1
396 J Chir 2008,145, N°4 • © 2008. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Revue de Presse C. Mariette 1 , S. Benoist 2 , Ph. De Mestier 3 1. Service de chirurgie digestive et générale, hôpital Claude-Huriez – Lille. e-mail : [email protected] 2. Service de chirurgie digestive et oncologique, hôpital Ambroise-Paré – Boulogne. e-mail : [email protected] 3. Unité de chirurgie viscérale, clinique Saint-Jean de Dieu – Paris. e-mail : [email protected] Essai contrôlé comparant la fermeture précoce à la fermeture tardive des iléostomies de protection réalisées pour anastomose basse après proctectomie A. Alves, Y. Panis, B. Lelong, B. Dousset, S. Benoist, E. Vicaut Randomized clinical trial of early versus delayed tem- porary stoma closure after proctectomy. Br J Surg 2008;95:693-698. Il a été montré qu’après une proctectomie avec anastomose colo- anale ou colorectale basse, la réalisation d’une iléostomie diminuait significativement le taux de fistules symptomatiques [1]. Cette il- éostomie est généralement fermée 2 mois après l’intervention. Les auteurs ont évalué la faisabilité de la fermeture précoce à J8 de cette iléostomie par une étude contrôlée réalisée dans 4 centres français. Ainsi, 253 malades ayant eu une iléostomie en amont d’une anastomose iléo-anale, colo-anale ou colorectale basse réa- lisée pour une pathologie colorectale bénigne ou maligne on été inclus au moment de la proctectomie. Un lavement par la stomie était réalisé à J7 afin de détecter une fistule asymptomatique. À J7, parmi les 253 malades inclus, 186 (73 %), qui n’avaient ni fistule radiologique ni complication postopératoire, ont été répartis par tirage au sort dans 2 groupes : un groupe (n = 95) où l’iléostomie était fermée à J8 et un groupe (n = 91) où l’iléostomie était fermée à J60. Le critère de jugement principal était la morbidité à 90 jours. À J90, la mortalité était nulle et la morbidité était de 31 % après fermeture précoce et de 38 % après fermeture tardive de l’iléostomie (ns). Le taux de complications chirurgicales était de 15 % dans les 2 groupes et le taux de complications médicales était de 5 % après fermeture précoce et de 15 % après fermeture tardive de l’iléostomie (p = 0,02). Le taux de réintervention était de 8 % dans les 2 groupes. Il y avait significativement plus d’abcès de paroi après fermeture précoce (19 % vs 5 % ; p = 0,007). À l’in- verse, il y avait significativement plus d’épisodes occlusifs après fer- meture tardive (16 % vs 3 % ; p = 0,002). La durée médiane d’hos- pitalisation pour l’ensemble de la procédure était de 16 jours après fermeture précoce et de 18 jours après fermeture tardive de l’il- éostomie (p = 0,01). À 1 an, la qualité de vie et le résultat fonction- nel étaient comparables dans les 2 groupes. Les auteurs concluent que la fermeture précoce de l’iléostomie est faisable chez des malades sélectionnés et qu’elle a des avanta- ges et des inconvénients qui doivent être discutés avec le malade. Commentaires 1) Il s’agit de la première étude contrôlée qui compare les résultats postopératoires des fermetures précoce vs tardive de l’iléostomie laté- rale de protection après proctectomie. Elle confirme deux précé- dentes études prospectives qui avaient montré la faisabilité de cette fermeture précoce [2, 3]. 2) Comme le soulignent les auteurs, la fermeture précoce de l’iléos- tomie est uniquement faisable dans une population très sélectionnée. Dans cette étude, elle a en effet été possible que chez un peu moins des 3/4 des malades éligibles initialement inclus. Il aurait été intéres- sant que les auteurs mettent en évidence des facteurs prédictifs de fai- sabilité de la fermeture précoce afin d’en affiner ses indications. 3) La fermeture précoce de l’iléostomie ne permet finalement de réduire que très modérément la durée d’hospitalisation. Ceci illus- tre que la réalisation de la proctectomie puis de la fermeture de l’iléostomie dans la même hospitalisation est assez lourde et que les malades ont un peu de mal à se remettre des deux interventions successives. Mots-clés : Rectum. Prophylaxie. Cancer. Anastomose basse. Iléostomie. Essai randomisé. 1. Ann Surg 2007;246:207-214. 2. Dis Colon Rectum 2003;46:1680-1684. 3. Eur J Surg 2002;168:713-715. Faisabilité et résultats opératoires des résections pancréatiques pour tumeur sous cœlioscopie A. Sa Cunha, A. Rault, C. Beau, C. Laurent, D. Collet, B. Mas- son A single-institution prospective study of laparoscopic pancreatic resection. Arch Surg 2008;143:289-295. La voie d’abord cœlioscopique est encore peu développée pour la chirurgie du pancréas. Les auteurs rapportent leur expérience de 60 résections pancréatiques réalisées par cœlioscopie pour de tumeurs présumées bénignes (n = 56) ou des tumeurs malignes limitées (n = 4), d’une taille moyenne de 37 mm. Dans tous les cas, l’intervention commençait par une échographie peropéra- toire pour repérer la tumeur et déterminer la ligne de section pancréatique. Une fistule pancréatique était définie par un taux d’amylase dans le liquide de drainage 5 fois supérieur au taux sérique à partir de J5 ou par l’existence d’une collection au scan- ner au contact d’une anastomose ou d’une tranche pancréatique. Le taux de conversion était de 20 %. Une conversion en lapa- rotomie était décidée dès le premier temps d’exploration chez 5 malades. Pour les 55 autres malades, il était réalisé une énu- cléation dans 15 cas, une pancréatectomie gauche dans 25 cas, une splénopancréatectomie gauche (SPG) dans 6 cas, une pan- créatectomie médiane dans 6 cas, une duodénopancréatectomie céphalique dans 1 cas et une pancréatectomie totale dans 1 cas. Une conversion était nécessaire chez 7 de ces 55 malades (13 %), dans la majorité des cas pour une hémorragie peropératoire. Le taux de mortalité était de 1,6 % et le taux de morbidité était de 36 %. Quinze malades (25 %) ont eu une fistule pancréatique qui était symptomatique dans la moitié des cas. Le taux de fistule était de 6 % en cas d’énucléation, de 20 % en cas de pancréa- tectomie gauche, de 45 % en cas de SPG et de 83 % en cas de pancréatectomie médiane. Le taux de réintervention était de 8 %. En cas de résection pancréatique réalisée entièrement par cœlioscopie, la durée médiane d’hospitalisation était de 12,7 jours. En analyse multivariée, les 2 facteurs de risque de fistule pancréatique était la consistance du pancréas (p = 0,02) et la réalisation d’une anastomose pancréatique (p = 0,002). Les auteurs concluent qu’en cas de tumeur bénigne du pancréas, la résection pancréatique est faisable sous cœlioscopie avec une mor- bidité acceptable.

Essai contrôlé comparant la fermeture précoce à la fermeture tardive des iléostomies de protection réalisées pour anastomose basse après proctectomie

  • Upload
    a-alves

  • View
    212

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Essai contrôlé comparant la fermeture précoce à la fermeture tardive des iléostomies de protection réalisées pour anastomose basse après proctectomie

396

J Chir 2008,145, N°4 • © 2008. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Revue de Presse

C. Mariette

1

, S. Benoist

2

, Ph. De Mestier

3

1. Service de chirurgie digestive et générale, hôpital Claude-Huriez – Lille.e-mail : [email protected]. Service de chirurgie digestive et oncologique, hôpital Ambroise-Paré – Boulogne.e-mail : [email protected]. Unité de chirurgie viscérale, clinique Saint-Jean de Dieu – Paris.e-mail : [email protected]

Essai contrôlé comparant la fermeture précoce à la fermeture tardive des iléostomies de protection réalisées pour anastomose basse après proctectomie

A. Alves, Y. Panis, B. Lelong, B. Dousset, S. Benoist, E. Vicaut

Randomized clinical trial of early versus delayed tem-porary stoma closure after proctectomy.

Br J Surg 2008;95:693-698.

Il a été montré qu’après une proctectomie avec anastomose colo-anale ou colorectale basse, la réalisation d’une iléostomie diminuaitsignificativement le taux de fistules symptomatiques [1]. Cette il-éostomie est généralement fermée 2 mois après l’intervention.

Les auteurs ont évalué la faisabilité de la fermeture précoce à J8de cette iléostomie par une étude contrôlée réalisée dans 4 centresfrançais. Ainsi, 253 malades ayant eu une iléostomie en amontd’une anastomose iléo-anale, colo-anale ou colorectale basse réa-lisée pour une pathologie colorectale bénigne ou maligne on étéinclus au moment de la proctectomie. Un lavement par la stomieétait réalisé à J7 afin de détecter une fistule asymptomatique. À J7,parmi les 253 malades inclus, 186 (73 %), qui n’avaient ni fistuleradiologique ni complication postopératoire, ont été répartis partirage au sort dans 2 groupes : un groupe (n = 95) où l’iléostomieétait fermée à J8 et un groupe (n = 91) où l’iléostomie était ferméeà J60. Le critère de jugement principal était la morbidité à90 jours. À J90, la mortalité était nulle et la morbidité était de31 % après fermeture précoce et de 38 % après fermeture tardivede l’iléostomie (ns). Le taux de complications chirurgicales étaitde 15 % dans les 2 groupes et le taux de complications médicalesétait de 5 % après fermeture précoce et de 15 % après fermeturetardive de l’iléostomie (p = 0,02). Le taux de réintervention étaitde 8 % dans les 2 groupes. Il y avait significativement plus d’abcès

de paroi après fermeture précoce (19 % vs 5 % ; p = 0,007). À l’in-verse, il y avait significativement plus d’épisodes occlusifs après fer-meture tardive (16 % vs 3 % ; p = 0,002). La durée médiane d’hos-pitalisation pour l’ensemble de la procédure était de 16 jours aprèsfermeture précoce et de 18 jours après fermeture tardive de l’il-éostomie (p = 0,01). À 1 an, la qualité de vie et le résultat fonction-nel étaient comparables dans les 2 groupes.Les auteurs concluent que la fermeture précoce de l’iléostomieest faisable chez des malades sélectionnés et qu’elle a des avanta-ges et des inconvénients qui doivent être discutés avec le malade.

Commentaires

1) Il s’agit de la première étude contrôlée qui compare les résultatspostopératoires des fermetures précoce

vs

tardive de l’iléostomie laté-rale de protection après proctectomie. Elle confirme deux précé-dentes études prospectives qui avaient montré la faisabilité de cettefermeture précoce [2, 3].2) Comme le soulignent les auteurs, la fermeture précoce de l’iléos-tomie est uniquement faisable dans une population très sélectionnée.Dans cette étude, elle a en effet été possible que chez un peu moinsdes 3/4 des malades éligibles initialement inclus. Il aurait été intéres-sant que les auteurs mettent en évidence des facteurs prédictifs de fai-sabilité de la fermeture précoce afin d’en affiner ses indications.3) La fermeture précoce de l’iléostomie ne permet finalement deréduire que très modérément la durée d’hospitalisation. Ceci illus-tre que la réalisation de la proctectomie puis de la fermeture del’iléostomie dans la même hospitalisation est assez lourde et que lesmalades ont un peu de mal à se remettre des deux interventionssuccessives.

Mots-clés :

Rectum. Prophylaxie. Cancer. Anastomose basse. Iléostomie.Essai randomisé.

1. Ann Surg 2007;246:207-214.2. Dis Colon Rectum 2003;46:1680-1684.3. Eur J Surg 2002;168:713-715.

Faisabilité et résultats opératoires des résections pancréatiques pour tumeur sous cœlioscopie

A. Sa Cunha, A. Rault, C. Beau, C. Laurent, D. Collet, B. Mas-son

A single-institution prospective study of laparoscopicpancreatic resection.

Arch Surg 2008;143:289-295.

La voie d’abord cœlioscopique est encore peu développée pourla chirurgie du pancréas. Les auteurs rapportent leur expériencede 60 résections pancréatiques réalisées par cœlioscopie pour detumeurs présumées bénignes (n = 56) ou des tumeurs maligneslimitées (n = 4), d’une taille moyenne de 37 mm. Dans tous lescas, l’intervention commençait par une échographie peropéra-toire pour repérer la tumeur et déterminer la ligne de sectionpancréatique. Une fistule pancréatique était définie par un tauxd’amylase dans le liquide de drainage 5 fois supérieur au tauxsérique à partir de J5 ou par l’existence d’une collection au scan-ner au contact d’une anastomose ou d’une tranche pancréatique.

Le taux de conversion était de 20 %. Une conversion en lapa-rotomie était décidée dès le premier temps d’exploration chez5 malades. Pour les 55 autres malades, il était réalisé une énu-cléation dans 15 cas, une pancréatectomie gauche dans 25 cas,une splénopancréatectomie gauche (SPG) dans 6 cas, une pan-créatectomie médiane dans 6 cas, une duodénopancréatectomiecéphalique dans 1 cas et une pancréatectomie totale dans 1 cas.Une conversion était nécessaire chez 7 de ces 55 malades (13 %),dans la majorité des cas pour une hémorragie peropératoire. Letaux de mortalité était de 1,6 % et le taux de morbidité était de36 %. Quinze malades (25 %) ont eu une fistule pancréatiquequi était symptomatique dans la moitié des cas. Le taux de fistuleétait de 6 % en cas d’énucléation, de 20 % en cas de pancréa-tectomie gauche, de 45 % en cas de SPG et de 83 % en cas de

pancréatectomie médiane. Le taux de réintervention était de8 %. En cas de résection pancréatique réalisée entièrement parcœlioscopie, la durée médiane d’hospitalisation était de12,7 jours. En analyse multivariée, les 2 facteurs de risque defistule pancréatique était la consistance du pancréas (p = 0,02)et la réalisation d’une anastomose pancréatique (p = 0,002).Les auteurs concluent qu’en cas de tumeur bénigne du pancréas, larésection pancréatique est faisable sous cœlioscopie avec une mor-bidité acceptable.