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Proposition d’un document de travail en vue de définir une politique nationale d’emploi et de formation professionnelle 1

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Proposition d’un document de travail en vue de définir une politique nationale d’emploi et de formation professionnelle

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SommaireProposition d’un document de travail en vue de définir une politique nationale d’emploi et de formation professionnelle......................................................................................................................1

Avant Propos..........................................................................................................................................4

En introduction : les priorités socioéconomiques de la politique nationale d’emploi et de formation. .5

1. L’ETAT DE LA SITUATION ACTUELLE................................................................................................8

1.1. La situation macroéconomique..............................................................................................8

1.1.1. Les données économiques globales................................................................................8

1.1.2. Les données économiques sectorielles...........................................................................9

1.1.3. Les objectifs et facteurs de développement à l’horizon 2019......................................10

1.2. La situation démographique, sociale et du marché du travail..............................................10

1.2.1. Le positionnement social de la population malgache...................................................11

1.2.2. La situation du marché du travail au plan national.......................................................11

1.2.3. La situation des marchés du travail sectoriels.............................................................12

1.2.4. Les perspectives de développement des économies régionales et locales..................19

1.2.5. Les axes stratégiques de développement d’une politique nationale d’emploi et de formation professionnelle............................................................................................................19

1.3. La situation du champ éducatif et de formation...................................................................24

1.3.1. Les grandes données sur la situation actuelle du système éducatif.............................24

1.3.2. Les grandes données sur la situation actuelle de l’ETFP...............................................24

1.3.3. L’absence de la prise en compte de la production de compétences hors du champ de l’ETFP 26

1.3.4. Les grandes données concernant le système de certification en place (à finaliser par la « Plateforme DCTP »)...................................................................................................................27

En guise de conclusion..................................................................................................................28

2. LES GRANDES ORIENTATIONS PROGRAMMATIQUES DE LA POLITIQUE NATIONALE DE L’EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE........................................................................29

2.1. Vers des instances de gouvernance efficaces et partenariales.........................................29

2.2. Vers des mécanismes de financement assurant la mise en œuvre efficace et pérenne des décisions stratégiques et programmatiques.................................................................................31

2.3. Vers une démarche homogène de reconnaissance et de certification de l’ETFP/DC........32

2.4. Vers une meilleure articulation entre le système d’éducation et le système de formation33

2.5. Vers une prise en compte de l’ensemble des dispositifs et modalités d’acquisition des compétences ou vers un passage effectif de l’ETFP au DC...........................................................35

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2.6. Vers une approche du rôle de l’ETFP/DC comme moteur du développement socioéconomique.........................................................................................................................37

En guise de conclusion..................................................................................................................38

3. LES GRANDES AXES DE MISE EN OEUVRE DE LA PNEFP...........................................................39

3.1. Premier axe de mise en œuvre de la PNEFP : la réforme institutionnelle........................39

3.2. Deuxième axe de mise en œuvre : le financement de la réforme....................................39

3.3. Troisième axe de mise en œuvre : une ingénierie harmonisée de formation et de certification..................................................................................................................................40

3.4. Quatrième axe de mise en œuvre : la constitution d’un système d’information pertinent sur le marché du travail et la formation professionnelle..............................................................40

la mise au point d’indicateurs susceptibles de renseigner sur les évolutions du marché du travail (emplois disponibles et en devenir) ;................................................................................40

3.5. Cinquième axe de mise en œuvre : la constitution de dispositifs d’ETFP/DC adaptés aux défis à relever...............................................................................................................................40

3.6. Sixième et dernier axe de mise en œuvre : former pour insérer et réinsérer...................41

En guise de conclusion..................................................................................................................41

Bibliographie ( à compléter).................................................................................................................43

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Avant ProposLe document de travail est le produit d’un processus participatif qui a inclus les divers responsables et acteurs de la formation professionnelle publique et privée et de Madagascar. Il est le fruit d’une dynamique de consultation et de dialogue qui a été menée dans le cadre de diverses manifestations qui ont mobilisé ces responsables et acteurs : les Etats Généraux de la Formation professionnelle les Assises régionales ainsi que les Assises sectorielles. Il est également le résultat d’une série d’amendements et de compléments d’informations de la part de tous ceux à qui il a été soumis pour avis, suite aux travaux des experts international et nationaux chargés d’en assurer une première rédaction pour le compte du Ministère de l’Emploi, de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle (MEETFP).

Ce document est donc le résultat d’une méthodologie de travail qui a pris en compte au maximum les réflexions, analyses et propositions formulées par l’ensemble des parties prenantes de la formation professionnelle. Seule une telle méthodologie permet, en effet, de définir avec le maximum de justesse les voies et moyens que le pays doit prendre pour faire émerger à Madagascar un développement des compétences qui soit porteur de croissance et d’un développement durable dont le pays a besoin pour se donner un avenir à la dimension de ses richesses naturelles mais aussi sociales et humaines.

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En introduction : les priorités socioéconomiques de la politique nationale d’emploi et de formation La future politique nationale de l’emploi et de la formation professionnelle ne sera légitime et efficace que si elle s’inscrit dans les grandes lignes stratégiques définies dans le cadre du Plan National de Développement (PND). Elle devra devenir un élément moteur du cadre global de transformation politique et socioéconomique du pays et se développer selon les cinq axes principaux que ce plan a définis.

Axe 1 : la mise en place d’une bonne gouvernanceLes éléments contenus dans le PND indiquent que la future politique nationale devra être en cohérence avec la stratégie nationale globale de développement et pour cela traduire, au niveau de la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle, les grands objectifs qui ont été fixés à cette stratégie. Il s’agira notamment au regard des priorités affichées par le PND de privilégier les orientations suivantes.

Première orientation: redéfinir la gouvernance des dispositifs d’emploi et de formationLa mise en place d’une bonne gouvernance requiert, au regard des pratiques mises en œuvre en ce domaine par les autres pays africains, la mise en place d’un pilotage du système qui lie étroitement développement des compétences et préparation à l’emploi. Un tel lien suppose que les responsables du système promeuvent une formation professionnelle qui soit à la fois pertinente, efficace et mise en œuvre de manière partenariale. Une formation est pertinente quand elle permet d’acquérir des compétences qui sont effectivement définies en fonction des référentiels de métiers et d’emplois disponibles et/ou en émergence sur le marché du travail. Elle est efficace quand elle permet aux jeunes, non seulement d’acquérir un profil de compétences adapté aux emplois disponibles, mais également d’entrer effectivement dans le monde du travail ce qui suppose que les établissements ne peuvent pas se satisfaire d’une mission exclusive de formation, mais ont pour responsabilité de faciliter et d’accompagner l’insertion professionnelle de celles ou ceux qu’ils ont formés. Une formation est mise en œuvre de manière partenariale quand elle implique l’ensemble des responsables et acteurs, publics et privés, de la formation professionnelle à toutes les étapes de sa mise en œuvre.

Deuxième orientation : assurer un financement efficace, équitable et transparent de la politique d’emploi et formation professionnelleLa stratégie du PND souligne clairement la nécessité de mettre en place des politiques appropriées de finances publiques renforçant à la fois leur efficience interne et externe et la capacité de l’administration publique à les gérer de manière équitable et transparente. Le financement de la formation professionnelle menant à l’emploi est un thème majeur dans les débats en cours, notamment en Afrique (ADEA/AFD, 2014). Les exigences définies par le PND s’inscrivent dans ces débats qui portent notamment sur :

la faiblesse des moyens financiers accordés à la formation et à l’insertion professionnelle ; la redéfinition nécessaire des procédures de financement à l’aune du rapport coût/efficacité

et la nécessité d’inscrire dans les budgets nationaux une exigence d’équité, c’est-à-dire le renforcement des compétences des populations jeunes et adultes qui occupent des emplois précaires en secteur informel urbain et rural ;

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la nécessité de développer l’autonomie de gestion des établissements et par conséquent leur capacité à gérer au mieux les ressources dont ils disposent, à trouver des fonds additionnels et, par ce moyen, à développer leur sens de la responsabilité et de la redevabilité ;

l’importance de mettre en place une comptabilité de type analytique qui a le double avantage de permettre un calcul effectif des coûts de formation et par conséquent d’en optimiser l’efficience et de rendre transparent au niveau de l’établissement une gestion des budgets qui est souvent opaque et non justifiée.

Troisième orientation : inscrire la formation professionnelle dans une perspective de développement local et régionalLa dynamique de décentralisation développée par le PND suppose que la politique nationale d’emploi et formation professionnelle (PNEFP) s’inscrive dans la volonté des pouvoirs publics de mettre l’accent sur le développement local et régional. Une telle orientation a pour avantage de devoir inscrire l’offre de formation au plus près du marché du travail et donc d’en renforcer la pertinence par rapport aux emplois existants ou en devenir au niveau local ou régional, ce qui présuppose et renforce l’exigence d’autonomisation des établissements évoquée plus haut. Elle a également pour conséquence de faciliter le pilotage partenarial vu que l’inscription de l’offre de formation dans le contexte local et régional ne peut pas se faire sans une relation étroite avec les acteurs économiques et professionnels locaux. Cette contextualisation de la politique de formation n’est pas opposée mais complémentaire au développement d’une approche sectorielle vu que cette dernière ne peut pas se concrétiser sans un enracinement de l’offre dans un ou des territoires donnés.

Axe 2 et 3 : la préservation de la stabilité économique, les activités d’urgence et les secteurs d’appui au développementSi la politique d’emploi et de formation professionnelle n’est pas un facteur direct de stabilité économique, elle s’inscrit pourtant de manière indirecte dans la préservation des grands équilibres dans la mesure où elle a une capacité réelle de stimulation économique et donc de contribution, par effet induit, au maintien d’un équilibre budgétaire interne. Mais comme le prévoit cet axe stratégique, il importe de cibler cette politique sur deux grands objectifs majeurs : l’aide à la résolution de situation d’urgences et l’appui au développement de secteurs porteurs

Axe 2 : participer à la résolution de situations d’urgenceLa réduction de la vulnérabilité sociale passe par la lutte contre la précarité des emplois qui elle-même entraine une absence de revenus stables et une fragilisation des situations de santé due notamment à un manque de protection sociale. La formation professionnelle ne réduit pas par elle-même les diverses situations de vulnérabilité, mais différentes études (IECD, 2012, BM, 2013, DEVCO, 2013) montrent qu’elle peut participer activement à une meilleure insertion dans l’emploi et à une amélioration progressive de la profitabilité des activités professionnelles. Elle peut favoriser le passage d’une économie de subsistance à une économie de croissance et de valeur ajoutée et aboutir même à une formalisation progressive des emplois précaires. La politique d’emploi et de formation professionnelle à mettre en œuvre pourra donc aider à la résolution des situations d’urgence à condition qu’elle inscrive dans ses priorités le développement des compétences en économie informelle, urbaine et rurale.

Axe 3 : aider à promouvoir une croissance inclusive et un développement durable

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Il n’est plus à démontrer qu’une formation qui cible les compétences critiques exigées par les emplois disponibles et en devenir est une condition sine qua non pour jeter les bases d’une croissance inclusive et d’un développement durable (ADEA, 2012). Le PND définit en l’occurrence des secteurs d’investissement prioritaires pour la PNEFP. Il s’agit, d’un côté, des secteurs considérés comme porteurs de croissance (développement rural, pêche halieutique, tourisme et mines) et, de l’autre côté, de secteurs plus traditionnels (économie privée et artisanat) avec toutefois une prévision de réorganisation de plusieurs filières de production agricoles (lait, fruits et légumes). Il s’agira pour tous ces secteurs de réaliser une démarche de type « approche par les compétences » afin d’identifier les référentiels métiers et compétences des métiers en devenir, soit de réviser et d’actualiser dans le cas de l’artisanat et de la production agricole les référentiels des métiers existants. Dans tous les cas il s’agira de mettre en œuvre une ingénierie de développement des compétences qui réponde précisément à la demande de qualifications des secteurs considérés comme prioritaires, mais qui réponde également aux exigences de dispositifs de formation accessibles quelque soit par ailleurs le niveau scolaire atteint. L’existence d’une multiplicité de voie d’accès de tous aux emplois et métiers existants et en devenir est la seule manière de promouvoir une société inclusive sans laquelle il n’y a pas de développement durable.

Axe 4 : connecter harmonieusement savoir faire, expériences et compétences avec les besoins de développementCet axe de développement vise à initier une réforme de l’ensemble du système d’éducation et de formation afin d’éduquer des citoyens travailleurs, cultivés, en bonne santé et ayant les compétences nécessaires pour accéder à un travail qualifié et permettant à Madagascar de devenir une nation moderne, compétitive et émergente. Il s’agit donc, dans la politique nationale à mettre en œuvre, de dépasser une vision utilitaire de l’acquisition d’un métier et de permettre d’acquérir tout à la fois des compétences techniques, sociales, comportementales, relationnelles, citoyennes et d’apprentissage tout au long de la vie. Il s’agit de fait de définir un socle commun de connaissances, de compétences et de qualifications répondant à des standards internationaux et auquel chaque citoyen de Madagascar devrait avoir un droit d’accès.

Axe 5 : former à des compétences favorisant un environnement naturel et social de qualitéCe dernier axe de la PND ne définit pas en tant que tel un nouveau secteur d’activité mais souligne plutôt une dimension transversale à développer dans l’ensemble des actions prioritaires déjà définies : celle d’une éducation et d’une formation à l’environnement et à la gestion durable qui permette de promouvoir une gestion qualitative des nombreuses richesses naturelles dont dispose le pays, mais également de réduire la vulnérabilité sociale en luttant contre les dégradations naturelles et sociales des écosystèmes et de l’habitat. Une telle orientation des politiques d’emploi et de formation invite en réalité les responsables et acteurs des politiques d’emploi et de formation à introduire une dimension environnementale dans toutes leurs actions qu’ils vont mener et, plus largement, de réfléchir à la manière dont cette dimension modifie leur approche des divers métiers sectoriels qu’ils ont choisi de promouvoir. Il est évident que les métiers du tourisme, de la pêche, de l’agriculture, des mines… devront intégrer cette dimension de croissance verte qui préserve les richesses naturelles tout en respectant les droits de celles et ceux qui vont les exercer à vivre dans un environnement humain et social de qualité.

Les cinq axes de la politique nationale de développement constituent l’horizon stratégique vers

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lequel les dispositifs d’emploi et de formation professionnelle devront tendre pour participer à l’ensemble de l’effort national voulu par les autorités pour faire de Madagascar une nation moderne et prospère et, à moyen terme, un pays émergent.

Le développement des compétences des populations jeune et adulte est la voie incontournable pour permettre au pays d’accéder à un emploi qui soit de moins en moins précaire et de plus en plus décent. Mais au-delà de cet effet sur les parcours individuels, ce développement est également le seul moyen pour le pays d’atteindre les objectifs ambitieux qu’il s’est fixés à l’horizon 2019.

Les développements qui suivent vont permettre, après une analyse de la situation actuelle du marché du travail et du champ actuel de l’éducation et de la formation, de concrétiser l’ensemble des dispositifs et mesures que la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle devra définir puis mettre en œuvre pour participer pleinement, en tant que force motrice, à la réalisation de la Politique Nationale de Développement.

1. L’ETAT DE LA SITUATION ACTUELLE

Si la politique nationale d’emploi et de formation doit s’inscrire résolument dans les axes prioritaires fixées par le PND, elle doit également bâtir ses grandes orientations sur une appréhension réaliste et critique des grandes données de la situation socioéconomique, du marché du travail et des dispositifs et parcours existants d’éducation et de formation. Elle doit notamment arriver à identifier les points de blocage qu’il convient de dénouer et les dynamiques de transformation en cours qu’il convient de renforcer et quelque fois de réorienter. Cette première partie décrira donc l’état des forces et des faiblesses à partir desquelles il conviendra de structurer la politique d’emploi et de formation à mener durant les années à venir de manière à ce qu’elle devienne véritablement un outil à la fois stratégique et opérationnel du développement durable et inclusif de Madagascar.

1.1. La situation macroéconomiqueLa plupart des données sur l’état du pays sont issues du document intitulé « Plan National de Développement de l’Emploi et de la Formation » (PANEF, 2014) ainsi que de divers documents produits notamment par la Banque mondiale (BM, 2012), l’OCDE (2012), la Banque africaine de développement (BAD, 2012) et l’UNDAF (2014).

1.1.1. Les données économiques globales La crise politique a eu un impact très sévère sur le développement socio-économique de Madagascar. Le pays a ainsi connu successivement des croissances positives et négatives du PIB depuis 1970. Si on ne retient que les dernières années, on constate de très fortes variations liées aux évènements en cours. On est ainsi passé d’une croissance de + 7,1% en 2008 à une décroissance de - 4% en 2009 pour peu à peu retrouver une croissance positive qui a atteint 2,1% en 2013. Pendant toute cette période le PIB/habitant a diminué pour aboutir en 2013 à 458,32 USD (FMI) ce qui place le pays au 165ème rang mondial dans le classement PIB/habitant. Madagascar se situe donc sur une trajectoire d’appauvrissement en termes de revenu interne. Le pays occupe par ailleurs le 151ème rang pour l’Indice de Développement humain (IDH) avec un indice de 0,482 en 2012 et au 142e rang selon Doing Business.

En mettant en évidence la nécessité pour Madagascar d’entrer dans une phase de développement durable et inclusif, le PND souligne clairement qu’il faut mettre fin à cette

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spirale descendante du PIB/habitant et ainsi créer les conditions d’une reconquête d’un véritable pouvoir d’achat des habitants.

Il parait évident à cet effet que la PNEFP doit être conçue comme un moyen efficace pour enrayer la chute de revenu et la spirale de la pauvreté. Elle doit progressivement devenir un moteur puissant de l’accroissement à moyen et long terme de la productivité économique et sociale de l’ensemble du pays comme de chaque individu.

1.1.2. Les données économiques sectoriellesL’analyse des activités par secteur montre que l’industrialisation de Madagascar reste très minime (15,5% de la valeur ajoutée) alors qu’elle constitue pour tout pays un processus incontournable de son développement. Ce constat, qui s’applique à la quasi-totalité des pays africains, signifie que le développement des compétences devra favoriser, selon les secteurs prioritaires retenus par le PND, les métiers portant sur les techniques de transformation des ressources naturelles du pays et donc sur la production de valeur ajoutée. Sont notamment concernés au niveau industriel les grands projets miniers qui ont fortement souffert de la crise et qui, selon la Banque mondiale, constituent le principal moteur de la croissance au cours des prochaines années . Les activités industrielles concernent également le secteur du textile et de l’habillement qui représente pour le moment plus du tiers de l’activité industrielle du pays et qui bénéficie à la fois de l’accord de libre-échange avec l’Europe (APE), du marché commun de l’Afrique australe (SADEC) et du retour très récent dans l’AGOA. Elles concernent enfin les Bâtiments et Travaux Publics (BTP) d’autant plus que la mauvaise qualité des infrastructures routières constitue une contrainte pour le développement de l’île et que leur amélioration fait partie des investissements incontournables pour stimuler la croissance (Banque mondiale). Les trois sous-secteurs des mines, du textile/habillement et du BTP sont ciblés par la politique nationale d’emploi et de formation d’autant plus que le PND les considère comme susceptibles de tirer la croissance en avant.

Le secteur des services est prédominant dans la production de la richesse nationale. Au cœur de ce secteur celui du tourisme, de l’hôtellerie et de la restauration est un levier fort du développement économique, social et environnemental du pays. Il l’est notamment par son poids économique : 4,6% d’emplois directs et 13,3% d’emplois indirects créés et 5,9% du PIB malgache, selon le rapport du World Travel & Tourism Council (WTTC) de 2013 (SNDC/THR, 2014). Il est prévu que le secteur attire 1 million de touristes à l’horizon 2020 et crée annuellement 3% d’emplois supplémentaires. Mais cela ne sera pas possible sans un investissement significatif dans le développement des compétences des fonctionnaires et des employés qui y sont actifs.

Le secteur agricole produit 27% du PIB et emploie quasiment 80% de la population active. Les agriculteurs pratiquent en majorité une culture vivrière, dont les surplus sont commercialisés sur un marché domestique cloisonné. L’Ile a vocation, selon la Commission de l’Océan Indien de 2013, à devenir le grenier alimentaire de la région, mais cela suppose tout à la fois une meilleure utilisation des 36 millions d’hectare de terre cultivables, dont seulement 6% sont exploités et 2% irrigués, et une élévation des capacités de production et donc de compétences des agriculteurs dont les techniques de production et par conséquent les rendements sont trop faibles pour atteindre un objectif aussi ambitieux.

Figure également par les secteurs d’activité considérés comme prioritaire celui des technologies de l’information et de la communication ou TIC. Il désigne à la fois une activité économique au sens

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habituel du terme (les infrastructures des télécommunications et des diverses formes de réseaux…) et le développement de l’usage des moyens technologiques permettant d’irriguer le champ global de l’économie en y créant des capacités nouvelles de collecte, de partage et de diffusion des informations. Il sera possible ainsi de mieux observer et analyser l’évolution des métiers et compétences sur le marché du travail et, par ce biais, de donner aux secteurs d’activités identifiés plus haut, de plus grandes capacités à anticiper leur gestion des emplois et des compétences, avec comme corollaire, la capacité de mettre en place des dispositifs d’orientation, de formation, d’insertion et de certification mieux connectés avec les besoins du développement socioéconomique.

Les assises sectorielles, dont les dernières se sont déroulées au début du mois de novembre 2014, ont porté sur la manière dont une politique d’emploi et de formation professionnelle ciblée sur des secteurs prioritaires devait permettre d’identifier et de promouvoir des métiers porteurs susceptibles de dynamiser ces secteurs tout en promouvant une croissance inclusive et un développement durable au plan national.

1.1.3. Les objectifs et facteurs de développement à l’horizon 2019 Comme évoqué en introduction, le PND a fixé des axes nationaux prioritaires de développement dont le but ultime est de mettre en œuvre « une stratégie d’accélération ciblée sur certaines actions porteuses d’effets de changement rapide et d’amélioration de la gouvernance, afin de permettre au pays de retrouver le chemin du développement inclusif et de la stabilité politique et sociale » (UNDAF, 2014). Exprimée de manière plus concrète cette stratégie a pour but, globalement et dans chaque secteur considéré comme prioritaire, de créer les conditions susceptibles de répondre aux défis de la situation actuelle :

mettre fin à la décroissance du revenu moyen par habitant et, par ce moyen, réduire les taux beaucoup trop élevés de pauvreté et d’extrême pauvreté ;

créer les conditions d’une croissance soutenue et génératrice d’emplois, afin d’améliorer la situation socioéconomique interne et le positionnement externe du pays dans le champ de la mondialisation ;

promouvoir une croissance riche en valeur ajoutée en ciblant l’investissement matériel et immatériel sur des secteurs à fort potentiel de croissance avec le but d’en faire à moyen et long terme des pôles d’excellence au service de l’ensemble de l’économie nationale ;

promouvoir une croissance inclusive et un développement durable en liant étroitement investissement dans l’activité sectorielle et investissement dans l’économie locale et régionale afin de créer cohérence et solidarité entre les diverses composantes de la nation.

Toutes ces actions ne pourront pas réussir sans un renforcement coordonné des compétences de l’ensemble des acteurs concernés. La politique nationale d’emploi et de formation devra jouer à cet effet un rôle primordial en créant les conditions d’une capacitation accrue de tous ces acteurs à aller jusqu’au bout des défis qu’ils auront décidé de relever.

1.2. La situation démographique, sociale et du marché du travailMadagascar est peuplé de 23,2 millions d’habitants en 2014 (www. Statistiques mondiales). La population de l’Ile, qui a été multipliée par 6 depuis 1950, a augmenté de plus de 3 millions de personnes entre 2008 et 2013 en raison d’un taux de croissance démographique proche de 2, 9% (Banque mondiale, 2012). 41,4% de cette population a moins de 15 ans et 3,2% plus de 64 ans. L’âge médian est de 19,2 ans. La pression démographique de l’Ile explique en grande partie la très forte tension qui s’exerce sur le marché du travail vu le très grand nombre de jeunes (environ 300 000) qui cherchent à y accéder annuellement.

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1.2.1. Le positionnement social de la population malgacheLa population de Madagascar connait un fort taux de pauvreté. Ainsi selon les données du PANEF, 92% de la population a vécu dans la pauvreté en 2010 contre 89,6% en 2005. 57% de cette population se situait durant la même période dans l’extrême pauvreté. La situation ne s’est pas améliorée depuis 2010 ce qui situe Madagascar parmi les pays les plus pauvres au monde.

Cette situation de pauvreté va de pair avec une détérioration des indicateurs sociaux. Ainsi, selon des données de la Banque mondiale de 2013, le nombre d’enfants non scolarisés s’est récemment accru (d’environ 600 000) tandis que la malnutrition infantile a augmenté dans certaines zones critiques de plus de 50%, que de nombreux centres de soins ont été fermés et que les parents pauvres ont dû assumer une lourde part du coût de scolarisation de leurs enfants, en raison de la défaillance du financement étatique.

Il est donc patent « que Madagascar ne sera pas en mesure d’atteindre la plupart des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) d'ici 2015, même ceux qui avaient été jugés, avant la crise, potentiellement réalisables (tels que la réduction de la mortalité infantile, l’augmentation du taux net de scolarisation et d'achèvement dans le primaire, ainsi que l’élimination de l’extrême pauvreté) ».

1.2.2. La situation du marché du travail au plan nationalLes analyses développées par le PANEF ainsi que l’enquête réalisée en 2012 sur l’emploi et le secteur informel (ENEMPSI) permettent d’en définir les grandes caractéristiques.

Les taux d’activité et de sous-emploi de la population activeSelon le PANEF, le taux net d’activité qui mesure la proportion de la population active (actifs occupés et chômeurs ensemble) dans la population en âge de travailler a atteint 64,7% en 2005 et 63,7% en 2010. Il a toutefois reculé d’environ quatre points pour revenir à 60,6% en 2012 ce qui, selon les analystes, ne signifie toutefois pas un recul de la motivation de la population à participer au monde du travail et à la vie économique. 3,2% de cette population active sont au chômage selon les critères du BIT. Le chômage touche essentiellement, selon ENEMPSI, les primo-demandeurs d’emplois et a pour caractéristique d’être un chômage de longue durée. Ainsi, en 2012, la durée moyenne du chômage était d’environ un an pour deux tiers des chômeurs et de plus d’un an pour l’autre tiers. Cette situation traduit la difficulté des jeunes à entrer sur le marché du travail et la plupart d’entre eux s’insère au moyen d’emplois ou d’activités de type informel.

Le marché du travail est également caractérisé par le sous-emploi qui concerne 10% de population active occupée. Ce sous-emploi touche les travailleurs en zone urbaine comme en zone et légèrement plus de femmes que d’hommes. Il atteint la proportion de 20% dans certaines régions pauvres (Menabe, Betsiboka et Vakinakaratra) et avoisine les 30% dans l’administration publique. L’enquête de 2012 met également en évidence que 80% des employés sont en situation d’emploi inadéquat, c’est-à-dire touchent une rémunération inférieure au minimum horaire garanti par la loi ou SMIG. Cette inadéquation est plus répandue dans le secteur rural (84,6%) que dans le secteur urbain (67,9%). Elle atteint dans certaines régions jusqu’à 90% des travailleurs.

Le marché du travail malgache est donc globalement caractérisé par une surreprésentation extrêmement significative des diverses formes de sous-emploi. Cette réalité est à prendre en compte dans les mesures qui devront être privilégiées dans le cadre d’une politique d’emploi qui devra viser l’insertion de chômeurs de longue durée mais également lutter contre la trop précarité des emplois existants.

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La prédominance du secteur et de l’emploi informelsLes diverses formes de sous-emploi sont effectivement liées à une prédominance très forte de l’emploi informel relativement à l’emploi total. L’enquête de 2012, qui porte spécifiquement sur le secteur informel, met en évidence que 93% des emplois créés se trouvent dans ce secteur. Il s’agit essentiellement d’emplois ou d’unités de production informelles (UPI) occupés par des individus qui travaillent à leur propre compte. Ces emplois sont surtout occupés par des femmes (94,4% contre 91,7% pour les hommes) et 75,3% d’entre eux sont situés dans le secteur agricole. 70 des emplois sont des auto-emplois et de ce fait essentiellement des emplois de subsistance. Près de 52% d’entre eux sont occupés par des femmes. Plus de la moitié d’entre elles travaillent à leur propre compte ou comme aides familiales. Les jeunes de moins de 26 ans représentent 28% de la main d’œuvre des UPI. L’enquête révèle que 9 UPI sur 10 ne sont pas enregistrés. Il s’agit donc d’emplois précaires et, dans la plupart des cas, d’emplois sans contrat de travail et sans protection sociale.

Le secteur informel développe essentiellement des activités commerciales (69% du chiffre d’affaires global du secteur) suivi par les activités industrielles (12,4%) et de services (14%). Il produit 24% du PIB global et 36% du PIB marchand non agricole. Il joue donc un rôle économique évident ainsi qu’un rôle social tout à fait important puisqu’il fonctionne, surtout en période de crise, comme un moyen d’insertion professionnelle privilégié de la population active et notamment des jeunes. Le secteur fonctionne également comme un lieu de professionnalisation puisque sept employés sur dix y ont appris leur métier sur le tas et que seulement 2,4% d’entre eux ont acquis leurs compétences dans un établissement de formation.

Il paraît évident, au regard de toutes ces réalités, que la PNEF devra concerner le renforcement des compétences en secteur informel. Il s’agit d’aider les actifs du secteur informel à acquérir des compétences de base et à une culture entrepreneuriale qui leur permettent de passer peu à peu d’un emploi de subsistance à un type d’activité qui leur permette de gagner décemment leur vie et, si possible, de pérenniser et de sécuriser leur emploi. Des études portant sur le développement des compétences en secteur informel montrent qu’un investissement significatif dans la formation et la professionnalisation de celles et ceux qui y travaillent dynamise l’ensemble du secteur et le fait passer peu à peu d’une économie de subsistance à une économie de croissance et de développement (Walther, 2013).

1.2.3. La situation des marchés du travail sectorielsLa croissance inclusive et le développement durable visés par la PND ne pourront pas se réaliser sans un accroissement des compétences de celles et ceux qui occupent les emplois existants : c’est la seule manière de lutter contre la précarité de ces emplois et d’augmenter leur capacité à nourrir et faire vivre de plus en plus décemment les nombreux actifs de l’économie informelle. Mais ils ne pourront pas non plus devenir réalité sans que la politique nationale d’emploi et de formation investisse dans l’identification des emplois qui feront l’avenir du pays et sans concevoir et mettre en œuvre des contenus et dispositifs de formation qui aideront leurs bénéficiaires à acquérir les métiers qui seront adéquats aux emplois ainsi identifiés.

Les Etats généraux de l’Emploi et de la Formation de juillet 2014 ont désignés cinq secteurs d’activités devant faire l’objet d’un investissement prioritaire de la part de la future politique nationale d’emploi et de formation professionnelle. Les Assises sectorielles qui ont suivi les Etats

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généraux ont permis d’esquisser un état des lieux actuel et prévisionnel du marché du travail dans chaque secteur sélectionné.

Les perspectives de développement du secteur agroalimentaireLe secteur est d’abord caractérisé par des ressources naturelles abondantes comprenant des millions d’hectares de terres arables se prêtant à l’exploitation agricole bien que seule une faible partie de ces terres soit irriguée et exploitée. Il a ensuite pour capacité de cultiver une large gamme de produits à la fois tropicaux et tempérés « grâce à la diversité pédoclimatique de l’Ile Contient ». Il a enfin pour opportunité que Madagascar occupe une position géostratégique « qui en fait une destination finale pour tout projet d’agro-business dans l’Océan Indien ».

Malgré ces très grands atouts qui en font un des secteurs les plus prometteurs de l’Ile, l’activité agroalimentaire est peu développée et intégrée et souffre notamment de très nombreux handicaps que les Assises ont permis de diagnostiquer. Il s’agit essentiellement d’une insuffisance technologique et énergétique, d’une obsolescence des outils de production et d’une absence de maîtrise des règles et procédures de normalisation et de commercialisation des produits. Il s’agit également d’une rareté des compétences aussi bien dans les domaines de la production, que de la maintenance et de la commercialisation de produits répondant aux exigences de qualité d’un marché international très concurrentiel.

Ce diagnostic une fois posé, les Assises ont défini les grandes orientations des emplois à pourvoir bien qu’il reste tout un travail à faire sur les référentiels métiers/compétences correspondant à ces emplois. Une mise en cohérence des diverses propositions des Assises permet de visualiser les situations et problèmes spécifiques des branches d’activités auxquels la future politique nationale d’emploi et de formation professionnelle devra apporter des réponses adéquates.

Branches d’activité

Les types de métiers/emplois potentiels

Les problèmes spécifiques selon la branche

Les problèmes spécifiques au type d’entreprise

Les problèmes communs à l’ensemble du secteur

Production agricole de rente

EncadrementExécutionAnalyse et contrôle

Tendance à la baisse de la qualité et de la quantité

PME

Accueil de la clientèle

Maitrise de la technique de vente

Faible maîtrise des langues de communication

Manque de discipline, de rigueur

Incompétence en général

Faible niveau d’instruction surtout des saisonniers

Absentéisme, stress, faible concentration (surtout pour les

Production de boissons alimentaires

MaintenanceQualitéCommercial

Baisse du pouvoir d’achat et dégradation des infrastructures

Production de boissons alcoolisées

CommercialMaintenanceTransportSécuritéMarketingAnalyses et techniques viticoles

Importation des matières premières et forte concurrence internationale

Biscuiterie, confiserie, chocolaterie

MaintenanceRecherche et développementNormalisation

Rareté des compétences dans la production et la maintenance

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Ressources humaines

plus pauvres)

TransformationConservation/ fruits et légumes

QualitéAccueilCommercial

Dégradation des infrastructures et faiblesse des compétences

Production de foie gras

Qualité AccueilCommercial

Effritement du pouvoir d’achat et embargo

Grandes entreprises

- Management

-Communication

-Maintenance industrielle

Transformation du lait

QualitéLogistiqueCommercial

Dégradation des infrastructures, Effritement du pouvoir d’achat plus concurrence

Minoterie LaboratoireRechercheEncadrement

Importation des matières première et faiblesse des compétences

Torréfaction (café)

CommercialSecrétariatAccueilTransport

Défaut de qualité du produit et de respect de la commande

Production d’huile alimentaire

AdministrationCommercialProductionMaintenanceRechercheQualité

Coupures d’énergie et faiblesse des compétences

La PNEFP devra investir de manière prioritaire dans un secteur qui occupe la très grande majorité de la population active et qui constitue par ailleurs un domaine d’activité stratégique de l’Ile. Ce secteur présente, en effet, l’avantage de pouvoir promouvoir une croissance à forte valeur ajoutée à condition que la politique mise en œuvre accroisse significativement les compétences de celles et ceux qui travaillent dans les métiers existants de la transformation des produits et ainsi remédie au manque de qualité actuel des produits transformés. Il a également pour caractéristique de produire une culture de rente très exportatrice, qui a besoin de compétences affirmées pour élever ses technologies de production et ainsi accroître tout à la fois la productivité et la qualité de son travail.

Les perspectives de développement du secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC)Le secteur des TIC regroupe les quatre branches d’activité que sont les télécommunications, les diverses entreprises de traitement des données, la vente de progiciels de gestion ainsi que la vente de matériel informatique. Il est possible de regrouper les deux dernières branches sous l’unique vocable de services informatiques.

Le développement de la branche des télécommunications se heurte à l’insuffisante extension des réseaux de distribution d’électricité, à une législation du travail qui freine sinon empêche la mobilité géographique et fonctionnelle des employés ainsi qu’à un manque de compétences de ces

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employés. L’illettrisme et l’analphabétisme d’une frange significative de la population freinent par ailleurs l’extension du téléphone comme de l’internet.

Les industries de traitement des données, qui concernent autant la mise au point de services technologiques de pointe au bénéfice des entreprises que les activités des centres d’appel, ont pour obstacle principal la rareté de personnels compétents ayant soit la capacité de combiner les nouvelles technologies (informatique et télécommunication par exemple) soit celle de maîtriser les langues étrangères qui sont nécessaires pour se former aux technologies de pointe comme pour faire fonctionner les centres d’appel.

Les services informatiques, enfin, sont confrontés à une forte concurrence, souvent déloyale, dans le domaine de la vente des systèmes d’information et de gestion à destination des entreprises et au faible pouvoir d’achat des ménages en ce qui concerne la vente des matériels informatiques.

La levée de tous ces obstacles, dont ceux liés à un manque d’investissement dans les infrastructures électriques et de télécommunication et à la rareté des compétences technologiques à tous les niveaux de la population, depuis le cadre supérieur jusqu’à l’usager de base, permettrait d’augmenter de manière significative les embauches directes dans le secteur. Les indications fournies par les Assises listent un ensemble de postes ou de métiers auxquels la PNEFP devra apporter un supplément de compétences. Une lecture transversale et cohérente de ces indications permet de synthétiser les requêtes formulées par le secteur vis-à-vis de la politique nationale d’emploi et de formation.

Branches d’activité Types de postes/métiers Types de compétences requises

Opérateurs de télécommunications

Gestionnaires de réseauxAdministrateurs de bases de donnéesDéveloppeurs d’applicationsCommerciauxSpécialistes en transferts financiers

TechniquesInformatiquesCommercialesManagementCulture projet

Industries de traitement des données

InformaticiensDéveloppeurs d’applicationChefs de projetsDesigners

Suivi des évolutions technologiquesRigueur et autonomieCréativitéMaîtrise parfaite de la langue françaiseConnaissance d’autres langues

Services informatiques Commerciaux et cadres commerciauxConseillers

Relation clientCapacité à se concentrer sur son travail

Les indications fournies sur les potentialités d’embauche du secteur ne concernent que quelques centaines de postes à pourvoir à court et moyen terme. Mais les conclusions des Assises ne précisent pas suffisamment que l’ensemble des autres secteurs d’activité ont besoin d’un accroissement de compétences technologiques et informatiques et que la caractéristique des TIC est de concerner des industries spécifiques tout en représentant une dimension incontournable de l’ensemble des activités économiques. Il faudra que la politique nationale à mettre en œuvre envisage le développement des compétences technologiques et de communication pour ce secteur

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précis mais également pour l’ensemble des métiers de production et de service.

Les perspectives de développement du secteur BTP/Ressources stratégiquesLe secteur du BTP est un des secteurs phares de Madagascar. Il a été jusqu’en 2008 un secteur à forte croissance (+ 27,6%) et dont la contribution au PIB est passée de 3,2% en 2006 à 4,74% en 2008 (FORMAPRO-BTP, 2010). La croissance du secteur a ensuite suivi le ralentissement général de l’économie. Ainsi entre 2008 et 2011 il y a eu une forte diminution des personnels employés par le secteur (70 % des pour les personnels des entreprises adhérentes du SE-BTP) ainsi qu’une baisse de 40% du volume de production. Le secteur est actuellement en attente d’une reprise des projets miniers qui, selon la Banque mondiale, constituera le principal moteur de la croissance pour les années à venir.

Les activités du secteur du BTP comportent les filières relatives aux industries minières et extractives (exploitation, transport et forage), à l’immobilier (gros œuvre, équipements techniques et aménagement interne) ainsi qu’aux infrastructures routières et à la construction d’édifices producteurs d’énergie. Les dernières statistiques disponibles (INSTAT, 2006) donnent un aperçu de la distribution des entreprises à l’intérieur du secteur. Celui-ci comporte d’abord 70% d’activités formelles et 30% d’activités informelles. Les entreprises formelles se répartissent en 45% de très petites entreprises (TPE), en 53% de petites et moyennes entreprises (PME) et en 2% de grandes entreprises (GE). Les GE réalisent toutefois 40% de l’activité de l’ensemble du secteur. Les entreprises du secteur informel sont majoritairement des entreprises unipersonnelles (65,2%) mais le reste de l’activité est réalisé par des unités de production informelles (UPI) occupant le taux de salariés (31,3%) le plus important du secteur informel. Le résultat en est que les UPI du BTP ont une longévité qui est parmi la plus forte du secteur informel et qu’il existe de fortes similarités entre les TPE et les UPI d’autant plus que ces dernières tout en répondant aux demandes directes des ménages travaillent également pour le secteur public.

Il existe donc de fortes relations sinon interpénétrations entre le BTP formel et informel ce qui explique pourquoi la politique nationale d’emploi et de formation à développer au plan de ce secteur devra promouvoir des dispositifs de professionnalisation qui soient valables pour l’ensemble des employés du secteur quelque soit le statut de leur emploi. Le processus de formalisation ne doit pas être un préalable mais plutôt un aboutissement du développement des compétences à condition toutefois que les pouvoirs publics mettent en places des mesures incitatives appropriées facilitant cette formalisation.

Cette convergence de situation entre les divers types d’entreprise du BTP ainsi qu’entre le secteur du BTP et celui des Ressources Stratégiques permet de définir des lignes directrices communes quant à l’identification des besoins de compétences prioritaires. En combinant les analyses de l’étude FORMAPRO-BTP et les conclusions de la Commission Formation des Assises du BTP on arrive à identifier de manière coordonnées les requêtes formulées vis-à-vis de la politique nationale de formation et d’emploi.

Branches ou filières d’activité Types de postes/métiers à promouvoir

Types de compétences requises

Mines Spécialistes en amont:- recherche pétrolière- forage

Pour les métiers de base :-un fort besoin de formation-métiers pour les nombreux

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- soudure-montage des installationsEmplois en aval :-entretien/maintenance : tourneur, fraiseur… -distribution

travailleurs sans qualification-l’acquisition des compétences- métiers afin d’accéder aux emplois en manque de main-d’œuvre

Pour les cadres/techniciens :-des compétences transversales du type logistique, management, gestion… pour leur permettre de s’adapter à l’évolution de leurs fonctions et des besoins des entreprises

Pour les entrepreneurs :-des compétences de gestion et de management, notamment pour chefs d’entreprises des TPE, formelles ou informelles, afin de les aider à mieux développer leurs activités

Bâtiments Les emplois haut-niveau sont plutôt pourvusIl manque :- des agents de maitrîse-essentiellement des ouvriers spécialisés : maçons/coffreurs, plombiers…

Transports Même situation que pour le bâtimentIl manque :- des conducteurs d’engins- des chefs de chantier- des conducteurs de travaux…

Les perspectives de développement du secteur du secteur Tourisme, Hôtellerie et RestaurationLe secteur du tourisme est un des leviers développement économique, social et environnemental du pays. Il l’est par son poids économique : 4,6% d’emplois directs et 13,3% d’emplois indirects créés et 5,9% du PIB malgache (WTTC 2013). Toutefois le pays reste en dessous de son potentiel de développement touristique en raison notamment du manque de qualité et de compétences de ses ressources humaines. La prise de conscience de cette situation a fait que le Ministère du Tourisme est en train d’élaborer une Stratégie Nationale de Développement des Compétences pour les métiers de tourisme, hôtellerie et restauration (SNDC-THR), pour les cinq prochaines années (2015-2020) assortie d’un plan d’action pour les années 2015/2017.

Le secteur du tourisme a connu, comme les autres secteurs, un ralentissement significatif de l’activité (-32% de touristes) entre 2008 et 2012. Cette situation n’est pas irréversible vu que l’Ile a des atouts incomparables dus notamment à sa grande biodiversité et à ses grandes richesses naturelles et culturelles. Mais il faut, pour redonner à l’île toutes ses potentialités et pour arriver à « faire de Madagascar une destination touristique durable » et attirer d’ici à 2020 un million de touristes, augmenter entre autres améliorations significatives la qualité des emplois et des services et la qualification des personnels touristiques.

Situation actuelle de l’emploi et prévisions à l’horizon 2020Le document relatif à la SNDC-THR donne un aperçu précis de la création d’emplois entre 2008 et 2013 par branche d’activité. Sur l’ensemble des emplois créés 83% l’ont été par l’hôtellerie/restauration et 17 % au titre des entreprises de voyages et des prestations touristiques.

Industrie 2008 2009 2010 2011 2012 2013

Hôtels et/ou Restaurants 20 623 21'998 23'843 25'412 28'325 30'413

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Entreprises de Voyages et de Prestations touristiques

5 039 5'301 5'544 5'795 6'003 6'303

Total 25 662 27'299 29'387 31'207 34'328 36'716

Ne sont pas comptabilisés dans ces données les emplois publics créés par le tourisme dans l’administration, les organismes rattachés et les parcs nationaux, ni les emplois fournis par l’économie informelle liée de manière directe au tourisme. La comptabilisation globale des emplois créés est impossible à faire vu qu’il n’existe pas une nomenclature officielle des métiers du tourisme. Il faudra décider si cette nomenclature devra d’abord se faire au niveau intersectoriel ou devra préalablement être réalisée au niveau des cinq secteurs prioritaires.

Des projections à court et moyen terme prévoient une augmentation significative du nombre d’emplois. Il existe à ce sujet deux scénarios. Le scénario le plus optimiste, qui prévoit un million de touriste en 2020 aboutit pour les filières hôtel/restauration et entreprises voyage/prestations touristiques à un nombre total d’emplois de 74260 soit à un accroissement de 100% du nombre d’emplois répertoriés en 2013.

Croissance des emplois et développement des compétencesLa caractéristique des emplois touristiques est que beaucoup d’entre eux sont saisonniers et connaissent un fort taux de turn over. Il en résulte que la plupart de ces emplois ne sont pas très qualifiés d’autant plus que le système de formation n’offre pas de qualifications très affirmées. Ils sont par ailleurs souvent dévalorisés notamment en raison de « conditions de travail pas suffisamment respectueuses des dispositions légales et réglementaires : bas niveau des salaires, non déclaration des travailleurs, non-respect des dispositions relatives à l’essai et aux heures supplémentaires, absence de prise en charge du travail des nuits, non affiliation au système de santé et sécurité au travail, non majoration des heures supplémentaires…[Rapport des Assises et entretiens supplémentaires].

L’attraction des touristes à l’horizon 2020, quelque soit l’hypothèse choisie, ne pourra devenir réalité que si la politique nationale d’emploi et de formation se donne pour priorité de mieux qualifier et valoriser les emplois actuels. C’est la seule manière pour l’industrie touristique de se donner l’image d’excellence dont elle a besoin pour réaliser les objectifs ambitieux qu’elle s’est fixés.

L’analyse de la situation actuelle et des évolutions en cours de l’industrie touristique permet de brosser un tableau synthétique des demandes de compétences auxquelles la politique nationale devra répondre pour à la fois prendre en compte les nouvelles tendances et demandes touristiques et dynamiser une activité économique potentiellement créatrice d’emplois. Les métiers identifiés ci-dessous ainsi que les compétences qu’ils requièrent ressortent d’une lecture transversale de l’ensemble des orientations stratégiques définies au plan sectoriel.

Branches ou filières d’activité Types de postes/métiers à promouvoir

Types de compétences requises

Thématiques touristiques émergentes au plan

Des nouveaux métiers dans l’écotourisme, le tourisme

Des compétences pointues en fonction des référentiels

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international durable, le tourisme culturel, le tourisme balnéaire, le tourisme d’affaires, le tourisme de luxe

métiers existants ou à définir

Ensemble du secteur touristique

Tout type de métier à tout niveau

Meilleure maîtrise de la langue françaiseMeilleure maîtrise des langues internationales en fonction des régions d’accueil (anglais, italien, chinois)

Hébergement Personnels d’accueil et de gestion, femme de chambre, lingère…

Des compétences en relation avec les normes internationales de l’hôtellerieDes compétences renforçant la professionnalité de chaque métier à tous niveaux

Restauration Cuisinier(e), commis de cuisine,garçon ou serveuse de restaurant…

Des compétences en relation avec les normes internationales de la restaurationDes compétences renforçant la professionnalité de chaque métier à tous niveaux

Entreprises de voyages et prestations touristiques

Guides touristiques (plein air, mers…), animateurs de loisirs, professionnels de l’évènementiel …

Des compétences en fonction des référentiels métiers existants ou à définir

Les perspectives de développement du secteur du secteur Textile, Habillement et AccessoiresTexte à rédiger en fonction du compte-rendu à venir des Assises du secteur.

En guise de conclusion de l’approche sectorielleLes Assises sectorielles ont eu pour grand avantage de faire un diagnostic aussi précis possible des besoins de compétences de chaque secteur et d’indiquer en conséquence les défis stratégiques et opérationnels auxquels les Comités sectoriels devront faire face. Ces Assises ont également été l’occasion de rassembler et de faire travailler en commun, de manière partenariale, l’ensemble des acteurs publics et privés, économiques, professionnels et de la société civile intervenant dans le secteur. C’est la mise en synergie de l’ensemble de ces acteurs qui a permis de définir avec justesse les tenants et aboutissants de la situation actuelle tout en balisant de manière dynamique et réaliste les chemins à parcourir pour les cinq années à venir.

Les diverses Assises ont ainsi défini les conditions auxquelles les stratégies nationales de développement des compétences (SNDC) auront des chances d’atteindre les objectifs fixés par chaque secteur. Rien ne pourra se faire sans une implication active de tous les acteurs concernés dans la conception, la mise en œuvre, l’évaluation et la certification des mesures et dispositifs sectoriels de DC à développer à l’horizon 2020. Une politique nationale ne peut réussir que si elle renforce les secteurs d’activité et les métiers porteurs de croissance et de valeur ajoutée en s’appuyant sur une dynamique partenariale de pilotage et de gestion d’un plan d’action défini et décidé en commun.

1.2.4. Les perspectives de développement des économies régionales et localesA rédiger si le CR des Assises régionales permet d’avoir un aperçu documenté à ce sujet.

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1.2.5. Les axes stratégiques de développement d’une politique nationale d’emploi et de formation professionnelle

Si le PND, en cours d’adoption, définit les grandes orientations de transformation de la situation socioéconomique actuelle dans lesquelles devra s’inscrire tout naturellement la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle, les propositions qui suivent s’appuient sur une analyse critique de la situation socioéconomique actuelle effectuée notamment par le PANEF et sur les conclusions des Etats Généraux de l’Emploi et de la Formation de juillet 2014. Elles définissent un certain nombre d’axes stratégiques qui devront inspirer les futures réformes à réaliser dans le cadre de la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle.

Le diagnostic critique de la situation actuelle de l’emploi et de la formation professionnelleLe PANEF fait le diagnostic d’un marché du travail dominé par le sous-emploi (8 actifs sur 10 en situation d’emploi inadéquat) et des emplois informels et faiblement productifs (93% de l’emploi total) pour analyser les causes de cette situation. Elles sont notamment dues à la faiblesse des infrastructures (routes, électricité…) et de l’accès au crédit, aux manques de performance globale du système d’éducation et de formation et, plus généralement, à un environnement économique défavorable (corruption et instabilité de la politique en place) (Global Competitiveness Report, 2014).

S’ajoute à ces causes la faible efficacité institutionnelle ou l’absence des services publics de l’emploi.. Les chercheurs d’emplois essaient de remédier à cette faiblesse et d’accéder au monde du travail en utilisant au maximum leurs relations sociales et familiales. Le PANEF signale également l’existence, à l’instar de ce qui se passe dans la plupart des pays ayant un fort taux d’emplois précaires et des niveaux d’instruction particulièrement faibles, d’un cercle vicieux économique qui peut se définir comme suit : l’omniprésence d’emplois de subsistance engendre des revenus trop faibles pour susciter une demande de consommation suffisante et ainsi engendrer un surcroit d’activité économique et donc de création d’emplois.

Une telle analyse ne doit pas toutefois sous-estimer le rôle que l’économie informelle joue dans la création d’emplois. L’OCDE et la Banque africaine de développement (BAD) soulignent ainsi dans leurs analyses sur les perspectives économiques africaines (PEA, 2012) que durant la crise mondiale de 2008/2010, cette économie a servi d’amortisseur, notamment dans les secteurs de l’agriculture, du commerce et de l’entrepreneuriat, et a créé trois emplois sur quatre dans les pays en développement. Il y a donc moyen de sortir du cercle vicieux économique à condition d’agir sur les leviers de la productivité les plus dynamiques que sont l’élévation du niveau d’éducation et l’accroissement des compétences professionnelles correspondant à la demande de qualification des emplois existants ou en émergence.

L’inadéquation de la formation technique et professionnelle avec le marché du travail est une faiblesse endémique que Madagascar devra impérativement surmonter. Mais cette inadéquation ne correspond pas simplement à un manque de formation préparatoire à l’emploi. Elle correspond également à un manque d’investissement dans l’accroissement des compétences des adultes et des jeunes qui sont déjà insérés dans le monde du travail.

Les voies de sortie des faiblesses socioéconomiques et institutionnelles de la situation actuelle de l’emploi et de la formation professionnelleLes analyses tant globales que sectorielles et régionales indiquent quelles sont les voies possibles de transformation des situations actuelles et les investissements à réaliser pour faire passer le pays d’un cercle économique vicieux à un cercle économique vertueux. Ces voies possibles rejoignent en grande partie les axes stratégiques définies par le PANEF. Si on compare toutes ces propositions à la

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réalité des autres pays du continent africain (ADEA, 2012), il est possible de les synthétiser selon les cinq actions prioritaires suivantes.

Première voie de sortie: établir un nouveau pacte social entre les pouvoirs publics et l’ensemble des acteurs économiques et sociauxUn tel pacte social est proposé par le PANEF sous la forme d’un engament de réciprocité entre le gouvernement et les autres partenaires économiques et sociaux. Mais il ne s’agit pas seulement à travers un tel pacte de définir des exigences partagées de performance et de redevabilité. Il s’agit plus fondamentalement de définir les conditions auxquelles les pouvoirs publics et les acteurs économiques, professionnels et de la société civile s’engagent d’un commun accord à mettre en œuvre une politique d’éducation, de formation et d’emploi au bénéfice du plus grand nombre. Il n’est pas possible, en effet, si le pays veut promouvoir une croissance durable et inclusive, d’en rester à 90% d’emplois précaires et à 80% de sous-emploi au sens de l’inadéquation des compétences par rapport aux activités exercées.

L’engagement d’un développement des connaissances, des compétences et des qualifications au service de tous devra être décliné dans le cadre du programme d’action de manière à viser des objectifs précis, réalisables et séquencés dans le temps. Il faudra pour cela articuler une politique nationale au service de tous et une politique sectorielle au sein de laquelle chaque comité aura la responsabilité de développer, dans son domaine d’activité, des programmes d’action spécifiques de dynamisation de l’emploi, notamment au moyen de dispositifs appropriés de formation professionnelle.

Deuxième voie de sortie : créer des outils performants d’information sur l’emploi et la formation professionnelleUne politique de connexion étroite entre les politiques d’emploi et de formation professionnelle demande, comme le souligne le PNSE, la mise en place d’un système national d’information permettant de rendre lisibles les situations des marchés du travail et de la formation professionnelle et surtout de les ajuster l’un à l’autre au fur et à mesure de leurs évolutions. Il existe au stade actuel l’Observatoire National de l’Emploi et de la Formation (ONEF) créé en 1996 sous l’intitulé d’Observatoire National des Compétences et de l’Emploi (ONCE) et qui constitue l’organe d’étude, de conception et d’information du secteur de l’ETFP. Il existe également depuis 2005 un Observatoire Malgache de l’Emploi et de la Formation Professionnelle Continue et Entrepreneuriale (OMEF), devenu entre temps UNISAR, davantage axé sur la création d’un véritable système d’information statistique sur l’emploi. Il existe également d’autres organismes et observatoires institutionnalisés tels que l’INSTAT qui a réalisé l’Enquête Nationale sur l’Emploi et le Secteur Informel (ENEMPSI, 2012) ou les Observatoires ruraux. Madagascar possède donc de fortes potentialités de suivi et d’instrumentation de la relation formation/emploi, Mais dans le même temps la faiblesse et la multiplicité des acteurs existants pose la question, comme l’avait souligné en son temps le PNSE, de la mise en place « d’un creuset de concertation inter-organismes » et plus largement l’adoption d’un système d’information du marché du travail (SIMT) faisant une observation homogène de la relation emploi/formation. Il faudra pour cela introduire dans l’appareillage statistique existant des indicateurs permettant de saisir la réalité du développement des compétences (du type de ceux adoptés par les pays membres de l’espace UEMOA) qui est au cœur du processus de préparation de la politique nationale d’emploi et de formation. Cet appareillage devra notamment permettre d’identifier les gisements d’emplois sous-exploités ainsi que les effets des actions ciblées d’ETFP/DC sur la lutte contre la trop grande précarité des emplois de type informel.

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La mise en place d’un « creuset de concertation inter-organismes » et l’élaboration d’indicateurs sur la relation emploi/formation homogènes et partagés par tous seront nécessaires pour permettre d’identifier les politiques nationale et sectorielles d’emploi et de développement des compétences à mettre en œuvre et d’en suivre et évaluer les résultats atteints au fur et à mesure de la concrétisation des objectifs qu’elles auront fixés.

Troisième voie de sortie : identifier et accroître au plan des régions et des secteurs prioritaires les emplois et métiers porteursLes assises sectorielles et régionales ont permis de prendre conscience de la nécessité qu’il y avait à lancer des études sectorielles permettant de diagnostiquer les métiers en cours de développement et pour lesquels il n’existait pas, dans la plupart des cas, de dispositifs de formation susceptibles de développer les compétences requises. La caractéristique de ces métiers que l’on appelle porteurs est qu’ils sont indispensables pour répondre positivement aux mutations économiques, technologiques et sociales en cours et ainsi créer les conditions d’accès aux niveaux de croissance et de valeur ajoutée que ces mutations permettent d’espérer. Il sera indispensable à court et moyen terme que les responsables régionaux ainsi que les comités sectoriels prennent tous les moyens pour, d’abord identifier de manière précise les contours et les niveaux de ces métiers, ensuite en établir un plan de mise en œuvre hiérarchisé et séquencé et, enfin, en définir les référentiels de compétences et de certification ainsi que des curricula de formation permettant de répondre le plus rapidement et le plus efficacement possible aux demandes de qualification du marché du travail.

Un tel développement des métiers porteurs, allant le plus rapidement possible de leur conception jusqu’à leur implantation dans des dispositifs de formation adéquat, ne sera vraiment efficace que si l’ensemble des acteurs locaux, régionaux et sectoriels se mettent d’accord sur une méthodologie harmonisée de l’ensemble du processus d’ingénierie du développement des compétences des métiers porteurs. Les réformes à promouvoir devront impérativement investir dans la réalisation d’une telle harmonisation. Mais il faudra, dans le même temps, développer une « masse critique » de responsables capables de mettre en œuvre l’ensemble de ce processus.

Quatrième voie de sortie: passer progressivement des emplois de subsistance à des emplois permettant de travailler et de vivre décemmentLes marques les plus évidentes de la précarité sont, selon la définition même de l’emploi informel (CIST, 2003), sa non soumission à la législation nationale du travail et aux régulations fiscales, à la protection sociale ou au droit à certains avantages (le préavis de renvoi, l'indemnité de licenciement, les congés payés ou les congés de maladies, …). Mais avant d’être définie en tant que telle, la précarité exprime la difficulté sinon de l’incapacité des personnes qui occupent un emploi informel à gagner correctement leur vie et à sortir de la spirale de pauvreté qui est celle de l’incertitude à gagner la subsistance quotidienne pour soi-même et pour sa famille. C’est pourquoi le passage d’un emploi précaire à un emploi décent n’est pas d’abord le résultat d’une législation sociale contraignante, mais d’abord l’effet progressif mais réel de l’élévation du niveau d’éducation et de formation de celles et ceux qui occupent un tel emploi. (PEA, 2012, BM, 2013, Walther, 2013). Il existe une relation de fait entre le niveau d’éducation et le niveau de précarité comme il existe des analyses montrant que l’accroissement du niveau de compétences des entrepreneurs du secteur informel les conduits peu à peu à une acceptation de la taxation de leurs revenus et à une progressive inscription de leurs employés dans un système minimal de protection sociale. Il convient, enfin, de constater que le secteur informel est lui-même producteur de compétences puisque la plupart des jeunes qui y occupent un emploi ont de fait été professionnalisés soit dans le cadre de

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l’apprentissage traditionnel, soit au moyen de l’acquisition directe de leurs compétences en situation de travail. Pour le moment ces compétences ne sont pas certifiées, mais elles devront l’être.

Il résulte de tous ces constats que la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle ne sera vraiment efficace dans sa lutte contre la précarité que si elle inscrit dans ses priorités l’importance sinon l’urgence d’investir dans les ressources humaines du secteur informel.

Cet investissement devra passer par le développement d’une formation de type apprentissage traditionnel rénové (telle qu’elle existe au Bénin et au Mali) qui prépare le mieux les jeunes à occuper des emplois qualifiés et donc de moins en moins précaires.

Il devra mener à un accroissement des compétences des maîtres d’apprentissage et entrepreneurs qui professionnalisent la grande majorité des jeunes dans les unités de production informelles et ainsi pourront mieux les former aux exigences d’un marché du travail en évolution constante.

Il devra enfin former à la gestion, à l’innovation, aux nouvelles technologies et à l’entrepreneuriat les responsables des entreprises individuelles et ainsi les rendre capables d’assumer des emplois porteurs tout en devenant eux-mêmes des créateurs d’emplois.

Tout cela devra aller de pair avec la mise en place d’un cadre législatif, institutionnel et de développement des capacités qui appuie et promeut l’économie des micro- et petites entreprises.

Cinquième voie de sortie : former et renforcer les intermédiaires du monde de l’emploi et de la formation professionnelleLe processus de préparation de la PNEFP a été très inclusif et très participatif en recueillant les besoins et les contributions de toutes les parties prenantes du pays. Il a mis en œuvre à cet effet toute une dynamique de coordination intégrant, autour du pilotage assuré par le MEETFP, les acteurs d’intermédiation du développement de l’emploi et des compétences techniques et professionnels que sont les diverses administrations publiques, mais également et surtout les groupements économiques et professionnels et les partenaires sociaux. Comme déjà affirmé, la future politique d’emploi et de formation professionnelle devra permettre la mise en place d’un système de gouvernance partenarial, pérenne et durable, associant gouvernance intersectorielle et gouvernance intersectorielle. Mais cette association ne suffira pas. Il faudra également que les divers acteurs engagés dans le processus de dynamisation du marché du travail et d’un développement des compétences adéquat par rapport aux besoins de qualification de ce marché entrent dans un dispositif de co-formation leur permettant de s’approprier les évolutions en cours et prévisionnelles de la réalité socioéconomique malgache.

Beaucoup de réformes échouent pour la raison que les décideurs et acteurs qui en ont la charge oublient d’adapter leurs propres capacités d’analyse, de gestion et d’évaluation tout au long de leur mise en œuvre. Il sera donc impératif que la politique nationale prévoie, notamment pour les organisations économiques et professionnelles, sans lesquelles il est difficile d’actualiser au fur et à mesure les référentiels d’emploi et de compétences, des dispositifs d’appui qui les aide à mieux remplir les responsabilités que leur confère leur rôle de partenaires incontournables des pouvoirs public.

En guise de conclusionLa dynamisation du marché du travail ayant pour effet de lutter conte une précarisation massive des emplois au bénéfice d’emplois plus stables, plus pérennes, plus qualifiés et plus décents, ne peut être que le résultat d’une action multifactorielle et d’une approche systémique. Elle suppose avant tout une décision politique majeure : l’adoption d’un nouveau pacte social entre les pouvoirs publics et l’ensemble des partenaires économiques, professionnels et sociaux en vue de mettre en œuvre de

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manière concertée et synergique une politique d’emploi et de formation au bénéfice du plus grand nombre. Ce nouveau pacte social, qui a été initié de fait au travers de l’organisation des Etats Généraux puis des Assises Sectorielles et Régionales de l’Emploi et de la Formation professionnelle, devra être au cœur de la future politique nationale 2015/2019. Il devra ensuite être décliné en plusieurs actions prioritaires qui font déjà l’objet d’un consensus entre tous les partenaires engagés dans le processus en cours d’élaboration de la politique nationale : un développement significatif des emplois porteurs tant au plan sectoriel que régional et la création des conditions optimales pour passer d’une économie de subsistance à une économie permettant de vivre et de travailler décemment. Mais tout cela ne sera pas possible sans un pilotage partenarial renforcé, intersectoriel et sectoriel, de toute cette politique par des acteurs responsables et compétents et ayant à leur disposition un système d’information et d’observation efficace et unifié.

1.3. La situation du champ éducatif et de formationL’analyse de la situation macroéconomique globale ainsi que celle du marché du travail national, régional et sectoriel ont mis en lumière à plusieurs reprises, parmi les causes de la faible productivité de l’économie malgache et de la faible employabilité des actifs jeunes et adultes, le faible rendement du système éducatif et de formation professionnelle. Les priorités d’action proposées pour permettre au pays de réaliser, comme proposé par le PND, un développement inclusif et durable, supposent donc de faire un diagnostic précis de la manière dont une meilleure acquisition de connaissances, de compétences et de qualifications critiques peut et doit devenir un moteur efficace du développement tel qu’il est souhaité et visé à l’horizon 2019.

1.3.1. Les grandes données sur la situation actuelle du système éducatifUn des derniers bilans réalisés sur les objectifs atteints objectifs par Madagascar dans le domaine de l’éducation pour tous (EPT) (UNESCO, 2012) fait état des progrès significatifs réalisés par Madagascar en une dizaine d’années tant au niveau de l’enseignement de base que de l’enseignement secondaire. Ainsi selon des données actualisées pour les années 2009/10, (juste avant la vaque de déscolarisation amorcée depuis 2009), l’accès à l’enseignement de base est universel et atteint un taux d’achèvement de 73%, un taux qui dépasse la moyenne des taux du continent africain mais qui souligne malgré tout le défi auquel le pays doit faire face pour atteindre la scolarisation universelle. Ces données placent Madagascar au 14ème rang sur 28 pays africains en termes de l’index de développement de l’EPT.

L’accès à l’enseignement secondaire a connu, avant l’impact de la crise, une forte progression puisqu’il est passé de 23% à 47% pour le premier cycle et de 6% à 14% pour le deuxième cycle entre 2000 et 2009. Ces bons chiffres ne doivent pas cacher toutefois que les taux de transition entre cycles sont faibles (environ 60% entre le primaire et le premier cycle secondaire et environ 30% entre les deux cycles du secondaire). De même l’index d’apprentissage des élèves (de 49 sur une échelle allant jusqu’à 100) reste faible en termes de références internationales et le taux d’alphabétisme a baissé de 5% à 65% en 2009 par rapport aux 7% de 2000.

Il ressort de ces données que 86% des jeunes sont hors tout système éducatif à l’âge de 15/16 ans et que les acquis éducatifs de base pour entrer dans le monde du travail restent d’autant plus faibles que l’index d’apprentissage n’est pas très probant. Cette réalité a un effet certain sur les emplois des jeunes puisque des enquêtes et études (AFRISTAT, 2005, OCDE/BAD 2012) mettent clairement en lumière que le niveau éducatif intervient de façon latente mais réelle sur la capacité des jeunes à sortir des emplois de subsistance.

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1.3.2. Les grandes données sur la situation actuelle de l’ETFPL’enseignement technique et la formation professionnelle malgache comporte deux grandes filières : la filière de formation professionnelle et la filière d’enseignement technique. La filière de formation professionnelle a pour particularité, contrairement à d’autres pays africains, d’être accessible à partir de la fin de l’enseignement primaire. Elle compte 32 centres de formation professionnelle publics (CFP) et mène généralement à des niveaux de certification du type CAP et BEP tout en donnant aux jeunes la possibilité d’accéder au baccalauréat professionnel. Depuis un décret de septembre 2011, la formation professionnelle qualifiante d’une durée d’environ un an permet également d’accéder à la certification de formation ou CFF. La filière technique comporte 39 lycées techniques et professionnels (LTP) et mène au baccalauréat technologique tout en donnant la possibilité de passer par le CAP. Il n’existe pas de passerelles entre l’ETFP et l’enseignement général. Les deux filières, professionnelle et technique, mènent jusqu’à l’enseignement supérieur et donnent accès aux diplômes du DTS et du BTS, mais dans les faits très peu d’élèves y entrent et y réussissent.

Les CFP ont formé en 2010/11 environ 4684 élèves tandis que les LTP ont accueilli 18003 élèves. Ces données illustrent la part minoritaire que l’ETFP joue puisqu’il accueille seulement 7% des élèves inscrits dans l’enseignement secondaire et n’a consommé en 2009 que 0, 99% des dépenses publiques d’éducation (FORMAPRO-BTP, 2011. Il faut ajouter à ce nombre d’élèves ceux formés dans l’enseignement privé. Celui-ci possède 76% de l’ensemble des établissements ETFP et accueille environ 32000 élèves. Toutefois la moitié de ces élèves suit des formations courtes de type « formations qualifiantes » essentiellement dans le secteur des services. Une grande partie des établissements publics et privés sont implantés dans ou autour de la capitale ce qui constitue un obstacle sérieux à un développement économique équilibré entre les régions.

Les diverses évaluations faites de la situation actuelle de l’ETFP (Document de Stratégie, 2010, Formapro-BTP, 2011, BM, 2013) mettent en lumière les faiblesses auxquelles la future politique nationale devra remédier si elle veut atteindre les objectifs que lui fixe la PND. Ces faiblesses peuvent être synthétisées comme suit.

L’ETFP n’a pas établi de partenariat effectif avec le monde économique ; Les établissements forment dans un nombre très limité de domaines. Ainsi entre 2008 et

2009 trois domaines d’activité (BTP, confection et métiers du bois) ont concerné 81, 6% des élèves des CFP. Les formations dans le secteur agricole qui occupe 75% de la population active ainsi que les formations dans le textile au moment où Madagascar réintègre l’AGOA sont quasi inexistantes ;

Il existe une très faible efficience interne due notamment aux méthodes d’enseignement qui portent avant tout sur un apprentissage théorique du métier. La conséquence en est que les LTP ont perdu 25% de leurs effectifs d’une année sur l’autre en 2008-09 et que les CFP ont connu durant la même période un taux de redoublement de 12,3% ;

Il existe également une très faible efficience externe. Ainsi selon une enquête rapportée par le PANEF, 96,9 % des jeunes affirment ne pas avoir pu bénéficier d’une formation pour exercer leur activité actuelle ;

S’ajoute à ce manque d’efficience et de qualité le fait que l’ETFP ne répond pas aux besoins d’embauche de certains secteurs. Ainsi selon le PANEF, les industries extractives, appelées à se développer fortement entre 2006 et 2010, ont trouvé sur le marché local moins de la moitié des 8 000 compétences dont elles avaient besoin ;

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Plus globalement l’EFTP connait une situation institutionnelle problématique qui peut se caractériser comme suit :

o un corps enseignant insatisfait, ayant une moyenne d’âge élevée et recruté sans avoir la plupart du temps une expérience professionnelle dans les métiers enseignés ;

o des établissements en manque d’ateliers professionnels, possédant des équipements obsolètes, dont les plus récents datent des années 1990, et ayant à leur disposition des matériels didactiques insuffisants en quantité et dépassés en qualité quand ils existent ;

o des services d’information et d’orientation inexistants et pourtant essentiels pour à la fois conseiller les élèves et aider les centres de formation à définir des dispositifs et filières en relation avec les besoins de compétences du monde du travail ;

o une absence de lien et de coopération avec le monde économique et professionnel ce qui a pour conséquence un faible développement des formations en alternance et en apprentissage pourtant identifiées pour leur forte capacité à insérer les jeunes dans l’emploi. La raison en est que seule la formation résidentielle est reconnue

o des capacités d’accueil insuffisantes de la part des établissements publics, ce qui oblige beaucoup de familles à financer, au-delà de leurs moyens, la scolarisation de leurs enfants dans l’enseignement privé quand celle-ci n’est pas prise en charge par des partenaires au développement. Quoiqu’il en soit l’Etat n’apporte aucun appui aux centres privés;

o la langue française est utilisée dans les référentiels (quand ils existent) et dans les ressources pédagogiques alors que peu de formateurs maîtrisent cette langue :

o le budget de l’Etat alloué à l’ETFP est insignifiant et diminue d’année en année.

Ce diagnostic très synthétique ne fait que souligner les points les plus saillants d’une analyse plus complète établie et partagée au niveau national et international. Il met en lumière que l’ETFP, dans sa configuration actuelle, n’est pas en mesure de jouer un rôle significatif et pertinent dans le domaine du développement des compétences et donc du développement socioéconomique. Il joue un rôle très minoritaire dans le domaine de la préparation des jeunes à leur entrée dans le monde du travail. Ses contenus et ses équipements sont trop obsolètes pour aider les jeunes à acquérir les qualifications requises par les emplois existants et surtout en émergence. Les dispositifs de formation sont essentiellement résidentiels et impliquent trop peu les partenaires économiques et professionnels. Enfin l’ensemble du système ETFP est totalement sous-financé. Ce diagnostic sévère a pour utilité de pointer les éléments les plus problématiques auxquels la politique nationale devra impérativement apporter des réponses concrètes et adaptées aux défis à relever.

Il faudra également, dans le cadre de la stratégie nationale comme des stratégies sectorielles, poser la question de la nécessaire professionnalisation de l’enseignement supérieur vu que les métiers porteurs d’un certain nombre de domaines d’activités et de secteurs professionnels vont exiger des qualifications de haut niveau du type « techniciens supérieurs », mais également du type « ingénieurs et cadres supérieurs ».

1.3.3. L’absence de la prise en compte de la production de compétences hors du champ de l’ETFP

Face au rôle très mineur que joue l’ETFP formel public et privé, les très nombreux jeunes malgaches qui accèdent au monde du travail sans avoir une formation adéquate n’ont d’autres moyens que de

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se professionnaliser hors des dispositifs de formation existants. Madagascar partage à ce titre la situation vécue par la quasi-majorité des pays de l’Afrique subsaharienne, celle d’une acquisition massive des compétences techniques et professionnelles en situation de travail. “La formation sur le tas représente le mode dominant d’acquisition des techniques de base pour l’exercice d’un métier, s’adressant à de nombreux jeunes exclus du système scolaire et trouvant là une source efficace de “qualification” en vue d’une insertion dans le marché du travail”. (Journal de l’économie, avril 2011). Cette acquisition peut se faire dans le cadre de l’apprentissage traditionnel ou dans le cadre d’une mise au travail accompagnée et guidée par le chef d’entreprise.

Face à cette production massive de compétences au moyen des dispositifs informels de professionnalisation, des organisations internationales ont décidé d’investir dans la structuration de l’apprentissage sur le tas ou de l’apprentissage traditionnel (FIDA, 2011). Ainsi la GIZ investit depuis de longues années dans la promotion de l’apprentissage de type dual à l’instar de ce qu’elle fait dans d’autres pays africains. Les programmes de travaux à haute intensité de main d’œuvre du BIT intègrent de nombreuses activités de formation pratique en relation avec ces travaux, souvent reprises en charge par les communautés concernées. L’Union européenne soutient de son côté depuis plusieurs années des activités de développement rural en promouvant, de manière participative, des activités de formation servant de vecteurs du développement.

Depuis 2008 et pour une durée minimale de sept ans, le Fonds International de Développement Rural (FIDA) soutient le projet PROSPERER qui comporte des actions de formation à destination des jeunes de 15 à 25 ans en milieu rural. Le principe du projet consiste, entre autres, à placer ces jeunes en apprentissage pour une durée de 6 mois dans une micro ou petite entreprise de l’espace rural. Le but visé est de donner une formation pratique à des jeunes issus de familles vulnérables, de les accompagner dans leur recherche d’emploi ou des les appuyer dans leur projet de création d’entreprises. Ces quelques exemples d’appui de partenaires internationaux au développement des compétences hors dispositifs formels d’ETFP illustrent l’importance sinon l’urgence, démontrée par de nombreuses études de terrain (BM, 2013, Walther, 2013), pour les pays en développement d’investir dans l’accroissement des compétences des jeunes et adultes actifs du secteur informel. Ces études, ainsi que la déclaration adoptée par 25 ministres de l’emploi et de la formation professionnelle réunis à Abidjan en juillet 2014 sur l’importance de former les formateurs et entrepreneurs professionnalisant les jeunes en situation de travail (PQIP/DCTP, 2014), indiquent clairement que la future politique nationale d’emploi et de formation professionnelle devra inscrire l’accroissement des compétences des 90% d’actifs du secteur informel au cœur de ses priorités stratégiques et opérationnelles. C’est la seule manière de promouvoir la croissance inclusive et durable qui est au cœur des orientations stratégiques du PND.

1.3.4. Les grandes données concernant le système de certification en place (à finaliser par la « Plateforme DCTP »)

Les deux filières techniques et professionnelles aboutissent, comme mentionné plus haut, à une série de diplômes (CAP, BEP, Bac Pro, Bac Technologique, DTS, BTS…) qui sont partie intégrante du système national de certification. Mais à l’instar de ce qui se passe dans la plupart des pays du continent africain, ces diplômes mesurent les acquis d’une formation qui reste en très grande parti théorique et non les compétences réellement acquises, c’est-à-dire la capacité de celles et ceux qui les acquièrent à exercer le métier ou la spécialisation visés par le référentiel de formation.

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Cette focalisation de la certification sur l’efficience interne des cycles de formation et non sur leur efficience externe nuit à l’ouverture de l’établissement de formation sur son environnement socioéconomique. Elle empêche que les dispositifs et parcours de formation de type non formel (formations qualifiantes) ou informel (parcours de professionnalisation en entreprise et situation de travail) aboutissent à des processus de reconnaissance et de validation des compétences acquises. Or ces dispositifs et parcours sont largement plus producteurs de qualifications adaptées au marché du travail que l’ETFP publique ou privé. Ce constat plaide donc pour les objectifs actuellement poursuivis par la Plateforme DCTP, qui sont l’instauration d’un cadre national de certification donnant toute sa valeur à l’ensemble du champ de production de compétences.

L’instauration d’un tel cadre national de certification ou CNC, dont des modèles existent à Maurice, e Afrique du Sud ou en France, aura pour bénéfice :

de favoriser, dans l’ensemble des approches sectorielles et intersectorielles, la mise en œuvre de l’approche par les compétences et donc l’élaboration de référentiels de certification et de voies de certification, dont la VAE, basés sur l’acquisition effective de la capacité à exercer un métier donné ;

de rendre justice, dans le cadre du nouveau pacte social à adopter entre les pouvoirs publics et l’ensemble des partenaires économiques, professionnels et sociaux, à la situation personnelles de toutes celles et ceux qui ont acquis un niveau professionnel donné sans qu’il soit reconnu socialement et économiquement ;

de créer enfin des passerelles effectives, horizontales et verticales entre l’enseignement général et l’ETFP et d’enclencher par ce biais une dynamique de valorisation de dispositifs et parcours de formation le plus souvent choisis après une sélection par l’échec dans la voie de l’enseignement général.

Le choix et l’opérationnalisation d’un cadre national de certification, intégrant toutes les modalités d’acquisition et donc de reconnaissance des compétences, sont au cœur de la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle à promouvoir dans les années à venir. Une certification basée sur la seule logique du diplôme est inéquitable puisqu’elle ne reconnait pas la valeur professionnelle de la très grande majorité des jeunes et adultes ayant acquis leur qualification professionnelle hors d’un système d’ETFP formel et inadapté à la réalité économique et sociale. Elle est contreproductive puisqu’elle valorise socialement des titres et des positions alors que la dynamique d’un développement durable et inclusif demande d’abord à valoriser celles et ceux qui sont les producteurs effectifs d’un tel développement et dont la plupart a acquis un niveau professionnel et un métier en situation de travail.

En guise de conclusion Il ressort du diagnostic global de la situation présente du pays que la future politique d’emploi et de formation professionnelle devra jouer un rôle de catalyseur de l’ensemble des mesures à promouvoir dans les années à venir pour réaliser avec succès les objectifs de la PND. Toutes les politiques actives de dynamisation socioéconomique mettent actuellement en avant un triptyque inséparable : formation, insertion et création d’emploi. Il ne s’agira donc pas, dans cette future politique, de privilégier une des composantes du triptyque par rapport à l’autre, mais bien plutôt de voir comment les combiner de manière à créer un développement inclusif et durable. Un tel développement concerne autant les cinq secteurs prioritaires que les économies régionales. Il pousse en avant autant le secteur agricole et rural qui doit améliorer les conditions de travail et de revenu des deux tiers de la population active que les autres secteurs industriels et de services qui ont été choisis pour leur

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capacité à susciter une croissance et une production de valeur ajoutée dont le pays a besoin pour se donner un avenir digne de ses fortes potentialités naturelles et humaines.

La future politique nationale devra mettre au cœur de ses priorités qu’un emploi sans compétences adéquates a de fortes chances de rester un emploi de subsistance précaire et non décent, qu’une formation sans insertion est une tâche inaboutie et souvent inefficace et qu’une création d’emploi où la formation n’est pas considérée comme un facteur d’optimisation de tous les autres investissements risque fort de ne pas devenir pérenne.

Elle devra donc promouvoir une vision holistique du développement tout en considérant que la force motrice en sera l’investissement prioritaire dans les compétences de celles et ceux qui seront chargés de le mettre en œuvre.

2. LES GRANDES ORIENTATIONS PROGRAMMATIQUES DE LA POLITIQUE NATIONALE DE L’EMPLOI ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Il s’agit, avant de fixer les grandes actions prioritaires qui devront constituer le cœur de l’action politique dans les domaines de l’emploi et de la formation professionnelles, de définir les conditions auxquelles ces actions auront le maximum de chances de produire des résultats à la hauteur des résultats escomptés. Il s’agit en quelque sorte de définir les mesures préventives ou d’accompagnement qui donneront à ces actions le maximum d’efficacité.

Les analyses des relations qui peuvent exister entre éducation, formation et emploi mettent en lumière combien il est important de considérer le champ de l’éducation et de la formation dans son ensemble et d’y promouvoir au maximum les articulations entre, d’un côté l’éducation et la formation et, de l’autre, entre toutes les formes d’acquisition des compétences. Cette vision cohérente de l’ensemble du champ de l’éducation et de la formation est d’autant plus importante que les systèmes actuels ont tendance à établir des échelles de valeur entre ce qui relève du champ de la connaissance, ce qui relève de la préparation à l’emploi, et à l’intérieur de cette préparation, ce qui relève des acquisitions scolaires et ce qui relève de l’apprentissage en situation de travail.

Les réformes à accomplir à court et moyen terme devront aider à établir des passerelles dynamiques et des équivalences entre ces espaces institutionnels. Sans cette mise en relation, il sera difficile sinon impossible de susciter une dynamique de développement inclusive et durable dont le moteur devra impérativement être l’élévation des niveaux de connaissances et de compétences de tous au service d’une grande cause nationale.

2.1. Vers des instances de gouvernance efficaces et partenarialesL’analyse du fonctionnement institutionnel de l’ETFP a montré combien l’ensemble du système ainsi que les établissements qui le composent sont déconnectés du monde économique et professionnel. Il n’existe pas en fait de partenariat constitué et structuré entre la formation professionnelle, les entreprises et le monde du travail.

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L’ensemble du processus de préparation des grandes orientations de la politique nationale à l’horizon 2019 a permis de rompre avec cette déconnexion école/entreprise et d’organiser avec l’ensemble des partenaires concernés les Etats Généraux ainsi que les Assises sectorielles et régionales de l’Emploi et de la Formation Professionnelle. Elle a ainsi mis fin à l’isolement de l’ETFP et lancé une dynamique de gouvernance partenariale ayant pour objectif de piloter avec l’ensemble des parties prenantes le développement des compétences depuis l’identification des besoins jusqu’à leur traduction en ingénierie des compétences, de formation et de certification et, bien sûr, leur opérationnalisation dans des dispositifs de formation faisant eux-mêmes appel à la participation des acteurs économiques et professionnels territoriaux et sectoriels.

Première orientation programmatique : vers des instances nationales et multi-acteurs de pilotage et de coordinationIl existe actuellement un comité de coordination nationale présidée par le MEETFP et comprenant des partenaires internationaux ainsi que des partenaires nationaux (Plateforme DCTP, projet PIC) qui sont eux-mêmes appuyés directement ou indirectement par des organisations internationales. Cette plateforme travaille en relation étroite avec les principales entreprises ainsi qu’avec les principaux groupements professionnels du pays. Elle constitue le noyau de l’instance future qui devra piloter, animer, évaluer et, si nécessaire réorienter la PNEFP. Mais elle devra pour cela se structurer pour devenir une instance permanente de pilotage et de coordination dont la composition et les responsabilités devront être partie intégrante des décisions de mise en œuvre de la politique nationale. Cette instance, qui sera présidée et animée par le MEETFP, devra comporter statutairement quatre types de membres :

les représentants des ministères ayant en charge des responsabilités effectives de promotion de l’emploi et de développement des compétences ;

les représentants des organisations économiques et professionnelles nationales ; les responsables des comités de pilotages et de coordination sectoriels et régionaux ; les instances d’appui chargées d’assister le MEETFP pour le suivi, la coordination et

l’évaluation de la réalisation des actions relevant de la politique nationale (ANEC) ainsi que d’informer le ministère sur les évolutions du marché du travail et de la formation professionnelle (ONEF).

Deuxième orientation programmatique : vers des instances de pilotage et de coordination autonomes sectorielles et régionalesL’identification des métiers stratégiques à développer dans les cinq secteurs prioritaires ainsi que celle des métiers susceptibles de dynamiser les économies territoriales exige une intervention au plus près du terrain. Elle présuppose que les secteurs comme les régions se structurent, soit sous la forme de branches professionnelles, soit sous la forme d’agences territoriales de l’emploi et de la formation professionnelle. Chacune de ces organisations devra créer en son sein une cellule de veille, chargée d’analyser et de suivre les mutations en cours économiques, technologiques et professionnelles ainsi qu’une commission formation ou développement des compétences, chargée de transcrire ces mutations en référentiels de métiers, de formation et de certification. Ces deux organes devront impérativement comporter des représentants des groupements professionnels sectoriels ou territoriaux. Ils devront être pilotés par des comités mixtes, public/privé, qui décideront des actions à entreprendre et assureront la coordination et le suivi de ces actions. Leurs représentants seront membres de l’instance nationale de pilotage et de coordination.

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Troisième orientation programmatique : vers un système d’information prenant en compte tous les domaines de l’ETFP/DCLa prise en compte de l’ensemble du champ de production des compétences suppose que les instances de pilotage et de coordination puissent disposer d’informations portant sur l’ensemble de ce champ. L’enquête réalisée par l’INSTAT en 2012 sur le marché du travail à Madagascar (ENEMPSIS, 2012) montre que les indicateurs existants sur le marché du travail permettent de saisir les diverses formes d’emplois précaires. Il sera utile, pour informer les diverses instances de gouvernance de l’état réel des dispositifs production de compétences, dont les dispositifs d’apprentissage traditionnels ou les diverses formes d’alternance formation/travail, que la PNEFP sollicite les diverses organisations de collecte ou d’observation des données, dont l’INSTAT et l’ONEF, à introduire dans leurs systèmes d’information, à l’instar de ce qui se fait dans les pays membres de l’espace UEMOA, des indicateurs capables de saisir les diverses formes d’acquisition des compétences techniques et professionnelles.

2.2. Vers des mécanismes de financement assurant la mise en œuvre efficace et pérenne des décisions stratégiques et programmatiques

Les moyens financiers affectés à l’ETFP représentent à peine 1% des dépenses publiques d’éducation (FORMAPRO-BTP, 2010). La conséquence en est que le MEETFP n’a pas les moyens de renouveler son offre de formation ainsi que les équipements des établissements qui sont pour la plupart d’entre eux obsolètes. Les moyens budgétaires disponibles ne suffisent même pas à assurer la maintenance des établissements (BM, 2013). Il est évident qu’avec des ressources aussi faibles, il ne sera pas possible pour les pouvoirs publics de faire face aux défis à relever et de prendre la mesure des évolutions socioéconomiques et technologiques.

Quatrième orientation programmatique : prévoir dans la future PNEFP les moyens budgétaires nécessaires pour atteindre les objectifs fixésIl ne servira à rien de retenir des priorités d’action et de viser des résultats ambitieux si les moyens budgétaires disponibles et l’appui technique pour les mettre en œuvre ne permettront pas de les réaliser. Ces moyens devront à la fois permettre de rénover et d’élargir les champs d’intervention du ministère, de mettre à jour et d’anticiper les compétences dont auront besoin les formateurs pour accomplir les missions qui leur seront confiées ainsi que de mettre à dispositions les équipements et technologies nécessaires pour former aux métiers et emplois déterminés par chaque filière prioritaire. La seule voie possible, pour ne pas faire des promesses qui ne seront pas tenables, sera de faire pour chaque action prioritaire une budgétisation réaliste, à court et moyen terme, et de l’inscrire dans un chronogramme précis de réalisation.

Cinquième orientation programmatique : faire une approche budgétaire selon un rapport coût/efficacité optimal ciblé sur une acquisition de compétences menant à l’emploiLes affectations budgétaires actuelles sont basées sur un renouvellement annuel global des moyens attribués aux établissements assortis d’un facteur multiplicatif lié à l’évolution du nombre d’élèves. Une telle pratique a pour effet de maintenir des dotations budgétaires d’une année sur l’autre, sans autre critère que celui de l’appréciation des effectifs. Entrer dans une démarche réaliste et soutenable de financement des actions prioritaires qui seront déterminés au niveau sectoriel et territorial signifie d’abord pour la PNEFP de changer de vision budgétaire et de déterminer les moyens financiers nécessaires en fonction d’un calcul du coût unitaire annuel par formé qui varie selon le métier visé et la filière de formation concernée. Une telle démarche signifie ensuite que la

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réforme à mettre en œuvre devra inclure dans le calcul de ce coût les moyens nécessaires pour faciliter l’insertion des formés dans l’emploi. Il n’est plus possible en effet de doter un établissement d’un budget donné sans évaluer dans le même temps ses capacités à mener les jeunes vers l’emploi ce qui ne peut se faire sans l’instauration d’une approche qualité permettant de mesurer au fur et à mesure les évolutions des efficiences interne et externe. La PNEFP devra donc promouvoir une politique budgétaire capable d’accompagner ses priorités stratégiques et de lui garantir des résultats liant soutenabilité des couts et efficacité de l’accès à l’emploi.

Sixième orientation programmatique : créer des mécanismes de financement et de cofinancement cogérés entre les pouvoirs publics et le secteur privéMettre en œuvre une politique budgétaire adaptée aux défis par l’emploi et la formation professionnelle ne signifie pas seulement augmenter les dotations publiques qui sont la plupart du temps limitées par des contraintes nationales, mais également chercher des fonds additionnels tout en optimisant le rapport coût/efficacité des dispositifs en place ou à créer. La PNEFP devra à cet effet faire le choix de deux mesures sans lesquelles elle n’aura pas les moyens de ses ambitions.

Elle devra d’un côté décider résolument de développer, notamment dans les cinq secteurs prioritaires, les dispositifs d’alternance et d’apprentissage qui ont le double avantage de diminuer les coûts de formation tout en renforçant très significativement l’efficacité en termes d’insertion dans l’emploi.

Elle devra de l’autre s’engager résolument dans la voie de la création d’un fonds de formation intersectoriel autonome et géré de manière partenariale qui aura l’avantage de faire mieux faire participer le secteur privé au développement des compétences préparatoires aux emplois existants et en émergence tout en renforçant la culture de formation continue des employés et salariés des entreprises formelles et informelles.

Le choix de création des fonds de formation a été fait dans un très grand nombre de pays des cinq continents. Une étude récente (ADEA/AFD 2014) démontre les impacts très positifs que ces fonds peuvent avoir dans le développement socioéconomique d’un pays. La PNEFP sans moyens budgétaires conséquents ne sera pas en mesure de relever les défis que la PND lui a fixés.

2.3. Vers une démarche homogène de reconnaissance et de certification de l’ETFP/DC

Le processus de préparation choisi pour définir le document cadre de la PNEFP s’est fixé comme objectif de départ de mettre en place une dynamique de travail très participative et très inclusive. Cette dynamique a abouti à la proposition d’adoption par l’ensemble des partenaires concernés de l’approche par compétences tant au niveau de l’analyse des besoins de formation que de la mise en œuvre des ingénieries de formation et de certification.

Septième orientation programmatique : passer de la logique du diplôme à celle d’une réponse effective à la demande de compétences d’emplois existants ou en émergenceLe système ETFP cible, comme l’ensemble du système éducatif, l’atteinte d’un niveau de diplôme qui atteste de l’obtention d’un niveau de connaissances et de compétences correspondant au dispositif de certification en place ainsi qu’à un positionnement professionnel et social défini préalablement dans le cadre d’un système de classification des emplois publics et/ou privés. Le choix fait par les responsables publics et privés engagés dans le processus de préparation n’est pas de renoncer à la délivrance des diplômes, mais de l’inscrire dans une nouvelle logique qui part de l’emploi visé pour

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en définir le métier correspondant ainsi aboutir à une professionnalisation de la personne formée qui lui donne le maximum de chances de l’insérer dans l’emploi visé au point de départ.

Huitième orientation programmatique : faire adopter par l’ensemble des acteurs de formation un processus harmonisé d’ingénierie de développement des compétencesCette adoption est non seulement souhaitable mais possible vu le travail déjà effectué, notamment par la Plateforme DCTP, afin de proposer une ingénierie cohérente de conception et d’adoption des référentiels de métiers, de compétences et de certification à partir d’une analyse des réalités économiques et du marché du travail prenant prioritairement en compte la dimension sectorielle de ces réalités. La politique nationale devra s’appuyer sur ce travail pour l’adapter à l’ensemble des situations sectorielles et régionales et ainsi aboutir à une ingénierie homogène applicable par tous. Elle créera à cet effet une cellule d’experts intersectorielle ayant pour mission d’appuyer les responsables des différentes filières de formation exprimant le besoin d’un appui méthodologique et d’un dispositif de formation à l’ensemble de la démarche d’ingénierie. Cette cellule aura également pour responsabilité d’évaluer les ingénieries réalisés par les diverses filières de formation et de proposer, le cas échéant, des éléments d’ajustement conformément à la méthodologie qui aura été définie et adoptée au plan national.

Neuvième orientation programmatique : la construction progressive d’un cadre et d’un répertoire national de certification à la fois nationaux et sectorielsL’adoption d’une ingénierie homogène ou harmonisée de développement des compétences est la condition préalable de la mise en place progressive d’un cadre national de certification (CNC). Un tel cadre a pour objectif général de donner une visibilité et une reconnaissance sociales à l’ensemble des certifications réalisées dans le système d’éducation et de formation. Mais la politique nationale d’emploi et de formation professionnelle devra fixer un objectif bien plus précis à ce CNC : celui d’établir des correspondances entre les certifications de l’enseignement général et celles de la formation professionnelle et ainsi de créer des passerelles permettant la mobilité entre les deux domaines. Il deviendra ainsi possible de choisir positivement la formation professionnelle vu qu’elle sera positionnée à égalité d’estime avec l’enseignement général. Les secteurs du tourisme et du BTP pourront servir de lieu d’expérimentation dans un premier temps.

Le CNC devra être bâti selon des principes et normes intégrant comme hypothèse de départ la mise en œuvre d’une certification basée sur la validation des compétences acquises et donc des acquis de l’expérience et de la formation, ainsi que sur la reconnaissance des acteurs légitimes que sont les pouvoirs publics et les partenaires sociaux. Une fois ces principes et normes acceptés au plan de l’ensemble du système d’éducation et de formation, il sera possible de positionner des cadres de certification sectoriels comme sous-ensembles du cadre national. Le CNC devra être construit en synergie avec les pays de la sous-région, plus particulièrement en rapport avec l’expérience de Maurice, de manière à pouvoir évoluer à moyen terme vers un cadre sous-régional de certification.

La construction progressive du CNC devra être accompagnée de la constitution d’un répertoire national et sectoriel des certifications professionnelles qui rendra lisibles et accessibles les métiers et professions certifiés ainsi que les référentiels qui permettent de les reconnaître et de les valider aux plans national et sectoriel.

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2.4. Vers une meilleure articulation entre le système d’éducation et le système de formation

Le passage actuel de l’éducation à la formation se fait en théorie relativement tôt (à partir de cinq années de scolarisation primaire). Ce passage précoce n’est pas sans poser de problème vu que les élèves n’ont pas nécessairement, au bout d’un tel parcours scolaire, les connaissances et compétences de base suffisantes pour bien réussir leur parcours professionnel. Il faudra à cet effet identifier de manière participative un socle commun que de connaissance et de compétences de base, dont la nécessaire maîtrise d’une langue commune à tous, que tous devront acquérir. Ce passage est également problématique vu que les conditions dans lesquelles il se passe ne permettent pas un choix positif par les élèves de la filière de formation technique et professionnelle dans laquelle ils vont entrer. Il faudra donc que la réforme induise des changements significatifs de la situation actuelle qui peuvent être résumées comme suit.

Dixième orientation programmatique: renforcer l’acquisition des connaissances et des compétences de base, soit avant, soit au début du cycle de formation technique et professionnelle. Cette acquisition d’un socle de connaissances et de compétences de bon niveau et commun à tous est une exigence d’équité vis-à-vis de tous les jeunes. Elle est également une condition sine qua non pour réussir la formation technique et professionnelle qui, en raison du développement d’une économie de la connaissance, requiert de plus en plus de capacités à comprendre la complexité des situations et à pouvoir les transformer. Cette exigence de renforcement des capacités à comprendre, à agir et à se comporter de manière responsable, tant au niveau professionnel que social, devient d’autant plus forte que la réforme visera à former les jeunes à des métiers porteurs et donc à des niveaux de qualifications de plus en plus élevés. Si les jeunes qui entrent dans l’enseignement technique ont acquis un niveau d’éducation équivalent au premier cycle de l’enseignement secondaire, il n’en est pas de même pour les élèves de formation professionnelles dont le socle de connaissances et de compétences de base est particulièrement fragile.

Onzième orientation programmatique : créer les conditions d’un choix réel par le jeune du métier qu’il souhaite acquérirCe choix est actuellement difficile sinon impossible à réaliser vu qu’il n’existe pas à ce stade de dispositif d’orientation vers les métiers auxquels l’ETFP/DC prépare et donc des informations précises sur les compétences à acquérir et sur leurs capacités, après la formation, à insérer dans le monde du travail. Il est quasiment impossible en raison de l’absence d’un service d’orientation capable de donner une information appropriée sur les tenants et aboutissants de la filière choisie. Il présuppose enfin qu’il existe un système d’information approprié et à jour sur les évolutions des métiers et plus largement sur les demandes de compétences du marché du travail. La réforme devra, à ce propos, faire un investissement prioritaire pour documenter les métiers auxquelles elle formera et conseiller les jeunes et leurs parents en conséquence.

Douzième orientation programmatique : mettre en place un dispositif financier qui soit en cohérence avec la nécessité d’accueillir et de former un maximum de jeunesMadagascar connait, comme la plupart des pays en développement, la contradiction qui existe entre le besoin très affirmé de qualifier un maximum de jeunes en fonction de la demande de compétences du marché du travail et les moyens mis à disposition pour répondre y répondre. L’analyse de la situation institutionnelle et budgétaire a mis en lumière non seulement la faible capacité d’accueil des établissements chargés de l’ETFP, mais encore la diminution en cours des moyens budgétaires affectés au secteur de la formation professionnelle. La future politique nationale devra résoudre

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cette situation paradoxale qui est préjudiciable pour une politique active de préparation à l’emploi et d’insertion dans le monde du travail. Elle devra tout à la fois actualiser les formations existantes en fonction de l’évolution des métiers auxquels elles préparent et introduire dans les délais les plus brefs possibles les formations aux métiers identifiés comme prioritaires lors des assises sectorielles et régionales. Il s’agira toutefois d’investir davantage dans la conception et l’implantation de dispositifs de type alternance ou apprentissage et donc dans la rénovation du système actuel que dans la construction de nouveaux établissements. Il faudra quoiqu’il en soit une inversion significative des moyens budgétaires actuellement mis à disposition.

Treizième orientation programmatique : positiver l’image de la formation professionnelleL’analyse du fonctionnement interne de l’ETFP met en lumière des difficultés auxquelles la réforme devra répondre. La première d’entre elles concerne le mode d’entrée dans les formations professionnelles et techniques. Il est, sauf exception, un choix imposé à des jeunes jugés incapables d’entrer dans l’enseignement secondaire général ou d’y continuer. Le manque d’efficience externe des parcours de formation ne permet pas de les rendre attractifs face à l’image de promotion sociale que véhicule l’enseignement général. La deuxième difficulté est liée au fait que le jeune, une fois rentré dans un dispositif d’ETFP, n’arrive plus à changer de voie. Il n’existe pas, en effet, de possibilités qui lui permettent en cours de route de se réorienter vers des formations plus appropriées à ses choix ou vers des métiers davantage porteurs d’emplois. La dernière difficulté est celle de la voie sans retour. Même s’il existe une infime possibilité après l’obtention d’un baccalauréat professionnel d’entrer dans l’enseignement supérieur, il n’existe pas en réalité de passerelles permettant une mobilité des jeunes entre les différents niveaux et types de formation. Or, sans une mobilité à double sens entre l’enseignement technique et professionnel et l’enseignement général, l’ETFP continuera à rester une sélection par l’échec ou par choix imposé. La future réforme devra trouver des alternatives positives à ces difficultés.

2.5. Vers une prise en compte de l’ensemble des dispositifs et modalités d’acquisition des compétences ou vers un passage effectif vers l’ETFP/DC

L’analyse du marché du travail malgache est sans ambiguïté aucune : un maximum de compétences liées au monde du travail est produit hors système d’éducation et de formation par les acteurs économiques et professionnels qui accueillent les plus de 90% de jeunes qui s’insèrent dans l’emploi sans qualification acquise dans les dispositifs d’éducation et de formation. Ce constat, qui devra être au cœur des réformes à proposer par la future politique d’emploi et de formation professionnelle, devra induire des mutations profondes, sinon un changement de paradigme, dans les orientations stratégiques et opérationnelles actuelles de l’ETFP.

Quatorzième orientation programmatique : passer d’une politique de l’offre à une politique de réponse à la demandeLes offres de formation publiques et privées actuelles ont la particularité d’être centrées sur un nombre limité de métiers et de secteurs et de permettre l’acquisition de compétences techniques et professionnelles à un nombre très limité de jeunes. Elles présentent de plus la particularité d’être mises en œuvre au moyen de curricula non formalisées ou obsolètes et d’équipements qui sont à la fois insuffisants et technologiquement dépassés. Les priorités de la réforme devront, dans un premier temps, porter sur une restructuration très significative des offres actuelles. Il s’agira notamment :

d’inscrire les formations existantes dans une approche de formation par les compétences ce qui supposera une forte mobilisation de ressources humaines et de moyens techniques et

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financiers pour actualiser sinon concevoir les référentiels de compétences et les curricula correspondant aux métiers actuellement préparés dans les établissements publics et privés. Cela pourra également signifier de mettre fin à des formations qui ne sont plus en rapport avec les demandes de compétences du marché du travail ;

d’élargir progressivement l’offre de formations aux métiers identifiés comme prioritaires par les Comités sectoriels et régionales à condition que les responsables de ces Assises aient fait le travail préalable d’ingénierie de formation par les compétences ;

de sortir de la prédominance actuelle de la formation résidentielle et d’introduire, notamment dans les formations aux métiers sectoriels, des dispositifs de formation en alternance et en apprentissage. Ces dispositifs auront pour avantage d’initier un véritable partenariat école/entreprise qui manque cruellement dans l’offre actuelle de formation et d’augmenter les chances d’insertion des jeunes dans l’emploi tout en partageant les coûts de formation avec le monde économique.

Quinzième orientation programmatique : reconnaître et donner valeur aux dispositifs et parcours formels, non formels et informels de formation/professionnalisationSi les informations disponibles empêchent une identification précise des dispositifs et acteurs qui permettent aux très nombreux jeunes, entrés sur le marché du travail sans qualification adéquate, d’acquérir progressivement les compétences dont ils ont besoin pour accomplir correctement leurs tâches, il ne sera pas possible pour la politique nationale d’ignorer toute cette production de compétences hors système formel de l’ETFP et surtout de ne pas y investir de manière stratégique. Les nombreuses analyses faites sur le développement des compétences en secteur informel soulignent l’importance que représente au plan des pays le renforcement des compétences des véritables formateurs des jeunes que sont les artisans, les maîtres d’apprentissage, les entrepreneurs et tous les professionnels qui acceptent de les tutorer en situation de travail. Il est ainsi démontré (BM, 2013) que les formations par apprentissage, même traditionnel, et effectuées selon diverses formes d’alternance préparent au mieux les jeunes à exercer efficacement leurs activités professionnelles dans les micro- et petites entreprises. La raison en est que ces types de formation aident à acquérir la polyvalence des compétences nécessaire pour ce type d’activités. Il faudra donc que le document de politique prévoie des mesures spécifiques d’accroissement des compétences des formateurs et des entrepreneurs du secteur informel (PQIP/DCTP, 2014) ainsi que des modalités de reconnaissance des compétences ainsi acquises tant par les jeunes que par ceux qui les aident à se professionnaliser. Il s’agira, comme l’ont suggéré l’OCDE et la BAD (PEA, 2008) et l’ADEA (Triennale 2012), de changer de paradigme et de passer d’une vision centrée sur l’enseignement à une vision prenant en compte l’ensemble du champ de développement des compétences.

Seizième orientation programmatique : prendre en compte le droit et la nécessité de tous, jeunes et adultes, à une formation tout au long de la vie L’analyse de la situation éducative du pays permet de constater que 53% des jeunes se trouvent hors tout dispositif d’éducation et de formation avant même d’avoir l’âge requis pour entrer dans le monde du travail. Il existe de fortes chances pour que ces jeunes perdent la plupart des acquis scolaires et entrent dans le monde professionnel, soit en étant quasiment illettrés, soit avec un bagage de connaissances minimal. L’analyse met également en lumière que l’ETFP s’adresse quasi exclusivement aux jeunes en formation professionnelle initiale et n’est pas ciblée sur la formation continue de la population active.

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Ces deux constats posent un problème de droit à l’éducation et à la formation qui est affirmé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (article 26) et qui prend actuellement la forme d’un droit de tous, quelque soit l’âge, à un socle commun de compétences. Un tel socle garantit l’acquisition d’outils d’apprentissage et de savoirs de base dont les jeunes comme les adultes ont besoin pour « survivre, vivre et travailler dans la dignité, améliorer la qualité de leur existence, prendre des décisions éclairées et continuer à apprendre… » (Déclaration de Jomtien). Mais ces constats appellent également, dans le cadre de la PND qui souhaite promouvoir une croissance inclusive et durable, à développer des mesures d’éducation et de formation spécifiques pour les jeunes et adultes exerçant une activité économique. Des enquêtes terrain (Walther, Savadogo, 2012) mettent ainsi en évidence que le renforcement des connaissances et compétences de base permettent à des employés, jeunes ou adultes, exerçant des activités de subsistance de mieux lutter contre la précarité de leur emploi. Ces mêmes enquêtes montrent qu’un accroissement des compétences professionnelles des entrepreneurs du secteur informel conforte la pérennité de leur entreprise tout en les amenant progressivement à formaliser leur activité.

Il importe donc que la politique nationale intègre, pour avoir des chances de réaliser les objectifs du PND, une dimension nécessaire de formation continue en faveur des jeunes comme des adultes en activité.

2.6. Vers une approche du rôle de l’ETFP/DC comme moteur du développement socioéconomique

Les rôles de l’éducation et de la formation comme facteurs de changement socioéconomique font débat. Les connaissances et compétences ne provoquent pas en effet le changement en tant que tel, mais dans le même temps aucun changement n’a de chance de réussir sans leur accroissement adéquat. Il existe aujourd’hui un consensus quasi général pour dire que le développement des compétences est un des moteurs, sinon le moteur du développement économique et social (ADEA, 2012). Dans le cas des réformes à promouvoir ce développement sera moteur du changement à condition qu’il s’inscrive dans la dynamique d’ensemble définie aux niveaux national, sectoriel et régional.

Dix-septième orientation programmatique : l’ETFP/DC devra être au cœur du développement macroéconomique Le changement macroéconomique initié par le PND comporte nécessairement tout un ensemble d’investissements matériels et immatériels que le PANEF a justement identifiés et dont la formation professionnelle est évidemment partie prenante. Mais ce serait une erreur de considérer cette formation comme une composante parmi d’autres de l’investissement immatériel. La politique nationale devra, dans ses orientations stratégiques comme dans ses programmes d’action, faire du développement des compétences un élément de structuration et d’optimisation de l’ensemble des autres investissements. Cela signifie très concrètement que les projets de développement sectoriels devront être soutenus par un travail en profondeur, avec l’ensemble des partenaires concernés, sur le type de métiers à développer, sur le type de compétences à promouvoir et sur le type de dispositifs de formation à mettre en œuvre pour que ces projets aient un maximum de chances de réussite notamment en termes d’insertion professionnelle et de création d’emplois. Il faudra également à ce propos évaluer l’opportunité de créer des moyens spécifiques de formation sectorielle impliquant au maximum les acteurs économiques et professionnels concernés.

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Il en ira des projets de développement régionaux et locaux comme des projets sectoriels avec la particularité que la politique nationale devra redéfinir les missions et modes d’intervention des établissements enracinés dans les territoires. Elle devra inviter ces établissements à nouer des partenariats de conception et de mise en œuvre de la formation avec les acteurs en charge de dynamiser localement la création d’activités et d’emploi. Elle devra élargir leur mission exclusive de formation initiale à la formation continue des jeunes et adultes travaillant dans le tissu économique local et en faire des lieux d’accueil possibles des formations spécialisées mises au point par les projets sectoriels.

Dix-huitième et dernière orientation programmatique : l’ETFP/DC devra être moteur dans la conception et mise en œuvre des métiers porteursLes dynamiques de transformation économiques et sociales en cours deviendront réalité à condition que les réformes à entreprendre ciblent résolument des dispositifs de création d’emplois dits porteurs pour la raison qu’ils sont susceptibles de créer à la fois de la richesse et de l’emploi. Le travail entrepris au plan des cinq secteurs prioritaires a déjà permis de diagnostiquer le profil de ces emplois ainsi que les type de métiers à développer pour rendre leur création possible. La spécificité de tels emplois et des métiers qui leur correspondent est qu’ils requièrent, pour leur lancement et leur consolidation, le recrutement quasi immédiat de personnels qualifiés. Il faudra donc que la future politique d’emploi et de formation crée, de façon urgente, au bénéfice de ses acteurs, un dispositif de formation-action de conception et de développement de compétences ciblés sur ces métiers porteurs sans quoi les décideurs économiques et politiques seront obligés, comme cela a été le cas pour le secteur des mines de faire appel à de la main-d'œuvre extérieure.

En guise de conclusionLes dix-huit orientations programmatiques ont été définies à partir du diagnostic de la situation actuelle du pays et des propositions de changement faites dans le cadre de la méthodologie de travail très participative et très active définie par le MEETFP pour élaborer le document cadre de la PNEFP. Ces orientations ne pourront pas toutes être mises en œuvre telle quelles vu qu’il faudra que la politique future se concentre sur quelques actions prioritaires qu’elle aura la capacité de mener jusqu’au bout avec les moyens humains et financiers disponibles. Mais ces orientations serviront à structurer les actions prioritaires de la PNEFP adoptera et pourront servir de critères de suivi et d’évaluation la concrétisation progressive de ces actions.

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3. LES GRANDS AXES DE MISE EN OEUVRE DE LA PNEFPIl s’agira dans cette dernière partie de prendre en compte les orientations programmatiques définies ci-dessus, d’en retenir celles qui sont les plus prioritaires et les plus urgentes et de les traduire en actions concrète s et réalisables durant les années 2015/2019.

Cette partie de la PNEFP est à écrire durant la mission du 30 novembre au 10 décembre. Elle devra le résultat d’un consensus à promouvoir, aux niveaux sectoriels et intersectoriels, entre les responsables et acteurs de l’ETFP/DC.

3.1. Premier axe de mise en œuvre de la PNEFP : la réforme institutionnelle les instances partenariales de pilotage et de coordination

o au niveau sectoriel : responsabilité et degré d’autonomie des instances sectorielleso au niveau régional : responsabilité et degré d’autonomie des instances régionaleso au niveau intersectoriel : instances et modalités du pilotage des synergies

sectorielles/régionales et de la mutualisation des moyens et des outils communs les instances de gouvernance et de gestion

o au niveau central : mutations à instaurer des modes actuels de gouvernance, d’appui et de contrôle

o au niveau décentralisé : détermination des compétences et des responsabilités à déléguer aux instances régionales

o au niveau des établissements : vers une autonomie de gestion/gestion déléguée, nouvelles missions en rapport une gestion plus partenariale et plus ouverte sur la demande diversifiée de compétences des acteurs territoriaux

les task forces spécifiques : o au niveau de l’ingénierie APC o au niveau de la certification : conception et mise en œuvre des CNC et CNS

3.2. Deuxième axe de mise en œuvre : le financement de la réforme la définition des domaines et besoins d’investissement prioritaires

o sectorielso intersectorielso ingénierieo curriculao formation de formateurso …

la définition des moyens de financements : o financements publics

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o financements PTFo financements privéso financements par fonds additionnels ou réduction des coûtso …

la définition des structures de financements :o financement par abondement des budgets publicso financement par appui à des projets sectoriels et intersectoriels bien définiso financement au moyen d’un fonds de formation intersectoriel à créero …

3.3. Troisième axe de mise en œuvre : une ingénierie harmonisée de formation et de certification

la finalisation et l’adoption d’une ingénierie harmonisée des compétences et des curricula de formation

la conception et construction progressive d’un CNC/CNS la mise au point et l’adoption d’un dispositif de validation des acquis de l’expérience et de la

formation la définition d’un processus de reconnaissance et de validation des compétences des acteurs

du secteur informel …

3.4. Quatrième axe de mise en œuvre : la constitution d’un système d’information pertinent sur le marché du travail et la formation professionnelle

la mise au point d’indicateurs susceptibles de renseigner sur les évolutions du marché du travail (emplois disponibles et en devenir) ;

la mise au point d’indicateurs susceptibles de renseigner sur les diverses modalités d’acquisition des compétences

le renforcement des capacités des institutions chargées des SIMT ; la détermination des processus d’enquête permettant de suivre et d’évaluer la mise en

œuvre progressive de la PNEFP …

3.5. Cinquième axe de mise en œuvre : la constitution de dispositifs d’ETFP/DC adaptés aux défis à relever

une redéfinition de l’offre de formation existante selon les modalités suivanteso une implication graduelle du secteur privé dans la mise en œuvre des dispositifs de

formation o une conception/révision des curriculao une reformation des formateurso …

la prise en compte et reconnaissance des dispositifs d’acquisition non formels et informels des compétences

o une identification qualitative et quantitative des dispositifs existants de professionnalisation (apprentissage traditionnel, apprentissage sur le tas…)

o des mesures d’appui au renforcement des compétences des formateurs/entrepreneurs qui professionnalisent les jeunes en situation de travail

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o la mise en œuvre de voies et moyens de reconnaissance/validation des compétences acquises en dehors des dispositifs formels

o liens avec les mesures d’appui au travail indépendant et micro-entrepriseo …

la constitution d’une offre de formation ciblée sur les cinq secteurs prioritaires avec une identification :

o des types et niveaux de métiers à promouvoir par secteur en fonction de la vision stratégique du développement du secteur à l’horizon 2019

o des publics à perfectionner ou qualifier en fonction de ces métiers : employés du secteur, jeunes primo-demandeurs, adultes au chômage, en reconversion…

o des parcours/types de dispositifs à promouvoir, renforcer ou concevoiro des acteurs publics/privés les plus à même de favoriser l’acquisition des

métiers/compétences o …

la constitution d’une offre d’EFTP/DC répondant aux besoins du développement économique et du marché du travail au niveau régional

o une concrétisation des requêtes faites lors des 13 assises régionales à propos des besoins des compétences des populations locales

o la mise en œuvre de mesures spécifiques, notamment dans l’espace agricole et rural, pour lutter contre la pauvreté due essentiellement aux situations de chômage et de précarité de l’emploi

o la création de synergies entre le développement local et le développement sectoriel afin de sortir de la concentration actuelle de certains métiers sectoriels dans des régions particulièrement favorisées au niveau socioéconomique

o …

3.6. Sixième et dernier axe de mise en œuvre : former pour insérer et réinsérer la définition, au niveau des établissements des missions de facilitation de l’insertion des

forméso par la mise en place de cellule d’accompagnement de l’insertiono constitution d’un partenariat entre les centres de formation et les entreprises

la mise en partenariat entre les établissements d’ETFP/DC et les Services publics de l’Emploi en vue de :

o d’identifier les publics « ni en école, ni en formation, ni en emploi »o de monter des dispositifs communs d’insertion et de réinsertion dans des parcours

de qualification à des emplois disponibles ou à la création d’activités professionnelles

En guise de conclusionTous ces axes de mise en œuvre devront être définis de manière à être réalisables et finançables durant la période du PNEFP. Ils devront être traduits dans un plan d’action soutenable dont la structure figure en annexe.

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EN ANNEXE : LA PROPOSITION D’UN PLAN D’ACTION 2015/19 REALISTE ET SOUTENABLE

Les orientations de la politique nationale sont à la fois des orientations à court, moyen et long terme. Tout ne pourra pas être réalisé sur la période 2015/2019. Il s’agira, durant cette période, de jeter les bases d’un EFTP/DC qui soit le moteur d’un développement socioéconomique durable et soutenable pour Madagascar.

Cela suppose la conception et mise en œuvre, dans le cadre de l’adoption de la politique nationale de l’emploi et de l’EFTP/DC, d’un plan d’action réaliste et soutenable, c’est-à-dire ayant les ressources financières et humaines suffisantes pour atteindre les résultats visés. Ce plan d’action devra être défini par les acteurs concernés tant au niveau de la concrétisation des orientations nationales que de celle des orientations sectorielles. Il devra être structuré de la manière suivante

Adoption du plan national global (2015)

Inscription dans des textes réglementaires appropriés des présupposés de mise en œuvre du plan national (2015/2016)

Adoption d’une approche globale du champ de la formation professionnelle ou approche EFTP/DC (formation formelle, non formelle et informelle)

Adoption d’une méthodologie homogène d’ingénierie des compétences, de formation et de certification

Adoption d’une gouvernance partenariale de l’EFTP/DC à tous niveaux Adoption d’un ensemble de mécanismes de financement et de cofinancement au plan

national et au plan sectoriel

Définition par le MEEFPT d’un plan d’action prioritaire annualisé de 2015 à 2019 indiquant : le séquencement des référentiels et curricula à mettre en chantier jusqu’en 2019 (en lien

avec le travail sectoriel) le séquencement des actions à prévoir pour mettre progressivement en œuvre des dispositifs

de formation en alternance/apprentissage le séquencement de la formation des formateurs et des professionnels au fur et à la mesure

de la mise en œuvre des évolutions des référentiels, curricula et dispositifs les mesures à inscrire dans les politiques nationales pour accroître la qualité et l’efficacité des

dispositifs non formels et informels de formation les outils et dispositifs de suivi et d’évaluation des résultats visés …

Toutes ces mesures devront être budgétés (coûts et financements) et inscrites dans un chronogramme précis

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Définition par les secteurs prioritaires d’un plan d’action prioritaire annualisé de 2015 à 2019 indiquant :

le séquencement des référentiels « métier, compétences et certification » et des curricula à rénover/actualiser jusqu’en 2019

le séquencement des référentiels « métier, compétences et certification » et des curricula à concevoir et/ou rénover

le séquencement des actions à prévoir pour impliquer au maximum les professionnels dans la mise en œuvre de la formation et de la certification

le séquencement de la formation des formateurs et des professionnels au fur et à mesure de la mise en œuvre des nouveaux référentiels et curricula

les outils et dispositifs de suivi et d’évaluation des résultats visés

Toutes ces mesures devront être budgétés (coûts et financements) et inscrites dans un chronogramme précis)

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Bibliographie ( à compléter)

http://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/06/05/madagascar-measuring-the-impact-of-the-political-crisis

http://www.statistiques-mondiales.com/madagascar.htm

INSTAT, UNDP, OIT (2012), Le marché du travail à Madagascar en 2012.

Banque mondiale (2012), Rapport combine de revue du portefeuille et d’extension du document de stratégie pays (2012-2013).

AFD/METFP (2011), Projet FORMAPRO-BTP, Rapport final.

OCDE/BAD (2008), Perspectives économiques en Afrique : Développer les compétences techniques et professionnelles. Paris.

UNESCO , Bureau de Dakar (2012).Fiche EPT Madagascar.

Walther, R. (2013), Etude sur le développement des compétences dans l’économie informelle. Commission européenne. Bruxelles.

Word Bank, (2009), Africa, Development indicators 2008/09, Youth and Employment in Africa: the Potential, the Problem, the Promise. Washington.

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