1
LE CO NCOURS MEDICAL H éne VE R D OUX, Audrey COUGN AR D Univ. Vi ctor Se gale n, Bor de aux-2 L es médecins gé néraliste s jouent u n r ôle clé dans l’identification et l’accès aux soins précoce des sujets atteints d’une schizophrénie, débutante en particu li er. Les études por tant sur des adolesc ents ou des adultes je unes mon trent que le dé lai entr e l’appari tion des premiers symptômes psychotiques et l’instauration d’un tr aitement adapté es t de plusieur s mois, voire de plu- sieur s ann ée s (11). De plus, ces études suggèren t que le pronostic pourrait être d’autant plus défavorable que ce délai es t plu s long (6). Malgré les progrès pharm acolo- giques a ccompl is lor s de s de r ni ères déce nn ies, la schi- zophrénie est encore trop souvent génératrice de handi - cap s évè re, e n parti culi er du fait de son retentiss ement sur les capacités d’insertion socio-professionnelle. La mise en place le plu s pr écoce possibl e d’un tr aitement adapté est donc essenti ell e pour tenter d’améli orer l e pro- nostic des personnes souffrant de schizophrénie. PSYCHO SE N O N TR A ITÉ E : UNE RIODE  À H AU T RISQ UE La schizophr énie commence le plus souvent par une phase pr odrom ique ca ractérisé e pa r d es sympt ômes non spécifiques (encadré1) , p ouvant dur er plu sie ur s ann é es avant l appa ri tion des sym pt ôm es psychoti ques (enca- dr é  2) . L ’émergence de sym pt ômes psychotiques est une expérie nce ps ychi que d r amatique pour l a pe r so nne qui subit l in vasion de so n psychi sme par des phénom ènes angoissants et incon tr ôlabl es , tels que des hall ucinations auditives , la transform ation de l environnement en un uni vers hos til e et in compr é hensibl e, le se nti ment de perte didentit é et de fr ag m entation psychi que . La so uffr ance et la d étresse de l entourage face à l effondrement psy- chique de leur enfant, co njoint ou ami (e) sont aussi consi- D é pistage des troubles schizophr é niques d é butants R ô l e du g é n é raliste T r ai ter l ep l u sp r écoce m en tpos si b l ees tess en ti el p ou r ten ter d’am éliorer l e p r on os ti c d e l a s chi zop h r én i e. M ai s l es sy m ptôm es d e déb ut ne s ont passp éci f i ques. L’entour ag e j ou e u n rôl e cruci al . 95 3 Tome 126- 17 05-05-2004 FORMATION  Schi zoph r é ni e ( pe tsca n) . L im age r ie ne st utili sé e que dans le cadr e de prog r ammes de r e che rche. BSIP/NIH/SCIENCE SOURCE

Depistage Schizo Debutant

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L E C O N C O U R S M E D I C A L

 H él èn e V ER D O U X , A u d r ey C O U G N A R DUniv. Victor Segalen, Bordeaux -2

L

es mé decins généra listes jouen t un rôle clé dansl’identification et l’accès aux soins précoce des

sujets atteints d’un e sch izophrén ie, débutante enparticulier. Les études portant sur des adolescents ou desadu ltes jeun es m ontren t que le délai entre l’appar itiondes premiers symptômes psychotiques et l’instaurationd’un traitemen t adapté est de plusieur s mois, voire de plu-sieurs ann ées (11). De plus, ces études suggèrent que lepronostic pourr ait être d’au tant plus défavorable que cedélai est plus long (6). Malgré les progrès pha rm acolo-giques accom plis lors des dern ières décenn ies, la schi-zophrén ie est encore trop souvent généra trice de han di-cap sévère, en par ticulier du fait de son re tentisseme ntsur les capa cités d’insertion socio-professionne lle. La

m ise en place le plus pré coce possible d’un traitemen tadapté est donc essen tielle pour tenter d’am éliorer le pro-nostic des personn es souffran t de schizophré nie.

PSYCHOSE NON TRAITÉE : UNE PÉRIODEÀ HAUT RISQUELa schizophrénie comm ence le plus souvent par un e

phase prodrom ique caractérisée par des symptômes non

spécifiques (encadré 1), pouvan t durer plusieurs ann ées

avan t l’apparition des symp tôm es psychotiques (enca-

dr é 2) . L’émergence de symptôm es psychotiques est un e

expérience psychique dram atique pou r la personne

subit l’invasion de son psychisme par d es phénom èn

an goissan ts et incontrôlables, tels que des h allucinati

au ditives, la transform ation de l’environnem ent en

un ivers hostile et incompréhen sible, le sentimen t de pe

d’identité et de fragm entation psychique. La souffran

et la détresse de l’entourage face à l’effondrement p

chique de leur en fant, conjoint ou a m i(e) sont aussi con

Dépistage des troublesschizophréniques débutants

Rôle du généralisteTraiter le plus précocement possible est essentiel pour

tenter d’améliorer le pronostic de la schizophrénie.Mais les symptômes de début ne sont pas spécifiques.

L’entourage joue un rôle crucial.

953Tom e 126-17 05-05-2004

FORMATION

Schizophré ni e (p etscan) . L’ima gerie n’est utilisée que dans le ca d e pro gr am m es d e recherche.

BSIP/NIH/SCIENCE SOURCE

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L E C O N C O U R S ➔ F O R M A T I O N

dérab les. Horm is la souffran ce directemen t générée par

les sym ptôm es psychotique s, les condu ites à risque son t

très fréquentes au cours de cette période : prise de toxique,

problèm es avec la police, comportem ent dangereu x pour

autrui.

Le risque su icidaire doit être particulièrem ent souligné,

puisque le suicide est responsable de un quart à un tiers

de la m ortalité de ces pa tients. Les prem ières ann ées

d’évolution des trou bles représenten t la période à risque

m aximal (8). Le retentissemen t sur l’insertion scolaire

des adolescents est ma jeur au cours de la phase prodro-m ique, avec un r isque de déscolarisation, nuisant à l’in -

sertion socio-professionn elle ultérieure de man ière sou-

vent irréversible.

FILIÈRES D’ACCÈS AUX SOINS DANSLES TROUBLES PSYCHOTIQUES DÉBUTANTSLe prem ier contact avec un m édecin d’une personne

souffran t de schizophrénie est généralemen t l’aboutisse-

ment d’un long processu s. Du fait des difficultés de com-

munication inhéren tes au trouble lui-même, liées au

repli, à la m éfiance, à la désorgan isation psychique, il

a pas le plus souven t de deman de d’aide par la person

elle-mêm e, ou elle est inada ptée. L’entourage joue ici

rôle crucial, m ais sa dema nde d ’aide n ’est pas non p

toujours a déquate, du fait de l’incompréhen sion liée à u

m éconn aissance de ces troubles, de la culpabilité, du re

de la hon te liée à la stigmatisation sociale des malad

mentales.

Le s études con du ites sur les filières d’accès aux so

des su jets souffran t de troubles psychotiques débuta

m ontrent que le prem ier interlocuteur est le plus s

ven t le gén éra liste, et que la m ajorité des person

consultent au m oins une fois un généraliste dan s l

parcours (1 , 4 , 5). Les résultats pré l im inaires d ’uétude actuellem ent en cou rs en Aquitaine, dans le ca

du réseau régional de recherche en santé publi

INSERM, con firm en t la fréquence é le vée de conta

avec les m édecins gén éral istes dans les psychodébutantes.

Sou s l’impulsion de l’exp érience pilote m ise en pl

en Austral ie par P. McGorry et son équipe, des p

grammes de dépistage précoce sont actuel lem ent

cours de développem ent dans de nombreu x pays eu

péens (Allem agne, Royaum e-Uni, Norvège, Danem a

Suisse, etc.) (3, 7, 12). Sch ématiquement, ces p

gram m es reposent sur la constitution d’un réseau en

un e équipe soigna nte spécialisée dan s les troubles p

chotiques débu tants et les diff érents acteurs de sa

non psychiatres interven an t dan s les filières d’accès

soins, en par ticulier les m édecins généralistes. À no

conn aissan ce, il n ’existe pas encore de program m e

dépistage structuré comparable en France.

COMMENT IDENTIFIER UNE SCHIZOPHRÉNDÉBUTANTE ?L’iden tification pr écoce d’un trouble psychotique détant en m édecine gén érale se heurte à plusieurs o

tacles. Le pre m ier est lié au fait que ces troubles ont u

incidence faible (1 pour 10 000 personnes par an), et

m édecins gén éralistes sont donc rarem ent confron

dans leur prat ique quotidienne à un trouble schi

ph rénique débutant . Le deuxièm e est nettement p

comp lexe. La m ise en évidence de symptôm es prodm iques et psychotiques repose exclusivem ent sur

examen clinique, car on ne dispose à l’heu re a ctue

d’aucu n m arqueu r pa racl inique val ide et fiable.

symptômes prodromiques (encadr é 1) sont aspécifiq

et relativemen t fréquents chez des adolescents de

populat ion gén érale indemnes de troubles psych

triques. S’ils sont isolés, ils ne p euven t donc être u tili

pou r identifier les sujets qui ont un risque de dével

per un trouble psychotique ultérieur . L’iden tification

sujets en ph ase préclinique reste don c actuellemen t

954Tom e 126-17 05-05-2004

PSYCHIATRIE  Dé  p ista ge d es t rou b les sch iz op h r é niques

1/Symptômes prodromiques les plus fréquentsG Difficultés de concentra tion

GManque de m otivation et d ’énergie

GHumeur dépressive

GTroubles du somm eil

GAnxiétéG Isolem ent social/repli sur soi

GMéfiance

GDétérioration du fonctionn emen t social

G Irritabilité

 D’ap r ès r é  f. 7.

2/Symptômes psychotiques selon la définition de

l’OMSGHallucinations, que l que soit le mode sensor iel

Idées délirantes

GTroubles m arqués du cours de la pensée et du lan gage

(incoh éren ce, bar rages, néologism es, discours incom -

pr éhen sible) au tres que les troubles liés à un ralentisse-

men t ou un e accélération psychique

GTroubles psychomoteurs m arqués (négativisme, mutisme

ou stupeur , excitation catatonique, attitudes im posées ou

inhabituelles m aintenues pendan t de longues périodes)

au tres qu’un ralentissement ou un e accélération m otrice

GComportement bizarre ou grossièremen t inapproprié (par-

ler ou rire tout seul, avoir des comportem ents incompr é-

hen sibles pour les au tres, perte des barrières sociales…)

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L E C O N C O U R S ➔ F O R M A T I O N

doma ine de la recherche, et aucune

recomm andat ion ne peut ê tre faite

concern an t la pr atique clinique, aussi

bien pour les généralistes que pou r les

psychiatres.

En l’état actuel des conn aissances, le

dépistage des troubles schizophr é-

niques d oit donc se limiter à l’identi-

fication le plus p récoce possible des

sujets présentant des sym ptôm es psy-

chotiques a vérés. On dispose a ctuel-

lement d’instruments standardisés,

qui sont des entretiens diagnostiques

structurés, mais qui, du fait de leur

lourdeu r, ne sont guère u tilisables en

m édecine gén éra le. Il n ’existe aucun

instrum ent spécifique v alidé pour le

dépistage des troubles psychotiquesdébutan ts en m édecine gén éra le (2) ,

comm e il peut en exister par exem ple

pour la dépression. Dans un e étude

conduite en collaboration avec le

Réseau Sentinel le Aquitaine (10),

nou s avons ut i lisé un autoquest ion-

naire (encadr é 3) perm ettant d ’identi-

fier des sym ptôm es psychotiques chez

des sujets de la popu lation gén érale.

Cette étude a démontré que les

patients acceptent dan s leur gran de

majorité de r épondre à des questions

pouvant ê tre a priori considérées

comm e gênan tes ou embar rassantes,

et que le m édecin généraliste pou rrait

donc h ésiter à poser directem ent. Il

est toujours possible de rech ercher

l’existence d’idées déliran tes et d’hal-

lucina tions, si l’on explique à la per-

sonne concern ée que ces questions

font pa rtie de l’examen m édical, et

sont posées de man ière systématique

à toutes les personnes dan s la m êm e

situation. L’au to-questionn aire décrit

précédemment n ’est pas utilisabledans u ne perspective de dépistage au

sens strict du term e, dans le sens où il

n ’existe pas de score seu il perm ettan t

d’iden tifier avec de bon ne s sensibilitéet spécificité un su jet à risque. Cepen-

dan t, les questions peu vent être u tili-

sées dans la prat ique quotidienne,

lorsqu ’il est n écessaire d’explorer la

présence d’id ées dél iran tes dans u n

entretien clinique.

955Tom e 126-17 05-05-2004

PSYCHIATRIE  Dé  p ista ge d es t rou b les sch iz op h r é niques

3/E.R. Peter et coll. Delusion Inventory (PDI)1

1. « Avez vous déjà eu l’impression que des gens semblaient insinuer des

choses à votre sujet ou tenaient des propos avec un double sens ? »

Non Oui (cocher la réponse de votre choix)

Si non, passer à la question suivante

Si oui, entourer les chiffres qui décrivent le mieux ce que vous ressentez

Cela ne m’angoisse pas 1 2 3 4 5

Cela m’angoisse beaucoup 1 2 3 4 5

Je n’y pense presque jamais 1 2 3 4 5

J’y pense tout le temps 1 2 3 4 5

Je ne crois pas que c’est vrai 1 2 3 4 5

Je suis certain(e) que c’est vrai 1 2 3 4 5

2. « Avez vous déjà eu l’impression que l’on disait à la télé ou que l’on écrivait d

les journaux des choses spécialement pour vous ? »

3. « Avez-vous déjà eu l’impression que certaines personnes n’étaient pas

qu’elles semblaient être ? »

4. « Avez-vous déjà eu l’impression que l’on cherchait volontairement à v

nuire ? »

5. « Avez-vous déjà eu l’impression qu’il y avait un complot dirigé contre vous ?

6. « Avez-vous déjà eu l’impression que vous étiez quelqu’un de très important

que vous étiez destiné(e) à devenir quelqu’un de très important ? »

7. « Avez-vous déjà eu l’impression que vous étiez quelqu’un de spécial, hors

commun ? »

8. « Avez-vous déjà eu l’impression que vous étiez tout particulièrement proche

Dieu ? »

9. « Vous est-il déjà arrivé de penser que les gens peuvent communiquer par té

pathie ? »

10. « Avez-vous déjà eu l’impression que des appareils électriques, comme d

ordinateurs, pouvaient influencer à distance vos pensées ? »

11. « Avez-vous déjà eu l’impression d’avoir été d’une certaine manière élu(e) p

Dieu ? »

12. « Est-ce que vous croyez aux pouvoirs de la sorcellerie, au vaudou, ou aux s

ences occultes? »

13. « Est-ce que vous êtes souvent préocupé(e) par l’idée que votre conjoint

puisse être infidèle ? »

14. « Avez-vous déjà eu l’impression d’avoir commis plus de péchés que la plup

des gens ? »15. « Avez-vous déjà eu l’impression que les gens vous regardaient bizarrement

cause de votre apparence ? »

16. « Avez-vous déjà eu l’impression de n’avoir plus aucune pensée dans la tête?

17. « Avez-vous déjà eu l’impression que la fin du monde était proche ? »

18. « Avez-vous déjà eu l’impression d’avoir dans votre tête des pensées que v

ne reconnaissiez pas comme les vôtres ? »

19. « Est-ce que vos pensées ont déjà été si intenses que vous avez craint

d’autres personnes puissent les entendre ? »

20. « Avez-vous déjà eu l’impression d’entendre vos pensées répétées comme p

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L E C O N C O U R S ➔ F O R M A T I O N

SCHIZOPHRÉNIE DÉBUTANTE EN PRATIQUEIl ne s’agit pas ici de donn er u ne con duite à tenir détaillée

face à une personne présentant u ne possible schizo-

ph rénie débutan te, m ais plutôt d’évoquer quelques pièges

diagnostiques et thérapeutiques à  éviter.

Ne jamais banaliser l’existence de symptômes psychotiquesSi l’existence de sym ptôm es psychotiques est suspectée àl’exam en clinique ou pa r les informa tions four nies par

les proche s, il ne faut jam ais les bana liser, et éviter les

attitudes attentistes (« wa it and see »). Des idées bizarres

et des compor tements inadaptés ne doivent pas être mis

sur le compte d’une «crise d’adolescence », supposée dis-

para î tre spontaném ent, surtout s’il existe un r etentisse-

m ent psychosocial (repli sur soi, altération d e l’insertion

scolaire et pr ofessionnelle…). En cas de d oute, il est donc

préf érable d’avoir recours par excès à un avis spécialisé,

en ch oisissant de préf érence u n psychiatre qui, de par son

orientation thérapeutique, prend en charge de man ièrerégulière des p atients atteints de trou bles psychotiques.

Ne pasémettre de jugement concernant les idées délirantes

Il est im portant de n e pas ém ettre de jugem ent en terme

de vrai/faux concern an t les idées déliran tes rappor tées

par le patient. Par définition, un e idée déliran te n’est pas

un e erreu r de jugemen t, et n’est donc pas a ccessible à une

argu m entation logique. Une expérience déliran te et ha l-

lucinatoire est vécue comm e réelle par le patient, et cela

m êm e si le degré de con viction p eu t varier. Il fau t donc

tenter de rester neu tre quan d un pa tient exprime un e idée

délirante, en évitant deu x écueils, d’un e part de faire sem-

blant de par tager le délire pou r m ettre en confiance la per-

sonn e (com m ent expliquer ensu ite que ces sym ptôm es

nécessitent u n tra item ent ?), et d’autre pa rt de lui dire que

ses propos n ’ont pas de sens (comm entaire qu’il ou elle a

dé jà eu le plus souvent l’occasion d’enten dre, et qui risque

d’aggraver sa réticence).

Ne pas attribuer l ’apparition de symptômes psychotiquesexclusivement à l’usage de drogues

Si la person ne con som m e des toxiques, tels que le can-

nabis et l’ecstasy, il fau t faire atten tion à ne pa s attribuer

l’appar ition de symptôm es psychotiques exclusivemen t

à ces substances, en p articulier si ces symptômes sont

persistants. La surven ue d ’un épisode psychotique lors

de la consom m ation de toxique r évèle souven t une vul-nérabilité psychotique préexistante et/ou le fait que la per -

sonn e souffran t d’un e schizophrénie débutante peu t uti-

liser des substan ces illicites en a utom édication pour ses

symptômes psychotiques. Les symptôm es psychotiques

doivent êtr e évalu és, et si besoin est traités, indépen-

damm ent de l’existence ou non d’une consomm ation de

substance.

Ne pas donner d’emblée un diagnostic précis

Face à un adolescent ou à un adulte jeun e présentant des

symptôm es psychotiques qui n écessitent un traitem ent,

il est souvent très difficile, mêm e pour les spécialistes

porter d’emblée u n diagnostic précis. Seule l’évolut

perm et le plus souven t de trancher entre les diff ére

types de troub les : trouble psychotique br ef (corresp

dant à la classique « bouff ée déliran te aiguë » des no

graph ies traditionne lles fran çaises), trou bles de l’hum

de type dépressif ou ma niaque avec caractéristiques p

chotiques («man ie délirante »ou «m élancolie délirant

schizophrénie , trou ble sch izo-affectif, trou ble délir

chronique… Du fait de ces incer titudes, il est donc reco

mandé de ne pas donner d’emblée un diagnostic préc

la personne et à son en tourage. C’est dans ce sens que

a plutôt tenda nce à utiliser l’expression «premier épis

psychotique » plutôt que « premier épisode schizoph

nique ».

Repérer si les symptômes psychotiques s’associent ou n

des symptômes thymiques

Indépendamm ent de l’étiquetage dia gnos tique, il esrevan che essentiel de rep érer si les sym ptôm es p

956Tom e 126-17 05-05-2004

PSYCHIATRIE  Dé  p ista ge d es t rou b les sch iz op h r é niques

I Les mé decins gén éralistes ont un rôleessentiel dans l’identification précoce destroubles psychotiques. Un accès plusrapide à des soins adaptés diminue lesconséquences à court terme de lapsychose non traitée (risque suicidaire,désinsertion, prise de toxique), et pourraiaussi contribuer à améliorer le pronosticà long terme.

I Il ne faut pas hésiter à rechercherl’existence d’idées délirantes etd’hallucinations en posan t des questionsdirectes, en expliquant à la personneconcernée que ces questions font partiede l’examen m édical et sont posées demanière systématique à toutes lespersonn es dans la m êm e situation.

I Des idées bizarres e t descomportements inadaptés ne doivent pasêtre systématiquement mis sur le compted’une « crise d’adolescence », supposéedispara î tre spontanément, surtout s’ilexiste un retentissem ent psychosocial(repli sur soi, altération de l’insertionscolaire et professionnelle…).

I Chez un adolescent consommateur detoxiques, attention à ne pas attribuerl’apparition de symptômes psychotiquesexclusivement à ces substances, enparticulier si ces symptômes sontpersistants.

      L                 ’    e    s    s    e    n     t      i    e      l

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L E C O N C O U R S ➔ F O R M A T I O N

chotiques s’associent ou non à des symptômes thy-

miques, car la conduite à tenir sera diff érente (par

exem ple, indication d’antidépresseur ou de thy-

m or égulateur).

I l n’y a pas d’indication pour mettre en place en

urgence un traitement antipsychotique spécifiqueLes trai tem ents an tipsychotiques ont u n d é la i

d ’action de plusieurs semaines sur les symp-

tôm es psychotiques, et n’ont qu ’un e action aspé-

cifique d e sédation/an xiolyse au cou rs des deux

à trois prem ières sem aines. S’il est ur gent de tra i-

ter les sym ptôm es tels que anxiété m assive, exci-

tation ou agitation a vec risque de passa ge à l’acte,

par des n eur oleptiques sédatifs ou des ben zo-

diazépines à fortes dose s, il n ’y a pas d ’indication pou r

m ettre en place en ur gence un traitemen t antipsycho-

tique spécifique. Celui-ci peu t être prescrit de m anière

diff érée, une fois que la situa tion d ’urgen ce est contrô-lée.

L’hospit alisat ion est souvent indispensable si le pat ient

refuse tous les soins, et /ou s’il est socialement isoléL’identificat ion pr écoce d ’un t rouble psychot ique a

pou r objectif de favoriser la mise en place d’un trai te-

m ent en am bulatoire. On peut éviter ain si le recour s

à l’hospi ta l isa t ion sous cont ra inte en urgen ce, dans

une ambiance souvent dramat ique, comme mode de

prem ier contact avec les soins p sychiatriques, et am é-

l iorer l’adh ésion ul tér ieure a ux soins. L’hospitalisa-

tion est souven t ind ispensable si le patient refuse tous

les soins, et/ou s’il est socialem ent isolé, en recouran t

au besoin à un e h ospital isat ion sous contrainte (h os-

pitalisation à l a demande d ’un tiers, voire hospitalisa-

tion d ’office).

CONCLUSIONLes généralistes sont des acteurs clés dans l’éducation àla santé des personn es de la population généra le. La lutte

contre la stigma tisation sociale de la ma ladie men tale en

général, et des troubles psychotiques en particulier, est

actuel lement reconnu e comm e un e priorité de santépublique par l’OMS. Les généralistes ont un rôle central

à jouer dan s cette lutte, en transm ettant au grand public

des inform ations en accord avec les données actuelles dela littérature sur ces troubles, et des représentations n on

stigma tisan tes pour les patients et les mem bres de leur

famille. I 4 0 8 2 7 6

A U T E U R S H. Verd ou x , PU-PH, service univ ersitaire de psych iat rie et EA 3676, IFRde sant é publique, A. Cougnard, Dr é  pid é m iol., EA 3676, IFR de sant é  pu bliqu e

Universit é Victor Segalen, Bordeaux -2, hô pital Ch arles Perrens,121, rue de la Bé chade, 33076 Bordeaux cedex E-mail : [email protected]

 Rem erciem ent sCe travail a é t é effectué dan s le cadre du r é seau r é gional INSERM drecherche en sant é publique «Trou bles psychotiques d é butants:incidence, filières d ’accès aux soins et é valuation de la faisabilit é de

 program m es de d é  pistage pr é coce ».

R É F É R E N C E S1. Cole E, Leavey G, King M et coll. Pathw ays to care for patients w first episod e for psychosis. A com pa rison of eth nic group s. Br JPsychiatry 1995 ; 167 : 770-776.2. Cougn ard A , Salmi R , Verdou x H. A d ecade of debate on early

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PSYCHIATRIE  Dé  p ista ge d es t rou b les sch iz op h r é niques

Ce livre fait le point sur l’état de l

recherche dan s la génétique d e la sch izo

ph rénie. L’existence d’un e concentratio

fam iliale de la schizophr énie est classique

men t admise, mais aucun gène majeur n

peut être im pliqué. Il s’agit don c probable

ment d’un e tran smission m ultifactoriel

seuil. Pour en savoir plus su r l’épidémiolo

gie, le mode de tran sm ission, les gènes sus

pectés, l’influen ce de l’environnem ent et l

recherche de ma rqueurs de vulnérabilitéon peu t se plonger da ns ce petit ouvra ge, dont le lan

gage est très accessible.

C h . P