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Baunard. Histoire de saint Ambroise. 1872

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    Res. S. J.Hag. Corn,ad S'^^ Ther-

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    Bibliotl.'^

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    Res. S. J.lag. Com. 3S

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    Res. S. J.iag. Coii S'^^ Thei

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    HISTOIRE

    SAINT AMBROISE

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    l'UlJ^SICljGUerKCKES.ElllT

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    HISTOIRE

    SAINT AMBROISEM. L'ABBE BAUXARLt

    ADMOXIKE DE L'COLE XOKMALE , CHAXOIXE HOSOUAIRE D'ORLAX?nor-TErn ex thologie et doctettr fts lettres

    D E U X I 1-: M F E 1 1 T I (i N

    PAHISLIBRAIRIE POUSSIELGUE ERRE:ri:e cassette , 27

    1872Tons droits rsprvs.

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    Residf r i K T o.a.

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    APPROBATIONS

    L'Histoire de saint Ambroise ayant t honore,ds son apparition, des plus minents suffrages,en France et l'tranger, nous avons cru devoirpublier ici quelques-unes des lettres et approbationsqui montrent l'esprit du livre et son actualit.

    LES EDITEURS.

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    EVCH D'ORLANS

    Permis d'imprimer.

    Orlans, ce 20 avril 1871.

    Le Vicaire gnralcharg de l'examen et de l'approbation des livres,

    Bakdin.

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    DiLECTO Fjlio presbytero Aloisio BAUNRD(Alreliam)

    Plus pp. IXDiLECTE FiLI, SALLTEM ET APOSTOLICAM BENEDICTIONEM.Italo sermone redditam videramus tuam Sancti Ambrosii Historiam ,Dilecte Fili; sed eam nunc nativa lingua descriptam , et auctam appen-

    dice non levis momenti, a te libentius excipimus.Gratulamur autem tibi, quod non modo fretus monumentis enarra-lionem obtuleris gestorum clarissimi Mediolanensis Episcopi , sed ipsamejus indolera ipsumque spiritum, ex ejusdem scriptis et insignis ejusdiscipuli Augustin! deproraptum, ita exhibueris, ut qui lgat eain tate etcura tantis viris quodarnmodo vcrsari sibi videatur.Tua; vero huic lucubrationi ominamur ut fidelium, et prsecipue Medio-lanensiura, pietatera vividius incendat erga sanctum Doctorem, eosquead studiosiorem incitet observantiam et amorem in Sanctam hanc Sedem,quam ille veluti Ecclesia; firmamentura venerabatur.Intrim vero , Superni favoris auspicem , et patern Noslrae Benevo-lentia? pignus tibi , dilecte Fili , Benedictionem Apostolicam peraman-ter impertimur.Datum Romae, apud S. Petrum, die 3 Julii, anno d873, PontilicatusNostri anno vicesimo octavo. Plus PP. IX.

    a notre cher fils lolis baunard , prtre;A Orlans)

    PIE IX, PAPEBiEN-AiM Fils, salut et bndiction apostoliqie

    Nous^ avions dj vu dans une traduction italienne votre Histoire desaint A.mbroise, bien-aim Fils; mais c'est avec un plaisir encore plusgrand que Nous la recevons de vos mains, crite dans votre langue fran-aise, avec des additions importantes qui l'enrichissent.Nous vous flicitons non-seulement de ce que, appuy sur les monu-ments, vous avez prsent le rcit des actions du grand Evque de Milan,mais aussi de ce que , vous inspirant de ses crits et de ceux d'Au-gustin , son glorieux disciple^ vous avez si bien reproduit son caractreet son esprit , qu'en lisant votre ouvrage on se croit , pour ainsi dire

    ,

    transport dans le temps et dans la socit de ces grands hommes.Nous avons la confiance que votre travail enflammera davantage encorela pit des fidles, et en particulier de ceux de Milan, envers le saintDocteur, et qu'il animera d'une nouvelle ardeur leur obissance et leuramour pour le Saint- Sige , qu'Ambroise vnrait comme le fondementde l'Eglise.En attendant, comme gage de la grce cleste, et en tmoignage deNotre tendresse paternelle , Nous vous accordons avec la plus viveaffection, bien-aim Fils, la Bndiction Apostolique.Donn Home, prs Saint-Pierre, le 3 juillet 1873, de Notre pontificatl'anne vingt-huitime. PIE IX , Pape.

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    LETTREMONSEIGNEUR DESPREZ , ARCHEVQUE DE TOULOUSE

    Bagnres-de-Luclion , le 17 septembre 1871.

    Monsieur le chanoine ,11 me tardait de vous dire le plaisir que votre Histoire de saint

    Ambroise m'a caus, et le bien qu'elle m'a fait.Elle avait eu chez nous un gracieux avant- coureur dans la Vie

    de sainte Marcelline , rcemment traduite par un religieux de mondiocse, que j'ai vivement regrett'.Dieu, qui garde avec amour les ossements de ses saints, veille avec

    plus de sollicitude encore l'clat de leur mmoire. Au moment mmeo il se prparait consoler l'Eglise de Milan par la dcouverte ducorps de son plus illustre vque, il vous inspirait de mettre sa belleme en lumire.C'est que Dieu possde minemment la science de l'opportunit. Ilfait se lever les saints et les doctrines comme les astres , l'heureprcise o le monde en a besoin; et quand, aprs des sicles, l'hu-manit traverse des passages analogues, Dieu n'a pas besoin de crerdes phares nouveaux : il lui suffit de prolonger, par le miroir de l'his-toire, le rayonnement d'une des nobles figures qui clairrent le pass.Vous avez saisi. Monsieur l'abb, ce secret des habitudes divines,

    et vous avez choisi, avec un tact exquis, et votre temps et votre por-trait. C'est plus qu'un talent, c'est une grce; c'est pour vous un gagel'esprance : l'homme n'est assur du mrite et du succs que quandsoa uvre entre dans le cadre de Dieu'.

    1 Vie de sainte Marcelline , par le P. Corail, de la Compagnie de Jsus; tra-duite de l'italien de Tabb Biraghi.

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    Noire sicle est plein d'analogie avec cette priode d'croulementet de rsurrection, du contre de laijuelle se dresse votre hros. L'in-fluence de cet incomparable caractre peut donc s'exercer utilementjus(|ue sur notre gnration. Elle vous devra ce bienfait.Vous nous l'avez fidlement peint : tour tour courageux comme

    un athlte, et doux comme une mre; majestueux comme un patri-cien, mais humble et fervent comme un cnobite; c'est--dire bonjiar nature, inbranlable par devoir.

    11 est beau dans votre livre, comme il devait l'tre dans sa basiliqueet dans les audiences piscopales; comme il l'tait dans sa studieuseretraite, ou dans sa mission d'aptre et d'homme d'Etat.On le voit, avec une gale admiration, confondant les sectateursd'Arius et de Mans, interdisant l'accs du temple l'empereur souill

    du sang de Thessalonique, enfantant Augustin Jsus-Christ parl'loquence et la charit, infusant l'esprit de l'Evangile dans la poli-tique, la lgislation et les murs du monde paen, donnant au cultesa forme, la prire publique ses rgles et ses harmonies; dictant ausacerdoce les lois de la discipline, flagellant le luxe des matrones dela mme main qui nourrissait les pauvres et dfendait l'opprim;crivant enfin de la mme plume aux monarques des lettres leiribles,aux veuves et aux vierges des traits de la plus tendre puret.J'aime surtout voir clater frquemment, dans votre tableau, son

    amour enthousiaste pour le Sige apostolique de Rome, dans lequel ilmontra, sans aucune dfaillance, le centre de l'autorit, la source dela juridiction, la chaire infaillible de la vrit, en un mot, le foyer dela vie, selon son immortelle maxime : Ubi Petrus ibi Ecclesia; ubiEcclesia ibi niella mors, sed vita terna.Quand on a contempl avec vous ce grand homme, la physionomie

    si harmonieusement varie, on l'admire comme un hros, on l'coutecomme un oracle, on le vnre comme un saint, on le chrit commeun pre.

    C'est que vous ne vous tes pas born au tissu des vnements. Vousavez fondu dans le rcit des actes d'Ambroise la meilleure substancede ses crits; son me, qu'Augustin appelait la plus grande du monde,palpite dans vos pages. On y est embaum du parfum de ses vertus, etvivifi par la chaleur de son gnie.

    Parlerai-je de votre style? On croira que je vous flatte. Le plus belloge que j'en saurais faire, c'est de dire qu'il se laisse oublier, tantil demeure simple dans sa richesse, transparent dans sa fermet , cor-rect et sobre dans ses mouvements pleins de vie. Votre modle a pro-jet sur vous un reflet de sa srnit, et je crois qu'un peu du miolde ses lvres a coul dans votre plume.

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    Toutes ces qualits rendront voire livre profitable aux situations lesplus diverses. Mes prtres y puiseront l'esprit de mansutude et deforce qui distingue les ministres du Seigneur; les littrateurs de maville piscopale y goteront l'orateur, le philosophe et le pote ; leshommes politiques y verront ce que peut l'Eglise pour le progrs dela civilisation et le bonheur des peuples, quand on lui laisse soninfluence civilisatrice, sa part lgitime d'action dans le mcanismesocial, et sa libert de rsistance la force brutale ou couronne.Tous enfin pourront tudier, dans cet aperu du iv

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    6 l'amour do la sainte Eglise, le zle de sa gloire... Permellez-moi vvous en fliciter.

    Je conois , du reste , parfaiteinciil vdtre attrait pour saint Ambroise.Cette grande et noble litrure qui se dtache en traits nergiques et douxsur le iv" sicle, si riche pourtant en grands esprits et en nobles ca-ractres, devait naturellement vous attirer.D'une pari, les ressemblances do ce sicle avec le ntre ne pou-

    vaient vous chapper. Cette poque agite et trouble, o la vieillesocit penche dj vers son dclin, o le sol de l'Empire commence lrt>mblor sous les pas des barbares, se rapproche par plus d'un ctde la ntro. Car nous aussi , hlas! nous sommes sur notre dclin ; lessignes de la dcadence ne nous font pas dfaut, et notre pauvre so-cit tremble encore sous les pas menaants du socialisme, la barbariede nos jours. Eviterons-nous la ruine? Dieu seul le sait!

    D'autre part, le grand vque de Milan en lui-mme , par son uvreet par ses vertus, tait bien digne de solliciter vos tudes et d'inspirervotre plume.Vous l'avez tudi avec amour; vous Tavez peint avec bonheur.

    " Ce merveilleux compos, comme vous le dites vous-mme, de dou-ceur et d'nergie, de condescendance et d'inflexibilit, de modestieet de grandeur, qui faisait de saint Ambroise le plus humble etle plus fier chrtien qu'on pt voir ; vous l'avez mis en relief avecce burin de l'artiste qui perfectionne son uvre, ou plutt avec cecur de prtre qui aime les gloires de l'glise. Vous avez redit ses

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    Chaire de saint Pierre, sa soumission entire aux dcisions du Saint-Sige. Par une foule de textes soigneusement recueillis, vous avezdmontr que la clbre formule O est Pierre, l est l'glise .n'est pas un passage isol, mais le rsum d'un vaste ensemble dedoctrine, qui se retrouve dans tous ses crits et qui a servi de rgle toute sa vie.Ceux qui vous liront, et j'espre qu'ils seront nombreux, trou-

    veront dans cette vie bien des objets de rllexion et d'imitation. Jeleur souhaite d'y trouver ce que vous y avez trouv vous-mme.

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    EXTRAIT D'UNE LETTRE

    MONSEIGNEUR DEGHAMP3, ARCHEVEQUE DE MALINES

    Malines, le 30 aot 1871.

    Monsieur l'abu ,. . . J'ai voulu vous lire, malgr mes grandes occupations; et, pour

    V russir, j'ai fait ma lecture spirituelle de chaque nuit dans l'Histoirede saint Ambroise. Me voil aux premires luttes du saint vque contrel'arianisme; et, avant de vous suivre jusqu'au bout, je viens vousexprimer ma reconnaissance pour le grand travail que vous avezentrepris.

    Saint Ambroise vit dans cette histoire , et c'est avec bonheur qu'onTentend lui-mme presque chaque page. Mais ce qui donne une grandeporte votre ouvrage. Monsieur l'abb , c'est l'analogie sous certainsrapports du i\' sicle et du ntre, o le christianisme se trouve denouveau en prsence de l'infidlit. 11 est vrai qu'au iv sicle l'infid-lit s'en allait, et qu'aujourd'hui elle revient!

    Je n'ai pas besoin de vous dire avec quelle joie j'ai lu votre introduc-tion , et parce qu'elle couronne si bien tout votre livre, et parce qu'elleproclame, l'aide de saint Ambroise, l'infaillibilit du suprme magis-tre du Vicaire de Jsus-ChristAgrez, Monsieur l'abb, l'expression de mes sentiments bien dvous

    en Notre-Seigneur.Y V.-A. , Archevque de Malines.

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    EXTRAIT D'UNE LETTRE

    MONSEIGNEUR PIE, VQUE DE POITIERS

    Poitiers, le 19 aot 1871,

    Monsieur l'abb,.... Avant d'achever entirement la lecture de voire Histoire de

    saint Ambroise , je ne dois pas diffrer de vous en exprimer mesremercments et mes flicitations.Outre l'intrt puissant qui s'attache la personne et la vie du

    saint vque de Milan, rien, dans la tradition des temps qui suiventla paix de l'Eglise, ne touche de plus prs aux questions vitales del'heure actuelle que la doctrine et l'action de ce grand pontife. Lesthses fondamentales que nous avons soutenir contre la grandehrsie moderne, qui est le pseudo-politicisme, ont t principalementtablies, par les thologiens et les controversistes des ges prcdents,sur l'autorit et l'exemple de saint Ambroise.Votre beau travail. Monsieur l'abb, vient donc trs propos, et il

    joint tous ses autres mrites celui d'une incontestable opportunit.J'ajoute qu'il tait ncessaire pour corriger des jugements trs-mal-heureux que des plumes catholiques et savantes avaient mis assezrcemment.

    Croyez, Monsieur l'abb, mon sincre et particulierdvouement.

    V L.-E., Evque de Poitiers.

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    10 -LETTRE

    MONSEIGNEUR PLANTIER, VQUE DE NIMES

    Nmes, le 29 novembre 1871.

    Au moment o la poste m'apportait Nmes, Monsieur l'Abb,l'exemplaire de votre bel ouvrage sur saint' Amhroise, une longueabsence me retenait loign de mon diocse. C'est aujourd'hui seu-lement qu'il m'est permis , aprs avoir savour ce noble fruit de voslabeurs, de vous offrir l'expression tardive, mais vivement sentie,(le mes flicitations et de ma gratitude.Le trait le plus frappant de votre travail est l'ampleur du cadre

    dans lequel il se dveloppe, et dont les vastes compartiments rpon-dent aux tonnantes proportions du saint Pontife dont vous glorifiezla mmoire.En ces ges orageux et lointains, travers le chaos tumultueuxet parfois sanglant ou le vieux monde du iv et du v sicle taitplong par l'humeur farouche des hrsies , par les dlires ou lesfunestes complaisances du pouvoir des Csars , par les incursions desBarbares, dont les flots battaient ou peraient sur divers points lesfrontires de l'empire, certains vques se dressaient o et l, en Ita-lie, dans les Gaules, sur les rives du Bosphore ou du Pont-Euxin ,comme des colonnes de bronze. Ils portent seuls , pour ainsi dire, surleur tte le lourd fardeau des temps, et l'effort des violences dcha-nes contre l'glise et contre le premier panouissement de la civi-lisation dont elle a dpos le germe au sein des peuples. Ces hommes la taille de gant semblent rsumer dans leur vie particulire toutesles pulsations de la vie universelle; leur histoire est en quelque faonl'histoire du catholicisme mme.Tel fut saint Amhroise; tel vous l'avez jug, tel vous l'avez dcrit:

    et c'est avec le plus haut intrt que vous faites suivre par vos lec-teurs les mille ramifications de cette majestueuse existence.Par-dessus tout et avant tout, c'est l'homme de la rsistance et de

    la lutte. L'arianisme triomphant, le paganisme essayant de renatre,les faux politiques, hommes ou femmes, couronns ou non, faisantirruption sur le domaine de l'Eglise, tandis qu'ils dfendent l'Eglise

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    11 de pntrer dans leurs affaires, ces trois grands faits caraclrissent lasituation qu'Ambroise trouva Milan quand il arriva l'piscopat.II combat Tarianisme dans Auxence et Justine, auxquels s'ajoutentles Goths^ appuys par l'apostasie de Valens. Symmaque, Arbogastet Eugne reprsentent le paganisme s'efforant de ressusciter, et c'esten eux que le grand vque le contraint en quelque sorte rendre lesdernier souffle. Les courtisans et les juristes dont rimp;Jratrice arienneest entoure veulent que le pouvoir civil mette la main sur les basi-liques, sur les biens de TEglise et mme sur les questions de foi. Maislui se jette entre deux et protge, comme un insurmontable rempart,ces trsors dont le Christ l'a constitu le gardien.

    Puis aprs avoir rsist, se jetant en avant , il entre dans le champdes affaires politiques comme dans un domaine lui appartenant dedroit divin. Il va remplir plusieurs missions auprs de Maxime. 11 ades conseils pour Gratien ; il claire de son exprience le gouverne-ment de Valentinien; sa sagesse sait avoir aussi de graves enseigne-ments pour Thodose lui-mme; et quand ce prince s'est souill dusang des Thessaloniciens injustement rpandu, l'inflexibilit d'Am-broise lui refuse l'entre du temple jusqu' ce qu'il ait expi, par lespnitences canoniques, la faute norme dont il s'est rendu coupable.Ambroise est d'autant plus beau dans toutes ces luttes, qu' lamagnanimit de l'vque il unit toujours les grandes manires dupatricien. Dans vos rcits, constamment simples, naturels, mais pleinsd'un charme dramatique , vous faites admirablement ressortir les traitsde cette noble nature.

    Si le controversisle et l'athlte sont les caractres les plus frappantsd'Ambroise, vous montrez pourtant que le docteur qui expose, l'aptrequi sanctifie et l'administrateur qui gouverne tiennent aussi une placeconsidrable dans son mrite et son histoire. Docteur, il approfonditles mystres des critures; comme saint Basile, dont il est parfoisl'cho, il a son uvre des six jours, tandis qu' l'autre extrmit deses travaux exgtiques, on trouve son court et substantiel commen-taire de l'Evangile de saint Luc. Ses enseignements sur l'Eglise sontaussi graves que ses recherches et ses crits sur nos livres sacrs.

    Il est un dogme surtout qu'il proclame avec autant d'insistance qued'amour : c'est la suprme autorit de Pierre, tabli par Jsus-Christfondement de son glise. Les tmoignages sont ici plus lumineux queles rayons du plus radieux soleil.Aprs le pasteur universel et principal, les pasteurs particuliers.

    En son livre De Offlciis, Ambroise apparat comme le lgislateur ducierge; et combien, grce la rvlation qui l'illumine et l'lve, ilplane au-dessus du livre correspondant de Cicron! Oracle et guide

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    12 lu sacerdoce, il est aussi le pangyrislc de la virginit; il consacre la fliciter de ses jfrandeurs , la prcautionner contre ses cueils ou gmir de ses dfaillances, des lettres ou des traits o la pit deson gnie a condens les parfums les plus e.\(iuis et les pluj odorantsdu Cantique des cantifjues.

    Aptre, il sanctilie les mes par la multiplication des sanctuaires,par le dveloppement du culte des saints; il ne se contente pas d'enexhumer les reliques des trsors secrets que Dieu lui dcouvre dansle sol de sa ville piscopale^il en fait venir du fond mme de l'Orient.11 sanctilie encore les mes par l'clat dont il entoure les rites sacrs;Milan lui doit une liturgie dont la beaut intime se trouve encorerehausse par la majest des sicles. 11 sanctilie les mes par ses lo-quentes Homlies; et c'est l prcisment le filet avec lequel il est allsaisir Augustin dans les eaux orageuses et troubles de la fausse phi-losophie, pour l'amener au port paisible de l'Eglise et de la foi. Ilsanctifie enfin les mes par ses beaux discours funbres, o, aprsavoir pouss d'innarrables gmissements sur la mort de Satyre, deValenlinien et de Thodose, il exhorte avec tant de suave mlancolieles fidles, dsols comme lui, consoler leurs douleurs par les esp-rances de l'immortalil.

    Enfin l'administrateur, dans ce grand Ponlife, est la hauteur del'aptre. Nul ne comprit mieux que lui les devoirs de Vaudiejxce jns-ropale, nul n'en ccepta plus gnreusement l'austre mais fcondeservitude; et paralllement aux soins multiplis et divers qu'elle luiimposait, il eut l'art et sut se donner le temps de pourvoir dignement tous les intrts dont son cur ou sa dignit le constituait le tuteur.Vous avez dit toutes ces choses avec une parfaite comptence. Les

    crits de saint Anibroise, miroir complet de sa vie, vous sont tellementconnus, vous en tes tellement matre, vous en avez si bien comprisla langue et le gnie, que, sous chacun des aspects que vous nouslaites contempler, ce n'est pas votre voix qui nous parle, c'est la sienneque vous nous faites entendre avec son vritable accent. Son latin estsans aucun doute le meilleur de son poque; mais, malgr cela, c'estun latin de la dcadence. Il s'y rencontre par intervalles je ne saisquelles expressions subtiles, je ne sais quels raffinements littrairesqui ne sont plus la simi>licit antique, et dont il est difficile de fairepasser le reflet dans notre langue ennemie de toutes ces recherches.Vous avez vaincu tous les obstacles; la fidlit de vos traductions estun de vos meilleurs succs. Anibroise a dans son style la dignit deBasile, l'ampleur de Jean Ghrysoslome, la posie et la souplesse de(irgoire de Nazianze, parfois mme une ombre du laconisme et del'nergie de Tertullien. Toutes ces nuances se reproduisent au cours

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    13 de votre ouvrage. Mais ce que vous reproduisez avec le plus de grce,c'est l'exquise sensibilit d'Ambroise. Parmi les Pres de l'glise,aucun n'a vers plus de cur et de chaste tendresse dans ses discours,ses traits et ses correspondances; cette huile embaume coule pleinsbords dans chacune de vos pages.

    Telle est la largeur de votre tude, telles en sont les proportions:vous nous avez peint Ambroise avec sa vraie stature , et l'on ne s'tonnepas qu'avec une telle grandeur, il ait eu dans l'empire tant d'illustresamitis, et que, du pays des Perses et des Marcomans, on soit venuen Italie pour contempler ses traits et recueillir les conseils de sascience et de sa sagesse.L'-propos s'unit la profondeur pour doubler le prix de votre beau

    volume. Sans mtaphore, nous aussi nous sommes en plein arianisme,il revit dans le rationalisme plus ou moins radical des gouvernements,des lettrs et des barbares enfants par les dsordres de la civilisa-tion. Et nous aussi, nous voyons le paganisme s'essayer renatredans la monstrueuse reconstitution des grandes nationalits, et dansl'irruption chaque jour plus effrne du despotisme imprial ou rvo-lutionnaire sur les choses de l'Eglise et de la conscience. Et nousaussi , nous entendons chaque instant de faux politiques nous excluredu maniement des affaires publiques et de toute intervention dans lemouvement social, au nom d'une scularisation qui n'est qu'un dgui-sement de l'athisme. Saint Ambroise, que vous faites si bien revivredans votre crit, arrive juste temps pour nous servir de flambeau,de modle, d'encouragement et d'autorit.Vous mritiez un autre genre d'-propos, que Dieu vous envoie

    d'une manire admirable. On a fait rcemment, Milan, l'inventiondu corps de saint Ambroise ; M. Csar Canti!i vous en donne , commetmoin, l'authentique assurance. Dieu , pour vous rcompenser, a vouluque votre livre figurt, comme l'hymne et le pangyrique, dans letriomphe et la joie de cette grande dcouverte.

    Autrefois, avant l'ge de trente ans, j'avais lu passionnment saintAmbroise comme la plupart des Pres de l'Eglise, et je le savaispresque par cur. Mais tant d'annes coules depuis avaient quelquepeu compromis, dans ma mmoire, les fruits de cette tude. Je vousdois d'avoir rajeuni mes souvenirs, et non-seulement confirm, maisagrandi mon admiration pour ce beau gnie accompagn d'un si noblecaractre.

    Veuillez , Monsieur l'obb, agrer tout mon respect, etc.7 HENRI , EvQUE de Nmes.

    I le-iS I

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    l'i EXTPxAIT D'UNE LETTRE

    DEMONSEIGNEUR PLACE, VQUE DE MARSEILLE

    Douin-sur-Mer (Vende), 20 septembre 1871.

    Mon bon et cher ami ,Je viens bien tard vous exprimer ma sincre reconnaissance pour

    votre admirable Histoire de saint Ambroise... Mais je ne peux plusattendre davantage pour vous dire toute la satisfaction et Tmotion quej'ai souvent prouve en lisant vos pages loquentes, dans lesquelleson sent revivre et parler ce grand saint, la fois si aimable et sinergique.

    Je fais les vux les plus ardents, mon bon et cher ami, pour quevotre livre se propage et trouve un grand nombre de lecteurs. Vouspouvez compter, cet gard, sur mon concours le plus dvou.Tout vous, avec la plus cordiale et la plus fidle affection en N.-S.

    f CH.-PHIL., EvQUE de M.\R3EILLE.

    LETTRE DU REVEREND PERE FELIXDE LA SOCIT DE JSUSNancy, 24 octobre 1871.

    Monsieur ,J'ai voulu, avant de vous adresser mes remercments pour votre

    nouveau livre, la Vie de saint Ambroise, trouver le temps de le lire.J'ai voulu faire plus encore. Afin de donner un contrle tout faitimpartial mon propre jugement, j'ai fait lire devant toute ma com-munaut ce remarquable ouvrage.Je suis heureux de vous dire que votre livre est sorti de cette

    preuve srieuse avec tous les avantages que peut souhaiter unauteur.

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    13 On y a justement admir pour le fond, avec une grande sret de

    doctrine, une vraie connaissance du sujet et une comprhension par-faite de la grande personnalit de saint Ambroise. Et pour ce quiconcerne la forme, on y a admir une mise en uvre qui rvle , dansl'auteur, le talent de l'artiste, et cette lgante puret de style quej'avais dj remarque dans votre belle Vie de saint Jean.

    Je suis donc heureux de vous transmettre, sur l'ensemble de votreuvre, notre sincre admiration; admiration ressentie et exprimepar tous les membres de ma rsidence et par moi-mme en parti-culier.Mais c'est au point de vue de l'apostolat surtout que je suis heureux

    d'apprcier et de louer votre ouvrage. Votre livre est plus qu'un livre,c'est une uvre, et une uvre vraiment apostolique. Il ressuscite , enpartie du moins , au milieu de nous l'apostolat de saint Ambroise.Les fortes doctrines de l'illustre Docteur sur les rapports de l'Eglise

    avec les socits humaines empruntent aux temps oii nous sommesune actualit nouvelle. Les mes , en quelque situation qu'elles setrouvent, peuvent, de nos jours encore, puiser cette source loin-taine, qui, grce vous , rejaillit mieux jusqu' nous, la lumire,la force et la consolation.Vous avez bien mrit des mes et de l'Eglise.Que le Matre vous en rcompense , mme sur la terre , en vous

    donnant la force de marquer encore votre passage par des uvrespareilles. Mais qu'il vous rcompense surtout dans le ciel en vousdonnant, comme un surcrot de flicit, de mieux voir dans l'ter-nelle lumire tout le bien que vous aurez fait tous ceux qui aurontlu votre livre avec l'esprit qui vous a port l'crire, et qui vous ainspir en l'crivant.Veuillez agrer, Monsieur l'abb, avec l'hommage de tout monrespect , l'expression de ma reconnaissance pour votre admirablelivre, et pour le plaisir que j'ai ressenti en vous lisant.Votre humble serviteur et sincre admirateur,

    J. FLIX, S. J.

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    AVANT-PROPOSDE LA DEUXIEME EDITION

    Cette vie de saint Ambroise venait peine de pa-ratre, lorsque, au mois d'aot 1871, des lettres deMilan nous apprirent qu'on venait de dcouvrir sesreliques, et d'ajouter ainsi une dernire page sonhistoire.

    Il n'est plus vrai prsentement, nous crivait le grayid historien de l'Italie, M. Csar Cant, il n'est plus vrai de dire que la dvotion des peuples a dis- perse les ossements d'Ambroise et des martyrs in- hums prs de lui, dans tous les lieux du monde. Le squelette de saint Ambroise, l'heure o je vous cris , a t retrouv tout entier; il est maintenant tout fait recompos. De son ct, le promoteur principal de celte heu-

    reuse dcouverte, M. le chanoine Biraghi, directeurde la bibliothque Ambroisienne , nous en dcrivaitainsi l'motion sainte : Oui, le Seigneur m'a donn la consolation de voir de mes yeux le corps de ce grand saint, en mme temps que les corps de Ger- vais et de Protais, ces deux glorieux martyrs/ La tombe de porphyre qui contenait ce trsor a t

    a

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    II AVANT- PROPOS ouverte l'entre de la nuit , le 8 aot, en prsence de il/^'' l'Archevque , du maire de la ville et de ses adjoints, des membres et professeurs de l'Acadmie,

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    INTRODUCTION

    1

    c( On a vu de nos jours un homme admirable , quic( fut la colonne et comme l'inexpugnable forteresse , non pas seulement de son glise de Milan, mais de la chrtient universelle... Elev Tpiscopat pour en tre l'honneur, il a port sans faiblir le tmoignage de Jsus-Christ devant les rois irrits. Non content d'attester la doctrine par sa parole

    ,

    il l'et fait par son sang gnreusement rpandu

    ,

    si Dieu ne l'avait rserv de nouveaux labeurs. Parler ainsi, c'est dsigner suffisamment Ambroise, dont la belle vie demeure dans la mmoire des hommes \

    1 Virura omni admiralione dignum, qui non solum MediolanensisEcclesiae, verum etiam omnium Ecclesiarum columna qudara et tur-ris inexpugnabilis fuit, etc. (Rufln. ex Invecliv. Il in Hieronym.)

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    IV INTRODUCTION11 y avait peine quatre ans que le saint vque

    de Milan tait mort, lorsque Rufin d'Aquile attes-tait en ces termes l'impression laisse par l'athltede Dieu chez ses contemporains. Eloigns de cetemps, nous sommes loin aussi de ces enthousiasmes ;et si Ambroise demeure encore un grand nom dansrglise, on compterait facilement les esprits, mmereligieux , qui ont rintelligence entire de son uvreet la possession historique de sa vie. Cependant cetteuvre d'instruction, d'dification et de civilisationne nous intresse-t-elle en rien? Cette vie si noble,ce caractre si haut dans un ge de dcadence nenous toucheront-ils point? Et l'exemple de celui quifut le pre, l'oracle et le consolateur d'un sicle mal-heureux ne saurait-il devenir une lumire pour lentre?Nous avons espr qu'il en serait autrement, et

    c'est raconter ce que fut ce grand liomme , que celivre est consacr. D'ailleurs un premier regard jetsur cette poque suffira pour nous faire voir et lagrandeur de l'ouvrage et celle de l'ouvrier qui enporte l'honneur devant l'histoire , comme il en a reule prix des mains de Dieu.Ambroise fut donn au quatrime sicle pour l'a-

    chvement de la ruine du paganisme et l'tablisse-ment du rgne public de Jsus-Christ. D'autres Pressont plus que lui thologiens, orateurs, apologistesde la foi ; Ambroise est surtout vque, c'est l'hommede l'Eglise; et tout ce qu'il tenait de la nature , de la

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    hNTRODUCTION Vrace, de la grce et de Ttude, il le mit au service del'mancipation , de Torganisation , de l'exaltation del'glise de Jsus-Christ, D'abord affranchir l'-ghse, la soustraire la tutelle tracassire ou oppres-sive des premiers csars chrtiens; revendiquer salibert : libert d'lection et de conscration pour lesacerdoce , libert de vocation et de profession pourl'institut religieux , libert de succession pour lesaint-sige romain , livr ds lors la calomnie et des violences cupides; puis, organiser le rgimeintrieur de l'glise , donner la doctrine une puis-sante unit , donner au culte sa forme , la prirepublique ses rgles et ses harmonies, au sacerdoce soncode, la discipline ses rgles; enfin introniserl'glise dans la socit, lui conqurir sa part lgi-time d'action dans la protection des peuples; infuserson esprit dans la lgislation , mettre son influencedans les affaires publiques, et au besoin opposer auxexcs du csarisme le frein d'une loi de justice oud'expiation: enfin, par ce moyen, transformer l'em-pire paen en monarchie catholique , en faisant ducsar le ministre de Dieu et le soldat du Christ , avecla croix pour sceptre et l'vangile pour code ; tellefut la mission d'Ambroise, telle est l'unit de sonoeuvre et ce qui la marque dans l'histoire d'un carac-tre qui lui est propre.

    Il est vrai que tout semblait l'y avoir prpar : sanaissance , son nom , son autorit , la haute magistra-ture qu'il avait exerce, son esprit, la fois si romain

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    VI INTRODUCTIONet si chrtien; son liabitude des affaires, son exp-rience des cours, sa connaissance de son temps; desorte qu'il paraissait l'homme providentiel pour unelche que nul autre avant lui n'avait t en situationde remplir comme lui.On verra avec quelle courageuse persvrance

    cette entreprise fut poursuivie travers les rvolu-tions et les perscutions de la deuxime moiti duiv^ sicle. De Valentinien P"" Thodose le Grand,elle se continue sans relche , pendant les rgnesphmres et par-dessus les tombeaux des deux frresGratien et Valentinien II, mes deux enfants, ainsique les nommait Ambroise.Un moment on put croire qu'elle tait accomplie ;et ce fut un jour de solennelle esprance que celui

    oi, par cet homme, la rpublique romaine et larpublique chrtienne joignirent leurs mains danscelles de Thodose , empereur d'Orient et d'Occi-dent. La loi Cunctos populos, porte le 28 fvrier del'anne 1380, en donna le signal, en dclarant enfinla religion chrtienne non plus seulement libre, mais)gnante dans l'tat et seule reconnue par lui. Dansce temps-l, de toutes parts les temples s'croulaient,les idoles tombaient. Sur leurs dcombres, les basi-liques envoyaient vers le ciel les hymnes d'action degrces et les aspirations d'un monde altr de vie.Le culte de la Victoire , dernire idole de l'ancienneRome guerrire, n'avait plus d'autres autels que leschamps glorieux o l'on combattait pour Dieu , et o

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    INTRODUCTION VIIlnalement les vainqueurs et les vaincus se rconci-liaient ses genoux. Si des emportements lamen-tables pouvaient encore dshonorer un pouvoir sanslimites et sans contrle, du moins avait-il appris pleurer ses excs et les rparer. L'empereur refu-sait les insignes du pontificat paen. L'arianisme semourait ou cherchait chez les barbares un refugedsespr. Le manichisme proscrit tait rduit cacher dans l'ombre ses turpitudes et ses gare-ments. Une mme foi dans l'Eglise , une mme loidans l'tat rgissaient simultanment l'univers civi-lis. Le dsert lui-mme fleurissait, et le clotre com-menait exhaler la bonne odeur de Jsus-Christ.Une pliade de sages et de saints , tels qu'aucunautre sicle n'en vit se lever de semblables , ver-sait sur l'Orient et sur l'Occident l'clat de la plushaute doctrine et l'exemple des plus clestes vertus.A leur tte le Pontife romain clairait leurs d-marches et menait tout le chur. La papaut , aprsde longs dchirements , retrouvait la tranquillitavec la libert. A Milan comme Rome , le princehonorait l'vque, l'vque inspirait le prince. Par-tout taient l'harmonie, la force, l'esprance; et leschrtiens purent croire qu'enfm allait s'accomplir levu que tant de fois ils avaient fait monter de leurssolitudes et de leurs catacombes : Que votre rgnearrive , notre Pre des cieux , que votre volont sefasse sur la lefre comme au ciel !

    Cet espoir ne fut pas long, et ni l'Eglise ni l'tat

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    VIII INTRODUCTIONne virent le beau jour que promcltail cette aurore.C'est le malheur des Etats o tout dpend d'un seul,(jue ce matre absolu venant disparatre , tout s'-croule avec lui. Ce jour-l, pour la premire fois, lasocit avait sembl sur le point de toucher cetidal catholique, vers lequel son devoir est de tendresans cesse , o devaient la faire remonter plus tardpour quelque temps Charlemagne et saint Louis, maiso ne put la fixer aucun de ces grands princes. Lergne complet du Christ ne sera donc .'jamais de cemonde ? La libert humaine aura donc ternellementla puissance d'y mettre obstacle? Je ne sais; maisAmbroise put bientt se convaincre que, sous cettesocit rgnre par la foi, il y en avait une autreobstinment rebelle l'esprit de l'Evangile. Dansl'ordre politique , le pouvoir continua se faire ado-rer; et la sacrilge tradition des cours prosterna lessujets des divis empereurs au seuil du sacr palaisde leur ternit. Dans l'ordre social, l'enfant demeuralongtemps encore sous l'autorit brutale et discr-tionnaire du pre , la femme sous le joug capricieuxde l'poux; l'esclavage resta la base mme de la so-cit; la guerre ne perdit rien de ses cruauts, nil'amphithtre de ses sanglantes volupts. Or, untel ordre de choses tait-il conciliable avec la religionde puret, de justice et d'amour? L'empire ne de-meurait-il pas ce mlange rprouv d'oppression etde perversion, cette statue de fer et de boue que leprophte avait vue , et que devait briser une Pierre

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    INTRODUCTION IXmystrieuse , pour devenir elle-mme une grandemontagne et couvrir tout le globe?

    L'effet de cette rprobation ne se fit pas attendre.Tandis qu'au dehors l'invasion barbare, un momentarrte par le bras de Thodose , couvrait de ruinesles tats de ses faibles successeurs, le fiot impur dupaganisme, refoul par Ambroise, reparut derrirelui. Les derniers jours de l'vque se passrent pleurer sur un dbordement dont il n'tait plusmatre. La socit politique et la socit religieuses'en allrent de plus en plus aux extrmits oppo-ses; aux derniers jours de Rome, le divorce fut com-plet. Alaric tait aux portes; le bher battait les mu-railles , et le prfet urbain, nomm Pompeianus

    ,

    appelait au secours de la ville les flamines trusquesqui devaient tout sauver en rtablissant le culte desaeux. Cela se passait en 408, et il n'y avait pas dixans qu'Ambroise n'tait plusl C'tait donc vainementqu'il avait combattu; c'tait donc vainement quel'Eglise, comme une mre, avait tendu ses ailes surla cit terrestre, pour la ranimer et la couvrir : l'in-grate avait mconnu le jour de la visite et mprisles larmes de son rdempteur. Bientt l'croulementde l'empire apprit au monde ce qu'il en cote dempriser Dieu; et puisse l'exemple illustre de Jru-salem et de Rome en tre le dernier exemple !Toutefois, ce serait se tromper que de croire quele travail d'Ambroise prit avec l'empire. Lui-mmeput le redouter, car l'avenir de son ceuvre fut voil

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    X INTRODUCTION se?^ yoiix. Le courant rgncraleur ([iril avait faitjaillir, englouti presque sa source, semblait tre jamais perdu sous l'avalanrhe qui venait de tout cou-vrir; mais il coulait sous terre, et, aprs plus de troissicles d'obscurit, on le vit reparatre au grand jouret traverser cette priode du moyen ge, que remplitla royaut publique de Jsus-Christ.En effet, nous le constaterons, il y a en germedans Ambroise toute la constitution de cette socit

    chrtienne, avec son alliance troite de l'Eglise etde l'tat, sa monarchie catholique, sa prpond-rance de la papaut, sa discipline sacerdotale, soninstitut monastique , son audience piscopale , sondroit d'asile et de refuge, la protection par l'Eglisedes peuples contre leurs matres, sa rpression desrois, sa clmente mdiation entre le fort et le faible.Il n'est aucune de ces choses dont l'initiative , ou dumoins l'inspiration ne remonte ce grand homme.Il en a jet la semence avant le long et rude hiverde la barbarie, il n'en a pas vu les fruits; il a pr-par des triomphes dont lui-mme n'a pas joui. Maisrien n'est beau comme de prparer des triomphesauxquels on ne participe pas. Telle est la gloire d'Am-broise. Par lui, Charlemagne donne la main Tho-dose; il est le lien des deux mondes.

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    INTRODUCTION XI

    [I

    Ce que nous venons dMndiquer n'est que l'uvreextrieure et clatante d'Ambroise. C'est par ellequ'il justifie son titre de Pre de l'Eglise ; et je nesuis pas surpris que cette uvre ait absorb presqueexclusivement l'admiration de l'histoire , par l'impo-sante grandeur de ses proportions. Mme ordinaire-ment, dans la vie des anciens, et la grande dis-tance o ils nous apparaissent, cette existence dudehors est peu prs la seule qu'il nous soit possibled'apercevoir. Heureusement il en est autrement pourAmbroise. Grce d'inapprciables documents bio-graphiques , on pntre dans toutes les profondeursde son me , on entre dans sa vie intime , et cette se-conde vie n'est pas moins attachante ni moins instruc-tive que l'autre.Ce qu'on y voit premirement, c'est dans quel

    juste accord les facults naturelles et les dons surna-turels s'harmonisent en cet homme. Qu'on se repr-sente l'onction cleste de la grce descendant sur lavertu native de la race la plus fortement trempequi fut jamais ; le courage d'un hros et la tendressed'une mre, la majest d'un personnage consulaire

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    XII INTHODUGTIONet l'humble austrit d'iiu asclc; le zle pour ledroit port jusqu'au mpris do la vie, le sacrifice audevoir port jusqu' l'oubli le plus absolu de soi; unsplendide gnie et un caractre intrpide au servicede la misricorde et de la bont sans rserve : Am-broise avait reu tout ce qui devait faire de lui.dans un sicle d'afaissement l'homme de l'autorit,dans un sicle de dsolations l'homme de la charit.

    Merveilleux compos de douceur et d'nergie, decondescendance et d'inflexibilit, de modestie et degrandeur, c'est le plus humble et le plus fier chr-tien qui se puisse voir. Il a de magnanimes colrescontre les puissants , contempteurs de Dieu ou op-presseurs de leurs frres; mais les faibles, les petits,les pauvres curs briss , les esprits esclaves ne con-naissent de lui que la compassion et la bndiction.Il crase l'orgueil, et il relve le repentir; il con-fond Symmaque, et il absout Augustin. Il fulminel'anathme contre les hommes souills de sang;niais l'hypocrite Maxime restera sous ce coup , tandisque Thodose verra les foudres de l'glise s'teindredans ses larmes. Celui qui tient en chec les lgionsde l'impratrice au seuil de la basilique est le mmequi sanglote avec le pcheur perdu qui est venucacher sa honte dans son sein. Qu'on lui demandede livrer son Eglise aux impies : plutt que de latrahir, il y mettra sa vie, et dj il en tressaille d'en-thousiasme et d'espoir. Mais qu'on lui dise que lesang des hommes va couler, ou qu'un infortun soit

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    INTRODUCTION XIIIarrach de l'autel au pied duquel il est venu cher-cher asile, le pontife est en pleurs, son doux cou-rage s'attendrit et s'indigne tout ensemble... Com-ment le peindre? et o trouver ce degr le spectacled'une me la fois ardente et contenue, capable demesure autant que de transport, mue de passionmais recueilhe dans la paix , et n'en descendant for-cment que pour y remonter aussitt, et rentrer parla prire dans l'union avec Dieu?

    Dieu, en effet, fut le centre de son cur et de savie ; et si dj la nature de l'homme est si excellentedans Ambroise , quelle ne fut pas la grce du saint etdu pontife ! Le jour o , comme il disait , la beautde Jsus-Christ lui apparut, il quitta tout pour lesuivre , et se dvoua sans rserve la gloire de Celuiqu'il nomme toujours mon Matre , comme unambassadeur en parlant de son roi. Docteur et pas-teur, orateur et pote, moraliste profond, vaillantapologiste et savant thologien , tous ces titres Am-broise est le ministre , le prophte, l'aptre et le z-lateur de l'amour de Jsus-Christ.Chez lui , cet amour enveloppe et consacre les

    autres, mais il ne les touffe pas; car quelle est l'af-fection lgitime et digne qui n'ait obtenu son cultedans cette me complte? Qui a mieux honor etchri la famille, l'amiti, la patrie? Son souvenirdans l'histoire ne se spare pas de celui de sa surMarcelline et de son frre Satyre. Ses plus belleslettres sont celles qu'il crit cette sur virginale

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    XIV INTRODUCTIONet clire , plus chre que ses yeux, ainsi qu'il luidisait. Le plus loquent panchement de son cur setrouve dans Timmortelle lgie consacre ce frreduquel Ambroise s'tait cru insparable la vie et la mort. Les rois sont ses pupilles, et les malheu-reux sont ses enfants. Ce n'est pas dire assez qu'ilaime les pauvres , il dclare qu'il les adore , qu'il voiten eux les membres, les pieds de Jsus-Christ , cespieds poudreux mais sacrs devant lesquels , commeMadeleine , il se met genoux pour les laver de seslarmes et les oindre de parfums K Une pliade d'amis,Jrme, Simplicien, Paulin de Noie, Aschole deThessalonique , Sabin de Plaisance , Gaudence deNovare , Flix de Come , Juste de Lyon , Honort deVerceil , soumis au charme de sa vertu plus qu'l'empire de son gnie, lui font cortge dans l'his-toire , o il s'avance pareil ces astres rois que touteune constellation accompagne dans le ciel. Il consoleles saintes veuves , et les vierges le suivent aux par-fums de sa pure et austre vertu. Lui qui donne auxempereurs de si terribles leons , se plat fairel'cole de petits enfants. On le voit soigner chez luil'un d'eux qui tait malade ; il en ressuscite un autreque sa mre lui apporte et qu'il rend cette mre.Aussi grand citoyen qu'incomparable vque, il aime

    1 Si alas pauperes, laves eorum vulnera, illuviemque detergas, tei^sisli utique pedcs Chrisli. Hos petlcs osculalur ille qui oliam infimosplebis sacra' diligit. Hos pcdes unguento ungil ille iiiii otiam lenuiori-bus mansueludiuis sii graliam inipertit. (Ambr. Epist. xi.i, n. "23.)

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    INTRODUCTION XVla patrie comme un ancien Romain , et il aime l'glisecomme un confesseur de la foi. Ainsi, qu'on le re-garde du ct de la terre ou du ct du ciel, Am-broise , ministre de Dieu et serviteur des hommes

    ,

    ralise pleinement l'ide que l'vangile nous proposed'un pontife de la nouvelle loi. Ainsi il apparat sonsicle comme un grand type du sacerdoce chrtien;et un jour Thodose , subjugu par l'admiration , seraforc de s'crier : Je ne connais qu'un vque aumonde : c'est Ambroise \'

    Toutefois si la saintet a son foyer dans l'amour etson exercice dans le zle , elle n'a sa consommationque dans le sacriflce. Ambroise se fit victime volon-taire pour Dieu; et toute sa vie que fut-elle sinon unegnreuse immolation de lui-mme? N riche, il sefait pauvre; n grand, il se fait petit. Les savantsviennent vers lui comme vers le sanctuaire desoracles de Dieu ; mais le Docteur ne voit en lui-mme qu'un c( pauvre ver luisant , c'est ainsi qu'ilse nomme. On le vnre jusque chez les peuplesbarbares , on vient le contempler des sables de laPerse et des valles de l'Elbe; mais ses admira-teurs le trouvent cach dans la retraite, n'aspirantqu' la paix d'une solitude obscure. La pauvret l'af-franchit, l'humilit l'agrandit, la pnitence l'pure, lasouffrance l'lve. Il est perscut, mconnu, calom-ni ; il perd ses amis, il voit expirer son frre, il voit

    1 Aitpaiov "fp oToa (avov ETttaxoTtov ^w xa>,o(J.vov. (Theodorel.Hist. eccl. lib. V, cap. xvm.)

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    XVI INTRODUCTIONprir tour toiii', dans tiois princes chrtiens, sesplus nobles allections et ses plus hautes esprances.Mais c'est par ce rude chemin que, de degr en degr,et, pour ainsi dire, de tombeau en tombeau, il at-teint au sommet de la perfection.A la fin riiomme terrestre s'est compltement ef-fac, l'homme cleste reste seul; c'est Theure o lesmiracles jaillissent de ses mains : Ambroise com-mence entrer dans les puissances de Dieu. Sa pluschre conversation est avec les martyrs, dont il enviele sort, dont il glorifie les reliques, et qui semblent

    ,

    sous ses pas, se lever de leurs spulcres pour luimontrer le chemin de son ternit. Lui-mme n'as-pire plus qu'aprs le bienfait de la mort , c'estson expression; et la maladie le surprend dans lamditation du psaume de l'esprance. Jsus-Christ,son Matre, lui apparat alors, et lui donne en sou-riant le signal du dpart. Aprs avoir reu une der-nire fois l'hostie dont les voiles vont tomber devantses yeux dessills, Ambroise, les bras en croix, expire l'aube du jour... C'est l'aube du jour de Pques ! etla parole suprme qu'il dit ses amis est un acte d'a-mour divin , le mme que nous retrouvons sur leslvres mourantes d'un pieux voque de F'rance : Jevais tre jug par Celui que j'ai beaucoup aim '.

    1 Ce sont les dernires paroles de Ms^ de Qulen, archevque deParis. Saint Ambroise mourant avait dit semblablement : A'ei* timeomort, quia Dominum bonum habemus. (Paulin, in Vlla Ambros.,n. 45.)

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    INTRODUCTION XVII

    III

    Une telle vie , une telle me , une telle uvre sont-elles connues parmi nous comme elles mritent del'tre? Il m'a sembl que non. Ce n'est pas qu'on n'enait fait de brillantes esquisses, et je veux dclarer d'a-bord combien je suis redevable M. le duc de Broglie,qui , dans le sixime volume de son ouvrage sur VE-glise et l'Empire romain, a mis la figure d'Ambroiseen un si beau relief. Dans le conseiller de Gratien etl'ami de Thodose c'est surtout l'homme politique qu'ila fait ressortir. Avant lui , M. Villemain avait peintl'orateur dans son Tableau de l'loquence chrtienneau lY^ sicle. Mais l'homme, l'vque, le saint, n'avaiteu jusqu'ici parmi nous d'autre historien que Gode-froy Hermant, docteur de Sorbonne au xvn sicle.L'impartialit me manque pour en parler ici ; mais ilreconnut que ce n'est pas dans son livre , justementoubli , qu'un lecteur dsireux de connatre saint Am-broise peut trouver ce qu'il cherche. D'autres es-sais furent tents. Les uns sont demeurs inachevsou indits^; les autres, composs dans des langues

    1 La bibliothque du sminaire de Saint-Sulpice possde une His-toire manuscrite de saint Ambroise , par M^^ Raillon, vque nomm

    b

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    XVIII INTRODUCTIONtrangres, n'ont point pass dans la ntre pour yrecevoir la lumire et la vie K Ainsi nous ne poss-dions sur ce Pre de l'Eglise que des tudes partiellesou des matriaux confus. Je ne parle pas des tra-vaux consciencieux de Dom Ceillier, de Tillemont,de Baronius et plus rcemment de Fessier. Ce sontdes jugements critiques sur l'esprit d'Ambroise oudes analyses de ses uvres ; mais ce n'est pas savie.La vie d'un crivain se trouve surtout dans ses

    livres : c'est l que nous avons d premirement cher-cher celle de l'vque de Milan. Il n'est presque pasun seul de ces crits qui ne contienne ou des traitsprcieux de son caractre ou des faits de son exis-tence. Ses lettres particulirement sont une inappr-ciable initiation sa vie intime. Avant de mettreen uvre ces pices de sources diverses , il fallaitassigner chacune sa place historique et sa dateprcise. La savante dition des ouvrages de saintxVmbroise , par les bndictins Dom Frische et Domle Nourry, nous a rendu facile ce travail de chro-nologie et de classification. Outre les dissertationscritiques places par eux dans l'avertissement de

    d'Orlans. Elle fut crite Versailles pendant les annes 1826 et 1827,et devait comprendre douze livres. 11 m'a t permis de consulter cetouvrage rest inachev , et il m'a t utile en quelques points.

    i Telle est la Vie abrge de saint Ambroise, en allemand, par Sil-bert; Vienne, 1841. J'ai le regret, malgr mes recherches, de n'avoirpu recourir cet ouvrage, qui est puis.

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    INTRODUCTION XIXchaque trait du saint Docteur , la Vie d'Ambroisetire principalement de ses uvres nous a t aussi duplus utile secours. Nous aurions d commencerpar nommer le diacre Paulin, secrtaire d'Ambroise,qui nous a lgu sur lui quelques pages trop courtes,mais qui ont le mrite inestimable de fournira sa bio-graphie un tmoignage contemporain d'une fidlitet d'une candeur parfaites.

    C'est grce ces documents de premire valeurqu'il nous sera permis de suivre Ambroise jour parjour, pendant chacune des annes de sa carrirepiscopale. Nous raconterons ses actes, nous citeronsses discours : faire agir et parler un homme c'est lefaire revivre. Et, malgr ce qui nous manque mani-festement pour une si grande tche, peut-tre de-vrions-nous ne pas dsesprer entirement de laremplir, si pour faire connatre Ambroise il suffisaitde l'avoir tudi consciencieusement, admir sinc-rement et grandement aim.

    Outre ces sources historiques ouvertes chacun,la ville de Milan a conserv , avec un culte filial, toutce qui rappelle le souvenir ou qui claire l'histoirede son grand vque. L'archologie locale, depuisde longues annes, s'est attache aux vestiges de savie et aux monuments de son sicle , avec une pa-tience d'rudition et uu bonheur de recherches dontle prsent ouvrage n"a eu qu' recueillir les fruits.Ughelli , Ripamonti , Andr Alciat, Allegranza, Gra-tiolo, Puccinelli, Morigia, Oltrocchi, ont reconstruit

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    XX INTRODUCTIONla cil milanaise de cet ge *. Mais tous les travauxanciens entrepris sur les monuments de cette Eglise,ont t complts et dpasss par ceux du chanoineBiraghi, qui a consacr spcialement Ambroise et sa sainte sur l'rudition profonde que sa gracieuseobligeance a mise si libralement notre disposition.Si la figure d'Ambroise trouve , dans notre livre, soncadre authentique, et si sa vie se meut dans le vritablemilieu o elle s'est coule , c'est ce savant et pieuxprofesseur que je le dois.Ces tudes acheves, il me restait encore aller

    m'agenouiller sur le tombeau d'Ambroise. J'allaisdonc, plein de joie, accomplir Milan le rite du p-lerinage , quand vinrent inopinment les jours d'in-consolable deuil o la France s'est vue transformeen un champ de bataille, et o ceux qui ne peuventcombattre pour le foyer ont du moins le devoir de veil-ler prs de l'autel.

    1 Ughelli, Italia sacra, t. IV. Rome, 1652.Ripamontius, Histor. Ecoles. Mediolan.A. Alciat. Berum palfi lib. IV. Milan, 1025.G. AUegranza, Spiegazioni e Reflessione sopr alcuni sacri mouu-

    menti di Milano. Milan , 1757.P. Gratiolo, De prclans Mediolan. .Edificiis qncr ,Enobai'di cta-

    dem antecesserunt. Milan, 1725.Puccinelli, Zodioco dlia Chiesa Milanese, cio le vite de' suoi \\i

    primi pastori. Milan , 1056.Morigia, Historia deW anlichil di Milano. Venezia, 1592.Ollrocclii, Eccles. Mediol. Historia ligastica. Milan, 1595.

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    INTRODUCTION X\I

    IV

    C'est assez dire que ce livre n'est pas, il s'enfaut bien, le fruit des veilles tranquilles et desloisirs heureux. Peut-tre mme plus d'une page ygardera l'motion des horreurs meurtrires accom-plies sous nos yeux, et qui, plusieurs reprises, ontforc la plume tomber de nos mains. Mais celuidont la vie est raconte ici , a-t-il ignor une seuledes douleurs de la patrie envahie, dvaste, incen-die, livre en proie un insolent vainqueur? Mmene serait-ce pas en raison des calamits de notretemps que ce livre vient son heure pour en rappe-ler la cause , en indiquer le remde , et peut-treainsi faire le bien que Dieu veut?La cause premire de nos maux, il ne servirait

    rien de le dissimuler, est celle que l'Esprit-Saintdnonce quand il dit : C'est la justice qui lve lesnations, c'est le pch qui rend les peuples malheu-reux ^ Comme au iv*" sicle, la socit modernes'est trop longtemps obstine demeurer paenne :

    < Juslitia levt gnies, miseros autem facil populos peccatum.(Prnv. XIV, 34.)

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    XXII INTRODUCTIONc'est de ce mal qu'elle souffre et qu'elle pourraitprir.

    Il ne faut pas sans doule forcer le rapprochement,et le paganisme de noire ge n'est pas le polythismecombattu par Ambroise. La vieille idoltrie a suc-comb le jour o Ambroise renversa dans le palaisdu snat l'autel de la Victoire. Mais cette divinitdu triomphe brutal , trop adore Rome , a-t-ellecess de recevoir chez les peuples chrtiens unsanguinaire hommage? N'est-ce pas elle toujoursqui dcide de la vie des gnrations humaines? etces immolations de myriades de nos frres, dont lespectacle sacrilge s'tale nos regards l'heuremme o j'cris, ne sont-ce pas les hcatombes qu'unpaganisme froce offre sur l'autel de la violence -vic-torieuse ?Le paganisme philosophique est plus reconnais-

    sable encore : il n'a fait que changer de nom. Qu'ilsoit clos l'ombre du Muse d'Alexandrie ou sousles pesants brouillards de la Germanie ; qu'il senomme arianisme et manichisme , comme au tempsd'Ambroise , ou qu'il s'intitule panthisme et positi-visme, comme dans nos coles, n'a-t-il pas pareille-ment pour dogme principal de confrer l'huma-nit les attributs divins qu'il refuse Jsus-Christ?N'est-ce pas toujours l'orgueil , qui ne voit en Dieuqu'un homme , et fait de l'homme un Dieu?

    Des acadmies passez dans les conseils des peu-ples et de leurs matres : vous y verrez rgner le pa-

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    INTRODUCTION XXIIIganisme politique , adorant aujourd'hui la divinitdu Csar qu'il prcipitera demain de l'autel aux g-monies ; consacrant la souverainet fataliste du faitet de la force, ainsi que le gouvernement matrialistedes hommes par l'intrt et le plaisir. Regardez lesorgies rvolutionnaires que nous voyons trop souventdshonorer l'histoire : vous y reconnatrez le paga-nisme ressuscit dans ce qui a fait de tout temps sondouble caractre, la violence et la luxure, l'ivressedu sang et des sens, la rage de la destruction et dela corruption, le culte de la cruaut et de la vo-lupt.

    Enfin , des institutions descendez dans les murs :sensualisme chez les uns, naturalisme chez les autres,c'est chez tous le paganisme grossier ou lgant. Il ases prtres , ses temples , ses idoles , son culte ; ildshonore la science , il dgrade les lettres , il abaisseles arts; il rgne dans la vie publique, il pntredans la vie prive , il est le dieu du jour. Dieu abjectet brutal! Laissez-le faire, et bientt, enti^ans parlui de dgradations en dgradations, et de rvolu-tions en rvolutions, vous aurez mesur la profon-deur de la chute d'une socit qui, des bras duChrist, est tombe aux pieds des divinits d'un olympefangeux !

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    \XIV INTRODUCTION

    V

    Mais , grces soient Dieu ! ct de ce grandmal, il y a le remde, et plus le mal va croissant,plus le remde devient puissant. Au-dessus de cedluge de corruption paenne il y a l'arche sacrede l'Eglise chrtienne; il y a quelque chose, non-seu-lement qui vit, mais qui est, pour quiconque s'enapproche et s'en pntre , le foyer de la vie. Ce foyerest Rome, centre d'autorit , source de juridiction,chaire de vrit souveraine, indfectible. C'est ladoctrine qu'Ambroise dveloppe dans tous ses crits,confirme par tous ses actes; et cette double vrit :Rome centre de l'Eglise, l'glise foyer de la vie,a reu ainsi de notre grand docteur sa formule com-plte : O est Pierre l est l'Eglise , o est l'glisel ne peut tre la mort, mais la vie ternelle : UbiPetrus, ibi Ecclesia ; ubi Ecclesia , ibi niilla mors,sed vitawterna^

    Cette insparable union de l'glise avec Pierre etavec les successeurs de Pierre : O est Pierre l estl'glise, n'est pas l'objet d'un texte isol dans Am-broise. Un vaste ensemble de doctrine en est le

    1 Ambros. Enarral. in Psalm. xl, 30.

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    INTRODUCTION XXVcommentaire. Il n'y a qu' ouvrir ses uvres pourreconnatre en lui le docteur de la suprmatie lgis-lative, judiciaire, administrative et surtout doctrinaledu Pontife de Rome.

    D'abord il le dclare en termes absolus : Romeest le centre de l'Unit, et il y a pour tout chrtienncessit et devoir d'adhrer ce centre par unefoi et une soumission formelle : f/n vque n'est pascatholique s'il n'est en communion avec l'Eglise ro-maine; il n'y a pas de foi vritable dans le schisme \ Entrer dans la barque de Pierre, c'est entrer dansl'glise ^. Ceux-l ne peuvent prtendre l'hritagede Pierre qui ne se tiennent pas unis au sige de Pierre,et qui le dsolent par des divisions impies ^. Trou-bler Rome, c'est troubler le corps entier de l'Eglise etla foi des Aptres; pacifier Rome , c'est mettre la paixdans tout ce corps ^.Rome est la source de la sacre juridiction. L'-

    glise romaine est la tte de tout le monde romain , et1 Percontatus est (Satyrus) utrumnam cum episcopis calholicis,

    hoc est cum Rotnana Ecclesia conveniret. Non putavit fidem essein schismate. ( Ambr. de Excessu Satyri lib. 1 , n. 4G, 47.)

    2 Hi igitur ad navem Patri , hoc est ad Ecclesiam convenerunt.{In Luc. lib. IV, n. 77.)

    3 Non habent Ptri hajreditatem qui Ptri sedem non habent, quamimpia divisions discerpunt. {De Pnit. lib. I, n. 32.)

    4 Ne (Ursinus) possit turbare totum corpus Ecclesi toto orbe diffu-sum et universa turbare... Totius orbis Piomani caput Romanam Eccle-siam, atque illani sacrosanctam apostolorum fidem, ne turbari sineret,obsecranda luit clemenlia vestra. (Ambr. Epist. xi Imperator. , n. 2et 4.)

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    XXVI INTUODUCTIOiNc'est d'elle que dcoule pour tous le droit de participer la communion sainte *.De plus Rome possde la puissance universelle;

    c'est le sige du gouvernement de toutes les autresglises , et le tribunal suprme tabli sur le monde :Pierre a t choisi pour pasteur du troupeau du Sei-gneur, car c'est lui qu'il fut dit : Tu affermiras tesfrres -. L'voque de Rome est le gardien pi^pos Ventre du bercail, sachant faire le discernement desloups et des brebis ^ A lui appartient Vexamen desautres vques ; il est tabli sur tous *. Il doit nces-sairement recevoir les appels de toutes les parties derglise ^. Il a sur tous les vques une minenteprrogative ^ Mme les grands patriarches d'A-lexandrie et d'Antioche sont soumis son jugement,et le leur ne vaut qu'autant qu'il est confirmpar celuide l'glise romaine'^.

    1 ...Inde enim in omnes venerand communionis jura dimananl.(Epist. XI, n. 24.)

    2 Eum [Petrum] pastorem elegil Dominici gregis, nam huic dixit :Confirma fratres tuos. [In PscUm. xliii, n. -41.)

    3 Boni pastoris facis excubias, qui fideliler conomissam libi januamservas, etc. {Ad Sii'icium PP.)

    4 De reliquis Ecclesiarum sacerdotibus episcopus Romanus habelexamen, qui in omnes fucral constilulus. [Epist. conc. Rom. adGratian.)

    5 Vel si ipse metropolitanus est, Romam necessario, vel ad ces quosRomanus episcopus judices dederil, contendere sine dilatione jubea-lur. [Epist, conc. Roin. ad Gratian.)

    6 Perogaliva tamen aposlolicae Sedis excellit. (Epist. xiii.)7 Quod Ecclesia Romana haud dubie comprobaverit, laeli fructum

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    INTRODUCTION XXVIRome enfin est la chaire de la vraie doctrine et

    l'organe d'une foi garantie par Dieu lui-mme : iciles textes abondent, et quels textes dcisifs! Quelleslumineuses paroles!

    Pierre est le premier dans la foi (ddei princeps),car c'est lui qui le premier a cru au Fils de Dieu avantmme que le Christ se ft dfini lui ; et non-seulementil a rpondu pour les autres, mais avant tous les au-tres. Il est appel le fondement, parce qu'il s'est portcaution non-seulement de sa foi propre , mais de la foicommune ^ La barque de Pierre ne tremble pas;car avec elle c'est la sagesse qui yiavigiie, c'est la foiqui enfle les voiles, et le mensonge en est absent. Com-ment sombrerait-elle, dirige par Celui sur qui reposerglise ^? Cette barque n'est j^as trouble, car c'estelle qui porte Pierre^. Les Jpoires tendent les filets;mais c'est Pierre seul que Jsus-Christ a dit de pous-ser sa barque au large , cest--dire jusqu'aux profon-

    hujus examinis adipiscamur. (Epist. lvi ad Thcophil. Alexandr. pa-Iriarch., n. 6, 7.)

    1 Ille fidei princeps, cui se Christus nondum Dei Filium dixerat,ettamen ille credideral. {Ibid., lib. V, n. 98.)Petrus respondit pro cteris , imo prse cteris. Ideo fundamentum

    dicitur quia novit non solum proprium, sed etiam commune servare.[De Incarnat, cap. iv, n. 33.)

    2 Non turbalur hc ( Ptri ) navis, in qua prudentia navigat, abestperfidia, fidos aspirt. Quemadraodum enim turbari poteral, cui prae-erat is in quo Ecclesiee firmamentum est. {In Luc. lib. IV, n. 70.)

    3 Non turbalur ista navis qu Petrum habet. [Ibid.)

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    XXVlll INTRODUCTIONdeurs des controverses '. C'est Pierre de pronon-cer la parole de la foi, d'af/rmer la vraie pit, etd'annoncer la grce '. C'est lui de corriger le fauxsens donn la doctrine , ou (coname s'exprime Am-broise par allusion Malchus) de retrancher, avec leglaive spirituel, l'oreille rebelle la vrit ^. Pierreest le fondement de l'glise, lequel doit prvaloircontre toutes les hrsies K Si Jsus-Christ,, qui seulest proprement la pierre fondamentale de l'glise,a voulu confrer ce titre son disciple, c'est afin defaire entendre, par ce surnom de Pierre, quelle est sasolidit et sa constance dans la foi ^. C'est, en effet,la foi qui est le fondement de l'glise. Il ne s'agit pointici du corps de Pierre, mais de la foi; c'est de cette foiqu'il est dit que les portes de la mort ne prvaudrontpoint contre elle; c'est sa confession qui a vaincu l'en-fer ^. Donc Pierre continue de vivre, puisque, se-

    i Soli lamen l'etro dicilur : Duc in altum , hoc est in profundumdisputalionum. {In Luc. lib. IV, n. 71.)

    2 Meum est (inquit Petrus), meum est enim fidem loqiii, pielatemadserere, ^raliam prdicare. [Ibid., n. 30.)

    3 Tollit spirilali gladio aurem interiorem maie inlelligentis. [In Luc.lib. X,n. 67.)

    4 Adversus omnos hrees dbet valere Ecclesi;i' fundamentum.[De Incarnat, cap. v, n. 34.)

    f Discipulo suo hujus vocabuli raliani non negavit, ut et ipse silPetrus, quod de Petra habeat soliditaleni conslantiae, fidei tinnamen-tum. [In Luc. lib. VI, n. 97, De Fide lib. IV, n. 56.)

    6 Fides ergo est Ecclesia; fundamentum. Non enim de carne Ptri,sed de fide dictum est quia port mortis ei non proevalebunl, sed con-fessio vicit inferniim. [De Inrarnal. cap. v, n. 34.)

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    INTRODUCTION XXIXIon la divine promesse , c'est contre lui que les portesde l'enfer n'ont pu p7^valoir ^

    Aussi la foi de Rome est-elle une foi pure et unelumire sans ombre; c'est la conclusion d'Ambroise :

    // faut croire au symbole des Aptres , dit-il , l'gliseromaine le garde et le maintient toujours dans une purret sans tache ^. La parole de Pierre est immacu-le; elle ne reoit pas d'atteintes des pines de l'impit;et rien ne doit empcher que la sainte parole ne sortede ses lvres \

    Telle est la doctrine d'Ambroise, telle est sa foidocile en l'enseignement suprme, certain, irrfra-gable de cette Rome spirituelle, devant laquelle ilveut que toute tte (lcliisse et que tout cur s'in-cline. Telle est sa reconnaissance envers celui dont ildit que Jsus tant sur le point de s'lever au ciel avoulu nous laisser dans Pierre commue le supplant deson amour ^. On verra, par cette histoire, que l'auto-rit de Damase n'eut pas de plus vaillant dfenseurque lui contre la comptition schismatique d'Ursin. La

    1 Neque enim Petrus morluus est, cui, juxla dominicam senten-tiam, inferi porta prsevalere non potuit. [In Luc. lib. VII, n. o.)

    2 Credatur Symbolo apostolorum , quod Ecclesia Romana inteme-ratum semper custodit et servat. (Epist. xm ad Siricium, n. S.)

    3 Purus est sermo, cui nulles spinas expressa reliquit impietas.Lingua (Ptri) non habet spinas; sine impedimento dbet exire.

    (De Incarnat, cap. iv, n. 32.)* Quem (Petrum) elevandus in clum, amoris sui nobis velut vi-

    carium reliqueral. [In Luc. lib. X, n. 174, 17a, 176.)

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    XXX INTRODUCTIONprimaut de Sirice n'eut pas de plus ferme vengeurcontre les premires prtentions des voques d'O-rient. Vous tes le Maitre et le Docteur, crivait Am-jjroise ce pape *; et celui-ci rpondait en disantqu'il tait certain de sa docilit, et que nul doute nelui tait permiis cet gard

    .

    Aujourd'hui la vrit professe par Ambroise estdevenue un dogme de foi pour tous les catholiques.On aura vu du moins, par ces paroles d'un Pre duiv'' sicle , que si la doctrine de l'infaillibilit du Pon-tife romain s'est rcemment formule en un dogmesacr, c'est qu'elle tait rpandue dans la traditioncatholique, pareille cette matire lumineuse pri-mitive qui, longtemps diffuse dans l'espace thr,finit par se condenser en des corps radieux qui clai-rent le monde.Que l'glise qui l'a dfini reoive ici l'adhsion

    pleine d'allgresse du plus humble de ses enfants. Jen'ai pas eu de peine croire une vrit dont je trou-vais chaque page de mon saint Docteur l'expressionou le germe. Elle illumine ses uvres, elle inspireses actes, et dclarer que ce livre est compos dans

    1 Quid plura apud Magislrum et Doctorem? (Epist. xm ad Siric.PP., n. 12.)

    2 Quod (judicium) custodituram sanctitatem tuam non ambigo. (Si-ricius ad Mediol. Ecoles. , n. 6.)

    Je puis citer tous les textes, qui sont considrables, et qui, parleur ensemble^ forment une invincible dmonstration. Je renvoie

    ,

    pour le contexte et son dveloppement, au rcent opuscule de AngeloTaglioretli : S. Ambvogio e l'InfnlUfnlita pnntipcia. Milan, 1870.

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    INTRODUCTION XXXIla foi de l'Eglise catholique, apostolique, romaine,c'est dire qu'il est crit dans l'esprit mme et commesous la dicte d'Ambroise.

    VI

    Le premier principe pos par le grand Docteur,O est Pierre l est l'glise, a donc eu son triompheet son avnement. Le second, savoir que l oitil y a rglise, il y a la vie jamais, n'est pasmoins incontestable, et l'histoire donnera raison l'esprance d'Ambroise comme elle l'a donne sacroyance. Dj une premire fois, c'est cette gliseimmortelle qui , l'Empire croul et les barbares pas-ss, a rgnr le monde. Pourquoi, au lendemainde catastrophes semblables, ne procurerait-elle pasau monde le mme bienfait? D'abord il est manifestequ'elle seule aujourd'hui , en principe et en fait

    ,

    possde l'autorit. Or ce qui est le plus en prildans la socit prsente, n'est-ce pas l'autorit, avecla discipline, la discipline des esprits, la disciplinedes consciences , plus encore que celle des- armes ?Si donc , au sein d'une poque mine par l'anar-chie, on voit les catholiques se serrer si troite-ment autour de leur chef spirituel pour recevoir de

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    \\\ll INTIIODUCTIONlui le mot d'ordre iulaillible de la vrit , ce con-traste n'est-il pas un signe consolant , et cette do-cile unit un contre -poids ncessaire? Si la Pierrefondamentale de l'glise reoit une si forte as-siette au milieu de nos ruines, n'est-ce pas parcequ'elle est destine devenir, dans les desseins deDieu, la pierre angulaire de l'difice de l'avenir? etn'y a-t-il pas l non-seulement un spectacle d'unegrandeur extraordinaire , mais un symptme qui doitfaire tressaillir tout homme sage d'une joyeuse con-fiance?Sans doute, je ne puis mconnatre que la socit

    en Europe prend une voie oppose, que partout lalibert y prime l'autorit, et que la dmocratie y d-borde de toutes parts. Mais n'est-ce pas en raisonmme du progrs des liberts que la discipline doc-trinale et que la loi morale y sont plus ncessaires?N'est-il pas vrai que , plus l'homme est matre de sesdestines, plus il a besoin d'une rgle de vrit etde vertu? Or o la trouvera-t-il si ce n'est dans la Re-ligion? et ds lors n'est-il pas bon, n'est-il pas dsi-rable qu'il y ait quelque part , au sein de notre mobi-lit , un centre de principes fixes, incontestables; etque l'oracle charg par Dieu de les promulguer soitun oracle infaillible et suprme comme lui?

    Laissons donc les impies rire de ces affirmationssolennelles de l'glise dont ils ignorent le sens et m-connaissent la sagesse. Laissons-les, comme autrefois,se moquer du patriarche qu'ils regardent construire

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    INTRODUCTION XXXIIIl'arche, sans vouloir croire encore que c'est elle quiva porter au-dessus du dluge l'espoir et la vie dumonde. Plus les rvolutions diminueront les pou-voirs humains, plus elles feront sentir le besoin dupouvoir divin , plus elles donneront raison cesactes du saint-sige , ces protestations de la foi et dudroit qui font pousser tant de clameurs aux aveuglesdmolisseurs des principes sociaux '. F^atigues dengociations, de changements, de malheurs, les in-telligences droites et les consciences saines prouve-ront le besoin de revenir rglise comme la seuleautorit capable de rgler et de consacrer toutesles autres. Alors on bnira et on glorifiera le jouro la vrit s'est solennellement reconnu . dans le

    C'est la pense qu'un journal protestant, lo Revue de Bcrlh^,exprimait nergiquement, il y a quelque? annes, propos de TEn-cyclique de notre Saint- Pre Pie IX :

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    INTRODUCTION XXXVLa perversion humaine peut entraver les desseinsde la volont divine. Elle peut faire subir aux af-faires du progrs chrtien des checs pouvantables,lui infliger des retards qui durent des sicles. JMaisTuvre de Dieu est l'uvre d'une patience infati-gable, car elle est celle d'un amour infini. Elle sepoursuit toujours, sinon comme une ligne inflexible-ment droite, du moins comme une ligne incessam-ment brise. Seulement ayons confiance! 11 est con-solant de voir que les gnies suprieurs dont l'glises'honore, ses Docteurs et ses Pres, ont vcu pres-que tous des poques humilies, au dclin des em-pires ou mme sur leurs ruines. Que leur exemplenous montre conmient se forment les mes plushautes que leurs temps , temporibus suis excelsiores t>,comme Grgoire de Nazianze appelle les Machabes.Les grands hommes sont ceux qui ne se dcouragentpoint; les grands chrtiens sont ceux qui fixent le butdivin de ce ferme et intrpide regard dont Bossueta parl, et qui marchent ce but sans s'arrter ja-mais.

    Orlans, oi 18 janvier 1871, en la fterie la Ciiaire de saint Pierre.

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    I

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    HISTOIRE

    SAINT AMBROISELIVRE I

    CHAPITRE ILES COMMENCEMENTS d'aMBROISE

    (340-374)

    La famille d'Ambroise. Son pre, prfet du prtoire des Gaules. Sa parente, sainte Sotheris, vierge et martyre. Naissance d'Am-broise Trves. Son frre Satyre et sa sur Marcelline. Pr-sages heureux de son gnie. Marcelline se consacre Dieu. Discours du pape saint Libre. Mort du prfet Ambroise.Jeunesse d'Ambroise Rome. Sa maison. Auslrits de Mar-

    celline. Ambroise prdit qu"il sera vque. Ses ludes aux colesde Rome. Ses amis, Priscus, Simplicien. Son union avec Satyre. La socit paenne; maison de Symmaque. La socit chr-tienne; maison de Probus. Les jeunes chrtiens. Ambroise, con-seiller au prtoire, est nomm consulaire de la haute Italie. Adieude Probus.

    Dans les dernires annes de Constantin le Grand , unillustre patricien nomm Ambrosius fut appel par l'em-pereur aux fonctions de prfet du prtoire des Gaules.Ambroise se rendit dans son gouvernement avec safamille. C'est l que Dieu lui donna l'enfant prdestin

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    s LES COMMENCEMENTS D'AMBROISEqui porta le nom de son pre, et dont j'entreprends deraconter la vie'.

    Les prfets du prtoire n'taient plus, comme autrefois,les chefs militaires des cohortes prtoriennes. Mais si,depuis (luclque temps, la i)olitique de Constantin leuravait retir le commandement des armes, toute l'admi-nistration judiciaire et civile restait encore aux mains deces grands magistrats, qui ne voyaient personne au-dessusd'eux que l'empereur. Ils exeraient une juridiction sansappel, percevaient les impts, gouvernaient des provincesplus vastes que des royaumes, reprsentant souveraine-ment la majest de Rome , faisant respecter son nom etobserver ses lois -.La prfecture des Gaules tait une des quatre grandes

    divisions de l'empire. Elle n'embrassait pas moins que laGrande-Bretagne, l'Espagne et la Gaule proprement dite,jusqu' la frontire du Rhin.

    Celui qu'on venait d'appeler l'administration de cetteimmense contre tait dj par lui-mme un homme con-sidrable. Il avait commenc par siger au snat, dansun rang lev, avant que son mrite et la confiance duprince l'eussent -investi de ce gouvernement suprieur ^

    i Posito in adniinislratioae prfcctur Galliarum ptre ejus Am-brosio, nalus est Ambrosius {Vila S. Ambi'osii Paulino ejusnotario ad B. Aiiguslinum scripta, n. 3. 0pp. S. Ambros.t. II, p. 2, in appendice. Edil. Bndictin. Curanlibus J. du I'>ischeet N. le Nourry. Paris, 1686; 2 vol. in-fol.

    2 Zozim. Hist. roinan. t. II, 33. V. M. Naudct, Changements ditnsl'empire romain, t. II, p. 330.

    3 Pater illuslris Romani sanguinis prosapia oriundis e.\stitit, quinon infeiiore primum subsellio in senatu romano potitus, tutor rei-public ac defensor ulillimus Csaris est judicio prelectus. {Pane-gyric. S. MarccUin. BoUand. 17 Julii. Cap. i, n. 4, p. 235.)Ce pangyrique, que nous citerons souvent, fui prononc au v ou

    vi sicle. Le D"' Biraghi en fournil les preuves dans une noie savantede la vie de sainte Marcelline.Le biograpbe grec de saint Anibroise nous apprend galonionl qu'il

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    LES COMMENCEMENTS D'AMBROISE 3De plus une riche fortune conservait la maison desAmbroises l'clat traditionnel d'une race qui comptait desconsuls au nombre de ses anctres. Dieu l'avait ainsivoulu, pour que leur descendant, appel bientt porterla parole en son nom, la portt libre et haute, et pt traiterd'gal gal avec les plus puissants.Toutefois la religion tait un hritage que celui-ci met-

    tait un plus haut prix. Nous autres prtres, crivaitle patricien devenu vque, nous avons une noblesse pr-frable aux consulats et aux prfectures. Nous possdonsdes honneurs que la foi seule nous rvle, et que rien nepeut nous ravir '. La famille d'Ambroise possdait cettenoblesse. Elle tait dj ancienne dans le christianisme

    ,

    et mme le vieux sang romain qui coulait dans ses veiness'tait rcemment rgnr par le martyre. Il n'y avaitpas un demi-sicle qu'elle avait donn au ciel une sainte,vierge hroque immole pour la foi, le 10 fvrier 304,dans la perscution de Diocltien. Cette vierge martyres'appelait Sotheris, et Ambroise se plat rappeler sou-vent son nom dans ses crits. Nous apprenons de luique Sotheris avait en elle et autour d'elle tout ce quipeut attirer le monde et le charmer. Mais au jour del'preuve, dit-il, la noble fille des prfets et des consulsrefusa d'offrir de l'encens aux faux dieux. Le perscuteurcommanda de lui mutiler le visage. Elle s'offrit elle-mme aux coups qui la dfigurrent, mais sans lui pou-voir ravir cette beaut intrieure de la grce et de la vertuqui ne s'efface point *. Aprs d'ingnieux tourments qui

    tait de race s^'iiatorialo : " Divinus Ambrosius in Romanorum clarussenatu. (Ambr. opp. Append. n" 3, p. xv.)1 Habemus enim nos sacerdotes noslram nobilitalem, praefecturis el

    consulatibus prferendam ; habemus, inquam, fidei dignitates quoiprira non norunt. (Ambr. Exhortai, virginilatis, cap. xii, n. 82, opp.t. II, p. 299.]

    2 Sancla Sotheris, ut domesticum pi parentis proferamus exem-

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    A LES COMMENCEMENTS D'AMOROISEprolongrent son supplice, elle fut dcapite, et mouruten laissant au loyer des Ambroises ce got du martyre etde la virginit qui ne devait pas y prir.La rsidence ordinaire du prfet des Gaules tait laville de Trves, o Constantin le Jeune avait fix sacour . Les ruines magniliqucs que celte mtropole a lais-ses aprs elle ne dmentent pas l'loge d'Ammien Mar-cellin, qui l'appelle une seconde Rome - . Ausone, dansun long pome , a dcrit les splendeurs de la ville imp-riale, le palais, le Gapitole, l'amphithlre, les Thermes,avec le prtoire dominant les deux rives de la Moselle, etles collines semes de villas et de grands bois; c'est--diretout ce qui faisait alors la vie romaine , le pouvoir et lesdlices, la domination et le plaisir ^

    Mais le christianisme avait dj jet sa semence danscette terre, et il y portait de grands fruits. Les vers desrhteurs -courtisans n'en disent rien; mais de simples etprcieuses inscriptions spulcrales retrouves de nos joursnous permettent de surprendre, sous sa forme la plustouchante comme la plus sincre, la foi de ce peuple quidonna des martyrs l'glise avant de lui donner des doc-teurs''. L sigeait Maximin, homme de haute saintet.plum, cum esset dcora facie valde et nobilis virgo majorum prosa-pia, consulalus et praefecturas parenlum poslhabuit fide, etc. (Ambr.,ibid. et de Virginibus lib. 111, n. 39, t. Il, p. 184.)

    1 Le pre Pagi, dans ses notes sur Baronius , a parfaitement d-montr que la rsidence du gouverneur tait alors, non Arles, mais Trves.

    2 Ammian. Marcellin. lierum gest. lib. XV.3 Talia despectant longo per crula tractu

    Pendentes saxis, inslanti culmine sylve,Quas mdius dirimit sinuosis llcxibus erransAinnis, et alternas comuiit prloria ripas.

    Ausonii Mosrlla, vers. 280, interprte l" relier. Heidelberg, 1619,in-l'ol. avec planches.

    4 V. Lersch, Central Musum, ni, p. 29, (>7, 0.'>. M. O/.anam a cit

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    LES COMMENCEMENTS D'aMBROISE 5et de grande doctrine qui, venu de Poitiers Trves, ydfendait la divinit de Jsus-Christ par ses crits et sesdiscours '. Prs d'un sanctuaire qui porte actuellementson nom, et qui tait alors consacr saint Jean, onmontrait la maison o dans ces mmes annes , en 336

    ,

    Athanase, exil, avait t accueilli avec enthousiasme parles peuples de cette contre, par l'vque de la ville, etmme par le Csar Constantin le Jeune , pris d'admira-tion pour le proscrit de son pre. Athanase a clbr lapit de cette glise. Il y avait vu construire les premiresbasiliques, et la foule impatiente se presser sous leursvotes avant que les ouvriers en eussent pos la dernirepierre -. Lui-mme, pendant deux ans, y avait embrastout le clerg des Gaules de son ardeur dfendre leChrist, Fils de Dieu , contre l'arianisme. La cause soute-nue par le courageux athlte ne devait pas tarder voirse lever, au mme lieu, un autre et grand vengeur.C'est l que, dans l'anne 340, d'aprs l'estimationla mieux autorise, Ambroise vint au monde D'autresplacent sa naissance en 333 ^ Dans cette seconde opi-quelques-unes de ces inscriptions dans ses tudes german., t. II ,ch. I, p. 16. V. aussi E. Leblant, Inscriptions chrtiennes de la Gaule.

    1 Saint Athanase parle des crits de saint Maximin contre les ariens.Ad Episcop. Aigypt., contra Arian., p. 278.2 Athanas. Apolog. ad imper. Consf. 0pp. t. I, p. 806. Edit. Bene-

    dict.3 Vita S. Ambros. ex ejus scriptis collecta, n. 4. Appendix ad opp.

    Anabr. t. II, p. xxxj.4 Ita Baronius in Ambros., Annal. Eccles., t. IV, p. 223, ad ann.

    .365. Cette diffrence d'opinion sur l'poque de la naissance du saintvque dpend de la date d'une lettre (Epist. liv ad Severum,n. 3)danslaquelle Ambroise dclare avoir alors cinquante- trois ans. II nousapprend que son ptre est crite au milieu de l'invasion barbare, desguerres et des rvolutions de toutes sortes : Objecli barbaricis molibuset be.Uorum procellis, in medio versamur omnium molestiarum. S'ils'agit de la guerre coAtre le tyran Maxime, en 387, comme le veutBaronius, Ambroise a du natre en 3.33. S'il s'agit de la guerre contre

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    6 I.ES COMMKNCKMKNTS D'AMliHOISLnion, qui est moins vraiscmblnltlc, Ambroise aurait eu unpeu plus de trois ans quand Aliianasc tait Trves, desorte que le grand vque aurait pu y connatre l'enfantet le bnir.Ambroise ne reut le baptme que bien des annes

    aprs, comme nous le raconterons. Par un abus lamen-table dont rb]glise gmissait sans pouvoir l'abolir, leretard du baptme tait encore l'usage commun cettepoque. L'enfant, sa naissance, tait seulement inscritau nombre des catchumnes. On lui mettait sur les lvresle sel, symbole de la sagesse et de l'incorruption, et sur lefront la croix , comme signe de la prise de possession deJsus-Christ. Ambroise demeura ainsi catchumne plusde trente ans. On ne ngligea pas pour cela de l'instruiredans la religion de son pre, homme grand devant Jsus-Christ comme devant Csar, dit un ancien auteur, et quise distinguait par l'clat de sa foi *, On lui apprit debonne heure les rcits de l'criture sainte-, en mmetemps qu'on prit soin de le former aux vertus, dont iltrouvait d'ailleurs dans Marcelline, sa sur, et dans sonfrre Satyre l'inspiration et le modle.

    Satyre comptait peine quelques annes de plus queson frre Ambroise. Celui-ci nous a trac le portrait decet an, qui semblait, disait-il, ne faire qu'un avec lui.Il y avait entre eux une ressemblance parfaite : mmestraits , mme dmarche , mme regard , mme son devoix , ce point que souvent leurs familiers eux-mmes

    Eugne en 393 ou 394, il faut placer la naissance de Tvque en l'an-ne 340, comme le veulent les Bndictins.

    1 Ambrosius sanctse Marcellinae genilor, vir apud Csesarem et apudChristum nobilissimus, et fidei nitore perspicuus. (Paneg. apud Bol-land. Cap. ii, n. H, p. 236.)

    2 Sapienlia qu hauritur e sacris lilteris enutritus, lametsi necduminilialus esset.

    [Ambrosii Vita, e grco translata. Appcndi.x, n. 3. 0pp. t. 11, p. xvj.)

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    LES COMMENCEMENTS D'AMBROISE 7ne pouvaient aisment distinguer l'un de l'autre. Leursmes ne se ressemblaient pas moins que leurs corps.Simple comme un enfant, pudique comme une vierge,ardent comme un aptre, Satyre semblait une premirepreuve du grand ouvrage que Dieu prparait dans Am-broise. La grce de la saintet viendra consommer plustard cette conformit; c'est Ambroise qui le dit; et Jsus-Christ sera un centre suprieur o leurs curss'uniront pour ne se sparer jamais *.

    Marcelline tait de dix douze annes l'ane de sonplus jeune frre -. Ses vnrables parents , ainsi qu'ilest racont , consacrrent au Dieu qui aime les prmicescette premire fleur de leur mariage '. Baptise jeuneencore, initi aux mystres de la rgnration et de lacommunion, Marcelline devana Ambroise et Satyre dansces voies de saintet qui lui taient ouvertes par les sa-crements. Assez grande pour comprendre Ambroise, as-sez forte pour le soutenir, assez tendre pour le consoler,Marcelline sera dans la vie de son frre une puissance, uncharme et une bndiction. Ambroise, de son ct, avaitpour elle un culte gal sa confiance ; il ne l'appelaitque sa sainte, sa vnrable sur* . C'est elle qui,dans son histoire, nous est montre la premire veillantauprs de son berceau ; elle est ses cts toutes les

    1 Ambros. de Excessu Satxjri, n. 6. 0pp. t. 11^ p. Hlo.2 Marcellina decem annos Ambrosio senior erat. [Bolland. Vita S.

    Marcellin. Acta SS. Junii, t. IV, p. 233.)Le doct. L. Biraghi, dans sa Vie de sainte Marcelline , Tplace sa

    naissance en 327.3 Venerandi conjuges primum sui conjugii florem, scilicet beatamMarcellinam, Christo Domino sacras primitias devoverunl. (Ex Bre-

    viar. Mediolan. Eccl. 1539. 1 Lecl