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le malade imaginaire de molière dossier littéraire Dossier littéraire au temps de molière page 94 l’auteur page 95 La pièce page 97 les temps forts de l’œuvre page 98 molière aujourd’hui page 110 citations page 112 JBQN0339-p093-112 dossier litt-2.indd 93 13/03/12 11:43

Je Bouquine

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Dossier littéraire sur le Malade Imaginaire, de Molière.

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le maladeimaginairede molière

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littéraire

au temps de molière page 94

• l’auteur page 95

• La pièce page 97

• les temps forts

de l’œuvre page 98

• molière

aujourd’hui page 110

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l’auteur

au temps de MOLIÈRE... (1622-1673)

1680

1672

1666

1643 1715

La Comédie-FrançaiseAprès la mort de Molière, le roi rassemble sa troupe et deux autres troupes parisiennes pour former la Comédie-Française, qui existe toujours.

La monarchie absolue Louis XIV en a assez d’attendre. Depuis qu’il a été couronné, à l’âge de 4 ans, c’est le cardinal Mazarin qui décide de tout. À la mort du cardinal, Louis XIV tape du poing sur la table. Il a 23 ans. Désormais, c’est lui qui décide.

Le roi aime les arts, surtout s’ils sont à sa gloire. Durant son règne

(de 1643 à 1715), les artistes français sont très inspirés et renommés dans l’Europe entière.

La troupe du RoiLes comédies de Molière plaisent au roi, qui décide de prendre le comédien sous sa protection en lui donnant une grosse somme d’argent chaque année. Une chance qui fait beaucoup de jaloux…

VersaillesOn donne déjà des fêtes somptueuses à Versailles, où Louis XIV fait construire un immense château.

Molière y crée de nombreux spectacles. Plus tard, en 1684, le roi s’y installera avec sa cour.

10 mars 1661

Molière est le plus célèbre auteur français de comédies. Plus de trois siècles après sa mort, ses pièces sont toujours jouées en France et dans le monde entier.

Jeune homme de bonne famille, Jean-Baptiste

Poquelin est né à Paris en 1622. Son père était tapissier du Roi. Sa mère meurt lorsqu’il a dix ans. Le jeune Jean-Baptiste fait d’abord des études de droit. Mais au métier d’avocat, il préfère celui de comédien.

SUR LES ROUTES DE FRANCE

La monarchie absolue Louis XIV en a assez d’attendre. Depuis qu’il a été couronné, à l’âge de 4 ans, c’est le cardinal Mazarin qui décide de tout. À la mort du cardinal, Louis XIV tape du poing sur la table. Il a 23 ans. Désormais, c’est lui qui décide.

10 mars 1661

UNe vie pour le théâtre

Jean-Baptiste fait la connaissance d’une famille de comédiens, les Béjart. Avec eux, il monte une troupe, L’Illustre théâtre, et prend le nom de scène de Molière. Mais à Paris, la concurrence est trop rude. Ils décident

DOSSIER RÉALISÉ PAR ANNE BIDEAULT

1666

La troupe du RoiLes comédies de Molière plaisent au roi, qui décide de prendre le comédien sous sa protection en lui donnant une grosse somme d’argent chaque année. Une chance qui fait beaucoup de jaloux…

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• les Personnages principaux •

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l’auteur

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la pièce

Lorsque Molière commence à écrire des pièces, la comédie italienne, ou commedia dell’arte, est à la mode et les auteurs français s’en inspirent. Souvent, ce sont des pièces bouffonnes, parfois obscènes et grossières. Molière les connaît bien, mais ses intrigues sont plus complexes : il y a des sentiments, des personnages originaux. Il réinvente totalement la comédie à la française.

Tartuffe (1664) Pour se moquer des hypocrites…Tartuffe est un faux dévot, qui fait semblant d’être très croyant…

L’Avare (1668) Pour se moquer des riches égoïstes… Harpagon n’a qu’une crainte : qu’on lui prenne sa cassette contenant dix mille écus d’or.

Les Fourberies de Scapin (1671) Pour se moquer des valets malins et des maîtres naïfs… L’expression « Quelle galère ! » nous vient d’une réplique célèbre de cette pièce : « Que diable allait-il faire dans cette galère ? »

Le Bourgeois Gentilhomme (1671) Pour se moquer des nouveaux riches… M. Jourdain s’est enrichi et veut ressembler à un noble.

La commedia dell’arte

Des pièces célèbres

Angélique est une jeune fi lle, belle et innocente, très attachée à

son père, Argan. Lors d’une sortie au théâtre, elle est tombée amoureuse de Cléante, qui veut l’épouser.

Mais son père préférerait qu’elle se marie à un médecin...

ce serait pratique pour lui !

Rien que leurs noms en disent long sur ce que Molière

pense des médecins : Purgon et Diafoirus. Et le public n’a aucun mal à comprendre le latin

qu’ils parlent : bene bene seignare,

ensuita purgare...

Comme souvent dans les pièces de Molière, la servante,

Toinette, est effrontée : elle répond à Argan, son maître, et se moque de lui. Comme elle a bon cœur, elle essaie

de lui montrer qu’il se fait rouler dans la farine par les

médecins qui l’entourent.

Argan est un hypocondriaque, c’est-à-dire qu’il s’inquiète

tellement de sa santé qu’il fi nit par être certain d’être malade. Les médecins l’impressionnent beaucoup,

d’autant plus qu’ils parlent une langue qu’il ne comprend

pas : le latin.

A rgan est persuadé d’être gravement malade. À son chevet se pressent deux médecins et un pharmacien. Ils lui prescrivent tout un tas de remèdes et

lui réclament beaucoup d’argent, se gardant bien de lui dire qu’il est en parfaite santé.

Le Malade imaginaire

de tenter leur chance en province. Ils mènent la dure vie de comédiens ambulants de 1645 à 1658.

L’HOMME À TOUT FAIRE

Molière se révèle extrêmement doué. Il sait improviser, déclenche des fous rires dans le public, passe d’un rôle à l’autre sans efforts et se met à écrire. Il s’inspire des comédies italiennes à la mode à l’époque. En une petite semaine, il est capable de rédiger une farce entière.

GLOIRE… ET JALOUSIESDe retour à Paris, Molière est précédé par sa réputation d’acteur comique. Monsieur, le frère du Roi, prend la troupe sous sa protection. Mais plus le public applaudit, plus les critiques se multiplient. Il faut dire que

Argan

Les médecins et le pharmacien

Molière tourne en ridicule la société de son temps. L’École des femmes (qui critique les hommes qui veulent maintenir les femmes dans l’ignorance) et Tartuffe (qui critique les croyants hypocrites) ne plaisent pas à tout le monde…

LA PROTECTION DU ROILouis XIV apprécie le talent de Molière à qui il a déjà commandé plusieurs pièces. Avec le compositeur Jean-Baptiste Lully, Molière crée aussi des comédies-ballets chantées et dansées à la cour.

UNE PIÈCE FATALE

Molière a consacré plusieurs pièces aux médecins, qu’il tient pour des charlatans. Lors des représentations du Malade imaginaire, en 1673, il joue le rôle principal. Il est pris de telles quintes de toux que le public s’extasie devant son talent. En fait, il est malade et meurt quelques heures après la quatrième représentation.

Toinette

angélique

• La médecine au XVIIe siècle •

Malade depuis 1665, Molière a gagné

une solide rancœur contre les médecins. À l’époque, pour soigner les gens, ils n’utilisaient que les potions (peu effi caces), les saignées et les purges.

Ils ignoraient que le sang était vital et croyaient au contraire qu’il servait à transporter les « humeurs » responsables de la maladie. Il fallait donc saigner le patient. Autre prescription désagréable

(mais moins dangereuse) : la purge. On injectait un liquide dans l’anus pour nettoyer le corps de l’intérieur. On estime qu’en ce temps-là, la médecine faisait plus de morts qu’elle ne guérissait !

Comme souvent dans les pièces

médecins qui l’entourent.

Angélique est une jeune fi lle, belle et innocente, très attachée à

Argan est un hypocondriaque, c’est-à-dire qu’il s’inquiète

tellement de sa santé qu’il

Les médecins et le pharmacien

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les temps forts de la pièce les temps forts de la pièce

Potions, remèdes, médecins, lavements, saignées, humeurs, canne et oreillers…

Pour Argan, tout n’est plus que maladie. L’homme a de la fortune,

et peut-être est-ce pour cela que les médecins s’empressent autour de lui...

10 extraits illustrés parcatherine meurisse

Potions, remèdes, médecins, lavements, saignées,

catherine meurisse

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les temps forts de la pièce les temps forts de la pièce

* Charogne

Toinette ne prend pas très au sérieux la maladie de son maître et regarde de travers Fleurant et Purgon, les deux médecins qui se pressent sans relâche auprès d’Argan.

ToineTTe : Ce Monsieur Fleurant-là et ce Monsieur Purgon s’égayent bien sur votre corps : ils ont en vous une bonne vache à lait ; et je voudrais bien leur demander quel

mal vous avez, pour vous faire tant de remèdes.argan : Taisez-vous, ignorante, ce n’est pas à vous à contrôler les ordonnances de la médecine. Qu’on me fasse venir ma fille Angélique, j’ai à lui dire quelque chose.

eXTraiT de l'acTe i, scène 2

Ah oui ! dans la maison d’Argan, il y a aussi Angélique, sa jeune et jolie fille…

Toinette, la servante d’Argan, met du temps pour entendre la clochette qui l’appelle auprès de son maître.

argan : […] Il n’y a personne : j’ai beau dire, on me laisse toujours seul ; il n’y a pas moyen de les arrêter ici. (Il sonne une son-nette pour faire venir ses gens.) Ils n’entendent point, et ma sonnette ne fait pas assez de bruit. Drelin, drelin, drelin : point d’affaire. Dre-lin, drelin, drelin : ils sont sourds. Toinette ! Drelin, drelin, drelin : tout comme si je ne sonnais point. Chienne, coquine ! Drelin, drelin,

drelin : j’enrage. (Il ne sonne plus mais il crie.) Drelin, drelin, drelin : carogne *, à tous les diables ! Est-il possible qu’on laisse comme cela un pauvre malade tout seul ? Drelin, drelin, drelin : voilà qui est pitoyable ! Drelin, drelin, drelin : ah, mon Dieu ! ils me laisseront ici mourir. Drelin, drelin, drelin.

eXTraiT de l'acTe i, scène 1

Argan, tout occupé à faire ses comptes (cette maladie lui coûte horriblement cher…), a tout de même une belle et forte voix pour un mourant…

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les temps forts de la pièce les temps forts de la pièce

Quand Angélique rêve de Cléante si cher à son cœur, Argan, lui, rêve de donner sa fille au neveu de son mé-decin, un certain Thomas diafoirus, que nul n’a encore jamais vu. Ce pro-jet saugrenu met Toinette en colère.

argan : Où est-ce donc que nous sommes ? et quelle audace est-ce là à une coquine de servante de par-ler de la sorte devant son maître ?ToineTTe : Quand un maître ne songe pas à ce qu’il fait, une servante bien sensée est en droit de le redresser.argan court après Toinette : Ah ! insolente, il faut que je t’assomme.ToineTTe se sauve de lui : Il est de mon devoir de m’opposer aux choses qui vous peuvent déshonorer.

argan en colère, court après elle au-tour de sa chaise, son bâton à la main : Viens, viens, que je t’apprenne à parler.ToineTTe, courant, et se sauvant du côté de la chaise où n’est pas Argan : Je m’intéresse, comme je dois, à ne point vous laisser faire de folie.argan : Chienne ! ToineTTe : Non, je ne consentirai jamais à ce mariage.argan : Pendarde ! ToineTTe : Je ne veux point qu’elle épouse votre Thomas Diafoirus.argan : Carogne !

eXTraiT de l'acTe 1, scène 5

On ne sait plus qui commande dans la maison : le maître ou sa servante ?

Et quand il y a une jolie fille, il ne faut pas attendre bien longtemps pour que l’on parle d’amour et de mariage.

argan se met dans sa chaise : Ô çà, ma fille, je vais dire une nouvelle, où peut-être ne vous attendez-vous pas. On vous demande en mariage. Qu’est-ce que cela ? vous riez. Cela est plaisant, oui, ce mot de mariage ; il n’y a rien de plus drôle pour les jeunes filles : ah ! nature, nature ! À ce que je puis voir, ma fille, je n’ai que faire de vous demander si vous voulez bien vous marier.angéliQUe : Je dois faire, mon père, tout ce qu’il vous plaira de m’ordonner.argan : Je suis bien aise d’avoir une fille si obéissante. La chose est

donc conclue, et je vous ai promise.angéliQUe : C’est à moi, mon père, de suivre aveuglément toutes vos volontés.argan : Ma femme, votre belle-mère, avait envie que je vous fisse religieuse, et votre petite sœur Louison aussi, et de tout temps, elle a été aheurtée* à cela.ToineTTe, tout bas : La bonne bête à ses raisons.argan : Elle ne voulait point consentir à ce mariage, mais je l’ai emporté, et ma parole est donnée.angéliQUe : Ah ! mon père, que je vous suis obligée de toutes vos bontés...

eXTraiT de l'acTe i, scène 5

Serait-il possible que l’affaire soit aussi simple ? Certes non !

* S’est attachéeavec obstination.

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Béline est mal intentionnée, Argan perd le sens commun et Thomas diafoirus, s’avère un indécrottable benêt… Heureusement, Béralde, le frère d’Argan, vient à la rescousse de Toinette qui à fort à faire pour sau-ver l’amour entre Angélique et Cléante.

béralde : […] Sur quelle pensée, mon frère, la voulez-vous donner en mariage au fils d’un médecin ?argan : Sur la pensée, mon frère, de me donner un gendre tel qu’il me faut.béralde : Ce n’est point là, mon frère, le fait de votre fille, et il se

présente un parti plus sortable pour elle.argan : Oui, mais celui-ci, mon frère, est plus sortable pour moi.béralde : Mais le mari qu’elle doit prendre doit-il être, mon frère, ou pour elle, ou pour vous ?argan : Il doit être, mon frère, et pour elle, et pour moi, et je veux mettre dans ma famille les gens dont j’ai besoin.

eXTraiT de l'acTe iii, scène 3

Faire changer d’avis à Argan ne va pas être facile. Heureusement, Toinette a plus d’un tour dans son tablier.

Mais tous les acteurs de la querelle ne sont pas encore en place. Il est temps de faire connaissance avec Béline, la jeune épouse d’Argan et la belle-mère d’Angélique.

béline : Là, là, mon petit ami, apaisez-vous un peu.argan : Mamie, vous êtes toute ma consolation.béline : Pauvre petit fils.argan : Pour tâcher de recon-naître l’amour que vous me portez, je veux, mon cœur, comme je vous ai dit, faire mon testament.

béline : Ah ! mon ami, ne parlons point de cela, je vous prie : je ne saurais souffrir cette pensée ; et le seul mot de testament me fait tressaillir de douleur.argan : Je vous avais dit de parler pour cela à votre notaire.béline : Le voilà là-dedans, que j’ai amené avec moi.

eXTraiT de l'acTe i, scène 6

Curieux, non, ce notaire tout prêt à rédiger le testament alors que, soi- disant, Béline a trop de chagrin rien que d’y penser ?

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Le danger des médecins avides et prétentieux éloigné, il reste encore à éclairer Argan sur la cupidité de sa femme, si impatiente d’envoyer Angé-lique au couvent. Mais Toinette doit faire preuve de ruse. Elle propose à Argan de faire semblant d’être mort...

béline : Mon mari est mort ?ToineTTe : Hélas ! oui. Le pauvre défunt est trépassé. béline : Assurément ?ToineTTe : Assurément. Personne ne sait encore cet accident-là, et je me suis trouvée ici toute seule.

Il vient de passer entre mes bras. Tenez, le voilà tout de son long dans cette chaise.béline : Le Ciel en soit loué ! Me voilà délivrée d’un grand fardeau. Que tu es sotte, Toinette, de t’af-fliger de cette mort !ToineTTe : Je pensais, Madame, qu’il fallût pleurer.

eXTraiT de l'acTe iii, scène 12

Argan ouvre enfin les yeux sur l’amour que feignait de lui porter Béline. La menace du couvent s’éloigne pour Angélique.

Puisqu’Argan ne jure que par ces diafoirus, Toinette décide de se faire passer pour un grand médecin afin de mettre un peu d’ordre dans la cervelle de son maître. Proprement déguisée en sombre docteur, elle dit pis que pendre des médecins d’Argan et pose un surprenant diagnostic.

ToineTTe : Ce sont tous des igno-rants : c’est du poumon que vous êtes malade.argan : Du poumon ?ToineTTe : Oui. Que sentez-vous ?argan : Je sens de temps en temps des douleurs de tête.ToineTTe : Justement, le poumon.argan : Il me semble parfois que j’ai un voile devant les yeux.

ToineTTe : Le poumon.argan : J’ai quelquefois des maux de cœur.ToineTTe : Le poumon.argan : Je sens parfois des lassi-tudes par tous les membres.ToineTTe : Le poumon.argan : Et quelque fois il me prend des douleurs dans le ventre, comme si c’était des coliques.ToineTTe : Le poumon.[…]

eXTraiT de l'acTe iii, scène 10

Et Toinette conclut sa consultation par la proposition de couper à Argan un de ses bras qui ne lui sert à rien et de lui crever l’œil droit pour la même raison. On verra sans doute moins de méde-cins dans cette maison désormais.

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Puisque le piège à confondre les menteurs marche si bien, Toinette propose de rejouer la même farce pour prouver à Argan que sa fille, elle, l’aime vraiment.

angéliQUe : Mon père est mort, Toinette ?ToineTTe : Oui, vous le voyez là. Il vient de mourir tout à l’heure d’une faiblesse qui lui a pris.angéliQUe : Ô Ciel ! quelle infor-tune ! quelle atteinte cruelle !

Hélas ! faut-il que je perde mon père, la seule chose qui me restait au monde ? et qu’encore, pour un surcroît de désespoir, je le perde dans un moment où il était irrité contre moi ? Que deviendrai-je, malheureuse, et quelle consolation trouver après une si grande perte ?

eXTraiT de l'acTe iii, scène 13

Un chagrin si sincère est bien propre à émouvoir le cœur d’Argan.

Il ne reste plus au malade imaginaire, un peu plus clairvoyant grâce au trai-tement énergique de Toinette, qu’à accepter Cléante pour gendre.

argan : Qu’il se fasse médecin, je consens au mariage. Oui, faites-vous médecin, je vous donne ma fille.cléanTe : Très volontiers, Mon-sieur : s’il ne tient qu’à cela pour être votre gendre, je me ferai médecin, apothicaire, même, si vous voulez. Ce n’est pas une affaire que cela, et je ferais bien d’autres choses pour obtenir la belle Angélique.

béralde : Mais, mon frère, il me vient une pensée : faites-vous mé-decin vous-même. La commodité sera encore plus grande, d’avoir en vous tout ce qu’il vous faut.

eXTraiT de l'acTe iii, scène 14

de malade, Argan se transforme donc en médecin ; on a bien compris que ce métier-là n’est pas difficile à ap-prendre, quelques vagues mots de latin y suffisent bien. Cléante s’unit à Angé-lique et on n’entendra plus parler de Béline. Toinette, elle, continuera sans doute de veiller sur tout le monde, ha-bile à trier le vrai du faux, à grands renforts de cris, de farces et de cœur.

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au théâtreAllez applaudir Julie Sicard en Toinette, à la Comédie-Française jusqu’au 24 avril. L’actrice jouera ensuite dans Une puce, épargnez-la, de Naomi Wallace, mise en scène d’Anne-Laure Liégeois, du 28 avril au 14 juin 2012.LE MALADE IMAGINAIRE Mise en scène de Claude Stratz.

Au cinéma La vie du grand auteur, de son enfance à sa mort, dans une fresque magnifi que. MOLIÈRE d’Ariane Mnouchkine avec Philippe Caubère... (1978)

À lire Plongez-vous dans le texte entier pour mieux le savourer !LE MALADE IMAGINAIRE de Molière Pocket, collection Classiques

POUR EN SAVOIR PLUS...

molière aujourd'hui molière aujourd’hui

Jeune sociétaire de la Comédie-Française, Julie Sicard enfi le chaque soir le costume de Toinette. Pour elle, le théâtre a commencé quand elle avait 10 ans. Une (déjà) longue histoire…

JB Votre première rencontre avec le théâtre ?JS J’allais souvent au théâtre avec mes parents, à Poitiers. Ma mère m’a proposé de me joindre à une troupe amateur qui se montait. Ça ne s’est plus jamais arrêté ! Je suis arrivée à Paris pour suivre les cours du Conservatoire et c’est un de mes profes-seurs, Catherine Hiegel, qui m’a fait passer une audition pour un rôle dans le Malade imaginaire.

JB C’est comme cela que vous avez fait la connaissance de Toinette ?JS Au début, j’étais Angélique. Pourtant, je me souviens que lors des premières répétitions le met-teur en scène me disait souvent « Attention, n’oublie pas que toi, tu es plutôt une Toinette ! » Il avait sans doute raison puisque maintenant, c’est moi qui joue Toinette. Ce qui est curieux, c’est qu’en changeant de rôle, je ne vois plus la pièce de la même façon.

JB Vous voilà donc Toinette…JS C’est une merveille, c’est une grande liberté. Toinette amène l’urgence dans la pièce : il faut sauver l’amour d’Angélique et c’est sur Toinette que ça repose.

JB Vous la jouez toujours en mouvement.JS C’est le metteur en scène qui voulait ça : elle travaille tout le temps, elle ne s’arrête jamais. Elle court, elle bouge. D’ailleurs, Molière dit que Toinette a 26 ou 27 ans.

JB Toinette vous étonne-t-elle encore ?JS Toujours ! Elle est vive, elle a de la folie en elle. Je l’aime bien. Et puis, elle aussi est comé-dienne ! Elle a l’air de bien s’amuser dans la scène où elle joue un médecin. Et elle demande une sacrée énergie !

JB Et si vous croisiez la jeune fi lle que vous étiez quand vous avez commencé à faire du théâtre, que lui diriez-vous ?JS Je lui dirais de lire davantage de pièces. Aller au théâtre, c’est bien mais c’est surtout pour la mise en scène, la scénographie. Lire le texte, ça donne une vraie culture. Même si ce n’est pas facile.

ça me donne

Jouer«Toinette

julie sicard comédienne

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ColucheHUMORISTE

Jules RomainsAUTEUR DE « KNOCK »

Anonyme

Le travail c’est bien une maladie, puisqu’il y a une médecine du travail.

Si le travail c’est la santé, alors laissons-le aux malades !

Francis BlancheACTEUR ET HUMORISTE

Quand on a la santé, c’est pas grave d’être malade.

Quand la santé,

Michel AudiardÉCRIVAIN ET SCÉNARISTE

Rouler des

mécaniques c’est

une maladie des hommes.

Les gens bien portants sont

des malades qui s'ignorent.

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