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Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 1
JOHN RAWLS
La justice comme équité
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 2
Élémentsbibliographiques
John Rawls (1921- 2002)
Théorie de la justice, Le Seuil, Point, 1997 (1971)
Justice et démocratie, Le seuil, Point 2000.
Libéralisme politique, PUF, Coll. Quadrige, 2001 (1993)
Ouvrage de vulgarisation en Français :
La justice sociale : Le libéralisme égalitaire de John Rawls, Véronique Munoz-Dardé, Paris, A. Colin, 2005.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 3
La question centrale:La société juste
L’objet de la philosophie de Rawls : qu’est-ce qu’une société juste ? C’est pour lui la question centrale de toute philosophie politique
« La justice est la première vertu des institutions sociales comme la vérité est celle des systèmes de pensée. Si élégante et économique que soit une théorie elle doit être rejetée ou révisée si elle n’est pas vraie ; de même, si efficaces et bien organisées que soient des institutions et des lois, elles doivent être réformées ou abolies si elles sont injustes. »
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 4
Perfectionnismeet libéralisme
1. Les philosophies politiques perfectionnistes : une « bonne » organisation de la société est celle qui permet aux hommes de réaliser leur vraie nature (Aristote)
2. Les philosophies politiques libérales : l’organisation sociale doit donner à chacun les moyens de réaliser sa conception du bien (Mill)
Les philosophies libérales reconnaissent l’irréductible diversité des conceptions du bien dans nos sociétés
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 5
Le pari du libéralisme
Fonder une théorie de la justice Qui ne présuppose aucune conception préalable du « bien » (de la vie bonne)Qui ne suppose que la rationalité des individus
Une théorie acceptable par les croyants et les incroyantsPar les tenants du civisme ou de l’égoïsme personnelPar les partisans du rigorisme moral ou de la tolérance, etc..
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 6
Le paridu libéralisme (suite)
Le juste prévaut sur le bienC’est en fonction des principes de justice au sein de la société qu’on peut élaborer des conceptions de la vie « bonne » et non l’inverse.Le JUSTE : « Suum cuique tribuere » (Tertullien)
⇒ Il s’agit de prendre acte de l’irréductible pluralité de nos sociétés en termes de conception du bien (valeurs, culture, morale…)
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 7
Justice procédurale VS substantielle
Conception procédurale : le juste est déterminé par la manière d’arriver à une décision sur la répartition des biens
Conception substantielle : le juste est déterminé par la nature de la répartition elle-même.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 8
Une justicedoublement procédurale
1. La théorie ne s’intéresse qu’aux structures de base (institutions politiques, principes distributifs…) et pas aux distributions concrètes des richesses
Une distribution concrète est juste si elle est organisée par des structures de base justes
2. Les principes qui organisent les structures de base sont eux-mêmes issus d’une procédure : le contrat social sous voile d’ignorance.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 9
Principe de liberté maximale
Pour qu’une société soit juste, elle doit accorder à chacun de ses membres la liberté la plus grande possible compatible avec la même libertépour tous.
Il s’agit donc de maximiser la liberté de chacun
Sous la contrainte d’égalité : la liberté des uns ne peut être supérieure à celle des autres.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 10
PrincipeD’égalité des chances
Les inégalités économiques et sociales ne sont acceptables que si elles s’inscrivent dans un système de positions sociales également accessibles à tous.
En d’autres termes : les positions sociales (de richesse, de pouvoir, de notoriété…) ne doivent dépendre que de la motivation et des talents.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 11
Principe de différence(le « Maximin »)
Les inégalités économiques et sociales ne sont acceptables que si elles profitent aux plus démunis.
Autrement dit, entre deux organisations sociales, ce n’est pas la plus égalitaire qui est la plus juste mais celle où les plus pauvres sont les mieux lotis.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 12
Le principe du Maximin :un exemple graphique
0
0,05
0,1
0,15
0,2
0,25
0,3
0,35
0,4
0,45
10.000 20.000 30.000 40.000 50.000 60.000 70.000
SOCIETE INJUSTE
SOCIETE JUSTE
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 13
Le principe du maximin :un exemple chiffré
Société A Société B Société C Société D
Pierre 10 8 15 20
Paul 10 12 11 14
Jacques 10 10 11 12
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 14
L’ordrelexicographique
S’il y a contradiction entre deux principes :
Le principe de liberté prévaut strictement sur les deux autres
Le principe d’égalité des chances prévaut strictement sur le principe de différence.
⇒ Il n’y a pas de substitution possible entre les principes
Exemple : une société où l’on aurait plus pour les plus pauvres mais moins de liberté serait moins juste.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 15
La procédure
Le contrat social sous voile d’ignorance
Contrat social : les parties sont supposées sortir de l’état de nature en s’accordant sur les règles qu’elles vont s’imposer (contrat hypothétique).
Le voile d’ignorance : les parties ignorent tous les faits particuliers les concernant.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 16
Le voile d’ignorance
Ce que j’ignore
Mes goûtsMes aptitudesMa position dans la sociétéMes caractéristiques physiques
Ce que je connais
Les règles générales de la psychologie et du fonctionnement socialEn particulier l’importance des biens premiers
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 17
Le sensdu voile d’ignorance
Le voile d’ignorance interdit aux contractants d’imposer une forme de société plus conforme àleurs « intérêts » puisqu’ils ignorent quels seront leurs intérêts.
Le voile d’ignorance est donc un dispositif destiné à figurer l’impartialité : je dois décider quelle société je veux, sachant que je peux occuper n’importe quelle place.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 18
Le problème de lala motivation
Dans la position originelle, quelle motivation ai-je pour choisir telle sociétéplutôt que telle autre ?
Aucune, en l’absence d’information sur mes intérêts : pourquoi refuser l’esclavage si je ne sais pas s’il me déplairait d’être esclave ?
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 19
Le rôle desbiens premiers
Rawls postule que la possession de certains biens est, dans l’absolu, souhaitable, parce qu’ils nous aident àréaliser notre conception de la vie bonne, quelle qu’elle soit :les droits, les libertés, les opportunités, la santé, la richesse, le respect de soi.
Ce sont les biens premiers.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 20
De la position originelleaux principes
A partir du contrat social sous voile d’ignorance peut-on déduire les trois principes ?
Oui, si l’on suppose que, dans cette situation, l’homme souhaite d’abord éviter le pire :
Il doit dessiner une société dans laquelle sa place lui sera assignée par son ennemi.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 21
Le pari de l’équilibre réflexif
1. La théorie doit être compatible avec nos « jugements bien pesés » (intuitions morales fondamentales)
2. Elle doit être cohérente dans sa construction (basée sur des principes)
3. Elle construit un équilibre réflexif entre principes et jugements bien pesés.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 22
Schéma del’équilibre réflexif
La position originelle
Les trois principes
Les structures de base de la société
Nos jugements biens pesés
Exemple : l’esclavage
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Rawls critiquede l’utilitarisme
1ère critique : les droits et libertés dépendent entièrement des circonstances (ex : la peine de mort, ou l’esclavage)
2ème critique : l’utilitarisme n’a rien à dire sur les questions de distribution
3ème critique : la philosophie utilitariste ne prend pas les personnes au sérieux (ex : la torture)
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MICHAEL WALZER
L’autonomie des sphères
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 25
Éléments bibliographiquesMichael Walzer (1935)
Guerres justes et injustes, Paris, Belin, 1999 (1977)
Sphères de justice, Paris, Seuil, 1997 (1983)
Critique et sens commun : essai sur la critique sociale et son interprétation, Paris, La découverte, 1990 (1986)
Ouvrage de vulgarisation en français :
Michael Walzer : le pluralisme et l’universel. Justine Lacroix, Paris, Ed Michalon (2001)
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La critiquecommunautariennedu libéralisme
Pour les communautariens, l’individu n’existe qu’à travers une histoire, une culture, des liens sociaux spécifiques.
Double critique de « l’abstraction » libérale :
La conception libérale de la justice se construit sur base d’un individu, abstrait, « irréel »
La conception libérale favorise l’émergence d’un tel individu, détaché de tout lien social et égoïste.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 27
Le postulatcommunautarien
Le refus de la méthode du voile d’ignorance, qui dépouille l’individu de toute ses caractéristiques concrètes
Il s’agit d’étudier le contrat social « réel » tel qu’il s’est élaboré dans une société donnée au fil des évolutions historiques.
Il est donc impossible de détacher le juste de toute conception du « bien ».
⇒ Le communautarisme de Walzer est une philosophie perfectionniste
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 28
Les sphèresde justice
Les sociétés complexes se caractérisent par une pluralitédes significations accordées aux différents biens.
Notre conception du juste s’enracine dans cette pluralité : le pouvoir politique, l’argent, l’amour, la santé, l’éducation… appartiennent à des sphères distributives différentes
Chaque sphère à son critère de distribution spécifique.
Le pluralisme de Walzer est donc un pluralisme des biens et beaucoup moins un pluralisme des conceptions morales.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 29
Les critèresdistributifs
Le libre-échange : s’impose dans la distribution de tous les biens ordinairement marchands
Le mérite : distribution des reconnaissances sociales positives (diplômes, honneurs) ou négatives (sanctions)
Le besoin : critère propre à la sphère distributive du bien-être (santé, minimum vital…)
La capacité à persuader : c’est ce qui doit régir l’obtention du pouvoir politique dans la sociétécomplexe qu’est la démocratie.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 30
Égalité et inégalitéEGALITE
Égalité simple :Tout le monde la même chose dans chaque sphère.
Égalité complexe :La règle distributive est respectée dans chaque sphère.
INEGALITE
Monopole :Certains s’approprient la plus grande part dans une sphère donnée
Dominance (tyrannie)L’inégalité dans une sphère se transmet aux autres sphères.
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Exemplesde dominance
Éviter le service militaire en payant
Pouvoir acheter la grâce divine (les indulgences)
Obtenir de meilleurs soins médicaux parce qu’on appartient au Parti
Le mandarinat : distribution des positions de pouvoir en fonction du mérite intellectuel.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 32
Pourquoi pasl’égalité simple ?
Elle ne correspond pas à notre propre conception de la justice : peut-on éliminer le mérite ? Le besoin ? Le débat démocratique? Le libre marché ?
Elle ne pourrait être imposée qu’au prix d’un contrôle bureaucratique écrasant
Elle serait constamment instable : par l’interférence entre les sphères (le pouvoir pour tenter de rompre l’égalitémonétaire, l’argent pour tenter d’obtenir de meilleurs soins, etc.)
« C’est une chose de chasser les marchands du temple. C’en est une autre de les chasser des rues ».
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 33
Significationde l’égalité complexe
Des inégalités existent dans toutes les sphères mais elles ne se cumulent pas.
Il y a des pauvres, mais ils ont le même droit au minimum vital, aux soins de santé, à la même éducation, à l’accès au pouvoir, à la culture...
Il y a des moins talentueux dans un domaine, qui le sont davantage dans un autre…
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 34
Conditionde l’égalité complexe
Le principe des échanges bloqués : il faut organiser un système d’inconvertibilité des biens.
Exemple : pour Walzer, la société américaine est tyrannique parce que l’argent permet d’obtenir des biens appartenant à d’autres sphères.
L’état social : illustration possible de l’égalitécomplexe ?
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La communautépolitique et l’appartenance
L’appartenance à la communauté politique est le premier des biens : il conditionne les autres
Les communautés politiques ont le droit à la fermeture.
Mais elles n’ont pas le droit à la discrimination
Conclusion : la justice n’exige pas l’accueil des immigrés mais elle exige leur naturalisation s’ils sont accueillis.
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 36
La méthoded’accès au « juste »
La découverte : Moïse et les tables de la loi
L’invention : Rawls et le voile d’ignorance
L’interprétation : on critique la société en partant de ses propres valeurs (les mouvements dissidents avant la chute du communisme)
La critique comme interprétation intègre l’essentiel du « communautarisme » de Walzer. Ne pourrait-on mieux le décrire comme un « immanentisme » ?
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 37
La critique commeinterprétation
1ère question : quid de la critique radicale ?les ressources existent toujours à l’intérieur d’une société pour la critiquer radicalement.
2ème question : comment trancher entre les interprétations ?Il n’y a pas de critère ultime. La critique se fait dans le débat.
3ème question : peut-on critiquer d’autres cultures ?La critique est toujours possibleMais elle doit être réintégrée par la culture elle-même, sinon elle est destructrice.
Exemple 1: les sacrifices humains chez les AztèquesExemple 2 :les mutilations sexuelles en Afrique de l’ouest
4ème question, dès lors : quelle place pour l’universel ?
Rawls et Walzer - Marc Jacquemain 38
Quelle placepour l’universel ?
UNIVERSALISME SURPLOMBANT
Il y a une forme unique de l’universel
Il s’agit de le découvrir au « fondement » des conceptions de la justice
Ceux qui l’ont découvert ont le droit de l’imposer
UNIVERSALISME REITERATIF
Chaque société humaine est universelle parce qu’humaine et singulièreparce que société
L’universel en chaque société doit être redécouvert par la sociétéelle-même et ne peut être imposé.