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N° 1180 du 13 au 19 juin 2013 courrierinternational.com Belgique : 3,90 € (!4BD64F-eabacj!:m;o FRANCE— CLÉMENT MÉRIC : UNE AFFAIRE POLITIQUE, VRAIMENT ? ÉTATS-UNIS— LES DÉRIVES DE BIG BROTHER Russie Les extraterrestres de la taïga Techno Ces objets qui prennent vie Election fermée Société bloquée Menace de guerre L’IRAN Pas de printemps pour noir Belgique 3,90€ - Luxembourg 3,90€

Courrier 20130613 courrier full 20130716 133158

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Courrier International du 13 juin 2013 : Pas de printemps pour l'Iran

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  • N 1180 du 13 au 19 juin 2013courrierinternational.comBelgique : 3,90

    FRANCECLMENT MRIC :

    UNE AFFAIRE POLITIQUE,

    VRAIMENT ?TATS-UNIS

    LES DRIVESDE BIG BROTHER

    RussieLesextraterrestres

    de la taga

    Techno Ces objets qui

    prennent vie

    Election fermeSocit

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    de guerre

    LIRANPas de printemps

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  • 7 jours dans le monde7. Portrait. Ada Colau, une des

    Mditerranennes dont Serge Moatibrosse le portrait dans un documentaire du mme nom sur France 2

    8. Controverse. Imposer des droits de douane au solaire chinois, est-ce lgitime ?

    Dun continent lautreAFRIQUE

    12. Tunisie. Union libre ou mariagecoutumier?

    13. Mali. Kidal, ville lugubre et sous pression

    14. Afrique du Sud. Jacob Zuma et ses bons amis indiens

    ASIE15. Cambodge. Apprendre le chinois : un

    must16. Inde. Mehmeet, la voix tranquille

    du Cachemire

    AMRIQUES 17. Etats-Unis. La NSA joue Big Brother 18. quateur. Entre les Andes et locan,

    un train dunion

    EUROPE20. Portugal. Touche pas ma poste!21. Allemagne. Les jardins ouvriers

    entre immigration et gentrication22. Italie. Dans le Guantnamo de Rome

    FRANCE23. Socit. Les extrmes aux anges24. Culture. Il joue de la tour Eiffel

    BELGIQUE26. Ces Nerlandais qui viennent

    cultiver du cannabis

    Transversales38. Sciences et innovations. Quand tous

    nos objets seront programmables 41. Economie. Ici, on accepte

    les sampaios44. Mdias. La presse gyptienne rappele

    lordre 45. Signaux. Cartographie de la passion

    amoureuse

    36050. Plein cran. 100% Kentucky52. Voyage. Kosice ou lveil de la belle

    endormie 54. Tendances. Utopies pour riches

    Cairotes 56. Histoire. La belle lgende dAmnesty

    Candidats soigneusement slectionns, Internet verrouill:la prsidentielle confirme les blocages dun pays cono-miquement asphyxi et dont le programme nuclairenourrit les spculations sur limminence dune guerre.

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    DITORIALRIC CHOL

    La femme qui voit rouge

    Les reculades rptes de laMaison-Blanche ont ni parsemer le doute sur la doctrinede Barack Obama en matire depolitique trangre. Il y a bien cettefameuse ligne rouge, voque ltdernier, ne pas franchir sous peinede dclencher le feu amricain. Mais depuis que lon sait aveccertitude que des gaz chimiques ont t utiliss dans le conit syrien,que sest-il pass? Rien. La diplomatie amricaine estenglue dans limmobilisme. Obamafait du Obama. Pas question de fairerepartir les boys rentrs dIrak ou dAfghanistan dans un nouveaupige guerrier. Les folles quipes de lre Bush appartiennent aupass. Dailleurs, selon une blague en vogue ces jours-ci Washington,il ny aurait plus une ligne rouge,mais cinquante nuances de rouge.Pardon, on avait mal compris. Leproblme, cest que les bonsamisdes Etats-Unis, Damas, Thranou Pyongyang, ont reu le message5 sur5: la dtermination duprsident amricain est gomtrievariable. Il y a fort parier que lesconservateurs iraniens, rconfortspar le scrutin prsidentiel du 14juin,soient tents de tester ce camaeu de rouge esquiss par la Maison-Blanche. Ils auraient tort.Car, comme lcrit la revue ForeignAairs*, la nomination de SamanthaPower comme ambassadrice auprs des Nations unies pourraitnalement changer la diplomatieamricaine. Face aux atrocitscommises dans le monde, cetteancienne journaliste de guerre refusela passivit des politiques. Dans lagrande maison de verre des Nationsunies, elle sera pour Barack Obamala femme qui voit rouge.

    * How Samantha Power could change U.S.diplomacy, Suzanne Nossel, Foreign Aairs(5/6/13)

    En couverture : Dessin de Mana Neyestani (Iran)extrait de son recueil Tout va bien !,paru aux Editions et l (Paris, 2013).Dessin de Joe Magee, Royaume-Uni.

    Retrouvez Eric Chol chaque matin 6 h 55,

    dans la chronique O va le monde

    sur 101.1 FM

    Sommairerubriques

    Dsormais exil Hong Kong, cet ancien employ de la CIA a dcid de dnoncer les abus de la trspuissante Agence de scurit nationale amricaine.(Lire aussi La NSA joue Big Brother, p. 17.)

    p.10

    Turquie Le mur de la peursest fissurPour luniversitaire et ditorialiste Ahmet Insel, les vnements montrent quune nouvelle gnration a pris got au soue de la libert.

    la une

    PAS DE PRINTEMPS POUR LIRAN

    7 jours dansle monde

    p.30

    Les extraterrestres de la taga

    Exiles depuis des dcennies ltranger, o elles ont vcu repliessur leurs traditions, des famillesorthodoxes reviennent aujourdhuidans lExtrme-Orient russe. Mais le pays dont elles rvaient a beaucoup chang.

    Edward Snowden :tratre ou hros ?

    p.46360

    ANDR

    E M

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    Un membre du clerg chiite

    iranien face au portrait de

    Khomeyni.

    2.

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    A retourner ds aujourdhui sous enveloppe Courrier international Service Abonnements Rue des Francs 79 1040 Bruxelles ou par fax au 02/211.31.65. Je ne paie rien maintenant et jattends votre bulletin de virement. O re valable en Belgique jusquau 30/06/13 pour un nouvel abonn.*Prix de vente au numro.

  • ABC, Madrid, quotidien. HaAretz,Tel-Aviv, quotidien. Brasileiros, So Paulo, mensuel. The Diplomat, (thediplomat.com) Tokyo, en ligne. Expresso, Lisbonne,hebdomadaire. Financial Times, Londres, quotidien. Il Foglio, Milan, quotidien. Foreign Policy, Washington, bimestriel. Frankfurter Allgemeine Zeitung, Francfort,quotidien. The Guardian, Londres, quotidien. Huanqiu Shibao (Global Times), Pkin, quotidien. Hrriyet, Istanbul, quotidien. Kayhan, Thran, quotidien.Mag14.com, Tunis, en ligne. Mint, New Delhi, quotidien. The New York Times, Etats-Unis, quotidien. Oxford American, Conway (Arkansas), trimestriel. Qandisha,(www.qandisha.ma) Casablanca, en ligne. La Repubblica, Rome, quotidien. Rooz, (roozonline.com) Amsterdam, en ligne. Rousski Reporter Moscou, hebdomadaire.As-Sar, Beyrouth, quotidien. Sddeutsche Zeitung, Munich, quotidien. Die Tageszeitung, Berlin, quotidien. Tehelka, New Delhi, hebdo. El Telgrafo, Guayaquil,

    quotidien. Le Temps, Genve, quotidien. T24, Istanbul, en ligne. USA Today, McLean (Virginie), quotidien. Vatan Istanbul, quotidien. Viso,Lisbonne, hebdomadaire. The Wall Street Journal, New York, quotidien. The Washington Institute, Etats-Unis, en ligne. El-Watan, Alger,quotidien. Wired, San Francisco, mensuel. Your Middle East, (yourmiddleeast.com) Stockholm, en ligne. Die Zeit, Hambourg, hebdomadaire.

    SommaireLES JOURNALISTES de Courrier international slectionnent et traduisent plus de 1 500 sources du mondeentier : journaux, sites, blogs. Ils alimentent lhebdomadaire et son site courrierinternational.com. Lestitres et les surtitres accompagnant les articles sont de la rdaction. Voici la liste exhaustive des sourcesque nous avons utilises cette semaine :

    VIDOLIran travers les dessinateurs:linterview de lIranienMana Neyestani et duFranais Nicolas Wild.MAROC Mais o estpass Mohammed VI ?AFRIQUE DU SUDLa vie sans Mandela?

    Retrouvez-nous aussisur Facebook, Twitter,Google +et Pinterest.

    MAN

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    Toutes nos sources Chaque fois que vous rencontrez cette vignette, scannez-la et accdez un contenu multimdia sur notre sitecourrierinternational.com (ici, la rubrique Nos sources).

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    orientation. Vous dites que l o la croix blesse,cest quand les religionsdescendent du spirituel au temporel. Au nom de quoi dniez-vous le droit des sensibilits dexprimerleurs opinions? En quoi est-il anormal que desassociations, fussent-ellesdinspiration catholique,expriment leur point de vue et le fassent savoir?

    Xavier Damez

    Continuez progresser en prenant en compte les remarques de vos dleslecteurs.

    Jean-Marie Pillot Balma

    Cousin du CanadaChaque semaine, jattendsavec anxit larrive de Courrier International au Qubec. Grand format,tour du monde de lactualit,mise en page professionnelleet colore, conceptiongraphique hors du commun,sujets diversis. Un dlice pour lintellect.

    Robert Riel Montral

    Au nom de quoi?Courrier International est un lieu de confrontation des ides et de dbats par la varit des sources des articles publis. Votreditorial En France aussi (CI n1169, Les dieux sont de retour) me semble aller lencontre de cette

    courrierlecteurs

    Les lecteurs peuvent nous crire par courriel [email protected] par courrier postal :Courrier international,Rdaction en chef, 6-8, rue Jean-Antoine-de-Baf,75212, Paris Cedex 13. Merci de prciser votre nom(pas de pseudonyme) et la localit do vous crivez.

    Enfin!Abonn depuis plus de dix ans Courrier international,je voulais vous soutenir dansla petite amlioration quevous venez dapporter (enn):prciser la date de publicationde larticle original. En revanche, je constate une rduction signicative des articles de la rubriqueconomie, que japprciaisbeaucoup. Merci de rintgrertoutes les semaines 3 ou 4 pages de grands articlesconomiques de fond.

    Courrier international innove.Dornavant, vous retrouverez sous chaque article traduit la date de parution de larticle original. Vous aurez ainsi votre dispositiontous les lments qui dnissentlidentit de larticle: le titre dujournal ou du site web, le nom deson auteur et sa date de parution.Sur Courrierinternational.com, vouspouvez aussi retrouver une grandepartie des textes originaux. E. C.

    PRCISIONDans notre n1176, nous avons publiun article de The Economist sur la nouvelle cole fonde par XavierNiel (Ecole prive pour futurs cracksde linformatique). Xavier Niel est, par ailleurs, actionnaire du Groupe Le Monde, propritaire de Courrier international.

    NOTRESURSITE

    Edit par Courrier international SA, socit anonymeavec directoire et conseil de surveillance au capital de 106 400 . Actionnaire La Socit Editrice du Monde. Directoire Antoine Laporte, prsident et directeur de la publication ; Eric Chol. Conseil de surveillance Louis Dreyfus, prsident.Dpt lgal octobre 2012. Commission paritaire n 0712c82101. ISSN n1154-516XImprim en France/Printed in France

    Rdaction 6-8, rue Jean-Antoine-de-Baf, 75212 Paris Cedex 13Accueil 33 (0)1 46 46 16 00 Fax gnral 33 (0)1 46 46 16 01 Faxrdaction 33 (0)1 46 46 16 02 Site web www.courrierinternational.com courriel [email protected] Directeur dela rdactionEric Chol Rdacteurs en chef Jean-Hbert Armengaud(16 57), Claire Carrard (dition, 16 58), Odile Conseil (web, 16 27)Rdacteurs en chef adjoints Catherine Andr (16 78), Raymond Cla-rinard (16 77), Isabelle Lauze (16 54). Assistante Dalila Bounekta(16 16) Rdactrice en chef technique Nathalie Pingaud (16 25)Direction artistique Sophie-Anne Delhomme (16 31) Direc-teur de la communication et du dveloppement AlexandreScher (16 15) Conception graphique Javier Errea Comunicacin

    Europe Catherine Andr (coordination gnrale, 16 78), DanileRenon (chef de service adjointe Europe, Allemagne, Autriche,Suisse almanique, 16 22), Gerry Feehily (Irlande, 19 70), Lucie Geroy(Italie, 16 86), Daniel Matias (Portugal, 16 34), Iwona Ostapkowicz(Pologne, 16 74), Marie Bloeil (chef de rubrique France, 17 32),Iulia Badea-Gurite (Roumanie, Moldavie, 19 76), Wineke de Boer(Pays-Bas), Solveig Gram Jensen (Danemark, Norvge), AlexiaKefalas (Grce, Chypre), Mehmet Koksal (Belgique), KristinaRnnqvist (Sude), Alexandre Lvy (Bulgarie, coordination Balkans),Agns Jarfas (Hongrie), Mandi Gueguen (Albanie, Kosovo), MiroMiceski (Macdoine), Martina Bulakova (Rpublique tchque, Slo-vaquie), Kika Curovic (Serbie, Montngro, Croatie, Bosnie-Herz-govine), Marielle Vitureau (Lituanie), Katerina Kesa (Estonie), Rus-sie, est de lEurope Laurence Habay (chef de service, 16 36), AldaEngoian (Caucase, Asie centrale), Larissa Kotelevets (Ukraine)Amriques Brangre Cagnat (chef de service, Amrique du Nord,16 14), Eric Pape (Etats-Unis, 16 95), Anne Proenza (chef de rubrique,Amrique latine, 16 76), Paul Jurgens (Brsil) Asie Agns Gaudu(chef de service, Chine, Singapour, Tawan, 16 39), Christine Chau-meau (Ase du Sud-Est, 16 24), Ingrid Therwath (Asie du Sud, 16 51),Ysana Takino (Japon, 16 38), Zhang Zhulin (Chine, 17 47), Elisa-beth D. Inandiak (Indonsie), Jeong Eun-jin (Cores), Kazuhiko Ya-tabe (Japon) Moyen-Orient Marc Saghi (chef de service, 16 69),Hamdam Mostafavi (Iran, 17 33), Hoda Saliby (16 35), Pascal Fe-naux (Isral), Philippe Mischkowsky (pays du Golfe), Pierre Vanrie (Tur-quie) Afrique Ousmane Ndiaye (chef de rubrique, 16 29), Hoda Sa-liby (Maghreb, 16 35), Chawki Amari (Algrie), Sophie Bouillon(Afrique du Sud) Economie Pascale Boyen (chef de service, 16 47)Sciences Anh Ho Truong (chef de rubrique, 16 40) Magazine Isa-belle Lauze (16 54) Insolites Claire Maupas (chef de rubrique,16 60) Ils et elles ont dit Iwona Ostapkowicz (chef de rubri-que, 16 74)

    Site Internet Hamdam Mostafavi (chef des informations, 17 33),Catherine Guichard (rdactrice, 16 04), Pierrick Van-Th (web-mestre, 16 82), Mathilde Melot, Albane Salzberg (marketing)Agence Courrier Sabine Grandadam (chef de service, 16 97)Traduction Raymond Clarinard (rdacteur en chef adjoint, 1677),Natalie Amargier (russe), Catherine Baron (anglais, espagnol),Isabelle Boudon (anglais, allemand), Franoise Escande-Boggino(japonais, anglais), Caroline Lee (anglais, allemand, coren), Fran-oise Lemoine-Minaudier (chinois), Julie Marcot (anglais, espagnol,portugais), Daniel Matias (portugais), Marie-Franoise Monthiers( japonais), Mikage Nagahama ( japonais), Ngoc-Dung Phan(anglais, italien, vietnamien), Olivier Ragasol (anglais, espagnol),Danile Renon (allemand), Mlanie Sinou (anglais, espagnol),Leslie Talaga Rvision Jean-Luc Majouret (chef de service, 16 42),Marianne Bonneau, Philippe Czerepak, Fabienne Grard, FranoisePicon, Philippe Planche, Emmanuel Tronquart (site Internet)Photo graphies, illustrations Pascal Philippe (chef de service, 1641), Lidwine Kervella (16 10), Stphanie Saindon (16 53) MaquetteBernadette Dremire (chef de service), Catherine Doutey, NathalieLe Drau, Gilles de Obaldia, Josiane Petricca, Denis Scudeller,Jonnathan Renaud-Badet, Alexandre Errichiello, Cline Merrien(colorisation) Cartographie Thierry Gauth (16 70) InfographieCatherine Doutey (16 66) Calligraphie Hlne Ho (Chine), AbdollahKiaie (Inde), Kyoko Mori (Japon) Informatique Denis Scudeller (1684) Directeur de la production Olivier Moll Fabrication NathalieCommuneau (direc trice adjointe), Sarah Trhin (responsable defabrication). Impression, brochage Maury, 45330 Malesherbes.

    Ont particip ce numro Jean-Baptiste Bor, Sophie Bouillon,Isabelle Bryskier, Sophie Courtois, Marie-Anne Day, Genevive Des-champs, Monique Devauton, Anastazia Dupuy, Chlo Emmanoui-lidis, Laurhena Faye, Gabriel Hassan, Mira Kamdar, Hanna Klimpe,Feriel Kolli, Jean-Baptiste Luciani, Laetitia Moreni, Valentine Mo-rizot, Chlo Paye, Alice Quistrebert, Camille Savage, PierangliqueSchouler, Isabelle Taudire, Marine Zambrano

    Secrtaire gnral Paul Chaine (17 46). Assistantes : NatachaScheubel (16 52), Sophie Nzet (partenariats, 16 99), Sophie Jan.Gestion : Julie Delpech (responsable, 16 13). Comptabilit : 0148 88 45 02. Responsable des droits Dalila Bounekta (16 16).Ventes au numro Responsable publications : Brigitte Billiard.Direction des ventes au numro : Herv Bonnaud. Chef de produit :Jrme Pons (0 805 05 01 47, fax : 01 57 28 21 40). Diffusioninter nationale : Franck-Olivier Torro (01 57 28 32 22). PromotionChristiane Montillet Marketing Sophie Gerbaud (directrice, 16 18), VroniqueLallemand (16 91), Lucie Torres (17 39), Romassa Cherbal (16 89).

    GEIE COURRIER INTERNATIONAL EBLCOURRIER INTERNATIONAL pour la Belgique et le Grand Duch de Luxembourg est commercialis par le GEIE COURRIER INTERNATIONAL EBLqui est une association entre la socit anonyme de droitfranais COURRIER INTERNATIONALet la socit anonyme de droit belge IPM qui est lditeur de La Libre Belgique et de La Dernire Heure Les Sports. Co-grant Antoine LaporteCo-grant et diteur responsable Franois le HodeyDirecteur gnral IPM Denis PierrardDirection logistique IPM Christian De CosterCoordination rdactionnelle Gilles Milecan et Pierre Gilissen

    + 32 2 744 44 33Ouvert les jours ouvrables de 8h 14h.Rue des Francs, 79 1040 BruxellesPublicit RGP Luc Dumoulin [email protected] + 32 2 211 29 54Services [email protected] + 32 2 744 44 33 / Fax + 32 2 744 45 55Libraires + 32 2 744 44 77Impression Sodimco SADirecteur Eric Bouko + 32 2 793 36 70

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    1 dcembre 2013.

    4.

  • Douteuxprivilge

    SANT Manger de la viande estun privilge dont il vaut mieux sepasser. Aux Etats-Unis, on enconsomme en moyenne deux foisplus quen Chine et six fois plusquen Afrique. Mais les Amri-cains sen portent-ils mieux? Non,si lon en croit une rcente tuderelaye par le magazine Time.Les vgtariens et vgtaliensauraient 12% de risques de dcsen moins, daprs lAmericanMedical Associations Journal ofInternal Medicine. Dautres tudesavaient dj montr que la viandeest lie des problmes de santcrise cardiaque, cancer qui cau-seraient la mort de 1,3milliondAmricains chaque anne.

    La violence,quelle violence ? VENEZUELAFin mai, les grandeschanes prives de tlvision vn-zuliennes ont accept de se plier une campagne gouvernemen-tale ociellement destine com-battre linscurit, rapporte lequotidien El Universal. La tl-vision est en fait accuse de glo-rier la violence en la montranttrop souvent. Cette mise au pasfait suite au changement depropritaire de Globovisin, ladernire chane de tlvisionouvertement dopposition. Depuis,plusieurs journalistes et anima-teurs de la chane ont dmis-sionn ou ont t remercis,mme sil reste des antichavistesconvaincus comme le prsentateurvedette Leopoldo Castillo.ElUniversalparle de nouvelle tapede la tlvision vnzulienne.

    7 JOURS.Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    USA Today McLean (Virginie)

    V oici une dnition du hros: quel-quun qui, lorsquil a le choix entreune bonne action qui va lui cotertrs cher et une mauvaise action dont il vatirer de grands avantages personnels,choisit la premire solution.

    On pense Wesley Autrey, ce type for-midable qui, en 2007, a saut devant unerame du mtro de New York pour sauverun inconnu. On songe aussi Nelson Man-dela, lancien prsident sud-africain, aujour-dhui malade, qui a pass vingt-sept ans enprison plutt que de renoncer lengage-ment quil avait pris de librer son peuple.

    Mais quen est-il dEdward Snowden, cethomme de 29 ans, ancien employ des ser-vices de renseignements [il a travaill pourla CIA avant dtre employ par direntssous-traitants de la NSA, comme BoozAllen Hamilton], qui a avou le 9juin tre lorigine des rvlations sur le programmede surveillance des communications tl-phoniques dcid par le gouvernementamricain? Doit-on le considrer commeun hros du fait quil protge la vie privedes citoyens ses risques et prils ou commeun criminel quil faut poursuivre pour avoirrvl des secrets aux terroristes?

    Maintenant quon a mis un visage surcette aaire, son dnouement pourraitdpendre en grande partie de la rponsequon apportera cette question. SoitSnowden se retrouvera derrire les bar-reaux et les autorits continueront espion-ner sans contrainte, soit il sera adul etles pouvoirs publics reculeront.

    A laune de la puret des intentions etsi ses dires sont conrms , Snowdenpourrait fort bien avoir ltoe dun hros.

    Il semble navoir rien gagner person-nellement dans cette aaire. Et beaucoup perdre : il a sacri une belle carrire et200000dollars de revenus annuels, safamille et sa petite amie, pour vivre encavale, si ce nest en captivit.

    Il arme de faon convaincante quilna agi quaprs avoir conclu quil fallaitfaire vite pour stopper un programme signi-ant la n de la vie prive telle quon laconoit gnralement et menaant la dmo-cratie dans son existence mme. Ces pr-occupations sont trs largement partages.

    Et, contrairement ceux qui ont rvlde manire discutable des secrets dEtat Julian Assange, de WikiLeaks, ou le soldatBradley Manning, actuellement en procset qui encourt une peine de prison vie ,Snowden a t slectif dans ses rvla-tions, laissant de ct des informationsdont il pensait quelles pourraient mettreen danger certaines personnes.

    De plus, chaque nouvelle fuite, il estdevenu plus vident que Snowden avaitagi bon escient. Il a suscit un dbatpublic sur des programmes extrmementindiscrets qui aurait d avoir lieu avantleur lancement. Une base de donnessecrte pistant de faon permanente lesfaits et gestes de chaque Amricain repr-sente de fait une menace pour la dmo-cratie si elle est alimente indniment.

    Il nen reste pas moins que la voieemprunte par Snowden vers lhrosmeest seme dembches.

    Les intentions pures de Snowden et lesconsquences heureuses [de ses rvla-tions] nenlvent rien au fait quil a trans-gress la loi et rvl des informations la fois classes secrtes et dune grandeutilit pour reprer les terroristes. Lesautorits ne peuvent pas laisser passerun tel dlit sans crer un prcdent

    qui mettrait des secrets trs sensibles la porte du premier venu.

    Snowden se dit prt une telle ven-tualit. Mais, comme Mandela la appris ses dpens, le prix payer pour dfendredes principes peut tre trs lev. Parfois,il ny a aucune autre rtribution que la satis-faction davoir fait ce quil fallait faire.

    Snowden assure que cela seul lui sutet, si tel est eectivement le cas, il sav-rera peut-tre que ses actes ont throques. Mais dici l il devra aronterde nombreuses preuves, et trs certai-nement un procs.

    Publi le 9juin

    TATS-UNIS

    Edward Snowden : tratre ou hros?Ag de 29 ans et dsormais rfugi Hong Kong, cet ancien employ de la CIA a dcid de dnoncer les abus de la trs puissante NSA, lAgence de scurit nationale amricaine.

    7 jours dansle monde.

    USA TODAYMcLean, VirginieQuotidien, 1800000 ex.www.usatoday.comLanc en 1982, cest le seulquotidien national du pays avecThe Wall Street Journal. Titrepopulaire, il nen ore pas moinsdes articles de qualit, parfois en avance sur les grands journaux.

    SOURCE

    79%79%des Suisses ont approuv un durcissement du droit dasilepar rfrendum le dimanche9juin. Les Suisses ont enrevanche rejet 76% llectiondirecte des membres du Conseilfdral (le gouvernement)

    par le peuple. Cette initiativevisant court-circuiter le Parlement avait t proposepar le parti populiste UDC et dnonce par lensemble des autres partis. Le Tempsapplaudit, soulignant la

    conance des Suisses dans leursinstitutions. Au-del de lasile ou de lEurope, lUDC estincapable dexercer la moindreinuence sur les questions dedmocratie et de gouvernance,note le quotidien.

    Dessin de Martirena,

    Cuba.

    Consommation annuelle de viande (2009, en kilogrammes par personne)

    SOURCE : THE ECONOMIST, FAO

    0 40 80 120

    TATS-UNIS

    UNIONEUROPENNE

    AMRIQUEDU SUD

    CHINE

    ASIEDU SUD-EST

    AFRIQUE

    INDE

    5

  • 7 JOURS

    Cours, Maizire,cours !ALLEMAGNE Un drone pour-suit un innocent, titre ironique-ment le quotidien Die Tageszeitungdu 6juin en reprenant une imageclbre de La Mort aux trousses,dAlfred Hitchcock. La tte de CaryGrant y est remplace par celle duministre de la Dfense allemand,Thomas de Maizire. Celui-ci a dexpliquer pourquoi il a soutenupendant des annes un projetdachat de drones de surveillanceinutilisables une situation connuedepuis longtemps. Le projet, aban-donn la mi-mai, aura tout de

    mme cot 500millions deurosau pays. Mais le ministre se dclaresans tache on ne la pas tenuau courant, dit-il. La faute, donc, autroisime invisible cest le titredu lm dHitchcock en allemand ,persie la TAZ .

    Adopter auMaroc, un cheminde croixESPAGNEAu Maroc, des dizainesde familles espagnoles ont vu leurkafala le processus dadoptionmusulman, qui impose notammentque la religion islamique soit pr-serve pour lenfant sinter-rompre brusquement larriveau pouvoir des islamistes du Partide la justice et du dveloppement,en janvier2012, rapporte El Pas.Elles avaient pourtant nou desliens forts avec les enfants, depuisparfois plus dun an. MustafaRamid, le ministre de la Justicemarocain, estime quil ny a aucunmoyen de sassurer que les termesde la kafala seront respects silenfant quitte le pays.Les famillesont envoy une lettre auxministres de la Justice du Marocet de lEspagne, qui se sont ren-contrs lundi 10juin.

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    JUAN PEDRO QUIONERO,correspondant Paris duquotidien conservateur espagnolABC, sur la rforme des retraites.

    La Franceest victimede sabureaucratieLa publication vendredi 14 juindu rapport Moreau va lancerla rforme des retraites. Cestun sujet prilleux pour le gou-vernement ?Cest un sujet la fois essentiel et

    trs dangereux. Si le gouver-nement ne bouge pas ce

    nest pas bon, et sil bougecest extrmement p -rilleux. Cela fait trenteans que la rforme des

    retraites est urgente et quele pouvoir se contente de com-

    promis toujours boiteux, qui ne fontquaggraver la situation.

    Comment expliquer cettedicult rformer ?Comme le disait le sociologueMichel Crozier, la socit fran-aise est victime de son Etatbureaucratique. Dans quel paystrouve-t-on autant de statutsdiffrents et des fonctionnairesaussi protgs? Toute rformesera ncessairement adopte,avec lassentiment de la bureau-cratie franaise.

    LEspagne va lancer unenouvelle rforme des retraites.Les enjeux sont-ils les mmesquen France ?Pas vraiment. LEspagne disposedun systme bien plus galitaire etbeaucoup moins bureaucratique.La France est victime dun Etat car-nivore alors que lEspagne souredun Etat impuissant, prisonniernotamment de ses relations avecles rgions. Pour un Espagnol moyen,la situation des retraites en Franceest littralement incomprhensible, cause de la multitude de statutsqui y coexistent.

    DE NOUS

    DR

    ILS PARLENT

    Avis de naufrageDE LA SEMAINELA PHOTO

    De lAllemagne la Hongrie, lEurope de lEst a pass plusieurs jours sous les eaux la suite de crues spectaculaires. A Varsovie (ci-dessus), la maire, Hanna Gronkiewicz-Waltz, navait vraiment pas besoin des pluies torrentielles qui ont inond la ville le 9juin, alors que ses dtracteurs demandent sa dmission. Une ptition pour la tenue dun rfrendum pour rvoquer HGW a dj recueilli plus de 100000signatures sur les 134000exiges, relate le quotidien Gazeta Wyborcza. On lui reproche davoir gon le nombre demploys de la mairie, tout en rognant sur les transports en commun et lducation. Ce quoi sest ajout labattage des arbres dans un jardin public.

    SYRIE

    Le jeu risqu du Hezbollah

    SUR LE WEB

    En complment, La semaine politiquefranaise vue dailleurs. Chaque semaine, retrouvez lactualit commente par les correspondants trangers, en vido.

    courrierinternational.com

    ADAM

    STE

    PIEN

    /AGE

    NCJ

    A GA

    ZETA

    /VU

    risque de se trouver embourb dansune campagne longue et coteuse,dsastreuse pour son image: Lesoi-disant dfenseur des opprims est lavant-garde de la rpression exer-ce par Assad contre son propre peuple.Il se met aussi dos ceux desLibanais qui ne veulent pas dunsoutien au rgime syrien, avec lerisque dun embrasement. Unecrainte encore amplie le 9juin:un homme a t tu Beyrouth lorsdune manifestation contre lenga-gement du Hezbollah en Syrie.

    Engags aux cts de BacharEl-Assad, les combattantsdu Hezbollah ont jou ungrand rle dans la prise de Qousseirle 5juin. Cette ville stratgiqueproche du Liban tait aux mainsdes rebelles depuis dix-huit mois.Les hommes du mouvement chiitelibanais se rassemblent prsentautour dAlep, o Assad compte lancersa prochaine grande oensive. Laguerre en Syrie est une entreprise haut risque pour le Hezbollah, observele site libanaisNow. Le mouvement

    Dans la tte dAssad, HassanNasrallah, le chef du Hezbollah.Dessin de Stavro paru dans The Daily Star, Beyrouth.

    6.

  • 7 JOURS.Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    ILS/ELLESONT DIT

    DR

    Ada ColauElle fait du logis son combat

    Cette Barcelonaise de 38 ans apparat comme la chef de le des opposants aux expulsions immobilires. En qualiant les banquiers de criminels, elle a vu sa notorit grandir.

    la Plateforme des victimes dhy-pothques (PAH). Ils ont dcou-vert une escroquerie gnralise, laloi qui permet aux banques degarder le logement de celui qui nepeut plus rembourser son prt immo-bilier et [de] continuer lui rclamersa dette jusqu la n de ses jours.

    Elle narrte pas. Toujours sus-pendue au tlphone, elle sint-resse aux uns, soccupe des autres.Depuis lemploi du mot crimi-nels, qui a suscit une ractionmassive sur les rseaux sociaux,la popularit lui est tombe dessus.Personne navait pens que je meretrouverais dans une situationpareille, pas une seconde, explique-t-elle. Ce jour-l, devant la com-mission de lEconomie du Congrs

    Ada Colau.Dessin dAjubel, Espagne, pour Courrierinternational.

    ILS FONTLACTUALIT

    Ada Colau est lune des Mditerranennes dont Serge Moatibrosse le portrait dans un documentaire du mme nom qui seradius sur France2 le mardi 18juin 22h40. Courrier internationalest partenaire de ce documentaire qui montre des femmesengages de direntes manires sur les rives de la Mditerrane.

    CONSTANTOn a dit que jtais le roi des punks. Je naccepte pas ce titre, mais si jen tais un je dirais : A bas les rgles ! Les rgles cest pour les cons.Pensez par vous-mmes et vous serez un vrai punk.John Lydon alias Johnny Rotten,ancien des Sex Pistols et leader du groupe Public Image Limited,rarme son credo.(The St. Petersburg Times, Russie)

    INJURIEUXDernire ligne droite pour le saint Nelson Mandela,apparemment. Evitez la BBCquand ce vieux terroriste

    va crever : ce sera vomir. Message de NickGrin, chef du Partinational britannique(extrme droite), propos

    de la rcente hospitalisationdu hros de la lutte

    anti-apartheid et ancien prsident de lAfrique du Sud. (Twitter)

    CONSENTANTENos enfants ont grandi. On se voit peine. Oui, on peut dire que cest un divorce civilis. LioudmilaPoutine, future ex-pouse du prsident russe VladimirPoutine, explique que leur sparation a t dcide par consentement mutuel.(Izvestia, Moscou)

    RACISTESils se font apprhenderquelque part, on peut les jeter dehors purement et simplement. Hans-PeterFriedrich, ministre de lIntrieurallemand, veut se dbarrasser de limmigration de pauvret,constitue selon lui des Romsroumains et bulgares qui viendraient illgalementen Allemagne pour proter du systme social sans avoirtravaill. (Die Welt, Berlin)

    DPOUILLPouvez-vous arrter a?a demand le pianiste polonaisKrystian Zimerman, interrompantson concert Essen, en Allemagne,parce quil tait distrait par un spectateur qui lenregistrait avecun portable. Lartiste a expliququil avait manquplusieurs contrats sous prtexte que tout tait dj disponible sur YouTube.La destruction de la musique cause de YouTube est norme,arme Zimerman.(Stern, Hambourg)

    DR

    ABC (extraits) Madrid

    LEspagne a appris son exis-tence le jour o, devant unmicro, la voix tremblantedindignation, elle a quali les ban-quiers de criminels [en fvrierdernier]. Ada Colau en avait assezque les banques, souvent sauvesgrce largent des Espagnols, celuides riches et celui des pauvres, jet-tent la rue des familles entires,des gens sans ressources des vic-times de lescroquerie immobilire.Ada a fait de la rsistance aux expul-sions son combat. Certaines ontcot plusieurs vies ces derniersmois do le choix du qualica-tif criminel. Ces suicides sontentrs comme des poignards dansles consciences de tous (ou presquetous). Dautres expulsions ontentran des drames sociaux.

    Ada Colau Ballano est uneBarcelonaise de 38ans, descenduedans la rue pour la premire foisen2003, aprs linvasion de lIrakourdie par le trio des Aores(Bush, Blair et Aznar). Elle sestalors rallie au mot dordre scandpar des centaines de milliers decitoyens dans les grandes villesdEspagne: Non la guerre!Ce fut loccasion de rencontrerdes gens ayant les mmes pr-occupations quelle, des gensqui inscrivaient des questionsplantaires dans la vie quotidienne.Et elle sest con centre sur lelogement, y voyant le prin-cipal facteur de prcarit. Cemouvement a dbouch en2006sur Vde Vivienda [LcommeLogement], un prcurseur, samanire, du15-M [mouvement desindigns de2001]. Cest l quellea rencontr son compagnon, aujour-dhui le pre de son ls de 2ans.

    V de Vivienda a dnonc lexis-tence dune bulle immobilire, ceque lEtat niait, une poque olEspagne tait encore en pleineeuphorie conomique, o ne passacheter un appartement semblaitune marque dinfriorit, une fai-blesse sociale. Ses militants ontprdit les problmes, les impays,les pleurs, mais personne naragi. Quand la bulle a ni par clater,Ada et dautres militantsne sont pas rests les bras croi-ss et ont fond, en fvrier2009,

    des dputs, jai eu une raction ins-tinctive et naturelle, non prmdi-te. Elle accepte cette notoritinattendue. Pour la cause quelledfend, pour la publicit. Mais jene crois pas aux hros, lance-t-elle.Ni aux sauveurs. Aujour dhui, il fautque tout monde simplique. Les rf-rents sont une erreur, alors que cesttoute notre dmocratie qui est en jeu.

    Sa bataille lui laisse peu de tempsavec son ls. Mais son compagnonlaide; lui aussi, il milite. Il est co-nomiste et vit avec elle dans unappartement de location.

    Ada travaille lObservatoire desdroits conomiques, sociaux et cul-turels, une ONG qui lutte pour ledroit au logement, la sant, autravail et lducation. Ses annesdtudiante la facult de philo-sophie de luniversit de Barcelonesont dj loin.

    Epoque heureuse o elle ne pou-vait simaginer un jour sur les pla-teaux des journaux tlviss, avecune lgion de sympathisants (prs

    de 80000abonns sur Twitter[@AdaColau]), en porte-drapeau dune cause soute-nue par 90% des Espagnols,

    daprs une enqute duPAH quelle cite. Lobjectifde la Plateforme est dou -ble: obtenir la dation enpaiement [qui permet-trait dapurer la dette delexpuls par la simple

    restitution du bien immo-bilier] et un moratoire sur

    les expulsions. Ces derniressont plus que jamais dactua-

    lit : on en dnombre plusde400000 depuis le dbut de

    la crise. Lintervention de laPAHa permis de stopper plus de 550deces expulsions. Une victoire au seindune guerre dicile contrelennemi le plus puissant, les ban -ques. Tandis que lEspagne vivaitdans livresse, elles ont arnaqu lesgens sciemment.

    Voil pourquoi elle les accusedtre des criminels.Et aprs, quandla bulle immobilire a clat, ils ontvol largent que lEspagne na pas, desmillions deuros. Ada reproche lEtat davoir sauv les ban ques etdavoir abandonn les familles leur sort.

    Fernando MianaPubli le 19avril

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  • 7 JOURS Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    LUE ne fait querespecter lesrgles de lOMCDie Tageszeitung Berlin

    Bruxelles peut-il appliquer de nouvellestaxes sur les exportations chinoises?Jusqu prsent, la question navaitpas fait dbat: la Commission europennea dj pris des mesures contre des entre-prises chinoises souponnes de dumpingdans 48secteurs. Jamais une telle dcisionna suscit de protestations, encore moinsune guerre commerciale.

    La situation, cette fois, est dirente. Legouvernement de Berlin se mobilise contreles sanctions. Il y a une semaine, la chance-lire Angela Merkel a mis en garde contre lerisque descalade. Elle en aurait parfaite-ment le droit si lAllemagne avait son mot dire dans cette aaire.

    Le fait est que ce nest pas le cas. LaCommission europenne a la haute main enmatire de politique commerciale. Le com-missaire europen au commerce, KarelDeGucht, peut et mme doit appliquerdes sanctions lorsquil souponne la Chinede ne pas respecter les rgles du jeu.

    La dcision de la Commission pourrait setraduire par une augmentation des tarifsdouaniers pouvant atteindre 47,6% sur lespanneaux solaires chinois. Le mieux que lecommissaire europen puisse faire pourAngela Merkel est dadoucir ces sanctions.Dans les premiers mois, la nouvelle taxe ne

    sappliquera qu taux rduit [11,8% pen-dant deux mois].

    Est-ce la n du monde? LUnion euro-penne cde-t-elle un protectionnismedbrid? Bien au contraire. LUE respectesimplement les rgles de lOrganisationmondiale du commerce (OMC). Elle ne faitpas autre chose que les Etats-Unis, qui sanc-tionnent les exportations chinoises dans lesecteur solaire depuis dj un an.

    En cdant aux pressions allemandes etchinoises, le commissaire DeGucht risque-rait de crer un dangereux prcdent. Pluspersonne ne prendrait au srieux la premirepuissance commerciale mondiale que repr-sente toujours lEurope. Celle-ci pourraitalors faire lobjet de chantages. Ces sanc-tions sont donc le bon signal envoyer.

    Eric BonsePubli le 5juin

    Imposer des droits de douane au solaire chinois, est-ce lgitime ?

    CONTROVERSE

    OUI

    NON

    LUnion europenne (UE) a dcid de taxer les importations de panneaux solaires chinois. Une rponse normale au dumping pratiqupar Pkin, estime un quotidien allemand. Une dcision que lUE regrettera, arme lorgane du Parti communiste chinois.

    Ce sera ilpour il, dent pour dentHuanqiu Shibao Pkin

    Loutrageuse dcision de la Commis -sion europenne pousse la Chine etlEurope au bord de la guerre com-merciale. Nous pensons que la Chine devraitcesser de rver en tentant de ngocier, etplutt mobiliser tout larsenal des repr-sailles contre lUnion europenne. Que lesdeux rivaux fassent match nul en dcembre

    Thierry Garcin et Eric Laurent6h45/6h57 du lundi au vendredidans Les Matins de France Culture

    en partenariat avec

    franceculture.fr

    [les taxes ont t adoptes pour une durede six mois] ou quils nissent par perdrelun et lautre, il nous faut ds aujourdhuiprendre des mesures capables dintimiderlEurope pour la guerre commerciale venir.

    Par le pass, la Chine sest toujoursemploye ngocier pour rsoudre lesconits commerciaux. Quand le volume ducommerce extrieur chinois tait encorerelativement faible, cette mthode sav-rait assez ecace. Aujourdhui, la Chine estdevenue lune des plus grandes puissancescommerciales mondiales, et cette taxe anti-dumping sapplique plus de 20milliardsde dollars de produits photovoltaques chi-nois, une somme non ngligeable pour laChine comme pour lEurope. Les intrtsinternationaux ne reposant que sur lchangede prots, les pourparlers ne susent pas;mme si laaire tait porte devant un tri-bunal, leet dune telle dmarche reste-rait fort limit

    La Chine doit donc faire comprendre lEurope quelles seront les consquencesdes taxes antidumping sur les importationsde panneaux solaires chinois et permettreau monde de se faire une ide claire sur cetteaaire. Et sans doute faudra-t-il que cettefois les deux parties y laissent des plumes

    Bien sr, sil tait possible dviter la pertede plusieurs dizaines de milliards de dollarsdans une guerre commerciale, ce serait unebonne chose. Mais cet espoir semble aujour-dhui stre rduit comme peau de chagrin.La Chine doit au plus vite concentrer touteson nergie rpondre cette taxe anti-dumping selon la loi du talion: il pour il,dent pour dent! Si notre pays riposte avecla plus grande fermet, il se pourrait mmeque la situation atteigne un point critique,pour nalement se renverser et plus noushsiterons ragir, moins nous aurons delatitude pour redresser la situation.

    Signalons ceci: le jugement qui sera rendupar la Commission europenne en dcembreprochain [ lissue de la fameuse priode desix mois] ayant peu de chances de jouer ennotre faveur, il nous faut bien garder en tteque lenvironnement mondial volue aurythme (rapide) auquel le volume commercialde la Chine augmente, et quil seratrs dicile dinverser la tendance.Aussi la Chine doit-elle mener unenouvelle rexion stratgique,assortie de nouveaux moyens dagir.

    La Chine est un pays qui attacheune grande importance lharmo-nie, qui naime pas les conits et quicon sidre le plus souvent le scnarioperdant-perdant comme le pire desrsultats ou presque, car elle chercheavant tout viter dtre la seuleperdante. Le scnario per-dant-perdant est alors unedmonstration de force

    susceptible dengendrer de futurs compro-mis gagnant-gagnant

    Prochaine tape: la Chine va tout fairepour que lUnion europenne paie le prixfort. Car si pour lEurope les pertes sav-rent plus importantes que le prot retir decette taxe antidumping, la Chine marquerades points un mal pour un bien!

    Le fait que la Commission europennesobstine vouloir imposer des taxes anti-dumping nous laisse penser que la dgra-dation continue de lenvironnementcommercial de la Chine est invitable. Tandisque nous luttons avec lextrieur, il nousfaut en mme temps acclrer le dvelop-pement de notre march intrieur, an quenotre croissance conomique soit de moinsen moins lie aux exportations. Si la Chineest aujourdhui la deuxime puissanceconomique mondiale, elle se place en pre-mire position par le volume de ses expor-tations. Nous avons puis tout ce que nouspouvions dans le march mondial: si nousnous ajustons trop lentement aux change-ments de cet environnement, la pressionextrieure ne viendra pas seulement delUnion europenne.

    Plus notre march intrieur se dvelop-pera, plus la contre-attaque aux mesuresextrieures de protectionnisme gagnera enforce. Mais, comme le dit le dicton, uneeau lointaine napaise pas une soif pres-sante, et pour faire face lurgence cettetaxe antidumping il nous faut galementrendre manifeste notre puissance dfen-sive. Parler de guerre commerciale nestpas une simple mtaphore, il sagit biendune guerre invisible.

    Publi le 5juin

    Dessin de Clou, Bruxelles.

    8.

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  • place Taksim, ni Ankara, ni Izmir, quiappelle larme renverser le gouvernement.Bien sr, certains slogans allant dans ce sensont t entendus a et l, mais ceux qui lescriaient se sont toujours retrouvs isolsparmi la masse des manifestants. Cest cela,la nouvelle Turquie.

    Qui trouve-t-on parmi eux?Le combat pour la dignit men partir deTaksim et du parc Gezi [que le gouverne-ment turc veut raser pour construire uncentre commercial, cette dcision ayantdclench lactuelle protestation] a pu prendreune forme pacique et joyeuse tout en met-tant en avant le concept de libert, parce quela perspective dune paix sur la questionkurde parat dsormais porte de main, etce dailleurs grce au courage dont a faitpreuve le Premier ministre sur ce dossier. Ily a un an, une telle situation aurait t inima-ginable, tant les rexes violents dominaientla rue turque. Cela aussi, cest un lmentdune Turquie nouvelle o les camions anti-meute de la police sont dsormais envoysde Diyarbakir [grande ville majorit kurdedu Sud-Est anatolien] vers Ankara, et nonplus linverse. On a vu aussi sur la placeTaksim et dans le parc Gezi des femmesturques dge moyen, votant vraisembla-blement pour la Parti rpublicain du peuple[CHP, kmaliste et nationaliste], danser avecde jeunes Kurdes sympathisants du Partipour la paix et la dmocratie [BDP, prokurde,proche du PKK], qui considrent Abdullahcalan comme leur leader. Dans ce contexte,lorsque Erdogan et certains lieutenants delAKP, avec des mdias compltement acquis la cause de lAKP, cherchent derrire cesvnements des forces occultes, des mainstrangres ou une action du rseau Ergenekon[clbre rseau maeux turc], ils trahissentune faon de parler et de penser qui se dis-tingue par un recours aux valeurs, la visionpolitique et aux codes de lancienne Turquie.Les chercheurs de luniversit Bilgi Istanbulont dress dans une enqute ralise chaudauprs de trois mille jeunes le portrait dela jeunesse qui se trouve aujourdhui dansla rue. On y apprend ainsi que ceux-ci sontmus par un idal de libert, quils nont pourla plupart que des liens organiques trsfaibles avec les partis politiques et quils uti-lisent abondamment et trs ecacementles rseaux sociaux. Ils ragissent contre lemoralisme et sont respectueux des di-rences, raison pour laquelle ils rclamentque lon respecte aussi leur propre di-rence. Il sagit dune jeunesse qui a un sensde lhumour trs dvelopp, qui rejette laviolence, mais qui ne se laisse pas impres-sionner par celle-ci. Ces caractristiquespermettent donc de dterminer le proltype du jeune luttant pour sa dignit.

    Que veut cette jeunesse incarnant doncla nouvelle Turquie?Elle veut la libert. Elle veut que les pouvoirspublics, le Premier ministre, les recteurs etles professeurs duniversit, les directeursde lyce et les patrons soient respectueux son gard. Nous sommes maintenant face une nouvelle gnration qui, comme par lepass, ne reoit plus de coups et ne se faitplus rprimander par ses parents. Ces jeunesne veulent plus subir la violence physique

    Moyen-Orient ....Afrique .........Asie ............Amriques .......Europe ..........France ..........

    duncontinent lautre.moyen-

    orient

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    Turquie. Le mur de la peur sest fissurPour luniversitaire et ditorialiste Ahmet Insel, les vnements montrentquune nouvelle gnration a pris got au soue de la libert.

    Vatan (extraits) Istanbul

    Vous avez dit que la mobilisation actuelle Istanbul incarnait la nouvelle Turquieet que le Premier ministre incarnait,quant lui, la Turquie ancienne.Pouvez-vous nous dcrire cette nou-velle Turquie?AHMET INSEL La nouvelle Turquie est enquelque sorte le rsultat des mesures poli-

    tiques et conomiques adoptes depuis dixans par le Premier ministre Recep TayyipErdogan. Il y a ainsi sur la place Taksimaujourdhui des jeunes qui nont pas vraimentdinquitudes quant leur avenir sur le planconomique. La plupart sont luniversitou travaillent dj. Certes, il y a en Turquiedu chmage, des pauvres et surtout uneingalit dans la rpartition des revenus.Mais il sagit l de problmes classiques qui

    se posent dans le cadre dune conomie capi-taliste dveloppe et normalise. Par ailleurs,aprs de longs combats, llite militaire etbureaucratique, qui exerait une tutelle surla socit, nest plus aussi forte en Turquie.Cest ainsi que, la dirence de ce qui sestpass en 2007 [lors des meetings de loppo -sition protestant contre llection dAbdullahGl, issu de lAKP, la prsidence de laRpublique], il ny a plus personne, ni sur la

    Dessin dOsama Hajjaj, Jordanie.

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    10.

  • ou symbolique des autres. Et ils veulent quonles consulte propos des problmatiquesqui les concernent.

    Quest-ce qui a le plus fch les gens?Que le Premier ministre se mle de tout,depuis les questions concernant un mairede quartier jusqu celles relevant de la com-ptence dun prsident de la Rpublique.Son empressement excessif intervenir, organiser et sanctionner, et lattitudeorgueilleuse et mprisante quil ache face ceux qui ne le soutiennent pas ont provo-qu une exaspration. Les gens ont alorsexprim leur ras-le-bol face ses projetspharaoniques, en particulier ceux dIstanbul,dont il se considre comme le sultan.

    Limage du Premier ministre a-t-elle tcorne par tous ces vnements?Le mur de la peur sest en tout cas ssur.Tous les aspects de la brutalit, de lorgueil,de la soif de pouvoir et des projets de for-matage de la socit du Premier ministreont t exposs. Sil poursuit la mme poli-tique en gardant cette mme attitude, on luirappellera systmatiquement ce qui sestpass au parc Gezi. Les nouvelles gnra-tions ont pris got au soue de libert quimane depuis plus dune semaine de la placeTaksim et de ses alentours. Maintenant, latche du Premier ministre sera beaucoupplus complique.

    Le Premier ministre a parl des 50% dela population quil aurait derrire luiCes propos en disent long sur larchasmede sa conception de la dmocratie. Il a ainsi,par ces paroles, cr de lui-mme un blocde 50% oppos son bloc de 50%. Mais sonbloc de 50% nest pas plus grand que lautre.Par ailleurs, il est possible de douter quildispose encore de ces fameux 50%.

    Cette mobilisation va-t-elle sarrter?Tout dpendra de lattitude du Premierministre. Toute la responsabilit des v-nements qui vont se produire repose entout cas dsormais sur les paules de RecepTayyip Erdogan.

    Propos recueillis par Deniz GerPubli le 8juin

    horreur et, qu cela ne tienne, il la faitdtruire [en2011]. Fch par des ditoriauxcritiques, il a mis en garde les patrons depresse en leur disant: Cest toi qui les paies,alors surveille tes ditorialistes. Il a encoredclar: Que disparaisse ce type de journa-lisme!* et le patron du quotidien incriminen a alors tir les leons [en sanctionnantlditorialiste Hasan Cemal, auteur de cetarticle, qui avait dfendu son journal, quila quitt depuis pour rejoindre le sitewww.t24.com.tr].

    Le nombre de journalistes et dditoria-listes qui ont perdu leur job la suite desmanuvres en coulisse na cess daug-menter. Il sest ml de la srie tlviseMuhtesem Yzyil [Le sicle magnique,quil considrait comme insultante pour lesultan Soliman le Magnique]. Il a qualidalcooliques ceux qui boivent de lalcool,de pillards ceux qui rsistent dans le parcGezi. Dans un contexte o lon a assist une augmentation signicative du nombrede journalistes emprisonns, la libert dex-pression a connu une rgression.

    La sensibilit des alvis [chiites htro-doxes anatoliens, minoritaires], pour les-quels aucune solution na t apporte aucours des mandats dErdogan, na absolumentpas t prise en compte lors du choix dunom du troisime pont sur le Bosphore**.

    Il vient aussi dannoncer quil feraitconstruire une mosque sur la place Taksim.Erdogan, qui croit quil peut faire ce quilveut parce quil a remport les dernireslections et qui menace de faire descendredans la rue 50% de la population, a choisi unchemin trs risqu qui ne peut contribuerqu diviser davantage la Turquie et qui estsusceptible de menacer la stabilit du pays.Souhaitons que les personnes de bonnevolont qui sont dans son entourage puis-sent freiner ce penchant autoritaire et leramener la raison.

    Hasan CemalPubli le 4juin

    * En raction la publication par Milliyet desentretiens secrets avec le chef emprisonn du Partides travailleurs du Kurdistan (PKK), Abdullah calan.

    ** Yavuz sultan Selim, cest--dire Selim Ier,sultan ottoman connu pour avoir combattuviolemment les chiites. Ce pont a t inaugur en prsence dErdogan le 29mai.

    MOYEN-ORIENT.

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    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    Ahmet Insel N en 1955, Ahmet Insel estun conomiste turc qui enseigne luniversit Galatasaray, Istanbul.Parfait francophone, Insel agalement enseign la Sorbonne.Il est connu en Turquie pour sonapproche critique du nolibralisme,sa rexion sur la recomposition dela gauche et son analyse du systmepolitique de son pays. Editorialisteau quotidien turc Radikal, il estaussi membre actif du trs srieuxmensuel sociopolitique Birikim.Ahmet Insel est par ailleurs lun des quatre initiateurs turcs de lappeldemandant pardon aux Armniens,lanc en dcembre2008.

    aaires, se sont soumis lui. A tel point quele Premier ministre a commenc donnerson avis sur le sort qui devait tre rserv tel rdacteur en chef ou tel ditorialiste.Sur certains sujets, cest lui qui a le derniermot et qui dcide de ce qui va tre publi. Ilest arriv quon sadresse directement luiou ses proches conseillers pour savoir com-ment une information devait tre traite.

    Il sest aussi permis de runir Ankara lespatrons de mdias et des rdacteurs en chefpour leur expliquer quelles taient les lignes

    ne pas franchir. Cest encorelui qui a le dernier mot lorsquilsagit de savoir comment les

    journaux et les chanes de tlvision doiventtre rpartis entre ces dirents patrons. Ildcide alors qui on va ter un quotidienou une chane et qui on va les rattribuer.Lombre dErdogan sur les mdias sest faitsentir dans la faon dont ont t couvertsles vnements du parc Gezi. Nous avonsainsi pu mesurer ltat pitoyable des mdias,dont la couverture de cette mobilisation at scandaleuse.

    Plus Erdogan sest vu comme incarnantlEtat, plus il a considr quil avait raisonsur tout. Par exemple, il a estim que la statuede Kars [statue de 25mtres de haut dieen2007 Kars, dans lest du pays] tait une

    T24 Istanbul

    Tayyip Erdogan lui aussi a connu laprison, et il y a mme t tortur.Pour un pome quil avait lu en1997[ jug comme remettant en cause la lacit],il a t incarcr et interdit un temps dac-tivit politique. Lun de ses vieux compa-gnons ma racont aussi quen1977 il avaitt arrt pour avoir particip une mani-festation non autorise, emmen au postede police et svrement tortur. Erdogan apar ailleurs vcu dicilementles tracasseries que ses lles ontsubies une certaine poqueparce quelles portaient le foulard. Erdogan,en tant que citoyen de ce pays, a donc subila violence de lEtat tout-puissant. Il a puapprhender la brutalit de celui-ci. On auraitpu attendre dune personne qui a vcu cegenre dexprience davantage de compr-hension, de tolrance et dindulgence.

    Dans le cadre du processus dadhsion lUnion europenne, il a ralis des avan-ces indniables sur le plan du droit et de ladmocratie. Il a ainsi mis un terme la tutelleque larme exerait sur la socit et a faiten sorte que lautorit militaire dpendedsormais de lautorit civile lue, cest--dire du gouvernement, ce qui tait juste. Saufquil sest ensuite substitu aux militairesqui freinaient le processus dmocratique etsest mis son tour, considrant quil incar-nait dsormais lEtat, bloquer cette vo-lution dmocratique.

    Il est ainsi devenu avec le temps luniquesource du pouvoir, tel point quil sest mis penser que lEtat, [ctait lui]. Tout enrecourant de plus en plus souvent la force,il a t (peut-tre sans sen rendre compte)pris par une sorte divresse du pouvoir unesorte dorgueil denfant gt qui ne veut pluslcher le pouvoir, qui sait tout et qui ne tolreplus aucune critique.

    Il a alors commenc tre craint. Le mondedes aaires sest mis avoir peur de lui parcequil a montr, en distribuant tantt desrcompenses, tantt des sanctions svres,quil tait, en incarnant lEtat, en mesure demenacer srieusement ses intrts. Cestainsi que les patrons des grands groupes depresse, qui tous sont issus du monde des

    PORTRAIT

    Erdogan, la victimedevenue bourreauLe Premier ministre, qui a jadis subi la violence de lEtat turc, est aujourdhui un dirigeant autoritaire dun autre ge.

    Dessin dAntnio paru dans lExpresso, Lisbonne.

    11

  • Mag14 Tunis

    U ne professeure duniver-sit avoue quelle entre-tient avec ses tudiantsdes relations intimes, loin des yeuxde son mari, et ce lors dun tmoi-gnage dius le 4juin, en direct,sur la bandeFM un tmoignagequi na pas ni de faire des vagues, en croire les commentaires quifusent de toutes parts sur lesrseaux sociaux.

    Ce tmoignage survient quelquesjours aprs larrestation [le 29mai]des Femen europennes accou-rues en Tunisie par solidarit avecleur consur tunisienne, la dsor-mais clbre Amina*. La devise deces groupes sextrmistes? Fuckmoral un slogan quelles rdi-gent sur leur poitrine dnude ensigne de d la morale, consi-dre comme dpasse, rpres-sive et oppressive. Et la nouveaut,cest que ces activistes trouventdsormais des soutiens qui ne crai-gnent plus de sacher publique-ment en Tunisie. Aussi, cestconformment ce slogan contrela morale que cette prof tunisiennesemble stre dcide agir.

    Les sympathisants de lisla-misme ont beau paratre soppo-ser cette dferlante, il nen restepas moins que leur camp nest pastout fait pargn par la tendancepermissive, mme si celle-ci prenddes apparences direntes. Plusdiscret, le phnomne du mariage

    coutumier, dit or, ne cesse eneet de se dvelopper dans lesmilieux estudiantins salastes. Etil sen passe des choses sous levoile sombre du niqab En d-nitive, quelle dirence relle yaurait-il entre le mariage or etlunion libre loccidentale, au-del du look de ceux qui dfen-dent ces direntes sortes deconcubinage?

    Dans un cas comme dans lautre,les couples se font et se dfont augr de lenvie du moment, mmesi, en Tunisie, les enfants ns deces unions, quelles soient cou-tumires ou lacisantes, ris-quent dtre exposs lopprobredune socit qui ne savoue pasencore ltendue des changementsauxquels elle est confronte. Maisdes scandales clatent sporadi-quement et dvoilent par petitestouches successives les boulever-sements cornant la morale tra-ditionnelle.

    Prtexte religieux. Ainsi, la pudi-bonderie religieuse nempcherapas lindustrie pharmaceutique defaire des aaires en or en Tunisieen coulant le Viagra et ses ver-sions gnriques. Et il parat mmeque sa dclinaison fminine serabientt disponible dans notre pays.

    Ces derniers mois, les Tunisiensberlus ont ainsi appris lexis-tence du djihad ennikah, sacra-lisant ainsi religieusement desbordels de campagne o les femmes

    seraient dsormais des volontaires,et non des victimes plus ou moinsrmunres. Mieux: elles trouventaujourdhui des prtextes religieuxfournis par des cheikhs satellitaires[sexprimant sur des chanes detlvision par satellite] qui dli-vrent labsolution et promettentaux plus dvoues le paradis enplus du septime ciel. Sans mmesappesantir sur les fatwas sca-breuses qui trifouillent dans lin-timit des couples pour les dcrterconformes (ou non) la loi divine.En clair, la sexualit tourne lapathologie obsessionnelle.

    Lpidmie de viols qui a frapprcemment la Tunisie [en marsdernier, dont le cas dune llettede 3ans] ne peut-elle pas tre consi-dre comme symptomatique dunmalaise socital endmique?

    De lautre ct, les unions sacra-lises par les liens du mariage nesont pas pour autant en bonnesant. Faut-il rellement sen ton-ner dans un contexte o lge moyendu premier mariage est dsormaisde 33ans pour les hommes et de29ans pour les femmes? Peut-onrprimer indniment des besoinsnaturels sans dommages psycho-logiques et sociaux?

    Quant aux promesses dEnnahda[parti islamiste au pouvoir] visant faciliter laccs aux pousailles,elles ont vcu le temps dune cam-pagne lectorale. Car, dans les faits,ce nest pas en organisant des cr-monies collectives en prsence

    des cheikhs les plus en vue quelon rglera le profond dsqui-libre social. En attendant, cestplutt avec le chmage que la jeu-nesse tunisienne est marie.Pendant que gronde dans les pro-fondeurs une rvolution sexuellequi ne dit pas son nom.

    Soua B.APubli le 4juin

    * A la mi-mars, Amina publie sur les rseaux sociaux des photos delle la poitrine nue et se rclame du mouvement Femen; le 19mai, elle est arrte pour port darmeblanche et maintenue en dtention pour dautres chefs daccusation.

    MAROC

    Rveillez-vous !Le cri dalarme dunefemme post surQandisha, le premierwebzine marocainfminin et fministe.

    afrique

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013DUN CONTINENT LAUTRE

    Tunisie.Union libre ou mariagecoutumier? Qandisha (extraits)Casablanca

    Rveillez-vous les femmes,la police des murs est deretour! On nest pas en Iranje suis marocaine, on est auMaroc au pays o je nattendslautorisation de personne pourconduire un vlo ou une voiture.Et pourtant, je me rends compteque, l, on minterdit plus. Voil,cest la troisime fois quon min-terdit de rentrer chez moi. Oui,vous avez bien entendu: chez moi!l o jhabite. Une bande de mecs,dnomms membres du syndic,ont donn lordre de minterdirelaccs de chez moi chaque fois queje serai accompagne dhommes.

    Je demande une runion, quidure presque deux heures, o jedbats avec trois hommes qui mex-pliquent : Madame! Vous tes dcla-re clibataire: alors, vous navez pasle droit des visites dhommes tran-gers! Bien entendu, part votre frre,pre et les femmes!Je tente de gardermon sang-froid avant de crachermon feu. Jexplique que je suismajeure et vaccine, quils ne sontpas mes tuteurs et quils nont aucunstatut juridique pour mimposerune ligne de conduite.

    Chers Messieurs! Vous tes membresdu syndic, vous avez plusieurs tchesqui se rsument en ce qui suit: jardi-nage, gardiennage et ce qui va avec.Ma vie prive est mienne. A part legteau, combien beau, jai aussi droit la cerise. Ma cerise a t cettephrase du prsident du syndic, quime lana: Ce sont nos lois internes.Et vous devez vous plier nos lois tantque vous habitez cette rsidence!Ohhh! On a des sectes au Maroc!Mon il, Monsieur, pour ne pas direautre chose. Vos lois internes, je ne lesreconnais pas. Je ne suis pas une brebisdans votre troupeau. La prochainefois, appelez la police! Mais sachez queje nabdique pas. Ma vie mappartient,et, a, je ne le ngocie pas.

    Mesdames, je me le suis jurquitte y laisser ma peau, mesfesses, mes plumes et mme mesos, je nabdiquerai pas! JAMAIS!Au grand jamais!

    Majda SaberPubli le 22mai

    MAG14Tunis, Tunisiewww.mag14.com/Ce webzine lanc aulendemain de la rvolutiondu 14janvier 2011 a pourambition de proposer aux lecteurs un nouveauregard sur la Tunisie.Ses articles couvrentlactualit tunisienne,politique et conomique.Des rubriques sontconsacres la culture et aux technologies.

    SOURCE

    Viols, relations sexuelles hors mariage, mergence du mouvement Femen : les Tunisiens sinterrogent sur lvolution de leur socit.

    Dessin dOtto paru dans The Guardian, Londres.

    12.

  • AFRIQUE.Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

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    El-Watan Alger

    A rrtez! Arrtez! Ils sont en train detirer! A une quinzaine de kilo-mtres dAns, sur la route quirelie Kidal Gao, des commerants nousempchent davancer. A bord de leursnormes camions de marchandises assu-rant le ravitaillement des villages du norddu Mali, ils nont pas pu entrer dans le vil-lage dAns. Il est 5h30. Voil presqueune heure que le soleil tape sur le bitumeventr de cette route que les chars desmilitaires ont nipar achever. Les com-merants nous racontent que des accro-chages entre larme malienne et le MNLA[Mouvement national de libration delAzawad, mouvement touareg] auraientdj fait plusieurs morts. La bataille esttermine, Ans est tombe entre les mainsde larme malienne. Un sordide dcor descience-ction. Aucune me visible. Descases serres. Un chien qui court derrireson ombre. Je ne remarque pas la prsencede Franais. On les voit peu. Ils se trou-vent Gao, laroport, dont on ne peutpas sapprocher. Un militaire sort re-ment sa carte didentit algrienne et medit: Tu es la lle de mon pays, flicite-moipour cette victoire. Je ne dis pas un mot.Je pense au barrage du MNLA que nousavons crois hier.

    Ils staient adresss Abou, mon chauf-feur, en tamasheq, moi en arabe ou enfranais. Ils mavaient paru trs jeunesmais ne connaissaient pas leur ge. Ilsnavaient pas plus de 25ans. Puis ils nousont quitts dans un nuage de poussire.Abou mapprend que leur convoi a tdcim. Moussa et ses camarades, proba-

    blement morts. Le MLNA a fait tat dunevingtaine de morts dans ses rangs. Selonlarme malienne, ils seraient plus dunecentaine. Nous sommes le 5juin, six moisaprs le dbut de lopration Serval. A Kidalcomme Gao, les tmoignages sont lesmmes. Le gouvernement malien na jamaisrien ralis ici, il na fait que perptuer le sys-tme colonial. Quand les gens ne viventpas terrs dans leur maison, ils parlent dela peur qui les tenaille.

    Ghetto du dsert. Tout au long du voyageet dans chaque village, les drapeaux fran-ais ctoient les drapeaux maliens. Lesmurs sont recouverts de slogans: Vive laFrance de Hollande, Merci la France,Merci Hollande. Une reconnaissance par-tage parfois avec un sourire forc. LaFrance est un ancien pays colonisateur.Aujourdhui, elle nous a aids en sacriant dessoldats, nous lui devons le respect, souligneun vieux. Vers 2heures du matin, les tl-phones de certains voyageurs se mettent sonner. Le chaueur traduit: Larmemalienne est dcide aller provoquer lesTouaregs Ans. Nous traversons lavitesse de la lumire des paysages surpre-nants de beaut, qui incarnent aussi la pro-fonde misre du Mali. San, Mopti, Douentza,Hombori, Gossi Les panneaux des villesdlent, barrages et vrications diden-tit se succdent jusqu Gao, qui narguele euve Niger dont elle est spare par unpont. Le coucher de soleil sur le euve mefait oublier que Gao est plonge dans lenoir. Au matin, tout le monde dguste desbeignets de farine avec du lait sous unedouce brise matinale. Abou, le chaueurqui doit me conduire Kidal, est l.

    MALI

    Kidal, ville lugubre et sous pressionA un mois des lections, les ngociations pour librer la ville du nord du pays se poursuivent. Sur le terrain les milicestouaregs se prparent la grande bataille.

    Un feu invisible vous brle la peau. Lachaleur est telle que rien ne me rafrachit.Abou me montre les eets des premiersbombardements franais. Il y a des dbrispartout, des villages parpills, si mis-reux. Au premier barrage du MNLA, lesvisages se dcrispent linstant o je dclinemon identit. Bienvenue dans lAzawad!Ici vous tes chez vous! En ralit, le MNLAsort exsangue de ce bras de fer avec lar-me malienne, qui, grce linterventionfranaise, a pris de lassurance. Fautedhommes, la plupart de ceux que jai croi-ss sont des adolescents arms qui suiventdautres adolescents arms, sans stratgie,sans moyens. Nous exigeons la librationde lAzawad, dclare un notable de Kidal.Un autre vtran de la rbellion de 1963[rbellion touareg contre le pouvoir cen-tral] sinsurge: Le Mali a toujours vouludtruire la culture touareg. Les responsablesappliquent un plan colonial pour nous radi-quer. Le gouvernement malien a permis ladlocalisation des populations [noires]. Je mebats, sans faiblir, pour la reconnaissance denotre nation. Ds 4heures, la lumire dujour se dilue dans le ciel. Il ny a pas deroute ni de goudron. Kidal ressemble unghetto du dsert.

    Je choisis de parler en arabe pour ne paspasser pour une Franaise. Les rues sontpleines de sachets, de dbris, de tles, vieuxmoteurs ou pices mtalliques. Sur les

    murs: Azawad libre, Vive le MNLA, Nonau racisme, Azawad ou la mort. Danslaprs-midi, on apprend quun kamikazevient de se faire exploser. Cest un Peul, unNoir, minforme-t-on. Lodeur de la chairbrle sur le ciment ne me quittera pas.Le MNLA a arrt de nombreux habitantsnoirs, craignant linltration dagents delarme malienne. Si le MNLA sest excusauprs de ceux qui ont t malmens, cer-tains tmoignages sont inquitants. LesAzawadiens nont rien voir avec les Noirs.Les Noirs nous dtestent depuis toujours,cone un ancien du MNLA. Son amisnerve: Comment peux-tu dire a unejournaliste? Kidal est mante, lugubre etsous pression. Je prfrais quand ctait lesislamistes qui commandaient. On nentendaitjamais parler de vol, de pillage ou dagres-sion, lche un citoyen dsabus. On rcu-pre un pied du terroriste. Les Azawadiensvoteront pour leur pays. Il nest pas questionquon nous impose des lections dans notrepays, lance un soldat du mouvement. LaFrance soutient ouvertement le Mali, noussommes abandonns par lAlgrie, et les ngo-ciations ne sont quune manire de gagner dutemps avant la grande bataille. Car, commele promet un haut responsable, le Mali etle monde entier doivent comprendre que nousmourrons tous avant de livrer Kidal.

    Faten HayedPubli le 7juin

    Bamako

    Tessalit

    Kidal

    Tombouctou

    DouentzaGossi

    Gao

    Hombori

    Mopti

    Ans

    ALGRIE

    MAURITANIE

    MALI

    NIGER

    SNGAL

    BURKINAFASO

    SOUR

    CE :

    EL-

    WAT

    AN AZAWAD

    S A H A R A

    Niger

    400 km

    Tropiquedu Cancer

    DjennSan

    Sgou

    L Azawad, zone revendiquepar les Touaregs du MNLA

    Route suivie par lajournaliste dEl-Watan

    Derniers combats entre larmemalienne et le MNLA (5/6/2013)

    13

  • Mais qui sont les Gupta ? Pourquoi ont-ils bnci dun tel traitement de faveur ?Pourquoi six ministres sud-africains,ainsi que lancien ministre en chef de lEtat indien de lUttar Pradesh,ont-ils assist ce mariage? Cest ce que tentent de dcouvrir les mdias sud-africains depuis le dbut du Guptagate. Le 7juin,lhebdomadaire Mail &Guardianindiquait que lentreprise indienneParas aurait remport lappel doresdu gouvernement sud-africain pourun grand projet de dveloppementagricole dans lEtat libre grce ses relations avec les Gupta. La famille est aussi trs proche du prsident de cette province,arment les journalistes. La minorit indienne, plus riche que les Africains grce aux avantages qui lui taient accords pendant lapartheid et ses contactshistoriques en Inde, a aidnancirement le Congrs nationalafricain (ANC) assurer sa transitionvers le pouvoir, en1994, en change de liens privilgis dans les partenariats public-priv.

    AFRIQUE

    Mint New Delhi

    LAfrique du Sud est plus sensible auracisme que la majorit des autrespays. Son corps politique porte encoreles cicatrices tragiques laisses par lapar-theid, qui a dur plus de quarante ans. LaConstitution rdige lissue de cette priodeest extrmement libraleet lAfrique duSud prend les accusations de racisme trsau srieux.

    Puis arriva la famille Gupta. Cette familleest compose dhommes daaires origi-naires de lEtat indien de lUttar Pradesh quiont fait fortune en Afrique du Sud aprs lan de lapartheid. Ils possdent lentrepriseSahara Computers ainsi quun journal local.Et, surtout, ils sont proches du prsidentJacob Zuma. A tel point que lorsque VegaGupta a pous Aakash Jahajgarhia (un siteInternet clbre dailleurs ce mariage), descentaines dinvits sont non seulement venusdInde par un vol art pour loccasion,mais ils ont aussi atterri Waterkloof, unarodrome de larme de lair situ prs dePretoria. Lhistoire ne dit pas pourquoi lafamille Gupta a jug que laroport interna-tional Oliver Tambo, Johannesburg, ntaitpas assez bien pour eux. Selon la presse sud-africaine, des fonctionnaires des servicesdimmigration sont venus contrler les pas-seports des visiteurs, un bar mobile a tmis disposition pour servir des boissonset les invits ont t escorts par des vhi-cules de police avec gyrophares jusqu SunCity un lieu de villgiature qui regroupehtels et casinos. Par ailleurs, la famille asrement fait quelques conomies troisfois rien sur les redevances datterrissageet les taxes aroportuaires.

    Le traitement de faveur accord aux amisdu prsident en a irrit plus dun, et beau-coup dautres ont t furieux en apprenantle comportement de certains invits, rvlpar la presse. Apparemment, ces derniersont exig de ntre servis que par des employsblancs et dautres ont demand au person-nel noir daller se laver.

    Ressentiment. Ces comportements ontrouvert des blessures en Afrique du Sud.Dans ce pays, certains nationalistes noirsont tendance penser que la lutte contrelapartheid na t mene que par des Noirs.Ce nest pas vrai. Mac Maharaj [dsormaisbras droit du prsident Zuma] tait avecNelson Mandela sur Robben Island. Il atranscrit ses mmoires et a dius lou-vrage [Un long chemin vers la libert] illga-lement hors de prison. Frene Ginwala taitla premire prsidente du Parlement natio-nal la n de lapartheid. Fatima Meer estlune des nombreuses Indiennes qui ontjou un rle crucial dans ce combat. Sansoublier Aziz Pahad, qui tait un politiciende renom. Aucune de ces nominations ntaitpurement gurative et il se trouve que cespersonnes avaient des origines indiennes.Elles ntaient pas toutes membres de lANC,mais elles croyaient toutes en lidal dunenation arc-en-ciel.

    Certes, les Indiens ont souert pendantlapartheid, mais pas autant que les Noirs.En vertu du Group Areas Act [une loi desparation gographique selon les races],les Indiens ne pouvaient pas vivre o ils le

    souhaitaient, mais ils avaient le droit dtreavocats ou comptables. Malgr tout, certainsIndiens ont russi, ce qui a provoqu un cer-tain ressentiment.

    Lorsque les dtails du somptueux mariagede Vega Gupta ont t rvls, nombreuxsont les Sud-Africains noirs qui ont exprimleur colre contre les Indiens. Les membresde la famille Gupta, venus dans ce pays pourfaire fortune, sont aprs tout des arrivistesqui nont pas particip la lutte contre lapar-theid. Les critiques, toutefois, ont menacde toucher tous les Sud-Africains dorigineindienne, ce qui serait catastrophique: ilsagirait dune nouvelle forme de racisme,dune part, et dautre part ces reproches sontfonds sur une interprtation malhonntede lhistoire sud-africaine.

    Lpisode du mariage Gupta rvle peut-tre que lAfrique du Sud est dsormais entrain de devenir un pays normal, auquel casil nest plus ncessaire quun parti de luttepour la libert soit la tte du gouverne-ment, comme la expliqu rcemment lar-chevque Desmond Tutu, laurat du prixNobel comme Nelson Mandela. Lpisodede la famille Gupta nest quun exemple decopinage politique.

    Les Sud-Africains ne se lassent jamais derappeler aux Indiens quen1893 lInde adonn lAfrique du Sud un avocat appelGandhi et que ce pays leur a rendu Mahatma[Gandhi a dvelopp sa thorie de la non-violence lors de son sjour en Afrique duSud]. Un sicle plus tard, quest-ce que lIndea donn lAfrique du Sud? Monsieur Gupta.Et ainsi, lHistoire se rpte, telle une farce.

    Salil TripathiPubli le 22mai

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    Jan Ole GERSTER

    Kobo Town

    3DXO:ULJKW

    AFRIQUE DU SUD

    Jacob Zuma et ses bonsamis indiensLe pays est secou par le scandale des Gupta : une famille dorigineindienne qui a bnci de traitements de faveur. Laaire rveille le racisme anti-Indiens.

    Le cadeau de mariage de Gupta. Pour votre mariage, nous vous orons un

    pays et un prsident. Dessin de Zapiro paru dans The Sunday Times, Johannesburg.

    14.

  • The Diplomat Tokyo

    Lorsqu 20ans Suon Chivaa voulu apprendre unedeuxime langue en com-plment du khmer, sa dcision avite t prise. Il a vu o taientfabriqus les produits vendus surles marchs locaux et do venaientles nouveaux investissementsdans son pays. Etudier le chinoislui a sembl un choix logique.Aujourdhui, beaucoup dhommeset de femmes daaires viennent deChine pour travailler au Cambodge,explique-t-il. Ils investissent beau-coup dargent, cest pourquoi il estessentiel de parler leur langue.

    Cette opinion est partage parla plupart des personnes qui setrouvent avec Chiva dans une sallede classe touante, Phnom Penh,la capitale cambodgienne. Commeune douzaine dautres tudiants,il est assis sur un banc en bois, lesventilateurs font tournoyer de lairchaud dans la pice, et le jeuneprofesseur explique les direntstons qui existent en mandarin.

    Ces dernires annes, plusieurscoles comme celle-ci ont ouvertdans la capitale, sur la mme routepassante le long de laquelle despanneaux de couleurs vives por-tant des inscriptions en chinoisdominent le trac. Le btimentdfrachi o ont lieu les cours estun ddale de salles qui communi-quent entre elles.

    Ces coles prennent pour ciblesde jeunes Cambodgiens qui veu-lent prendre une longueur davancedans le contexte dune conomiemergente. Pendant des annes,apprendre langlais tait une condi-tion requise pour la plupart desCambodgiens ambitieux. Toutefois,avec linuence croissante de laChine et ses investissements omni-prsents dans la rgion, parlermandarin est galement devenuune comptence prcieuse.

    Les rsultats des eorts de laChine pour renforcer son rayon-nement sont sujets dbat, mais Phnom Penh de nombreuxjeunes sont avides den savoirplus sur la langue et la culturechinoises, que lempire du Milieuest prcisment dsireux dex-porter. Selon une associationlocale de Sino-Cambodgiens,environ 30 000 tudiants appren-draient actuellement le mandarin temps plein ou partiel.

    Pour les aaires. Dans une sallede classe du rez-de-chausseouverte sur la rue, des tudiantscontournent les motos gares pourtrouver une place. Prs du tableaublanc, le directeur, Long Sochea,sadresse lentement au groupe dedbutants et parle fort pour treentendu malgr le vacarme.

    Lorsque Sochea a commenc enseigner le mandarin, dans lesannes 1990, ses quelques tudiants

    taient surtout des Cambod -giens ayant des origines chinoisesqui voulaient rafrachir leursconnaissances sur la langue deleurs lointains anctres.Maintenant, prcise-t-il, presquetous ses lves sont khmers etnont aucun lien avec la Chine. Ilsesprent quapprendre cette langueleur donnera un avantage dans lemonde des aaires.

    Les familles cambodgiennes encou-ragent leurs enfants apprendre lechinois, explique-t-il, car ils veulentque leur progniture trouve du tra-vail. Lcole propose par ailleursdes cours dinitiation dautres

    langues, comme langlais, le corenet le vietnamien. Toutefois, lorsquede nouveaux venus lui demandentdes conseils, Sochea avoue quilles oriente tous dans la mme direc-tion. Je leur dis de jeter un il auxinvestissements des autres pays. AuCambodge, lessentiel de largent vientde la Chine.

    Lempire du Milieu est devenuun investisseur de premier plan.Depuis 2005, les investissementsvalids par des entreprises chinoisesau Cambodge ont atteint plus de8milliards de dollars [6,2milliards

    deuros] selon le Conseil cambod-gien de linvestissement (CIB)un chiffre largement suprieuraux sommes places en Core,

    deuxime pays pour les inves-tissements chinois. Ilne sagit toutefois que

    dun aperu partiel desprojets chinois au Cam -bodge, autrement dit ceux

    qui bncient dexonra-tions scales et dautres

    mesures incitatives. Le chireociel ne tient pas comptenon plus des investisseurs

    qui oprent dans les zones

    au Cambodge. Cest grce cescentres installs dans le mondeentier que la Chine cherche renforcer son rayonnement.Munyrith a appris le mandarinpour communiquer avec seshomologues chinois.

    Depuis 2010, lInstitut Confuciusde Phnom Penh propose des coursde langue aux fonctionnaires cam-bodgiens. Parmi les tudiantsadultes, on compte des bureau-crates et des membres du gou-vernement. Aujourdhui, le chinoisnest plus seulement la langue desaaires, prcise Munyrith, cest aussicelle de la politique.

    Une autorit accepte. Dansce domaine, plusieurs vnementsrcents ont montr que la Chineet le Cambodge avaient souventdes discours similaires. Les di-rends territoriaux en mer de Chinemridionale ont cr des tensions

    dans la rgion. En 2012, leCambodge a pr-

    sid lAsso ciationdes nations de lAsie du

    Sud-Est (Asean), et le paysa t accus de sallier la Chineaux dpens de ses voisins lors desdbats sur ce litige maritime.

    Pour Pavin Chachavalpongpun,professeur luniversit de Kyoto,la tendance des Cambodgiens vouloir apprendre le chinois retelinuence croissante de la Chine.

    Cest le signe que la populationaccepte lautorit chinoise dans largion, arme Pavin, voquantlutilisation par la Chine du softpower [le pouvoir dinuence,concept dvelopp par le profes-seur de sciences politiques am-ricain Joseph Nye] dans la rgion.Lorsquon apprend la langue dunautre pays, cela signie que lon com-prend et accepte la position domi-nante de ce pays. Nanmoins,comme la montr la polmiquede lAsean, les largesses chinoisesau Cambodge impliquent bel etbien des obligations.

    Pour les nombreuses personnesqui commencent apprendre lemandarin, cela reprsente tou-tefois la promesse dun avenirengageant. Pendant ce temps, la Jing Fa Chinese School, lescours de laprs-midi se sont ter-mins. Kaing Mengty, g de 26ans,range ses livres avant de retour-ner vendre des produits fabriqusen Chine sur un march local.

    Je ne sais pas grand-chose sur laChine, avoue-t-il. Je ne connais quemon pays. Et les Cambodgiens peu-vent gagner de largent grce au com-merce avec la Chine.

    Irwin LoyPubli le 22 mai

    (A propos de The Diplomat,lire notre rubrique La source de la semaine p.50)

    asie

    Cambodge.Apprendre le chinois: un mustAlors que linuence conomique et politique de la Chine explose, les plus ambitieux des Cambodgiens apprennent le mandarin.

    conomiques spciales du pays oudes petits projets approuvs par lesautorits provinciales.

    Ces accords souvent obscurssont loin dtre transparents auxyeux de la population. Par ailleurs,contrairement aux investissementsvenus du monde occidental, per-sonne nexige de contrler ou desuperviser quoi que ce soit, ce quiarrange bien le gouvernementcambodgien.

    La langue de la politique. PourChea Munyrith, lomniprsence dela Chine au Cambodge lheureactuelle contraste fortement aveclpoque de son enfance, dans lesannes 1980, aprs la chute desKhmers rouges. Il se souvient quesa grand-mre, dorigine chinoise,avait trs peur de parler son dia-lecte, le teochew [parl dans le sudde la Chine, rgion dorigine dunepartie importante des populationsqui ont migr vers lAsie du Sud-Est au dbut du XXe sicle], cestpourquoi elle na jamais pris la peinede le lui apprendre.

    Elle ma dit que nous tions khmerset que nous devions dsormais parlercette langue, se rappelle-t-il. Ellene voulait pas voquer ses origineschinoises.

    Maintenant quil est adulte,Munyrith estime toutefois que lechinois fait partie intgrante de sontravail. Il est codirecteur du pre-mier Institut Confucius qui a ouvert

    Au Cambodge,lessentiel de largent vient de la Chine

    Dessin de Xiaparu dans Caijing, Pkin.

    D'UN CONTINENT L'AUTRECourrier international n 1180 du 13 au 19 juin 2013 15

  • ASIE

    Tehelka New Delhi

    M ehmeet Sayeed a fait son apparitionsur la scne musicale cachemirie en2001 alors que la valle tait dans lesares dun sparatisme dchan. Elle navaitpas 20ans quand elle sest soudain retrou-ve catapulte des scnes universitairesaux grandes salles de concert et surRadio Kashmir [principale radio,contrle par le gouvernementindien et qui a contribu la vita-lit de la musique traditionnellede la rgion] tout a en unan. Dans les annes qui ontsuivi, elle a enregistr desalbums et tourn des clips dont certainsont fait fureur. MehmeetSayeed na jamaist confronte des critiques publiques,des menaces dextrmistes ou des fatwas,mme si elle a eu sa part dintimidations:de temps en temps, un coup de tlphonelui ordonnait darrter de chanter. Mesparents se sont occups de tout. Je nai pas eu minquiter. A 21ans, MehmeetSayeed

    sest fait une place parmi les chanteusestablies de la valle. ShamenaDev, pousede Ghulam Nabi Azad, le ministre de la Santde lEtat, qui est galement une chanteuseaccomplie, cone: Les menaces, cest la rou-tine. Il faut les ignorer.

    Une russite inoue. Mehmeet afait du chemin: elle est devenue

    une chanteuse clbre au Cache -mire et va mme jusqu jouer lesvedettes dans certains de sesdisques. Dans ses DVD, on la voit

    tourbillonner autour dequelques arbres, chantant enplay-back pendant quun essaim

    de belles jeunes lles en costume cache-miri dansent sur fond de prairies ver-doyantes. Ses albums se sont vendus parmilliers dans la valle, une russite inouepour un artiste cachemiri, et ils sont ga-lement trs apprcis par la diaspora. Dsle dbut des annes 2000, elle tait trsdemande par les radios et les tlvisionslocales et se produisait galement lors

    dvnements culturels ociels et nonociels, o son interprtation de la posiesoue et du rpertoire local de lamourcourtois ravissait le public. Tout cela unepoque o le sparatisme plongeait leCachemire dans le chaos.

    Pathos et simplicit. Mehmeet a publitrois albums. Mais cest son interprtationmouvante des pomes de HabbaKhatoon,dans lesquels cette reine du Cachemire auXVIe sicle exprime le chagrin que lui causelexil de son poux, le roi Yusuf Shah Chak,qui lui a donn son identit. ChanterHabbaKhatoon est devenu un rite de pas-sage pour tout jeune chanteur cachemiri,

    et Mehmeet a russi avec brio. Ellerend le pathos et la simplicit de

    Habba dans la plus pure tradi-tion locale tout en apportantune touche de sensibilit

    moderne. Lune de ces chan-sons est Gah Choon Pevan

    Ghati, Aki Lati Yiham Na(Je vois ton halo dans

    lobscurit, ne reviendras-tu pas vers moi au moinsune fois?). Mehmeet estgalement la premire chan-

    teuse cachemirie avoir montun groupe de rock, qui sap-

    pelle Immersion. Elle chante et joue desclaviers et de la te.

    Daprs Mehmeet, le Cachemire ne manquepas despace cratif pour les artistes. Jaireu quelques menaces, mais cest normal. Elleestime que les groupes de lles qui ont arrtde chanter [en fvrier dernier] la suitedune fatwa devraient continuer. Il y a tel-lement de groupes au Cachemire! Et puisce genre de chose arrive, on nest pas cens yprter grande attention. Jai essay de briserle corset qui emprisonne les chanteuses cache-miries et dlargir mon horizon, ajoute-t-elle.Elle chantera bientt dans un lm deBollywood aux cts de Rahat Fateh Ali Khan[chanteur pakistanais, neveu de Nusrat FatehAli Khan]. Mon objectif est de faire mieuxconnatre la musique de ma rgion et de la fairesortir du Cachemire.

    Riyaz Wani, Srinagar (Inde)Publi le 24mai

    Courrier international no 1180 du 13 au 19 juin 2013

    G eet veut dire la chanson dans lesens dune chanson de gestecomme La Chanson de Roland. Legeet est une faon lyrique de raconterune pope. Parmi ces chants, la BaghavadGita, que lon appelle la Gita (le geet)pour faire court, est lun des rcits les plusclbres de lhindouisme (compose entreleVe et leIIe sicle avant notre re). Moinsloigne de notre poque, la collectiond