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1 Secrétariat général de la Communauté du Pacifique Département développement humain Guide de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques culturelles en Océanie Katerina Teaiwa et Colin Mercer

Guide de cartographie, de planification et d’élaboration ... · de politiques culturelles en Océanie traitera, par conséquent, de la culture en général, sachant que les savoirs

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Secrétariat général de la Communauté du Pacifique

Département développement humain

Guide de cartographie, de planification et

d’élaboration de politiques culturelles en Océanie

Katerina Teaiwa et Colin Mercer

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© Secrétariat général de la Communauté du Pacifique, 2012

Tous droits réservés de reproduction ou de traduction à des fins commerciales/lucratives, sous quelque

forme que ce soit. Le Secrétariat général de la Communauté du Pacifique autorise la reproduction ou la

traduction partielles de ce document à des fins scientifiques ou éducatives ou pour les besoins de la

recherche, à condition qu’il soit fait mention de la CPS et de la source. L’autorisation de la

reproduction et/ou de la traduction intégrale ou partielle de ce document, sous quelque forme que ce

soit, à des fins commerciales/lucratives ou à titre gratuit, doit être sollicitée au préalable par écrit. Il est

interdit de modifier ou de publier séparément des graphismes originaux de la CPS sans autorisation

préalable.

Texte original : anglais

Secrétariat général de la Communauté du Pacifique – Catalogage avant publication (CIP)

Teaiwa, Katerina

Guide de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques culturelles en Océanie / Katerina

Teaiwa et Colin Mercer

1. Culture — Oceania.

2. Culture diffusion — Oceania.

3. Cultural policy — Oceania.

I. Teaiwa, Katerina II. Mercer, Colin III. Titre IV. Secrétariat général de la Communauté du Pacifique

305.800995 AACR2

ISBN: 978-982-00-0530-3

Mise en page réalisée par la Section publications du Secrétariat général de la Communauté du

Pacifique (CPS), Nouméa (Nouvelle-Calédonie), 2012

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Table des matières

Remerciements ....................................................................................................................................... 4

Acronymes .............................................................................................................................................. 5

Introduction ............................................................................................................................................ 6

Comprendre la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques en matière

culturelle : En quoi cela consiste ? ..................................................................................................... 10

1. La cartographie culturelle ............................................................................................................. 10

2. La planification culturelle ............................................................................................................. 14

3. La politique culturelle ................................................................................................................... 18

Pourquoi entreprendre la cartographie, la planification et l'élaboration

de politiques culturelles? ..................................................................................................................... 20

Comment conduire la cartographie, la planification et l'élaboration de politiques culturelles? . 22 Liste de contrôle de la cartographie, de la planification et de

l'élaboration de politiques culturelles ................................................................................................ 22

ANNEXE A : Rapport de l'atelier consacré à la cartographie, la planification et l'élaboration de

politiques culturelles ............................................................................................................................ 28

ANNEXE B : Établissement d'une politique culturelle nationale : projet de cartographie, de

planification et d'élaboration de politiques ....................................................................................... 36

ANNEXE C : Définitions utiles ........................................................................................................... 39

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Remerciements

Le présent Guide n’aurait pu voir le jour sans la contribution substantielle de la Commission

européenne, apportée par le truchement du projet Structuration du secteur culturel océanien en vue

d’améliorer le développement humain. Il a été rédigé à la suite de l’atelier consacré à la politique

culturelle, qui s’est tenu au Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS), à Nouméa

(Nouvelle-Calédonie), du 25 au 28 mars 2010, et a pour but de donner aux États et Territoires des

éléments d’orientation sur la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques en matière

culturelle. La CPS tient à remercier tout particulièrement les auteurs de ce Guide, Katerina Teaiwa et

Colin Mercer, qui ont également animé l’atelier sur les orientations en matière de cartographie, de

planification et d’élaboration de politiques culturelles.

Les auteurs tiennent à exprimer leur gratitude à Linda Petersen, à Elise Huffer et au personnel du

Département développement humain de la CPS, ainsi qu’à Nicholas Mortimer, pour l’aide et le soutien

qu’ils ont apportés tout au long de ce projet.

Il reste à espérer que ce Guide permettra à tous les États et Territoires membres de la CPS d’élaborer

et de mettre en œuvre des politiques culturelles, et d’appeler l’attention sur le rôle de la culture en tant

que vecteur du développement.

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Acronymes

ACP Pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique

CNUCED Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement

CPS Secrétariat général de la Communauté du Pacifique

EEE Espace économique européen

OIT Organisation internationale du Travail

OMPI Organisation mondiale de la propriété intellectuelle PNUD Programme des Nations unies pour le développement

SIG Systèmes d’information géographique

UE Union européenne

UNESCO Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

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Introduction

En Océanie, la culture est omniprésente dans la vie politique, économique et sociale. C’est parce que

les peuples et les pratiques autochtones prédominent dans toute cette région depuis des centaines,

voire, dans certains endroits, des milliers d’années, que la culture vit et influence directement les

valeurs, les décisions et les espérances des Océaniens. La culture, en Océanie, est avant tout perçue

comme une référence aux peuples ou aux coutumes « du pays » ; or, au XXIe siècle, de nombreuses

autres idées, croyances et pratiques sont désormais bien enracinées. En outre, les populations du

Pacifique se déplacent de plus en plus et se sont établies au-delà de leurs terres d’origine. De la même

manière, les îles ont accueilli de nouveaux migrants venant d’autres pays. La culture englobe, par

conséquent, différentes manières de penser, d’être et de créer, héritées du passé, nouvelles et sans

cesse mouvantes.

Dans le monde, ce processus culturel revêt une importance capitale sur le plan économique et social :

de nombreux pays d’Asie, d’Europe, d’Amérique, d’Afrique et des Caraïbes donnent un degré de

priorité élevé à la culture, au regard de l’investissement national, du renforcement des capacités, du

développement humain, de la paix et de la sécurité, de la croissance économique et de la

redynamisation des communautés. Dans le contexte international, la culture tient de plus en plus une

place centrale dans la « créativité » et l’« innovation », deux concepts qui sont au cœur des industries

culturelles ou créatives. Dans la région du Pacifique, ces industries ne sont toutefois pas clairement

définies, et les programmes ou politiques en matière culturelle sont encore considérés comme étant

essentiellement axés sur la promotion et la sauvegarde du patrimoine culturel matériel et immatériel,

notamment des savoirs traditionnels.

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Définition utile : Qu’est-ce que les industries culturelles ?

Le terme « industries culturelles » s’applique aux secteurs qui conjuguent la création, la production

et la commercialisation de biens et de services dont la particularité réside dans l'intangibilité de leurs

contenus à caractère culturel, généralement protégés par le droit d’auteur.

Les industries culturelles incluent l’édition imprimée et le multimédia, la production

cinématographique, audiovisuelle et phonographique, ainsi que l’artisanat et le design. Certains pays

étendent le concept à l’architecture, aux arts plastiques, aux arts du spectacle, aux sports, à la

fabrication d’instruments de musique, à la publicité et au tourisme culturel. On parle alors plutôt

d’« industries créatives » (creative industries). Dans les milieux économiques, on les qualifie d’

« industries en expansion » (sunrise industries), et dans les milieux technologiques, d’« industries de

contenu » (content industries).

Les industries culturelles ajoutent aux œuvres de l’esprit une plus-value de caractère économique qui

génère en même temps des valeurs nouvelles, pour les individus et pour les sociétés. La dualité

culturelle et économique de ces industries constitue leur signe distinctif principal. Tout en contribuant

à la préservation et à la promotion de la diversité culturelle, ainsi qu’à la démocratisation de l’accès à

la culture, elles sont des gisements importants pour l’emploi et pour la création de richesses. En effet,

elles favorisent la créativité, qui est leur « matière première » fondamentale, mais elles permettent

également d’innover en termes de production et de distribution. Dans nombre de pays, au cours de la

décennie 90, leur croissance a été exponentielle en termes de création d’emploi et de contribution au

PIB.

D’autres questions ?

Voir : http://portal.unesco.org/culture/fr/.

De nombreux travaux sur les savoirs traditionnels ont été conduits dans le contexte océanien et ont

déjà permis au Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS), à l’Organisation des Nations

Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), à l’Organisation mondiale de la propriété

intellectuelle (OMPI) et à d’autres organisations internationales d’élaborer toute une série de

documents utiles dans ce domaine. Le présent Guide de cartographie, de planification et d’élaboration

de politiques culturelles en Océanie traitera, par conséquent, de la culture en général, sachant que les

savoirs traditionnels s’inscrivent dans ce cadre général. L’accent est mis ici sur l’appréhension de la

culture, sous ses aspects les plus généraux et les plus divers, comme une force ou une ressource

pouvant être valorisée et, dans certains cas, mobilisée pour permettre d’atteindre différents objectifs

sociaux, économiques et politiques.

Ce processus suppose en principe une méthode de travail intégrée, qui consiste en la cartographie, la

planification et l’élaboration de politiques culturelles, le but ultime étant que tous les acteurs de la

culture, y compris les pouvoirs publics, les communautés, les individus, les artistes, les universitaires,

les détenteurs de savoirs traditionnels et les dirigeants, s’approprient le « secteur culturel » proprement

dit et, partant, s’investissent constamment dans celui-ci.

Le présent Guide fait suite à l’atelier sur les orientations en matière de cartographie, de planification et

d’élaboration de politiques culturelles, organisé à l’intention des membres du Conseil des arts et de la

culture du Pacifique en mars 2010, au siège de la CPS, à Nouméa (Nouvelle-Calédonie). Il s’agissait

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de la première activité menée dans le cadre du projet Structuration du secteur culturel océanien en vue

d’améliorer le développement humain, géré par le Département développement humain de la CPS et

financé par la Commission européenne. Ce projet cible quatre domaines spécifiques de la culture, qui

sont malgré tout complémentaires et interdépendants, à savoir : l’élaboration de politiques, la

promotion des industries culturelles, la préservation du patrimoine culturel et le renforcement des

relations culturelles au sein des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP).

Le présent document constitue, par conséquent, un outil en faveur d’une « structuration du secteur de

la culture » dans les États et Territoires insulaires océaniens. Il s’appuie sur des approches tirées de

divers modèles internationaux, tout en examinant plusieurs questions et aspects problématiques qui

concernent plus particulièrement les pays insulaires océaniens. Plutôt que de brosser un tableau

exhaustif des politiques culturelles, ce Guide donne aux consultants en politique culturelle et aux

acteurs de la culture toute latitude de concevoir leur propre approche adaptée au contexte local et

national. Il a pour raison d’être de compléter d’autres documents relatifs à la culture élaborés par la

CPS, notamment la Feuille de route et la Loi type sur les savoirs traditionnels, qui sont disponibles en

ligne (à l’adresse suivante :

http://www.spc.int/hdp/index.php?option=com_docman&task=cat_view&gid=37&Itemid=44).

Les travaux sur les politiques culturelles devraient s’inscrire dans le prolongement des activités

actuelles et futures axées sur la gestion des savoirs traditionnels et des autres programmes y afférents,

au lieu d’être menés de manière isolée et parallèlement à ces activités.

Si le présent Guide reprend certains des éléments de procédure fondamentaux liés à la cartographie, à

la planification et à l’élaboration de politiques en matière culturelle, il propose également des étapes

supplémentaires susceptibles d’être utiles dans le contexte océanien. Il comprend le rapport de l’atelier

sur les orientations en matière de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques

culturelles (annexe A), ainsi que des données et des conclusions issues de cet atelier.

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Figure 1 – Aux Îles Fidji, le slam constitue le symbole des activités créatives des jeunes et contribue au

développement des « industries culturelles » de ce pays insulaire.

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Comprendre la cartographie, la planification et l’élaboration de

politiques en matière culturelle : En quoi cela consiste ?

La cartographie, la planification et l’élaboration de politiques en matière culturelle impliquent un large

éventail d’acteurs de la culture. Dans la région océanienne, cette grande portée signifie généralement

que tout un chacun peut prendre part à ce processus. Pour mieux comprendre de quoi il s’agit, nous

allons maintenant examiner un à un les différents éléments liés à la cartographie, à la planification et à

l’élaboration de politiques en matière culturelle.

1. La cartographie culturelle La cartographie culturelle permet d’obtenir des données qualitatives et quantitatives sur la valeur de la

culture (statistiques culturelles), grâce à la conduite systématique :

de consultations ;

d’évaluations ; et

d’activités de collecte d’informations.

Parmi ceux qui interviennent dans la fourniture de ces statistiques culturelles, figurent notamment

diverses communautés, des services publics, des sociétés, des chercheurs, des éducateurs, les médias,

des artistes, des détenteurs de savoirs traditionnels et des dirigeants. Dans le contexte océanien, les

parties prenantes incluent aussi les églises et les groupes confessionnels.

Dans le cadre de ce travail en commun, l’appréhension de la culture comme une « richesse », une

« force » ou une « ressource » devient évidente. Par conséquent, la cartographie culturelle ne consiste

pas simplement à dresser un inventaire des sites, des savoirs, des rituels et des pratiques culturels. Elle

implique :

un dialogue direct avec les parties prenantes ; et

des discussions sur la société actuelle et, pour ce qui concerne l’avenir, le type de société et de lieu

dans lequel les parties prenantes souhaiteraient vivre.

Par ailleurs, ce processus peut faire appel à toute une gamme de techniques de cartographie, comme :

la cartographie de lieux revêtant une importance sur le plan culturel, à l’aide de systèmes

d’information géographique (SIG) ;

la collecte de données quantitatives sur les recettes et les dépenses liées aux produits et services

culturels ; et

la constitution de listes de rituels, d’événements et de spectacles culturels.

Il devrait également comprendre la collecte d’informations sur les savoirs et les pratiques populaires

qui sont susceptibles d’échapper à la définition communément admise de la « culture » ou de la

« coutume » dans les pays insulaires océaniens.

Cartographie Planification Élaboration

de politiques

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En outre, la cartographie culturelle engagera de préférence tous les groupes culturels, linguistiques,

ethniques, sexospécifiques et générationnels dans le processus. Il conviendra, par exemple, de veiller à

ce que les femmes et les jeunes soient bien pris en considération dans le contexte culturel, alors que

leurs expériences et leurs idées sont habituellement méprisées.

À l’échelle nationale, la cartographie culturelle étudie à la fois les autochtones et les migrants installés

à l’intérieur du pays et à l’étranger.

On trouvera ci-après trois outils importants pour la cartographie culturelle : les SIG, les statistiques

culturelles et la chaîne de valeur ajoutée, ou approche du cycle culturel, en vue de la collecte et de

l’analyse de données. L’approche de la chaîne de valeur ajoutée est essentielle pour mieux comprendre

les industries culturelles et structurer ce secteur.

Utilisation des SIG Les systèmes d’information géographiques font partie des nouvelles technologies de l’information et

de la communication qui permettent de créer différentes « couches » d’information sur un lieu à

recenser. Ils constitueront un outil très précieux dans le cadre de la cartographie culturelle de la région

océanienne et sont d’ores et déjà exploités, comme c’est le cas aux Îles Fidji, à Kiribati et ailleurs.

Communément utilisés dans les domaines de la planification physique et de l’aménagement du

territoire, les logiciels SIG sont également capables d’enregistrer des informations sur un lieu, c’est-à-

dire :

des données démographiques quantitatives (population, ethnie, etc.) ; et

des données qualitatives sous forme de récits, d’images, d’articles, etc.

Ils peuvent, par exemple, intégrer dans leurs « couches » d’information des détails sur un site

patrimonial particulier ou un site traditionnel. Ils peuvent en outre regrouper des informations sur ce

site sous forme de textes ou d’illustrations complémentaires ou explicatives.

Les SIG sont utilisés par les agents des services publics à tous les niveaux, par les ingénieurs

géographes et les planificateurs, ainsi que par certaines sociétés commerciales. Grâce à leur

fonctionnalité de travail interactif en ligne, il est évident qu’ils peuvent être utilisés dans le cadre de la

cartographie et de la planification culturelles, qui requièrent plus particulièrement des données

qualitatives.

Pour plus d’informations sur les SIG et leurs fonctions potentielles, ou pour voir en ligne comment

fonctionne un SIG, reportez-vous à l’adresse suivante : http://www.gis.com/content/what-gis

(Remarque : Il sera plus facile de consulter ce site à l’aide d’une connexion haut débit.)

La prise en compte des particularités du secteur culturel dans le développement des logiciels SIG et

des autres technologies de « cartographie culturelle » pourrait permettre d’établir une collaboration.

Cette collaboration devrait être poursuivie et favorisée, notamment avec les organismes œuvrant à

l’échelon local.

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Statistiques culturelles En septembre 2009, l’UNESCO a publié sa nouvelle version tant attendue du Cadre pour les

statistiques culturelles, publié pour la première fois en 1986. (Ce document peut être téléchargé en

français à l’adresse suivante : http://www.uis.unesco.org/Library/Documents/FCS09_FR.pdf)

Étant donné que la définition de la culture peut varier d’un pays à l’autre, le Cadre de l’UNESCO ne

constitue pas un modèle de collecte et d’analyse de statistiques culturelles pour tous les pays. Il

constitue plutôt un outil utile pour :

définir le secteur de la culture et ses domaines constitutifs (arts visuels, patrimoine, arts de la scène,

édition et presse, audiovisuel, etc.) ;

prendre conscience de la nécessité d’obtenir des données quantitatives fiables sur, entre autres, le

nombre de personnes employées ou actives dans les secteurs culturels et créatifs, le nombre

d’entreprises et d’organisations œuvrant dans ces secteurs, le chiffre d’affaires, la valeur ajoutée

brute (nouvelles richesses créées par ces secteurs), les dépenses des ménages afférentes à la culture

à l’échelon national et, bien entendu, la croissance et le déclin de ces secteurs. Ces statistiques

peuvent servir d’indicateurs importants (pour savoir où l’on va) de la santé générale des secteurs

culturels et créatifs, et de repères (pour savoir quand on y est arrivé). Elles ont une influence

déterminante sur les politiques et font partie intégrante de tout travail de cartographie ;

réaliser l’importance que revêt la compréhension des secteurs culturels et créatifs, qui reposent sur

une « chaîne de valeur ajoutée », ou un « cycle culturel », comprenant différentes phases : la

création, la production et la reproduction, la promotion et l’information, la distribution et la

diffusion, et la consommation (de plus amples informations sur ce sujet sont fournies dans les

paragraphes suivants) ; et

comprendre la nécessité, au-delà des statistiques quantitatives, de consulter et d’interroger

simplement les personnes, les organisations, les institutions et les communautés.

La chaîne de valeur ajoutée ou cycle culturel L’approche de la chaîne de valeur ajoutée pour mieux comprendre les secteurs culturels et créatifs

constitue le cadre stratégique et diagnostic de collecte et d’analyse de données, et d’intervention

politique, qui est désormais utilisé par :

la Commission européenne, comme en témoigne son Livre vert sur les industries culturelles et

créatives (voir : http://ec.europa.eu/culture/our-policy-development/doc2577_en.htm) ;

l’UNESCO, dans son nouveau Cadre pour les statistiques culturelles 2009 ;

l’Organisation internationale du Travail (OIT), dans ses travaux sur le développement et la création

d’emplois dans le secteur de la culture au profit de la Communauté de développement de l’Afrique

australe ; et

l’Australie, le Canada et le Royaume-Uni, au titre de leur approche du développement des

industries culturelles et créatives.

La chaîne de valeur ajoutée est un modèle d’évaluation des forces, faiblesses, possibilités et menaces

dans toutes les phases de la chaîne ou du cycle culturel, depuis la création jusqu’à la consommation.

Elle prend en considération les facteurs ou « apports » figurant dans l’organigramme ci-dessous.

Chacun de ces facteurs doit être analysé dans le cadre de la cartographie, de la planification et de

l’élaboration de politiques en matière culturelle, et sont examinés plus en détail dans les paragraphes

qui suivent.

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La création a trait :

à l’éducation et à la formation des professionnels du secteur de la création ;

aux financements et aux investissements, notamment au capital-risque, en faveur des professionnels

culturels, tant publics que privés ;

à l’aide apportée en matière de planification d’activités et aux conseils prodigués aux créateurs ;

au fait d’encourager la participation des groupes habituellement exclus à la création ; et

aux savoirs et aux savoir-faire culturels transmis aux jeunes générations.

La production et la reproduction ont trait :

aux besoins en infrastructures (physiques et numériques) pour la production et la reproduction ;

aux besoins en matière d’éducation et de formation dans les domaines de la production et de la

reproduction ;

aux financements et aux investissements nécessaires dans ces domaines ; et

aux questions liées à la propriété intellectuelle.

La promotion et l’information (commercialisation) ont trait :

à la promotion de « l’image de marque » et à la commercialisation du lieu ou de la destination ;

à l’adéquation des techniques de commercialisation des produits culturels existants et nouveaux ;

au développement et au renforcement de la coopération et des capacités de communication ; et

aux besoins en matière d’éducation et de formation dans ces domaines.

La distribution et la diffusion ont trait :

à l’adéquation des mécanismes et des lieux de distribution et d’exposition existants ;

à l’attrait du produit et aux possibilités de création de marchés locaux, nationaux et étrangers ;

Création

Production et reproduction

Promotion et information

(commercialisation)

Distribution et diffusion

Consommation

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à l’offre d’un accès aux groupes habituellement exclus ;

aux besoins en matière d’éducation et de formation dans ces domaines ; et

aux financements et aux investissements nécessaires dans ces domaines.

La consommation a trait :

à la mesure dans laquelle le marché culturel et les différents goûts culturels à l’échelon local,

régional, national et international sont bien compris ;

au tourisme culturel ;

à l’efficacité des mesures prises pour stimuler la demande et des stratégies de commercialisation ;

aux stratégies propres à élargir le public local et général, pour inclure notamment les groupes exclus

et les non-utilisateurs ; et

aux besoins en matière d’éducation et de formation dans ces domaines.

Cet outil de diagnostic stratégique appliqué à la gestion et à la gouvernance est déjà couramment

utilisé et sert de guide pour déterminer les interventions politiques à mettre en œuvre dans le secteur

culturel, notamment en Australie, au Canada et au Royaume-Uni. Il pourrait tout à fait constituer un

modèle visant à faciliter la réalisation des objectifs en matière de gouvernance et de gestion dans les

pays insulaires océaniens.

Si ce cadre venait à être appliqué dans le contexte océanien, il conviendrait d’accorder une importance

toute particulière à la manière de concilier ses impératifs commerciaux avec certains savoirs culturels

tels que les savoirs traditionnels, ainsi qu’avec les produits et pratiques ayant une nature spirituelle,

collective, généalogique ou taboue. Il ne faudrait pas non plus négliger le fait que ce cadre ne met pas

l’accent sur la participation. Au contraire, il est, sous sa forme actuelle, axé sur la consommation. Dans

bon nombre de pays, la culture est centrée sur la consommation et la production ; il existe un fossé

entre le travail investi dans les produits, les spectacles et les services culturels, et le public ou les

clients qui les consomment. Les consommateurs n’ont aucune idée des personnes qui produisent leurs

biens culturels. En Océanie, les activités et les produits culturels sont axés sur la participation et la

création de liens, et les gens se connaissent.

2. La planification culturelle La planification culturelle :

étudie le rôle de la culture sur le plan économique, social et politique ;

se fonde sur la cartographie culturelle ; et

favorise le développement humain et économique.

La planification culturelle correspond à l’utilisation intégrée et stratégique des ressources

culturelles au profit du développement national, régional et local, ainsi que du développement

urbain et communautaire.

Théoriquement, la planification reconnaît dès le départ :

que tout un chacun constitue un acteur de la culture, et que les plans établis toucheront divers

secteurs, services publics, conseils et communautés ; et

que les plans devraient être placés sous la responsabilité des parties prenantes concernées et établir

un lien entre les différents besoins en matière de planification sociale, économique et physique.

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Lorsque des ressources culturelles méconnues dans des communautés, des villages, des villes et des

îles sont cartographiées ou mises en valeur, elles deviennent apparentes et font alors partie intégrante

de l’identité et des signes distinctifs de ces lieux.

La planification culturelle, en tant que moyen d’autonomisation et d’action stratégique, permettra

d’orienter les politiques et programmes mis en œuvre par les autorités culturelles, les administrations

et les communautés.

La planification culturelle nécessite absolument :

un cadre culturel ;

un plan d’action ; et

un budget.

La prochaine étape consiste alors à définir les objectifs stratégiques et les politiques à mener à bien au

cours d’une période déterminée.

Les ressources culturelles : de quoi s’agit-il exactement ? Les ressources culturelles sont des ressources ordinaires, courantes, diverses et parfois

exceptionnelles. Il peut, par exemple, s’agir :

de la façon de cuisiner et de préparer les repas à la manière insulaire ;

des anciens qui détiennent des savoirs culturels sur la manière de parcourir la terre et les mers ;

des savants, des poètes, des écrivains et des compositeurs ;

des connaissances qu’ont les femmes de la fabrication du tapa ou du tressage des nattes ;

des sites patrimoniaux se rapportant à des événements ancestraux et contemporains ;

des monuments ayant une importance sur le plan historique ;

de l’existence de réseaux communautaires et de centres d’activité culturelle tels que les églises et

les associations de jeunes ;

de stations de télévision et de radio locales ;

de réseaux d’artistes, de réunions et d’expositions ;

de spectacles de danse contemporaine et traditionnelle ;

de studios d’enregistrement, de producteurs et d’organisateurs de manifestations ;

de festivals annuels, de défilés de mode et d’événements sportifs ; et

des migrants installés à l’étranger, et de leurs idées et activités.

En envisageant la culture de cette façon, il apparaît clairement que, par définition, la planification

culturelle doit être stratégique, intégrée, adaptée et globale.

Impératifs liés à la planification culturelle La planification culturelle doit respecter les us et coutumes locaux ou autochtones, et en même temps

tenir compte des besoins et des possibilités en matière de développement que représentent, par

exemple, les stratégies en matière de tourisme culturel, le développement du secteur culturel, la

planification des activités de divertissement et de loisirs, l’architecture urbaine et l’agencement des

rues. En outre, elle doit établir un lien entre les divers besoins et possibilités dans ces domaines.

La planification culturelle ne doit pas éluder les questions de l’identité, de l’autonomie et du sentiment

d’appartenance au lieu. Elle doit également être orientée vers l’extérieur et s’inscrire dans le cadre

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d’un programme général de développement régional, national ou local, ou de développement

communautaire urbain ou rural.

La planification culturelle doit permettre d’établir et de maintenir un équilibre politique satisfaisant

entre les qualités « internes » et les éléments structurels de la vie (notamment les valeurs, les

croyances, les idées, les goûts et les sentiments des populations) et d’autres facteurs « extérieurs » liés

au tourisme et à l’attraction de résidents et de visiteurs potentiels (y compris les petites et grandes

entreprises).

Elle doit reconnaître et redécouvrir sans cesse la richesse des ressources culturelles qui existent déjà au

sein d’une communauté, mais qui ne constituent pas encore des signes culturels, sociaux ou

économiques distinctifs de cette communauté.

Ce critère nous amène à considérer un autre point très important. La planification culturelle doit

reposer sur le principe de la consultation de toutes les personnes intéressées et sur un travail rigoureux

d’évaluation des ressources culturelles à l’échelon local, ou une cartographie culturelle. Ce principe est

simple : on ne peut mettre en valeur les ressources culturelles que si l’on sait quelles sont les

ressources existantes et quel est leur potentiel. L’évaluation des ressources culturelles à l’échelon

national ou local passe par des consultations et un travail rigoureux de recherche sur les diverses

ressources culturelles et les différents besoins dans ce secteur. Ces travaux de recherche peuvent

rassembler des données quantitatives ou qualitatives ; le mieux serait de disposer des deux.

Il ne faut pas seulement s’en tenir à des objectifs en matière de politique sociale ou de développement

communautaire. Il s’agit également de poursuivre des objectifs économiques. Dans le contexte

économique du XXIe siècle, les industries culturelles, c’est-à-dire celles qui ont vocation à produire du

sens, des signes, des symboles, des images et du son, ainsi que les ressources humaines qui les sous-

tendent en tant que producteurs et consommateurs, joueront un rôle primordial dans la nouvelle

économie créative, laquelle connaît une croissance rapide.

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Approches stratégique et intégrée de la planification culturelle Nous allons à présent étudier plus en détail les approches stratégique et intégrée de la planification

culturelle, en examinant tour à tour chacune de ses composantes.

Approche stratégique

La planification culturelle doit s’inscrire dans le cadre d’une vaste stratégie de développement urbain,

rural et communautaire. Elle doit établir un lien entre la planification physique et l’urbanisme, la

planification des activités de divertissement, l’aménagement rural et la planification des travaux liés au

logement et aux infrastructures publiques. Les planificateurs culturels doivent concilier leurs propres

intérêts et activités avec ceux des autres organismes compétents en matière de planification et de

développement. Ils doivent se sortir d’une situation délicate, établir des liens, faire entendre leur voix

et prendre part à l’élaboration des stratégies et des plans d’action afin d’atteindre leurs objectifs à long

terme.

Approche intégrée

La planification culturelle ne peut se faire a posteriori. Il ne peut s’agir d’un travail qui vient s’ajouter

à d’autres. Les planificateurs culturels doivent convaincre les planificateurs chargés d’autres secteurs

que la planification culturelle fait partie intégrante de l’élaboration de plans liés aux modes de vie,

aux éléments structurels de la vie et à la qualité de vie, aux activités quotidiennes de base et aux cadres

de vie, aux achats, au travail et au divertissement, soit de la planification appliquée aux populations,

aux actions et aux lieux. Les planificateurs culturels doivent, par conséquent, être présents et faire

entendre leur voix dès le début, c’est-à-dire dès les premières étapes de l’élaboration d’un plan

stratégique, national ou communautaire, au premier signe d’une nouvelle expansion résidentielle ou

commerciale, ou dès les premières ébauches d’une stratégie de création d’une nouvelle industrie

locale. En outre, ils doivent prendre part au processus, non pas en tant qu’observateurs extérieurs, mais

en tant qu’éléments vitaux d’une « coalition de croissance ». Ils doivent convaincre les autorités des

secteurs public et privé, au nom des communautés, et avec leur appui et leur désapprobation, que les

éléments qui font l’objet d’une planification constituent des structures, des rituels et des sites

caractéristiques de la vie locale. C’est pour cette raison que la planification culturelle doit être associée

aux autres activités de planification et non se faire après coup.

Planification

Il est important de ne pas prendre ce mot à la légère. La planification forme la base organisationnelle

sur laquelle reposent tous les autres éléments. Les planificateurs créent des espaces ; les gens et les

communautés transforment les lieux, dans le cadre de leurs activités quotidiennes, en quelque chose

qui, bien souvent, ne correspond pas aux intentions premières des planificateurs. Cette constatation

n’est pas une remarque populiste : les planificateurs sont nécessaires. Cependant, il convient d’élargir

leur travail, afin que leurs plans tiennent compte des aspects éthiques, et ce, grâce à des consultations.

Il convient de les aider à élargir leur manière de penser et à aborder les problèmes de manière

originale, voire moins soignée.

18

Tourisme culturel Alors qu’il constitue depuis longtemps la base du tourisme en Europe, le tourisme culturel connaît un

formidable essor à l’échelon mondial. Le tourisme lié au patrimoine afro-américain est un mouvement

qui se développe de plus en plus aux États-Unis d’Amérique. Les communautés afro-américaines

reconnaissent désormais et, dans certains cas, redécouvrent leur patrimoine culturel, qui comprend des

sites et des monuments matériels et, plus généralement, une richesse culturelle propre, ainsi qu’une

histoire vieille et passionnante.

Ce mouvement n’a pas été imposé aux communautés ; ce sont elles qui l’ont généré. Au-delà de

l’intérêt que présente le fait de mettre en avant ce patrimoine et d’entrevoir les débouchés

commerciaux qu’il peut offrir, c’est l’envie de redécouvrir et de revendiquer leur patrimoine afro-

américain unique qui a motivées ces communautés. Cela n’est pas nécessairement contradictoire : le

tourisme culturel est à la fois une stratégie de développement économique et une définition et une

redécouverte de traits culturels par la population. Ce secteur offre de vastes possibilités de

développement dans la région océanienne.

3. La politique culturelle Les politiques culturelles :

protègent, promeuvent et renforcent la diversité culturelle sous toutes ses formes ;

soutiennent le secteur de la culture et contribuent à la redynamisation, à l’administration et à la

formation culturelles ainsi qu’à la gestion du patrimoine, des arts, des savoirs, des sites, des

pratiques et des produits culturels de même que d’autres biens connexes ;

sont en place à de nombreux niveaux de la société et à l’échelon national, sont susceptibles de

procurer la structure conceptuelle requise pour favoriser la créativité et la diversité culturelles, en

contribuant ainsi au développement et à la construction positive d’un pays ;

doivent, dans l’idéal, faire office de garde-fou contre la disparition de certains aspects de la culture,

ou les protéger si ceux-ci sont menacés, tout en offrant à l’ensemble des acteurs de la culture la

possibilité de reconnaître, de célébrer et de prendre part à la régénération culturelle et, partant,

d’améliorer le développement humain ; et

constituent des directives vivantes qui doivent fréquemment faire l’objet de révisions et

d’évaluations, afin de les adapter, entre autres, aux évolutions démographiques, politiques et

environnementales qui surviennent au fil du temps.

La politique culturelle constitue une ligne d’action (directives et orientations visant à régir et à gérer

les conduites et l’affectation des ressources) fixée par des organismes et des parties prenantes des

pouvoirs publics et des entités de gouvernance, en lien avec le secteur ou le domaine culturel, tel que

défini par les autorités compétentes à l’échelon international, régional, national ou sous-national. En

règle générale, ce secteur englobe les arts, le patrimoine (matériel et immatériel), les industries

créatives et culturelles, voire parfois le sport, le tourisme et la religion. Ces différentes composantes de

la politique culturelle sont examinées plus en détail dans l’encadré « Comprendre la politique

culturelle » ci-après.

19

Comprendre la politique culturelle En vue d’apporter des éclaircissements sur ce que recouvre une politique culturelle, nous nous

intéressons ici de manière plus approfondie à ses différentes composantes.

Qu’entend-on par « politique » dans politique culturelle ?

Étant donné que, dans son acception moderne, le terme « politique » évoque quelque chose d’assez

morne et bureaucratique, il est intéressant d’en rappeler l’histoire. Ce mot vient du grec ancien

politeia, qui a trait à la « politique », à la « citoyenneté » ainsi qu’à la gestion et à la gouvernance des

conduites de manière générale. En italien et en français modernes, l’équivalent anglais de « politique

culturelle » peut également être traduit par « lignes de conduite » et « linea de condotta » (en italien).

Auparavant, en anglais, ce terme désignait la manière dont une personne s’occupait de sa propriété ou

de son jardin.

Par conséquent, le terme politique au sens large ne renvoie pas uniquement à la prise de décision par

les autorités nationales ; il s’agit en effet de la manière dont nous identifions, gérons et allouons nos

ressources, qu’elles soient naturelles, économiques, sociales ou culturelles. Ce terme fait davantage

référence à la gouvernance (qui implique chacun de nous) qu’aux pouvoirs publics (à savoir les

hommes politiques). La politique culturelle correspond donc à la gouvernance et à la gestion des

ressources culturelles.

Qu’entend-on par « culturel » dans politique culturelle ?

La nature d’une politique « culturelle » est essentiellement déterminée par ce que l’on entend par cet

adjectif, c’est-à-dire ce que l’on estime gérable et gouvernable. Par exemple, dans la plupart des

systèmes européens et des autres sociétés occidentales, les arbres et les végétaux (igname, lierre

arborescent, kava) ne sont pas considérés comme des éléments culturels, alors qu’ils le sont en

Océanie. De même, dans la majorité de ces sociétés, la terre, la mer et le ciel sont principalement

assimilés à des ressources exploitables pour le transport, la construction immobilière et les affaires. En

Océanie, en revanche, ces ressources essentielles revêtent également une signification et une

importance culturelles fondamentales, ce dont la plupart des pays occidentaux commencent tout juste à

se rendre compte.

Jusqu’à une date récente, ce patrimoine de manière générale et, depuis moins longtemps encore, les

savoirs traditionnels et le patrimoine culturel immatériel, qui constituent des ressources culturelles

particulièrement importantes dans le Pacifique, n’étaient pas considérés comme des éléments ayant

véritablement leur place dans une politique culturelle (habituellement définie, d’après les critères

européens, comme étant une « politique artistique »). Aujourd’hui, ce point de vue est radicalement

remis en question et révolutionné par les contributions de l’Océanie et d’autres pays et régions en

développement.

Ce que l’on peut attendre d’une politique culturelle

Là encore, il y a relativement peu de temps que l’on a commencé à réaliser le potentiel considérable

des industries créatives et culturelles, à savoir de l’économie créative comme l’appellent désormais

officiellement l’Union européenne (UE), la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le

développement (CNUCED), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et

l’UNESCO. Ces organisations emploient ce terme pour un large éventail de domaines connexes,

notamment : création d’emplois et sources de revenus ; renforcement du sentiment d’identité et de

fierté ; tourisme lié au patrimoine et à la culture qui engendre d’importantes recettes ; reconnaissance

inédite des lieux et de l’importance que ceux-ci présentent ; ainsi que nouveaux savoir-faire, sources

20

d’inspiration et innovations, s’inscrivant dans une économie mondiale de plus en plus fondée sur le

savoir et sur la créativité. L’Océanie, forte de sa diversité en matière de ressources créatives et

culturelles encore peu connues, est parfaitement à même de s’engager sur cette nouvelle voie et, ainsi,

aux côtés des autres régions du monde, de relever avec assurance les divers défis qui se posent à cet

égard.

Pourquoi entreprendre la cartographie, la planification et l’élaboration

de politiques culturelles? La cartographie, la planification et l’élaboration de politiques culturelles offrent aux communautés

locales et nationales ainsi qu’aux acteurs du secteur culturel la possibilité de mettre en évidence un

potentiel régulièrement ignoré dans la perspective du développement des États et Territoires insulaires

océaniens. De plus, il s’agit d’une initiative intégrée, stratégique et potentiellement novatrice.

Rares sont les programmes de développement qui visent ou reconnaissent explicitement le potentiel de

la culture, ou qui établissent un lien entre créativité et innovation, d’une part, et ressources culturelles

des populations océaniennes d’autre part. En conséquence, la culture est très peu souvent érigée en

priorité lors des investissements et de la planification stratégique à l’échelon national ou régional.

Entreprendre la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques culturelles permet avant

tout de faire reconnaître la valeur et le potentiel des savoirs, des pratiques et de la créativité inhérents

aux communautés océaniennes, dans toute leur diversité. Une fois qu’ils auront pris conscience de ce

potentiel et de cette valeur, les dirigeants, à tous les niveaux, seront en mesure de comprendre

l’avantage comparatif que possède la région dans le domaine de la culture. Ils pourront également

mieux saisir en quoi la définition et la structuration du secteur de la culture sont susceptibles de

consolider le potentiel économique et social des activités, des sites, des expressions et des savoirs

culturels.

Ce processus vise à mieux cerner les domaines et les éléments qui doivent être protégés, afin d’éviter

qu’ils ne disparaissent ou que leur commercialisation ne les dénature. Par ailleurs, il contribue à

l’épanouissement de l’expression créative ainsi qu’au développement de produits culturels, d’idées, de

signes, de symboles et de sons qui ont parfaitement leur place sur le marché mondial.

21

Le potentiel créatif des îles Très loin au nord, dans la région arctique de l’Atlantique Nord, se trouve une île de 320 000 habitants,

une population relativement restreinte d’après les critères européens. Ces individus sont les

descendants d’anciens navigateurs nomades et possèdent un riche patrimoine culturel oral et

immatériel, connu sous le nom de « sagas » ou histoires, dont la forme écrite ne date que des XIIe et

XIIIe siècles. Ce n’est que vers la fin du XIX

e siècle que les premières productions musicales et

théâtrales y furent interprétées en public. Ce riche patrimoine culturel immatériel est exprimé dans une

langue qu’aucun autre peuple européen ne comprend, et tous ces insulaires maîtrisent parfaitement

l’anglais ainsi que d’autres langues nordiques, et ce, alors même que leur langue demeure très présente

dans la littérature, la musique, la création, la mode, le cinéma et les jeux vidéo.

En 2007, cette île à la population restreinte, isolée de l’Europe et de tout autre continent, occupait la

première place du classement des pays les plus développés de la planète suivant l’indice de

développement humain du PNUD, un indicateur qui fait autorité. En 2010, elle a été considérée le

« pays le plus novateur » au monde, laissant les États-Unis d’Amérique (un pays 1 000 fois plus vaste)

à la quatrième place. Cette île présente le niveau de connexion Internet haut débit le plus élevé de l’UE

et de l’Espace économique européen (EEE), elle n’a jamais délibérément pris part à un conflit armé

depuis l’arrivée des Vikings au IXe siècle, et ses programmes scolaires intégrant les arts dans

l’éducation sont jugés excellents. D’après les informations contenues dans le dernier rapport en date

émis par l’UE, sur l’ensemble des pays de l’UE et de l’EEE, c’est cette île qui, par rapport à sa

population active totale, affiche le plus fort taux de professionnels intervenant dans les industries

culturelles et créatives. De plus, les trois derniers James Bond et les deux derniers films de Clint

Eastwood (qui se déroulent officiellement dans le Pacifique) y ont été tournés.

Cette île, comme vous l’avez peut-être déjà deviné, c’est l’Islande. En dépit de son éloignement, de

l’activité du volcan Eyjafjallajökull et de la récente crise financière qu’a connue le pays, le nombre de

touristes continue de croître de manière exponentielle, et ce, alors même que ceux-ci n’ont d’autre

choix que d’atterrir sur l’unique aéroport international de l’île ou d’entreprendre un périple de deux

jours en bateau à partir de l’Europe continentale. En outre, les investissements étrangers reprennent

eux aussi.

D’autres îles ont connu un succès comparable : la Jamaïque avec le reggae, Cuba grâce au Buena Vista

Social Club, Singapour en raison des prouesses de ses industries créatives et de son ambition de

devenir « la capitale asiatique de la culture », ainsi que Taïwan, aux prouesses et aux ambitions

similaires. À quoi peut bien être due la réussite de ces îles ? À l’évidence, la réponse ne réside pas

dans l’importance de leur population, dans l’efficacité de leurs stratégies géopolitiques ni dans leur

poids économique.

Les ingrédients de leur réussite découlent avant tout du caractère distinctif, de l’ingéniosité, de

l’indépendance d’esprit, de la créativité et de la culture de chacune de ces îles, ingrédients dont

regorge assurément l’Océanie.

22

Comment conduire la cartographie, la planification et l’élaboration de

politiques culturelles?

Très concrètement, dans le cadre de la cartographie, de la planification et de l’élaboration de politiques

culturelles, des équipes plurisectorielles œuvrent de concert, en partageant une vision et des objectifs

communs. Le travail qu’elles accomplissent est le suivant :

rassembler des informations qualitatives et quantitatives sur les biens culturels auprès d’un large

éventail de parties prenantes – communautés, services de la statistique, divers organismes de

conservation du patrimoine et services de l’administration publique, acteurs et consommateurs du

secteur culturel, médias et secteur privé – en s’appuyant sur des infrastructures, des ressources, une

formation et un budget appropriés à cette fin ;

évaluer et analyser les informations recueillies sur les biens culturels, en vue de jeter les bases de la

planification culturelle ; et

entreprendre la planification culturelle, en adoptant une démarche collaborative qui tienne compte

des idées et des idéaux des populations et qui respecte les divers besoins de l’ensemble des parties

prenantes de la culture.

Les politiques et plans culturels qui en découlent peuvent se révéler utiles à de nombreux égards sur le

plan économique et social, tout en permettant aux dirigeants et aux communautés de repenser et de

réévaluer leurs ressources culturelles créatives, aussi bien matérielles qu’immatérielles.

La liste de contrôle ci-après donne des indications sur les différentes étapes à suivre dans le cadre de la

cartographie, de la planification et de l’élaboration de politiques culturelles.

Liste de contrôle de la cartographie, de la planification et de l’élaboration de politiques culturelles

Préparation

Titre du projet (envisager un titre en langue autochtone ou en lingua franca)

Attribuerez-vous à votre projet un nom distinctif, créatif et reconnaissable par les

acteurs de la culture ?

Principes de base

Les dirigeants politiques et communautaires comprennent-ils en quoi la cartographie, la

planification et l’élaboration de politiques culturelles seraient souhaitables, utiles et

stratégiques ? Est-il nécessaire d’élaborer au préalable des principes de base

conjointement avec les acteurs de la culture, afin que tous adhèrent à ce projet ? Est-il

nécessaire de conduire un débat national sur la culture en vue d’établir une politique

culturelle nationale ?

Vision Quelle est la vision créative générale de votre projet ? Quel est le résultat final

escompté ? Par exemple, s’agit-il de la paix ou de la stabilité, de la prospérité

économique, de la redynamisation de la culture ou de la structuration du secteur

culturel ? Avez-vous à cœur de réaliser la cartographie, la planification et l’élaboration

de politiques culturelles de manière transparente et en rendant compte de vos actions ?

23

Chefs de file/parrains

Qui devez-vous intégrer au projet, personnalité ou groupe important de personnes

respectées, afin que celle(s)-ci oriente(nt) vos activités et vous apporte(nt) des

conseils ?

Objectifs/buts

Quels sont les objectifs ou les buts de la cartographie, la planification et l’élaboration

de politiques culturelles ? Avez-vous l’intention de : lancer un débat national sur la

culture, de manière à faire participer l’ensemble des acteurs ; faire en sorte que la

culture soit placée au centre des priorités dans le cadre de la planification des zones

urbaines et rurales ; ou définir une politique culturelle nationale souple et stratégique ?

Plan de travail

Quels procédure échelonnée et calendrier détaillé devez-vous mettre en place en vue

d’entreprendre la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques ?

Groupe de travail plurisectoriel

Votre groupe de travail est-il composé de représentants de l’ensemble des secteurs

concernés ? Dans un premier temps, les membres du groupe pourront notamment

appartenir aux services en charge du patrimoine, de l’éducation, de la jeunesse, de la

condition féminine, des arts visuels et du spectacle ou du tourisme. À plus long terme,

il conviendra également d’obtenir le soutien d’acteurs des secteurs du commerce, de la

finance, de la santé, de la planification/du développement urbain(e) et régional(e), ainsi

que, éventuellement, de l’agriculture, de la pêche et de la foresterie.

Infrastructures, gestion et ressources

Le personnel à votre disposition est-il formé de manière appropriée à la conduite d’un

tel projet ? Bénéficiez-vous du soutien et des moyens logistiques requis pour

entreprendre les consultations et pour rassembler les informations qualitatives et

quantitatives dont vous avez besoin ?

Gestion des risques

Disposez-vous d’un plan de gestion des risques et d’intervention en cas d’urgence pour

les phases de cartographie, de planification, de mise en œuvre et d’élaboration de

politiques de votre projet ?

Communication

Vos plans comprennent-ils une stratégie de communication visant à tenir les parties

prenantes informées du déroulement du projet ?

Budget

Disposez-vous des fonds nécessaires pour mener vos activités dans les délais prévus ?

Avez-vous la possibilité d’obtenir un soutien financier et en nature de la part de divers

secteurs ou organisations, en vue d’appuyer vos actions ? Votre budget vous permet-il

d’atteindre vos objectifs à court et long terme, notamment de pérenniser le secteur

culturel ?

24

Cartographie culturelle

Identification des parties prenantes

Quelles sont les parties prenantes qu’il faudrait intégrer au projet de cartographie ou

consulter dans ce cadre ? Si l’on part du principe que chaque personne constitue un

acteur de la culture et que votre objectif est d’élaborer une politique culturelle

nationale, comment pouvez-vous parvenir à établir le contact avec les communautés ou

le grand public ?

Aperçu de la situation actuelle

Que recèle d’ores et déjà le secteur de la culture et, par conséquent, que doit-on

cartographier en premier lieu? Disposez-vous d’un conseil national de la culture ou des

arts ? Existe-t-il des musées, des galeries d’art, des archives, des universités, des

studios d’enregistrement, des troupes de théâtre, des organisateurs de manifestations,

des lieux de représentation ou des festivals régulièrement organisés ? Des

réglementations ou des politiques relatives à la culture sont-elles d’ores et déjà en

place ? Dispose-t-on dès à présent de statistiques sur la culture ? Réalisez une analyse

de la situation du secteur culturel de votre pays.

Consultations et recueil de données qualitatives

Quelles sont les informations qualitatives que vous êtes en mesure d’obtenir au sujet

des ressources culturelles, des pratiques, des valeurs, des souvenirs ainsi que des

espoirs que les populations nourrissent pour l’avenir ? Recueillez ces informations à la

fois de manière individualisée, en élaborant et en soumettant des enquêtes et des

questionnaires, et auprès de groupes, en mettant en place des séminaires, en vous

adressant à des groupes cibles, en organisant des assemblées de wantoks ou talanoa

ainsi qu’en consultant les communautés.

Consultations et recueil de données quantitatives

Quelles sont les statistiques culturelles que vous êtes en mesure de recueillir à partir de

diverses sources ? Il peut notamment s’agir du nombre de producteurs culturels,

d’employés dans ce secteur et de spectateurs, ainsi que des recettes et des dépenses

relatives à des manifestations culturelles, du financement d’activités artistiques et

culturelles, des échanges commerciaux concernant des services et des biens culturels,

des dépenses des ménages en matière de culture et du nombre d’organisations

culturelles.

Recherches sur les démarches et modèles adoptés à l’échelon régional et

international

Vous êtes-vous intéressés à d’autres modèles et démarches, afin de vous rendre compte

ce qui est susceptible de fonctionner ou non pour votre projet ? Il est possible qu’un

modèle ou une démarche soit efficace dans le contexte de votre pays une fois adapté ou

associé à d’autres méthodes originales ou informations spécifiques à l’Océanie.

Compilation des données et des analyses relatives aux biens culturels

Avez-vous organisé les données dont vous disposez par indicateurs reflétant la santé et

la vigueur de la culture en général, et fixé des points de référence visant à mesurer les

progrès accomplis en faveur des objectifs ultimes recherchés par les acteurs de la

culture ? Vous pourriez vous appuyer sur un cadre local ou autochtone pour organiser

ces données de manière utile et constructive.

25

Évaluation et présentation de rapports

Disposez-vous d’un cadre d’évaluation de votre projet de cartographie ? Présentez-

vous régulièrement vos travaux aux dirigeants, communautés et autres parties

prenantes, afin de bénéficier de leurs commentaires et observations ?

Planification culturelle

Définition des priorités des parties prenantes

Quelles sont les différentes priorités des personnes et organismes consultés dans le

cadre du projet de cartographie ?

Est-il possible de formuler quelques priorités clés, visant à orienter la planification, à

partir de celles-ci ?

Comment entendez-vous gérer les attentes contradictoires des diverses parties

prenantes ?

Identification des structures politiques existantes

Quels sont les politiques, les instruments juridiques, les conseils ou les comités visant à

soutenir, à protéger ou à promouvoir la culture d’ores et déjà en place ? Existe-t-il des

liens plurisectoriels entre ceux-ci ?

Affinement des objectifs stratégiques

Vos objectifs sont-ils alignés sur vos priorités et fondés sur des politiques et des lois en

vigueur ?

Des modifications ou des améliorations doivent-elles y être apportées ?

Rédaction des plans

Avez-vous préparé une ébauche de votre plan ? Avez-vous soumis cette ébauche aux

dirigeants et aux autres parties prenantes afin d’obtenir leur avis ?

Consultations et réactions (en continu)

Recueillez-vous régulièrement les réactions des acteurs des divers secteurs à propos de

votre projet ?

Mise en œuvre

Avez-vous procédé à la mise en œuvre de vos plans par l’entremise des services de

l’administration publique et des organisations concernés ? Avez-vous prévu la conduite

de formations appropriées et le renforcement des capacités, le cas échéant ?

Suivi et analyse (en continu)

Dans le cadre de la mise en œuvre des plans, des dispositifs de communication des

réactions sont-ils prévus ? Êtes-vous disposés à admettre vos erreurs, à en tirer des

enseignements et à modifier vos activités en conséquence, s’il y a lieu ?

26

Élaboration de politiques culturelles

Prise en compte de l’environnement juridique et des politiques en place

Les travaux que vous menez en faveur d’une politique culturelle s’inscrivent-ils dans

l’environnement existant ? L’échelon local comme l’échelon national sont-ils pris en

considération à cet égard ?

Identification des enjeux et des lacunes

Avez-vous identifié les domaines où des politiques doivent être élaborées et mises en

relation avec la planification sectorielle, statistique, financière, urbaine, rural et du

développement ? Les principaux plans et politiques locaux et nationaux prennent-ils en

compte la culture ?

Objectifs des politiques

Dans votre politique culturelle, avez-vous fixé des objectifs clairs, stratégiques et

intégrés ? Ceux-ci peuvent-ils être atteints à l’échelon local ou national ?

Rédaction des politiques, consultations et réactions

Avez-vous préparé une ébauche des politiques et soumises celles-ci à l’attention des

conseillers et des parties prenantes ? Recueillez-vous régulièrement les réactions des

acteurs des divers secteurs à cet égard ?

Recommandations sur le plan juridique

Les lois en vigueur appuient-t-elles vos projets de politiques, ou une nouvelle

législation en faveur de la culture doit-elle être établie à long terme ?

Analyse des risques, coûts et avantages et éventuelles difficultés de mise en œuvre

Avez-vous songé aux diverses difficultés susceptibles de survenir lors de la mise en

œuvre de la politique ?

Avez-vous une idée précise des coûts et des avantages inhérents aux actions

suggérées ?

Mise en œuvre

Les nouvelles politiques établies par vos soins ont-elles les retombées escomptées ?

Permettent-elles de soutenir de manière durable les nouveaux services culturels et

résultats connexes ?

Suivi et analyse (en continu)

Dans le cadre de la mise en œuvre des plans, des dispositifs de communication des

réactions sont-ils prévus ? Êtes-vous disposés à tirer les enseignements de ces réactions

et à procéder à des modifications en conséquence, s’il y a lieu ?

27

Figure 2. Ces porte-monnaie tressés ont été fabriqués par la communauté du domaine du chef Roi Mata,

site inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, à Vanuatu.

28

ANNEXE A : Rapport de l’atelier consacré à la cartographie, la

planification et l’élaboration de politiques culturelles Présenté par Katerina Teaiwa

Le premier atelier régional consacré à la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques

culturelles conduit en Océanie s’est tenu à Nouméa (Nouvelle-Calédonie), au mois de mars 2010, dans

le cadre d’un projet plus large mené par la CPS, Structuration du secteur culturel océanien en vue

d’améliorer le développement humain, financé par la Commission européenne et axé sur la politique

culturelle et le renforcement des capacités en Océanie. Parmi les participants figuraient l’ensemble des

membres présents du Conseil des arts et de la culture du Pacifique, ainsi que des représentants des six

pays ciblés par le projet d’élaboration de politiques culturelles : États fédérés de Micronésie, Palau,

Tuvalu, Tonga, Îles Salomon et Vanuatu.

L’atelier a été animé par Colin Mercer, consultant et spécialiste international en matière de politique

culturelle, ainsi que par Katerina Teaiwa, spécialiste régionale des études sur le Pacifique à

l’Australian National University. Les diapositives présentées par ces intervenants lors de l’atelier

figurent à l’annexe B.

Les objectifs de cet atelier étaient les suivants :

examiner les contextes ainsi que les capacités aux échelons national et régional pour

l’accomplissement du travail en faveur d’une politique culturelle ;

29

prendre conscience du caractère exceptionnel, spécifique et concurrentiel des ressources culturelles

de l’Océanie ;

former les agents en charge de la culture dans les méthodes et la terminologie propres à la

cartographie, la planification et l’élaboration de politiques culturelles ;

réaliser des exercices pertinents par rapport à un tel projet ;

préparer un rapport sur les points abordés lors de l’atelier ; et

créer un guide de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques culturelles à

l’intention des agents en charge de la culture et des autres parties prenantes de ce secteur dans le

Pacifique.

Points abordés lors de l’atelier Des progrès ont été accomplis par les États et Territoires océaniens en faveur de la cartographie, la

planification et la mise en œuvre de politiques culturelles nationales. La Papouasie-Nouvelle-Guinée

est le seul pays à être d’ores et déjà doté d’une telle politique, celle-ci étant d’ailleurs en cours de

révision suite à des consultations menées sur une période d’un an et demi. Le Samoa dispose quant à

lui d’un projet de politique nationale, tandis que Tuvalu et les Îles Fidji ont conduit de vastes

consultations à cette fin. Le projet incomplet des Îles Fidji est en cours de réalisation depuis plusieurs

années et ce pays a amorcé la cartographie des savoirs traditionnels, entreprise aux résultats très

prometteurs. Vanuatu met régulièrement en œuvre des programmes d’inventaire des savoirs

traditionnels et dispose de deux politiques nationales connexes sur la recherche et la documentation en

matière de culture. Les dix-sept autres États et Territoires membres de la CPS, sur vingt-deux au total,

sont dotés de politiques pertinentes à cet égard, en lien, par exemple, avec l’éducation, la jeunesse ou

la condition féminine. En outre, des manifestations et des programmes culturels divers et variés y sont

en place, sans pour autant s’inscrire dans une politique nationale stratégique et exhaustive.

De nombreux dirigeants n’ont pas conscience que la culture, tout aussi « vivante » et fluctuante qu’elle

soit, doit être planifiée ou encadrée par une politique. Par conséquent, l’une des composantes

essentielles de cet atelier a été d’échanger sur les types de manifestations entreprises à l’échelon local,

national et régional, ainsi que sur les autres catalyseurs potentiels du changement, ce qui a conduit les

participants à reconnaître la nécessité de cartographier, planifier et élaborer des politiques en matière

culturelle. Parmi ces catalyseurs figurent la prise de conscience soudaine de la disparition de la culture

matérielle et immatérielle, ou de la menace qui pèse sur celle-ci, un festival artistique organisé à

l’échelon national ou régional ainsi que tout autre événement de ce genre, la demande croissante

émanant du secteur touristique ou l’apport de fonds d’aide et de développement au profit de la culture.

Une plus grande attention tend à être accordée à la conservation et à la promotion de la culture, de

même qu’à la fourniture d’infrastructures destinées à appuyer ces objectifs, au sein des États et

Territoires où la population autochtone est minoritaire et où elle n’exerce pas de contrôle souverain,

comme en Australie, en Nouvelle-Calédonie, à Wallis et Futuna, à Hawaii, à Guam et à Aotearoa

(Nouvelle-Zélande). Tous ces États et Territoires, où le risque d’érosion culturelle apparaît plus

clairement, sont constamment confrontés à des difficultés, qu’il s’agisse de pérenniser les programmes

ou de trouver le juste équilibre entre, d’une part, la coutume ou les savoirs traditionnels et, d’autre

part, les nouvelles pratiques et idées introduites.

Même si, dans le cadre de cet atelier, l’objectif était d’aborder les questions en lien avec

l’établissement d’une politique culturelle en se fondant sur une définition assez large et ouverte de la

culture, il est nettement apparu que, pour les participants, ce projet présentait avant tout de l’intérêt

30

pour les valeurs, pratiques et cultures autochtones et « traditionnelles » du Pacifique. De plus, une

importance toute particulière était accordée à la nécessité de protéger, conserver et transmettre cette

culture. Compte tenu du statut minoritaire des cultures autochtones dans le monde entier et, tout

particulièrement, dans les États et Territoires susmentionnés, il n’est guère étonnant que cette forme de

culture ait été privilégiée. L’Océanie se distingue aussi des autres régions du monde, car les États et

Territoires qui la composent sont gouvernés par des peuples autochtones et sont constitués de sociétés

qui s’articulent autour de principes fondamentaux, comme la primauté des liens de parenté et la

relation entre l’homme et sa terre ou le lieu où il habite.

Néanmoins, à l’échelle mondiale, la cartographie, la planification et l’élaboration de politiques

culturelles visent également à soutenir les industries créatives et culturelles qui s’appuient

nécessairement sur un large éventail d’idées et de sources culturelles. Les Océaniens sont eux aussi

exposés aux idées, formes, symboles et sons populaires dans le monde entier, et ce sont tout

particulièrement les jeunes qui tirent le plus parti de ce choix culturel, en en reproduisant certains

aspects à leur façon. De plus, de très importants flux migratoires internes sont enregistrés, en raison de

l’installation en ville d’Océaniens issus de zones rurales, et le Pacifique accueille également un

nombre croissant d’immigrés originaires d’autres régions. Par conséquent, la politique culturelle doit,

dans l’idéal, intégrer les valeurs et intérêts partagés par les jeunes ou présents dans les cultures

autochtones, mais aussi ceux des immigrants et des habitants non autochtones, et en tenir compte. Elle

doit également prendre en considération la riche diversité des formes et des idées culturelles en

Océanie.

S’agissant des savoirs, valeurs, idées et pratiques, autochtones ou introduites, la question de la

propriété intellectuelle, du droit d’auteur et de la propriété collective présente une importance capitale

pour les peuples océaniens. Dans le Pacifique, une grande partie des savoirs se transmettent

uniquement au sein de lignées généalogiques ou de tribus précises, en respectant des protocoles stricts.

Sur le marché mondial, les contenus culturels transnationaux inédits et originaux sont très prisés, et les

communautés océaniennes pourraient bénéficier d’avantages concurrentiels à cet égard. Cependant,

pour les Océaniens, le fait d’honorer leurs ancêtres et d’observer des coutumes auxquelles ils vouent

un grand respect revêt généralement davantage d’importance qu’adopter une position concurrentielle.

Le représentant du Samoa a résumé succinctement cet état d’esprit en rappelant l’axiome océanien :

« Nous vivons pour les défunts ».

Parvenir à trouver le juste équilibre entre les exigences du passé et celles de l’avenir constitue une

difficulté à laquelle les peuples océaniens sont constamment confrontés.

Des ressources culturelles exceptionnelles en Océanie Dans le monde entier, l’image de l’Océanie est généralement celle d’un endroit de petite taille, dont la

population restreinte vit sur des îles minuscules et connaît l’un ou l’autre des scénarios suivants :

paradis ou crise. Ce point de vue est souvent repris à leur compte par les Océaniens eux-mêmes, ce

qui, par conséquent, limite leurs chances de participer sur un pied d’égalité aux instances géopolitiques

ou culturelles à l’échelon international. Au début de l’atelier, l’accent a été mis sur certaines

caractéristiques exceptionnelles du Pacifique, caractéristiques que les Océaniens peuvent souligner,

notamment lorsqu’ils réfléchissent et œuvrent de concert en tant que région :

L’océan Pacifique recouvre plus d’un tiers de la planète. L’ensemble des continents pourraient y

être contenus, et il resterait encore de la place. Lorsque les navigateurs océaniens traversèrent cet

31

océan et s’installèrent sur diverses îles de la région, ils entreprirent l’une des migrations et l’un des

périples les plus incroyables de l’histoire de l’humanité. Il est essentiel que les Océaniens se servent

de cette histoire comme ressource et qu’ils s’en inspirent dans leur marche vers l’avenir.

Plus de 20 pour cent des langues de la planète sont parlées en Océanie par moins d’un pour cent de

la population mondiale. Le Pacifique se targue ainsi de la plus forte diversité culturelle par habitant

de la terre. Malgré les distances, à la fois physiques et intellectuelles, entre les îles de l’est, l’ouest,

le nord et le sud, il existe de véritables liens entre celles-ci, comme en attestent des recherches

scientifiques ainsi que les traditions orales et écrites.

Faute d’exploitation à des fins stratégiques par les dirigeants océaniens, ces statistiques ne présentent

généralement qu’un intérêt purement théorique. Puisque la région a été l’une des plus étudiées, en

raison de ses caractéristiques géographiques et culturelles uniques en leur genre, il est crucial

d’associer les savoirs scientifiques, historiques, anthropologiques et linguistiques à la cartographie, à

la planification et à l’élaboration de politiques culturelles, aussi bien comme source d’inspiration

qu’en tant que socle de la planification économique, sociale et culturelle.

Résultats des deux exercices relatifs à l’élaboration d’une politique culturelle La planification culturelle correspond à l’utilisation intégrée et stratégique des ressources culturelles

au profit du développement urbain et communautaire. En Océanie, cette définition est élargie de

manière à inclure également les zones rurales, en sus des communautés et des zones urbaines. La

politique culturelle, d’après la définition qu’en a donnée Colin Mercer lors de l’atelier, constitue :

Une politique (directives et orientations visant à régir et à gérer les conduites et l’allocation des

ressources) fixée par des organismes et des parties prenantes des pouvoirs publics et des entités de

gouvernance, en lien avec le secteur culturel ou le domaine culturel (« culture »), comme défini par

les autorités compétentes à l’échelon international, régional, national ou sous-national. En règle

générale, elle englobe les arts, le patrimoine (matériel et immatériel), les industries créatives et

culturelles, voire parfois le sport, le tourisme et la religion.

Néanmoins, avant même d’entreprendre une planification, il est essentiel d’avoir pleinement

conscience de la nature et de la diversité de telles ressources culturelles, ainsi que du « secteur »

culturel et de ses différents « domaines », aux échelons local et national. De plus, il est nécessaire de

parfaitement comprendre la nature et l’ampleur des investissements (économiques, sociaux et

culturels) consentis par les différents groupes sociaux à ces égards.

Deux exercices ont été réalisés en vue de simuler un projet de cartographie, de planification et

d’élaboration de politiques culturelles à l’échelon national. Dans un premier temps, en vue de mieux

connaître les ressources culturelles d’un État ou d’un Territoire, les participants ont échangé sur la

manière dont ils organiseraient un débat national sur la culture. Un tel débat, quelle que soit la

forme qu’il prendrait, permettrait de définir l’objet, la cible et les modalités du projet, à savoir les

principes de bases de la cartographie, de la planification et de l’élaboration de politiques en matière

culturelle. Envisager un débat national sur la culture permettrait également de souligner le fait que

chaque individu est un « acteur de la culture », et non pas seulement les agents en charge de la culture,

les chefs traditionnels, les chercheurs ou les pouvoirs publics. Si les politiques ne sont pas fondées sur

les valeurs et les aspirations de la population dans son ensemble, elles sont vouées à l’échec. Ce

constat vaut également si les populations et les communautés ne participent pas activement à la

cartographie, à la planification et à l’élaboration de politiques.

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Dans le cadre de l’exercice, il a été demandé aux participants d’étudier les questions suivantes :

S’il était possible de conduire un débat national sur la culture, comment formuleriez-vous les

principes de base de celui-ci ? (objet)

Comment procéderiez-vous à sa planification et quels en seraient les principaux participants et

bénéficiaires ? (cible)

Quelles méthodes adopteriez-vous pour toucher l’ensemble des communautés et pour prendre en

considération leurs valeurs et leurs aspirations ? (modalités)

De quelle manière organiseriez-vous, puis présenteriez-vous vos conclusions ? (modalités)

La synthèse des réponses apportées par un groupe est présentée ci-après, afin d’illustrer la manière

dont les participants ont traité ces questions.

Figure 3. Quelques photos prises dans le cadre du Festival des arts du Pacifique, en 2008, par Alison

Fleming.

Un débat national sur la culture ? Réponses du groupe composé de représentants de Wallis et Futuna, de Tuvalu et des Tonga

Objet

La connaissance de la culture contribue à la coexistence pacifique.

Améliorer les connaissances relatives à la culture traditionnelle, en termes, notamment, de valeurs

et de savoirs. Aider les populations à se forger une identité et à comprendre les protocoles locaux.

Le fait de connaître les valeurs culturelles aide les populations à évaluer les valeurs culturelles

nouvelles et importées, et à dresser des comparaisons entre celles-ci, notamment en matière de

droits de la personne, de gouvernance, etc.

Le fait de connaître les moyens de subsistance traditionnels et durables permet aux populations de

mieux comprendre l’attention particulière accordée actuellement au développement durable.

Cibles

Les participants

Les chefs traditionnels

Les dirigeants politiques

Les jeunes

Les femmes

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Les étudiants

Les représentants des minorités

Modalités

Talanoa (dialogue et débats formels et informels)

Fono (assemblées, conseils et réunions)

Consultations et groupes de discussion

Médias (radio, presse, télévision, Internet)

Enquêtes par le biais de questionnaires :

Faire participer des associations de jeunes et de femmes aux enquêtes

Il serait également possible de s’appuyer sur les enseignants de l’ensemble du pays.

Envoyer les questionnaires à la diaspora.

Le second exercice consistait à établir une liste exhaustive des parties prenantes du projet de

politique culturelle. Les participants avaient le choix entre aborder cette tâche comme un exercice

national ou traiter celle-ci comme étant une activité ciblée sur un projet ou un programme précis. Le

fruit de la réflexion des représentantes d’Hawaii est reproduit ci-après succinctement à titre d’exemple.

Projet relatif à Hawaii Soumis par Melody Kapilialoha MacKenzie et Mapuana de Silva Enrayer la disparition du savoir-faire culturel relatif à la vannerie basée sur des végétaux traditionnels d’Hawaii, lauhala (pandanus) et makaloa (herbe).

Mettre en contact les parties prenantes de la politique culturelle :

Maîtres vanniers de lauhala et makaloa, ainsi que leurs familles

Vanniers de lauhala qui exercent actuellement

Groupes structurés de vanniers, par ex. Ulana Lauhala o Kona

Quels types de questions poseriez-vous à ces personnes en vue de recueillir des informations sur la

culture ?

Nom, lieu de naissance, généalogie (en lien avec la vannerie)

Depuis combien de temps êtes-vous vannier et comment avez-vous appris ?

Quels sont les kapu (protocoles sacrés ou tabous) attachés à cette pratique ?

Quel est votre sentiment vis-à-vis de la transmission de ce savoir-faire à des tiers ?

Dans quelles conditions accepteriez-vous de transmettre ce savoir-faire ?

Une ou plusieurs personnes sont-elles actuellement en apprentissage auprès de vous ?

Parmi vos apprentis/élèves, combien seraient susceptibles de devenir maîtres ?

Souhaiteriez-vous enseigner votre art à davantage d’élèves ?

Certains de vos apprentis peuvent-ils accepter d’autres élèves en ce moment ?

Commercialisez-vous votre production ? Le cas échéant, pouvez-vous préciser votre fourchette de

prix ?

Ce travail/cette pratique culturelle vous permet-il/elle de gagner votre vie ?

Parvenez-vous à subvenir à tous vos besoins et, dans le cas contraire, quelles sont vos autres

sources de revenus ?

(Facultatif : quel est le revenu annuel moyen que vous retirez de la vannerie ?)

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Où pratiquez-vous la vannerie ?

Existe-t-il un endroit dédié à cette pratique ?

Dans le cas contraire, souhaiteriez-vous disposer d’un lieu exclusivement consacré à la réalisation

de votre travail ?

Réfléchir aux types de renseignements devant être recueillis et à la manière dont ceux-ci pourraient,

par la suite, donner lieu à un indicateur de la culture :

À l’heure actuelle, quel est le nombre de maîtres vanniers ?

À combien d’apprentis ces maîtres inculquent-ils leur savoir-faire ?

Combien de membres de la famille de chaque maître pratiquent-ils actuellement la vannerie ?

Quel est le nombre total d’élèves rattachés à l’ensemble des maîtres et apprentis ?

Établir une liste des indicateurs potentiels allant de pair avec ces questions :

Seuls quelques maîtres continuent de pratiquer la vannerie à l’heure actuelle.

Les maîtres vanniers disposent d’apprentis, mais sont conscients de la nécessité d’augmenter le

nombre de ceux-ci.

Étant donné que, souvent, les membres de la famille des maîtres vanniers ne souhaitent pas marcher

dans les pas de leurs aînés, il convient d’élargir la diffusion de ce savoir-faire au-delà de la seule

famille.

La part de maîtres, apprentis et élèves pratiquant la vannerie dans la population hawaiienne est

actuellement négligeable.

Plans d’action de six pays en matière de cartographie, de planification et

d’élaboration de politiques culturelles

Le dernier jour de l’atelier, les représentants de cinq pays ont axé leurs efforts sur la préparation d’un

plan d’action relatif aux activités à entreprendre durant l’année à venir au titre de la cartographie, de la

planification et de l’élaboration de politiques culturelles. Vanuatu, qui devait être le sixième pays à

prendre part à cette initiative soutenue par la CPS, n’a pas été en mesure d’y participer.

Cette activité comportait plusieurs volets, notamment :

Trouver un titre pour le projet de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques

culturelles qui marquerait l’imaginaire des ressortissants du pays concerné.

Définir une vision et une mission.

Établir un groupe de travail plurisectoriel chargé de superviser et de mettre en œuvre le plan

d’action, notamment pour ce qui est des dispositions en matière de gouvernance et de gestion.

Préparer un descriptif de fonctions et déterminer les compétences souhaitées pour le consultant

national chargé de prêter son concours au projet.

Dresser la liste des parties prenantes concernées par les consultations à mener lors de la

planification et de la cartographie.

Faire appel aux médias et à d’autres réseaux, afin de diffuser les informations.

Identifier les types d’indicateurs et d’informations qualitatives et quantitatives susceptibles d’être

les plus utiles.

Définir des méthodes appropriées de collecte de ces informations.

Traduire ces données en connaissances, afin de permettre l’élaboration d’une politique nationale.

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Préparer un budget réaliste pour ce projet.

L’état d’avancement du projet de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques

culturelles différait d’un pays à l’autre. Tuvalu, par exemple, avait d’ores et déjà entrepris

d’importantes consultations et son plan était en cours d’élaboration. Les États fédérés de Micronésie

devaient relever un défi logistique de taille : rassembler des informations sur 607 îles et auprès de

quinze groupes linguistiques, sans compter l’importante diaspora présente aux États-Unis d’Amérique.

En tant que pays hôte de la onzième édition du Festival des arts du Pacifique en 2012, les Îles Salomon

éprouvaient un sentiment d’urgence à formuler leur plan, dans l’optique des préparatifs de cette

manifestation. La diversité de situations de chacun de ces pays a permis aux agents en charge de la

culture de réfléchir ensemble et de tirer des enseignements de leurs expériences respectives, ainsi que

de l’expérience des représentants des Îles Fidji, qui ont fait part de certains aspects de leurs stratégies à

ces cinq pays.

Une version abrégée du plan élaboré par les Tonga figure à l’annexe B.

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ANNEXE B : Établissement d’une politique culturelle nationale : projet

de cartographie, de planification et d’élaboration de politiques

ÉCHANTILLON DES TRAVAUX DES TONGA

Préparé par Viliami Fukofuka

1. Les parties prenantes

Pouvoirs publics Autres que les pouvoirs publics

Dirigeants politiques Chefs traditionnels

Hauts fonctionnaires Chefs religieux

Professionnels Représentants de la société civile

Employés Chefs d’entreprise

Étudiants Chefs communautaires

Dirigeants des industries créatives

Touristes

Fournisseurs de matières premières

Artistes traditionnels

Femmes

Jeunes

Minorités

Sportifs

Organisations

Min. de l’emploi, du commerce et de l’industrie Famille royale

Administration locale Églises/autres institutions religieuses

Ministère de la santé Villages/villageois

Ministère du tourisme Groupes de la société civile

Ministère de l’éducation et de la jeunesse Chambre de commerce

Service de l’emploi et de la statistique Associations sportives

Cabinet du Premier Ministre Associations de jeunes

Ministère des affaires étrangères Associations d’hommes

Commission nationale de sauvegarde des traditions Organismes de promotion touristique

Bureau du Palais Organisations d’artistes

Commission nationale de sauvegarde des traditions

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VISION Que tous les Tongans acquièrent des connaissances culturelles et qu’ils

bénéficient des innombrables avantages qui s’y rattachent.

MISSION Assurer un développement culturel entièrement intégré et durable.

BUTS 1. Faire en sorte que tous les Tongans accordent de l’importance à la

culture.

2. Promouvoir la créativité comme facteur de redynamisation culturelle.

3. Favoriser la cohésion sociale et le bien-être individuel.

STRATÉGIES 1. Se mettre en relation avec un chef de file de la culture.

2. Tirer pleinement parti de la promotion médiatique, des débats et de la

diffusion des informations.

3. Faire du Ministère de l’éducation, de la culture et de la condition

féminine la principale institution de référence dans le cadre des

consultations menées à l’échelon national.

4. Conduire des enquêtes par le biais de questionnaires.

DISPOSITIONS PRISES AVEC LES AUTORITÉS NATIONALES

1. La Princesse royale jouera le rôle de chef de file du projet, ce qui

permettra de bénéficier du soutien requis pour la conduite des

consultations et du projet de politique.

Le protocole traditionnel sera respecté.

2. Transparence des méthodes adoptées en vue de diffuser les informations

et de protéger le domaine sacré.

3. Protection du patrimoine matériel et immatériel.

INDICATEURS DE RÉSULTATS

1. Qualitatifs – études relatives aux activités

2. Quantitatifs – questionnaires

3. Adaptation des indicateurs artistiques et culturels et de l’indice de

créativité de Hong Kong, afin de répondre aux questions suivantes :

Que s’est-il produit par le passé ?

Que se passe-t-il aujourd’hui ?

À quoi aspirons-nous à l’avenir ?

GESTION DU PROJET

1. Établir un Comité plurisectoriel/sous-sectoriel en charge de l’élaboration

de la politique

2. Conduire des études en vue d’établir des contacts directs.

3. Mettre au point une stratégie d’étude et des enquêtes, ainsi que passer

des accords avec les médias.

DONNÉES ET INFORMATIONS

1. Établir un Comité directeur en charge de la collecte de données.

2. Trouver diverses sources d’information.

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CALENDRIER

Avril Finalisation du plan d’action

Recrutement d’un consultant national CPS

Mai Confirmation et présentation du chef de file de la culture

Juin Début de la campagne d’information par l’entremise des médias

Juillet Établissement du Comité directeur

Août Établissement du Comité plurisectoriel en charge de l’élaboration de la politique

PROJET DE BUDGET

1. Consultant national pendant 2 mois 20 000 dollars, dont rémunération 15 000 dollars

et 5 000 (autres)

2. Dépenses relatives aux médias 5 000

3. Production de documents d’information pertinents 2 000

4. Élaboration de questionnaires,

Administration 4 000

5. Consultations 5 000

6. Études 2 000

7. Rémunération du souverain 12 000

50 000 dollars

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ANNEXE C : Définitions utiles

Les définitions ci-après émanent de l’UNESCO et de divers organismes d’envergure internationale

(consulter la liste des sites et documents de référence ci-après).

Culture : La culture constitue l’ensemble des traits distinctifs spirituels et matériels, intellectuels et

affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les

modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les

croyances (UNESCO, 2001). Dans son sens le plus large, il s’agit de ce qui compte pour les peuples et

les communautés. La culture englobe les relations, les expériences et les souvenirs communs. Elle

recouvre aussi l’identité, l’histoire et le sentiment d’appartenance (Ministère des arts de la Nouvelle-

Galles du Sud ; traduction libre).

Diversité culturelle : La culture prend des formes diverses à travers le temps et l’espace. Cette

diversité s’incarne dans l’originalité et la pluralité des identités qui caractérisent les groupes et les

sociétés composant l’humanité. Source d’échanges, d’innovation et de créativité, la diversité culturelle

est, pour le genre humain, aussi nécessaire qu’est la biodiversité dans l’ordre du vivant. En ce sens,

elle constitue le patrimoine commun de l’humanité et elle doit être reconnue et affirmée au bénéfice

des générations présentes et des générations futures (UNESCO, 2001).

Pluralisme culturel : Dans nos sociétés de plus en plus diversifiées, il est indispensable d’assurer une

interaction harmonieuse et un vouloir vivre ensemble de personnes et de groupes aux identités

culturelles à la fois plurielles, variées et dynamiques. Des politiques favorisant l'intégration et la

participation de tous les citoyens sont garantes de la cohésion sociale, de la vitalité de la société civile

et de la paix. Ainsi défini, le pluralisme culturel constitue la réponse politique au fait de la diversité

culturelle. Indissociable d'un cadre démocratique, le pluralisme culturel est propice aux échanges

culturels et à l'épanouissement des capacités créatrices qui nourrissent la vie publique (UNESCO,

2001).

Droits culturels : Les droits culturels sont partie intégrante des droits de l'homme, qui sont universels,

indissociables et interdépendants. L'épanouissement d'une diversité créatrice exige la pleine réalisation

des droits culturels, tels qu'ils sont définis à l'article 27 de la Déclaration universelle des droits de

l'homme et aux articles 13 et 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et

culturels. Toute personne doit ainsi pouvoir s'exprimer, créer et diffuser ses œuvres dans la langue de

son choix et en particulier dans sa langue maternelle ; toute personne a le droit à une éducation et une

formation de qualité qui respectent pleinement son identité culturelle ; toute personne doit pouvoir

participer à la vie culturelle de son choix et exercer ses propres pratiques culturelles, dans les limites

qu’impose le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales (UNESCO, 2001).

Accessibilité de la culture : Tout en assurant la libre circulation des idées par le mot et par l'image, il

faut veiller à ce que toutes les cultures puissent s'exprimer et se faire connaître. La liberté d'expression,

le pluralisme des médias, le multilinguisme, l'égalité d'accès aux expressions artistiques, au savoir

scientifique et technologique - y compris sous la forme numérique - et la possibilité, pour toutes les

cultures, d'être présentes dans les moyens d'expression et de diffusion, sont les garants de la diversité

culturelle (UNESCO, 2001).

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Patrimoine culturel et créativité : Chaque création puise aux racines des traditions culturelles, mais

s'épanouit au contact des autres cultures. C'est pourquoi le patrimoine, sous toutes ses formes, doit être

préservé, mis en valeur et transmis aux générations futures en tant que témoignage de l'expérience et

des aspirations humaines, afin de nourrir la créativité dans toute sa diversité et d'inspirer un véritable

dialogue entre les cultures (UNESCO, 2001).

Dialogue interculturel : La richesse culturelle du monde, c’est sa diversité en dialogue. Le dialogue

interculturel constitue le meilleur gage de paix, et [permet] de rejeter catégoriquement la thèse d'un

conflit inéluctable de cultures et de civilisations (UNESCO, 2001). Il s’agit d’un processus qui

embrasse des interactions et échanges ouverts et respectueux entre personnes, groupes et organisations

dont les bagages culturels ou les conceptions du monde divergent. Parmi les objectifs poursuivis dans

le cadre du dialogue interculturel, on peut citer : améliorer la compréhension des diverses perspectives

et pratiques ; renforcer la participation ainsi que la liberté et la capacité de faire des choix ; favoriser

l’égalité ; et améliorer la créativité (European Institute for Comparative Cultural Research ; traduction

libre).

Industries culturelles : Les industries culturelles, ainsi que l’économie créative à laquelle elles

appartiennent, recouvrent un large éventail d’activités économiques, allant de l’artisanat à l’édition et à

l’industrie du multimédia en passant par les arts, la musique et la production cinématographique. Le

point commun des industries culturelles est le fait qu’elles créent du contenu et qu’elles s’appuient sur

la créativité, le talent et, parfois, la propriété intellectuelle, en vue de produire des biens et des services

investis d’une signification sociale et culturelle (Les industries culturelles en Asie et dans le

Pacifique ; UNESCO – traduction libre).

Sites/documents de référence et lectures complémentaires

European Institute for Comparative Cultural Research (Institut européen de recherche comparative sur

la culture ; en anglais)

http://www.ericarts.org/web/index.php

Ministère des arts de la Nouvelle-Galles du Sud (en anglais)

http://www.arts.nsw.gov.au/ et

www.dlg.nsw.gov.au/Files/Information/CPG-final.pdf

Documents de la CPS relatifs à la culture (en anglais et/ou en français)

http://www.spc.int/hdp/index.php?option=com_docman&task=cat_view&gid=37&Itemid=44

Les industries culturelles en Asie et dans le Pacifique (UNESCO ; en anglais)

http://www.unescobkk.org/culture/our-projects/creativity/cultural-industries-in-asia-and-the-pacific/

Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle (2001)

http://www.unesco.org/new/fr/social-and-human-sciences/themes/social-transformations/international-

migration/glossary/cultural-diversity/

Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles

(2005)

http://www.unesco.org/new/fr/culture/themes/cultural-diversity/2005-convention