18
1981, 63, n ° 6. m m | m I I 0 f.4 Contr61e anionique des propri6t6s fonctionnelles de rh6moglobine A humaine I. ~ Introduction. Au cours des 20 ou 30 derni~res an- ndes de nombreuses dtudes ont montrd l'extr~me variabilitd de I'affinit~ pour I'oxyg~ne du sang des vertdbrds. Ces dif- ferences d'affinitd estim~es par la mesure de pression partielle d'oxyg~ne de demi- saturation ou P~o tdmoignent de I'adapta- tion des diff~rents groupes d'animaux soit leurs besoins m~taboliques, soit ~ leur environnement (teneur ambiante en oxy- gdne de leur habitat) [I]. A u sein m~me de chaque espdce cette variation est retrouvde- dans de nombreuses esp~ces mammif~res le sang foetal a une forte affi- nitd et le sang maternel une faible affinitd. Cette variation fonctionnelle des hdmoglo- bines est aussi ddmontrde au niveau mold- culaire comme I'illustre la forte affinitd des hdmoglobines monom~riques ou sous- unitds isoldes et la faible affinitd des h~moglobines t~tram~riques prdsentes dans les drythrocytes. Enfin comme nous le verrons plus loin il existe une diffdrence d'affinit~ pour I'oxygdne entre I'hdmoglo- bine t~tramdrique ddoxygdnde et la m~me moldcule presque compl~tement oxygd- nde. Ce sont ces variations d'affinit~ inter ou intra esp&ces ou intra moldculaires qui rendent compte de I'efficacitd optimale de ces hdmoprotdines comme transporteurs de I'oxyg~ne puisqu'elles permettent aussi bien la captation de I'oxyg~ne du milieu ambiant que sa ddlivrance aux tissus pdri- ph~riques, lieu de son utilisation m~tabo- lique. Tr~s schdmatiquement les mdca- nismes responsables de ces diffdrences d'affinitd pour I'oxyg~ne sont au nombre de trois. IIs peuvent ~tre lids : soit ~ la structure primaire des chatnes polypeptiques, la composition et la sdquence des acides amines intervenant sur I'affinitd de I'h~me pour le ligand ; soit ~ une variation des structures tertiaire et quaternaire, variations ddpen- dant de I'dtat d'oxygdnation des groupes h~mes ; soit, et c'est I'ob)et de cet article, la composition du milieu aqueux drythro- cytaire environnant les molecules d'h~mo- globines. II s'agit I~ de diffdrences soit de liaison, soit de concentration et/ou d'ac- tivitd d"effecteurs anioniques (hdtdro- tropes). Deux types d'effecteurs inter- viennent dans la plupart des esp~ces de vertdbr~s et en particulier chez les mammif~res : le chlore, anion monovalent prdsent ~ la concentration de 0.06 M dans les drythrocytes et les polyanions organo- phosphords, produits directs ou indirects de la glycolyse ~rythrocytaire repr~sentds chez les mammif~res ( dont I'homme) par le 2,3 bis phosphoglycdrate (DPG) et pour une part moindre par I'ATP. Chez les oiseaux I'effecteur phosphord est I'inositol pentaphosphate et I'addnosine triphos- phate chez les poissons. Ces diffdrents facteurs de modulation de I'affinitd pour I'oxyg~ne des hdmoglo- bines peuvent ~tre lids entre eux, une variation de structure primaire ~ I'un des sites de liaison de I'effecteur modifiant par exemple I'affinitd de la protdine pour I'effecteur anionique prdsent dans I'~ry- throcyte. La fixation d'effecteurs anio-

Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

  • Upload
    shang

  • View
    215

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

m m

| m I I

0

f.4

Contr61e anionique des propri6t6s fonctionnelles

de rh6moglobine A humaine

I. ~ I n t r o d u c t i o n .

Au cours des 20 ou 30 derni~res an- ndes de nombreuses dtudes ont montrd l'extr~me variabilitd de I'affinit~ pour I'oxyg~ne du sang des vertdbrds. Ces dif- ferences d'affinitd estim~es par la mesure de pression partielle d'oxyg~ne de demi- saturation ou P~o tdmoignent de I'adapta- tion des diff~rents groupes d'animaux soit

leurs besoins m~taboliques, soit ~ leur environnement (teneur ambiante en oxy- gdne de leur habitat) [ I ] . A u sein m~me de chaque espdce cette variation est retrouvde- dans de nombreuses esp~ces mammif~res le sang foetal a une forte affi- nitd et le sang maternel une faible affinitd. Cette variation fonctionnelle des hdmoglo- bines est aussi ddmontrde au niveau mold- culaire comme I'il lustre la forte affinitd des hdmoglobines monom~riques ou sous- unitds isoldes et la faible affinitd des h~moglobines t~tram~riques prdsentes dans les drythrocytes. Enfin comme nous le verrons plus loin il existe une diffdrence d'affinit~ pour I'oxygdne entre I'hdmoglo- bine t~tramdrique ddoxygdnde et la m~me moldcule presque compl~tement oxygd- nde. Ce sont ces variations d'affinit~ inter ou intra esp&ces ou intra moldculaires qui rendent compte de I'efficacitd optimale de ces hdmoprotdines comme transporteurs de I'oxyg~ne puisqu'elles permettent aussi bien la captation de I'oxyg~ne du milieu ambiant que sa ddlivrance aux tissus pdri- ph~riques, lieu de son utilisation m~tabo-

lique. Tr~s schdmatiquement les mdca- nismes responsables de ces diffdrences d'affinitd pour I'oxyg~ne sont au nombre de trois. IIs peuvent ~tre lids :

soit ~ la structure primaire des chatnes polypeptiques, la composition et la sdquence des acides amines intervenant sur I 'affinitd de I'h~me pour le ligand ;

soit ~ une variation des structures tertiaire et quaternaire, variations ddpen- dant de I'dtat d'oxygdnation des groupes h~mes ;

soit, et c'est I'ob)et de cet article, la composition du mil ieu aqueux drythro-

cytaire environnant les molecules d'h~mo- globines. II s'agit I~ de diffdrences soit de liaison, soit de concentration et /ou d'ac- tivitd d" effecteurs anioniques (hdtdro- tropes). Deux types d'effecteurs inter- viennent dans la plupart des esp~ces de vertdbr~s et en particulier chez les mammif~res : le chlore, anion monovalent prdsent ~ la concentration de 0.06 M dans les drythrocytes et les polyanions organo- phosphords, produits directs ou indirects de la glycolyse ~rythrocytaire repr~sentds chez les mammif~res ( dont I 'homme) par le 2,3 bis phosphoglycdrate (DPG) et pour une part moindre par I'ATP. Chez les oiseaux I'effecteur phosphord est I ' inositol pentaphosphate et I'addnosine triphos- phate chez les poissons.

Ces diffdrents facteurs de modulation de I'affinitd pour I'oxyg~ne des hdmoglo- bines peuvent ~tre lids entre eux, une variation de structure primaire ~ I'un des sites de liaison de I'effecteur modif iant par exemple I'affinitd de la protdine pour I'effecteur anionique prdsent dans I'~ry- throcyte. La fixation d'effecteurs anio-

Page 2: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

IV f

niques sur I'h~moglobine a pour conse- quence de diminuer son affinit~ pour I'oxyg~ne et d'augmenter sa sensibilit~ aux variations du pH (effet Bohr), mdca- nisme essentiel du transport de Foxy- g~ne par le sang. En d'autres termes I'ef- let des anions est de moduler, en fonction des besoins physiologiques, les propridt~s intrins~ques de I'h~moglobine. Le but de cet exposd est de rappeler les caract~ris- tiques essentielles de la liaison du 2.3 DPG et du chlore ~ rh~moglobine humaine.

II. ~ Bases structurales de la fonc~ion de I 'h~moglobine humai,ne.

La structure fonctionnelle de I'h~mo- globine A est t~tram~rique compos~e de 4 cha]nes polypeptidiques (sous-unit~s) semblables deux ~ deux (2 ~ et 2 ~), chaque cha~ne renfermant dans une poche hydrophobe, I'h~me compos~ de la proto- porphyrine IX et d'un atome de fer fer- reux. La structure t~tram~rique d~pend de la concentration des cha~nes polypepti- diques en presence selon les r~actions d'~quilibre.

2 o~ + 2 ~ ~ 2 (o:~) ~ ~ 1 2

La constante d'dquilibre de la premiere r~action est beaucoup plus dlev~e que celle de la rdaction 2 [~ ] . A faible concen- tration la dissociation du tdtram~re pro- voque la formation de dim~res mais d'une quantitd insignifiante de sous-unitds iso- Ides. Le dimdre cc~ a une affinitd pour I'oxygdne tr~s dlevde similaire ~ celle d'une sous-unitd isolde et est impropre la ddlivrance de I'oxygdne aux tissus. A la concentration existant dans I'drythrocyte, (5 mM) I'hdmoglobine est essentiellement tdtramdrique et permet la captation pulmo- naire et la ddlivrance tissulaire de I'oxy- g~ne par I'interm~diaire de 3 propridtds fondamentales :

affinitd pour I'oxygdne mod~rde ; liaison coopdrative de roxyg~ne

c'est-&-dire augmentation de I'affinitd pour I'oxyg~ne avec I'augmentation de la quan- titd d'oxyg~ne li~ ;

ddpendance de I'affinitd avec le pH de I'environnement, un pH acide dimi- nuant I'affinitd pour I'oxyg~ne et vice- versa. Cette propridtd est commundment appelde effet Bohr.

La moddlisation fonctionnelle proposde par Monod et aL [3] rend compte des

deux premieres propri~t~s de I'hdmoglo- bine dnoncdes ci-dessus. Ce module dit de transition concertde pr~voit que ies sous- unitds du t~tram~re peuvent s'associer en deux conformations quaternaires diff~- rentes et en ~quilibre entre elles. L'une, caract~ristique de la deoxyhdmoglobine, est contrainte (structure T) ces con- traintes opposant une rdsistance ~ la fixa- tion de I'oxygdne (structure d'affinitd faible pour I'oxyg~ne). L'autre, caractd- ristique de I'oxyh~moglobine est non con- trainte ou relach~e (R) et son affini~ pour I'oxyg~ne est d'environ 100 fois sup~- rieure ~ ce/le de la forme T. La transition /ors de I'oxyg~nation, d'une structure de faible affinit~ ~ une structure de forte affi- nit6 explique le ph6nom~ne de coop~ra- tivitd positive observ& Le module allost6- rique de Monod et al. [3] est d~fini par 3 param~tres : la constante <( L )) d'allo- st~rie, ~gale au rapport des concentrations des t~tram~res sous forme T et sous forme R, en I'absence d'oxygdne (L -~ To ~ ) ; la constante ~< c ~) ~gale au rapport

des constantes d'association b rdquil ibre (K) de I'oxyg~ne ~ la structure T et R

KR soit c -- K~ ; la pression m~diane ou de

demi saturation (Pm ~ Pso si L ~-- 10 6 ) relide aux param~tres pr~cddents. La coop~rativit~ qui t~moigne de I'interaction entre les groupes h~mes Iors de Foxy- g~nation est estim~e par rexposant n de I'~quation de Hil l et sa valeur maximale est de 3 ~ P~o quand L a une valeur moyenne proche de 10 6 (fig. 1). Le mo- dule de M WC pr~dit que la valeur de n d~croit de part et d'autre de cette valeur moyenne de L (fig. 2). Une valeur basse de L indique qu'en I'absence d'oxyg~ne une proportion importante des t~tram~res sont sous forme R (d~stabilisation de la forme T). A rautre extr~mit~ de la courbe une valeur ~lev~e de L indique la sur- stabilisation de la forme T telle que m~me en presence d" une concentration saturante du ligand une proportion importante de t~tram~res reste sous forme T. Selon ce module fonctionnel I'affinitd globale du t~tram~re pour I'oxyg~ne (Pso) d~pend essentiellement de la constante L, les constantes d'association KT et KR ~tant supposdes invariantes. Les donn~es exp~- rimentales, acquises depuis I'~nonc~ de ce module ont montr~ que ce schema dtait incomplet puisque les valeurs de Kr et

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

Page 3: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

V

de KB d6pendaient du pH. C'est le rn~rite du module st6r6ochimique de Perutz [4, 5] de d6crire plus pr6cisdment le m6ca-

nisme de la coopdrativit6 mais aussi de rendre compte de I'effet Bohr. Trds sch6- matiquement les contraintes de la struc-

-1

KR;

A ~

/ /

/

-2

i., I I -1 0 1

log PO2 mm H 9

Fig. 1. - - Propridt6s fonctionnelles de I'HbA : repr6sentation de Hill de la courbe d'association de I'oxygbne ~ I'Hb t6tram6rique. La courbe 1 (P~o 1) est un example obtenu dans une solution d'HbA (0.7 mM heme) h pH 7.0, 25°C et d'activit6 ionique faible (p~ --- O.O1 M). La courbe 2 (P= =) est la courbe obtenue dans une solution identique mais en pr6sence de NaDPG 2 mM. On notera sur ces 2 courbes I'existence des 2 segments sup6rieurs et inf6rieurs dont la pente est de 1 compar6e & une pente proche de 3 pour le segment interm6diaire (Pso). KRI, K R=, KT, et KT= indlquent les valeurs des constantes d'association de I'oxy- g~ne ~ la structure T, (deoxy) et R, (oxy) respectivement. En pr6sence de DPG (courbe 2) c'est essentiellement I'affinit6 de la structure T pour I'oxygi~ne qui est abaiss6e, KR= restant tr~s voisin de KRs • L'6nergie libra d'interaction (AF) peut 6tre estim6e comma indiqu6 i~ partir de la distance s6parant les asymptotes sup6- rieure et inf6rieure. L'addition de D*PG augmente AF mais essentiellement par 1"616vation de KT=.

1 9 8 1 , 63, n ° 6 .

Page 4: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

vI

ture quaternaire T ddoxy sont expliqudes par la prdsence de 8 ponts salins intra et inter chaines qui se rompent Iors de la fixation de I'oxygdne ~ I'hdme. Cette rup- ture progressive est due ~ des modifica- tions des structures tertiaires des sous- unitds qui, au sein d'une m~me structure quaternaire T ou R, peuvent ~tre sous forme t ou r. La transition t ~ r Iors de I'oxygdnation d'une sous unitd ddpendrait des variations de tension (ou de rdpul- sion) exercde par le Fe ~+ sur la cha~ne polypeptidique par I' intermddiaire de la liaison de covalence qui I 'unit ~ I'histi- dine proximale (/:8) [6]. Lorsqu'un certain nombre de sous unitds (3 en gdndral) sont oxygdndes (et sous forme r) la structure quaternaire se modif ie de T en R. Le moddle de Perutz explique 6galement le mdcanisme de I'effet Bohr alcalin. Les ponts salins de la structure quaternaire ddoxy intdressent au moins deux groupes de rdsidus dont la charge (pKz) ~ pH neutre se modifie Iors de la transition t ~ r. Ces groupes dits groupes de Bohr sont le groupement imidazo/e de i 'histi-

nale de la chaTne opposde) so i l par I'in- termddiaire d'un anion, au groupernent guanidinium du m~me rdsidu (Arg 141o~) (fig. 3). En structure deoxy le pKz de c e s groupes, en liaison ionique avec ie groupe opposd, est 61ev6 (proche de 8). Lors de I'oxygdnation, et de la rupture du pont salin, leur pKz respectif s'abaisse vers leur valeur normale, proche de 7.0. Ceci explique le relargage de protons contem- porain de I'oxygdnation du tdtram~re. En I'absence de tout effecteur hdtdrotrope (anions) environ 1 proton est relargu6 pH 7.0 Iors de I'oxygdnation compldte d'une mole de tdtramdre en solution [1]. Le module stdrdochimique de Perutz per- met de comprendre que toute condition qui stabilise les liaisons ioniques contrai- gnant les structures t et T se traduit fonc- tionnellement par I'augmentation de L e t de Pm et d'expliquer I'augmentation de la constante d'association K~. L'effet Bohr alcalin est expliqu6 par la stabilisation des structures tertiaire ( t) et quaternaire (T) due au renforcement des ponts salins par les protons fixds sur les groupes de Bohr.

13

3

2

• I I I I " " I f I

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 log L

Fig. 2. - - Variat ion de I 'exposant n de Hil l estimd ~ P~o ~ P m e n fonction de log L, constante d'al lost6r ie. De part et d'autre de la valeur normale de L pour laquelle n = 3, I ' index de I ' interaction hSme-h~me diminue. L'expl icat ion est donn6e dans le texte confor- mdment au module de fonct ionnement al lost~rique propos6 par Monod e t a l . [ 3 ] .

dine-146-~ (extrdmit6 C terminale des chaines ~) lid en structure ddoxy ~ I'as- partate 94 ~ d'une part et le groupe amind de la val ine-l~l (extrdmit6 N termi- nale des chaines ~) lid en structure t soit au carboxyl de I'arginine-141~2 (C termi-

Ceci implique que I'affinit6 de la ddoxy Hb (t, T) pour les protons est plus 61evde que celle de I'oxy Hb (r, R). Fonctionnel- lement cette liaison diffdrentielle de I'ef- fecteur (H*) ~ la ddoxy et ~ I'oxyhdmo- globine est dite (( lide z) I'oxygdne ~. Ce

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

Page 5: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

VII

mbcanisme de I'effet Bohr, propri~t~ intrinsbque de I'h~moglobine t~tram~- rique, est fondamental. Nous allons voir que le m~canisme de ref fet des anions chlore ou DPG sur I'h~moglobine, ob~it dans son essence, ~ un m~canisme sem- blable.

Rappelons enfin que I'intbr~t physiolo- gique de ref fet Bohr est double : i l faci- lite la captation et la d~livrance de I'oxy- g~ne aux tissus p&riph&riques lieu de pro-

m~rique sont profond~ment modifMes par la liaison des anions. Pour que cet effet soit possible il faut :

que les anions en cause soient en concentration adequate dans I'~rythro- cyte ce qui est le cas du CI- et du DPG.

que I'h&moglobine renferme des rd- sidus ionis~s charges positivement au pH physiologique de I'~rythrocyte et acces- sibles aux anions : groupes ~ amines des extr~mitbs N terminales ou groupes ioni-

N.;

"-''cl coo- !.<1126 A,p}

~ : . . . . N":~--! =140 Lysl

J " "

!"2 /,3 Glu FcOO: . . . . Gua ÷ I=<1 92 Arg.] (d'aprks Ba ldwin)

Fig. 3. - - Representation sch~matique des interactions ~lectrostatiques (ponts salins) existant dans la structure T deoxy de rHb et qui se rompent Iors de I'oxyg~nation. Cette rupture a pour double consdquence d'augmen- ter l'affinit6 de I'hi~me pour roxyg~ne (,diminution des contraintes impos6es au t6tram~re deoxy) et de provoquer le relargage de protons clans le milieu (effet Bohr alcalin) par retour vers la neutraHt~ du pKz des groupes en cause (Val 1=¢t His 146-~}.

duction des protons d'origine m~tabo- lique ; i l contribue pour une part impor- tante au pouvoir tampon du sang (trans- port des protons ~ pH constant) et donc au maintien de I'hom~ostasie acido- basique de I'organisme.

I!1. - - E f fe t des a,nions.

I i i -1 G6n~ra l i t~s .

Los propri~t~s fonctionnelles intrin- s~ques de I'h~moglobine A (HbA) tdtra-

s~s des chMnes lat~rales. L'effet global d~pendra alors du rapport entre la densit~ des charges positives accessibles de la prot~ine (d~pendant du pH ambiant} et du hombre de charges n~gatives de ranion en presence (d~pendant de sa valence et /ou de sa concentration).

que les deux partenaires de I'inter- action ionique soient ajustables ce qui d~pend ~ la fois de la st~ricit~ de I'anion et de I'accessibilit~ du site de liaison.

1981, 63, n ° 6.

Page 6: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

"v3J[

qu'i l y ait une diffdrence d'aff initd de la prot~ine pour l 'effecteur anionique se/on que I'h~moglobine est en structure quaternaire T ou R, ce qui d~pend des remaniements structuraux du t~tram~re /ors de I'oxyg&nation envisagds plus haut.

On peut r~sumer /'effet des anions sur les propri&t~s fonctionnelles de/ 'Hb selon le schema suivant :

Les anions se fixent, au niveau des extr~mit~s terminales des cha~nes ~ et et dans la cavit~ centrale comprise entre les 2 cha~nes ~.

Les anions se fixent pour des raisons st~riques pr~f~rentiellement ~ la d~oxy Hb, ajoutant des liaisons ioniques suppl~- mentaires ~ celles pr~existantes. En con- s~quence leur liaison stabilise les struc- tures t et T, d~place I'~quilibre allost~- rique vers la forme T et augmente L e t Pm.

L'interaction entre I'effecteur anio- nique et /es groupes amines charges posi- tivement de la prot~ine s'accompagne d'une ~l~vation du pKz de ces groupes et donc d'une absorption de protons. Le relargage de/'anion, lots de I'oxyg~nation de I'Hb entra~ne ~galement le relargage de ces protons additionnels qui apparais- sent dans le milieu comme un effet Bohr additionnel ou exc~dentaire ~ I 'effet Bohr intrins~que. En d'autres termes, /'inter- action pr~f~rentielle des anions avec la d~oxy Hb ~quivaut fonctionnellement transformer certains r~sidus ou groupes ionis~s de cha~nes lat~rales en groupes de Bohr additionnels. Par ce m~canisme la liaison des anions contribue ~ stabiliser encore davantage les structures t et T et

diminuer I 'affinit~ globale pour Foxy- g&ne.

L'interaction anion-d~oxy Hb est exo- thermique. Le relargage des anions/ors de I'oxyg~nation a donc pour consequence la diminution de la chaleur d'oxyg~nation du t&tram~re estim~e par le rapport &log P5o/ ~T.

En abaissant pr~f~rentiellement la cons- tante d" association de I'oxyg~ne ~ la struc- ture T d~oxy, la fixation des anions aug- mente I'&nergie libre d'interaction (t~F) estim~e par la difference s~parant les deux extr~mit~s non cooperatives de la courbe d" association (fig. I) .

9 L'effet des anions d~,pend non seu- lement du rapport de/eur constante d'as- sociation ~ /a ddoxy et ~ Foxy Hb mais ~galement de leur concentration. A forte concentration la fixation de/ 'anion ~ /'oxy Hb devient saturante. Lorsque /a quantit~ li~e ~ /'oxy Hb est ~quivalente ~ ce//e li~e

/a d~oxy Hb, I'~/~vation de Pso atteint un plateau et /'effet Bohr additionnel dis- paraH.

111-2 Effet du 2,3 DPG.

Depuis 1967, I'dtude precise du r6/e du DPG ~rythrocytaire sur les propridt~s fonctionne//es de/ 'Hb est li~e aux travaux de R. et R. Benesch [8, 9]. Produit de /a g/ycolyse ~rythrocytaire, ce d~riv6 ~ 3 car- bones fortement chargd ndgativement au pH physiologique est present dans I'~ry- throcyte ~ une concentration 6quimolaire

cel/e de I'h~moglobine (4-5 raM). II se lie de facon sp~cifique sur des rdsidus charges positivement situds ~ /'entrde de la cavit6 centra/e entre/es 2 chaines ~J du t~tram~re.

111-2.1 Effet sur I'aft:i~it~ de VHb pou,r ~1'O2.

Le DPG diminue I'affinit~ g/obale de I'h~moglobine pour/ 'oxyg~ne et cet effet d~pend de sa concentration. L'effet maxi- mum est obtenu /orsqu'une mole de DPG est li~e ~ une mole de t6tram~re d~oxy- g~n~. En solution in vitro, ~ 25°C, pH 7.0 et / -- 0.01 M, / 'add i t ion de DPG (2 raM) multiplie par 5 la P5o mesur~e en son absence. A cette concentration/e DPG se lie quasi exclusivement ~ /a d~oxy Hb et pratiquement pas ~ /'h~moglobine compl~- tement oxyg~n~e. La constante de disso- ciation (KD) ~ pH 7.2 et 37°C est de /" ordre de O. 1 mM et est mu/tip/i~e par 50 environ/ors de/'oxygenation (Tableau 1). L'effet du DPG s'exerce essentiel/ement par la diminution de I'affinit~ de la struc- ture T pour I'oxygbne dont i/ augmente les contraintes. K~ varie par exemple de 8.7 77 mmHg en /'absence et en presence de 2 mM de DPG respectivement. Simu/tan~- ment et dans les m&mes conditions L varie de 4 × 108 ~ 2.6 × 106 [ | 0 ] . L'~tude des effets du DPG sur / 'affinit~ pour I'Os de /'Hb a permis deux observations impor- tantes concernant la fonction de rh6mo- globine. I /a ~t~ montr~ qu'en pr6sence de DPG I'oxyg~nation du tdtram~re corn-

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

Page 7: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

I X

mence prdf~rentiellement par I'un des h~mes des chaines ~ [1 I , 12] . L'augmen- ration importante de Kr en presence de DPG, effecteur exclusif des cha~nes ~J indique donc que les contraintes impos~es par sa liaison aux cha~nes ~ sont trans- raises par un m~canisme encore inconnu, aux h&mes des cha~nes ~. II est ~galement bien d~montr~ que, ~ pH et tempdrature

Tableau 1.

Complexe KD mM

Hb D~PG 0.103 ± 0.015 HbO= DPG 4.75 ± 0.71 Hb AT,P 0.127 ± 0.025 HbO= /~TP 3.43 ± 0.85 Mg DPG 1.5 ± 0.3 Mg ATP 0.038 ± 0.004 Mg Hb 400 ± 100 Mg HbO= 400 ___ 100 Hb (Mg ATP) 1.15 ± 0.35 HbO= (Mg ATP) 5.4 +__ 2.7

Constantes de dissociation de complexes de Mg, ATP, DPG et hdmoglobine dans les condi- tions intra 6rythrocytaires :,pH ----- 7.2, t~ --- 0.15, T = 37°C (~52).

constants, Kr varie avec la concentration de DPG, indiquant le relargage d'une par- tie du DPG li~ aux cha~nes ~J Iors de roxy- g~nation initiale des chaines ~ [ 13 ] . Ces deux observations d~montrent qu'i l existe une interaction entre les groupes h&mes au sein de la structure quaternaire T, ce qui contredit le schema de fonctionne- ment allost~rique propos~ par Monod et col. (1965). Un module coherent de fonc- tionnement allostdrique dolt tenir compte du fait que I'affinit~ pour I'oxyg~ne d'une sous-unit~ dans le t~tram~re d~pend non seulement de la structure quaternaire pr~- dom/nante mais ~galement de I'~tat de ligation des autres sous unit~s.

111-2.2 Ef fe t Ou DPG su~r I ' e f fe t Bohr a Ica~li:n,.

A ux concentration et temperature phy- siologiques ref fet du DPG sur I 'affinit~ de rHb pour roxyg~ne est maximum pH = 6.5 et s'annule ~ pH 9.0. Simulta- n~ment la liaison du DPG multiplie par 2 I 'effet Bohr alcalin intrins~que (effet Bohr additionnel). Cet effet est ddpendant du

pH, suivant en cela la pH d~pendance de la fixation du DPG ~ I'Hb. Les expdriences de titration directe de solutions d'Hb puri- fide, d~oxyg~n~e et oxyg~n~e, en presence et en I'absence de DPG [14, 15] ont d~montr~ qu'apr~s addition de DPG la courbe de I'effet Bohr en fonction du pH est d~plac~e sur la droite de celle d~ter- mince en son absence, le pic maximum ~tant observ6 aux environs de pH = 7.4 au lieu de pH 7.2 (Figure 4). Ce ddplace- ment du pic t~moigne de I'~l~vation du pK apparent global de la prot~ine r~sultant de rabsorption de protons contemporaine de la fixation de reffecteur.

L'analyse prdcise de ces courbes d~- montre que :

de pH 6 ~ pH 9 I 'affinitd de ta d6oxy Hb pour le DPG est constamment sup~- rieure ~ celle de I'oxy Hb, la difference entre les affinitds des deux structures (T et R) augmente avec I'~l~vation du pH.

A pH tr~s acide (< 6.0), dans des conditions ~loign~es des conditions phy- siologiques, on peut mettre en ~vidence la liaison pr~f~rentielle du DPG ~ I'oxy Hb. L'augmentation progressive de I'affi- nit~ de I'oxy Fib pour le DPG ~ pH acide explique la diminution de I'effet Bohr additionnel li6 au DPG dans ces zones de pH. Quand la quantit~ de DPG li~e aux structures T et R devient ~quivalente, la valeur de I" effet Bohr mesur~e rejoint celle de ref fet Bohr intrins~que [ 9 ] .

Dans les conditions intra-~rythrocy- taires physiologiques de concentration de l'effecteur, de temperature et de pH, le DPG se fixe peu ~ I'oxy Hb. L'effet Bohr additionnel observ~ dans ces conditions repr~sente donc essentiellement la quan- tit~ de protons absorb~s Iors de la liaison du DPG ~ la d~oxy Hb.

111-3 Si tes de I ' ia ison d u DPG sur ' l 'Hb.

Envisages par les Benesch ~ partir de leurs ~tudes fonctionnelles et pr~vus par Perutz d" apr~s I" analyse cristallographique de la d~oxy Hb, les sites de liaison du DPG ont ~t~ formellement d~crits par Arnone [ 16 ] et sont situ~s dans la cavit~ centrale sdparant les deux chaines ~, La Figure 5 emprunt~e ~ Arnone illustre ces sites de liaison. Des ~tudes fonctionnelles plus r~centes indiquent que ces sites de

1981, 65, n ° 6.

Page 8: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

X

liaison sont identiques dans la d~oxy et Foxy Hb. Selon Perutz [ 17 ] , les modifica- tions st~riques intervenant Iors de la tran- sition quaternaire T ~ R (rapprochement des h~lices H et 6cartement des h61ices A des cha~nes ~J, Fig. 6) expliqueraient la difference d'affinit& de ces sites pour leur effecteur Iors de I'oxyg&nation. Comme nous I'avons indiqu~ plus haut, ce sch6ma simple de variation de fixation du DPG

aux chaines ~ contemporaine de la transi- tion quaternaire T -> R doit ~tre actuelle- ment r&vis& dans la mesure ob une frac- tion non n~gligeable de I'effecteur est re/argu~e /ors de I'oxyg&nation de la pre- miere sous-unit& o~, dans des conditions ob /e t~tram~re est en structure T pr6do- minante. La substitution de I'un ou plu- sieurs r6sidus du site de liaison modifie de fa,con importante /a fixation du DPG

/..0L A H* ! tet ra=m~re

3.0

2.(]

• CI'IOOn'~M

Px5

• DPGx5

1.0

D p

q ' l

I ! I • S 7 pH II 9

Fig. 4. - - Courbes de Bohr obtenues par d6rivat ion des courbes log P~/pH mesur~es dans des solutions d 'HbA (0.7 mM hibme) b 25°C en presence de diff~rents effecteurs anioniques. On notera le d~placement vers la droite du pic des courbes en fonction de la densit(~ des charges n~gatives de I'anion en cause (voir texte).

1981, 63, n ° 6.

Page 9: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

XI

sur la d~oxy Hb. L" exemple le plus ancien- nement connu est la difference d'effet du DPG sur I'Hb foetale humaine (HbFzz}. Dans cette HbFzz, les cha~nes non o~ dites chaTnes T comportent un r6sidu s~rine la place de I'histidine 143-~. Son affinit~ pour le DPG est diminu6e et explique la plus forte affinit6 pour !"02 du sang foetal compar6e ~ celle du sang adulte. Le sang

foetal comporte une fraction mineure dite HbFx dens laquelle le groupe ~-amin~ du r~sidu N-terminal glycine I- T est ac~tyl6 supprimant un deuxi~me site de liaison du DPG. Cette modification, post-traduction- nelle, de I'Hb foetale, fait dispara~tre toute interaction avec le DPG [ 1 8 ] . Des exem- pies identiques se rencontrent dans les fractions mineures de I'HbA. Les HbAlc

H2 Is

® 131 3

- ® 082 Lys

Fig. 5. - - Repr6sentation sch6matique des sites de liaison du DPG dens la cavit6 centrale inter-ohaTnes ~. Les charges ndgatives du DPG (4 au pH de 1'6rythrocyte humain) sont oppos6es ~ un bouquet de 8 charges positives des 2 chatnes polypeptiques qu'elles neutralisent par- tiel]amant. Les groupes an cause sont Val-1 ~, His 2-~, His 143- 6 de 2 chai'nes ~ et I'una des 2 Lysines 82 ~l. Dans I'HbFzz, composant princi- pal des #rythrocytes foataux I'His 143~ est remplac~e par una s6rine non charg6e, supprimant I'un des sites de liaison de I'effecteur. Catte substitution est responsable du moindre effet du DPG sur I'HbF~z et de la plus forte affinit6 du sang foetal pour I'oxygbne compar6e b celle du sang maternal.

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

Page 10: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

X[[

(Hb glycosyide au niveau de Val-I retrouv~e en quantit~ importante chez le diab~tique non ou mal traitS), HbA ~.~ (glu- cose 6 P), HbA~,.z (fructose 1-6 di P) sent peu ou pas sensibles au DPG [ Ig]. La car- bamylation s~lective du groupe ~-amin~ de Val-l~J (R-NH~ -~ R-NH-CONH~) en- tratne ~galement une diminution de I 'aff i- nit& de la d&oxy Hb pour le DPG [20]. On peut citer ~galement la diminution de I'ef- fet du DPG sur I'Hb en presence de CO~. Le CO~ mol~culaire s e fixe (carbamina- tion, R-NH~ --* R-NH-CO0-) sur la val-1-~ (site de plus forte affinit~ pour le CO~) et inhibe la fixation du DPG et vice-versa [21, 2~]. D'autres exemples nombreux d'anomalies de la liaison du DPG ont ~t~ retrouv~s dans les Hb <( mutantes >) ob la

DPG sur la protdine. Cel/es-ci peuvent ~tre li~es ~ la concentration ~rythrocytaire du DPG lui-m&me. Sa diminution importante /ors de/a conservation du sang en rue de la transfusion sanguine est connue depuis /ongtemps [25, 30] e t a suscit~ de nom- breux travaux ~ la recherche du mil ieu de conservation ad~quat pr~servant la con- centration de DPG /e p/us/ongtemps pos- sible [31] ou sa r~g~n~ration [32] avant /'uti/isation du sang. Un autre exemple, physio/ogique, est I'~l~vation du DPG qui suit / 'exposit ion pro/ongde ~ I'hypoxie, en particu/ier I'hypoxie d'altitude t~moignant d'une adaptation transitoire de l'orga- nisme ~ la baisse de la pression en oxy- g&ne ambiante [~3]. Enfin dans certaines esp~ces mammif~res /es hdmoglobines

)

÷'-"

; ',,Y/////,

m,

Fig. 6. ~ Repr6sentation sch6matique des variations structurales intervenant entre les structures T deoxy et R oxy de I'HbA au niveau de la cavit~ inter-chaTne ~, sites de liaison du D~PG. Les zones hachur6as repr6sentant la position des diff6rents segments h~licoTdaux en structure T et les zones pointiti~es, cel[e de la structure R. On notera surtout le rap- prochement des 2 h61ices H et 1"6cartement des segments terminaux NA. Cette cavit6 est tapiss6e de 8 charges positives. Dans I'hypoth~se de C. et J. Bonaventura, ces charges positives exe~ceraient une force r6pulsive destabilisant la structure T. Leur neutralisation Iors de la fixation du DPG contribuerait ~ la stabilit~ du tdtram~re deoxy-. Le rapprochement des 2 h~lices H Iors de I'oxyg6nation serait responsable de la moindre affinit6 de I'oxy Hb pour le D~PG.

substitution d'un des rgsidus du site de liaison du DPG par un acide aming non ionis6 est responsable de la non fixation du DPG et entra2ne une affinit6 du sang pour l'oxyg~ne ~lev~e et par consequence, une polyglobulie plus ou moins impor- tante [23-28]. Les variations de I'inter- action DPG-Hb ne se l imitent cependant pas aux anomalies du site de fixation du

embryonnaires sent remplac~es d~s la vie foetale par de I'Hb adulte. La difference d" affinitd entre sang foetal et maternel qui facititerait le transfert transplacentaire de I'oxyg~ne, est assur~e par I'absence de DPG dans les ~rythrocytes foetaux, les enzymes responsables de son accumula- tion ne devenant actifs que lore des pre- mieres semaines de la vie a~rienne [34].

1981, 60, n ° 6.

Page 11: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

Xl ] l

111-4 Mode d'action du DPG.

Le mode d'action propos~ d~s la mise en ~vidence du DPG, de son r61e sur les propri~t6s fonctionnelles de rHbA et de la caract~risation precise de son site de liaison a ~t~ celui dit de la <( liaison croi- s6e )), I'organo-phosphor~ amarrant, en les rapprochant I'une de rautre, les deux cha~nes 8 dans la structure quaternaire T. La diminution de I" affinit6 pour le DPG de I'Hb en structure R a 6t~ rapport6e au r6tr6cissement de la cavit~ centrale provo- qu6 par le remaniement st6rique contem- porain de la transition T --> R. L'image tri- viale d6crivant ce ph~nom~ne est celle d'une expulsion du DPG tel un ~ noyau de cerise )~. Ce schema simple est actuelle- ment r~vis6 puisque il est bien d~montr~ (cf supra) qu'~ pH acide et forte concen- tration I'oxy Hb peut lier te DPG de fa.con 6quimolaire comme la d~oxy Hb. De m~me nous avons montr~ I'existence d'une diminution d" affinit6 de la d~oxy Hb en structure T pour le DPG en l'absence de toute modification de structure qua- ternaire.

Une hypoth6se s~duisante a 6t~ propo- s6e plus r6cemment par C. et J. Bonaven- tura [3§]. Cette hypoth6se est li~e ~ deux observations importantes. L'une concerne I'HbFm dont raffinit6 pour I'oxyg6ne est, en I'absence de tout effecteur anionique, inf6rieure ~ celle de I'HbA. L'addition de DPG inverse la situation pour la raison expliqu~e plus haut (substitution de I'his- tidine-1438 par un r~sidu s~rine non char- g6). L'autre concerne les propri6t~s fonc- tionnelles d'une Hb mutante, I'Hb Provi- dence dans laquelle la lysine-82 8 (site de liaison du DPG) est remplac6e par une asparagine non charg~e (Hb Providence I) ou son d6riv~ ddamid6 charg6 n6gative- ment (Hb Providence II, Lys-82 ~ --> Asp) [36]. En I'absence d'effecteur anionique I'ordre des P~o mesur6es de ces Hb est Hb Prov H > Hb Prov I > HbA. Ces deux observations ont conduit ces auteurs formuler I'hypoth6se que I'ensemble des charges positives tapissant ia cavit~ cen- trale inter-chaines 8 exercent entre elles une force r~pulsive tendant ~ ~carter les h6lices H des 2 cha]nes 8 provoquant une d6stabilisation de la structure T. La neu- tralisation de tout ou partie de ces charges positives par les anions ou leur diminution quantitative par substitution d'un r6sidu non charg6 (HbF~z) ou charg~ n~gative-

ment (Hb Prov !!) entraineraient I'att6nua- tion de cette interaction r6pulsive et d~placeraient I'~quilibre conformationnel vers I'Oat de faible affinit6 (T). En d'autres termes ta fixation des anions au niveau de la cavit6 centrale inter chaines ~J diminuerait I'affinitd du t6tram~re pour I'oxyg6ne non seulement par I'addition de liaisons ioniques suppl~mentaires respon- sables d'un effet Bohr additionnel mais ~galement en neutralisant les charges positives responsables d'une d6stabilisa- tion de la structure T. A vec ses 4 charges n~gatives (4 pH 7.20) et sa taille, le DPG est le compos6 physiologique le plus add- quat pour exercer cette double fonction. La diminution de I'affinit~ de I'Hb pour le DPG Iors de I'oxyg~nation du t~tram6re reste a expliquer. Les observations cities plus haut indiquent que les changements de structure tertiaire des chaines 8 d6s la premiere 6tape d'oxyg~nation provoquent des modifications st6riques du site de liai- son et de discrets changements de pK des groupes responsables de la liaison. II n'est pas impossible que ces modifica- tions n'atteignent pas simultan6ment les 6 ou 8 charges positives impliquOes, I'af- finit6 minimale ~tant atteinte tr6s tardive- ment Iors de la 4 ° ~tape d'oxyg6nation contemporaine de la transition T --> R.

Nous avons dit plus haut que le DPG pouvait 6tre consid~r~ comme le (( super- anion )~ physiologique en raison de sa tail- le, du nombre et de la r~partition de ses charges n6gatives. Son efficacit~ est d6pass6e par I'inositol hexaphosphate (organophosphate d'origine v6g6tale) qui,

pH neutre, est porteur de 8 charges n6gatives pouvant neutraliser quasiment totalement les charges positives de la cavit6 inter-chaines 8. Sa taille permet, comme pour le DPG, son ajustement dans cet espace [37]. Compar~ aux effets du DPG, I'IHP diminue par 40 I'affinit6 intrin- s6que de rHbA et multiplie par 4 I'effet Bohr intrins6que (fig. 3). La constante d'allost~rie L ~ pH 7.0, 25°C atteint une valeur de I'ordre de 109 ~ 10 ~°. L'impor- tance de cet effet entraine, conform6- ment au module de transition concert6e [3] , une diminution de la coop~rativit6 (( n ~) ~ Pso qui d6cro~t de 3 ~ 1.7. Une telle modification n'est pas observ6e en presence de DPG dans les conditions phy- siologiques de pH et de temperature. Les effets de I'IHP, conform~ment au mod61e expos6 plus haut, sont exptiqu6s par I'im-

1981 , 63, n ° 6.

Page 12: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

XIV

portance des contraintes $lectrostatiques suppl~mentaires ajout~es au t$tram~re d~oxy (augmentation tr~s importente de KT) mais ~galement par sa liaison ~ I'oxy Hb (diminution de I'affinit$ pour le ligand de la quatri~me sous-unit~ du t$trambre). En presence d'IHP et d'une concentration saturante d'oxyg&ne (oxygenation com- plete) une quantit$ plus ou moins impor- tante, selon les conditions de pH et de temperature, des molecules d'oxy Hb restent << fig~es )) en structure quaternaire T. On ne peut d'ailleurs obtenir la ligation complete des h~mes, en presence d'IHP pression atmosph~rique qu'en presence d'oxyde de carbone dont la constante d'association au Fe ~ est d'environ 200 lois sup~rieure ~ celle de I'oxyg~ne.

Ces quelques exemples de I'effet de I'IHP ne sont cites que pour montrer que I'intensit~ des effets d'un cofacteur anio- nique sur I'Hb d$pend essentiellement, si sa taille est adequate, de I'interaction pri- vil~gi~e entre le site de liaison (le bou- quet de charges positives de la cavit~ cen- trale) et le nombre de charges n~gatives port~es par I'anion c'est-&-dire de ses << possibilit~s ~) de neutraliser le maximum de charges positives ~ une concentration ~quimolaire ~ celle du t~tramOre. Le DPG n'est pas le seul ester phosphor$ pouvant sel ier ~ I'Hb humaine. L'exemple de I'IHP a ~t$ soulign~ plus haut. Parmi ceux pre- sents dans I'~rythrocyte humain tous les compos~s phosphoryt~s peuvent exercer un effet [38 ] , en particulier I'ATP. II con- vient cependant de rappeler que seul I'A TP libre est susceptible de se tier & la d$oxy Hb. Dans les conditions pr~valant dans I'~rythrocyte, 80 ~ 90 p. 100 de I'A TP est complex~ au Mg ~÷ (A TP Mg ~÷) ce qui en limite d'autant sa liaison ~ I'Hb (Tableau I). Ceci explique le faible role de I'A TP sur la function de I'Hb dans les conditions physiologiques chez I'homme. A I'inverse chez les poissons, dont les ~ry- throcytes ne contiennent pas de DPG et une forte concentration d'A TP, la quantit$ d'A TP libre est suffisamment $lev~e pour en faire I'effecteur allost$rique predomi- nant.

La function physiologique de la liaison des cations (Mg ~+) par les esters phos- photos libres presents dans I'~rythrocyte est encore un domaine largement inexplo- r~. II est possible d'envisager que Falter- nance de liaison-fib~ration du DPG libre

de I'h~moglobine Iors du cycle oxyg~na- tion-deoxyg$nation entra~ne une alter- nance similaire de Mg ~÷ libre-Mg ~* com- plex$ peut-~tre responsable de modifica- tions de I'activit$ d'enzymes membra- naires impliqu$s dans les transferts ioniques.

IV - - Lia,ison du CI- ~ I 'Hb.

Connu depuis de nombreuses ann~es [39, 40] I 'effet des anions monovalents

et en particulier du CI-, (predominant dans I'~rythrocyte de toutes les esp~ces ~tu- di$es) a $t~ pr~cis$ r~cemment. Le sche- ma g6n~ral envisag~ pour le DPG est approximativement identique (diminution de I 'aff init$ pour I'oxygbne, effet Bohr additionnel) et nous nous limiterons d~crire les aspects qui confbrent ~ la fixa- tion du CI- sa specificitY.

IV-1 R61e du CI" sur I'affini~6 de l 'Hb pour 1'O2.

La Figure 7 montre la variation de log P~o avec I'augmentation de la concentra- tion de NaCI darts une solution d'HbA native. A la concentration physiologique de I'anion I'addition de CI- diminue I'af- finit~ d'un facteur de 2,5 environ, c'est-&- dire la moiti~ de I'effet du DPG. II s'agit d'un effet sp~cifique de I'anion et non de la variation d'activit~ ionique, car cet effet est identique que le cation suit mono ou divalent [41] . Les autres anions monova- lents (lactate, bicarbonate) ~tudi~s ont un effet similaire [? ] . La modif ication de P~o en pr6sence de CI" t6moigne d'une liaison diff~rentielle de I'anion selon I'~tat d'oxy- g~nation de la pro t~ine et de la fixation pr~f~rentielle & la d~oxy Hb. Comme le montre la Figure 8 I'addition de quantit~s croissantes de CI- diminue I'affinit~ pour I" oxygbne de la d6oxy Hb en structure qua- ternaire T. Dans les conditions physiolo- giques Foxy Hb en structure R a une affi- nit~ pour le CI- inf~rieure ~ ceile de la d~oxy Hb. L'effet du CI- sur I 'affinit~ de I'Hb pour I'0~ est donc expliquable par son action pr~dominante sur la structure T d~oxy de I'Hb, d~pla,cant I'~quilibre allost~rique vers les structures t e t T qu' i l consolide 6levant mod~r~ment la cons- tante L sans modif ier la coop~rativit~.

L'analyse de la figure 7 indique que la quantit6 de CI- li~ ~ I'~tat d'oxyg~nation est au maximum de 0.5 M par mol d'hbme

1 9 8 1 , 63, n ° 6.

Page 13: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

XV

oxyg$n$ soit de 2 mol/t~tram~re ~ pH et temperature physiologiques. Le pic de la courbe est observ$ pour une concentration de 0.08 M de sel. La partie ascendante de la courbe, ~ gauche du pic, t~moigne de I'augmentation de la fixation de ranion la d~oxy Hb. Lorsque la concentration de Cl- est sup~rieure ~ O. 1 M la partie d e s -

del& de O. 1 ~ 0.2 M) ne conduit pas ~ un plafonnement des valeurs de log Pso qui continue ~ augmenter jusqu'& des concen- trations de 1 M. Ceci indique l'existence de 2 sites de liaison d'aff init$ diff$rente.

- - La quantit~ de CI- relargu~e lots de la premiere oxygenation du t6tram~re d$o- xyg~n~ d~crit une courbe semblable dans

log PSO ( r n r n H g)

1.0

0.5

o.6 i o.s! O.&

0.3

0.2

0.1

0

dlogPso d iog[Ci']

-} -i 6 [erlu:r'

-z'.o -£o 6 [cl') mol.r'.

Fig. 7. - - Variat ion de I'affinitO pour I 'oxyg~ne (log P~) en fonction de la concentration de CI- (log CI'). La pente maximum (dlog Pso/dlog CI-) est obser- v(~e pour une concentration proche de 0.08 M. La valeur de cette pente est son maximum de 0.5 indiquant que 0.5 Mol de CI" sont l ib&~s du t~tram~re par mol d'h~me ligand~ (encart).

cenda~te de la courbe t~moigne de la fixa- tion croissante du CI- b Foxy Hb dimi- nuant d'autant la fraction de Cl- fix~ li~e & I'oxyg~nation. La sp~cificit~ fonction- nelle de la liaison du Cl- est indiqu~e par deux types de r~sultats exp~rimentaux :

I'augmentation de la concentration de CI- dans une solution d'HbA native (au

son intensit~ ~ celle observ~e ~ Pso mais d~plac~e sur la gauche (Fig. 8). Les r~sul- tats indiquent que le relargage de I'anion lots de I'oxyg~nation ne suit pas lin~aire- ment I'~tat d'oxyg~nation, qu'i i n'est pas li~ uniquement ~ la transition quaternaire T --> R et qu'i l correspond ~ un site de forte affinit~ (le pic maximum ~tant obte-

1 9 8 1 , 6?,, n ° 6.

Page 14: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

-1,9,

-t.I

-1.6

-1 .=.

-1.6

-log gl I mmHg -1)

o ~ to~[cr)

o.s.

0.31 0.2 0.1 ii

-2.0 -1.0 0 ~O~ [¢1"1,~.~

- 2r0 . . . . . . . -1.0 log [ Cl']mol.I "1 0

Fig. 8. ~ Variation de log Kx (constsnte d'association de I'oxyg/~ne ,h I 'Hb en structure T) avec la concentration de CI-. La d6riv6e de cette courbe (encart) indique que la quantit6 de CI- relargu6e Iors de I'oxyg&nation de la premi6re sous-unit6 est identique & celle observ6e

P~o (effet global, f igure 7 ) . Cos r6sultats d6montrent le caract/~re pr6dominant des modif i - cations de structure tertiaire {t ~-~ r) dans le m6canisme de liaison du CI- h I 'HbA.

nu pour une concentration plus faible de /'anion),

A partir de ces r~sultats on peut cafcu- ler que /a constante d'assoc~ation du Cl-

la d~oxy Hb est proche de 50 mol -~ tr~s inf~rieure ~ celle du DPG ( 105 mol-~). De m&m.e /e rapport des constantes d'associa- tion du CI- ~ la d6oxy et oxy Hb est proche de 10 compar~ ~ celu~ estim~ pour le DPG voisin de 50. Ces valeurs indiquent que conform~ment au module d'action des anions expos~ plus haut, les anions mono- valents ne modif ient que mod~r~ment los propri~t~s fonctionnelles intrins~ques de I'HbA et on concoit que cet effet soit imperceptible en presence de DPG.

IV-2 L ia ison d u Ot- et e f f e t Bohr alca'li~n.

La fixation du Cl- sur I'Hb augmente I'effet Bohr alcalin et cet effet est d#pen- dant du pH. Ceci indique, corol/airement, que la fixation du Cl- ~ I'Hb est d~pen- dante du pH. L'analyse precise de ce rSle du Cl- est due aux exp6riences de titration directe de solutions d'HbA d~oxy et oxy- g~n#e ~ diff#rents pH et concentrations

croissantes de I'anion [42-44] . Cos ~tudes montrent que pour des concentrations physiologiques de I'anion, 30 p. 100 de I'effet Bohr alcalin sont dus ~ la protona- tion de r6sidus, sites de fixation du Cl-. Ces m~mes dtudes ont ~galement sugg~r~ que la fixation du Cl- serait ~ I'origine de I 'effet Bohr acide (diminution de i 'aff init~ pour t'oxyg#ne avec la baisse du p H a u dessous de pH 6.0).

IV-3 Si tes de l ia ison du CI-.

La connaissance des sites de liaison du CF ~ i 'Hb r&sulte des t.ravaux de plusieurs ~quipes util isant des techniques diff~- rentes : RMN [ 4 5 ] , diffraction des rayons X de cristaux de d~oxy HbA [16, 46 ] , ou ~tudes fonctionnelles (oxygEnation, offer du pH) d'Hb mutantes ou modifi~es sp~ci- fiquement [47-49 ] . Tou.tes ces ~tudes con cordent pour d~finir 2 sites de liaison, I'un situ~ au niveau des cha~nes 9, I'autre au niveau des chaines ~.

IV-3.1 Le site 9, le premier reconnu par Arnone [16 ] est mis en ~vidence par la comp6tition existant entre DPG ou IHP et le C/- quand ta concentration de ce tier-

1 9 8 1 , 63 , n ° 6.

Page 15: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

X ~ I

nier est supdrieur ~ 0.2-0.3 M (Fig. 9). L'~l~vation du Cl- fait disparaftre I 'effet du DPG et de I'IHP. L'dtude de I'effet du CI- sur des Hb modifi~es ou porteuses d'une substitution intdressant les d i f f . - rents groupes charges positivement de la cavit~ centrale inter chaFnes ~ a permis de d~signer I'une des lysines 82 comme dtant le site de fixation prddominant du CF au niveau des chaFnes ~J [20]. II est concevable ~galement qu'& forte concen- tration de CI- les autres sites de liaison du DPG puissent @tre saturds par I'anion monovalent rendant compte de/a compe- tit ion d~crite plus haut.

par Fermi [50] montraient cependant I' impossibilit~ de cette interaction en raison de la distance trop importante exis- tent entre ces deux groupes de charges oppos~es. Puis, Arnone ddmontra que la liaison entre extrdmitds N e t C terminals des 2 chaTnes ~ opposdes ~tait ~tablie entre /e groupe amind de Val-lo~z et le groupe guanidinium de Arg-141~., beau- coup p/us proche, par I'interm~diaire d'un anion monovalent. Les dtudes de fixation du Cl- sur des Hb portant une anomalie de I'une des extrdmit~s N ou C terminales des chaines o~ [47, 49] confirment I'exis- tence de ce site de fixation. D'aprds ce

2.0.

1.5

log P50

"\

'\ • ]HP " \ /

\ \

25*C pH=?.0 [Hb4]= 6.5 xl0 "s M [DPG] =3.3x10"4M [IHP]=I.3 xl0"4M

0.5 i

0'.5 1;0 2'.0 [Na CI ]M

Fig. 9. - - Comp6tition entre I'effet du CI" et les esters orgsno-phosphor6s su,r I'af- finit6 de I'Hb pour I'oxygibne (log P~). A forte molarit6 le CI- inhibe totalement l'effet du D,PG ou de I'IHP.

IV-3.2 Site d,e fixa~ion, des chaines c~.

Fortement sugg~rd par les dtudes fonc- tionnelles de titration par le Cl" d'Hb mutantes ou modifides chimiquement ce site a dtd formellement ddcrit par Arnone r 4 6 ] au niveau des extrdmit6s terminales N e t C des deux chaFnes (Fig. 10). Les analyses cristallographiques de Perutz [5] avaient rdvdld I'existence d'une liaison ionique (pont salin) ~ ce niveau entre le groups c¢-amind de la val 1-o~ terminals et le groups carboxyl de I'arginine 141~2. L'amdlioration de la rdsolution des ~tudes diffractomdtriques faites ultdrieurement

schema (Fig. 11) I' interaction entre les 2 extr~mit~s terminales des chaines c¢ serait ddpendante de la pr6sence du Ct- d'ob son importance fonctionnelle ma- jeure. En effet I'extr~mitd N terminale Val- l~ est Fun des 2 principaux groupes de Bohr qui ne pourrait fonctionner comme tel qu'en presence de CI-. L'extr~- mitd C terminale des cha~nes ~, par rinterm~diaire de I'arginine 141-;¢ et la tyrosine 140-~ fait partie de I'ensemble des interactions constituent avec les r~si- dus du segment C D de la chains ~ immd- diatement opposde, la zone de contact o~1~2 sidge du mouvement de glissement-

1981, 63, n ° 6.

Page 16: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

XVIII

rotation caract~risant la transition quater- naire T -* R. Enfin, comme le montre la Figure 11, les extr~mit~s terminales des 2 chMnes o~ font partie d'un bouquet d'interaction ioniques inter chMnes, zone essentielle pour la stabilit~ du t~tram~re. En d'autres termes, si I'on extrapole aux conditions physiologiques les observa- tions faites dans les conditions de I'&tude cristatlographique, la fixation du Cl- au niveau des chaines c~ aurait une fonction majeure au triple point de vue de I'affinit~ pour I'oxyg~ne (modulation de la transi- tion quaternaire) de I'effet Bohr alcalin

est remplac~e par une asparagine ou un aspartate. Malgr~ cette anomalie, cette Hb mutante conserve des interactions homo- tropes normales (P.~o augment~e mais n~o proche de 3). Ces 2 observations indi- quent r importance mineure du site ~ dans le rdle physiologique de fixation du CI-

rHb.

A I'oppos~ les btudes faites sur rHb Suresnes (Arg 141-~ --> His) dont la sub- stitution porte sur la zone d'interaction ~h-~ envisag~e plus haut ont montr~ ralt~ration profonde de sa fonction : dimi-

o < 2

' ! ""...'" ".'." ..12

Fig. 10. - - Interactions ~lectrostatiques de la r~gion N-C terminale des chaines a. La zone hachur&e est la chMne ;~. Noter I'irnportance des liaisons inter-chaTnes (~ et celles du contact ~ = par I'interm6diaire des r6sidus Arg 141-az et Tyr 140-~ et les r~sidus opposers des seg- ments C et CD de la chatne 1~2 oppose~e (contact a~%).

(modification du pK de Val- l~) et de la stabilit~ du t~tram~re. L'importance de cette fonction est ~ rapprocher du fait que les ~tudes en RMN [ 45 ] aussi bien que los ~tudes d'oxyg~nation de I'HbA [ 61 ] ont attribud ~ ce site ~ la plus forte affi- nit~ pour le CI-.

IV-3.3. Importance relative des sites et ~ de fixation du CI-. Le site ~J est un site de fixation commun au Cl- et au DPG. Ceci indique, .nous ravons vu, que dans les conditions physiologiques du mil ieu intra-~rythrocytaire, peu ou pas de CI- se lie, en presence de DPG, ~ ce niveau. En i" absence de DPG les ~tudes in v i t r o faites sur rHb Providence [ 36 ] montrent que certes la fixation du Cl- est diminu~e de moiti~ ou des 3 / 4 solon que la Lys-82

nution de reffet Bohr alcalin, diminution importante de la coop~rativit~, instabilit~ du t~tram~re, qui en I'absence de DPG, se dissocie en dim~res [ 4 9 ] . A faible acti- vit~ ionique (Cl ~ 0.01 M) rHb Suresnes a une affinit~ pour I'oxyg~ne proche de celle des sous-unit~s isoMes, un effet Bohr aboli et les dtudes cin6tiques r~v~lent la presence d'une proportion importante de dim~res. Des ~tudes fonctionnelles por- tant sur rHb 141~- des Arg [ 46 ] ou I'Hb~2c~2 (sp~cifiquement carbamoyMe en Val-lc¢) [ 61 ] confirment ~galement r importance fonctionnelle de I' int~grit6 de la r~gion N-C terminale des chMnes et par consequent des possibilit~s de liai- son du Cl- ~ ce niveau. Les r6sultats obte- nus Iors de I'~tude des anomalies fonc- tionnelles de I 'Hb Suresnes ainsi que

1 9 8 1 , 6 3 , n ° 6.

Page 17: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

X[X

d'autres ~vidences cristallographiques ont permis de sugg~rer I'hypoth~se que I'argi- nine 141o~ (par son encombrement st~- rique) pourrait jouer le r~le d'<( ~carteur )) des 2 cha~nes ~, ~cartement stabilisant la structure T et I'association des sous-uni- t~s en t~tram~re. Dans le cadre de cette hypoth~se, il est possible d'envisager que la fixation du CI- entre I'arginine-141;¢~ et la valine ~ contribue ~ stabiliser I'~car- tement optimal des 2 sous-unit~s ~ du t~tram~re. Ainsi dans son principe la fixa- tion du CI- sur I'Hb aurait une conse- quence de m~me nature (neutralisation de 2 charges positives proches) que celle envisagEe pour le mode d'action du DPG. Cette hypoth~se n'est pas contradictoire avec la liaison du CO~ mol~culaire sur le groupe oc amin~ de la Val 1-offR-NH-CO0-) site de liaison prEf~rentiel de cet effec- teur sur le t~tram~re quand la presence de DPG inhibe sa fixation sur le site Val 1-~, de forte affinitY. L'addition d'une charge n~gative sur I'extr~mit~ N-terminale de la cha~ne ~ cr~e les conditions d'une liaison ~lectrostatique avec le groupe guanidi- nium de I 'Arg-141~ ind~pendamment de la fixation du CI-. La liaison du chlore oxy- labile apparatt en effet inhib~e en pre- sence de dioxide de carbone, aux pres- sions partielles physiologiques du gaz.

V. Conclusio,ns.

Au del& des caract~ristiques communes de la fixation et du mode d'action des dif- f~rents anions ( C I ou DPG) sur I'Hb qui ont ~t~ ddtaill~s plus haut, il convient de d~gager, avec prudence, une sp~cificit~ pour chacun d'entre eux, peut ~tre li~e leur ordre d'apparition phylog~nique. Le chlore, anion diffusible largement r~pan- du dans tousles liquides biologiques dont I'eau intracellulaire (souvenir de la mer primitive) appara~t comme le cofacteur pr~f~rentiel des cha?nes ~, cha~nes poly- peptidiques originelles des sous-unit~s de I'HbA actuelle. Sa fixation contribue certes ~ modifier la fonction intrins~que de I'HbA en abaissant I'affinit6 pour Foxy- g~ne du t~tram~re et en majorant I'effet Bohr alcalin. En fait nous I'avons vu, son r~le reste ~ ce titre modeste. Le chlore appara~t au contraire d'importance ma- ]eure, ~ la concentration pr~valant dans rErythrocyte, pour assurer la stabilit~ du t&tram~re et la fonction du contact c¢1~ indispensable ~ la transition quaternaire

de rHb. Cette transition qui permet le passage d'une structure de faible affinit~

une structure de forte affinit~ est, quel- qu'en soit le m~canisme intime, ~ I" origine de la liaison cooperative de I'oxyg~ne. A ce titre I'anion CI- pourrait &tre consi- d~rE comme reffecteur ancestral des h~moglobines t~tram6riques.

A I'opposE, le DPG appara~t, par son effi- cacit6 sur les propri&t~s fonctionnelles de I'Hb humaine, comme I'effecteur principal de regulation et d'adaptation de I'Hb aux conditions de la respiration aErienne au niveau de la mer. A pparu au cours des mill~naires de s~lection du syst~me opti- mal de transport de I'oxyg~ne, plus tardi- vement comme les cha~nes ~ auquel i l se fixe, le DPG semble avoir comme fonction principale sinon exclusive I'abaissement de I'affinit~ pour 1"02 de I'Hb et /'ElEvation de I'effet Bohr. Selon cette hypoth~se, le chlore apparait plus comme un 61Ement (( structurel )) indispensable ~ la fonction intrins~que du t6tram~re o~2~2 ~ I'oppos~ du DPG qui en est I'effecteur r6gulateur optimal. Etant donn~e la presence d'anions monovalents et de phosphates organiques dans la plu- part des cellules de rorganisme il est pos- sible que la dualit~ fonctionnelle des anions d~crite ~ propos de I'Hb, puisse ~tre retrouv~e au niveau d'autres pro- t~ines enzymatiques dans de nombreux tissus.

Remerciements.

Nous remercions trds vivement C. Gautheron et J. Grellier pour leur aide ~ pr6parer ce manuscrit. Travail subventionnd par I ' INSERM C. R. L. 78-5-058-5.

Elizabeth BURSAUX et Claude POYART.

REFERENCES.

1. Symposium on Respiratory Pigments (:1980). Amer. Zoo/., 20, 103-211.

2. Ackers, G. K. 6" Halvorson, H. R. (1974) Proe. Nat. Acad. Sci. USA, 71, 4312-4316.

3. Monod, J., Wyman, J. 6" Changeux, J. P. (1965) J. Mo/. Biol., 12, 88-118.

4. Perutz, M. F. (1970) Nature, 228, 726-734. 5. Perutz, M. F. (1970) Nature, 228, 734-739. 6. Perutz, M. F. (1980) Proc. R. Soc. Lond. B.,

208, 135-162. 7. Guesnon, P., Poyart, C., Bursaux, E. Et Bohn,

B. (1979) Resp. Physiol., 38, 115-129.

1981, 68, n ° 6.

Page 18: Contrôle anionique des propriétés fonctionnelles de l'hémoglobine a humaine

X X

8. Benesch, R. 8 Benesch, R. E. (1967) Bio- chem. Biophys. Res. Commun, 9.6, 162- 167.

9. Benesch, R. E. ~ Benesch, R. (1974) Adv. Protein Chem., 2,8, 211-237.

10. Imai, K. Et Yonetani, T. (1975) J. Biol. Chem., 2250, 7093-7098.

11. Huestis, W. H. Et Raftery M. A. (1972) Bio- chem. Biophys. Res. Commun., 49, 1358. 1365.

12. Johnson, M. E. ~ Ho, C. (,1974) Biochemis- try, 13, 3653-3661.

13. Wyman, J. (1964) Adv. Protein Chem., 19, 223-286.

14. de Bruin, S. H., Rollema, H. S., Janssen L. H. M. e t Van Os, G. A. J. (1974) Bio- chem. Biophys. Res. Commun., 58, 204- 209.

15. Van Beek, G. G. M. ~ de Bruin, S. H. (1979) Eur. J. Biochem., 100, 497-502.

16. Arnone, A. (1972) Nature, 237, 146-149. 17. Perutz, M. F., Kilmartin, J. V., Nishikura, K.,

Fogg, J. H., Butler, P. J. G. Et Rolfema, H. S. (1980) J, Mol. Biol., 138, 649-670.

18. Bunn, H. F. ~ Briehl, R. W. (1970} J. C/in. Invest., 49, 1088-1095.

19. McDonald, M. J., Bfeichman, M., Bunn, H. F. ~ Noble, R. W. (1979) J. Biol. Chem., 254, 702-707.

20. Nigen, A. M. &" Manning, J. M. (1975) J. Biol, Chem., 2,59, 8248-8250.

21. Bauer, C. (1970) Resp. Physiol., 10, 10-19. 22. Perelia, M., Kilmartin, J. V., Fogg, J. 8- Ros-

si-Bernardi, L. (1975) Nature, ?-.56, 759- 761.

23. Labossi~re, A., Vella, F., Hiebert, J. ~ Gal- braith, P. (,1972) C/in. Biochem., 5, 46-50.

24. Tentori, L., Cartasorlini, M. ~ Bucella, C. (1972) Clin. Chim. Acta, 38, 258-262.

25. Bromberg, P. A., Alben, J. O., Bare, G. H., Balcerzak, S. P., Jones, R. T., Brimhall, B. £ff Padilla, F. (1973) Nature, New Biol., 2,43, 177-179.

26. Jensen, M., Oski, F. A., Nathan, D. G. Et Bunn, H. F. (1975) J. Clin. Invest., 55, 469-477.

27. Ikkala, E., Koskela, J., Pikkarainen, P., Rahiala, E. L., E I Hazmi, M. A. F., Nagai, K., Lang, A. ~ Lehmann, H. (1976) Acta Haemat., 56, 257-275.

28. Lorkin, P. A., Stephens, A. D., Beard, M. E. J., Wrigley, P. F. M., Adams, L. ~ Leh- mann, H. (1975) Brit. Med. J., 4, 200- 202.

29. Valtis, D. J. ~ Kennedy, A. C. (1954) Lancet 1, 119-125.

30. Bunn, H. F., May, M. H., Kocholaty, W. F. 6" Shields, C. F. (1969) J. Clin. Invest., 48, 311-321.

31. Dawson, R. B. ~ El/is, T. J. (1970) Trans- fusion, 10, 113-120.

32. Duhm, J., Deuticke, B. £t Gerlach, E. (1971) Transfusion, 11, 147-151.

33. Lenfant, C., Torrance, J., English, E., Finch, C. A., Reynafarge, C., Ramos, J. £, Faura, J. (1968) J, Clin. Invest., $7, 2652-2656.

34. Petschow, D., Petschow, R., Bartels, R., Baumann, R. Et Bartels, H. (1978) Resp. Physiol., 35, 271-282.

35. Bonaventura, C. Et Bonaventura, J. (1978) in Biochemical and Clinical Aspects of Hemoglobin Abnormalities. W. S, Caughey Ed. Academic Press New York, p. 647- 661.

36. Bonaventura, J., Bonaventura, C., Sullivan, 8., Ferruzzi, G., McCurdy, P., Fox, J. Moo-Penn, W. (1976) J. Biol. Chem., ~1, 7563-7571.

37. Arnone, A. ~ Perutz, M. F. (1974) Nature, 249, 34-36.

38. Hamasaki, N. ~ Rose, Z. (1974) J. Biol. Chem., 249, 7896-7901.

39. Sidwell, A. E., Munch, R. H., Guzman-Baron, E. S. 6" Hogness, T. R. (1938) J. Biol. Chem., 123, 335-350.

40. Rossi-Fanelli, A., Antonini, E. Et Caputo, A. (1961) J. Biol. Chem., ?,36, 397-401.

41. Imaizumi, K., Imai, K. Et Tyuma, I. (1979) J. Biochem., 86, 1829-1840.

42. Rollema, H. S., de Bruin, S. H., Janssen, L. Et Van Os, G. A. J. (1975) J. Biol. Chem., ZS0, 1333-1339.

43. Van Beek, G. G. M., Zuiderweg, E. R. P. Et de Bruin, S. H. (~1979) Eur. J. Biochem., 99, 379-383.

44. Van Beek, G. G. M. ~ de Bruin, S. H. (1980) Eur. J. Biochem., 105, 353-360.

45. Chiancone, E., Norne, J. E., Forsen, S., Bonaventura, J., Brunori, M., Antonini, S. 6" Wyman, J. (1975) Eur. J. Biochem., 55, 385-390.

46. Arnone, A. Et Williams, D. J. (1977) in Molecular interactions of Hemoglobin Labie D., Poyart C. et Rosa J. Ed. INSERM Paris p. 15-22.

47. O'Donnel, S., Mandaro, R., Schuster, T. M. Arnone, A. (1979) J. Biol. Chem., 254,

12204-I 2208. 48. Nigen, A. M., Manning, J. M. 8 Alben, J. O.

(1980) J. Biol. Chem., ?,55, 5525-5529. 49. Poyart, C., Bursaux, E., Arnone, A., Bona-

ventura, J. ~ Bonaventura, C. (1980) J. Biol. Chem., 255, 9465-9473.

50. Fermi, G. (1975) J. Mol. Biol., 97, 237-256. 51. Poyart, C., Bursaux, E., Bohn, B. Et Guesnon,

P. (1980) Biophys. Biochim. Acta, 626, 417-423.

52. Gupta, R. K., Benovic, J. L. ~ Rose, Z. (1978) J. Biol. Chem., 253, 6165-6176.

Special F E B S

M e e t i n g on cel,I fu,nct ion and' d ! i f f e ren t ia t ion A thens , Greece Ap r i l , 2 5 - 2 9 , 1982

Tentat ive l is t of symposia.

Charac te r i za t i on o f spec ia l ce l l sys tems.

Sl : Eukaryot ic Gene Structure and Expression.

S~ : Cel l D i f fe ren t ia t ion and An t ibody Synthesis.

1981, 63, n ° 6.