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Les entrepreneurs de la pauvreté Economie |Entreprises Décembre 2011 DOSSIER 064 Les entrepreneurs de la pauvreté 068 Un secteur à l’abandon 072 L’ESS peut atteindre 20% du PIB 074 Les prémices d’une stratégie nationale L’économie sociale et solidaire est une conception relativement jeune au Maroc. Confronté aux problématiques de développement de ces poches de pauvreté, le pays dispose avec ce «Tiers secteur» d’opportunités réelles de sortir de l’engrenage de la précarisation de ses populations les plus vulnérables. Eclairage sur un secteur à fort potentiel de croissance, mais encore oublié. Par Ghassan Waïl El Karmouni 064

Dossier ESS sur Economie Entreprises Décembre 2011

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064 Les entrepreneurs de la pauvreté - 068 Un secteur à l’abandon -072 L’ESS peut atteindre 20% du PIB - 074 Les prémices d’une stratégie nationale. L’Economie Sociale et Solidaire est une conception relativement jeune au Maroc. Confronté aux problématiques de développement de ces poches de pauvreté, le pays dispose avec ce «Tiers secteur» d’opportunités réelles de sortir de l’engrenage de la précarisation de ses populations les plus vulnérables. Eclairage sur un secteur à fort potentiel de croissance, mais encore oublié.

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Les entrepreneurs de la pauvreté

Economie|Entreprises Décembre 2011

DOSSIER064 Les entrepreneurs de la pauvreté068 Un secteur à l’abandon072 L’ESS peut atteindre 20% du PIB074 Les prémices d’une stratégie nationale

L’économie sociale et solidaire est une conception relativement jeune au Maroc. Confronté aux problématiques de développement de ces poches de pauvreté, le pays dispose avec ce «Tiers secteur» d’opportunités réelles de sortir de l’engrenage de la précarisation de ses populations

les plus vulnérables. Eclairage sur un secteur à fort potentiel de croissance, mais encore oublié.

Par Ghassan Waïl El Karmouni

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Décembre 2011 Economie|Entreprises

DOSSIER|L’économie sociale et solidaireL’économie sociale et solidaire

(ESS) est considérée dans plusieurs pays, même les plus développés, comme un secteur potentiel de sortie de crise. Cette affi rmation n’est pas une vue de l’esprit mais basée sur un certain nombre d’éléments concrets. En effet ce secteur contribue à la création d’emplois à hauteur de 12% en France et au Pays-Bas, 11% en Belgique, au Brésil et en Irlande, 8% aux USA. Il participe en outre à la création de richesses estimée entre 6 à 7% en France, 5% en Belgique, 6% au Brésil…

Au Maroc, bien que les principes de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) soient une réalité ancienne, à travers des phénomènes tels que la Twiza, la Jmaa, l’Agadir, la Mou-charaka ou la Mouzaraa dont le fonctionnement fait référence de façon très proche aux principes de l’ESS dans sa défi nition moderne, la participation de ce «Tiers secteur» à la création de richesse est encore en deçà du potentiel.

Les rapports offi ciels parlent d’un taux de pénétration par rapport à la population active de l’ordre de 3,1% (soit 50.000 emplois salariés et plus de 380.000 adhérents ou associés) et d’une participation au PIB esti-mée à 1,6%. Au-delà des diffi cultés de quantifi er le secteur en raison de l’absence d’études précises et d’une comptabilité nationale dans le do-maine, le potentiel est bien là et ne demande qu’à être exploré. En effet, quand on suit l’épopée de la Coopérative Agricole de Taroudant ou Copag qui produit entre autre la marque Jaouda, on peut se rendre compte comment le secteur de l’ESS peut devenir un moteur de déve-loppement local et même national. Des 39 agriculteurs de la région de Taroudant qui ont constitué la coo-pérative en 1987, celle-ci est passée, 25 ans plus tard, à plus de 15.000 agriculteurs adhérents et 5.000 sala-riés avec une diversifi cation dans la production, le conditionnement et commercialisation des agrumes, des

primeurs, du lait, de l’alimentation de bétail ainsi que la fabrication des jus générant un chiffre d’affaires de plus de 2,5 milliards de dirhams. Un modèle qui a tellement concurrencé les entreprises du secteur que le lé-gislateur a dû imposer les coopérati-ves dépassant un CA de 2 millions de dirhams alors que la loi sur les coopératives les exonérait de TVA et d’IS.

Une notion relativement récente

Ce qui est aussi symboliquement intéressant dans le cas de la Copag, c’est qu’elle a été lancée la même année que le concept de «l’économie sociale» a été évoqué offi ciellement au Maroc. Ainsi, en 1987 pour la première fois lors d’un colloque or-ganisé par le département chargé du Plan, le concept d’économie sociale a été utilisé pour désigner «des ac-tivités économiques dont le but est de

répondre aux besoins sociaux de la col-lectivité. Ces activités s’exercent dans trois types d ’organisations qui sont les coopératives, les associations et les mu-tuelles».

Confronté aux contres-coups so-ciaux de l’Ajustement Structurel, l’Etat avait déjà pensé à mettre en place «une économie intermédiaire» pour amortir son retrait massif et parfois brutal des secteurs sociaux mais aussi de l’économie publique. Cette notion d’ESS, encore large-ment méconnue vise ainsi à donner un cadre conceptuel et politique à un secteur qui émerge hors des structu-res de l’Etat pour assurer l’accès des populations aux services sociaux de base, contrer la recrudescence de la pauvreté et de la vulnérabilité, ainsi que les problèmes du chômage, no-

tamment celui des jeunes diplômés. C’est ainsi qu’est né au Maroc

le concept d’Economie Social. Il vient conforter en fait le statut de la coopérative, créé en 1984 et qui est défi ni comme «un groupement de personnes physiques, qui conviennent de se réunir pour créer une entreprise chargée de fournir, pour leur satisfac-tion exclusive, le produit ou le service dont elles ont besoin». On compte en 2010 plus de 7.800 coopératives avec 380.144 adhérents réalisant près de 7 milliards de dirhams de CA.

Viennent se greffer à cela l’autre composante de l’ESS qui sont les associations et qui dans le contexte des années 1980 voient la naissance des premières associations de déve-loppement à côté des associations caritatives, culturelles et d’anima-tion de la jeunesse. Caractérisé par une proximité des problèmes des citoyens ainsi qu’un niveau intellec-tuel plus ou moins élevés de leurs

dirigeant et de fi nancement inter-nationaux, les associations se sont inscrit dans un soutient actif a une grande partie de la population sou-vent marginalisée dans le monde ru-ral. Cette composante importante de l’économie sociale a graduellement commencé à être perçue comme un acteur incontournable dans le pro-cessus du développement économi-que, politique et social du pays. On compte aujourd’hui plus de 50.000 associations se spécialisant dans dif-férents secteurs. En plus des secteurs traditionnels, le domaine d’activité principale des nouvelles associations créées à partir des années 80-90 et plus particulièrement dans les années 2000 sont la santé, l’alphabétisation, l’intégration socio-économique des femmes, la promotion des TPE et

Des 39 agriculteurs qui ont constitué la COPAG en 1987, celle-ci est passé à plus de

15.000 adhérents et 5.000 salariés

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Economie|Entreprises Décembre 2011

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

des PME, le développement rural, les microcrédits... une étude récente sur les activités des associations fait ressortir que le secteur associatif a une prédilection aux actions à ca-ractère économique, notamment le développement local (22% des as-sociations), social (21%) ou cultu-rel et récréatif (22%). Toutefois, la faiblesse des études exhaustives et de la faiblesse de l’effort statistique public en direction de ces structures poussent à relativiser les différents chiffres avancés.

L’autre composante de l’ESS au Maroc sont les mutuelles. Celles-ci poursuivent le but d’assurer, sur une base solidaire, l’accès aux services et à la protection. Deux grands princi-pes généraux sont à la base des mu-tualités: la solidarité entre les mem-bres et le caractère non lucratif. Elles sont gérées depuis les années 60 par un dahir promulgué en 1963 qui dé-fi nit les mutualités comme étant «des groupements à but non lucratif qui, au moyen des cotisations de leurs mem-bres, se proposent de mener dans l ’in-térêt de ceux-ci ou de leur famille, une action de prévoyance, de solidarité et d ’entraide tendant à la couverture des risques pouvant atteindre la personne humaine». Aujourd’hui, le secteur mutualiste marocain est animé par une cinquantaine d’institutions. 43% sont des sociétés de cautionnement mutuel qui opèrent dans les secteurs de l’artisanat (11 mutuelles regrou-pant 8.840 artisans), du transport (6 avec 8.979 exploitants de voitures de transport), de la pêche (3 avec 675 pêcheurs) et de la PME (2 avec 517 commerçants et jeunes promoteurs). 3 mutuelles d’Assurance (Mutuelle

Agricole d’Assurance (MAMDA), la Mutuelle d’Assurance des Trans-porteurs Unis (MATU) et la Mu-tuelle d’Assurance sur les accidents de route et de travail. En plus de ces mutuelles classiques, on assiste récemment au Maroc à l’émergence d’une autre catégorie de mutuelles: «les mutuelles communautaires». Il s’agit de groupes de personnes qui s’organisent localement pour faire face, au moyen de leurs cotisations, à leurs besoins en matière de fi nan-cement de la santé. Celles-ci se sont essentiellement constituées autour de coopératives dont les membres ont développés des mutuelles de santé pour garantir une couverture maladie pour les adhérents ou en-core mutualiser l’épargne pour le réinvestir dans leurs coopératives.

Des limites contraignantesUne dynamique donc assez consé-

quente mais qui pêche par la fai-blesse de la capacité des acteurs et aussi le balbutiement des politiques publiques qui tardent à dégager une vision claire pour le secteur. En effet, ministère des Affaires économiques

et générales, ministère du Dévelop-pement social, de la Solidarité et de la Famille, ministère de l’Intérieur, ministère des Finances, ministère de la justice, ministère de l’Emploi et secrétariat général du Gouverne-ment sont autant de départements qui interviennent dans le secteur, en plus de l’Offi ce du développe-ment de la coopération (ODCo), Agence du Développement Social (ADS), Entraide Nationale, et les différentes agences régionales… une pléthore d’acteurs qui, chacun à son niveau, touche à l’ESS. Si on y ajoute un mécanisme transversal tel que l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) et les différentes Fondations, ONG et coopérations internationales, on peut se rendre compte de la diffi cul-té à coordonner les efforts et fi nale-ment à développer le secteur malgré les sommes colossales qui y sont dé-versées annuellement.

Un secteur qui touche principa-lement les populations les plus dé-munies qui par défi nition ont besoin d’un appui spécifi que et ciblé à leurs multiples problèmes. Et aussi d’un accompagnement afi n qu’ils puis-sent se prendre en charge en de-hors des logiques d’assistanat. Or ce qui apparait selon les différentes études qualitatives qui ont été dili-gentées, les contraintes internes du secteur sont de plusieurs ordres. En premier lieu, on retrouve un niveau d’instruction faible à inexistant chez beaucoup de porteurs de projets que ce soit dans les coopératives ou les associations notamment dans le mi-lieu rural. Cette situation limite les capacités de saisir les opportunités qui s’offrent à eux en termes de fi -nancements ou tout simplement en termes de viabilité des projets. En effet, n’importe quel bailleur de fonds public ou privé va demander un business plan du projet pour pou-voir le fi nancer. Cette situation fait que les populations qui cherchent à s’inscrire dans ce genre d’entreprises d’économie sociale sont contraintes

La création de coopératives par secteurAvec l’INDH, le nombre de coopératives a fortement cru, notamment dans les activités agricoles.

Source: Annuaire statistique des coopératives au Maroc en 2010

800

700

600

500

400

300

200

100

0

2004 2006 2008 2010

Agriculture

Artisanat

Habitta

L’Economie Sociale et Solidaire en Méditerranée (2010)Bien que le Maroc soit bien positionné au Maghreb, le secteur de l’ESS reste faible par rapport à la Méditerranée.

Source: ESMED, L’économie sociale dans la Méditerranée (mai 2011)

NOMBRE D’ORGANISATIONS 2.369

45.093

196.868

105.690

47.365

8.815

4.581

PAYSAlgerie

Espagne

France

Italie

Maroc

Portugal

Tunisie

ADHÉRENTS/ASSOCIÉS 1.423.781

12.150.549

13.000.000

13.403.099

365.255

2.880.056

897.923

EMPLOIS CRÉÉS24.528

2.379.994

2.392.787

1.302.081

22.502

101.000

N.C.

C A (MILLIONS D’EUROS)N.C.

92.157

311.653

148.155

683

6.095

177

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Décembre 2011 Economie|Entreprises

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

à l’autofi nancement engendrant du coup une faiblesse du capital initial. Ainsi, à titre d’exemple, plus de 70% des coopératives marocaines dispo-sent d’un capital compris entre 0 et 300.000 dirhams. La faiblesse du capital empêche en outre le levier fi -nancier et la projection dans le futur. Donc, les excédents quand ils sont réalisés sont rarement réinvestis dans l’affaire. Ajouté à cela le défaut de bonne gouvernance comme soulevé dans le rapport de l’Observatoire du développement humain concernant les projets fi nancés par l’INDH: «54% des Activités Génératrices de Revenue (AGR) sont mises en œuvre par des associations et des coopératives qui ne disposent pas toujours d ’un sys-tème de gestion financière et comptable conforme à la réglementation.» Et cela n’est que la partie visible de l’iceberg puisque l’INDH est obligée d’audi-ter ses projets. La conjonction de tous ces facteurs engendre une forte

mortalité dans le secteur. A ces facteurs internes s’ajoutent

des facteurs externes liés à l’envi-ronnement où interagissent les en-treprises d’économie sociale et soli-daires.

En effet, en plus de la multiplicité des intervenants comme cité précé-demment, la contrainte des marchés est fondamentale. La plupart des structures ont du mal à écouler leur production. Que ce soit en termes de capacité physiques, de produc-tions, en termes de qualité ou en termes de proximité des marchés, la problématique de la commercialisa-tion et de la compétitivité des pro-duits proposés, les entreprises d’éco-nomie sociale ont du mal à vendre et de générer du cash. Ajouté à cela un cadre juridique inadéquat (la loi sur les coopératives a plus de 25 ans) et souvent contraignant, les entrepre-neurs de l’économie sociale et soli-daire sont ainsi pris entre l’enclume de leurs limites propres et la massue de leur environnement externe. E|E

La réforme de l’économie sociale, initiée par Nizar Baraka, en est encore à ses débuts et accuse du retard.

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Economie|Entreprises Décembre 2011

Le discours sur l’économie sociale et so-lidaire a tendance à s’ancrer de plus en plus dans le débat public. Depuis l’annonce de l’INDH et la volonté affi chée de doter les acteurs de l’ESS d’une certaine reconnais-sance et de moyens d’actions publics, plu-sieurs dizaines de millions de dirhams ont été injectés dans les secteurs et une mobi-lisation importante de l’aide internationale vers les acteurs de ce secteur a été impulsée par l’Etat.

Pourtant le rôle des acteurs et leur poids dans l’économie sociale et solidaire est as-sez diffi cile à cerner. De part la multiplicité des intervenants et des interventions ainsi que la faiblesse des études et des statistiques disponibles, il s’avère particulièrement diffi -cile de mesurer les effets et l’impact des dif-férentes actions menées ni de la pertinence des investissements concédés. D’autant plus que l’absence de la culture de l’évalua-tion et de la rentabilité laisse planer le doute sur la capacité des actions entreprises et des

acteurs du secteur d’entrer dans une logique de croissance vertueuse et de sortir de la lo-gique de l’assistanat qui apparait dès qu’on parle de solidarité ou de social.

Le secteur de l’Economie Sociale et Soli-daire, est fortement concentré. Malgré l’in-fl ation numérique qui est apparue depuis 2005, date de lancement de l’INDH, le secteur est toujours dominé par trois types d’acteurs essentiellement les coopératives agricoles, les associations de proximité, no-tamment dans le rural et dans une moindre mesure les mutuelles qui ont stagné voir ré-gressé depuis les années 80.

Les coopératives: un acteur majeur

La plus grande partie de la plus-value réalisée par l’ESS provient essentiellement des coopératives. Celles-ci sont elles-mê-mes orientées en grande partie vers le sec-teur agricole avec plus de 5.000 structures dédiées soient plus de 64%. Le secteur de

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

l’habitat attire lui aussi un grand nombre de coopérants et compte plus de 1.000 struc-tures, mais concentre plus de 73% du capi-tal investi contre 24% pour les coopératives agricoles. Cette contradiction apparente s’explique aisément par la nature du secteur. Premièrement parce que les coopératives de production sont en grande partie sous capitalisées. Les 5.000 coopératives agrico-les se concentrent à hauteur de 70% entre l’élevage, la collecte et commercialisation de lait et l’agriculture. Elles se partagent moins d’1,5 milliard de dirhams en termes de capital soit 300.000 dirhams en moyen-ne. Ce qui est très faible si on considère qu’une seule vache laitière coûte au bas mot 15.000 à 20.000 dirhams pièce. Ajoutés à cela les installations, les équipements etc. Pour un tracteur il faut compter au mini-mum 300.000 dirhams! A cette sous capi-talisation patente s’ajoute un autre facteur qui est la faiblesse du réinvestissement des excédents quand ils existent.

Entre contraintes internes et externes, les entreprises de l’économie sociale se déploient sur une grande partie du territoire nationale tout en restant en grande

partie concentrées dans leurs activités. Confronté à de nombreux défi s, le secteur de l’Economie Sociale et Solidaire semble laissé à l’abandon.

Un secteur à l’abandon

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DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

L’autre facteur explicatif de cette sous-ca-pitalisation est la faiblesse du niveau d’en-cadrement et d’instruction des coopérants qui implique une sous-déclaration à la base du capital cautionné par l’absence du suivi et du contrôle de la part de l’Etat. Il faut dire que l’organe habilité par les pouvoirs publics à gérer les coopératives est l’Offi ce de développement de Coopération ODCo. Un offi ce qui a depuis longtemps connu beaucoup de dysfonctionnements et qui peine à se restructurer. Troisièmes facteur important: les coopératives d’habitat de par leur nature sont obligées d’avoir des immo-bilisations importantes du fait qu’elles font de l’autopromotion immobilière et qu’elles ont besoin d’un capital important pour pouvoir faire de la levée fi nancière auprès des banques pour compléter le montant né-cessaire à la construction.

L’autre secteur qui mobilise la plupart de nos coopératives est l’artisanat. Celui-ci représente plus de 12% de l’ensemble des coopératives inscrites avec 968 structures. Elles rassemblent plus de 22.300 artisans au niveau national. Les coopératives artisa-nales sont de faible taille, elles ne disposent pas de capacités fi nancières et de possibilités de mobilisation de crédits puisque le capital moyen des coopérative de textile et tapis par exemple ne dépasse pas les 30.000 dirhams. Alors que ces coopératives représentent plus de 15% des structures du secteur et plus de 20% en terme de nombre d’artisans regroupés dans des coopératives. Fortement soutenu par l’Etat dans le cadre des plans touristiques, ces coopératives ont servi au développement de l’esprit d’assistance et de dépendance, plutôt qu’à l’encouragement des initiatives individuelles ou collectives. En effet, l’action publique s’est focalisée

sur la mise à la disposition des coopératives d’équipements et d’outillage, l’allocation de subventions pour le fonctionnement, l’oc-troi de locaux, l’encadrement technique et administratif, l’organisation de cycles de formation, d’expositions... A cela s’ajoutent les avantages fi scaux, l’aide alimentaire et parfois la prise en charge des frais d’eau, d’électricité et de téléphone. A travers les mécanismes mis en place, les agents publics chargés de la gestion de ses coopératives avaient été, selon plusieurs rapports de gestion, dé-faillants. En effet, «la gestion admi-nistrative, écono-mique et fi nancière, souvent attribuée à des agents mis à la disposition des coo-pératives par l’État, a souvent desservi ces coopératives, plutôt qu’elle ne les a servis. Quant à la fonction d’encadrement et de contrôle dévolue aux organismes publics, elle est quasi inexistante», comme le rap-porte le rapport du cinquantenaire sur son volet consacré aux politiques publiques de l’artisanat.

Le rôle perdu des associationsLe secteur associatif est l’autre acteur

majeur du développement de l’économie sociale et solidaire au Maroc. Malgré la faiblesse des donnés disponibles, les asso-ciations mènent leurs actions dans tous les domaines du développement. Infrastructu-res de base, électrifi cation, alimentation en eau potable, protection de l’environnement, alphabétisation, éducation, santé, promo-tion de la petite entreprise, microcrédit, lut-te contre la corruption, etc. autant de sec-

teurs vitaux qui sont investis par les 50.000 associations recensées. En termes de poids économique, une étude américaine estime la participation de la société civile à plus de 160.000 équivalents d’emplois à temps plein sur l’ensemble du territoire national. Leur rôle s’est encore renforcé avec le lan-cement de l’INDH qui sollicite explicite-ment leurs interventions à tous les niveaux: de la proposition des projets à la participa-tion dans les organes de gouvernance, en

passant par l’organisation des bénéfi ciaires, la contribution au fi nancement, la concré-tisation et l’accompagnement des projets. Une mise en avant du rôle des associations, bien que selon le rapport de l’Observatoire National du Développement Humain paru en 2009, le rendement de cette action est assez limité. En effet, les AGR ne concer-nent qu’environ 13% du nombre de pro-jets INDH engagés au cours de la période 2005-2008. En termes fi nanciers, seuls 8% des montants globaux des projets sont af-fectés aux AGR. De manière générale, relè-ve le rapport, les AGR offrent peu de diver-sité quant à la nature des projets et peu de visibilité quant à leur viabilité économique, faute d’un accompagnement et d’un enca-drement adéquats. Or, souligne le rapport de l’ONDH, «les associations ne possèdent pas le professionnalisme exigé par certaines procédures administratives. Qui plus est, leur statut d’institutions à but non lucratif

L’intérêt pour l’Argan a démarré à partir des années 80, date à laquelle plusieurs missions d’études scientifi ques ont été diligentées aux niveaux national et international. Une première action de création de coopérati-ves féminines dans le village de Tafdna dans la région d’Essaouira a été soutenue par la coopération allemande GTZ en 1996 dans le cadre d’un programme de lutte contre la pauvreté et de promotion de l’approche genre et de la protection de l’environnement. Depuis, l’organisme public allemand a soutenu la création de plus d’une dizaine de coopératives et même d’une union de coopératives. L’expérience a fait mouche et l’UE va soutenir en 2002 un programme de l’Agence de Développement Social

ADS pour l’élargissement de l’expérience à toute l’arganeraie. A la clé, la structuration d’une vraie fi lière de production d’argan composée d’une association professionnelle, de 6 Groupements d’Intérêt Economique regroupant plus de 60 coopératives de femmes sur un total de 160 coo-pératives actives. Cette action a pu développer non seulement le chiffre d’affaires des coopératives estimé en 2009 à plus de 15 millions de di-rhams, mais aussi un chiffre d’affaires «privé» de 50 millions de dirhams, de revaloriser le prix du litre d’huile, de protéger l’arganeraie et aussi de labéliser les produits issus de l’argan, d’alphabétiser et de former des milliers de femmes de la région...

SUCCESS STORIES LES FEMMES «ARGANIÈRES»

Le statut d’institutions à but non lucratif est difficile à concilier

avec l’objectif de base des AGR

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Economie|Entreprises Décembre 2011

quelques expériences ont été mises en pla-ce depuis 2002. Ces expériences n’ont pas été initiées dans un cadre unifi é, ni dans le cadre d’actions publiques. Il s’agissait de tentatives ponctuelles de répondre locale-ment à un besoin qui a principalement trait à l’accès aux médicaments dans des régions reculées. On compte aujourd’hui plus d’une dizaine de ces institutions lo-cales, qui touchent quelques milliers de bénéfi ciaires mais en l’absence d’un réel intérêt public pour ces expériences, celle-ci resterons méconnues et limitées.

Ainsi, bien que le discours offi ciel fait l’apologie de l’Economie Social et Soli-daire, les performances de ce «tiers sec-teur» sont encore loin d’être à la hauteur de son potentiel. Des efforts sont encore nécessaires pour coordonner et encadrer les acteurs sans pour autant chercher à les dominer comme il est ressorti de l’échec relatif à des méthodes de gouvernance de l’INDH. E|E

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

est diffi cile à concilier avec l’objectif de base des AGR». Cet aspect relevé par le rapport met en évidence une limite essentielle. En effet, le rôle des associations est d’accom-pagner les porteurs de projets et pas de porter elle-même des projets économiques. Cette nuance n’a pas été prise en compte par l’INDH qui visait la création d’AGR par des associations au bénéfi ce de person-nes et non pas la création d’AGR par des bénéfi ciaires soutenus par une association. Cette confusion des genres, d’ailleurs assez répondue dans le secteur associatif maro-cain, ce qui fait que les projets ne sont pas toujours viables et pérennes.

Mutuelles, le maillon manquantLes mutuelles quant à elles ont stagné

et sont essentiellement dominées par les mutuelles de couverture médicale pour les fonctionnaires et les employés du secteur public avec plus de 3 millions de bénéfi ciai-res. La seule opération d’envergure ayant

touché cette partie de l’économie sociale et solidaire est la fusion de la MAMDA-MCMA qui a engendré un géant en ter-mes de fl ux fi nancier qu’il génère, mais aussi en termes de participation au tour de table des grands chantiers publics et privés. Ainsi, le groupe MAMDA-MC-MA affi che des chiffres importants dont notamment des réserves libres colossales, 600 millions de DH de chiffres d’affaires, 12 milliards d’actifs réévalués. A travers ses placements dans la Bourse des Valeurs de Casablanca, estimés à plus de 5 milliards de dirhams, le groupe est présent dans le tour de table de plusieurs organismes ou sociétés cotées comme l’ONA et la SNI, Attijariwafa Bank, BMCE Bank, Sonasid ou autres, sortant peu a peu des logiques de mutualité et des principes d’économie social et solidaire. A côté de ces géants de la mutualité, l’émergence des mutuelles communautaires notamment dans la san-té, est une nouveauté à relever. En effet,

1000

800

600

400

200

0

Création de coopératives par des femmesAvec la réussite avérée dans l’Argan et l’appui national et international aux coopératives féminines leur nombre explose.

Effectifs

1950 1960 19801970 1990 2000 2010

Les coopératives artisanales par activitéLes filières en relation avec le textile sont les principales contributrices aux coopératives artisanales

• Poterie et céramique

• Platre

• Commercialisation d’artisanat

• Forgerons-feronerie

• mozaique-zellige

• Boulangeries

• Maroquinerie

• Art et décoration

• Chaussure

• Tisserands

• Corderie et vanerie

• Thuya

• Bijouterie

• Autres

Textile et TapisEffectif 152

Taux 15,7

BatimentsEffectif 130

Taux 13,43

Tailleurs ConfectionEffectif 113

Taux 11,67

MenuiserieEffectif 65

Taux 6,71

Couture-broderieEffectif 104

Taux 10,74 Effectif 404

Taux 41,75

Les coopératives agricoles par type d’activité Le lait et l’élevage sont les principales filières des coopératives agricoles

Collecte et commecialisation de lait Effectif 1517

Taux 30,32

ElevageEffectif 1339

Taux 26,76ApicultureEffectif 763

Taux 15,25

ApprovisionnementEffectif 440

Taux 8,79Materiel agricoleEffectif 196

Taux 3,92

OleicultureEffectif 142

Taux 2,84

MaraichageEffectif 129

Taux 2,58

PompageEffectif 110

Taux 2,2Autres Effectif 367

Taux 7,34

Secteurs des coopératives de femmesLes coopératives féminines se concentrent entre agriculture, Argane et artisanat.

AgricultureEffectif 388

Taux 39,35

ArtisanatEffectif 353

Taux 35,8

ArganeEffectif 170

Taux 17,24

Denrées AlimentairesEffectif 50

Taux 5,07

AutresEffectif 25

Taux 2,54

Récapitualtif des principaux indicateursAvec près de 8 milliards de dirhams de CA, les coopértives au Maroc restent un créneau sous exploité en vue de son potentiel.

INDICATEUR7.804

380.144

6.226.715.420

1.998.319.278

7.842.192.041

6.814.563.137

104.215.405

24.719

495.717.113

INTITULÉNombre de coopératives

Nombre d’adhérents

Capital en dirhams

Actif Immobilisé en dirhams*

Chiffre d’Affaire en dirhams*

Total des achats en dirhams*

Excedent en dirhams**

Emploi salarié*

Masse salariale en dirhams** Donnée relatives à 1163 cooperatives déclarants en 2008

** Ne corespondant qu’au 826 coopératives ayant réalisées

un excedent parmis 1163

Les coopératives et leurs unions par secteur L’agriculture demeure la principale activités des coopérants

AgricultureEffectif 5003

Taux 64,11

HabitatEffectif 1,026

Taux 13,15

Artisanat Effectif 968

Taux 12,4

ArganeEffectif 183

Taux 2,34

ForetEffectif 175

Taux 2,24

• Peche

• Plantes medicinales

• Denrée allimentaire

• Transport

• Alphabetisation

• Commerce de detaille

• Conssomation

• Exploitation des carriere

• Centre de gestion

• Main d’Œuvre

• Traitement des dechets

• Mine

• Tourisme

• Telecom

•Arts et culture

• Commerce electronique

• Imprimerie papeterie

Effectif 449

Taux 5,75

Source: Annuaire statistique des coopératives au Maroc en 2010

Page 8: Dossier ESS sur Economie Entreprises Décembre 2011
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072

Economie|Entreprises Décembre 2011

Est-ce qu’on peut mesurer le secteur de l’économie sociale et solidaire au Maroc (ESS)?

Oui, mais on rencontre de grosses dif-fi cultés puisque pour mesurer cette éco-nomie, il faut d’abord la défi nir de façon rigoureuse. On ne fait pas la distinction entre ce qui est social, privé, et ce qui est public. Ensuite, même si on fait cette dé-fi nition, la mesure est plus diffi cile puisque les institutions de l’économie sociale sont multiples, par exemple les coopératives, les associations, etc. A titre d’exemple, toutes les associations ne font pas partie de l’ESS. Une association ne peut pas être forcément économique. Il y en a qui produisent, peut-être des activités qu’on ne peut pas classer comme économiques. Il n’est pas suffi sant de dire par exemple que nous avons 8.000 coopératives alors que la moitié peut-être inactives.

Comment se fait-il qu’on estime la participation de l’économie sociale et solidaire à 8% du PIB en France?

En Espagne, c’est 7%. Mais quelle est la valeur de ce chiffre dans la réalité? Au Ma-roc, très probablement, on peut dire que ce taux est de 2 ou de 5%, mais comment le vérifi er? Pour l’instant, on n’est pas encore arrivé à cette quantifi cation et à construire ce qu’on appelle le compte satellite de l’éco-nomie sociale.

Donc, on ne pourrait pas non plus évaluer son impact…

Pour l’instant, tout le monde est d’accord pour dire qu’il y a un impact, mais personne n’est capable de dire quel est cet impact ou quelle est sa mesure. Donc, je crois qu’on

peut s’inspirer de ce qui est fait ailleurs. Il faut à mon avis créer carrément un départe-ment ministériel dans le prochain gouver-nement dédié à l’économie sociale et soli-daire, défi nir ses contours, faire les enquêtes nécessaires, créer un observatoire, revoir les conditions d’exercice et rassembler l’infor-mation statistique… et à partir de là, on va pouvoir construire en coordination avec les concepts de la comptabilité nationale et voir ce que les coopératives apportent réel-lement à l’ensemble de l’économie. C’est ce que j’ai appelé le compte satellite de l’éco-nomie sociale.

Dans la même veine, comment peut-on évaluer l’action de l’Etat dans la promotion de l’ESS?

Il y a plusieurs départements ministériels qui veulent intervenir, parce que l’économie sociale concerne plusieurs secteurs. On la retrouve dans l’agriculture, l’artisanat, le transport, l’assurance, la santé… et puis nous avons dans les Affaires économiques

L’ESS peut atteindre 20% du PIB

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

et générales et les interventions des services extérieures de l’Etat dans toutes les provin-ces. Le problème de ces interventions ,c’est qu’elles ne sont pas organisées. La multipli-cité des intervenants fait que tout le monde se fait marcher sur les pieds et on n’arrive pas à bien fonctionner. Pour que l’action de l’Etat soit visible et effi cace, il faut une défi -nition légale et juridique, une forme organi-sationnelle aux niveaux national, régional et sectoriel. Il faut de la formation des cadres pour gérer ces coopératives, ces institutions de l’économie sociale, réduire la contrainte fi nancière de plusieurs de ces unités. Dans une thèse de doctorat que j’avais encadré en partie, on avait avancé l’idée de la création d’une banque de l’économie sociale, d’une banque pour les coopératives, qui peuvent les aider, puisque ces dernières sont à cheval entre le modèle d’une entreprise fi nança-ble par une banque et le modèle individuel éligible au micro-crédit. Il faut trouver un moyen pour alléger leur contrainte fi nan-cière. Les ressources humaines ne sont pas en reste, que ce soit en termes de qualité ou de quantité.

Quelle serait, selon vous, la taille que l’ESS pourrait prendre avec toutes les réserves que vous avez émises?

Le secteur des coopératives ne doit pas être assimilé à une rente. Le potentiel de l’économie sociale et solidaire serait entre 10 et 20% du PIB. Pour y arriver, une plus grande organisation est nécessaire : s’orga-niser pour exploiter les terres, la forêt, la mer, les montagnes. Et si on arrive à cerner toutes ces problématiques, je crois qu’il y a un potentiel. E|E

Abdelkhalek Touhami, enseignant chercheur à l’INSEA et auteur du rapport «L’Economie Sociale au Maroc: Etat des lieux et perspectives d’avenir», revient sur les principales problématiques liées à la mesure du poids de l’ESS au Maroc et son

potentiel de croissance.

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Economie|Entreprises Décembre 2011

Les centres de collecte de lait ou de céréales et les centres d’approvisionne-ment des coopératives étaient l’unes des principales actions de soutien mises en place par les pouvoirs publics pour aider les coopératives dans leur processus de commercialisation ou d’approvisionne-ment. Avec la libéralisation de plus en plus avancée de l’agriculture et le retrait programmé de l’Etat du secteur, et de la mauvaise gestion qu’on connu ces struc-tures, celles-ci tendent à perdre du terrain au profi t d’actions plus ciblées envers les producteurs.

La commercialisation, talon d’Achille

L’une des actions menées consiste en l’or-ganisation de foires nationales et régionales des produits de l’économie sociale. Orga-nisée sous forme de marchés itinérants ou d’installations de stands au sein des grandes surfaces destinées à la commercialisation de produits des petites coopératives ou de pro-duits issus de l’INDH, cette formule vise à promouvoir ces produits et les rapprocher des consommateurs fi naux. L’approche purement marketing a bien sûr l’intérêt de faire sortir les produits de l’ESS de l’ombre,

DOSSIER|L’économie sociale et solidaire

mais ne suffi t pas à pérenniser des revenus pour les porteurs de projets. C’est de là d’où est venue l’idée de réorienter les activités de l’Offi ce de commercialisation et d’exporta-tion (OCE) vers l’accompagnement des pe-tits producteurs au niveau de la production, la valorisation et la commercialisation des produits du terroir. Pour Najib Mikkou, le directeur général de l’OCE, «il faut imaginer que la production de toutes les petites exploita-tions agricoles sont un potentiel dormant qui peut être exploité pour doper les exportations marocaines si on réussit à la valoriser et la commercialiser». Pour lui, toutes les actions

De plus en plus conscients du potentiel et des limites du secteur de l’économie sociale et solidaire, les acteurs publics, à leur tête le ministère des Affaires

Economiques et Générales, vont tenter de palier les maux du secteur. L’action principale a concerné la commercialisation, mais aussi une tentative de renouveler le

cadre réglementaire et l’instauration d’une stratégie nationale.

Les prémices d’une stratégie nationale

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Décembre 2011 Economie|Entreprises

DOSSIER|L’économie sociale et solidairemises en place par l’Etat en ce qui concerne l’ESS se sont concentrées sur l’amont de la fi lière sans penser aux débouchés et qu’il est aujourd’hui temps de centraliser les opéra-tions de logistiques, de commercialisation et de recouvrement pour développer le secteur. Le rôle de l’OCE, rebaptisé (Ma-roc Taswiq) serait donc de regrouper l’offre proposée par les structures publiques qui s’occupent de la production des associations et coopératives (ADS, Réseau Marocain d’Economie Sociale et Solidaire REMESS, Entraide Nationale, INDH…), aussi bien pour les grandes et moyenne surface que pour les particuliers et les industriels, de chercher des débouchés à travers un nou-veau réseau de vente directe, mais aussi de mutualiser les fonctions logistiques et de re-couvrement pour une remontée directe du cash vers les producteur. En Somme, créer plusieurs plateformes de distribution (dont la plateforme pilote de 1.000 m² est prévue pour décembre au siège de l’OCE à Casa-blanca), un réseau de collecte et un réseau de distribution par vente directe. Le nou-

produits spécifi ques ou de régions particu-lières. Finalement, et comme pour boucler la boucle, le ministère des Affaires Economi-ques et Générales est en phase de lancement de la stratégie nationales de développement de l’ESS. Cette stratégie passerait par une refonte du carde légal en le facilitant tout en renforçant le suivi et l’accompagnement des porteurs de projets, réorganiser et renforcer les acteurs, faciliter l’accès au fi nancement et favoriser l’accès au marché des produits de l’ESS. Cette stratégie s’étalerait sur 10 ans et vise à faire passer la participation de l’ESS à hauteur de 4% du PIB et la création de plus de 100.000 emplois supplémentaires.

Une sorte de plan Emergence du secteur de l’ESS, mais qui attendra probablement le prochain gouvernement pour voir le jour. Ce qui est sûr, c’est que le secteur a besoin d’une réelle volonté politique doublée des moyens fi nanciers et humains pour le sor-tir de son marasme actuel. Un blocage qui touche en fait la partie de la population qui a le plus grand besoin de l’appui public ciblé et effi cace. E|E

veau système permettrait ainsi de mettre le petit producteur à l’abri de l’intervention des intermédiaires via l’accès au commerce équitable. En parallèle à cette stratégie, une autre action concernant la labellisation a été lancée par le ministère de l’Agriculture pour les produits du terroir (Argan, Safran…) et aussi par le ministère du Commerce et de l’Industrie pour garantir et authentifi er les

Pour Najib Mikou, le potntiel endormi de l’ESS doit être exploité pour le développement du Maroc.

Pour la Gouverneur Coordinatrice Nationale de l’INDH: l’Initiative a permis l’instauration de valeurs telles que le regain de la dignité, la restauration de la confi ance, l’incitation à la participation, la promotion de la pérennité et de la bonne gouvernance

Combien l’INDH a soutenu d’AGR dans sa 1ère phase? Et quel est l’objec-

tif de la 2ème phase?

De prime abord, je tiens à souligner que l’INDH ne peut être réduit au nombre d’AGR créées ou soutenues. Rappelons à cet égard que si la mise en œuvre de l’INDH, dans sa première phase, a permis la création de 3700 AGR ayant généré 40 000 emplois, et si la 2ème phase de l’INDH s’est donnée comme objectif la création de 5000 nouvelles AGR, il n’en reste pas moins opportun de se donner les moyens de porter un regard critique sur ce qui a été entrepris jusqu’ici en vue de déceler et de remédier aux dysfonctionnements enregistrés, tout en focalisant la réfl exion sur les meilleurs moyens et mesures à mettre en œuvre pour consolider les acquis, réguler le champs d’intervention et conquérir de nouvelles pistes d’action. Il va sans dire que la poursuite de la consolidation, le développement et la péren-nisation des approches de développement communautaires visant la promotion d’AGR nous interpelle à plusieurs niveaux, notamment au niveau de la gouver-nance, de l’administration, du fi nancement que de l’accompagnement car au delà des AGR prometteuses et tangibles qui requièrent juste des mesures de consolidation, il n’en va pas de même pour certaines dont le suivi et l’évaluation post création ont révélé quelques dysfonctionnements .

Quel est l’impact du soutien de l’INDH sur l’économie sociale et solidaire?

Il va sans dire que l’INDH a contribué effi cacement et contribuera encore via la

NADIRA EL GUERMAI REVIENT SUR LES RÉALISATIONS DE L’INDH DANS L’ESSmise en œuvre du programme 2011-2015, à hausser l’indice de développement, à réduire le taux de pauvreté dans les zones les plus vulnérables. Ainsi, les im-pératifs des indicateurs de progrès mondialement reconnus, sont pris en compte notamment la réduction de la pauvreté, la baisse du taux de mortalité infantile, la scolarisation pour tous, le recul des maladies prioritairement retenues, la ré-duction des inégalités par le soutien à l’accès aux équipements sociaux et in-

frastructures de base. L’impact de l’ensemble de ces mesures, combiné aux réalisations physiques concrètes, est également mesurable en termes d’opportunités offertes pour favoriser l’in-sertion des populations pauvres et vulnérables dans le tissu économique et social, et d’incitation à la création de micropro-jets générateurs d’emplois et de revenus stables.

Pour régler les blocages de l’INDH est ce qu’il ne serait

pas plus judicieux de l’intégrer avec les autres outils de

luttes contre la pauvreté et de développement dans une

même structure?

Conscients des ajustements à apporter, nous ne pouvons par-ler de blocage, sachant que l’INDH, est un projet perfectible qui

s’inscrit dont le temps et dont l’impact est mesurable aussi bien sur le court terme que sur le long terme. S’agissant de votre question au sujet de l’assimilation de l’INDH à d’autres structures, je tiens à rappeler à cet égard que l’INDH n’a pas été conçu pour se substituer aux autres départements ministériels qui interviennent dans le même domaine, mais plutôt en tant que dispositif de soutien et d’appui aux interven-tions de ces mêmes structures. En outre, il ne faut pas perdre de vue, comme je viens de le préciser, le principe de convergence tant prôné et mis en exergue dans la mise en œuvre des projets INDH. Donc de ce point de, je ne vois pas où réside la problématique.