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Pr. Idriss FAÏK - 1 - « Le contrat est la constatation de l'accord de deux ou plusieurs personnes qui se sont concertées pour former entre elles une obligation, ou pour étendre ou modifier une obligation préexistante ». Le contrat est essentiellement définit comme étant une convention génératrice d'obligations. Dans tous les cas de figure, le contrat suppose un accord de volontés entre deux personnes au moins. Ces personnes les parties sont seules liées par cet accord. Elles sont les seules à en recueillir le bénéfice ou en supporter la charge, alors que celles qui n'y ont pas participé, ne peuvent en profiter, ni en souffrir. Cette règle est l'émanation directe du principe dit de l'effet relatif des contrats, principe au terme duquel, un tel acte est dépourvu d'effets, au moins d'effets directs à l'égard des tiers. Le droit français distingue entre le contrat et la convention : - La convention : est tout accord de volontés tendant à produire un effet juridique, tel que créer, modifier, transférer ou éteindre une obligation ; - Le contrat : désigne la convention qui "crée" une obligation ; Tout contrat est une convention, mais toute convention n'est pas un contrat. Les contrats sont soit commerciaux, soit civils, selon qu'ils constituent ou non des actes de commerce. Certains contrats : engagements de payer une lettre de change, contrat de société anonyme … constituent toujours des actes de commerce. Les contrats à titre gratuit, constituent au contraire, des actes civils. Le principe de la liberté contractuelle : Les relations contractuelles entre individus doivent être abandonnées à leur libre volonté et le législateur ne doit intervenir que le moins possible. Une personne ne pourra être contrainte de s'engager si elle ne le souhaite pas. 1. Le principe du consensualisme : La volonté d'une personne suffit à l'engager. Le contrat est valable du seul échange des consentements sans qu'aucune condition de forme ne soit exigée. 2. Le principe de la force obligatoire du contrat : Un individu qui s'est librement engagé, ne peut se délier de cet engagement : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi ». (article 230 D.O.C.). - Remarque : L'autonomie de la volonté peut aboutir à des conséquences injustes et inefficaces; car si l'autonomie de la volonté repose sur la liberté et l'égalité des individus, cette égalité et liberté sont théoriques vu que les contractants n'ont pas la même force économique et le contractant le plus puissant peut dicter sa loi au plus faible. De plus la volonté humaine n'est pas sans faille : même sans être incapable, un individu clairvoyant peut s'engager sans mesurer toutes les conséquences de cet engagement, on sans pouvoir prévoir de brusques bouleversements des circonstances économiques. L'autonomie de la volonté peut être conforme à l'intérêt des contractants, mais heurter l'intérêt général. L'Etat qui a un rôle croissant dans les relations économiques, ne peut abandonner le contrat à la seule volonté individuelle. I : LES CONTRATS ET LES CONVENTIONS

Contrats Et Conventions

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Page 1: Contrats Et Conventions

Pr. Idriss FAÏK - 1 -

« Le contrat est la constatation de l'accord de deux ou plusieurs personnes qui se sont concertées pour former entre elles une obligation, ou pour étendre ou modifier une obligation préexistante ».

Le contrat est essentiellement définit comme étant une convention génératrice d'obligations. Dans tous les cas de figure, le contrat suppose un accord de volontés entre deux personnes au moins. Ces personnes – les parties – sont seules liées par cet accord. Elles sont les seules à en recueillir le bénéfice ou en supporter la charge, alors que celles qui n'y ont pas participé, ne peuvent en profiter, ni en souffrir. Cette règle est l'émanation directe du principe dit de l'effet relatif des contrats, principe au terme duquel, un tel acte est dépourvu d'effets, au moins d'effets directs à l'égard des tiers.

Le droit français distingue entre le contrat et la convention : - La convention : est tout accord de volontés tendant à produire un effet juridique, tel que créer, modifier, transférer ou éteindre une obligation ;

- Le contrat : désigne la convention qui "crée" une obligation ; Tout contrat est une convention, mais toute convention n'est pas un contrat. Les contrats sont soit commerciaux, soit civils, selon qu'ils constituent ou non des actes

de commerce. Certains contrats : engagements de payer une lettre de change, contrat de société

anonyme … constituent toujours des actes de commerce. Les contrats à titre gratuit, constituent au contraire, des actes civils.

Le principe de la liberté contractuelle : Les relations contractuelles entre individus doivent être abandonnées à leur libre

volonté et le législateur ne doit intervenir que le moins possible. Une personne ne pourra être contrainte de s'engager si elle ne le souhaite pas.

1. Le principe du consensualisme :

La volonté d'une personne suffit à l'engager. Le contrat est valable du seul échange des consentements sans qu'aucune condition de forme ne soit exigée.

2. Le principe de la force obligatoire du contrat :

Un individu qui s'est librement engagé, ne peut se délier de cet engagement : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi ». (article 230 D.O.C.).

- Remarque :

L'autonomie de la volonté peut aboutir à des conséquences injustes et inefficaces; car si l'autonomie de la volonté repose sur la liberté et l'égalité des individus, cette égalité et liberté sont théoriques vu que les contractants n'ont pas la même force économique et le contractant le plus puissant peut dicter sa loi au plus faible. De plus la volonté humaine n'est pas sans faille : même sans être incapable, un individu clairvoyant peut s'engager sans mesurer toutes les conséquences de cet engagement, on sans pouvoir prévoir de brusques bouleversements des circonstances économiques.

L'autonomie de la volonté peut être conforme à l'intérêt des contractants, mais heurter l'intérêt général. L'Etat qui a un rôle croissant dans les relations économiques, ne peut abandonner le contrat à la seule volonté individuelle.

I : LES CONTRATS ET LES CONVENTIONS

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I. Les différents types de contrats et conventions :

1. Contrat synallagmatique et contrat unilatéral :

- Le contrat est synallagmatique ou bilatéral, lorsque les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres (exemple : le contrat de vente) ; - Le contrat est unilatéral lorsqu'une on plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que de la part de ces dernières, il y ait d'engagement (exemple : la donation).

2. Contrat commutatif et contrat aléatoire : - Le contrat est commutatif lorsque chacune des parties s'engage à donner ou à faire une chose qui est regardée comme équivalent de ce qu'on lui donne, ou de ce qu'on fait pour elle (exemple : le contrat de vente) ; - Le contrat est aléatoire lorsque l'équivalent consiste dans la chance de gain ou de perte pour chacune des parties, d'après un événement incertain, c'est à dire lorsque l'importance des prestations de l'une au moins des parties n'est pas connue au moment de la formation du contrat. (exemple : la rente viagère qui est un contrat par lequel l'acheteur s'engage à verser au vendeur une rente jusqu'à sa mort).

3. Contrat à titre gratuit et contrat à titre onéreux : - Le contrat à titre gratuit est celui dans lequel, l'une des parties procure à l'autre un avantage purement gratuit (exemple : la donation ou mandat non rémunéré) ; Le contrat à titre onéreux est celui qui assujetti chacune des parties à donner ou à faire quelque chose. Cette définition est proche de celle du contrat synallagmatique, mais les deux catégories ne coïncident pas toujours : un contrat peut être synallagmatique et à titre gratuit (bail sans stipulation de loyer).

4. Contrat nommé et contrat innomé : - Le contrat nommé est celui qui est qualifié et réglementé par la loi (exemple : vente, bail, travail …) ; - Le contrat innomé : ne fait l'objet d'aucun régime légal spécifique.

5. Contrat à exécution instantanée et contrat à exécution successive - Le contrat à exécution instantanée est le contrat dont les obligations sont susceptibles d'être exécutées en un seul instant par exemple : la vente qui est en principe à exécution instantanée, le transfert de propriété et le paiement du prix pouvant avoir lieu en un seul moment ; - Le contrat est à exécution successive, lorsque les obligations d'une au moins des parties s'échelonne dans le temps, par exemple : le contrat de travail et le contrat de bail.

6. Contrat consensuel, contrat réel et contrat solennel : - En vertu du principe du consensualisme, découlant de l'autonomie de volonté, le contrat consensuel se forme par la seule rencontre des volontés (exemple : la vente) ; - Le contrat réel ne se forme que par la remise de la chose objet du contrat (exemple : le dépôt, le gage, le prêt …) ; - Le contrat solennel est subordonné au respect d'une formalité, généralement la rédaction d'un écrit, acte authentique ou sous seing privé.

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7. Contrat simple et contrat conjonctif : - Le contrat simple : est constitué de deux parties composées chacune d'une seule personne (exemple : la vente conclue entre un seul vendeur et un seul acheteur) ; - Le contrat conjonctif : est le contrat dans lequel plusieurs personnes sont rassemblées au sein d'une partie plurale. (Exemple : co-entreprise, co-assurance, pool bancaire ...). L'intérêt principal de la distinction ici est de faire apparaître une obligation de collaboration et une obligation de ne pas se nuire au sein de la partie plurale. Ainsi, par exemple, les co-entrepreneurs sont tenus de s'informer mutuellement de l'état d'avancement de leurs travaux respectifs, voire de s'entraider pour assurer la meilleure exécution au maître de l'ouvrage. De même, chaque co-auteur d'une œuvre de collaboration, ne doit pas nuire aux autres, par exemple en ne respectant pas le délai d'exécution.

8. Contrat d'adhésion et contrat de gré à gré : - Le contrat est d'adhésion lorsque les stipulations essentielles qu'il comporte ont été

imposées par l'une des parties ou rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instructions, et qu'elles ne pouvaient être "librement discutées" (exemples : le contrat de transport passé avec la ONCF ou la RADEEMA …) ;

- Le contrat de gré à gré est à l'inverse, un contrat ou chacune des parties peut négocier ses clauses.

9. Distinction entre les contrats administratifs et ceux de droit commun : a. Détermination par la loi :

Une catégorie de contrat peut être qualifiée d'administratif par la loi. C'est le cas des marchés publics, des contrats de partenariat ainsi que des contrats d'occupation du

domaine public.

b. Détermination par la jurisprudence : La jurisprudence utilise deux critères cumulatifs: le critère organique et le critère

matériel. Le critère organique :

Le contrat est en principe administratif s'il contient au moins une personne publique partie au contrat.

Pour les contrats entre deux personnes publiques, ils ont en principe un caractère administratif.

A contrario, le contrat conclu entre deux personnes privées est en principe de droit

privé, même si l'une des personnes privées est chargée d'un service public. Mais le juge

administratif a appliqué les notions de mandat et de représentation pour admettre que ce type de contrat pouvait être administratif dès lors qu'une des parties agit «pour le compte d'une personne publique». En fait l'acception de ces contrats signés entre personnes privées comme contrats administratifs constitue une exception au principe qui veut que ces contrats soient privés. Ainsi ces contrats peuvent être administratifs si l'un des co contractants a agi au nom et pour le compte d'une personne morale de droit public ou s'il a été mandaté par celle-ci. Le critère matériel : Le critère matériel se base sur deux critères alternatifs. - Les clauses ou le régime :

Un contrat peut être administratif si ses clauses sont exorbitantes du droit commun ou bien si son régime est exorbitant du droit commun.

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Ce que les clauses exorbitantes veulent dire : Définition par effet : elles permettent de « conférer aux parties des droits ou de mettre à leur charge des obligations étrangères par leur nature à ceux qui sont librement consentis par quiconque dans le cadre des lois civiles et commerciales». Définition par contenu:

1- La possibilité pour l'administration contractante de résilier le contrat ; 2- La possibilité pour l'administration contractante de diriger, surveiller ou contrôler l'exécution du contrat. « Coopérative agricole » ; 3- La possibilité pour le contractant avec l'administration de prélever directement des taxes. Mais ce n'est pas le cas si c'est l'administration qui le fait pour elle.

En guise de conclusion, notant ces quelques retournements de situation : L'objet :

Un contrat peut être administratif, s'il est relatif à l'organisation et à l'exécution d'un service public .

C'est le cas pour : - Les contrats de délégation de service public ; - Les contrats d'engagement de personnel par une personne publique exerçant

un service public administratif ; - les contrats conclus avec les usagers des services publics administratifs.

Les contrats conclus pour la réalisation de travaux ou ouvrages d'art routiers sont toujours administratifs même s'ils sont conclus entre deux personnes privées.

II. Les parties des conventions et contrats :

La loi contractuelle n'est le plus souvent qu'un règlement particulier au petit nombre de ceux qui l'ont souscrit. Ce n'est que très exceptionnellement qu'on la voit, comme la loi étatique, rayonner, au-delà de la personne de ses auteurs ; on parle alors de contrat collectif. L'exemple le plus frappant est la convention collective de travail : Elle lie non seulement les organisations (patronales et ouvrières) qui l'ont signée, mais aussi, chacun en son particulier, les membres de ces organisations, car ses clauses seront de plein droit applicables à tous les contrats individuels de travail conclus par eux.

Si en thèse générale, pour avoir la qualité de partie, il faut être l'auteur de l'une des déclarations de volonté qui concourent à former le contrat, cette règle peut se trouver modifiée soit par l'institution de la représentation (sous section I), soit par les incidences du droit successoral ou même familial (sous section II). Par l'effet de la représentation, les parties véritables pourront ne plus se trouver dans le cercle de ceux qui ont émis les volontés contractuelles. Du fait du droit successoral ou familial, il semble que, par delà l'individu, ce soit une chaîne d'individus successifs, voire un groupe actuel d'individus, qui ait contracté.

Section I : La représentation :

La représentation est un mécanisme par lequel un individu (représentant) passe un contrat pour le compte d'un autre individu (représenté), en la personne de qui naissent les droits et les obligations.

Paragraphe I- Les conditions de la représentation :

Deux conditions, l'une juridique, l'autre psychologique sont nécessaires : le pouvoir et la volonté du représentant (la volonté du représenté n’est pas nécessaire, elle n’est qu’une source possible, mais non la seule du pouvoir.)

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A- Le pouvoir : C’est l’élément juridique extérieur qui donne effet à la volonté du représentant sur le

patrimoine du représenté. Le représentant peut avoir reçu son pouvoir, soit de la loi, soit d’un contrat (mandat) passé, précisément à cette fin, entre le représenté et lui.

B- La volonté du représentant :

Il n’y a de représentation que si le représentant a eu l'intention d'agir pour le compte du représenté.

Paragraphe II- Les effets de la représentation :

La représentation sera immédiate (A) ou médiate (B), suivant que le représentant a agi au nom du représenté ou en son nom personnel.

A- La représentation immédiate (parfaite) :

C'est l'hypothèse ordinaire, celle du mandat. Les effets de la représentation sont complets, ils tiennent en deux propositions :

La loi contractuelle est inapplicable au représentant ;

La loi contractuelle est applicable au représenté ; En d'autres termes, les droits et les obligations crées par le contrat, naissent

immédiatement en la personne du représenté, sans que le représentant en soit touché. Le représenté devient créancier ou débiteur dès la conclusion du contrat. C'est lui qui

est véritablement partie. Une réserve doit être faite, cependant, pour le cas ou la loi contractuelle n'aurait pas été

élaborée dans les limites du pouvoir conféré au représentant. En ce cas, le représenté n'est pas engagé ; le contrat lui est inopposable, sauf ratification ; le contractant n'aura d'autre ressource que de mettre en cause la responsabilité du représentant.

B- La représentation médiate :

Le mécanisme de la représentation, ne va plus opérer qu'en deux temps. Le représenté n'a pas de lien directe avec le cocontractant du représentant ; car il n'est pas partie au contrat. C'est en la personne du représentant que naissent les droits et les obligations. Mais en vertu de leurs rapports internes, le représentant et le représenté sont réciproquement tenus de s'en faire raison. Le représentant doit transférer ses droits au représenté, qui, à partir de cette cession de créance, pourra agir contre le cocontractant. Le représenté est tenu envers le représentant d'assurer les engagements pris envers le cocontractant. Débiteur du représentant, qui est débiteur du cocontractant, il est soumis à la poursuite de celui-ci (par le jeu de l'action oblique).

Section II : Les incidences du droit successoral ou familial

Le principe est que les héritiers et légataires universels ou à titre universel succèdent aux droits et obligations nés du contrat auquel leur auteur avait été partie.

L'article 229 D.O.C. stipule à ce propos que : « Les obligations ont effet, non seulement entre les parties elles-mêmes, mais aussi entre leurs héritiers … ».

Exceptionnellement, certains contrats ne se transmettent pas avec le patrimoine, parce qu'ils s'éteignent par la mort de l'un des contractants. Il peut en être ainsi, soit en vertu d'une clause expresse, soit à cause de la nature propre du contrat (exemple, la rente viagère…).

Donc, même le contrat de transport produit directement effet au profit de certains proches du voyageur. Si celui-ci est victime d'un accident mortel, ses enfants et son conjoint pourront invoquer le contrat, afin de faire jouer la responsabilité du transporteur.

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III. Les effets des conventions et contrats :

La solidarité se présume entre les contractants (article 165 D.O.C.) ;

La prescription extinctive (5 ans au lieu de 15 ans) ;

La compétence judiciaire (article 28/15 C.P.C. stipule que l'action en matière commerciale peut être portée selon le choix du demandeur, soit devant le tribunal du domicile du défendeur, ou devant celui dans le ressort duquel l'exécution devait être effectuée) ;

La clause compromissoire (ou d'arbitrage) qui ne peut être insérée dans un acte civil, et valable dans les contrats commerciaux (article 309 C.P.P.) ;

Le régime des intérêts est permis ;

Le délai de grâce existe rarement. Le contrat est commercial lorsqu'il constitue un acte de commerce. Ce peut être un acte

de commerce par nature. Exemple : un achat pour revendre, l'agence commerciale, le crédit-bail ou leasing, et les contrats bancaires …

Le contrat peut aussi être commercial lorsqu'il constitue un acte de commerce par accessoire.

On étudiera la force obligatoire du contrat, qui détermine l’engagement des contractants (Section I). Mais encore convient-il de préciser à quoi s’applique cette force obligatoire, le pouvoir délégué par la loi aux volontés individuelles, implique que la force obligatoire s’applique à ce que les parties ont voulu. Dans le cadre défini par la loi, leur volonté est à la fois source et mesure des obligations qu’engendre le contrat. Deux difficultés peuvent cependant se présenter :

La première surgit lorsque les parties ont dissimulé leur volonté réelle en concluant une convention ostensible (apparente) différente de leur convention véritable, c’est l’hypothèse de la simulation (Section II) ;

La deuxième difficulté se rencontre lors de la détermination de l'effet du contrat à l'égard des tiers et des ayants cause (Section III).

Section I : Le principe de la force obligatoire du contrat :

Le principe de la force obligatoire du contrat signifie que le contrat qui a été valablement formé constitue la loi des parties. Dans une formule aussi célèbre qu’elle est énergique, l’article 230 D.O.C dispose que : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites…»1.

Le législateur marocain, à l’instar du législateur français, assimile l’obligation née du contrat à une prescription légale. Les parties au contrat sont donc tenues au respect des obligations contractuelles, comme elles sont tenues au respect de la loi. Entre les parties, le contrat est obligatoire parce qu’il constitue la loi des parties. La formule de l’article 230 du D.O.C. signifie donc que, l’obligation née du contrat s’impose aux contractants avec la même force qu’une obligation légale.

Donc, l'obligation ou la série d'obligations qui naît du contrat, va constituer une sorte de loi particulière régissant le petit groupe des contractants, et ceci est subordonné à ce que le contrat réponde à toutes les conditions requises par la loi pour sa formation, ce qui comprend la conformité à l'ordre public et aux bonnes mœurs.

Il en résulte tout d’abord que les parties ne peuvent se soustraire à l’exécution de leurs obligations. En passant un contrat, les parties ont pris des engagements et elles sont tenues, en vertu du contrat, de s’y plier…

1 L’article 1134/1 du code civil français dispose que : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites…».

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Sous section I : Interdiction de la révocation unilatérale : Paragraphe I : Le principe : Cette irrévocabilité découle de la loi elle-même. L'article 230 D.O.C. stipule que : « …

tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou dans les cas prévus par la loi », qui souligne la force du contrat sur lequel les parties ne peuvent revenir.

Un contractant ne peut, par sa seule volonté, modifier les clauses du contrat, ni encore moins, se délier des obligations qui lui incombent. La force obligatoire du contrat entraîne comme conséquence l’irrévocabilité ou encore l’intangibilité du contrat. Aussi, le contrat qui naît du concours de deux volontés, ne peut être modifié ou détruit que par un nouvel accord et donc par un nouveau concours de deux volontés.

Cette irrévocabilité nous conduit à distinguer trois situations :

- La première situation : Le contrat peut être révoqué du « consentement mutuel des parties » (article 230 D.O.C.). Cette révocation obéit au droit commun des contrats. Les parties peuvent définir elles mêmes son étendue. - La deuxième situation : le législateur permet parfois à une partie de résilier unilatéralement le contrat. Tel est le cas dans les contrats à durée indéterminée, ou éviter qu'une personne soit liée par un engagement perpétuel : le salarié ou l'employeur peuvent rompre unilatéralement le contrat de travail.

La loi permet également la révocation de certains contrats à durée déterminée, lorsque la confiance a disparue : le mandat (article 929 et s. D.O.C.). - La troisième situation : des stipulations contractuelles peuvent être prévues pour permettre à une partie ou aux deux parties de se désengager : Une clause de résiliation dans un contrat à exécution successive (exemple : le

contrat de bail) ; Une clause de dédit (le fait de se rétracter) qui permet à une partie, généralement

moyennant le versement d'une indemnité de se délier.

Paragraphe II : Cas dans lesquels la révocation unilatérale est autorisée : I- La révocation par consentement mutuel : L’article 230 D.O.C., après avoir proclamé que les obligations contractuelles constituent

la loi des parties, ajoute, qu’elles « ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel (le consentement mutuel des parties)… »1. Cette irrévocabilité apparaît comme un corolaire de la force obligatoire : celle-ci ne serait pas assurée si chacun de ceux qui ont conclu le contrat pouvait s’en délier. Elle est en vérité, de l’essence du contrat : à défaut, il n’y aurait pas d’obligation et la notion de contrat serait vide de sens.

La révocation par le consentement mutuel des parties, ne porte précisément pas atteinte à la force obligatoire. Tout au contraire, elle repose elle-même sur le même pouvoir conféré aux volontés individuelles qui a permis le contrat initial : ce que deux personnes ont fait d’un commun accord, elles sont libres, sauf exceptions, de le défaire de la même manière.

Parmi « les causes que la loi autorise », figure d’abord la faculté reconnue à chacune des parties dans les contrats synallagmatiques, de demander la résolution pour inexécution, par l’autre, de ses obligations.

Là encore, il n’y a pas atteinte à la force obligatoire : C’est précisément parce que les contractants sont tenus de respecter leurs engagements, que l’anéantissement du contrat

1 L’article 1134/2 du code civil français dispose que les conventions « Ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise ».

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peut être imposé, comme sanction, à celui qui y défaille. Aussi bien, la partie victime de cette défaillance conserve-t-elle toujours le choix d’assigner soit en résolution, soit en exécution.

La question de révocation par consentement mutuel est traitée par le D.O.C. sous le titre « De la résiliation volontaire » au titre sixième, chapitre VIII, articles 393 à 398. La terminologie employée est tantôt la révocation, tantôt la résiliation.

Nous analyserons la résiliation amiable (A), et les effets de la résiliation amiable (B). A- Les conditions de la résiliation amiable : La résiliation amiable est un accord de volontés destiné à anéantir un contrat

valablement formé. Il s’agit donc d’une convention qui « est soumise quant à sa validité aux règles générales des obligations contractuelles » (article 395/1 D.O.C.).

C’est pourquoi, la convention qui vise non pas à éteindre, mais à modifier le contrat primitif, ne constitue pas une résiliation amiable, mais un nouveau contrat qui succède au contrat initial (article 397/3 D.O.C.)1.

En principe, la résiliation amiable n’est soumise à aucun formalisme, et l’article 394 D.O.C. envisage même la possibilité d’une résiliation amiable tacite, et donne l’exemple du cas des parties qui, après avoir conclu une vente, se restitueraient réciproquement la chose et le prix.

La résiliation amiable peut porter sur un contrat dont l’exécution n’est pas commencée et dans ce cas, on parle plus volontiers de révocation. Mais la résiliation amiable peut également porter sur un contrat en cours d’exécution et dans ce cas, on parle plutôt de résiliation. Ainsi, et contrairement à ce que semble affirmer l’article 393 D.O.C., la résiliation amiable peut avoir lieu aussitôt après la conclusion du contrat, mais aussi plus tard, au cours de l’exécution du contrat.1

La révocation par consentement mutuel est-elle toujours possible ? L’article 393 du D.O.C. laisserait entendre qu’elle ne serait possible que dans le cas où

elle serait permise par la loi : « Les obligations contractuelles s’éteignent lorsque, aussitôt après leur conclusion, les parties conviennent d’un commun accord de s’en départir, dans le cas où la résolution est permise par la loi ».

Mais cette restriction se concilie mal avec le principe logique selon lequel un accord de volontés peut toujours être modifié ou détruit par un accord ultérieur.

Cependant, il est vrai que la résiliation amiable peut se heurter à des obstacles. Ainsi, dans la vente d’un corps certain qui a été consommé ou détruit, comment concevoir une résiliation amiable puisque l’acheteur se trouve dans l’impossibilité de restituer la chose vendue ?

C’est pourquoi l’article 396/1 D.O.C. énonce que : « La résiliation ne peut avoir effet : 1- Si le corps certain qui a fait l’objet du contrat a péri, a été détérioré ou s’il a été

dénaturé par le travail de l’homme ». De manière plus générale, chaque fois que les restitutions réciproques à l’identique ne

sont pas possibles, la résiliation amiable ne pourra jouée pleinement. Les parties pourraient résilier mais pour l’avenir seulement, sans revenir sur les effets déjà réalisés. Exemples : résiliation amiable d’un bail en cours, qui produit effet pour l’avenir et n’entraîne aucune restitution ; ou bien résiliation amiable d’un contrat de travail avec effet pour l’avenir seulement, sans retourner sur le passé.

Les parties pourraient aussi se mettre d’accord pour compenser l’absence de restitution à l’identique. Ainsi, le vendeur d’un corps certain pourrait accepter de reprendre la chose vendue moyennant la restitution d’un prix inférieur au prix réel, pour compenser l’utilisation

1 Lire à ce propos l’article 397 du D.O.C.

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ou la détérioration de la chose. Mais dans ce cas, y-a-t-il révocation du contrat initial ou conclusion d’un nouveau contrat (article 397/3 D.O.C.1) ?

Bien que l’hypothèse puisse apparaître comme intermédiaire, elle reste plus proche de la révocation que de la conclusion d’un nouveau contrat, ne serait-ce que parce qu’il ne subsiste aucune relation contractuelle entre les parties2.

B- Les effets de la résiliation amiable : La résiliation amiable, produit un effet rétroactif. C’est ce qui est énoncé par l’article

397/1 D.O.C. : « La résiliation remet les parties dans la situation où elles se trouvaient au moment de la conclusion du contrat ». Ce qui implique l’effacement rétroactif des effets produits par le contrat au moyen de restitutions réciproques : « les parties doivent se restituer réciproquement ce qu’elles ont reçu l’une de l’autre en vertu de l’obligation résiliée. » (L’article 397/2 D.O.C.).

Mais cette rétroactivité ne porte pas atteinte aux intérêts des tiers, puisque comme l’énonce l’article 398 D.O.C. « La révocation amiable ne peut nuire aux tiers qui ont acquis régulièrement des droits sur les choses qui font l’objet de la résiliation ».

De plus, il arrive qu’en ayant recours à la résiliation amiable, les parties cherchent simplement à faire cesser le contrat sans toucher aux effets antérieurement produits. Il en est ainsi de l’accord entre loueur et locataire pour mettre fin au contrat de louage, ou de l’accord entre employeur et salarié pour faire cesser le contrat de travail. Dans ces cas, les parties ne recherchent aucune rétroactivité et leur accord n’aura d’effet que pour l’avenir.

En définitive, pour déterminer de manière commode, les effets de la résiliation amiable, il est utile de s’appuyer sur la distinction ente contrats à exécution successive et contrats à exécution instantanée.

- S’agissant des contrats à exécution successive, les parties mettent habituellement fin au contrat pour l’avenir : les prestations en cours d’exécution sont arrêtées, mais, les prestations déjà exécutées ne sont pas remises en cause. Exemples : le contrat de louage, le contrat de travail, le contrat d’abonnement, le contrat de fourniture…. Mais les parties, peuvent exceptionnellement, vouloir effacer le passé au moyen de restitutions réciproques (résiliation amiable d’un contrat de fournitures), à moins où il n’y ait impossibilité pratique comme c’est le cas du contrat de louage, puisque, si le loueur peut à la limite restituer le prix du loyer qu’il a perçu, le locataire lui, ne peut naturellement pas restituer la jouissance dont il a bénéficié.

- S’agissant des contrats à exécution instantanée, la résiliation amiable n’a de sens que si elle agit rétroactivement, puisque la cessation pour l’avenir d’un contrat qui a déjà produit tous ses effets n’a pas de signification.

II- La révocation unilatérale prévue par la loi : La loi permet la révocation unilatérale du contrat. L’article 230 D.O.C., énonce à ce

sujet que les obligations contractuelles peuvent être révoquées dans les cas prévus par la loi3.

Cas des dérogations légales : Tout contrat à exécution successive, qui a été conclu pour une durée

indéterminée, peut être résilié unilatéralement, sinon l’engagement risque de devenir perpétuel, ce qui est prohibé.4

1 L ‘article 397/3 D.O.C. stipule que : « Toute modification apportée au contrat primitif vicie la résiliation, et la transforme en un nouveau contrat ».

2 Omar Azziman “ Droit civil – Droit des obligations: Le contrat “, Edition Le Fennec 1995, p. 237 et s.

3 La même permission est prévue par l’article 1134/2 du code civil français.

4 Voir les articles 754 D.O.C. et 1780/2 du code civil français.

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La faculté de révocation unilatérale, joue également dans les contrats où la confiance constitue le fondement de la relation contractuelle. Il en est ainsi du mandat qui peut être révoqué par le mandant1 et, à certaines conditions, par le mandataire2.

Sous section II : L’obligation d’exécuter de bonne foi les contrats : C’est une obligation formulée par l’article 231 D.O.C. : « Tout engagement doit être

exécuté de bonne foi, et oblige, non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que la loi, l’usage ou l’équité donnent à l’obligation d’après sa nature… »3.

Cette obligation impose aux contractants d’exécuter de bonne foi leurs obligations, c’est-à-dire d’une part d’observer, l’un vis-à-vis de l’autre, un comportement loyal et honnête, dépourvu de malice (paragraphe I), et d’autre part aussi un devoir de coopération ou de collaboration (paragraphe II).

Paragraphe I : Obligation de loyauté : La loyauté implique de la part du débiteur, une exécution conforme à son engagement

et à la probité (observation rigoureuse des devoirs de la justice et de la morale = honnêteté, intégrité), et de la part du créancier, l’absence de manœuvres qui rendraient plus difficile l’exécution de la prestation de l’autre partie. Donc des devoirs s’imposent aux contractants :

I- Le débiteur : Le devoir de loyauté impose au débiteur une exécution fidèle de son engagement. C’est

est ainsi que le débiteur qui commettrait un dol dans l’exécution du contrat, c’est-à-dire qui intentionnellement n’exécuterait pas ses obligations, manquerait certainement à son devoir de loyauté. Il en irait de même de celui qui se mettrait volontairement dans une situation rendant impossible l’exécution de sa prestation : par exemple, en réservant, en louant ou en vendant plus de places qu’il n’en possède (pratique de la surréservation ou surbooking). Il en irait encore ainsi de celui qui se livrerait à des manœuvres, afin d’empêcher l’autre partie de retirer du contrat le bénéfice qu’elle en attend.

Si la transgression du devoir de loyauté justifie la sanction qui frappe le contractant de mauvaise foi, son respect permet-il au débiteur défaillant de s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en démontrant que, diligent et consciencieux, il a tout mis en œuvre pour remplir son obligation ?

La réponse varie selon la nature de l’obligation qui pèse sur le débiteur : - S’il s’agit d’une obligation de moyens, c’est-à-dire, si le débiteur a promis non un

résultat précis, mais de faire tout son possible pour atteindre ce résultat, son seul devoir est de porter à son obligation « tous les soins d’un bon père de famille ». Autant dire que le débiteur de bonne foi, celui qui a loyalement essayé de fournir la prestation promise, échappera à sa responsabilité.

- S’il s’agit d’une obligation de résultat, c’est-à-dire, si le débiteur a promis l’obtention d’un résultat précis, sa responsabilité sera engagée dès lors que celui-ci n’a pas été atteint. Peu importe alors que le débiteur se soit montré diligent. Seule l’existence d’une cause étrangère sera de nature à l’exonérer de sa responsabilité.

II- Le créancier : Il est également tenu d’un devoir de loyauté. Il doit s’abstenir de déloyauté, de

manœuvres qui tendraient à rendre l’exécution du contrat impossible ou plus difficile.

1 Les articles 929 et s. du D.O.C.et 2003 et s. du code civil français.

2 Articles 935 et s. D.O.C. et article 2007 du code civil français.

3 Cette même obligation est exprimée par l’article 1134/3 du code civil français qui stipule que : « Elles doivent (les obligations) être exécutées de bonne foi ».

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Ainsi en va-t-il du créancier qui délivre un commandement1 à son débiteur en son absence, pendant la période des vacances dans l’unique dessein de le mettre dans l’impossibilité d’exécuter dans les délais.

Il manque, en outre à son devoir de loyauté si, sans prétexte de fidélité dans l’exécution, il impose au débiteur des sacrifices pécuniaires d’importance disproportionnée avec l’utilité à atteindre2.

L’obligation de loyauté impose encore au créancier d’éviter au débiteur des dépenses inutiles. La jurisprudence française3 décide ainsi qu’un installateur d’électricité a l’obligation de rechercher le branchement le plus court, ou qu’un transporteur doit adresser une marchandise par l’itinéraire le plus avantageux pour l’expéditeur, ou encore qu’un chauffeur de taxi doit prendre le trajet le moins onéreux pour mener son passager à destination. De même, le maître de l’ouvrage, doit faciliter le travail de l’entrepreneur, notamment en n’apportant pas au projet des modifications inconsidérées, ou en ne provoquant pas des arrêts de travail.

Le devoir de loyauté du créancier, joue également à l’égard du garant. Le créancier doit faire son possible, en exerçant diligemment ses droits à l’encontre du débiteur pour alléger au maximum le poids de la garantie consentie.

III- Les sanctions relatives au devoir de loyauté : D’une manière générale, la mauvaise foi, met le contractant coupable dans

l’impossibilité de réclamer les droits nés du contrat, notamment d’invoquer le droit à l’exécution, aux dommages-intérêts et à la résolution4.

Paragraphe II : Obligation de coopération : La coopération implique l’obligation pour chaque partie de veiller au mieux pour les

intérêts de son contractant, et notamment le devoir de lui donner les informations qu’il a intérêt à connaître au sujet de l’exécution du contrat.

Cette obligation contractuelle d’information relative à l’exécution du contrat, est à distinguer de l’obligation précontractuelle de renseignement.5

Certains contrats constituent la terre d’élection du devoir de coopération. C’est ainsi que le contrat de travail ne peut se maintenir entre le chef d’entreprise et les salariés exerçant des responsabilités essentielles à l’intérieur de celle-ci que si règnent entre eux de véritables rapports de confiance.

Il a aussi été souligné que la plupart des contrats d’approvisionnement exclusif, ingénierie6, transfert de technologie, affacturage …, reposaient sur une sorte de confiance et d’équilibre dans les contrats.

Ainsi, à raisonner sur les contrats de distribution, il existe entre fournisseur et distributeur un objectif commun : la conquête et l’exploitation d’une part de marché, c’est-à-dire une clientèle destinataire finale du produit. Par conséquent, si le fournisseur modifie l’équilibre du contrat de telle façon que le distributeur n’est plus en mesure d’affronter la concurrence, il manque à la bonne foi dans l’exécution du contrat. C’est le cas également des contrats relatifs à l’informatique. Fournisseur et client doivent y collaborer de façon active afin de mettre sur pied un système qui réponde au mieux au résultat recherché.

1 Commandement : acte d’huissier précédent la saisie et mettant une personne en demeure d’exécuter une obligation.

2 Aussi, il a été jugé que, des travaux ayant été mal exécutés dans un immeuble, les juges du fond ont, à juste titre, refusé la réfection demandée, au motif que celle-ci

« nécessiterait la démolition à peu près complète de l’immeuble et occasionnerait une dépense de beaucoup supérieure au préjudice résultant de la défectuosité desdits travaux » (cass.req. 23 mars 1909, s. 1909.1.552 ; comp. cass. req. 31janvier 1887, préc. Cass. civ., 2 fèv. 1904, s. 1904.1.389). D’après François Terré et Cie « Droit civil – Les obligations », 7

ème édition 1999, Dalloz, phe. 415, p. 406 (annexe).

3 Voir cette jurisprudence dans l’ouvrage de François Terré et compagnie, op. cit. annexe phe.415, pp.405 et 406.

4 Inversement, les tribunaux français accordent la résolution du contrat sur le fondement de celui qui a contre venu à l’obligation d’agir de bonne foi. Le législateur a en outre, visé

spécialement le dol du débiteur : l’article 1151 du même code, sanctionne celui-ci, en permettant au juge de réparer les dommages imprévus qu’il provoqué. De leur côté les tribunaux écoutent les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité lorsque le débiteur s’est rendu coupable d’une faute dolosive : D’après l’ouvrage de François Terré et Cie op.cit.phe.415, p 406. 5 Gérard Légier « Droit civil – Les obligations », 16

ème édition 1998 Dalloz, .p .70.

6 Ingénierie (ou Engineering) = ensemble des études qui permettent de déterminer, pour la réalisation d’un ouvrage ou d’un programme d’investissement, les tendances les plus

souhaitables, les modalités de conception les meilleures, les conditions de rentabilités optimales, les matériels et les procédés les mieux adaptés. (Définition du dictionnaire Petit Larousse illustré 1979 – p.373).

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Dans un certain nombre de contrats, le devoir de coopération implique également l’obligation pour un contractant de faciliter l’exécution du contrat à son partenaire : un expéditeur est tenu de faciliter le transport international en remettant aux entreprises chargées de l’effectuer, les pièces nécessaires pour la douane ; le client du tailleur doit se plier aux essayages ; le maître de l’ouvrage doit coopérer à la bonne exécution du contrat en obtenant les autorisations nécessaires et en renseignant l’entrepreneur sur les difficultés du marché1…

Section II : La simulation :

La simulation est un mensonge concerté entre des contractants qui dissimulent le

contrat qui renferme leur volonté réelle derrière un contrat apparent. On se trouve donc en présence de deux conventions : l’une qui est ostensible (apparente) mais mensongère, l’autre qui est sincère mais secrète.

Opération complexe, la simulation intéresse aussi bien la formation que les effets du contrat. La formation, parce qu’elle suppose un montage réalisé dès l’origine ; de plus, lorsqu’elle est frauduleuse, elle soulève un problème de validité du contrat.

La simulation est donc, la situation dans laquelle, un acte apparent cache la volonté réelle des contractants qui s'est manifestée dans un acte secret (ou contre-lettre) : on se trouve alors en présence de deux conventions, l'une qui correspond à la véritable volonté des parties, mais qui est secrète, et l'autre qui est mensongère, et qui apparaît aux yeux des tiers. - Cette simulation peut porter sur la nature même du contrat : exemple : donation, acte secret ; déguisé derrière une vente, acte apparent ; - Elle peut porter sur l'objet du contrat : exemple dissimulation d'une parties du prix : l'acte apparent porte sur un prix de 70 000 DH, alors que l'acte secret porte sur 130 000 DH ;

Si la simulation s'explique souvent par une volonté de fraude fiscale, de fraude aux droits des créanciers ou des héritiers, elle peut poursuivre un but licite, tel est le cas d'une personne qui veut faire une donation à une œuvre en gardant l'anonymat, se cachant derrière un prête-nom.

Les effets, parce que l’article 22 du D.O.C. l’envisage en précisant les effets de la contre-lettre, c'est-à-dire de l’acte caché, tant entre les parties qu’à l’égard des tiers.

Nous analyserons cette institution à la (sous section I), tandis que la (sous section II), sera consacrée à l’étude des effets de celle-ci.

Sous section I : Analyse de l’opération de la simulation : La description de la structure de l’opération sera faite au (paragraphe I), tandis que sa

finalité sera abordée au (paragraphe II). Paragraphe I : Analyse structurelle : Le mécanisme de la simulation tient à la dualité des actes juridiques conclus

relativement au même objet par les parties contractantes. La coexistence de deux actes juridiques distincts (l’un caché venant contredire l’autre apparent), est inhérente à la structure de l’opération.

I- L’acte apparent ou ostensible : Destiné à servir de façade, l’acte ostensible apparaît seul au regard des tiers. Il pourra

être passé par devant notaire ou par acte sous seing privé. Il devra même l’être chaque fois qu’on voudra faire apparaître un acte qui constate une opération dont la loi subordonne la validité à la rédaction d’un acte notarié ou celle d’un acte sous seing privé.

1 François Terré et Cie, op.cit., phe 416, p.406 et s.

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Lui seul fait l’objet de la publicité légale, lui seul est présenté à l’enregistrement. On le voit, tout se passe comme si cet acte régissait les rapports des parties signataires. Mais cette apparence est trompeuse, car il existe un acte secret ou occulte qui renferme la volonté réelle des parties.

II- L’acte secret ou occulte : Egalement nommé contre-lettre, l’acte caché est le plus souvent un acte écrit, rédigé

sous seing privé. Renfermant la volonté réelle des parties, la contre-lettre contredit l’acte apparent -d’où

son nom - et transforme parfois radicalement la situation juridique découlant de celui-ci. Notons simplement, afin d’éviter toute confusion, que la contre-lettre ne constitue pas

une modification à posteriori de l’acte apparent. Il ne s’agit pas d’actes successifs, l’acte caché venant modifier ou révoquer l’acte apparent qui lui serait antérieur. Il s’agit d’un « montage », d’une combinaison élaborée dès l’origine. Dès le départ, l’acte apparent est un « trompe l’œil ». Aussi bien, les deux actes sont-ils, le plus souvent, contemporains. Mais cette simultanéité des deux actes n’est exigée qu’à titre intellectuel. En d’autres termes, la contre-lettre peut avoir été rédigée postérieurement ou antérieurement à l’acte apparent dès lors que les parties ont été, dès l’origine, d’accord sur la simulation.

Donc, la simulation est un mensonge commun des parties à l’encontre des tiers : l’acte clandestin est le siège de l’accord réel des volontés. Mais les parties conviennent de faire croire que leur volonté est autre. La simulation se distingue ainsi nettement du dol. Alors qu’au cas de dol, il y a manœuvre d’une des parties pour tromper l’autre, en cas de simulation, il y a entente des parties pour tromper les tiers.

Paragraphe II : Finalité de l’opération : On recherchera nécessairement le but immédiat, l’objet de la simulation (I), et le but

lointain, les mobiles, les motifs qui animent les parties (II). I- But immédiat : l’objet de la simulation : La simulation peut porter sur un ou plusieurs éléments du contrat : consentement,

cause, objet, identité des parties. Dans le premier cas, l’acte caché affecte l’existence même de l’acte apparent, on est en présence d’une opération fictive (A). Dans le deuxième cas, l’acte caché affecte la nature juridique véritable de l’opération, on est en présence d’une opération déguisée (B). Dans le troisième cas, l’acte caché modifie l’étendue des obligations qui découlait de l’acte apparent, sans pour autant changer sa nature juridique (C). Dans le quatrième cas enfin, l’acte caché déplace les effets de l’acte apparent ; il y a interposition de personnes (D).

A. La simulation peut porter sur le consentement même des parties :

L’acte secret affecte l’existence de l’acte apparent. Il en fait une opération fictive. Ainsi, lorsque l’acte apparent est une vente, les parties peuvent convenir dans l’acte secret que le vendeur ne cesse pas d’être propriétaire. La vente est purement fictive. Ainsi encore, une personne peut avec d’autres constituer une société fictive qui sera censée être propriétaire des biens apportés par les associés.

B. La simulation peut porter sur la cause :

L’acte ostensible est alors destiné à masquer la véritable nature du contrat. C’est ce qu’on appelle un déguisement. Ainsi, une personne feint de vendre à une autre un bien. Mais, dans l’acte caché, il est entendu entre les parties que le prétendu acquéreur n’aura rien à payer. On est en présence d’une donation déguisée sous forme d’une vente.

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C. La simulation peut porter sur l’objet : Dans ce cas, les parties ont bien voulu faire un acte juridique de la nature mentionnée à

l’acte apparent, mais par l’acte secret, elles modifient l’étendue des obligations qui découlent de celui-ci. La plus fréquente est celle qui porte sur le montant exact du prix dans une vente. Par exemple, l’acte passé devant notaire est présenté à l’enregistrement porte l’indication d’un certain prix (500.000 DH), mais par un accord secret, il est entendu entre les parties que l‘opération se traitera, non au prix déclaré, mais à un prix plus élevé (700.000 DH), la différence correspondant à ce que la pratique appelle un « dessous de table » ou « le noir ».

D. Le prête-nom :

La simulation tend parfois à cacher la personne même d’une des parties. Une personne figure au contrat comme si elle en était le véritable bénéficiaire, alors que celui-ci est désigné par l’acte secret. C’est l’hypothèse de l’interposition des personnes. Celle-ci peut être utilisée avec l’accord de l’autre partie à l’acte apparent. Mais elle peut l’être aussi à son insu. On parle alors de prête-nom. Ainsi en va-t-il de celui qui veut agrandir sa propriété en achetant des terrains voisins, mais qui craint que le propriétaire de ceux-ci n’exige de lui, s’il se présente en personne, un prix excessif. Il charge alors un tiers d’acheter les terrains comme s’il agissait pour son propre compte, alors qu’il agit pour le compte de son mandant, à qui il transférera le bien ainsi acquis. - Exemple : une personne (A) apparaît comme partie à un contrat avec (B), alors qu'elle n'est qu'un prête-nom de (C).

II- But lointain : La raison de la simulation : Les mobiles qui animent les parties peuvent être extrêmement divers. Mais le droit ne

s’en préoccupe qu’afin de déterminer si la simulation est ou non frauduleuse. Très souvent, la simulation tend à réaliser une fraude à la loi ou une fraude aux droits

des tiers, notamment aux droits des créanciers. - Fraude fiscale : on dissimule une partie du prix de vente pour permettre à l’acheteur

de payer des droits de mutation moins élevés, et éventuellement au vendeur de se soustraire en tout ou partie à l’imposition des plus-values.

- Fraude civile : Un débiteur organise son insolvabilité en vendant fictivement à un complice l’immeuble que voulait saisir ses créanciers. Ou encore, l’on veut éviter l’application des règles d’ordre public qui frappent d’une incapacité, de recevoir à titre gratuit, certaines personnes. On pourra alors avoir recours à la technique des donations déguisées, comme par exemple l’interposition de personnes : la donation est alors adressée à un donataire apparent, lequel s’engage à transmettre le bien à l’incapable désigné comme le véritable bénéficiaire par la contre-lettre. Mais si la fraude plane en général sur la simulation, cette dernière peut avoir un but moralement neutre. Ainsi en va-t-il de celui qui a recours à un prête-nom, afin d’acheter un terrain au meilleur prix, ou encore de commerçants soucieux de ne pas révéler leur marché à des concurrents. La simulation peut même avoir un but digne d’éloges. C’est le cas par exemple du bienfaiteur qui désir dissimuler sa libéralité pour garder l’anonymat.

Sous section II : Les effets de la contre-lettre : Bien qu’impliquant nécessairement un mensonge, la simulation est neutre. Elle ne

rend pas nul ce qui est valable, non plus qu’elle ne rende valable ce qui est nul. Dès lors, un problème apparaît : l’acte ostensible et l’acte secret se contredisent en tout

ou en partie, il faut rechercher celui qui va finalement l’emporter. Afin de répondre à cette question, il est nécessaire de remonter aux principes.

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L’autonomie de la volonté impose de respecter la volonté réelle des parties. Celle-ci étant renfermée dans l’acte secret, c’est celui-ci qui devrait prévaloir. Mais cette première considération se heurte aux exigences de la sécurité juridique. Il serait contraire à celle-ci que l’acte secret l’emportât, car les tiers n’ont connu que l’acte apparent.

Le droit positif est le produit de la conciliation de ces deux impératifs contradictoires.

Celle-ci est opérée par l’article 22 D.O.C. en une double proposition. « Les contre-lettres ou autres déclarations n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes et leurs héritiers. Elles ne peuvent être opposées aux tiers, s’ils n’en ont eu connaissance ;…» 1. En d’autres termes, l’autonomie de la volonté prévaut dans les rapports entre les parties, la sécurité juridique dans les rapports avec les tiers.

Suivant la distinction suggérée par l’article 22 D.O.C., on analysera les effets de la contre-lettre entre les parties (Paragraphe I), avant d’envisager la situation des tiers (Paragraphe II).

Paragraphe I : L’effet de la contre-lettre entre les parties : Entre les parties, c’est en principe l’acte secret qui prévaut, sous réserve qu’il

remplisse toutes les conditions de fond qui lui sont propres et respecte les conditions des formes de l’acte apparent.

En prévoyant que la contre-lettre peut avoir effet entre les parties contractantes, l’article 22 D.O.C. (1321 du code civil français), marque que la discordance entre l’acte apparent et l’acte secret se résout entre celles-ci au bénéfice du second. La primauté appartient à l’acte secret, en tant qu’il exprime le véritable accord des parties. La solution postule à l’évidence, que l’acte secret n’est pas, du seul fait de son caractère occulte, frappé de nullité. On peut faire secrètement ce qu’on a le droit de faire ouvertement. Mais à l’inverse, la simulation ne saurait évidemment conférer à l’acte une validité qu’il n’a pas.

La simulation dit-on, est neutre. Aussi bien, est-il nécessaire de préciser les conditions de validité auxquelles doit satisfaire l’opération pour que la contre-lettre soit efficace entre les parties (I). De plus, caché par définition, l’acte secret ne pourra produire ses effets entre les parties, si l’une d’elles prétend s’en tenir à l’acte apparent, qu’à condition de le prouver (II).

I- Les conditions de validité de l’acte secret : L’acte secret l’emportant, toutes les conditions de fond auxquelles la loi subordonne

la validité de l’acte juridique doivent être réunies dans celui-ci. Les conditions de fond à savoir consentement, capacité, objet et cause, s’apprécient donc dans l’acte occulte. En revanche, les conditions de forme, sont celles de l’acte apparent. Constituant la façade de l’opération, celui-ci doit pouvoir faire illusion. Il en résulte que l’acte caché emprunte, en quelque sorte, la forme de l’acte apparent.

Encore faut-il pour que l’acte caché l’emporte, que la simulation soit démontrée, que le caractère fictif de l’acte ostensible (apparent) soit prouvé.

II- La preuve de l’acte secret : L’acte secret ne peut être établi, dans son existence et sa teneur, que

conformément aux règles ordinaires de preuve des actes juridiques. Il faut dès lors distinguer selon que la convention ostensible a été ou non passée par écrit.

Ou bien, la convention est elle-même constatée par écrit et l’article 444 D.O.C. (article 1341 du code civil français) s’oppose à ce que l’acte secret soit prouvé autrement que par écrit, car il s’agit de prouver outre ou contre le contenu de l’écrit.

1 C’est ce qui est édicté également par l’article1321 du code civil français : « Les contre-lettres ne peuvent avoir leur effet qu’entre les parties contractantes : elles n’ont point d’effet

contre les tiers. »

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On ne peut donc prouver outre ou contre le contenu d’un écrit qu’au moyen d’un autre écrit, ou au moins d’un commencement de preuve par écrit, lorsque la valeur de l’acte dépasse 10.000 DH, conformément aux dispositions des articles 443 à 447 du D.O.C.1.

Paragraphe II : La situation des tiers : Aux termes de l’article 22 D.O.C. les contre-lettres « ne peuvent être opposées aux

tiers… »2. Il s’agit de tous les tiers, c'est-à-dire de toutes les personnes autres que les parties et celles qui leur sont assimilées, ayants cause universels ou à titre universel.

Mais, c’est évidemment au regard des tiers pour lesquels l’opposabilité du contrat présente un intérêt particulier (créancier chirographaire, ayant cause à titre particulier) que la solution prend toute son importance. Tout en étant valable entre les parties, parce qu’elle exprime leur volonté réelle, la contre-lettre ne sera pas opposable aux tiers parce que ceux-ci n’ayant connu que l’acte apparent, n’ont pu se déterminer que par rapport à lui.

Mais, le fondement même de cette règle permet de lui apporter certains aménagements. Posée pour protéger les tiers, l’inopposabilité de la contre-lettre ne va s’imposer que si celle-ci leur est défavorable. Au cas où la contre-lettre leur serait plus favorable, ils pourront s’en prévaloir, à condition bien sûr d’en démontrer l’existence.

En d’autres termes, les tiers ont en cas de simulation une option : selon leur intérêt, ils peuvent s’en tenir à l’acte apparent (I), ou faire prévaloir la contre-lettre si elle leur est plus favorable (II), ce qui n’est pas sans soulever des difficultés en présence de tiers dont les intérêts sont contradictoires (III).

I- L’inopposabilité aux tiers de l’acte secret : Enoncée par l’article 22 D.O.C., l’inopposabilité aux tiers de l’acte secret, paraît

s’imposer comme une évidence. Comment admettre que l’on puisse imposer à une personne, un acte qui lui a été volontairement dissimulé et dont elle ignorait tout ?

Deux séries de considérations sont invoquées pour fonder cette solution. - D’une part, l’inopposabilité de l’acte secret serait une application de l’idée

d’apparence. L’inopposabilité vise à protéger les tiers trompés par l’apparence créée par l’acte ostensible. Il en résulte que seuls les tiers de bonne foi peuvent prétendre s’en tenir à l’acte apparent. La contre-lettre peut donc être opposée aux tiers qui, au moment où ils ont traité, avaient connaissance de la simulation par un moyen quelconque.

- D’autre part, l’inopposabilité peut être considérée comme une sorte de sanction frappant le bénéficiaire de l’acte secret ; il ne lui sera pas permis d’invoquer des droits qu’il a dissimulés.

En pratique, la contre-lettre ne sera pas opposable à ceux qui, faisant confiance à l’acte apparent, ont compté sur la situation qu’il créait : ayant cause à titre particulier, créancier chirographaire.

Par exemple, le propriétaire d’une maison, pour obtenir dans une vente un prix plus élevé, passe avec son locataire un bail apparent de 4000 DH, puis par une contre-lettre, il est convenu entre le propriétaire et le locataire que le loyer est ramené à son montant véritable 2.500 DH. L’immeuble est vendu ; l’acheteur, ayant cause particulier tenu de respecter le louage, pourra réclamer au locataire le loyer fixé dans l’acte apparent, 4.000 DH, sans que le locataire puisse lui opposer la contre-lettre.

Autre exemple : une personne conclut avec une autre une vente fictive. Les créanciers chirographaires de l’acheteur apparent, croyant que cet immeuble fait partie du patrimoine de leur acheteur, peuvent le saisir et sont à l’abri de la revendication de celui qui se prétendait le véritable propriétaire du bien en vertu d’une contre-lettre.

1 L’article 1341 du code civil français prévoit une valeur de 5000 FF (ancienne monnaie française).

2 Article 1321 du code civil français.

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II- La faculté pour les tiers d’invoquer l’acte secret : Les tiers peuvent invoquer la contre-lettre lorsque celle-ci leur est plus favorable que

l’acte apparent. Conforme, comme on l’a vu, à l’esprit de l’article 22 D.O.C. qui vise à protéger les tiers, cette solution se déduit de la lettre de ce texte par un argument a contrario : en posant que la contre-lettre n’a pas d’effet à l’égard des tiers, ce texte ne dispose nullement qu’elle n’en produit pas en leur faveur. La règle figurant à l’article 22 ne doit pas être retournée contre ceux qu’elle a pour but de protéger. La solution est, en outre, logique. Dès lors que les tiers passent outre à la protection que leur offre l’article 22 D.O.C., il est normal que l’acte secret qui exprime la réalité de l’accord conclu entre les parties et auquel l’article 230 D.O.C. confère efficacité, l’emporte.

Reprenons les exemples précédemment utilisés, en les amendant quelque peu. En cas de majoration par contre-lettre du loyer indiqué dans le contrat de louage relatif à un immeuble ultérieurement cédé, l’acquéreur de celui-ci, ayant cause à titre particulier pourra se prévaloir de la contre-lettre. De même, en cas de vente fictive, les créanciers chirographaires du vendeur fictif pourront invoquer la contre-lettre qui maintenait le bien dans le patrimoine de leur débiteur et le saisir.

III- Conflit entre les tiers : Il résulte des développements précédents que la contre-lettre n’a pas d’effet contre les

tiers, mais qu’elle peut être invoquée par eux quand ils y ont intérêt. Cette option peut faire surgir un conflit entre deux tiers, l’un prétendant ignorer la contre-lettre, l’autre voulant en profiter. Par exemple, un individu, débiteur insolvable, a vendu fictivement son immeuble à un tiers, qui a lui-même des créanciers. Il y a un conflit possible entre les créanciers du vendeur apparent qui invoquent la contre-lettre et les créanciers de l’acheteur apparent qui prétendent ne connaître que l’acte apparent.

La question a été longtemps controversée. Un arrêt de la cour de cassation française qui a valeur de décision de principe1, paraît avoir définitivement fixé la jurisprudence : en cas de conflit entre les tiers, la préférence doit être donnée à celui qui invoque l’acte ostensible. Cette solution est conforme à l’esprit de l’article 22 D.O.C. Il y est dit, non que les tiers doivent nécessairement profiter de la contre-lettre, mais que la contre-lettre ne saurait avoir effet contre eux, c'est-à-dire qu’elle ne doit pas leur nuire ; Or elle nuirait aux tiers si certains d’entre eux pouvaient l’opposer aux autres. Au surplus, la solution consacrée par la cour de cassation a le mérite de préserver la sécurité juridique en faisant valoir aux yeux des tiers, les situations apparentes sur les situations occultes. Elle protège celui qui a été victime des apparences.

Section III : L'effet du contrat à l'égard des tiers et des ayants cause

L'article 228 D.O.C. dispose que : « Les obligations n'engagent que ceux qu'ont été parties à l'acte : elles ne nuisent point aux tiers et elles ne leur profitent que dans les cas exprimés par la loi ».

Le bon sens, avant même l'individualisme, demande que chacun s'occupe de ses affaires, non de celles d'autrui.

Sous-section I : Les tiers Paragraphe I : Le principe de l'effet relatif

Un tiers ne peut réclamer le bénéfice d'un contrat que les contractants ont entendu conclure pour eux (à moins que l'un d'entre eux ne lui ait ensuite régulièrement cédé sa créance).

1 Cass. Civ., 25 avril 1939, DP 1940. 1. 12, note G. L., Grands arrêts, n°98. D’après François Terré et Cie, op.cit. phe. 529. p.498.

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Exemple : un propriétaire terrien ayant, par convention, accordé à un voisin un droit de passage sur ses terres, les autres voisins ne peuvent se prévaloir de la convention.

Réciproquement et surtout, un tiers n'est pas tenu d'assurer les obligations de l'un des contractants. Il peut les assurer s'il le veut bien, mais il n'y est tenu en rien : le contrat, en tant qu'il crée des obligations, lui est inopposable.

Paragraphe II : Les dérogations classiques de l'effet relatif du contrat :

Ces dérogations concernent la transmission du contrat aux ayants cause à titre universel (I), l'opposabilité du contrat aux tiers (II), la stipulation pour autrui (III) et la promesse de porte-fort (IV).

I- La transmission du contrat aux ayants cause à titre universel :

L'article 229 D.O.C. dispose qu'en principe, le contrat est transmis aux ayants cause à titre universel, « Les obligations ont effet, non seulement entre les parties elles-mêmes, mais aussi entre leurs héritiers ou ayants cause, à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de l'obligation ou de la loi.

Les héritiers ne sont tenus toutes fois que jusqu'à concurrence des forces héréditaires, et proportionnellement à l'émolution de chacun d'eux.

Lorsque les héritiers refusent d’accepter la succession, ils ne peuvent y être contraints et ils ne sont nullement tenus des dettes héréditaires : les créanciers ne peuvent, dans ce cas, que poursuivre leurs droits contre la succession ».

Voir à ce propos page (les incidences du droit successoral ou familial).

II- L'opposabilité du contrat aux tiers : Il faut distinguer effets du contrat et opposabilité du contrat : si les tiers ne peuvent être

liés par les effets du contrat, le contrat est un fait social qui s’impose à ceux, qu’ils peuvent invoquer ou que les parties peuvent invoquer à leur encontre.

Le contrat peut d'abord créer une situation juridique qui s'impose à tous. Il en est ainsi du contrat translatif de propriété : l'acquéreur d'un bien pourra opposer à tous les droits qu'il tient du contrat de vente.

De même, le tiers peut opposer le contrat aux parties : comme moyen de preuve par exemple ou pour s'exonérer d'une obligation dont il n'est pas tenu, ou pour agir en responsabilité délictuelle contre un contractant fautif qui lui aurait porté préjudice.

III- La stipulation pour autrui :

La stipulation pour autrui, rend un tiers à un contrat créancier. Elle se définit comme l'opération par laquelle une partie, le stipulant, obtient de l'autre, le promettant, qu'il s'engage envers une troisième, le tiers bénéficiaire.

La stipulation pour autrui peut poursuivre des objectifs variés : paiement d'une dette du stipulant envers le tiers, volonté de lui faire une libéralité.

L'article 34 D.O.C. nous brosse les conditions générales de la stipulation pour autrui. Il dispose à ce propos que « Néanmoins, on peut stipuler au profit d'un tiers, même indéterminé lorsque telle est la cause d'une convention à titre onéreux que l'on fait soi-même ou d'une libéralité que l'on fait au promettant.

Dans ce cas, la stipulation opère directement en faveur du tiers, celui-ci peut, en son nom, en poursuivre l'exécution contre le promettant, à moins que l'exercice de cette action n'ait été interdit par le contrat ou n'ait été subordonné à des conditions déterminées.

La stipulation est réputée non avenue, lorsque le tiers en faveur duquel elle est faite refuse de l'accepter en notifiant son refus au promettant. ».

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Exemples : - (A) fait promettre à (B) une prestation en faveur de (c). Tel : l'expéditeur d'une

marchandise stipule du transporteur qu'il la remettra au destinataire ; - Ou un père de famille qui stipule d'une compagnie d'assurance qu'à sa mort, elle

versera un certain capital à ses enfants. La stipulation pour autrui, fait naître trois rapports :

1 - Rapports entre le stipulant et le promettant : Le contrat entre stipulant et promettant sur lequel est greffé la stipulation pour autrui,

produit ses effets conformément au droit commun.

2 - Rapports entre le promettant et le tiers bénéficiaire : Le tiers à un droit direct contre le promettant : il peut agir directement en exécution pour

obtenir la prestation promise. Ce droit naît dès le jour du contrat entre le stipulant et le promettant.

3 - Rapports entre le tiers bénéficiaire et le stipulant : Le stipulant peut révoquer la stipulation tant que le tiers ne l'a pas acceptée. L'acceptation ou la ratification équivaut au mandat. Elle peut être tacite et résulter de

l'exécution par le tiers du contrat fait en son nom. Elle a effet en faveur de celui qui ratifie et contre lui à partir de l'acte qui en est l'objet,

s'il il y a déclaration contraire ; elle n'a effet à l'égard des tiers qu'à partir du jour où elle a été donnée (article 37 D.O.C.).

IV- La promesse de porte-fort :

La promesse de porte-fort est une pratique par laquelle, une personne (A) le porte-fort, promet à (B), qu'un tiers (C) consentira à tel contrat.

Exemple : un acheteur qui traite avec un seul indivisaire pour l'acquisition d'un bien

indivis. Ce dernier s'engage à se porter fort que les autres co-indivisaires ratifieront la vente.

Pratiquement, il faut supposer entre le porte-fort (A) et le tiers (C) des relations

personnelles, de famille ou d'amitié (A) se sent en mesure de persuader (C), le moment venu, qu'il est bon pour lui de consentir au contrat.].

Cette combinaison réunit au fond deux contrats : un contrat immédiat, entre (A) et (B) et un contrat éventuel entre (B) et (C). 1 - Le contrat immédiat :

Le porte-fort n'y promet pas exactement le fait d'autrui, mais le sien propre : il s'engage à faire de sorte que le tiers consente (obligation de faire).

En ce sens, il peut sembler que la combinaison ne déroge pas au principe de la relativité des conventions.

Si le tiers signe le contrat éventuel, le contrat immédiat est accompli. S'il refuse de signer, le contrat immédiat, inexécuté, entre en jeu : le porte-fort sera condamné à des dommages intérêts envers son contractant.

2 - Le contrat éventuel :

Jusqu'à ce que le tiers ait fait connaître sa volonté, ce contrat est ouvert, mais ne lui est pas opposable, et en droit, il reste absolument libre de ne pas ratifier.

S'il refuse sa ratification, le contrat n'aura jamais existé.

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S'il ratifie, le contrat se forme rétroactivement à la date de l'engagement du porte-fort. En ce sens qu'on peut dire que la combinaison déroge au principe de la relativité des conventions.

Sous-section II : Les ayants cause :

La notion d'ayant cause suppose une transmission de droit : l'acquéreur d'un droit est l'ayant cause de celui qui le lui a transmis.

On distingue deux catégories d'ayant cause selon que la transmission porte sur une universalité (soit un patrimoine, soit une fraction de patrimoine), ou au contraire, sur un droit considéré à titre particulier.

Les ayants cause à titre universel des parties (c'est à dire leurs héritiers ou légataires) doivent être entièrement assimilés au parties elles-mêmes (article 229 D.O.C.).

Les ayants cause sur lesquels il y a lieu de s'interroger ici seraient donc uniquement les acquéreurs à titre particulier (paragraphe I) et les créanciers chirographaires (paragraphe II).

Paragraphe I : Les ayants cause à titre particulier

Les ayants cause à titre particulier sont ceux qui tiennent leur droit sur un bien d'une autre personne.

Exemple : l'acheteur est l'ayant cause particulier du vendeur.

Pour déterminer dans quelle mesure les contrats produisent effet envers les ayants cause, il y a lieu de distinguer : - Les contrats créant un droit réel sur le bien transmis ; ils produisent effet au profit ou à la charge de l'acquéreur. Exemple : Si un contrat a crée une servitude, elle est transmise avec le fonds dominant ou le fonds servant ; - Les contrats ayants pour objet de créer un droit personnel en application des articles 228 et 229 D.O.C., les obligations en résultant ne sont pas transmises à l'acquéreur. Exemple : l'acquéreur d'un immeuble n'est pas tenu contractuellement envers un entrepreneur pour les répartitions commandées par le vendeur ;

Toutefois, certains droits personnels sont parfois transmis avec le bien.

Exemple : Les contrats de travail conclus par le cédant d'une entreprise sont transmis à l'acquéreur.

Paragraphe II : Les créanciers chirographaires :

Le créancier chirographaire est celui dont la créance n'est garantie par aucune sûreté. L'article 1241 D.O.C. stipule que : « Les biens du débiteur sont le gage commun de ses

créanciers, et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ».

Les contrats conclus par le débiteur ont effet, indirectement à l'égard des créanciers, dont le gage général sur le patrimoine de leurs débiteurs subit les effets des contrats passés par celui-ci, bénéficiant des augmentations et supportant les diminutions du patrimoine.

Dans certains cas, le créancier chirographaire est assimilé à une partie : - D'une part, il ne peut se prévaloir de défaut de date certaine d'un acte sous seing privé, il n'est pas tiers suivant l'interprétation dominante ;

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- D'autre part, il peut exercer les droits et actions que la convention a fait naître (l'article 453 C.P.C.). Il se comporte donc comme une partie par le biais de l'action oblique comme une dérogation à la relativité des contrats.

Dans d'autres cas, le créancier chirographaire est traité comme un tiers par rapport aux contrats que le débiteur a passé après la naissance de la dette.

Dans pareille situation, il peut reprocher une certaine fraude au débiteur d'où : - Lui sont inopposables les conventions par lesquelles le débiteur s'est sciemment

appauvri à leur préjudice (voir aussi l'article 658 c.co.). - Les contre-lettres sont inopposables aux créanciers chirographaires (article 22 D.O.C.).

IV. La responsabilité contractuelle; Lorsque le créancier ne peut pas obtenir de son débiteur l'exécution en nature de son

obligation, il devra alors se contenter d'une exécution par équivalent, le plus souvent sous forme de dommages-intérêts.

Section I : Les règles de base de la responsabilité contractuelle

Sous-section I : Les conditions de mise en jeu de la responsabilité contractuelle

- Existence d'un contrat ; - Existence d'un dommage ; - Existence d'une obligation.

Les trois conditions sur lesquelles repose la responsabilité contractuelle sont : la faute du débiteur consistant à l'inexécution de son obligation, le dommage et le lien de causalité entre la faute et le dommage.

Paragraphe I : La faute :

On doit distingue entre l'obligation de résultat et l'obligation de moyens. - Dans le cadre d'une obligation de résultat, le débiteur est obligé de fournir un résultat (exemple fabriquer une table). En cas d'inexécution, sa faute est présumée. Le débiteur ne peut s'exonérer en prouvant seulement n'avoir pas commis de faute : l'inexécution suffit à engager sa responsabilité. La présomption ne tombe qu'en cas de force majeure, du fait d'un tiers ou le fait du créancier ; - Dans le cadre de l'obligation de moyens, le débiteur s'engage à mettre en œuvre tous les moyens pour remplir ses engagements, mais il ne promet pas un résultat. Sa responsabilité n'est engagée que si le créancier prouve sa négligence ou son imprudence (exemple : l'obligation de soins du médecin).

L'obligation de moyen est toujours une obligation de faire. En cas d'inexécution de l'obligation, il n'est pas possible de présumer la faute du débiteur, il faut que le créancier la prouve. Elle apparaît comme une erreur de conduite que n’aurait pas commise un homme prudent, diligent et avisé, placé dans les mêmes circonstances.

Paragraphe II : Le dommage :

Les dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée et le gain dont il a été privé, et qui sont la conséquence directe de l'inexécution de l'obligation (article 264 D.O.C.).

Pour obtenir réparation, le créancier victime de l'inexécution doit justifier d'un dommage. Aux termes de l'article 263 D.O.C. : « Les dommages-intérêts sont dus, soit à raison de

l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l'exécution … ».

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Le défaut d'exécution donne lieu à l’octroi de dommages-intérêts compensatoires, dont le montant variera selon que l'exécution est totale ou partielle.

Le retard dans l'exécution peut donner lieu à l'attribution de dommages-intérêts moratoires dès que le créancier a apporté la preuve du préjudice que ce retard lui a causé.

Voir aussi les articles 261 et 262 D.O.C.

Paragraphe III : Le lien de causalité entre la faute et le dommage : Pour que le créancier puisse bénéficier de la réparation du préjudice causé par le

débiteur, il faut qu'il existe un lieu de cause à effet entre la faute et le dommage subi. Cette exigence est formulée par l'article 264 D.O.C. qui stipule que : « Les dommages

sont la perte effective que le créancier a éprouvé et le gain dont il a été privé, et qui sont la conséquence directe de l'inexécution de l'obligation …. ».

Exemples :

Si l'exploitant d'un parc de jeu pour enfants n'a pas surveillé les enfants et, par conséquent, a commis une faute, il ne sera pas pour autant tenu à la répartition du dommage subi par un enfant, si ce dommage est dû à un geste maladroit de la victime que l'exploitant n'aurait pu empêcher s'il avait correctement exécuté son obligation de surveillance (Civ. 1ère, 8 Nov. 1976, J.C.P.1976. IV. 395)1 ;

Un constructeur qui a mal exécuté les travaux d'une installation de distribution d'eau, ne sera pas responsable envers le maître de l'ouvrage dans le cas où le dommage éprouvé par celui-ci est dû à la qualité de l'eau circulant dans l'installation (Civ. 3ème, 24 octobre 1984, J.C.P. 1985. IV.5).

Sous-section II : Les causes d'exonération :

L'article 268 D.O.C. stipule que : « Il n'y a lieu à aucun dommage-intérêt lorsque le débiteur justifie que l'inexécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui être imputée, telle que la force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier ».

L'article 339 D.O.C. stipule quant à lui que : « Lorsque l'impossibilité d'exécution dépend du fait du créancier ou d'une autre cause qui lui est imputable, le débiteur conserve le droit d'exiger l'exécution de l'obligation pour ce qui lui est dû … ».

Les causes d'exonération sont donc soit : la force majeure, le fait du créancier ou le fait d'un tiers.

Paragraphe I : La force majeure :

(On assimile assez souvent la force majeure au cas fortuit). La force majeure se caractérise traditionnellement par trois traits qui sont

l'imprévisibilité ; l'irrésistibilité et l'extériorité.

I- L'imprévisibilité : C'est à dire que l'événement ne pouvait être prévu par le débiteur lors de la conclusion

du contrat car s'il était prévisible; le débiteur avait le devoir de prendre des précautions supplémentaires pour l'éviter.

II- L'irrésistibilité :

C'est à dire qu'il est insurmontable. « Nul n'est tenu à l'impossible ». Seule est retenue l'impossibilité absolue et non pas l'impossibilité relative, due par

exemple au fait que le débiteur n'est pas équipé d'une façon suffisamment importante pour pouvoir répondre à ses obligations.

1et

2 D’après CHRISTIAN LARROUMET « Droit civil », 2

ème édition, tome 3 « Les obligations : le contrat », Econominca, serie enseignement, 1990, p.670, annexe 160.

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On ne tient pas non plus compte, de la simple difficulté d'exécution : peu importe que l'exécution soit très onéreuse.

Mais un événement irrésistible, quoique prévisible, peut constituer un cas de force majeure.

III- L'extériorité :

L'événement doit être extérieur au débiteur, ainsi qu'aux moyens matériels et humains, auxquels il recourt pour exécuter le contrat.

Ainsi, la défaillance peut bien être irrésistible et imprévisible pour lui, mais comme elle est survenue à l'intérieur de son entreprise, il ne peut s'en prévaloir comme d'une force majeure.

Antinomie (contradiction) entre la force majeure et la faute : La force majeure exclut la faute, parce qu'un résultat ne peut être imputé à la faute qu'à

celui qui avait le pouvoir de l'empêcher. L'inverse aussi est vrai, c'est à dire que la faute exclut la force majeure et supprime

ainsi son effet libératoire.

Exemple : Une marchandise fragile qui devait être rangée dans un hangar couvert, a été laissée

sur le quai sans aucun soin, entraîne la responsabilité de celui qui en avait la charge si de mauvaises conditions climatiques surviennent et l'endommagent.

Voir aussi l'article 269 D.O.C.

Paragraphe II : Le fait du créancier : Le créancier ne peut se plaindre si c'est par son propre fait que le contrat n'a pas été

exécuté. Il n'est pas besoin que le fait ait en quelque chose d'irrésistible et d'imprévisibilité qui en

ait fait une force majeure pour le débiteur. (Ce cas est distinct de la force majeure).

Paragraphe III : Le fait d'un tiers : Ce fait ne libère le débiteur qu'à condition d'avoir été pour lui irrésistible et

imprévisibilité. Il y a donc là une variété de force majeure. Le vol commis par un étranger, est bien le fait d'un tiers, mais il n'est libératoire de la responsabilité que s'il a eu les caractères d'une force majeure véritable.

Section II : Les modalités conventionnelles de la responsabilité contractuelle Sous-section I : Les clauses exclusives ou limitatives de responsabilité - Les clauses exclusives de responsabilité permettent à une partie d'exclure complètement sa responsabilité contractuelle, en prévoyant qu'elle ne devra aucuns dommages-intérêts en cas d'inexécution ; - Les clauses limitatives de responsabilité fixent le montant maximum des dommages-intérêts qui pourront être alloués.

L'article 544 D.O.C. nous trace les grandes lignes de ces clauses : « Les parties peuvent convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie.

Cette clause n'a ce pendant pour effet que d'affranchir le vendeur des dommages-intérêts, mais ne peut le libérer de l'obligation de restituer, en tout ou en partie, le prix qu'il a reçu, si l'éviction s'accomplit.

La stipulation de non-garantie n'a aucun effet : 1- Si l'éviction se fonde sur un fait qui est personnel au vendeur lui-même ;

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2- Lorsqu'il y a dol du vendeur, ou lorsqu'il a sciemment vendu la chose d'autrui, ou lorsqu'il connaissait la cause d'éviction et qu'il ne l'a pas déclarée.

Dans ces deux cas, il doit, en outre, des dommages ». L'article 772 D.O.C. quant à lui, il stipule que : « Est nulle toute clause ayant pour objet

de limiter ou d'écarter la garantie du locateur d'ouvrage pour les défauts de son œuvre, surtout lorsqu'il a sciemment dissimulé ces défauts, ou lorsqu'ils proviennent de sa négligence grave ».

Sous-section II : Les clauses pénales :

La clause pénale est celle par laquelle les parties à un contrat conviennent d'une somme forfaitaire à verser en cas d'inexécution, de retard ou de faute dans l'exécution.

La clause pénale a l'avantage d'éviter aux parties les difficultés inhérentes à l'évaluation judiciaire des dommages-intérêts. D'autres part et lorsqu'elle est d'un montant élevé, la clause pénale apparaît comme un moyen de pression sur le débiteur, pour l’inciter à exécuter scrupuleusement ses obligations.

1. Les difficultés posées par les clauses pénales :

La clause pénale est en principe valable. Mais les juges peuvent-ils en réviser le montant, s'il apparaît sans rapport avec le préjudice subi ?

La jurisprudence française se fondant sur le principe de force obligatoire des conventions, s'est longtemps prononcée pour la négative.

Mais ce principe à été contesté lorsque à partir des années 60, certains professionnels ont profité de leur position de force pour imposer un montant excessif de dommages-intérêts. Tel a été le cas dans les contrats de crédit-bail, qui prévoyaient fréquemment qu'a défaut de paiement d'une mensualité, le contrat étant résilié de plein droit, le débiteur devant en plus de la restitution de la chose, à titre de clause pénale, une grande partie des loyers restant à courir.

2. La solution apportée par la loi française du 9 -7-1975 :

Le juge peut « modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ». Le texte interdisant toute stipulation contraire (article 1152 du code civil français).

Une loi du 11 octobre 1985 a complété cet article, précisant que le juge peut intervenir d'office.

L'appréciation du caractère manifestement excessif ou dérisoire est une question de fait qui relève du pouvoir souverain des juges de fond.

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I. Cas d’inexécution des contrats : Lorsqu'un contractant n'exécute pas son obligation, l'autre partie peut agir en justice

pour le forcer à exécuter (le régime de l'exécution forcée), mais le créancier ne peut pas toujours obtenir l'exécution forcée, ce qui justifie la résolution des contrats pour cause d'inexécution.

Section I : Règles générales:

Pour procéder à l'exécution forcée, il faut que le créancier :

1- Soit muni d'un titre exécutoire (exemple : une décision judiciaire passée en force de choses jugée, c'est à dire non susceptible de recours suspensif) ; 2- Qu'il est mis en demeure son débiteur.

Sous section I : La mise en demeure :

La demeure est le retard, plus largement le défaut du débiteur constaté dans les formes

légales. La mise en demeure est un acte par lequel le créancier demande au débiteur d'exécuter l'obligation, alors que celle-ci n'a pas été exécutée volontairement au moment où elle devait l'être (article 254 doc).

Paragraphe I : Forme de la mise en demeure :

L'article 255 D.O.C. dispose que : « Le débiteur est constitué en demeure par la seule échéance du terme établi par l’acte constitutif de l’obligation.

Si aucune échéance n’est établie, le débiteur n’est constitué en demeure que par une interpellation formelle du représentant légitime de ce dernier. Cette interpellation doit exprimer : 1- La requête adressée au débiteur d'exécuter son obligation dans un délai raisonnable ; 2- La déclaration que, passé ce délai, le créancier se considérera comme dégagé en ce

qui ce le concerne. Cette interpellation doit être faite par écrit, elle peut résulter même d'un télégramme,

d'une lettre recommandée, d'une citation en justice, même devant un juge incompétent ».

Paragraphe II : Les effets de la mise en demeure : Lorsque le débiteur est en demeure, le créancier a le droit de le contraindre à accomplir

l'obligation, si l'exécution en est possible ; à défaut il peut demander la résolution du contrat, ainsi que des dommages intérêts dans les deux cas (article 259/1 D.O.C.).

Le débiteur en demeure répond du cas fortuit et de la force majeure (article 266 D.O.C.).

La mise en demeure fait également courir les dommages et intérêts moratoires (réparant le préjudice lié au retard dans l'exécution).

Par exemple : pour une obligation de somme d'argent, les intérêts moratoires ne

courent qu’à partir de la sommation de payer.

II : LES RISQUES JURIDIQUES ET FINANCIERS AFFERENTS

AUX DIFFERENTS TYPES DE CONVENTIONS ET CONTRATS

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Pr. Idriss FAÏK - 26 -

Sous section II : L'exécution en nature :

Paragraphe I : Le domaine de l'exécution forcée : Lorsque le débiteur est en demeure, le créancier a le droit de le contraindre à accomplir

l'obligation, si l'exécution en est possible. Lorsque l'exécution n'est plus possible qu'en partie, le créancier peut demander, soit

l'exécution du contrat pour la partie qui est encore possible, soit la résolution du contrat, avec dommages-intérêts dans les deux cas. (article 259 D.O.C.).

Si l'obligation consiste en un fait dont l'accomplissement n'exige pas l'action personnelle du débiteur, le créancier peut être autorisé à la faire exécuter lui-même aux dépens de ce dernier, sinon, l'obligation de faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution.

Lorsque l'obligation consiste à ne pas faire, le débiteur est tenu à des dommages-intérêts par le seul fait de la contravention.

Le créancier peut, en outre, se faire autoriser à supprimer, aux dépens du débiteur, ce qui aurait été fait contrairement à l'engagement.

Paragraphe II : Les moyens de contrainte :

I - Les mesures conservatoires :

Le créancier à terme peut prendre, même avant l'échéance du terme, toutes mesures conservatoires de ses droits, il peut même demander caution lorsqu’il a de justes motifs de craindre la déconfiture, du débiteur ou sa fuite.

II- Le droit rétention :

Le droit de rétention est celui de posséder la chose appartenant au débiteur, de ne s'en dessaisir qu'à après paiement de ce qui est dû au créancier. Il ne peut être exercé que dans le cas spécialement établis par la loi. (Voir articles 292, et s. du D.O.C. et 779 D.O.C.).

III- L'astreinte :

L'astreinte est la condamnation à une somme d'argent, fixée par période de retard (jour, semaine, mois, …), destinée à faire pression sur un débiteur afin de l'inciter à exécuter. Elle est indépendante des dommages et intérêts auxquels il peut éventuellement s'ajouter. Section II : Règles spéciales aux contrats synallagmatiques :

L'interdépendance des obligations nées d'un contrat synallagmatique explique deux règles spécifiques en cas d'inexécution. Une partie peut suspendre l'exécution de ses obligations tant que son partenaire n'exécute pas lui-même : c'est l'exception d'inexécution (sous-section I). Si l'un des contractants n'exécute pas son obligation, l'autre peut demander en justice la résolution du contrat : c'est la résolution pour inexécution (sous section II). Mais il y a des cas où l’inexécution est due à une cause étrangère à la volonté du débiteur : c'est la théorie des risques (sous-section III).

Sous section I : L’exception d’inexécution :

L’exception d’inexécution est le droit d’une partie à un contrat synallagmatique de suspendre l’exécution de ses obligations, tant que son partenaire n’a pas exécuté les siennes.

L’exception d’inexécution constitue à la fois une garantie pour le créancier, qui n’aura pas à payer sans avoir reçu la prestation qui lui est due, et un moyen de pression sur le débiteur, qui doit exécuter s’il veut obtenir la prestation promise.

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L’article 235 D.O.C. stipule à ce propos : « Dans les contrats bilatéraux, l’une des parties peut refuser d’accomplir son obligation jusqu’à l’accomplissement de l’obligation corrélative de l’autre partie, à moins que, d’après la convention ou l’usage, l’un des contractant ne soit tenu d’exécuter le premier sa part de l’obligation.

Lorsque l’exécution doit être faite à plusieurs personnes, le débiteur peut refuser d’accomplir la prestation due à l’une d’elles jusqu’à l’accomplissement intégral de la prestation corrélative qui lui est due. ».

Sous-section II : La résolution pour inexécution

Victime de l'inexécution de ses obligations par son partenaire, un contractant peut préférer demander la résolution du contrat, éventuellement accompagnée de dommages-intérêts plutôt que l’exécution forcée.

Il n'est pas nécessaire que cette inexécution soit fautive, ou totale. La résolution ne peut en principe être prononcée qu'en justice, mais

exceptionnellement, la décision de justice n'est pas nécessaire, si les parties ont stipulé une clause résolutoire, qui entraîne la résolution automatique du contrat en cas d'inexécution.

L'article 259 D.O.C. dispose à cet effet que « lorsque le débiteur est en demeure, le créancier a le droit de contraindre le débiteur à accomplir l'obligation, si l'exécution en est possible, à défaut, il peut demander la résolution du contrat, ainsi que des dommages-intérêts dans les deux cas.

Lorsque l'exécution n'est plus possible qu'en partie, le créancier peut demander, soit l'exécution du contrat pour la partie qu'est encore possible, soit la résolution du contrat avec dommages-intérêts dans les deux cas.

On suit, au demeurant, les règles établies dans les titres relatifs aux contrats particuliers.

La résolution du contrat n'a pas lieu de plein droit, mais doit être prononcée en justice. ».

L'article 260 D.O.C. quant à lui dispose que : « Si les parties sont convenues que le contrat sera résolu, dans le cas où l'une d'elles n'accomplirait pas ses engagements, la résolution s'opère de plein doit par le seul fait de l'inexécution ».

Trois conditions sont en général, nécessaires pour appliquer la résolution : 1- Un contrat synallagmatique. 2- Une inexécution. 3- En principe l'intervention de la justice.

Sous-section III : La théorie des risques :

C'est le cas où l'inexécution est due à une cause étrangère à la volonté des débiteurs. C'est le plus souvent, lorsque l'inexécution est due à un cas de force majeure.

Si dans un contrat synallagmatique, la prestation de l'une des parties ne peut être fournie par suite d'un cas de force majeure, alors que la prestation de l'autre partie demeure possible, on peut supposer la question qui des deux parties doit supporter les conséquences de l'impossibilité d'exécution ?

Si on décide que la prestation demeurée possible, doit néanmoins, être fournie, le dommage sera pour son débiteur qui ne recevra rien en contre partie.

Si on admet qu'elle disparaît, le dommage sera pour le créancier qui en perd le bénéfice : C'est la question des risques.

Le principe est donc que : le débiteur de la prestation devenue impossible par la force majeure est libéré ; l'autre, dont la prestation est encore possible, l'est également.

Ceci trouve son fondement dans l'interdépendance des obligations réciproques dans les contrats synallagmatiques, où la cause de l’obligation de la partie dont la prestation

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demeure possible, disparaît s'il survient un cas de force majeure rendant impossible la prestation de l'autre.

L'article 268 D.O.C. stipule que : « Il n'y a lieu à aucun dommage-intérêt, lorsque le débiteur justifie que l'inexécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui être imputée, telle que la force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier ».

L'article 338 D.O.C. stipule que : « Lorsque l'inexécution de l'obligation provient d'une cause indépendante de la volonté des deux contractants, et sans que le débiteur soit en demeure, le débiteur es libéré mais il n'a plus le droit de demander la prestation qui serait due par l'autre partie. Si l'autre partie a déjà rempli son obligation, elle a le droit, selon le cas, d'en répéter la totalité, ou une partie, comme indue ».

II. Cas de force majeure : Section I : Les causes d'exonération :

L'article 268 D.O.C. stipule que : « Il n'y a lieu à aucun dommage-intérêt lorsque le débiteur justifie que l'inexécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui être imputée, telle que la force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier ».

L'article 339 D.O.C. stipule quant à lui que : « Lorsque l'impossibilité d'exécution dépend du fait du créancier ou d'une autre cause qui lui est imputable, le débiteur conserve le droit d'exiger l'exécution de l'obligation pour ce qui lui est dû … ».

Les causes d'exonération sont donc soit : la force majeure, le fait du créancier ou le fait d'un tiers.

Paragraphe I : La force majeure :

(On assimile assez souvent la force majeure au cas fortuit). La force majeure se caractérise traditionnellement par trois traits qui sont

l'imprévisibilité ; l'irrésistibilité et l'extériorité.

I- L'imprévisibilité : C'est à dire que l'événement ne pouvait être prévu par le débiteur lors de la conclusion

du contrat car s'il était prévisible; le débiteur avait le devoir de prendre des précautions supplémentaires pour l'éviter.

II- L'irrésistibilité :

C'est à dire qu'il est insurmontable. « Nul n'est tenu à l'impossible ». Seule est retenue l'impossibilité absolue et non pas l'impossibilité relative, due par

exemple au fait que le débiteur n'est pas équipé d'une façon suffisamment importante pour pouvoir répondre à ses obligations.

On ne tient pas non plus compte, de la simple difficulté d'exécution : peu importe que l'exécution soit très onéreuse.

Mais un événement irrésistible, quoique prévisible, peut constituer un cas de force majeure.

III- L'extériorité :

L'événement doit être extérieur au débiteur, ainsi qu'aux moyens matériels et humains, auxquels il recourt pour exécuter le contrat.

Ainsi, la défaillance peut bien être irrésistible et imprévisible pour lui, mais comme elle est survenue à l'intérieur de son entreprise, il ne peut s'en prévaloir comme d'une force majeure.

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Antinomie (contradiction) entre la force majeure et la faute : La force majeure exclut la faute, parce qu'un résultat ne peut être imputé à la faute qu'à

celui qui avait le pouvoir de l'empêcher. L'inverse aussi est vrai, c'est à dire que la faute exclut la force majeure et supprime

ainsi son effet libératoire.

Exemple : Une marchandise fragile qui devait être rangée dans un hangar couvert, a été laissée

sur le quai sans aucun soin, entraîne la responsabilité de celui qui en avait la charge si de mauvaises conditions climatiques surviennent et l'endommagent.

Voir aussi l'article 269 D.O.C.

Paragraphe II : Le fait du créancier : Le créancier ne peut se plaindre si c'est par son propre fait que le contrat n'a pas été

exécuté. Il n'est pas besoin que le fait ait en quelque chose d'irrésistible et d'imprévisibilité qui en

ait fait une force majeure pour le débiteur. (Ce cas est distinct de la force majeure).

Paragraphe III : Le fait d'un tiers : Ce fait ne libère le débiteur qu'à condition d'avoir été pour lui irrésistible et

imprévisibilité. Il y a donc là une variété de force majeure. Le vol commis par un étranger, est bien le fait d'un tiers, mais il n'est libératoire de la responsabilité que s'il a eu les caractères d'une force majeure véritable.

Section II : Les modalités conventionnelles de la responsabilité contractuelle : Sous-section I : Les clauses exclusives ou limitatives de responsabilité : - Les clauses exclusives de responsabilité permettent à une partie d'exclure complément sa responsabilité contractuelle, en prévoyant qu'elle ne devra aucuns dommages-intérêts en cas d'inexécution ; - Les clauses limitatives de responsabilité fixent le montant maximum des dommages-intérêts qui pourront être alloués.

L'article 544 D.O.C. nous trace les grandes lignes de ces clauses : « Les parties peuvent convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie.

Cette clause n'a ce pendant pour effet que d'affranchir le vendeur des dommages-intérêts, mais ne peut le libérer de l'obligation de restituer, en tout ou en partie, le prix qu'il a reçu, si l'éviction s'accomplit.

La stipulation de non-garantie n'a aucun effet : 1- Si l'éviction se fonde sur un fait qui est personnel au vendeur lui-même ; 2- Lorsqu'il y a dol du vendeur, ou lorsqu'il a sciemment vendu la chose d'autrui, ou lorsqu'il connaissait la cause d'éviction et qu'il ne l'a pas déclarée.

Dans ces deux cas, il doit, en outre, des dommages ». L'article 772 D.O.C. quant à lui, il stipule que : « Est nulle toute clause ayant pour objet

de limiter ou d'écarter la garantie du locateur d'ouvrage pour les défauts de son œuvre, surtout lorsqu'il a sciemment dissimulé ces défauts, ou lorsqu'ils proviennent de sa négligence grave ».

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Identifier les risques financiers et juridiques liés aux contrats et aux

conventions Une situation juridique risquée existe à partir du moment où les contrats ou les

obligations réglementaires ne sont pas applicables ou pas totalement remplies. A- Qu'est-ce que le risque juridique ? Le risque juridique est un risque multidimensionnel : 1. dont la cause peut être liée à : - une déficience de la veille législative, réglementaire ou déontologique ; - un défaut de conformité législative, réglementaire, déontologique ou contractuelle ; - un défaut d'organisation ou une déficience des processus internes de la société ou de la relation d'affaires concernée ; - un défaut de matérialisation d'une convention. 2. qui peut se présenter sous des manifestations diverses qui seront fonction par

exemple : - Du type de prestation (fournie ou reçue) et de sa nature (contrat "technique" ou non) ; - du moment de la survenance du risque ; - de la qualité du contenu de l'accord (définition claire et exhaustive des droits et obligations incombant à chacune des parties. 3. qui est susceptible en cas de réalisation, d'avoir des conséquences

significatives pour l'entreprise, car il peut générer : - une prestation obtenue ou fournie en inadéquation avec la volonté initiale des parties ou de l'une d'entre elles ; - une perte de temps pour l'ensemble des parties concernées, un défaut d'application total ou partiel de la convention ; - des sanctions administratives et/ou judiciaires, et/ou contractuelles ; - des pertes ou un manque à gagner ; - un risque d'image et de réputation pour l'entreprise.

On peut citer trois (3) définitions qui sont celles du risque opérationnel, du risque juridique et du risque de non-conformité : a. risque opérationnel : le risque résultant d'une inadaptation ou d'une défaillance

imputable à des procédures, personnels et systèmes internes ou à des événements extérieurs ;

b. risque juridique : le risque de tout litige avec une contrepartie, résultant de toute imprécision, lacune ou insuffisance susceptible d'être imputable à l'entreprise au titre de ses opérations ;

c. risque de non-conformité : le risque de sanction judiciaire, administrative ou disciplinaire, de perte financière significative ou d'atteinte à la réputation, qui naît du non-respect de dispositions propres aux activités bancaires et financières, qu'elles soient de nature législatives ou réglementaires, ou qu'il s'agisse de normes professionnelles et déontologiques, ou d'instructions de l'organe exécutif prises notamment en application des orientations de l'organe délibérant ;

III : L’ELABORATION DE TABLEAUX DE BORD DE SUIVI

FINANCIER

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Plus précisément, les définitions et explications pourraient être résumées ainsi : "Le risque juridique couvre les relations avec les contreparties (capacité, autorité, adéquation), les normes de rédaction et de documentation des contrats, ainsi que les risques de non-conformité aux réglementations et aux reportings réglementaires.

Enfin, il n'est pas douteux, pour les prestataires habilités, que l'expression finale d'un risque juridique est la survenance d'un risque de perte ou de manque à gagner.

4. Méthode(s) de mesure du risque :

La démarche première consiste en l'établissement d'une nomenclature globale des risques répertoriés, parmi lesquels figure le risque juridique.

Certes, cette nomenclature ne présente pas le même degré d'élaboration, d'extension et de précision d'un prestataire à l'autre. Mais ni la taille du prestataire concerné, ni son appartenance ou non à un groupe ne semblent en être des conditions déterminantes.

On a établi un inventaire particulier de représentation par schémas de leurs risques juridiques. Cet inventaire est communément dénommé cartographie spécifique des risques juridiques.

À titre d'illustration, trois grandes catégories de risques juridiques sont répertoriées : - les risques liés au non respect de la législation et de la réglementation générale, tels que le non respect du droit du travail ou une pratique anticoncurrentielle, etc. ; - les risques liés à la législation et à la réglementation spécifiques à l'exercice de services d'investissement, c'est-à-dire liés au respect des obligations professionnelles, tels qu'une perte d'agrément, la sanction d'une autorité de tutelle ou le non respect d'une règle déontologique ; - les risques liés aux engagements contractuels, tels que le non respect et la non formalisation des engagements contractuels. 5. Instruments de mesure du risque :

Le principe préalable, que déclare partager la majorité, est que l'on ne peut mesurer que ce que l'on connaît bien et que la précision de l'instrument de mesure est proportionnelle au degré de connaissance par l'opérateur du champ mesuré.

Aussi existe-t-il deux catégories d'instruments de mesure. - La première catégorie, quand elle est précisément désignée, sert d'abord à identifier

et analyser les risques juridiques. - La seconde catégorie sert ensuite à évaluer les conséquences judiciaire, financière et

sur la réputation de l'entreprise de l'éventualité d'un risque juridique ou de non conformité.

Appartiennent à la catégorie des instruments et supports d'identification et

d'analyse : • les différentes bases juridiques documentaires recensant de manière exhaustive et sécurisée toutes les conventions signées par un prestataire habilité et son groupe, qu'elles soient liées aux produits ou à l'entreprise elle-même, y compris les conventions intra-groupe ; • Les différentes bases de "contrats standards" aux clauses et définitions prédéterminées par les directions juridiques et validées par les responsables de la conformité et de la déontologie.

B. Qu'est-ce que le risque financier ? Les risques financiers sont inhérents aux marchés financiers. Aux risques financiers

traditionnels, risque de taux, risque de contrepartie ou risque de change, se sont ajoutés

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de nouveaux types de risques pour la gestion desquels la pratique a mis au point de nouveaux outils, les contrats financiers ou instruments dérivés. Mais ces nouveaux outils dont la fonction essentielle est une fonction de couverture sont indissociables de la spéculation et s’avèrent eux-mêmes sources de risques.

Le phénomène de globalisation croissante des économies ainsi que des marchés financiers, conjugué à l’instabilité des prix et à la volatilité des taux d’intérêts, a conduit à la multiplication des sources et à la diversification de la nature des risques financiers auxquels doivent faire face les acteurs économiques. Parmi les risques les plus courants, on identifie notamment, et classiquement :

- Le risque de taux, qui fait peser une incertitude sur les résultats de l’entreprise ; - Le risque de contrepartie, qui est le risque de défaillance de la part de certains

partenaires de l’entreprise ; - Le risque de change, lorsque l’entreprise réalise une opération dans une devise

autre que sa monnaie nationale ; - Besoins sous-estimés (consultants, achats externes, recettes arrivant trop tard /

règlements) Par la suite d’autres risques sont apparus. Certains ne sont pas directement

financiers (par exemple les risques géologiques ou climatiques, mais se sont trouvés « financiarisés » par leur prise en compte dans certains dispositifs financiers.