impossible métaphysique

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  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

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  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

    2/7

    Mtaphysique

    117

    ractristique

    de

    l tre

    humain),

    la

    substance

    spirituelle ou l'me,

    le corps

    et l'me, la

    personne,

    la

    survie. Chacun des chapitres se

    termine

    par

    une

    brve

    bibliographie.

    Les

    thses

    mtaphysiques

    proposes

    s inspirent

    rgulirement

    du

    thomisme, mais elles sont

    peu

    dveloppes.

    On

    apprciera

    l'ouverture accueillante

    de

    l'A. aux apports

    de

    l histoire de

    la pense et

    surtout aux

    courants

    les

    plus

    divers de

    la

    pense contemporaine. On

    notera

    aussi

    le large ventail de

    l'enqute

    phnomnologique, qui

    s'tend au

    langage,

    la

    culture

    et

    au travail.

    Mais on ne voit pas pourquoi

    la

    description envahit parfois notablement

    la

    section

    mtaphysique, en

    particulier

    dans

    le

    chapitre // corpo e

    l'anima, o

    les

    sept

    premires

    pages (245-252) devraient passer

    la

    section

    phnomnologique. D'autre part, l'A. ne

    relve

    pas l'ambigut

    de la

    notion

    de

    corps

    lorsqu'on

    dit

    que

    la

    substance humaine

    est

    compose

    de corps

    et d'me: corps signifie

    ici

    matire premire

    et

    non

    pas ralit tendue.

    A

    propos

    du problme

    de

    la vie future, l'A.

    rappelle les

    principales

    solutions proposes

    au

    cours de

    l histoire. Il attribue

    Averros

    la

    doctrine de l intellect agent

    unique et

    impersonnel (p. 285). En ralit,

    c'est

    la

    position d'Avicenne

    et

    elle n'exclut nullement

    l'immortalit

    personnelle. Pour Averros,

    les deux

    intellects, l'agent et

    le rceptif,

    sont

    uniques pour

    toute

    l'espce humaine; il

    n y a

    donc

    qu'un

    sujet

    pensant

    et

    immortel. Je

    dnonce

    depuis plus de 40 ans cette confusion

    entre

    la

    position

    d'Averros

    et

    celle

    d'Avicenne:

    j'en

    ai

    relev

    une

    dizaine

    de cas

    dans les crits

    de

    Gilson et une srie chez plusieurs

    autres mdivistes

    rputs.

    Apparemment

    en

    vain, puisque

    la

    confusion

    reparat

    constamment.

    C'est comme si, propos de Kant, on confondait

    raison thorique

    et

    raison pratique.

    Fernand Van Steenberghen.

    Georges

    Kalinowski,

    L'impossible mtaphysique.

    En

    annexe

    :

    trois

    lettres

    indites d'Etienne Gilson (Bibliothque des Archives de

    Philosophie, 33).

    Un vol. 22 x

    14

    de

    251

    pp. Paris,

    Beauchesne,

    1981.

    Cible de

    maintes critiques,

    la

    mtaphysique

    a

    t

    rduite

    un

    phnomne

    minoritaire

    et presque

    honteux.

    Et cependant, la

    mtaphysique

    subsistera

    toujours. Kant lui-mme en convenait: elle est

    plus vieille que toutes les sciences,

    et

    elle subsisterait toujours,

    alors

    que celles-ci disparatraient toutes ensemble

    dans

    le

    gouffre

    de

    la

    barbarie (Prface de

    la

    seconde dition de

    la

    Critique de

    la

    raison

    pure). De fait,

    la

    rflexion mtaphysique se poursuit jusqu' nos

    jours.

    On est mme surpris par

    le

    nombre

    lev de

    publications mtaphysiques.

    Et

    l intrt pour la

    mtaphysique

    va

    mme croissant. Le moment

    n est-il pas venu, demande M. G. Kalinowski,

    de

    hisser la

    voile pour

    capter

    le

    vent?

    (Avant-propos).

  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

    3/7

    8

    Comptes

    rendus

    Telle est

    la question

    qu'aborde l'Auteur en

    affrontant

    les

    objections

    qui, aprs Hume, Kant, Marx, Schlick,

    Nietzsche

    ou Heidegger,

    tendent

    montrer

    l'impossibilit

    d'une

    mtaphysique-savoir.

    L'ouvrage

    se divise en deux parties:

    la

    premire, o l'Auteur s'attache renverser

    les prjugs; et la seconde, o il esquisse une mtaphysique dans un

    souci

    de rigueur

    mthodologique.

    La mtaphysique est

    le

    legs

    le

    plus prcieux des Anciens. Il ne

    faut

    donc

    pas s'tonner d'une constante

    rfrence

    au pass. A l'inverse de

    la

    science qui, cherchant expliquer les faits connus, se trouve toujours

    en face

    de nouveaux faits

    et

    de

    nouveaux problmes en remplaant

    sans

    trve les thories anciennes par des thories nouvelles,

    la philosophie

    affronte toujours les mmes problmes : C'est pourquoi, crit l'A.,

    tandis

    que

    les

    rponses des

    sicles

    passs

    aux

    questions

    scientifiques

    n intressent plus que l histoire

    de

    la

    science,

    celles des philosophes

    anciens

    sont

    toujours actuelles parce que, dans la

    mesure

    o

    elles

    sont

    vraies, elles constituent un acquis

    dfinitif (p.

    8). La tche

    du

    philosophe doit donc

    consister

    s efforcer d'assimiler l'apport du pass,

    sans

    que cela ne le dispense de

    l effort

    d'aller de

    l'avant.

    Tel

    est

    l esprit

    de cet

    essai.

    Le legs dont M. Georges

    Kalinowski se fait

    l hritier est

    celui de

    S.

    Thomas

    d'Aquin. Certes,

    ce

    dernier

    est

    thologien,

    il parle d'abord

    de

    Dieu. Mais il n'a pas t impossible

    de dgager de

    son uvre

    globale

    la philosophie

    qu'il a utilise

    sans en avoir

    fait

    personnellement

    la

    synthse pour mieux laborer sa thologie.

    Le

    point

    de

    vue

    de

    l'A. est strictement philosophique.

    Aussi ambitionne-t-il de

    poser, selon une mthode rigoureuse, les problmes philosophiques que

    S. Thomas a rencontrs, en tenant compte des leons reues des

    mtalogiciens (smioticiens)

    contemporains. Alors on

    pourra

    donner

    l'ensemble des

    propos

    philosophiques ainsi enchans

    le nom de

    systme,

    en

    prenant

    ce

    terme uniquement au sens tymologique

    (p.

    10). Ainsi

    entendu, le systme ne

    renfermera

    rien

    de

    subjectif, d'apriorique,

    d artificiel,

    d'exclusivement dductif,

    de

    ferm et

    de

    repli sur soi-mme.

    L'ensemble des

    noncs

    qui

    le

    constituent sera

    au

    contraire

    objectif,

    apostriorique,

    naturel, principalement rductif, ouvert

    sur

    le

    rel.

    La mtaphysique, ainsi envisage, se distingue

    de

    la mthodologie

    des sciences ou

    de

    la

    thorie

    du langage

    scientifique.

    L'A.

    la tient

    pour synonyme

    de

    philosophie en

    prcisant que la thorie de

    l tre

    en

    tant

    qu'tre n est,

    notre avis,

    que la

    dernire tape de

    la

    rflexion

    philosophique,

    son parachvement rendu ncessaire

    et

    possible lorsque

    l'explication des tres donns dans notre

    exprience,

    l'homme y

    compris

    bien

    entendu, est parvenue la dtermination

    de leur

    ultime raison

    d'tre (p.

    14).

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    Mtaphysique

    19

    Aprs avoir dcrit son projet, l'A. passe donc sa

    ralisation.

    Dans la

    premire partie de

    son ouvrage, il

    dresse

    une liste quasi

    exhaustive

    des

    arguments

    opposs

    toute

    mtaphysique

    prtendant

    tre un savoir. Il pourra, ainsi,

    montrer

    plus

    aisment

    que ces objections

    n atteignent pas

    la mtaphysique

    esquisse

    dans la deuxime

    partie.

    Hume, Kant, no-positivisme, marxisme

    et

    Heidegger sont passs

    en

    revue.

    L'A. prsente des analyses

    pertinentes

    et bien documentes,

    en

    particulier

    celles consacres

    au no-positivisme. Il montre les liens

    de

    filiation

    qui

    lient

    les doctrines

    entre

    elles. Toutes ont en

    commun

    un glissement

    de

    sens concernant la notion mme

    de

    mtaphysique.

    Ainsi, l'auteur

    de

    L'enqute sur

    l'entendement

    humain ne garde

    de

    la mtaphysique

    que le nom

    en

    le

    donnant

    l'analyse des limites

    de

    l'entendement humain.

    Tout

    ce qui

    dpasse la

    critique

    de

    l'entendement

    n est que fausse mtaphysique. Le scepticisme de Hume sort ici

    triomphant. Mais, entretemps, la

    mtaphysique a

    t

    ramene

    au type

    de

    savoir scientifique. Elle a

    perdu

    son sens

    de

    philosophie

    de

    l tre en

    tant

    qu'tre,

    ce qui est

    l'objet

    propre

    de

    la mtaphysique et non

    de

    la

    science. Hume

    parle du

    point de

    vue

    de

    la

    science, non de

    la

    philosophie.

    Sa critique

    de

    la

    mtaphysique est donc

    un

    coup d'pe

    dans l'eau.

    La critique de Hume

    ne

    prouve rien parce qu'elle dcoule d'une

    thorie

    simpliste

    de

    la

    connaissance.

    Elle

    impressionna

    nanmoins

    Kant

    qui

    finit

    par

    penser

    comme

    Hume

    que

    la

    mtaphysique-savoir

    tait

    impossible et

    lui

    substitua la mtaphysique-croyance. Mais, ici encore,

    s'opre un glissement

    de sens

    concernant la nature

    de

    la mtaphysique.

    Pour

    Kant, en effet, celle-ci doit tre une

    science.

    Or, cette science

    n'a

    pas encore

    t

    favorise

    du

    sort

    pour

    entrer

    dans

    le

    sr

    chemin de

    la

    science (...). La raison s y trouve continuellement

    dans

    l'embarras

    {Critique

    de

    la raison

    pure,

    Prface

    de

    la deuxime dition, p. 20).

    En

    outre, situation

    aggravante

    ses

    adeptes sont

    incapables de

    se

    mettre

    d'accord sur

    leurs

    assertions. La

    pluralit

    des mtaphysiques,

    pour Kant, rend la mtaphysique-savoir impossible. Cependant, crit

    l'A.,

    elle ne

    prouve

    rien.

    Kant

    glisse trop vite sur

    l'histoire

    de

    la

    philosophie, qu'il ne connat pas

    dans

    sa totalit. Il n'a pas

    la

    moindre

    ide

    d'une

    mtaphysique qui ne

    serait

    pas

    de

    type wolfien, c'est--dire

    rationaliste

    ou a

    priori De l il

    dcoule que toute doctrine

    mtaphysique

    qui se fonde

    sur

    l'exprience n est pas

    touche

    par

    la

    critique

    kantienne. Par ailleurs,

    il est

    digne de

    remarque

    que

    les

    checs passs

    n'excluent pas les russites futures

    de mme

    que

    la

    pluralit

    des rponses

    n'exclut

    pas la vrit

    de

    l'une d'elles (p. 33).

    Kant rejoint Hume

    en

    ceci que tous

    deux

    apprhendent

    la

    philosophie

    travers le

    prisme

    de

    la

    science.

    Cela aboutit

    la dissolution

  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

    5/7

    120

    Comptes rendus

    pure et simple

    de

    la philosophie. Il

    faut voir

    la cause

    de cette

    corruption de

    la

    philosophie

    dans

    ses liens avec les sciences particulires,

    disait

    . Gilson.

    C'est

    toujours

    son

    dtriment

    qu'elle

    emprunte

    leurs

    mthodes. Voil pourquoi, si l'on essaie d utiliser en mtaphysique le

    critre

    de

    la vrit

    scientifique,

    on risque

    seulement de prendre

    la

    mtaphysique pour une

    croyance rationnelle comme

    Kant,

    ou

    pour une

    opinion

    irrationnelle

    comme Hume (p. 34).

    Les critiques

    de

    la mtaphysique manant

    de

    Hume et

    de

    Kant ne

    sont en ralit, on l'a vu, que les

    critiques d'une

    mtaphysique

    de

    type

    rationaliste.

    Il n'en va pas

    autrement

    des no-positivistes auquel

    l'Auteur

    consacre

    un chapitre particulirement bien

    inform.

    Ceux-ci

    arrtent

    leur

    regard Hegel,

    Nietzsche

    ou Heidegger. Mais, encore

    une

    fois,

    leurs

    objections

    atteignent

    un

    type

    particulier

    de

    mtaphysique,

    non toute mtaphysique possible. Ils restent

    tributaires

    du prjug

    kantien

    selon

    lequel la

    mtaphysique, faute

    d'tre

    un savoir,

    ne peut

    tre qu'une

    croyance.

    Toutefois, ils se sparent de Kant par le

    rejet

    de

    toute croyance.

    Comme le no-positivisme, le marxisme

    est

    un vaste courant qui

    fait

    l'objet de

    l'analyse

    sagace de

    l'Auteur. La vogue marxiste,

    crit-il,

    dont la philosophie

    demeure secondaire,

    est due

    la

    simplicit, voire

    au simplisme, de sa thorie de

    la

    connaissance

    et

    de

    son

    ralisme.

    Le marxisme

    est

    une grande

    philosophie

    parce qu'il a entran l'adhsion

    d'un grand nombre

    d'hommes.

    La mthode dialectique sur

    laquelle

    s'appuie

    le marxisme,

    en

    l'empruntant

    Hegel,

    prtend

    infirmer

    le

    principe

    de non-contradiction.

    Hlas,

    cette prtention

    est fausse

    car

    ce n'est point

    la

    simultanit des contradictoires qui est admise (ici)

    mais uniquement l'union des contraires (p. 99). Les

    marxistes,

    comme

    les

    hgliens,

    confondent contrarit

    et

    contradiction.

    Ils

    croient

    avoir

    prouv l'invalidit du principe

    de contradiction parce

    qu'ils

    se

    sont

    placs

    dans

    une perspective

    telle

    qu'ils peuvent

    affirmer

    l'unit des

    contraires (p. 100). Leurs

    propos

    sur

    la

    contradiction ne laissent pas

    de

    surprendre.

    Le tort

    de

    Hegel et

    de ses

    continuateurs est d'appeler

    contradiction l'union des contraires dans une chose. Or la contradiction

    absolue serait le dchirement

    total,

    l'anantissement immdiat de l tre

    lui-mme.

    Cette

    ide

    d'un anantissement

    de

    l tre n est-elle pas au

    cur

    de

    la pense

    de Heidegger?

    Selon ce dernier, la fin

    de

    la philosophie

    occidentale

    a

    commenc

    pointer peu

    aprs

    son dbut. Il parle

    d'une

    fin initiale

    {Qu'est-ce

    que la

    mtaphysique?, p.

    95).

    Ainsi Platon

    fut

    l'achvement

    du

    commencement {o.c,

    p.

    186) partir duquel

    s'amora le dclin. Ce dclin n est-il pas li l'oubli

    de

    l'tre?

    L'oubli

    est essentiel

    l tre.

    L'tre s'oublie ds l'origine et

    cet

    oubli

  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

    6/7

    Mtaphysique

    121

    l'empche

    de se constituer.

    L'tre

    selon Heidegger,

    en effet, est

    l'

    Ouvert. Il s'ouvre, ds l'aube

    de

    la mtaphysique, comme (pum,

    kyo

    et

    ikt). Et,

    par

    cette

    ouverture,

    il

    chappe

    lui-mme

    pour

    se

    retrouver mconnaissable,

    dans les tants.

    L'tant, dans

    lequel l tre

    s'oublie, est

    donc

    la

    ngation

    de

    l tre.

    C'est

    pourquoi

    la

    mtaphysique

    s'interrogeant

    sur

    l'tant est un nihilisme. L'tant n est

    tant

    que grce

    l'oubli

    de l tre.

    Sans l'tre (...) tout

    tant

    resterait dans la privation

    d'tre

    {Qu'est-ce que la mtaphysique?, p. 77).

    Heidegger

    prcise:

    mais aussi bien mme cette dernire n est pas, comme abandon de

    l tre,

    un nant

    nul,

    s'il

    est

    vrai qu'il appartient

    la

    vrit de

    l'tre

    que

    jamais

    l'tre ne se dploie

    sans

    l'tant, que

    jamais

    un tant

    n est sans

    l'tre. L'abandon

    de

    l'tre,

    c'est l effet

    de

    l'tre qui

    s'oublie dans

    l'tant.

    C'est pourquoi

    l'tant

    n est

    jamais

    nul

    :

    c'est

    l'tre barr,

    c est--dire,

    l'tre

    qui

    s'est

    effac

    en

    s'affaissant

    dans

    l tant, en s'y

    oubliant. Voil

    pourquoi l'tre

    est ce

    qui a toujours

    besoin d'tre remmor Tel est

    le destin de

    l tre, son histoire.

    Si

    la question

    de

    l'tre est

    lie

    au problme

    de

    la

    dignit de

    l'homme

    et du

    salut de l'humanit,

    c'est

    parce que les tants (les

    hommes),

    pour aider l'tre

    se remmorer, devraient eux-mmes

    tomber

    dans

    l'oubli

    et

    retourner ainsi leur vritable fondement.

    La mtaphysique appartient donc la nature

    de

    l'homme. En la

    dpassant,

    c'est

    l'homme que

    l'on dpassera

    : La pense pourrait bien

    entraner

    un

    changement

    de

    l'essence

    de

    l'homme

    {Qu'est-ce que la

    mtaphysique ,

    p. 26).

    Cette mystique de l tre,

    crit M. G. Kalinowski,

    est sous-tendue par une

    inexactitude

    historique

    et

    par une outrance

    philosophique. Heidegger,

    demande-t-il,

    aurait-il lanc

    ses

    griefs

    contre

    toutes

    les mtaphysiques

    s'il avait

    frquent saint

    Thomas

    autant que

    Kant

    et Nietzsche?

    Depuis

    saint

    Thomas

    d'Aquin, en effet, le

    premier

    notre connaissance,

    avoir distingu entre

    Yesse

    et Y

    essentia,

    en

    affirmant

    une diffrence relle entre

    l'un et

    l'autre

    dans

    tous les tants

    contingents (p.

    121),

    on

    peut

    constater chez toute

    une

    ligne de

    philosophes que Yesse n est point identifi l'ide. Or tout semble,

    dans la pense

    de

    Heidegger, reposer sur

    un glissement

    inaperu

    de

    lui,

    de

    l tre

    au

    sens

    de

    esse

    l tre

    au

    sens

    de

    ce

    qui

    est

    {ens,

    tant)

    (p. 117).

    L'tre,

    pour

    le

    philosophe

    de

    Fribourg,

    a

    en

    effet

    une

    essence.

    Elle

    consiste

    dans la

    prsence ou adestance, consistance,

    subsistence,

    continuit,

    ad-venir. Autrement

    dit,

    par un

    renversement

    impens chez

    l'Auteur,

    l tant devient l'essence de l tre.

    Heidegger

    ne

    distingue

    pas entre le est constatant

    le

    fait d'tre

    (est

    existentiel)

    et

    le est attribuant un prdicat un

    sujet (est

    prdicatif) (p. 124). Cela nous montre que s'il

    est

    extrmement

    pertinent

    de

    distinguer l tre {esse) et l tant

    {ens),

    encore faut-il

    saisir

  • 7/25/2019 impossible mtaphysique

    7/7

    122 Comptes

    rendus

    en quoi cette

    distinction

    consiste. La distinction thomiste s'appuie sur sa

    philosophie de l tre conu comme

    acte pur,

    perfection des perfections,

    qui

    rien ne

    manque

    parce

    qu'il

    est

    la

    plnitude

    de

    ce

    qui

    est,

    et

    qui transcende par consquent les tants dont l'existence ne lui ajoute ni

    ne

    lui

    enlve

    rien.

    Le

    Sein

    heideggerien diffre donc totalement

    de

    Yesse thomiste.

    Il

    s'oublie dans

    les tants.

    Peut-tre faut-il

    voir

    ici la

    raison

    pour laquelle

    Heidegger se tait au fond

    sur l'tre

    (p. 128)

    comme

    le

    constatait juste titre . Gilson.

    Au terme

    de ces

    critiques

    de

    la mtaphysique, on peut donc

    constater qu'elles

    ne rendent pas dsespre a

    priori

    la tentative

    d exposer, avec une rigueur analogue

    la

    rigueur scientifique, une

    mtaphysique-savoir. C'est

    dans

    cette tche

    que

    l'A. s'engage

    dans la

    deuxime

    partie

    de

    son

    ouvrage.

    Saint Thomas,

    a-t-on

    dit,

    n'a

    pas

    crit

    de

    source

    philosophique.

    L'A. ambitionne

    de

    nous prsenter l uvre

    philosophique

    du docteur

    anglique selon un

    ordre

    rigoureux. Cette

    entreprise

    ne

    consiste

    pas,

    nous

    avertit-il,

    faire

    du no

    thomisme.

    On

    a affaire un no... isme

    philosophique,

    crit-il,

    non

    pas

    l

    o une

    vrit se trouve reconnue

    et reprise,

    mais o

    l'on

    tente une synthse

    factice

    de

    nova et vetera

    dformant ces derniers

    en

    cherchant

    les

    moderniser

    l'encontre de leur

    esprit

    au lieu d'aller de l'avant

    partir

    de

    la

    vrit

    qu'ils contiennent

    (p. 140). Nous

    nous

    trouvons donc

    devant une uvre fidle l esprit authentique

    de

    la mtaphysique

    thomiste, soucieuse

    de

    suivre le mouvement naturel

    de

    la

    pense qui

    rencontre le

    rel pour s interroger

    non

    pas scientifiquement

    mais

    philosophiquement

    son

    sujet.

    L'A.

    concentre

    son

    attention

    sur l tre

    en s'inspirant

    du

    gnie d'Etienne Gilson. Puis, en s'interrogeant

    sur

    l'existence

    de

    tous les tres donns dans notre

    exprience,

    il affirme

    l'existence de

    Dieu et voit ce que l'homme peut en

    savoir

    et en

    dire.

    Ce

    travail nous prsente donc

    une esquisse de

    la

    mtaphysique

    permettant de dire

    ce

    qu'elle

    est et

    comment elle se construit.

    On

    se

    trouve devant une thorie

    de

    la

    mtaphysique traant les grandes lignes

    d'une

    mta-mtaphysique. La mtaphysique peut, ds

    lors, offrir

    l'aspect d'un ensemble

    de

    questions et

    de

    rponses concernant

    le

    rel.

    En

    conclusion, on pourra

    dgager

    la spcificit

    de l'ordre philosophique

    dont le

    questionnement diffre

    des questions scientifiques. La

    voie

    alors

    sera ouverte une recherche proprement mtaphysique

    de

    l explication

    ultime

    du rel

    donn

    dans

    l'exprience.

    L'A. ralise

    pleinement son projet selon

    nous. Ce faisant, il

    montre

    la

    perenne

    actualit

    de

    la

    mtaphysique thomiste,

    la

    vigueur

    et la

    rigueur d'une pense susceptible de renouveler l'interrogation

    philosophique et

    d enrichir de sa profondeur

    inpuisable la

    recherche

    contemporaine.

    Herv

    Pasqua.