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Huvé Amandine Mémoire
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UNIVERSITE DE POITIERS
Facult de mdecine et de pharmacie
Ecole dorthophonie
Anne 2011-2012 Mmoire N2012.12
MEMOIRE
En vue de lobtention du certificat de capacit dorthophonie prsent par :
HUVE Amandine
Poitiers, le 3 juillet 2012
Directrice du mmoire :
Mme LACROIX Agns, Matre de confrences en psychologie
Membres du Jury :
Mme GOHLER Catherine, Praticien hospitalier ORL et mdecin-directeur du CAMSP pour
dficients auditifs et visuels
Mme BAUDEQUIN Michle, Orthophoniste en service hospitalier ORL
Mme GRASSIN Muriel, Orthophoniste
Mme VEAU Typhaine, Orthophoniste du CAMSP pour dficients auditifs et visuels
Mme BESLY Nadine, psychologue du CAMSP pour dficients auditifs et visuels
LA COMPREHENSION DES ETATS EMOTIONNELS
CHEZ DES ENFANTS SOURDS DE 3 A 6 ANS
PORTANT UN APPAREILLAGE CONVENTIONNEL:
ROLE DU CONTEXTE, DE LA PROSODIE ET DE
LEXPRESSION FACIALE
REMERCIEMENTS
REMERCIEMENTS
Je remercie tout dabord Typhaine Veau, orthophoniste et matre de stage davoir
accept dencadrer ce mmoire. Merci pour ses rflexions avises et conseils, pour sa
disponibilit et son coute mais galement pour le soutien apport et sa gentillesse qui mont
paule tout au long de ce mmoire. Je la remercie aussi pour ses qualits professionnelles et
ses connaissances partages.
Merci Mme Agns Lacroix, directrice du mmoire, qui est lorigine de ce projet et
a accept de diriger ce mmoire. Je la remercie pour son implication dans llaboration de ce
travail, ses conseils indispensables et sa disponibilit.
Je remercie galement Mme Muriel Grassin, orthophoniste, qui ma soutenue et
pousse raliser ce mmoire dans le domaine de la surdit.
Je remercie les membres du jury de stre intresss ce mmoire.
Merci aux parents et enfants ayant particip au protocole sans qui la production de ce
mmoire naurait pu tre ralise.
Je remercie les orthophonistes et lcole maternelle Sainte Jeanne Elisabeth pour leur
disponibilit et leur accueil.
Je remercie les orthophonistes qui mont accueillie en stage, Mme De La Porte, Mme
Veau, Mme Grimault et Mme Rivire-Villeneuve.
Merci Mme Isabelle Rivire-Villeneuve pour son soutien et son aide prcieuse.
Merci mes proches, mon pre pour avoir prt sa voix dacteur, ma sur pour sa
relecture avise, Romain pour son soutien et sa confiance.
Un grand merci mes amis de la promotion Baudelaire pour leur soutien et pour tous
ces bons moments passs ensemble qui vont me manquer !
Merci tous ceux qui ont particip ce mmoire.
TABLE DES MATIERES
TABLE DES MATIERES
LISTE DES TABLEAUX ET DES FIGURES 1
LISTE DES ABREVIATIONS 3
INTRODUCTION 4
ASSISES THEORIQUES 5
I/ DEVELOPPEMENT DE LA RECONNAISSANCE DES EMOTIONS
CHEZ LENFANT 5
A/ Approches thoriques des motions 5
B/ Aspect dveloppemental de la comprhension motionnelle 7
1/ Aspects socio-perceptifs 9
2/ Aspects lexicaux et langagiers 11
C/ Les expressions faciales 14
D/ La prosodie 16
E/ Le contexte 20
II/ LENFANT SOURD 22
A/ Surdit et appareillage prothtique conventionnel 22
B/ Le dveloppement du langage chez lenfant sourd 26
C/ Le dveloppement de la pragmatique chez lenfant sourd 30
D/ Les motions chez les enfants sourds 34
PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES 37
I/ PROBLEMATIQUE 37
II/ HYPOTHESES 37
POPULATION ET METHODES 39
I/ POPULATION 39
A/ Les enfants sourds portant un appareil auditif conventionnel 39
B/ Les enfants typiques 40
TABLE DES MATIERES
II/ MATERIEL 40
A/ Batterie dEvaluation du Langage Oral 41
1/ Lexique en Rception (LexR) 41
2/ Production dnonc (ProdE) 41
3/ Comprhension (C1/C2) 42
4/ Lexique en Production 42
5/ Rpartition des enfants en groupe langagier 43
B/ Protocole dvaluation des motions 44
1/ Capacits de production . 44
Production spontane 44
Production lie un vnement 45
Production sur imitation 45
2/ Capacits de reconnaissances des motions 46
Dnomination des expressions faciales et de la prosodie 46
Dsignation des expressions faciales 47
Dsignation de la prosodie 47
4/ Capacits dappariement des motions 47
5/ Capacits dInfrence dtats mentaux 48
III/ PRODEDURE 48
RESULTATS 51
I/ CAPACITES DE PRODUCTION DES EMOTIONS
Quelles sont les capacits de production des motions des enfants sourds
appareills ? 51
A/ Quelles sont les diffrences entre les groupes ? 51
1 / Rsultats de la production sur la base dune expression faciale 52
2 / Rsultats de la production sur la base dune prosodie 53
3 / Rsultats de la production lie un vnement 54
4 / Rsultats de la production sur imitation dune expression faciale 55
5 / Rsultats de la production sur imitation de la prosodie 55
6 / Bilan pour la tche de production dune motion 56
TABLE DES MATIERES
B/ Quelles sont les diffrences entre les niveaux de langage ? 56
1/ Rsultats de la production sur la base des expressions faciales 56
2/ Rsultats de la production sur la base de la prosodie 57
3 / Rsultats de la production lie un vnement 57
4 / Rsultats de la production sur imitation dune expression faciale 58
5 / Rsultats de la production sur imitation de la prosodie 58
6 / Bilan pour la tche de production dune motion dun point de vue langagier 59
C/ Quelles sont les diffrences interindividuelles que lon peut observer ? 60
1 / Bilan pour la tche de production dune motion dun point de vue qualitatif 61
II/ CAPACITES DE RECONNAISSANCES DES EMOTIONS 61
1 - Quelles sont les capacits de reconnaissance des motions des enfants sourds
appareills sur la base de lexpression faciale ? 61
A/ Quelles sont les diffrences entre les groupes ? 62
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de lexpression
faciale 64
B/ Quelles sont les diffrences entre les niveaux de langage ? 64
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de lexpression
faciale en fonction du niveau langagier 65
C/ Quelles sont les diffrences interindividuelles que lon peut observer ? 65
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de lexpression
faciale dun point de vue qualitatif 66
2 - Quelles sont les capacits de reconnaissance des motions des enfants sourds
appareills sur la base de la prosodie ? 67
A/ Quelles sont les diffrences entre les groupes ? 67
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de la prosodie70
B/ Quelles sont les diffrences entre les niveaux de langage ? 70
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de la prosodie
en fonction du niveau langagier 71
C/ Quelles sont les diffrences interindividuelles que lon peut observer ?71
1 / Bilan pour la tche de reconnaissance des motions sur la base de la prosodie
dun point de vue qualitatif 72
TABLE DES MATIERES
III/ CAPACITES DAPPARIEMENT DUNE EMOTION 73
Quelles sont les capacits dappariement des motions des enfants sourds
appareills ? 73
A/ Quelles sont les diffrences entre les groupes ? 731 / Bilan pour la tche dappariement des motions 74
B/ Quelles sont les diffrences entre les niveaux de langage ? 74
1 / Bilan pour la tche dappariement des motions en fonction du niveau
langagier 75
C/ Quelles sont les diffrences interindividuelles que lon peut observer ? 75
1 / Bilan pour la tche dappariement des motions dun point de vue qualitatif 76
IV/ CAPACITES DINFERENCE DETATS MENTAUX 77
Quelles sont les capacits dinfrence des motions des enfants sourds
appareills ? 77
A/ Quelles sont les diffrences entre les groupes ? 77
B/ Quelles sont les diffrences entre les niveaux de langage ? 78
C/ Quelles sont les diffrences interindividuelles que lon peut observer ?78
1 / Bilan pour la tche dinfrence des motions dun point de vue qualitatif 79
DISCUSSION 80
I/ LES LIENS AVEC LORTHOPHONIE 93
II/ CONCLUSION 95
BIBLIOGRAPHIE 96
ANNEXES 99
LISTE DES TABLEAUX ET DES FIGURES
1
LISTE DES TABLEAUX ET DES FIGURES
Tableau 1 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus par chaque groupe denfants (ESA =
enfants sourds appareills et ENE = enfants normo-entendants) en fonction de la tche et de
lmotion 52
Figure 1 : Pourcentage de rponses correctes des ESA et des ENE pour la tche
dexpressions faciales spontanes en fonction de lmotion 53
Figure 2 : Pourcentage de rponses correctes des ESA et ENE pour la production prosodique
spontane en fonction de lmotion 53
Figure 3 : Pourcentage de rponses correctes des ESA et ENE pour la production lie un
vnement en fonction de lmotion 54
Figure 4 : Pourcentage de rponses correctes des ESA et ENE pour la production sur
imitation dune expression faciale en fonction de lmotion 55
Figure 5 : Pourcentage de rponses correctes des ESA et ENE pour la production sur
imitation de la prosodie en fonction de lmotion 55
Tableau 2 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en production sur la base des
expressions faciales en fonction du niveau de langage (PSM, MSM et GSM) de chaque
groupe ENE et ESA, du groupe et de lmotion 57
Tableau 3 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en production sur la base de la
prosodie en fonction du niveau de langage (PSM, MSM et GSM) de chaque groupe ENE et
ESA, du groupe et de lmotion 57
Tableau 4 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en production lie un vnement en
fonction du niveau de langage (PSM, MSM et GSM) de chaque groupe ENE et ESA, du
groupe et de lmotion 58
Tableau 5 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en production sur imitation dune
expression faciale en fonction du niveau de langage (PSM, MSM et GSM) de chaque groupe
ENE et ESA, du groupe et de lmotion 58
Tableau 6 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en production sur imitation de la
prosodie en fonction du niveau de langage (PSM, MSM et GSM) de chaque groupe ENE et
ESA, du groupe et de lmotion 59
Tableau 7 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus par chaque groupe denfants (ESA =
enfants sourds appareills et ENE = enfants normo-entendants) en fonction de la tche et de
lmotion 62
LISTE DES TABLEAUX ET DES FIGURES
2
Figure 6 : Pourcentage de rponses correctes pour lpreuve de dnomination en fonction des
diffrentes motions et des groupes 63
Figure 7 : Pourcentage de rponses correctes pour lpreuve de dsignation en fonction des
diffrentes motions et des groupes 63
Figure 8 : Pourcentage de confusions de la colre des ENE lors de lpreuve de dsignation
dmotions en fonction du type dmotions confondues 64
Tableau 8: Pourcentages de bonnes rponses obtenus en fonction du niveau de langage (PSM,
MSM et GSM) de chaque groupe ENE et ESA en fonction de la tche et de lmotion 64
Tableau 9 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus par chaque groupe denfants (ESA =
enfants sourds appareills et ENE = enfants normo-entendants) en fonction de la tche et de
lmotion 67
Figure 9 : Pourcentage de rponses correctes pour lpreuve de dnomination en fonction des
diffrentes motions et des groupes 68
Figure 10 : Pourcentage de confusions lors de lpreuve de dnomination de la prosodie en
fonction des types de confusions et des groupes 68
Figure 11 : Pourcentage de rponses correctes pour lpreuve de dsignation en fonction des
diffrentes motions et des groupes 69
Figure 12 : Pourcentage de confusions lors de lpreuve de dsignation de la prosodie en
fonction des types de confusions et des groupes 69
Tableau 10: Pourcentages de bonnes rponses obtenus en fonction du niveau de langage (PSM,
MSM et GSM) de chaque groupe ENE et ESA en fonction de la tche et de lmotion 69
Tableau 11 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus par chaque groupe denfants (ESA =
enfants sourds appareills et ENE = enfants normo-entendants) en fonction de la tche et de
lmotion 73
Tableau 12: Pourcentages de bonnes rponses obtenus en fonction du niveau de langage (PSM,
MSM et GSM) de chaque groupe ENE et ESA en fonction de la tche et de lmotion 74
Tableau 13 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus par chaque groupe denfants (ESA =
enfants sourds appareills et ENE = enfants normo-entendants) en fonction du contexte, de la
prosodie et de lexpression faciale 77
Tableau 14 : Pourcentages de bonnes rponses obtenus en fonction du niveau de langage
(PSM, MSM et GSM) et du groupe 78
LISTE DES ABREVIATIONS
3
LISTE DES ABREVIATIONS
AC : Autocorrection
CI : Comprhension Immdiate
CG : Comprhension Globale
DB HL : Dcibel Hearing Level
C1 ; C2 : Comprhension 2
CD : Changement de Dsignation
COL : Colre
CM2 : Cours Moyen 2
DS : Dviation Standard
DysL : Dyslinguistique
DysP : Dyspragmatique
ELO : Evaluation du Langage Oral
ENE : Enfant Normo-Entendant
ESA : Enfant Sourd Appareill
FACS : Facial Action Coding System
F0 : Frquence Fondamentale
GSM : Grande Section de Maternelle
If : Contenu Infrentiel
Ig : Contenu Imageable
J : Joie
LexP : Lexique en production
LexR : Lexique en rception
LSF : Langue des Signes Franaise
LPC : Langage Parl Complt
MorSyn : Morphosyntaxe
Moy : Moyenne
MSM : Moyenne Section de Maternelle
PSM : Petite Section de Maternelle
ProdE : Production dnonc
QQC : Quest-ce que cest ?
QQF : Quest-ce quil fait ?
T : Tristesse
UA : Unit dAction Comprhension
INTRODUCTION
4
INTRODUCTION
Lmotion est lun des facteurs prpondrants dans la rgulation des relations sociales
et dans lorganisation des conduites ds la naissance. Etant le premier systme de
communication entre le nourrisson et son environnement, les motions forment un vritable
procd dintgration sociale. Tout au long des annes prscolaires, les interactions se
multiplient, explicites par linterprtation familiale. Les motions sont alors voques
permettant lenfant de construire des reprsentations mentales. Peu peu, lenfant acquiert
des capacits pragmatiques afin de pouvoir sadapter aux diverses situations de
communication.
Diverses tudes ont constat le dficit pragmatique des enfants sourds possdant un
appareillage conventionnel notamment concernant la thorie de lesprit et lattribution dtats
mentaux. En effet, on constate une diminution des expriences langagires entravant ainsi le
dveloppement des comptences sociales et affectives de ces enfants. Cependant, peu de
recherches se sont intresses au dveloppement de la comprhension des motions chez ces
enfants et son incidence dans les interactions sociales.
La communication met en jeu diffrents indices dont le langage, mais galement,
lexpression faciale, la prosodie et le contexte qui sont autant dinformations disponibles et
indispensables linterprtation et la comprhension de la situation. Quelques tudes
mettent en valeur lintrt privilgi des enfants envers les indices contextuels, ngligeant
davantage ceux prosodiques et de lexpression faciale. Nanmoins, aucune tude ne semble
stre interroge en ce domaine la population denfants sourds possdant un appareillage
prothtique conventionnel. Ainsi, pour mieux comprendre le dveloppement motionnel de
ces enfants et mieux apprhender leur prise en charge, nous nous sommes questionns sur le
rapport unissant le dveloppement motionnel et langagier de ces enfants.
Pour ce faire, une approche thorique concernant les motions sera prsente, suivie
dune revue de la littrature sur le dveloppement de la comprhension des motions. Puis,
limplication de lexpression faciale, de la prosodie et du contexte sera voque travers les
recherches actuelles. Nous aborderons le dveloppement des comptences sociales
(pragmatiques et motionnelles) chez lenfant sourd. Le protocole exprimental sera alors
dcrit suivi de la prsentation des rsultats recueillis. Une discussion confrontant les tudes
antrieures la ntre viendra clturer cette recherche avant de terminer par une conclusion.
ASSISES THEORIQUES
5
ASSISES THEORIQUES
I/ DEVELOPPEMENT DE LA RECONNAISSANCE DES EMOTIONS
CHEZ LENFANT
A/ Approches thoriques des motions
Diverses thories sont nes pour expliquer le fonctionnement, la production et la
comprhension des motions. Parmi les plus prgnantes, la thorie volutionniste privilgie
linfluence des motions sur lorganisation des comportements. Les motions servent donc de
rgulateur social et organisent le comportement individuel par des expressions ritualises.
Darwin (1964) indique que lmotion fait suite la prise dhabitudes, qui force de
rptition, sinscrivent, sautomatisent et rapparaissent quand lmotion ressurgit (Dantzer,
1994). Pour lui, les motions proviennent de lexcitation nerveuse du corps et sont
universelles.
Par la suite, les biologistes ont cherch dcouvrir les mcanismes sous-jacents de ces
ractions physiologiques et comportementales qui accompagnent les motions. Au cours du
XIXme sicle, Lange J. suggre la participation du systme nerveux central dans les
ractions motionnelles (Dantzer, 1994). Cette thorie considre que le cerveau analyse les
ractions viscrales provoques par une motion et rpercute alors des actes appropris en
rponse ces manifestations motionnelles. Plus tard, Cannon dcrit en 1929 que le cortex
crbral peroit les expriences motionnelles avant de transmettre linformation au thalamus,
sige des motions (Dantzer, 1994). Enfin Papez, en 1937, tablit une thorie fonde sur un
circuit de connexions entre les diffrentes structures crbrales intervenant dans le contrle
des motions (le circuit de Papez) (Dantzer, 1994). Ekman, Levenson et Friesen (1991)
mettent en valeur quelques ractions neurovgtatives spcifiques chez des adultes confronts
des situations motionnelles (Cosnier, 1994). Le rythme cardiaque et la temprature
corporelle sont les principales ractions produites.
Au cours XXme sicle, beaucoup dauteurs se sont intresss aux motions elles-
mmes et leur influence dans la rgulation des relations interpersonnelles et affectives ainsi
que dans les fonctions socio-adaptatives et dans la vie quotidienne. Depuis quelques annes,
les chercheurs abordent la notion dmotion de base. Les motions de base ou motions
ASSISES THEORIQUES
6
fondamentales sont rares. Mme sil est difficile de les dnombrer, beaucoup saccordent sur
cinq : la joie, la colre, la peur, la tristesse et le dgot. Certains comme Ekman (1984)
ajoutent la surprise (Cosnier, 1994). En 1992, Ekman tablit neuf caractristiques des
motions de base (Cosnier, 1994). Ainsi, elles proviendraient dun fondement biologique
inn. Ces motions se transmettent de faon phylogntique pour parer lindividu au
quotidien de la vie et lui permettre de rpondre rapidement une situation donne (Ekman &
Friesen 1969 cits par Cosnier, 1994). Leur expression et leur reconnaissance sont
universelles. Les motions sont vues comme un processus adaptatif veillant la survie de
lespce. Les manifestations motionnelles apportent donc des informations ncessaires
autrui pour interprter les motions grce diverses caractristiques comme la situation, le
type de raction et le comportement adopt. Lensemble des tats motionnels est ainsi cr
partir de ce nombre limit dmotions de base.
On ne pourrait voquer les motions sans traiter de la thorie du processus de
lvaluation cognitive ou appraisal de Scherer (1984) (Bnziger & Scherer, 2005). Celui-
ci tablit une approche en composantes multiples afin de dfinir les motions. Pour Scherer,
lmotion est un systme en volution, permettant une adaptation lenvironnement par
dcouplage progressif entre le stimulus et la rponse. Ainsi, ce mcanisme cre une rponse
adquate diffrencie grce un grand nombre de paramtres dpendant de lorganisme et/ou
de lenvironnement. Les motions sont labores selon cinq composantes qui interviennent et
interagissent dans lexpression dune motion : le sentiment subjectif (le ressenti) / les
caractristiques physiologiques (vgtative et somatique) / le comportement expressif (facial,
gestuel et/ou vocal) / lvaluation cognitive (le systme nerveux central) / le type daction
comportementale (amorce de laction). Ainsi, une modification dans lune des composantes
peut avoir une incidence sur les autres composantes. Cette approche dfend lide que le
dclenchement de ce processus multicomponentiel se droule en rponse un environnement
prcis ou un stimulus particulier provoquant la raction dun tout coordonn agissant en
congruence et de faon synchronise. Lmotion est donc le moment prcis o plusieurs sous-
systmes de lorganisme se couplent et se synchronisent dans le but dobtenir une raction
adapte un vnement vcu par lindividu comme primordial pour son bien-tre.
Cependant, pour dautres auteurs, plusieurs composantes motionnelles peuvent se
croiser : certaines peuvent sattnuer pour laisser une autre composante sexprimer davantage.
Elles ne sont alors ni synchronises ni en congruence. Cela met en jeu deux processus,
savoir celui de la tendance laction et celui de la rgulation de lmotion (Bradley & Lang,
ASSISES THEORIQUES
7
2000 ; Cosnier, 1994). Cependant il reste fort probable quau quotidien, plusieurs motions
diffrentes sassocient et soient prsentes au mme moment. Mais, au cours du temps, une
motion peut aussi se dcoupler. Cest par exemple le cas lorsque tous les processus sont
dirigs vers une mme motion et quun dernier vient les perturber et les dcoupler.
Lapproche en composante montre ainsi la complexit des motions et de leur tude.
En toute vidence, larrive dune motion, celle-ci accapare tellement lesprit de
lindividu, quelle stoppe alors lactivit quil pratiquait.
B/ Aspect dveloppemental de la comprhension motionnelle
Lenfant, au cours de son dveloppement, met en place des processus dadaptation afin
dinterprter les motions, dajuster son comportement et de comprendre une situation de
communication. Lmotion est un indice communicationnel que lenfant doit pouvoir
identifier. Ainsi, il utilise ses capacits dattribution dtats mentaux1 laide de la gestualit,
de lexpression faciale et vocale, de la posture et de sa matrise du lexique relatif aux
motions. Comprendre les motions permet ainsi davoir accs une communication
implicite essentielle pour vivre et agir en socit. Tout ceci ne peut avoir lieu que si lenfant
interagit avec son environnement. Durant lchange mre-enfant, la mre reprend et accentue
inconsciemment les motions leur associant alors une signification, celles-ci sont imites par
le bb qui se les approprie peu peu. Daprs Monfort et al, (2001) p.8, voquer les
motions est une fonction rgulatrice est clarificatrice des relations interpersonnelles. .
Pons, Harris et Rosnay (non publi) ont mis au point un test, le TEC (Test of Emotion
Comprehension) qui mesure, grce neuf composantes fondamentales, la comprhension des
motions. Il permet de situer lenfant par rapport sa population de rfrence. Ainsi, il offre
la possibilit de voir les composantes acquises par lenfant et celles quil ne matrise pas. Ce
test, trs utile en rducation, met en valeur un ordre dapprentissage des composantes
motionnelles. Pour ce faire, une image charge motionnellement est prsente lenfant. Ce
dernier doit ensuite infrer une raction motionnelle au personnage laide de quatre autres
images proposant diverses ractions motionnelles. Pour tudier la comprhension du rle des
croyances sur les motions, ils ont labor une histoire o un lapin mangeant une carotte, est
1Attribution dtats mentaux : la comprhension et lexpression des vcus et des reprsentations de ce qui se
passe dans notre esprit et dans celui dautrui. (Monfort et Monfort Jurez, 2001, p 1)
ASSISES THEORIQUES
8
observ son insu par un renard derrire un buisson. Ce dernier dsire manger le lapin. Ainsi
on demande lenfant de choisir limage correspondant ltat desprit du lapin. Les plus
jeunes enfants (3-5 ans) optent pour limage reprsentant le lapin qui a peur. Ils narrivent pas
concevoir que le lapin ne sait pas que le renard lobserve. Les plus gs (9-11 ans) dsignent
limage du lapin joyeux. Ils comprennent que le lapin est persuad dtre seul. Pour analyser
la comprhension des motions mixtes, une seconde histoire a t invente. Il sagit dun
garon qui, pour son anniversaire, a reu un vlo. Mais alors quil le regarde, il est partag
entre le fait dtre content par ce cadeau et la peur de faire pour la premire fois du vlo. Les
plus jeunes enfants (3-5 ans) choisissent lune des deux motions quand on leur demande
comment se sent le garon. Les plus grands (9-11 ans) sont capables dattribuer les deux
motions au personnage. Ainsi, les auteurs obtiennent trois rsultats. En premier lieu, la
confirmation du dveloppement en neuf composantes de la comprhension de lmotion chez
les enfants. Mais galement, la dcouverte de trois paliers de dveloppement. De 3 5 ans,
lenfant est apte reconnatre les motions de base partir dexpressions faciales, analyser
les causes motionnelles et raliser limportance des souvenirs dans lmotion. De 5 7 ans,
il prend conscience de limpact des dsirs et des croyances sur lmotion, diffrencie les
motions apparentes et celles ressenties. Enfin de 9 11 ans, il prend en compte les motions
mixtes, cest--dire quil reconnat alors quune personne peut prouver deux motions
opposes provoques par une mme situation et peut en dterminer les causes. Il contrle
ainsi ses motions et lincidence de la morale sur celles-ci. Enfin, ils mettent en vidence le
lien entre le dveloppement des neuf composantes et lattribution dtats mentaux.
Cependant, on remarque des disparits individuelles quant la comprhension des
motions et lvocation du contenu motionnel dans les noncs des enfants. Harris (1994,
1999) met en vidence le retentissement familial des rapports motionnels sur cette
comprhension chez les enfants (Harris & al, 2003). En effet, plus le dialogue est ouvert
propos des motions et mieux les enfants peroivent et rflchissent sur les dsirs, les
croyances et les motions mixtes et peuvent ainsi attribuer plus aisment des tats mentaux
autrui. Ainsi, plus une motion est voque, plus sa reprsentation mentale est inscrite chez
lindividu et mieux elle sera reconnue et prouve lors de lapparition de lmotion.
ASSISES THEORIQUES
9
1/ Aspects socio-perceptifs
La capacit percevoir les divers stimuli de lenvironnement est essentielle pour
linterprtation et la comprhension des motions. Comprendre une motion cest tre capable
dattribuer un ressenti autrui en se positionnant de son point de vue. Les ges de
dveloppement de la comprhension des motions varient quelque peu en fonction des
diffrences individuelles et suivant les auteurs. Mais il est certain que lintrt port
lmotion saccrot au cours de lenfance. Hobson (1995) identifie la prparation
motionnelle des nourrissons comme indispensable au dveloppement relationnel (Monfort
& Monfort Juarz, p.7, 2001). En effet, les caractristiques affectives transmises dans
lexpression vocale des parents leur enfant sont primordiales dans le dveloppement du
nourrisson. La prosodie se caractrise par un dbit de parole plus lent, une exagration des
contours et une prsence dans le discours dinformations motionnelles facilitant la
comprhension de lenfant. Ce parler-bb (ou Langage Adress lEnfant) permet par
ces modulations intonatives et langagires de favoriser le dveloppement du langage, de la
communication et des motions chez le nourrisson. Ainsi, Hobson (1995) remarque quun
nouveau-n peut tre capable didentifier un tat motionnel chez autrui, dprouver de
lempathie et dajuster alors son comportement lors dun change ds 1 an. On relve vers 2
mois, que lenfant rpond aux stimuli par lorientation visuelle. Muir et Nadel, (1998)
estiment que le sourire du bb entre 1 mois et 2 mois exprime de la joie (Brun, 2001). Ce
dernier est dj capable dprouver de lintrt, de la satisfaction et de la peur. Les rires et les
pleurs apparaissent cet ge-l, puis 5 mois le sentiment de colre survient. A 7 mois,
lenfant peroit des sentiments de surprise et de tristesse. En 1997, la capacit des bbs de 5
7 mois analyser des lments communs la prosodie et aux expressions faciales
motionnelles est mise en vidence par Walker-Andrews (Brun, 2001). Cette tude sur les
capacits des nourrissons percevoir les expressions motionnelles a clairement indiqu que
la prsentation de stimuli motionnels multimodaux facilite la dtection, la discrimination et
la reconnaissance de ces stimuli motionnels. Pour lui, cest partir des stimuli multimodaux
inhrents aux diffrents contextes environnementaux que lenfant peut comprendre et
interprter les expressions sociales et motionnelles dautrui. La perception des stimuli
multimodaux se dveloppe au cours de la petite enfance, offrant ainsi les indices ncessaires
facilitant les apprentissages prcoces.
ASSISES THEORIQUES
10
Vers lge d1 an, on observe une rfrenciation sociale. Il sagit dun processus
permettant lindividu dutiliser les informations que fournissent les autres dans une
situation ambigu et inhabituelle afin dadapter ses propres comportements cette
situation. (Brun, 1997, p 2). Par exemple, Klinnert (1984), rend compte de lattitude du
bb de 12-18 mois explorer un jouet en fonction de lexpression de joie, de peur ou de
neutralit de la mre (Brun, 1997). Lors dun vnement nouveau, le bb va faire appel aux
expressions motionnelles de son entourage pour le comprendre. Ainsi la rfrenciation
sociale contribue ladaptabilit de lindividu son environnement. (Brun, p 6). A 4 ans,
lenfant nest pas capable dattribuer une fausse croyance2 autrui (efficiente que vers 6 ans),
mais il est apte infrer des dsirs autrui (Harris, Johnson, Hutton, Andrews & Cooke,
1989 ; Harris & al., 2003). Cest cette priode que lenfant fait le lien entre le dsir
recherch et la ralit dont dpendent les motions. Entre 5 et 6 ans, lenfant comprend que
les personnes ont des croyances (des reprsentations subjectives de la situation) et que celles-
ci ont des rpercussions sur leurs motions.
La perception des expressions faciales de l'motion est fondamentale dans
traitement des motions. Elle permet l'interprtation de base des indices sociaux dont
dcoulent les interactions sociales et comportementales. En grandissant, lexprience sociale
saccrot. Les enfants commencent tablir des liens utilisant davantage le support verbal et
croisant tous les indices ncessaires la comprhension dune motion. Ainsi, on observe que
la capacit bien discerner les expressions faciales motionnelles est lie aux comptences
sociales qui sacquirent durant les annes prscolaires. Ekman et Friesen (1978) ont mis au
point un rpertoire des mimiques faciales (le FACS Facial Action Coding System) en 1980
(Gosselin, 1995). Il sagit dun guide technique codant les changements de comportements
faciaux. Ce rpertoire comporte quarante-quatre composantes faciales de base quon appelle
des UA units daction (changements dapparence produits par la contraction musculaire dun
ou plusieurs muscles de la face). Par exemple, les haussements de la partie intrieure et
extrieure du sourcil (UA1 et UA2) sont des composantes de la peur. Le FACS est donc un
support efficace dvaluation de lexpression faciale motionnelle et offre la possibilit de
mieux comprendre certaines confusions dans les motions. En effet, Gosselin (1995) dcle
cinq types derreurs rcurrentes tels que les confusions surprise-peur, peur-surprise, dgot-
peur, surprise-joie, peur-tristesse chez les enfants de 5 7 ans. Il est vident que les motions
2 Lattribution de fausses croyances : fait quune personne A attribue une pense un individu B en prenant en
compte le point de vue de B. Il est donc indispensable que A puisse se dtacher de ses propres penses et
comprendre que B na pas les mmes
ASSISES THEORIQUES
11
les mieux reconnues ces ges-l sont la joie, la colre et la tristesse malgr des confusions
habituelles parfois entre la joie et la surprise ; la joie et la peur ; la colre et le dgot et enfin
la tristesse et la peur. Ces confusions diminuent avec lge, selon les motions notamment
vers 7-8 ans. Il se pourrait en fait, que la discrimination des expressions faciales soit due la
configuration des UA et non une dtection individuelle des composantes faciales. Cest
pourquoi, des confusions persistent longtemps car certaines UA se retrouvent dans plusieurs
motions.
2/ Aspects lexicaux et langagiers
Daprs la psychologie dveloppementale, la thorie de lesprit3 slabore lors de
lorganisation et de la rorganisation de conduites provoquant ainsi des diffrences
interindividuelles. Elle est galement tributaire du langage qui joue un rle important. Le
langage est primordial dans lattribution dtats mentaux et la comprhension des motions.
En effet, des tudes ont dcouvert une forte corrlation entre les performances verbales et
celles de tches dattribution de croyance (Jenkins & Astington, 1996 ; Le sourn-Bissaoui &
Deleau, 2001). Ainsi, lmergence du langage permet lenfant dentrer plus facilement en
communication et de partager de nouvelles expriences motionnelles. Ce vocabulaire
motionnel, est assimil par lenfant avant son utilisation, lui offrant une meilleure adaptation
environnementale et un perfectionnement de son contrle motionnel.
Vers 2 ans, on parle du concept du soi-mme ou qute du moi . En dautres
termes, il sagit pour lenfant de se diffrencier des autres personnes. Ce concept fait appel
aux tats mentaux et la comprhension des motions. Lenfant reconnat alors lautre
comme ayant ses propres motions mais il saperoit quil peut agir sur ltat psychique de
lautre grce la parole ou aux actions. Cest donc cet ge, que langage et motions se
lieraient. Ds 2 ans, lenfant est donc capable de parler des motions notamment des siennes
mais galement de celles des autres. Les principales voques sont la tristesse, la joie et la
colre. Il peut aussi attribuer des motions ses jouets (poupe, peluche) et faire rfrence
3 Thorie de lesprit : Aptitude que manifeste lindividu expliquer (donc comprendre) ou prdire ses
propres actions (et celles de ses semblables). Chez lenfant, cette thorie de lesprit recouvre la comprhension
de lesprit, dans le sens o lesprit gnre des reprsentations qui ne sont pas des reproductions du rel mais des
produits de lactivit mentale, cest--dire que selon cette thorie lenfant peut concevoir quun mme objet peut
tre reprsent de manires diffrentes par des personnes diffrentes en fonction des reprsentations que les
personnes se font de lobjet Brin et al (2004) p.261
ASSISES THEORIQUES
12
aux motions passes ou futures. Entre 2 et 3 ans, lenfant est capable de consoler un autre
enfant. Lenfant est capable demployer le langage motionnel pour influencer autrui et
arriver ses fins. Mme si entre 3 et 7 ans, lenfant est en gnral plus apte exprimer les
motions qu les reconnatre, Fabes, Eisenberg, Nyman, et Michaelieu (1991) mettent
cependant en valeur la capacit de lenfant de 3 ans identifier et expliquer une motion
(les explications sont dautant plus prgnantes vers lge de 5 ans) (Harris & Pons, 2003).
En grandissant, lenfant tend son langage motionnel la sphre familiale, le langage
tant alors plus contextuel. Cest grce lui et aux nombreuses conversations du quotidien
que lenfant accrot sa comprhension des tats mentaux, des relations comportementales
mais galement lenrichissement de son lexique motionnel. Afin dvaluer la corrlation
entre lenvironnement sociolinguistique des enfants prscolaires et leurs aptitudes faire
appel aux motions et aux croyances dans lattribution dtats mentaux, Le Sourn-Bissaoui et
Deleau, (2001) ont cr un protocole laide de deux livres illustrs que chaque mre raconte
son enfant de 36 mois et 6 mois plus tard. Leur narration est alors recueillie pour recenser la
frquence des rfrences maternelles explicites aux tats mentaux motionnels (joie, colre)
et cognitifs (penser, connatre) et leurs diversits. Ensuite, lenfant est soumis une
preuve de prdiction et dexplication dmotion. Trois situations sur quatre doivent tre
valides pour russir lpreuve. En exemple, un personnage dsire manger un gteau au
chocolat, quelle sera sa raction lorsquil dcouvrira que dans la bote, il reste un gteau ? La
deuxime preuve consiste en la prdiction et lexplication dans des tches de fausse
croyance. Concernant la prdiction, lexprimentateur montre tout dabord lenfant quune
bote de pansement est vide et que celle ct ne comportant aucune indication est pleine de
pansements. Puis il met en scne une poupe qui sest coupe et veut mettre un pansement.
On demande lenfant pour la tche de prdiction dans quelle bote la poupe va dabord
chercher le pansement. Pour la tche dexplication, une autre poupe voulant aussi un
pansement intervient et prend la bote de pansements. On demande alors lenfant pourquoi
cette seconde poupe prend cette bote. Pour finir, les auteurs valuent le niveau langagier des
enfants laide de lchelle verbale MSCA (chelle daptitudes pour enfants de Mac Carthy).
Les rsultats suggrent que les mres font plus rfrence aux tats motionnels qu ceux
cognitifs 36 mois qu 42 mois. De mme, elles produisent plus dtats motionnels divers
que dtats cognitifs diffrents 36 mois qu 42 mois. De plus, les exprimentateurs ont
remarqu durant lintervalle dobservation une plus grande capacit prdire et expliquer
une motion. Afin dtudier les liens entre le discours maternel et la comprhension des tats
ASSISES THEORIQUES
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mentaux, Le Sourn-Bissaoui et al (2001) travaillent avec les enfants de 42 mois. En effet,
leurs russites aux preuves prcdentes sont plus satisfaisantes qu 36 mois. De plus, il est
intressant dtudier les effets prdictifs des conversations mre-enfant sur la comprhension
des tats mentaux des enfants de 42 mois. Ainsi, les auteurs obtiennent une corrlation entre
les discours maternels 36 mois et les performances aux preuves de cognition sociale des
enfants 42 mois. Ils mettent en vidence un lien entre le contenu des discours des mres sur
les cognitions et les motions et les performances de lenfant dans des tches dattribution
dtats mentaux et de cognitions sociales. Ainsi, plus tt les parents discutent avec leur enfant
des dsirs et des croyances et plus tt ces enfants russissent les voquer clairement
(Bartsch & Wellman, 1995 ; Le Sourn-Bissaoui & al, 2001). Dunn, Brown, Slomkowski,
Testa et Youngblade (1991) remarquent, chez des enfants de 3 ans 3 mois, un lien entre
linfluence des conversations au sein de la famille et la capacit expliciter les sentiments
dune poupe, expliquer ses propres actes dans une situation motionnelle et attribuer de
fausses croyances (Le Sourn-Bissaoui & al, 2001). Cest pourquoi plus les conversations
propos des motions sont frquentes, plus les performances de ces enfants sont leves en
comprhension dtats mentaux. Ainsi, le dialogue sur les motions favorise la
comprhension de tches de cognition sociale en permettant dlaborer une reprsentation des
tats mentaux plus visible. Comme le confirme Le Sourn-Bisssaoui et Deleau (2001) p.332
les contenus conversationnels jouent un rle dans llaboration par lenfant dune
reprsentation des tats mentaux et, dautre part, celle dune relation spcifique entre les
contenus motionnels et cognitifs du discours maternel et les performances des enfants. . Le
dveloppement de la thorie de lesprit et celui du langage sont donc intrinsquement lis et
se nourrissent lun lautre.
Cest pourquoi les habilets langagires sont un vecteur essentiel dans la
reprsentation cognitive (plus un enfant peut se reprsenter les lments abstraits, meilleure
est sa comprhension). De surcrot, avoir un bon niveau de langage, permet galement de
sintgrer dans la socit afin de communiquer avec les autres, et ainsi, de pratiquer davantage
cet outil linguistique qui aide mieux manipuler les tats mentaux, les motions. Mme si
lon a prtendu que lon peut comprendre les motions sans utiliser le langage, la capacit de
pouvoir en parler permet datteindre un niveau diffrent dintersubjectivit que celui de la
communication non verbale. Pouvoir parler des motions reprsente une fonction rgulatrice
et clarificatrice lors des relations interpersonnelles, mme chez les jeunes enfants.
Bretherton et al, 1986 ; Le Sourn-Bisssaoui et al, 2001, p 337).
ASSISES THEORIQUES
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Mme si lhomme a mis des mots sur les motions afin de les traduire, le paralangage4
demeure le moyen de transmission motionnel le plus inn linstar des mots qui restent
conceptuels.
C/ Les expressions faciales
Les expressions faciales ont fait lobjet dun grand nombre de recherches. Elles
participent la comprhension des motions, la rgulation et la cohsion des interactions
sociales. Primordiales dans le dveloppement de lattachement, elles sont prsentes ds les
premiers jours de la vie (Izard, 1991 ; Gosselin, Roberge & Lavalle, 1995). En effet, ds la
naissance, le nourrisson discrimine plusieurs expressions faciales et les imite. Limitation des
mouvements faciaux participe au contrle volontaire des expressions faciales notamment chez
les enfants dge prscolaire (Field & Walden, 1982 ; Gosselin, 1995). Par exemple, la joie
semble plus facile imiter que la peur (Ekman & al, 1980 ; Gosselin, 1995). On retrouve ainsi
une universalit des mimiques. Les enfants font effectivement tous les mmes mimiques et les
acquirent dans le mme ordre. Lenvironnement socioculturel doit alors soutenir leur
apparition et matriser leur expression. Ds 4 mois, le nourrisson pose plus longtemps son
regard sur les expressions faciales de joie (Labarbera, Izard, Vietze & Parisi, 1976 ; Gosselin,
1995). Vers le septime mois, lenfant peut les catgoriser (Nelson, 1987), et en discriminer
certaines (Ludemann, 1991, Nelson & Dolgin, 1985 ; Gosselin & al, 1995). A 1 an, le bb
sait sil sagit dune expression faciale agrable ou non (Harris, 1990 ; Gosselin & al, 1995).
Vers 2-3 ans, le jeune enfant interprte certaines expressions faciales et y associe le lexique
adquat (Izard, 1971 ; Gosselin & al, 1995). Au cours de sa troisime anne, lenfant
reconnat bien la joie, la colre et la tristesse mais cest entre 5 et 6 ans que leur
reconnaissance devient compltement efficiente (Tremblay & Gosselin, 1985 ; Gosselin & al,
1995). Les enfants gs de 3 5 ans commencent distinguer la peur, le dgot et la surprise
et amliorent cette reconnaissance jusqu lge de 10 ans (Kirouac, Dor & Gosselin, 1985 ;
Gosselin & al, 1995). La production dexpression faciale dbute par la joie puis la colre
suivie de la tristesse entre 3 ans et 9 ans (Perron & Gosselin, 2004). Ainsi, lenfant amliore
tout au long de son enfance la qualit de ses productions faciales.
4 Paralangage : ensemble des moyens de communication non verbale qui accompagnent naturellement
lnonciation (prosodie, mimique, geste) (Brin et al., 2004, p 187)
ASSISES THEORIQUES
15
Gosselin et al (1995), ont labor un protocole partir dexpressions faciales
photographies afin de vrifier la comprhension des termes motionnels des enfants de 5
10 ans sur la reconnaissance des expressions faciales. Pour se faire, ils constituent trois
groupes denfants : 5-6 ans, 7-8 ans et 9-10 ans. Afin dvaluer la comprhension des termes
motionnels, quatre histoires sont lues lenfant qui doit dterminer lmotion ressentie par le
personnage. Ensuite, lenfant regarde la srie de photographies reprsentant soit un homme
soit une femme ayant une expression faciale de dgot, de joie, de colre ou bien de surprise.
Lenfant doit indiquer pour chacune lmotion de la personne. Les rsultats de ltude
rvlent une assez bonne comprhension des termes motionnels chez les 5-6 ans, celle-ci
devenant excellente lge de 7 ans. Ils remarquent que lorsque laccentuation de
lexpression faciale est importante, la reconnaissance de la joie et de la colre est parfaite.
Ceci nest remarquable pour la surprise qu partir de 7-8 ans et nest envisage qu lge
adulte pour le dgot. De plus, ils ne relvent pas de lien entre la comprhension des termes
motionnels et la reconnaissance des expressions faciales. Pour finir, une comprhension
approximative de ces termes na pas de consquence directe dans la production dexpressions
faciales chez ces enfants. Ces auteurs mettent donc en vidence des convergences par rapport
aux tudes antrieures quant lge de reconnaissance de la joie (5-6 ans), de lamlioration
de la reconnaissance de la surprise et du dgot entre 5-6 ans et 7-8 ans. Cependant, des
divergences sont noter comparativement aux tudes prcdentes quant lexpression de
colre. En effet, lors de cette tude, Gosselin et al (1995) ne rvlent pas daugmentation de la
reconnaissance de la colre entre 5-6ans et 7-8 ans comme le dmontraient les tudes
antrieures. Lanalyse de lintensit de lmotion montre une meilleure reconnaissance chez
les enfants notamment pour la joie et la colre mais naide en rien pour la surprise et le dgot
(peu dunits daction facilitent le jugement des enfants). Ainsi, lamlioration de la
reconnaissance des expressions faciales motionnelles est due la qualit du jugement des
enfants (celui-ci augmente avec lamlioration de la discrimination des expressions faciales
motionnelles et des reprsentations mentales des motions avec lge). Gosselin et al (1995)
en dduisent alors que les erreurs de reconnaissance ne sont pas causes par le systme
perceptif, mais par la reprsentation mentale des expressions motionnelles. Enfin, ils
remarquent que la capacit reconnatre une expression faciale est lie la personnalit et
lempathie de lindividu ressentir une motion.
Ainsi, les expressions faciales ont une place prpondrante dans lmotion et
notamment dans le dveloppement des interactions sociales et lvolution de lindividu dans
ASSISES THEORIQUES
16
son environnement. Llaboration dunits daction permet de mieux tudier et comprendre le
dveloppement des motions chez lenfant. Mme si des confusions persistent longtemps,
lenfant est rapidement capable dutiliser certaines expressions faciales et de les reconnatre
afin dagir et de mieux apprhender son milieu grce une meilleure reprsentation mentale
et un bon dveloppement cognitif. Lenvironnement socioculturel reste influant quant
lvolution de la comprhension et de linterprtation de ces expressions faciales
motionnelles.
D/ La prosodie
Longtemps nglige par la recherche, lexpression motionnelle vocale est pourtant un
lment important de lmotion. La prosodie est lensemble des faits suprasegmentaux
(intonation, accentuation, rythme, mlodie, tons) qui accompagnent, structurent la parole et
qui se superposent aux phonmes (aspect segmental). (Brin & al, 2004). Cest un vecteur
privilgi de la parole motionnelle. Nombre dauteurs croient que laccentuation, le rythme
et lintonation, en dautres termes la prosodie, dterminent un rle prpondrant dans la
communication vocale motionnelle (Fnagy, 1983 ; Bnziger, Grandjean, Bernard,
Klasmeyer & Scherer, 2001). Lmotion peut donc tre communique par laspect mlodique,
rythmique et le timbre (Scherer, Feldstein, Bond & Rosenthal, 1985 ; Bnziger & al, 2001).
Avec son modle de processus-composantes, Scherer (1984b, 1986, 2001) conoit
lexpression vocale des motions comme dynamique, inscrite dans un contexte situationnel
prcis (Scherer, Bnziger & Grandjean, 2003). Ainsi, lorsquune motion apparat, des
manifestations physiologiques surviennent et produisent des changements du rythme
respiratoire, des modifications du systme phonatoire (vibration des cordes vocales) et
articulatoire. Lmergence de tensions musculaires ou encore laugmentation de la salivation
peuvent intervenir galement dans une motion touchant ainsi la prosodie de lindividu. Tout
ceci est modifi par des bouleversements cognitifs, autonomes et somatiques lis la rponse
motionnelle.
Scherer tablit une approche de covariance et une approche de configuration pour
tudier lintonation. Dans la premire, les indices motionnels et les indices du contenu
linguistique sont indpendants et voluent en parallle. Cette approche est idale pour tudier
la parole affecte par des facteurs biologiques. La deuxime approche considre que le
ASSISES THEORIQUES
17
contour de F05 est un lment linguistique. Cette approche est employe pour tudier une
parole affecte par les conventions linguistiques et socioculturelles.
En utilisant le modle de Scherer, on peut dgager des prdictions quant aux
modifications acoustiques provoques par des ractions motionnelles. Pour cela, deux types
de mthodes sont mises au point.
La premire fait appel la reconnaissance et au jugement des motions par lcoute
dun chantillon vocal. Elle est aussi appele tude de dcodage ou de perception de laffect
vocal. On enregistre des acteurs nonant des phrases dpourvues de signification mais
charges daffects motionnels comme la joie, la colre, la tristesse, la peur et le dgot.
La seconde mthode dite dencodage, est fonde sur lanalyse des proprits physiques
acoustiques de la parole. Ces paramtres acoustiques modifis par la respiration et la
phonation incluent la frquence fondamentale, lintensit (lamplitude) et la dure des
diffrentes segments des expressions (parties voises, non voises, silencieuses des
segments). Le timbre, lui est affect par les changements somatiques et physiologiques
(Scherer, 1986 ; Bnziger & Scherer, 2005). Le but de cette dernire mthode est dtablir et
de prdire des patrons de paramtres en fonction des motions spcifiques. Cependant ceux-ci
sont difficiles mettre en relief du fait des nombreuses caractristiques vocales de la parole.
Ainsi, on nidentifie pas avec certitude les proprits acoustiques spcifiques de chaque
motion. Dans son modle dencodage, Scherer, remarque la rapidit avec laquelle les
expressions vocales changent de faon squentielle et continue au cours dune motion mais il
ne prend pas en compte les modifications des contours intonatifs de lnonc et celles du
timbre.
Les tudes de dcodage de lmotion vocale permettent de choisir, parmi plusieurs
motions, celle correspondant lenregistrement. Ainsi, Scherer, (1989), met en vidence une
plus grande facilit reconnatre la tristesse et la colre plutt que la joie, la peur et le dgot
(Bnziger & al, 2001).
Certains auteurs tels que Ladd, (1983) considrent la prosodie motionnelle comme la
superposition de plusieurs composantes (Bnziger & al, 2001). Cette superposition est base
sur une variation de la hauteur et une ligne de dclinaison (lintonation est haute au dbut de
la production vocale puis baisse peu peu). Cependant, ce modle ne permet pas de prciser
la production de lintonation, ni de comparer des expressions vocales en fonction de leurs
5 Frquence fondamentale ou F0 : En acoustique, cest le premier terme de la somme des sons simples quon
obtient quand on dcompose un son priodique complexe. Cest le principal responsable de la sensation
subjective de hauteur. (Brin et al (2004) p.103)
ASSISES THEORIQUES
18
contours intonatifs, de leur F0, de leurs dures, de leurs amplitudes et de leurs hauteurs de
rfrence puis de celles finales. Mais il peut seulement les dcrire.
Dun point de vue plus neurologique, Grandjean, Scherer, Ducommun, Michel et
Landis (2001) tudient la spcialisation hmisphrique de la perception de lintonation
pragmatique (affirmatif, interrogatif ou neutre) et de lintonation motionnelle (joie, tristesse,
neutre) (Bnziger & al, 2001 p.29). A laide dlectroencphalogramme et de cartographie
crbrale, ils ont modul diffrents paramtres acoustiques caractristiques des types
dintonation. Ils ont alors pu mettre en vidence une identification des variations prosodiques
mais nont pu localiser prcisment le ou les points de diffrenciation prosodique dune
motion prcise. Ils supposent que certaines modifications mineures sur des paramtres
acoustiques affecteraient probablement la perception motionnelle de manire importante
alors que certaines modifications majeures sur dautres paramtres nauraient que peu
deffets sur la perception de cette motion, et inversement pour une autre motion.
(Bnziger & al, 2001 p. 34).
La modulation du contour de la frquence fondamentale est essentielle dans
lattribution dmotion. En effet, par exemple si on pose une question dont la rponse est
oui/non avec un contour final descendant, celle-ci apparatra comme provocante lauditeur
(Scherer, Ladd & Silverman, 1984 ; Bnziger & al, 2001). Cest ainsi quon remarque laspect
pragmatique6 et motionnel que transporte lintonation suivant le type dnonc quil soit
interrogatif ou affirmatif.
La prosodie joue donc un rle indispensable dans le dveloppement du langage, de la
comprhension verbale et de la communication. Actuellement, nous navons aucune preuve
fiable de lexistence dune motion spcifique pour un type dintonation. Cependant, on pense
que les contours de F0 ont une signification motionnelle plus ou moins indpendante du
contour linguistique. En effet, si lintonation affecte ltat motionnel dautrui permettant ce
dernier dinfrer des tats mentaux au locuteur, le caractre linguistique reste parfois
indpendant de linterprtation motionnelle. Par exemple, les tudes de Papousek et al (1991)
6 Pragmatique : La pragmatique sintresse ce qui se passe lorsquon emploie le langage pour communiquer,
cest-dire que dune part elle tente de dcrire lensemble des paramtres linguistiques et extralinguistiques qui
influent sur le phnomne de lnonciation, qui modifient la faon dont lnoncest transmis, et dautres part elle
tudie dans quelle mesure ces paramtres interviennent. Elle sattache percevoir ce que lnonc exprime ou
voque, et ce que fait le locuteur en lnonant. (Brin et al, (2004) p. 201)
ASSISES THEORIQUES
19
montrent que la signification motionnelle peut-tre communique travers les modulations
de lintonation avant lacquisition du langage chez le nourrisson. Lintonation a lavantage de
maintenir lattention de lauditeur (Bnziger & al, 2005). Cest effectivement linformation
motionnelle envoye qui motive lauditeur couter. Cette fonction pragmatique invite
lauditeur accder lintention communicative du locuteur. Maillochon, Bassano (2003)
mettent en valeur la capacit des tout-petits (20 30 mois) comprendre les aspects
exclamatifs grce la prosodie (Aguert, Laval & Bernicot, 2008). Cutler et Swinney, (1987)
montrent quant eux, que lenfant utilise prioritairement lindice linguistique et ce nest que
plus tard quil envisage celui prosodique (Moore, Harris & Patriquin, 1993).
Moore, Harris, et Patriquin, (1998) tudient cette question. Ils cachent un objet dans
une bote, lautre restant vide. Deux pantins font une dclaration sur la localisation de lobjet,
chacun indiquant une bote diffrente. Dans une premire exprience, les deux dclarations
diffrent selon leur aspect lexical ( savoir qui correspond une grande certitude et
deviner quon associe un jugement hasardeux) et prosodique (intonations montante et
descendante). Une quarantaine denfants de 3-6 ans doivent alors trouver lobjet en suivant les
dclarations des pantins. Les rsultats attestent que lenfant distingue savoir et deviner
entre 4-6 ans. A 4 ans, lenfant utilise linformation prosodique seulement pour valuer la
pertinence et la fiabilit dune information. Dans une seconde exprience, quarante enfants de
3-5 ans participent. Le mme matriel est utilis, mais les auteurs dpareillent les intonations
et les dclarations savoir et deviner . Les rsultats montrent que lintrt pour les
indices prosodiques et lexicaux se dveloppe en mme temps 4 ans, mais la priorit est tout
de mme donne au contenu. Dautre part, cette recherche assure que lorsque le lexique et la
prosodie sont combins dans le mme nonc, les dcisions des enfants de 5 ans montrent la
prise en compte de lintonation. De plus, ils traitent lintonation descendante comme un
marqueur de plus grande certitude que lintonation montante. En dfinitive, pour dterminer
ltat psychologique du locuteur, ils jugent les indices du contenu propositionnel de lnonc
en premier quand ceux-ci sont clairement fiables et utilisent ceux prosodiques en second, soit
pour moduler linterprtation quils viennent dtablir avec les indices lexicaux (ils
recherchent toujours dabord ces indices avant de se pencher sur ceux prosodiques), soit
quand ces derniers ne sont pas assez clairs.
Cest vers 9-10 ans que lintonation sert de rfrence dans linterprtation dtats
mentaux pour la moiti des enfants. En dautres termes, cet ge, ils considrent autant la
prosodie et le contexte (Aguert & al, 2008).
ASSISES THEORIQUES
20
Des tudes sur la comprhension sarcastique divergent quant lge de lintrt
prosodique. En effet, alors que les adultes considrent lintonation comme indispensable
toute comprhension sarcastique, Creusere, (1999), atteste qu 8 ans, lenfant commence
percevoir lintonation comme un indice intressant pour comprendre ce type dnonc
(Aguert & al, 2008). Plus rcemment, Laval et Bert-Erboul (2005) dmontrent qu partir de 5
ans les enfants accordent une priorit lintonation pour lnonc sarcastique par rapport au
contexte (Aguert & al, 2008). Cependant, il est important de noter que lnonc sarcastique
fait appel autant au contenu qu la prosodie. Ainsi, la prosodie a pour fonction dtayer les
autres lments de cet nonc. Cest pourquoi, dans ltude de Laval et Bert-Erboul, (2005)
lenfant de 5 ans accorde autant dimportance la prosodie alors que dans une situation
communicationnelle classique, la prosodie nest prsente que pour accompagner le contenu
(Aguert & al, 2008).
Enfin, Bnziger et Scherer (2005) remarquent quen labsence de congruence entre
expression faciale, contexte ou contenu lexical, les enfants prouvent des difficults
interprter lintonation.
Ainsi avant 5-7 ans, les enfants prennent en compte en premier lieu le contenu
linguistique et contextuel dans une situation conversationnelle. Entre 9 et 10 ans le mme
intrt est port sur la prosodie et le contexte. Et ce nest qu lge adulte que lindividu fixe
son attention sur lintonation.
E/ Le contexte
Le contexte, en pragmatique est lensemble des donnes verbales et non-verbales qui
concourent lnonciation et qui permettent lnonc ou au mot de prendre une valeur
dans la communication. On distingue le contexte littral ou co-texte qui est li lnonc oral
ou crit, et le contexte situationnel ou situation, qui est lensemble non-verbal accompagnant
la production verbale (lieu, mimique, rapport entre les interlocuteurs, rle des
interlocuteurs) (Brin & al, 2004). Nous nous pencherons davantage sur la part du contexte
situationnel dans ce mmoire.
Trs peu dtudes se sont intresses aux effets du contexte sur la comprhension du
monde environnant et des motions. Comme indiqu prcdemment, le contexte situationnel
est essentiel pour la comprhension du langage oral (Bernicot, 2006) et reste lun des
ASSISES THEORIQUES
21
lments fondamentaux de lutilisation des demandes indirectes chez les enfants de 1,5 ans
jusqu 6-7 ans et plus (Aguert, Laval & Bernicot, 2010). Dans leur tude, en 2008, Aguert,
Laval, et Bernicot font lhypothse que les enfants de 5 ans se fondent sur le contexte et les
adultes sur lintonation. Pour se faire, ils crent un matriel informatis mettant en scne deux
personnages dont le discours est compos de logatomes7 afin que lenfant base son
interprtation sur le contexte ou lintonation. Ce dernier doit indiquer si lintention de
communication est positive ou ngative. Ainsi, ils ralisent une premire exprience mettant
en contradiction lintonation et le contexte et une seconde exprience o seul lun des deux
indices est prsent afin de contrler si lenfant est capable de prendre en compte lun ou
lautre seul. Dans la premire exprience, 54 enfants de 5,2 ans 9,2 ans et 18 adultes
participent. Douze histoires de Pilou le lapin et Edouard le canard sont racontes oralement.
La moiti des situations est congruente, lautre moiti est non congruente. Les rsultats
montrent que les enfants de 5-7 ans prennent en compte le contexte. A 9 ans, lintonation et le
contexte sont considrs de faon identique. A lge adulte, lintonation est prioritaire. Une
dernire exprience est ralise avec des enfants de 5-7 ans, afin de connatre leurs capacits
de prise en compte de lintonation. Daprs les rsultats, les enfants de 5 ans ne sont pas aptes
employer lintonation si elle forme le seul indice disponible. En revanche, ils observent qu
lge de 7 ans, lintonation vient renforcer le rle du contexte dans la comprhension de
lintention communicative dune situation non congruente. De mme, des recherches sur la
comprhension des promesses attestent de limportance du contexte chez lenfant (Laval &
Bernicot, 1999 ; Aguert & al, 2010). Concernant les expressions idiomatiques, Cacciari et
Levorato (1989) rvlent que le contexte offre laccs au sens de lexpression. Ce type
dexpression fait appel des concepts dabstraction, dtats mentaux tels que les intentions,
les ressentis et les motions ce qui est difficile pour les enfants (Flavell & Ross, 1981)
(Aguert, 2010). Cest notamment par le contexte que lenfant peut interprter de faon
figurative lidiome vers lge de 7 ans, quand il est infr dans un contexte adquat mme si
le sens littral est inappropri ou plausible. A linverse, ladulte privilgie le sens idiomatique
car il sait se dtacher du contexte. Chez lenfant, plus le contexte est riche et meilleure est son
interprtation. Cest vers 8 ans, que lenfant prend conscience et est capable de se diriger vers
laspect non-littral dun nonc. Il passe alors au stade de croyance dun langage littral
une connaissance figure induisant ainsi de nombreux tats mentaux.
7 Logatome : Production orale et/ou crite, sans signification, compose dune seule ou de plusieurs syllabes
(exemples : vo, ti , chon, favu, chijo, noug, rikap, cragonblin, etc.). (Brin et al, 2004)
ASSISES THEORIQUES
22
La prise en compte du contexte reste donc une base fondamentale dans la
comprhension des motions et le processus dveloppemental langagier.
Dans ce mmoire, nous voquons les motions travers ltude de la surdit. En effet,
celle-ci perturbe la production et la comprhension des motions. Malgr la correction
auditive parfois tardive et de qualit variable, lenfant ayant un appareil conventionnel est
capable de rentrer dans le langage oral. Cependant, tant privs de stimulations auditives
durant la petite enfance, ces enfants connaissent un dveloppement sensoriel prcoce atypique
ayant une incidence quant au dveloppement des interactions sociales, affectives et
motionnelles. Ainsi, nous dbuterons par un rappel concernant la surdit et lappareillage
conventionnel. Puis nous aborderons le dveloppement langagier et pragmatique de ces
enfants travers les diverses tudes sy rfrant.
II/ LENFANT SOURD
A/ Surdit et appareillage prothtique conventionnel
La surdit est une altration de laudition8. La dficience auditive reprsente 1 des
naissances, soit 600 700 enfants par an. La venue dun enfant sourd est un vritable
branlement pour la famille, car ce nest pas seulement la pathologie elle-mme qui la
bouleverse mais cest surtout lensemble du systme de communication qui se voit entrav
par la surdit. Suivant le type de surdit, lacquisition du langage, le reprage spatio-temporel,
lintelligibilit de la parole, le dveloppement intellectuel et psychoaffectif, la socialisation, la
construction de lidentit, la scolarisation, laccs culturel et professionnel sont autant de
domaines susceptibles dtre touchs.
Cinq grands critres caractrisent la baisse de laudition. Il sagit de ltiologie, de lge
dapparition que lon qualifie soit de surdit pr-linguale, pri-linguale ou post-linguale, du
8 Audition : Activit sensorielle complexe ralise grce loreille et ses affrences, permettant la perception,
lintgration des sons et bruits. Laudition commence avec la rception, au niveau de loreille externe, dune
onde sonore qui est ensuite achemine mcaniquement au travers de loreille moyenne (osselets, milieu arien)
puis au travers de loreille interne (cochle, milieu liquidien) jusquaux cellules cilies de lorgane de Corti
(Brin et al., 2004, p. 29)
ASSISES THEORIQUES
23
degr de dficit quil soit lger, moyen, svre ou profond ; du type de surdit quelle soit de
transmission, de perception ou mixte et enfin de la bilatralit ou non de la surdit.
On remarque actuellement que parmi les surdits 60% sont dorigine gntique dont 30%
sont syndromiques et 70% sont isoles. 25% des surdits sont causes par des facteurs
externes tels que les infections, les mningites, les pathologies de la grossesse, les
consquences de la prmaturit). Enfin, concernant les autres surdits, soit 15%, les causes
restent inconnues.
Lge dapparition de la surdit est un des facteurs dterminants quant au dveloppement
langagier de lenfant. Ainsi, on repre trois stades de survenue de la surdit congnitale :
Surdit pr-linguale : ds la naissance ou avant lapparition normale du langage
soit avant 2 ans.
Surdit pri-linguale : entre lge de 2 et 4 ans. Les surdits pr et pri linguales
interfrent dans le dveloppement du langage surtout quand il sagit de surdits
bilatrales et svres ou profondes.
Surdit post-linguale : aprs lge dacquisition du langage soit aprs 4 ans.
La dficience auditive lgre est comprise entre 21 et 40dB de perte daprs le BIAP
(Bureau International dAudioPhonologie). Ainsi, lenfant peut percevoir la parole.
Cependant, on remarque des perturbations quant lintelligibilit phontique et la
reconnaissance de certains indices sonores. Heureusement, la redondance de la parole et la
lecture labiale permettent de faon implicite de compenser. On retrouve des difficults en
voix chuchote ou sur des sons lointains pour la comprhension du langage. Lenfant accde
donc une scolarit classique.
Pour la dficience moyenne, la perte tonale se situe entre 41 et 70dB de perte. Si on lve
la voix, la parole est perue. Certains bruits sont distingus. Lenfant doit tre suivi en
orthophonie afin de dvelopper lapprentissage du langage. Ce type de surdit retentit dans la
production de la parole notamment sur le contrle de lintensit, de la mlodie, du timbre et
du rythme. Tout ceci a une incidence sur la production articulatoire et la parole de lenfant. Le
dpistage doit tre effectu tt pour une meilleure intgration sociale. Sa scolarit peut se faire
soit en institut spcialis soit en classe ordinaire avec quelques amnagements cependant.
La dficience auditive svre se situe entre 71 et 90dB de perte. Lenfant ne peroit que
les mouvements de la bouche. La parole crie et les fortes intensits sont devines mais de
manire rduite. Il ne distingue pas les bruits de la nature, seuls ceux des activits humaines
ASSISES THEORIQUES
24
peuvent tre perus. Les indices vibratoires sont alors trs importants et renseignent lenfant
sur son milieu. Lappareillage est indispensable pour la perception de la voix et
lapprentissage de la parole. Un accompagnement spcialis semble vident notamment un
suivi orthophonique qui peut savrer trs long tout comme pour une surdit profonde.
La surdit profonde se situe un seuil de perception suprieur 90dB HL. La parole nest
donc pas entendue. Mme forte intensit, seuls certains bruits trs forts sont perus comme
tant trs faibles. Lenfant est mutique si la surdit est bilatrale, congnitale, sans
appareillage et sans ducation prcoce. Si les bandes de frquences correspondant aux traits
phonmiques du langage ne peuvent tre amplifies par une prothse classique on propose
limplant cochlaire. On distingue trois catgories au sein des surdits profondes : la
premire concerne une perte de 91 100dB, la deuxime recueille les pertes entre 101 et
110dB, la dernire va au-del de 111 119dB HL. Puis on parle de cophose au-del dune
perte suprieure 120dB.
Ainsi, il est essentiel de pratiquer un dpistage prcoce afin de rapidement mettre en
place une prise en charge spcialise pour accompagner au mieux la famille et lenfant vers
des dispositifs adapts. Lorthophoniste tient donc un rle central dans ce suivi rducatif et
ducatif afin dapporter des outils et techniques ncessaires au dveloppement de la
communication ds le plus jeune ge chez ces enfants appareills ou non, ou encore
implants. Aujourdhui, le dpistage peut seffectuer ds le deuxime jour laide de PEA
(Potentiels Evoqus Auditifs). Le diagnostic qui sen suit doit tre confirm dans les trois
mois venir afin dinstaurer une prise en charge pluridisciplinaire avant six mois dans le
meilleur des cas.
Lappareillage auditif [] regroupe la fois la prothse elle-mme ainsi que sa mise en
place qui doit tre ralise au plus tt pour que ladaptation soit la plus satisfaisante
possible. (Brun & al., 2004, p.21). Lappareillage est au dpart, bien souvent mal accept
par lentourage. En effet, il vient traduire le handicap de la surdit alors que celle-ci reste
invisible. Cest pourquoi, il se miniaturise avec lvolution technique. Lappareillage
prothtique, dans un projet oraliste, est un moyen dviter le repli social des enfants sourds.
La prescription dun type dappareil se fait en fonction du type et du degr de surdit, de la
gne et de la demande de lentourage ou du patient. Ds que lon remarque une dgradation
en audiomtrie vocale ou une perte moyenne daudition sur les frquences 500, 1000 et
2000Hz suprieure 35dB, lappareillage est prconis. Une fois le type de prothse choisi,
ASSISES THEORIQUES
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laudioprothsiste adapte et fait les rglages en fonction de la surdit. Ce choix est fonction
des besoins, des conditions de vie sociale, de lintgration esthtique ainsi que de la
commodit de lappareil. Un appareillage strophonique ou bilatral permet alors une plus
grande fidlit du monde sonore extrieur. Cest en collaboration avec lorthophoniste et
laudioprothsiste que les rglages saffinent. On distingue les prothses amplificatrices
conduction arienne, celles amplificatrices conduction osseuse, les prothses auditives
implantables doreille moyenne et les implants cochlaires. Dans ce mmoire, nous nous
intresserons aux enfants sourds portant des prothses auditives conventionnelles encore
appeles prothses conduction arienne.
Le but premier de ces prothses est damplifier les sons afin que le sujet puisse percevoir
le message acoustique. Lappareillage prothtique traditionnel est une prothse amplificatrice
conduction arienne. Elle est prconise pour les sujets ayant une surdit moyenne svre.
Le rglage de ce type dappareillage est cependant rapidement limit en fonction du degr de
surdit. Les prothses conventionnelles constituent lappareillage de premire intention des
surdits de perception. Le dispositif gnral dun appareil auditif classique se constitue dune
partie rceptrice comprenant un microphone ou transducteur dentre (qui capte les sons et les
transforme en signaux lectriques), dune bobine dcoute (qui capte les vibrations du flux
magntique transmise par une boucle magntique) et dun interrupteur. Par lintermdiaire
dun couteur, la partie amplificatrice est charge daugmenter et de projeter les signaux via le
canal auditif. Une partie reproductrice permet aux sons amplifis datteindre et de stimuler la
cochle. En somme, les ondes sonores sont alors transformes en vibrations lectriques, elles-
mmes amplifies et ensuite retransformes en ondes sonores. Lnergie est fournie par des
piles. Lamplification peut-tre amliore par un systme HF (Haute Frquence) en milieu
scolaire pour les enfants en intgration. Il sagit dun sabot plac lextrmit du contour
doreille qui cre une boucle magntique amplifiant le son du microphone positionn sur le
porte cravate de linstituteur (le microlink) ou laide denceinte dans une salle de spectacle.
Ce systme coupe tous les bruits environnants et parasites pour ne slectionner que
linformation voulue.
Au sein de la catgorie des prothses conventionnelles conduction arienne, on identifie
les contours doreille, les prothses intra-auriculaires et les botiers. Pour chacune, on
distingue les prothses numriques, qui comme leur nom lindique, numrisent linformation
auditive grce un dcodeur. Ce type de prothse permet de rgler facilement lappareillage
ASSISES THEORIQUES
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en fonction de la surdit et du milieu sonore environnant. Enfin, il existe des prothses
programmables composes dun circuit numrique offrant la possibilit de faire les rglages
par ordinateurs.
B/ Le dveloppement du langage chez lenfant sourd
Le dveloppement de la parole et du langage a un lien troit avec le degr de surdit et
surtout avec la zone frquentielle touche. Bien entendu, la surdit est lun des facteurs
fondamentaux ayant une incidence sur le langage. Cependant, le niveau intellectuel, le
comportement, le milieu socioculturel et les troubles associs sont autant de facteurs qui
entrent en jeu lors de son acquisition. Lacquisition du langage oral en prsence dune surdit
est variable, allant de labsence de langage, dun retard plus ou moins important une
expression structure.
Suivant le gain prothtique, on retrouve des troubles de la voix avec des distorsions
du timbre dues labsence de feedback (le timbre peut tre nasalis, assourdi, rauque), des
troubles de lintensit (celle-ci peut tre oscillante voire dmesure par rapport au contexte) et
de la hauteur (grave, aigu, bitonale). On remarque des altrations de la voix surtout pour les
surdits profondes. Pour les autres types de surdit, laltration est plus ou moins constante en
fonction du gain prothtique et de la rducation. Un trouble de la parole est possible touchant
la mlodie, le rythme, les mots, les syllabes, lintensit des voyelles et consonnes. La
phonation est perturbe, le dbit tant plus allong avec des pauses inappropries. Enfin, la
respiration peut tre mal coordonne avec la parole. Des troubles darticulation sont
galement visibles et varient selon la perte auditive. Tout ceci dpend bien entendu du stade
de la rducation, du type de surdit et du degr. En labsence de rducation, lenfant sourd
profond nacquiert seulement que les explosives, phonmes les plus visibles.
Aujourdhui, 90% des enfants sourds naissent de parents entendants (Marschark,
1993 ; Peterson, 2004). Cest bien souvent pour ces derniers, le premier contact avec le
monde de la surdit. Ceci a une consquence primordiale dans lacquisition du langage chez
lenfant. En effet, ni le langage oral ni le langage sign ne lui sera naturel. Ainsi, suite au
diagnostic, les parents ont tendance moins stimuler vocalement leur enfant, sous prtexte
quil nentend pas. Ce silence peut tre rvlateur du dsarroi des parents face au handicap.
ASSISES THEORIQUES
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Nanmoins, on remarque une dprivation linguistique chez beaucoup denfants sourds mme
sils ont t dpists et appareills dans leurs deux premires annes. Cest pourquoi, mme si
une ducation oraliste est envisage par les parents de lenfant appareill, les gestes de la
langue des signes sont les plus accessibles ds le plus jeune ge pour venir souligner la parole.
Le dveloppement de cette langue premire offre des effets long terme sur lapprentissage
du langage oral ensuite (Transler, Leybaert & Gombert, 2005). Mme si lenfant sourd reoit
un suivi spcialis, lacquisition de la langue orale et crite reste difficile. Pourtant, le
dveloppement des tapes pr-linguales est le mme chez un enfant entendant que chez un
enfant sourd mais se droule de faon dcale.
Chez les enfants atteints de surdit lgre le langage se dveloppe quasi normalement, on
peut reprer cependant un retard ou un tr