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ENSEIGNER LE PIANO EN TANT QU’OUTIL MUSICAL Pour la formation de pianistes musiciens Directeurs de recherche Irène BLONDEL et Serge LECUSSANT Mémoire présenté en vue de l’obtention du Diplôme d’Etat Mai 2011 CEFEDEM AQUITAINE Laurence GIRAUDET

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ENSEIGNER LE PIANO EN TANT QU’OUTIL MUSICAL

Pour la formation de pianistes musiciens

Directeurs de recherche

Irène BLONDEL et Serge LECUSSANT

Mémoire présenté en vue de l’obtention du Diplôme d’Etat

Mai 2011

CEFEDEM AQUITAINE

Laurence GIRAUDET

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SOMMAIRE

PREAMBULE 2

INTRODUCTION 3

I. L’ENSEIGNEMENT DU PIANO AUJOURD’HUI – CONSTAT 4

1. Schéma national d'orientation pédagogique de l’enseignement initial de la musique :

florilège commenté. 4

2. Du point de vue de l’équipe de direction. 7

3. Du point de vue de l’équipe pédagogique. 10

II. ENSEIGNER LE PIANO EN TANT QU’OUTIL MUSICAL 15

1. La lecture à vue. 15

2. La musique d’ensemble. 20

3. De l’usage des transcriptions, réductions et autres arrangements. 24

CONCLUSION 29

ANNEXES 31

BIBLIOGRAPHIE 33

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PREAMBULE

« Un professeur très connu avait coutume de dire avec une modestie empreinte de fierté et le désir

évident d’ériger ces paroles en thèse : « Je n’enseigne pas la musique, j’enseigne le piano ». Rien

de plus entaché d’erreur que cette affirmation, à mon sens. Même s’il s’agit de la grosse caisse, le

professeur doit penser à la musique autant qu’à l’instrument. La remarque vaut doublement

pour le piano, instrument unique et irremplaçable pour apprendre la musique, du seul fait qu’il

permet de jouer et d’entendre tout. Si un maître et un élève s’assignent pour unique objet d’étudier

le piano et non la musique, ils devraient tous les deux prendre ailleurs des leçons de musique. »

Heinrich NEUHAUS1

1 NEUHAUS, Heinrich, L’art du piano, Paris, Éditions Van De Velde, 1971, p.196.

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INTRODUCTION

Les instruments polyphoniques en général et le piano en particulier présentent l’intérêt d’être des

outils musicaux complets, permettant d’appréhender les multiples facettes du monde musical, d’en

saisir les différents langages, d’en aborder les mille et une formes.

Paradoxalement, les apprentis-pianistes sont souvent perçus comme des solitaires reclus dans leur

esthétique et leur répertoire. Echappent à cette idée ceux qui se laissent appeler par leur instrument

à élargir leur horizon musical et à aller vers les autres. Ce peut être en tant que simples spectateurs,

afin de découvrir leur répertoire ou en tant qu’acteurs, pour les y accompagner. Ces derniers bénéfi-

cient ainsi d’une possibilité supplémentaire, complémentaire à celle qui leur est offerte par leur ap-

prentissage de pianiste soliste, de développer leur curiosité et leurs connaissances.

Naturellement, seuls les professeurs persuadés de la pertinence d’une telle démarche peuvent y

initier leurs élèves. Pertinence, que nous tacherons de démonter dans ce mémoire.

La lecture à vue, la musique d’ensemble et l’étude d’arrangements (transcriptions et réductions)

constitueront nos axes de recherches. L’on pourrait nous rétorquer que ces champs d’intérêts et de

compétences sont ceux des pianistes-accompagnateurs et que l’élève peut y être sensibilisé en

classe d’accompagnement. Or, à l’heure actuelle, ces dites classes ne sont accessibles qu’après avoir

obtenu une récompense de 3° cycle, soit après une dizaine d’années d’étude.

Après avoir confronté les points de vue de professionnels issus des équipes de direction et pédago-

giques de différents établissements, nous nous attacherons à expliciter les enjeux et les modalités

d’un enseignement du piano en tant qu’outil musical au sein des classes de premier et second

cycles.

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I. L’ENSEIGNEMENT DU PIANO AUJOURD’HUI – CONSTAT.

1. Schéma national d'orientation pédagogique de l’enseignement initial de la mu-

sique1: florilège commenté.

Ce texte est un document de référence pour tout professionnel de l’enseignement musical au sein

des conservatoires français.

En lien avec l’objet de notre travail (écartant donc volontairement toute autre réflexion à mener

autour de ce texte, si primordiale soit-elle), trois points sont importants :

℘ Les pratiques collectives.

Page 1 :

« Enfin, poursuivant l’effort déjà entrepris, il est nécessaire de consolider la place réservée aux pratiques collectives afin qu'elles s’affirment comme centrales […]. En effet, par les réalisations qu’elles génèrent, les pratiques collectives donnent tout son sens à l’apprentissage. »

Page 5, au sujet des « orientations et modalités » du premier cycle :

« La pratique instrumentale ou vocale est dès le début collective et s’adjoint peu à peu la pratique individuelle en fonction des acquisitions nécessaires à la réalisation musicale et à la progression de l'élève. »

Page 6, au sujet des « orientations et modalités » du second cycle :

« Concernant les pratiques d'ensemble, l'élève doit pouvoir valider un cursus, sur la durée du cycle, qui lui aura permis de se confronter à au moins deux situations différentes parmi celles qu'il sera susceptible de rencontrer dans le cadre de sa pratique. »

Ces directives sont claires : les pratiques collectives doivent être mises en place et encouragées dès

le premier cycle, dans tout type d’établissement spécialisé et dans toutes les disciplines. La musique

d’ensemble devient même capitale en second cycle, étant donné qu’elle donne lieu à une évaluation

prise en compte pour l’obtention du brevet de fin de second cycle.

1 Texte officiel du Ministère de la Culture et de la Communication, Paris, Avril 2008.

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Or, nombreux sont les établissements qui n’introduisent la musique de chambre qu’à partir du troi-

sième cycle pour les élèves en piano, souvent au prétexte d’un niveau instrumental insuffisant avant

ce stade. Il est intéressant de relever que le Schéma va jusqu’à préconiser l’attitude pédagogique

inverse : débuter par les pratiques collectives et adjoindre la pratique individuelle lorsque le niveau

de l’élève n’est plus suffisant pour suivre correctement le cours de musique d’ensemble.

Nous verrons dans la seconde partie de ce travail quel rôle peut jouer le professeur de piano dans

cette affirmation des pratiques collectives comme élément central de la formation de l’élève. Il

s’agira d’évoquer la pratique du déchiffrage, de l’harmonisation au clavier, du travail de la partie

séparée d’œuvres de chambre…

℘ La culture musicale.

Page 2 :

« Renforcer la place de la culture musicale. L'apport de la culture musicale dans la formation aux pratiques n’est plus à souligner. Il faut cependant rappeler qu’une attention particulière doit toujours y être portée. Dans les conser-vatoires, la culture musicale a vocation à être intimement associée à l’ensemble des pra-tiques, qu’elles soient individuelles ou collectives. »

Il est capital d’initier les enfants aux disciplines dites d’érudition ou de culture musicale dès leur

accession au premier cycle. Ceci peut être fait par le biais de la formation musicale ou par celui

d’une classe dédiée. Naturellement, il s’agit d’un autre débat que le nôtre, qui est actuellement en

cours dans nombre d’établissements.

Cependant, il est également nécessaire que la culture musicale soit « intimement associée à

l’ensemble des pratiques ». Aussi, nous défendons ici l’idée qu’un professeur de piano enseigne

avant tout la musique et non le piano.

Nous verrons plus loin que de nombreuses disciplines - déchiffrage, usage des transcriptions et ré-

ductions, pratique de la musique de chambre - accessibles aux apprentis pianistes dès lors qu’elles

sont adaptées à leur niveau permettent de voir plus loin que le bout de sa méthode pour débutant,

participant ainsi à l’élaboration d’une culture musicale large et diversifiée.

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℘ Les démarches d’invention.

Page 2 :

« Favoriser les démarches d’invention. Parmi les enjeux pédagogiques qui apparaissent comme prioritaires aujourd’hui, les dé-marches liées à l’invention (écriture, improvisation, arrangement, composition) constituent un domaine important de la formation des instrumentistes et des chanteurs. Elles ne de-vraient pas être différées, mais faire l’objet d’une initiation dès le 1er cycle. »

Interpréter une œuvre musicale peut être considéré dans une certaine mesure comme un acte créa-

teur. Néanmoins, le Schéma insiste sur l’encouragement des démarches d’invention autres que

l’interprétation : écriture, improvisation, arrangement, composition… Là aussi, cette volonté péda-

gogique peut s’inscrire dans le cadre du cours de formation musicale ou bien au sein d’une classe

dédiée ; mais elle peut également faire partie intégrante du cours de piano.

Dans le but de restreindre notre champ de réflexion à un questionnement ciblé, nous n’aborderons

pas ici la question de la création libre, qu’elle relève de la composition ou de l’improvisation.

Néanmoins, dans la seconde partie de ce travail, nous réfléchirons à la pratique « semi-improvisée »

qu’est l’harmonisation au clavier.

Favorisant l’invention, par la disposition des accords, des voix et des mélodies, elle permet à l’élève

de s’approprier différemment son instrument ainsi que de s’ouvrir à certains répertoires de mu-

siques d’ensemble (musique baroque, musiques actuelles…).

℘ Tableau synthétique1.

Cycle Objectifs principaux Contenus de l’enseignement

1er cycle

� Construire la motivation et la méthode, � Choisir une discipline, � Constituer les bases de pratique et de cul-ture.

� Travaux d’écoute et mise en place de repères culturels, � Pratiques vocales et instrumentales collec-tives, � Pratiques individualisées de la discipline choisie.

2° cycle

� Contribuer au développement artistique et musical personnel en favorisant notamment : - une bonne ouverture culturelle, - l’appropriation d’un langage musical et l’acquisition des bases d’une pratique auto-nome, - la capacité à tenir sa place dans une pratique collective.

� Travaux d’écoute, � Acquisition de connaissances musicales et culturelles en relation avec les pratiques du cursus, � Pratiques vocales et instrumentales collec-tives, � Pratiques individualisées.

1 Ibid. p.10 et 11.

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Dans ce tableau, outre l’évocation des notions précédemment étudiées, deux phrases nous paraissent

intéressantes : il s’agit de « choisir une discipline » et « construire la motivation ». En effet,

l’adhésion de l’enfant à l’instrument qu’il étudie est primordiale. Il en va de son bon apprentissage

et de la constance de sa motivation. Les multiples facettes du piano sont attrayantes ; les présenter à

l’enfant dès les premières années paraît judicieux par rapport à l’engagement et l’engouement de

l’élève vis-à-vis de son instrument.

2. Du point de vue de l’équipe de direction.

Dans le but d’éviter au lecteur tout travail fastidieux, seuls quelques extraits des entretiens auxquels

nous avons procédé seront fournis ici.

Par ailleurs, le constat ci-établi prend également en compte les observations menées durant les deux

années de formation au Diplôme d’Etat et les nombreuses rencontres effectuées dans ce cadre (avec

différents ASEA, PEA, directeurs etc.). Le point de vue des professionnels ayant eu la gentillesse de

répondre à nos questions, si pertinent soit-il, demeure singulier et ne peut donc prêter à généralisa-

tion.

℘ Entretien avec Hervé ALEXANDRE / Ex-Directeur adjoint du CRR de Bordeaux1.

L’impression qui nous est donnée par le CRR de Bordeaux est celle d’un établissement en pleine

mutation. En effet, ce conservatoire bascule progressivement vers le système d’enseignement appe-

lé « Orphéons ». Ce dernier se caractérise notamment par la mise en place de groupes pluridiscipli-

naires d’élèves qui partagent le même créneau de cours deux fois par semaine. La présence simulta-

née des élèves au sein du CRR, leur permet d’élaborer facilement un projet musical commun. Outre

ces pratiques d’ensemble, les cours d’instruments en eux-mêmes deviennent collectifs, à raison

d’une heure trente de cours pour trois élèves de premier cycle :

« En premier cycle, se baser sur l’idée que le groupe d’enfants, source de motivation, de dy-namiques est un facteur de progrès. » « Double appartenance : à une classe d’instrument ainsi qu’à un groupe d’élèves. »

1 Hervé ALEXANDRE quitta la direction du CRR au 1er mars 2011 et devint Secrétaire Général de l’Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux. H.A. était encore en poste lors de la réalisation de notre entretien.

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« Le professeur peut travailler comme il l’entend avec son expérience, ses capacités propres, dans cet espace d’1h30 consacré à l’instrument. Il peut décider que telle semaine il préfère travailler spécifiquement sur un répertoire à 3, à 6, à 9 avec les autres instruments, ou déci-der de consacrer ½ heure à tel élève car les deux autres pourront être soit dans l’écoute soit dans des travaux avec le professeur d’à côté, ou même dire «pendant 15 jours, je dois vous voir chacun l’un après l’autre». La structure permet toutes les actions pédagogiques en étant convaincus qu’être ensemble finit par générer des dynamiques, des compétences. »

Ce système qui, comme tout type d’organisation, présente un certain nombre d’avantages et

d’inconvénients, est plus ou moins bien reçu par l’équipe enseignante. Néanmoins, nous ne nous

étendrons pas davantage sur ce sujet, distinct de l’objet de notre recherche.

Ce qui a retenu notre attention est la liberté d’organisation laissée aux équipes de direction des

CRM/CRD/CRR : en effet, toutes ces structures bénéficient des mêmes cadres d’enseignement dé-

finis par le Ministère et pourtant chacune possède sa singularité :

« Le schéma d’orientation pédagogique […] fixe un esprit, des bornes, en termes de volume d’enseignement qui permet d’avoir des points de repères. Ce n’est en aucun cas un document contraignant et c’est toute sa richesse. »

A titre d’exemple, le CRR de Toulouse où j’ai effectué mon tutorat propose toujours une heure

complète de cours instrumental par élève, même en première année de premier cycle. Une question

se pose alors : ces différents types d’organisation encouragent-ils ou, au contraire, freinent-ils la

formation globale d’un pianiste telle que nous l’envisageons dans ce travail ?

Hervé ALEXANDRE nous donne certains éléments de réponse :

« Le répertoire à 4 mains ou à 2 pianos fait partie de la culture du pianiste. Il est assez peu développé et souvent vécu comme « si on a le temps, c’est sympathique » mais ce peut être une base d’enseignement. » « J’ai souvent entendu en examens ou autres, des airs d’opéras de Mozart au piano, plutôt bien faits et là, l’enfant associe et fait des connexions. […] La transcription est un bon moyen de découvrir le répertoire. » « Est-ce que l’appropriation de l’instrument piano peut passer par là [l’apprentissage de l’harmonisation au clavier] ou est-ce qu’il faut déjà s’être approprié le piano pour y arri-ver ? J’aurais envie de tenter le pari, mais je n’en sais rien. » « Je ne vois pas comment il [le professeur de piano] peut transmettre un geste musical qui ressemble à quelque chose sans transmettre une vision culturelle qu’il a de la pièce et sans

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transmettre un petit bout de patrimoine […]. Donc on est dans une transmission de culture. Il est professeur de musique spécialité quelque chose. Donc il est professeur de musique. »

Par ailleurs, Hervé ALEXANDRE soulève également une problématique centrale, celle de

l’écoute :

« Le pianiste est quelqu’un qui n’écoute pas. Le vrai problème de l’élève c’est son écoute, même de lui-même. […] Il n’écoute pas. Il écoute ce qu’il rate. […] Dans cet objectif de déve-lopper l’écoute, l’initiation à l’accompagnement est un objectif que l’on se fixe. [...] En cycle 3, on sera dans le prolongement de ça, avec peut-être un renforcement du répertoire de mu-sique de chambre, à plusieurs pianos et à 4 mains. »

Ce dernier a également insisté sur la souplesse du « programme » qui, en réalité, n’existe pas. La

progression des élèves est requise afin d’évoluer de cycle en cycle, c’est une certitude. Néanmoins,

rien n’impose les moyens afin d’amener les élèves à progresser. Aucun texte officiel ne dicte cela,

comme c’est le cas par exemple au sein de l’Education Nationale :

« L’arme absolue du professeur est « on n’a pas le temps, on doit faire autre chose ». Mais qui dit « on doit faire autre chose » ? Le programme. Mais qui dit le programme? Le pro-gramme est l’idée qu’on se fait d’un morceau d’examen de fin de cycle. C’est l’habitude et la représentation qu’on a d’un niveau absolu. » « Les réticences sont liées au fameux niveau à atteindre, qui est une réminiscence de 1795. La norme absolue c’est « pour que je rentre au conservatoire de Paris il faut que j’ai tel âge et que je sache jouer telle chose ». Tout le reste en est déduit. » « Les réticences viennent des enseignants qui ne sont pas convaincus d’avoir un espace de li-berté. »

Pour conclure, nous pouvons affirmer avoir perçu lors de cet entretien tant la volonté que la possibi-

lité de voir l’enseignement du piano changer, afin de former des pianistes polyvalents, ouverts aux

autres pratiques que celle du piano solo. Cette tendance s’affirme au sein de nombreux établisse-

ments, qu’il s’agisse de CRM, de CRD ou de CRR et résulte d’une double prise de conscience : au

sujet des possibilités pédagogiques offertes par le piano ainsi qu’au sujet du milieu musical profes-

sionnel actuel, qui ne retient que de très rares élus en tant que pianistes solistes.

Néanmoins, nous avons le sentiment que cette volonté trouve aléatoirement sa traduction sur le ter-

rain. Les établissements adoptent des outils pédagogiques très différents, eu égard à la liberté

d’organisation des apprentissages laissée par les textes officiels, comme nous avons pu le constater

plus haut.

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Aussi, nous devons nous entretenir avec plusieurs professeurs de piano afin de prendre la mesure

des actions réellement entreprises.

3. Du point de vue de l’équipe pédagogique.

℘ Entretiens croisés avec Anne MENTA, Professeur de piano Diplômée d’Etat au CRI de

Cahors (46) et Jean-Philippe GUILLO1, Professeur Certifié au CRR de Bordeaux.

Cinq thèmes guidèrent nos entretiens : les pratiques d’ensemble, la lecture à vue, la culture musi-

cale, l’arrangement et l’harmonisation au clavier.

o Les pratiques d’ensemble.

Deux de ces cinq thématiques ont fait l’objet d’un relatif consensus : il s’agit des pratiques

d’ensemble et de la lecture à vue. A.M. et J.-P.G ont tous deux affirmé l’importance d’y initier les

enfants du fait des compétences que ces disciplines permettent de développer (écoute, curiosité,

ouverture, imagination etc.) ainsi que de la place importante qu’elles occupent dans la vie d’un mu-

sicien professionnel.

• A.M.

« S’agissant des pratiques d’ensemble, tous les pianistes vont à la chorale et nous [les profes-seurs de piano] nous chargeons des cours de piano 4 mains à raison d’une heure de cours par semaine et par professeur. » « Nous faisons beaucoup de piano quatre mains car nous avons instauré depuis quelques an-nées une audition où l’on mélange toutes les classes de piano et c’est super, tant au niveau des élèves que des profs.» « Je ne fais pas travailler ou très peu les parties séparées de musique de chambre. C’est l’occasion pour les élèves d’apprendre l’autonomie. »

• J.-P.G.

« Les pratiques d’ensemble commencent au troisième cycle. Avant, rien n’est prévu. C’est à l’initiative du prof. »

1 Pour plus de praticité, nous nous permettrons plus loin d’utiliser les abréviations A.M. et J.-P.G.

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« La spécificité des Orphéons, en premier cycle, fait que l’on peut organiser des rencontres plus facilement. » « Il m’arrive de faire travailler les parties séparées de musique de chambre. Je le fais à la demande des élèves. »

o La lecture à vue.

• A.M.

« On déchiffre beaucoup et on réfléchit à la manière dont on déchiffre : visualiser les octaves s’il y en a, ne pas lire toutes les notes, visualiser une gamme chromatique, visualiser les in-tervalles ce qui implique un travail technique particulier. » « Un bon déchiffrage fait que l’élève peut avoir une idée générale de l’histoire, du début à la fin. Si tu ânonnes les notes, tu ne comprends pas l’histoire, tu ne sais pas où tu vas. » « Bien déchiffrer est nécessaire pour réussir à jouer avec les autres : si un élève met six mois à monter sa partie, il ne jouera jamais avec les autres. » « Pour le plaisir personnel : déchiffrer, c’est se faire plaisir, avoir un rapport musical di-rect. »

• J.-P.G.

« Quand je suis arrivé sur Bordeaux, en octobre 1994, il y avait des professeurs de déchif-frage. Il n’y en a plus maintenant et je le regrette. » « Le déchiffrage est indispensable. Les gens que j’ai maintenant lisent moins bien que ceux que j’avais en 1994, à niveau de piano équivalent. Et c’est d’autant plus embêtant que dans le métier de pianiste on est souvent amené à accompagner, à déchiffrer au dernier moment… Etre bon lecteur quand on est pianiste, c’est vraiment important et ça ne se fait pas tout seul. » « Lire c’est découvrir la musique. On travaille une sonate de Beethoven, on a le volume à la maison, on déchiffre le reste ! »

o La culture musicale.

Le thème de la culture musicale a également suscité l’adhésion des deux professionnels qui considè-

rent que la transmission de culture est aussi importante que celle du geste technique, pianistique, si

l’on vise à initier l’élève aux joies de l’interprétation et de la recherche esthétique. J.P.-G a quelque

peu nuancé son propos en la matière au fil de l’entretien, ce que l’on peut relier à l’appui que les

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professeurs du CRR de Bordeaux trouvent auprès de la médiathèque du conservatoire ; le CRI de

Cahors ne disposant pas de tels équipements, les professeurs d’instrument se trouvent d’autant plus

responsabilisés en la matière.

• A.M.

« La culture musicale est indissociable du cours de piano. Le but du jeu, c’est la musique, ce qui implique culture historique, culture littéraire… » « J’ai une discothèque dans ma classe et chaque semaine les élèves choisissent un disque. Ils partent d’abord avec une symphonie de Beethoven lorsqu’ils jouent une sonate et pas avec la sonate en question. » « Il y a des recueils type De Bach à nos jours où une petite biographie est disponible au début et c’est très bien. Sinon, on prend des livres, on feuillette ensemble. Je demande parfois aux élèves de chercher quelques informations chez eux. » « Parfois il faut isoler un trait pour le bétonner. Tu le tords, tu le retords, tu le décortiques mais dès que tu le remets dans son contexte : musique ! Elan musical, élan de la phrase. Et quand tu penses musique tu joues plus propre, tu trouves le bon geste et tu te fais plaisir. »

• J.-P.G.

« Evidemment, le cours de piano tend vers la culture G. Mais le problème est le temps. » « Quelqu’un qui a entendu une symphonie de Mozart ne joue plus sa sonate de la même fa-çon. » « Il ne faut pas confondre culture et connaissances. Certains ne savent pas restituer. La cul-ture doit être intégrée, comprise. » « Le pianiste classique peut être un bon exécutant sans être un bon musicien. »

o L’étude d’arrangements (transcriptions et réductions).

Deux thématiques, à savoir l’étude d’arrangements ainsi que de la pratique de l’harmonisation au

clavier, ont suscité des réactions différentes de la part d’Anne MENTA et de Jean-Philippe GUIL-

LO.

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• A.M.

« En piano quatre mains, je fais travailler très régulièrement des arrangements. Nous [les professeurs de piano] faisons parfois les arrangements nous-mêmes mais sans changer une seule note du texte original.» « Grâce à l’arrangement, les élèves peuvent se retrouver à jouer des choses beaucoup plus difficiles et qui sonnent. » « L’arrangement est un art parce qu’il faut que ça sonne ! Ce doit être cohérent. » « Tu ne peux plus jouer au piano les Tableaux d’une exposition sans penser à l’orchestration de Ravel ! Le piano n’est jamais qu’un orchestre. L’arrangement te pousse à aller plus loin dans ton travail pianistique. »

• J.-P.G.

« Je n’ai jamais fait jouer d’arrangements parce qu’on a un répertoire tellement riche qu’on est jamais à court ! Autant jouer ce qui a été écrit pour notre instrument car c’est souvent mieux fichu. » « Cette année, j’ai des Orphéons pour la première fois donc je vais faire moi-même des ar-rangements pour que les petits pianistes puissent jouer avec des cornistes ou autres. Mais c’est différent.» « L’intérêt de l’arrangement c’est de jouer quelque chose que l’on peut ensuite écouter joué par d’autres instrumentistes et c’est vrai que ça peut donner une dimension musicale diffé-rente. » « Je vois plus l’arrangement sur un plan utilitaire. Sur un plan esthétique…Il faut que ce soit extrêmement bien fait. Après, il faut se mettre à la place de l’élève qui va peut être prendre beaucoup de plaisir à jouer un thème de la 5° ou de la 6° symphonie de Beethoven au piano parce qu’il a déjà une idée musicale et que ça va faire marcher son imaginaire. »

o L’harmonisation au clavier.

• A.M.

« La basse chiffrée est très codifiée, dans notre esthétique classique. » « Les grilles sont moins codifiées. Et la basse chiffrée implique une technique de lecture, une compréhension de la théorie qui fait que l’on peut imaginer que la personne qui a ce niveau-là pour comprendre les basses chiffrées possède aussi un niveau instrumental suffisant. »

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« L’avantage de la grille par rapport à l’harmonie au clavier, c’est que rien n’est interdit. »

• J.-P.G.

« Jouer la musique d’un certaine manière occupe beaucoup l’esprit. Harmoniser au clavier laisse plus de place pour la sensation et l’imaginaire. » « Il m’arrive de donner une mélodie à harmoniser ou de demander à ce que l’élève écrive trois lignes dans le style du morceau qu’il est en train d’étudier. »

o Conclusions.

Les échanges menés avec Anne MENTA et Jean-Philippe GUILLO attestent du fait que la qualité1

de l’enseignement prodigué n’est nullement fonction de l’importance du conservatoire dont il est

question. En effet, ces deux professionnels ont témoigné de leur réalité quotidienne avec la même

implication et le même investissement. Les établissements dont ils sont issus aspirent de façon égale

à s’adapter au renouvellement des pratiques pédagogiques, bien que présentant une structuration et

des fonctionnements distincts.

Par ailleurs, il a été intéressant de constater la cohérence des témoignages de Jean-Philippe GUIL-

LO et Hervé ALEXANDRE2 : H.A. nous affirmait plus haut que la principale réticence des profes-

seurs de piano à un enseignement global de leur instrument était liée à la gestion du temps de cours.

Cet argument a été évoqué à plusieurs reprises, en effet, plus qu’il n’y paraît au sein des extraits

rapportés.

Une majorité des thématiques abordées lors de ces entretiens a suscité l’adhésion de ces deux pro-

fesseurs. D’autres ont été reçues avec plus de réserve. Il nous appartient désormais, par le biais de

ce travail, de démontrer l’intérêt et la pertinence de l’étude du piano en tant qu’outil musical, forts

du constat que nous venons d’établir à charge et à décharge de notre parti-pris.

1 Nous entendons par « qualité » le soin avec lequel les pratiques pédagogiques sont pensées, conçues, mises en pratique et régulièrement renouvelées, aspirant constamment à s’améliorer. 2 Nous nous permettons de rappeler au lecteur que ces deux professionnels faisaient partie, à l’époque de nos entretiens, du même établissement : le CRR de Bordeaux.

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II. ENSEIGNER LE PIANO EN TANT QU’OUTIL MUSICAL.

1. La lecture à vue.

Lire la musique, comme le disait Nadia BOULANGER, c’est avoir « le plaisir de la rencontre. »

Le déchiffrage c’est donc la curiosité, l’ouverture, la connaissance, le partage. Lire la musique est

un acte tributaire d’un état d’esprit courageux, engagé, opiniâtre. Vouloir à tout prix créer telle at-

mosphère ou encore faire jaillir telle autre intention du compositeur à l’aide de la partition dont il

faut retranscrire chaque signe. Ainsi, il faut prendre conscience qu’une hauteur n’est rien sans son

rythme ni sans sa nuance ou son articulation. Il faut également apprendre à dépasser les habitudes

de travail qui sont celles de la plupart des musiciens à savoir un travail étalé dans le temps, régu-

lier, ordonné… Et admettre que déchiffrer n’est pas forcément l’activité la plus confortable qui soit

mais qu’elle n’en demeure pas moins « vitale », comme l’écrit Sylvaine BILLIER1, professeur de

déchiffrage au CNSMDP :

« La lecture est une pratique naturelle, intrinsèquement liée à l’étude instrumentale […]. Si elle apparaît trop souvent marginalisée, apparentée à une quelconque spécialité réservée à quelques heureux élus, nous nous apercevrons ensemble qu’elle se trouve au contraire, au cœur même de l’apprentissage de l’artiste musicien […]. Elle est une activité vitale.»

Lucette DESCAVES2, autrefois éminente pianiste et professeur au CNSMDP, témoigne également

en la faveur de la lecture à vue et de la nécessité d’y initier les jeunes élèves :

« Déchiffrer et bien déchiffrer – c'est-à-dire, non pas jouer d’emblée toutes les notes d’un morceau mais pouvoir faire ressortir le caractère d’une œuvre, sa mélodie, son rythme, son genre – est indispensable à tout bon musicien. […] C’est dès le début de l’enseignement que l’élève doit prendre l’habitude de déchiffrer. Il y gagnera une lecture plus facile, développera son oreille et s’intéressera infiniment plus à son travail en s’apercevant, à quelque niveau qu’il en soit, de la variété des textes offerts à son exploration. »

℘ Comment abordons-nous actuellement la lecture à vue ?

Au sein de nombreux établissements d’enseignement musical, le déchiffrage occupe une place à

part et fait l’objet d’une classe séparée alors même qu’il constitue le point de départ de tout appren-

1 BILLIER, S., Le déchiffrage ou l’art de la première interprétation, Paris, éditions Alphonse Leduc, 1990, p.2. 2 DESCAVES, L., Un nouvel art du piano, Paris, éditions Gérard Billaudot, 1990, p.51.

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tissage. En effet, tout musicien, élève ou professeur, commence en déchiffrant le morceau qu’il a

choisi de jouer. Sylvaine BILLIER1 écrit :

« En réalité les mots « matière », « discipline » ne devraient pas être prononcés car ils déli-mitent, dans l’enseignement, un secteur spécial ; or, la lecture est sans frontière, la soif de connaître son seul passeport. »

Certains établissements vont jusqu’à instituer un examen de lecture à vue à chaque fin d’année sans

que les élèves n’aient suivis aucun cours à ce sujet. Pratique terriblement arbitraire et paradoxale,

mettant à jour la gêne existante autour de ce fait musical.

Par ailleurs, l’idée selon laquelle le déchiffrage relèverait du don est encore profondément ancrée

dans les esprits. Que l’on soit professeur ou élève, nous sommes nombreux à céder à la fatalité : tel

élève lit bien ou mal car il est (ou non) doué pour cela.

Pour finir, quel intérêt savons-nous accorder actuellement dans nos conservatoires à la pratique ai-

sée de la lecture à vue ? Bien des professeurs affirment que la seule différence entre un élève relati-

vement bon en déchiffrage et un autre plutôt mauvais est que l’un saura plus vite son texte que

l’autre. Ainsi, le déchiffrage n’est pour beaucoup qu’une discipline technique, digitale, préparatoire

au stade de l’interprétation, que l’élève a acquis de façon plus ou moins efficace en fonction de ses

prédispositions naturelles.

℘ Pourquoi reconsidérer la pratique de la lecture à vue ?

Car lire la musique c’est s’ouvrir à la totalité du répertoire : solo, musique de chambre, concertos,

réductions, transcriptions, musique classique, contemporaine, jazz, variété… Vertigineux car infini

mais par là-même empêchant toute routine et permettant l’accès à une culture musicale large et va-

riée. Lucette DESCAVES2 écrit :

« Bien déchiffrer offre à tout musicien de multiples avantages : compréhension rapide d’une œuvre, ouverture à un répertoire élargi, et pour le pianiste la possibilité d’accéder à des dis-ciplines plus spécialisées comme l’accompagnement ou la direction de chant. »

Nous le voyons, le déchiffrage donne accès à la connaissance du langage musical nécessaire à tout

musicien, quel que soit son instrument. Mais les pianistes ont d’autant plus de raisons de s’initier à

1 Ibid. 2 Ibid.

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la lecture à vue qu’ils ont à portée de main un instrument aux mille possibilités (polyphonie, poly-

rythmie, nuances, pédales etc.). Les musiciens pratiquant un instrument monodique ne pourront

jamais se délecter d’avoir sous les doigts le Sacre du printemps de STRAVINSKY ou les lieder de

SCHUBERT sans besoin d’orchestre ni de chanteurs… Nous consacrerons le dernier sous-chapitre

de ce travail à la thématique de l’arrangement.

℘ Quels outils pédagogiques?

Réaliser dans le cadre de notre travail un compendium des techniques d’enseignement du déchif-

frage n’est pas possible car cela demanderait la rédaction d’un mémoire entier. Néanmoins, voici

quelques pistes de travail que nous tenons à souligner eu égard aux observations faites dans plu-

sieurs classes de piano durant les deux années de formation au DE ainsi qu’aux différentes lectures1

entreprises pour la rédaction de ce travail :

o De la musique...

Parfois, l’aspect solfégique du déchiffrage est mis en avant, assimilant le premier travail sur un

nouveau morceau à l’apprentissage de la hauteur des notes ainsi que de leur rythme.

Voici une anecdote illustrant ce propos : j’ai en cours particulier une élève qui fréquente par ailleurs

un conservatoire en classe à horaires aménagés (HA). Elle est actuellement en dernière année de

second cycle et nous travaillons ensemble depuis 5 ans. Depuis que je connais cette élève, son pro-

fesseur au conservatoire lui a toujours demandé de déchiffrer sans pédale, sans nuances et sans se

fixer de tempo. Ceci, dans le but de sécuriser l’apprentissage du « texte ».

Je comprends très vite que ce professeur n’est pas le mauvais pédagogue ou musicien qu’il paraît

être ! Il s’agit simplement pour lui d’une angoisse autour du surplus d’informations que représente à

ses yeux le déchiffrage global de la partition.

Il en va de même du déchiffrage mains séparées et non mains ensemble. Le plus souvent, le profes-

seur estime que son élève n’est pas en mesure de traiter autant d’informations. Or, comme l’écrit

Brigitte BOUTHINON-DUMAS2 :

« La mémoire d’un enfant de sept ans digère fort bien une lecture en deux clefs. L’enfant en-tend globalement, c’est l’adulte qui croit qu’une partie après l’autre est plus facile. […] On déchiffrera toujours mains ensemble la première fois, même si ensuite le travail mains sépa-

1 Cf. bibliographie. 2 BOUTHINON-DUMAS, B., Mémoire d’empreintes, Paris, éditions de la Cité de la Musique, 1993, p.118 et 119.

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rées s’impose de lui-même pour élucider une difficulté particulière. Pour connaître une œuvre, jouer bancal en s’amputant musicalement d’une voix n’offre aucun intérêt. »

L’idée que nous soutenons ici est qu’il est dans l’intérêt de l’élève de lire la musique en recherchant

immédiatement le rendu sonore final d’une pièce, même sur un morceau dont il ne connait pas le

compositeur ou l’esthétique. Le professeur, les enregistrements, les concerts seront là pour guider

l’élève dans cette démarche.

o …vers une technique pianistique appropriée.

L’exigence sonore que nous évoquions à l’instant requiert une technique adaptée, que Lucette

DESCAVES1 évoque ainsi :

« Nombre de bons lecteurs potentiels sont gênés par des problèmes digitaux ; on veillera à travailler en particulier au moyen d’exercices adaptés : les déplacements […] ; les gammes à doigtés particuliers en particulier, modes à transpositions limités […] ; les formules ryth-miques particulières […] ; les tremolos, gammes en tierces, en accord de sixtes, trilles doubles, etc. »

Nous nous accorderons à penser qu’un tel programme technique vise plutôt les élèves de 3° cycle.

Néanmoins, nous pouvons introduire dès les premières années de piano certaines notions fondamen-

tales, communes à toutes les formes de techniques pianistiques (nous pensons aux différentes

« écoles » ; russe, française…) : il s’agit de la stabilité de l’empreinte et de la prise de conscience

sensorielle, dont Brigitte BOUTHINON-DUMAS2 parle en ces mots :

« La stabilité sera le moyen d’avoir une exigence sonore, car la qualité du son émis est direc-tement liée à cette notion d’équilibre du doigt. C’est la prise de contact initiale du doigt sur la touche qui fera la qualité du son, car on n’a plus d’action sur une note déjà frappée. Pour être stable, il ne suffit pas de se tenir droit (c'est-à-dire de corriger un dos) ; le but final est l’assise de la phalange, siège de l’empreinte tactile. » « Il est fondamental d’inculquer très tôt une approche sensorielle et consciente de l’instrument. […] Il faut expliquer rapidement à l’élève que c’est par la qualité du contact que l’on exprimera un sentiment. »

L’empreinte que l’élève imprimera au clavier afin de réaliser telle nuance, telle articulation ou telle

intention sera intériorisée par l’élève avec bénéfice et ce, dès l’étape de la lecture à vue. On ne peut

laisser ce dernier jouer triple piano, les doigts effleurant avec peine le clavier, car il a peur de

1 Ibid. p.52. 2 Ibid. p.23 et 121.

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« commettre » une fausse note ou de manquer un rythme. Dans le but de ressentir et de conscienti-

ser l’empreinte correspondant à sa décision musicale, l’élève doit absolument assurer un enfonce-

ment minimum de ses doigts, leur affectant une sensation suffisamment précise.

Dans le prolongement de cette idée, nous avons observé que certains professeurs délivraient des

doigtés identiques aux élèves jouant le même morceau. Les photocopies des dits doigtés sont distri-

buées préalablement au déchiffrage du morceau par l’élève, à la maison. Cette pratique me semble

incompatible avec la notion de stabilité car un doigté qui ne convient pas engendre justement une

instabilité de la main.

Naturellement, nous ciblons par ces propos l’enseignement dispensés aux élèves de second cycle.

Les choses se présentent différemment en premier cycle où il est important de « former » la main de

l’élève à l’aide des doigtés usuels afin de lui transmettre une logique tant technique que musicale du

doigté.

o De l’importance de l’analyse.

Pour finir, évoquons l’intérêt fondamental d’introduire en cours quelques notions d’analyse et ce,

dès l’étape de la lecture à vue. SCHUMANN disait : « Il faut vous rendre capables de lire toute

musique et de la comprendre par la vue, seulement ».

En contexte tonal, il est capital de faire prendre conscience à l’élève de la tonalité en cours, de la

présence de cadences, de modulations, d’éventuelles réexpositions transposées ou non… En con-

texte atonal, soulignons les chromatismes, les intervalles remarquables, la présence d’une éventuelle

série… Et de manière plus générale, sachons remarquer les particularités d’une écriture harmonique

ou au contraire contrapunctique. Pour cela, le professeur doit se former en la matière et ne pas se

laisser décourager par des écritures inconnues. Nous pensons tout particulièrement aux langages

contemporains.

o Proposition d’un programme de piano prenant en compte la lecture à vue.

De nombreux élèves passent l’année avec seulement trois ou quatre morceaux, joués aux auditions

ou aux examens. La raison invoquée la plupart du temps par les professeurs est le manque de temps.

Nous proposons de concocter un programme riche, varié mais qui impliquerait des niveaux de tra-

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vail différents afin que le « timing » de l’année soit tout de même respecté. Voici une idée que nous

tenons à développer, nous appuyant sur les propos de Brigitte BOUTHINON-DUMAS1 :

« Premier stade : morceaux seulement déchiffrés pour nourrir la curiosité de lire une parti-tion nouvelle, et s’entraîner ainsi au déchiffrage. Deuxième stade : travailler une œuvre jusqu’à ce qu’elle soit dans l’esprit et au tempo […]. Ceci implique naturellement un travail pointu sur le son définitif. En revanche, on n’exigera pas le par cœur. Son et climat créés devront l’emporter sur quelques accidents techniques. Troisième stade : œuvre travaillée dans le plus grand détail pour obtenir une maîtrise anti-trac, celle qui est indispensable pour une audition ou un examen. C'est-à-dire la version con-cert. »

Un tel programme nous semble particulièrement intéressant et pertinent. Néanmoins, nous aime-

rions suggérer un dernier point constituant le « quatrième stade » : l’étude poussée de morceaux

d’un niveau inférieur à celui de l’élève. Cela permet de travailler à la fois sur le déchiffrage et sur

l’interprétation précise, riche, maîtrisée.

A titre d’exemple, dans le cadre de la formation au DE, j’ai eu l’occasion d’assister à un cours sur

les Pièces lyriques de GRIEG chez un élève de niveau cycle 2, 2e année, ayant de très grandes qua-

lités musicales. L’étude de ces pièces, d’un niveau technique, digital, inférieur au sien, lui ont per-

mis de développer maturité, lyrisme et expressivité si bien que l’on aurait pu croire entendre un

élève de 3e cycle en fermant les yeux !

2. La musique d’ensemble.

℘ Pianistes-solistes et pianistes-accompagnateurs : drapeau blanc !

Il est des disciplines musicales qui prêtent plus au nombrilisme que d’autres : instruments possédant

une vaste littérature originale, chant lyrique. Au sein de ces individualités exacerbées germent par-

fois certains conflits, dont celui opposant le pianiste-soliste au pianiste-accompagnateur. Cet état de

fait conduit la grande majorité des élèves et des jeunes professionnels à choisir un camp ; il s’agit le

plus souvent du premier. Caroline ROSOOR2, directrice de l’ENMD de la vallée de Chevreuse (dé-

partement de l’Essonne) écrit :

1 Ibid. p.124. 2 ROSOOR, C., « Editorial » in Marsyas n°33, Paris, éditions Cité de la Musique, 1995, p.3.

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« Il semble qu’il [le jeune musicien] ne dise même pas : j’aimerais bien accompagner. Quel degré de maturité un futur musicien doit-il atteindre pour se détacher de l’idée : soliste, sinon rien ? »

La mise en concurrence établie entre ces deux professions n’a pourtant aucun fondement puisqu’il

s’agit de deux métiers bien différents où les professionnels ont en commun la musique et leur ins-

trument mais sont dotés d’aptitudes tout à fait spécifiques. Jean KOERNER1, autrefois professeur

d’accompagnement au CNSMDP, écrit :

« Pur produit d’une nation réfractaire à la notion conviviale de Kammermusik, notre classe se sait commise d’office à d’obscures ou glorieuses besognes, sans discrimination aucune ; armée de qualités reconnues de sang-froid, de plasticité, d’endurance mentale et physique, et destinée à tous les défis pianistiques qu’exigeront, en particulier : des emplois de « claviers » au sein d’un grand orchestre, d’un ensemble de musique contemporaine […], des accompa-gnements tous azimuts, au cœur d’une toundra hérissée de mines à retardement […], notre ir-ruption, récente, dans l’univers de « l’accompagnement chorégraphique » […]. »

Nous reconnaissons bien ici ce qui force notre admiration envers ces véritables casques bleus du

piano : musiciens tout terrain, courageux, opiniâtres, artistes de l’instant T.

Nous nous sommes attachés durant ces quelques lignes à définir la singularité du pianiste-

accompagnateur afin de pouvoir cerner, par opposition, celle du pianiste-soliste amené à pratiquer

la musique de chambre ou d’ensemble.

℘ Jouer de la musique, ensemble.

Être pianiste au sein d’un ensemble, c’est travailler dans la durée avec ses partenaires ; proposer une

interprétation commune ; être dans l’échange et non dans le soutien unilatéral ; établir un contact

humain et professionnel pérenne avec ses camarades etc. Voici quelques éléments qui distinguent le

pianiste-chambriste ou pianiste d’ensemble, du pianiste-accompagnateur et c’est à ces savoir-faire

qu’il nous appartient de former les élèves.

o Musique.

La première réalité s’imposant à tout musicien d’ensemble est que chaque partie séparée, même la

moins raffinée, demeure de la musique. En tant que telle, elle devra être travaillée, pensée, soignée

1 KOERNER, J., « Classe d’accompagnement au CNSMDP : 1979-1995, état des lieux » in Marsyas n°33, Paris, édi-tions Cité de la Musique, 1995, p.7.

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comme si c’était la plus belle musique au monde. Alain MEUNIER, président du CEFEDEM Aqui-

taine, éminent violoncelliste et chambriste, nous le rappelait encore en master class l’an passé.

Par ailleurs, les parties séparées de piano peuvent être redoutables sur le plan technique comme sur

le plan musical. Pourquoi ne pas prendre quelques instants, de temps à autres, en cours de piano afin

d’évoquer les difficultés éventuellement rencontrées par l’élève ? Ce peut être l’occasion de lui ap-

porter une réponse appropriée, « pianistique » si l’on peut dire, qu’un professeur de musique de

chambre n’est pas forcément en mesure de fournir s’il pratique un autre instrument que le piano.

Une telle démarche permet également d’accorder une place centrale aux pratiques d’ensemble, de

lier les classes de piano et de musique de chambre ; cette dernière est actuellement si confidentielle

dans certains établissements que même la grande réunion de rentrée n’est fréquentée que par une

dizaine d’élèves.

o Ensemble.

Une seconde réalité s’impose également : jouer ensemble nécessite l’apprentissage de l’empathie.

Cette notion constitue tant un fait technique et musical concret (respecter la pulsation et jouer en

place, s’écouter mutuellement et ainsi gérer l’équilibre sonore, créer une ambiance, proposer une

interprétation commune) qu’une valeur humaine indispensable (être à l’heure en répétition, ne pas

oublier ses partitions, écouter ses camarades dans ce qu’ils ont à dire, à proposer, échanger et cons-

truire avec eux etc.).

La musique de chambre, qu’elle soit pratiquée au sein d’une classe dédiée ou directement en cours

de piano1, permet de travailler sur des notions techniques et musicales fondamentales telles l’écoute

et la pulsation. N’entendons-nous pas certains élèves affirmer que la régularité de la pulsation n’est

pas si importante que cela en piano solo, se sentant libres de rattraper leur retard ou leur avance en

usant du rubato (ou bien ne pas rattraper du tout !). Il en va de même pour l’écoute : le travail sur

les plans sonores est encore plus évident lorsque plusieurs instruments se répartissent les voix et les

rôles. Jouer à plusieurs transforme ces éléments déjà capitaux en conditions sine qua none.

Mais la musique d’ensemble permet également d’aborder les notions impalpables de respect,

d’échange, d’élaboration. De ce fait, porter jusque sur scène le travail réalisé est important :

1 Nous avons vu, en première partie de ce travail, que certains établissements adoptaient des créneaux de cours com-muns à plusieurs élèves, ce qui permet de travailler facilement sur le répertoire pour 4 mains ou 2 pianos.

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l’expérience d’une audition de musique d’ensemble permet à l’élève de prendre conscience de son

rôle au sein du groupe, ce qui le responsabilise et le galvanise. Les enfants (comme les adultes…)

ressentent une grande fierté à constituer l’un des maillons indispensables d’une chaîne. Il est dom-

mage que seuls les musiciens d’orchestre ou les choristes connaissent de telles expériences musi-

cales et humaines.

Percevant leur instrument ainsi que leur propre rôle sous un nouveau jour, les élèves bénéficient

d’une façon différente, complémentaire, d’apprendre la musique et le piano.

℘ L’harmonisation au clavier.

La plupart des pianistes se trouvent démunis lorsqu’on leur demande d’harmoniser une mélodie afin

d’accompagner un instrument monodique ou un chanteur. Or, certains répertoires n’intègrent des

claviers qu’à la condition qu’ils sachent harmoniser : musique ancienne, musiques actuelles, jazz

etc. L’apprentissage de telles spécialités nous apparaît réservé à des pianistes d’un niveau instru-

mental et solfégique avancé. Néanmoins, nous pourrions proposer aux élèves de premier et second

cycles une initiation à l’harmonisation au clavier qui leur permettrait plus tard, s’ils le désirent,

d’aller plus loin dans l’apprentissage de ces différentes esthétiques.

Romain DIDER, auteur-compositeur-interprète de chansons françaises a travaillé avec une cinquan-

taine d’établissements d’enseignement musical à travers l’Europe, afin d’aller à la rencontre des

jeunes musiciens de conservatoire. Il raconte1 :

« Ouvrir par exemple l’univers harmonique des gens, et pas seulement en faisant des classes d’harmonie (souvent, d’ailleurs, assez tard dans vos cursus), c’est un apprentissage qui peut se faire dès les premières années ; je trouve qu’il y a un gros gâchis à ce sujet. [ …] Il ne s’agit pas de faire n’importe quoi dès la première année avec son instrument, mais de savoir […] que l’on peut écrire un petit canon à 8 ans pour peu qu’on connaisse trois bases de chif-frage, d’harmonie. »

Naturellement, une telle démarche d’initiation ne peut se faire qu’en collaboration avec la classe de

formation musicale : en effet, certaines connaissances théoriques sont nécessaires, notamment au

sujet des chiffrages. Néanmoins, dès lors que ces savoirs ont été transmis aux élèves, pourquoi ne

pas les faire fructifier lors du cours de piano ? Réaliser une cadence parfaite, évitée ou plagale à la

fin d’une gamme ; imaginer une série d’accords harmonisant une même note afin de travailler sur la

1 PORTELLI, J.L., et DIDIER, R., « Accompagner un chanteur de variétés » in Marsyas n°33, Paris, éditions Cité de la Musique, 1995, p.16.

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notion de couleur harmonique. En cours collectif, un élève pourrait composer une mélodie simple

pour la partie prima de 4 mains et un autre, l’harmoniser.

Nous avons la conviction que l’harmonisation au clavier permet à l’élève de s’approprier

l’instrument en dehors des codes interprétatifs propres aux différents styles musicaux étudiés en

piano solo ou en musique de chambre. Nous avons l’exemple au CRR de Toulouse, de jeunes pia-

nistes récemment diplômés du DEM, extrêmement brillants en tant que solistes, qui travaillent éga-

lement au sein de groupes de musiques actuelles amplifiées (rock et métal). Suivant la voie tracée

par certains pianistes de MAA tel Matthew BELLAMY (leader du groupe MUSE, formé pendant

10 ans en conservatoire), leur double engagement musical semble les aider à rester ouverts à toute

forme de pratique et leur assure une motivation constante pour leur instrument.

Pour finir, rejoignant le propos que nous tenions précédemment au sujet de la lecture à vue, les no-

tions d’analyse et de théorie abordées, si basiques soient-elles, faciliteront la compréhension et la

mémorisation des morceaux du répertoire étudiés dans le même temps.

3. De l’usage des transcriptions, réductions et autres arrangements1.

℘ Quelques précisions en matière de terminologie.

Selon Marc VIGNAL2, la transcription est une « adaptation, à l’usage d’un instrument ou groupe

d’instruments, d’une composition musicale dont la version primitive était destinée à la voix ou à

d’autres instruments ». Le terme de réduction est utilisé lorsqu’il s’agit de ramener une partition

d’orchestre au piano ou à tout autre instrument polyphonique, que ce soit par écrit ou à vue.

Toujours selon le même Dictionnaire de la Musique, le terme d’arrangement regroupe l’art de la

transcription et celui de la réduction. D’autres ouvrages tels Science de la musique3 refusent le

terme d’arrangement qui se voit alors restreint au seul domaine du jazz.

1 Nous tenons à préciser que le terme « arrangement » utilisé dans ce travail a été choisi car il nous apparaît être suffisamment porteur de sens et nous permet de ce fait d’éviter l’utilisation d’une terminologie multi ple. Il n’est nullement question pour nous de défendre l’art de « s’arranger » avec les œuvres, par le biais de modifi-cations grossières du texte ou de simplifications contraires aux idées mêmes des compositeurs. 2 VIGNAL, M., (dir.), Dictionnaire de la Musique, Paris, éditions Larousse, 2001. 3 HONEGGER, M., (dir.), Science de la musique, Paris, éditions Bordas, 1976.

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Transcription, réduction, arrangement… Les divergences d’opinions au sujet de cette terminologie

sont le symptôme d’un malaise cristallisé autour de ces pratiques qui connaissent un fort déclin de-

puis la fin du siècle romantique au sein de la musique dite savante.

℘ Les raisons de ce déclin.

Les musicologues attribuent communément le déclin de l’arrangement à deux facteurs : il s’agit de

la prise de conscience du timbre instrumental et de la disparition du rôle fonctionnel de

l’arrangement.

o La prise de conscience du timbre instrumental.

Jusqu’au 19° siècle, les compositeurs travaillaient tout d’abord pour le piano avant d’orchestrer

leurs compositions. Modifier l’instrumentation d’une pièce ou la réduire au clavier ne posait donc

aucun problème aux musiciens de l’époque qui gardaient à l’esprit que le compositeur lui-même

n’avait pas fait grand cas des couleurs instrumentales. BERLIOZ a été l’un des premiers à prendre

conscience des timbres, en composant sa Symphonie fantastique directement pour chaque pupitre

d’instruments.

Cependant, une telle prise de conscience est, en réalité, tout à fait compatible avec la notion

d’arrangement. A titre d’exemple, Peter SZENDY1 relate qu’Arnold SCHÖNBERG a fait (ou a

laissé) faire à Anton WEBERN, qui était alors son élève, une transcription pour piano de la troi-

sième de ses Cinq Pièces pour orchestre opus 16 composées en 1909. Cette pièce, intitulée Farben,

constitue la première occurrence de la Klangfarbenmelodie. La nature même de ce procédé musical

semble être opposée à tout arrangement ; et pourtant…

Un autre évènement, relativement récent, nous paraît plus lourd de conséquences en ce qui concerne

l’art de l’arrangement. Il s’agit de la prise de conscience des timbres baroques. En effet, la volonté

historiciste des baroqueux, si pertinente soit-elle, cause un certain nombre de dommages collaté-

raux. Ce mouvement, initié dans les années 1950 par Nikolaus HARNONCOURT et Gustav

LEONHARDT, se fixe pour objectif le respect des différents paramètres techniques et musicaux de

l’époque : diapason, tempérament, instruments (sans les remplacer par leur équivalent moderne dont

le piano fait partie), effectifs instrumentaux etc. Cette exigence a engendré une sorte de crainte de

1 SZENDY, P., Arrangements – Dérangements, Paris, éditions L’Harmattan, 2009, p.12.

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l’arrangement, considéré comme une déformation voire une transgression du texte musical originel.

Il est dommage de constater que le refus des instruments modernes conduit certains pianistes, pro-

fesseurs ou musicologues à rejeter catégoriquement l’interprétation du répertoire des clavecinistes

au piano (RAMEAU, COUPERIN, HAENDEL, BACH).

o La disparition du rôle fonctionnel de l’arrangement.

Avant l’apparition du disque, l’arrangement était le seul moyen de diffuser largement une œuvre

musicale. En effet, les ensembles instrumentaux et les concerts n’étaient pas monnaie courante et

l’arrangement permettait à tous de jouer au piano une symphonie, une cantate, une mélodie…

Le paysage musical du 19° siècle proposait tant une transcription pour harmonium du Tannhäuser

de WAGNER, mise au point par un musicien anonyme (l’enregistrement réalisé à l’époque sur rou-

leau de cire est toujours disponible) que le travail titanesque de LISZT qui, à titre d’exemple, permit

à SCHUMANN de découvrir la Symphonie fantastique de BERLIOZ.

L’hypothèse est qu’une fois ces fonctions de diffusion, transmission et substitution rendues ca-

duques par l’arrivée du disque, l’arrangement ne revêtait plus aucun rôle fonctionnel et perdit donc

les faveurs des musiciens. Voici ce qu’écrit Jean KOERNER1 :

« Une époque peu scrupuleuse, la nôtre, a donné des titres de noblesse exorbitants à ce qui n’était qu’une solution de fortune vouée, naguère, à la propagation de la culture orchestrale dans les chaumières [...]. Respectons-en le caractère utilitaire, pédagogique ou ludique, sans dépasser la dose prescrite. A moins qu’un soir, de passage ici-bas, Richard WAGNER n’insiste pour réentendre son « Liebestod » en blanc et noir ?».

Ces propos nous interrogent : peut-on réellement résumer l’intérêt présenté par l’arrangement en

cette unique capacité de propagation des œuvres?

℘ Des enjeux musicaux et pédagogiques.

Peter SZENDY2 écrit :

« Traduction, critique musicale en musique : c’est ainsi que Liszt ou Schumann, dans l’âge d’or romantique de l’arrangement, voyaient déjà son œuvre, son opération, qui ne se laisse en rien réduire à une fonction adaptative ou communicationnelle. »

1 KOERNER, J., « Classe d’accompagnement au CNSMDP : 1979-1995, état des lieux » in Marsyas n°33, Paris, édi-tions Cité de la Musique, 1995, p.6. 2 Ibid. p.14.

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Si l’on pense à l’arrangement en le soustrayant à toute fonction utilitaire, l’on prend conscience

qu’il agit sur l’œuvre elle-même, à la manière d’un révélateur de son caractère essentiel. Il est un

rapport actif à elle, qu’il éprouve, qu’il teste dans sa facture. Voilà donc le véritable et primordial

apport de l’arrangement.

Sans cela, comment expliquer par exemple que l’orchestration par Maurice RAVEL des Tableaux

d’une exposition de Modest MOUSSORGSKI touche autant l’auditeur que la version originale pour

piano? Il en va de même pour de nombreuses œuvres, dont je ne citerai qu’un autre fameux

exemple: la réduction des symphonies de BEETHOVEN pour piano solo, réalisées par LISZT; la

7° est tout particulièrement émouvante.

L’enseignant s’interrogeant sur cet aspect-là de l’arrangement y voit immédiatement un enjeu con-

sidérable pour lui-même, dans sa pratique personnelle, ainsi que pour ses élèves. Outre la curiosité

pouvant être suscitée chez l’élève par ce type de répertoire, la pratique de l’arrangement lui permet-

tra de développer son imaginaire musical : au piano, l’on enseigne souvent BEETHOVEN en fai-

sant référence aux timbres issus de l’orchestre, MOZART en évoquant l’opéra… Encore faut-il que

l’élève sache de quoi nous parlons!

Travailler à partir de transcriptions en écoutant parallèlement les versions originales constitue un

très bon outil de développement de « l’instrumentarium intérieur » d’un élève ainsi que de sa cul-

ture musicale globale. Plus tard, l’étudiant pourra même s’essayer à transcrire, réduire et arranger

par lui-même ; qui plus est s’il entre en classe d’analyse ou d’écriture ce qui est fréquemment le cas

concomitamment à un troisième cycle instrumental.

℘ Quelques exemples musicaux.

o D’une transcription d’air pour piano solo.

Il est souvent difficile d’enseigner ce qu’est le legato au piano. Lorsque j’aborde la question avec un

élève, je ne peux m’empêcher de passer par le chant tant l’aspect artificiel du legato pianistique me

paraît incompatible avec la bonne compréhension de cette notion : en effet, pour pouvoir réaliser un

legato satisfaisant au piano, il ne faut pas partir vaincu en sachant que le son sera de toute façon

«faussement» legato ; mieux vaut avoir un idéal sonore en tête que l’empreinte au bout du doigt fera

tout pour atteindre. Aussi, l’usage de transcriptions d’airs, de mélodies ou de lieder paraît fort inté-

ressant, la voix étant le meilleur vecteur en la matière.

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Citons par exemple la pièce d’Henry PURCELL intitulée A new ground1. Cette transcription pour

clavecin, certainement réalisée par Purcell lui-même, est celle de l’air Here the Deities Approve tiré

de Welcome to all the Pleasures Z .339 (il s’agit d’une ode composée en l’honneur de Sainte Cécile

en 1683).

Le plus grand recul est à prendre avec l’édition, notamment en ce qui concerne les indications ex-

pressives ou agogiques mais le travail que cette pièce permet d’entreprendre sur le legato, les plans

sonores et les articulations (entre autres) est tout à fait pertinent pour un élève de début de second

cycle. Pour finir, l’écoute de cet air sublime, qui remporte encore aujourd’hui un franc succès au-

près du public d’opéra, ne peut qu’apporter une dimension supplémentaire à l’imaginaire développé

par l’élève autour de cette œuvre et à sa compréhension du legato, de la conduite de la phrase.

o De l’usage des concertos avec réduction d’orchestre au second piano.

Le répertoire concertant génère autour de lui beaucoup de crainte (dans les conservatoires français

tout du moins). Que ce soit au prétexte du manque d’orchestres, du refus des réductions d’orchestre

au second piano ou de la difficulté de certains concertos, les pianistes et professeurs de bon niveau

sans pour autant mener une carrière de soliste se désintéressent du répertoire concertant. Il est

dommage de constater cela, tant pour les pianistes que pour le répertoire qui risque de se résumer

rapidement aux grands concertos du 19° siècle et aux œuvres postromantiques (les autres concertos

majeurs du 20° siècle sont d’ores et déjà enclins à disparaître des programmations). En Belgique par

exemple, chaque élève présentant l’équivalent du DEM joue un concerto, accompagné par son pro-

fesseur au second piano.

En effet, loin de l’image d’Épinal du pianiste virtuose exécutant les plus grands concertos, l’usage

du répertoire concertant peut être mis au profit de l’apprentissage des élèves dès la fin de premier

cycle. Quelques exemples de concertos abordables en premier et second cycle : Concerto en do ma-

jeur de HAYDN ; Klavierkonzert en do majeur de VANHAL ; Concerto pour piano n°8 de MO-

ZART ; Concerto pour clavier en la majeur de BACH etc.

Par ailleurs, l’étude d’un concerto peut se faire par extrait ou par mouvement. L’étude d’un mou-

vement lent de concerto, outre sa moindre difficulté technique, permet d’amorcer avec l’élève un

travail musical sensible, intense et pointu sans équivalent au sein des Bach à nos jours ou autre sé-

lection de morceaux pour piano solo. Citons par exemple le mouvement lent du Concerto pour pia-

no n°2 de CHOSTAKOVITCH2.

1 Extrait de la partition disponible en Annexe 1. 2 Extrait de la partition disponible en Annexe 2.

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CONCLUSION

Enseigner le piano en tant qu’outil musical soulève un certain nombre d’interrogations et constitue

donc une problématique en soi. Nous avons pu constater que le Schéma national d’orientation pé-

dagogique abondait dans le sens d’une telle vision de l’enseignement musical et pianistique.

Les professeurs interrogés n’emploieraient pas forcément l’intégralité des moyens décrits dans ce

travail (nous pensons notamment à l’étude d’arrangements et à l’harmonisation au clavier) mais en

cautionnent la fin. Les considérations théoriques et pratiques émises au sujet de l’enseignement de

la lecture à vue, de la musique d’ensemble ainsi que de l’étude d’arrangements nous ont permis

d’en cerner les enjeux et les modalités.

Néanmoins, il nous reste à définir la portée d’une telle réflexion :

Apprendre la musique revient à apprendre un langage. Il paraît naturel d’initier un enfant dès son

plus jeune âge, de manière concomitante et progressive, à former les mots le plus distinctement pos-

sible ainsi qu’à élargir son vocabulaire et à développer sa syntaxe. Il en va de même en ce qui con-

cerne la musique : l’élève saura être initié avec bénéfice au langage musical tout entier parallèle-

ment à son apprentissage technique de l’instrument. Au fil de son développement, il fera croître sa

sensibilité à ce langage pour finalement se l’approprier et ainsi devenir autonome.

Il nous semble que la véritable autonomie se niche en cette capacité d’appropriation : c’est par elle

que l’élève cultivera sa curiosité, son désir d’apprendre et de jouer.

Cette idée trouve sa triste illustration dans le nombre important d’étudiants qui réduisent voire ces-

sent totalement leur pratique instrumentale au sortir du conservatoire. Alors même que ces jeunes

musiciens parviennent à un niveau suffisant de compétences et de maturité sur le plan technique,

certains délaissent leur instrument1.

Nous émettons l’hypothèse que cet état de fait soit lié au manque d’autonomie des étudiants sur le

plan musical ; comme s’ils ne s’en étaient pas intégralement approprié le langage : préparer un réci-

tal, travailler son instrument dans une recherche sonore et esthétique exigeante, seul, sans l’appui

régulier d’un professeur ; monter des projets : créer un groupe de musique de chambre, organiser

des répétitions et élaborer un programme de concert ; accompagner un chanteur et retravailler pour 1 Notons que ce cas de figure ne se rencontre pas, ou très peu, en MAA. Les jeunes diplômés de cette filière prennent en général leur envol dès leur cursus terminé et jouent très souvent en concert, au sein de différentes formations.

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l’occasion une transcription mal agencée ; enseigner et transmettre à ses propres élèves la « fibre »

musicale.

Enseigner le piano en tant qu’outil musical répond donc à la nécessité de former des pianistes musi-

ciens, qu’ils soient professionnels ou amateurs, autonomes tant sur le plan technique que sur le plan

musical, capables d’entretenir, d’améliorer et d’adapter leur pratique pianistique à toute éventualité

de concert, projet artistique, collaboration pluridisciplinaire etc. Sans oublier de continuer à jouer

pour le simple plaisir de le faire.

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ANNEXES

℘ Annexe 1 : extrait de la partition

CELL (transcription par l’auteur).

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extrait de la partition A new Ground in E minor (Z. T682)

(transcription par l’auteur). Editions DOVER.

in E minor (Z. T682), de Henry PUR-

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℘ Annexe 2 : extrait de la partition du 2° mouvement du Concerto n°2 pour piano et or-

chestre, de Dmitri CHOSTAKOVITCH (réduction pour 2 pianos par l’auteur).

Editions BOOSEY & HAWKES.

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BIBLIOGRAPHIE

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ROSOOR, Caroline, (dir.), Marsyas n°33, éditions de la Cité de la Musique, Paris, 1995.

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SZENDY, Peter, Arrangements-Dérangements, éditions l’Harmattan, Paris, 2000.

℘ Ouvrages spécialisés au sujet de l’enseignement du piano.

BILLIER, Sylvaine, Le déchiffrage ou l’art de la première interprétation, Paris, éditions Alphonse

Leduc, 1990.

BOUTHINON-DUMAS, Brigitte, Mémoire d’empreintes, Paris, éditions de la Cité de la Musique,

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NEUHAUS, Heinrich, L’art du piano, Paris, éditions Van De Velde, 1971.

℘ Mémoires DE.

BONNEU, C., Regards d’un accompagnateur sur l’enseignement du piano, CESMD

TOULOUSE, 2003.

GASSIAT, H., L’accompagnement : entre compétences et rôle pédagogique, CESMD

TOULOUSE, 2003.