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Communication & Influence Quand la réflexion accompagne l’action www.comes-communication.com Pourquoi Comes ? En latin, comes signifie compagnon de voyage, associé, pédagogue, personne de l’escorte. Société créée en 1999, installée à Paris, Toronto et São Paulo, Comes publie chaque mois Communication & Influence. Plate-forme de réflexion, ce vecteur électronique s’efforce d’ouvrir des perspectives innovantes, à la confluence des problématiques de communication classique et de la mise en œuvre des stratégies d’influence. Un tel outil s’adresse prioritairement aux managers en charge de la stratégie générale de l’entreprise, ainsi qu’aux communicants soucieux d’ouvrir de nouvelles pistes d’action. Être crédible exige de dire clairement où l’on va, de le faire savoir et de donner des repères. Les intérêts qui conditionnent les rivalités économiques d’aujourd’hui ne reposent pas seulement sur des paramètres d’ordre commercial ou financier. Ils doivent également intégrer des variables culturelles, sociétales, bref des idées et des représentations du monde. C’est à ce carrefour entre élaboration des stratégies d’influence et prise en compte des enjeux de la compétition économique que se déploie la démarche stratégique proposée par Comes. N°36 - Septembre 2012 EDITORIAL Stratégie d'entreprise et communication d'influence La rentrée universitaire est l'occasion de rappeler qu'action pratique et réflexion théorique sont indissolublement liées. S'instruire pour vaincre s'impose comme un leitmotiv à l'heure de la guerre économique. Il faut donc saluer l'initiative des Presses universitaires de France (PUF) de proposer un Manuel d'intelligence économique, réalisé sous la direction de Christian Harbulot (voir Communication & Influence, avril 2012). Dans la palette des nouvelles stratégies de puissance, l'influence constitue une arme essentielle. "Les stratégies d'influence sur les normes, l'éducation, la structuration de la société de l'information ou les systèmes juridiques (pour se limiter à ces exemples) ont des conséquences décisives sur la manière dont les puissances affirmeront leur position sur l'échiquier mondial" remarque Christian Harbulot. On entre ainsi au sein d'une "aire informationnelle complémentaire qui génère de nouveaux types de confrontations entre acteurs économiques." Lorsque Christian Harbulot m'a aimablement proposé de rédiger le chapitre intitulé "De la stratégie d'influence à la communication d'influence", ma préoccupation a été d'offrir une synthèse opérationnelle, répondant aux questions qui me sont posées comme chef d'entreprise, jour après jour depuis 1999, année de création de Comes communication. De quoi parle-t- on quand on parle d'influence ? En quoi l'influence se distingue-t-elle du lobbying ? Quelle est sa place dans le smart power ? A qui s'adresse-t-elle ? Comment faire en pratique pour engager une communication d'influence ? En direction de quelles cibles ? Pour quels retours sur investissements ?... C'est une chose de dresser un séduisant cadre théorique, c'en est une autre d'engager concrètement ces actions au quotidien, au profit de structures diverses, qu'elles soient publiques ou privées, qui exigent bien logiquement des résultats tangibles. L'expérience acquise en France, mais surtout à l'international (Amérique du nord, Amérique latine, Maghreb, etc.) nous permet d'effectuer des allers-retours permanents entre la théorie et la pratique. C'est en grande partie ce qui fait notre force. C'est ce qu'apprécient nos clients. n Bruno Racouchot Directeur de Comes FOCUS Les ouvertures des PUF Belle institution bénéficiant d'une solide notoriété, les Presses universitaires de France constituent un pilier de la pensée en France. Fondées en 1921, elles ont su tout à la fois conserver leur aura scientifique et universitaire, tout en cherchant à s'ouvrir aux réalités du monde - réalités politiques, économiques, sociales... A côté des traditionnelles collections de recherche et de référence, les PUF proposent ainsi de nombreuses revues de sciences humaines et sociales, (voir le site www.cairn.info). Les PUF sont également appréciées du grand public pour les fameux Que sais-je ? Quant à la collection Major, où a été publié le Manuel d'intelligence économique (432 p.,28 €), elle offre de solides repères aux étudiants, sous la houlette de Pascal Gauchon (voir Communication & Influence, juin 2011). Cette volonté de s'ouvrir aux réalités du monde économique est louable. Plus que jamais il importe de croiser les savoirs. Communication & Influence souhaite soutenir cette initiative. Grâce à l'autorisation de la dynamique directrice des relations extérieures des PUF, Dominique Reymond, vous découvrirez dans les pages qui suivent le chapitre du livre consacré à la communication d'influence. Une précision avant de le lire : le copyright appartient aux PUF. Donc, jouez le jeu… Pour en savoir plus : www.puf.com n

Communication & influence n°36 (09/2012) - Stratégie d'entreprise et communication d'influence

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S'instruire pour vaincre s'impose comme un leitmotiv dans la guerre économique. Il faut donc saluer l'initiative des Presses universitaires de France de proposer en cette rentrée universitaire un Manuel d'intelligence économique. Christian Harbulot, en charge de la direction de l'ouvrage, a aimablement proposé à Bruno Racouchot, directeur de Comes communication, de rédiger le chapitre intitulé "De la stratégie d'influence à la communication d'influence". La préoccupation de ce dernier a donc été d'offrir une synthèse opérationnelle, répondant aux questions qui lui sont posées comme chef d'entreprise, jour après jour depuis 1999, année de création de Comes : De quoi parle-t-on quand on parle d'influence ? En quoi l'influence se distingue-t-elle du lobbying ? Quelle est sa place dans le smart power ? A qui s'adresse-t-elle ? Comment faire en pratique pour engager une communication d'influence ? En direction de quelles cibles ? Pour quels retours sur investissements ?... Un fil d'Ariane à suivre pour découvrir bien des aspects méconnus de l'intelligence économique et des nouvelles stratégies de puissance !

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Page 1: Communication & influence n°36 (09/2012) - Stratégie d'entreprise et communication d'influence

Communication &Influence Quand la réflexion accompagne l’action

www.comes-communication.com

Pourquoi Comes ? En latin, comes signifie compagnon de voyage, associé, pédagogue, personne de l’escorte. Société créée en 1999, installée à Paris, Toronto et São Paulo, Comes publie chaque mois Communication & Influence. Plate-forme de réflexion, ce vecteur électronique s’efforce d’ouvrir des perspectives innovantes, à la confluence des problématiques de communication classique et de la mise en œuvre des stratégies d’influence. Un tel outil s’adresse prioritairement aux managers en charge de la stratégie générale de l’entreprise, ainsi qu’aux communicants soucieux d’ouvrir de nouvelles pistes d’action.

Être crédible exige de dire clairement où l’on va, de le faire savoir et de donner des repères. Les intérêts qui conditionnent les rivalités économiques d’aujourd’hui ne reposent pas seulement sur des paramètres d’ordre commercial ou financier. Ils doivent également intégrer des variables culturelles, sociétales, bref des idées et des représentations du monde. C’est à ce carrefour entre élaboration des stratégies d’influence et prise en compte des enjeux de la compétition économique que se déploie la démarche stratégique proposée par Comes.

N°36 - Septembre 2012

EDITORIAL

Stratégie d'entreprise et communication d'influenceLa rentrée universitaire est l'occasion de rappeler qu'action pratique et réflexion théorique sont indissolublement liées. S'instruire pour vaincre s'impose comme un leitmotiv à l'heure de la guerre économique. Il faut donc saluer l'initiative des Presses universitaires de France (PUF) de proposer un Manuel d'intelligence économique, réalisé sous la direction de Christian Harbulot (voir Communication & Influence, avril 2012). Dans la palette des nouvelles stratégies de puissance, l'influence constitue une arme essentielle. "Les stratégies d'influence sur les normes, l'éducation, la structuration de la société de l'information ou les systèmes juridiques (pour se limiter à ces exemples) ont des conséquences décisives sur la manière dont les puissances affirmeront leur position sur l'échiquier mondial" remarque Christian Harbulot. On entre ainsi au sein d'une "aire informationnelle complémentaire qui génère de nouveaux types de confrontations entre acteurs économiques."

Lorsque Christian Harbulot m'a aimablement proposé de rédiger le chapitre intitulé "De la stratégie d'influence à la communication d'influence", ma préoccupation a été d'offrir une synthèse opérationnelle, répondant aux questions qui me sont posées comme chef d'entreprise, jour après jour depuis 1999, année de création de Comes communication. De quoi parle-t-on quand on parle d'influence ? En quoi l'influence se distingue-t-elle du lobbying ? Quelle est sa place dans le smart power ? A qui s'adresse-t-elle ? Comment faire en pratique pour engager une communication d'influence ? En direction de quelles cibles ? Pour quels retours sur investissements ?... C'est une chose de dresser un séduisant cadre théorique, c'en est une autre d'engager concrètement ces actions au quotidien, au profit de structures diverses, qu'elles soient publiques ou privées, qui exigent bien logiquement des résultats tangibles. L'expérience acquise en France, mais surtout à l'international (Amérique du nord, Amérique latine, Maghreb, etc.) nous permet d'effectuer des allers-retours permanents entre la théorie et la pratique. C'est en grande partie ce qui fait notre force. C'est ce qu'apprécient nos clients. n

Bruno Racouchot Directeur de Comes

FOCUS

Les ouvertures des PUFBelle institution bénéficiant d'une solide notoriété, les Presses universitaires de France constituent un pilier de la pensée en France. Fondées en 1921, elles ont su tout à la fois conserver leur aura scientifique et universitaire, tout en cherchant à s'ouvrir aux réalités du monde - réalités politiques, économiques, sociales... A côté des traditionnelles collections de recherche et de référence, les PUF proposent ainsi de nombreuses revues de sciences humaines et sociales, (voir le site www.cairn.info). Les PUF sont également appréciées du grand public pour les fameux Que sais-je ? Quant à la collection Major, où a été publié le Manuel d'intelligence économique (432 p.,28 €), elle offre de solides repères aux étudiants, sous la houlette de Pascal Gauchon (voir Communication & Influence, juin 2011).

Cette volonté de s'ouvrir aux réalités du monde économique est louable. Plus que jamais il importe de croiser les savoirs. Communication & Influence souhaite soutenir cette initiative. Grâce à l'autorisation de la dynamique directrice des relations extérieures des PUF, Dominique Reymond, vous découvrirez dans les pages qui suivent le chapitre du livre consacré à la communication d'influence. Une précision avant de le lire : le copyright appartient aux PUF. Donc, jouez le jeu… Pour en savoir plus : www.puf.com n

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I. Stratégie d’influence : de quoi parle-t-on ?

1. La logique de l’influence

En général l’influence a mauvaise presse, assimilée le plus souvent à de la propa-gande, de la désinformation, ou de la manipulation, autant de termes sulfureux quirenvoient à la guerre froide. L’approche anglo-saxonne, qui nomme influence touteopération conduisant l’adversaire à prendre des décisions non conformes à ses inté-rêts, est également négative et limitative. Or l’influence peut aussi s’exercer dans unsens positif, à savoir ouvrir de nouvelles perspectives. « L’influence, c’est un moyend’amener celui auquel on s’adresse à envisager une autre vision des choses, à chan-ger son paradigme de pensée, à modifier ses fondamentaux », explique Alain Juillet,qui précise : « ce changement est produit par des éléments qu’on lui présente et quil’invitent à réfléchir. En somme, d’une certaine manière, plus on est intelligent, pluson est influençable. Parce que l’influence fait appel à la capacité d’analyse de l’audi-teur, qui doit faire le tri entre ce qu’il pense “habituellement” et les éléments nou-veaux qui lui sont soumis, dont il lui appartient de mesurer la validité. Toutargument solide qui lui est proposé peut ainsi le conduire à revoir son jugement,donc son positionnement. C’est à partir de là que s’enclenche le processus del’influence 1 ».

2. Les paramètres clés d’une stratégie d’influence

Une stratégie d’influence répond prioritairement à une volonté : conforter lesobservateurs que la stratégie suivie est pertinente, et éventuellement mener desactions de contre-influence face aux pressions et autres actions de désinformationvenues de l’extérieur. Sa mise en œuvre suppose une réflexion très en amont pouracquérir une capacité d’anticipation et une vision objective de l’environnement,permettant d’optimiser l’utilisation des outils de l’intelligence économique et decertains vecteurs de communication. Comme l’écrit François-Bernard Huyghe,l’influence apparaît comme une « stratégie indirecte visant à obtenir d’autrui unassentiment ou un comportement, soit par le prestige de son image, soit par uneforme quelconque de persuasion ou de “formatage” des critères de jugement, soit,enfin, par la médiation d’alliés ou de réseaux » 2. L’influence est d’autant plus prédo-minante qu’« elle est désormais au cœur du commerce international 3 ».

1. Communication & Influence, hors-série no 1, juin 2009 (téléchargeable à la rubrique Publications du sitewww.comes-communication.com).

2. Maîtres du faire croire, de la propagande à l’influence, Paris, Vuibert, 2008.3. Éric Delbecque et Christian Harbulot, La guerre économique, op. cit. ; voir aussi La guerre économique, Jean-

Marc Huissoud et Frédéric Munier, Paris, PUF, « Major », 2009.

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De la stratégie d’influence à la communication d’influence | 361

Aux antipodes de la communication classique, on ne parle ici ouvertement ni del’entreprise ni du cœur de métier (nous englobons sous le terme générique « entre-prise » les différentes structures, publiques ou privées, susceptibles d’engager unestratégie d’influence). Il ne s’agit plus de s’adresser directement au marché pour leconvaincre de l’excellence des produits proposés, mais d’attirer l’attention des relaisd’opinion et des parties prenantes (stakeholders) qui « font » l’image de l’entreprise.Comment ? En développant un discours récurrent, établissant en permanence unlien entre les valeurs que souhaite refléter l’entreprise, les traits d’identité qu’ellemet en avant, et les questions d’actualité. L’entreprise ne se trouve ainsi pas limitéeà son seul savoir-faire. Elle développe un discours cohérent, porteur de sens, appuyépar des repères. Elle apparaît comme une structure proactive et responsable. Elledevient de facto pour ses parties prenantes – en premier lieu les relais d’opinion –un interlocuteur privilégié. L’objectif visé par l’entreprise est de s’imposer peu à peucomme LA source de référence dans la sphère d’activité qui est la sienne.

3. Les confusions à éviter

Avant d’aborder les paramètres autour desquels se structure une communicationd’influence, il est utile de lever quelques ambiguïtés. L’influence devient furieuse-ment « tendance » ces derniers temps, aussi trouve-t-on tout et n’importe quoi sousce vocable. Les trois erreurs les plus courantes consistent à confondre l’influenceavec le lobbying, les RP (relations presse et relations publiques) et les technologies.

L’influence accompagne la ligne stratégique de la structure concernée. En ce sens,les moyens mis en œuvre sous ce terme précèdent et accompagnent le lobbying. Lacommunication d’influence constitue le socle sur lequel peut se développer le lob-bying, elle ne se confond pas avec lui 1. Comme nous le verrons plus loin, l’influences’adapte aux nouvelles formes de pouvoir, celui-ci n’étant plus pyramidal commeautrefois, mais diffus et éclaté. Pour ce qui est des RP, nombre de groupes decommunication ont repris le mot « influence » pour ripoliner leur façade et vendretout bêtement leur carnet d’adresses, leurs prestations de RP sous un nouveauvocable. Enfin, la confusion entre influence et technologies est celle du fond et dela forme. Rappelons que l’influence au sens où nous l’entendons aujourd’hui estassimilable à un fluide qui se glisse à travers des canaux. Le fétichisme technologiquede notre époque, qui vise à faire croire que la machine peut tout, ne doit pas nousfaire oublier les racines néoplatoniciennes du mot « influence », venu aux grandspenseurs de la Renaissance italienne via le philosophe byzantin Georges GémistePléthon 2... Gardons toujours à l’esprit que l’influence, c’est avant tout un fluide,un rayonnement, donc un contenu, pas un contenant.

1. « Lobbying et communication d’influence », Fusions & Acquisitions magazine, septembre 2010.2. François Masai, Pléthon et le platonisme de Mistra, Paris, Les Belles Lettres, épuisé.

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II. L’influence : redonner du sens

1. Penser la communication autrement

Confrontées à une crise majeure de confiance, les directions sont de factoconduites à de sévères remises en question face à un marché désorienté, en quêtede sens et de repères. Cette crise des créances est aussi une crise des croyances queles managers, les analystes financiers ou les professionnels de la communicationdoivent impérativement prendre en compte. On sait également que toute criseconstitue en même temps une occasion formidable de repenser sa manière d’êtreet d’agir, tant sur le plan de la stratégie de développement que sur celui de laprésentation de l’activité et des résultats. Dès lors, c’est essentiellement sur l’image,les valeurs et surtout l’identité que s’opère la différence. Une différence qui s’imposecomme un facteur essentiel, par exemple dans les scénarii de fusions et acquisitionsdont la multiplication est caractéristique de ces périodes de vaste chamboulement.

Pour répondre à ces exigences, les entreprises doivent prioritairement revoir leurcommunication, essentiellement sur le fond. Ce qui implique de renoncer aux dis-cours convenus. Rompre avec les clichés et la pensée dite « correcte » : tel est lepoint nodal où les stratégies d’influence sont à même de bouleverser la donne etde conférer un net avantage concurrentiel aux structures suffisamment audacieusespour les mettre en œuvre. Car une communication influente est d’abord une com-munication « différenciante ».

2. Plaidoyer pour un retour au réel

La crise agit aujourd’hui comme un révélateur des maux structurels et profondsqui minent notre société. Certes, la publicité est utile et a son rôle à jouer endirection du marché et du grand public. Mais cette logique publicitaire qui vend unmonde lisse, aseptisé, idéal a de moins en moins lieu d’être. Mezzo voce, chacuns’accorde à reconnaître que les discours des agences de communication sont à sensunique. Le ton est convenu, le contenu éditorial quasi identique et d’une banalitéaffligeante. Résultat : les messages passent et lassent.

La crise a provoqué un retour au réel. Pour valoriser réellement l’entreprise,d’autres formes de communication sont envisageables. Être crédible suppose quel’on ait le courage d’affirmer sa différence et de rompre avec la langue de bois,donc de donner du sens et des repères aux messages délivrés. Ce qui implique unbasculement de perspective. Et d’abord réapprendre à penser et agir sur le longterme. Comme l’explique Alain Juillet, « la véritable influence, celle qui organise,structure, anticipe, exige de penser et d’agir dans la durée. Parce que l’on ne modifiepas un schéma de pensée d’une manière instantanée. Nous raisonnons aujourd’hui

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de manière pavlovienne, avec des réactions épidermiques à très court terme, demanière instantanée devrions-nous dire. Or pour agir intelligemment sur le longterme, il faut dépasser cet état pour aller vers l’analyse construite 1 ».

3. S’adresser à ceux qui font l’opinion

La montée en puissance des stratégies d’influence va constituer le corollaire natu-rel d’un double mouvement qui s’opère dans nos sociétés : la multiplication desincertitudes et le changement de nature du pouvoir, qu’ont parfaitement analysésFrançois-Bernard Huyghe et Ludovic François 2. Avant, le pouvoir venait d’en haut,émanant d’une autorité qui donnait des ordres retombant ensuite en cascade sur lesdifférents niveaux hiérarchiques. Aujourd’hui, comme l’avait pressenti le sociologueMichel Foucault, le pouvoir est éclaté en des myriades de micropouvoirs, quireçoivent, traitent et répercutent des messages vers d’autres cibles, d’autres relais,mais aussi vers le marché et l’opinion publique. Ce sont ces « faiseurs d’opinion »que vise la communication d’influence.

De fait, face à l’exacerbation de la concurrence, la question clé est de savoircomment l’entreprise est perçue. Dans le monde sans cesse mouvant qui est lenôtre, rien n’est à la fois plus fort et plus fragile que l’image. Or cette image est larésultante du traitement opéré par ces relais d’opinion que nous venons d’évoquer.Pierre angulaire de l’appréciation portée sur l’entreprise, ils déterminent la percep-tion que le marché a de l’entreprise et de ses produits. L’entreprise se doit donc deproposer à ceux qui « font l’opinion » un profil favorable à travers un certainnombre de thématiques, de messages et de vecteurs, pour les convaincre de relayerce positionnement. Ainsi, pour Alain Juillet, « la clé de la réussite est de parvenir àdifférencier la structure en la valorisant. Il ne s’agit plus de communiquer sur leproduit, mais d’acquérir une identité forte à travers un discours récurrent, haut degamme, différenciant et structuré. Là, on est typiquement dans l’influence. Alorsque quand on évolue dans une communication sur le produit, l’auditeur n’y croitpas, d’abord parce que celui qui parle ne peut être à la fois juge et partie ». Et ilajoute : « Toute entité vivante, pour exister, doit présenter une différence intrin-sèque qui fait qu’on ne la confond pas avec les autres. L’individu n’existe que parses caractères différenciants. Sinon, il est fondu dans un agrégat qui, lui-même, sedifférencie des autres agrégats... Mais, qu’il s’agisse de l’individu ou de l’entreprise,l’un comme l’autre doivent se différencier, et non tomber dans le piège de l’unifor-misation 3. »

1. Communication & Influence, art. cit.2. Contre-pouvoirs, de la société d’autorité à la démocratie d’influence, Paris, Ellipses, 2009.3. Ibid.

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III. Identité puissante, communication influente

1. L’influence ? D’abord une question d’état d’esprit

La mise en valeur de l’identité constitue le « cœur nucléaire » d’une stratégied’influence. À condition toutefois de bien positionner l’action menée. Car êtreinfluent, c’est faire en sorte que ceux qui observent, jaugent et jugent la structureconcernée l’identifient comme étant différente, solide, authentique, cohérente etporteuse de projet. Comment ? Par son aptitude à développer un discours originalet structuré, la faisant apparaître comme leader dans son segment d’activité. Etsurtout comme un interlocuteur déclinant des messages dont le contenu présenteun intérêt digne d’être relayé.

Mettre en avant son identité grâce à un discours haut de gamme permet de sedistinguer des concurrents, de s’imposer face à un repreneur ou de donner unnouvel élan après une fusion. Ce qui exige une certaine force de caractère de la partdu manager. Il lui faut accepter d’être différent des autres s’il veut enfin être lui-même. Un positionnement subtil qui génère à terme un retour sur investissementnon négligeable. « Actif important de son patrimoine immatériel, la marque faitpartie du capital de l’entreprise car elle est une valeur marchande correspondant àl’image que l’on veut donner sur le plan national ou international. Elle est un outild’influence qui assure la pérennité de l’entreprise en lui permettant de développerdes actions de franchise, de licences et d’alliances qui sont autant de projectionsvers des opportunités et des partenariats 1 », explique encore Alain Juillet. C’est laraison pour laquelle les universitaires anglo-saxons estiment que l’influence rejointen partie la sphère complexe du branding de très haut niveau, le high end branding.

2. Concrètement, se positionner au-delà du savoir-faire

Afficher une spécificité concerne donc moins le savoir-faire de la structure cliente– que tout le monde a déjà en tête – que la mise en avant de l’identité que l’onsouhaite faire percevoir. À côté des instruments appuyant directement la démarchecommerciale – publicité, marketing direct... –, il s’agit de présenter d’autres vecteurs,donnant une image de l’entreprise qui fasse d’elle un référent. Celle-ci doit conférerdu sens à son action. Être crédible exige d’avoir du fond. Une des particularités del’identité est de faire surgir l’authenticité. On accorde sa confiance à une entité quiprouve qu’elle sait où elle va, qui ne se montre pas enfermée dans ses probléma-tiques internes, mais qui à l’inverse offre une vision claire de son devenir. C’est

1. Défense, revue de l’IHEDN, no 140, juillet-août 2009.

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cette perception qu’elle doit faire partager à l’ensemble de ceux qui suivent sesactivités, à travers des messages réguliers et structurés.

En fait, ce qui prime ici, c’est l’élaboration d’un contenu éditorial différent, dehaute tenue, capable de soutenir, expliquer, conforter et surtout valoriser l’identitéque la direction a choisi de revendiquer au cœur de sa stratégie. La communicationn’est alors pas conçue comme un simple outil d’exécution, mais comme un brasarmé capable de transposer dans les faits, avec une efficacité maximale, les objectifsassignés par la direction générale. C’est là qu’il faut faire s’ajointer la stratégie d’influ-ence et sa déclinaison pratique, la communication d’influence.

3. La force des idées : de la stratégie d’influence à la communication d’influence

Aussi loin que l’on remonte dans les sociétés humaines, les idées ont toujoursjoué un rôle structurant pour séduire ou effrayer, rassembler ou exclure. Qu’ellesprennent des traits mythologiques ou théologiques, qu’elles se parent des atoursdialectiques chers à la politique ou à la sociologie, les idées sont par essence liéesaux enjeux de puissance. Dans les rivalités ou les conflits, économiques ou guerriers,culturels ou sociétaux, les idées jouent un rôle moteur. Comme le constatait Renan,les idées mènent le monde.

C’est là un enjeu clé, puisque les idées définissent le cadre immatériel dans lequelse jouent les affrontements et les rivalités, les alliances et les synergies. La guerreéconomique est un conflit d’intérêts. Or ces intérêts sont commandés non seule-ment par des paramètres d’ordre économique et financier, mais encore par desidées, des « manières-de-voir-le-monde ». À nous de savoir si nous voulons que cesparamètres nous soient imposés de l’extérieur ou si nous entendons reprendre lamain pour que notre discours soit en adéquation avec les buts poursuivis 1. Lesidées sont le moteur de l’influence. Appuyées sur des sources sérieuses, mises enperspective et orientées, elles vont influer très en amont sur la perception desrelais d’opinion.

IV. Communication d’influence : cibles, ROI, finance et Goodwill

1. Cibles

Le but d’une stratégie d’influence n’est pas de s’adresser à la Terre entière, maisde se déployer en direction de cibles bien précises. On ne communique pas directe-

1. « Stratégies d’influence, le rôle clé des idées », Défense, no 132, mars-avril 2008.

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Convergence IE - Marketing Communication

Direction générale

Marketing

Marché

Produit

Placement

Prix

Promotion

Communication

Branding

Image

1. Schéma classique

Premier niveau de perceptionMarché

© Racouchot/Vandomme 2011

ment en direction du marché ou de l’opinion publique, mais vers l’entourage del’entreprise, à savoir :

— les relais d’opinion et d’influence (journalistes, experts, chercheurs, observa-teurs, analystes économiques et financiers, etc.) ;

— les décideurs publics et privés qui gravitent dans son environnement (élus, col-lectivités, chambres de commerce ou des métiers, fédérations professionnelles, etc.) ;

— les salariés, clients, partenaires et sous-traitants, adhérant à une image positivede l’entreprise, qui donne du sens à son action et valorise ceux qui travaillentpour elle.

Ce sont eux qui, in fine, vont modeler la perception que le marché aura de l’entre-prise et de ses produits. Pour gagner la guerre économique, il ne suffit pas d’êtretechniquement le meilleur. Il faut un discours de qualité, soigné, bien documenté,charpenté, cohérent et porteur de sens, relayé par des dirigeants solides, ayant lecourage d’assumer leur différence pour revendiquer une identité propre. Une subtilealchimie, délicate à mettre en œuvre, mais à même de résoudre certains des pro-blèmes générés par la crise actuelle.

2. ROI : les retours sur investissements

En matière de communication, l’engagement d’une communication d’influencepermet de :

— se montrer proactif (à la différence de ses concurrents, l’entreprise observeles réalités du monde bien au-delà de sa seule expertise technique) ;

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De la stratégie d’influence à la communication d’influence | 367

— inspirer la confiance (face à la crise, l’entreprise veille pour optimiser sadémarche stratégique) ;

— susciter l’intérêt (l’entreprise préempte des champs nouveaux de communica-tion, ce qui intéresse nécessairement les relais d’opinion) ;

— renforcer son identité, afficher les valeurs « maison » (donc se différencierdes concurrents, pour que l’entreprise apparaisse naturellement comme leader d’opi-nion dans son secteur) ;

— conforter sa notoriété (l’entreprise développe une stratégie qui s’inscrit sur lelong terme et se veut réaliste, prenant en compte les nouveaux enjeux dumanagement).

Dans le schéma classique, l’entreprise s’adresse directement au marché. Dansl’approche influence, les messages sont destinés aux relais d’opinion. Ceux-ci lesreçoivent, les analysent, puis ils interagissent entre eux, échangent, reformulent cesmessages. Ils vont ainsi contribuer à forger une identité de l’entreprise qui seraprojetée vers le marché. L’influence entre donc dans le cadre des stratégies indi-rectes et transverses. Les messages ont d’autant plus de poids qu’ils émanent desources reconnues et indépendantes, et non directement de l’entreprise, qui ne peutainsi être accusée par le marché d’être à la fois juge et partie.

Convergence IE - Marketing Communication

Direction générale

Intelligence économiqueMarketing

MarchéMarché

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Intelligence économique et organisations

Gestion information et connaissances

Protection du patrimoine informationnel

Influence et contre-influence

Relais d'opinion

© Racouchot/Vandomme 2011

IdentitéIdentité

2. L'identité au cœur de la stratégie d'influence

Premier niveau de perception Perception dans laprofondeur et sur lelong terme

Marché Identité

Au-delà du simple plan communicationnel, d’autres ROI peuvent être envisagésen fonction de la ligne stratégique adoptée ; sur le plan commercial, il s’agit :

— d’entretenir le lien permanent avec les clients ;— de donner aux forces de vente une occasion de contact et un sujet de

dialogue.

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Sur le plan des ressources humaines, il s’agit :— d’attirer les jeunes talents;— de conforter l’adhésion à la culture d’entreprise.

3. Influence et valorisation du capital immatériel

Enfin, sur le plan financier, la démarche proposée vise à toucher favorablementceux qui évaluent l’entreprise. Pour le faire, ils se fondent en grande partie sur lesanalyses produites par les relais d’opinion. Engager cette méthode revient à optimi-ser le concept de « Goodwill », particulièrement sensible lors d’un transfert de pro-priété. C’est l’augmentation du capital immatériel (potentiel et non encore révélé)de l’entreprise qui est ici l’objectif, en termes de capacités de développement,d’ouverture d’esprit, de faculté d’adaptation, de rayonnement, d’intelligence, deculture, de qualité de recrutement, d’image...

Que ce soit pour engager de nouvelles synergies, pour rechercher et ouvrir denouveaux marchés ou pour élargir ceux déjà existants, pour des questions de maî-trise des coûts ou de création de valeur actionnariale, une communication d’influ-ence génère un fort effet de levier, permettant d’optimiser le capital intangible del’entreprise. C’est ce changement de paradigme que les directions doivent appréhen-der en profondeur, afin d’adapter leur stratégie de communication aux nouveauxcapteurs et aux nouveaux paramètres d’évaluation du potentiel des entreprises.

V. Communication d’influence, les sept piliers de la sagesse

L’influence constitue un outil clé pour soutenir la ligne stratégique de l’entreprise.Ce qui suppose bien sûr que celle-ci existe, avec une volonté et un cap clairementaffichés. Les sept piliers de la sagesse pour réussir l’engagement pratique d’unecommunication d’influence peuvent se résumer aux paramètres suivants.

• Cibler les parties prenantes et les relais d’opinion. Il ne s’agit pas ici des’adresser à la Terre entière, mais prioritairement à ceux qui font l’image et lanotoriété de la structure concernée. D’où la nécessité d’un contenu rédactionnel àforte valeur ajoutée, s’adressant à des cibles capables d’analyser et de répercuter leséléments proposés qui leur semblent dignes d’intérêt.

• Privilégier l’écrit et l’information de qualité. La force de l’écrit demeure,envers et contre tout. Internet n’a pas tué l’écrit, au contraire. Des vecteurs bienrédigés, ciblés et de qualité, véhiculant des idées et concepts clairs et forts, s’inscri-vant dans le long terme, s’imposent comme des repères distillant du sens, attirantainsi l’attention des relais d’opinion. Ceux-ci sont par définition des entités réfléchis-santes (aux deux sens du terme, pensée et miroir), donc susceptibles d’être récep-tives à des messages réguliers et dignes d’intérêt. Des sources solides et bienréférencées font toujours autorité, et le numérique facilite leur diffusion. Il suffit de

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voir comment, consciemment ou non, les réseaux sociaux répercutent ces vecteurs.Dans la mise en œuvre de leurs stratégies d’influence, les Anglo-Saxons suiventl’adage selon lequel les paroles s’en vont, mais les écrits restent. C’est pourquoi ilsfont précéder – ou accompagnent – leur développement par une intense préparationdes esprits, via toutes sortes de publications de qualité.

• Affirmer son identité. Si la publicité permet d’être perçu par le grand publicet le marketing de mieux cerner les attentes du marché visé afin d’optimiser lesobjectifs commerciaux, l’influence, elle, implique de jouer sur d’autres registres, enamont des processus de décision. Un discours récurrent, structuré, bien informé etorienté, permet de se distinguer des concurrents. Pour susciter l’intérêt, il faut accep-ter de ne parler ni de son cœur de métier ni de communication produit. Ce sontles traits d’identité de la structure concernée qu’il s’agit de mettre en valeur. Lacommunication n’est pas ici conçue comme un simple outil d’exécution. Elle doitêtre capable de donner du sens aux objectifs assignés par la direction générale.

• Avoir l’intelligence des situations. Engager une communication d’influenceest avant tout une question d’état d’esprit. La direction doit montrer sa volonté deprésenter une authentique spécificité au regard de ceux qui « font l’opinion ». Unecommunication d’influence exige de l’audace, de la curiosité et de l’intelligence (ausens latin du mot comme au sens anglo-saxon). Ce qui implique d’avoir une visionsynoptique de son environnement et, parallèlement, d’établir un aller-retour perma-nent entre l’identité que l’on veut mettre en valeur et les éléments recueillis dansl’actualité qui confortent ce positionnement. D’où une veille permanente en matièred’idées et de publications émergentes.

• Travailler sur le long terme. Dans un monde où tout est instantanéité, il fautse positionner à rebours et inscrire son action sur la durée. Les parties prenantes etles relais d’opinion identifient alors la structure concernée comme développant unestratégie différente, solide, authentique, cohérente, porteuse de sens et donc promet-teuse pour l’avenir. À partir de ce socle qui rend crédible leur action, les communi-cants et autres lobbyistes peuvent déployer leurs talents auprès de leurs cibles etparties prenantes.

• Répondre à la quête de sens. À côté des instruments ayant vocation àappuyer directement la démarche commerciale – publicité, marketing direct... – ils’agit de présenter d’autres vecteurs, ayant pour but de donner une image valorisantede la structure concernée, pour conférer du sens à son action. Être crédible exiged’avoir du fond. On accorde sa confiance à une entité qui prouve qu’elle sait oùelle va. D’abord parce qu’elle a une perception claire et à 360° de sa situation et deson évolution. C’est cette perception qu’elle doit faire partager à ceux qui suiventses activités, en leur adressant des signaux compréhensibles et, surtout, en leurfournissant des repères à travers des messages réguliers et charpentés.

• Mettre en œuvre des vecteurs prouvant l’authenticité de la démarche.Une fois l’option stratégique clairement définie, on intègre concrètement les actionsd’influence dans la communication de la structure cliente. Vient alors le choix dessupports à engager : newsletters, notes, revues, cahiers paraissant à intervalles réguliers,ou encore rapports, discours, articles, colloques, offrant l’opportunité d’opérations

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de RP... grâce à un contenu éditorial de haute tenue, capable de soutenir, expliquer etsurtout valoriser l’identité que la direction a choisi de placer au cœur de sa stratégie.

Ces sept axes constituent l’architectonique de méthodes désormais bien cadréesqui permettent d’obtenir des résultats clairs, tangibles, utiles tant pour la directionstratégique que pour ses RH, communicants et lobbyistes.

Qu’est-ce qu’être influent sinon détenir la capacité à peser sur l’évolution dessituations ? L’influence n’est pas l’illusion. Elle en est même l’antithèse. Elle est unemanifestation de la puissance. Elle plonge ses racines dans une certaine approchedu réel, elle se vit à travers une manière d’être-au-monde. Le cœur d’une stratégied’influence digne de ce nom réside très clairement en une identité finement ciselée,puis nettement assumée. Une succession de « coups médiatiques », la gestion habiled’un carnet d’adresses, la mise en œuvre de vecteurs audacieux ne valent que s’ilssont sous-tendus par une ligne stratégique claire, fruit de la réflexion engagée surl’identité. Autant dire qu’une stratégie d’influence implique un fort travail de clarifi-cation en amont des processus de décision, au niveau de la direction générale oude la direction de la stratégie. Une telle démarche demande tout à la fois de lalucidité et du courage. Car revendiquer une identité propre exige que l’on accepted’être différent des autres, de choisir ses valeurs propres, d’articuler ses idées selonun mode correspondant à une logique intime et authentique. Après des décenniesde superficialité revient le temps du structuré et du profond. En temps de crise, onveut du solide. Et l’on perçoit aujourd’hui les prémices de ce retournement.

L’influence mérite d’être pensée à l’image d’un arbre. Voir ses branches se tendrevers le ciel ne doit pas faire oublier le travail effectué par les racines dans lesentrailles de la terre. Si elle veut être forte et cohérente, une stratégie d’influencedoit se déployer à partir d’une réflexion sur l’identité de la structure concernée, etêtre étayée par un discours haut de gamme. L’influence ne peut utilement porterses fruits que si elle est à même de se répercuter à travers des messages structurés,logiques, harmonieux, prouvant la capacité de la direction à voir loin et sur lelong terme. Top managers, communicants, stratèges civils et militaires, experts etuniversitaires doivent croiser leurs savoir-faire. Dans un monde en réseau, l’échangedes connaissances, la capacité à s’adapter aux nouvelles configurations et la volontéd’affirmer son identité propre constituent des clés maîtresses du succès.

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