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Etude d’un tableau n°1 Une œuvre de propagande politique : « Le sacre de Louis XIV » Hyacinthe Rigaud 1701 Ce tableau a été peint par Hyacinthe Rigaud en 1701 pour le petit-fils de Louis XIV, Philippe V devenu roi d’Espagne. Louis XIV a aimé le tableau au point de le garder ! Il s’agit d’une huile sur toile de 2,77 m sur 1,94 m (le Roi mesure environ 2 m sur le tableau, en réalité environ 1,60 m) exposée au musée du Louvre. Tout d’abord accroché dans la chambre du Roi, puis en 1702 dans la salle du trône : la personne du Roi était jugée si présente dans le tableau, que tourner le dos à cette oeuvre était un délit comme tourner le dos au Roi lui-même, ce qui pose le problème du statut de l’image en politique (comme en religion). Ce portrait illustre bien la théorie des deux corps du roi de Kantorowicz. Le corps du Roi n’est pas un corps comme les autres. Il est constitué d’une essence mortelle qui fait du monarque un homme soumis comme chacun au sort commun, la mort. Mais il est fait aussi d’une essence spirituelle, symbolique qui échappe au vieillissement, illustrant ainsi un lien privilégié avec l’au-delà. L’essence mortelle est marquée par le haut du corps. Le roi a alors 64 ans comme en témoigne son visage. Il est atteint à cette époque de maladies de peau, il n’a plus de dents, il est atteint de la goutte (excès d’acide urique). Le contraste avec les jambes qui renvoient à la nature spirituelle du corps du roi est saisissant. Le roi a gardé ses jambes de 20 ans, celles qui ont fait de lui un excellent danseur. Le vieillissement, et, au delà, la mort n’ont pas de prise sur ce corps si particulier. Cette théorie des deux corps du Roi est-elle encore valable à notre époque, celle des présidents ? Les morts de Franco en Espagne, de Trancredo Neves au Brésil, de Mitterrand en France, l’embaumement de Lénine, l’agonie planétaire de Jean Paul II et l’état actuel de Fidel Castro tendent à conclure qu’il existe un rapport complexe entre la mort et le pouvoir.

Etude d’un tableau n°1 Une œuvre de propagande politique : «  Le sacre de Louis XIV  »

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Etude d’un tableau n°1 Une œuvre de propagande politique : «  Le sacre de Louis XIV  » Hyacinthe Rigaud 1701. Ce tableau a été peint par Hyacinthe Rigaud en 1701 pour le petit-fils de Louis XIV, Philippe V devenu roi d’Espagne. Louis XIV a aimé le tableau au point de le garder ! - PowerPoint PPT Presentation

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Etude d’un tableau n°1

Une œuvre de propagande politique :« Le sacre de Louis XIV »

Hyacinthe Rigaud 1701

Ce tableau a été peint par Hyacinthe Rigaud en 1701 pour le petit-fils de Louis XIV, Philippe V devenu roi d’Espagne. Louis XIV a aimé le tableau au point de le garder !

Il s’agit d’une huile sur toile de 2,77 m sur 1,94 m (le Roi mesure environ 2 m sur le tableau, en réalité environ 1,60 m) exposée au musée du Louvre.

Tout d’abord accroché dans la chambre du Roi, puis en 1702 dans la salle du trône : la personne du Roi était jugée si présente dans le tableau, que tourner le dos à cette oeuvre était un délit comme tourner le dos au Roi lui-même, ce qui pose le problème du statut de l’image en politique (comme en religion).

Ce portrait illustre bien la théorie des deux corps du roi de Kantorowicz. Le corps du Roi n’est pas un corps comme les autres. Il est constitué d’une essence mortelle qui fait du monarque un homme soumis comme chacun au sort commun, la mort. Mais il est fait aussi d’une essence spirituelle, symbolique qui échappe au vieillissement, illustrant ainsi un lien privilégié avec l’au-delà.

L’essence mortelle est marquée par le haut du corps. Le roi a alors 64 ans comme en témoigne son visage. Il est atteint à cette époque de maladies de peau, il n’a plus de dents, il est atteint de la goutte (excès d’acide urique). Le contraste avec les jambes qui renvoient à la nature spirituelle du corps du roi est saisissant. Le roi a gardé ses jambes de 20 ans, celles qui ont fait de lui un excellent danseur. Le vieillissement, et, au delà, la mort n’ont pas de prise sur ce corps si particulier.

Cette théorie des deux corps du Roi est-elle encore valable à notre époque, celle des présidents ? Les morts de Franco en Espagne, de Trancredo Neves au Brésil, de Mitterrand en France, l’embaumement de Lénine, l’agonie planétaire de Jean Paul II et l’état actuel de Fidel Castro tendent à conclure qu’il existe un rapport complexe entre la mort et le pouvoir.

Dimension spirituelle

du corps du RoiLe Trône est à l’arrière plan, car il n’est pas nécessaire pour Louis XIV de s’y asseoir pour affirmer sa majesté.

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Dimension mortelledu corps du Roi

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La pourpre est la couleur du pouvoir puisqu’elle est celle des empereurs romains. C’est sous un grand dais pourpre que le Roi se trouve protégé. L’usage de l’or et de la pourpre sont réglementés à la cour car ce sont les couleurs royales.

Colonne antique, symbolede pouvoir, sur laquelle repose la justice (Thémis).Pourpre + colonne +Justice = Légitimité

La composition du tableau se présente sous la forme d’un triangle, symbole de stabilité.

Le Roi s’appuie sur son sceptre à la manière d’une canne. De façon générale, les « regalia » (attributs de la royauté, de 1 à 5) sont assez malmenées : posées sur un tabouret, en arrière plan … Ceci est à mettre en relation avec la devise de Louis XIV : NEC PLURIBUS IMPAR, devise qui se traduit (difficilement) par « non égal même à plusieurs ».« Incomparable » ou « à nul autre pareil » : le roi n’a nul besoin des symboles royaux pour s’affirmer comme Roi.

Petit, Louis XIV, usa de hauts talons dont la mode s'imposa à Versailles (jusqu'à nos jours !). Le Roi met en valeur ses jambes d'excellent danseur, en montrant un pas de danse (position perpendiculaire des pieds). Des bas blancs soulignent cet aspect physique d'un Roi pourtant âgé. Sa perruque vient aussi compenser sa petite taille.

L'épée cruciforme (surnommée « Joyeuse », réplique de l’épée de Charlemagne) est au centre de la composition picturale, dégagée, à proximité de la main. Elle est dissuasive. Le Roi, chef des armées, servant la cause catholique, prévient ses opposants qu'il n'hésitera pas à user de la force. C'est également l " ultima ratio regis ", le dernier mot décisif du Roi. L’archevêque de Reims la lui a donnée avec les éperons, lors du sacre. La symbolique du sacre fait du Roi un “miles christi”, un soldat de Dieu.

La couronne : Ce n'est pas la sienne mais celle d'Henri IV, le Roi protestant, reliée au sceptre (également d'Henri IV). Posée sur un tabouret, le Roi ne trouve nul besoin de la porter.

Elle affirme la supériorité du Roi sur tout le royaume. Ni l'empereur, ni le Pape n'ont d'autorité sur lui. La couronne est « fermée », comme celle de l’empereur.

La main de justice. Elle symbolise les actions de grâce du Roi catholique.

Le pouce = Dieu

L'index = la raison

Le majeur = la charité

L'annulaire = la Foi

L'auriculaire = la Pénitence

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3

2

1

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La fleur de lys est l’emblème de la monarchie française. Cet attribut apparaîtentre les XIIème et XIIIème siècles. Elle est aussi l’emblème de Vierge Marie.C’est aussi à cette époque que l’on attribue le bleu à la vierge (ciel ?), et la monarchiefrançaise placée sous sa protection reprend donc cette couleur (et non pas le blanc comme on le croit souvent).Le manteau doublé d’hermine n’est pas celui du sacre. Cette fourrure symbolise l’autorité de l’Etat : on la retrouve de nos jours dans les toges des hauts magistrats.

Déesse Thémis fille d'Ouranos et de Gaïa, prodiguant à Zeus d'avisés conseils. Allégorie de la Justice (la balance dans sa main), elle incarne l'ordre établi (l'épée dans l'autre main). La bonne justice du Roi est une des bases de sa légitimité.