Upload
others
View
4
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
Décembre 2012 - N° 17
ASSOCIATION RIVAGE Groupe Interdisciplinaire de Recherche et d’Action en Bénévolat d’Accompagnement
L’ESPERANCE
Citations p. 6
Violette Maurice - Guy Gilbert p. 7
Brin de philosophie … p. 8 - 9
V. Havel, l’Avenir de l’Espérance p. 10 – 11
Mme Vittek, résidente p. 12
M. de Hennezel, « La Mort intime» p.13
RIVAGE
Vœux de Sylvie Wolff, Présidente p.2
Editorial p. 2
Rivage : Actualités p.3 - 5
Bibliographie p. 21
Contacts p. 23
Annonces-Bulletin d’adhésion p. 22
Devenir bénévole p. 24
RIVAGE
« Horizon »
MCM - 2011
Vie de l’Association
Dossier en cours
Alzheimer : Plan 2008-2012 prolongé,
Récits, Témoignages, p. 14 à p 17
RIVAGE
RIVAGE
Dossier en cours
Fin de Vie : Visite de F. Hollande, Mission
Sicard - Quelques Plumes p.18 à 20
Vœux
Je suis heureuse de profiter de notre journal Rivage sur « L’Espérance pour vous
souhaiter de joyeuses fêtes de fin d’année 2012.
En 2012, quelques événements ont été essentiels, la conclusion du plan Alzheimer
2008-2012 et sa prolongation et la « mission Sicard » sur la fin de vie …
Concernant ce dernier point, Mme Marie Quinquis, a pris part au débat public à Paris
le 15 décembre 2012.
Nous vous transmettrons la conclusion du rapport de la Mission Sicard dans notre
prochain journal.
Que l’année 2013 soit chargée de projets constructifs en lien et en respect de chaque
personne, en approche de celui et celle qui vivent les souffrances de la maladie, de la
fin de vie, de la grande vieillesse, du deuil.
A Rivage, engagés dans l’accompagnement, restons très attentifs à ce qui se pense
et se décide au niveau national et dans le monde. Gardons, défendons notre
particularité française.
Bonne année 2013, avec toute mon amitié. Sylvie Wolff
Présidente de l’association Rivage
Éditorial
Chers Amis,
L’Espérance est partout, cette force inimaginable, cette valeur esthétique et morale.
Merci à Marie Coquilleau-le Maréchal et à Jean-Hugues Motte, qui nous conduisent dans
cette réflexion : bravo!
Gwénaëlle d’Anterroches ne rédigera plus cette revue. Nous sommes tristes car elle a été le
collecteur des éditoriaux, des interviews des Ecrivains, des reporters, des textes des
bénévoles… merci pour ce que tu as fait, merci pour les images et les mots harmonieux,
agréables à entendre et lire : merci beaucoup tout simplement!…
Plein d’Espérance pour cette nouvelle année.
Marie Quinquis, Vice-Présidente
Véronique Levêque, Responsable de la formation
- 2 -
RIVAGE Vie de l’Association
RIVAGE Actualités – Evénements
- 3 -
Historique des Evénements…
Colloque « La mort à l’Hôpital » - Hôpital Européen Pompidou
« L’a priori qui voudrait que l’évocation de la mort par les établissements
hospitaliers inquiète la population, gèle les réflexions. Les établissements
devraient davantage s’inquiéter de l’image, bien souvent assez négative,
que les conditions de la mort d’un proche laissent de l’hôpital » …
(Rapport IGAS, La mort à l’hôpital, 2009)
Sœur Mireille Golliez, la passion de l’aventure monastique
La nouvelle prieure des Diaconesses de Reuilly succède à Sœur Evangéline Vié. Elle
a été installée, dimanche 28 octobre 2012, à Versailles, lors d’une célébration prési-
dée par le pasteur Claude Baty, président de la Fédération Protestante de France.
La Croix - 30/10/2012
Versailles Nord-Ouest – Restructuration de l’EHPAD Hyacinthe Richaud
Une unité de soins de suite de l’hôpital Richaud va être réhabilitée afin d’y intégrer 19 lits de l’EHPAD
(Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) qui se trouve sur le site de
l’établissement hospitalier. Conseil Général – Magazine N°4 – automne 2012
Dépendance – Grands Chantiers 2012-2013
* Création de 272 places en EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes)
et 84 places en MARPA (Maison d’Accueil Rurale pour Personnes Agées).
* Formation de bénéficiaires du RSA (Revenu de Solidarité Active) dans le développement des métiers de
services à domicile pour répondre aux besoins des personnes âgées dépendantes (1000 personnes
formées d’ici à 2014).
* Pose de la première pierre de la nouvelle MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) à
Versailles en janvier 2013. Conseil Général – Magazine N°4 – automne 2012
Valérie Verchezer,
Accompagnante bénévole en soins palliatifs gériatriques à l’ASP Fondatrice depuis 2002
Diplômée du Master Politiques et gestion des EHPAD, Science Po Paris, soutenu en janvier 2012
Texte – synthèse - www.espace-ethique-alzheimer.org/.../VERCHEZER-MEMOIRE-MA...
« Face à la vulnérabilité, osons la solidarité : le bénévole d’accompagnement du grand
âge en EHPAD : acteur et diffuseur d’une culture du « prendre soins citoyen » jusqu’à la
fin de la vie »
Corinne Simon/Cric
La Croix
- 24 octobre 2012 -
RIVAGE Vie de l’Association
- 4 -
Rappel : La bibliothèque « Marie Guinet »
Les responsables sont heureuses de rappeler les modalités de fonctionnement de la bibliothèque aux
bénévoles de Rivage et à ceux et celles qui seraient intéressés par les nombreux ouvrages
présentés.
- les samedis matins, lorsqu’il y a formation initiale
- renseignements auprès de Christine Marcilhacy et de Marielle Nourry
A.G.O. : 9 Octobre 2012
L’Association RIVAGE regroupe 91 bénévoles, 5 bénévoles de structure et 1 salarié.
En 2011, 8 personnes ont quitté l’Association alors que 14 nouveaux membres nous ont
rejoints.
Durant cette année, nous avons reçu 35 personnes souhaitant s’investir dans
l’accompagnement et 20 personnes ont été retenues.
Ces 20 nouveaux bénévoles ont été formés en deux promotions.
Notre bénévolat est présent dans 6 sites :
1. Versailles – Claire Demeure (78)
2. Courbevoie – La Cité des Fleurs (92)
3. Clamart – La Clinique du Plateau (92)
4. Meudon – La maison de retraite, Le Châtelet (92)
5. Rocquencourt – Les Lys (78)
6. Houdan – Hôpital Public. (78)
Pour l’année 2011, on compte environ 160 heures de présence par bénévole.
En mars 2011, nous avons eu la joie d’accueillir le Dr. Christophe Fauré, sur le thème du deuil,
pour notre conférence publique annuelle qui a réuni 250 personnes.
Concernant la formation continue, ce fut une année particulièrement riche.
Florence d’Assier de Boisredon a animé, de janvier à avril, 6 journées de formation sur le
thème « Ecouter : Un Art de la Présence ».
Catherine Farcet a animé, en octobre, 2 journées sur le thème « Directives Anticipées et
Personne de Confiance ».
Marilyn Kalfa, Médecin-Chef de la Cité des Fleurs à Courbevoie, a animé dan son
établissement un formation sur « Démence et Confusion » en novembre .
J’ai moi-même, représenté Rivage au Collège des Associations de Bénévoles
d’accompagnement (CABA) et au comité CNAMTS-SFAP (Société Française
d’Accompagnement et de soins Palliatifs).
Par ailleurs, le pôle de formation, composé de 10 formateurs, s’est réuni 6 fois.
Le CREAVie, composé de 8 personnes issues de toutes les équipes de bénévoles de RIVAGE,
s’est réuni 7 fois. 6 personnes ont participé aux congrès SFAP (Société Française
d’Accompagnement et de soins Palliatifs) à Lyon.
Chaque mois, se sont réuni les coordinateurs des équipes et leurs adjoints que je remercie
pour leur implication et leur aide au bon fonctionnement des équipes, ainsi que pour la relation
qu’ils établissent avec les équipes soignantes dans les différents lieux où RIVAGE intervient.
Actualités…
Ouverture :
1. Rivage synthèse du Rapport d’Activité 2011
RIVAGE Vie de l’Association
- 5 -
Concert en soutien à l’Association – mardi 13 novembre 2012
Nous avons partagé cette musique ensorcelée entre piano (Frédérique
Lagarde), violoncelle (Véronique Marin) et violon (Pierre-Olivier Queyras).
Merci aux concertistes et aux spectateurs qui ont soutenu l’Association.
La dernière Promotion 2012, « Poussière d’Etoiles »
Actualités…
Ressources 66 013€
Subventions SFAP 37%
Autres subventions 30%
Dons-Divers 14%
Cotisations 15%
Prestations Formation 4%
Emplois 57 510€
Formation Initiale 40%
Formation Continue 37%
Communication 15%
Partenariats 1%
Administration 7%
Intégration
Unité de soins Palliatifs = 1 Cité des Fleurs = /
Soins Longue Durée = 1 Les Lys = 1
Le Châtelet = / Clinique Meudon la Forêt
& Clamart = /
Soutien au Deuil = 1 E.V.C = 1
Houdan : 2
Nos bénévoles ont bénéficié chaque mois de 7 groupes de parole animés par un psychologue
et cela sur 10 mois.
Au cours de cette année, nous pouvons noter une diminution des candidatures pour notre
bénévolat qui correspond à une tendance nationale, malgré la présence active de RIVAGE lors
de différentes « journées des Associations. »
Marie Quinquis
Vice-Présidente
2. Rivage en Chiffres 2011
10 personnes formées, 8 bénévoles : 4 femmes, 4
hommes
Décès,
C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès de Chantal Pagano qui fut
bénévole en USP de 1996 à 1998 et engagée à « Chrétiens Sida ». Nous gardons le souvenir
d’une personne d’une grande délicatesse. Plusieurs d’entre nous ont assisté à ses obsèques le
19 novembre 2012.
- 6 -
Olivier Abel
La joie interview de Michel Ocelot
«Nos Espérances mesurent notre bonheur présent, bien plutôt
que notre bonheur à venir »
Alain
RIVAGE Espérance…
Quelques citations …
« L’Espérance est le songe d’un
homme éveillé »
Aristote
«Je venais justement lui annoncer que, contre toute
Espérance, j’avais réussi mon travail »
Saint-Exupéry
«L’espérance est un combat qui exige du cœur et de
l’imagination »
Jaques Chirac, Président de la République
«Les déceptions ne tuent pas et les Espérances font vivre »
George Sand
«L’Espérance est la plus grande et la plus difficile
victoire qu’un homme puisse remporter sur son
âme »
Georges Bernanos
« Echos intérieurs ,
Incandescence de la lumière…
Quand le noir obscurcit le ciel,
Quand l’eau inonde la terre,
Le sol se déchire et la tempête neigeuse ensevelit les corps humains…
Saison d’hiver, est là!
Alors … dans le temps et l’espace
Un nouvel état paisible, sublime
Et fixe un point naissant lumineux
Comme un arc-en-ciel irise les couleurs du prisme!
Quand les mots obscurs n’expliquent plus rien,
Quand les yeux des hommes sont fermés, verrouillés,
Leurs mains serrées, poignets immobiles,
Leur corps, comme des statues, restent figés, crispés!
Alors, ….les rayonnements cosmiques, étincelles, nous protègent
La Création, à nouveau inventée,
L’extraordinaire envahit les Idées,
Le regard s’ouvre!
L’Incandescence de la lumière, filament,
Illuminé, le RIVAGE inonde l’horizon,
Céleste entre visible et invisible…
L’Espérance, l’Esprit est tout!
Marie Coquilleau-le Maréchal Comité de Rédaction
«Le handicap, la maladie sont fracture et dégradation.
Dans ces instants où l’ont perçoit l’échéance de la vie,
l’espérance est souffle vital qui s’amplifie; sa juste
respiration en est le second souffle »
Philippe Pozzo di Borgo
- 7 -
Olivier Abel
La joie interview de Michel Ocelot
RIVAGE Espérance…
Textes…
Violette Maurice, née en 1919 à Saint-Etienne (France). Résistante à l’ occupation nazi, elle a fait parti du convoi « Nuit et Brouillard ». Déportée au camp de concentration de Ravensbrück entre 1943 et 1945, elle a survécu à la folie des hommes. Poète, romancière, ses mots essayent de trouver dans la contemplation de la nature une paix à jamais noircie par les horreurs de la guerre. Elle disparaît le 21 octobre 2008.
Imaginaire
« J’ai marché dans le rêve et dans l’imaginaire,
Dans le matin de miel et dans le jour fervent,
Dans les reflets du soir, dans l’or de la rivière,
Sur le sable léger ébouriffé de vent.
Je t’ai cherché en vain dans chaque paysage,
Echo de notre esprit, souffle de ma pensée,
Dans le regard du fou et dans celui de sage,
Et dans le lent martyr de l’enfance blessé.
Ton silence toujours repoussait mon attente,
Le couchant rayonnait comme un grand luminaire,
Je voulais m’arracher à la terre pesante,
J’ai marché dans le rêve et dans l’imaginaire. »
Violette Maurice
Guy Gilbert, né à Rochefort-sur-Mer en 1935 Proche de la population et il parle l’argots des loubards… «Qu’est-ce, pour lui, qu’aller « jusqu’au bout »?
La joie de vieillir …
« L’éternité vient doucement. Quelle joie! Ce visage tant prié, tant désiré, prend forme. C’est
l’Amour. Il n’a pourtant pas de visage, l’Amour.
Il est l’éternité où il n’y aura plus de souffrance, de mort à craindre, de manques à supporter.
Il est Dieu, cherché, bûché, pressenti, frôlé, du temps de la terre.
Debout, les ancêtres. Marchez. Ne courez pas, ce n’est plus le temps. Mais bougez-vous.
Sortez. Par tous les temps. Couvrez-vous simplement. « Avec le manteau de l’Amour »,
nous recommande saint Paul »
Guy Gilbert
« Jusqu’au bout !»
- 8 -
La transmission réflexions d’Afrique
Au sens général l’espérance est une attente,
fondée rationnellement ou non, d'une
amélioration, d'une réussite, d'un bonheur à
venir .
De nos jours certains philosophes
l’approchent plutôt sous l’angle du principe
moteur de la perfectibilité illimitée et
historique de l’humanité en marche vers un
état de perfection.
Mais cette notion d’espérance fut mise en
question par la montée du nihilisme exprimé
par Nietzfche et Cioran, comme aussi par des
événements tels Verdun, Auschwitz et
Hiroshima.
Pour la première fois de son histoire, l’homme
est devenu le maître de l’apocalypse, se
trouvant constamment sous l’épée de
RIVAGE Espérance …
Freud
Un Brin de Philosophie ……
Cioran
Extraits de :
Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale Tome 1 PUF p. 68
Monique Canto Sperber
Dictionnaire de la philosophie Armand Colin
Nouveau vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines
Louis -Marie Morfaux et jean Lefranc Armand colin
Damoclès d’une mort collective qui réduirait à
néant le principe d’une espérance historique
tendant vers son épanouissement.
Un pessimisme radical n'y voit qu'une illusion du
vouloir-vivre : c'est en général le cours de la vie
de l'homme : « déçu par l‘Espérance, il danse
dans les bras de la mort » (Schopenhauer ).
L’anti-utopie par excellence que constitue la mort
vient interrompre brutalement la projection des
possibles vers l’à-venir.
Si la mort devait être l’échec final, le dernier
fiasco qui supprime tout futur, tout projet,
l’espérance fondamentale serait alors une
illusion, une promesse qui ne pourrait pas être
tenue. Sartre aurait alors raison de soutenir que
l’existence est fondamentalement absurde.
Au sens théologique, c’est une attente confiante
et patiente de ce qu'on ne voit pas.
- 9 -
L’espérance implique donc une confiance
originelle en l’être, un acquiescement à la
totalité de la réalité dans lequel l’amour, le
don, la fidélité jouent des rôles primordiaux.
La transmission réflexions d’Afrique
En conclusion, l’homme est-il un être pour la mort
ou un être pour l’esprit ?
RIVAGE Espérance …
Jean-Hugues Motte Comité de réduction
- soit sur une confiance dans le tout Autre qui,
malgré les nouveaux choix possibles de l’homme
veillera à ce que l’homme atteigne son état final par
une transfiguration de la temporalité dans
l’intemporalité
L’espérance peut alors se fonder :
- soit sur une foi en l’être humain, en sa moralité, « Le progrès de la civilisation saura-t-il
et dans quelle mesure dominer les perturbations apportées par les pulsions humaines
d’agression ou d’autodestruction ? » (Freud dans Malaise et civilisation PUF 1971 p. 107).
Elle est toujours accompagnée d’un minimum de
certitude, d’assurance, de confiance dans la
possibilité d’atteindre son objet.
On n’espère pas quelque chose qu’on est
absolument sûr de ne pas pouvoir posséder.
- 10 -
L’Avenir de l’Espérance …
La transmission réflexions d’Afrique
Pour lui, l’écriture fut un levier pour résister :
« En prison, l’écriture me sauvait et donnait sens
à ma vie » (lettre à Olga).
Courage, responsabilité et persévérance furent
en quelque sorte ses maîtres mots.
Persévérer, c’est ne jamais renoncer, et aussi ne
pas attendre un salut qui vient de l’extérieur.
C’est apprendre à attendre patiemment que les
fruits soient mûrs.
« Souvent, au cours de ma vie, et pas seulement
en prison, il m’est arrivé de me trouver dans une
situation où tout semblait se liguer contre moi.
Rien de ce que j’avais espéré ne paraissait
devoir se réaliser, aucune de mes actions n’allait
aboutir, ce que j’entreprenais avait perdu tout
sens. C’est là une situation que nous
connaissons tous ; nous croyons qu’il ne va plus
rien arriver de bon, pas plus à nous qu’au
monde qui nous entoure. Nous sommes pour
ainsi dire dans une situation de désespoir.
Je me trouvais donc plongé dans ce marasme et
une question ne cessait de me tourmenter :
pourquoi ne pas tout abandonner, pourquoi ne
pas me résigner? (…)
Et chaque fois que je m’interrogeais ainsi, je
finissais par comprendre que l’espérance au
sens le plus profond du terme ne vient pas du
dehors, qu’on ne saurait la chercher autour de
soi dans les signes qui annoncent le succès de
telle ou telle entreprise, pas plus qu’on ne
saurait la perdre en bloc lorsque tout paraît
courir à la catastrophe. Au contraire,
j’aboutissais chaque fois à cette même
conclusion claire : l’espérance est avant tout un
état d’esprit que l’on partage ou non,
indépendamment de la situation où l’on est
plongé. ( ..)
RIVAGE Espérance …
Vaclav Havel
(Source : Prague Cityline.com)
Vaclav Havel
Vue sous ce jour, l’espérance est
manifestement liée au sens que nous donnons
à la vie ; tant que nous la gardons, nous
gardons aussi une raison de vivre.
Si nous la perdons, il ne nous reste que deux
solutions : nous suicider ou, de façon plus
banale, nous contenter de survivre, de vivoter ,
de rester au monde simplement parce que
nous sommes déjà là. Bien sûr, on espère
généralement quelque chose ou en quelque
chose.
L’espérance a donc pour support un objet
concret. Prisonnier, je peux par exemple
espérer que quelqu’un finira par comprendre
un jour le sens de mon emprisonnement et
que mes souffrances en prison n’auront pas
été inutiles, qu’elles serviront par exemple à
conforter telles ou telles valeurs.
Président, je peux espérer voir une issue
heureuse à quelque négociation complexe et
goûter ensuite au bonheur du travail accompli.
Cependant, que l’espérance s’applique à un
objet spécifique ne change rien à ce que je
viens de dire : dans son essence la plus
profonde, elle ne vient pas du monde qui nous
entoure. (..) Ce serait même l’inverse :
l’espérance vivifie son objet, elle lui infuse une
vie, elle l’illumine.
Mais alors si l’espérance n’est pas un pur
produit de l’extérieur, d’où la tirons-nous ? Je
me suis interrogé, j’ai mille fois songé à cette
question et j’ai toujours fini pas aboutir à la
même conclusion qui tantôt réjouit, tantôt
sidère mes interlocuteurs : l’origine la plus
profonde de l’espérance est, pour parler net,
métaphysique.
- 11 -
Est né à Prague en 1936
auteur dramatique de renommée internationale, porte-parole de la charte de 1977
fut élu Président de la République tchèque et distingué comme Prix Nobel de la paix
J’entends par là que l’Espérance représente
quelque chose de plus profond qu’une
tendance ou une disposition de l’esprit humain
à l’optimisme, celles-ci fussent-elles d’origine
génétique, biologique, chimique ou culturelle.
Me voici arrivé au thème de la mort. L’homme
semble bien être la seule créature connue dont
on puisse affirmer sans aucun doute possible
qu’elle sait qu’elle va mourir. Et la mort n’est
pas cet événement bizarre que nous montrent
les informations télévisées avec leurs guerres,
les massacres terroristes ou leurs accidents
automobiles.
Bien au contraire, elle nous accompagne à
chacun de nos pas. Elle est présente dans la
disparition de nos proches, dans la moindre de
nos maladies, dans un vol en avion ou un
déplacement rapide en voiture. ( ..)
Mais alors puisque nous savons que nous
allons vers la mort, et que tout est en fin de
compte inutile, quel intérêt avons-nous à vivre
et à faire tant d’efforts? ( .. ) Nous ne pouvons
pas croire que notre vie a un sens et conserver
dans notre esprit une espérance permanente si
nous avons la certitude que tout s’arrête
définitivement avec notre fin.
L’ unique explication de l’Espérance véritable
tient à notre certitude profonde et par essence
archétypale, une certitude pourtant maintes fois
rejetée et ignorée ; celle que la vie sur terre
n’est pas un événement aléatoire au milieu de
milliards d’autres événements cosmiques eux
aussi aléatoires et promis à une disparition
totale , mais qu’elle est partie intégrante, ou un
maillon, fût-il microscopique, d’un grand et
mystérieux ordre de la vie dans lequel tout a sa
place unique, où rien de ce qui est arrivé ne
peut être effacé, où tout s’inscrit à jamais et se
trouve mystérieusement évalué.
RIVAGE Espérance …
(Suite) Vaclav Havel
Oui, notre sentiment de l’infini et de l’éternité, qu’il
soit intuitif ou raisonné, peut expliquer ce
phénomène non moins mystérieux qu’est
l’espérance.
D’aucuns trouveront peut-être ma réflexion
extravagante, mais je n’y peux rien. A ma
connaissance, toutes les fois où quelqu’un a
vraiment accepté un destin difficile, entrepris un
acte de bonté ou de courage sans se soucier d’un
résultat visible et immédiat, c’est la seule
conviction secrète et profonde qui l’a fait agir.
En exagérant un peu, on pourrait donc dire que la
mort ou la conscience de la mort, cette dimension
étonnante s’il en est du passage de l’homme sur
terre, qui nous remplit d’effroi , de crainte et de
terreur constitue en même temps une sorte de
condition à l’accomplissement de notre vie au
meilleur sens du terme. (.. )
Cette conscience lui offre en effet la possibilité de
vaincre la mort, non en refusant de l’admettre,
mais en se montrant capable de voir au-delà
d’elle ou d’agir malgré elle en toute connaissance
de cause.
Sans l’expérience de la transcendance, ni
l’espérance, ni la responsabilité humaine n’ont
de sens.
Extraits de la conférence sur « l’avenir de l’espérance »
Hiroshima 5 décembre 1995
Livre « Il est permis d’espérer » 1997 . Editions Calmann-Levy
*
* *
- 12 -
La transmission réflexions d’Afrique
Tu ne te souviens sûrement plus de rien,
et pourtant tu m’as parlé du haut de tes 3 ou 4 ans.
Tu remontais un autobus à roulettes jusqu’en haut de la côte pentue
d’un jardin public de Meudon. Au sommet de la colline,
bien déterminé à profiter de ton jouet,
tu t’étais assis dessus en l’enjambant avec tes petites jambes
potelées et fermes.
L’effort avait rosi tes joues, et tes yeux brillaient d’excitation.
Moi, en bas de la côte, je n’en menais pas large,
car le chemin était étroit et si tu me heurtais en passant,
j’allais tomber par terre et une fois au sol,
c’est certain, je ne pourrais plus me relever.
Mais tu t’es tranquillement arrêté
devant moi en freinant avec tes petits petons.
Très sérieusement , tu as pointé ton index vers moi,
et tu m’as déclaré : « Toi tu es vieux »
J’ai failli te répondre « dans mon cas, on dit « vieille » parce que moi,
je suis une dame.
Je t’ai quand même répondu en souriant : « Tu as raison, je suis vieille ».
Tu t’es mis à rire si joyeusement que j’en étais perplexe.
Enfin, je t’ai demandé :
« Pourquoi ris-tu ? »
« Parce que tu es rigolote. »
Quelle évidence ! Et tranquillement tu as repris ta descente.
Et voilà notre seule rencontre.
Je voudrais que tu gardes ta clairvoyance et ta certitude,
et que tu me répondes,
mais ça c’est un rêve.
RIVAGE Espérance …
Lettre à mon Petit Copain d’un Jour
Mme Vittek, 85 ans – Résidente EHPAD – Le Chatelet - Meudon
- 13 -
RIVAGE Espérance …
« La Mort intime »
Ceux qui vont mourir nous apprennent à VIVRE
Marie de Hennezel
« La mort n’en demeure par moins un immense mystère,
Un grand point d’interrogation que nous portons au plus intime de nous-mêmes.
Après des années d’accompagnement de personnes vivants dans leurs instants,
je n’en sais pas plus sur la mort elle-même,
mais ma confiance dans la vie n’a fait que croitre.
Je vis, sous doute, plus intensément, avec une conscience plus fine
ce qui m’est donné de vivre, joies et peines,
mais aussi toutes ces petites choses quotidiennes, allant de soi
comme le simple de respirer ou de marcher »
« Alors que la mort est si proche, que la tristesse et la souffrance dominent,
il peut encore y avoir de la vie, de la joie,
des mouvements d’âme d’une profondeur
et d’une intensité parfois encore jamais vécues.
Dans un monde qui considère que la « bonne mort » est la mort brutale,
si possible inconsciente, ou du moins rapide afin de déranger le moins possible,
la vie de ceux qui restent, un témoignage sur la valeur des derniers de la vie
sur l’incroyable privilège que peut représenter le fait
d’être un témoin ne me semble pas superflu.
Mieux encore, j’espère contribuer à une évolution de la société.
Une société, qui au lieu de dénier la mort,
apprendrait à l’intégrer à la vie.
Une société plus humaine, où conscients de notre condition de mortels,
nous respecterons davantage la valeur de la vie. »
« Quand on ne peut plus rien faire,
on peut aimer et se sentir aimé,
et bien des mourants, au moment de quitter la vie,
nous ont lancé ce message poignant :
ne passer pas à côté de la vie,
ne passer pas à côté de l’amour. »
Psychologue clinicienne, Marie de Hennezel a travaillé dix
ans en soins palliatifs puis elle a été chargée de mission au
ministère de la Santé sur les questions de la fin de vie
Intervention du Président de la République, François Hollande,
lors de la clôture de la réunion du comité de suivi du plan Alzheimer
20 septembre 2012
- 14 -
RIVAGE Alzheimer, Plan contre la maladie
2008-2012 Prolongé
(Extaits)
« Je suis venu aussi vous dire que si ce comité se
réunit, ici, en cette journée, c'est bien parce que
nous voulons marquer l'importance que nous
attachons d'abord à la maladie elle-même : 850
000 personnes sont aujourd'hui touchées par
ce fléau ; je pense aussi aux familles qui sont
directement concernées.
Je voulais que pour cette journée consacrée à la
maladie d'Alzheimer, nous puissions nous réunir
ici, les ministres, votre comité pour saluer le rôle
que vous jouez et cette construction originale que
vous avez été capables de bâtir. »
« Votre comité a d'abord cette force qui est celle
de diversité. Il y a ici des personnalités médicales,
scientifiques. Nous avons beaucoup d'attente en
matière de recherche. Il y a des professionnels,
ceux qui soignent, aident, accompagnent. Il y a
des représentants des familles qui sont angoissés,
souvent dans le désarroi. Il y a toutes les
associations qui accompagnent les patients et
leurs familles. Il y a les aides à domicile, sans
lesquelles il n'y aurait pas le soutien de tous les
instants. »
« Si la maladie d'Alzheimer est un drame pour des
familles, pour des personnes touchées, dans le
même temps, vous avez donné à espérer. Vous
avez avancé des pistes, des réponses. Vous avez
également permis des progrès. En cette journée,
beaucoup se retournent vers vous, votre comité
notamment, pour savoir ce que nous pouvons, ce
que vous pouvez faire encore. »
« J'ai d'ailleurs une pensée pour Geneviève
LAROQUE longtemps présidente de la
fédération nationale de gérontologie, qui hélas,
nous a quittés il y a quelques jours. Elle avait
souhaité depuis longtemps cette approche
intégrée, ne pas séparer les malades, mais au
contraire considérer que nous avons à faire
ensemble une approche cohérente par rapport à la
grande question du vieillissement. »
« Et donc, ce respect de la décision portant sur les
choix les plus intimes, y compris sur la fin de vie,
j'ai voulu qu'une mission puisse y travailler. C'est
celle que j'ai confiée au Professeur SICARD. »
« C'est pourquoi le plan Alzheimer sera prolongé
au terme d'une évaluation, parce que nous en
avons besoin. Ce plan sera même élargi à
l'ensemble des maladies neurodégénératives, de
façon à ce que nous puissions utiliser tout ce qui a
été déjà engagé, réalisé, avancé, recherché au
service des malades dont les troubles peuvent être
à un moment ou à un autre comparables à
Alzheimer. »
*
* *
Source AIRMA (Association Internationale pour la Recherche sur la maladie d’Alzheimer
- 15 -
Geneviève Laroque
35 ans de gérontologie
RIVAGE Alzheimer, témoignage passionnant…
Sœur Nathanaëlle raconte,
en mémoire de Mme Geneviève Laroque
Les soignants qui, comme moi, ont eu la chance
d’exercer leur profession entre 1985 et 2000 ont
été au bénéfice du travail patient, rigoureux et
volontariste de Mme Geneviève Laroque ,
en ce qui concerne
la prise en charge
des patients en
fin de vie.
Je me souviens de
ce mois d’août 1986
en plein été, donc
en pleine période
de vacances, où nous
avons découvert, lu,
imprimé, et partagé la circulaire DGS/D dite
Laroque.
Son titre contenait des mots qui pour nous
soignants en cancérologie, en gériatrie,
portaient toute notre espérance d’un mieux être
dans le quotidien de notre travail, pour les
patients dont nous avions la responsabilité :
«les soins d’accompagnement visent à
répondre aux besoins spécifiques des
personnes parvenues au terme de leur
existence»
Mme Laroque à travers la rédaction de ce
rapport, commandé par Mme Michèle Barzach,
ministre de la santé, posait les bases de ce qui
est toujours une des préoccupations majeures
de notre société : être présent à côté de celui
qui est confronté à sa finitude.
Le terme le plus neuf dans ce titre est celui
« d’accompagnement ».
A l’époque, c’était lui qui donnait du sens à cet
élan et ce mouvement venus des pays anglo-
saxons : le mouvement des Hospices. Il
contenait toute notre espérance.
ce qu’elle a initié dans les instances où elle a
œuvré avec intelligence et ténacité.
En particulier, je souhaite que les équipes de
bénévoles d’accompagnement en EHPAD,
USLD et autres lieux de résidence de nos
anciens et de leurs proches, soient attentives à
la bienfaisance de la présence gratuite, si
souvent silencieuse, sans autre médiation que
le regard intérieur du cœur éveillé à la
Rencontre de l’autre.
Merci Geneviève Laroque d’avoir été là, à ce
tournant du siècle.
Les soins d’accompagnement sont maintenant
reconnus, même s’ils ne sont pas encore codifiés
à leur juste valeur dans le système de la
« tarification à l’activité ». Les associations de
bénévoles d’accompagnement ont pignon sur
rue et essaient toujours plus de prendre une
parole citoyenne dans les débats actuels liés à la
fin de la vie.
Je souhaiterais que l’on exhume ce rapport de
1986, et qu’on se mette à le travailler comme à
nouveau.
Alors, parce que Mme Laroque nous a quittés
après une longue vie de fidélité au service de la
gérontologie, dans une société vieillissante,
soyons vigilants pour transmettre autour de nous
Soeur Nathanaëlle
Décembre 2012
Alors nous découvrirons
avec joie le chemin parcouru,
et dans l’espérance celui qui
reste à parcourir pour en
vérité « accompagner »
ceux qui ont besoin de soins,
de présence, au-delà de ce
qui est inscrit dans le
protocoles de toutes sortes!
- 16 -
RIVAGE Alzheimer, témoignage passionnant …
A 39 ans, « Vivre avec cette maladie, c’est un triple combat »
Témoignage recueilli et publié par Pascale Santi
Le Monde - 21 septembre 2012
M’inventer un avenir. Le troisième combat est de
trouver des solutions de remplacement. Par
exemple : j’adore la lecture, c’est l’une de mes
passions. Mais voilà, la maladie, actuellement,
touche la lecture, pas encore le déchiffrage, mais
c’est plutôt réussir à suivre l’histoire que c’est
devenu compliqué. Donc premier combat : me
battre, m’accrocher pour continuer à maintenir la
lecture.
Second combat : accepter. Accepter de lire des
romans du rayon ados, dont l’intérêt, vous en
conviendrez, est limité !
Accepter la perte de cette capacité intellectuelle
… C’est dur, voire impossible !
Troisième combat : trouver une issue de secours
à long terme, quelle activité pourrais-je trouver
pour passer un aussi bon moment qu’avec un
livre quand la lecture ne sera plus possible ?
Des pistes existent, mais il faut être capable de
prendre du recul, de faire en sorte que la douleur
s’apaise, laissant place à une solution ».
« Peut-être que l’une des solutions pour moi
serait la photo ? Affaire à suivre …
Si vous avez des idées, je prends !
Et voilà, ce triple combat est à mener sur bon
nombre de fronts : au niveau de mes capacités,
certes, mais aussi et surtout au niveau de mon
mari Xavier et de mes enfants.
Premier combat : me battre pour accepter que la
vie ensemble soit la plus belle, la plus classique
possible, bref que notre quotidien soit le plus
normal et beau possible.
Deuxième combat : me battre pour accepter que
je ne serai peut-être pas à leurs côtés pour les
voir grandir et les accompagner dans les étapes
de leur vie.
Et enfin troisième combat, parallèlement, me
battre pour trouver des solutions innovantes,
différentes, pour l’avenir, pour que notre relation
perdure, qu’elle reste belle, qu’elle soit apaisée.
Je ne veux pas qu’à l’avenir nous vivions côte à
côte sous le même toit, que le poids de ma
dépendance pèse sur leur vie, car j’adore la vie ».
Mais, Justine –nous avons choisi de changer
son prénom- a accepté de témoigner
lors de la deuxième
université d’été
d’Espace éthique
Alzheimer
qui s’est tenue le
18 et le 19 septembre
à Aix-en-Provence.
Un témoignage qui a bouleversé l’auditoire. Il
figure dans le livre Alzheimer, Ethique et Société
(Editions Erès), d’Emmanuel Hirsch, Directeur
de l’Espace éthique Alzheimer et Fabrice Gzil,
responsable du pôle études et recherche à la
Fondation Méderic Alzheimer qui sort début
octobre.
Voici quelques extraits de l’intervention de
Justine (!)
« Je suis avant tout une personne,
complètement, entièrement, avant d’être une
malade de plus. (…) J’ai 39 ans, je suis ingénieur
en électronique, mariée à un homme extra,
Xavier, et heureuse maman de trois enfants … et
j’aime la vie, comme tous ».
Cette personne a été diagnostiquée d’une
maladie à Alzheimer il y a 3 ans.
« Cette foutue maladie va peu à peu me faire
disparaître à vos yeux, peu à peu on va parler de
moi en ma présence, sans même avoir la
décence de me consulter. Car je vais disparaître
derrière cette maladie. Parce que mon père, qui
a 66 ans a été diagnostiqué il y a 8 ans, il est
aujourd’hui très fortement dépendant, et je vois
donc combien il est difficile de garder à l’esprit
que derrière le malade, il reste une personne.
(…) Vivre avec cette maladie est un triple
combat.
Le premier de ces combats, c’est avant tout pour
ne pas perdre mes capacités alors que je n’ai
qu’à sombrer. Donc ce deuxième combat :
s’accepter telle que je suis et ne serai plus. M’accepter avec tous ces moins.
Pascale Santin – Journaliste
Elle ne veut pas être érigée en représentante des personnes jeunes atteintes de la maladies d’Alzheimer
- 17 -
« C’est bon… » Mon père opine du chef en
buvant son verre de sirop de grenadine.
«C’est bon… » Surprise de l’entendre
prononcer cette phrase qui l’a si peu
accompagné tout au long de sa vie.
Aussi loin que je remonte, je ne pense pas
avoir jamais vu ces trois mots affleurer sur ses
lèvres.
Et voilà qu’à quatre-vingt-neuf ans, enfermé
dans sa maladie d’Alzheimer, un assentiment
voluptueux lui vient : « C’est bon… ».
Il boit le verre à petits coups. La sensation de
plaisir semble maintenant diminuer.
A la fin, je crois même qu’il revient à cette
notion de devoir qui, elle, ne l’a jamais quitté.
Il faut absolument finir son verre, finir son plat.
Aux dernières années de pleine conscience, il
maugréait devant les assiettes remplies qu’on
poussait devant lui, au restaurant surtout.
Il n’avait pas faim mais allait au bout du
supplice, méthodiquement, à grand renfort de
pain – une habitude prise depuis sa plus petite
enfance.
Il allait au bout parce qu’il était inconcevable
de ne pas finir son assiette.
Une morale complexe l’exigeait, ses origines
paysannes le contraignant à honorer toute
abondance, fût-elle infligée.
Il y a trois ou quatre ans, je l’ai vu se lever
fatigué, les jambes flageolantes, et s’asseoir
devant son café au lait matinal en murmurant :
« Je suis foutu ». Mais maintenant qu’il est
parti ailleurs, dans une demi-somnolence
apparemment satisfaite et résignée, voilà qu’il
dit : « C’est bon… ».
« C’est bon. » On ne peut pas dire ces mots
par hasard. Le père que j’ai connu avant se
serait-il senti trahi de les avoirs prononcés?
Je me rappelle ses retours du fond du jardin,
aux plus chaudes journées d’été, dans la
lourde chaleur d’Aquitaine.
Je revenais d’une partie de foot ou d’une
balade à bicyclette. J’appuyais mon vélo contre
le mur de la maison pendant qu’il se lavait les
mains juste à côté, au robinet extérieur.
Il me jetait un regard qui n’était pas vraiment
de reproche, mais où s’affirmait le triomphe de
sa conception du devoir, l’évidente satisfaction
qu’il prenait à se montrer transpirant d’une
transpiration sérieuse.
Ma mère lui servait un verre de panaché, qu’il
buvait en remerciant, mais sans dire : « c’est
bon. »
Maintenant que tout est passé, qu’il ne tient
plus les rênes – on l’a changé de chambre
aujourd’hui pour modifier le revêtement du sol
et il n’a même pas manifesté de surprise -, quel
sens y a-t-il dans cet aveu de plaisir qu’il va
réitérer au repas du soir en commençant son
entremets à la vanille ?
Je l’ai entendu dire « C’est bon… ». Deux fois
dans la même journée. Deux fois en cinquante
ans. Est-ce qu’il se sent mieux, débarrassé de
toutes les tensions qui habitaient sa vie
d’adulte ? Ou bien l’expression du plaisir est-
elle chez lui proche d’une extrême lassitude,
d’un abandon contraire à sa nature.
Peu importe, après tout. Je ne possède pas
mon père. Il dit « c’est bon », il aime le sucré,
la grenadine et l’entremets à la vanille.
Il dit c’est bon, et sans doute l’a-t-il pensé
souvent sans le dire.
Est-il davantage ou moins lui-même ? Il dit
« C’est bon. »
Philippe Delerm
Ecrivain
« Dickens, barbe à papa » et autres nourritures
délectables
Philippe Delerm
Editions Gallimard - 2005
RIVAGE Alzheimer, récits, témoignages…
« Et voilà qu’à quatre-vingt-neuf ans,
enfermé dans sa maladie d’Alzheimer, un
assentiment voluptueux lui vient : »
« C’est Bon »
Le collecteur des mots …
- 18 -
RIVAGE Fin de Vie…
Lancement de la Mission Sicard
Visite du Président de la République le 17 juillet 2012 à la Maison Médicale Notre Dame du Lac
Le 17 juillet 2012, Monsieur Le Président de la
République Française, Monsieur François
Hollande, accompagné de Madame Touraine,
Ministre de la santé, de Madame Delaunay,
Ministre déléguée auprès du ministre de la
santé chargée de la vieillesse et de l’autonomie,
le Professeur Lyon Caen chargée de mission
pour les questions de santé à l’Elysée ont été
accueillis par le pasteur Marcel Manoël,
Président de la Fondation Diaconesses de
Reuilly, le directeur général Monsieur Olivier
Joël, la directrice de la Maison médicale Notre
Dame du lac, Madame Claire-Marie
SCHEFFELS, en présence de Monsieur le
Maire de Rueil-Malmaison, Monsieur Patrick
Ollier.
Trois temps forts ont ponctué cette visite
qui a durée plus de deux heures :
La visite proprement dite de l’établissement où
le Président a pu rencontrer et dialoguer avec
des malades ou leurs proches. Cet échange
direct et émouvant a pu se dérouler dans une
relative intimité.
Une table ronde sans la présence de
journalistes ou de tiers, où ont été débattues les
questions concernant l’accompagnement, les
soins palliatifs et la fin de vie dans un climat
sérieux, empreint d’écoute et de confiance.
Enfin dans le parc, la conférence de presse ou
le Président a à la fois nommé le professeur
Didier Sicard afin de mener un travail de
réflexion d’information, de concertation sur le
débat concernant la fin de vie et en particulier
pour les cas les plus difficiles et exceptionnels.
C’est bien sur ce que les médias ont le plus
commentés, mais il a aussi beaucoup insisté
sur le caractère prioritaire du développement
des soins palliatifs. Sur ce point, sa conclusion
nous a fait chaud au cœur :
Lettre aux amis des Diaconesses de Reuilly – N°23
« Voilà Mesdames et Messieurs
le message que j'étais venu porter.
C'est-à-dire d'abord celui de la reconnaissance d'un
travail qui est mené dans des institutions comme
celle-ci, des maisons comme les vôtres.
Travail qui est assumé par des professionnels de
grande qualité, des personnels dévoués, dignes,
qui méritent toute la considération de la Nation.
Je voulais aussi dire aux médecins qui sont là,
combien nous soutenons leur démarche, combien
nous appelons à un travail interdisciplinaire et
combien vous pouvez être fiers
de l'action que vous menez.
Vous offrez l'un des plus beaux témoignages qui
soit, celui de permettre à chaque être humain de
rester digne, à tout moment de son existence.
C'est pourquoi vous pouvez compter sur le soutien
et l'engagement de l'Etat et vous nous avez fait ce
matin le plus beau des cadeaux. Celui de nous
offrir une leçon de vie, une leçon de bonheur, le
bonheur de voir des malades heureux.
Le bonheur de voir des personnels heureux de
rendre heureux et si nous pouvions faire que cette
leçon de vie soit une leçon de société, et donner un
peu plus de bonheur à chacun, nous aurions à nos
places respectives rempli notre mission.
Merci pour cette leçon. »
Extrait de l’Intervention de M. le Président de la
République - Maison médicale Notre Dame du Lac
- 19 -
RIVAGE Fin de Vie… Le lancement de la Mission Sicard
Le Professeur Didier Sicard
AFP/Jean-Pierre Muller
"Je ne viens pas avec un armement idéologique, religieux ou médical.
Comme les Français, je m'interroge", assure Didier Sicard
Dans le cadre des débats actuels
voici le calendrier des réunions organisées par le Pr Sicard
6/10 Montpellier 2012
10/10 Clermont-Ferrand 2012
20/10 Lille 2012
24/10 Nantes 2012
1/12 Toulouse 2012
8/12 Le Havre 2012
15/12 Paris 2012
Les débats sur la Fin de Vie sont publics
Mission Sicard
Le professeur Sicard assure disposer d'une « liberté absolue » pour cette mission de
réflexion sur la fin de vie.
Il souhaite donner aussi la parole aux citoyens : "Nous devons être des capteurs des
attentes et des angoisses des Français" annonce -t-il.
Pour autant, cette mission, débutée le 22 septembre à Strasbourg, reste délicate, car la
fin de vie peut déchaîner les passions, si ce n'est déjà fait, entre partisans et adversaires
de l'euthanasie.
Dans le journal La Croix, le Ministre de la Santé Marisol Touraine s'est exprimée sur ce
sujet : « Une personne doit pouvoir demander que soit abrégée une vie qui n'en est plus
une pour elle » Ce qui va plus loin que la loi Leonetti de 2005. Avec cette mission, une
réflexion de fond est engagée.. . .
L'association Rivage, à travers son comité de Recherche en Ethique d'Accompagnement
pour la fin de vie (CREAVie), a déterminé sa position (Avis numéro 1, du 30 septembre
2009) . Cet Avis a été adressé récemment à la commission Sicard.
Contact CREAVie : [email protected]
- 20 -
Quelques Plumes …
RIVAGE Fin de Vie… Témoignages
L’horizon du grand pays recule sans cesse
Au fond de l’espace et du temps.
C’est le pays où l’on s’éloigne toujours
ensemble, et l’on ne parvient en un lieu désert
que pour en trouver d’autres plus beaux… »
« Il va tête nue.
La mort, le vent, l’injure, il reçoit sans jamais ralentir son
pas.
A croire que ce qui le tourmente n’est rien en regard de
ce qu’il espère.
A croire que la mort n’est plus qu’un vent de sable.
A croire que vivre est comme il marche – sans fin … »
« L’Homme qui marche »
Christian Bobin
« Le pays où l’on n’arrive jamais »
André Dhôtel
Quelques mots s’envolent …
Puis s’évanouissent, lointains
Le murmure des mots, proche,
Qui s’embrasse…comme des Baisers,
Sur le visage de Clément …
Puis la neige immaculée et blanche
Soupir et Mort….
Mais tu es là, en Vie :
Lentement, un souffle vital
Haletant, tu respires
Tu es notre souffle de vie, de Lumière !
Pour quelques enfants
Pour quelques adolescents
Pour quelques adultes,
Femmes et Hommes,
Vivants
Mais silencieux
Mais Enfermés
Equilibristes
Entre « avant et après »
Qui combattent la lassitude et
la solitude
«Mots Entrelacés »
Marie de Cantilly
Bénévole
- 21 -
Nous vous proposons 4 livres et 2 livres audio
Neige
Maxime Fermine – Editions Arléa – Janvier 1999
« il n’écrivit qu’un seul mot, d’une blancheur éclatante »
Dans le Japon raffiné du XIX° siècle, le jeune Yuko a choisi sa voie : il sera poète
contre l’avis de son père…
Langue épurée, il parle d’amour de la vie et quête d’absolu.
Lire et relire …
Soie Alexandre Barricco – Editions R.C.S. 1996 à Milan – Editions Albin Michel 1997 pour la
traduction française (Françoise Brun)
« Des voyages longs et dangereux, des amours impossibles, qui se poursuivent
sans avoir commencé, des personnages de désirs et de passions, le velours
d’une voix, la sacralisation d’un tissu magnifique et sensuel et la lenteur des
saisons et du temps immuable. »
A vraiment lire…
Le second Souffle Philippe Pozzo di Borgo-Editions Bayard (L’histoire vraie qui a inspiré le film « Intouchables » d’Eric Toledano et Olivier Nakache)
« En 1993, Philppe Pozzo di borgo est directeur délégué des champagnes Pommery,
lorsqu’une chute en parapente le laisse trétraplégique. Il découvre l’exclusion à la suite de
cet accident. Son « diable gardien » Abdel le maintient en vie … »
Audio Livres
Monstres Sacrées, Sacrés Monstres Textes et poèmes
André Dussolier - Gallimard « J’ai réuni ces textes sans autre critère que mon amour pour eux et mon plaisir de les
vivre »
A écouter en silence…
C’était Bien Jean d’Ormesson – « lire dans le noir »
Lu par Jacques Garat avec la participation de Jean d’Ormesson
« Jeune homme, Jean d’Ormesson se demandait ce qu’il pouvait faire de sa vie.
Aujourd’hui, il s’interroge : « qu’en ai-je fait? » revenant sur les questions
essentielles que chacun se pose, l’Académicien porte sur notre époque un regard
apaisé. Il conclut dans un sourire : « c’était bien ». Merci pour ce sourire …
RIVAGE Bibliothèque – Audio Livres
- 22 -
Bulletin d’adhésion
A retourner avec votre règlement à l’ordre de Association Rivage
Membre Actif : 40 €
Membre Sympathisant : 50 €
Donateur : ……............. €
Personne Morale : 75 €
Mode de Règlement Chèque Banque Espèces
Chaque adhésion ou don est déductible des impôts – Art.200 & 238 du CGI
NOM – Melle/Mme/Mr. …………………………………………………………………………………………………………………………………………………….….
PRENOM ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..…………
ADRESSE ………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..………
CODE POSTAL …………………………………………… VILLE …………………………………………...……………………………………………………………………
……………… /…………………… ……………………@………………………..
Date ………………………………………. Signature
12 rue Porte de Buc – 78000 Versailles - 06 16 30 81 13 – [email protected]
19 février 2013
« Vivre et Mourir sans Souffrir » - Jacques Ricot
Conférence publique - 20h30 – Centre 8
Organisée par RIVAGE et la CD au sein du collectif SP
de la mairie de Versailles
RIVAGE Quelques Annonces 2013…
16 janvier 2013
« La Vulnérabilité : ces limites où tout s’inverse? » Olivier Abel, professeur de
philosophie éthique à l’Institut protestant de théologie de Paris
De 18 heures à 20 heures – Amphithéâtre Morel- pavillon Magnan - CHSA
1 rue cabanis – 75014 Paris
Inscription obligatoire : [email protected]
Recherchons un nouveau TRESORIER pour l’Association …..
4 heures par semaine
Merci
(Véronique Levêque – 06 10 04 13 30)
URGENT
- 23 -
Contacts
12 rue Porte de Buc – 78000 Versailles
Présence assurée : le mardi de 9h30 à 16h30
Courriel : [email protected]
http ://www.association-rivage.org/
Présidente Sylvie Wolff – (06 08 47 78 31)
Vice Présidente – Marie Quinquis (06 09 11 18 35)
Responsable du Bénévolat - Formation Initiale - Administration Véronique Levêque (06 10 04 13 30)
Communication Marie Coquilleau-le Maréchal ([email protected]) Jean-Hugues Motte ([email protected]) Trésorier Alain Barbet-Massin (01 39 07 30 58)
Lieux de Présence de Rivage
*Maison de Santé Claire Demeure
12 rue Porte de Buc – 78000 Versailles *La Cité des Fleurs Soins de Suite et de Réadaptation Hôpital Privé de Gériatrie 1 rue de Dieppe – 92400 Courbevoie *Clinique du Plateau Soins de Suite et de Cancérologie 5 rue Carnets-92140 Clamart *Maison de Retraite du Chatelet 3bis rue du Bel Air – 92190 Meudon *Maison de Retraite ORPEA les Lys Unité Spécifique Alzheimer 5 rue Auguste Brunot – 78150 Rocquencourt *Hôpital de Houdan 42 rue de Paris – 78550 Houdan *Réseau Epsilon soins palliatifs à domicile 195 avenue du Général Leclerc – 78220 Viroflay
Soutien au Deuil
en Région Parisienne
Coordinatrice : Noëlle Coutansais Ecoute téléphonique et accueil à notre siège :
* lundi de 14h à 17h 01 39 07 30 10 – 06 01 33 72 35
Entretiens individuels : sur rendez-vous Groupe de Partage et d’Ecoute :
* chaque premier mardi du mois De 19h à 20h30
Association Rivage Atlantique
13 avenue Darcy Brun – 17750 Etaules 05 46 36 42 63
Président : Alexandre Reguillet
Secrétaire : Bernadette Dussauld [email protected]
Rivage n°17 – Décembre 2012 – Tiré à 600 Exemplaires Journal d’information réalisé et publié par des bénévoles de l’Association Rivage
Comité de Rédaction : Marie Coquilleau-le Maréchal & Jean-Hugues Motte Illustrations : bénévoles – gratuits - Copyright
« Donner du sens à la fin de vie »
AVEC L’ASSOCIATION RIVAGE
DEVENEZ BENEVOLE D’ACCOMPAGNEMENT
Auprès des personnes en fin de vie
et des personnes âgées
(en institution)
Nouvelle session de formation en Septembre 2013
Inscrivez-vous dès maintenant au
Tél. : 06 16 30 81 13
RIVAGE, association de loi 1901, membre de la SFAP (Société Française d’Accompagnement et de Soins palliatifs)
Bénévolat d’accompagnement en institutions : Maison de Santé Claire-Demeure à Versailles, Hôpital de soins de suite La
Cité des Fleurs à Courbevoie, Clinique du Plateau à Clamart, Maison de retraite du Châtelet à Meudon, Maison de retraite
ORPEA les Lys à Rocquencourt, Hôpital de Houdan, Soutien au Deuil pour la région parisienne et accompagnement à
domicile avec le réseau Epsilon.
Contact : [email protected]