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2011 - n° 2 (1) Découverte botanique de la région du Lautaret et du Briançonnais S. Aubert, S. Bec, Ph. Choler, R. Douzet, R. Michalet, W. Thuiller La Galerie de l’Alpe Eléments d’écologie alpine à l’usage des curieux, amateurs et étudiants illustrés Les cahiers du Lautaret Partie 1

Découverte botanique de la région du Lautaret et du ... · Les premiers stages de botanique au Lautaret ont été organisés par le professeur Marcel Mirande, successeur de J.-P

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2011 - n° 2 (1)

Découverte botanique de la région du Lautaret

et du Briançonnais

S. Aubert, S. Bec, Ph. Choler, R. Douzet, R. Michalet, W. ThuillerL

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Eléments d’écologie alpineà l’usage des curieux, amateurs et étudiants

illustrésLes cahiers

du Lautaret

Partie 1

Page 2: Découverte botanique de la région du Lautaret et du ... · Les premiers stages de botanique au Lautaret ont été organisés par le professeur Marcel Mirande, successeur de J.-P

Le nord des Hautes-Alpes dispose d’un environnement de haute montagne remarquable tant par sa beauté que par sa biodiversité.

Ce cahier illustré du Lautaret, N°2 d’une série, s’adresse à tous ceux qui souhaitent découvrir les richesses botaniques de cette région. Il est composé de deux livrets :

• La partie 1. rassemble des éléments d’écologie alpine (climat, sols, adaptations des plantes, etc.) qui permettent de comprendre la flore de la région et les grands types de végétation que l’on peut y rencontrer;

• La partie 2. décrit 18 petites excursions de découverte botanique, avec les cartes de situation, les éléments remarquables de la flore et de la végétation (en lien avec les éléments présentés dans la première partie du cahier) et des listes de plantes rencontrées sur chaque site.

Ce livret s’adresse également aux étudiants qui suivent les stages de botanique et d’écologie alpines organisés chaque année par les personnels de l’université Joseph Fourier.

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décrits dans ce cahier

Sommaire

Un siècle de stages botaniques au Lautaret La région du Lautaret/Briançonnais 5

Une région de haute montagne 5Le géographie humaine et économique 6La géologie 6Le climat 8La flore: origine et diversité 9

L’exploration botanique de la région 9Une diversité remarquable 13Des recherches en cours 17

La protection et la conservation des espèces et des milieux 22

Les facteurs de l’environnement 26Les facteurs abiotiques: température, eau, etc. 26Les facteurs biotiques: compétition et facilitation 30Les impacts anthropiques 31Les adaptations des plantes alpines 32

Un aperçu de la végétation 35Les écosystèmes forestiers 35La végétation asylvatique des étages collinéen à subalpin 43

Etage collinéen et montagnard inférieur 44Etage subalpin de la région du Lautaret 48

Etage alpin du Galibier 60

Bibliographie 73

Index des groupements végétaux 77

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Fig. 1 (page opposée). Image du stage organisé par Rolland Douzet en 2009, ici dans le secteur du col du Lautaret. Photo: S. Bec

3

Un siècle de stages botaniques au LautaretLe col du Lautaret (2058 m) est connu depuis longtemps comme un haut lieu de la botanique. Dominique Villars, le célèbre botaniste haut-alpin, y herborisait déjà à la fin du 18ème siècle (Villars 1786-89) et il a été le premier à reconnaître sa richesse botanique. Depuis la fin du 19ème siècle, le col est devenu une attraction touristique, notamment grâce à la route nationale qui relie Grenoble et Briançon (et l’Italie via le col du Montgenèvre) et qui dessert la Savoie via le col du Galibier à plus de 2500 m. C’est pourquoi le professeur Jean-Paul Lachmann de l’Université de Grenoble décida d’y installer un jardin botanique (ouvert en 1899 puis transféré à son emplacement actuel en 1919) avec comme vocation l’accueil du public, la recherche sur les plantes et les écosystèmes alpins ainsi que la formation des étudiants (Aubert et al. 2005). Chercheurs, botanistes, étudiants et amateurs de flore alpine venus du monde entier s’y retrouvent dans un lieu unique.Les premiers stages de botanique au Lautaret ont été organisés par le professeur Marcel Mirande, successeur de J.-P. Lachmann. En juillet 1914, après les examens du certificat de botanique, il emmène un groupe d’étudiants pour une excursion au Lautaret de quelques jours (Mirande 1915). Dans ce petit groupe figurent Jean Breton et Jean de La Brosse, deux étudiants passionnés d’alpinisme, et c’est le 16 juillet, au Lautaret, qu’ils sont appelés sous les drapeaux. Ils mourront au combat, respectivement le 7 septembre 1914 et le 2 mai 1917. Plus tard, dans les années 1950, les stages de botanique du Lautaret prennent de l’importance. Deux stages sont organisés chaque année, dont un à destination des élèves des écoles normales supérieures. Jusqu’en 1960, l’encadrement est assuré par les chercheurs sur place et à Robert Ruffier-Lanche (Fig. 2), chef de culture du Jardin et excellent botaniste. A partir de 1960, Gérard Cadel et Jean-Claude Gilot, assistants à l’université, prennent en main l’organisation des stages: ils séjournent sur place durant l’été, écrivent un guide (Cadel et Gilot 1964) et participent à l’entretien du Jardin alpin tout en conduisant des recherches sur les écosystèmes forestiers (Cadel et Gilot 1963; Gobert et al. 1966; Cadel 1980). Plus tard, cette pratique du terrain est victime du déclin de la botanique au sein de l’université de Grenoble.

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Le stage encadré par les enseignants-chercheurs de l’université a été arrêté en 1982 et repris dans les années 1990 à l’initiative d’Olivier Manneville, puis de Philippe Choler et de Richard Michalet. C’est Rolland Douzet, botaniste au Jardin alpin, qui est en charge de l’organisation du stage depuis 2000 (Fig. 1). Ce stage est généralement organisé la première semaine de juillet et il est ouvert aux étudiants de Grenoble et d’autres universités ainsi qu’aux enseignants en formation permanente1. Il a pour objectif de présenter la flore et la végétation de la région du Lautaret et du Briançonnais. Il s’organise autour de sorties sur le terrain pour découvrir les paysages de cette région, les différentes communautés végétales et les espèces qui les composent, depuis l’étage collinéen jusqu’à l’étage alpin, des pelouses à affinité steppique du Queyras aux crêtes élevées du Galibier.Le cahier « Découverte botanique de la région du Lautaret et du Briançonnais » comporte deux parties. Cette première partie vise à mettre à disposition des étudiants et du public les éléments nécessaires à la compréhension de la répartition des communautés végétales de la région du Lautaret et du Briançonnais. Il complète les guides et les livrets existants (Remy et Cirio 1988; Remy 1992a; Remy 1998; Parc national des Ecrins 2003, 2006; Chas et al. 2006) en incluant notamment des informations issues des travaux de recherche menés dans la région par l’université de Grenoble et par le CNRS (laboratoire de botanique devenu aujourd’hui Laboratoire d’Ecologie Alpine). La deuxième partie décrit 18 petites excursions de découverte botanique, avec des cartes de situation, les éléments remarquables de la flore et de la végétation (en lien avec les éléments présentés dans cette première partie) ainsi que les listes de plantes rencontrées. Il est également complété par une banque d’images plus exhaustive disponible sur internet (http://www.flickr.com/photos/stationalpinejosephfourier/collections/).

4

Fig. 2. Une partie de la promotion naturaliste de l’Ecole Normale

Supérieure de Saint-Cloud en juillet 1956. De gauche à droite : Jean Valérien, Robert Ruffier-Lanche

(encadrement du stage), Jean Boulin, René Monéger et Pierre Lamarque.

Manquent à l’appel : Gilbert Boillot qui prend la photo ainsi que Georges

Biondi et Claude Hartmann qui sont venus en août. Photo: G. Boillot

1Aujourd’hui, deux stages plus courts, comprenant une partie du contenu de ce stage, concernent les étudiants de Master en Environnement et les

étudiants de Master en Enseignement des sciences de la vie et de la terre

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La région du Lautaret/BriançonnaisUne région de haute montagneLe Lautaret et le Briançonnais, auxquels nous adjoignons ici une partie du Queyras, sont typiquement des régions intra-alpines de haute montagne (Figs. 3-4). L’altitude moyenne y est supérieure à 1800 m et les records européens foisonnent : le Queyras est la plus haute vallée habitée, Saint-Véran (2040 m) le plus haut village d’habitat permanent et Briançon (1326 m) la plus haute ville. Après le Mont-Blanc, il s’agit du second massif des Alpes françaises par l’altitude, avec des sommets avoisinant ou dépassant 4000 m : la Barre des Ecrins (4102 m), la Meije (3983 m) ou le Pelvoux (3946 m). Le Briançonnais est limité au nord par la crête qui va du Grand Galibier (3228 m) au Mont Thabor (3178 m) et qui le sépare de la Haute-Maurienne ; il est formé de profondes vallées glaciaires en étoile autour de Briançon. Elles correspondent au bassin supérieur de la Durance et de ses principaux affluents: la Guisane, la Clarée, la Cerveyrette et le Guil. La partie la plus au nord-ouest, au delà du col du Lautaret (2058 m), est rattachée à l’Oisans et au bassin du Drac et de l’Isère par la vallée de la Romanche. Le Queyras correspond au bassin versant du Guil ; il est isolé et accessible par route uniquement par les étroites gorges du Guil (seul passage en hiver), le col de l’Izoard (2361 m), vers Cervières puis Briançon, et le col Agnel (2746 m) vers Pontechianale en Italie.

Fig. 4. Carte de la région étudiée

5

Fig. 3. Carte du relief de la France, avec la position de la région étudiée

Le Bourgd'Oisans La Grave

Villar d'Arène

BELLEDONNE

TAILLEFERRomanche

Guisane

CHAMPSAUR

VALGAUDEMAR

VALBONNAIS

Briançon

Col duLautaret

La Meije(3987 m)La Barre des Ecrins (4102 m)

GRANDES ROUSS

ES

CERCES

ISERE

SAVOIE

HAUTES-ALPES

Romanc

heGrenoble Grand

Galibier(3228 m)

Guil

Guillestre

L’Argentière-la-Bessée

Maurienne

Clarée

Saint-CrépinParc Naturel Régional

du QUEYRAS

Col del'Izoard

Parc Nationaldes ECRINS

Fournel

Durance

Ville-Vieille

DEVOLUY

OISANS

CerveyretteLe Pelvoux (3946 m)

Le Mont Thabor(3178 m)

10 Km

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La géographie humaine et économiqueLe département des Hautes-Alpes (préfecture : Gap) est un des départements les moins peuplés de France (132 476 habitants en 2007) avec environ 24 habitants au km2 (<5 pour le Queyras) (Tableau 1). Les principales agglomérations du Briançonnais et du Queyras sont Briançon (la sous-préfecture), Guillestre et l’Argentière-la-Bessée. Du point de vue économique, on observe de nos jours le passage d’une économie agricole vers une économie orientée vers le tourisme estival et surtout hivernal avec des complexes touristiques comme Serre-Chevalier, Montgenèvre ou Puy-Saint-Vincent (Tableau 1). On note une stabilisation durant la dernière décennie avec une baisse de l’exode rural dans le Queyras et une augmentation de la population dans toutes les zones. Le nombre d’exploitants agricoles a cessé de chuter (sauf dans le Queyras) et le nombre de nuitées en hôtels/gîtes est en légère baisse, surtout à cause du changement des pratiques touristiques (déclin du tourisme estival en montagne). Il faut souligner le nombre très élevé de résidences secondaires par rapport au logement global qui favorise la spéculation immobilière et complique souvent le maintien de la population locale.

Briançonnais Queyras Hautes-AlpesPopulation

Habitants (en 2007) 32 354 2470 132 476Densité (hab./km2) 21,2 4,6 23,9Evolution 1990-2007 +37 % +10,4 % +17 %Au dessus de 60 ans 22 % 21,6 % 27,2 %

AgricultureExploitants agricoles 123 57 2129Variation 1999-2007 +2,5 % -17 % +3,4 %

TourismeKm de pistes de ski 440 271 1111Capacité en chambres 1500 362 4198Emplacements de camping 2565 686 12127Résidences secondaires 60 % 71 % 45 %Touristes/km2 (moyenne) 60 46 45

Tableau 1. Evolution socio-économique du Briançonnais et du Queyras (données INSEE)

La géologieLa géologie du Briançonnais est complexe (Debelmas et al. 1983) car la région se situe à la limite entre les massifs alpins externes et internes (Figs. 5-6).

6

Fig. 5 (page opposée, en haut). Carte géologique simplifiée des Alpes

occidentales (d’après Gidon 1977)

Fig. 6 (page opposée, en bas). Panorama géologique du Galibier

(photo Francou) et coupe interprétative (J. Debelmas)

Parmi les plus grandes attractions touristiques des Hautes-Alpes, se trouvent les maisons du Parc national des Ecrins en Briançonnais et Vallouise (>170000 visiteurs annuels), Chateau Queyras (25000 visiteurs annuels), le Jardin alpin (15-18000 visiteurs annuels) et la ville de Briançon (16 000 visiteurs annuels). Données du Comité Départemental du Tourisme des Hautes-Alpes (2010).

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Belle

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Sept

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EcrinsPelvoux

Chaillol

Taillefer

LA MURE

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GRENOBLE

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Trièves

ChampsaurDévoluy

BochaineDiois

GAP

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Ambin

Queyras

MONTVISO

BOURGST MAURICE

Maurie

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Tarenta

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EMBRUNParpaillon

Remollon

Embrunais

Dora Maira

ArgenteraMercantour

SISTERON

Baronnies

DIE

CHAMBERY

Ambin

Bas D

auph

iné

BRIANCON

BARCELONNETTE

25 km

BARRE DESECRINS

coupe

Nappes de Flyschà helminthoïdesMassifs cristallinsinternesZone des Schisteslustrés piémontais

Zone de Gondran

DOMAINE PIEMONTAISET AUSTRO-ALPIN

DOMAINE BRIANCONNAIS(massifs internes)

Zone de la Vanoise et d'Acceglio

Zone briançonnaise (etpréalpes médianes rigides)

Zone subbriançonnaise (etpréalpes médianes plastiques)

DOMAINE DAUPHINOIS(massifs externes)

Zone de Tarentaise, de Ferretet du Nielsen

Zone ultradauphinoise etultrahelvétique

Zone dauphinoise (Trias, Lias etDogger de la couverture des massifs cristallins externes)

Massifs cristallinsexternes

DOMAINES EXTRA ALPINSZone molassiquepérialpine

Jura

col du Lautaret

Massifs subalpins (Préalpes)

du Norddu Sud

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Fig. 8 (page opposée). Carte de végétation de la France - Gap

1/200 000 (Gobert et al. 1966) © CNRS. Cette carte a été réalisée

au laboratoire de biologie alpine de l’université de Grenoble, dirigé par

Paul Ozenda. Il s’agit de l’une des 64 cartes construites sur le même modèle pour couvrir l’ensemble de la France

métropolitaine. Dans un même étage de végétation (collinéen, montagnard, subalpin,

alpin; voir plus loin Fig. 40), les types de roche (calcaire/silice) et

de sols, l’exposition (adret/ubac) et l’altitude sont les principaux facteurs

qui conditionnent la végétation. Une série de végétation est définie comme l’ensemble des formations

végétales (pelouses, landes, forêts) qui conduisent, en absence d’intervention

humaine, à la mise en place d’une forêt « en équilibre » avec le sol et le

climat (forêt dite climacique) (voir plus loin Fig. 83 pour l’exemple de la série du pin cembro). Chaque série est définie par l’essence forestière qui est le stade ultime de la dynamique végétale

et par la composition floristique de son sous-bois en fin de succession

végétale. Chaque série est représentée par une couleur déclinée selon trois

teintes correspondant aux stades pelouse, lande (et/ou broussailles)

et forêt.Cette carte illustre en particulier

les différences climatiques entre les Alpes externes et les Alpes internes.

Le long d’un transect Ouest/Est qui correspond à un gradient de sécheresse

(l’influence atlantique laissant la place à la tendance continentale,

Figs. 7-8), on observe des différences majeures. Entre 900 et 1500 m

(étage montagnard), les hêtraies (en bleu) sont remplacées par des pinèdes

à pin sylvestre (en violet), et plus haut en altitude (étage subalpin), les sapinières (en bleu foncé) et les forêts d’épicea (en gris) laissent la place au

mélézin (en marron) et à la cembraie (en rouge foncé)

BRIANÇON

GRENOBLE

GAP

Col duLautaret

HAUTES-ALPES

ISERE

SAVOIE

BRIANÇON

GRENOBLE

GAP

Col duLautaret

HAUTES-ALPES

ISERE

SAVOIE

BRIANÇON

GRENOBLE

GAP

Col duLautaret

HAUTES-ALPES

ISERE

SAVOIE

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collinéen

Bois, arbres isolés

Lande et pelouse

montagnard subalpin alpin

Briançon

La Grave

Villar d’Arène

Mont Dauphin

L’Argentière-la-Bessée

Bourg d’Oisans

Saint-Crépin

Col duLautaret

Col duGalibier

Val-des-Prés

Fournel

10 Km

Le Monêtier-les-Bains

Figs. 9-12. Cartes bioclimatiques des Alpes (données de MétéoFrance, réalisation: Ph. Choler). En noir, la zone couverte par la carte de la Fig. 8.9. Précipitations estivales moyennes;10. Continentalité hydrique (angle de Gams);11. Continentalité thermique (différence des températures des mois de juillet et janvier); 12. Carte du relief de la région

chênepubescent

BRIANÇON

GRENOBLE

GAP

Col duLautaret

HAUTES-ALPES

ISERE

SAVOIE

pin sylvestre hêtre sapin épicéa mélèze cembro pin à crochets

Fourrés d’aulnes verts

Série de végétation

Etage

sur silice

sur calcaire

neige et glaciers

9 8

10

11 12

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opposées (Saxifraga oppositifolia, Figs. 18, 199), le silène acaule (Silene acaulis, Fig. 49), la renouée vivipare (Polygonum viviparum), la renoncule des glaciers (Ranunculus glacialis, Figs. 33, 54), etc. A ce contingent majoritaire s’ajoute une composante steppique qui représente, dans le Briançonnais et le Queyras, près de 4,5 % de la flore. Il s’agit de plantes qui se rencontrent majoritairement dans les steppes de l’Asie centrale et qui ont trouvé dans le Briançonnais un climat favorable, comme l’Astragale queue-de-renard (Astragalus alopecurus, Fig. 95), l’astragale en vessie (Astragalus vesicarius), le stipe capillaire (Stipa capillata), la Bartsie glanduleuse (Odontites glutinosus), etc.C’est dans la région de Guillestre et de l’Argentière-la-Bessée que se trouve la limite septentrionale des dernières espèces vraiment méditerranéennes qui remontent la vallée de la Durance, comme l’arbre à perruques (Cotinus coggygria), l’aristoloche pistoloche (Aristolochia pistolochia) ou la stéhéline douteuse (Staehelina dubia, Fig. 78).Enfin, la région est riche en espèces endémiques qui représentent environ 3% de la flore. Certaines ont un territoire très restreint, en particulier l’androsace de Briançon (Androsace adfinis subsp. brigantiaca, Figs. 13, 194), le buplèvre alpin (Bupleurum alpigenum), le sainfoin de Briançon (Hedysarum brigantiacum), le prunier de Briançon ou marmottier (Prunus brigantina, Fig. 21), la potentille du Dauphiné (Potentilla delphinensis, Fig. 20) ou le chou de Richer (Coincya richeri).Certaines espèces ont une répartition remarquable d’un point de vue biogéographique et historique. C’est le cas du genévrier thurifère (Juniperus thurifera, voir Fig. 82) qui est abondant dans la commune de Saint-Crépin. Il correspond probablement aux vestiges de l’expansion passée d’une forêt xérothermophile (de climat sec et chaud) qui existait à l’ère tertiaire et que l’on retrouve actuellement au Maroc (Fig. 19). Il en va de même pour la bérardie (Berardia subacaulis) que l’on rencontre dans les éboulis calcaires (Fig. 15). Il s’agit d’un genre

1

2

3

Fig. 17 (à gauche). Les voies de colonisation de l’arc alpin, après le retrait des glaciers il y a environ 10 000 ans. Les principales influences sont issues des régions méditerranéenne (1, exemple des campanules), himalayenne (2, exemple des gentianes et des primevères) et arctique (3, exemples de Saxifraga oppositifolia et Salix reticulata). Dans ce dernier cas, l’alternance des glaciations/déglaciations a contribué à de nombreux échanges floristiques qui sont à l’origine de nombreuses espèces dites arctico-alpines, c’est à dire communes aux Alpes et aux régions arctiques

Fig. 18 (ci-dessous). Répartition actuelle de Saxifraga oppositifolia en Europe, une espèce dite arctico-alpine. Pendant les glaciations, elle occupait les régions hachurées dépourvues de glace

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favorables pour l’espèce, en plus des aires de présence observées). Dans un deuxième temps, ces modèles (dits de niche climatique) permettent de prévoir l’évolution de ces aires de distribution en fonction des scénarios de changement climatique qui prévoient un réchauffement de 2 à 6 °C d’ici à la fin du 21ème siècle (Thuiller et al. 2005, Thuiller 2007). Selon les espèces, les réponses prévues sont différentes (Figs. 24-35). Ainsi, certaines semblent peu vulnérables, car même si leur aire de distribution est modifiée, ces espèces disposeront de nouvelles aires potentielles, par exemple plus haut en altitude (cas du lis martagon, Figs. 30-32). Pour de nombreuses espèces, par exemple le sapin (Figs. 24-26) ou le mélèze (Figs. 27-29), les modèles prédisent un déplacement de leur aire potentielle vers l’Est où les altitudes plus élevées offriront des conditions climatiques potentiellement favorables. Les Alpes externes (à l’Ouest) seront les plus touchées par ce déplacement d’aires (cas du sapin dans la Chartreuse par exemple). D’autres espèces devraient subir une très forte réduction de leur aire de répartition potentielle. C’est en particulier le cas des espèces de très haute altitude qui n’auront pas la possibilité de « migrer » vers les hauteurs (cas de la renoncule des glaciers, Figs. 33-35).

Fig. 23. Diversité des espèces végétales rencontrées aux étages subalpin et

alpin dans l’arc alpin. Cette carte est issue des résultats du programme de

recherche IntraBioDiv qui a rassemblé une vingtaine de laboratoires et

d’institutions botaniques et mobilisé plus de 70 botanistes européens pour

la réalisation de l’échantillonnage. Chaque motif coloré représente le

nombre d’espèces dans un carré de 25 km de côté. La région du Lautaret

(étoile)/Briançonnais apparaît comme une des zones des Alpes où la biodiversité est la plus forte. Les résultats du projet sont en cours de

publication (Taberlet et al. soumis). © Consortium IntraBioDiv

NICE

GRENOBLE BRIANÇON

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Sapin (Abies alba)Actuellement, cette essence se trouve essentiellement dans les Alpes externes (ouest) à l’étage montagnard (sapinières et hêtraies-sapinières). Elle est rare dans les Alpes internes (voir plus loin). La projection prédit pour 2100 un décalage vers ces Alpes internes (parties Est de la carte passant du rose au vert) ainsi qu’une remontée en altitude.

CHAMBERY

GRENOBLE

GAP

Mélèze (Larix decidua)Cette essence pionnière se rencontre majoritairement à l’étage subalpin dans les Alpes du sud et dans les vallées internes des Alpes du nord (surtout en ubac), en lien avec sa préférence pour les forts ensoleillements et les sols frais. La projection pour 2100 montre un resserrement de son aire dans les Alpes du sud, avec une élévation en altitude.

CHAMBERY

GRENOBLE

GAP

CHAMBERY

GRENOBLE

GAP

CHAMBERY

GRENOBLE

GAP

Projection pour 2100(probabilité de présence, avec un scénario intermédiaire, A2)

50 Km

Distribution actuelle observée (points noirs) et distribution potentielle modélisée (couleurs)

probabilité de détection

20

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Les prédictions des modèles doivent être confrontées à un suivi de terrain sur le long terme pour déceler les espèces qui répondent d’une façon qui diffère des prédictions. Un volet de ce projet consiste aussi à réaliser une étude génétique sur la totalité des espèces de l’arc alpin, en incluant la France, la Suisse, l’Italie et l’Autriche (projet PhyloAlp). Après un échantillonnage exhaustif (Fig. 36) et un séquençage d’une partie du matériel génétique, des reconstructions phylogénétiques en collaboration avec des bioinformaticiens permettront de mieux comprendre l’histoire évolutive des espèces qui ont colonisé les Alpes.

La protection et la conservation des espèces et des milieux

Les espèces protégées

Au niveau de la réglementation française, la loi du 10 juillet 1976 a donné lieu à l’établissement d’une liste des espèces végétales protégées sur l’ensemble du territoire métropolitain (arrêté du 20 janvier 1982, modifié par les arrêtés du 15 septembre 1982, puis du 31 août 1995). L’article 1er modifié en 1995 stipule que « afin de prévenir la disparition d’espèces végétales menacées et de permettre la conservation des biotopes correspondants, sont interdits, en tout temps et sur tout le territoire, la destruction, la coupe, la mutilation, l’arrachage, la cueillette ou l’enlèvement, le colportage, l’utilisation, la mise en vente, la vente ou l’achat de tout ou partie des

Fig. 37. Carte des espaces protégés du nord des Hautes-Alpes

La Grave

Villard'Arène

Briançon

Col duLautaret

La Meije (3987 m)

La Barre des Ecrins (4102 m)

ISERE

SAVOIE

HAUTES-ALPES

Guillestre

L’Argentière-la-Bessée

Saint-Crépin

Ville-Vieille

Le Pelvoux (3946 m)

Parc national des Ecrins (Zone coeur)

Parc national des Ecrins (Zone optimale d’adhésion)Parc naturel régional du Queyras

Réserve naturelle nationale

Réserve naturelle régionale

Réserve biologique

Zones Natura 2000 (Directive Habitats)

22

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26

Les facteurs de l’environnementLes facteurs abiotiques

La température

La température baisse en moyenne de 0,6°C lorsqu’on s’élève de 100 m, ce qui explique l’étagement de la végétation (Fig. 40). Les forêts de conifères sont localisées aux plus hautes altitudes forestières (et aux plus hautes latitudes, où elles constituent les taïgas), en relation avec la plus forte résistance au froid des conifères par rapport aux feuillus (des exceptions existent, par exemple chez les bouleaux dont certaines espèces arctiques peuvent résister à des températures de -40°C). La Fig. 40 montre également l’importance de l’exposition: les versants exposés au sud (adrets) reçoivent plus de chaleur que les versants exposés au nord (ubac), ce qui explique la remontée des étages de végétation sur les adrets.La température agit tout d’abord par les valeurs extrêmes qui limitent le développement de certaines espèces non adaptées au gel qui peut survenir durant toute l’année (-12°C le 2 juin 2001 au Jardin alpin

Fig. 40. Etagement de la végétation dans les Alpes de la région

briançonnaise. Les versants exposés au sud (adrets) ont souvent été déboisés depuis des siècles pour les besoins de

l’agriculture (cultures en terrasses, pâturages, voir par exemple la

fig. 51). Les formations végétales des différents étages sont décrites plus loin

Figs. 41-43. Opposition de versant sur la montagne de Chaillol (2200-2739 m).

Les conditions sont très différentes (enneigement,

température, eau) de même que la végétation:

pelouses à seslérie bleue (adret) et landes à myrtilles

au feuillage rouge (ubac). Photos: S. Aubert

Adret Ubac

1700 m

2400 m

1100 m

3000 m

1500 m

2200 m

900 m

ADRET

Sud

Nord

2900 m UBACEtage NIVAL

Mousses et lichens

Etage ALPINPelouses alpines

Etage SUBALPINForêts de résineux

Etage MONTAGNARDForêts mixtes

Etage COLLINEENForêts de feuillus

(sud) (nord)

octobrejuinjanvier

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Les effets anthropiquesLes activités humaines (déforestation, agropastoralisme) ont façonné les paysages du Briançonnais depuis le Néolithique (Girel et al. 2010). Il est très probable que les sapinières internes ont été particulièrement touchées par ces perturbations, ainsi que les forêts de pins cembro aujourd’hui peu représentées dans la région. L’absence de forêt est très visible au Lautaret et dans toutes les vallées avoisinantes (Figs. 38, 51).Par ailleurs, certains types de forêt ont été fortement favorisés par les pratiques traditionnelles, notamment le mélézin qui permet un pâturage en sous-bois et fournit un bois imputrescible de qualité.La déforestation a permis de générer des prairies montagnardes et subalpines dont la richesse floristique est largement conditionnée par les activités agricoles (fauche, pâturage etc.), leur abandon entraînant un embroussaillement et une perte de biodiversité (Jouglet 1999). Ainsi, des mesures agri-environnementales gérées par le Parc national des Ecrins et par le PNR du Queyras encouragent les agriculteurs à continuer la fauche des prairies pour favoriser le maintien de leur biodiversité.

31

Fig. 49 (à gauche). Une alchémille (Alchemilla alpigena) profite du microclimat d’un coussin de silène acaule (Silene acaulis) qui colonise les éboulis granitiques du Combeynot. Au fond, le Grand Galibier. Photo: S. Aubert

Fig. 50 (ci-dessus). Température à la surface d’un coussin de silène acaule (Silene acaulis) comparée à la température de l’air mesurée à 2 m du sol (in Körner 2003)

2 mètres de hauteur

Surface du coussin

9 12 15 18Heure de la journée (été)

0

5

20

15

10

25

Tem

péra

ture

(°C)

Fig. 51. Vallée de la Haute Romanche, commune de La Grave avec ses hameaux Ventelon, Les Terrasses, Les Hières. L’adret de la vallée est sculpté de terrasses qui étaient labourées et cultivées de céréales jusqu’à 2000 m encore au début du 20ème siècle (voir Girel et al 2010). Photo : S. Aubert

10 p. opp.Ces travaux publiés dans une revue prestigieuse (Nature) ont rassemblé des chercheurs issus de plusieurs pays et travaillant sur plusieurs massifs montagneux du monde. Parmi les laboratoires concernés figure le Laboratoire d’Ecologie Alpine de Grenoble dont une partie des observations ont été menées dans les secteurs du col du Galibier et du col Agnel (Queyras)

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encore plus extrêmes, ce qui explique que ces organismes colonisent les milieux les plus froids (records d’altitude) et les plus secs (déserts).La résistance à l’excès de lumière met également en jeu des stratégies d’évitement (présence à la surface des feuilles d’une épaisse cuticule de cires ou d’un duvet de poils épidermiques qui renvoient les rayonnements) et de tolérance (accumulation d’antioxydants, en particulier la vitamine C, qui permettent de neutraliser les formes réactives de l’oxygène générées par l’excès de lumière et délétères pour les cellules végétales, Figs. 58-59; Streb et al. 2003; Aubert et Bligny 2011). Les pigments anthocyaniques (responsables des couleurs rouges et bleues des fleurs) sont quant à eux impliqués dans le piégeage des rayonnements UV.Un autre exemple concerne la pauvreté des sols en azote et en phosphore. Une stratégie d’évitement consiste pour les plantes alpines à vivre en symbiose avec des bactéries capables d’utiliser l’azote atmosphérique (cas des Fabacées, des aulnes verts, des argousiers, etc.) ou à pousser au voisinage de ces plantes. D’autre plantes vivent en symbiose avec des champignons (mycorhizes) très efficaces pour absorber les éléments minéraux du sol. Une autre stratégie consiste à utiliser l’azote présent dans la neige. Pour cela, certaines plantes de combes à neige développent des « racines à neige » qui poussent à l’opposé de la gravité vers le manteau neigeux (Fig. 60, Onipchenko et al. 2009).Compte tenu des difficultés d’approvisionnement, beaucoup de plantes alpines ont développé des stratégies de conservation des éléments minéraux, avec une récupération efficace de ces éléments lors de la mort des feuilles, lesquelles ont une durée de vie souvent de plusieurs années.

34

Fig. 58 (à gauche). Soldanelle des Alpes (Soldanella alpina), espèce des

groupements à saules nains (combes à neige). Photo: S. Aubert 1 32 4 65

plantes alpines

plantes de plaine

Vita

min

e C

, mic

rom

ol/m

g ch

loro

phyl

le

0

1

4

3

2

5

Fig. 60. Réseau de « racines à neige » chez Corydalis conorhiza, une

espèce des combes à neige du Caucase (photo réalisée juste après la fonte de

la neige). © Onipchenko et al 2009, Blackwell Publishing Ltd/CNRS

Fig. 59 (à droite). Différences de teneur en vitamine C chez trois

plantes alpines (1, soldanelle des Alpes; 2, homogyne des Alpes; 3,

renoncule des glaciers) et trois plantes de plaine (4, seigle; 5, pissenlit; 6, renoncule âcre). Ces résultats sont

issus des travaux de recherche menés sur la physiologie des plantes alpines

depuis une vingtaine d’années au col du Lautaret

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(formations arborées ou arbustives des bords de rivières). Parmi les conifères, il convient de distinguer les espèces dites mésophiles11 (sapin, épicéa et pin cembro) des espèces xérophiles11 (pin sylvestre et pin à crochets), le mélèze occupant une position intermédiaire.La Fig. 62 représente les résultats d’une analyse factorielle12 réalisée sur environ 300 relevés botaniques effectués dans les forêts (mélézins exclus) du Briançonnais et de deux autres vallées aux caractéristiques voisines (Tarentaise et Maurienne). Elle permet de bien comprendre les exigences écologiques de ces différentes espèces (Michalet et al. 2001).La position des relevés sur l’axe 1 (le plus discriminant) est corrélée à l’humidité atmosphérique régnant sous la canopée des arbres dominants, les facteurs à l’origine de ce paramètre étant par ordre d’importance décroissante : la fermeture de la canopée, l’exposition et le substrat. La flore la plus xérophile (à gauche de l’axe 1) se rencontre dans les adrets sur calcaire (pinèdes de pin sylvestre ou de pin à crochets) et la flore la plus mésophile dans les ubacs sur silice (hêtraie-sapinières des Alpes intermédiaires, sapinières-pessières et pessières). Les forêts sur calcaire sont plus xérophiles que celles sur silice, à exposition égale, en liaison avec la plus faible rétention d’eau des sols sur calcaire (Michalet et al. 2002). A l’échelle de cette analyse, le pin sylvestre et le pin à crochets apparaissent identiquement xérophiles, mais le remplacement du pin sylvestre par le pin à crochets sur les substrats les plus filtrants (gypse) indique qu’à une échelle plus fine ce dernier apparaît comme le plus xérophile (Bartoli 1966).L’axe 2 est un axe thermique, particulièrement déterminant dans les stations mésophiles d’ubac (partie droite de l’axe 1) ; en situation

Fig. 62. Axes 1 et 2 d’une analyse factorielle des forêts des Alpes sud-occidentales

36

11Les espèces xérophiles sont les plantes poussant dans des milieux

soumis à une sécheresse importante (éboulis, pentes situées en adret, etc.);les espèces hygrophiles sont les plantes

poussant dans des milieux très riches en eau (pelouses humides, marécages, etc.);

les espèces mésophiles sont intermédiaires quant à leurs

exigences hydriques

12Une analyse factorielle est une méthode statistique qui permet

l’appréhension et l’interprétation d’un ensemble volumineux de

données. Elle permet de faire ressortir graphiquement les similitudes entre

les données et d’identifier les facteurs qui les structurent (ici, les facteurs

environnementaux responsables de la distribution des forêts)

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du mélèze, absent de la Fig. 62, peut être expliquée par les transects des Figs. 63-64. Cette espèce continentale nécessite une bonne alimentation hydrique et, comme l’épicéa, elle est rare dans les adrets du Briançonnais, surtout sur calcaire. L’abondance du mélèze dans les ubacs s’explique avant tout par l’activité anthropique qui a favorisé cette essence ne supportant pas la compétition pour la lumière et nécessitant donc des milieux ouverts pour sa régénération (Pache et al. 1996).Trois facteurs complexes fondamentaux permettent donc d’expliquer la diversité des communautés forestières du Briançonnais: l’exposition, l’altitude et la nature de la roche mère.

Les communautés forestières

Les pinèdes de pin sylvestre

Ces forêts sont largement dominantes à l’étage montagnard avec quatre faciès différents en fonction de l’exposition et de la roche mère. La pinède d’adret sur calcaire est caractérisée essentiellement par la présence de légumineuses (Fabacées), en particulier la

Figs. 65-67. Espèces des pinèdes à pin sylvestre et à pin à crochets. De

gauche à droite, Ononis rotundifolia, Minuartia

laricifolia, Polygala chamaebuxus.

Photos: S. Aubert, S. Bec, R. Douzet

Fig. 68. Le mélézin de la vallée de la Guisane, aux étages montagnard et

subalpin, le 20 octobre 2010, avant la chute des aiguilles. Au milieu, le

vallon du Fontenil. Photo: S. Aubert

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Normalement, c’est le chêne pubescent (Quercus pubescens) qui devrait dominer, mais cette forêt n’est présente qu’à l’état parcellaire, souvent éliminée pour les besoins de l’agriculture. De plus, les conditions étant particulièrement rudes dans la région (forte aridité, froid intense l’hiver), le chêne pubescent peut être remplacé par le pin sylvestre et plus occasionnellement par le genévrier thurifère (Juniperus thurifera). Le thurifère se développe souvent par pieds isolés ou par petits groupes qui atteignent Briançon (Croix de Toulouse). Seule la commune de Saint-Crépin abrite une forêt (thuriféraie)

Figs. 79-81. Espèces des sapinières du Briançonnais. De gauche à droite: Pulsatilla alpina, Veronica urticifolia, Listera cordata. Photos: S. Aubert, S. Bec

Fig. 82. La junipéraie à genévrier thurifère (thuriféraie), au dessus du village de Saint-Crépin, dans la vallée de la Durance au sud de Briançon. Il s’agit de l’une des plus belles d’Europe, avec des arbres pluri-centenaires.Cette forêt fait partie du « site Natura 2000 steppique durancien et queyrassin ». Elle est étudiée par le Conservatoire botanique national alpin de Gap-Charance. Photo: S. Bec

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42

Sol nuou perturbé

Mélézin

Mélézinà rhododendron

Pelouse

Lande àrhododendron

Pinèdeà crochets

Pinède à crochetshumide à

rhododendron

Pinède àcrochetshumide

Cembraie Sapinière

Sécheresse Humiditécha

blis

Fig. 83. Dynamique de la végétation à l’étage subalpin dans le Briançonnais. Les carrés indiquent la succession théorique décrite dans

les Alpes centrales, avec évolution vers un état d’équilibre (climax) constitué par la forêt de pin cembro (cembraie) via des stades de pelouse et de lande à rhododendron. Dans le Briançonnais,

en fonction de la sécheresse (adret) ou de l’humidité (ubac), plusieurs stades

forestiers sont observés, qui peuvent ou non évoluer vers la cembraie (pointillé).

D’après Cadel et Gilot (1963)

assez dense (Fig. 82). On y rencontre quelques espèces typiques de la chênaie pubescente, comme l’hellébore fétide (Helleborus foetidus, Fig. 76) ainsi que de nombreuses espèces xéro-thermophiles (adaptées à la sécheresse et à la chaleur) comme l’hélianthème couché (Fumana procumbens), la scabieuse pourpre (Knautia timeroyi subsp. collina), la petite lavande (Lavandula angustifolia), le thésion à feuilles de lin (Thesium linophyllon) ou la catananche bleue (Catananche caerulea, Fig. 77). On y observe aussi les stations les plus septentrionales de certaines espèces méditerranéennes, comme l’aristoloche pistoloche (Aristolochia pistolochia) et la stéhéline douteuse (Staehelina dubia, Fig. 78).

La dynamique de la végétation à l’étage subalpin

La dynamique de la végétation correspond aux différentes formations (pelouses, landes, forêts) qui se succèdent sur un sol nu et qui aboutissent à un stade forestier qui est différent selon l’altitude, l’exposition, la roche mère, etc. La Fig. 83 présente la situation à l’étage subalpin dans le secteur du Briançonnais. Alors que la dynamique devrait aboutir majoritairement à la mise en place de forêts de pin cembro, le Briançonnais se caractérise par un « blocage » fréquent au niveau du mélézin qui couvre de très grandes surfaces, la cembraie étant rare et fragmentaire. Cette situation peut s’expliquer par l’action humaine qui a toujours favorisé le mélèze pour son bois imputrescible et son sous-bois clair favorable au pâturage bovin. Cela pourrait aussi

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elaeagnos subsp. angustifolia), le saule pourpre (Salix purpurea), le saule faux-daphné (Salix daphnoides), le saule noircissant (Salix myrsinifolia), la myricaire (Myricaria germanica, Fig. 105), l’argousier (Hippophae rhamnoides subsp. fluviatilis), l’épilobe des moraines (Epilobium fleischeri, Fig. 106), le gypsophile rampant (Gypsophila repens), etc. Ces milieux ont été affectés par l’aménagement des cours d’eau et par l’exploitation industrielle des granulats, aujourd’hui interdite (depuis 2009 dans le cas de la gravière de Villar d’Arène).

Fig. 103. Quelques plantes des éboulis subalpins siliceux, au niveau des Fréaux, en aval de La Grave, vers 1400 m d’altitude. Les espèces principales sont: Lavandula angustifolia (premier plan), Laserpitium gallicum (Apiacée blanche), Buphthalmum salicifolium (Astéracée jaune), Ononis natrix (Fabacée jaune au second plan). On note aussi, sur la gauche, Artemisia alba. Au fond, les arbres Sorbus aria et Betula alba. Photo: S. Aubert

Figs. 104-106. Plantes des formations riveraines sur alluvions grossières. De gauche à droite: Betula alba, Myricaria germanica, Epilobium fleischeri. Photos: S. Aubert, S. Bec

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Etage subalpin de la région du Lautaret

Dans le secteur du Lautaret, l’étage subalpin est asylvatique, en relation avec un très ancien déboisement de la région et avec la difficulté pour les essences forestières de recoloniser les versants à cause de la rudesse climatique, de la pression anthropique (pastoralisme, fauche) et de l’éloignement des arbres semenciers. On y observe un très fort effet de versant, allié à des variations de pente et donc une répartition des ressources en eau très inégale, les zones les plus pentues étant plus sèches. Le paysage des adrets est dominé par des pelouses15 et des prairies15 alors que celui des ubacs se caractérise par une mosaïque de pelouses et de formations arbustives, landes basses et brousses plus élevées. Les principaux groupements sont présentés ci-dessous. La répartition des groupements est liée essentiellement à la topographie qui conditionne l’alimentation en eau et le degré de perturbation.

Les pelouses en gradins à seslérie bleutée

Ce groupement se développe sur les adrets à la limite des étages subalpin et alpin, sur des croupes et des pentes raides où les perturbations sont fortes (solifluxion, cryoturbation, Fig. 107). Cette pelouse rase et plutôt ouverte est dominée par la seslérie bleutée (Sesleria caerulea, Fig. 111). Les interactions entre plantes y sont surtout de type facilitation : la seslérie, par ses touffes denses caractéristiques, structure la pente en gradins et permet aux autres espèces de se développer. Les autres espèces

Fig. 107. Découverte de la flore des éboulis calcaires du col de l’Izoard,

lors de la 141ème session extraordinaire de la Société Botanique de France en

juillet 2007. De part et d’autre du groupe, pelouses en gradins à seslérie bleue, avec quelques mélèzes et pins

à crochets à 2300 m (« zone de combat » à la limite entre les étages subalpin et alpin). Au fond, éboulis

calcaires très actifs de la célèbre Casse Déserte. Photo: S. Aubert

15Les pelouses sont des formations herbacées basses non soumises à

la fauche, mais parfois pâturées. Lorsque la proportion de sol nu est importante, souvent dans les

situations de forte pente, on parle de pelouse « ouverte » ou « écorchée »;

Les prairies sont des formations généralement plus hautes et soumises

à des pratiques agricoles (fauche, pâturage, fumure). Les prairies

«artificielles» doivent être ressemées chaque année après labour

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espèces caractéristiques sont la fétuque de Haller (Festuca halleri), l’agrostide des rochers (Agrostis rupestris), l’œillet négligé (Dianthus pavonius), la véronique d’Allioni (Veronica allionii, Fig. 142), la véronique arbustive (Veronica fruticans), l’alsine printanière (Minuartia verna), la joubarbe toile d’araignée (Sempervivum arachnoideum), l’Alchemille glauque (Alchemilla glaucescens), le jonc trifide (Juncus trifidus) et le plantain serpentant (Plantago serpentina).

Les prairies à fétuque paniculée

Cette formation d’adret, rencontrée aux environs du col du Lautaret (Fig. 112), est intermédiaire entre prairie et pelouse. Elle est élevée, dense et très riche floristiquement, ce qui justifie sa reconnaissance comme habitat prioritaire au niveau européen. Elle se reconnaît grâce aux touffes de fétuque paniculée (Festuca paniculata), la Poacée dominante localement appelée « quéyrelle ». Cette prairie peut s’élèver jusqu’à 2300 m en adret, sur sol légèrement acide. Les perturbations y sont faibles, car cette pelouse se développe sur des pentes peu accusées et aux sols profonds (plus d’un mètre). Les relations de compétition y sont fortes, la fétuque paniculée tendant à supplanter les autres espèces, notamment par la production de composés racinaires inhibiteurs (Viard-Cretat et al. 2009). Les espèces caractéristiques sont la centaurée uniflore (Centaurea uniflora, Fig. 113), le fenouil des Alpes (Meum athamanticum, Fig. 114), le trèfle de montagne (Trifolium montanum, Fig. 115), la campanule barbue (Campanula barbata, Fig. 112), l’arnica (Arnica montana, Fig. 112), la raiponce de Micheli (Phyteuma michelii, Fig. 116), la luzule penchée (Luzula nutans, Fig. 117), le lis de St Bruno (Paradisea liliastrum, Fig. 118), le crépide de Boccone (Crepis bocconi, Fig. 119), la pulmonaire à feuilles étroites (Pulmonaria angustifolia) et la campanule en thyrse (Campanula thyrsoides, Fig. 120). On y trouve aussi souvent en abondance le trèfle des Alpes (Trifolium alpinum, Fig. 190), la potentille à grandes fleurs (Potentilla grandiflora), le séneçon doronic (Senecio doronicum, Fig. 121), la gentiane de Koch (Gentiana acaulis), la gentiane champêtre (Gentianella campestris, Fig. 122), le céraiste raide (Cerastium arvense subsp. strictum), la benoîte de montagne (Geum montanum), la véronique d’Allioni (Veronica allionii, Fig. 142), l’hélianthème à grandes fleurs (Helianthemum grandiflorum), etc. Quelques orchidées se rencontrent dans ces pelouses, comme l’orchis vanille (Nigritella rhellicani =N. nigra p.p., Fig. 123) ou l’orchis globuleux (Traunsteinera globosa). Un faciès de croupes comporte, dans la région du col du Lautaret, l’armoise noirâtre (Artemisia atrata, Fig. 124) et l’ail raide (Allium lineare), espèce protégée à l’échelle nationale.

50

Figs. 112 (page opposée). Prairie à fétuque paniculée (Poacée à

l’inflorescence marron et aux feuilles bleutées sur leur face inférieure),

près du col du Lautaret. On aperçoit notamment au premier plan Arnica

montana et Campanula barbata. Photo: S. Aubert

Figs. 113-124 (page opposée). Quelques espèces de cette pelouse:

Centaurea uniflora (113), Meum athamanticum (114), Trifolium

montanum (115), Phyteuma michelii (116), Luzula nutans

(117), Paradisea liliastrum (118), Crepis bocconi (119), Campanula thyrsoides (120),

Senecio doronicum (121), Gentiana campestris (122), Nigritella nigra

(123), Artemisia atrata (124). Photos: S. Aubert, R. Douzet

112

113 114 115 116

117 118 119 120

121 122 123 124

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51

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Cette richesse floristique est étroitement liée au mode de gestion de ces pelouses. La fauche tardive traditionnelle, après la mi-août, permet le maintien de la diversité végétale et animale (nombreuses espèces de papillons et d’orthoptères en particulier). Le pâturage précoce ou l’abandon de la fauche favorisent la fétuque paniculée (peu appétante) aux détriments des autres espèces.

Les prairies fraîches à grande berce et à trisète

C’est une formation proche de la prairie à fétuque paniculée et localisée dans les dépressions ou les bas de pentes (Fig. 129). Elle est formée de hautes herbes et se caractérise par une alimentation en eau optimale, ce qui la rapproche de la mégaphorbaie (voir plus loin). Les espèces caractéristiques sont la grande berce (Heracleum sphondylium subsp. elegans, Fig. 125), la laîche très noire (Carex atrata subsp. aterrima), la centaurée de montagne (Centaurea montana), la gesse jaune (Lathyrus occidentalis), l’ail victorial (Allium victorialis), la campanule en thyrse (Campanula thyrsoides, Fig. 120), la trisète ou avoine dorée (Trisetum flavescens subsp. purpurascens), le cerfeuil de Villars (Chaerophyllum villarsii), le géranium

52

Figs. 125-127. Espèces de la prairie à grande

berce. De gauche à droite: Heracleum

sphondylium subsp. elegans, Tragopogon

pratensis et Asphodelus albus. Photos: S. Aubert,

R. Douzet

UBAC

Combeynot (Sud)Figs. 128 (à gauche)-129 (à droite).

Transects de répartition des groupements végétaux de l’étage

subalpin au niveau du col du Lautaret, en ubac (à gauche) et en adret (à droite, d’après

Molinier et Pons 1955)

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57

dans les secteurs bien enneigés. Les espèces caractéristiques sont le rhododendron (Rhododendron ferrugineum), la luzule de Sieber (Luzula sieberi) avec localement l’arnica (Arnica montana, Fig. 112), la camarine (Empetrum nigrum), la petite astrance (Astrantia minor), l’airelle à petites feuilles (Vaccinium gaultherioides, Fig. 147), la myrtille (Vaccinium myrtillus, Figs. 38, 43, 145, 149), le genévrier nain (Juniperus sibirica, Fig. 149), l’homogyne des Alpes (Homogyne alpina), l’airelle rouge (Vaccinium vitis-idaea, Fig. 146), le raisin d’ours (Arctostaphylos uva-ursi, Fig. 148), l’avoine bigarrée (Helictotrichon versicolor), le lycopode sélagine (Huperzia selago), et, plus localement au Lautaret, le rare daphné strié (Daphne striata, Fig. 144). On rencontre aussi de nombreux lichens humicoles (poussant sur les humus) dont Cetraria islandica. A noter que ces landes sont plus développées dans les Alpes externes ou sur le versant français des Pyrénées, en lien avec un niveau de précipitations plus important.

Les landes à genévrier nain

Il s’agit d’une formation développée principalement en adret et dominée par le genévrier nain (Juniperus sibirica = Juniperus communis subsp. nana). Elle se développe en général sur les adrets des étages montagard supérieur et subalpin, sur substrat acide ou alcalin, à tendance xérophile sur sol drainant (Fig. 149). Les espèces qui la composent supportent le déneigement précoce et le gel. Au Lautaret, on trouve ces landes également en ubac, sur les parties les plus en relief et les plus filtrantes. Les espèces caractéristiques sont l’airelle à petites feuilles (Vaccinium gaultherioides, Fig. 147), la myrtille (Vaccinium myrtillus, Figs. 145, 149), le raisin d’ours (Arctostaphylos uva-ursi, Fig. 148), la canche flexueuse (Avenella flexuosa), le millepertuis de Richer (Hypericum richeri) et le cotonéaster du Jura (Cotoneaster juranus).

Les brousses à aulne vert et à saules et les mégaphorbaies

Sur l’ubac du col du Lautaret, longuement enneigé et bien alimenté en eau, on distingue une brousse (Fig. 150) où domine l’aulne vert, un arbuste très bien adapté à la vie en haute montagne. Il ne possède pas de tronc et ses branches très flexibles poussent dans le sens de la pente, ce qui lui permet de très bien résister au poids du manteau neigeux et à son glissement. De plus, comme tous les aulnes, ses racines vivent en symbiose avec des mycorhizes (champignons favorisant la nutrition en phosphore) et avec une bactérie (Frankia) qui fixe l’azote atmosphérique. Dans les fourrés d’aulnes se développe une formation à grandes plantes herbacées vivaces, la mégaphorbaie, qui profitent de l’optimum d’alimentation en eau et de l’enrichissement en azote.

Figs. 145-148. Quelques Ericacées des forêts et des landes, en fleurs et en fruits (encarts en haut à gauche) (à l’exception du rhododendron). De haut en bas: Vaccinium myrtillus, V. vitis-idaea, V. gaultherioides, Arctostaphylos uva-ursi. Photos: S. Aubert, R. Douzet

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entre un (étage) alpin sur roche mère calcaire et un (étage) alpin sur roche mère siliceuse (Braun-Blanquet 1954). D’autres études, dites phytoécologiques, privilégient le facteur enneigement et proposent de distinguer un alpin de type nival17 (zones de combes à neige) et un alpin de type thermique17 (zones de crêtes) (Aubert et al. 1965). L’ensemble de ces travaux peut être résumé en distinguant les modes thermique et nival, à plusieurs niveaux altitudinaux et pour chaque type de roche-mère. Par ailleurs, les études à méso-échelle ont permis de mieux définir et quantifier les gradients directs (température, pH) et les gradients de ressource (eau, azote) liés à la durée de la couverture neigeuse (Dalmas 1972; Gensac 1979; Isard 1986) ou au type de roche-mère (Bounemoura et al. 1998; Choler et Michalet 2002);

• les microgradients sont liés à l’hétérogénéité microtopographique, laquelle est souvent héritée des processus géomorphologiques de type péri-glaciaire (Carbiener 1966; Sohlberg et Bliss 1984; Fig. 167).

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Fig. 166. Exemple de diversité des groupements végétaux sur une faible distance à l’étage alpin (fortes pentes au niveau du Grand Galibier, vers 2700 m). Les caractéristiques de ces groupements sont développées plus loin dans le texte. A, groupement à Salix serpyllifolia qui stabilise des sols soumis à une importante solifluxion (alternances gel/dégel); B, pelouse à Kobresia myosuroides; C, pelouse à Festuca violacea; D, éboulis schisteux à Leontodon montanus; E, rochers siliceux (quartzite) à Eritrichium nanum; F, éboulis calcaires à Campanula alpestris; G, rochers calcaires dolomitiques à Androsace helvetica. Photo: S. Aubert

A

B

D

E

C

F

G

17on parle de « mode » nival et de « mode » thermique

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Fig. 167. Exemple d’hétérogénéité microtopographique, avec des buttes et des creux de quelques dizaines de centimètres (secteur du Galibier, vers 2600 m d’altitude, peu après la fonte de la neige). Photo: S. Aubert

Ils peuvent aussi résulter de l’effet structurant de certaines couvertures végétales, comme les touffes de Poacées et/ou de Cypéracées dans le cas de l’alpin thermique (Choler et al. 2001).

Les figures 168 et 169 présentent les résultats d’un traitement mathématique (analyse de correspondances) de nombreux relevés floristiques effectués dans les pelouses alpines des Alpes du Dauphiné. Les principales espèces y sont représentées selon troix axes qui permettent de comprendre leurs exigences écologiques:

• L’axe 1 permet de distinguer les communautés herbacées de haut de versant et de crête (pôle thermique, à gauche) des communautés de combe à neige (pôle nival, à droite). A noter que les groupements à saule herbacé (Salix herbacea), classiquement décrits comme appartenant à l’étage alpin de mode nival, tendent ici vers le domaine mésophile. Cette espèce se situe préférentiellement sur des microconvexités existant au fond des combes à neige (petites buttes gazonnées). Dans ce cas, enneigement et hydromorphie sont dissociés, la microtopographie facilitant le drainage rapide des eaux de fonte. Cette répartition particulière de Salix herbacea, que l’on retrouve dans d’autres régions, serait au moins en partie expliquée par l’exigence d’une aération suffisante du sol pour la germination des graines. Il apparaît donc que la durée d’enneigement n’est qu’un des éléments déterminant les termes du bilan hydrique en un point.

• L’axe 2 permet surtout de séparer les espèces selon une logique thermique liée à l’altitude et aux oppositions de versants. En bas de l’axe se situent les groupements d’adret bénéficiant d’une situation thermique favorable et au sein desquels s’observent des espèces d’affinité subalpine qui atteignent là leur limite supérieure d’altitude. En haut de l’axe, se situent les groupements d’ubac plus caractéristiques des conditions de l’étage alpin.

Figs. 168-169 (page opposée, en haut). Etude des pelouses alpines de la région Haut-Queyras-Haute-Ubaye selon une analyse des correspondances. Il s’agit ici des projections des relevés floristiques selon trois axes (plans factoriels 1-2 et 1-3) (Detrended Correspondance Analysis, Hill 1979). Les espèces dominantes des groupes de relevés sont indiquées (Choler et Michalet 2002)

Fig. 170 (page opposée, en bas). Transect montrant la répartition des principales communautés à l’étage alpin en fonction de la mésotopographie (10-100 m) et de la microtopographie (0-1 m)

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Sur les croupes les plus ventées et très froides, très rarement enneigées et sur sol plus superficiel, on trouve surtout la laîche des rochers (Carex rupestris) et des espèces comme la laîche courbée (Carex curvula subsp. rosae, Fig. 175), l’alsine faux-orpin (Minuartia sedoides, Fig. 182), l’antennaire des Carpathes (Antennaria carpatica, Fig. 183), l’agrostide des Alpes (Agrostis alpina) et la fétuque à quatre fleurs (Festuca quadriflora).

Les pelouses écorchées à fétuque naine

Sur les gypses plus compacts, par exemple au niveau du col du Galibier, se développe une pelouse très calcicole à fétuque naine (Festuca quadriflora), avec notamment la valériane des débris (Valeriana saliunca, Fig. 207), la campanule du Mont Cenis (Campanula cenisia, Fig. 201), l’astragale fétide (Oxytropis foetida, Fig. 197), le pétrocalle des Pyrénées (Petrocallis pyrenaica, Fig. 213) et le gypsophile rampant (Gypsophila repens). On rencontre aussi le saule nain à feuilles de serpolet (Salix serpyllifolia, Fig. 188), qui colonise également les croupes schisteuses (Fig. 166).

Les groupements enneigés de pente à saules nains

Cette formation basse (lande basse ou landine) se rencontre sur des pentes rocailleuses longuement enneigées (alpin de mode nival), plutôt sur calcaire. Les espèces caractéristiques sont le saule réticulé (Salix reticulata, Fig. 184), le saule à feuilles tronquées (Salix retusa, Figs. 185, 188), la saxifrage fausse androsace (Saxifraga androsacea), la dryade à huit pétales (Dryas octopetala), la laîche à petites fleurs (Carex parviflora), la soldanelle des Alpes (Soldanella alpina, Fig. 58), la sagine (Sagina saginoides), la véronique des Alpes (Veronica alpina), le gnaphale de Hoppe (Gnaphalium hoppeanum), le paturin des Alpes (Poa alpina), la renouée vivipare (Polygonum viviparum), le silène acaule (Silene acaulis, Fig. 49) et l’hutchinsie des Alpes (Hornungia alpina). Localement, au col du Galibier, on peut rencontrer un autre saule nain plus rare, Salix breviserrata, une espèce protégée à l’échelle nationale (Fig. 186).

Fig. 188 (à droite). Salix serpyllifolia (petites feuilles) et Salix retusa

(grandes feuilles) qui colonisent une pente rocailleuse (voir aussi Fig. 166)

et permettent l’installation d’autres espèces. Photo: S. Aubert

Figs. 184-187. Les saules nains de l’étage alpin sont des chaméphytes

prostrés (Fig. 52) et à forte longévité: Salix reticulata (184)

Salix retusa (185) Salix breviserrata (186)

Salix herbacea (187)

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Fig. 208), des fougères (Cryptogramma crispa; Polystichum lonchitis, Fig. 209), la cardamine à feuilles de réséda (Cardamine resedifolia, Fig. 210), l’épilobe à feuille de mouron (Epilobium anagallidifolium), la fétuque violette (Festuca violacea) et le chrysanthème des Alpes (Leucanthemopsis alpina).

Les éboulis calcaires grossiers à tabouret à feuille rondes

Ces éboulis des étages subalpin supérieur et alpin sont très répandus dans le Briançonnais, absents ou réduits aux environs du Galibier et extrêmement développés au col de l’Izoard. Ils sont caractérisés par un substrat grossier sans éléments fins ou presque. Ceci entraîne une forte sécheresse et l’on rencontre des espèces très spécifiques comme le tabouret à feuille rondes (Noccaea rotundifolia, Fig. 211), la violette du mont Cenis (Viola cenisia), l’adénostyle des Alpes (Adenostyles alpina), le céraiste à larges feuilles (Cerastium latifolium, Fig. 212), le silène prostré (Silene vulgaris subsp. prostrata), la campanule alpestre (Campanula alpestris, Fig. 205), le chou des éboulis (Brassica repanda, Fig. 198), l’astragale austral (Astragalus australis) et le vélar nain (Erysimum jugicola). C’est dans ce groupement que l’on peut rencontrer la bérardie (Berardia subacaulis), espèce relique de la flore tertiaire (Fig. 15).

Les groupements des rochers

Sur silice, les espèces caractéristiques des groupements saxicoles sont le roi des Alpes (Eritrichium nanum, Fig. 215), la saxifrage à feuilles rétuses (Saxifraga retusa), le silène sans tige (Silene exscapa), la saxifrage fausse-mousse (Saxifraga bryoides, Fig. 215), la primevère hirsute (Primula hirsuta, Fig. 216), le génépi jaune (Artemisia umbelliformis, Fig. 217) et le

Fig. 214. L’adénostyle à feuilles blanches (Adenostyles leucophylla), espèce typique des éboulis siliceux, ici

dans la Réserve naturelle nationale des Pics du Combeynot. Photo: S. Aubert

Figs. 211-213. Espèces des éboulis calcaires (et

gypseux). De gauche à droite: Noccaea

rotundifolia, Cerastium latifolium, Petrocallis

pyrenaica. Photos: S. Aubert

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Zinger L, Coissac E, Choler P, Geremia RA (2009) Microbial Communities Assessed by Graph Partitioning Approach: Study of Soil Fungi in Two Alpine Meadows. Appl. Env. Microb. 75 : 5863-5870

Zohlen A, Tyler G (2004) Soluble Inorganic Tissue Phosphorus and Calcicole–Calcifuge Behaviour of Plants. Annals of Botany 94 : 427–432

Site internet de la Station alpine Joseph Fourier: http://sajf.ujf-grenoble.fr/

Site internet rassemblant les publications relatives à la flore de la région du Lautaret/Briançonnais (site de la Station alpine Joseph Fourier): http://sajf.ujf-grenoble.fr/spip.php?rubrique212

Site internet du Conservatoire botanique national alpin de Gap-Charance: http://cbn-alpin.org/

Site internet du Parc national des Ecrins : http://www.ecrins-parcnational.fr/

Site internet du Parc naturel régional du Queyras: http://www.pnr-queyras.fr/

Site internet présentant la flore des Hautes-Alpes: http://www.florealpes.com

Site internet des Cahiers d’habitat Natura 2000: http://www.natura2000.fr/spip.php?article70

Site internet présentant les données relatives au rayonnement solaire: https://www2.nancy.inra.fr/unites/lerfob/ecologie-forestiere/sig/rayonmt.htm

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Index des groupements végétauxLes codes en début de ligne permettent de repérer ces groupements dans la partie 2

Les communautés forestières Les pinèdes de pin sylvestre

Les pinèdes de pin à crochetsLes mélézinsLes sapinièresLes cembraiesLa junipéraie de Saint-Crépin

La végétation asylvatique (étages collinéen à subalpin)Etages collinéen et montagnard inférieur

Les pelouses d’affinité steppiqueLes rochers de l’étage montagnardLes éboulis à stipe argenté des étages montagnard et subalpinLes formations riveraines sur alluvions assez grossières

Etage subalpin (région du Lautaret)Les pelouses en gradins à seslérie bleutéeLes pelouses à fétuque violette (et laîche ferrugineuse)Les pelouses rases à fétuque de HallerLes prairies à fétuque paniculéeLes prairies fraîches à grande berce et à trisèteLes prairies humides à molinieLes bas-marais alcalins à laiche de DavallLes groupements à scirpe à cinq fleurs et troscart des maraisLes bas-marais acides à laiche noireLes pelouses rases à nard raideLes landines à airelles et landes à rododendron ferrugineuxLes landes à genévrier nainLes brousses à aulne vert et à saules et les mégaphorbaiesLes reposoirs à bestiaux

Les groupements de l’étage alpin du GalibierLes pelouses de crêtes à élyne queue-de-sourisLes pelouses écorchées à fétuque naineLes groupements enneigés de pente à saules nainsLes pelouses fraîches à vulpin des Alpes et renoncule de KüpferLes combes à neige à saule herbacéLes éboulis schisteux à liondent des montagnesLes éboulis siliceux à oseille à deux styles et adénostyle à feuilles blanchesLes éboulis calcaires grossiers à tabouret à feuille rondesLes groupements des rochersLes groupements des bords de ruisseaux

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Le comité de relecture des cahiers illustrés du Lautaret est composé de membres du conseil scientifique de la Station alpine Joseph Fourier. Pour ce n°2, sont remerciés tout particulièrement Philippe Danton (correspondant du Muséum national d’Histoire naturelle), Christian Dumas (membre de l’Académie des Sciences et professeur à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon), Hervé Cortot (Parc national des Ecrins) et Pascal Chondroyannis (directeur du Conservatoire botanique national

alpin de Gap-Charence).

La conception graphique et la mise en page des cahiers illustrés du Lautaret ont été réalisées par Philippe Danton et Serge Aubert

La Station alpine Joseph Fourier est une Unité Mixte de Service (UMS 3370) de l’université Grenoble 1 et du CNRS. Sous l’égide d’un conseil scientifique, elle regroupe un ensemble unique en Europe comprenant :- au col du Lautaret : le Jardin botanique alpin, le Chalet-laboratoire ainsi que la Galerie de l’Alpe, futur bâtiment destiné à développer l’interface entre science et public;- sur le campus de Grenoble : l’Arboretum paysager Robert Ruffier-Lanche et des serres techniques en cours de construction.

http//sajf.ujf-grenoble.fr

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Les auteursSerge Aubert

Enseignant-chercheur à l’université de Grenoble, Serge Aubert est directeur de la Station alpine Joseph Fourier, la structure qui comprend le Jardin botanique alpin et le Chalet-laboratoire du Lautaret. Il a assuré la coordination du travail de rédaction ainsi qu’une grande partie de l’illustration.

Rolland DouzetProfesseur agrégé détaché à l’université de Grenoble, Rolland Douzet est le botaniste de la Station alpine Joseph Fourier. Son expertise est au service de l’enseignement de la botanique, du développement des collections du Jardin alpin et des recherches menées au Lautaret. Depuis 2000, il a repris en charge le stage d’écologie et de botanique alpines organisé en juillet.

Philippe CholerAujourd’hui chercheur au CNRS (Laboratoire d’Ecologie Alpine), Philippe Choler a été professeur agrégé puis enseignant-chercheur à l’université Joseph Fourier, où il s’est occupé du stage d’écologie et de botanique alpines dans les années 1990. Il est notamment spécialiste du fonctionnement des écosystèmes de l’étage alpin.

Richard MichaletAujourd’hui professeur à l’université de Bordeaux 1, Richard Michalet a été maître de conférences à l’université Joseph Fourier dans les années 1980-90. Il a conduit des recherches sur les forêts de montagne, en particulier dans la région briançonnaise, dont une partie des résultats sont présentés ici.

Wilfried ThuillerChercheur au CNRS (Laboratoire d’Ecologie Alpine), Wilfried Thuiller est l’un des spécialistes internationaux de la modélisation de la végétation. Il pilote le projet Diversitalp (financé par l’Agence Nationale de la Recherche) qui vise à prévoir les effets des changements globaux (climat et agriculture) sur la végétation de l’arc alpin.

Stéphane BecProfesseur agrégé détaché à l’université de Grenoble, Stéphane Bec participe à titre bénévole aux activités de la Station alpine Joseph Fourier, en particulier l’encadrement des stages du Lautaret. Il a réalisé une partie des photographies présentées ici et alimenté une banque d’images disponible sur internet.