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N°076 Du cinéma politique contemporain français Costa-Gavras est le père, la pierre angulaire et la légende. Derrière sa caméra acide, il n’a épargné aucun système et les a toujours ramené à leurs contradictions : le fascisme dans Z, le communisme dans L’Aveu, Vichy dans Section spéciale, la démocratie à l’amé- ricaine dans Missing... Ses films puissants ne cédent jamais ni à l’intellectualisme, ni au manichéisme propre au regard partisan. Sauf que voilà, le temps n’est plus aux rêves politiques et Costa-Gavras le sait on ne peut mieux. Ainsi dans son nouveau film, Le Capital , il s’attaque au nouvel ennemi mondial, celui-là même qui a vidé la politique de sa substance : la finance. Il nous conte ici les premiers pas de Marc Tourneuil, trader ambitieux dans son poste de président fraîchement acquis à la tête d’une des banques les plus influentes d’Europe. C’est donc une arrivée dans un monde hostile où hommes de main comme plus proches collaborateurs (actionnaires français et américains) ne cherchent qu’à provoquer la chute de Tourneuil, histoire de casser ses dents longues. Le moteur de cette ruche semble clairement identifiable : l’argent, dont on ne verra pourtant jamais la couleur. L’argent dont on ne sait plus que faire, qui n’est plus qu’un alibi pour rentrer dans ce jeu géant de conquête du monde. Mi- Risk mi-Monopoly, tout n’est qu’un jeu, tout est déconnecté de la réalité et rien n’a fina- lement de sens ou d’importance en dehors de l’adrénaline que provoquent le gain ou la perte. Loin d’être dénué d’intelligence, d’humanité ou de lucidité, Marc Tourneuil, bluffant Gad Elmaleh dans ce rôle noir tout en nuances cyniques si inhabituel, ne cherche lui qu’une chose : être le maître de ce jeu… Il n’est pas de gentils dans ce film, ni de méchants, seulement des gens conscients de la réalité dégueulasse qui dirige le monde. Aucune morale donc, mais un simple constat d’une course vers l’abîme dans laquelle les puissants se lancent avec allégresse. Tout cela rappelle un autre grand cinéaste politique français, d’un autre temps celui-ci : Jean Renoir qui, dans La Règle du Jeu (1939), donnait déjà les clefs de com- préhension de notre modernité : « Le plus terrible dans ce monde, c’est que chacun à ses raisons. Nous dansons au-dessus d’un volcan. » orgnaisée par le collectif CAC42* visant notamment à la mise en place de «Tribunaux citoyens de la Dette publique» (où le système bancaire européen f igure parmi les prévenus)... * Collectif pour un audit Citoyen de la dette (AT- TAC, Solidaires, ADECR, Front de Gauche, NPA...) (Tarifs habituels - prévente à partir du 10/11)

Gazette Cinéma Le Méliès n°76 - Novembre 2012

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Gazette de Novembre - cinéma le Méliès - Saint-Etienne, Loire

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Du cinéma politique contemporain français Costa-Gavras est le père, la pierre angulaire et la légende. Derrière sa caméra acide, il n’a épargné aucun système et les a toujours ramené à leurs contradictions : le fascisme dans Z, le communisme dans L’Aveu, Vichy dans Section spéciale, la démocratie à l’amé-ricaine dans Missing... Ses films puissants ne cédent jamais ni à l’intellectualisme, ni au manichéisme propre au regard partisan. Sauf que voilà, le temps n’est plus aux rêves politiques et Costa-Gavras le sait on ne peut mieux. Ainsi dans son nouveau film, Le Capital, il s’attaque au nouvel ennemi mondial, celui-là même qui a vidé la politique de sa substance : la finance.Il nous conte ici les premiers pas de Marc Tourneuil, trader ambitieux dans son poste de président fraîchement acquis à la tête d’une des banques les plus influentes d’Europe. C’est donc une arrivée dans un

monde hostile où hommes de main comme plus proches collaborateurs (actionnaires français et américains) ne cherchent qu’à provoquer la chute de Tourneuil, histoire de casser ses dents longues. Le moteur de cette ruche semble clairement identifiable : l’argent, dont on ne verra pourtant jamais la couleur. L’argent dont on ne sait plus que faire, qui n’est plus qu’un alibi pour rentrer dans ce jeu géant de conquête du monde. Mi-Risk mi-Monopoly, tout n’est qu’un jeu, tout est déconnecté de la réalité et rien n’a fina-lement de sens ou d’importance en dehors de l’adrénaline que provoquent le gain ou la perte. Loin d’être dénué d’intelligence, d’humanité ou de lucidité, Marc Tourneuil, bluffant Gad Elmaleh dans ce rôle noir tout en nuances cyniques si inhabituel, ne cherche lui qu’une chose : être le maître de ce jeu…Il n’est pas de gentils dans ce film, ni de méchants, seulement des gens conscients

de la réalité dégueulasse qui dirige le monde. Aucune morale donc, mais un simple constat d’une course vers l’abîme dans laquelle les puissants se lancent avec allégresse. Tout cela rappelle un autre grand cinéaste politique français, d’un autre temps celui-ci : Jean Renoir qui, dans La Règle du Jeu (1939), donnait déjà les clefs de com-préhension de notre modernité : « Le plus terrible dans ce monde, c’est que chacun à ses raisons. Nous dansons au-dessus d’un volcan. »

orgnaisée par le collectif CAC42*visant notamment à la mise en place de «Tribunaux citoyens de la Dette publique» (où le système

bancaire européen f igure parmi les prévenus)...* Collectif pour un audit Citoyen de la dette (AT-TAC, Solidaires, ADECR, Front de Gauche, NPA...)

(Tarifs habituels - prévente à partir du 10/11)

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www.musee-mine.saint-etienne.fr

Ce projet est réalisé dans le cadre du dispositif Culture(s) de ville

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Sommaire

Votre pub dans la gazette :Contactez Gisèle Grataloup au 04 77 32 32 01 ou via [email protected] : Le Méliès concept graphique : Corne Bleue impression: IGPM Tirage : 27 000 exemplaires

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Après dix ans d’absence, Jacques ressurgit dans la vie de Mado, désormais mariée et mère de Paul, un garçon de sept ans. La relation de l’ancien couple est entachée du deuil d’un enfant. Alors que Mado a refait sa vie, Jacques en paraît incapable et lorsqu’il rencontre Paul, c’est un choc. La complicité de plus en plus marquée entre Jacques et Paul finit par déranger Mado qui leur interdit de se revoir... Sandrine Bonnaire nous avait déjà bouleversés avec son documentaire consacré à sa sœur autiste Elle s’appelait Sabine, elle parvient à nouveau, magistralement, à nous bouleverser avec ce premier long-métrage de fiction, inspiré d’une histoire vraie. Entre drame familial et thriller, l’ex égérie de Maurice Pialat met des images sur l’indicible douleur de la perte d’un enfant et donne sans doute à William Hurt et Alexandra Lamy leur meilleur rôle.

Venez (re)découvrir le célèbre opéra de Verdi comme vous ne l’avez jamais vu ! Ce grand petit film documentaire est bien plus captivant, bien plus exaltant, et trans-met bien mieux la grandeur et la magie de l’opéra que n’importe quelle retransmission en direct live du Palais Garnier ou de la Scala de Milan à 25l la place. Printemps 2011, Jean François Sivadier met en scène La Traviata, à Aix-en-Provence, sous la di-rection de Louis Langrée. Natalie Dessay est Violetta. Pendant deux mois, des salles de répétition aux coulisses du Théâtre de l’Archevêché, une équipe de cinéma a suivi leur travail au plus près. Comment devient-on La Traviata ? Comment l’histoire renaît-elle sur un plateau de théâtre ? Comment l’émotion renaît-elle sous la baguette du chef, entre les rangs de l’orchestre et du chœur ? Comment se reproduit et se renou-vèle la magie de l’opéra ? Comment s’opère l’incarnation ? Chacun d’entre nous a un jour rendez-vous avec cette femme, cette œuvre, ce mythe : Traviata.

Projections de films français en version sous-titrée ouvertes à tous et accessibles aux personnes sourdes et malentendantes. Séances signalées dans les grilles horaires par le visuel

Les films

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Le 24 octobre 2001, dans la petite ville de Conroe au Texas, Jason Burkett et Michael Perry, en quête d’une voiture à voler, abattent de sang-froid Sandra Stotler, son fils Adam et l’ami de ce dernier, Jeremy. Retrouvés puis arrêtés, les deux jeunes hommes, âgés d’à peine 19 ans, sont condamnés : Burkett à la prison à perpétuité, Perry à la peine capitale.Le 1er juillet 2010, le cinéaste Werner Herzog interviewe Michael Perry, huit jours avant son exécution. Suite à cette rencontre, il retourne sur les lieux du crime, interroge les enquêteurs, consulte les archives de la police, discute avec les familles des victimes et des criminels, rencontre un ancien bourreau du couloir de la mort. Non pour juger mais pour essayer de comprendre. Au-delà du fait divers, Herzog nous entraîne dans une enquête sur l’Amérique et les profondeurs de l’âme humaine. Le maître Werner Herzog autopsie ici les injustices et les contradictions du système carcéral américain : indispensable à l’heure ou Romney pourrait devancer Obama...

Film français de François Ozon(2012 - 1h45min)

avec Fabrice Luchini, Ernst Umhauer, Kristin Scott Thomas

Un garçon de 16 ans s’immisce dans la maison d’un élève de sa classe, et en fait le récit dans ses rédactions à son professeur de français. Ce dernier, face à cet élève doué et différent, reprend goût à l’enseignement, mais cette intrusion va déclencher une série d’événements incontrôlables.

Film américain deBob Goldthwait (2012 - 1h40min - VOST) avec Joel Murray, Tara

Lynne Barr, Melinda Page Hamilton...

Seul, sans boulot, gravement malade, Frank sombre dans la spirale infernale d’une Amérique déshumanisée et cruelle. N’ayant plus rien à perdre, il prend son flingue et assassine les personnes les plus viles et stupides qui croisent son chemin. Bientôt rejoint par Roxy, lycéenne révoltée, c’est le début d’une équipée sauvage, sanglante et grandguignolesque sur les routes de la bêtise made in USA.

Film italien de Paolo Taviani et Vittorio Taviani (2012 - 1h16min - VOST) avec

Cosimo Rega, Salvatore Striano...

Théâtre de la prison de Rebibbia. La re-présentation de Jules César de Shakes-peare s’achève sous les applaudisse-ments. Les lumières s’éteignent sur les acteurs redevenus des détenus. Mais qui sont ces acteurs d’un jour ? Pour quelle faute ont-ils été condamnés et comment ont-ils vécu cette expérience de création artistique en commun ?

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Les films

C’est à la fois un thriller psychologique prenant et une plongée fascinante dans l’absurdité d’un pays miné par ses contradictions, son passé non assumé, une corruption qui gangrène tous les étages de la société. C’est cette réalité que découvre, avec les yeux d’un Candide horrifié, Arash, jeune universitaire qui vit depuis plus de vingt ans en Occident où il a fait ses études et qui est revenu à Chiraz, loin de Téhéran, pour soutenir sa mère tandis que son père se meurt et pour donner des cours à la fac. Arash se heurte à la difficulté d’enseigner dans un pays où l’on ne peut pas utiliser n’importe quel texte. Il affronte aussi une histoire familiale compliquée. Sa mère a quitté depuis longtemps son père qui menait une double vie avec une autre femme et un autre enfant, un père à qui son épouse n’a jamais pardonné la mort de son fils cadet, tombé en martyr lors de la guerre Iran/Irak, poussé par son père à s’engager. Le père est donc mourant et, rongé par le remords, il a décidé de léguer à son ex-femme et à Arash sa fortune, en grande partie constituée de l’indemnité de guerre de son fils défunt. Mais la mère refuse obstinément cet argent souillé selon elle par le sang de son cadet. Arash rencontre alors son demi-frère Jafar, devenu un homme d’affaires redoutable, son épouse Zoreh, ancienne compagne de jeux d’enfance d’Arash et devenue depuis une femme très pieuse, obsédée par la pureté, et enfin son neveu Hamed qui semble vouloir l’aider dans toutes ses démarches et réconcilier l’ensemble de la famille. Mais tous ces gens ont ils de si bonnes intentions envers Arash ? Comment expliquer le meurtre mystérieux du notaire de famille ? Pourquoi Zoreh semble -t-elle détester son fils, nettoyant tout derrière lui de manière compulsive ? Pourquoi Hamed est-il si empressé de l’aider dans ses démarches pour obtenir son passeport qui lui permettra de revenir en France ?

SAISON 2012 / 2013

RENDEZ-VOUS À LA COMÉDIE

création

LE SONGE D’UNE NUIT D’ÉTÉWilliam Shakespeare / Julien Rocha - Cédric Veschambre

du 8 au 15 novembre / 20 h+ répétition publique mardi 30 octobre à 20 h

+ rencontre en bord de scène mercredi 14 novembre à l’issue de la représentation

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www.lacomedie.fr billetterie : 04 77 25 14 14

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Prologue. La porte d’entrée d’un bel appartement parisien que l’on enfonce. Des pompiers surgissent. On comprend à leur moue que l’odeur est insoutenable. Puis il y a une pièce calfeutrée. Une chambre avec un lit et le corps d’une vieille dame endormie pour l’éternité. Morte depuis quand ? Des heures ? Des jours ? Elle est soigneusement vêtue et maquillée avec des pétales de fleurs qui entourent sa tête apaisée. Le mot « Amour » surgit plein cadre sur fond noir. Tout est dit ou presque.On pressent l’humour pince sans rire et l’ironie souvent brutale du cinéaste autrichien poindre déjà le bout de son nez. Et puis non, le film qui commence se veut doux mais intranquille, calme malgré l’odeur de mort qui nous a déjà étreints. Presque rassurant ! Et pourtant nous ne sortirons jamais de cet appartement. Amour est l’histoire d’un vieux couple. Elle est malade, bientôt impotente. Lui fait ce qu’il peut pour gérer et accepter le lent processus de la vie et donc de la mort. Elle, c’est Anne : Emmanuelle Riva, qui n’avait rien vu à Hiroshima. Lui, c’est Georges : Jean-Louis Trintignant que l’on a tous vu chez Truffaut, Bertolucci, Scola, Rohmer, Audiard... Ils forment ici un couple amoureux, élégant, lettré, fin, poli. Dans le grand appartement on écoute des impromptus de Schubert, on lit beaucoup, on reçoit un élève concertiste ou bien leur fille (Isabelle Huppert forcément!) Le film dont on connaît l’irrémédiable fi-nalité, avance avec une précision absolue, un sens du dialogue magnifique d’expressivité et puis finit par questionner, comme souvent chez Haneke et dans tous les grands films en général, notre regard.Le vieil homme ferme la porte pour ne pas exposer aux proches l’état délabré de sa femme. La caméra, elle, enfreint cet interdit et nous place à une distance évidemment troublante. Et puis il y a ces séquences où le vieil homme se perd dans un cauchemar, raconte des souvenirs d’enfance, tente d’attraper un pigeon... Des moments poétiques, romanesques, beaux comme un poème animé. Il arrive qu’une vie trouve une conclusion qui ressemble à son déroulement : celle de Georges et Anne était tissée d’harmonie et d’accords sublimes. C’est magnifique, et curieusement apaisant, comme si la lu-cidité bienveillante de Haneke, en se coulant dans le rythme d’une vie qui s’essouffle, donnait à sentir encore plus fortement combien chaque moment qui reste est précieux. C’est très fort, très beau, et il faut dire et redire qu’Emmanuelle Riva et Jean Louis Trintignant sont impressionnants d’intensité, et que leur histoire avec le cinéma a laissé une telle empreinte qu’elle enrichit d’une émotion encore plus puissante cette histoire de vie et d’amour indestructible. Un chef-d’oeuvre tout simplement !

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Palme d’OrCannes 2012

Projections de films français en version sous-titrée ouvertes à tous et accessibles aux personnes sourdes et malentendantes. Séances signalées dans les grilles horaires par le visuelAmour de Michael Haneke : vendredi 9 nov. à 13h50 / lundi 12 nov. à 16h30 / etc...J’enrage de son absence de Sandrine Bonnaire : ven. 9 à 15h30 / sam. 10 à 11h / etc...

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Les films

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On a envie de dire : enfin il est de retour ! Le Burton d’Edward aux mains d’argent et de L’Étrange Nœl de M. Jack. C’est un peu comme des retrouvailles avec un vieil ami perdu de vue depuis un bail. Comme l’indique son titre, Frankenweenie est une adaptation toute burtonnienne du mythe de Frankenstein. En lieu et place du célèbre docteur, on trouve ici un petit garçon lui aussi prénommé Victor. Il est le fils de M. et Mme Frankenstein et il est lui aussi passionné de science et d’inventions en tous genres. Le meilleur ami de Victor c’est son chien Sparky. Victor est un gamin secret et solitaire, au grand désarroi de son père qui ne voit pas d’un très bon œil le désintérêt apparent de son fils pour les autres enfants. Même si Victor admire en secret Elsa Van Helsing, la jeune fille sombre et mélancolique qui vit juste à coté de chez lui avec son oncle tyrannique, le suffisant maire de la ville, M. Burgermeister. Est-ce pour faire plaisir à son père, est-ce pour briller aux yeux de la belle Elsa ? Toujours est-il qu’il décide d’intégrer l’équipe de baseball. Et c’est alors que le destin va frapper : Victor réussit un coup de maître et expédie la balle au delà des limites du terrain de jeu ; Sparky, qui toute sa vie a couru après des balles, se lance à la poursuite de celle-ci jusque dans la rue, où il se fait écrabouiller par une voiture… Inconsolable après la perte de son fidèle compagnon, Victor va retrouver espoir à l’occasion d’une expérience pendant le cours de science : il va redonner la vie à Sparky, il va le recréer…

6 ans

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Paris, hiver 1885. A l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, le professeur Charcot étudie une maladie mystérieuse : l’hystérie. Augustine, 19 ans, devient son cobaye favori, la vedette de ses démonstrations d’hypnose. D’objet d’étude, elle passe peu à peu à objet de désir… Après Céline Sciamma (Naissance des pieuvres, Tomboy) et Rebecca Zlotowski (Belle épine), voici la nouvelle grande révélation issue de la FEMIS : Alice Winocour, une ex de la section scénario qui n’a pas choisi la facilité pour son premier film. Commencer son œuvre par un film d’époque, peu s’y risqueraient. Le pari est pourtant totalement réussi, le film étant d’une maîtrise confondante, tant d’un point de vue esthétique que scénaristique. La reconstitution historique est parfaite mais ne crée pas d’ombre à la véracité des personnages, incarnés de façon stupéfiante par Soko et Vincent Lindon, tandem où la malade et le soignant intervertiront leurs rôles, l’une guérissant de manière inattendue et l’autre tombant amoureux de sa patiente.

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Rude Boy Story est un documentaire sur le parcours musical atypique du groupe de reggae stéphanois Dub inc. : une bande de potes qui construit sa route hors des sentiers battus, en prônant l’indépendance et l’autoproduc-tion, loin des circuits médiatiques traditionnels.Le réalisateur, qui a suivi le groupe durant trois ans, a autoproduit un film qui met en lumière une aventure délicate et profondément humaine ; celle

projection du film + rencontre avec le réalisateur

Kamir Meridja

qui permet à Dub inc. de préserver ce qui fait d’eux un groupe diffé-rent : leur liberté.+ d’infos : www.rudeboystory.com

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Les films

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1969, Lately, Floride. Ward Jansen, reporter au Miami Times, revient dans sa ville natale, accompagné de son partenaire d’écriture Yardley Acheman. Venus à la demande de Charlotte, femme énigmatique qui entretient une correspondance avec des détenus dans le couloir de la mort, ils vont enquêter sur le cas Hillary Van Wetter, un chasseur d’alligators qui risque d’être exécuté sans preuves concluantes. Persuadés de tenir l’article qui relancera leur carrière, ils sillonnent la région, conduits par Jack Jansen, le jeune frère de Ward, livreur du journal local à ses heures perdues. Fasciné par la troublante Charlotte, Jack les emmène de la prison de Moat County jusqu’aux marais, où les secrets se font de plus en plus lourds. L’enquête avance au cœur de cette Floride moite et écrasante et révèle que, parfois, la poursuite de la vérité peut être source de bien des maux…Après son sensationnel Precious, Lee Daniels est revenu sur la Croisette avec ce Paperboy qui fut le film choc du dernier Festival de Cannes : nos bons vieux critiques ayant été outrés par une scène où Nicole Kidman urine sur le visage de Zac Efron. Est-ce pour ce genre de performances que toute la presse à crié à la résurrection de l’actrice australienne ? Faites-vous votre propre avis…

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Il a 2 ans et demi lorsque ses parents s’installent en banlieue parisienne. Adolescent, il fréquente les cinémas et découvre La Bête humaine de Renoir : un choc. Entre deux métiers alimentaires et des cours de théâtre, il tourne des films en amateur. En 1961, il réalise L’amour existe, un documentaire très remarqué et enchaîne avec un second court-métrage, Janine, de fiction cette fois-ci, d’après un scénario de Claude Berri. Il se consacre ensuite à des documentaires de commande avant de réaliser à 43 ans, L’enfance nue, son premier long-métrage, première pierre d’une oeuvre largement autobiographique.Par l’approche réaliste de son cinéma, il est considéré comme un héritier direct de Jean Renoir. Maurice Pialat reste cependant inclassable. Anticonformiste, exigeant, très critique envers les films de ses contemporains autant qu’envers ses propres films, il tracera jusqu’à sa mort un cinéma sans concession proche de celui de Jean Eustache.On lui doit notamment L’enfance nue(1968), Nous ne vieillirons pas ensemble(1972), La gueule ouverte (1974), Passe ton bac d’abord (1978), Loulou (1980), À nos amours (1983), Police (1985), Sous le soleil de Satan (1987), Van Gogh(1991) et enfin Le Garçu (1995).Sous le Soleil de Satan obtient la Palme d’Or au 40ème Festival de Cannes, en 1987. C’est sous les cris et les sifflets que Maurice Pialat a reçu la prestigieuse récompense. A l’hostilité d’une partie du public qui composait l’assistance de la soirée de clôture, Pialat a répondu, le poing levé : « Vous ne m’aimez pas, et bien moi non plus je ne vous aime pas ! »,réplique devenue maintenant culte.

Focus Maurice Pialat

A nos amours, c’est d’abord une révélation : Sandrine Bonnaire, 15 ans, jeune actrice encore totalement inconnue. Signe particulier, elle porte sur la joue gauche une fossette, une petite dépression qui se creuse au coin de son sourire. Un détail loin d’être futile. On peut même se demander ce que serait ce film sans cette fossette. Dans une scène magnifique d’intimité entre le père (Pialat) et sa fille (Bonnaire), il la pointe d’un geste. « Avant, t’en avais deux. T’en as plus qu’une ; elle est partie où, l’autre ? » Le père touche du doigt la grâce fragile de sa fille en train de devenir une femme. Toute la profondeur du cinéma de Pialat est dans cet instant magique de complicité entre le père et sa fille, mais aussi entre le réalisateur et son actrice. La fossette qui s’efface, la perte de l’innocence, c’est le sujet même d’A nos amours(le titre sonne comme un toast funèbre). Suzanne découvre les garçons, le sexe, les sentiments. Elle s’émancipe, mais entre une mère légèrement hystérique et un frère obsessionnellement jaloux, ça se passe plutôt mal. On frise souvent le psychodrame. De ces séquences, véritables blocs de vérité humaine, on pourrait ne retenir que les torgnoles spectaculaires et les vociférations passionnées. Mais précisément, Pialat a choisi de placer sa caméra au centre de ces passions déchaînées, pile dans l’œil du cyclone. Son regard fixe ce point précis, la fossette de Suzanne/Sandrine, cet ultime repli d’une grâce vacillante, la grâce d’une jeune actrice soudain révélée.

Film français de Maurice Pialat (1980 - 1h50min) avec Isabelle Huppert, Gérard Depardieu...Interdit aux moins de 12 ans

Comment Nelly, jeune femme aisée et mariée a un presque quadragenaire, tombe amoureuse du loubard Loulou...

Film français de Maurice Pialat (1972 - 1h30min) avec Jean Yanne, Marlène Jobert, Harry-Max...Prix d’interprétation masculine - Cannes 1972

Un homme ne peut se résoudre à divorcer ni à quitter definitivement sa maîtresse.

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Les films

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En évoquant les derniers jours de Van Gogh à Auvers-sur-Oise, Maurice Pialat signe une œuvre récapitulative et l’un de ses films les plus bouleversants. Dixième long-métrage de Maurice Pialat, Van Gogh ressemble au film d’une vie. Le cinéaste réussit avec ce portrait du peintre à ressusciter un monde éteint. Ce film à costumes échappe totalement à l’impression de reconstitution ou d’académisme. Van Gogh parle des relations entre les hommes et les femmes, de la famille, de l’art et de la France, de l’ap-pétit sexuel. Autant de sillons que Pialat, peintre devenu cinéaste, artiste incommode du cinéma français, a implacablement creusés de film en film. Van Gogh s’attache à montrer les derniers jours d’un artiste célèbre, mais c’est tout autant le portrait d’un homme en fin de parcours et une radioscopie de la société française et de ses classes, du souvenir encore douloureux des tueries de la Commune, évoquées ici à deux reprises avec beaucoup d’émotion. Comme il lui est reproché dans le film, Van Gogh n’est pas “sympathique”. Il vit une relation ombrageuse avec son frère Théo, sans doute jaloux de son génie, à qui il reproche de laisser dormir ses toiles.Il fustige la critique, les marchands d’art et ses contemporains. En revanche, il apprécie la compagnie des paysans et des petites gens, mais aussi des filles de joie dans les bordels, à la ville ou la campagne. Marguerite Gachet _ la fille de son mécène, un médecin _ amoureuse de Van Gogh, dira au début du film qu’il est difficile de faire simple. On est tenté d’appliquer cette maxime au cinéma de Pialat. Conçu dans la souffrance et la colère, fruit d’un tournage émaillé de nombreux incidents et conflits, Van Gogh est un chef-d’œuvre. (merci Olivier Père !)

Soirée en partenariat avec les Amis du Musée d’Art Moderne Saint-Etienne MétropoleTrès loin de La vie passionnée de Vincent Van Gogh par Minelli sorti en 1956, Van Gogh de Pialat recevra un accueil enthou-siaste de la part des critiques comme du public. On ne peut qu’établir un parallèle entre les deux caractères marginaux que sont Van Gogh et Pialat. Si les deux derniers mois de la vie du peintre à Auvers-sur-Oise sont retracés, mêlant création intensive, amours malheureuses et désespoir, on perçoit une démystification du génie. Qu’est-ce que la création ? Qu’est-ce qui prédispose un artiste à être reconnu comme un grand ? Et quand ? Après sa mort ? Le film rend hommage à toute la peinture du XXème siècle à travers des plans colorés superbes.

Tarifs habituels + 2€(préventes à partir du 17/11)

Philippe Roux, coordonnateur des conférences au MAM, enseignant de culture générale à l’ESADSE, présentera ce film et, après sa diffusion, animera une discussion qui s’avère passionnante au vu de la problématique de la création. La soirée se poursuivra autour du pot de l’amitié.

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A 8 ans, le petit John Bennett fit le vœu que son ours en peluche de Noël s’anime et devienne son meilleur ami pour la vie, et il vit son vœu exaucé. Presque 30 ans plus tard, l’histoire n’a plus vraiment les allures d’un conte de Noël. L’omniprésence de Ted au côté de John pèse lourdement sur sa relation amoureuse avec Lori. Bien que patiente, Lori voit en cette amitié exclusive, consistant principalement à boire des bières et fumer de l’herbe devant des programmes télé plus ringards les uns que les autres, un handicap pour John qui le confine à l’enfance, l’empêche de réussir professionnellement et de réellement s’investir dans leur couple. Déchiré entre son amour pour Lori et sa loyauté envers Ted, John lutte pour devenir enfin un homme, un vrai !Voilà une comédie intelligente et hilarante, délicieusement régressive et surtout politiquement incorrecte. Dans un glorieux mélange de genres, Seth MacFarlane réinvente la comédie romantique. Son ours en peluche est une vraie bonne trouvaille, il est très drôle, trash à souhait et parfaitement déluré. On a là un divertissement loufoque et original, doublé d’une bonne réflexion sur la difficulté de passer à l’âge adulte.

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Cinquante ans après la sortie du premier épisode, James Bond 007 contre Dr No, avec Sean Connery et Ursula Andress (le 5 octobre 1962 à Londres), débarque sur les écrans du Méliès le 23e film de la saga sur l’espion british imaginé par le romancier Ian Fleming. Et cette fois-ci, c’est Sam Mendes, le réalisateur du célèbre American Beauty et surtout des fascinantes (je vous l’assure (re)voyez-le !) Noces rebelles,qui s’attaque à la franchise James Bond. Résultat des courses il nous emmène au 007eme ciel ! Dans Skyfall, la loyauté de James Bond envers M est mise à l’épreuve lorsque la directrice des services secrets britanniques est rattrapée par son passé. 007 doit identifier et détruire la menace, quoi qu’il lui en coûte à titre personnel…Lorsque la dernière mission de Bond tourne mal, plusieurs agents infiltrés se retrouvent exposés dans le monde entier. Le MI6 est attaqué, et M est obligée de relocaliser l’Agence. Ces événements ébranlent son autorité, et elle est remise en cause par Mallory, le nouveau président de l’ISC, le comité chargé du renseignement et de la sécurité. Le MI6 est à présent sous le coup d’une double menace, intérieure et extérieure. Il ne reste à M qu’un seul allié de confiance vers qui se tourner : Bond. Plus que jamais, 007 va devoir agir dans l’ombre. Avec l’aide d’Eve, un agent de terrain, il se lance sur la piste du mystérieux Silva, dont il doit identifier coûte que coûte l’objectif secret et mortel…

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Les films

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Neuf ans. C’est la durée qu’il a fallu à Rachid Djaïdani pour tourner et monter cette œuvre en totale indépendance financière et créative. Le moins que l’on puisse dire, c’est que toute cette liberté se ressent à l’écran. Rengaine est un film hors du commun et des circuits de production habituels. Pur produit urbain filmé au numérique, à l’image du Donoma de Djinn Carrénard, cette petite pépite respire l’authenticité, la fraîcheur et la fougue de la jeunesse des quartiers populaires de Paris. Autodidacte de 38 ans, ac-cessoirement boxeur et auteur d’essais ayant fait ses premiers pas dans le monde du cinéma en tant que régisseur sur le tournage de La Haine de Kassovitz, Rachid Djaïdani livre ici sa première fiction sur un sujet complexe, peu évoqué dans le cinéma français, qui aurait pu devenir une simple succession de clichés si le réalisateur n’avait pas su frapper aussi juste.Rengaine, c’est l’histoire d’un amour qui dure depuis plus d’un an entre deux apprentis comédiens qui désirent sceller celle-ci par une union matrimoniale. L’un s’appelle Dorcy, un noir qui tente de percer dans le monde du spectacle en se réduisant à des castings parfois loufoques et dégradants ; l’autre est Sabrina, une jeune femme d’origine algérienne en pleine possession de son destin, décidée à se marier malgré une tradition bien ancrée dans la culture maghrébine. Sur l’échiquier, face à cette relation secrète, se posent les relations intracommunautaires des trente-neuf frères de Sabrina, plus un surtout (l’aîné ou presque), sorte de chien de garde quadragénaire au respect unilatéral, celui du mâle. « Fais comme je dis, pas comme je fais », comme dirait l’autre, puisque Rachid Djaïdani expose la situation tout aussi délicate du frère le plus hargneux, en profitant pour dénoncer l’hypocrisie latente et l’ostracisme envers toute communauté, religion ou orientation sexuelle différente - pratiqués au nom d’une règle tacite et pro-fondément ancrée dans les mentalités.Par sa caméra fébrile, capturant toujours les expressions au plus près du visage, le réalisateur d’origine algérienne et soudanaise nous fait voyager dans les rues parisiennes, de Stalingrad aux Abbesses, faisant découvrir à chaque séquence une vision plus ou moins radicale de la situation. Car il ne faudrait pas croire que les quarante frères sont tous contre le mariage ; ce serait par trop simpliste. Or Rachid Djaïdani laisse s’exprimer toute une palette de personnages : certains, suiveurs et soumis à la parole de Slimane (l’excellent Slimane Dazi, qui incarnait déjà Brahim Latrache dans Un Prophète d’Audiard) ; d’autres, plus intégristes, qui menacent de renvoyer Sabrina au « bled » ; sans oublier de fermes réfractaires au diktat de Slimane. Djaïdani se joue de nos à priori et préjugés avec brio, notamment lors d’une séquence qui trompe à coup sûr son monde et désamorce le caractère révoltant de certains propos par un humour ravageur dans un langage propre à celui des quartiers. C’est avec cette œuvre frénétique et talentueuse que Rachid Djaïdani explose les non-dits

RENCONTRE AVEC LE RÉALISATEUR RACHID DJÏDANISoirée en partenariat avec Ciel ! Les Noctambuleswww.ciel-lesnoctambules.com

d’une société qui voudrait fermement croire à l’utopie de l’intégration et de la mixité culturelle. Pendant cette heure quinze qui passe comme une dizaine de minutes, on espère que cette Rengainepassera du « touche pas à ma sœur, mon frère » à « l’amour n’a pas de frontière ». (merci Abus de Ciné !)

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Avec Après Mai, Olivier Assayas nous offre une belle fresque autobiographique, qui nous promène de France en Italie et à Londres, et qui fait revivre avec beaucoup de justesse et d’intelligence le temps de son adolescence : celui des années 70. Période foison-nante qu’il avait déjà abordée dans L’Eau froide (1994) et dans son récent Carlos. « Ce n’est plus le moment authentiquement ré-volutionnaire de Mai 68, dit le réalisateur, mais son sillage. » Le fond de l’air est rouge, et le petit groupe de terminale d’un lycée de banlieue suivi par Assayas est ultra-politisé. La jeunesse d’aujourd’hui a sans doute du mal à imaginer ce mélange détonant d’idéologie confuse et d’action fébrile, distribution de tracts, coopération à la presse militante gauchiste, manifs, tentatives désordonnées de coordonner des groupuscules ou de se greffer sur des occupations d’usine. « L’obsession de la politique était partout, se souvient Assayas, elle formait une espèce de sur-moi qui pouvait être étouffant. Il y a quelque chose de violent et de triste dans le gauchisme. Mais en même temps, la jeunesse avait foi dans le futur, dans la transformation possible de la société. Est-ce dépassé aujourd’hui ? Aux jeunes de se poser la question, de confronter leur jeunesse à la nôtre. »Le film commence en 1971, avec un fait réel et violent : la manifestation interdite en faveur de leaders de la Gauche prolétarienne emprisonnés, spectaculairement réprimée par des CRS à moto. Sans transition, on se retrouve dans un cours de philo avec une citation de Pascal : « Entre nous et le ciel, l’enfer et le néant, il n’y a donc que la vie, qui est la chose du monde la plus fragile. »C’est cette chose fragile que met en scène Olivier Assayas, feu et flamme de la jeunesse qui voudrait embraser le monde, mais qui cherche son souffle, s’éteint parfois. En même temps qu’une peinture de l’époque, Après Mai est un film d’apprentissage, où les personnages cherchent leur chemin personnel, au travers de l’engagement politique certes, mais aussi des sentiments amoureux, des études et du choix d’un métier. Gilles (Clément Métayer) est le plus proche d’Olivier Assayas. Il peint, il dessine, bientôt il deviendra cinéaste. Il baigne dans la contre-culture musicale et politique du temps, qui l’oppose à son père, scénariste et réali-sateur de la télévision « bourgeoise ». Mais le fait qu’il vienne d’un milieu cultivé et qu’il ait une vocation artistique lui donne des outils de réflexion critique sur l’embrigadement politique et le militantisme. Il lit Les Habits neufs du président Mao de Simon Leys, premier et impitoyable dénonciateur du maoïsme, qu’un de ses copains gauchistes censurerait volontiers : un agent de la CIA, dissimulé sous un faux nom. Mais surtout, Gilles est d’abord artiste, ce qui signifie aller vers la solitude plutôt que vers la multitude, écouter ses voix intérieures plutôt que des mots d’ordre.Cette distance critique, qui est celle du cinéaste autant que du personnage, jointe à une connaissance précise des codes et des comportements de la contre-culture, donne à Après Mai une exactitude historique et une lucidité intime très remarquables. On voit vraiment surgir une génération. « Aujourd’hui, dit Assayas, on a tendance à représenter une adolescence rigolarde, allant de fête en drague. Ce n’est pas le sentiment que j’ai gardé de la mienne, où l’amour de la vie s’alliait à la mélancolie et au sérieux. »(merci Marie-Noëlle Tranchant !)

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Meilleur ScénarioMostra de Venise 2012

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Après un divorce difficile, Lucas, quarante ans, a trouvé une nouvelle petite amie, un nouveau travail et il s’applique à reconstruire sa relation avec Marcus, son fils adolescent. Mais quelque chose tourne mal. Presque rien. Une remarque en passant. Un mensonge fortuit. Et alors que la neige commence à tomber et que les lumières de Noël s’illuminent, le mensonge se répand comme un virus invisible. La stupeur et la méfiance se propagent et la petite communauté plonge dans l’hystérie collective, obligeant Lucas à se battre pour sauver sa vie et sa dignité…Après avoir initié le Dogme95 de la nouvelle vague danoise au côté de Lars von Trier avec l’électrochoc Festen en 1998, Thomas Vin-terberg a vécu par la suite une longue traversée du désert en entamant une carrière américaine peu folichonne… Avec La Chasse, il poursuit fort heureusement une belle résurrection qu’il avait amorcée au travers de Submarino voilà deux ans ! Curiosité, il y met en scène un scénario rappelant de façon troublante son premier film, mais dans une perspective en quelque sorte inversée… Là où le hé-ros adulte de Festen accusait à raison le patriarche familial d’avoir abusé de lui lorsqu’il était enfant, La Chasse montre ainsi une petite fille accusant à tort un homme de pédophilie. Egalement à l’affiche de Royal Affair (cf. page 16), Mads Mikkelsen, prix d’interprétation à Cannes pour son rôle, est tout bonnement magnétique, parfait pour décrire la descente aux enfers du personnage de Lucas !

CIE DES FEMMES À BARBE

Magie mentale et humour

Vendredi 14 décembre

à 20h30

CIRKUS CIRKÖR

Cirque électro-rock

Jeudi 29 novembre à 20h30

Prix d’interprétation masculineCannes 2012

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C’est un film somptueux, sensuel et crépusculaire. Une histoire tout ce qu’il y a de plus vrai qui nous conte le Danemark tel qu’on l’ignore, pendant le bref instant où, touché par « les Lumières », il devint un exemple pour l’Europe entière. Au point que le grand Voltaire lui-même prit la peine de dégainer sa plus belle plume pour célébrer l’intelligence de son roi, « la lumière du Nord »…Comment l’amour permit cette évolution incroyable, comment aussi il signa la perte des précurseurs qui avaient contribué à faire de ce petit pays une référence pour tous ceux qui rêvaient d’une société meilleure : Nikolaj Arcel réussit brillamment un film sans temps morts, parvenant, du plus intime au plus collectif, à décrire une société furieusement inégalitaire, trop douce pour les uns, trop dure pour la plupart ; un film porté par des comédiens magnifiques qui nous font croire au trouble de leur esprit comme aux élans de leurs corps et de leurs cœurs avides de liberté.Fin du XVIIIe siècle. La noblesse égoïste et futile, soutenue par un clergé puissant et arrogant, règne en opprimant le petit peuple. A travers tout le continent, intellectuels et libres penseurs réclament réformes et justice, mais la cour du Danemark, trop préoccupée de ses intérêts, de ses querelles et de ses royales fêtes, est sourde aux échos du monde, et les gens souffrent, exploités, battus, punis de mort pour le simple fait d’avoir déplu à leur maître, croupissant dans des villes sales… On dit que le jeune roi Christian VII est fou, qu’il ne gouverne guère, trop occupé qu’il est à boire et festoyer... Lorsqu’on lui amène sa très jolie et intelligente cousine britannique pour qu’il donne un héritier au royaume, il en est quasi contrarié et la délaisse sitôt son devoir de reproduction accompli, si bien que Caroline Mathilde, la nouvelle reine, regrette amèrement sa douce Angleterre…C’est alors que les ministres, embarrassés par ce monarque inconséquent et incontrôlable, décident de lui trouver un médecin pour s’occuper en permanence de lui. Parce que son père était un pasteur apprécié pour ses idées conservatrices, et que la brochette de ministres qui régentent le royaume ne brille pas par son audace progressiste, c’est sur Johann Friedrich Struensee que se portera leur choix. Une forte personnalité, ce Struensee (Mads Mikkelsen, sacré Meilleur acteur au Festival de Cannes 2012 pour La Chasse, cf. page 15) : bon vivant, libéral, humaniste, auteur lui-même de textes anonymes largement inspirés de Voltaire, Rousseau et quelques autres… Sa bienveillance naturelle, sa grande compréhension des hommes et son goût pour les plaisirs vont lui gagner la confiance et l’amitié de ce roi instable et léger qui va prendre un curieux tournant sous son influence, tandis que la reine trouve enfin à qui parler de ces lectures qui les nourrissent et les ouvrent à un monde que tous deux voudraient bien changer. Autant d’amour de la vie et de goût pour les idées élevées rend bientôt inévitable une relation fusionnelle, attisée par le sentiment de pouvoir peser sur l’évolution des choses. Sous leur influence, le roi aura tôt fait de se faire le porte-parole de réformes audacieuses tandis que les ministres et la régente commencent à s’alarmer… Prendre des sous sur les rentes des nobles pour nettoyer Copenhague de sa saleté, vacciner tout le peuple, abolir la torture, supprimer le servage, les châtiments corporels, éloigner l’église des questions publiques, proclamer la liberté de la presse… Voilà qui décoiffe le Conseil qui n’en revient pas et résiste à ces propositions farfelues. Qu’à cela ne tienne, le roi dissout le Conseil et décrète que le royaume sera désormais gouverné par un cabinet réduit à Struensee et lui-même, promulguant enfin les lois que le Conseil refusait de prendre au sérieux ! C’est fou le nombre de choses qui purent évoluer pendant cette petite année où Struensee resta aux manettes… Et comme tout ça n’est pas un conte de fées mais la vérité vraie, on se doute que la méchante douai-rière et la classe dominante vont tout faire pour mettre à mal ces nouvelles idées et ceux qui les mettent en pratique…Les châteaux font rêver et les fêtes qui s’y donnent, superbement mises en scène, ne sont jamais empesées malgré la beauté des costumes, assumés comme si chacun portait là ses vêtements habituels ; la musique accompagne sans être envahissante et le jeu des acteurs est bigrement contemporain. Pour tout ça, le film déborde largement la description d’une époque pour nous renvoyer aux valeurs bousculées de la nôtre… (merci Utopia !)

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Les nouveautés de la semaine : Augustine ; Ted ; L’air de rien : Paperboy ; A nos amours ; La Traviata et nous

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Les nouveautés de la semaine : Le Capital ; La Chasse ; Après mai ; Rengaine

les musiques que vous entendez en

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DENTS DE SCIEEt AUTRESDÉGUEULASSERIES

L’Assaut de la Menuiserielieu d’art contemporain11, rue Bourgneuf42000 Saint-Étienne

Info : www.lassautdelamenuiserie.blogspot.com

Expositioncollectivede sérigraphie

du 16 novembreau 09 décembre 2012

vernissagevendredi 16 novembredès 18 heures

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Les horaires

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Les nouveautés de la semaine : Au-delà des collines ; Royal Affair ; Yossi ; Van Gogh

les musiques que vous entendez en

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Guy CarlierIci et maintenant

Vendredi 30 novembre 201220 h Nouvel Espace Culturel

9 rue Claudius Cottier42270 Saint Priest en Jarez04 77 74 41 [email protected]

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Les nouveautés de la semaine : Mauvaise fille ; Looper ; Niko le petit renne 2 ; Le Concours de danse : Argo ; Les Tontons flingueurs

les musiques que vous entendez en

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Les films

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Palme d’or surprise en 2005, pour son sublime thriller coup de poing 4 mois, 3 semaines, 2 jours, Cristian Mungiu nous livre un film fascinant sur l’éternel affrontement entre l’aspiration au salut et l’attirance vers la perte. En amour, il est bien difficile d’avoir Dieu comme rival… Alina ne peut pas vivre sans Voichita. Alors, elle va la chercher là où elle est : au fin fond de la Roumanie, dans un monastère. Une question d’heures, pense-t-elle : bientôt, elles partiront toutes les deux pour l’Allemagne et travailleront sur un bateau. Sauf que Voichita a changé : elle aime toujours Alina, mais elle a découvert la foi et fait partie, désormais, de cette communauté religieuse, dirigée par un pope orthodoxe. Elle hésite à couper les ponts, tergiverse tandis qu’Alina, fragile et amoureuse, sombre dans l’hystérie... Une fille qui en aide une autre à survivre à un homme borné, violent, abusant de son pouvoir : Cristian Mungiu semble avoir repris à peu près les mêmes personnages que dans 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Les mêmes personnages, mais surtout le même thème : la description au scalpel d’un groupe dont l’autorité consiste à détruire au nom du bien commun. La religion est ici sa cible, mais ce pourrait aussi bien être ce pouvoir politique dictatorial qui a plongé son pays, durant des années, dans l’aveu-glement et l’infantilisme. Dieu ou l’ex-PC roumain, même combat à ses yeux ! Dans les deux cas, le renégat ou le dissident deviennent forcément des dangers pour l’ordre établi. Il s’agit alors de les liquider en faisant mine de les « guérir » : système infaillible et sans merci...

Prix d’interprétation féminineCannes 2012

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Voici en avant-première le nouveau film d’Eytan Fox, le réalisateur de Tu marcheras sur l’eau et The Bubble.Yossi vit seul sa trentaine à Tel Aviv, assumant mal sa sexualité, trouvant dans son métier de cardiologue une échappatoire à ses déboires amoureux. Lors d’un voyage dans le sud du pays, il rencontre un groupe de jeunes militaires et, parmi eux, un jeune homme qui lui fait retrouver le goût de vivre...

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21h00 Avant-première de YOSSI de Eytan Fox + rencontre avec le réalisateur

20h00 La Nuit du court-métrage avec 20 films en compétition internationale

12h00 Roméos de Sabine Bernardi (2011 - Allemagne)12h15 Kyss Mig de Alexandra-Thérèse Keinig (2011 - Suède)14h00 Mon arbre de Bérénice André (2011 - France)14h15 The Parade de Srdan Dragojevic (2011 - Serbie)16h30 Ouganda au nom de Dieu de Dominique Mesmin (2010 - France)18h30 Diagnostiquer la différence de Annalise Ophelian (2010 - USA)

12h30 Cloudburst de Thom Fitzgerald (2011 - Canada)12h45 Four More Years de Tova Magnusson-Norling (2010 - Suède)14h30 Reflection in a Golden Eye de John Huston (1967 - USA)16h30 Hors les murs de David Lambert (2011 - France)16h40 Ronde de nuit de Richard Laxton (2011 - Angleterre)18h30 Les invisibles de Sébastien Lifshitz (2012 - France)

+ d’infos sur www.festivalfaceaface.fr

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Dans un futur proche, la Mafia a mis au point un système infaillible pour faire disparaître tous les témoins gênants. Elle expé-die ses victimes dans le passé, à notre époque, où des tueurs d’un genre nouveau (les «Loopers») les éliminent. Un jour, l’un d’entre eux, Joe, découvre que la victime qu’il doit exécuter n’est autre que… lui-même, avec 20 ans de plus. La machine si bien huilée déraille…On le tient enfin, le meilleur blockbuster de 2012 : original, étonnant, émouvant, excitant, voire génial, les adjectifs ne vont pas vous manquer pour qualifier Looper, cette petite claque SF qui nous a époustouflés et qui devrait d’ici peu se retrouver ran-gée dans la catégorie films cultes. On est restés scotchés 2 heures durant dans notre fauteuil avec son suspense mené tambour battant, savamment entretenu par le réalisateur et scénariste Rian Johnson à qui l’on doit le bijou qu’était Brick et que nous vous avions fait découvrir en catimini rue Gambetta lors de l’édition 2006 du festival Télérama.

Saison

2012l13

RenseignementsMaison de la Culture Le Corbusier04 77 100 777

Vente à la Maison de la Culture Le Corbusier Vente à la Maison de la Culture Le Corbusier

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Louise (stupéfiante Izia Higelin, futur César 2012 on prend les paris !) apprend simultanément qu’elle est enceinte et que sa mère est gravement malade.Le bonheur et la culpabilité, l’euphorie et la tristesse, l’amour filial et l’amour tout court.Il faudra bien neuf mois pour gérer tout ça…Au départ, il y a un livre. Poignant, dérangeant. Où son auteur, Justine Lévy, raconte sa propre histoire. Patrick Mille, comédien notamment vu dans Crime d’amour d’Alain Corneau, et compagnon à la ville de Justine Lévy, a choisi de le porter à l’écran. Un pari casse-gueule mais pourtant brillamment relevé par ce jeune cinéaste qui, comme Ben Affleck (cf. Argo page ci-contre), semble être bien plus à l’aise derrière que devant la caméra. Car Mauvaise fille est tout sauf un drame, c’est une belle et lumineuse comédie de la vie qui ne parle pas de mort mais d’instinct de survie. Et cette lumière, cette énergie, on la doit pour beaucoup à celle que le réalisateur a choisie pour incarner son héroïne : Izia Higelin. Ceux qui ont eu le bonheur de la voir sur scène* savent l’énergie flamboyante qu’elle peut y déployer. Là, un seul premier plan sur son visage suffit à comprendre où le film va nous conduire. Ses yeux, sa bouche... Tout chez elle sourit. Même quand elle enrage, même quand elle s’effondre...Mauvaise fille est à son image. Et l’on ne louera jamais assez le sens du casting de son réalisateur qui a confié à Carole Bouquet (jamais aussi juste depuis Trop belle pour toi) et Bob Geldof (avec une gueule à la Higelin père) le rôle des parents, et à Arthur Dupont (aussi parfait que dans le joli petit Mobile home projeté au France en septembre) celui de son petit ami. Il paraît qu’on fermait le livre bouleversé de tristesse. On sort du film les yeux embués de larmes certes, mais un immense sourire aux lèvres et avec l’envie de dévorer la vie.

* Elle a notamment mis le feu deux fois à Saint-Etienne : au Magic Mirrors pour Paroles et Musiques 2009, puis au Fil en février dernier.

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Si nous étions loin d’être fans du Ben Affleck version comédien, il n’en va désormais pas de même du Ben Affleck cinéaste. Après nous avoir étonnés avec son réussi Gone Baby Gone, Ben Affleck ressuscite ici le thriller politique des 70’s de manière magistrale. Il nous offre deux affolantes heures de cours d’Histoire récente, pimentées par une critique de Hollywood et sur fond de suspense à couper le souffle.Le 4 novembre 1979, alors que la tension entre les USA et l’Iran de l’Ayatollah Khomeiny est à son paroxysme, des manifestants pénètrent de force dans l’ambassade américaine de Téhéran, prenant ainsi plus de 50 Etatsuniens en otage. Ils exigent le renvoi au pays du Shah afin de le juger pour ses crimes lorsqu’il servait les intérêts des pays occidentaux. 6 d’entre eux parviennent toutefois à s’échapper par une porte arrière et à se cacher chez l’ambassadeur canadien. Après s’être installés dans les bureaux et aperçus de leur absence, les extrémistes se lancent à leurs trousses, sans doute dans le but de les tuer. C’est alors que la CIA fait appel à un spécialiste de «l’exfiltration» qui va avoir une idée aussi abracadabrante que dangereuse : faire passer les 6 fugitifs pour une équipe de tournage canadienne en repérage pour un film de SF à deux balles et repartir avec eux.

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en parallèle de l’exposition Dents de scie et autres dégueulasseries à L’Assaut de la Menuiserie, lieu d’art contemporain, 11 rue BourgneufPlongée du côté obscur de la pellicule avec le cinéaste Kenneth Anger, l’ennemi jurée d’Andy Warhol. Sataniste, gay, inventeur du Hollywood trash, et surtout grand gourou du cinéma underground américain, Kenneth Anger préfère se définir comme un Mage des images plutôt que d’être rangé sous l’appellation bêtement réductrice de réalisateur. Pour ce californien de 81 ans féru d’ésotérisme, le cinéma est un rituel magique. Il apparaît souvent dans ses propres films déguisé en prêtre occulte. Dès ses débuts à la fin des an-nées 40, il s’engage dans les expérimentations tout azimut, superposant les images les unes sur les autres ou triturant des fréquences sonores inédites dans ses bandes originales. Kenneth Anger a déployé sa puissance visuelle dans une dizaine de courts métrages, sans dialogue, d’une beauté stupéfiante et pratiquement inconnus du grand public bien qu’ils aient irrigué tout un pan du cinéma moderne. L’influence occulte de Kenneth Anger a façonné les visions de David Lynch, irrigué les films de Martin Scorsese, inspiré Fassbinder, voire Spielberg, Georges Lucas, William Friedkin et tant d’autres.

Projection de 2 films de Kenneth Anger : Puce Moment et Scorpio Rising en 16mm ainsi que Blue Velvet de David Lynch en 35mm. (tarif habituel + 2s)Soirée en Partenariat avec Le Grand Lux et L’Assaut de la Menuiserie

Le film retrace la riche histoire de Girls Films and Chocolate Cinema, une histoire qui remonte à une époque considérée par certains comme l’âge d’or de la planche à roulette.

€en partenariat avec

Kenneth Anger VS. David Lynch

Film américain de Kenneth Anger (16mm - 1947 - 7min)Une évocation abondamment colorée du Hollywood disparu, vu à travers l’après-midi d’une star de cinéma des années vingt. (distribution Cinédoc Paris Films Coop)

Film américain de Kenneth Anger (16mm - 1963 - 30min)C’est l’un des films les plus célèbres de Kenneth Anger, mélange d’homoérotisme, d’oc-cultisme et de bikers. C’est un cinéma ésotérique, bourré de surimpressions, empreint de fanfreluches et de rococo. (distribution Cinédoc Paris Films Coop)

Film US de David Lynch (35mm - 1987 - 2h00min - VOST) avec Kyle MacLachlan, Isabella Rossellini, Dennis Hopper...David Lynch a façonné Blue Velvet dans la glaise du cinéma de Kenneth Anger en empruntant à Scorpio Rising sa chanson-titre et à Puce Moment le personnage d’Isabella Rossellini. Polar vénéneux et somptueux, Blue Velvet est illuminé par la rencontre d’une fleur carnivore impressionnante (Isabella Rossellini) et d’un boy-scout très impressionnable (Kyle MacLachlan). Détective amateur, Jeffrey Beaumont découvre en épiant Dorothy Vallens que la paisible petite bourgade de Lumberton abrite des individus louches, aux moeurs douteuses. Mais, charmé par l’étrange Dorothy, Jeffrey

n’est-il pas déjà pris au piège ? Des fleurs aux couleurs vives, un jardin pimpant, un concentré de rêve américain : et là, au milieu des herbes, une oreille humaine, proprement tranchée... Un petit fragment de chair qui en suggère long sur la violence enfouie sous l’apparente paix, la souffrance bâillonnée par un american way of life triomphant.

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C’est la référence absolue en matière de parodie délirante !Sur son lit de mort, le Mexicain fait promettre à son ami d’enfance, Fernand Naudin, de veiller sur ses intérêts et sa fille Patricia. Fernand découvre alors qu’il se trouve à la tête d’affaires louches dont les anciens dirigeants entendent bien s’emparer. Mais, flanqué d’un curieux notaire et d’un garde du corps, Fernand impose d’emblée sa loi. Cependant, la belle Patricia lui réserve quelques surprises…« C’est pas parce qu’on a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule ». Le conseil de Michel Audiard tombe à plat car il y a beaucoup à dire justement. En effet, on vous propose rien moins que de (re)découvrir Les Tontons… en version intégralement numérisée et remasterisée. Les inconditionnels d’Audiard peuvent enfin se réjouir. L’attente a été longue (seuls un laser-disc, puis un DVD sont sortis à la fin des années 90). Mais la patience des cinéphiles est récompensée à sa juste valeur. Presque quarante-cinq ans après leur sortie en salles, Les Tontons… n’ont rien perdu de leur fraîcheur. Cette adaptation du roman Grisbi Or Not Grisbid’Albert Simonin a été l’occasion pour Audiard d’écrire des dialogues aux petits oignons. Evidemment, la bande du Lipp (Blier et Blanche notamment) s’en donne à cœur joie (un peu moins Lino Ventura habitué - au début de sa carrière - aux rôles tout en muscles).« Je crois que le dialogue est essentiel », déclarait ce dernier. Ses mésaventures dans le rôle de Fernand Naudin, aux prises avec Mademoiselle Patricia (Sabine Sinjen) et son fiancé Antoine (Claude Rich), ne sont donc qu’un prétexte pour des bons mots qui appartiennent déjà à l’histoire du 7e Art : « Les cons, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît » ; « Mais moi, les dingues, je les soigne, j’m’en vais lui faire une ordonnance, et une sévère. Je vais lui montrer qui c’est Raoul. » Fraîchement accueilli à sa sortie, ce film reste une référence absolue en matière de parodie et de délire. Un film culte indispensable dans toute DVDthèque, même si rien ne remplace l’expérience en salle. Audiard avait raison : « Vivant, je veux bien être modeste, mais mort, il me paraît naturel qu’on reconnaisse mon génie... ».

f film + bonus surprises + pop corn à volonté !

prévente des places à la caisse du cinéma à partir du 20 novembre (attention prévoir une pièce de 2f (ou 2 de 1, etc...) pour la consigne du gobelet popcorn

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De son titre original First Position dévoile les coulisses du « Youth America Grand Prix », la plus grande compétition inter-nationale de danse, destinée aux jeunes talents du sixième art. Ce concours se tient chaque année à New York et rassemble jusqu’à 5000 participants. Pour les gagnants, c’est l’assurance de repartir avec une bourse qui assurera leur scolarité dans l’une des écoles les plus prestigieuses du monde. Ce premier film de la journaliste Bess Kargman a remporté le Grand Prix du jury au Festival du Film de Miami, le Prix du Public au Festival international du Film de Portland, le Staff Prize au San Francisco Docfest, et le 2ème Prix du Public au Festival international du film de Toronto.

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Séances en partenariat avec

Théâtre du Parc d’Andrézieux-

Bouthéonet

Des Arts Des Cinés(association Stéla)

Film américain de Ramaa Mosley (2010 - 4min)

Ce très court métrage est une petite pépite comme on les aime... Chacun révèle, pour un bref instant, son monde intérieur et son désir de liberté en dansant. Ou comment le quotidien, suspendu à un souffle venu de nulle part, se transforme en un moment de pur bonheur. Hommes et femmes, au travail, dans la rue, à la maison, dans le bus, laissent parler au travers de la danse leur moi profond, leurs rêveries, leur joie de vivre ! Ce film a été récompensé par la Dance Camera du Festival de Film de Los Angeles.

Les huit années passées au Ballet de l’Opéra de Lyon puis les trois au Grand Théâtre de Genève ont permis à Davy Brun de découvrir de multiples gestuelles. Ses collaborations avec Mats Ek, Trisha Brown, Georges Balanchine, Jiri Kylian, William Forsythe, Maguy Marin, ou encore Mathilde Monnier l’ont poussé très tôt vers la chorégraphie. Il viendra partager avec le public son parcours atypique, puisé aux sources du ballet classique.

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Les films

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Tandis que son père est toujours absent à sillonner le ciel dans la brigade du Père Noël, Niko le petit renne voudrait que ses parents se retrouvent et qu’ils forment enfin une vraie famille. Mais sa mère a une surprise pour Niko : elle a rencontré quel-qu’un, Lenni, un renne qui a un fils nommé Johnny. Le rêve de Niko est alors brisé. Dans cette famille recomposée Niko doit s’occuper de Johnny, son nouveau petit frère. Mais un jour celui-ci est kidnappé par le loup blanc et sa horde de vautours ! Accompagné de son fidèle ami Julius l’écureuil volant, Niko démarre alors une grande aventure à la recherche de Johnny, avec à la clef, l’acceptation d’une nouvelle famille….

3 ans

Film fr. de Michel Ocelot (2012 - 1h28min) Les histoires de Kirikou étaient trop courtes pour montrer tout ce qu’il avait accompli. Voici donc de nouvelles aventures qui vous seront révélées par son noble grand-père...

Film britannique/allemand de Uwe Heidschötter, Johannes Weiland

(2012 - 43min - VF)Son papa l’a averti : en aucun cas, le Petit Gruffalo n’a le droit d’aller se promener seul dans les bois profonds. C’est bien trop dange-reux ! Un animal rôde dans les parages…

3 ans3 ans

projection du clip de l’hymne des droits de l’enfant en avant-programme

Film japonais de Mamoru Hosoda (2012 - 1h57min - VF)

Hana et ses deux enfants, Ame et Yuki, vi-vent discrètement dans un coin tranquille de la ville. Leur vie est simple et joyeuse, mais ils cachent un secret : leur père est un homme-loup.

6 ans

... et aussi de Tim Burton(cf. page 7)

Après la mort soudaine de Sparky, son chien adoré, le jeune Victor fait appel au pouvoir de la science afin de ramener à la vie celui qui était aussi son meilleur ami. Il lui apporte au passage quelques modifications de son cru…

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Prochainement

Tarifs(validité 30 juin 2014)

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Une vieille dame au fort tempérament, sa femme de ménage Cap-Verdienne et sa voisine dévouée à de bonnes causes partagent le même étage d’un immeuble à Lisbonne. Lorsque la première meurt, les deux autres prennent connaissance d’un épisode de son passé : une histoire d’amour et de crime dans une Afrique de film d’aventures.

Prochainement

Lorsqu’une partie de poker illégale est braquée, c’est tout le monde des bas-fonds de la pègre qui est menacé. Les caïds de la Mafia font appel à Jackie Cogan pour trouver les coupables. Mais entre des commanditaires indécis, des escrocs à la petite semaine, des assassins fatigués et ceux qui ont fomenté le coup, Cogan va avoir du mal à garder le contrôle d’une situation qui dégénère…

Al est un jeune homme d’origine modeste à qui tout réussit : il se marie dans huit jours avec la fille de son patron et doit prendre la tête de l’entreprise de son futur beau-père. Une nuit, après une soirée arrosée à fêter dignement tous ces projets d’avenir, il renverse un inconnu. Poussé par ses deux amis d’enfance, il abandonne le blessé et s’enfuit. De son balcon, Juliette a tout vu. Hantée par l’accident, elle va aider Véra, la femme du blessé, à retrouver l’homme qu’elle a vu fuir.

Hushpuppy, six ans, vit seule avec son père Wink, alcoolique et malade du coeur, dans une baraque déglinguée sur le «Bathtub», une île quasi sauvage des bayous de la Louisiane. Quand une énième violente tempête inonde cet endroit totalement coupé de la civilisa-tion par de grandes digues, les habitants, bons vivants malgré leur extrême pauvreté, font une fois de plus montre d’un grand sens de l’entraide. De sorte que lorsque les autorités gouvernementales ordonnent l’éva-cuation de la zone inondée, leurs habitudes sont brutalement chambardées, au point de provoquer une crise.

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Voici un film pétri de sensibilité et de nuances, réaliste et rêveur, drôle et touchant à la fois… C’est l’histoire d’un jeune huissier de justice… ouais, je vous vois déjà froncer le nez : pas le genre de boulot qui fait rêver ! Ils ne sont pas nombreux les gosses qui, à la question rituelle, répondraient : quand je serai grand, je serai huissier ! Nous plaiderons, votre honneur, les circonstances atténuantes, cet huissier-là l’est devenu par héritage plus que par choix : quand on ne sait pas trop ce qu’on veut faire de sa vie, il arrive qu’il soit plus simple de prendre ce qui vous arrive par transmission.Pour Grégory, la charge lui est échue à la mort de son père, par ailleurs fan de Michel Delpech dont les chansons ont imprégné son enfance d’une sorte de culture populaire pleine de poésie, lui laissant en héritage une flopée de ces mélodies sensibles qui s’accrochent pour toujours à la mémoire, peu propices à l’éclosion du tempérament féroce qui conviendrait mieux pour assumer le boulot qui est désormais le sien. Ça saute aux yeux en effet dès le premier regard : Grégory n’a pas l’étoffe qu’il faut pour traquer le mauvais payeur, le harceler, le dépouiller et le jeter tout nu à la rue, pour rester de marbre devant les pleurs de la veuve et de l’orphelin, du chef d’entreprise ruiné, des victimes de plans de licenciements. C’est pourtant un bon job, huissier, étant donné l’air austère du temps, le boulot n’est pas près de manquer, mais il y faut un minimum de dispositions naturelles que Grégory n’a pas. Et lorsqu’il découvre, dans la liste des saisies à mettre en route, le nom de Delpech Michel, l’idole de son père, sa vie va furieusement se compliquer et sa vraie nature se révéler. Sic transit gloria mundi…Michel Delpech – formidable dans son propre rôle

Notre coup de b

Le Méliès cinéma indépendant 10 place Jean Jaurès 42000 [email protected] / www.lemelies.com / www.facebook.com/CinemaLeMeliesSaintEtienne

– est sorti des radars du show-biz après avoir accumulé les succès il y a un certain nombre d’années, il empile désormais les dettes et, dans le trou perdu où il mène une vie solitaire (mais peinarde), tout ce qu’il possède est à saisir : voiture de sport, maison… Quand l’huissier Grégory déboule, le chanteur reçoit l’annonce des calamités qui lui pendent au nez avec un détachement et une désinvolture qui alertent son tourmenteur patenté. Pas de doute, ce glorieux déchu s’en fout et ne bougera pas le petit doigt pour sauver ce qui lui reste. Au nom de son père, et de sa propre enfance, Grégory se met alors en tête de sauver l’heureux loser de la mouise promise en organisant une tournée revival pour qu’il puisse payer ses dettes et que lui n’ait surtout pas à le saisir. Il en est sûr, les chansons de Delpech sont tellement chouette qu’elles courent toujours dans les rues, ceux qui l’aimaient n’ont pu l’oublier et ses fans se déplaceront en masse pour assister aux concerts. Trouver des lieux pour se produire ? Il ne manque pas de salles paumées au bord du dépôt de bilan dans les dossiers de l’huissier, elles feront l’affaire ! Et le voilà à magouiller des arrangements pour le moins tordus, collant des affiches la nuit un peu partout, tandis que son associé, un vrai dur à cuire, lui, s’étonne de le trouver si flapi alors que ses saisies n’avancent pas d’un poil. Notre épatant Grégory va tirer, pousser le chanteur au départ peu enthousiaste, et le duo improbable va se lancer dans son équipée salvatrice, nous emportant dans une sorte de balade du temps présent qui charrie les souvenirs passés comme une comète sa poussière d’étoiles.C’est un film formidablement attachant, qui fait un bien fou parce qu’il magnifie ces décalés improbables, dépités par les fausses valeurs régissant le monde, et qui font un pas de côté pour s’inventer une toute autre trajectoire. (merci Utopia !)

3ème édition de ce nouveau rendez-vous mensuel en partenariat avec le journal LE PETIT BULLETIN

Séance présentée par Christophe Chabert (Critique cinéma au Petit Bulletin)