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8/13/2019 Arrt Muhoza.17.06.1999.fr
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Arrt de la Cour dAppel de KIGALI du 17 juin 1999
MUHOZA C/ MINISTERE PUBLIC.
ET
MINISTERE PUBLIC C/ MUHOZA.
GENOCIDE ASSASSINAT ASSOCIATION DE MALFAITEURS NON
ASSISTANCE A PERSONNE EN DANGER (article 256 C.P. du Rwanda, livre II) APPEL RECEVABILITE (article 24 de la loi organique du 30/8/96) - TEMOINS
PREUVE - INCOMPETENCE (matrielle) DOUBLE INCRIMINATION -ACQUITTEMENT LIBERATION (immdiate).
1 . Appel du M ini stre public (peine minime, non prise en compte suf f isante des tmoignages)
2 . Appel du prvenu pour incomptence du tr ibunal (inf raction de droit commun) et inf ractionnon tablie Recevable et fond.
3 .Appel recevable et f ond Acquittement et l ibration immdiate.
1 . La Cour dclare recevable mais non fond lappel du ministre public qui argue du
caractre infrieur de la peine prononce celle qui avait t requise et de la non prise encompte suffisante des tmoignages charge. Elle considre que :- Le Ministre public na pas rapport les preuves tangibles de ce que les infractions
taient tablies ;- Les contradictions apparues dans les tmoignages charge ont conduit le tribunal,
juste titre, constater que les infractions de crime de gnocide, assassinat et association
de malfaiteurs en vue de commettre le gnocide ntaient pas tablies.- Le tribunal a prononc la peine quil estimait juste et proportionne aprs avoir
apprci souverainement les faits.
2 . La Cour dclare recevable et fond lappel du prvenu qui argue du moyen delincomptence de la chambre spcialise. Dans son analyse au fond, elle estime que le
Tribunal ne pouvait connatre de linfraction de non assistance personne en danger(article 256 C.P. Rwandais), infraction de droit commun, ds lors quelle avait considr
quil ny avait pas gnocide
3 . Ayant reconnu lincomptence de la chambre spcialise et dclar recevable et fondlappel du prvenu, la Cour dcide son acquittement et ordonne sa libration immdiate.
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(traduction libre du kinyarwanda)
LA COUR DAPPEL DE KIGALI, SIEGEANT A KIGALI, EN MATIERE
DINFRACTIONS CONSTITUTIVES DU CRIME DE GENOCIDE OU CRIMES
CONTRE LHUMANITE, A RENDU LARRET DE LA MANIERE SUIVANTE :
PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE DU 17/06/1999
En cause : Ministre Public
C/
MUHOZA Ernest, fils de KAVUTSE Lonard et MUKANGANGO Marie Jeanne, n en 1968
en commune Kagano, prfecture Cyangugu, y rsidant, enseignant, clibataire, sans biens niantcdents judiciaires connus.
PREVENTIONS
1 Avoir, Nyamirambo, commune Nyarugenge, Prfecture de la Ville de Kigali, Rpublique
Rwandaise, entre avril et juin 1994, comme auteur, coauteur ou complice, intentionnellement et
en connaissance de cause, commis le crime de gnocide prvu et puni par la convention
internationale du 9 dcembre 1948 portant prvention et rpression du crime de gnocide et la
convention internationale de Genve du 26 novembre 1968 sur limprescriptibilit des crimes de
guerre et des crimes contre lhumanit ; ce crime est rprim par la Loi Organique n 08/96 du30/08/1996.
2 Avoir, dans les mmes circonstances de temps et de lieux, comme auteur, coauteur oucomplice, commis un meurtre, article 311 du Code Pnal Rwandais, Livre II.
3 Avoir, dans les mmes circonstances de temps et de lieux que ci-dessus, comme auteur,
coauteur ou complice, intentionnellement et en connaissance de cause, omis de porter assistance
aux personnes en danger alors quil ne pouvait en rsulter un pril pour lui, et chass ceux qui
avaient trouv refuge auprs de lui ; infraction prvue et rprime par larticle 256 du Code Pnal
Rwandais, Livre II.
4 Avoir, dans les mmes circonstances de temps et de lieux, intentionnellement et enconnaissance de cause, cr des associations de malfaiteurs dans le but dattenter aux personnes
ou aux biens, infraction prvue et rprime par larticle 281 du Code Pnal Rwandais, Livre II.
Parties Civiles : Nant.
LA COUR
Vu que les enqutes prliminaires ont commenc la Police Judiciaire du Parquet deKigali, que sitt termines, lOfficier de Police Judiciaire en a transmis les pices de la procdure
lOfficier du Ministre Public qui, la clture de linstruction prparatoire, a dfr MUHOZAErnest devant la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali et que sa
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plainte fut inscrite au rle sous le n RP 023/CS/KIG que laffaire fut appele laudience du24/09/97, MUHOZA tant assist par Me AKIMPAYE Adle et que le prononc eut lieu le
10/03/1998 de la manire ci-aprs :
Dcide de recevoir et dexaminer laction introduite par le Ministre Public ;
La dclare fonde en partie, tel quexpliqu dans les constate ; Dboute MUHOZA ;
Le condamne une peine demprisonnement de deux ans ;
Lui ordonne de payer 8.950Frws des frais de justice de la prsente instance dans le dlai
de 30 jours, sinon 20 jours de contrainte par corps suivi dexcution force sur ses biens ;
Dcide la disjonction de laction civile ;
Attendu quaprs le prononc en audience publique, le Ministre Public et MUHOZA
nont pas t satisfaits du jugement, que le Ministre Public a interjet appel en date du
12/03/1998 et que MUHOZA en fit de mme le 23/03/1998, que ce double appel a t inscrit au
rle pnal des affaires relatives aux infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimes
contre lhumanit sous le n RPA 40/98/R1/Kig ;
Attendu que le dossier de laffaire RP 023/CSK RMP 55/9/S12 charge de MUHOZA
Ernest a t transmis la cour en date du 23/12/1998 ; quil fut confi au Conseiller rapporteur en
vue den prparer linstruction daudience et quaprs ltablissement de son rapport, le Prsidentde la cour a pris lordonnance de fixation daudience au 25/02/1999 9 heures du matin ; qu ce
jour laudience na pas eu lieu faute de moyens dappel du prvenu et du Ministre Public et
quelle fut remise au 8/04/1999, mais qu cette date elle na pas eu lieu non plus, tant donn
que les moyens dappel du prvenu avaient t communiqus tardivement si bien que le Ministre
Public navait pas eu suffisamment de temps pour y rpliquer ; quelle a t reporte au
13/05/1999, jour o lexamen de la recevabilit de ce double appel a commenc ;
Ou le Conseiller rapporteur ;
I. Des dlais dappel et des conditions de recevabilit
Constate que le jugement dont appel a t rendu en date du 10/03/1998, que le Ministre
Public a interjet appel le 12/03/1998 et que MUHOZA a fait de mme le 23/03/1998, tous les
deux dans les dlais car ils nont pas dpass les 15 jours prvus par larticle 24, alina premier
de la Loi Organique n 08/96 du 30/08/ 1996 sur lorganisation des poursuites des infractions
constitutives du crime de gnocide ou de crimes contre lhumanit ; que par ailleurs le dossier de
laffaire charge de MUHOZA Ernest a t transmis la Cour dAppel en date du 23/12/1998 etque laudience de lexamen de la recevabilit de lappel fut fixe au 25/02/1999 dans un dlai ne
dpassant pas les 3 mois prvus lalina 3 de larticle 24 de la Loi Organique cit ci - avant ;
II. De lexamen de la recevabilit de lappel
Constate que larticle 24, alina premier de la Loi Organique n 08/96 du 30/08/1996 sur
lorganisation des poursuites des infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimes
contre lhumanit admet lappel dun jugement rendu par une chambre spcialise interjet dans
un dlai de 15 jours et portant sur les questions de droittelles que le non respect de la loi, lamauvaise interprtation dune disposition lgale ou la condamnation pour une infraction non
commise ; que cet article admet galement lappel bas sur des erreurs flagrantes de fait et
notamment lorsque le tribunal a commis une erreur sur la personne poursuivie ou sur les motifsde sa dcision qui, sil nen avait pas t ainsi, lauraient amen prendre une dcision contraire ;
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Constate que le tribunal na pas respect la Loi Organique n 08/96 du 30/08/1996 sur
lorganisation des poursuites des infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimescontre lhumanit commises depuis le 1eroctobre 1990 car, tel que Daniel de Beer, en
collaboration avec CYIZA, GASASIRA, KANUBANA, MUGENZI et RWAGASORE en donnedes explications de son livre paru aux Edition Alter Egaux 1997 la page 41 en disant que : Il
faut souligner que la non-assistance personne en danger(art.256 du CPR L.II) fait partie des
infractions qui ne peuvent pas tre poursuivies en application de la Loi Organique, car cetteinfraction ne peut pas tre qualifie de crime de gnocide ou de crime contre lhumanit.
Linfraction pnale doit tre un meurtre, un autre acte inhumain ;
Constate que lappel du Ministre Public et celui du prvenu MUHOZA sont unanimes
reprocher au tribunal davoir fond sa dcision sur linfraction de droit commun de non-assistance personne en danger, alors quil tait appel connatre des infractions constitutives
du crime de gnocide ou de crimes contre lhumanit ;
Constate quen vertu de larticle 24 alina 2 de la Loi Organique n 08/96 du 30/08/1996
sur lorganisation des poursuites des infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimes
contre lhumanit, lappel du Ministre Public et celui de MUHOZA sont recevables et doiventtre examins tel quexpliqu dans les constate qui prcdent .
PAR CES MOTIFS
Sur base de larticle 24 alina 2 de la Loi Organique n 08/96 du 30/08/1996 sur
lorganisation des poursuites des infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimes
contre lhumanit ;
Dcide de recevoir lappel du Ministre Public et celui de MUHOZA Ernest et son avocat
Me AKIMPAYE Adle, car interjets dans le dlai lgal et bass sur des erreurs flagrantes
commises par la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali ;
Attendu quaprs la recevabilit de lappel du Ministre Public et de MUHOZA Ernest, la
cour a dcid que laudience sur le fond de laffaire aura lieu le 17/06/1999 en examinant lesmoyens dappel du Ministre Public et de MUHOZA ;
1 Appel du Ministre Public
Attendu que dans sa lettre crite en franais en date du 12/03/1998, lOfficier du Ministre
Public prs la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali, NDABUKIYERUCONDO Vincent, sexprime ainsi quil suit :
Monsieur le Greffier,
Jai lhonneur dinterjeter appel contre le jugement rendu en date du 10/03/1998 par le Tribunal de 1 instance de Kigali, Chambre Spcialise mettant en cause le Ministre Public
contre MUHOZA Ernest.
Motif : 1) Peine requise par le Ministre Public : perptuit ; dcision du tribunal : 2 ans
demprisonnement.
2) Sur 4 prventions charge du prvenu, le tribunal nen a retenu quune seule
non-assistance aux personnes en danger , art.256 du CPRLII.
3) Le tribunal na pas exploit fond les dclarations faites devant le tribunal des
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tmoins charge du prvenu.
Attendu quen date du 5/04/1999, Matre Vronique Ch. De lassociation Avocats Sans
Frontires qui assiste le prvenu, a communiqu la cour des conclusions volumineusesconues comme suit :
Plaise la cour, Statuant sur lappel rgulirement interjet par MUHOZA Ernest dun jugement rendu le
10 mars 1998 par la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali, la
cour infirmera la dcision entreprise :
1 acquittera MrMUHOZA du crime de gnocide, de meurtre et association de malfaiteurs.
2 le dclarera incomptent pour juger de la non-assistance personne en danger. 3 titre infiniment subsidiaire relaxera le prvenu des fins de la poursuite, sil se dclarait
comptent.
1. Rappel des faits et de la procdure
Monsieur Ernest MUHOZA est n en 1968 Kagano, prfecture de Cyangugu, il estenseignant et pralablement la prsente procdure na jamais fait lobjet de condamnation.
Il a t dfr devant la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali sur
laccusation davoir commis le crime de gnocide, un meurtre, le dlit de non-assistance
personne en danger et avoir particip une association de malfaiteurs.Lors de la premire audience fixe au 20 juin 1997, et sur demande du prvenu, le tribunal
accept une remise de laffaire car le prvenu navait pas eu accs son dossier mais a
refus la mise en libert provisoire dans lattente de laudience de jugement.
Lors de laudience de renvoi fixe au 5 aot 1997, les parties civiles ntant pas reprsentes
ni prsentes, une nouvelle remise a t prononce au 24 septembre 1997, date laquelle les
dbats au fond ont pu commencer.
Durant les dbats, maintenant sa position antrieure, Mr MUHOZA a persist dans ses
dngations et soulev les conditions irrgulires de son arrestation et de sa dtention
prventive.Il sest avr que les chefs daccusation pesant sur Mr MUHOZA taient surtout bases
sur des ou - dires et non sur des tmoignages fiables, ce qua reconnu le tribunal au moins
partiellement puisquaussi bien Mr MUHOZA puisquaussi bien Mr MUHOZA na t
condamn que du fait de la non-assistance personne en danger.
En effet et malgr les rquisitions de Monsieur le Reprsentant du Ministre Public visant
voir condamner Mr MUHOZA perptuit aprs classement en 2mecatgorie, et aprs
quune descente ait t ordonne et laffaire renvoye une ultime fois, le tribunal a retenu :- que laccusation dassassinat de Mr MUGABO nest pas fonde,
- que de mme Mr MUHOZA na pas particip une association de malfaiteurs et quil ne
peut tre retenu contre lui que le dlit de non-assistance aux personnes en danger constitu parle fait davoir prtendument refus asile Josine UWINEZA, que le prvenu ne justifiant pas des
risques que cet accueil aurait pu lui faire courir, doit tre class en 3mecatgorie et puni selon le
droit commun conformment larticle 39 de la Loi Organique et lart.256 al.2 du C.P.L.II, et a
condamn Mr MUHOZA la peine de deux annes demprisonnement, tout en prononant la
disjonction de laction civile, par jugement du 10 mars 1998.
Le 12 mars 1998, le Ministre Public relevait appel a minima de la dcision en basant son
appel sur les motivations suivantes :
- le tribunal a prononc une peine de deux ans alors que la perptuit avait t requise- le tribunal na retenu quune seule des quatre prventions,
- le tribunal naurait pas exploit fond les dclarations des tmoins charge durant les
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dbats.
Le 22 mars 1998, soit trs exactement dans le dlai de 15 jours qui lui tait imparti,Monsieur MUHOZA a relev appel de ladite dcision en motivant ainsi quil suit son appel :
1) la non assistance personne en danger nest pas en soi constitutive du crime degnocide, en consquence le tribunal ntait pas comptent pour connatre de ce chef
daccusation ;
2) Monsieur MUHOZA constate que pour retenir sa prtendue culpabilit, le tribunal acommis une erreur grave dans lapprciation de faits, l o les prtendues victimes ayant t
incapables de prouver que la non assistance prtendue aurait t la cause dun prjudice subi par
elle(s).
2. SUR LA RECEVABILITE
2.1. Sur la recevabilit de lappel principal du Ministre Public
Il est constant que larticle 24 de la Loi Organique du 30 aot 1996 restreint lappel des
dcisions des chambres spcialises deux cas prcis :
- une erreur de droit
- une erreur de fait flagrante.Force est de constater que les motivations de lappel du Ministre Public ne rpondent en
aucun cas aux spcifications requises.
En effet :
2.1.1. En droit
Les deux arguments de droit soulevs par le Ministre Public sont dune part une peine
prononce infrieure la peine requise par lui, dautre part le fait quune seule des
prventions aurait t retenue.
Les explications contenues dans le dveloppement des moyens dappel du Ministre Public
ne fournissent aucune explication sur ces deux prtentions.
Or il convient de relever que le rle du tribunal est, aprs avoir apprci souverainement les
faits, de faire application du droit, et en consquence de retenir ou non les chefs daccusations etde prononcer la peine que les juges du sige estiment juste et proportionne,
prenant en considration non seulement les faits reprochs mais aussi la personnalit du prvenu.
Le fait que la peine requise ait t la perptuit et la peine prononce deux annes
demprisonnement ne constitue en rien une erreur de droit, mais la simple application du
pouvoir souverain des juges du fond.
De mme le fait quun seul des chefs daccusation ait t retenu sur quatre participe
galement de la fonction judiciaire et ne constitue en rien une erreur de droit.La cour constatera quaucune critique fonde en droit nest avance par le Ministre Public.
2.1.2. Sur lerreur flagrante de fait :
Bien que la dcision portant sur la recevabilit doit prcder lexamen au fond du dossier, il
est constant que lexamen dune erreur flagrante de fait argue par le Ministre Public doit
faire lobjet dun examen dune partie du fond du dossier.
Monsieur le Reprsentant du Ministre Public voque :
a) le tmoignage de Mr NTAMPAKA qui, au mois de mai 1994, aurait t dnich par
une bande dInterahamwe dont faisait partie MUHOZA.
Il semble que le Ministre Public ait fait sur ce point une erreur car Mr MUHOZA, sollicit
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par Mr NTAMPAKA dtre cach par lui na pu laccueillir chez lui compte tenu du danger
mais lui a nanmoins trouv une cachette dans la maison derrire chez lui et queMonsieur NTAMPAKA est parti le lendemain sans mme prvenir son sauveur !
Aux termes mmes du jugement, qui contient la totalit des notes daudience prises par leGreffier durant les dbats et dont la vracit ne peut tre mise en doute, Mr NTAMPAKA
dclar quil avait t dlog de sa cachette par des Interahamwe dont Mr MUHOZA qui laurait
dailleurs bless avec sa machette.Mais que pri par le tribunal de montrer la cicatrice de sa blessure, Mr NTAMPAKA en fut
incapable.
Quallant plus loin dans ses dclarations ce prtendu tmoin charge dclara que Monsieur
MUHOZA aurait eu un fusil et laurait menac lors dune attaque pralable, mais que pri
alors par le tribunal dexpliquer pourquoi il aurait t trouver justement refuge chez lun deses perscuteurs alors quil le connaissait comme Interahamwe , et de prciser sil connaissait
des personnes qui auraient t tues par le prvenu, Mr NTAMPAKA sest embrouill dans ses
dclarations, faisant tat de ou dires, et se contredisant clairement par
rapport ses dclarations telles que contenues dans le procs verbal.
Ainsi le tribunal, faisant une juste apprciation des volte-faces et des imprcisions du tmoignage
de Mr NTAMPAKA a cart les accusations de ce dernier et na commis de ce fait aucune erreurde fait flagrante ainsi que le soutien tort le Ministre Public.
b) Le tmoignage de KAYITESI qui aurait t recherch par MUHOZA quil aurait entendu dire
quil avait une arme feu ;
Compte tenu des contradictions entre certains tmoignages, le tribunal avait dcid de renvoyer
laffaire afin de faire citer les tmoins charge et quune enqute rellement contradictoire ait
ainsi lieu la barre, lors de laudience du 10 janvier 1997.
Aprs avoir prt serment le tmoin KAYITESI dclare quelle se serait rfugie chez le
DrNGENDAHIMANA qui aurait appel Mr MUHOZA au tlphone chez son pre, quelle
aurait entendu Mr MUHOZA dire au Docteur que des INKOTANYI avaient conquis les lieux
et quil avait peur car il possdait un fusil.
Presse par le tribunal de prciser si elle avait dautres accusations contre Mr MUHOZA, le
tmoin dclare quelle ne savait rien de mauvais sur MUHOZA, quelle tait tonne .. etquen particulier elle lui en demande pardon(sic) .
Sur question du tribunal, le tmoin a prcis quelle avait t victime dune attaque de la part de
KIGINGI mais quelle navait pas vu Mr MUHOZA parmi les attaquants.
Cest alors que Mr MUHOZA, interrog sur ses ractions sur ce tmoignage par le tribunal,
a prcis que ce tmoignage ne pouvait le charger de quoi que ce soit, et quil navait jamais
dit quil avait un fusil, et quen ralit les dclarations qui lui taient attribues par le tmoin
taient celles du mdecin et non les siennes, il a donc t dcid dentendre le D
r
NGENDAHIMANA pour prciser ce point.
Aprs laudition du DrNGENDAHIMANA qui a prcis quil y avait une erreur et que le
prvenu ntait pas le MUHOZA dont parlait KAYITESI, le tribunal a fait une juste apprciationdes faits de la cause en ne retenant pas comme pertinent ce tmoignage.
c) Le tmoignage du DrNGENDAHIMANA qui aurait inform KAYITESI quil tait recherch
par MUHOZA.
Le DrNGENDAHIMANA a t cit et laffaire renvoye au 3 fvrier 1998, compte tenu des
contradictions persistantes.
A cette date laffaire ne put tre retenue, car un magistrat tait souffrant et laffaire fut donc
remise au 19 fvrier 1998, le Dr NGENDAHIMANA se prsentant bien quen retard.Aprs quil eut prt serment, ledit tmoin fut pri par le tribunal dindiquer sil connaissait le
prvenu. Il a rpondu que tout ce quil savait sur le prvenu tait quune femme dnomme
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KAYITESI stait rfugie chez lui mme et que deux semaines aprs larrive de celle-ci un
jeune homme lui aurait demand des nouvelles de Mme
KAYITESI et que arriv chez lui cettedernire lui aurait dit quil sagissait de MUHOZA Ernest fils de KAVUTSE.
Mais pri par le tribunal de confirmer que la personne laquelle il avait parl tait bien la mmeque le prvenu, le tmoin a t incapable de le confirmer, et allant plus loin quil ne sagissait pas
de lui.
Le Ministre Public a alors demand que lui soit pose la question de savoir quelle tait ladclaration retenir, soit celle faite pendant lenqute, soit celle faite la barre, et le tmoin a
conclu que ctait Mme KAYITESI qui, sur description orale, lui avait donn le nom de
MUHOZA, que lui mme ne connaissait pas les membres de la famille de MUHOZA.
Ainsi cest par une juste apprciation des faits de la cause et sans commettre derreur flagrante et
surtout sans dnaturer les dclarations du prvenu et du tmoin que le tribunal a donn sa justevaleur ce tmoignage.
Le Ministre Public prcisait que si le tribunal avait retenu ces tmoignages, il aurait fait droit
aux rquisitions visant la perptuit ainsi que retenu les chefs daccusation de meurtre association
de malfaiteurs et dtention illgale darme feu, en sus de la non-assistance personne en
danger.
Or la cour ne pourra que constater que lexamen des moyens soulevs par le Ministre Publicne constitue en rien une erreur de droit ou une erreur flagrante de fait et en consquence la cour
dclarera irrecevable lappel du Ministre Public, par application de la Loi Organique du 30
aot 1996.
2.2. Sur la recevabilit de lappel du prvenu
Monsieur MUHOZA base son appel sur deux points de droit.
2.2.1. La Chambre Spcialise tait incomptente pour juger dun dlit de droit commun que
constitue la non-assistance personne en danger.
En effet une fois que la Chambre a et juste titre exonr Mr MUHOZA des accusations de
gnocide, et na retenu que le dlit de non-assistance personne en danger, elle aurait d dune
part prononcer un acquittement pour les faits de gnocide et se dclarer incomptente pour juger
dune ventuelle accusation du seul fait dun dlit de droit commun tel que la non-assistance
personne en danger tel que prvu et rprim par larticle 256 du Code Pnal Rwandais.
2.2.1.1. La non-assistance en danger ne fait pas partie des crimes de gnocide tels que prvus et
rprims par la Loi Organique du 30 aot 1996.
En effet les actes constitutifs du crime de gnocide sont dfinis par les articles 2 et 3 de la
Convention pour la prvention et la rpression du crime de gnocide, qui ninclut pas ce dlit.
Il est ainsi libell :Article II
Le gnocide sentend de lun quelconque des actes ci-aprs, commis dans lintention de dtruire
en tout ou partie, un groupe national, ethnique ou religieux comme tel :a) meurtre de membres du groupe
b) atteinte grave lintgrit physique ou mentale de membres du groupe
c) soumission intentionnelle du groupe des conditions dexistence devant entraner sa
destruction physique totale ou partielle
d) mesures visant entraver les naissances au sein du groupe
e) transfert forc denfants du groupe un autre groupe
Le droit pnal tant dinterprtation stricte, concept reconnu internationalement, aucun autre chefdaccusation autre que ceux prcits ne peut tre constitutif dun crime de gnocide.
En lespce llment lgal faisant dfaut, le crime de gnocide ne peut tre constitu.
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A supposer mme que le Ministre Public soutienne que Mr MUHOZA se serait rendu complice
de gnocide, lincrimination ne saurait tre retenue puisquaussi bien la complicit suppose uneaide indispensable sans laquelle linfraction aurait t rendue impossible, par application de
larticle 3 de la loi du 30 aot 1996.Larticle 39 de la Loi Organique auquel fait rfrence le jugement entrepris ne peut faire chec
aux rgles de comptence des chambres spcialises(art.19 de la Loi Organique faisant
rfrence la comptence exclusive des chambres spcialises pour les infractions vises larticle I excluant en consquence les dlits de droit commun non accompagns de crime de
gnocide).
Ainsi ce premier moyen sera accueilli favorablement par la cour.
2.2.1.2. Linfraction de non assistance personne en danger elle mme nest pas constitueA supposer mme que la non-assistance aurait constitu un crime de gnocide sui generis,
ce qui nest pas le cas, la culpabilit de Mr MUHOZA ne pouvait tre retenue puisquaussi
bien les lments constitutifs de cette infraction ntaient pas runis en droit pnal commun.
En effet pour que la non-assistance soit tablie il faut que la personne qui se plaint davoir t non
assiste ait subi un dommage(atteinte physique ou morale graves, viol etc) et quil soit prouv
que sans lassistance ce dommage ne serait pas intervenu.Or en lespce les deux accusateurs de Mr MUHOZA de cette infraction nont subi aucun
dommage. Il sagit donc en lespce dune infraction impossible.
La tentative en la matire nexiste pas.
Le fait pour le tribunal davoir outrepass sa comptence matrielle constitue une violation gravedes rgles de droit procdural, et le fait davoir retenu linfraction de droit commun alors mme
quil navait pas constat que la non intervention de Mr MUHOZA avait caus aux prtendues
victimes un prjudice grave constitue une grave erreur de droit justifiant de lappel de Monsieur
MUHOZA qui sera donc dclar recevable.
3. AU FOND
Une fois que la cour aura jug recevable et bien fond lappel interjet par le prvenu de la
condamnation, elle ne pourra que constater que les arguments de ce dernier sont
parfaitement recevables et particulirement fonds tant en fait quen droit.
3.1. La cour, infirmant le jugement entrepris, acquittera Mr MUHOZA des accusations de
gnocide.
Rappelons que les quatre chefs daccusation taient
- dans le cadre dune accusation globale de gnocide :
- assassinat de Mr MUGABO
- refus dassistance personne en danger
- association de malfaiteurs.
Or dans le cadre dune juste apprciation des faits de la cause :
a) sur lassassinat de Monsieur MUGABOIl a t largement rapport la preuve durant les dbats que les faits reprochs navaient pas t
commis par le prvenu.
En effet, parmi les tmoins charge, il est constant quaucun tmoin oculaire ne figure.
Monsieur MUNYAMPUNDU Albert soutient que Mr MUGABO aurait t tu le 8 avril 1994,
aprs avoir saut un mur en venant de chez la famille SAKUMI tue le mme jour, ce
qui lui aurait t rapport, tandis que pour sa part Mr Michel KAGABO prtend que sa mort
daterait du 5 avril 1994 et quil aurait t dlog dun autre lieu(chez Ancille), et que de son ct
le tmoin NTAMPAKA contredit ses dclarations faites devant lOPJ laudience et que lesdclarations des autres tmoins NDUWAWE et UWINEZA proviennent de racontars de Michel
KAGABO.
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Ainsi le tribunal a par une juste apprciation, fait application de larticle 20 du Code de Procdure
Pnale et constat quun doute trop srieux existait pour retenir une quelconque responsabilit deMonsieur MUHOZA dans la mort de Mr MUGABO.
La cour confirmera cet acquittement de ce chef daccusation.
b) Sur la participation une association de malfaiteursCe chef daccusation reposait sur lventuelle participation de Mr MUHOZA une attaque de
la famille de Mr KANYALIBWA, la recherche des enfants de SAKUMI pour les tuer.
Or force est de constater que les dbats fidlement retranscrits par le Greffier de la Chambre
Spcialise ont permis de vrifier que cette accusation ne tenait pas, car les enfants de SAKUMI
ont justement t cachs par le prvenu jusquau jour o ils ont t remis Mr MANYEMBWA.
Quainsi il ne pouvait tre reproch Mr MUHOZA davoir voulu tuer lesdits enfants quil a
justement cachs, leur pargnant la mort certaine ce moment.
c) Sur laccusation de gnocide :Le gnocide suppose quait t retenu lun des crimes dnomms larticle II de la convention,
intgralement cit plus haut ;
Force est de constater que le meurtre de Mr MUGABO dont Mr MUHOZA a t innocent
tait le seul lment susceptible de constituer le crime de gnocide.Rien dans les dclarations des tmoins ni dans les accusations figurant aux autres chefs retenus
par le Ministre Public ne permet de retenir ce chef daccusation.
En consquence la cour ne pourra quacquitter Mr MUHOZA du crime de gnocide et de
meurtre ainsi que dassociation de malfaiteurs
et la cour se dclarera incomptente pour statuer sur laccusation de non-assistance personne
en danger, sagissant dun dlit de droit commun non commis dans le cadre dun crime de
gnocide.
3.2. Trs subsidiairement et si la cour devait retenir sa comptence pour juger de ce dlit de
droit commun :Il convient de relever que le prsent chef daccusation tait constitu par :
- un refus prtendu davoir donn refuge Mr NTAMPAKA F. et Josiane UWINEZA.
Or la suite des dbats, il sest avr que Mr NTAMPAKA a t hberg par MUHOZA et
que ce dernier ne la jamais chass, que de plus il sest avr que Mr NTAMPAKA avait des
difficults rapporter la preuve de ses accusations et que ses paroles devaient tre prise avec
dlicatesse(notamment car il sest contredit plusieurs reprises et a t incapable de montrer laprtendue cicatrice de sa blessure).
Concernant Mme Josiane UWINEZA, elle ne rapporte pas la preuve du risque que lui aurait fait
viter son hbergement par Mr MUHOZA, nayant pas apport la preuve dun prjudicequelconque.
Force est de constater en consquence que le dlit nest pas constitu et que Mr MUHOZA doit
tre acquitt intgralement de ce chef daccusation ainsi quil la t dvelopp.
PAR CES MOTIFS
Statuant sur lappel interjet tant par le Ministre Public que le prvenu du jugement rendu le 10
mars 1998 en audience publique par la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance deKigali,
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dire et juger irrecevable pour dfaut de motivation conforme la Loi Organique du 30/08/96
lappel du Ministre Public,dire et juger recevable lappel du prvenu pour violation tant des rgles de comptence de la
chambre spcialise que pour erreur grave de droit,en consquence accueillir le prvenu en sa demande et infirmer le jugement entrepris,
statuant nouveau.
Acquitter Mr MUHOZA des faits de gnocide, de meurtre et de participation une associationde malfaiteurs,
pour le surplus cest--dire laccusation de non-assistance personne en danger hors le crime de
gnocide, se dclarer incomptent, ce dlit ntant partie de la dfinition du gnocide aux
termes de larticle 2 de la convention sur la prvention et la rpression du crime de gnocide.
Trs subsidiairement et au cas o la cour entendrait retenir sa comptence pour juger de ce dlitde pur droit commun,
acquitter Mr MUHOZA de ce dlit au motif quil ne peut tre constitu que si la victime qui se
prtend non assiste a subi un prjudice grave et quen lespce aucune des deux victimes ne peut
apporter la preuve du prjudice grave rsultant de la prtendue non assistance
Sous toutes rserves et ce sera justice.
Attendu que dans ses conclusions du 30/04/1999 rdiges en Kinyarwanda le reprsentant
du Ministre Public Sande MUDAHERANWA dit que :
1. RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE.MUHOZA Ernest est poursuivi pour avoir, Nyamirambo, commune Nyarugenge,
commis le crime de gnocide contre les personnes de lethnie Tutsi entre avril et juin 1994, et est
surtout accus davoir eu une part de responsabilit dans le meurtre de SAKUMI Anselme et son
petit frre MUGABO.
Il est par ailleurs inculp davoir fait partie dune association de malfaiteurs compose des
Interahamwe tel que le nomm KIGINGI.
Il lui est en outre reproch davoir refus de porter assistance ceux qui avaient cherch refuge
auprs de lui, tels que NTAMBARA alias KANYOTA et UWINEZA Josiane, car il les a chasss
au lieu de les cacher alors quils taient en danger de mort.
La Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali a dclar que seule
est tablie sa charge linfraction de non-assistance personne en danger en ce quil na pas
port secours UWINEZA Josiane, que les autres infractions ntaient pas tablies faute de
preuve.
Ainsi, le tribunal la condamn une peine demprisonnement de 2 ans sur base de
larticle 256 du Code Pnal Rwandais Livre II.
Le Ministre Public qui avait requis quil soit rang dans la deuxime catgorie tel que
cela est prvu par la Loi Organique du 30 aot 1996 na pas t satisfait du jugement rendu endate du 10/03/1998 et a interjet appel, et le prvenu a galement fait de mme le 23/03/1998,
tous les deux dans le dlai de 15 jours prvu par la loi tant donn que le Ministre Public a
relev appel le 13/03/1998 ;
II. MOTIFS DAPPEL
A. Le Ministre Public a interjet appel pour les motifs suivants :
1 La peine prononc par le tribunal est trs minime au regard de celle qui avait t requise par leMinistre Public.
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2 Des quatre prventions , le tribunal nen a retenu quune seule et de droit commun par ailleurs
.3 Il na pas t suffisamment tenu compte des tmoignages .
B. Le prvenu eu la personne de MUHOZA.
Compte tenu des conclusions de son Avocat Matre AKIMPAYE Adle le prvenu ainterjet appel pour deux motifs :
1 Le tribunal a fond sa dcision sur linfraction de droit commun de non-assistance aux
personnes en danger alors quil tait appel connatre des infractions constitutives du crime de
gnocide .2 Linfraction pour laquelle il a t condamn na pas exist.
III. EXPOSE DES FAITS A SA CHARGE.
Ernest MUHOZA est poursuivi pour avoir, Nyamirambo, commune Nyarugenge,
Prfecture de la Ville de Kigali, particip aux attaques qui tuaient des gens dans lintentionunique dexterminer lethnie Tutsi dans le pays. Cest ainsi quil aurait t vu dans lattaque qui a
tu SAKUMI Anselme et son pouse, et quil aurait dvoil la cachette du petit frre de
SAKUMI qui sappelait MUGABO et qui a t tu un endroit o se trouvait un trou au domicile
de Tassienne aprs avoir t emmene du lieu o il se cachait au Bar Beau Sjour. MUHOZAaurait commis ces actes en collaboration avec dautres Interahamwe rpondant aux pseudonymes
de KIGINGI, KIBUYE, KARIYARIYA, HABIMANA, MANDWA et dautres. Cest par ailleurs
ce groupuscule de malfaiteurs qui a tu KIGENZA et son enfant Marcelin.
MUHOZA Ernest est en outre poursuivi pour avoir refus de donner refuge ceux qui venaient
vers lui en les traitant dInyenzi. Il sagit notamment de NTAMPAKA Franois alias
KANYOTA. Cela a t affirm par des tmoins oculaires savoir :
1) NTAMPAKA Franois(cte 10) qui relate comment il a cherch refuge chez KAVUTSE o
seuls taient rests MUHOZA et des domestiques, quau lieu de laccueillir, MUHOZA a donn
lordre de le fouiller en le traitant dInyenzi, quil la hberg pendant une seule nuit dans une
maisonnette situe dans larrire-cour, que le lendemain, il a ameut des militaires qui setrouvaient chez KARAMIRA. Il na d son salut quau fait que ces militaires le connaissaient et
quau lieu de le tuer, ils lont aid fuir. Il a mme affirm que MUHOZA faisait partie de ceux
qui ont tu les membres de la famille de SAKUMI.
2) NDUWASE Denise(cte 11) a vu MUHOZA dans une attaque qui a t mene leur domicile,
les a sortis de la maison, les a obligs sasseoir sur la route et ont tu quelques uns dentre eux
au moment o les autres se sont sauvs en courant.
3) UWINEZA Rosine(cte 12) sa dclaration concorde avec celle de Denise.4) KAGABO Michel(cte 13) dit que cest MUHOZA qui dirigeait les meurtriers en leur
montrant les domiciles des gens qui devaient tre tus parce que ceux-l ne les connaissaient pas.
Il ajoute que MUHOZA est venu chez eux au domicile de MANYEMBWA la recherche desenfants dAnselme, quils sont alls par la suite dnicher MUGABO de sa cachette pour
finalement le tuer.
5) RUSAGARA Serges fils de SAKUMI(cte 14) dit que mme sils ont fui au domicile de
KAVUTSE Lonard et quon les a cachs, son fils Ernest tait la tte de ceux qui sont venus
tuer leurs parents.
6) AMURI Denis(cte 17), mme sil a t cit par MUHOZA comme tmoin sa dcharge, a dit
quil ne peut pas le disculper 100% tant donn quils ne se dplaaient pas ensemble et quil ne
contrlait pas ce quil faisait.7) NKURUNZIZA Gustave(cte 18) galement cit par Ernest MUHOZA, dit que quand ils
taient Kabuga o ils avaient fui, il a entendu NTAMPAKA Franois dire que MUHOZA avait
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refus de le cacher en le traitant dInyenzi, et qu lpoque o il a entendu ces propos, il ntait
pas encore question de comploter contre les personnes car lide de porter plainte ntait pasencore ne.
8) KAYITESI(cte 19) dit que MUHOZA est un assassin car il se dplaait en leur compagnie etdemandait des informations sur lendroit o ils se trouvaient.9) MUKARUGEMA Ancille(cte 20) dit : Le litige quil y a entre MUHOZA et NTAMPAKA
est que lun a refus de cacher lautre 10) BISANGWA Aloys, veilleur chez KAVUTSE(cte 21) dit comment NTAMPAKA est venu
deux heures du matin, et que quand il a rveill MUHOZA qui la identifi, il lui a dit quil va
lhberger pendant cette nuit seulement et quil doit se dbrouiller le lendemain.
Il a par la suite affirm quils lont fouill en le traitant dInyenzi, et que le lendemain on la
envoy alerter les militaires qui se trouvaient au domicile de KARAMIRA.11) MUDENGE Joseph, domestique chez KAVUTSE(cte 25 et 26) conforte la dclaration de
Aloys et affirme que MUHOZA a envoy chercher les militaires au domicile de KARAMIRA.
12) MASUMBUKO Jean Pierre(cte 27) dit que MUHOZA lui a tir dessus, mme sil nest pas
mort.
IV. MOYENS DE DEFENSELes moyens de dfense de MUHOZA sont contenus dans les conclusions quil a lui-mme
rdiges en date du 26/03/1999 et dans celles tablies par son avocat, Matre Vronique
Chauveau de lassociation Avocats Sans Frontires et communiques la cour le 5/04/1999.
Mme si ces conclusions manent de personnes diffrentes, elles reposent toutes sur les
mmes motifs dappel savoir :
- lincomptence du tribunal pour connatre de linfraction prvue par larticle 256
- Avoir condamn le prvenu du chef de linfraction de non-assistance aux personnes en danger
alors quil ne la pas commise
- Ne pas avoir commis le meurtre sur la personne de MUGABO
- Ne pas avoir fait partie dune association de malfaiteurs
Mme sil nest pas facile de rpliquer aux conclusions du prvenu lui-mme et de son
avocat, nous prfrons prendre la peine dy rpondre en mme temps.A. Sur le motif dincomptence du tribunal
Nous estimons que ce motif nest pas valable, tant donn que la qualification des infractions
constitutives du crime de gnocide repose sur le code pnal et la loi portant rpression du crime
de gnocide, ce quon a appel la double qualification. La loi rgissant les infractions
constitutives du crime de gnocide prvoit cette double qualification lorsque les infractions ont
t commises dans le cadre du gnocide, ce qua fait MUHOZA en refusant dhberger les
personnes qui sont en danger et en les traitant dInyenzi(article 16 de la loi sur le gnocide).Lexemple concret est celui de NTAMPAKA qui tait son ami auparavant, mais qui il a dit, au
moment o il a fui vers lui en pleine nuit, dy passer cette nuit seulement et de tirer son plan le
lendemain.B. Sur le motif davoir t condamn pour une infraction quil na pas commise.
Linfraction dont MUHOZA parle est celle de non-assistance aux personnes en danger. Il na
aucun moyen de la contester tant donn que lui-mme et leurs domestiques reconnaissent que
NTAMPAKA a cherch refuge auprs deux, mais quil lui a dmontr son manque de confiance
en ordonnant de le fouiller et en le traitant dInyenzi, quil la hberg pendant cette nuit seule et
quil a, le lendemain, ameut des militaires.
Les filles de SAKUMI Anselme y ont galement cherch refuge au moment o leurs parents
taient assassins, mais lui et son pre ont refus de les hberger si bien quelles sont parties enerrant vers linconnu alors quelles taient recherches pour tre tues.
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Nous ne pouvons pas terminer sans parler des enfants dAnselme quils ont chasss pendant la
nuit et qui ont t sauvs par des militaires qui les connaissaient tel que cela a t rapport parRUSAGARA Serges(lun deux) ;
C. Ne pas avoir commis le meurtre sur la personne de MUGABO.
MUGABO est le petit frre de SAKUMI. Malgr quil avait au dpart t atteint dune balle au
pied, il est all se cacher au bar Beau Sjour Nyamirambo. Ds que MUHOZA a euconnaissance de lendroit o il se cachait, il est parti eu compagnie dautres Interahamwe et sont
alls le tuer au trou qui se trouvait chez Tassienne.
Cela a t confirm par les tmoins. Il est ds lors faux de dire que ce nest pas lui qui la tu, car
cest lui qui dirigeait les meurtres tel que la dit NDUWASE Denise et dautres ;
D. Ne pas avoir fait partie dune association de malfaiteurs
Beaucoup de personnes ont dit et confirm que MUHOZA tait toujours en compagnie de
KIGINGI, KIBUYE, KARIYARIYA et dautres, sans oublier que cest lui qui montrait aux
militaires les gens qui devaient tre tus. A part les dpositions des tmoins directs cela a t
dmontr par le comportement de MUHOZA aprs la guerre ;
Il se conoit mal que MUHOZA ait renonc revenir Kigali et prfr exercer la fonction
denseignant Cyangugu, et quinterrog ce sujet, il ait rpondu quil craignait que
NTAMPAKA ne le fasse emprisonner. Peux-tu craindre de te faire emprisonner par une personne
contre laquelle tu nas pas commis dinfraction de faon que mme la population ne pourrait pasdisculper ;
E. Sur la motivation propre son avocat
Mme si en grande partie Matre Vronique Chauveau reprend les prtentions de MUHOZA, elle
dit nanmoins que la non-assistance aux personnes en danger ne peut tre tablie ds lors que la
prtendue victime na subi aucun dommage ;
A part quun avocat est toujours (.) mettre son client du bon ct, nul ne peut
perdre de vue que le fait pour MUHOZA et son pre KAVUTSE davoir chass UWINEZA et
NDUWASE qui taient poursuivis par les meurtriers constitue un acte de dlaissement ;
Par ailleurs, il a chass NTAMPAKA qui tait parvenu sintroduire dans leur enclos
sans stre fait remarquer, et a au contraire ameut les militaires avec lesquels il collaborait en
vue de lemmener et le tuer. Sil nest pas mort, cest grce Dieu. Cela constitue ds lors
linfraction de non-assistance aux personnes en danger ;
V. REQUISITIONS DU MINISTERE PUBLICLe Ministre Public demande la Cour dAppel :
- De recevoir son appel et de rejeter celui du prvenu car aucune erreur na t commise son
encontre.- Rformer le jugement rendu au premier degr et de condamner le prvenu la peine
demprisonnement perptuit.
Attendu qu la fin de lexamen de toutes ces pices la cour a mis la cause en dlibr et
prononc en audience publique larrt dans les termes ci-aprs :
Constate que le Ministre Public a interjet appel pour le motif que des quatre prventions
quil avait retenu savoir :le crime de gnocide, lassassinat de MUGABO, lassociation de malfaiteurs, la non-assistance
aux personnes en danger, le tribunal a estim que seule linfraction de non-assistance aux
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personnes en danger tait tablie charge du prvenu en ce quil na pas port secours
UWINEZA Josiane et ce, la mconnaissance des dclarations de 12 tmoins charge ; et quilla condamn une peine minime(2 ans demprisonnement) alors que le Ministre Public avait
requis la peine demprisonnement perptuit ; que MUHOZA et son avocat Me VroniqueChauveau invoquent lincomptence du tribunal comme motif de leur appel car, ds lors que
MUHOZA venait dtre acquitt de crime de gnocide et dassassinat, et de linfraction de
complicit dassociation de malfaiteurs, le tribunal ntait pas comptent de connatre delinfraction de non-assistance personne en danger prvue et rprime par larticle 256 du Code
Pnal Livre II et que par ailleurs il ne la pas commise ;
Constate que la juridiction infrieure sest fonde sur les dpositions des tmoins cits par
le Ministre Public et a constat que de toutes les prventions charge de MUHOZA, le crimedassassinat de MUGABO et dassociation de malfaiteurs en vue de commettre le gnocide
ntaient pas tablis sa charge, car ces dpositions des tmoins font apparatre des
contradictions spcialement quant aux dates et lieux de la mort de MUGABO, car,
MUNYAMPUNDU dit que MUGABO est mort le mme jour que les membres de la famille de
SAKUMI en date du 8/04/1994, KAGABO Michel affirme que MUGABO a t tu le 5/05/1994
aprs tre dbusqu chez Ancille, NTAMPAKA dit avoir vu de ses yeux MUGABO au momento il tait dnich du bar Beau Sjour, tandis que NDUWAWE et UWINEZA affirment quant
elles que leur tmoignage repose sur ce que leur a rapport Michel tant donn qu'elles se
trouvaient dj lHtel des Mille Collines lors de la mort de MUGABO ; que cet acquittement
est conforme aux dclarations des tmoins qui ont sign la pice n 425/09/95 du 20/09/1995dlivre par NYAMUZIGA Abdulkarim, membre de la cellule Nyabitare et ce, aprs les
auditions de 15 tmoins rescaps dans la localit o rsidait MUHOZA lpoque du gnocide,
que mme lautorit de la commune Nyarugenge a dlivr MUHOZA en date du 26/09/1995
une attestation de bonne conduite, vie et murs qui montre que son comportement en 1994 est
irrprochable ;
Constate que la Chambre Spcialise du Tribunal de Premire Instance de Kigali, ayant
acquitt du crime de gnocide, ntait pas comptente pour poursuivre linfraction de non-
assistance personne en danger, tel que le Ministre Public, le prvenu MUHOZA et son avocat
en sont unanimes que le tribunal infrieur a t saisi des crimes de gnocide et quil a statu surune infraction de droit commun, cela tant confirm par Daniel de Beer en collaboration avec
CYIZA, GASASIRA, KANUBANA, MUGENZI et RWAGASORE dans son livre paru aux
Editions Alter Egaux 1997 la page 41 o il dit : Il faut souligner que la non assistance
personne en danger(art.256 du CPR L.II) fait partie des infractions qui ne peuvent pas tre
poursuivies en application de la Loi Organique, car cette infraction ne peut pas tre qualifie de
crime de gnocide ou de crimes contre lhumanit. Linfraction pnale doit tre un meurtre, un
assassinat, une atteinte grave lintgrit physique ou mentale, un autre acte inhumain ;
Constate que les crimes de gnocide du chef desquels MUHOZA est poursuivi ne sont pas
tablis sa charge car le Ministre Public nen a pas rapport des preuves tangibles la cour,tant donn que des contradictions apparaissent entre les tmoignages recueillis tel quexpliqu
dans le deuxime constate ;
PAR CES MOTIFS
Vu la loi fondamentale de la Rpublique Rwandaise, spcialement aux articles 93 et 94 de
la Constitution du 10/06/1991 ;
Vu larticle 109 du Dcret-loi portant code dorganisation et de comptence judiciaires ;
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Vu larticle 99, 4 de la loi du 23/02/1963 portant Code de Procdure Pnale ;
Vu les articles 1, 2, 14, 19, 24 de la Loi Organique n 08/96 du 30/08/1996 surlorganisation des poursuites des infractions constitutives du crime de gnocide ou de crimes
contre lhumanit ;
Dcide la recevabilit de lappel interjet par le Ministre Public car rgulier en la forme,
mais aprs examen le dclare non fond ;
Dcide la recevabilit de lappel de MUHOZA et de son avocat Me Vronique Chauveau
car rgulier en la forme, et le dclare fond ;
Dcide lacquittement de MUHOZA Ernest et en consquence le dclare innocent ;
Dcide quil obtient gain de cause ;
Ordonne la libration immdiate de MUHOZA ;
Mets les frais dinstance slevant 4.650Frw charge du trsor public ;
Ainsi arrt et prononc en audience publique du 17/06/1999 par la Cour dAppel deKigali, sigeant Kigali et compose de : KABEJA J. Robert(Prsident), UWIMANA Juvnal et
NSENGIYUMVA Franois(Conseillers), NIBISHAKA Jose(Greffier).
SIEGE
Conseiller Prsident Conseiller Greffier
UWIMANA J. KABEJA J. Robert NSENGIYUMVA Fr. NIBISHAKA Jose
S S S S
Copie certifie conforme la minute
Fait Kigali, le 29/11/1999
Le Greffier : MUTAGANDA E.S + cachet.