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L’adolescence heureuse On pourrait se demander pourquoi avoir choisi ce découpage et commencé ce deuxième chapitre en 1973 plutôt qu’en 1970, alors qu’un jalon aussi im- portant de l’histoire sociopolitique de la santé au Québec que l’avènement de l’assurance maladie date de 1970. C’est qu’à partir de 1973 la revue a fait une sorte de « Grand bond en avant ». D’une part, parce que Le Médecin du Québec allait vivre, en passant à l’off- set (encadré), un changement déterminant dans ses méthodes de production. D’autre part, parce que la revue allait être gérée par une nouvelle équipe de ré- daction qui resta fondamentalement la même pen- dant au moins vingt ans. Enfin, et peut-être surtout, Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 De l’information politique à la formation continue (1973-1985) 65 L’impression en offset est un dérivé de la lithographie, inventée en 1796 par un imprimeur praguois installé à Munich, Aloys Senefelder. À l’origine, l’artiste des- sinait à l’encre ou au crayon gras sur une plaque de pierre calcaire soumise ensuite à une solution d’acide nitrique, de gomme arabique et de térébenthine. Les parties préservées par le dessin étaient imper- méables au mouillage, alors que les par- ties vierges devenaient encore plus hydro- philes que la pierre nue. L’encre grasse se déposait exclusivement sur le dessin. Il ne restait plus qu’à presser une feuille de pa- pier contre la pierre encrée pour imprimer le dessin. Mais la pierre de Bavière utilisée en li- thographie était au moins aussi lourde et encombrante que le métal typographique et la lithographie demeura donc, au début, une pratique strictement artistique et ar- tisanale destinée à la production de petites quantités de documents. Comme solution de rechange à la lour- deur de la pierre, Senefelder chercha un métal qui aurait des propriétés similaires. Il retint le zinc. En 1903, l’imprimeur américain Ira Washington Rubel remarqua, par hasard, que chaque fois qu’il manquait de papier au cours d’une impression sur sa presse lithographique, l’image s’imprimait en mi- roir sur un rouleau de caoutchouc faisant partie de l’appareil. Les impressions sui- vantes portaient le dessin sur les deux cô- tés du papier. Qui plus est, l’impression provenant du rouleau en caoutchouc était beaucoup plus nette que celle provenant directement de la pierre. L’offset était né, mais il ne deviendrait une réalité indus- trielle qu’entre 1950 et 1970. En offset, la plaque photosensible est rendue hydrofuge aux endroits où elle a été exposée aux rayons ultraviolets à travers un film négatif (c’est ce qu’on appelle « brûler » la plaque). Elle est ensuite montée sur un cylindre, soumise à une solution de mouil- lage et encrée. Les parties hydrofuges re- tiennent l’encre grasse alors que le reste de la plaque retient la solution de mouillage. L’encre de la plaque est reportée en miroir (comme l’écriture de Léonard) sur un cy- lindre recouvert d’une toile caoutchoutée, souple et susceptible d’épouser les moin- dres irrégularités de la plaque et du papier : le blanchet. L’encre se transmet, encore en miroir (donc dans le bon sens) et avec une très grande précision, du blanchet au papier. Les avantages de l’offset, par rapport à la typographie, sont l’économie, la légèreté, la qualité d’impression et des possibilités graphiques très étendues grâce à la mani- pulation aisée des films, qui peuvent être superposés, assemblés et masqués pour créer des compositions d’images à peu près impossibles à réaliser avec les clichés typographiques. Au début des années 1970, l’ère des typographes tirait à sa fin. Pen- dant quelques années, les rois de l’impri- merie seraient les pelliculeurs (strippers). Chez Harpell, jusqu’au milieu des an- nées 1970, la composition des textes se poursuivit en typographie au plomb. On im- primait les épreuves corrigées sur un pa- pier crayeux spécial dont on tirait un né- gatif photographique. Après 1976, on passa à la photocomposition. Par comparaison avec le plomb, la photocomposition sem- blait « molle » et mal définie. Cette tech- nique allait d’ailleurs nous créer d’autres problèmes à la fin de la décennie suivante, car l’interface entre la photocomposeuse et le traitement de texte était boiteuse et empêchait tout raffinement typographique. À l’ombre de l’ offset

De l’information politique à la formation continue Medecin du Quebec... · La rentabilité des capsules radio- ... vue a fait l’acquisition d’équipement photogra-phique professionnel

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L’adolescence heureuse

On pourrait se demander pourquoi avoir choisice découpage et commencé ce deuxième chapitre en1973 plutôt qu’en 1970, alors qu’un jalon aussi im-portant de l’histoire sociopolitique de la santé auQuébec que l’avènement de l’assurance maladie datede 1970.

C’est qu’à partir de 1973 la revue a fait une sortede « Grand bond en avant ». D’une part, parce queLe Médecin du Québec allait vivre, en passant à l’off-set (encadré), un changement déterminant dans sesméthodes de production. D’autre part, parce que larevue allait être gérée par une nouvelle équipe de ré-daction qui resta fondamentalement la même pen-dant au moins vingt ans. Enfin, et peut-être surtout,

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005

De l’information politique à la formation continue

(1973-1985)

65

L’impression en offset est un dérivé dela lithographie, inventée en 1796 par unimprimeur praguois installé à Munich,Aloys Senefelder. À l’origine, l’artiste des-sinait à l’encre ou au crayon gras sur uneplaque de pierre calcaire soumise ensuiteà une solution d’acide nitrique, de gommearabique et de térébenthine. Les partiespréservées par le dessin étaient imper-méables au mouillage, alors que les par-ties vierges devenaient encore plus hydro-philes que la pierre nue. L’encre grasse sedéposait exclusivement sur le dessin. Il nerestait plus qu’à presser une feuille de pa-pier contre la pierre encrée pour imprimerle dessin.

Mais la pierre de Bavière utilisée en li-thographie était au moins aussi lourde etencombrante que le métal typographiqueet la lithographie demeura donc, au début,une pratique strictement artistique et ar-tisanale destinée à la production de petitesquantités de documents.

Comme solution de rechange à la lour-deur de la pierre, Senefelder chercha unmétal qui aurait des propriétés similaires.Il retint le zinc.

En 1903, l’imprimeur américain Ira

Washington Rubel remarqua, par hasard,que chaque fois qu’il manquait de papierau cours d’une impression sur sa presselithographique, l’image s’imprimait en mi-roir sur un rouleau de caoutchouc faisantpartie de l’appareil. Les impressions sui-vantes portaient le dessin sur les deux cô-tés du papier. Qui plus est, l’impressionprovenant du rouleau en caoutchouc étaitbeaucoup plus nette que celle provenantdirectement de la pierre. L’offset était né,mais il ne deviendrait une réalité indus-trielle qu’entre 1950 et 1970.

En offset, la plaque photosensible estrendue hydrofuge aux endroits où elle a étéexposée aux rayons ultraviolets à travers unfilm négatif (c’est ce qu’on appelle « brûler »la plaque). Elle est ensuite montée sur uncylindre, soumise à une solution de mouil-lage et encrée. Les parties hydrofuges re-tiennent l’encre grasse alors que le reste dela plaque retient la solution de mouillage.L’encre de la plaque est reportée en miroir(comme l’écriture de Léonard) sur un cy-lindre recouvert d’une toile caoutchoutée,souple et susceptible d’épouser les moin-dres irrégularités de la plaque et du papier :le blanchet. L’encre se transmet, encore en

miroir (donc dans le bon sens) et avec unetrès grande précision, du blanchet au papier.

Les avantages de l’offset, par rapport àla typographie, sont l’économie, la légèreté,la qualité d’impression et des possibilitésgraphiques très étendues grâce à la mani-pulation aisée des films, qui peuvent êtresuperposés, assemblés et masqués pourcréer des compositions d’images à peuprès impossibles à réaliser avec les clichéstypographiques. Au début des années 1970,l’ère des typographes tirait à sa fin. Pen-dant quelques années, les rois de l’impri-merie seraient les pelliculeurs (strippers).

Chez Harpell, jusqu’au milieu des an-nées 1970, la composition des textes sepoursuivit en typographie au plomb. On im-primait les épreuves corrigées sur un pa-pier crayeux spécial dont on tirait un né-gatif photographique. Après 1976, on passaà la photocomposition. Par comparaisonavec le plomb, la photocomposition sem-blait « molle » et mal définie. Cette tech-nique allait d’ailleurs nous créer d’autresproblèmes à la fin de la décennie suivante,car l’interface entre la photocomposeuseet le traitement de texte était boiteuse etempêchait tout raffinement typographique.

À l’ombre de l’offset

parce qu’en cette période où, après une pluie de loiset de règlements, les pièces maîtresses de l’échiquierpolitique du système de santé étaient déjà bien enplace, il convenait à la FMOQ d’élaborer des straté-gies différentes.

Dans un éditorial clé, en janvier 1973, le Dr GérardHamel annonce le lancement d’un ambitieux pland’action par lequel il compte mobiliser les médecinsomnipraticiens et les inviter à faire eux-mêmes leurplace dans la réforme plutôt que de laisser à d’autresle soin de la leur assigner en faisant d’eux de simplesemployés d’établissement.

« Ce plan comprend un audacieux programmed’éducation des bénéficiaires d’assurance maladie etdeux autres programmes à l’intention des omnipra-ticiens*, dont l’un, intitulé Objectif 73, constitue ac-

tuellement une des activités prioritaires de la Fédé-ration. » En vertu d’Objectif 73, « un certain nombred’associations doivent élaborer (…) un plan précisd’organisation des soins de première ligne ».

Sous l’impulsion d’Objectif 73, puis d’Action 74,d’Action 75 et d’autres programmes subséquents, la

661973 1974 1975 1976 1977 1978 1

Monde

Canada et Québec

Santé

Science et technologie

Syndicalisme médical(FMOQ, FMSQ, FMRQ)

Le Médecin du Québec

Crise du pétrole

Nixon est compromisdans le Watergate

Nouvelle victoire du Partilibéral de Robert Bourassa

Adoption du Code des professions

Création du Conseil du statut de la femme

Claude Castonguay remplacé par ClaudeForget comme ministredes Affaires socialesdans le cabinet Bourassa

CUSM. Installation du premier tomodensitomètre au Canada

Ententes particulières surles conditions d’exercicedans les institutions psychiatriques etCliniques Domrémy

Passage à l’impression offset

Périodicité : 12 mois par année

Nixon démissionne

Droit à l’avortement

Inauguration de la tour du CN à Toronto, le plus haut édifice du monde

Utilisation du lithium danscertains hôpitaux duQuébec

Morgentaler est condamné

ADN recombinant(génie génétique)

Une étude prouve les méfaits des CFC

IVe Congrès syndical de laFMOQ : L’accessibilitéaux soins, du concept à lapratique

Mémoire de la FMSQ sur la loi 41 (Loi SSSS)

Une enquête de GruneauResearch Limited placeLe Médecin du Québec entête pour son contenuéditorial et pour saprésentation graphique

Victoire communiste au Viêt-Nam

L’ONU proclame l’année de la femme

Radio-Québec entre en ondes

Accord avec les Cris et les Inuit au sujet desterritoires de la BaieJames

Adoption de la Loi visantà assurer les services de santé et les servicessociaux essentiels en casde conflit de travail

CUSM. Établissement dela première unité de soinspalliatifs au Canada

Rencontre Apollo-Soyouzdans l’espace

Fondation et affiliation à la FMOQ del’Association desmédecins de CLSC

La FMSQ dépose un pro-jet d’entente en avril

Deux sondages confir-ment que Le Médecin duQuébec a le plus haut delecture parmi tous lespériodiques médicaux au Québec

Mort de Mao Tsé-Toung

Un nuage de dioxineplane sur la région deSeveso

Jeux de la XXIe Olympiadeà Montréal

René Lévesque et le Parti Québécois sont élus au pouvoir

Conflit dans le secteurhospitalier. L’AHPQ de-mande et obtient une loispéciale. Après deuxmois la grève prend fin.

L’académie nationale dessciences affirme que lesgaz des contenantsaérosols endommagent lacouche d’ozone

La FMOQ seul agent négociateur pour tous lesomnipraticiens

La FMOQ met sur pied son propre système deformation continue

Entente avec Sonomedpour la reproduction de textes de formationcontinue

Anouar el-Sadate en Israël

Mort d’Elvis Presley

Adoption de la loi 101

Fernand Seguin obtient lePrix Kalinga, la plus hautedistinction internationaleen journalisme scientifique

Denis Lazure Ministre des Affaires sociales dans le gouvernement de René Lévesque

Apple livre son premier or-dinateur domestique

Des bactéries synthétisentdes protéines humaines

La FMOQ conclut une en-tente particulière relative aux médecins ex-erçant aux Iles-de-la Madeleine

Les photos couleurs illustrant les reportagessur les cabinets de groupesont presque toutes produites par l’équipe de rédaction

Karol Wojstyla devientJean-Paul II, le plus jeunepontife du XXe siècle

Mise en place du congé de maternité de 18 semaines

La Sun Life quitte leQuébec pour Toronto,à cause de la loi 101

Création de l’Office despersonnes handicapéesdu Québec

Louise Brown, premierbébé-éprouvette

Cœur artificiel Jarvik-7

La FMOQ dénonce la loi 84

Paul Desjardins devientprésident de la FMSQ

Les résidents de McGillsont reconnus légalement

Programme d’auto-évaluation tous les deux mois

Chronologie de quelques événements marquants 1973-1985

*Dans son éditorial de février 1973 (« Un programme d’éducation ».Le Médecin du Québec, février 1973, volume 8, numéro 2, pp. 7-8), leDr Gérard Hamel décrivait ces deux projets conçus dans le cadred’une grande démarche d’affirmation des médecins omniprati-ciens. Cette démarche, essentiellement fondée sur l’organisationdes soins de première ligne par les omnipraticiens eux-mêmes,avait été baptisée « Objectif 73 ». La rentabilité des capsules radio-phoniques était remise en question l’année suivante et la campagneétait abandonnée. Quant au programme de vidéocassettes baptiséOmnivideomd , il était plus qu’en avance sur son temps et auraitnécessité un personnel nombreux et d’importants budgets qu’ondécida, après analyse, d’investir autrement.

revue va donc promouvoir cette orientation de laFMOQ, notamment en publiant des reportages in-citatifs sur les cabinets de groupe et en publicisant lesréseaux régionaux d’organisation de soins, de façonà démontrer au gouvernement, tout en informant seslecteurs, que les médecins omnipraticiens offraientdans leur région des soins de première ligne 24 heuressur 24, sept jours sur sept. Pas moins de 70 de ces re-portages ont été publiés entre août 1973 et décembre1982 sous la rubrique « regroupement ».

Sans compter leur influence sur l’organisation dela pratique médicale au cour de ces dix ans, ces ar-ticles on été l’élément déclencheur du rapatriementau sein de l’équipe de rédaction d’une des techniquesfondamentales de la publication : la photographie.C’est, en effet, peu après le début de cette série et, en

partie pour diminuer le coût des photos, que la re-vue a fait l’acquisition d’équipement photogra-phique professionnel (un objectif grand angulairede 24 mm, entre autres, nous permettait de photo-graphier, sans difficulté, l’ensemble d’une salle d’exa-men, pour peu qu’on se cale dans un des coins).

Toujours sur le plan tactique, une décision qui au-rait pu paraître banale, celle de passer à l’impressionoffset, s’avéra un puissant générateur de retombéesinsoupçonnées et bénéfiques. En trois ou quatreans, le nombre de pages d’annonces a doublé et lenombre de pages éditoriales a augmenté encore plus.Tant et si bien, qu’à partir de 1978 chaque volume adû être relié en deux tomes. L’impression en offsetnous donnait, en outre, la possibilité d’exercer notreaudace sur le plan graphique, ce que nous fîmes.

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 671979 1980 1981 1982 1983 1984 1985

Signature des accords de Camp-David

L’ayatollah Khomeyniprend le pouvoir en Iran

Mise en service de la centrale LG-2

Grève générale illégaledans le réseau de laSanté

Adoption de la loi sur la santé et la sécuritéau travail

Mise au point du « disque compact »

Un rapport médicalaméricain démontre quefumer cause le cancer

Lancement du REER-FMOQ, ancêtre des fonds FMOQAprès cinq semaines degrève, la FMRQ conclutune nouvelle entente

La rubrique Antipasto,toujours une des pluslues, a touché 175 sujets d’actualité

Entente avec le Journalmédical des voyages

Fondation du syndicat«Solidarité » à Gdansk

Reagan est élu à laMaison Blanche

Assassinat de John Lennon

1er Festival de Jazz de Montréal : 12 000 spectateurs

Début du Marathon de l’espoir de Terry Fox

La variole est éradiquéeet la vaccination est interrompue

Brevet de Mévacor,un agent révolutionnairepour réduire lecholestérol

À cause du référendum,la FMOQ accepte unmoratoire : ajustementd’honoraires et rétroactivité

FMSQ : prolongement del’entente de 1976

Numéro spécial pour le 15e anniversaire

Naissance de deuxtabloïdes chez Maclean :L’Actualité médicale et Le Courrier médical

Découverte du virus du SIDA

Mariage de Charles et Diana

Élection de François Mitterand

Trudeau rapatrie la Constitution sans l’accord du Québec

Mort de Thérèse Casgrain

Adoption de la loi 27,modifiant diverses dispositions législativedans le domaine de lasanté et des services sociaux

IBM lance son premier or-dinateur domestique et Microsoft lance MS-DOS

Laval s’affilie à la FMOQ

Contestation de la loi 27par les fédérations

Gérard Hamel démissionne pour raisonsde santé

Le Médecin du Québecpublie 975 pages dematériel éditorial, dont180 colonnes sous larubrique Antipasto, et 950 pages d’annonce

La population chinoise at-teint le milliard

Guerre des Malouines

Mort de Grace de Monaco

Mort de Gilles Villeneuve

Bombardier annonce leplus gros contrat de l’histoire canadienne :825 voitures pour lemétro de NewYork

Grève des médecins omnipraticiens et loi spéciale (loi 91)

Premières organisationssur le SIDA au Canada

La cyclosporine permetles greffes d’organes

Sony lance son caméscope

Les CD sont lancés sur le marché

Décès de Gérard Hamel

La FMSQ signe une entente avec Pierre-Marc Johnson

Deux éditoriaux et un en-cart sont dédiés à la mé-moire de Gérard Hamel

Un article de Me P.-A. Crépeau fait l’objet d’une brochure

Lech Walesa reçoit le Nobel de la paix

Mort de Tenessee Williams

Mort de Hergé

La FTQ crée le fonds desolidarité

Le gouvernement achète Québecair

Première conférencecanadienne sur le SIDA à Toronto

Premier vol d’essai de lanavette spatiale Columbia

Découverte des « trous noirs »

Lancement de la montre Swatch

FMOQ : nouvelle ententede 2 ansFMSQ : premier congrèsd’orientation

Tragédie à Bhopal

Famine en Éthiopie

Mort de François Truffault

Élection de Brian Mulroney

Denis Lortie abat 4 personnes àl’Assemblée Nationale

Adoption de la Loi canadienne sur la santé(PL C-3)

Congélation des embryons

Définition des critères de l’Alzheimer

FMOQ-FMSQ : plusieursmémoires dont ceux surles règlements de la loi27, sur la loi C-3 et sur leprojet de loi 42

Deux sondages mènent à la réorientationdu contenuUne disette d’annonces,n’empêche pas la publica-tion de 930 pages de texte

Avènement de Mikhaïl Gorbachev

Le Rainbow Warrior est coulé

Mort de Chagall et d’Orson Welles

René Lévesque démissionne

La Commission McDonaldrecommande le libreéchange

Mise sur pied de la commission Rochon

Réforme importante dansle domaine de la santé etde la sécurité du travail

Création de Windows par Microsoft

Réussite d’une greffe dufoie sur un jeune patient

Xe congrès syndical de la FMOQ

FMOQ et FMSQ signentdes protocoles d’accordavec la CSST

Formation du Comité de rédaction scientifique

Numéro du 20e

anniversaire de la revue

D’abord timidement (dès 1973, lenouveau procédé d’impressionnous permet l’emploi, sur la pagecouverture, de véritables illustra-tions couleurs dont le graphismeépuré est parfois repris à l’intérieurpour agrémenter le titre de l’articlevedette), puis de plus en plus allé-grement, pour les articles princi-paux, les sections thématiques, etles pages couvertures. Certaines deces pages couvertures, réalisées enstudio et bonifiées en atelier, consti-tuent de véritables prouesses pourl’époque, témoignant de la vita-lité, de l’inventivité et de la créa-tivité qui caractérisaient l’équipeet qui nous attiraient de plus enplus de lecteurs, malgré un petitcôté brouillon – au demeurantsympathique.

C’était l’adolescence heureuse.

Le « Grand bond en avant »

Par ailleurs, la revue commenceà afficher, à partir de ces années,une politique éditoriale plus ac-cusée et mieux structurée, une vo-lonté de développer, chaque mois,une thématique précise se rappor-tant plus ou moins étroitement àl’actualité, en l’illustrant par un ouplusieurs articles, souvent en pros-pective. Il s’agit, dans bien des cas,d’une entrevue ou d’une tableronde. En fait, on aurait souhaitépublier presque une entrevue parmois, mais les entrevues et surtoutles tables rondes exigeaient une lo-gistique complexe et beaucoup detravail d’affinage.

Le numéro de février 1973 nouspropose une entrevue avec l’éco-nomiste Jean-Luc Migué, celui demars, une table ronde sur la nutri-tion, celui de juillet, une autre sur

la sexologie, celui de septembre recueille les proposde Guy Beauchemin, sur l’industrie du médicament,et celui de novembre produit une entrevue avecRobert Marier, nouvellement élu à la tête de laFMRQ. Ouf !

De nouvelles rubriques voient le jour : bibliogra-phies, qui recense des titres d’ouvrages récents ; opé-ration décor avec Albert Bazergui, sur la décorationdu cabinet médical. Mai et juin 1973 couvrent lesactes du congrès du Xe anniversaire de la FMOQ,alors que le premier article de la série fleuve « re-groupements », qui fait une description de la cli-nique médicale de Saint-Bruno, est publié en août.Quatre de ces reportages seront publiés cette année-là. Enfin, en décembre, paraît un article culte deRodrigue Johnson et Thomas J. Boudreau, profes-seurs agrégés en science du comportement à laFaculté de médecine de l’Université de Sherbrooke,intitulé « Une lutte de pouvoirs ». « La profession mé-dicale, concluaient les auteurs de l’article, voit sa fonc-tion remise en question. Elle fait face à un pouvoir dontles visées rationalisantes s’appuient sur une logiqued’efficacité et de rentabilité, logique par ailleurs érigéeen langage. (…) La situation nouvelle est telle que lemédecin n’est pas loin d’être, au sens plein du terme,un employé parmi d’autres employés. » Ils reprenaientainsi, presque mot pour mot, la pensée qu’exprimaitle Dr Hamel dans son éditorial de janvier de la mêmeannée.

1974 et la Femme des dunes

En février 1974, la revue affiche sa première cou-verture couleurs pleine page pour illustrer un article,avant-gardiste pour l’époque, sur le dopage phar-macologique des athlètes, écrit par un certain RobertDugal, qui deviendra, quelques années plus tard, uneautorité mondiale en la matière. Un autre article surle bruit dans l’environnement industriel faisait par-tie de ce même numéro. Deux articles sur des sujetsde santé signés par des professionnels non médecinset traitant de domaines qui allaient bientôt devenirdes champs d’expertise particuliers pour de nom-breux médecins omnipraticiens : la médecine dusport et la médecine du travail. Ce ne sont pas lesseuls domaines d’expertise nouvelle qu’allait explo-rer Le Médecin du Québec avec un flair quasi pro-

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phétique. La nutrition et le traite-ment de l’obésité, la gériatrie, lamédecine des voyageurs, la méde-cine esthétique, la contraception,le traitement des MTS et la géné-tique, qui furent abordés parfoislongtemps avant d’être reconnuscomme des champs particuliersde la pratique médicale générale, en sont quelquesautres exemples.

En avril, première page couverture avec photo pleinepage destinée à illustrer un article du Dr BertrandSavoie sur l’évolution de la pratique de l’obsté-trique par un omnipraticien entre 1950 et 1970. LeDr Savoie, alors de Plessisville, un habitué de nospages, écrivait assez régulièrement des articles coups-de-poing qui faisaient jaser dans les chaumières

J’avais discuté du concept avec le Dr Boileau et j’enavais même fait une petite esquisse au pastel. L’imagefloue et savamment cadrée d’une femme enceintenue, couchée sur le dos, surmontée d’une grosse pas-tille jaune orangée sur un fond bleu devait a prioriressembler à un paysage désertique plombé de so-

leil. Le Dr Boileau accepta l’idée etse chargea de réaliser la scène avecnotre photographe officiel del’époque, René Bénard. En voyantle résultat, j’ai été à la fois frappéet ravi de la ressemblance del’image avec mon dessin, quoiqueun peu chagriné de la grosseur et

de la couleur rosâtre de la pastille qui, subtilement,dénaturait son rôle de soleil… Mais le vin était tiréet il fallait le boire. Cette page couverture audacieusedonna lieu à quelques commentaires perplexes.

Mai 1974 a été marqué par une table ronde surl’avortement. Un autre sujet audacieux pourl’époque. Je me souviens d’avoir beaucoup travailléà réécrire les interventions de cette table ronde. Mais,de par ma formation littéraire, j’aimais ce travail deréécriture qui nous force à assimiler le style et la men-talité de l’interlocuteur pour rendre l’essentiel de sespropos dans un langage personnalisé qui lui res-semble. En fait, une des participantes, la Dre ThérèseMartel-Jutras, de Victoriaville, n’avait pas pu se pré-senter à l’enregistrement, ce jour-là, sans doute à

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 69

Je venais de quitter l’enseignement. Sans trop savoir ce quim’attendait, je débarquai comme « conseiller technique » àla Fédération le 12 décembre 1972. En janvier 1974, j’étaispromu adjoint du rédacteur en chef. Le nouveau noyau de l’équipe de rédaction allait se révé-ler extrêmement stable : le Dr Boileau restera à son postejusqu’en 1997, Gilles Bauset jusqu’en 1992, Marie-Hélène(Pauline) Wolford, arrivée en 1975, jusqu’en 2003 etFrancine Belliveau, qui se joignit au groupe en 1976, y res-tera jusqu’en 1999. Quant à moi, j’y suis encore (duréemoyenne de la carrière de ces cinq personnes au Médecindu Québec, 26 ans). Mais cette longévité remarquable, quise confirmera quelque dix ans plus tard par le passage deSylvie Massenet de 1984 à 1997, n’est pas à mes yeux laprincipale marque de ce groupe.Cette équipe était cimentée par un immense enthousiasmeet une belle chimie : le Dr Boileau, le maître du menu, étaitouvert à toutes les hypothèses ; Gilles Bauset était tou-jours prêt à sauter sur le téléphone pour matérialiser unprojet qui venait à peine d’être évoqué, Francine Belliveau

était dotée d’une curiosité journalistique et d’un intérêtpeu commun pour le monde de la santé et la politique tan-dis que Marie-Hélène Wolford était l’efficacité tranquille ;quant à moi, mes principaux atouts, du moins à cetteépoque, étaient sans doute l’imagination et une certaineinconscience.Je n’avais, en effet, aucune peur de concepts et de pro-jets qui auraient fait reculer d’effroi des professionnelschevronnés et je ne tenais rien pour impossible avant d’enavoir moi-même vérifié l’impossibilité. Cette vérificationpouvait parfois être douloureuse, et je crois qu’on m’abeaucoup pardonné, mais la plupart du temps, contre touteattente, ça marchait !C’est au cours de ces premières années, au fil d’une ex-périmentation exaltante, qu’est né et s’est affermi en moiun objectif professionnel principal : rapatrier progressive-ment à la Fédération toutes les techniques qui nous pro-cureraient l’indépendance d’exécution et, partant, la pluscomplète liberté d’édition aussi bien sur le plan du contenuque sur celui du style d’écriture ou de la facture.

Un prof chez les docs

cause de la température et de l’étatdes routes (l’enregistrement avaiteu lieu en février ou mars). Ellenous avait quand même fait par-venir un texte que j’avais découpé,réécrit et inséré à certains endroitsdu dialogue des autres, à sa plusentière satisfaction, semble-t-il.

Les numéros de juin et juillet1974 étaient consacrés au congrèsde la FMOQ On y trouve, entreautres, des articles de Me Paul-André Crépeau, éminent juriste etspécialiste du droit médical et hos-pitalier, et de Léon Dion.

Les livraisons d’août et de sep-tembre innovent en utilisant desprésentations graphiques en cou-leurs pour les premières pages desarticles principaux, assez timide-ment en août, mais beaucoup plusrésolument en septembre.

Octobre voit la naissance d’unenouvelle chronique hobby, alorsqu’en novembre, on aborde un su-jet vraiment très avant-gardiste,dans un article signé LaurentLamer et intitulé « L’informatiqueet le médecin, promesse ou décep-tion ». Ce même numéro fait aussiétat de la visite de plusieurs offi-ciers du syndicat national des mé-decins omnipraticiens français,dont les impressions de voyages,recueillies par le Dr Boileau, serontcomplétées, dans le numéro sui-

vant, par une entrevue avec les Drs Daubinet,Francis Chaliol et Paul-André Béfort, sur lesyndicalisme médical en France.

De la Terre à la Lune

Ce titre, emprunté à Jules Verne par BertrandSavoie pour un nouvel article relatant et met-tant en contexte différentes étapes de sa carrière,évoque aussi pour moi le grand projet d’évolu-tion du Médecin du Québec dans sa deuxième dé-

cennie. Nous rêvions d’en faire un magazine qui au-rait pu soutenir la comparaison avec n’importe quelautre, y compris – et surtout – avec le prestigieuxMedical Economics.

En dépit de nos moyens modestes et d’une équipeplus que réduite, nous arrivions, parfois, à des ré-sultats étonnants. Comme cette couverture de jan-vier 1975 et la double page qui habillait le début del’article du Dr Savoie : une photo de la NASA illus-trant la Terre vue de la Lune. Ou encore, ce repor-tage exclusif de Christiane Fabiani (une journalistepigiste qui a collaboré quelque temps au Médecin duQuébec) intitulé « À 1000 milles de tout centre hos-pitalier, la clinique médicale de la Baie-James… »

Explorer des terres nouvelles, au risque d’écorcherau passage quelques préjugés, était un mode de vie.

Quelle plus belle occasion que l’année internatio-nale de la femme pour publier, en avril, une série dehuit entrevues d’Hélène Pelletier-Baillargeon avec au-tant de femmes médecins : « Médecins du Québec ».

Le numéro de mai 1975 présente, en page cou-verture, l’illustration d’un article du Dr AndréSindon du Collège des médecins du Québec. Au re-tour d’un voyage en Chine, en tant que membre dela délégation canadienne pour l’étude de l’acupunc-ture, le Dr Sindon avait relaté ses impressions et sesdécouvertes sous le titre « Hypoalgésie par acupunc-ture : mythe, montage ou réalité ». Je me souviensavec un certain émerveillement de cette page cou-verture réalisée, pour la première fois sous ma di-rection, au studio Denco par Gary Binda, un pho-tographe qui resta un de nos fidèles collaborateurspendant plus de dix ans. Les masques en ivoire pré-cieux, les cartables et les estampes chinoises,le petit coffret en boisfruitier

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et les aiguilles d’acupuncture nous avaient été gra-cieusement prêtées par l’auteur de l’article. Il ne fal-lut pas moins d’une demi-journée de travail en stu-dio pour disposer, dans une composition trèsétudiée, les objets sur le papier rouge, pour doser lalumière avec précision et pour calculer la profon-deur de champ optimale. Encore aujourd’hui, je re-garde cette image avec satisfaction.

Juin 1975 a également bénéficié d’une page cou-verture assez remarquable sur le « marketing » dela santé, la promotion de la vie saine et la médecinepréventive qui n’était, à cette époque, qu’un conceptencore en émergence. Est-ce une coïncidence, maisle mannequin qui saute en pleine nature porte unsurvêtement aux couleurs du Centre Épic, un centresportif spécialisé dans la prévention des troubles car-diaques… Quoi qu’il en soit, cette photo a effective-ment été remarquée par les Laboratoires Abbott quil’utiliseront (avec permission), à partir de la fin de1977, pour la publicité du Ventolin®. Le numéro dejuin 1975, qui marquait d’ailleurs le dixième anni-versaire du Médecin du Québec contenait un énoncéde quelques éléments de la politique éditoriale de larevue sous la plume du rédacteur en chef : « Nous ten-

terons, de plus en plus, disait le Dr Boileau en conclu-sion, d’ajouter de l’information en consacrant plus deplace aux dossiers, en produisant plus de numéros àthème.

« Rejoindre le lecteur, répondre aux questions qu’il sepose quant aux différents aspects de l’exercice médicalen lui fournissant une documentation d’une qualitétoujours améliorée, voilà notre objectif. »

En juillet, s’attaquant à une zone plus ou moins

Du moment où j’ai été nommé rédacteur-adjoint de larevue, j’ai été investi de tâches pour lesquelles il n’existaitpas encore de formation spécifique : pas vraiment d’écolesde journalisme, encore moins de cours de réviseur ou decorrecteur d’épreuves, pas non plus d’école de directionartistique. Le métier s’apprenait sur le tas et nous étionstous des généralistes, très peu nombreux d’ailleurs, dontcertains avaient simplement un peu plus d’expérience.

Lorsque Mme Saucier, secrétaire, quitta la revue à la finde 1976, j’insistai auprès de Lucille Malo, chef du person-nel à l’époque, pour que nous engagions une remplaçantequi aurait suffisamment de potentiel pour, le moment venu,prendre en charge des tâches comme la révision des texteset la correction des épreuves, à coup sûr parmi celles quime pesaient le plus.

La production de la revue avait pris, au fil des mois, plu-sieurs semaines de retard et nous avions, chaque mois, unequantité formidable de corrections d’auteurs* parce qu’ilétait à peu près impossible pour une si petite équipe de tout

mener à bien, à la fois dans les délais impartis et dans lesrègles de l’art.

C’est ainsi qu’arriva, en novembre 1976, Denise Monjot,une jeune secrétaire d’origine française que j’avais considéréapte à accomplir ce travail de révision et de correctiond’épreuves et qui, après un entraînement progressif dequelques années, occupa effectivement ces fonctions et dé-montra hors de tout doute la nécessité du poste de réviseur.

Quant à moi, plus littéraire et surtout plus enclin àl’idéation et au domaine graphique, je pus, tout en distil-lant quelques topos ou quelques reportages de temps àautres, récupérer graduellement la mise en pages, ce qui,tout en étant plus économique, nous laissait beaucoup plusde liberté et de contrôle.

Comme les doigts d’une seule main

* On parle de correction d’auteur lorsqu’il s’agit d’un change-ment demandé par l’auteur ou l’éditeur après la premièreépreuve, par opposition à une correction d’atelier qui découled’une erreur de l’imprimeur. Contrairement à la correctiond’atelier, la correction d’auteur est facturée.

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 71

taboue de la pratique médicale àl’époque, Le Médecin du Québecpublie une série d’articles sur lamédecine esthétique, préfacéepar nul autre que le Dr AugustinRoy, président du Collège desmédecins.

Horizons illimités

Après une série thématique surl’établissement d’un cabinet degroupe, avec pour auteurs princi-

paux Raymond Duquette, conseiller juridique à laFMOQ, et Émery Marcoux, architecte consultant, etune autre série, encore plus costaude, sur la santé autravail, Le Médecin du Québec publie, en octobre1975, une entrevue avec le Dr Charles Dumont inti-tulée «Médecin chez les Cris et les Inuits ». On y dé-crivait la prestation des soins de santé dans le GrandNord québécois, sur les côtes de la baie James et dela baie d’Hudson, jusqu’à Ivujivik, à l’extrême Norddu Nouveau-Québec.

En novembre, dans le cadre d’une série d’articlessur la pédiatrie, dont l’un était signé Gloria Jeliù, unarticle intitulé « Les dysfonctions cérébrales mineureschez l’enfant » et signé Raymond Lafontaine fut, àma connaissance, le point de départ de la diffusiondu désormais célèbre « principe de Lafontaine ». Envertu de ce principe, les humains se divisent princi-palement en auditifs et en visuels, plus rarement enolfactifs, en gustatifs, en tactiles ou en kinesthésiques.

Le Dr Lafontaine et sa collaboratrice Béatrice Lessoilétaient intéressés à rendre accessible aux médecinsomnipraticiens, voire au grand public, leur théorieselon laquelle le sens privilégié par l’enfant pour sonapprentissage déterminait en lui un certain profil,auquel étaient associé des forces et des faiblesses. Cesfaiblesses, connues une fois le mode d’appréhensiondu réel établi, pouvaient alors mieux être compen-sées. J’avais donc rencontré le Dr Lafontaine et sa col-laboratrice qui m’avaient transmis une certaine do-cumentation. Nous avions parlé pendant plusieursheures. Je leur avais rendu, peu de temps après, unesynthèse « vulgarisée » de notre rencontre, qui, aprèsquelques retouches, était devenue l’article mentionnéplus tôt.

Curiosité bleue ou jaune ?

Fidèle à son intérêt pour les systèmes de santé etles associations médicales du monde, le Dr Boileau,profitant d’un voyage d’étude organisé par le Syn-dicat national des médecins omnipraticiens français,nous avait rapporté un article mi-journal de voyage,mi-étude qu’il avait intitulé « Contact avec la méde-cine suédoise ». C’était en janvier 1976. Une imagem’était tout de suite venue à l’esprit : pourquoi nepas faire du titre de l’article (qui s’y prêtait fort bien)un élégant et subtil rappel du drapeau suédois ? Jeme revois encore appelant le consulat de Suède etdemandant à l’employée qui m’avait répondu de medécrire les teintes exactes du drapeau de son pays…

Le même numéro contenait, en outre, une nou-velle chronique cinéma signée Richard Gay. Autrefait à noter dans ce numéro, les « Échos et com-mentaires » deviennent « Antipasto ». Ce titre de ru-brique un peu énigmatique laissa bien des lecteurs– et même des chroniqueurs – perplexes. J’avais pro-posé ce titre au Dr Boileau en raison de la brièvetédes articles de leur position dans la revue, avant le« plat principal », et de l’orientation, de la « saveur »éditoriale, acidulée ou piquante qu’on pourrait leurdonner : de véritables commentaires plutôt que descomptes rendus ou de simples faire-part.

Février 1976 allait être dévolu au sport olympiqueet aux mesures prises pour assurer aux athlètes quinous visiteraient dans un avenir tout proche lesmeilleurs soins de santé possibles. À remarquer, en

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page couverture, l’image stroboscopique d’un ath-lète sautant une haie, arborant, dans le coin supé-rieur droit, en rouge spécial, le logo des Jeux olym-piques de Montréal.

En avril, Le Médecin du Québec publie une rareentrevue du Dr André Barbeau, professeur titulairede neurologie à l’Université de Montréal et directeurdu département de neurobiologie à l’Institut de re-cherches cliniques de Montréal. Au fil de cette ren-contre, le Dr Barbeau lève le voile sur l’origine desmaladies génétiques québécoises, particulièrementnombreuses étant donné les paramètres de la colo-nisation. « Au début, la colonisation s’est faite à par-tir d’un très petit nombre de Français qui ont établileurs pénates dans des endroits assez éloignés les unsdes autres, favorisant ainsi les mariages dans unrayon relativement restreint. Cette réalité a conduità un très fort taux de consanguinité (…) d’ailleursun des plus élevés dans l’histoire du monde. »

Plus l’année avance, plus la tendance à recourir àdes numéros thématiques s’affirme : « La médecined’urgence », « Criminologie et médecine », « Vies demédecin » (une série d’entrevues avec six médecins,visant à illustrer différentes facettes de la pratique),« Les conflits hospitaliers », « Rx vacances » et « Géo-graphie de la mortalité au Québec », une table ronded’une ampleur telle qu’on dut la répartir sur deuxnuméros (novembre et décembre).

Le numéro d’octobre, sur les vacances, a été no-tamment l’occasion d’une nouvelle collaborationavec Pierre Vincent, chroniqueur régulier à La Presse,sur les différents types de destinations et d’activitésde vacances. En plus de trois articles de PierreVincent, on y trouve, entre autres, un article deLouis-Martin Tard, des conseils du skieur PeterDuncan, du photographe Antoine Désilets et du gas-tronome Gérard Delage : jolie brochette d’auteurs.

Une étape décisive

La mise en pages, progressivement récupérée eninterne au cours de l’année 1976, se raffine de façontangible et bénéficie d’un bien meilleur contrôle quelorsqu’elle était faite à l’extérieur. Les articles de larubrique Regroupements sont maintenant illustrésde photos couleurs.

Le numéro de janvier, sur la planification financière,

illustre bien la nouvelle tendancede la revue qui, tout en conser-vant ses objectifs socio-politico-économiques et médicaux, s’efforcede devenir un outil pratique pourle lecteur, aussi bien qu’une sourcede réflexion et d’information surl’horizon médical le plus large pos-sible, sur le milieu où le médecinquébécois évolue.

Les articles des thèmes sontmaintenant réunis par un lien gra-phique évident, nouveau chaquefois et étudié pour correspondre authème. Le numéro de février 1977,sur la médecine de groupe, en estun bon exemple : un logotype ré-unissant les lettres M et G, sur-monté d’un gros point de couleurdifférente pour chaque article,évoque subtilement le médecin defamille avec sa trousse.

En avril, le Dr Boileau relate uncongrès de l’American MedicalAssociation. Dans le même nu-méro, Hélène Pelletier-Baillargeon et JacquesBaillargeon signent les deux premières parties d’unimposant dossier intitulé « Le médecin devant lamort ». La troisième partie, étudiant les tenants etaboutissants de l’euthanasie, sera publiée le moissuivant.

En juin, la revue fait état du IVe congrès syndicalde la FMOQ. La page couverture de ce numéromontre un caducée de bronze d’allure monumen-tale qui se dresse sur un fond de ciel nuageux. Ils’agit, bien sûr, d’un montage photographique, unjeu d’enfant avec les logiciels de traitement d’imaged’aujourd’hui, mais un exploit pour l’époque. Enfait, la petite stèle de bronze et d’époxy, œuvre deBernard Chaudron, ne mesure guère plus de 30 cm,mais paraît bien plus imposante étant donné lacontre-plongée, l’éclairage et la courte focale de l’ob-jectif qui accentue la perspective.

Autre « exploit » photographique, la couverturede juillet qui montre un casque de travailleur sur le-quel sont projetées des cheminées d’usine et où sont

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inscrites les lettres MD. Le numérotraite, évidemment, de médecinedu travail. Suprême coquetteriegraphique, les pages titres des ar-ticles sont agrémentées de deuxencres spéciales, l’une gris acierdans laquelle s’inscrit le texte enrenversé, l’autre métallique et ar-gentée. Août 1977 nous offre lapremière partie d’un article sur lestroubles sexuels où la mise enpages joue encore un rôle sémio-tique évident ; quelle époque bénieque celle où on pouvait chaque foisréinventer le vêtement que portaitle texte…

C’est également vers cette époqueque les programmes annuels de for-mation continue de la FMOQ com-mencent à prendre une forme plusorganisée : une page complète, enseptembre 1977, annonce cinqcongrès pour l’automne et le prin-temps suivant, dont trois à Mont-

réal et deux à Québec. On pouvait s’inscrire auxcongrès de deux jours pour 60 $, alors que le congrèsde trois jours sur l’urgence, tenu à Montréal, coûtait100 $ aux participants.

Novembre 1977 aborde un autre sujet assez no-vateur, dans un article de Jean-Claude Panisset inti-tulé : « Les médicaments dans l’industrie animale,

un danger pour la santé de l’homme ? ». C’est éga-lement à partir de ce numéro que commencèrent àêtre publiés les formulaires de demande d’admissionau concours des bourses d’études Upjohn, offertesaux médecins omnipraticiens du Québec en colla-boration avec la FMOQ. Quatre bourses de 1000 $,applicables selon certaines conditions à des cours àtemps complet, d’une durée d’au moins deux se-maines, étaient attribuées.

Les dures réalités de la vie adulte

De 1973 jusqu’en 1978, Le Médecin du Québecavait connu une croissance étonnante. Nous allionsmaintenant adopter un rythme de croisière un peuplus calme, marqué par une augmentation beaucoupplus lente du nombre de pages d’annonces, voire unestagnation ou même, certaines années, un fléchisse-ment et, de toutes façons, un excédent de pages édi-toriales. À partir de 1978, nous allions connaître deplus près les budgets difficiles et les restrictions, mal-gré le soutien indéfectible de la FMOQ qui épon-geait, bon an mal an, les déficits inévitables.

Pourquoi cette baisse des pages d’annonces ? Pourdes raisons assez obscures auxquelles ne sont certespas étrangères la saga des brevets pharmaceutiquesqui mena au projet de loi C-22, et l’apparition, en1980, de deux nouveaux tabloïdes, L’Actualité médi-cale et L’Omnipraticien.

Gérer un tel arrêt de croissance n’est pas facile, caril faut garder un air de croissance ou du moins debonne santé. C’est bien connu, on ne prête qu’auxriches… Les annonceurs paient pour être vus dans desmédias qui ont le vent dans les voiles. Gare à celui quis’approche trop d’une spirale dépressionnaire ! Parailleurs, dans une publication comme la nôtre, les dé-cisions qu’on applique aujourd’hui ne donnerontguère de résultats avant six mois : une revue, ça faitvolte-face aussi facilement qu’un pétrolier…

Quoi qu’il en soit, le format et l’attitude éditorialeétaient déjà bien établis en janvier 1978, et Le Méde-cin du Québec allait rester à peu près égal à lui-mêmejusqu’en 1985, avec, de temps à autres, quelques feuxd’artifices.

Les pages couvertures de janvier et de février 1978restent pour moi de beaux souvenirs. Janvier voit,par ailleurs, le retour de Jacques Duval sous une

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autre forme de collaboration quecelle de chroniqueur : désormais ontirerait chaque année un article d’uneentrevue avec lui. Février marqua ledébut d’une nouvelle collaboration,celle de Lise Lachance, égalementcorrespondante au bureau de Mont-réal du journal Le Soleil. En mai, sousle titre « Demain… la vieillesse », nousabordions un sujet qui aujourd’hui,à la veille de la retraite massive desbaby-boomers et avec un taux de na-talité en chute libre depuis trois générations, de-meure d’une brûlante actualité : le vieillissement etses répercussions sur le système de soins, dans uneperspective sociodémographique. En août, nous pu-bliions une étude de Nicole Dedobbeleer, André-Pierre Contandriopoulos, Reynald Pineault etG. Derome sur un autre sujet qui fait encore parleraujourd’hui et qui a marqué de façon indélébilel’évolution de la pratique partout dans le monde :la féminisation du corps médical. L’article s’intitu-lait « Femmes médecins de demain : perspectives decarrière des internes et résidents dans deux hôpitauxde Montréal ». Il regorge de données très intéres-santes, notamment sur l’importance accordée à cer-tains facteurs lors du choix d’une carrière médicale,selon le sexe.

Ce même numéro marque également le début denotre collaboration (qui durera près de 15 ans) avecFranco De Luca, un illustrateur qui nous rendit degrands services surtout après 1986, alors que la re-vue s’était franchement orientée vers la formationmédicale continue.

Le numéro de novembre allait être à l’origine d’uncurieux phénomène. Depuis plusieurs mois, nousavions évoqué l’intérêt probable d’un numéro sur lamédecine des voyageurs, mais nous nous demandionsqui pourrait bien écrire un numéro sur ce sujet ? Parun heureux concours de circonstances, le Dr PierreViens, alors responsable de la clinique parasitaire del’Hôtel-Dieu de Montréal fut mis au courant de notreprojet. Avec son collègue, le Dr Richard Morisset, chefdu Service des maladies infectieuses au même hopi-tal, il accepta, avec enthousiasme le véhicule que luioffrait la revue.

Il s’adjoignit quelques auteurs, leDr Boileau lui en proposa quelques au-tres, et c’était parti. Non seulement cenuméro bien étoffé a-t-il été bien ap-précié des médecins, mais on publiaen supplément une petite brochuredestinée à être distribuée au grand pu-blic. La brochure « Voyager en santésous les tropiques » a été rééditée neuffois en neuf ans, citée de nombreusesfois dans les médias comme un ou-vrage de référence pour le grand pu-

blic, recommandée par l’Association des agents devoyage du Québec et tirée, en tout,à 43 000 exemplaires, ce qui en faitun des grands succès du Médecindu Québec.

S’inspirant de l’année interna-tionale de l’enfant comme il s’étaitinspiré de l’année de la femme etdes jeux de la XXIe Olympiade, LeMédecin du Québec publiait, en fé-vrier, sous le titre « Le Monde desjeunes » une série d’articles sur lesaspects psychosociologiques del’enfance et de l’adolescence, avecdes auteurs comme, Julien Bigraset Jean Wilkins. En mars, sous letitre « Prolonger la vie ou la mort,à qui de décider », la revue explo-rait encore les thèmes de l’eutha-nasie et de l’acharnement théra-peutique avec des auteurs commePaul-André Crépeau et David Roy.Ces deux thèmes bénéficièrentd’un traitement graphique très éla-boré, peut être même un peu lourdet répétitif, étant donné le nombred’articles. Le Dr Boileau m’en ayant fait la remarque,je me mis à la recherche d’une formule graphique-ment efficace, mais plus légère.

C’est en mai que, lors d’un numéro thématiquesur « L’alcool et l’homme » illustrant toutes les fa-cettes de la consommation, y compris l’alcoolisme,j’entrevis une solution intéressante en utilisant lequart supérieur gauche de la page et en mettant à

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 75

profit la composition typographique et la couleur. C’est cette solution que nous avons privilégié,

quelques années plus tard, lors de l’établissementd’une nouvelle grille graphique pour les textes deformation continue, à une différence près, cepen-dant : pour l’éditeur, la page de droite est considéréecomme la « belle page » C’est, en effet, à droite que,dans la culture occidentale, s’arrête le regard en boutde course. Tant et si bien qu’en boutade, les anglo-phones parlent parfois de right page et de wrongpage (pour désigner la page de gauche). Prenantconscience de cette réalité, j’envins à développer une véritableobsession pour… l’alignementappuyé à droite et le quart supé-rieur droit de la page.

À l’automne de 1979, Le Méde-cin du Québec conclut de accordsavec une revue française dirigéepar Jean-Pierre Sergent : Le Jour-nal médical des voyages. En vertude ces ententes, nous étions auto-risés à reproduire des dossiers déjàparus en France sur la médecineet les soins de santé dans lemonde. Intéressante collaborationqui débuta en novembre 1979 parun volumineux dossier sur laChine et qui, au cours des années subséquentes, nouspermit de parler entre autres de la Colombie, de laCalifornie, de la Tchécoslovaquie, de la Belgique de

l’Allemagne de l’Est, de la Grande-Bretagne et de laSuède.

L’année 1980 débute sur un ton franchement syn-dical, alors qu’un premier bloc d’article relate le col-loque Synergie, tenu les 18 et 19 octobre de l’annéeprécédente. Synergie avait réuni à Mirabel quelques150 représentants de la FMOQ, de l’Association deschirurgiens dentistes du Québec, de l’Associationquébécoise des pharmaciens propriétaires et del’Association professionnelle des optométristes duQuébec, dans le but d’élaborer une démarche stra-

tégique, une orientation unifiéequi guiderait les représentants desprofessionnels dans leurs de-mandes au gouvernement. L’évé-nement était d’importance, puis-que la précédente rencontre dugenre avait eu lieu 12 ans plus tôt.D’autant plus important pour LeMédecin du Québec que la revuejouait, depuis 1975, la carte dusyndicalisme médical québécoisplutôt sotto voce.

Le numéro d’avril 1980 a été, enquelque sorte, le numéro du 15e

anniversaire de la revue : on y pré-sentait un florilège des meilleursextraits éditoriaux ou graphiques

des quinze années précédentes. La page couverturede ce numéro est d’ailleurs, en soi, ce qu’on pour-rait appeler une pièce d’anthologie : le chiffre 15 englace (sculpté par M. Pierre Brunelle), qui sembleassez anodin une fois imprimé, mesurait en réalitéprès de 1,5 m et pesait environ 175 kg ! C’est qu’ilavait fallu le transporter jusqu’au studio dans unepetite Volkswagen et le placer sur la « glace » (unevitre d’environ 3 cm d’épaisseur) qui permettrait del’éclairer par le dessous. Cette seule opération né-cessita au moins trois solides gaillards à chaque boutde la chaîne. Théoriquement, un tel éclairage devaitpermettre à la glace de diffuser la lumière et donnerune impression de radiance douce. Quant à la photoreprésentant la nébuleuse d’Orion, elle nous avaitété prêtée par M. André Paul, de la Société d’astro-nomie de Montréal. Finalement, l’effet n’était pas siterrible, mais c’est – et de loin – la page couverture

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la plus épique qu’il nous fut donné de faire.Deux autres hauts faits, les numéros de septembre

et d’octobre de cette année-là. Inscrits sous le thème« Réflexions sur la santé au Québec et au Canada »,ces numéros totalisent, à eux seuls, plus de 410 pageset comprennent, entre autres, des entrevues avecMonique Bégin et Denis Lazure, une opinion deJean Rodrigue et des textes de David Roy, HansSelye et Henri Laborit. Le numéro de novembre, pasmoins costaud (202 pages intérieures), dont le thème,« L’amiante, ce mal connu », avait été dirigé par leDr Pierre Boux, un omnipraticien d’Asbestos qui seportait à la défense du minéral en voie d’être ostracisé.

Quel automne !

La formation de l’omnipraticien : une préoccupation qui s’affirme

En mars 1981, Le Médecin du Québec fait état d’unepréoccupation croissante de la FMOQ : la formationde l’omnipraticien, autant sous l’angle des études uni-versitaires que sous celui de la formation continue.La revue publie, en fait, le rapport du comité ad hocinstitué par le Bureau de la FMOQ et confié à la di-rection du Dr Robert Bourque. Ce rapport recom-mandait, notamment que « l’omnipratique soit re-connue comme une discipline spécifique », nantied’une formation spécifique conçue et dirigée par desomnipraticiens. Il concluait, en outre, que « l’Étatdoit considérer la formation continue comme par-tie intégrante du service rendu au malade et, de cefait, en favoriser l’accès par la voie des ententesconclues avec la Fédération. » C’était un premier pasvers la création des départements de médecine gé-nérale et des unités de médecine familiales

En fait, dans une lettre adresséeau Dr Augustin Roy, président-secrétaire général de la Corpora-tion professionnelle des médecinsdu Québec (l’actuel Collège desmédecins du Québec) datée du22 janvier 1981, le Dr ClémentRicher avait même fait une de-mande d’agrément des services deformation de la FMOQ. À la suitede la visite d’agrément menée parles Drs François Laramée et AndréSindon, la FMOQ et ses associa-tions affiliées étaient agréées pourla première fois, le 21 octobre 1981,en vertu d’une résolution du Co-mité des études médicales. Onpourrait y voir une préfigurationde la future vocation du Médecindu Québec.

La mort d’une étoile

Tel que l’avait relaté l’antipastod’octobre, le Dr Gérard Hamel dé-missionnait de son poste de président de la FMOQ,le 20 août 1981, pour des raisons de santé. Ainsi quit-tait l’un des titans qui avaient présidé à la naissancedu syndicalisme médical et de la revue. Le Dr AndréCzitrom, premier vice-président, assura l’intérimd’août 1981 jusqu’à l’assemblée annuelle de la mêmeannée, au cours de laquelle le Dr Clément Richer futélu à la présidence, le 12 décembre.

En novembre, la revue publia la première partied’une importante étude de Me Paul-André Crépeau,

sur la responsabilité del’établissement hospitalieren droit civil canadien. Ladeuxième partie parut enfévrier 1982 et la troisième,en mars. L’ensemble futrepris sous forme de sup-plément. Peu habitués à lapublication de textes juri-diques de cette nature, nousavions été un peu étonnés(lire « traumatisés ») des

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L’équipe du Médecin du Québec en 1980. De gauche à droite, Mmes Pauline (Marie-Hélène) Wolford etDenise Monjot, M. Jean-Guy Aumont, le Dr Georges Boileau, Mme Francine Belliveau et M. Gilles Bauset.

quelque 238 notes de jurisprudence qui suivaient letexte : presque autant de pages en petits caractèresque le corps de l’article. Un peu naïvement, nousavions demandé à Me Crépeau s’il ne pouvait pas enretrancher quelques-unes…

Au début de mars 1982, GérardHamel mourait des suites de sa ma-ladie. La page couverture du nu-méro, modifiée en toute hâte, demême qu’un encart de quatre pagesreproduisant, à l’identique, le pre-mier éditorial, lui furent consacrés.

Le numéro de juin 1982 a ceci departiculièrement remarquable quele Dr Boileau a reçu un prix dejournalisme (le Kenneth R. WilsonAward offert par la Canadian Busi-

ness Press Association) pour des articles qui y sontréunis sous le thème du syndicalisme médical enFrance et en Belgique, issus de propos recueillis aucours des Assises de la médecine générale tenues àParis en février 1982.

Un second souffle syndical

Parallèlement au développement de la formationmédicale continue, et de la formation des formateursqui en découle, la FMOQ commença à s’intéresser àla préparation de la relève syndicale et à mettre aupoint un cadre rigoureux pour permettre à ses lea-ders, présents et futurs, d’affronter avec plus d’aisanceles dossiers de plus en plus techniques du syndica-lisme médical ainsi que le monde terrifiant des mé-dia. C’est ainsi que se concrétisa le premier ColloqueGérard-Hamel, tenu à l’Université Laval les 12 et13 mars 1982 et relaté dans le numéro de juillet.

Autre innovation, en octobre, l’encart d’informa-tion syndicale. Sous Clément Richer, le syndicalisme,mis en filigrane par Gérard Hamel, après avoir étéle cœur de la revue pendant les premières années,redevient nettement plus visible. L’un des principauxproblèmes quant à la publication de nouvelles syn-dicales, voire d’éditoriaux syndicaux, réside dans lefait qu’un mensuel est parfois décalé de l’actualité –beaucoup plus, en tout cas, qu’un tabloïde hebdo-madaire ou bimensuel, de sorte que l’informationsyndicale véhiculée est parfois caduque avant même

que le lecteur puisse y accéder.Il fallait donc trouver le moyen d’insérer dans la

revue un cahier qui serait produit très rapidement,à la toute dernière minute, de façon à offrir au lec-teur une image plus fidèle de la situation. Cette sec-tion imprimée en deux couleurs sur un papier dif-férent devait, quel qu’en soit le nombre de pages, setrouver toujours au même endroit. La solution : pla-cer les pages d’actualité et d’information syndicalesavant le sommaire. Cette pratique nous sembla,certes, un peu bizarre au début : commencer la re-vue sur autre chose qu’un sommaire… Mais nousnous sommes vite rendu compte que nous n’étionsni les premiers ni les seuls à agir de la sorte.

Janvier 1983 marque le début d’une intéressantecollaboration avec une journaliste chevronnée :Thérèse Dumesnil. Férue de musique et d’alpinisme,Mme Dumesnil écrira pour la revue pendant plus dedix ans, principalement sous la rubrique « Médecinsdu Québec », une sorte de galerie de portraits de mé-decins québécois choisis pour leur mérite, leur no-toriété ou leur personnalité.

On remarque, dans les premiers numéros de 1983,que les changements dans le traitement graphiquedes articles se sont étendus de l’information syndi-cale et de l’antipasto à toutes les autres rubriques, àl’exception des articles faisant partie d’un thème, quibénéficient toujours d’un traitement de faveur.

En février, les articles réunis sous le thème « L’ins-tallation du jeune médecin » font l’objet d’un tiré àpart qui sera, par la suite, repris et produit sous formede cartable destiné aux internes et aux résidents.

D’autres numéros se démarquent : celui d’avril,sur les MTS, sous la direction du Dr Marc Steben,un des premiers au Québec à consacrer tout un ar-ticle au sida, maladie apparue en 1981, et dont onne recensait à l’époque que 1000 cas aux États-Uniset 26 au Canada. Le numéro de mai 1983, piloté, c’estle cas de le dire, par le Dr Jacques Bouchard, portaitsur les services médicaux prévus pour les coureursautomobiles du Grand prix de Montréal. Juillet re-late les actes du deuxième Colloque Gérard Hamelet montre, en page couverture quatre gros volumesreliés, marqués des titres des grands thèmes du col-loque. Ces reliures avaient été gracieusement confec-tionnées par l’Imprimerie coopérative Harpell qui

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gérait, soit dit en passant, le plus gros atelier de re-liure du Québec. Intéressant dossier en septembresur les médecins administrateurs, puis en novembre,un autre, très étoffé, sur la dépression, illustré parune toile produite expressément pour l’occasion parle peintre Littorio del Signore.

Janvier 1984 voit l’inauguration d’une page cou-verture et de pages sommaires entièrement redessi-nées. La précédente version de la page couvertureavait duré 10 ans, ce qui est relativement long. Onestime aujourd’hui qu’une grille graphique doit êtresubstantiellement rafraîchie au moins tous les quatreou cinq ans. Une autre des caractéristiques de ce vi-rage graphique fut l’utilisation accrue de la photo etde l’illustration couleurs.

En mai 1984, en plus de proposer un éventail qué-bécois de destinations vacances, la revue publie unintéressant article des Drs Jacques Desmarchais,Pierre Delorme et Pierre Jean intitulé : « L’autofor-mation modulaire : des omnipraticiens fabriquenteux-mêmes un moyen pratique de formation conti-nue ». C’est le début d’un tandem de la FMOQ avecl’Unité de recherche et de développement en éduca-tion médicale (URDEM) de la Faculté de médecinede l’Université de Montréal. Ces auteurs, en parti-culier Pierre Jean, allaient jouer un rôle déterminantdans le développement du volet formation continue

des activités de la Fédération et,plus précisément, dans le virage ra-dical qui se concrétisa en mars1986 avec la publication du pre-mier numéro de formation médi-cale continue.

En juin, le Dr Richer, dans sonéditorial, évoque un problème en-core lancinant 20 ans plus tard :celui des pénuries d’effectifs. Est-ilétonnant que, parmi les numérosgravitant autour de cette période etde cet éditorial, plusieurs portentsur les régions éloignées ?

En 1985, Le Médecin du Québeca 20 ans. Les thèmes avant-gardistesd’il y a dix ans se répètent mainte-nant avec une certaine régularité,peut-être même avec une certaineprévisibilité. Par ailleurs, animéed’un nouveau et puissant soufflesyndical sous la présidence deClément Richer, la revue fait main-tenant état d’informations, de ré-flexions et de débats qui étaient depuis longtempsréservés à d’autres véhicules de communication,comme le Bulletin de nouvelles de la FMOQ ou le

Le Médecin du Québec, volume 40, numéro 6, juin 2005 79

Au début des années 1980, Le Médecin du Québec, organe offi-ciel et « vitrine » parmi d’autres de la FMOQ, traversait une criseassez douloureuse sur le plan financier étant donné la concur-rence de deux nouveaux médias médicaux et la réserve del’industrie pharmaceutique, irritée par un projet de loi sur lesbrevets. Cette crise ayant engendré un questionnement sur le« rendement politique net » de la revue, sur son identité et sur savocation, le bureau de la FMOQ décida, en septembre 1982, decréer un comité éditorial qui pourrait encadrer l’orientation ducontenu général de la revue, valider ses stratégies de marketinget analyser sa situation financière. Ce comité de trois membresincluant le rédacteur en chef, fut présidé, jusqu’en 1995, par leDr Renald Dutil, actuel président de la Fédération. Aboli en 1997,ce comité fut réinstitué en janvier 2004 avec pour mandat d’ob-server avec impartialité et rigueur, l’évolution de la revue par rap-port à ses objectifs. Il est actuellement composé des Drs Jacques

Desroches, Christiane Simard, Jean Rodrigue, directeur de laPlanification, de la Régionalisation et des Communications à laFMOQ, et Louise Roy, rédactrice en chef.Dans la foulée des questionnements identitaires lancés par le co-mité éditorial à ses débuts, on en vint à considérer, aprèsquelques sondages et mûre réflexion, que le créneau de la for-mation médicale continue en était un d’avenir et qu’il corres-pondait à un besoin ressenti. C’est ainsi que le comité de rédac-tion scientifique a été mis sur pied par le Bureau de la FMOQ enjuin 1985. Il était chargé d’élaborer et de contrôler le contenu an-dragogique de la revue dans le cadre des politiques du comité deformation de la FMOQ et du comité éditorial Ce comité d’abord composé de 4, puis de 5 membres, incluant le ré-dacteur en chef, fut présidé successivement par les Drs Jean-MauriceTurgeon (de 1985 à 1995), Gilles Otis (de 1996 à 1999), LouiseRoy (en 2000 et en 2001) et Michel Lapierre (de 2002 à nos jours).

Deux comités à la rescousse

bulletin spécifiquement consa-cré aux relations entre les fé-dérations médicales et le gou-vernement du Québec intituléLe point sur les négociations. Àpreuve, une série d’articles surla Loi 27, commençant enjanvier 1985 et arborant les lo-gos de la FMSQ et de laFMOQ.

Le vingtième anniversairede la revue est, en fait, souli-

gné dans le numéro de novembre dont la page couverturen’est autre qu’un cliché de zinc à l’ancienne, où le logo ha-bituel et le sommaire des principaux articles ressortent enrelief de métal brossé sur fond sombre. Dans l’éditorial dece numéro, le Dr Boileau écrivait : « S’il est une publica-tion qui a pu aborder avec une influence certaine la distri-bution des soins, les coûts de la santé, les relations entre lesmédecins et l’État, ainsi que les diverses facettes de la pra-tique médicale, c’est bien Le Médecin du Québec (…) Ilfaut surtout, dans un numéroanniversaire, penser à l’avenir.Des dispositions ont été prisespour qu’un nouveau programmede formation continue occupe unbloc complet dans la revue à par-tir de mars 1986. (…) Le tempsétait venu d’offrir aux médecinsomnipraticiens, dans l’écrit, uneforme de formation continuebien adaptée à leurs besoins. »

La période d’apprentissage dela revue s’achevait. Désormaisbien rodée, l’équipe de rédac-tion, après quelque 12 ansd’une production d’abord unpeu brouillonne dans son en-thousiasme naïf, mais de mieuxen mieux maîtrisée, chaque foisréinventée et toujours à l’écoutedu monde où elle évoluait, étaitsur le point d’affronter le for-midable défi de créer de nou-velles normes en matière de for-mation médicale continue. 9

Le médecin du Québec

Félicitationsde l’Association des médecins de langue française du Canada

pour les 40 ans d’excellence de la revue

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