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Macroéconomie agricole, Dossier I, Arnaud Diemer, IHEDREA, MCF Clermont-Ferrand 6 I. DIAGNOSTIC INTERNE DES EXPLOITATIONS AGRICOLES Le diagnostic interne renvoie au processus d’audit économique. L’audit économique, au même titre que l’audit comptable et financier, est une étape nécessaire pour comprendre le fonctionnement économique et technique des exploitations agricoles. L’INSEE et le SCEES utilisent pour cela des outils comptable, économique et statistique : les enquêtes, les recensements, la comptabilité nationale agricole. A. Les spécificités de l’économie agricole Le potentiel agricole français est généralement appréhendé par les enquêtes et les recensements réalisés conjointement par l’INSEE et le SCEES (Ministère de l’Agriculture, Agreste). En 1988 (période qui a précédé les nombreux départs à la retraite et à la pré- retraite), le recensement de l’agriculture française avait révélé l’existence de 1 016 000 exploitations agricoles, contre près de 1,3 million en 1979. - Le dernier recensement 1 (octobre 2000 à mars 2001) du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche 2 , a dénombré 664 000 exploitations agricoles en France métropolitaine. Parmi elles, quelques 400 000 exploitations dites "professionnelles" concentraient 95 % du potentiel économique agricole. Ces exploitations "professionnelles" atteignaient une dimension économique d'au moins 12 hectares équivalent blé (8 Unités de Dimension Européenne - UDE) et utilisaient au minimum l'équivalent du travail d'une personne occupée à trois quarts de temps pendant une année (0,75 UTA). Les plus grandes unités (celles de plus de 100 UDE, soit l'équivalent de 150 hectares blé) constituent 11 % des exploitations mais concentrent 45 % du potentiel agricole français. A l'inverse, les exploitations de moins de 8 UDE (moins de 12 hectares équivalent blé) représentaient encore 34 % des exploitations, mais ne totalisent que 2 % du potentiel agricole. La superficie et le cheptel moyen progressent. En 2000, les exploitations s'étendent en moyenne sur 42 hectares, soit une fois et demie la superficie moyenne de 1988. L'augmentation de la taille des exploitations, tant en surface qu'en dimension économique, est liée en partie à l'essor des " formes sociétaires " qui totalisent aujourd'hui près de 17% de l'ensemble des exploitations. Le nombre d'exploitations spécialisées dans l'élevage bovin a diminué de manière significative. En 2000, elles étaient 165 000 contre 271 000 en 1988. Un tiers des exploitations reste spécialisé dans l'élevage d'herbivores. Globalement, on observe un mouvement de concentration des cheptels, et plus particulièrement dans les élevages hors sol spécialisés. Les deux tiers des porcs à l'engraissement et des volailles sont désormais élevés dans ces exploitations. Le mouvement de concentration affecte également les productions végétales. La population active agricole compte actuellement (hors salariés saisonniers ou occasionnels) 1 319 000 personnes travaillant à temps plein ou partiel. La diminution de 35% du nombre d'agriculteurs actifs en 12 ans s'explique notamment par le fait que les conjointes occupent plus souvent un emploi à l'extérieur de l'exploitation. Par contre, après plusieurs décennie de 1 Les éléments marquants sont l'accroissement du nombre des grandes exploitations notamment sous forme sociétaire, le rajeunissement des chefs d'exploitation et la baisse de la population active familiale agricole. Le nombre des actifs permanents a diminué de 35% depuis 1988, date du dernier recensement. 2 D’après l’enquête « structures d’exploitations » réalisée en 1997, il en restait 680 000 (une exploitation sur trois a disparu en neuf ans). La taille moyenne d’une exploitation agricole avait doublé en France de : 20,5 hectares en 1971 à 41 hectares en 1995. Sur les 1 403 000 actifs agricoles permanents, les actifs familiaux représentaient 90% et les salariés permanents seulement 10%.

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I. DIAGNOSTIC INTERNE DES EXPLOITATIONS AGRICOLES Le diagnostic interne renvoie au processus d’audit économique. L’audit économique,

au même titre que l’audit comptable et financier, est une étape nécessaire pour comprendre le fonctionnement économique et technique des exploitations agricoles. L’INSEE et le SCEES utilisent pour cela des outils comptable, économique et statistique : les enquêtes, les recensements, la comptabilité nationale agricole.

A. Les spécificités de l’économie agricole Le potentiel agricole français est généralement appréhendé par les enquêtes et les

recensements réalisés conjointement par l’INSEE et le SCEES (Ministère de l’Agriculture, Agreste). En 1988 (période qui a précédé les nombreux départs à la retraite et à la pré-retraite), le recensement de l’agriculture française avait révélé l’existence de 1 016 000 exploitations agricoles, contre près de 1,3 million en 1979. - Le dernier recensement1 (octobre 2000 à mars 2001) du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche2, a dénombré 664 000 exploitations agricoles en France métropolitaine. Parmi elles, quelques 400 000 exploitations dites "professionnelles" concentraient 95 % du potentiel économique agricole. Ces exploitations "professionnelles" atteignaient une dimension économique d'au moins 12 hectares équivalent blé (8 Unités de Dimension Européenne - UDE) et utilisaient au minimum l'équivalent du travail d'une personne occupée à trois quarts de temps pendant une année (0,75 UTA). Les plus grandes unités (celles de plus de 100 UDE, soit l'équivalent de 150 hectares blé) constituent 11 % des exploitations mais concentrent 45 % du potentiel agricole français. A l'inverse, les exploitations de moins de 8 UDE (moins de 12 hectares équivalent blé) représentaient encore 34 % des exploitations, mais ne totalisent que 2 % du potentiel agricole. La superficie et le cheptel moyen progressent. En 2000, les exploitations s'étendent en moyenne sur 42 hectares, soit une fois et demie la superficie moyenne de 1988. L'augmentation de la taille des exploitations, tant en surface qu'en dimension économique, est liée en partie à l'essor des " formes sociétaires " qui totalisent aujourd'hui près de 17% de l'ensemble des exploitations. Le nombre d'exploitations spécialisées dans l'élevage bovin a diminué de manière significative. En 2000, elles étaient 165 000 contre 271 000 en 1988. Un tiers des exploitations reste spécialisé dans l'élevage d'herbivores. Globalement, on observe un mouvement de concentration des cheptels, et plus particulièrement dans les élevages hors sol spécialisés. Les deux tiers des porcs à l'engraissement et des volailles sont désormais élevés dans ces exploitations. Le mouvement de concentration affecte également les productions végétales. La population active agricole compte actuellement (hors salariés saisonniers ou occasionnels) 1 319 000 personnes travaillant à temps plein ou partiel. La diminution de 35% du nombre d'agriculteurs actifs en 12 ans s'explique notamment par le fait que les conjointes occupent plus souvent un emploi à l'extérieur de l'exploitation. Par contre, après plusieurs décennie de

1 Les éléments marquants sont l'accroissement du nombre des grandes exploitations notamment sous forme sociétaire, le rajeunissement des chefs d'exploitation et la baisse de la population active familiale agricole. Le nombre des actifs permanents a diminué de 35% depuis 1988, date du dernier recensement. 2 D’après l’enquête « structures d’exploitations » réalisée en 1997, il en restait 680 000 (une exploitation sur trois a disparu en neuf ans). La taille moyenne d’une exploitation agricole avait doublé en France de : 20,5 hectares en 1971 à 41 hectares en 1995. Sur les 1 403 000 actifs agricoles permanents, les actifs familiaux représentaient 90% et les salariés permanents seulement 10%.

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baisses liée à l'essor de la mécanisation, on constate une augmentation du nombre de salariés permanents (en 2000, on en dénombre 164 000, soit 12%) et une baisse relative des actifs familiaux (88%). Enfin, malgré la faiblesse du nombre d'arrivée de jeunes, la pyramide des âges s'équilibre. Les nombreux départs en retraite et préretraite ont contribué au rajeunissement des chefs d'exploitation et des co-exploitants : 53% ont moins de 50 ans en 2000, contre 43% en 1988. - A partir du dernier recensement, le ministère de l’Agriculture a publié une enquête sur les structures des exploitations françaises (Agreste, 2004). Un échantillon de 75 000 exploitations a été utilisé sur la période allant de l’automne 2003 au début de l’année 2004, et sera réutilisé pour les enquêtes prévues en 2005 et 2007. Ce portrait de l’agriculture française révélait l’existence de 370 000 exploitations « professionnelles » et de 220 000 unités beaucoup plus modestes, qualifiées de « non professionnelles », soit près de 590 000 exploitations (contre 664 000 en 2000, soit une baisse de 11%). Les exploitations dites non professionnelles ne fournissent en moyenne que l’équivalent du travail d’une personne à tiers de temps. Le poids de ces petites unités (270 000 en 2000, 400 000 en1988), qui disposent en moyenne de 10 ha de superficie demeure toutefois réel dans certains élevages (50% des équidés, 33% des ruches, 10% des ovins…). De 2000 à 2003, le nombre des exploitations professionnelles aurait diminué de 2.3% (après une réduction de 3%, chaque année, de 1988 à 2000). Les exploitations professionnelles concentrent aujourd’hui près de 95% du potentiel économique agricole. Elles représentent la quasi-totalité de l’activité laitière ou horticole, 95% de l’activité viticole, 94% de l’élevage bovin à viande et 93% de celui des grandes cultures. Premier phénomène marquant de cette enquête : l’agrandissement des exploitations professionnelles s’est poursuivi. Elles disposent désormais de 70 ha de superficie agricole, soit 5 ha de plus qu’en 2000. Ces extensions se font en récupérant les terres d’anciennes exploitations (la superficie globale des exploitations professionnelles ne varie guère : 25.5 millions d’hectares, soit la moitié du territoire national). Les unités de plus de 100 ha continuent à augmenter. On comptabilise 67 000 exploitations de 100 à 200 ha (contre 63 000 en 2000) et 15 500 de plus de 200 ha (contre 14 000 en 2000).

Deuxième phénomène important : la montée en puissance des formes sociétaires (17% en 1997). Les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) représentaient près de 50% des formes sociétaires (61 000 contre 55 000 en 2000). Le nombre des groupements agricoles d’exploitations en commun (GAEC) a progressé de 3% (de 41 500 unités en 2000 à 43 000 en 2003). On dénombrait enfin près de 16 000 sociétés civiles d’exploitation agricole, surtout dans le domaine de la viticulture (elles étaient 800 en 2000).

Tableau 1 : Classement des exploitations selon leur statut juridique

Exploitations professionnelles par statut Nombre %

Var 2003/2000

Exploitants individuels 241 000 65.66 - 12% Formes sociétaires 126 000 34.33

Dont EARL 61 000 48.4 + 11% GAEC 43 000 34.1 + 3% SCEA 16 000 12.7 + 6% Autres 6 000 4.8 - 9%

TOTAL 367 000 100 Source : Agreste, 2003

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Les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) représentaient près de 50% des formes sociétaires (61 000 contre 55 000 en 2000). Le nombre des groupements agricoles d’exploitations en commun (GAEC) a progressé de 3% (de 41 500 unités en 2000 à 43 000 en 2003). On dénombrait enfin près de 16 000 sociétés civiles d’exploitation agricole, surtout dans le domaine de la viticulture (elles étaient 800 en 2000). La spécialisation et la concentration des exploitations constituent le troisième fait important. Sur les 367 000 exploitations professionnelles, seules 60 000 sont de type mixte, associant de façon équilibrée plusieurs cultures ou types d’élevage. Près de 81 000 exploitations sont spécialisées en grande culture (soit 4 000 de plus qu’en 2000). Ces exploitations disposent désormais d’une moyenne de 106 hectares de superficie agricole (6 de plus qu’en 2000). Les 65 000 exploitations spécialisées dans la production laitière comptabilisent désormais un cheptel moyen de 39 vaches laitières (3 de plus qu’en 2000). Les éleveurs de plus de 1000 porcs ont développé leur cheptel malgré une conjoncture délicate. Ils en détiennent en moyenne 2050 (contre près de 1950 en 2000). Les gros élevages de poules pondeuses s’affirment de plus en plus. Les unités de plus de 50 000 poules abritent en moyenne 107 000 animaux (contre 100 000 en 2000).

Tableau 2 : Exploitations professionnelles par OTE en 2003

OTE Effectifs en milliers Var 2003/2000 Grandes cultures

Bovins lait Polyculture, Poly-élevage

Bovins viande Viticulture appellation

Autres herbivores Porcins, volaille Autre viticulture

Maraîchage horticulture Fruits

Bovins mâles

81 65 60 41 36 21 16 13 12 11 10

- 5 - 8

- 14 - 5 - 2 - 3 0

- 3 - 5 - 8

- 16 Source : Agreste (2003)

Dernier fait marquant : plus de 875 000 personnes hors salariés saisonniers travaillent à temps plein ou partiel sur les exploitations professionnelles en 2003. L’évolution de leur nombre suit celle des exploitations, soit une baisse de 2.2% par an depuis 2000. Plus de 80% des emplois sont occupés par les exploitants ou leur famille. Cet effectif diminue au rythme de 2.6% par an entre 2000 et 2003. Les enfants choisissent plutôt une profession non agricole. Les conjointes travaillent davantage hors de l’exploitation. La proportion d’actifs familiaux à statut salarié reste modeste, tout en continuant à augmenter (4% en 2003 contre 3% en 2000 et 1% en 1988). Les 146 000 salariés permanents non familiaux restent stables depuis 2000. L’ensemble des actifs sur les exploitations professionnelles fournissait en 2003 l’équivalent de travail de 793 000 personnes à plein temps pendant une année. Cette quantité de travail représente l’équivalent de 2.2 personnes par exploitation ou encore 3.1 pour 100 ha. La productivité continue donc de s’accroître rapidement : il fallait l’équivalent de 3.3 personnes pour cultiver 100 ha en 2000 et 4.7 personnes en 1988.

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Ces quelques données montrent que l’exploitation agricole à caractère familial (annexe I) reste largement prépondérante et pose des problèmes particuliers liés aux relations et aux solidarités existant entre l’unité de production et la famille, celle-ci apportant à la fois sa force de travail et une part du capital nécessaire. Le qualificatif « familial » cache bien sûr des réalités très diverses, des conditions de vie et des possibilités de développement très différentes. La superficie cultivée, les potentialités de la région, la technicité de l’agriculteur, le niveau des emprunts contractés, les liens avec les secteurs amont (approvisionnement) et aval (transformation), l’encadrement coopératif, la composition de la famille (la présence ou non d’un successeur)… sont autant de situations qui permettent ou non à l’exploitation agricole de faire vivre le groupe familial et d’assurer sa reproduction. Le caractère familial pose cependant 5 séries de problèmes :

1. Définition et mesure du revenu tiré de l’exploitation agricole Ces problèmes sont liés à la présence de facteurs personnels (travail familial, capitaux personnels, terres en propriété). Une fois, soustrait au produit obtenu le montant des charges réelles (ce qui a été réellement déboursé), il reste un revenu, appelé revenu agricole, qui sert à rémunérer les charges supplétives (coûts implicites), c’est à dire celles qui correspondent aux facteurs personnels mis en œuvre sur l’exploitation.

2. Répartition du revenu entre la famille et l’unité de production En effet, ce revenu ne doit pas seulement être affecté à la consommation du ménage, il doit aussi servir à renouveler et à accroître la capacité de production (investissement de capacité, investissement de productivité). Il arrive souvent que les besoins de la famille (conditions de vie) soient sacrifiés aux exigences du développement de l’unité de production.

3. La place des travailleurs familiaux

Le fait qu’une large majorité de femmes travaille sur les exploitations n’entraîne pas forcément leur participation effective à la conduite de l’unité de production et aux prises de décisions. De même, les fils et filles travaillant comme aides familiaux doivent obtenir la faculté de faire reconnaître leur participation aux résultats et au développement de l’exploitation. Les exigences légitimes des « agricultrices » et des enfants aides familiaux ont fait l’objet d’une série de dispositions législatives et réglementaires : - Le salaire différé : c’est la loi d’orientation agricole de juillet 1999 qui a créé une créance de salaire différé entre époux. Jusqu’à cette date, l’époux survivant n’avait aucun droit. Depuis 1999, la créance est attribuée au conjoint collaborateur survivant du chef d’exploitation ou de l’associé exploitant une société. Ce dernier doit avoir participer directement et effectivement à la mise en valeur de l’exploitation pendant au moins 10 ans, sans autre contrepartie financière (salaire ou participation aux bénéfices) que les avantages inhérents à la communauté de vie (nourriture, logement…). La créance ne peut être réclamée qu’au décès du chef d’exploitation et uniquement par le conjoint survivant. Ce droit à rémunération vient s’ajouter aux droits successoraux. - Le maintien dans l’indivision de l’exploitation agricole, à la mort du chef d’exploitation, au profit du conjoint survivant.

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- L’attribution préférentielle de l’exploitation agricole, à la mort du chef d’exploitation, au profit du conjoint survivant ou de tout héritier copropriétaire. - Le partage des droits et des responsabilités entre mari et femme dans la gestion de l’exploitation agricole, c’est-à-dire la reconnaissance d’un statut de co-exploitante pour l’agricultrice qui participe avec son mari à la conduite de l’exploitation agricole (loi du 4 juillet 1980). - La création d’un GAEC (Groupement Agricole d’Exploitation en Commun) associant père et fils, voire couple parents et couple enfants est aussi un moyen d’assurer la cogestion de l’exploitation.

4. La confusion des patrimoines Il peut y avoir en effet confusion entre le patrimoine de la famille et le patrimoine de l’unité de production, ce qui peut avoir des conséquences très graves en cas de difficultés financières sur l’exploitation. Les créanciers impayés (les banques en particulier) peuvent aller jusqu’à saisir les biens strictement familiaux pour assurer le recouvrement des sommes prêtées pour les besoins de l’unité de production. Pour permettre la séparation du patrimoine familial des biens affectés à l’exercice de l’activité professionnelle, la loi du 11 juillet 1985 a créé l’Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL). Ce nouveau cadre juridique est une société civile constituée par une ou plusieurs personnes physiques où les associés ne supportent les pertes qu’à concurrence de leurs apports. 5. Revenu agricole et pluriactivité Longtemps considérée comme un frein au développement agricole (défense du modèle d’exploitation à deux actifs familiaux), la pluriactivité des familles d’agriculteurs apparaît aujourd’hui comme un moyen d’assurer la viabilité des exploitations agricoles. Une étude réalisée par l’INSEE (Butault, 1999) auprès d’un échantillon exclusivement constitué d’exploitations individuelles3 de plus de 12 hectares-équivalent-blé (système RICA) souligne que la décision d’exercer une activité professionnelle hors de l’exploitation répondrait à une double logique : conjoncturelle, en permettant de compenser la faiblesse et la volatilité du revenu agricole) ; structurelle, en contribuant directement ou indirectement au financement de l’exploitation. - Les revenus agricoles sont, pour une large part, déterminés par la taille des exploitations. L’exercice d’une activité extérieure par un ou plusieurs membres de la famille peut permettre de compenser la faiblesse du revenu agricole et par là même de réduire les disparités de revenu global entre les familles d’agriculteurs. Par ailleurs, du fait d’imperfections du marché du travail (accès difficile) ou d’une préférence marquée de certains de ses membres pour le travail sur l’exploitation, certains foyers ne peuvent ou ne souhaitent pas accéder à un emploi hors de l’exploitation, ce qui se traduit par un revenu global des familles pluriactives supérieur à celui des autres familles. 3 Les formes sociétaires d’exploitations étant exclues du champ de l’enquête. L’échantillon permanent était composé d’observations relatives à 4106 exploitations (sur les 7 468 présentes dans le RICA), représentant 420 foyers d’agriculteurs professionnels. Cet échantillon a ensuite fait l’objet d’un partage entre quatre régimes de travail selon l’exercice (ou non) d’une activité professionnelle hors de l’exploitation et selon l’emploi (ou non) de main d’œuvre salariée sur l’exploitation.

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- L’exercice d’une activité extérieure agit également sur la situation financière des exploitations, en accroissant les capacités d’épargne et d’autofinancement, mais également en facilitant l’accès des exploitants au marché du crédit4. Ainsi la capitalisation des exploitations pluriactives est plus intense. Elle s’effectue principalement par la voie d’emprunt, la sécurité assurée aux banques par l’existence de revenus extérieurs jouant davantage que leur niveau effectif. B. Les comptes de l’agriculture Les comptes de l’agriculture représentent la partie de la comptabilité nationale qui s’intéresse aux résultats de l’activité économique de la branche agricole, c’est l’activité concourant à la production de produits agricoles. Les comptes de l’agriculture sont établis chaque année et permettent de mesurer l’évolution du revenu agricole.

1. La détermination du revenu agricole

Le revenu agricole s’entend à la fois comme un revenu d’entreprise mais également comme une rémunération de l’exploitant. Une exploitation agricole ne se limite pas à son rôle d’outil de production, elle permet aussi à une famille, celle du chef d’exploitation, de dégager des moyens de subsistance. La limite entre ce qui relève du domaine de l’entreprise agricole et ce qui relève du domaine privé (surtout lorsqu’il s’agit d’une exploitation individuelle) n’est pas évidente. Cette difficulté à séparer les deux aspects s’explique par le fait que le bénéfice dégagé lors de l’exercice d’une activité indépendante rémunère à la fois le travail non salarié (souvent de plusieurs personnes travaillant sur l’exploitation) et les capitaux investis dans l’exploitation. Une fois les charges courantes liées à l’activité payées et les provisions nécessaires à l’activité constituées, ce qui reste représente le revenu d’activité des exploitants qui rémunère indistinctement le travail, le capital et une partie de la terre. Les revenus agricoles sont les revenus provenant de la production de produits agricoles quels que soient les agents qui la réalisent (exploitations agricoles mais également ménages et entreprises non agricoles). Les revenus des agriculteurs (revenu global) comprennent non seulement les revenus agricoles mais aussi des revenus provenant d’activités extérieures exercées par les agriculteurs et leur famille ainsi que les transferts sociaux (retraites agricoles ou non) perçues par la population agricole. Le calcul du revenu agricole va s’effectuer à partir de données recueillies directement auprès d’un certain nombre d’exploitations agricoles. L’opération, mise en place au niveau communautaire, est gérée conjointement par l’INSEE et le SCEES (on utilise le RICA : Réseau Informatique Comptable Agricole). Elle constitue actuellement la seule enquête statistique permettant d’appréhender directement le revenu agricole des exploitants. Elle consiste à suivre les comptabilités de 6 000 exploitations agricoles françaises, à traiter et à dépouiller les données obtenues. Les résultats sont fournis suivant l’orientation technico- 4 Selon Butault (1999, p. 177), le taux d’endettement, défini comme le rapport de l’endettement total sur le total de l’actif, s’élèverait à 36% pour les exploitations pluriactives alors qu’il serait de 27% pour les autres exploitations. Une hiérarchie qui se retrouve lorsqu’on examine le montant des nouveaux emprunts contractés par les exploitations sur la période considérée. Les nouveaux emprunts des exploitations pluriactives représenteraient un peu moins de 45% du revenu agricole brut contre 35% pour les autres.

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économique des exploitations, c’est à dire selon leur système de production et, à l’intérieur, selon la dimension des exploitations.

En analyse économique, la notion de profit ou de revenu se définit comme le produit

(ou le chiffre d’affaires) duquel on déduit l’ensemble des coûts. Celui-ci comprend les coûts variables, c’est à dire tout ce qui est détruit ou transformé lors du processus de production (les matières premières, le carburant, les produits chimiques…) et la rémunération des facteurs de production. L’activité agricole mobilise trois types de facteurs de production : la terre, le travail et le capital. Dans ce cadre théorique, la terre est rémunérée par les loyers et les fermages si l’exploitant est locataire, ou par un loyer fictif si l’exploitant est propriétaire, ou une combinaison des deux car l’exploitant peut louer et posséder. Le travail salarié est lui rémunéré par le versement des salaires et des cotisations sociales. Quant au capital, il est rémunéré par un taux d’intérêt que l’on pourrait choisir équivalent à celui des capitaux empruntés pour l’achat de matériels et bâtiments. Cependant quand il s’agit de mesurer concrètement ce concept, on est limité par les instruments comptables dont on dispose et qui ne permettent pas de respecter parfaitement la définition théorique. De plus, les dispositions fiscales tendent à complexifier le calcul. On est ainsi contraint d’accepter l’indicateur le moins éloigné du concept théorique mais affecté néanmoins de certaines imperfections. L’indicateur de profit qui s’approcherait de la définition recherchée est ainsi le Résultat Courant Avant Impôt, défalqué des cotisations sociales de l’exploitant. Le RCAI correspond au solde entre le produit total (produit brut agricole, produits divers dont les subventions) et les charges totales (y compris les amortissements). Ce revenu mixte mesure la somme dont dispose le chef d’exploitation pour rémunérer les capitaux propres, la terre et la main d’œuvre familiale. Il constitue donc une ressource pour le développement de l’activité et des investissements agricoles. C’est ainsi le solde comptable qui semble le plus proche de la notion de revenu ou de profit économique dégagé par l’exploitation. Il correspond au résultat de l’activité permanente de l’exploitation dans la mesure où les produits et les charges exceptionnelles sont exclues. En revanche, il prend en compte les revenus annexes comme ceux provenant de l’agritourisme si l’activité reste limitée. - Le revenu net agricole est égal au résultat courant avant impôt – les cotisations sociales. - Le revenu brut agricole correspond au revenu net agricole + les amortissements. - Les bénéfices non agricoles : bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et bénéfices non commerciaux (BNC). - Le revenu d’activité extérieure : salaires + bénéfices non agricoles - Autres revenus extérieurs : revenus de la propriété et retraites - Total des revenus extérieurs : revenu d’activité extérieure + autres revenus extérieurs - Le revenu brut global : revenu brut agricole + total des revenus extérieurs - Le revenu net global : revenu net global + total des revenus extérieurs - Les prélèvements privés : sommes versées par l’exploitation à la famille

Depuis l’instauration du Système Européen des Comptes en 1995 (SEC 95), les aides à l’agriculture sont désormais scindées en subventions sur les produits et en subventions d’exploitation. Les premières recouvrent les aides compensatrices aux grandes cultures, la prime à la vache allaitante et la prime spéciale aux bovins mâles. Dans le nouveau système, ces aides directes sur les produits sont incluses dans le prix de base, dont sont déduits la TVA et les autres impôts sur les produits. Les secondes sont prises en compte dans le calcul du résultat agricole global. L’aide au gel des terres ou les indemnités spéciales montagnes rentrent dans ce cadre. Ces subventions n’incluent pas l’indemnisation des éleveurs dont le troupeau a été abattu à cause de l’ESB (opération traitée comme un transfert en capital).

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2. Les comptes nationaux de l’économie agricole

Le compte consiste à regrouper les opérations sur biens et services, et les opérations de

répartition. On appelle ressource toute opération qui représente une entrée de monnaie, et emploi toute opération qui représente une sortie de monnaie. Comme toute comptabilité, la comptabilité nationale agricole présente des comptes en équilibre, en écrivant le solde, capacité ou besoin de financement, à l'intérieur des comptes. Chaque compte doit réunir un ensemble d'opérations homogènes, ou découlant d'une même activité. On distingue

a. Le compte de production

Comme son nom l'indique, il est axé sur la production. Cette fonction est exercée à titre principal par les entreprises agricoles (statut sociétaire) et par les exploitations individuelles. Le compte de production décrit la liaison entre la production de biens et services et les consommations intermédiaires nécessaires pour obtenir cette production. La production de l’exercice nette des achats d’animaux comprend : * Les livraisons : quantités vendues et autoconsommées * La variation des stocks pour les céréales, le vin, les pommes de terres et le bétail sur pied. La valorisation se fait au prix au 1er janvier pour le stock initial et au 31 décembre pour le stock final. La différence entre les deux valorisations, appelée «appréciation sur stocks » traduit l’effet de glissement des prix en cours d’année sur la valeur des stocks. * Les biens d’investissement (production immobilisée): variation du cheptel de souche et plantations de vergers et de vignobles. * les intraconsommations : produits agricoles réutilisés en l’état dans le processus de production (fourrages, semences, lait bu par les veaux…). * des travaux à façon * des produits résiduels * des pensions d’animaux * des terres louées prêtes à semer * de l’agritourisme * d’autres locations et autres produits d’activités annexes. Le solde du compte de production est constitué par la valeur ajoutée (portée en emploi du compte). La valeur ajoutée brute, est égale à la différence entre la production de l’exercice nette des achats d’animaux (en tenant compte des remises, ristournes et rabais obtenues) et les consommations intermédiaires. La comptabilité nationale agricole calcule également ce que l’on appelle la valeur ajoutée nette ; différence entre la valeur ajoutée brute et la consommation de capital fixe.

b. Le compte d’exploitation

Il décrit la répartition primaire de la valeur ajoutée, la distribution de revenus qui a eu lieu à l'occasion de la production. Il reprend en ressources la valeur ajoutée brute augmentée des éventuelles subventions d'exploitation reçues (il s’agit des sommes versées à des agriculteurs pour combler un déficit d’exploitation : ni les aides aux investissements, ni les bonifications d’intérêt ne figurent dans ce poste), et décrit en emplois comment ces ressources ont été réparties entre les salariés qui ont participé à la production (il s’agit des salaires et cotisations sociales concernent la main d’œuvre salariée) ; l'état qui prélève des impôts indirects (il s’agit de taxes frappant les produits agricoles ou les facteurs de production, à la charge des

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agriculteurs : droits sur les alcools de mutage, taxes sur les sucres de chaptalisation) et l’entreprise elle-même. Le compte d'exploitation ne comporte que des opérations de répartition. La rémunération des salariés est entendue au sens large puisqu'elle comporte les cotisations sociales. Le solde du compte d'exploitation est l'excédent brut d'exploitation (porté en emplois du compte). Il montre ce qui reste à l’entreprise agricole après qu'elle est rémunérée ses salariés et versée les prélèvements obligatoires liés à la production. Ce solde est indépendant des capitaux (propres ou empruntés) mis en oeuvre pour produire. Pour les entreprises sociétaires, le compte d'exploitation traduit le partage entre travail et capital. L'excédent brut d'exploitation représente les sommes qui sont disponibles pour renouveler le matériel, investir et rémunérer les divers apporteurs de capitaux. Pour les exploitants individuels, l'excédent brut d'exploitation représente à la fois la rémunération de leur travail, celle des capitaux qu'ils ont avancés ou empruntés, et les sommes disponibles pour accumuler.

c. Le compte de revenu

Ce compte décrit la répartition secondaire du revenu. Il retrace les opérations de répartition liées à l'acquisition et à la redistribution du revenu des entreprises agricoles et des exploitants agricoles. En ressources, il reprend l'excédent brut d'exploitation pour les entreprises sociétaires et les entrepreneurs individuels. Pour les autres ménages, les ressources essentielles sont les salaires, les transferts (prestations sociales, retraites) et les revenus de la propriété (intérêts, dividendes). En emplois, on porte les transferts de revenu. Les entreprises sociétaires paient l'impôt sur les bénéfices, versent des intérêts aux prêteurs et des dividendes aux actionnaires (parts sociales pour les SARL). Les exploitants agricoles versent des intérêts, des primes d'assurance, paient des impôts directs. Le solde du compte de revenu est le revenu disponible brut qui représente la somme dont le secteur institutionnel peut disposer à son gré, pour la consommation ou l'épargne. Les différentes postes Les assurances : on trouve, en ressources, les indemnités reçues pour les risques de grêle, incendie, automobile et en emplois, les primes versées. Les intérêts comprenant les sommes versées par les agriculteurs pour les emprunts liés à l’entreprise agricole. Les fermages et métayages « nets » représentent la différence entre ceux versés par les agriculteurs et ceux reçus par eux. Ainsi les charges locatives nettes sont inscrites en emplois du compte de revenu d’entreprise. Elles correspondent à la rémunération nette du propriétaire des terres, c’est à dire aux charges locatives brutes desquelles sont déduits les impôts fonciers sur les terres en fermages. A la rubrique impôts, figure la totalité de l’impôt foncier qu’il soit payé par les propriétaires non exploitants ou par les agriculteurs en faire valoir direct. Les cotisations sociales sont celles payées par les exploitants pour eux-mêmes et leur famille. Les prestations sociales sont celles reçues par les exploitants et leur famille.

d. Le compte d’utilisation du revenu

Il montre comment l’exploitant agricole répartit son revenu disponible entre la

consommation finale et l'épargne. Ce compte ne comporte en ressources que le revenu disponible brut et en emploi une seule opération sur biens et services, la consommation finale. Le solde est l'épargne brute. Les entreprises sociétaires n'ont par convention aucune consommation finale (l'épargne brute est égale au revenu disponible brut). Le compte d'utilisation du revenu des exploitants agricoles permet de connaître le partage entre

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consommation et épargne, qui est une donnée macro-économique essentielle. La signification du solde du compte d'utilisation du revenu est importante : si on déduit de l'épargne brute, l'amortissement qui mesure la consommation de capital fixe au cours de la période, on obtient l'épargne nette qui mesure l'enrichissement du secteur institutionnel. L'épargne nette mesure l'accroissement du patrimoine. L'épargne brute représente la somme que l’entreprise agricole peut consacrer au financement de son investissement brut sans avoir à s'endetter : c'est l'autofinancement. Les dépenses familiales correspondent aux prélèvements privés plus le total des revenus extérieurs. Elles correspondent à la somme de la consommation familiale, des remboursements d’emprunts privés, de l’épargne extra-agricole et de l’impôt.

c. Le compte de capital

Il retrace avec le compte financier l'ensemble des flux qui constituent la fonction d'accumulation. Ils vont décrire comment le secteur a remplacé les équipements usagés et quelle structure il a donné à l'accroissement de son patrimoine, mesuré par l'épargne nette. Le compte de capital a pour objet de décrire les opérations liées aux investissements en actifs physiques et aux transferts en capital. Il reprend en ressources l'épargne brute à laquelle s'ajoutent les transferts en capital reçus. Les emplois du compte de capital se décompose de la manière suivante : - La FBCF, c'est à dire l'achat de biens destinés à produire d'autres biens, et dont la durée d'utilisation excède un an. C'est l'investissement brut. - Les variations de stocks. Les stocks sont des produits conservés par le secteur en vue d'utilisation ou de ventes futures. Ces produits peuvent également constituer des stocks spéculatifs. La variation des stocks constitue la différence entre le montant des stocks au 31 Décembre courant et le montant des stocks au 31 Décembre précédent. - l'acquisition nette des terrains et actifs incorporels (brevets) - les transferts en capital Le compte de capital d'un exploitant agricole montre comment son épargne (S) va suffire ou non à financer ses investissements (I), il montre dans quelle mesure l’exploitant s'autofinance (on parle de capacité ou besoin de financement). Si l’exploitant a un besoin de financement, il doit faire appel à l'épargne des autres secteurs en leur empruntant (principalement les banques). La capacité d’autofinancement courante est égale au résultat courant avant impôt + les amortissements - charges sociales. L’autofinancement courant est égal à la capacité d’autofinancement courante – les prélèvements privés. Ces comptes nationaux présentent toutefois, une série d’imperfections : - Des difficultés liées à la connaissance statistique : ainsi pour certaines productions (fruits et légumes, animaux), il est souvent difficile de connaître les quantités livrées, les stocks et les prix. Il est difficile également de saisir certains achats de biens intermédiaires. - Le revenu brut agricole n’est pas le revenu disponible des ménages agricoles : en déduisant du revenu brut agricole, la consommation de capital fixe pour le renouvellement des investissements (matériel, bâtiments, plantations…), on obtient le revenu net agricole. Cependant, le calcul des amortissements reste approximatif et le revenu net doit servir non seulement aux besoins des ménages mais aussi à l’accroissement de la capacité de production.

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Ressources Emplois

Compte d’exploitation

Impôts liés à la production (sauf TVA)

Compte de revenu

Compte de Production Consommations intermédiaires

Rémunération des salariés Impôts liés à la production et à l’importation (reçus) y compris TVA perçue par les administrations publiques Revenus de la propriété et de l’entreprise (intérêts , dividendes...reçus) Opérations d’assurance dommages Autres transferts courants (impôts sur le revenu, cotisations sociales, prestations reçus)

Subventions d’exploitation versées Revenus de la propriété et de l’entreprise (intérêts , dividendes...versés) Opérations d’assurance dommages Autres transferts courants (impôts sur le revenu, cotisations sociales, prestations versés)

Compte de capital

Présentation des comptes des secteurs institutionnels

Flux nets de créances Flux nets de dettes

Valeur Ajoutée Brute

Production

Moyens de paiement internationaux Monnaie et dépôts non monétaires Bons négociables, obligations, actions et autres participations Crédits Réserves techniques d’assurance

Valeur Ajoutée Brute

Subventions d’exploitation (reçues)

Compte financier

Rémunération des salariés

Excédent Brut d’Exploitation

Excédent Brut d’Exploitation

Compte d’utilisation du revenu

Revenu Disponible Brut

Revenu Disponible Brut Consommation finale Epargne Brute

Epargne Brute Formation Brute de Capital Fixe Variation de stocks Acquisition nette de terrains et d’actifs incorporels Transferts en capital versés

Transferts en capital (aides à l’investissement, impôts en capital...reçus)

Capacité ou Besoin de financement

Solde des créances et des dettes

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Dans un souci de simplification, la comptabilité nationale agricole est généralement ramenée aux différents postes suivants :

Production agricole Subventions sur les produits Production au prix de base Dont production de produits végétaux - Céréales - Oléagineux, protéagineux - Fruits, légumes, pommes de terre - Plantes industrielles - Vins - Produits végétaux divers Dont production de produits animaux - Bétail - Produits avicoles - Autres produits animaux Dont production de services - Total des consommations intermédiaires (hors TVA déductible) = Valeur ajoutée brute au prix de base

- Consommation de capital fixe = Valeur ajoutée nette au prix de base Subventions d’exploitations Impôts fonciers Impôts liés à la production = Résultat agricole net global Rémunérations des salariés Intérêts Charges locatives nettes = Revenu agricole d’entreprise global

C. Analyse des comptes de l’agriculture La compréhension des comptes et des opérations économiques est généralement associée à une analyse des relations prix-quantité (c'est-à-dire des effet valeur et effet volume) sur les différents marchés. Une présentation détaillée de la conjoncture économique annuelle peut nous permettre de faire un lien entre les outils de la comptabilité nationale agricole et l’état des marchés.

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1. L’année 2004

En France, comme dans l’Union Européenne à vingt cinq, la valeur de la production agricole a augmenté (+ 11,2% en volume). L’abondance des récoltes a toutefois été compensée par une pression des prix à la baisse. L’année 2004 a été également marquée par l’intégration de 10 nouveaux Etats membres, qui contribuent pour 9% à la production agricole européenne (il s’agit notamment de la Hongrie, de la Pologne et de la République Tchèque).

a. Effet prix – Effet volume (Hausse des volumes et baisse des prix) L’abondance des productions de céréales au niveau européen et mondial (due à la progression des surfaces ensemencées et à des hauts rendements) et la forte parité €/$ ont généré une pression concurrentielle qui a orienté les prix à la baisse. Le volume de blé tendre, dont le rendement est très élevé et la qualité bonne, s’est accru de 29,5% (par rapport à 2003) alors que le prix diminuait de 17%. La production de maïs a augmenté de 31.5% (après une baisse de 30% en 2003) alors que son prix a diminué de près de 28% (le maïs français est concurrencé par le maïs hongrois). De son côté, la production d’oléagineux a augmenté grâce à la croissance des rendements. Le prix a reculé de 11.8%, à l’instar du cours du soja sur le marché mondial. Les cours des protéagineux décroissent dans le sillage de ceux du blé et du tourteau de soja, auxquels ils peuvent se substituer en alimentation animale. De la même manière, la production de pommes de terre de conservation s’étant fortement accrue, les prix ont baissé de 25%. Les importantes récoltes de fruits ont entraîné une baisse des cours (phénomène amplifié par la baisse de la consommation de fruits). Dans cette atmosphère de baisse des prix, les productions des gros bovins et des veaux tirent leur épingle du jeu. La hausse générale des prix avoisinait les 1.9% tout en restant contrastée selon les produits. Les prix des gros bovins ont remonté pour la troisième année consécutive (4.3%) et dépassaient le prix atteint avant la crise bovine (2001). Les prix des porcs ont remonté (6.8%) tout restant encore bas (intervention européenne d’aides au stockage). Les prix des volailles se sont redressés (3.4%), après deux années de baisse, liée à la surproduction et la concurrence extérieure. En revanche, le prix des œufs a chuté (- 23,6%), après la flambée des prix de 2003. Le prix hors subvention du lait et des produits laitiers a baissé pour la troisième année consécutive (- 2.8%). Cependant le prix de base a augmenté légèrement (0,8%), compte tenu de la mise en place, en 2004, d’une aide directe sur le lait au niveau européen.

b. Résultats en baisse Le montant des subventions sur les produits s’est accru de près de 5% (soit 7.6 millions d’euros). La réforme de la PAC adoptée en juin 2003 s’est traduite par le versement de nouvelles subventions (principalement la prime au secteur laitier, soit 282 millions d’euros, qui compense en partie la baisse du prix du lait). Pour les productions végétales, les subventions, qui sont liées aux surfaces ensemencées, ont fortement augmenté (2.2%). Elles se sont accrues pour les céréales (les surfaces ont beaucoup augmenté) et les protéagineux (complément d’aide). Elles se sont par contre réduites pour les oléagineux, avec la diminution des surfaces.

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La valeur des consommations intermédiaires de l’agriculture a augmenté de 3.1% en raison du prix des achats. Le prix des aliments achetés pour les animaux s’est accru de 4.9% en raison de la forte hausse du prix des matières premières (céréales, soja…) au début de l‘année 2004. Le prix des produits énergétiques a progressé de 5.6% en dépit de la réduction de la taxe intérieure sur les produits domestiques (TIPP) sur le fioul domestique, accordée aux agriculteurs au 1er semestre 2004. Le prix des engrais a sensiblement augmenté (+ 3.9%) du fait de la hausse du prix du gaz (qui entre dans la fabrication des engrais azotés). Finalement, la valeur ajoutée nette (tenant compte de la consommation de capital fixe : amortissement des plantations, des matériels et des bâtiments) a augmenté de 3.9%. Les subventions d’exploitation et les impôts fonciers sont quant à eux revenus à des niveaux habituels, après des mesures exceptionnelles prises en 2003. Les subventions d’exploitation ont été ramenées à 1.6 milliards d’€ en 2004 contre 2.6 milliards en 2003. Les indemnités au titre des calamités agricoles 2003 relatives au gel et à la sécheresse, ont été en totalité enregistrées sur l’exercice 2003, conformément aux règles du système européen de comptabilité nationale, qu’elles aient été versées fin 2003 ou début 2004. Par ailleurs, la prime herbagère, instituée en 2003 est restée stable. Les contrats territoriaux d’exploitation (CTE) ont diminué dans l’attente d’une montée en charge des contrats d’agriculture durable (CAD). L’aide au gel des terres a diminué légèrement (le taux de gel ayant été exceptionnellement ramené e 10% à 5% sur 2004). Il en résulte une baisse du résultat agricole net de la branche (- 1.7%). Comme l’emploi agricole total a diminué d’autant, le résultat agricole net par actif est resté stable. En termes réels, il s’est cependant détérioré (- 1.6%). Sur les cinq dernières années, cet indicateur de revenu a diminué : - 1.2% en moyenne sur les années 2000-2004. Pour le revenu net d’entreprise agricole, qui prend en compte notamment la rémunération des salariés (+ 4.1%), la dégradation est plus marquée (- 4.7%). Le montant des intérêts nets versés par la branche agricole a diminué de 3.1%. L’encours des prêts s’est stabilisé avec un recours accru aux prêts non bonifiés d’investissement. Le taux moyen d’intérêt apparent a baissé pour se situer à 4.81% en 2004 après 5.05% en 2003 (il était encore de 7% en 1995). Le nombre d’actifs non salariés continue à diminuer à un rythme soutenu (- 2.6%) : le revenu net d’entreprise agricole par actif non salarié baisse néanmoins : - 2.2%, soit – 3.7% en termes réels. Sur les cinq dernières années, cet indicateur de revenu a baissé : - 2.5% par an en moyenne sur les années 2000-2004.

2. L’année 2002 L’année 2002 a été marquée par une forte hausse des récoltes de céréales et d’oléo-protéagineux, puis une chute des prix des céréales et du porc. La valeur de la production agricole au prix de base est restée quasiment stable (- 0.2%, soit une baisse de 210 millions d’euros). La diminution sensible des prix (- 3.6%) a été compensée par la hausse des volumes produits (+ 3,5%). Hors subventions sur les produits, la production agricole a décru de 0,9% en valeur par rapport à l’année 2001.

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a. Effet prix- effet volume (hausse des volumes, baisse des prix)

Au niveau des végétaux, des fruits, animaux…, on a enregistré des volumes en hausse et des prix en baisse. Le prix des céréales a diminué en raison d’une offre abondante et de la forte concurrence russe et ukrainienne. Les récoltes de blé tendre et de blé dur ont été en très nette augmentation sous l’effet conjugué de la progression des surfaces et des rendements. Pour l’orge, malgré une réduction des superficies, la production augmente grâce aux bons rendements. En revanche, pour le maïs, la récolte diminue en raison d’une baisse sensible de la surface ensemencée et le prix se stabilise. Les oléagineux ont enregistré une progression de leurs rendements et une diminution des cours. Celui du colza baisse après une forte hausse l’an dernier, la production a augmenté de 16% (malgré la réduction des superficies). Le prix du tournesol se stabilise alors que la récolte a continué à diminuer. La demande mondiale de soja étant supérieure à l’offre, les cours ont fortement augmenté (ceci est d’autant plus vraie que la production nationale a diminué). Les cours des protéagineux ont diminué suite à l’amélioration des rendements. La production de betteraves s’est accrue fortement (+ 28%) en raison de la progression des rendements. C’est la quantité de betteraves hors quota, vendue à un prix moins élevé, qui a augmenté, ce qui a fait baisser le prix de l’ensemble. Le prix des fruits a chuté après une forte hausse en 2001 tandis que les volumes de produits augmentent. Dans le cas des cerises et des pêches, l’offre supérieure à la demande a fait baisser les cours. Les cours des pommes de terre de conservation ont chuté avec une récolte en très forte augmentation (ceux des pommes de terre primeurs ont également chuté après avoir doublé en 2001). La baisse des prix des légumes est modérée, cependant elle n’est pas compensée par la hausse des volumes. La campagne a été très favorable aux producteurs de tomates et de choux-fleurs avec des prix en très nette hausse malgré la croissance des volumes.

Les cours des caprins-ovins se sont réajustés après avoir atteint des niveaux historiquement élevés en 2001 et la production diminue : elle avait été fortement stimulée par le report de la consommation de viande bovine. Les cours des porcins a chuté de 21% en raison d’une moindre demande. Le secteur de la volaille a été confronté à des problèmes de surproduction en raison du repli de la consommation intérieure et des exportations. Les prix ont diminué pour le poulet et la dinde. Ont échappé à cette tendance baissière des marchés, les vins et les bovins. Les prix des vins se sont accrus après trois années successives de baisse, surtout pour les vins de table et de pays (hormis le champagne, les volumes produits ont cependant diminué). Le cours des gros bovins a augmenté nettement en 2002 (+ 7,5%) par rapport à son faible niveau de 2001. Le volume de la production s’est stabilisé. Les abattages se sont redressés grâce à la reprise de la consommation de viande bovine. Les effectifs diminuent pour toutes les catégories de bovins. En effet, en 2001, le cheptel était très important, la crise bovine ayant freiné la commercialisation du bétail.

b. Recul de la valeur ajoutée

Le montant des subventions sur les produits a fortement augmenté (+ 6.3%). Dans le cadre de l’Agenda 2000, qui fixe les orientations de la PAC, la revalorisation des aides directes à l’agriculture permet de compenser la baisse prévue des prix d’intervention. Pour les productions végétales, les subventions se sont accrues de 0.6% (elles augmentent pour les céréales, mais chutent pour les oléagineux et protéagineux). Pour les productions animales, elles ont fortement progressé (+21,7%) : les primes existantes (gros bovins, vaches allaitantes

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et abattages) ont été revalorisées. La prime ovine a doublé, elle devient, comme les primes bovines, une prime par tête indépendante du niveau des prix. La valeur des consommations intermédiaires de la branche agriculture a diminué légèrement en 2002 (-0.4%), après deux années de hausse. Les achats d’aliments pour animaux (hors produits agricoles intra-consommation) ont régressé, le climat du printemps a été propice à la production de fourrages. La baisse est plus sensible pour les aliments composés, en particulier ceux destinés aux bovins et aux volailles dont les effectifs se sont réduits. La consommation de tourteaux de soja continue de progresser (on a enregistré une baisse des cours de tourteaux de soja).

La consommation de produits énergétiques a décru modérément en volume, leur prix s’est réduit sensiblement du fait de la forte baisse du cours du fuel domestique qui se renouvelle en 2002. Les achats d’engrais et de produits de protection des plantes se réduisent légèrement ; leurs prix se sont stabilisés.

La consommation de capital fixe, représentant l’amortissement économique du capital, a continué à progresser en 2002 : +2% en valeur par rapport à 2001. Cette progression a fait reculer la valeur ajoutée nette de la branche agricole (- 0.6%), malgré la diminution de la valeur des consommations intermédiaires.

c. Diminution du résultat agricole net Les subventions d’exploitation versées à la branche agriculture ont diminué de 1,5% et s’élèvent à 1.79 milliard d’€ en 2002. Après la crise bovine, les aides exceptionnelles perçues par les éleveurs bovins se sont fortement réduites (de 203 à 68 millions d’€) ainsi que les prises en charge d’intérêts qui leur ont été accordées. La prime à l’herbe a également été diminuée. En revanche, les contrats territoriaux d’exploitation (CTE) se sont fortement développés, les versements sont passés de 105 millions d’€ en 2001 à 260 millions d’€. L’indemnité compensatoire de handicap naturel (zones de montagne) a progressé de 32 millions d’€, les indemnités au titre des calamités agricoles telles que la sécheresse et inondations de 35 millions d’€. Après prise en compte des subventions d’exploitation et des impôts, le résultat agricole net serait en légère baisse : - 0.7% en 2002. Le volume de l’emploi agricole total étant estimé à – 1.8%, le résultat agricole par actif aurait progressé légèrement en 2002 : + 1.1%. Le prix du PIB augmentant de 2%, le résultat agricole net par actif en termes réels diminuerait d’environ 1% par rapport à 2001. Les salaires versés par les unités agricoles se sont accrus de 3%, les cotisations sociales des salariés à la charge de l’employeur de 4%, les charges locatives nettes de 1%. Le montant des intérêts nets versés par la branche agricole a progressé de 1%. L’encours des prêts a également progressé. La baisse tendance des taux d’intérêt a rendu les prêts non bonifiés très attractifs (ils représentaient 75% des encours totaux en 2002 contre 59% en 1995). Le taux moyen apparent a baissé : 5,32% en 2002 contre 5,47% en 2001.

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Au total, le revenu net d’entreprise agricole a baissé de 2,6% en 2002. La baisse du volume d’emploi non salarié étant estimée à – 2.7%, le revenu d’entreprise agricole par actif non salariés resterait stable, mais diminuerait d’environ 2% en termes réels.

3. L’année 2001 La baisse sensible des récoltes et la crise de confiance envers la viande bovine ont

marqué l’année agricole 2001. Malgré la baisse des volumes, la valeur de la production est en légère hausse en raison de l’augmentation globale des prix des produits. Mais les consommations intermédiaires renchérissent également et leurs volumes diminuent peu : elles pèsent donc sur la valeur ajoutée de la branche, qui devrait stagner cette année. Bien que les subventions d’exploitation progressent sensiblement, le résultat agricole net serait pratiquement stable par rapport à 2000. L’emploi agricole continue à décroître. De ce fait, d’après les estimations du compte prévisionnel de l’agriculture, le résultat agricole net par actif augmenterait en termes réels de 1 % en 2001. En 2001, la valeur de la production agricole au prix de base augmente de 1,6% (hausse d’un milliard d’€). Cette augmentation est le résultat d’une croissance sensible des prix (+ 4,5%) qui compense la baisse des volumes produits. Hors subventions, la production agricole s’accroît de 1,1% par rapport à 2000. Les subventions sur les produits ont progressé de 6%. Dans le cadre de l’agenda 2000, qui fixe les orientations de la PAC, la revalorisation des aides directes à l’agriculture permet de compenser la baisse prévue des prix d’intervention. Pour les productions végétales, les subventions croissent de 1,9% (elles augmentent pour les céréales et baissent pour les oléagineux). Pour les productions animales, la hausse est de 19% (gros bovins, vaches allaitantes et abattage). Hors subventions sur les produits, le prix de l’ensemble de la production agricole a augmenté de 3,6% en 2001 tandis que les volumes diminuaient (- 2,4%). La hausse des prix a été observée à la fois pour les productions végétales et animales (à part les gros bovins), alors que la baisse des volumes concernait essentiellement les productions végétales.

a. effet prix, effet volume (hausse des prix et baisse des volumes) Les prix des oléagineux et protéagineux se sont fortement accrus en raison de la

faiblesse des productions. La réforme des aides dans le cadre de l’agenda 2000 (réduction de l’ensemble des superficies en oléoprotéagineux) conjuguée à des rendements faibles (récolte de colza ont chuté de 18%, celle de tournesol et de protéagineux de10%) ont généré des hausses de cours importantes, plus de 22% par rapport à 2000 pour le colza, plus de 30% pour le tournesol (en effet, la production mondiale étant en baisse, le marché français n’est pas concurrencé par les graines d’importation, contrairement à l’année 2000).

Les prix des céréales ont augmenté en raison de la faiblesse des quantités

disponibles. Les cours du blé ont fortement remonté suite à une amélioration de la qualité. Les fortes pluies de printemps ont perturbé les semis, entraînant une diminution des surfaces et des rendements. Ceci est particulièrement vrai pour le blé dur et le blé tendre (- 15%). Pour le maïs et l’orge, la production est stable, l’augmentation des surfaces a compensé la baisse des rendements.

Le prix des fruits a fortement augmenté tandis que leur volume baissait. Les

mauvaises conditions climatiques ont entraîné d’importantes chutes de fruits et des récoltes

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plus tardives, ceci a limité l’offre de début de campagne, la plus sensible à la concurrence étrangère. Les abricots, cerises et pêches ont vu leurs prix s’envoler par rapport à 2000. La production de fraises a diminué en raison d’une baisse tendancielle des surfaces.

Les prix des légumes se sont légèrement accrus en raison de volumes stables. Le

cours des carottes a progressé suite à une baisse de l’offre (difficultés d’arrachage) et une demande soutenue. La modération a profité également aux prix des choux-fleurs et des salades. En revanche, le marché des tomates et des concombre a dû subir une forte concurrence étrangère. Comme les deux années précédentes, les prix des vins diminuent sensiblement (hormis le champagne). Notamment, le prix des vins de table et de pays (faible demande).

A part la baisse du prix des gros bovins, les prix des autres animaux sont en hausse. En 2000, le prix des gros bovins avait chuté à l’automne, sous l’effet de la crise de confiance liée à l’ESB. En 2001, il est resté encore à un bas niveau, très inférieur (- 15%) à la moyenne de l’année précédente. Le volume de la production a légèrement diminué. Des mesures d’allègement de marché ont été prises, les exportations et les abattages ont repris en fin d’année. Les prix des ovins et des porcins sont repartis à la hausse suite du report de la consommation de viande bovine. De plus, pour les ovins, l’offre a été réduite, le Royaume-Uni, principal fournisseur extérieur, a été touché par la fièvre aphteuse et a cessé d’approvisionner le marché français. Une demande intérieure très soutenue a favorisé le marché des volailles dont les volumes et les prix ont augmenté pour le poulet, la dinde et la pintade. La situation a été moins favorable pour les producteurs d’œufs. La production a diminué, la mise en place de poules pondeuses ayant diminué à la fin de l’année 2000. Les prix baissent après avoir été élevés en 2000 en raison de la demande italienne.

b. Recul de la valeur ajoutée La valeur des consommations intermédiaires de la branche agriculture ont augmenté de 2,3% en 2001 sous l’effet des prix (+ 3,8%). La hausse est forte pour les engrais (+ 15%), leur prix enregistre la hausse du gaz nécessaire à la fabrication des engrais azotés. Le prix des aliments pour animaux s’est accru avec le renchérissement des aliments composés pour allaitement et pour bovins, et celui du tourteau de soja. En revanche, après de fortes hausses en 2000, le prix des produits énergétiques décroît, celui du fuel domestique, très utilisé en agriculture, est en net recul. En volume, l’ensemble des consommations intermédiaires se réduit de 1,4%, de pair avec la production. C’est la première baisse depuis 1993. La consommation des engrais et des produits de protection des plantes diminue à cause des mauvaises conditions climatiques qui ont perturbé l’utilisation. Les aliments pour animaux continuent à progresser. La consommation de tourteaux de soja s’accroît sensiblement. La consommation de capital fixe (amortissement économique de la branche agriculture) continue à progresser en 2001 (+ 3,8%) en valeur par rapport en 2000. Cette progression s’ajoute à celle des consommations intermédiaires. Au total, la valeur ajoutée nette de la branche agriculture a légèrement diminué (- 0,2%).

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c. Progression du résultat agricole net Les subventions d’exploitation versées à la branche agriculture ont augmenté de 13,9% et se sont élevés à 1,67 milliard d’€ (11 milliards de F) en 2001. Les éleveurs bovins ont obtenu des aides exceptionnelles (150 millions d’€, soit 984 millions de F) pour pallier l’effondrement du marché. Dans le cadre des mesures agri-environnementales, les Contrats Territoriaux d’Exploitation se sont fortement développés et ont donné lieu à un versement de 73 millions d’€ (482 millions de F). L’indemnité compensatrice de handicap naturel (zones de montagne) a également progressé. Après la prise en compte des subventions d’exploitation et des impôts, le résultat net agricole net serait en légère augmentation (+ 0,5% en 2001). La baisse du volume de l’emploi agricole total étant estimé à 1,8%, le résultat agricole net par actif progresserait de 2,4% en 2001. Le PIB ayant augmenté de 1,6%, la progression en termes réels serait de l’ordre de 1%. Les salaires versés par les unités agricoles se sont accrues de 3,9% et les cotisations sociales des salariés à la charge de l’employeur de 1,4%. En revanche les charges locatives nettes ont baissé de 0,5% en 2001. Le montant des intérêts nets versés par la branche agricole reste stable : le taux moyen apparent baisse encore (5,47% en 2001 contre 5,62% en 2000). L’encours des prêts non bonifiés a progressé (la baisse tendancielle des taux d’intérêt les rendant plus attractifs. Ils représentent 73% des encours totaux contre 59% en 1995. Au total, le revenu net d’entreprise agricole aurait baissé de 0,3% en 2001. La baisse du volume d’emploi non salarié étant estimée à 2,7%, le revenu d’entreprise agricole par actif non salarié progresserait de 2,5% (soit près de 1% en termes réels).

4. L’année 2000 En 2000, la production agricole hors subventions s’est accrue de 1,6% en valeur par rapport à 1999 (en y incluant les subventions sur les produits, la production agricole dite « au prix de base » a augmenté de 1,8%). Dans le cadre de l’agenda 2000, qui fixe les orientations de la PAC jusqu’en 2006, une baisse des prix d’intervention a été décidée sur les grandes cultures et les viandes bovines. Pour compenser en partie cette baisse, des aides directes sur les produits ont été revalorisées, elles ont progressé de 3,3% sur l’année. En légère diminution sur les grandes cultures, elles ont fortement progressé pour les animaux.

a. effet prix – effet volume (une baisse des prix) Le prix de l’ensemble de la production agricole (hors subventions sur les produits) a augmenté de 2% en 2000 alors que les quantités ont diminué de 0,4%. - Les prix des oléagineux et protéagineux ont nettement augmenté, suite à la baisse de la production. A la baisse des rendements, liée aux mauvaises conditions climatiques, s‘est conjuguée la réduction des superficies (les aides dans le cadre de l’agenda 2000 ont été plus favorable aux céréales). Ainsi les récoltes de protéagineux ont chuté de 24%, celles de colza

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et de soja de 20%. Les prix du colza ont augmenté de 15%, tout comme ceux du soja pour lequel les producteurs français ont bénéficié de l’appréciation du dollar qui renchérit les importations américaines. La production de tournesol a moins fléchi que celle des autres protéagineux car les rendements déjà très élevés en 1999, ont progressé encore cette année (en revanche, le prix du tournesol a baissé car il subit la concurrence des pays d’Europe Orientale). Les oléagineux et protéagineux sont les produits qui ont enregistré la baisse la plus importante de la valeur de leur production. - Les prix des fruits et légumes ont également augmenté. Pour les fruits d’été, les cours très bas l’an dernier, ont remonté cette année : la campagne a été très bonne pour les abricots (les pêches et nectarines ont quant à elles enregistrées des cours inférieurs à la moyenne quinquennale). Pour les fruits d’automne, les poires et les raisins ont été bien valorisés, contrairement aux pommes dont la récolte fût importante et la demande insuffisante. Parmi les légumes, les asperges et les tomates ont retrouvé des cours élevés grâce à une offre modérée et à une faible concurrence étrangère. Les prix des choux-fleurs, des concombres et des carottes ont progressé (le marché a été moins favorable pour la salade et l’endive). Enfin le prix des pommes de terre de conservation s’est accru malgré la hausse des quantités récoltées. - Le prix des gros bovins a été stable en moyenne annuelle par rapport à 1999. Ceci contraste cependant avec la hausse en début d’année et la chute après la crise de confiance déclenchée par l’essor de l’Encéphalopathie Spongiforme Bovine (ESB). Au premier semestre, les abattages de gros bovins ont été soutenus par une bonne demande intérieure, puis l’activité des abattoirs a régressé surtout à partir du mois d’octobre. Le volume des livraisons est en baisse depuis trois années consécutives. Toutefois, comme le cheptel s’est accru, le volume de la production a progressé. - Le prix des autres animaux sont en hausse après avoir diminué en 1999, notamment ceux des porcins et des ovins – caprins, en raison d’une réduction de l’offre et d’une bonne demande (ils ont bénéficié du report de la consommation des ménages qui se sont détournés du bœuf). Le marché des volailles a redémarré après la crise de surproduction des années passées et la crise de la dioxine en 1999. Les producteurs ont réduit leur offre de produits standards, et relancé la production de volailles labellisées (qui se vendent plus chères). - Comme en 1999, les prix des vins ont diminué sensiblement, hormis pour le Champagne. La vendange exceptionnelle de 1999 a engendré des stocks importants. De plus, la concurrence étrangère (italienne et espagnole) fût forte sur les vins ordinaires. La récolte de l’an 2000 retrouve un volume moyen. - Les cours des céréales ont reculé après s’être redressés en 1999. Néanmoins, ils restent supérieurs au prix d’intervention qui a baissé de 7,5%, conformément aux dispositions de l’Agenda 2000. La hausse des quantités produites a été sensible pour le maïs, l’orge, modérée pour le blé tendre. Dans les deux cas, les superficies ont augmenté. Mais le rendement du maïs et de l’orge s’est amélioré alors que celui du blé a diminué et que sa qualité a été particulièrement hétérogène en raison de mauvaises conditions climatiques au moment des moissons.

b. Une hausse des coûts de production La valeur des consommations intermédiaires de la branche agriculture ont augmenté de 2,6% en 2000 sous l’effet des prix (+ 2,5%). La hausse des prix est imputable aux combustibles et

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carburants qui ont augmenté de 30% malgré les deux baisses de la TIPP sur le fuel domestique. Comme en 1999, la baisse du prix de l’électricité a atténué la hausse des produits énergétiques, qui a atteint + 22%. Après deux années de baisse, le prix des aliments pour animaux s’est redressé de 5,4% conséquence du renchérissement de certaines matières premières lié au cours du dollar. Le prix des semences est resté stable, et celui des engrais était en légère baisse malgré la remontée du prix des engrais azotés en fin de campagne (due à celle du gaz). En volume, l’ensemble des consommations intermédiaires est stable. Par ailleurs, la consommation de capital fixe (amortissement économique du capital de la branche) a continué de progresser en 2000 : 2% en valeur par rapport à 1999. Cette progression associée à celle des consommations intermédiaires atténue la croissance de la valeur de la production agricole. Au total, la valeur ajoutée nette a augmenté faiblement de 0,5%.

c. Une augmentation du résultat agricole par actif de 1% Les subventions d’exploitation versées à la branche agriculture se sont élevées à 9,5 milliards de F en 2000, soit 200 millions de moins qu’en 1999. L’aide au gel des terres a diminué de 500 millions de F avec la baisse du paiement de base (- 15%). Les montants versés aux éleveurs ont baissé de 250 millions de F en raison de la fin des mesures liées à la crise porcine et à l’abattage précoce des veaux. En revanche, les montants versés aux producteurs de fruits et légumes se sont accrus de 100 millions de F et les indemnités spéciales montagne de 150 millions de F. Enfin, les premiers contrats territoriaux d’exploitation (CTE) ont donné lieu à un versement de 150 millions de F. Compte tenu des faibles évolutions des subventions d’exploitation et des impôts, le résultat agricole global aurait augmenté de 0,3% en 2000. Comme le prix du PIB a augmenté de 0,8%, la résultat global en termes réels a diminué de 0,5%. On constate cependant une hausse du résultat agricole par actif en termes réels de 1% suite à une baisse du volume de l’emploi agricole total de - 1,8%. En ce qui concerne revenu d’entreprise agricole global, on constate une progression des salaires versés par les unités agricoles (+ 2,7%) et des cotisations sociales des salariés à la charge de l’employeur (+ 1,6%). En revanche les charges locatives nettes ont diminué (- 2%). Même si l’encours des prêts aux agriculteurs s’est accru de 3,6% en 2000, le montant des intérêts nets versés par la branche agricole s’est quant à lui réduit de 4,5%. Ceci est dû principalement à la baisse des taux moyens apparents (5,51% en 2000 contre 5,83% en 1999) et aux prises en charge d’intérêts par le Crédit Agricole / autres banques (397 millions en 2000 contre 155 millions en 1999). La progression du revenu d’entreprise agricole global aura donc été de 0,5% en 2000.

5. L’année 1999 En 1999, la production agricole hors subventions a diminué de 2,7% en valeur par rapport à 1998. La production agricole dite « au prix de base5 » a reculé de 2,5% en valeur, ce qui correspond à une baisse de 10 milliards de F. Les prix à la production de la plupart des produits agricoles ont baissé de 4,2% en moyenne (tandis que les quantités continuaient à

5 Dans le nouveau système, les subventions sur les produits sont incluses dans le prix de base, dont sont déduits la TVA et les autres impôts sur les produits. La production agricole est valorisée au prix de base.

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croître selon un rythme de 1,4%). Cette baisse se serait traduite par un recul de la valeur de la production et de la valeur ajoutée de la branche, malgré la légère réduction des consommations intermédiaires.

a. effet prix – effet volume (une baisse des prix) Les prix des oléagineux, des fruits et des pommes de terre ont nettement baissé. - Les cours du colza se sont fortement dégradés (- 25%), l’offre étant très abondante en France et dans de nombreux pays producteurs (notamment l’Europe Orientale, le Canada et l’Australie). La production de Colza a atteint un record en 1999. La baisse du prix du tournesol (plus modérée, - 12%) s’explique par la forte concurrence des graines importées d’Europe Orientale. - A l’exception des fraises et des melons, les cours des fruits d’été ont été plutôt bas. La production nationale a été forte, avec une importante proportion de petits calibres, vendus moins chers. Les débouchés à l’exportation se sont réduits en raison d’une récolte européenne abondante et d’une concurrence avec les pays voisins de l’Union européenne particulièrement vive (notamment sur le marché des pêches et raisins). - Le prix des pommes de terre de conservation a chuté de façon spectaculaire (les chiffres doivent cependant être relativisés car 1998, a été marquée par des prix très élevés). - Le marché de la volaille est resté confronté à une crise de surproduction. Les producteurs français ont dû diminuer leur offre (- 2,5% en volume) en raison d’un manque de débouchés (consommation intérieure stagnante et exportations freinées) et d’une concurrence intra-communautaire de plus en plus vive (augmentation continue de l’offre dans l’ensemble de la Communauté et hors de l’Union). Les exportations subventionnées ont été limitées par les accords internationaux. Cette contraction de l’offre n’a pas suffi à enrayer la dégradation des cours dont l’ampleur a été très marquée (-8%). On constate le même phénomène pour le marché de l’œuf (les cours ont chuté de 11%). - Les prix des animaux sont tous en retrait. Le prix de la production porcine a diminué de 8% en moyenne annuelle : la crise de surproduction porcine de 1998 s’est prolongée en 1999. Parallèlement, les importations de viandes bovines et ovines ont exercé une pression à la baisse sur le prix de la production nationale, dont le niveau était quelque supérieur à celui de nos voisins européens. - Seule exception notable parmi les produits agricoles, les céréales, dont les cours se sont redressés légèrement en 1999. Cette augmentation s’explique par de bonnes perspectives du marché intérieur (en particulier dans l’alimentation animale) ainsi que sur le marché extérieur (la bonne qualité du blé a facilité les exportations). La remontée des prix est restée cependant modérée car l’offre est demeurée abondante (malgré le recul des quantités récoltées tant en France que dans l’Union Européenne). En effet, les stocks de report de la fin de la campagne précédente sont importants, ils ont atteint leur niveau le plus élevé depuis l’application de la réforme de la politique agricole commune de 1992.

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b. Une chute de la valeur ajoutée Si la production agricole a baissé nettement en valeur, les consommations intermédiaires n’ont diminué que légèrement (- 0,8%). Une baisse du prix qui recouvre des évolutions très divergentes. La chute du coût de l’alimentation, amorcée au deuxième semestre 1998, s’est poursuivie au cours des 8 premiers mois de l’année 1999. Ensuite, les cours se sont raffermis, conséquence du renchérissement de certaines matières , notamment les céréales et les tourteaux de soja. Ainsi en 1999, le prix des aliments industriels pour animaux s’est réduit de 8% (après une baisse de 7% en 1998). A l’opposé, les fortes revalorisations des carburants à partir du deuxième trimestre se traduisent par une augmentation de plus de 10% en moyenne annuelle. La hausse du prix de l’ensemble des produits énergétiques (+8%) a cependant été atténuée par la baisse du prix de l’électricité. Entre ces deux extrêmes, les prix des autres consommations intermédiaires ont été stables (engrais et produits de protection des cultures) ou en légère augmentation de 1 à 2% (entretien du matériel…). Par ailleurs, la consommation de capital fixe, qui représente l’amortissement économique du capital de la branche, a continué à progresser au rythme de 3% (en valeur). Au total, la valeur ajoutée nette de la branche agricole s’est dégradée (- 6,3%). La baisse des consommations intermédiaires s’est révélée insuffisante pour contrebalancer le recul de la valeur de la production agricole conjuguée à une progression de la consommation de capital fixe.

c. Une baisse du résultat agricole par actif de 4% en termes réels Les subventions d’exploitation versées à la branche « Agriculture » se sont élevées à 1,4 milliards de F (soit près de 800 millions de plus que l’année précédente). L’aide au gel des terres a nettement augmenté (+ 950 millions de F). Cette forte progression est la conséquence directe du relèvement de 5% à 10% du taux de gel obligatoire. Ce relèvement qui fait suite aux récentes surproductions européennes, concerne les superficies de céréales, d’oléagineux et de protéagineux. En outre, les aides diverses versées aux producteurs de fruits et légumes se sont accrues de 200 millions : elles visent à compenser les difficultés financières provoquées par les baisses importantes des prix à la production au cours de l’été. En 1999, le résultat agricole global a diminué de 5,8%. Cette baisse a été légèrement moins sensible que celle de la valeur ajoutée nette, en raison de l’accroissement du montant des subventions d’exploitation. En termes réels, le revenu agricole global chute de – 6,4%. Compte tenu de la baisse du volume de l’emploi agricole total estimée (- 2,5%), le résultat agricole par actif diminuerait de 4%.

Les salaires versés par les unités agricoles ont progressé de 3% et les cotisations

sociales des salariés à la charge de l’employeur de 2,4%. Les charges locatives nettes ont augmenté de 4%. L’encours des prêts a continué à s’accroître en 1999 (+ 1,5%) : le recours au crédit à court terme et à l’équipement a augmenté tandis que les prêts destinés aux acquisitions foncières restent stables. La contraction des taux d’intérêt s’est poursuit et a concerné les prêts non bonifiés (le taux moyen est passé de 6,18% en 1998 à 5,82% en 1999). Dans le même temps les prises en charges d’intérêt par le Crédit Agricole sont passées de 29 millions de F en 1998 à 252 millions en 1999 (elles intègrent des prises en charge

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exceptionnelles en faveur des producteurs de fruits et légumes. Au total, le montant des intérêts versés par la branche agricole s’est réduit de 6% par rapport à 1998. Compte tenu de ces éléments, le revenu d’entreprise agricole global baisserait de 9,6%. En termes réels, le revenu d’entreprise global diminuerait de 10% par rapport à 1998. La baisse du volume de l’emploi non salariée étant estimée à 3,7%, le revenu d’entreprise agricole par actif non salarié diminuerait de 7% en termes réels. Pour en savoir plus ______________________________________________ Agreste (2004), « Enquête sur la structure des exploitations agricoles », Primeur, n° 147, juillet, 4 p.

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Présentation des comptes nationaux pour 1999/2004

Comptes prévisionnels en milliards d’€

1999 2000 2001 2002 2001/2002 2004 03/04 Production hors subventions Subventions sur les produits

56.07 6.08

57.71 6.64

58,46 6.83

57.94 7.26

- 0.9 + 6.3

57.5 7.6

+ 3.2 + 5.1

Production au prix de base Dont production de produits végétaux - Céréales - Fruits, légumes, pommes de terre - Plantes industrielles - Vins - Produits végétaux divers - Oléagineux, protéagineux Dont production de produits animaux - Bétail - Produits avicoles - Autres produits animaux Dont production de services

62.15

36.57 9.75 6.23 4.51 9.04 7.02

22.89 11.02 3.75 8.12

2.68

64.28

36.92 10.01 6.67 4.29 8.91 7.01

24.56 12

4.07 8.50

2.80

65.33

37.01 9.84 7.51 4.25 8.44 7.32

25.18 12.04 4.33 8.81

2.73

65.20

37.72 10.67 7.07 4.38 8.22 7.38

24.66 11.98 4.05 8.63

2.82

- 0.2

+ 0.9 + 8.4 - 5.9 + 3.0 - 2.7 + 0.8

- 2.1 - 0.5 - 6.6 - 2.1

+ 3.0

65.1

37.6 10.3 6.5 1.7 9.5 7.4 2.2

24.4 12.1 3.8 8.5

3.1

+ 3.4

+ 5.2 + 6.1 - 7.2 - 2.8

+ 22.7 + 1

- 1.4

+ 0.9 + 3.0 - 4.6 + 0.5

+1.8

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Total de cons° intermédiaires (Hors TVA déductible)

31.52

32.68

33.11

32.98

- 0.4

34

+ 3.1

Valeur ajoutée brute au prix de base 30.62 31.61 31.22 32.22 0.0 31.1 + 3.7 Valeur ajoutée nette au prix de base 23.67 23.79 24.10 23.95 - 0.6 22.2 + 3.9 Valeur ajoutée nette Subventions d’exploitation Impôts fonciers Impôts liés à la production Résultat agricole net global

23.67 1.48 0.85 0.38 23.91

23.79 1.45 0.86 0.38 24

24.10 1.81 0.89 0.37 24.66

23.95 1.79 0.92 0.35

24.47

- 0.6 - 1.5 + 3.0 - 5.0 - 0.7

22.2 1.6 1.0 0.5 22.3

- 38.7 + 16.5 + 29 - 2.3 - 1.7

Rémunérations des salariés Intérêts Charges locatives nettes Revenu net d’entreprise globale

5.06 1.86 2.05 14.94

5.20 1.78 2.01 15.01

5.45 1.80 2.09 15.31

5.62 1.82 2.12

14.92

+ 3.2 +1.0 + 1.0 - 2.6

6.1 1.8 1.9 12.5

+ 4.1 - 0.5 - 0.5 - 4.7

Plantes industrielles : Betteraves industrielles, oléagineux, protéagineux, tabac et autres plantes industrielles Produits végétaux divers : fleurs, plantes, plants de pépinières, plantes fourragères (luzerne) Bétail : gros bovins, veaux, porcins, équins, ovins et caprins Produits avicoles : volailles, oeufs Autres produits animaux : lait et produits laitiers, lapins, gibiers d’élevage, autres produits de l’élevage… Production de services : travaux agricoles pour le compte de tiers (labourage,…), agritourisme, etc. Consommations intermédiaires : combustibles, carburants, électricité, alimentation animale, semences, engrais

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UTA : Unités de travail annuel

Evolution du résultat et du revenu d’entreprise agricole en % 1999/

1998 2000/ 1999

2000/2001

2001/2002

2003 /2004

Résultat agricole global Résultat agricole global en termes réels Résultat agricole par actif en termes réels Revenu d’entreprise agricole global Revenu d’entreprise agricole global en termes réels Revenu d’entreprise agricole par actif non salarié en termes réels Evolution du prix du PIB Evolution du nombre d’UTA total Evolution du nombre d’UTA des actifs non salariés

- 5,8 - 6,4 - 4,0

- 9,6

- 10,1 - 6,7

+ 0,6 - 2,5 -3,7

+ 0,3 - 0,5 + 1,3

+ 0,5 - 0,3 + 2,5

+ 0,8 - 1,8 - 2,7

+ 0.5 - 1.1 + 0.8

- 0.3 - 1.8 + 0.9

+ 1.6 - 1.8 - 2.7

- 0.7 - 2.7 - 0.9

- 2.6 - 4.5 - 1.8

+ 2 - 1.8 - 2.7

- 1.7

0 - 1.6

- 4.7 - 2.2 - 3.7

+ 1.6 - 1.7 - 2.6

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Indicateurs économiques

1992 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2004 Subventions

d’exploitations (milliards d’€)

2.74 7.63 8.04 7.54 1.46 (7.66)

1.47 1.45 1.67

1.6

Variation des subventions

(en millions d’€)

+ 4 878 + 411 - 503 + 122 + 15.24 (+ 130)

- 30.50 + 35

Explications de ces hausses

Mise en place de la réforme de la PAC : compensation des baisses des prix

d’intervention des grandes cultures et des gros bovins, gel d’une

partie des terres

Compensations financières de la crise de la vache folle. Primes à la vache allaitante et aux bovins

mâles (1,6 milliard de F).

Indemnités spéciales de montagne (+650),

exonération de cotisations

sociales (+ 600).

Baisse des aides

exceptionnelles

Indemnités spéciales montagne et au titre

des calamités agricoles

Compensations financières

au gel des terres (5 à

10%)

Aides au gel des terres

diminuent. Fin des mesures liées à la

crise porcine.

Aides directes tenant compte de l’agenda 2000 (baisse des surfaces

d’oléagineux). Subventions

exceptionnelles pour les

éleveurs bovins (150 m €), CTE

(73 m d’E), indemnité

compensatrice de handicap

naturel

Taux d’intérêt 7% 6,33% 6,18% 5,82% 5,62% 5,47 4.81% Prises en charge

d’intérêt par les banques (en

millions €)

21.34 4.42 38.41 60.5

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Macroéconomie, dossier I, IHEDREA , Arnaud Diemer, MCF Clermont-Ferrand

34

Evolution du nombre

d’exploitations, puis d’UTA

- 4 %

- 4 % - 3,7% -3,7% - 2,5% - 1,8% - 1,8% - 2.6%

CRISE ECONOMIQUE

Début de la vache folle en

mars

Peste Porcine,

crise russe et

asiatique

Surcapacité de

l’offre porcine

Reprise de la crise de la vache folle, crise de la

dioxine

Prolongement de la crise

bovine et tremblant

e du mouton

Prolongement de la crise bovine et

tremblante du mouton

Conséquences

Bœuf/volaille Hausse de 2% du prix de la

volaille

Hausse du prix du porc

Chute du prix du

porc

Chute du prix de la volaille

Bœuf/porc et

volaille labellisée

Report sur le porc et l’ovin

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Macroéconomie agricole, Arnaud Diemer, IHEDREA, MCF Clermont-Ferrand

Classement des exploitations selon leur statut juridique

Nombres % % parmi les formes sociétaires

Exploitants individuels 570 632 83.81% GAEC Dont pères-fils assimilés Autres

42 963 13 868 29 095

39.34%

EARL 42 303 38.74% SCEA 13 857 12.69% Sociétés de fait 5 265 4.82% Sociétés commerciales 2 745 2.51% Autres 2 075 1.90% TOTAL formes sociétaires 110 203 16,19% TOTAL 680 835 100 % 100 %

Source : SCEES, 1997