13

Deuxième partie : Mécanique du solide · 2020. 12. 9. · que dans le cadre de la mécanique des solides. L’objet de cette partie du cours est de fournir une introduction à la

  • Upload
    others

  • View
    6

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

  • Deuxième partie : Mécanique du solide

  • 39 De la mécanique du point à la mécanique du solide

    4 De la mécanique du point à la mécanique du solide

    Dans la première partie de ce cours, nous nous sommes intéressés à des situations où il n’était pas nécessaire de tenir compte de la taille et de la forme du corps considéré pour comprendre et prédire son mouvement. Cependant, cette hypothèse n’est pas toujours valable. Ainsi, alors que la trajectoire d’un électron dans un champ magnétique comme celle de la Terre autour du Soleil peuvent être prédites en réduisant l’électron ou la Terre à des corps ponctuels, le mouvement d’une toupie ou d’un boomerang, la stabilité d’un vélo ou la rotation de la Terre sur elle-même ne peuvent être compris qu’en considérant le volume fini de ces corps. Notons que la nécessité ou non de tenir compte du volume fini d’un solide ne vient donc pas de la taille de l’objet mais des propriétés de cet objet que l’on souhaite étudier. A titre d’exemples, le gyrocompas, l’horizon artificiel en aviation, un stabilisateur de caméra ou encore le contrôle de l’altitude de la station spatiale internationale sont autant d’exemples d’applications reposant sur l’effet gyroscopique, effet qui ne peut être compris que dans le cadre de la mécanique des solides. L’objet de cette partie du cours est de fournir une introduction à la mécanique des solides.

    Tandis que les premiers fondements de la mécanique des solides remontent à l’époque d’Archimède, la mécanique du solide est aussi à la base de problèmes plus récents comme la modélisation des grandes molécules diffusant dans le gel d’une électrophorèse (technique servant par exemple à séparer différents fragments d’ADN en fonction de leur longueur), la robotique… Par ailleurs, des concepts abordés en mécanique du solide se retrouvent dans d’autres domaines de la physique. Ainsi par exemple en imagerie par résonance magnétique (IRM), où la dynamique du spin d’un atome constituant les tissus peut être décrite en faisant appel à des concepts similaires à ceux servant à décrire le mouvement de la Terre (précession, nutation).

    Tout solide réel présente une certaine élasticité, c’est-à-dire qu’il est sujet à se déformer suite à l’application d’une force extérieure. Cependant, dans les exemples cités ci-dessus ces déformations sont très petites devant les dimensions du solide. Nous supposerons donc dans la suite du cours que le solide est indéformable. Un solide est un objet constitué d’un ensemble de points matériels. Ce solide est dit indéformable si sa forme et ses dimensions restent inchangées lorsqu’il est soumis à une force extérieure. En d’autres termes, les distances relatives des particules qui constituent le solide restent constantes dans le temps. Comme pour toute approximation, l’hypothèse d’un solide indéformable présente un domaine de validité et ne s’appliquera par exemple pas au cas d’un ressort ou du caoutchouc. Elle sera en revanche suffisante pour analyser tous les exemples mentionnés ci-dessus.

    En guise d’introduction pour montrer le nécessaire passage de la mécanique du point à la mécanique du solide, nous étudierons dans un premier temps la cinématique de la rotation d’un solide. Cette étude cinématique mettra en effet en évidence que chaque point du solide ne se déplace pas à la même vitesse au cours d’une rotation et donc que le solide ne peut être ramené à une masse ponctuelle. Puis nous nous limiterons ensuite à l’étude de la statique du solide, c’est-à-dire à l’étude des forces qui agissent sur un corps en équilibre et au repos. On pense tout naturellement à l’intérêt de cette problématique pour la conception

  • 40 De la mécanique du point à la mécanique du solide

    de pont ou de bâtiment, ces structures devant garder leur intégrité en présence de sollicitations externes ordinaires (passage de véhicules sur un pont) ou extraordinaires (tremblements de terre, vents violents…). Mais les concepts abordés en statique du solide sont aussi extrêmement important dans d’autres domaines, comme par exemple la biomécanique. Au repos, le corps humain est en effet une structure mécanique complexe en équilibre statique et le moindre déséquilibre peut avoir des conséquences importantes.

    Les notions abordées dans ce cours serviront de base à de futurs enseignements en physique ou en mécanique. Le prolongement naturel de la statique du solide sera l’étude de sa dynamique. Puis la prise en compte des déformations d’un solide sera abordée en mécanique des milieux continus, encore appelée résistance des matériaux, et permettra de comprendre tant les efforts internes subis par l’armature d’un pont que le principe de la microscopie à force atomique. L’hydrodynamique décrira quant à elle les très grandes déformations subies par un fluide tel que l’eau. Ces notions seront approfondies au sein de la Licence mention Sciences pour l’Ingénieur.

  • 41 Cinématique de la rotation

    5 Cinématique de la rotation

    5.1 Translation vs rotation

    Considérer qu’un solide à un volume fini autorise un nouveau type de mouvement : le mouvement de rotation. Le mouvement d’un solide peut alors être de différentes natures :

    Mouvement de translation pure (Figure 1a et Figure 1b) : un solide est animé d’un mouvement de translation pure si une ligne joignant deux points quelconques du solide (ronds gris) reste parallèle à elle-même au cours du mouvement (traits pointillés fin). Si le solide se déplace sur une droite (Figure 1a : trait pointillé épais), alors il s’agit d’une translation rectiligne. Si le solide se déplace sur une courbe (Figure 1b : trait pointillé épais), alors il s’agit d’une translation curviligne.

    Mouvement de rotation pure (Figure 1c et Figure 1d) : un solide est animé d’un mouvement de rotation pure si tous les ponts du solide suivent des trajectoires circulaires centrées sur l’axe de rotation (traits pointillés fins). Cet axe peut appartenir au solide (Figure 1c) mais il peut aussi se situer hors du solide (Figure 1d).

    Dans le cas général, le mouvement d’un solide est un mélange de translation et de rotation (Figure 1e).

    Figure 1

  • 42 Cinématique de la rotation

    5.2 Mouvement de translation pure

    Soit le solide en forme de bateau animé d’un mouvement de translation pure entre les instants et ∆ dans le référentiel (Figure 2). Repérons trois points du solide à l’instant : , et . A l’instant ∆ ces trois points se sont déplacés respectivement en ’, ’ et ’.

    Figure 2 La translation pure se traduit par l’égalité . Or la vitesse du point

    appartenant au solide par rapport à , notée / est égale à :

    / lim∆ → ∆ . Ainsi / / / . Par conséquent, dans le cas d’une translation pure, tous les points du solide ont la même

    vitesse. Autrement dit, parler de la vitesse d’un des points du solide est équivalent à parler de la vitesse du solide. On peut donc décrire le mouvement du solide comme s’il s’agissait d’un objet ponctuel.

    5.3 Mouvement de rotation pure

    Soit un solide dans un référentiel d’inertie . Un mouvement de rotation pure a lieu lorsque l’axe de rotation est fixe par rapport à (cf Figure 1c et Figure 1d).

    Reprenons le raisonnement du paragraphe précédent dans le cas d’une rotation pure du solide en forme de bateau (Figure 3). Repérons deux points du solide à l’instant : et

    . A l’instant ∆ ces deux points se sont déplacés respectivement en ’, ’.

  • 43 Cinématique de la rotation

    Figure 3 Il apparaît clairement sur la vue de dessus que la distance parcourue par le point le long

    de l’arc de cercle ’ pendant l’intervalle de temps ∆ est inférieure à la distance parcourue par le point le long de l’arc de cercle ’ pendant ce même intervalle de temps. Par conséquent / / .

    En revanche, comme illustré sur la Figure 4, l’angle dont a tourné le segment

    pendant l’intervalle de temps ∆ est égal à l’angle dont a tourné le segment pendant ce même intervalle de temps.

    Figure 4 Ainsi, dans le cas d’une rotation pure, tous les points d’un solide tournent d’un même

    angle par rapport à l’axe de rotation pendant un intervalle de temps donné. Autrement dit la donnée d’un angle suffit pour décrire globalement la rotation du corps.

  • 44 Cinématique de la rotation

    5.3.1 Variables angulaires

    La position angulaire utilisée pour décrire une rotation est l’analogue de la position utilisée pour décrire une translation en mécanique du point. Or deux informations sont nécessaires pour définir complètement un axe des : son origine 0 et son orientation (qui indique le sens des croissants). Il est en de même pour la position angulaire : affecter une valeur à un angle impose de se fixer une origine des angles ( 0) et un sens associé aux croissants. Par convention (cf Figure 5), le sens des croissants est le sens trigonométrique (sens inverse des aiguilles d’une montre) tandis que le sens des décroissants est le sens anti-trigonométrique (sens des aiguilles d’une montre).

    Figure 5 Il existe une relation entre l’angle de rotation d’un solide et la distance parcourue par un

    point du solide au cours de cette rotation. Sur la Figure 6, le point du bateau est situé à une distance de l’axe de rotation et est repéré par la position angulaire à l’instant . Suite à la rotation du solide, ce point du solide se retrouve en ’ à l’instant , toujours à une distance de l’axe de rotation mais repéré par la position angulaire . Notons Δ la longueur de l’arc de cerce ’ et Δθ θ θ . Lorsque les angles sont exprimés en radians, il existe une relation très simple entre Δ et Δθ :

    Δθ Δ Remarques :

    Pour un point A ayant parcouru exactement un tour complet entre les instants et , Δ 2 (périmètre d’un cercle de rayon ) et on obtient naturellement Δθ 2π.

    Attention, Δ et Δθ sont des grandeurs algébriques : Δ (et donc Δθ) est positif si l’arc de cercle ’ est parcouru dans le sens des θ croissants mais Δ (et donc Δθ) est négatif si l’arc de cercle ’ est parcouru dans le sens des θ décroissants.

    On appelle diamètre apparent l’angle sous lequel est vu un objet. La lune, située à 3,8. 10 m de la Terre, a un diamètre 3,4. 10 m. Le

    diamètre apparent Δθ de la Lune vue depuis la Terre est donc Δθ ⁄ et vaut environ 9. 10 rad, soit environ 0.5°. Le Soleil, de diamètre 1,4. 10 m, est certes environ 1000 fois plus grand que la Lune mais il est aussi bien plus loin de la Terre (distance 1.5. 10 m). Étonnamment, son diamètre apparent Δθ ⁄ vaut aussi environ 9. 10 rad. Ainsi, observés depuis la Terre, la Lune et le Soleil semble avoir la même taille.

  • 45 Cinématique de la rotation

    Figure 6

    5.3.2 Vitesse angulaire

    De même que lim → indique de combien se déplace un point par seconde, nous allons définir l’analogue angulaire de , que nous appellerons vitesse angulaire et qui sera noté . Soit Δθ le déplacement angulaire d’un solide pendant un intervalle de temps Δ :

    lim→ΔθΔ

    θ.

    La vitesse angulaire est le taux de variation de la position angulaire par rapport au temps. Plus la vitesse angulaire est élevée, plus le solide tourne rapidement, plus rapidement change l’angle.

    Remarques :

    Dans les unités du système international, la vitesse angulaire s’exprime en rad. s . D’autres unités sont rencontrées dans la vie quotidienne : tours par seconde, tours par minute…

    La vitesse angulaire , comme le déplacement angulaire Δθ, peut être positive ou négative. Si le solide tourne dans le sens trigonométrique, θ augmente, Δθ 0 et donc 0. A l’inverse, si le solide tourne dans le sens anti-trigonométrique, θ diminue, Δθ 0 et donc 0.

    Supposons la vitesse angulaire constante. La période du mouvement, exprimée en

    secondes, est alors définie comme la durée que met le solide à effectuer un tour et la fréquence , exprimée en Hertz (Hz) ou en , est le nombre de tours par seconde :

    2 2 .

  • 46 Cinématique de la rotation

    5.3.3 Relation entre vitesse et vitesse angulaire

    Les paramètres angulaires (déplacement angulaire, vitesse angulaire) présentent l’avantage de décrire la rotation de l’ensemble du solide. Cependant, lorsqu’on s’intéresse au mouvement spécifique d’un des points du solide, il peut être utile de connaître sa vitesse de déplacement.

    Reprenons l’exemple de la Figure 6 et notons Δ . A tout instant, le point appartenant au solide (le bateau) est situé à une distance constante de l’axe de rotation. La distance Δ parcourue par le point pendant l’intervalle de temps Δ et son déplacement angulaire Δθ sont reliés par :

    Δθ Δ . Divisons l’équation précédente par Δ :

    ΔθΔ

    1ΔΔ . Prenons alors la limite de l’expression ci-dessus lorsqueΔ → 0 :

    lim→ΔθΔ

    1 lim→ΔΔ .

    On reconnaît dans le membre de gauche la vitesse angulaire définie au paragraphe 5.3.2. La limite apparaissant dans le membre de droite est par définition la vitesse de déplacement du point , notée :

    / , où est la distance à l’axe de rotation. Ainsi, lors d’un mouvement de rotation,

    toutes les particules qui composent le solide ont la même vitesse angulaire mais chaque particule se déplace à une vitesse proportionnelle à sa distance à l’axe de rotation. On note que a le même signe que .

    Remarque : Dans une course de patinage sur piste, supposons que deux patineurs 1 et 2 avancent à la même vitesse , le patineur 1 étant à la corde à une distance du centre et le patineur 2 sur l’extérieur de la piste à une distance du centre, avec . Notons et

    les vitesses angulaires respectives des patineurs 1 et 2. Les deux patineurs ont la même vitesse donc . Or donc , i.e. . Pour une vitesse donnée, un patineur à la corde met moins de temps pour faire un tour et est donc avantagé par rapport à un patineur sur l’extérieur de la piste.

    5.3.4 Différence fondamentale entre vitesse et vitesse angulaire

    Lorsqu’un solide tourne autour d’un axe à une vitesse angulaire , cette grandeur suffit à caractériser le mouvement de l’ensemble du solide. En revanche, la vitesse d’un point du solide dépend de sa distance à l’axe de rotation et est égale au produit de cette distance par la vitesse angulaire.

    De plus, la vitesse angulaire d’un solide en rotation est la même par rapport à n’importe quel point de ce solide, pas seulement par rapport à l’axe de rotation. Il suffit de se référer à

  • 47 Cinématique de la rotation

    un exemple de la vie quotidienne pour s’en convaincre : il n’est pas nécessaire d’être à un des deux pôles pour observer que la Terre fait un tour en 24h par rapport aux étoiles fixes.

    Ainsi, il n’est pas nécessaire de préciser par rapport à quel point est calculée la vitesse angulaire alors qu’il est impératif d’expliciter le point auquel est calculée une vitesse de déplacement.

    5.3.5 Ordres de grandeur

    Le tableau ci-dessous donne des ordres de grandeur de vitesse et de vitesse angulaires de différents mouvements connus.

    Rotation … rad. s Hz Période m. s

    … du Soleil autour du centre de la voie lactée 8. 10 1,3. 10

    250. 10 années 2. 10

    … de la Terre autour du Soleil 2. 10 3,2. 10 1 an 3. 10 … de la Lune autour de la

    Terre 2,7. 10 4,2. 10 27,3 jours 3. 10

    … d’un satellite géostationnaire 7,27. 10 1,16. 10 1 jour 3. 10 par rapport au centre de la Terre

    … de la Terre sur elle-même 7,27. 10 1,16. 10 1 jour 460 à l’équateur (Guyane)

    … d’un patineur artistique sur lui-même 30 4,8 210 ms

    8 au niveau de l’épaule

    … d’un disque dans un lecteur CD 40 6,4 160 ms 2,5 au bord du disque

    … d’une lame de tondeuse 300 48 21 ms 75 au bord de la lame

    5.3.6 Vecteur vitesse angulaire

    Nous avons vu jusqu’à présent une très forte similitude entre les mouvements de translation et les mouvements de rotation. Un dernier pas reste à franchir pour avoir une analogie complète. De même que nous avons attribué une nature vectorielle à la vitesse de translation d’un point matériel, nous allons définir un vecteur vitesse angulaire . Un vecteur est caractérisé par une norme, une direction et un sens.

    Dans le cas de la translation d’un point matériel appartenant à un solide dans un

    référentiel selon l’axe par exemple, le vecteur vitesse est tel que :

    - la norme de / est la vitesse du point, - la direction de / indique la direction selon laquelle se déplace le point (ici

    l’axe ), - le sens de / précise si le point matériel se dirige vers les positifs ou

    négatifs.

  • 48 Cinématique de la rotation

    Le vecteur vitesse angulaire associé à la rotation d’un solide autour d’un axe est défini

    de la façon suivante :

    - la norme de est la valeur de la vitesse angulaire du solide, - la direction de indique la direction de l’axe de rotation, - le sens de précise si la rotation du solide se fait dans le sens trigonométrique ou

    anti-trigonométrique. La définition du sens de nécessite l’adoption d’une convention. Cette convention peut

    se résumer dans la règle de la main droite : le pouce de la main droite est dans la direction de si les autres doigts sont courbés dans le sens de rotation, comme illustré Figure 7.

    Figure 7

    5.4 Relation entre le vecteur vitesse et le vecteur vitesse angulaire

    5.4.1 Rappel : produit scalaire de deux vecteurs

    Nous avons utilisé dans la partie sur la mécanique du point la notion mathématique de produit scalaire entre deux vecteurs et , noté . . Comme son nom l’indique, le résultat de cette opération est un scalaire dont la valeur peut s’exprimer de deux façons différentes :

    en fonction de la norme des vecteurs et et de l’angle entre ces deux vecteurs : . cos , ,

    en fonction des composantes respectives , , et , , des vecteurs et dans une base orthonormée directe , , :

    .

  • 49 Cinématique de la rotation

    5.4.2 Produit vectoriel de deux vecteurs

    5.4.2.1 Définition

    Par définition, le produit vectoriel entre deux vecteurs et , noté ∧ , est un vecteur perpendiculaire au plan contenant et et égal à :

    ∧ sin , avec :

    l’angle le plus petit entre les deux vecteurs quand leur origine coïncide (Figure 8). Toutefois, l’angle 180 (en degrés) ou (en radians) peut aussi être utilisé car sin sin .

    Figure 8

    est perpendiculaire au plan contenant et mais connaître son sens nécessite de se donner une convention. Mathématiquement, la convention choisie impose que le trièdre , , ∧ soit direct. Dans la pratique, le sens de peut être obtenu en utilisant la règle de la main droite, règle qui a déjà été évoquée lors de la détermination du sens du vecteur vitesse angulaire au paragraphe 5.3.6. On enroule les doigts de la main droite à partir du premier vecteur apparaissant dans le produit vectoriel, ici , vers le second vecteur , en parcourant le plus petit angle qui les sépare. Le pouce indique alors le sens de .

    5.4.2.2 Propriétés et cas particuliers

    Soient trois vecteurs , et et un scalaire . Le produit vectoriel possède les propriétés suivantes :

    Linéarité : ∧ ∧ ∧ Distributivité par rapport à l’addition : ∧ ∧ ∧ Anti-commutativité : ∧ ∧

    Remarque : à l’inverse du produit vectoriel, le produit scalaire est commutatif : . . L’expression du produit vectoriel se simplifie dans les cas particuliers suivants :

    ∧ 0 si et sont colinéaires, i.e. 0 . ∧ si et sont orthogonaux, i.e. .

  • 50 Cinématique de la rotation

    5.4.2.3 Calcul dans une base cartésienne

    Comme pour le produit scalaire, le produit vectoriel entre deux vecteurs et peut aussi s’exprimer en fonction des composantes de chaque vecteur exprimés dans une base orthonormée directe , , . Il faut pour cela connaître le produit vectoriel deux à deux des vecteurs de la base. Ces produits vectoriels sont en réalité des applications directes des cas particuliers présentés ci-dessus :

    ∧ 0 ∧ ∧ ∧ ∧ 0 ∧ ∧ ∧ ∧ 0

    Un moyen rapide de retrouver ces égalités repose sur le diagramme de la Figure 9.

    Figure 9

    Le produit vectoriel d’un vecteur par son voisin donne le troisième

    doté d’un signe « + » si l’opération correspond au sens des flèches (par exemple ∧ et d’un signe « - » pour le sens contraire (par exemple ∧ ).

    ATTENTION : le calcul précédent n’est pas valable dans une base orthonormée indirecte. La Figure 10 ci-dessous présente deux exemples de bases orthonormées directes et un exemple de base orthonormée indirecte.

    Figure 10

    Les produits vectoriels ∧ , ∧ et ∧ étant nuls, le produit vectoriel ∧ s’écrit alors : ∧ ∧

    ∧ ∧ ∧ ∧ ∧ ∧

  • 51 Cinématique de la rotation

    5.4.3 Relation entre le vecteur vitesse et le vecteur vitesse angulaire

    Reprenons l’exemple de la Figure 6.

    Figure 11 Nous avons vu que la vitesse d’un point du solide (le bateau) en rotation autour de

    l’axe passant par et perpendiculaire au plan de la feuille est par rapport à : / ,

    où est la distance à l’axe de rotation ( ) et est le vitesse angulaire bu bateau. Cette vitesse peut être positive ou négative, selon que le solide tourne respectivement dans le sens trigonométrique (partie gauche de la Figure 11) et anti-trigonométrique (partie droite de la Figure 11). Nous avons par ailleurs vu en mécanique du point que la vitesse d’un point en rotation est tangente à se trajectoire, autrement dit orthogonale au vecteur . Compte tenu de la définition du produit vectoriel, l’ensemble de ces informations peut être résumé dans la relation vectorielle suivante :

    / ∧ .

    En effet, et étant orthogonaux, la norme du produit vectoriel est bien égale à . De plus la direction de / est bien orthogonale à et le sens de / , qui peut être obtenu avec la règle de la main droite, est dicté par le sens de . Par ailleurs, si appartient à l’axe de rotation du solide, i.e. si et sont colinéaires, alors / 0 : c’est la définition de l’axe de rotation du solide.

    5.5 Rotation autour d’un axe de direction fixe : exemple du roulement

    Nous avons vu au paragraphe 5.2 le cas d’un mouvement de translation pure puis au paragraphe 5.3 celui d’un mouvement de rotation pure. Cependant, dans de nombreux cas, le mouvement d’un solide résulte d’une superposition de ces deux mouvements. On peut par exemple penser à une roue roulant sur une surface. Contrairement au paragraphe 5.3, l’axe de rotation possède alors toujours une direction fixe par rapport au référentiel terrestre mais se déplace au cours du mouvement.

    Considérons une voiture roulant à vitesse constante et sans glisser (i.e. sans déraper) sur une route. La roue tourne dans le sens indiqué sur la Figure 12, induisant une translation de

  • 52 Cinématique de la rotation

    la voiture de la gauche vers la droite. La vitesse d’un point quelconque de la roue peut être vue comme la somme de deux contributions. La rotation de la roue engendre en chaque point une vitesse tangentielle de norme proportionnelle à la distance au centre de la roue. A cette composante s’ajoute la vitesse de translation de l’ensemble de la roue. Cette dernière est identique quel que soit le point de la roue considéré. Le résultat de cette somme est présenté en bas à droite de la Figure 12.

    Figure 12 Nous voyons que la vitesse du point en contact avec le sol est nulle, c’est-à-dire que la

    composante en translation du vecteur vitesse de la roue (identique pour tout point de la roue) et la composante en rotation du vecteur vitesse au niveau du sol sont égales en norme et opposées en direction. L’odomètre d’une voiture mesure la vitesse angulaire de la roue et utilise l’égalité de la norme entre ces deux composantes pour déterminer la distance parcourue par la voiture.

    Un autre point particulier de la roue est celui diamétralement opposé au point de contact avec le sol. En ce point, la composante en translation du vecteur vitesse de la roue et la composante en rotation du vecteur vitesse sont égales en norme et de même en direction. Le haut de la roue se déplace donc à une vitesse double de la vitesse de translation. Cette différence entre le haut et le bas de la roue explique que lorsqu’une voiture en mouvement est prise en photo (avec un temps de pause suffisamment court), le haut de la roue paraisse flou tandis que le bas est net (cf Figure 13).

  • 53 Cinématique de la rotation

    Figure 13 Ce résultat peut se retrouver par le calcul. Nous nous intéressons au cas d’un roulement

    sans glissement, telle une roue de voiture sur la route en situation normale. Le centre de la roue, noté , se déplace à vitesse constante et nous nous intéressons au comportement des points situés sur la périphérie de la roue, tels les points et : est au sommet de la roue et est le point de la roue en contact avec le sol (Figure 14).

    Figure 14 Le mouvement d’un point de la roue (solide ) se décomposant en un mouvement de

    translation et un mouvement de rotation, la vitesse d’un point de la roue peut être obtenue en utilisant la composition des vitesses introduites en mécanique du point :

    / / / ,

    où est le référentiel lié à la roue.

  • 54 Cinématique de la rotation

    Le vecteur / traduit la translation en bloc de la roue et ne dépend donc pas du point

    . Dans le cas présent, est en translation rectiligne par rapport à . Calculer la vitesse relative de par rapport à revient à calculer la vitesse du centre de la roue par rapport à , / . La roue reste en contact avec le sol sans s’y enfoncer : la coordonnée selon

    de est constante. Le vecteur vitesse / est donc orienté selon . Le roulement s’effectuant sans glissement, la centre de la roue a parcouru après un tour, c’est-à-dire pendant un intervalle de temps égal à la période de rotation de la roue, une distance 2 égale au périmètre de la roue. La norme de / est donc égale à / soit

    / . Ainsi, / .

    Vitesse du point A au sommet de la roue. Le point a un mouvement de pure rotation par rapport au référentiel . La

    vitesse du point A par rapport à peut donc être calculée avec la relation donnée au paragraphe 5.4.3 :

    / ∧ ∧

    Donc

    / / /

    2

    Vitesse du point B en contact avec le sol. Comme le point , le point a un mouvement de pure rotation par rapport au

    référentiel . La même formule est donc utilisée pour calculer la vitesse du point appartenant au solide par rapport à , la seule différence portant sur l’expression du vecteur : . Par conséquent :

    / ∧ ∧

    La norme et la direction des vecteurs / et / sont donc identiques

    mais ces deux vecteurs sont de sens opposés. La vitesse du point appartenant au solide par rapport à est donc :

    / / /

    0 Nous retrouvons ainsi que le point du solide en contact avec le sol a une vitesse nulle. Ce

    résultat n’est valable que dans le cas d’un roulement sans glissement. Il existe cependant des cas où la composante en translation du vecteur vitesse de la roue (identique pour tout point de la roue) et la composante en rotation du vecteur vitesse au niveau du sol ne sont pas égales en norme et opposées en direction. Par exemple, une voiture qui freine trop brusquement bloque ses roues et dérape ; la roue est alors animée d’un mouvement de

  • 55 Cinématique de la rotation

    translation pure. A l’inverse, une voiture coincée dans la neige patine ; la roue est alors animée d’un mouvement de rotation pure.

    Dans le cas le plus général d’un mouvement de rotation, l’axe de rotation peut changer à

    la fois de position et de direction. Cette situation plus complexe, à la base du principe du gyroscope, sera étudiée ultérieurement dans des modules de mécanique du solide.

    Nous venons dans cette partie d’introduire la notion de rotation d’un solide indéformable,

    notion qui ne peut être comprise avec la mécanique du point et qui nécessite de considérer le volume fini du solide. Nous allons maintenant aborder un autre concept qui lui aussi ne peut être appréhendé qu’en ayant recours à la mécanique du solide : le moment d’une force.

  • 56 Moment d’une force

    6 Moment d’une force

    Archimède est principalement connu pour avoir travaillé sur la théorie des corps flottants qui a donné naissance à la poussée d’Archimède. Mais il s’est aussi intéressé à d’autres domaines de la mécanique. Il aurait ainsi mis au point un ingénieux système de leviers, poulies et palans et affirmé qu’en appliquant une petite force, il serait possible avec ce système de soulever un objet très lourd. L’histoire lui attribue ainsi la mise à l’eau, sous le règne du roi Hiéron au IIIè siècle av. J.-C., d’un trois-mâts avec à bord tout son chargement. Suite à cet exploit, il aurait par ailleurs affirmé : « Donnez-moi un point d’appui et un levier, je soulèverai le monde ». Bien plus tard, au XVè siècle ap. J.-C., Léonard de Vinci s’est intéressé à la biomécanique et a montré que le corps humain se meut grâce à des systèmes de leviers similaires. Ces deux exemples repose sur la notion de « moment de force » que nous allons introduire dans cette partie et qui est à la base de la statique des solides qui sera abordée dans la dernière partie.

    6.1 Introduction de la notion de moment d’une force

    Le moment d’une force joue le même rôle en rotation que la force en translation : la force induit une translation du solide tandis que le moment de la force induit une rotation du solide.

    6.1.1 Observation

    Considérons le cas d’une personne souhaitant ouvrir une porte (Figure 15a). Les Figure 15b à Figure 15g sont une vue du dessus de la porte et illustrent différents cas où la norme de la force est constante mais où la direction de la ligne d’action de la force ainsi que son point d’application varient.

    Figure 15 L’expérience nous montre que :

    aucun mouvement de rotation n’est induit par une force dont la ligne d’action est colinéaire à la porte (Figure 15b) ou dont le point d’application est au niveau des gonds (Figure 15c),

  • 57 Moment d’une force

    lorsque la ligne d’action n’est pas colinéaire à la porte, il est d’autant plus facile de

    l’ouvrir que le point d’application est éloigné des gonds (Figure 15d et Figure 15e), pour un point d’application donné, la situation la plus favorable pour induire un

    mouvement de rotation est lorsque la ligne d’action de la force est perpendiculaire à la porte (Figure 15e et Figure 15f),

    le sens de la rotation engendrée par la force dépend de la direction de la force (Figure 15f et Figure 15g).

    6.1.2 Définition du moment d’une force

    Le moment au point induit par la force appliquée au solide en est défini par :

    → sin (unité : N.m) ,

    avec et l’angle le plus petit (non orienté) entre les deux vecteurs et quand leur origine coïncide. Le signe permet de tenir compte du sens de la rotation engendrée par la force. En effet, imaginons deux personnes situées de part et d’autre de la porte exercent en un même point des forces de module et de direction identiques mais de sens opposées. Le résultat est que la porte ne tourne pas. Cela signifie que les moments induits au niveau des gonds par les deux personnes se compensent, et donc qu’ils sont de signes opposés. Ainsi il nous faut adopter une convention quant au signe d’un moment de force. Comme pour la vitesse angulaire, le moment d’une force sera positif s’il tend à engendrer une rotation dans le sens trigonométrique et il sera négatif dans le cas contraire. Ce sens sera indiqué sur les schéma par une flèche en arc de cercle avec un signe +, comme sur la Figure 16 ci-dessous. Dans le cas de gauche, le moment induit par en est positif, tandis qu’il est négatif dans le cas de droite.

    Figure 16 ATTENTION : le moment dépendant de la distance entre le point et le point d’application

    de la force, il est impératif de connaître au préalable le point d’application de la force et d’indiquer en quel point est évalué le moment.

    Cette expression permet d’expliquer chacun des cas présentés Figure 15 :

    Figure 15b : si 0, alors → 0, Figure 15c : si 0, alors → 0,

  • 58 Moment d’une force

    Figure 15d et Figure 15e : à fixé, si ↗, alors → ↗ (d’où l’intérêt de

    placer la poignée sur le montant extérieur de la porte…), Figure 15f : si , alors → est maximum, Les moments pour (Figure 15f) et (Figure 15g) sont opposés.

    6.1.3 Interprétation graphique du moment d’une force

    Regardons plus précisément l’expression du moment de la force à l’aide de la Figure 17.

    Figure 17 L’équation définissant le moment d’une force peut être interprétée graphiquement selon

    deux points de vue équivalents :

    La force peut être décomposée en deux composantes : ∥ colinéaire à la porte et orthogonale à la porte. Seule la composante sin induit un moment à la

    distance des gonds. Le moment peut alors s’écrire → . La force agit sur la distance apparente sin , générant ainsi en un moment

    → . La distance , appelée bras de levier, est la distance perpendiculaire du point à la ligne d’action de la force .

    6.2 Exemples simples

    Exemple 6-1. Clé droite vs clé tordue

    1- Une main exerce sur une clé droite une force appliquée en . Calculer le moment résultant au centre de l’écrou en . Faire l’application numérique avec

    10N et 30°. 2- Reprendre le calcul précédent

    lorsque la clé est tordue.

  • 59 Moment d’une force

    Exemple 6-2. Gratte-ciel

    Un gratte-ciel de hauteur 400m et à base carrée de côté 40m est soumis à un vent violent arrivant de la gauche. La vitesse du vent, supposée uniforme sur l’ensemble de la façade, est 160km. h . L’action du vent est alors équivalente à une force horizontale appliquée au point de norme 20. 10 N.

    Déterminer le moment exercé par le vent en .

    6.3 Définition vectorielle du moment d’une force

    6.3.1 Moment d’une force

    Nous allons maintenant généraliser la notion de moment d’une force par rapport à un point que nous avons introduite au paragraphe 6.1.2.

    Figure 18 Le moment → généré en par la force appliquée à la porte en est par

    définition :

    → ∧ . En utilisant la définition du produit vectoriel basée sur l’angle formé par les vecteurs et sur

    leur norme :

    → sin Sur l’exemple de la Figure 18, la règle de la main droite appliquée aux vecteurs et

    conduit à , d’où :

    → sin .

  • 60 Moment d’une force

    Comme le moment d’une force, d’autres grandeurs physiques que vous rencontrerez par

    la suite peuvent s’exprimer sous la forme d’un produit vectoriel tel le moment cinétique, la force magnétique agissant sur une particule chargée.

    6.3.2 Exemple du gratte-ciel traité vectoriellement

    Nous venons d’écrire vectoriellement le moment à partir de l’angle formé par les vecteurs et de leur norme. Une autre méthode, que nous allons voir sur l’exemple du gratte-ciel (noté S) traité plus haut au paragraphe 6.2, consiste à décomposer les deux vecteurs dans une base orthonormée directe.

    → ∧ avec et . Donc :

    → 2 ∧

    ∧ 2 ∧

    2 Nous retrouvons le module du moment calculé au paragraphe 6.2. Dans le cas présent 0 donc le signe « - » nous indique que le vent induit une rotation en dans le sens anti-

    trigonométrique, conformément à ce que l’on attend. Cette méthode pourrait être déclinée sur tous les exemples vus aux paragraphe 6.2.

    6.4 Notion de couple

    Nous venons de voir qu’une force induit un moment en un point différent de son point d’application et que ce moment dépend du point considéré. Il en est de même en général pour un ensemble de force.

    Cependant un cas particulier existe lorsque deux forces de même module, antiparallèles et non-colinéaires sont appliquées à un solide. L’ensemble de ces deux forces est alors appelé « couple ». Notons le module des deux forces et la distance séparant leur ligne d’action. Une propriété intéressante d’un couple de forces est que quel que soit le point considéré, ce couple exerce en un moment .

    Démonstration : En utilisant les résultats vus précédemment, le moment exercé à un endroit

    quelconque de la Terre par un couple de forces et aux points d’application respectifs et diamétralement opposés à la surface de la Terre (Figure 19) est égal à :

    → → → ∧ ∧

    Or donc → ∧ ∧

  • 61 Moment d’une force

    ∧ Ce vecteur est donc indépendant du point . De plus, le module de est donc égal à

    sin = car .

    Figure 19 Un couple ne résulte pas forcément d’une seule paire de forces. Il peut résulter de

    plusieurs paires de forces, chacune de même grandeur et de signes opposés. C’est le cas par exemple d’un essieu qui fait tourner une hélice d’avion : chaque élément microscopique de l’essieu exerce une force sur l’hélice et le nombre de ces forces est nettement supérieur à deux. Néanmoins, elles peuvent toutes être associées par paires comme sur la Figure 19, l’ensemble de ces forces étant alors qualifier collectivement de couple.

    Comme vous pourrez le voir ultérieurement dans des modules avancés de mécanique du solide, le moment de force joue le même rôle pour un mouvement de rotation que celui joué par une force pour un mouvement de translation. Ainsi, de la même manière que l’accélération d’un solide (i.e. sa mise en translation) est induite par une force, l’accélération angulaire d’un solide (i.e. sa mise en rotation) est induite par un moment de force.

  • 62 Centre de masse d’un solide

    7 Centre de masse d’un solide

    7.1 Pourquoi s’intéresser au centre de masse ?

    Parmi tous les points d’un solide, un point particulier présente des propriétés remarquables : son centre de masse (CM).

    La figure ci-contre montre par exemple le mouvement d’une clé en chute libre représenté tous les 1/30è de seconde. Si l’on focalise notre attention sur le mouvement du trou dans la poignée à l’extrémité du manche, nous avons l’impression d’un mouvement assez complexe. C’est en effet le cas pour tous les points matériels constituant la clé, à l’exception de son centre de masse. A chaque instant ce centre de masse (que nous allons définir dans cette partie) a été indiqué par un petit point blanc. Nous voyons que ce point particulier du solide a une trajectoire simplement rectiligne au cours de la chute. De façon générale, vous verrez plus tard que le mouvement quelconque d’un solide peut être décrit comme la superposition d’un mouvement de translation de son CM et d’un mouvement de rotation du solide autour du CM. Le mouvement de la clé peut ainsi être vu comme une chute de son CM à laquelle se superpose une rotation de la clé autour de son CM. La physique du CM est par exemple très importante pour les athlètes de saut en hauteur ou de saut à la perche. Les meilleurs sauteurs parviennent ainsi à réussir leur saut même lorsque leur centre de masse est situé sous la barre ! Sur la chronophotographie ci-dessous décomposant le saut d’un surfeur, chaque point du corps du surfeur a au cours du saut une trajectoire complexe mais le CM du surfeur suit une trajectoire parabolique dont les caractéristiques dépendent uniquement de l’inclinaison de la pente au départ du saut et de l’accélération initiale du surfeur au moment du décollage.

    Lors de la réalisation de jeux vidéo ou d’effets spéciaux au cinéma, il est essentiel de respecter cette propriété du CM pour que la chute d’un corps apparaisse « réaliste ». A une toute autre échelle, en astrophysique, la Terre et la Lune sont liées par la force de gravité et le mouvement de rotation de la Terre par rapport à la Lune se fait autour du CM de l’ensemble {Terre+Lune}.

    La seconde propriété particulière du CM d’un solide est liée à la force de gravité. Tout solide de masse peut être considéré comme composé d’un très grand nombre de masses ponctuelles. Chaque masse ponctuelle subit une force gravitationnelle descendante. Dans le cas où toutes ces masses ponctuelles sont soumises à un champ de gravitation identique (comme à la surface de la Terre par exemple), le poids du solide peut être modélisé par une force unique

    s’appliquant au centre de masse du solide et égale à .

  • 63 Centre de masse d’un solide

    7.2 Centre de masse de deux masses ponctuelles rigidement liées

    Considérons un solide S, représenté Figure 20, constitué de deux masses ponctuelles et de masses respectives et reliées par une tige de masse négligeable comparée à et

    .

    Figure 20 Suite à l’action de la gravité, la masse est soumise en à la force et la masse est soumise en à la force . Soit le centre de masse du solide . Nous venons

    de voir que le poids du solide s’applique en son centre de masse. Le moment d’une force en son point d’application étant nul (cf paragraphe 6.3.1), → 0. Or le moment induit par le poids en est la somme du moment induit en par le poids de la masse (qui tend à faire tourner dans le sens « + ») et du moment induit en par le poids de la masse (qui tend à faire tourner dans le sens « - ») :

    → → → ∧ ∧ ∧ ∧

    Donc 0 Et donc

    La coordonnée du centre de masse est donc la moyenne pondérée des coordonnées des particules, les facteurs de pondération étant la masse de chaque particule.

    Nous venons de faire le calcul dans le cas où une seule coordonnée intervient ( ici). Dans le

    cas général où les deux particules et sont repérées respectivement par les vecteurs positions et , le vecteur position du centre de masse est alors égal à :

  • 64 Centre de masse d’un solide

    7.3 Généralisation à un solide constitué d’un grand nombre de particules

    7.3.1 Solide quelconque

    La formule précédente s’étend au cas d’un solide composé de particules, pouvant être très grand. Notons le vecteur position de la è particule, variant de 1 à . Le vecteur position

    du centre de masse est alors donné par la moyenne pondéré des vecteurs positions des particules, les facteurs de pondération étant la masse de chaque particule :

    ∑∑ .

    La seule force ∑ agissant au CM du solide produit exactement le même effet

    mécanique que l’ensemble des forces de gravité agissant sur toutes les masses ponctuelles qui constituent ce solide.

    7.3.2 Solide homogène présentant une symétrie

    Ce calcul est a priori complexe dans le cas d’objets de formes arbitraires. Cependant, dans le cas d’un solide présentant une symétrie et avec une répartition de masse homogène (i.e. la masse volumique est la même en tout point du solide), la position du CM est déterminée très facilement grâce à la propriété suivante :

    Le CM d’un solide homogène et symétrique est confondu avec son centre géométrique. Ainsi le CM d’une sphère homogène est le centre de la sphère, le CM d’un rectangle

    homogène est le centre du rectangle, le CM d’un cerceau uniforme est le centre du cerceau, … Notons que le CM d’un solide n’est pas nécessairement situé dans l’espace occupé par la

    matière. Ainsi, dans le cas d’un cerceau par exemple, le centre de masse est situé au centre du cerceau, c’est-à-dire à un endroit où il n’y a pas de matière. C’est aussi le cas d’un sauteur en hauteur adoptant la technique de Dick Fosbury : au moment où il franchit la barre, son CM peut se situer sous la barre.

    7.3.3 Ensemble de solides homogènes présentant une symétrie

    Dans le cas d’un solide composé de plusieurs solides homogènes et symétriques, la position du CM du solide peut être déterminée en considérant chaque solide le constituant comme une masse ponctuelle possédant la masse de ce solide et positionnée au CM de ce solide, confondu dans ce cas-là avec son centre géométrique.

  • 65 Centre de masse d’un solide

    Exemple 7-1. Centre de masse d’un bonhomme de neige Illustrons cette propriété dans le cas d’un bonhomme de neige constitué de trois

    boules de neige empilées les unes sur les autres et de diamètre respectifs 0.5m, 0.4m et 0.2m.

    Nous supposons les trois boules de neige homogène et de masse volumique . Les trois solides constituant le bonhomme de neige sont donc des sphères homogènes de rayon 0.25m, 0.2m et 0.1m et leur centre de masse respectif est situé au centre des sphères, i.e en d’ordonnée 0.25m, en d’ordonnée

    0.5 0.4 2 0.7m et en d’ordonnée 0.50.4 0.2 2 1m. En utilisant la propriété du CM d’un ensemble de solides homogènes et symétriques, le CM du bonhomme de neige est directement égal à :

    , où , et sont les masses des boules de neige

    respectivement centrées en , et . Or la masse d’une sphère homogène est égale au

    produit de sa masse volumique par son volume. Donc :

    43

    43

    434

    3

    La masse volumique et le facteur se simplifient :

    L’application numérique donne 0.42m.

    Rappelons que l’ensemble de la partie 7 a été traité dans le cadre de l’hypothèse forte

    suivante : le champ de gravitation auquel est soumis le solide considéré est le même en tout point de ce solide. Cette hypothèse est valide dans la majeure partie des situations rencontrées dans la vie quotidienne. Mais elle l’est aussi à de toutes autres échelles lorsque l’on s’intéresse à la force de gravité exercée par une planète sur une autre planète car la distance entre les planètes est très grande devant le diamètre des planètes. Cependant, lorsque le solide considéré est un pont ou un gratte-ciel ou tout autre exemple dont les dimensions atteignent plusieurs centaines de mètres voire le kilomètre, la dimension du solide n’est plus négligeable devant le rayon de la Terre. Cette hypothèse cesse alors d’être valide et il n’est plus possible de considérer que tous les points du gratte-ciel sont soumis au même champ de gravitation. L’étude de ces cas dépasse le cadre de ce cours.

  • 66 Statique des solides

    8 Statique des solides

    Dans cette dernière section, nous allons énoncer le principe fondamental de la statique. Puis nous mettrons en application ce principe au travers de divers exemples de complexité croissante.

    8.1 Principe fondamental de la statique

    Pour qu’un solide initialement au repos dans un référentiel galiléen reste en équilibre, deux conditions doivent être satisfaites :

    La somme vectorielle des forces extérieures agissant sur est nulle (équilibre en

    translation) :

    → 0 La somme vectorielle des moments en un point des forces extérieures agissant sur

    est nulle (équilibre en rotation) :

    → 0 Ces deux équations vectorielles appellent plusieurs remarques : La seconde équation est vraie quel que soit le point considéré. Dans le cas d’un couple appliqué à un solide (cf paragraphe 6.4), nous avons vu que la

    somme vectorielle des deux forces composant le couple est nulle. Pourtant, un couple peut mettre en rotation le solide. La seconde équation vectorielle ci-dessus permet d’interdire ce mouvement de rotation. Lorsque le solide peut être considéré comme une particule ponctuelle, seule la première équation vectorielle sur le bilan des forces est nécessaire (cf 1è partie du cours).

    La notion de repos n’a de sens que si elle est définie par rapport à un référentiel : un solide peut être au repos par rapport à la Terre mais en mouvement par rapport au Soleil.

    Dans ces deux équations, la notion d’ « extérieur » au système considéré est primordiale. Toutes les forces internes à un système et participant à sa cohésion ne doivent pas être considérées.

    Selon le nombre d’inconnues à déterminer, l’utilisation d’une seule des deux équations

    vectorielles du principe fondamental de la dynamique peut suffire. En revanche, l’étude de certains systèmes nécessite l’utilisation combinée de ces deux équations. C’est ce que nous allons voir dans la suite au travers de divers exemples.

  • 67 Statique des solides

    8.2 Méthode de résolution d’un problème de statique de solides

    La méthode suivante est valable pour aborder un problème de statique des solides mais elle le sera aussi pour tout problème de dynamique.

    1. Expliciter le système dont on veut étudier l’équilibre. Cette étape primordiale permet de spécifier ce qui sera considéré comme « extérieur » au système.

    2. Recenser alors l’ensemble des forces extérieures s’appliquant sur le système. Contrairement à la mécanique du point, dans le cas d’un solide il est impératif de spécifier le point d’application de chacune de ces forces.

    3. Résumer ces informations sur un schéma. Ce schéma, sur lequel seront indiqués les axes du repère choisi, est une aide très précieuse au moment de la projection des forces ou de la détermination du signe d’un moment de force. Indiquer sur ce schéma une flèche en arc-de-cercle avec un signe « + » pour fixer le sens d’un moment positif.

    4. Ecrire les deux équations vectorielles du principe fondamental de la statique et les projeter sur les axes du repère choisi

    a. Si l’orientation d’une force est inconnue, on la décrit par deux composantes orthogonales.

    b. Pour l’équation relative aux moments des forces, le point par rapport auquel sont calculés ces moments doit être choisi de façon judicieuse pour simplifier au maximum les calculs.

    5. Il ne reste plus qu’à résoudre les équations pour déterminer les inconnues.

    8.3 Exemple 1 – La balance

    Considérons maintenant une balance libre de pivoter autour du point . Une masse , de centre de masse , est placée à une distance à gauche de . Une masse , de centre de masse , est placée à une distance à droite de . La balance a une masse négligeable devant et .

    Nous cherchons à déterminer le lien entre et pour assurer l’équilibre de la

    balance. 1. Effectuer un bilan des forces extérieures agissant sur le plateau de la

    balance. Est-il possible d’obtenir une relation entre et ? 2. Effectuer en un bilan des moments des forces extérieures agissant sur le

    plateau de la balance. Est-il possible d’obtenir une relation entre et ? 3. Effectuer en un bilan des moments des forces extérieures agissant sur le

    plateau de la balance. Est-il possible d’obtenir une relation entre et ?

  • 68 Statique des solides

    8.4 Exemple 2 – Equilibre d’une échelle

    Une échelle d’épaisseur négligeable, de

    longueur et de poids est posée sur un plancher rugueux et contre un mur lisse, i.e. sans frottement. Le coefficient de frottement statique du plancher est 0.6 . Le but de l’exercice est de déterminer l’angle maximal de l’échelle avec le mur au-delà duquel l’échelle se met à glisser. Le système de coordonnées est indiqué sur la figure ci-contre.

    1. Isoler l’échelle et effectuer un bilan des forces extérieures s’exerçant dessus. On décompose les forces inconnues dans la base , : ,

    et . En déduire une relation entre et d’une part, et entre , et d’autre part.

    2. Effectuer en un point judicieusement choisi un bilan des moments des forces extérieures agissant sur l’échelle. Déterminer alors l’angle maximal entre le mur et l’échelle pour que l’échelle ne glisse pas.

    3. Pour cette valeur , la force exercée par le mur représente quelle proportion du poids de l’échelle ?