nous donne 10 % du capital annuellement et on nous enlve la fin 1,5 % de la somme de dpart titre de commission.

    PLAN DPARGNE B

    On nous donne 3 % du capital trimestriellement et on nous enlve la fin 3 % de la somme de dpart titre de commissions.

    PLAN DPARGNE C

    On nous donne 1,8 % du capital trimestriellement et on nous enlve la fin 1 % de la somme de dpart titre de commission.

    PLAN DPARGNE D

    On nous donne 0,7 % du capital mensuellement et on nous enlve la fin 1 % de la somme de dpart titre de commission.

    Lactivit se droule dans ce que nous appelons un Atelier de mathmatiques o le groupe dlves de la classe, sous la direction du professeur, doit laborer une rponse crite cette commande passe par les clients qui sont ici les lves de 5

    e.

    On peut esprer que ltude commence par un travail dans le domaine des nombres et lusage de formules numriques . Ainsi, par exemple, pour le plan A, on calculerait le capital disponible un an aprs lautre : 200 + 0,10 200 = 220 pour la premire anne, 242 + 0,10 242 0,015 200 pour la deuxime, etc. Lors du travail avec le plan mensuel, ou peut-tre avant, peut apparatre le besoin dutiliser le multiplicateur (1 + r)

    n, o r est lintrt et n le nombre de priodes, pour calculer le capital

    final. Mme si, dans les expressions utilises, il napparat pas de lettre, on peut considrer quon entre alors dans la premire tape du processus dalgbrisation caractrise par le travail crit (simplification de calculs) sur des expressions littrales. Ainsi, pour le plan D, on peut obtenir directement le capital disponible en calculant 200 1,007

    36 0,01 200. Le travail dans cette premire

    tape permet de justifier que le plan B est le meilleur des 4 pour tout capital initial car lon obtient :

    Plan A) C0 1,13 0,015 C0 = 1,3160 C0

    Plan B) C0 1,0312

    0,03 C0 = 1,3958 C0

    Plan C) C0 1,01812

    0,01 C0 = 1,2287 C0

    Plan D) C0 1,00736

    0,01 C0 = 1,2755 C0

    Ce qui donne, dans le cas du plan B, le capital initial augment du 39,58 %.

    La deuxime tape du processus dalgbrisation arrive lorsquon se voit amen travailler avec des expressions avec une inconnue. Ainsi, pour obtenir le capital final de 600 personne, les lves peuvent faire diffrents essais (surtout sils se servent de la calculatrice en ligne Wiris), mais un moment donn ils devraient arriver poser lquation x(1 + r)

    n d x = 600 (o r et n sont les valeurs

    qui correspondent chaque plan). Le besoin de cette expression, sil napparat pas de manire spontane, peut venir du fait que le prix du voyage peut varier et quil faut donc expliquer aux lves qui passent la commande comment calculer le versement lorsquils connatront le prix exact du voyage. Dans cette tape peut aussi surgir la question de dterminer quel intrt permettrait dobtenir les 600 personne avec un versement initial de, par exemple, 200 personne. Cela permet que la formule implicite que lon a utilise jusqu prsent, C0(1 + r)

    n d C0 = 600, engendre diffrentes

    quations, selon que linconnue est le capital initial C0, lintrt r (ou laccroissement 1 + r) ou la commission d.

    La troisime tape du processus dalgbrisation correspond au travail avec des quations paramtres. En effet, mme lorsquon considre le meilleur plan (B), la conclusion laquelle on arrive est quil faut un versement de dpart trop lev pour obtenir une somme voisine de 600 personne. Il est donc naturel quon veuille essayer de ngocier lintrt et/ou la commission. Cela peut porter poser des questions relatives la dtermination de C0 en fonction de r ou de d : comment dpend C0 de lintrt, de la commission, etc. On peut aussi poser les questions linverse : on peut calculer lintrt ncessaire pour obtenir les 600 avec un versement initial de 300 , cest--dire, regarder comment varie r en fonction de C0 , et de mme pour d.

    Ltude de la ngociation avec la banque porte travailler avec la fonction d = f(r) = (1 + r)12

    Cfinal/C0, o le rapport Cfinal/C0 joue le rle de paramtre. Le graphe de y = (1 + r)

    12 montre que si r varie entre

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 23

    1 % et 5 %, ce rapport ne peut pas tre plus grand que 1,59, cest--dire quon peut obtenir un accroissement maximal de 59 % (avec r = 5 %). Ainsi, pour obtenir les 600 , il faudrait un versement initial tel que 600/C0 = 1,59, soit C0 = 600 /1,59 377,36 . On rentrerait ainsi dans la quatrime tape du processus, celle du travail avec des formules et ltude de la relation entre variables, ce qui suppose le passage vers la modlisation fonctionnelle.

    Il est fort probable que, un moment donn, apparaisse la formule gnrale C0(1 + r)n d C0 = Cfinal

    et que lon utilise cette formule pour rsoudre les questions de relation entre Co, r et d. Il se peut aussi que lon narrive pas manipuler la formule (la transformer en expressions quivalentes), mais quil convienne galement de ltablir explicitement, mme si ce nest que pour pouvoir la prsenter dans la rponse finale pourvoir, avec des instructions pour pouvoir lutiliser si jamais on avait besoin de considrer de nouveaux plans dpargne. Le schma ci-aprs rsume le passage dans ces quatre tapes :

    Figure 2. Les quatre tapes dalgbrisation

    Lhypothse que nous faisons est que ltude de la question de dpart, du fait quelle ne peut pas se rpondre compltement dans les tapes intermdiaires du processus dalgbrisation, devrait conduire avancer jusqu la quatrime tape, celle de lutilisation de modles algbriques en forme de formules que lon peut manipuler, avec le support du CAS Wiris, comme des expressions fonctionnelles entre deux variables. Mais il convient dinsister sur le fait que ltude qui donne lieu au PER doit toujours garder en vue la question de dpart comme objectif principal du travail faire et que dautres stratgies possibles dlaboration de rponse doivent pouvoir tre envisages. Il sagit, avant tout, de pouvoir rdiger en forme de rapport final, une rponse la commande passe qui soit la fois claire et utile pour les clients de latelier.

    4. cologie du PER Plans dpargne

    Lannexe 2 prsente un bref compte rendu du droulement de latelier de mathmatiques Plans dpargne qui a eu lieu dans un institut de Barcelone avec une classe de 30 lves de 3

    e. Cest la

    deuxime anne que le professeur met en place latelier et il prvoit une dure de deux semaines du mois de mai interrompues par une semaine o les lves partent en colonie. tant donn quaucun chercheur de lquipe ne pouvait faire les observations pendant cette priode, le professeur a fait leffort de nous envoyer par courrier lectronique un bref compte rendu de chaque sance au fur et mesure de lavance de latelier. Nous disposons ainsi dun tmoignage rare et prcieux des difficults rencontres par un professeur dans la direction du travail demand dans latelier. Son rcit des faits quil juge important de rapporter fera apparatre les conditions situes aux diffrents niveaux de lchelle de codtermination didactique qui font que le PER puisse se drouler. Du fait que la mise en place du PER trouble, en un certain sens, la pratique dtude habituelle dans la classe, il fera aussi apparatre certaines des contraintes qui viennent entraver le droulement du PER tel que lavait prvu le professeur. Cela nous permettra dillustrer lutilisation de lchelle des niveaux de codtermination didactique comme outil danalyse pour mieux connatre cette cologie didactique souvent aride des dispositifs denseignement. Nous invitons ici le lecteur dcouvrir le rapport du professeur que nous prsentons dans lannexe 2 avant de continuer la lecture des dveloppements qui suivent.

    4.1 Le niveau de lcole

    Le PER que nous considrons est mis en place dans un milieu scolaire : un institut denseignement

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 24

    secondaire public de Barcelone. Dans le cas qui nous occupe, il sagit dun tablissement intgr 3-18 qui accueille des lves depuis la maternelle jusquau baccalaurat avec deux classes de 25-30 lves par groupe dge

    11. Il existe ainsi certaines conditions dues aux particularits de lcole-institut

    qui semblent faciliter la mise en place du PER. Par exemple le fait que la plupart des lves se connaissent depuis lge de trois ans et ont lhabitude du travail en groupe, aussi bien en classe que hors classe. Ou encore quil sagit dun tablissement qui participe de nombreux projets dinnovation ducative et, en particulier, dintgration des TICE dans lenseignement. Cest pourquoi les lves peuvent disposer dun ordinateur portable par groupe dans certaines sances de classe, situation rcente lors de lexprimentation de latelier et qui, comme on le voit par les nombreux commentaires du professeur, ne cesse de poser problme dans la classe : on ne russit pas sauvegarder la sance, la connexion au vidoprojecteur ne marche pas, on a des problmes avec le rseau, la batterie des portables est dcharge, etc.

    La tradition de cette cole dorganiser une semaine de colonies la campagne est un autre exemple de condition la fois favorable et contraignante pour le PER. Dun ct, cest en sappuyant sur cette activit que la question de dpart du PER prend sa force et crdibilit : lorsque les colonies supposent des frais supplmentaires (cas dun voyage, par exemple), les lves et les professeurs organisent des activits varies pour obtenir des moyens de financement. Or, en mme temps, la semaine de dpart effectif des lves de la classe en colonies est venue interrompre le droulement du PER, ce que le professeur a anticip en divisant latelier en deux parties : un bref AER sur les jeux de magie comme rappel de la modlisation algbrique (voir annexe 3) suivi du PER sur les plans dpargne, dont la dure se voit alors raccourcie.

    Enfin, comme dans la grande majorit dinstituts de secondaire catalans, le professeur doit grer la mise en place du PER dans une organisation scolaire trs dtermine, o lon consacre aux mathmatiques quatre sances par semaine dune dure de 50 minutes chacune avec une organisation horaire rigide (on russit parfois avoir deux sances lune la suite de lautre mais, comme cest le cas ici, avec lheure du repas au milieu), o chaque matire est organise de manire indpendante des autres avec un professeur responsable diffrent, etc. Ces conditions de travail constituent pour le professeur autant de contraintes assumer et adapter la gestion du PER.

    4.2 Le niveau de la pdagogie

    Le niveau de la pdagogie inclut les conditions qui rgissent lorganisation de ltude scolaire des diffrentes disciplines. Cest l o nat le contrat pdagogique qui rgit un certain rapport entre professeur et lves et permet que certains gestes automatiques puissent avoir lieu : il revient au professeur de proposer les tches de ltude et de les valider ; alors que les lves ont un rle plus passif jouer : ils sassoient en silence, acceptent les tches qui leur sont commandes par le professeur, apportent les devoirs faits la maison, lvent la main pour passer au tableau, etc. La programmation du travail faire est aussi la charge du professeur, ainsi que la gestion temporelle de chacune des sances et des thmes qui configurent le programme de lanne.

    Or la mise en place dun PER suppose que lon puisse modifier certaines de ces conditions qui, autrement, pourraient finir par entraver le travail raliser. Ce nest pas un thme qui est ici lorigine du processus dtude, mais une question pose au groupe dtudiants laquelle il faut fournir une rponse qui demande plusieurs sances de travail. Il nexiste pas ncessairement un savoir bien identifi dans le programme dtude qui permet de produire cette rponse et cest bien la valeur de la rponse produite collectivement quon devra pouvoir juger le succs de ltude ralise. Le dispositif de latelier de mathmatiques et son mode de fonctionnement est ici une aide importante la gestion de ce changement. On voit ainsi comment, lors de la premire sance, le professeur prend bien la peine dintroduire les nouvelles conditions du travail faire (les nouvelles clauses du contrat) :

    Jai prsent latelier en soulignant bien la mthodologie suivre : travail en groupe, initiative [ prendre par les lves], ralisation dun journal de chaque sance quil faut prsenter la sance suivante et laboration dun dossier individuel. (Sance 1)

    Il convient ici de signaler une particularit de lcole considre qui a sans doute facilit ce

    11

    Cest un cas relativement exceptionnel dans lenseignement public catalan, mais trs frquent dans lenseignement

    priv ou demi-priv (tablissements ayant pass un concert avec ladministration).

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    changement : le fait que les lves ont lhabitude, depuis la fin du primaire, surtout pour les matires de sciences naturelles et sociales, dorganiser ltude partir de la ralisation de diffrents projets autour de quelques grands thmes ( le travail des hommes , le traitement des rsidus , le papier , la famille , etc.) partiellement en classe et la maison, avec du travail en groupe et individuel, quils doivent rdiger en forme de dossier et rendre au professeur la fin de chaque thme, le jour de lexamen. Ajoutons ce propos une contrainte moins visible mais fortement restreignante dans la mise en place des PER qui est celle de la division disciplinaire de ltude scolaire : alors que les matires de sciences naturelles et sociales senseignent gnralement de forme relativement combine (du moins au primaire et au collge), les mathmatiques ont une forte tendance rester toujours lcart de toute possible mixit. Il est intressant de noter que, dans ces projets que ralisent les lves depuis le primaire autour de diffrents thmes codisciplinaires, il est rare de faire appel de manire systmatique aux mathmatiques, dont lenseignement se droule gnralement lcart des projets en jeu.

    On voit bien ici combien les niveaux de lcole et de la pdagogie sont fortement interdpendants. Pour que les lves puissent se mettre travailler en groupe, il faut que le mobilier soit adapt, que les lves aient acquis des techniques particulires de travail en groupe, pour savoir partager et ngocier le travail faire et tirer profit des leurs diffrences individuelles, que ltude prolonge dun thme ou question prenne du sens pour le groupe, que la recherche dinformations pertinentes pour ltude ne reste pas toujours la charge du professeur, etc. Certes, ces conditions peuvent aussi stablir au niveau uniquement de la discipline ltude des mathmatiques mais il est vident que le cot que cela suppose et leffort pour les maintenir en vie risquent de rendre trs instable la mise en place du dispositif.

    4.3 Le niveau de la discipline

    tudier les conditions et contraintes qui sont spcifiques de la discipline tudie (ici, les mathmatiques) reprsente le domaine par excellence de lanalyse didactique. Nous en indiquerons ici quelques traits, mais nous voulons avant tout insister sur linteraction constante qui existe entre les diffrents niveaux de codtermination. Nous venons de voir comment les niveaux de lcole et de la pdagogie conduisent le professeur (et les lves) prendre un certain nombre de dcisions qui, en rendant possible quun type dtude comme celle des PER puisse avoir lieu dans la classe, limitent la fois lensemble de gestes et de moyens disponibles pour le faire. Plus que cela, il est fort possible que linvisibilit due la naturalisation des niveaux de lcole et de la pdagogie fait que ni les professeurs ni les chercheurs ne pensent toujours essayer de les modifier. La division entre disciplines en est un bon exemple : le professeur ne soccupera que de ce quil croit identifier comme mathmatique dans la question qui est pose la classe, sans arriver rellement la prendre au srieux. Son commentaire propos de loffre dING Direct est trs illustratif ce propos :

    Certains disent que les intrts du plan B sont trs bas et que cela peut samliorer. Un lve dit que le compte dpargne dING-direct peut donner un taux de 8 % trimestriel (je pense que si cest vrai je suis en train de faire limbcile, je devrais le vrifier). (Sance 8)

    Il semble que la dvolution de la question sest faite auprs des lves, mais pas auprs du professeur ! Pour les lves, cest sans doute grce cette ralit scolaire que sont les colonies, leur facilit pour trouver des renseignements propos des investissements en banque (sur Internet par exemple) et leur habitude due au contrat pdagogique particulier de cette cole davoir apporter des informations pour leurs dossiers en dehors de ce qui est vu en classe, quils ont t par contre beaucoup plus capables dentrer dans le jeu et de prendre au srieux la question qui leur tait pose.

    Dautres liens entre le contrat didactique et le contrat pdagogique apparaissent ici. Nous avons dj dit que la mise en place dun PER demande un renouveau du partage de responsabilits au sein de la classe. Pour pouvoir prendre la question de dpart au srieux, il ne faut pas en connatre la rponse a priori (bien que lon puisse disposer de nombreux lments de rponse fournir). La topogense est donc ngocier : ce nest plus au professeur dapporter ou valider la bonne rponse au problme pos, ni mme de poser les questions traiter. En effet, le droulement du PER devrait faire merger de nouvelles sous-questions, dont certaines devraient apparatre en voix des lves. Mais il est difficile pour le professeur de ne pas indiquer les voies suivre ou de procurer les moyens et renseignements ncessaires pour poursuivre :

    Beaucoup de questions. Ils avaient besoin dobtenir mon approbation de ce quils faisaient. Ils voulaient que je leur donne des instructions pour faire les calculs. Je leur ai suggr de faire une table pour organiser les rsultats obtenus pour chaque priode de travail. (Sances 5 et 6)

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    Il devrait aussi se produire un changement radical au niveau des critres de validation des rsultats fournir. Le contrat didactique, en accord avec le contrat pdagogique et scolaire, tend attribuer au professeur le droit de la vrit ultime sur les questions de sa discipline. Cela se manifeste plusieurs reprises dans le droulement de latelier : bien que les calculs arithmtiques devraient permettre de constituer un milieu assez solide pour la construction et validation des formules de la part des lves, cest toujours devant une rue de mains leves attendant lapprobation du professeur que lon se trouve, ds que la question aborde naccepte pas une rponse production immdiate :

    Ils mappellent au fur et mesure pour me poser des questions ou valider leurs initiatives.

    Isoler le temps produit une rue de mains leves. (Sances 7 et 8)

    Nous naborderons pas ici lanalyse des sous-niveaux de la discipline (domaine, secteur, thme) qui demanderait une tude plus dtaille du travail concret ralis dans le PER pour voir de quelle manire le type dtude propose peut affecter (et tre affecte par) les articulations difficiles entre calcul numrique, travail algbrique et modlisation fonctionnelle. Si le PER stait dvelopp davantage, on aurait sans doute pu observer lvolution de la problmatique dinvestissement initiale (intrt compos et commissions) vers celui des dpts rguliers, ce qui demanderait une nouvelle articulation du travail algbrique et ltude de fonctions avec les sries numriques et leur somme.

    4.4 Les niveaux de la socit et de la civilisation

    Nous avons laiss pour la fin les niveaux plus gnriques de la socit et de la civilisation qui, a priori, peuvent sembler les plus trangers lanalyse didactique. Or il sagit de deux niveaux spcialement importants pour lcologie des PER du fait que ceux-ci promeuvent un rapport au savoir qui va compltement lencontre du monumentalisme dominant dans notre culture occidentale. La difficult pour questionner et dconstruire les savoirs tablis afin de pouvoir sen approprier et leur redonner du sens va se manifester de manire subreptice mais constante dans le droulement des PER.

    Par exemple, il est assez habituel, dans le PER expriment comme dans dautres, que les lves nacceptent pas bien le fait de consacrer plusieurs semaines ltude dune unique question. Cette contrainte devrait tre considre initialement au niveau didactique, en ce quelle peut sembler spcifique de lenseignement des mathmatiques lcole, et elle requiert pour la dpasser la cration de nouvelles infrastructures didactiques pour pouvoir grer les nouvelles chronogenses, topogenses et mesogenses que requirent les PER. En effet, la perception que le temps didactique navance pas est lie en partie aux difficults pour institutionnaliser les rponses partielles obtenues qui ne sont pas toujours faciles identifier en termes des mathmatiques savantes. Or cette situation affecte plus gnralement lenseignement scolaire de toutes les disciplines (niveau de la pdagogie) o les problmes abords ne durent jamais plus dune ou quelques sances et o les lves ont lhabitude de voir dfiler trs rapidement les diffrents thmes et savoirs les uns aprs les autres. Et cette pratique scolaire de la visite des savoirs est soutenue par une certaine culture pistmologique dominante dans nos socits qui attribue aux savoirs une valeur en soi, que lon apprend connatre et inventorier, mais que lon a du mal traiter comme de vritables outils de questionnement du monde. Yves Chevallard (2009, p. 36) dcrit cette contrainte dans les termes suivants :

    [Cest] la rsistance quoppose dans nos socits le paradigme scolaire de la visite des savoirs, typique des socits hritires de lAncien Rgime et qui dfinit le contrat du professeur avec la socit en termes de savoirs visits avec ses lves (et qui, ajouterai-je, regarde le chercheur comme un savant , celui qui sait, et non comme celui qui questionne et tente de rpondre). Cest l un paradigme de ltude scolaire qui faonne les lves en spectateurs, qui lon montre les savoirs, qui lon donne un petit rle dans le spectacle du savoir, mais que lon maintient distance de ses tenants et aboutissants motivation, utilit, usages. Mais quoi rsiste le paradigme de la visite des savoirs ? une volution plantaire (quoiquingalement dveloppe) vers ce que jai appel le paradigme de questionnement du monde lequel, de ce fait, tarde merger. Or cest ce paradigme seulement qui permettrait denseigner par PER , et cela parce quil obligerait enseigner ainsi, le contrat du professeur avec la socit snonant ds lors en termes de questions tudies (et non plus de savoirs visits), comme il en va dun programme de recherche.

    La mise en place des PER court le risque, linstar des mots de Kavafis la fin de son pome sur le voyage Ithaque, de cder aux pressions du monumentalisme et conduire attribuer plus de valeur aux moyens utiliss en particulier les savoirs qu la rponse quils sont censs aider laborer en fin du parcours :

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    [] Garde sans cesse Ithaque prsente ton esprit. Ton but final est d'y parvenir, mais n'courte pas ton voyage : mieux vaut qu'il dure de longues annes, et que tu abordes enfin dans ton le aux jours de ta vieillesse, riche de tout ce que tu as gagn en chemin, sans attendre qu'Ithaque t'enrichisse.

    Ithaque t'a donn le beau voyage : sans elle, tu ne te serais pas mis en route. Elle n'a plus rien d'autre te donner. Mme si tu la trouves pauvre, Ithaque ne t'a pas tromp. Sage comme tu l'es devenu la suite de tant d'expriences, tu as enfin compris ce que signifient les Ithaques.

    Or en mme temps, et de manire sans doute paradoxale, si le but des PER doit constituer une fin en soi, il nen reste pas moins que cest bien le processus dlaboration de la rponse qui va donner du sens et aux savoirs utiliss et au projet denseignement lui-mme. Il ne sagit plus denseigner montrer et faire visiter des rponses toutes faites des questions anciennes et souvent oublies, mais de redcouvrir une possible valeur des savoirs travers le processus lui-mme dlaboration de rponses. De l linsparabilit dIthaque et du voyage Ithaque.

    5. De nouveaux parcours suivre

    Le professeur que nous venons dobserver volue dans un milieu didactique, pdagogique, scolaire et social dtermin qui lui facilite ou du moins rend possible la mise en place et la gestion de certaines pratiques dtude avec les lves, tout en dlimitant lunivers des possibles et en contraignant son plan daction. Tous les accidents que nous avons vu se produire dans le droulement du PER observ, bien que conjoncturels, ne doivent pas sapprhender comme des effets secondaires viter, car ce qui est structurel est que tout PER sera accident par des contraintes manant dun niveau de codtermination ou dun autre. Les imprvus constituent en ralit la rgle gnrale de tout fonctionnement didactique : cest parce que les processus dtude ont lieu dans une socit, dans un environnement scolaire dtermin et selon des pratiques pdagogiques installes que des contraintes gnriques vont toujours effleurer, dans un sens ou dans lautre, pour faciliter et, la fois, entraver une certaine volution prvue du dispositif didactique considr. Tout travail dinnovation didactique, pdagogique et scolaire doit prendre en considration lensemble de ces conditions et contraintes qui agissent aux diffrents niveaux de lchelle de codtermination didactique, que ce soit comme point dappui ou comme obstacle dpasser. Ltude de lcologie des organisations didactiques et mathmatiques qui vivent et de celles qui devraient pouvoir vivre dans les classes est ainsi un axe de recherche incontournable pour la didactique. Non seulement elle affecte de faon totalement interdpendante les diffrents types de contrats qui se vivent dans les classes, mais elle constitue aussi une source permanente de limitations pour la rnovation des pratiques didactiques, limitations que nous aurions tort dattribuer aux professeurs, aux lves ou aux chercheurs et concepteurs de nouvelles ressources.

    La notion de PER, que nous avons prsente jusquici comme un outil de conception, gestion et analyse des processus didactiques, doit aussi nous servir, dans une sorte de mouvement mta-analytique, comme paradigme pour penser notre propre travail de questionnement sur le systme denseignement des mathmatiques, que ce soit depuis la position de chercheur en didactique, de concepteur de nouvelles ressources ou de Professeur travaillant linnovation des infrastructures didactiques et mathmatiques pour lenseignement. Notre point de dpart commun est toujours constitu par des questions vivantes qui mergent propos de lenseignement des mathmatiques. Prendre ces questions au srieux requiert que lon ralise des parcours dtude et de recherche souvent bien plus longs et complexes que lon navait imagin. Et cela exige aussi de construire un rapport renouvel aussi bien aux savoirs didactiques et de toute autre nature qui nous servent comme outils de recherche et dinnovation qu ceux que nous prenons comme objet de lenseignement : un rapport affranchi dassujettissements institutionnels et culturels.

    Et nous allons sans doute rencontrer le paradoxe indiqu plus haut : nous ne devons pas esprer que, la fin des parcours raliss, les rponses produites apparaissent comme des solutions de prt--porter produites par la recherche lusage des professeurs. Les rponses vont prendre plutt la forme de nouvelles questions et de nouveaux outils de savoir et autres pour la mise en place de nouveaux parcours que nous devrons apprendre explorer ensemble. Voil pourquoi, comme le disait Yves Chevallard rcemment, cest vers une nouvelle configuration de coopration entre professeurs, recherche et systme denseignement que nous devons nous orienter (Chevallard, 2010) :

    Lenseignement des mathmatiques et ses entours, dune part, et la recherche sur lenseignement des mathmatiques, dautre part, sont deux systmes largement non communicants : le premier semble se soumettre entirement lui-mme, repoussant la recherche au-del de son horizon vital, tandis que le second nchappe pas toujours la tentation acadmique, qui pousse certains chercheurs se situer en surplomb par rapport leur objet dtude mme. []

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    Cest une configuration historiquement nouvelle du systme denseignement que nous devons inventer, o personne ne se poste en surplomb mais o tout soit contribution et coopration. Leffort doit porter tant sur la recherche que sur larticulation entre recherche et dveloppement du systme denseignement.

    Rfrences

    Barquero, B., Bosch, M., Gascn, J. (2010). The ecology of mathematical modelling: constraints to its teaching at university level. Proceedings of CERME 6, January 28

    th - February 1st 2009, Lyon,

    France (pp. 2146-2156). www.inrp.fr/editions/cerme6

    Bosch, M. & Chevallard, Y. (1999). La sensibilit de lactivit mathmatique aux ostensifs. Recherches en didactique des mathmatiques, 19(1), 77-124.

    Burkhardt, H. (2006). Modelling in Mathematics Classrooms: reflections on past developments and the future, Zentralblatt fr Didaktik der Mathematik, 38(2), 178-195.

    Chevallard, Y. (1985). La transposition didactique, du savoir savant au savoir enseign. Grenoble, Francia: La Pense Sauvage (2nde dition 1991).

    Chevallard, Y. (2004). Vers une didactique de la codisciplinarit. Notes sur une nouvelle pistmologie scolaire. Journes de didactique compare 2004 (Lyon, 3-4 mai 2004). http://yves.chevallard.free.fr/spip/spip/article.php3?id_article=45

    Chevallard, Y. (2005). La place des mathmatiques vivantes dans lducation secondaire : transposition didactique et nouvelle pistmologie scolaire. In Ducourtioux, C. & Hennequin, P.-L. (ds.) La place des mathmatiques vivantes dans lenseignement secondaire. Publications de lAPMEP N 168 (pp. 239-263). Paris : APMEP.

    Chevallard, Y. (2006a). Steps towards a new epistemology in mathematics education. In Bosch, M. (Ed.) Proceedings of the 4

    th Conference of the European Society for Research in Mathematics

    Education (CERME 4). (pp. 21-30). Barcelona: FUNDEMI-IQS.

    Chevallard, Y. (2006b). Les mathmatiques lcole et la rvolution pistmologique venir. Journes 2006 de lAPMEP (Clermont-Ferrand, 26-28 octobre 2006). http://yves.chevallard.free.fr

    Chevallard, Y. (2007). Pass et prsent de la Thorie Anthropologique du Didactique. In A. Estepa, L. Ruiz, F. J. Garca (Eds.), Sociedad, escuela y matemticas. Aportaciones de la Teora Antropolgica de lo Didctico (TAD) (pp. 705-746). Jan: Publicaciones de la Universidad de Jan.

    Chevallard, Y. (2009). La notion de PER : problmes et avances. IUFM de Toulouse. http://yves.chevallard.free.fr/spip/spip/article.php3?id_article=161

    Chevallard, Y. (2010). Lenseignement des mathmatiques un carrefour? La parole http://educmath.irnp.fr

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 29

    Annexe 1. Atelier Plans dpargne : Document pour les lves

    PRPARATION DU VOYAGE DE FIN DTUDES

    Les 30 lves de 5e veulent commencer conomiser de largent pour leur voyage de fin dtudes

    la fin de la 2de

    . Ils ont prvu de partir une semaine au mois de juin 2013 Paris.

    Ils ont fait un calcul approch des dpenses dun lve :

    Transport Logement Loyer vlos Muses, excursions, etc. TOTAL

    150 50 jour x 5 jours

    = 250

    50 150 600 /pers.

    Ils devraient pouvoir disposer de largent en janvier 2012 pour payer la rservation lagence de voyages. Ils veulent commencer lpargne en janvier 2010 et se demandent comment faire.

    Ils considrent lide de faire un premier versement maintenant (par exemple de 200 personne) et de linvestir dans un plan dpargne

    12 la banque quutilise habituellement lassociation des parents

    dlves. Cette banque offre 4 plans diffrents pour des versements 3 ans qui sont les suivants :

    PLAN DPARGNE A

    On nous donne 10 % du capital annuellement et on nous enlve la fin 1,5 % de la somme de dpart titre de commission.

    PLAN DPARGNE B

    On nous donne 3 % du capital trimestriellement et on nous enlve la fin 3 % de la somme de dpart titre de commissions.

    PLAN DPARGNE C

    On nous donne 1,8 % du capital trimestriellement et on nous enlve la fin 1 % de la somme de dpart titre de commission.

    PLAN DPARGNE D

    On nous donne 0,7 % du capital mensuellement et on nous enlve la fin 1 % de la somme de dpart titre de commission.

    TAPE 1. Les lves de 5e vous demandent dtudier la situation et de leur rdiger une

    recommandation sur ce quils peuvent faire pour conomiser largent pour le voyage.

    Prenez en compte que les parents des lves ont dit quils ntaient pas disposs payer une somme de dpart trop haute.

    Il se peut aussi que, la fin, le prix du voyage ne soit pas exactement de 600 . Il faut leur expliquer de combien il faudra augmenter le versement si, la fin, le prix est, par exemple, 10 % ou 20 % plus cher que prvu.

    TAPE 2. Les parents recommandent aux lves dessayer de ngocier avec la banque un type dintrt plus haut ou une commission plus petite.

    Sils peuvent le faire, est-ce plus important daugmenter lintrt ou de diminuer la commission ? Comment doivent-ils formuler la ngociation ? Quel intrt ou commission devraient-ils obtenir ? Que vaut-il mieux ngocier, lintrt annuel, trimestriel, mensuel ?

    12

    Dpt constitu par un ensemble de paiements successifs et planifis dans le temps, avec lobjectif de disposer dun

    capital final un moment dtermin. En gnral, ces plans ont un type dintrt assez lev en plus de certains avantages

    fiscaux.

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 30

    Annexe 2. Journal des sances

    Latelier se droule dans un collge-lyce public de Barcelone intgrant une cole maternelle et primaire, et qui accueille donc des lves de 3 18 ans. Il y a deux classes denviron 30 lves par niveau dge. Le professeur JV travaille avec lune des deux classes.

    JV fait partie de notre groupe de travail depuis 3 ans. La premire anne en observateur, la seconde en mettant en place un atelier sur les jeux de magie (classe de 3

    e) puis, lanne daprs, celui des

    plans dpargne que nous considrons ici mais avec un groupe rduit dlves de 3e.

    tant donn que cette fois-ci aucun observateur nest disponible, il rdige lui-mme le journal des sances et nous lenvoie rgulirement par mail. Il en rsulte le rsum ci-aprs (traduit du catalan au franais). Quelques commentaires ont t ajouts entre crochets pour faciliter la lecture.

    Professeur : JV

    Horaire : Mardi : 13 h 30 - 14 h 30 et 15 h 30 - 16 h 30 (avant et aprs le djeuner)

    Jeudi : 10 h 00 - 11 h 00

    Vendredi : 9 h 00 - 10 h 00

    Latelier commence le 5 mai 2009, sinterrompt pendant une semaine o les lves vont en colonie (11-15 mai) puis reprend la semaine daprs.

    SANCES 1 et 2 : mardi 5 mai (2 heures)

    Prsentation de latelier : Jai prsent latelier en soulignant bien la mthodologie suivre : travail en groupe, initiative [cest aux lves de prendre linitiative de ce quil y a faire], ralisation dun journal de chaque sance quil faut prsenter la sance suivante et laboration dun dossier individuel [ rendre en fin datelier]

    13.

    Formation des groupes : Je les ai confectionns pralablement et les ai donns tout faits afin doptimiser le travail et dquilibrer les groupes au maximum. En prenant cela en compte, jai prfr faire des groupes de 3. Chaque groupe a pu disposer dun ordinateur pour travailler avec la calculatrice Wiris [calculatrice symbolique daccs libre par Internet]. On perd un peu de temps pour aller chercher les ordinateurs [portables], les distribuer, les mettre en marche, etc.

    Dbut : Aprs avoir distribu chacun deux le dossier [ensemble des documents pour les lves], les lves ont commenc travailler sur les jeux de magie (partie I). Ils travaillaient et systmatiquement venaient laborer chaque nonc lordinateur connect au vidoprojecteur [il doit sagir dune mise en commun pour corriger le travail des lves]. Ils essayaient avec des nombres concrets puis essayaient darriver une expression algbrique qui justifie le rsultat.

    Je leur ai demand, pour la prochaine sance, de rsoudre les noncs correspondants la deuxime partie. Nous pourrons ainsi faire une mise en commun des rsultats et, tout de suite aprs, commencer la partie des plans dpargne.

    13

    Les lves de cet tablissement sont trs habitus prparer des dossiers pour certains des thmes travaills

    dans les diffrentes matires. Ces dossiers comprennent gnralement une compilation de tous les documents utiliss pendant

    ltude, ordonns, complts et structurs de faon constituer un tout reli et prsentable : page de titre avec illustration,

    table des matires, documents de classe et documents personnels, etc. Ce dispositif nest pas courant dans les autres collges

    ou lyces catalans.

  • Actes journes mathmatiques INRP 2010 31

    Nous navons pas russi sauvegarder la sance Wiris.

    SANCE 3 : jeudi 7 mai

    La sance daujourdhui a t problmatique. La connexion de lordinateur au vidoprojecteur na pas march et cela nous a fait perdre quelques minutes. Par ailleurs plusieurs ordinateurs nont pas pu tre connects et on na donc pas pu utiliser Wiris ; en consquence, il a fallu se servir du tableau.

    Nous avons commenc avec une mise en commun des jeux de magie (II). Certains navaient rien fait et je me suis un peu fch. Peu peu jai vu que la plupart avaient travaill. Certains taient arrivs la conclusion en essayant des nombres concrets et dautres ont t capables darriver une conclusion en utilisant une lettre. Jai d insister sur lutilisation des indices de variation (1,20 n suppose un accroissement de 20 % du nombre n, tout comme n + (20/100) n, qui est ce quils crivent de prfrence). Ils se sont aussi rendu compte quil fallait utiliser des parenthses au lieu des crochets [la calculatrice Wi