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12 | AVRIL 1989 : Du congélateur au déménagement REPÈRES L'ethnologie italienne : un itinéraire Entretien entre Clara Gallini et Giordana Charuty Clara Gallini p. 110-124 Entrées d’index Thèmes :traditions anthropolo giques nationales Lieux d'étude :Italie 1 Professeur d'anthropologie à l'Institut oriental de Naples, Clara Gallini a longtemps vécu et travaillé en Sardaigne dont elle a analysé les profonds changements survenus depuis les années 60. Son premier livre, La danse de l'Argia. Fête et guérison en Sardaigne, qui, dans le prolongement des travaux de De Martino sur le tarentisme apulien, explorait les rituels sardes de l'Argia, vient d'être traduit en français dans une version remaniée*. A cette occasion, nous avons évoqué ensemble les  principaux mome nts d'un très riche itiné raire. 2 Giordana Charuty : Comment devenait-on ethnologue, en Italie, dans les années 50 ? 3 Clara Gallini : J'appartiens à une génération qui n'a pas connu de formation universitaire à l'ethnologie puisque c'était une discipline très peu enseignée. Les ethnologue s de la génération  précédente — De Martino, Pettazzon i, Sabatucci — sont des historiens de s religions qui ont e u une formation classique et j'ai fait moi-même des études classiques. D'autres, comme De Martino par exemple, avaient aussi une formation philosophique. Antiquités classiques et philosophie : voilà les deux filières. Mes intérêts viennent donc de l'histoire des religions. J'ai fait mes études à Milan, avec Momolina Marconi, disciple d'Umberto Pestalozza, philologue d'une très grande érudition mais qui avait la manie de la religion méditerranéenne, dont il proposait une reconstruction très hypothétique, en se fondant essentiellement sur des sources littéraires, grecques et romaines. Or, le  plus drôle, c'est q ue tout cela baign ait dans un ima ginaire très dannunz ien où la Grande Mère s'accouple avec son fils pour le châtrer dans des bouillonnements de sang ! Des images toutes masculines de féminité grondante et de sang, voilà ce que nous proposait la vestale du Maître. Mais, dans le même temps, paraissaient les premiers volumes de la « collection violette » chez Einaudi, qui présentait, sous la direction de De Martino et de Pavese, un choix très précis de travaux d'anthropologie et d'histoire des religions : Lévy-Bruhl, Durkheim, Mauss, V an der Leuw , Eliade. Ces livres constituaient alors une ouverture très importante, surtout pour nous qui appartenions au monde fermé et étroit de la philologie classique. Les philosophes, autant que je me souvienne, apportaient une ouverture au matérialisme, mais c'était encore un marxisme traditionnel d'où était totalement exclu l'univers des mythes et des rites. Puis je me suis spécialisée à Rome en histoire des religions avec Pettazzoni déjà âgé, toujours grand érudit, et avec Brelich qui nous initiait à une lecture quasi formaliste des mythes grecs, même si l'on ne s'en rendait pas compte alors. A vec Pettazzoni, j'ai découvert l'exotisme en même temps que la nécessité d'une très grande rigueur dans la documentation. Et je lisais De Martino, que je ne connaissais pas encore, Il Mondo magico venait de paraître. 4 G. C. : Et c'est à ce moment-là que tu commences à t'intéresser aux rituels de possession... 5 C. G. : Disons que mon intérêt pour ce que je définirais aujourd'hui comme les rapports entre rationnel et irrationnel est déjà présent dans mes premières recherches d'histoire des religions grecque et latine, que ce soit dans les études préparatoires sur certains aspects du dionysisme, sur les rituels de possession dans la Grèce antique, sur les thèmes du labyrinthe et de la dissolution du moi, sur les rituels initiatiques. Mais il s'agissait d'une lecture de type psychologique et

Entretien Entre Clara Gallini Et Giordana Charuty - Terrain 12 - Avril 1989

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    12 | AVRIL 1989 : Du conglateur au dmnagementREPRES

    L'etnolog!e !tal!enne : un !t!nra!reEntret!en entre "lara #all!n! et #!ordana "arut$

    "lara #all!n!%& 11(12)

    Entres dindex*+me, :trad!t!on, antro%olog!-ue, nat!onale,L!eu. d'tude :Ital!e

    1 Professeur d'anthropologie l'Institut oriental de Naples, Clara Gallini a longtemps vu ettravaill en !ardaigne dont elle a anal"s les profonds hangements survenus depuis les annes #$%!on premier livre, &a danse de l'rgia% ()te et gurison en !ardaigne, *ui, dans le prolongement destravaux de +e artino sur le tarentisme apulien, explorait les rituels sardes de l'rgia, vient d')tretraduit en fran-ais dans une version remanie.% ette oasion, nous avons vo*u ensem/le les

    prinipaux moments d'un tr0s rihe itinraire%

    Giordana Charut" 2 Comment devenait3on ethnologue, en Italie, dans les annes 4$ 5

    6 Clara Gallini 2 7'appartiens une gnration *ui n'a pas onnu de formation universitaire l'ethnologie puis*ue 'tait une disipline tr0s peu enseigne% &es ethnologues de la gnration

    prdente 8 +e artino, Petta99oni, !a/atui 8 sont des historiens des religions *ui ont eu uneformation lassi*ue et :'ai fait moi3m)me des tudes lassi*ues% +'autres, omme +e artino parexemple, avaient aussi une formation philosophi*ue% nti*uits lassi*ues et philosophie 2 voil lesdeux fili0res% es intr)ts viennent don de l'histoire des religions% 7'ai fait mes tudes ilan,ave omolina aroni, disiple d';m/erto Pestalo99a, philologue d'une tr0s grande ruditionmais *ui avait la manie de la religion mditerranenne, dont il proposait une reonstrution tr0sh"pothti*ue, en se fondant essentiellement sur des soures littraires, gre*ues et romaines%

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    ps"hanal"ti*ue *ui simplifiait des faits /eauoup plus omplexes, mettre en relation ave uneanal"se du soial dont :e n'avais pas enore les instruments% C'est +e artino *ui m'en fournira lesmo"ens%

    #G% C% 2 C'est alors *ue tu demandes un poste en !ardaigne% Ju'est3e *ui motivait un tel hoix 5

    K C% G% 2 7e suis partie pour la !ardaigne, non pas pour faire du terrain, mais prisment pourtravailler ave +e artino *ui, tout en a"ant une grande influene intelletuelle, n'a :amais eu depouvoir aadmi*ue% C'est tr0s tard *u'il o/tint un poste de professeur d'universit et e n'est pas unhasard si sa premi0re haire se situe dans une rgion priphri*ue% la fin des annes 4$, toute lagauhe intelletuelle italienne est passe par Cagliari *ui, de e fait, tait une universit tr0sintressante% Il " avait Petronio, !alinari, +e Ho/ertis omme historiens de la littrature italienne Lldo Capitini et assuo3Costa en pdagogie L Paolo Hossi, Cesare Fasoli, Pietro Hossi, CarloFiano pour la philosophie L +el onte pour la smioti*ue et Hosiello pour la linguisti*uestruturale% C'taient des annes tr0s vivantes, tr0s importantes%

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    livre est un peu la onlusion d'une priode et d'un t"pe de reherhes% 7e l'ai rit en parall0le aveIl onsumo del saro 1K1Q, /ien *ue :'aie depuis longtemps tous les matriaux, mais :e me heurtais une diffiult thori*ue 2 *ue faire de la protestation 5 Car, d: e moment3l, la simple anal"seen termes de protestation ne me paraissait pas suffisante%

    1 (inalement, :'ai ompris *u'il ne suffisait pas d'tudier la possession omme envers de la

    rationalit, mais *u'il fallait la situer dans le ontexte des d"nami*ues soiales et ulturelles% Entre3temps, la fr*uentation de +e artino m'avait fait douvrir la *uestion fondamentale desd"nami*ues ulturelles, des rapports entre ulture lettre et /asse ulture% Et :'aurais privilgi ettedimension si :'avais ontinu travailler sur le monde anti*ue% +'autre part, taient parus &esmouvements religieux des peuples opprims1 de &anternari, un livre fondamental pour omprendreomment, dans les mouvements des /ahanales omme dans les rvoltes d'eslaves, la protestationsoiale devenait un fateur idologi*ue et religieux tr0s important% Cela m'a onduite identifiergalement au niveau idologi*ue les rapports de ontradition entre es mouvements et l'idologieoffiielle de la Home rpu/liaine% ais e *ue :e ne trouvais pas dans &anternari et *ue :e dois,dans e as, aux hanges et aux d/ats ave &ua Pinna, un soiologue mort maintenant, 'estd'avoir ompris *u'il faut onsidrer aussi e *u'il advient apr0s le temps de la protestation% Par

    exemple, dans le as *ue :'ai anal"s, :e me suis aper-ue *ue le pouvoir, non plus de la Homerpu/liaine mais de la Home impriale, s'tait restrutur sous de nouvelles formes prisment

    pour rpondre aux instanes mises en avant par les mouvements de protestation% Ce pouvoir s'estremodel en englo/ant les instanes idologi*ues de la protestation% C'tait l, si tu veux, uneleture un peu pessimiste mais 'est *ue :'avais aussi *uel*ues doutes sur la radialisation de l'utopiesoixante3huitarde @ Car 'est faile, pour le patron, de te mettre sur le dos ton utopie @ Et don :etournais autour de e th0me des rapports entre utopie et pouvoir% 7e ne sais pas si :e ontinuerais,au:ourd'hui, parler d'B intgration , :e onsidrerais *ue les ontraditions se sont dplaes d'autres niveaux L mais reste la nessit de ne pas s'en tenir exlusivement au moment de laontestation, de la resituer dans la dure%

    16 G% C% 2 Juelle a t la ration des historiens 5

    1 C% G% 2 is part l'intr)t de ario Oorelli, un :eune arhologue l0ve de Dianhi Dandinelli,*ui ompte au:ourd'hui parmi les arhologues les plus inventifs, la plupart des historiens ragirent

    par le silene% Il " eut un re:et aadmi*ue ar :'empitais sur leur terrain% la tradution fran-aiseet la rdition italienne t'ont donn l'oasion de priser ou de rviser ertaines des anal"ses

    proposes dans la premi0re version de l'ouvrage% &'tude des novene o> la dvotion religieuse estintimement lie aux valeurs festives de l'hospitalit, du don et de la dpense te permet d'anal"ser lesrelations entre rapports de prodution et rapports de onsommation soiale et s"m/oli*ue% Juelleest la spifiit de la !ardaigne et gard 5

    1# C% G% 2 7'tudiais es f)tes au moment d'un /oom onomi*ue *ui avait dfinitivement mis enrise les strutures onomi*ues et soiales traditionnelles ainsi *ue les formes et les fontionsoutumi0res des prati*ues festives% u:ourd'hui, au ontraire, elles3i ont retrouv une vitalitremar*ua/le mais en se transformant selon des modalits *ue :'avais d: entrevues alors% +ansertains as, le mod0le de la novena est a/sor/ par elui de la f)te votive annuelle, elle aussirelane de mani0re follori*ue, et les neuf :ours au santuaire se rduisent une :ourne%

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    1K G% C% 2 +ans e travail, l'usage du *uestionnaire permet une anal"se de la parent enore peuprati*ue dans les tudes monographi*ues de ette priode%

    1M C% G% 2

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    individualise rarement la figure de l'agresseur% Ce *ui est au premier plan, 'est le groupe dans sonindtermination, d'o> part le oup d'Sil *ui frappe% &a figure du :ettatore est /eauoup plusmarginale% &es rapports interpersonnels sont prsents dans le B vol magi*ue *ui impli*ue uns"st0me d'hanges positifs et ngatifs entre familles et se rattahe troitement la vendetta% +on,vol magi*ue et vendetta font s"st0me%

    6 G% C% 2 &a notion d'B mergene d'une hirarhie soiale se rattahe aux anal"ses en termes deB /iens limits %

    C% G% 2

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    6 C% G% 2 7'insiste davantage sur l'am/iguUt d'un rituel o> l'on rit et pleure en m)me temps, et :em'interroge sur l'nigme *ue onstitue pour moi le fait de rire devant une personne *ui se dfinit et*ue le groupe dfinit lui3m)me omme malade% C'est l *uel*ue hose d'extraordinaire *ui supposeune norme sant du groupe soial%

    64 G% C% 2 &a dimension festive est3elle aratristi*ue de l'rgia ou /ien tait3elle prsente dans le

    tarentisme mais sous3value par +e artino 5

    6# C% G% 2

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    voisines de elles de l'rgia et du Carnaval, mais il a des issues /ien diffrentes 2 il peut expulser lavitime hors du village ou /ien elle3i peut entrer dans le :eu et )tre rintgre% C'est tout un :eu*ui s'instaure entre les su:ets soiaux, travers es instruments s"m/oli*ues *ue l'on transforme enles soumettant des intentionnalits diffrentes% 7e vois /ien rapparaAtre, dans les olletes desfolloristes, les m)mes o/:ets mais lors*ue :e les vois fontionner, eux3i deviennent diffrents arla relation entre les su:ets est diffrente% &es lments s"m/oli*ues sont les m)mes et en m)me

    temps ils ne sont plus les m)mes lors*u'ils sont, omme tu le dis, refontionnaliss%

    6 G% C% 2 Cela signifie3t3il *ue tu mets des rserves sur la possi/ilit d'la/orer le s"st0me de esrelations s"m/oli*ues 5

    $ C% G% 2 Non, au ontraire% u moment de l'en*u)te sur l'rgia, :'aperevais des ressem/lanesgnri*ues entre les rituels de ertains villages et le Carnaval% +epuis, ma onnaissane de laulture traditionnelle s'est arue et :'ai vu *ue e n'tait pas seulement le moment festif du Carnaval*ui servait de rfrene, *u'il " avait aussi d'autres moments o> l'on utilise des mo"ens s"m/oli*uessem/la/les eux de l'rgia% Il devient alors intressant de reonstruire le mod0le ommun, :e rois*ue l'on peut et *ue l'on doit le faire% ais, ensuite, il faut aussi le donstruire ar, dans haune de

    ses ralisations, le mod0le se transforme en fontion des diffrentes relations *ue les su:ets soiauxentretiennent ave lui et *ui varient selon les intentions prati*ues%

    1G% C% 2 Par rapport au tarentisme, la grande diffrene, ii, 'est *ue, la plupart du temps, e sontdes hommes *ui se disent pi*us par l'rgia%%%

    C% G% 2

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    manifestement per-us omme *uivalents sur le plan s"m/oli*ue, au point d'avoir une inidene surle vu ps"hi*ue du malade% En un sens, es variantes renvoient aussi un univers ulturel *uiretient omme faile l'hange des r=les entre spetateur et ateur% C'est le as dans le arnaval, parexemple% ais il " a /ien d'autres transformations 2 si :e suis pi*u par une argia veuve, dansertains as on me mettra dans le four, dans d'autres on fera appel des veuves pour danser et dansd'autres as enore des femmes pour hanter des lamentations fun0/res% Ce sont l des variations

    importantes *ui impli*uent pres*ue un s"st0me de transformations, non pas tellement au senslvistraussien d'une organisation du rel selon des atgories antiennes, non pas seulement nonplus omme modalit de dfinition de l'identit villageoise par opposition aux villages voisins, mais*ui renvoie une fontion prati*ue, la nessit d'affronter une situation d'urgene%

    K G% C% 2 ais ne disent3elles pas toutes un m)me sens de la maladie *ue seule la onsidration desvariantes, dans leur ensem/le, permet de reonstruire 5

    M C% G% 2 C'est un :eu d'*uivalenes, /ien sTr, mais :e ne pense pas *ue, dans le as de l'rgia, :epuisse, partir de toutes les variantes du m"the, reonstruire un mta3m"the% 7'ai onstruit unta/leau s"nopti*ue des lments, des relations et de toutes les possi/ilits de om/inaisons

    prsentes dans le rite, mais 'est l une extrapolation logi*ue de ma part%

    G% C% 2 +ans ton itinraire d'anthropologue s'insrivant dans la tradition marxiste &a sonnam/ulameravigliosa%%% 1M6Q, leture anthropologi*ue du magntisme et de l'h"pnotisme de la seondemoiti du xixe si0le italien, me sem/le mar*uer un tournant, notamment par le re:et d'oppositionssimplifiatries omme elle entre ulture hgmoni*ue et ulture su/alterne, dont l'emploi taitdevenu pres*ue o/sessionnel dans ertains travaux italiens%%%

    4$ C% G% 2 7e ne re:ette pas es atgories de mani0re fraassante ar elles ont, initialement,reprsent un instrument extr)mement valide% u:ourd'hui, :e suis la premi0re ne plus )tred'aord sur l'emploi simplifiateur de ette opposition, mais par rapport d'autres mani0res,analogues, de lire les d"nami*ues ulturelles, 'tait l un pas en avant tr0s net% &es letures entermes de rapports entre entre et priphrie ou /ien entre B haute et B /asse ultures ngligentles d"nami*ues du pouvoir et du ontr=le soial% )me la littrature anthropologi*ue et histori*ueanglaise, o> le mod0le fontionnaliste est plus omplexe, n'aorde pas une attention suffisante aumoment de la ontradition omme rponse au ontr=le soial *ui peut russir ou houer% Cettedimension thori*ue, propre un ourant de l'anthropologie italienne, :e ontinue la revendi*uertout en sahant *ue l'on ne peut plus rduire les d"nami*ues soiales une opposition entre ulturehgmoni*ue et ulture su/alterne% 7e dirai plus 2 lors*ue :'rivais Il onsumo del saro, :e faisaisd: remar*uer omment les rihes eux3m)mes vont la f)te et don omment la f)te est aussi unmoment d'intgration des divers groupes soiaux, e *ui indisposait /eauoup de monde en es

    annes d'idologie populiste%

    41 Ce *ui ontinue m'intresser, 'est le rapport entre ulturesQ et lassesQ soialesQ, non pas endes termes simplifiateurs, attri/uant ha*ue lasse une ulture autonome et radialement distintede elle des autres lasses, mais en pla-ant au entre de l'anal"se l'identifiation des d"nami*ues de

    pouvoir et de ontr=le% C'est l le th0me *ue :'ai tou:ours privilgi dans les diffrents seteurs del'anthropologie du s"m/oli*ue *ue :'ai explors, ar le s"m/oli*ue est aussi un en:eu du ontr=lesoial% C'tait d: le su:et de Protesta e integra9ione%%% L dans le as de l'rgia, au ontraire, le

    pro/l0me n'tait pas envisagea/le dans la mesure o> le rite n'a gu0re fait l'o/:et de tentatives deontr=le% Ooutefois, :e ne voudrais pas aplatir l'anal"se du s"m/oli*ue, en la rduisant au seul onflitidologi*ue, selon un pseudo3marxisme a/strait *ue m)me +e artino ne partageait pas%

    4 Il faut rappeler *ue ette radialisation de l'opposition ulture hgmoni*ue3ulture su/alterne at tr0s la mode deux moments de l'histoire ulturelle italienne% +'a/ord la fin des annes $ et

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    au d/ut des annes 4$, parmi les intelletuels les plus engags, puis dans les annes K$, ommeformule relevant pres*ue de la ulture de masse, et lie aussi aux mouvements des :eunes% ais +eartino n'en a :amais fait un emploi /anal% !'il parle de ulture su/alterne, il faut se souvenir *uetoutes ses anal"ses prennent en ompte l'existene, dans la ulture du !ud, de plusieurs instanesdominantes 2 l'Rglise atholi*ue mais aussi la pense laU*ue, *ue e soit elle des intelletuels des&umi0res dans le xviiie si0le napolitain voir l'anal"se de la :ettatura dans !ud e magia, 14Q ou

    elle des mdeins de l'?ge /aro*ue :us*u' l'po*ue moderne voir &a terra del rimorso, 1#1Q%

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    nous pleurions tous sur es pauvres pa"sans *ui faisaient des lamentations fun0/res @ riresQ% Et aufond, :'tudiais leurs f)tes en me disant 2 B Pour*uoi ne produisent3ils pas au lieu de onsommer 5 lors *ue faire la f)te, 'est tr0s agra/le @ 7'ai ainsi retrouv ette dimension du plaisir *ui mesem/le importante% Cela renvoie peut3)tre mon propre vu, mais, trangement, apr0s avoir rite livre, :'ai douvert *ue, dans le m)me temps, /on nom/re d'intelletuels travaillaient, eux aussi,sur les rapports entre fantaisie et irrationalit, imaginaire et rationnel% 7'ai fait e travail dans la plus

    totale solitude et une fois fini, :e me suis aper-ue *ue non seulement toi3m)me avais fait le m)meparours mais *u'aussi /ien en Italie *u' l'tranger, on se proposait de reonsidrer notre ulturepositiviste%%%

    4 G% C% 2 le as italienest diffrent de elui des autres pa"s europens 5

    # C% G% 2 En effet% ve le magntisme et, ensuite, ave le spiritisme, on est onfront desphnom0nes ulturels ur/ains non limits aux lasses populaires et *ui, d'autre part, ont unediffusion europenne, ou extra3europenne pour le spiritisme% Cette situation n'est pas neuve

    puis*ue ertaines formations ulturelles ont onnu une telle diffusion% ;ne srie de prati*uesmagio3religieuses, par exemple, a t diffuse dans le monde entier par les missionnaires% Ce *uiest nouveau, ii, e sont les anaux de ommuniation, du fait d'une plus grande extension de laulture rite, de la prsene tr0s importante du :ournal et des proessus de B dmoratisation dela ulture% &a omparaison internationale, *ui reste faire, devrait notamment montrer ommentragissent les diverses nations ou rgions, ompte tenu de leurs propres spifiits ulturelles% Parexemple, il n'" a pas, en Italie, de prati*ues de gurison spirite ompara/les elles *ue tuexamines dans &e Couvent des fous, et ii, le spiritisme n'a :amais eu la dimension B gauhiste *ue +aniel (a/re trouve en &anguedo%

    #6 G% C% 2 Pourtant les alinistes italiens sont aussi des soialistes, omme en (rane 5

    # C% G% 2

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    struture, siene et fition, disours su/:etif et disours *ui se veut o/:etif% Et 'est l un autrepoint sur le*uel :e m'aper-ois *ue :e ne suis plus seule travailler, ave les tentatives du roman pourapparaAtre omme siene et elles de la siene pour se faire roman% Cette radiale division, dontnous souffrons mais *ui est aussi un hritage au*uel nous ne pouvons renoner, fait partie, :e rois,de nos atuelles rises pistmologi*ues%

    #K G% C% 2 &'tude des rapports entre religion et mdeine, pour dfinir la modernit, te onduitau:ourd'hui explorer un autre phnom0ne 2 le santuaire moderne tel *u'il est invent &ourdes ettel *ue l'on peut enore l'o/server%

    #M C% G% 2 &'in*uitude de la fin du si0le dernier est, en effet, tr0s prohe de elle *ui se manifeste,au:ourd'hui, travers le retour de l'irrationnel et la tentative du atholiisme pour redevenir uneinstane dominante, m)me si, durant es derni0res annes, le sientisme n'a pas onstitu l'idologiedes lasses dominantes omme il l'avait fait au si0le dernier% Ce n'est pas un hasard si l'on parle,au:ourd'hui, de rise de la pense laU*ue et si le pape relane les th0mes du mirale et du dia/le%nal"ser &ourdes dans e ontexte 'est, au fond, poser la m)me *uestion *ue posait d: Wolalors*u'il portait sur &ourdes un regard d'ethnologue#% Pour*uoi, dans une soit moderne *ui

    devrait )tre laU*ue, trouve3t3on un santuaire de ration rente m)lant des s"m/oles aussi aniens*ue eux de l'eau et de la grotte des formes organisationnelles tout fait modernes 2 les trains, lesh=tels, les /ranardiers, les assoiations nationales et internationales, ainsi *ue des /iens deonsommation sars *ui sont des B artiles de Paris , 'est33dire *ui mar*uent la fin del'artisanat 5 Wola est extr)mement sensi/le au paradoxe *ue onstitue &ourdes% Dien sTr,au:ourd'hui, on ne peut plus lire &ourdes en termes d'atavisme et de ontradition de la modernit,on doit l'interprter omme phnom0ne de modernit et 'est ela, prisment, *ui me fasine%Juatre millions de p0lerins par an, *u'est3e *ue ela signifie 5 Pour*uoi les anthropologues vont3ilsen fri*ue et ne vont3ils pas &ourdes 5

    # G% C% 2 Pare *u' &ourdes on tom/e malade @

    K$ C% G% 2 7e me suis demand *uelle est la raison de e grand malaise *ue l'on prouve &ourdes et:'ai mis du temps omprendre% 7e pensais tout d'a/ord *u'il tait dT la visi/ilit de la maladie%&'effiait de &ourdes serait de rendre visi/les une maladie et une mort *ui, dans notre soit,sont ahes% ais les signes de ette visi/ilit appartiennent des ordres diffrents% &e malade eststigmatis en tant *ue malade, 'est la souffrane mdialise *ui arrive &ourdes% ais on vientaussi en tant *ue p0lerin au*uel l'Rglise dit 2 B Oon /onheur ne sera pas sur ette terre , et *ui sevoit proposer le mod0le de Dernadette *ui n'a :amais guri% +e plus, depuis les annes 4$, les orpsdes malades sont disposs en roix omme les orps sains des athl0tes dans les grandes liturgiessportives% &e malaise ne vient pas seulement de la visi/ilit de la maladie mais de la superposition

    de es deux t"pes de signes% Ce *ui m'intresse, 'est don de relire les signes des lieux et duterritoire de &ourdes, les signes des p0lerins omme mar*ues d'ethniit et les signes des orpssouffrants imposs par le dou/le pouvoir de la mdeine et de l'Rglise, puis*ue &ourdes est le seulsantuaire moderne *ui omporte un /ureau mdial de onstatation%

    K1 &'autre *uestion *ui m'intresse, 'est la releture du roman de Wola omme premier doumentethnographi*ue important sur &ourdes, l'anal"se des prods exprimentaux *u'il utilise pourtransformer les figures relles de mirauls en personnages de roman *ui doivent mettre envidene la pro/lmati*ue du mirale telle *ue Wola la dfinit apr0s avoir lu &a foi *ui gurit deCharot et sans doute aussi la Ps"hologie des foules de &e Don% Wola fait une s"nth0se tr0soriginale des th0ses de Charot et de &e Don pour les appli*uer aux gurisons mirauleuses 2 'est le

    souffle de vie des foules *ui, dans ertains as, produirait le mirale, alors *ue he9 Charot la foiest tou:ours une expriene individuelle et *ue pour &e Don les foules ne sont pas gurisseuses%+'o> la troisi0me *uestion *ui me proupe 2 l'importane en (rane du d/at sur le mirale, de la

  • 5/20/2018 Entretien Entre Clara Gallini Et Giordana Charuty - Terrain 12 - Avril 1989 - slide...

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    fin du xixe si0le la Premi0re Guerre mondiale, d/at ontemporain de elui sur le spiritisme et*ui met en s0ne les m)mes protagonistes%

    K G% C% 2 &ourdes, Wola est frapp par la prodution en srie des o/:ets pieux *ui se sontrpandus, partir des annes 1MK$, dans tout le monde atholi*ue et *ui, leur tour, produisent desmirales% C'est l une dimension du santuaire moderne *ui re:oint un autre aspet de tes

    proupations atuelles 2 les dimensions m"thi*ues et rituelles de la ulture de masse%

    K6 C% G% 2 En Italie, la ulture de masse n'est tudie *ue par les soiologues de la ommuniation,or il me sem/le important d'en faire une leture anthropologi*ue% +'o> la onstitution d'une *uipe*ui, s'interrogeant sur l'image de l'autre dans les mdias, anal"se les images de l' nous onfions une partie de nous3m)me des images *ui

    peuvent ventuellement )tre le support d'une ativit magi*ue, nous onfions notre ommuniationorale un mo"en, le tlphone, *ui porte notre voix de plus en plus loin, mais *ui fait disparaAtre leorps% lors :e me demande de plus en plus o> est notre orps, entre la photographie et letlphone @

    K4 . Pu/li en 1MM par les ditions Ferdier, 11$ &agrasse%

    /!0l!ogra%!e

    /!0l!ogra%!e de, %r!nc!%au. ourage, de "lara #all!n!

    I rituali dell'rgia, Padoue, CE+, 1#K%

    Oradution fran-aise par G% Charut" et % FalensiQ 2 &a danse de l'rgia, Paris, Ferdier,1MM% Protesta e integra9ione nella Homa antia, Dari, 1K$% Il onsumo del saro% (este lunghe di !ardegna, Dari, &ater9a, 1K1% Il referendum sul divor9io in !ardegna ave &ua PinnaQ, Cagliari, E+E!, 1K4% Oradi9ioni sarde e miti d'oggi% +inamihe ulturali e sontri di lasse% Cagliari, E+E!, 1KK% +iario di un parroo di villaggio% &otte di potere e tenihe del onsenso in una ommunit

    sarda, Cagliari, E+E!, 1KM% Intervista a aria, Palerme, !ellerio, 1M1% &a sonnam/ula meravigliosa% agnetismo e ipnotismo nell'

  • 5/20/2018 Entretien Entre Clara Gallini Et Giordana Charuty - Terrain 12 - Avril 1989 - slide...

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    Prparation de &a riera folloria 2 Ernesto +e artino% &a riera e i suoi perorsi, nY 16,avril 1M#%

    /!0l!ogra%!e d'Erne,to De art!no Il mondo magio, Ourin, 1M% orte e pianto rituale nel mondo antio% +al lamento pagano al pianto di aria, Ourin,

    Einaudi, 14M% !ud e magia, ilan, (eltrinelli, 14% Oradution fran-aise par C% PonetQ 2 !ud et magie,

    Paris, Gallimard, 1#6% (urore, sim/olo, valore, ilan, II !aggiatore, 1#1% &a terra del rimorso, ilan, II !aggiatore, 1#1% Oradution fran-aise par C% PonetQ 2 &a

    terre du remords, Paris, Gallimard, 1##% &a fine del mondo, Ourin, Einaudi, 1KK% Introdution de Clara Gallini%

    3ote,

    1% Paris, aspero, 1# pour la tradution fran-aise% Edition italienne 2 ovimenti religiosi di&i/ert e di salve99a dei popoli oppressi, ilan, (eltrinelli, 1#$%

    % !oiologue *ui s'est intress aux transformations de la famille italienne% pu/li 2 &afamiglia eslusiva% Parentela e lientelismo in !ardegna, Dari, &ater9a, 1K1 et enolla/oration ave Clata Gallini 2 Il referendum sul divor9io in !ardegna, Cagliari, E+E!,1K4%

    6% !"ndrome toxi*ue produit par la morsure d'une araigne venimeuse, le &atrodetustredeimguttatus%

    % &a musi*ue et la transe, 1M$% Es*uisse d'une thorie gnrale des relations de la musi*ue et

    de la possession, Paris, Gallimard%4% ar !oriano, 1M1% &a !emaine de la Com0te, Paris, !to, B Grands su:ets %#% Emile Wola, 1M% &ourdes%

    Pour iter et artile

    R4rence %a%!erGallini C% Z G% Charut", 1M, B &ethnologie italienne2 un itinraire , Oerrain, nY 1, pp% 11$31%

    Hfrene letroni*ueClara Gallini, B &'ethnologie italienne 2 un itinraire , Oerrain [En ligne\, 1 ] avril 1M, mis enligne le 11 avril $$4, onsult le 1M aoTt $1% ;H& 2 http2^^terrain%revues%org^666K L +