13
 CRAI  2012, II (avril-juin), p. 815-826 1. The  Bower Manuscript: Facsimile Leaves, Nagari Transcript, Romanised Transliteration and English Translation with Notes , Calcutta, Superintendent Government Printing (Archaeological Survey of India, New Imperial Series, 22), 1893-1912. Voir également U. Sims-Williams, « The Papers of the Central Asian Scholar and Sanskritist Rudolf Hoernle », dans The British Library Sanskrit Fragments: Buddhist Manuscripts from Central Asia  (  BLSF), S. Karashima et Kl. Wille éd., International Research Institute for Advanced Buddhology, Soka University (ci-après  BLSF I) tome 1, 2006, Tokyo, p. 1-26 ; Ead. « The British Library Hoernle Collection, part 1 »,  BLSF II.1, 2009, p. 1-24. 2. « The Weber MSS. – Another Collection of Ancient Manuscripts from Central Asia »,  Journal of the Asiatic Society of Bengal  (ci-après  JASB) 62, pt. I, 1893, Calcutta, 1894, p. 1-40 ; « Three Further Collections of Ancient Manuscripts from Central Asia », JASB 66, pt. I, 1897, p. 213-60 (réimpression : Calcutta, 1897) ; « A Report on the British Collection of Antiquities from Central Asia. Part I »,  JASB 68, pt. I, 1899, extra no., Calcutta, 1899 ; « A Report on the British Collection of Antiquities from Central Asia. Part II »,  JASB 70, pt. I, 1901, extra no. 1, Calcutta, 1902 ;  Facsimile Reproduction of Weber Mss., Part IX and Macartney Mss., Set I with Roman Transliteration and Indexes , Calcutta, Baptist Mission Press, 1902 ; « The « Unknown Languages » of Eastern Turkestan. [I] »,  JRAS, 1910, p. 834-38, p. 1283-1300 ; « The « Unknown Languages » of Eastern Turkestan. II », JRAS, 1911, p. 449-477 ;  Manuscript Remains of Buddhist Literature  Found in Eastern Turkestan , Oxford, 1916 (Réimpression : St. Leonards et Amsterdam, 1970). Pour une description détaillée et une évaluation du travail de Hoernle et du fonds qui porte son nom, NOTE D’INFORMATION NOUVELLES RECHERCHES SUR LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES PROVENANT D’ASIE CENTRALE, PAR M. SEISHI KARASHIMA En 1889, des chasseurs de trésors locaux trouvèrent une cache de manuscrits, dans un endroit situé au sud de Kucha, sur la route de la soie septentrionale. Ces manuscrits furent vendus à un officier des services de renseignements britanniques en Inde, le lieutenant Bower, qui à son tour les envoya à Augustus Frederic Rudolf Hoernle à Calcutta. Hoernle déchiffra ces manuscrits, qui contiennent plusieurs textes médicaux et bouddhiques en sanskrit, et en publia une édition soignée (1893-1912) 1 . Cette découverte et cette publica- tion ont influencé le début du mouvement d’exploration archéolo- gique au Turkestan oriental. En 1893, Hoernle publia également un article sur une collection de manuscrits qu’il avait reçue du Rev. F. Weber, un missionnaire Morave à Leh au Ladakh. Plus tard, il publia encore des articles sur des fragments en sanskrit – certains d’entre eux étaient des faux – envoyés par George Macartney (1867- 1945), le consul général britannique à Kashgar , et le capitaine Stuart Hill Godfrey (1861-1941), « résident assistant » au Kashmir 2 . En

Karashima2013“Nouvelles recherches sur les manuscrits sanscrits bouddhiques provenant d’Asie Centrale”.pdf

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  • CRAI 2012, II (avril-juin), p. 815-826

    1. The Bower Manuscript: Facsimile Leaves, Nagari Transcript, Romanised Transliteration and English Translation with Notes, Calcutta, Superintendent Government Printing (Archaeological Survey of India, New Imperial Series, 22), 1893-1912. Voir galement U. Sims-Williams, The Papers of the Central Asian Scholar and Sanskritist Rudolf Hoernle , dans The British Library Sanskrit Fragments: Buddhist Manuscripts from Central Asia (BLSF), S. Karashima et Kl. Wille d., International Research Institute for Advanced Buddhology, Soka University (ci-aprs BLSF I) tome 1, 2006, Tokyo, p. 1-26 ; Ead. The British Library Hoernle Collection, part 1 , BLSF II.1, 2009, p. 1-24.

    2. The Weber MSS. Another Collection of Ancient Manuscripts from Central Asia , Journal of the Asiatic Society of Bengal (ci-aprs JASB) 62, pt. I, 1893, Calcutta, 1894, p. 1-40 ; Three Further Collections of Ancient Manuscripts from Central Asia , JASB 66, pt. I, 1897, p. 213-60 (rimpression : Calcutta, 1897) ; A Report on the British Collection of Antiquities from Central Asia. Part I , JASB 68, pt. I, 1899, extra no., Calcutta, 1899 ; A Report on the British Collection of Antiquities from Central Asia. Part II , JASB 70, pt. I, 1901, extra no. 1, Calcutta, 1902 ; Facsimile Reproduction of Weber Mss., Part IX and Macartney Mss., Set I with Roman Transliteration and Indexes, Calcutta, Baptist Mission Press, 1902 ; The Unknown Languages of Eastern Turkestan. [I] , JRAS, 1910, p. 834-38, p. 1283-1300 ; The Unknown Languages of Eastern Turkestan. II , JRAS, 1911, p. 449-477 ; Manuscript Remains of Buddhist Literature Found in Eastern Turkestan, Oxford, 1916 (Rimpression : St. Leonards et Amsterdam, 1970). Pour une description dtaille et une valuation du travail de Hoernle et du fonds qui porte son nom,

    NOTE DINFORMATION

    NOUVELLES RECHERCHES SUR LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES PROVENANT DASIE CENTRALE,

    PAR M. SEISHI KARASHIMA

    En 1889, des chasseurs de trsors locaux trouvrent une cache de manuscrits, dans un endroit situ au sud de Kucha, sur la route de la soie septentrionale. Ces manuscrits furent vendus un officier des services de renseignements britanniques en Inde, le lieutenant Bower, qui son tour les envoya Augustus Frederic Rudolf Hoernle Calcutta. Hoernle dchiffra ces manuscrits, qui contiennent plusieurs textes mdicaux et bouddhiques en sanskrit, et en publia une dition soigne (1893-1912)1. Cette dcouverte et cette publica-tion ont influenc le dbut du mouvement dexploration archolo-gique au Turkestan oriental. En 1893, Hoernle publia galement un article sur une collection de manuscrits quil avait reue du Rev. F. Weber, un missionnaire Morave Leh au Ladakh. Plus tard, il publia encore des articles sur des fragments en sanskrit certains dentre eux taient des faux envoys par George Macartney (1867-1945), le consul gnral britannique Kashgar, et le capitaine Stuart Hill Godfrey (1861-1941), rsident assistant au Kashmir2. En

  • 816 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    cf. P. O. Skjrv, Khotanese Manuscripts from Chinese Turkestan in The British Library. A Complete Catalogue with Texts and Translations. With Contributions by Ursula Sims-Williams, London, 2002, introduction.

    3. S. F. Oldenburg (S. F. Oldenburg), Kajgarskaq rukopis N. F. Petrovskago , Zapiski Vostownago Otdeleniq Imperatorskago Russkago Arheologiweskago Obestva (ci-aprs ZVOIRAO) VII, 1893, p. 81-82, 1 planche ; Otrxvki kajgarskih sanskritskih rukopise iz sobraniq N. F. Petrovskago , ZVOIRAO VIII, vxp. I, 1893, p. 47-67, 2 planches ; K Kajgarskim buddiskim tekstam , ibid., p. 151-153 ; Ee po povodu kajgarskih sanskritskih rukopise , ZVOIRAO IX, 1894, p. 349-351 ; Otrxvki kajgarskih i sanskritskih rukopise iz sobraniq N. F. Petrovskago, II, Otrxvki iz Pacaraka , ZVOIRAO XI, 1899, p. 207-264, 2 planches ; Otrxvki kajgarskih i sanskritskih rukopise iz sobraniq N. F. Petrovskago, III, Otrxvki iz Pacaraka , ZVOIRAO XV, Vxp. 4, 1904, p. 113-122, 3 planches ; Predvaritelnaq zametka o buddisko rukopisi napisanno pismenami kharohi, Sanktpeterburg 1897 : Tipografq Imperatorsko Akademi Nauk.

    4. On compte 11 477 fragments Berlin ; 8 315 fragments Londres, environ 3 000 fragments Paris, plus de 350 manuscrits et fragments Saint-Ptersbourg et plusieurs centaines de fragments Lshun.

    1899, Hoernle publia la premire partie de son rapport sur le fonds qui comprenait plus de cent fragments dans diverses critures et langues.

    Presque la mme priode, de 1890 1903, Nikolaj F. Petrovsky (1837-1908 ; le consul russe Kashgar de 1882 1903) collecta de nombreux manuscrits bouddhiques en sanskrit, gandhari, khota-nais, tokharien, tibtain et ougour, dcouverts dans divers endroits du Turkestan oriental. Il envoya un grand nombre dentre eux Saint-Ptersbourg. En 1893, lacadmicien Sergey Fyodorovich Oldenburg (1863-1934) commena publier ses tudes sur les fragments en sanskrit et en tokharien3. Il ne put publier que dix-neuf fragments, ceux qui taient les mieux conservs parmi les deux-cent cinquante fragments environ que comptait le fonds Petrovsky.

    Ainsi, le Grand Jeu ou Tournoi des Ombres (Turnirx tene) entre lEmpire britannique et lEmpire russe pour la supr-matie en Asie centrale fut jou mme dans le domaine de la recherche sur les manuscrits en sanskrit.

    Ces rapports sur les dcouvertes successives de manuscrits bouddhiques ont suscit lintrt des chercheurs en Europe et au Japon. Au cours des deux dcennies qui ont suivi lanne 1895, Sven Hedin, Aurel Stein, Albert Grnwedel, Albert von Le Coq, Carl Gustaf Emil Mannerheim, Sergey F. Oldenburg, Zuicho Tachibana, Ellsworth Huntington et Paul Pelliot (1878-1945), pour ne nommer que les plus clbres, effecturent des expditions en Asie centrale et en rapportrent de nombreux fragments en sanskrit, en khotanais et dans dautres langues centre-asiatiques en Europe, aux tats-Unis et au Japon. Ces fragments sanskrits, dont le nombre total pourrait slever vingt-cinq mille4, sont prsent conservs dans diverses institutions Londres, Berlin, Munich, Helsinki,

  • LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES 817

    5. Pour une vue densemble des manuscrits sanskrits bouddhiques provenant dAsie centrale, voir L. Sander, Buddhist Literature in Central Asia , Encyclopaedia of Buddhism, G. P. Malalasekara et al. d., vol. IV, Colombo, 1979, p. 52-75 et Ead. Buddhist Sanskrit Manuscripts from Chinese Turkestan: Eighty Years of Research Work , Praja-Bharati, J. S. Jha d., Patna, 1983, p. 1-18.

    6. http://idp.bl.uk/ et http://iriab.soka.ac.jp/orc/Publications/BLSF/index_BLSF.html.7. dit par Seishi Karashima et Klaus Wille, Tokyo, IRIAB, Universit Soka, tome I (2006),

    tome II, 2 parties (2009). 8. Lexemple le plus frappant de cette situation est le manuscrit du Saddharmapuarikasutra

    dit de Kashgar , datant probablement du IXe ou du Xe sicle ap. J.-C., qui fut dcouvert Khadaliq

    Saint-Ptersbourg, Ankara, Yale, Washington, Harvard, Kyoto, Lshun en Chine et ici-mme, Paris5. Rcemment, de nombreux fragments en sanskrit ont t dcouverts au Xinjiang en Chine et beaucoup dentre eux sont aujourdhui prservs la Bibliothque nationale de Chine Pkin.

    1. La numrisation des fragments

    Depuis la fin du XIXe sicle, un nombre substantiel de ces frag-ments ont t catalogus, transcrits ou tudis par de nombreux spcialistes. Toutefois, lexception des collections allemandes, la majorit de ces fragments reste encore tudier.

    Cest cette fin quen 2005, lInstitut International de Recherche Avance en Bouddhologie (IRIAB) de lUniversit Soka, dont je suis lun des membres, et la British Library (BL) ont pass un accord pour la numrisation de lensemble des collections des fragments de manuscrits sanskrits provenant dAsie centrale, compose de plus de 8315 pices en tout. Nous avons galement dcid de rendre accessibles les images, publiant les identifications prliminaires, les transcriptions et les informations sur les fragments sur les sites de lInternational Dunhuang Project (IDP) et de lIRIAB, six mois aprs que notre Institut eut reu les images numrises6. Ainsi, nous sommes en train de rendre ce patrimoine culturel inestimable acces-sible aux chercheurs du monde entier. Depuis 2006, nous avons publi 2 tomes de Buddhist Manuscripts from Central Asia: The British Library Sanskrit Fragments (BLSF), qui traitent environ mille cent fragments7. Et ce jour (mai 2012), 6604 sur les 8315 pices ont t numriss ; le reste sera achev en 2012.

    Le fonds sanskrit Petrovsky Saint-Ptersbourg a la particularit notoire de prserver des manuscrits qui, bien quincomplets, possdent souvent des folios bien conservs, alors que les manus-crits prservs dans les fonds dautres bibliothques sont gnrale-ment dans un tat plus fragmentaire. Ce fait peut tre d la position avantageuse du consul de Russie Kashgar8.

  • 818 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    avant dtre vendu Kashgar. Ce manuscrit est probablement le mieux conserv de tous ceux qui furent retrouvs en Asie centrale. Il fut divis en six parties, aujourdhui conserves dans six endroits du monde. Sur les 459 folios que comptait originellement le manuscrit, 447 sont prservs, dont 396 Saint-Ptersbourg, 44 la British Library, 9 Berlin, 1 lUniversit de Yale et 6 feuilles au muse de Lshun en Chine. Certains folios ont t diviss en deux et vendus en plusieurs parties ; par consquent, la somme des folios existants dpasse 447. Cf. H. Toda, Saddharmapuarikasutra, Central Asian Manuscripts, Romanized Text, Tokushima, Kyoiku Shuppan Center, 1983, p. xii-xiii. Une dition comprenant les fac-simils en couleurs du manuscrit est actuellement en prparation par lInstitut de Philosophie orientale de Tokyo.

    9. The Kasyapaparivarta: Romanized Text and Facsimiles, M. I. Vorobyova-Desyatovskaya d., en collaboration avec S. Karashima et N. Kudo, Tokyo, IRIAB, Universit Soka (Bibliotheca Philologica et Philosophica Buddhica V), 2002 ; S. Karashima et M. I. Vorobyova-Desyatovskaya, Some Buddhist Sanskrit Fragments from the Collection of the St. Petersburg Branch of the Institute of Oriental Studies of the Russian Academy of Sciences (1) , Annual Report of The International Research Institute for Advanced Buddhology at Soka University (ci-aprs ARIRIAB) X, 2007, p. 45-56 + 3 planches ; Buddhist Sanskrit Fragments from the Collection of The Institute of Oriental Manuscripts in St. Petersburg (2) , ARIRIAB XI, 2008, p. 91-94 + 2 planches.

    10. Cf. BLSF II.1, p. 494-495 ; II.2, planche 322.

    En collaboration avec lInstitut des Manuscrits orientaux de lAcadmie des Sciences de Russie Saint-Ptersbourg, nous avons publi les textes et les fac-simils du manuscrit du Kasyapa-parivarta et plusieurs fragments de textes divers dans les publica-tions de lIRIAB9. En largissant la collaboration entre nos deux instituts, nous avons dcid de commencer une srie similaire celle du BLSF, savoir Buddhist Manuscripts from Central Asia: The St. Petersburg Sanskrit Fragments (StPSF). Nous sommes en train de prparer la publication du premier tome, prvue pour septembre 2013, qui comprendra entre autres les manuscrits de lAjitasenavyakaraa, du Sardulakaravadana ainsi quune antho-logie davadanas dcouverte dans loasis de Merv proximit de Bayram Ali au Turkmnistan en 1966. Ces trois manuscrits se composent de feuilles presque compltes.

    2. Les procds didentification des fragments au moyen des bases de donnes des textes en sanskrit et en pali

    Par le pass, seuls les fragments relativement gros, qui sont faciles identifier, furent tudis et publis. De nos jours, les bases de donnes des textes en sanskrit et en pali permettent didentifier mme des fragments minuscules ne comprenant que quelques mots ou, dans les cas extrmes, quelques caractres. Par exemple, le frag-ment sanskrit Or.15010/85 conserv la British Library10 se lit comme suit :

  • LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES 819

    11. Gv = Gaavyuha, D. Teitaro Suzuki, H. Idzumi d., Kyoto, The Sanskrit Buddhist Texts Publishing Society, 1934-1936 (nouvelle dition rvise, Kyoto, The Society for the Publication of Sacred Books of the World, 1949) ; Gv(V) = Gaavyuhasutra, P. L. Vaidya d., Darbhanga, The Mithila Inst. of Post-Graduate Studies and Research in Sanskrit Learning (Buddhist Sanskrit Texts, No 5), 1960.

    Dans ce fragment, il ny a presque aucune expression caractris-tique, ni de mot complet. Il eut t impossible aux chercheurs dautrefois de lidentifier, eux qui ne pouvaient compter que sur leur mmoire et sur les textes imprims. De nos jours, par contre, grce laide des bases de donnes de textes bouddhiques en sanskrit, on peut aisment lidentifier comme une partie du Gaavyuha :

    recto : Gv 52.16-53.6 = Gv(V) 40.17-2911. saptahastayamavistara-urdhvadha-pramaani dharaitalad abhyud-gamya pratyeka ca sarvopakaraaparipurani nanaratnaparipurani suvarabhajanani rupyacuraparipurani asmagarbhabhajanani lohitamuktaparipurani etatpramukhani verso : Gv 56.12-21 = Gv(V) 45.21-46.7

    rectoa /// ib ///.. karaac /// [p]yacurad /// janae /// kha[ni]

    versoa /// m.b ///..c /// pud ///.. 34 ||e ///.. tra

    FIG. 1.

  • 820 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    12. Cf. BLSF II.1, p. 460-461 ; II.2, planche 287. 13. Les bases de donnes de cette dition de rfrence du Canon bouddhique en chinois se

    trouvent sur les sites suivants : http://www.l.u-tokyo.ac.jp/~sat/japan/down.html et http://www.cbeta.org/index.htm. Lidentification de loiseau krauca est problmatique et a t beaucoup discute. Voir, par exemple, J. Leslie, A bird bereaved : the identity and significance of Valmikis Krauca , Journal of Indian Philosophy 26, 1998, p. 455-487 ; P. Thieme, Kranich und Reiher im Sanskrit , Studien zur Indologie und Iranistik 1, 1975, p. 3-36 = Kleine Schriften II, Wiesbaden, p. 855-888. Selon Leslie, la grue antigone est lidentification la plus probable. On comprend pour-quoi le terme sanskrit a t rendu de diverses manires dans les traductions chinoises ( grue ), ( pie ), ( phnix ), ( canard mandarin ), (ceci est une translitration !). Les traducteurs ont donc d prouver des difficults identifier le rfrant de krauca, et la traduc-tion parat la plus adquate. Le terme hasa ( oie ) se trouve frquemment associ krauca dans la littrature bouddhique. Par consquent, jai cherch le mot ( oie ) dans le corpus lectronique.

    sarvasantipurabhumisthapana dharmayanam abhirohayahi me ||32|| dharaivaravisuddhi suprabha janasuryam upadarsayahi me ||34|| yatra te samabhiruhacakua janarajamakuabhyalakta |

    3. Lidentification des fragments en utilisant les bases de donnes des traductions en chinois et en tibtain

    Tous les textes sanskrits ne sont pas conservs. Il y a de nombreux cas o nous ne pouvons pas identifier des fragments dans les textes sanskrits existants. On peut alors recourir aux traductions de textes bouddhiques en chinois et en tibtain, qui sont conserves en grand nombre. Les bases de donnes de ces textes sont prsent galement accessibles.

    Un cas exemplaire pour lequel on a recouru lune de ces bases de donnes est le fragment sanskrit Or.15010/130, rdig en criture Brahmi ancienne du Turkestan (IVe-Ve sicle ap. J.-C. ?), o se trouvent des mots tels que bhiku ( moine ), maikara ( joail-lier ), mai ( pierre prcieuse ), soita ( sang ) et krauca ( grue antigone )12.

    En recherchant les mots chinois susceptibles de leur correspondre, tels que , , et dans la base de donnes du corpus de textes bouddhiques en chinois (le Taisho Shinshu Daizokyo ou Taisho Tripitaka)13, on peut identifier le fragment comme corres-pondant la 63e histoire dans la traduction chinoise du Sutralakara de Kumaralata, le Dazhuangyanlunjing , traduit par Kumarajiva au dbut du Ve sicle ap. J.-C. (cf. Taisho, tome. 4, No 201). Ce texte fut traduit en franais par douard Huber, sur les conseils de son matre Sylvain Lvi, lequel nourrissait galement un profond intrt pour le Sutralakara.

  • LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES 821

    14. Cf. . Huber, Avaghoa, Strlamkra, traduit en francais sur la version chinoise de Kumrajva, Paris, Leroux, 1908, p. 325-328. Ce fragment correspond un autre fragment sanskrit, qui a t dcouvert Kizil par lexpdition allemande Turfan et tudi par Heinrich Lders : H. Lders, Bruchstcke der Kalpanamaitika des Kumaralata, Kleinere Sanskrit-Texte II, Leipzig, Deutsche Morgenlndische Gesellschaft, 1926, p. 179, folio 204 (SHT 21). Cette histoire est gale-ment le sujet dun bas-relief gandhrien ; cf. A. Foucher, Interprtation de quelques bas-reliefs du Gandhra , Journal asiatique, mars-avril 1917, p. 257-281.

    Taisho 4, No 201, 320a15f. ( joaillier ) ( pierre prcieuse ), 320b27f. ( moine ) ( joaillier ) ( joail-lier ) ( moine ) ( mai ) ( joaillier ) ( moine ) ( sang ) ( oie ) ( sang ) ( moine ) ( oie ) 14

    4. Mise en lumire des avantages de la photographie numrique des fragments

    Les images numriques de fragments sont bien plus claires que les photos en noir et blanc. Ainsi, sur la base de reproductions noir et blanc des manuscrits, il est souvent impossible de faire la distinction entre les points marquant les anusvara et de simples taches du

    FIG. 2.

  • 822 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    15. Cf. BLSF I, p. 155f., planche 95f.

    support. Il est galement difficile de distinguer les petits signes dno-tant la suppression de caractres superflus ou des marques dinser-tion interlinaire. Un des avantages de la photographie numrique des fragments est la possibilit du traitement secondaire des images. On peut ainsi agrandir les images numriques autant que lon veut, augmenter ou diminuer le contraste et modifier les couleurs sur un cran dordinateur. Toutes ces amliorations dimages aident rsoudre les problmes voqus ci-dessus.

    Par exemple, les images suivantes sont des clichs dun manuscrit du Saddharmapuarikasutra ou Stra du Lotus , qui fut dcou-vert Farhd Bg-Yailaki au Xinjiang et est aujourdhui conserv dans le fonds Stein la British Library. La photo du haut est tire dun microfilm non dat. Celle du bas est la photo numrise pour notre projet BLSF15.

    Il est presque impossible de distinguer les marques danusvara des taches dans la photo du haut. Les caractres qui sont illisibles sur la photo du haut, sont bien plus aisment dchiffrables sur celle du bas.

    FIG. 3.

  • LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES 823

    16. Cette image a t assemble par Oktor Skjrv et publie dans BLSF II.2, planche 376. 17. Cf. S. Karashima, Sanskrit Fragments of the Kasyapaparivarta and the Pacaparamita-

    nirdesasutra in the Mannerheim Collection , ARIRIAB VII, 2004, p. 105-118 + 3 planches. BLSF II.1, p. 354-356 ; ibid. II.2, planche 219.

    En outre, la photographie numrique nous permet de rassembler des images de fragments, aujourdhui spars, mais lorigine constituant un seul et mme folio. Par exemple, limage suivante du verso dune feuille du Suvarabhasottamasutra est constitue partir des photographies de six diffrents fragments conservs la British Library, savoir Or.15010/205, IOL San 73, Or.15009/677, IOL San 1184, IOL San 1172 et IOL San 58916.

    Dautre part, la photographie numrique nous permet dassembler des images de fragments, qui sont aujourdhui conservs dans diff-rents pays. Par exemple, limage suivante dune feuille du Kasyapa-parivarta se compose de trois morceaux, savoir les fragments Or.15010/17 et Or.15010/18, conservs la British Library, et le fragment Mannerheim n 3, conserv la bibliothque de lUniver-sit dHelsinki en tant que dpt de la Socit finno-ougrienne17.

    Il est probable que le marchand de cette feuille, dcouverte sur les ruines de Khadaliq en Chine, lait divise en trois et vendue sparment.

    FIG. 4.

  • 824 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    18. Le fac-simil du fragment Mannerheim est ici reproduit avec laimable autorisation de la Socit finno-ougrienne.

    19. Une reproduction photographique se trouve dans : Saiiki Koko Zufu [Photographies archologiques de la rgion de lOuest], M. Kagawa d., Tokyo, 1915 () (Rimpressions : Tokyo, 1972 [], Pkin, 1999 []), n 20.

    20. Cf. BLSF II.1, p. 535-538 ; II.2, planche 367. 21. Cf. BLSF II.2, planche 160.

    Le deuxime exemple est une feuille du Saddharmapua-rikasutra. Le fragment sur le ct gauche (en noir et blanc) a autre-fois appartenu la collection Otani, mais il a aujourdhui disparu19. Le fragment sur le ct droit est Or.15010/208 de la British Library20.

    FIG. 518.

    FIG. 6.

    Le troisime exemple est une feuille du Mahaparinirvaa-mahasutra. Le fragment se compose de deux morceaux, savoir le fragment Or.15009/246 de la British Library21 et le fragment

  • LES MANUSCRITS SANSKRITS BOUDDHIQUES 825

    22. Le fac-simil du fragment est ici reproduit avec laimable autorisation de lInstitut des Manuscrits orientaux de lAcadmie des Sciences de Russie Saint-Ptersbourg.

    23. Ce folio a t tudi par Hiromi Habata, BLSF II.1, p. 582f. 24. Limage est tire de J. N. Reuter, Some Buddhist Fragments from Chinese Turkestan in

    Sanskrit and Khotanese , dans Aikakauskirja (Journal de la Socit finno-ougrienne) XXX, 37, Helsinki, 1913-18, p. 33, planche VII. Cet article fut rimprim dans C. G. E. Mannerheim, Across Asia from West to East in 1906-1908, Suomalais-Ugrilainen Seura (Kansatieteellisi Julkaisuja 8), Helsinki, 1940 (Rimpression : Oosterhout, 1969, Anthological Publications, vol. II).

    25. Cf. S. Karashima, ARIRIAB VII, 2004, p. 109f. et planche 3. Le fac-simil du fragment Mannerheim est ici reproduit avec laimable autorisation de la Socit finno-ougrienne.

    FIG. 7.

    De cette manire, la photographie numrique nous permet das-sembler des images de fragments qui sont spars et, par consquent, aussi de restaurer les caractres cheval sur deux fragments.

    5. Urgence de la numrisation des fragments

    Aprs avoir t enterrs pendant plus de mille ans dans les sables dAsie centrale, ces fragments sanskrits ont t dcouverts et rapports en Europe, aux tats-Unis et au Japon il y a cent ans. Depuis, la majorit dentre eux ont t conservs dans les biblio-thques sans avoir t tudis. Durant cette priode, un certain nombre de ces fragments ont t dtriors d au passage du temps. Les photos suivantes proviennent dun seul et mme fragment du Pacaparamitanirdesasutra, le fragment Mannerheim n 9. Celle de gauche a t prise il y a cent ans24, et celle de droite il y a dix ans, ma demande25. La dtrioration du fragment est vidente.

    SI P/88d22 de lInstitut des Manuscrits orientaux de lAcadmie des Sciences de Russie Saint-Ptersbourg23.

  • 826 COMPTES RENDUS DE LACADMIE DES INSCRIPTIONS

    26. http://gallica.bnf.fr/Search?ArianeWireIndex=index&q=sanscrit&p=1&lang=fr.

    Comme je lai soulign prcdemment, la numrisation de tous les 8315 fragments dAsie centrale de la British Library sera acheve cette anne. Cest un projet que lIRIAB de lUniversit Soka soutient financirement depuis 2005. prsent, nous collaborons galement avec lInstitut des Manuscrits orientaux de lAcadmie des Sciences de Russie, comme indiqu ci-dessus. Par ailleurs, plus de 1000 fragments sanskrits du fonds Pelliot, sur un total slevant 3000 environ, sont numriss et publis sur le site internet de la Bibliothque nationale de France26. Nous formulons le souhait qu lavenir dautres institutions sempressent galement de numriser les fragments sanskrits avant quils ne se dtriorent et quelles puissent les rendre accessibles au public.

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    Le Prsident Jean-Pierre MAH et M. Jean-Nol ROBERT, membre de lAcadmie, interviennent aprs cette note dinformation.

    FIG. 8.