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La lettre des élus Une publication mensuelle de l’UNEF et de l’APFEE - 0,15 Euros N° de Commission Paritaire : 0108G82659 • ISSN : 1761-1547 // Directeur de publication : Sébastien Chaillou // Rédacteurs en chef : Yannis Burgat, Benoit Soulier // mail : [email protected] // tél : 01 42 02 25 55 // Impression : imprimerie Grenier RCS Créteil B 622.053.189 Actualités Réforme du concours de SciencesPo Paris // IDEX de Toulouse Dossier Unifier l’enseignement supérieur pour démocratiser les écoles Fiche pratique Rôle des élus dans les grandes écoles Interview Pierre Tapie, Président de la CGE Association pour la Formation des Elus Etudiants APFEE Bonjour à tous ! Ces derniers mois, dans le cadre des élections présiden- tielles, le débat public est revenu sur la question de la réussite dans l’enseignement supérieur et la diversité des étudiants au sein des grandes écoles. Pour faire état des propositions des élus « UNEF et association étudiantes » et des batailles à mener dans les conseils, la Lettre des Elus consacre ce mois-ci un numéro spécial aux élus étu- diants dans les Grandes Ecoles. Si la qualité du diplôme dans les grandes écoles est indé- niable, l’accès à ces diplômes demeure réservé à une mi- norité. La massification de l’enseignement supérieur, qui permet aujourd’hui à plus de 2,3 millions de jeunes d’être étudiants, repose principalement sur les épaules des uni- versités. Les élus « UNEF et associations étudiantes », s’organisent dans chaque établissement pour réduire les inégalités entre les étudiants et démocratiser l’accès aux grandes écoles. Le dossier du mois est consacré au rapprochement entre les universités et les grandes écoles. Les élus « UNEF et associations étudiantes » portent le projet d’unification de l’enseignement supérieur. Celui-ci passe nécessaire- ment par un rapprochement des deux structures. Nous donnerons également la pa- role à Pierre Tapie, président de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE), qui nous fera part de sa vision du rapprochement entre les écoles et les universités. Bonne lecture ! Sébastien Chaillou, Élu au CNESER #188 Mai 2012 Spéciale grandes écoles

La lettre des élus #188

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La lettre des élus #188

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La lettredes élus

Une publication mensuelle de l’UNEF et de l’APFEE - 0,15 EurosN° de Commission Paritaire : 0108G82659 • ISSN : 1761-1547 // Directeur de publication : Sébastien Chaillou // Rédacteurs en chef : Yannis Burgat, Benoit Soulier // mail : [email protected] // tél : 01 42 02 25 55 // Impression : imprimerie Grenier RCS Créteil B 622.053.189

Actualités • Réforme du concours de SciencesPo Paris // IDEX de Toulouse

Dossier • Unifier l’enseignement supérieur pour démocratiser les écoles

Fiche pratique • Rôle des élus dans les grandes écoles

Interview • Pierre Tapie, Président de la CGE

Association pour la Formation des Elus Etudiants

APFEE

Bonjour à tous !

Ces derniers mois, dans le cadre des élections présiden-tielles, le débat public est revenu sur la question de la réussite dans l’enseignement supérieur et la diversité des étudiants au sein des grandes écoles. Pour faire état des propositions des élus « UNEF et association étudiantes » et des batailles à mener dans les conseils, la Lettre des Elus consacre ce mois-ci un numéro spécial aux élus étu-diants dans les Grandes Ecoles.

Si la qualité du diplôme dans les grandes écoles est indé-niable, l’accès à ces diplômes demeure réservé à une mi-norité. La massification de l’enseignement supérieur, qui permet aujourd’hui à plus de 2,3 millions de jeunes d’être étudiants, repose principalement sur les épaules des uni-versités. Les élus « UNEF et associations étudiantes », s’organisent dans chaque établissement pour réduire les inégalités entre les étudiants et démocratiser l’accès aux grandes écoles.

Le dossier du mois est consacré au rapprochement entre les universités et les grandes écoles. Les élus « UNEF et associations étudiantes » portent le projet d’unification de l’enseignement supérieur. Celui-ci passe nécessaire-ment par un rapprochement des deux structures.

Nous donnerons également la pa-role à Pierre Tapie, président de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE), qui nous fera part de sa vision du rapprochement entre les écoles et les universités.

Bonne lecture !

Sébastien Chaillou,Élu au CNESER

#188Mai 2012

Spéciale grandes écoles

L’Institut d’Etudes Politique de Paris va réfor-

mer son concours d’entrée en première année

à la rentrée 2013. L’objectif est de diversifier les

profils des étudiants. En effet, le ministère de

l’enseignement supérieur et de la recherche

oblige Sciences Po Paris à intégrer la procé-

dure Admission Post Bac. Cette exigence du

ministère impose alors une réforme en pro-

fondeur du concours d’entrée à l’IEP afin qu’il

s’organise avant les épreuves du baccalauréat.

Une remise à plat du concoursSuite à la volonté de la direction d’avancer la

date du concours au mois de mars, les élus

« UNEF et associations étudiantes » identifient

plusieurs risques. D’abord le risque que les

lycéens ne soient pas informés à temps de la

procédure d’entrée à SciencesPo et que seuls

ceux issus des milieux les plus favorisés s’y pré-

sente. Le risque également que les épreuves ne

soient pas en conformité avec ce que l’on peut

attendre d’un élève de terminale, renforçant

ainsi le poids des inégalités sociales entre les

lycéens et les étudiants inscrits en prépas pri-

vées.

Des avancées en faveur de la démocratisationTrois ans après la dernière réforme et malgré

des améliorations sur le format et le contenu

des épreuves, le concours reste encore com-

posé d’épreuves particulièrement discrimi-

nantes socialement. Durant plusieurs mois, les

élus « UNEF et associations étudiantes » ont

fait des propositions afin de réduire la sélection

sociale et ont obtenu de nombreuses avancées

sur le concours :

• Le placement des épreuves après les vacances

de février afin de permettre à tous les candidats

de bénéficier d’un temps minimal de révision.

• La suppression de l’épreuve de culture gé-

nérale fortement discriminante, car elle fait

appelle à des connaissances et une méthodo-

logie absente des cours de terminale.

• La possibilité de choisir entre plusieurs types

d’exercices (une épreuve documentaire et

deux dissertations) pour l’épreuve d’Histoire.

• Le rapprochement du contenu et de la forme

des épreuves avec le programme de terminale

afin que les classes de première et de terminale

restent la meilleure préparation au concours.

• La réduction de la durée et du coefficient

de l’examen écrit de langue socialement dis-

criminante ainsi que la suppression de la note

éliminatoire pour cette épreuve.

Aller plus loin dans la réforme du concoursAfin de diminuer le coût et le temps de dé-

placement des candidats, les élus « UNEF et

associations étudiantes » demandent que ces

changements soient accompagnés d’une dé-

localisation rapide des épreuves sur davantage

de sites.

Enfin, l’épreuve de langue doit avoir pour

objectif d’évaluer et non pas de sélection-

ner les étudiants. C’est pourquoi, les élus

« UNEF et associations étudiantes » de-

mandent la suppression de l’oral de langue

étrangère puisqu’une épreuve écrite de langue

existe déjà dans les épreuves d’admissibilité au

concours.

Paul Bernardet,

Elu au conseil de direction de SciencesPo Paris

L’ouverture sociale à SciencesPo Paris

REFORME DU CONCOURS

Suite au recensement des établissements pra-

tiquant des frais d’inscription illégaux et aux

courriers de rappel à l’ordre réalisés par les

élus UNEF et associations étudiantes, l’Institut

Polytechnique de Bordeaux (IPB), l’Institut Na-

tional Polytechnique de Toulouse (INPT), l’Ins-

titut Lillois d’Ingénierie Santé (IRIS) et Centrale

Paris ont annoncé la suppression de leurs frais

d’inscription illégaux ainsi que le rembourse-

Actualités des conseils

2

5 écoles suppriment leurs frais d’inscrip-tion illégaux

L’épreuve de chimie du concours d’entrée

à plusieurs grandes écoles (Polytechnique,

les Ecoles Normales Supérieures de Cachan

et Lyon et l’École supérieure de physique et

de chimie industrielles de la ville de Paris)

qui s’est déroulée le 17 avril 2012 a été an-

nulée. Le Comité de pilotage des banques

d’épreuves aux écrits communs de ces

écoles a annoncé qu’elle devra être repassée.

Selon lui, « une partie de l’épreuve de chimie

du concours Physique-Chimie n’était pas

totalement inédite ».

Grandes écoles : épreuve annulée

Actualités des conseils

3

Le 4 avril dernier, le conseil d’administration de

l’Institut National Polytechnique de Toulouse a

élu Olivier Simonin président de l’établissement.

Ce dernier souhaite changer la gouvernance et

la répartition des financements dans le projet

de fusion des établissements toulousains.

Un projet de fusion qui affaiblit le service publicLa fusion des écoles et des universités toulou-

saines a été un des 8 projets IDEX sélection-

nés par le « jury international » du Ministère de

l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

L’IDEX de Toulouse se verra attribuer une dota-

tion en capital de 750 millions dont seuls les

intérêts lui seront versés chaque année.

L’IDEX de Toulouse a été sélectionné par le

jury international pour son caractère élitiste.

Le projet de fusion propose de concentrer

les moyens sur une poignée d’étudiants et de

chercheurs dans le but de faire émerger un

pôle d’excellence capable de rayonner au ni-

veau international.

Un projet largement contesté lors des électionsLe projet de fusion s’est constitué sans aucune

concertation avec la communauté universi-

taire. Les dernières élections dans les écoles et

les universités ont démontré un rejet important

de ce projet tant chez les étudiants que chez

les personnels et les enseignants-chercheurs.

C’est notamment le cas à l’INPT ou les can-

didats de la liste « UNEF et associations étu-

diantes », opposés au projet de fusion, ont

obtenu 4 élus.

Le changement de président à l’INPT remet en cause le projet de fusion

Olivier Simonin, nouveau président de l’INPT

a relayé les inquiétudes des étudiants et per-

sonnels de son école et exige des ajustements

importants.

Le projet sélectionné par le jury international

prévoit la création d’une grande université fu-

sionnée sous le statut de Grand Etablissement.

Elle serait dirigée par un Conseil d’Administra-

tion (CA) unique avec une part importante de

personnalités extérieures. Selon Olivier Simonin

« Il faut s’interroger sur le rôle de cette struc-

ture : si elle n’est là que pour chapeauter, ce

n’est pas réellement un problème. Si elle a un

rôle politique fort, il faut en revoir la représen-

tativité. »

La version initiale du projet IDEX proposait éga-

lement la création de « chaires d’excellence » qui

monopoliseraient des moyens important pour

quelques scientifiques. Cette vision est égale-

ment dénoncée par le président de l’INPT pour

qui il s’agit d’une « vision particulière de l’ex-

cellence qui ne correspond pas à l’ingénierie »

Il exige que ce projet soit adapté à toutes les

communautés scientifiques.

Les batailles à venir pour faire avancer les droits des étudiants en école Ce changement de cap à l’INPT vient s’ajouter

à l’élection de nouveaux présidents à Toulouse

2 et Toulouse 3 qui critiquent également vive-

ment le projet de fusion. Le renouvellement des

Le nouveau président de l’INPT souhaite un « ajustement »

IDEX DE TOULOUSE

conseils des universités et des écoles a ainsi

permis de changer la donne et de suspendre la

signature de la convention entre les établisse-

ments toulousains et le ministère.

Les élus « UNEF et associations étudiantes »

entendent bien poursuivre leur action contre le

projet de fusion et faire entendre leurs reven-

dications.

Il est important de s’assurer une gouvernance

démocratique et une répartition équitable du

budget dans la nouvelle université fusionnée

mais il est également fondamental de faire pro-

gresser les droits des étudiants en école.

La fusion des établissements toulousains doit

également permettre d’assurer des passerelles

entre écoles et universités. D’un côté, pour que

les étudiants des universités puissent intégrer

en cours de route les cursus d’ingénieurs. De

l’autre côté, pour que les étudiants en écoles

puissent intégrer des masters universitaires,

en particulier pour pouvoir se tourner vers la

recherche.

La fusion doit également être l’occasion d’har-

moniser vers le haut les droits de tous les étu-

diants. Les étudiants à l’université bénéficient

de droits comme des frais d’inscription faibles

et régulés, ou des modalités d’examens qui per-

mettent la réussite des étudiants (rattrapages,

compensation entre les UE…). Les étudiants en

écoles doivent pouvoir bénéficier de ces droits.

William Martinet

élu au CNESER

tions d’études sont nettement supérieures à

celles des universités. Les étudiants au sein

des écoles ne bénéficient quant à eux pas des

mêmes droits.

Les élus « UNEF et associations étudiantes »

portent le projet d’unification de l’enseigne-

ment supérieur. L’unification de l’enseigne-

ment supérieur reste à terme le seul outil per-

mettant d’assurer à la fois l’égalité entre les

étudiants et la qualité de toutes les formations

dispensées. Cette unification ne pourra pas se

faire sans un processus de démocratisation

des grandes écoles qui passe par la mise en

place de mesures visant à favoriser l’accès de

tous aux écoles. Cette unification doit débuter

par un processus de rapprochement entre les

écoles et les universités incluant un rappro-

chement des travaux de recherche, des for-

mations, ainsi que des moyens qui sont attri-

bués aux différents établissements.

Démocratiser les grandes écolesAfin que les universités ne soient pas les seules

à assumer la démocratisation de l’enseigne-

ment supérieur, il est déterminant de modifier

le fonctionnement des écoles.

Démocratiser les concours

La sélection sur concours est le premier verrou

social à l’entrée des écoles. Les concours de-

mandent généralement la maitrise de connais-

sances qui ne sont pas enseignées et qui

dépendent du capital culturel acquis par l’étu-

diant. Ceux qui souhaitent intégrer des écoles

sont obligés d’avoir recours à une formation

supplémentaire comme les prépas, souvent

privées et hors de prix. Afin de démocratiser

les concours, leurs contenus doit correspondre

au niveau d’études antérieur à l’intégration de

l’étudiant dans l’école. Les concours doivent

Unifier l’enseignement superieur pour démo-cratiser les écoles

GRANDES ECOLES

Dossier du mois

4

Mettre fin à la bipartition de l’enseignement supérieur

L’accès aux grandes écoles reste fermé au

plus grand nombre et les universités, qui ac-

cueillent tous les publics, supportent seules la

démocratisation de l’enseignement supérieur.

Les voies d’excellence que représentent les

écoles sont sélectives et la plupart du temps

payantes créant ainsi une forte reproduction

sociale. Si 21% des enfants de cadres accèdent

aux grandes écoles, ce taux baisse fortement

pour les autres catégories socioprofession-

nelles : 4% pour les enfants d’employés et 1%

pour les enfants d’ouvriers.

Ce système crée aussi des inégalités fortes

entre les étudiants. Les écoles drainent la

majorité des financements tant publics que

privés (taxe d’apprentissage, frais d’inscrip-

tion) qui font que l’encadrement et les condi-

L’enseignement supérieur est aujourd’hui divisé avec d’un côté les universités et de l’autre les écoles. Cette bipartition de l’enseignement supérieur est aujourd’hui un frein à la démocratisation de l’enseignement supérieur et pose deux problèmes majeurs.

Aujourd’hui, dans le cadre de la restructu-

ration de la carte universitaire, de nom-

breuses écoles sont devenues des com-

posantes à part entière d’une université. A

titre d’exemple, la création de l’Université de

Lorraine regroupe les universités de Nancy

et de Metz ainsi que l’INPL (Institut National

Polytechnique de Lorraine) qui a intégré la

nouvelle université.

Cependant, ces rapprochements n’ont en

réalité rien fait avancer en matière d’unifi-

cation de l’enseignement supérieur puisque

les problématiques de mobilité, d’égalité

et de démocratisation restent inchangées.

Ainsi, la bipartition de l’enseignement supé-

rieur se retrouve toujours au sein des uni-

versités : les écoles concentrent les moyens

budgétaires alloués et continuent à mettre

en place de la sélection à leur entrée.

L’intégration des écoles dans les universités

pousse également les universités à changer

leur statut pour pouvoir librement sélection-

ner les étudiants et fixer les frais d’inscrip-

tion. Certaines composantes des universités

tendent également à reproduire la logique

d’écoles dans certaines filières comme le

droit ou l’économie, freinant d’autant plus la

démocratisation.

Les élus « UNEF et association étudiantes »

revendiquent l’unification du service public

de l’enseignement supérieur pour le démo-

cratiser. Il faut pour cela rapprocher les deux

structures : en démocratisant les écoles, et

en réduisant les inégalités entre les étu-

diants.

Zoom sur l’intégration des écoles au sein des universités

Dossier du mois

5

être gratuits pour qu’ils ne soient pas réservés

à une minorité d’étudiants. A titre d’exemple

le regroupement des concours qui permet de

passer un seul concours pour plusieurs écoles

au plus près de chez soi, est une véritable me-

sure en faveur de la démocratisation.

Démocratiser la préparation aux grandes

écoles

Au delà des méthodes propres de sélection

des grandes écoles, les préparations à l’entrée

sont aussi des freins à la démocratisation des

grandes écoles. Les classes préparatoires aux

grandes écoles demeurent aujourd’hui des

lieux de reproduction sociale, qui privent les

étudiants de milieux modestes de préparations

aux épreuves d’admission aux grandes écoles.

L’intégration des CPGE aux universités ainsi que

leur transformation en filières non sélective

sont des leviers essentiels pour permettre à un

maximum d’étudiants de préparer le concours

d’entrée aux grandes écoles.

Lutter contre la sélection financière

Que ce soit le prix des concours, des frais d’ins-

criptions ou le manque d’aide à la mobilité

pour étudier dans une grande école, la ques-

tion financière écarte chaque année de nom-

breux étudiants de l’accès aux écoles. La mise

en place de frais progressifs en fonction des

revenus des parents est une fausse bonne idée

car ils incitent les établissements à recruter des

étudiants issus des milieux les plus favorisés.

Lutter contre la sélection sociale à l’entrée des

grandes écoles suppose de fixer des frais d’ins-

cription au même niveau que ceux de l’univer-

sité.

Unifier le service public : rapprocher les universités et les écolesLa bipartition de l’enseignement supérieur crée

non seulement des inégalités en termes d’ac-

cès au diplôme et de qualité mais rend égale-

ment illisible l’offre de formation. Pour les élus

« UNEF et associations étudiantes », l’unifica-

tion de l’enseignement supérieur répond au

double enjeu d’égalité et de mobilité des étu-

diants.

Développer les coopérations entre écoles et

universités

Le contenu des formations entre les écoles et

les universités est très différent. Cela handicape

à la fois la lisibilité de l’offre de formation et

accentue la concurrence entre les écoles et les

universités. Une coopération plus poussée doit

permettre de mutualiser les bonnes pratiques

pédagogiques et de renforcer la qualité des

diplômes délivrés par les universités : suivis in-

dividualisés, pluridisciplinarité, années d’études

à l’étranger, stages… Cette coopération permet

également de renforcer la qualité des ensei-

gnements en écoles par leur adossement à la

recherche.

Améliorer les passerelles

La coopération entre les écoles et les univer-

sités doit encourager la mobilité des étudiants.

A tous les niveaux de sa formation, un étudiant

à l’université doit pouvoir rejoindre une grande

école. Les ENS ont d’ores et déjà développé les

doubles cursus qui offrent la possibilité pour

les étudiants en écoles de pouvoir également

poursuivre leurs études à l’université. Des pas-

serelles restent à développer pour permettre

à des étudiants de l’université d’accéder à des

écoles en cours de cursus.

Unifier les droits étudiants

Les élus « UNEF et Associations étudiantes »

ont obtenu l’année dernière un nouvel arrêté

qui garantit au niveau national des nouveaux

droits pour les étudiants pendant les examens

(rattrapages, compensation annuelle…). Celui-

ci ne s’applique qu’aux étudiants de licence à

l’université. Pour aller vers plus d’égalité entre

les filières, les mêmes droits étudiants doivent

s’appliquer dans l’ensemble des établissements

de l’enseignement supérieur.

Intégrer les écoles au sein des universités

L’unification du service public doit passer par

une intégration des écoles au sein des univer-

sités. Dans le cadre des fusions d’universités,

certaines écoles d’ingénieurs ont déjà été inté-

grées aux universités. Ces fusions n’ont pour

autant pas permis de réduire le fossé entre les

deux structures tant sur les droits étudiants que

sur la qualité des diplômes délivrés. Pour les

élus « UNEF et associations étudiantes », l’inté-

gration des grandes écoles au sein des univer-

sités doit donc s’accompagner de dispositifs

contraignants d’ouverture sociale et d’harmo-

nisation des droits étudiants.

Rattraper le retard des universités

Les grandes écoles tirent leur plus-value des

conditions d’études et de la qualité des ensei-

gnements qui y sont dispensés. Alors que l’in-

vestissement pour un étudiant en CPGE est de

15 240€, celui pour un étudiant à l’université

varient entre 5000 et 10000€ en fonction des

filières. Les universités sont en retard en terme

de qualité dans l’offre de formation, ce qui ex-

plique leur difficulté à permettre aux étudiants

d’obtenir un diplôme qui constitue une vraie

protection sur le marché du travail. Il est donc

urgent de l’Etat se réengage financièrement

dans les universités.

Yannis Burgat

Elu au CNESER

En direct des universités

Pourriez-vous nous présenter votre mouvement et votre position sur cette circulaire ?

Le Collectif du 31 mai s’est créé au mois de sep-

tembre 2011 suite à une prise de conscience,

permise par les réseaux sociaux, de probléma-

tiques nouvelles auxquelles se sont heurtés de

nombreux diplômés étrangers demandant le

changement de statut d’étudiant à salarié. A

l’origine, ce mouvement d’étudiants et de diplô-

més, étrangers ou français, s’est constitué pour

un partage d’expériences et une aide de proxi-

mité. Avec les nombreux soutiens qui se sont

créés autour de la cause des diplômés étrangers,

la vocation du collectif a évolué : sensibiliser

les décideurs et l’opinion publics au problème.

Notre revendication : le retrait de la circulaire

Guéant du 31 mai 2011.

La circulaire du 31 mai a été modifiée le 12 janvier. Qu’apportent ces modi-fications et sont-elles suffisantes pour vous ?

La modification de la circulaire le 12 janvier

2012 n’a rien changé en pratique : le flou et

l’arbitraire règnent toujours en préfecture.

Pire, les entreprises françaises se détournent

aujourd’hui des diplômés étrangers, voire des

étudiants en fin de cycle à la recherche d’un

stage pour valider leur formation. Il n’y pas eu

de modification majeure si ce n’est la régulari-

sation des diplômés sous le coup de la circu-

laire entre le 1er juin 2011 et le 12 janvier 2012,

toujours au cas par cas. En cela, la circulaire

du 12 janvier n’aura été qu’un coup de com-

munication visant à tuer la polémique. Sur le

terrain, seul le retrait de la circulaire du 31 mai

Interview de Fatma Chouaieb, porte parole du collectif du 31 mai

CIRCULAIRE GUEANT

constituera un symbole fort pour permettre

aux agents de préfecture de mieux traiter les

dossiers, aux entreprises de reprendre le re-

crutement de jeunes talents formés en France.

Les étudiants étrangers rencontrent de plus en plus de difficultés qu’elles soient financière, administrative ou pédagogique. Comment défini-riez-vous la situation des étudiants étrangers aujourd’hui ?

Le manque de transparence, d’information, les

délais interminables d’attente en préfecture

et la non délivrance de récépissés assurant

la légalité d’un séjour (provisoire ou non) en

France participent d’une politique particulière-

ment difficile vis-à-vis des étudiants étrangers

qui, sans le vouloir, se retrouvent dans une si-

tuation de précarité. Qui aurait pu croire qu’au

bout de 5 ou 6 ans d’études et de stages en

France, et après avoir décroché un emploi, un

jeune diplômé se retrouve sans papiers ? Une

précarité subie.

Pour finir, quelles revendications principales portez-vous auprès des pouvoirs publics ?

Nous portons comme revendication d’abord

l’abrogation de la circulaire du 31 mai mais

aussi la mise en place de titres de séjour étu-

diants et salariés pluriannuels. Nous voulons

également une clarté administrative renforcée

et l’aménagement de l’Autorisation Provisoire

de Séjour.

Propos recueillis par Morand Perrin

Elu au CNESER

Cette année a été marquée par une forte opposition de la communauté universitaire contre la politique du gouvernement à l’encontre des étudiants étrangers. En effet en moins de six mois, plusieurs textes sont venus remettre en cause les conditions d’accueil et de séjour de ces étudiants comme la circulaire du 31 mai, appelée aussi « Circulaire Guéant ».

Les élus « UNEF et associations étudiantes » se sont mobilisé aux côtés du Collectif du 31 mai. Ce collectif a été créé afin de défendre les diplômés étrangers des écoles victimes de cette circulaire. Nous donnons la parole à Fatma Chouaieb, porte parole du Collectif du 31 mai. Cette interview a été réalisé avant l’éléction de François Hollande qui s’est engagé à revenir sur la circulaire

6

Fiche Pratique #188

7

Alors qu’ils sont les premiers concernés par les

décisions relatives au contenu des diplômes

ou à la politique de l’établissement, les élus

étudiants sont souvent peu reconnus et da-

vantage considérés comme des délégués de

classe plutôt que des élus étudiants qui sont

forces de propositions.

Malgré les différences de fonctionnement des

établissements, les élus étudiants rencontrent

des difficultés communes. Alors que certains

dossiers nécessitent un minimum de connais-

sances techniques, les élus étudiants ne sont

pas formés sur les différents sujets qui sont mis

en débat. Ils se retrouvent contraints de vali-

der des projets sans avoir les conditions maté-

rielles pour se faire leur avis.

Très souvent mis au ban de toute concerta-

tions ou prises de décisions relatives à la poli-

tique de l’établissement, les élus étudiants

en sont pourtant les premiers concernés. Ils

doivent ainsi s’imposer pour faire entendre la

voix des étudiants dans les conseils.

Les batailles des élus étudiantsParfois confrontés à un manque de respect

de la démocratie dans les écoles, les élus étu-

diants ont de nombreuses batailles à mener

dans leurs conseils au sein des écoles. En

effet, les élus étudiants sont indispensables

pour pouvoir faire avancer les droits des étu-

diants.

Réformer le concours d’entrée La formation en école profite essentiellement

aux étudiants issus des familles les plus favori-

sées. Le concours d’entrée représente une sé-

lection sociale sévère dans l’accès aux grandes

écoles. Les élus étudiants doivent se battre

pour que dans chaque école, les concours

fassent l’objet d’une réforme au service de la

démocratisation :

• L’instauration de la gratuité du concours. Le

prix de l’inscription au concours est un frein

important pour les étudiants issus des milieux

modestes.

• Le contenu du concours doit se faire sur la

base des connaissances acquises au sein du

système éducatif afin de limiter la sélection

sociale entre ceux qui détiennent du capital

culturel et ceux qui n’y ont pas eu accès.

• Multiplier les centres d’examens dans plu-

sieurs villes universitaires pour réduire les

coûts financiers liés aux déplacements.

• Généraliser les concours communs. Les

concours communs à plusieurs écoles per-

mettent de réduire les coûts de concours pour

les étudiants et d’augmenter le nombre de

centres.

Faire progresser et unifier les droits étudiantsAujourd’hui, les droits étudiants au sein des

écoles ne sont pas réglementés nationa-

lement. Cette absence de cadrage permet

à chaque école de fixer ses propres règles,

entraînant des inégalités importantes entre

les établissements et les étudiants. Les élus

« UNEF et associations étudiantes » ont obte-

nu en juillet dernier une réglementation natio-

nale garantissant de nouveaux droits pendants

les examens (seconde session d’examens,

compensation annuelle…) pour les étudiants

de licence.

Les élus étudiants au sein des écoles peuvent

prendre appui sur cette arrêté pour faire pro-

gresser les droits dans leur établissement mais

également en obtenir d’autres avec :

Rôle des élus dans les grandes écoles

ELUS EN GRANDES ECOLES

• La généralisation de la seconde session

d’examens

• L’anonymat des copies

• Le droit de consulter sa copie et à la double

correction en cas de litige

• Le droit au redoublement

• La mise en place de service comme des lieux

de vie, la gratuité des polycopiés de cours etc.

Renforcer le rôle des élus étudiantsLes élus étudiants sont souvent réduits à une

position d’observateurs dont les avis ne sont

que peu pris en compte. Il est donc néces-

saire de rétablir une véritable démocratie afin

d’impliquer davantage les élus étudiants à

l’ensemble des prises de décisions. Pour cela,

il faut se battre pour :

• L’ouverture des commissions de l’établisse-

ment (sur les sujets de la vie étudiante, de la

santé et les droits étudiants) aux étudiants.

• La mise en place d’un Vice-président Etu-

diant comme dans les universités.

Yannick Sabau

Elu au CNESER

3 questions à...

LDE : L’enseignement supérieur fran-çais est caractérisé par une séparation entre les grandes écoles et les uni-versités. Comment avancer vers un rapprochement universités-grandes écoles et quels sont les leviers à mettre en place pour diversifier les publics qui accèdent aux grandes écoles ?

Ces séparations sont largement dépassées. Sur la

scène internationale, une large partie des grandes

écoles sont considérées comme des « Research

Universities », spécialisées en disciplines scien-

tifiques, technologiques ou managériales. La

spécificité française est plus de n’autoriser qu’un

usage très restreint par la loi du mot « université »,

d’interdire toute sélection à l’entrée de ce qu’elle

appelle université, et de disposer d’une large par-

tie du potentiel de recherche réservé à des cher-

cheurs des Etablissements Publics Scientifiques

et Techniques que d’avoir un double système

« Grande Ecole » et « Université ».

Aujourd’hui le nombre de passerelles entre les

deux univers est considérable, dans les deux sens.

N’oublions pas qu’au niveau Master, les « Grandes

Ecoles » délivrent 40% des diplômes français et

qu’un tiers des doctorats sont préparés dans leurs

laboratoires. La diversification des publics est de-

venue considérable sur le plan pédagogique (une

minorité des diplômés d’une grande école ont

fait une classe préparatoire par exemple) ; sur le

plan social, dès lors que l’on considère le niveau

Master, seul pertinent pour analyser les grandes

écoles, les biais sociaux sont les mêmes dans les

universités et les Grandes Ecoles.

LDE : L’année a été marquée par une polémique autour de la circulaire Guéant et des conditions d’accueil et de séjour des étudiants étrangers. La CGE a dénoncé cette circulaire. Quelles sont les propositions de votre conférence concernant l’ouverture

de l’enseignement supérieur aux étu-diants étrangers et leurs conditions d’accueil et d’études en France ?

La seconde « circulaire Guéant », en date du 13

janvier 2012, est le fruit d’un travail très coordonné

CPU, CDEFI et CGE face au gouvernement. Elle

améliore la loi du 24 juillet 2006, qui avait été lar-

gement inspirée par les ambassadeurs de France

et la CGE. Nous considérons qu’aujourd’hui, avec

cette loi et sa circulaire d’application du 13 jan-

vier, la France présente une réglementation ou-

verte vis-à-vis des étudiants étrangers. Ceux-ci

constituent une aubaine pour notre pays, immé-

diatement pour rendre la vie d’étudiant plus inté-

ressante, à long terme parce que ces milliers de

francophiles seront des acteurs de l’influence de

la France, culturelle comme économique.

L’enjeu est de convaincre les acteurs universi-

taires comme les pouvoirs publics que quand

le nombre d’étudiants augmente chaque année

de 7 millions dans le monde, en éduquer une

petite partie peut représenter une opportunité

extraordinaire pour la France. C’est ce que pro-

pose la CGE, en en accueillant chaque année 50

000 de plus pendant 10 ans. L’enjeu économique

représente, à la fin de ces 10 ans, 7 fois le grand

emprunt.

LDE : La gouvernance des grandes écoles est très variable d’un établisse-ment à l’autre, laissant plus ou moins de place aux élus étudiants. Comment les élus étudiants doivent-ils selon vous être associés à la définition des formations et des orientations straté-giques de leur école ?

La plupart des écoles intègrent des étudiants dans

leurs différentes instances de gouvernance, à des

titres divers. Il est important que les étudiants

participent à la gouvernance des écoles d’abord

sur les sujets où ils sont ou peuvent être acteurs

directs : évaluation des enseignements, vie étu-

... Pierre Tapie

diante, évolutions de l’architecture, organisation

et innovation pédagogiques, etc… qui corres-

pondent aux échéances de temps sur lesquelles

les étudiants peuvent être directement concernés.

Sur des sujets qui traitent plus d’orientations à

long terme, il faut veiller à ce que les étudiants

disposent du niveau d’information approprié pour

que leur avis soit sollicité sur des sujets parfois très

complexes. Leur jeunesse les rend indispensable

pour que la sensibilité de leur génération soit en-

tièrement prise en compte.

Sur certains sujets hautement techniques,

comme des stratégies de recherche ou des déci-

sions d’investissement scientifique lourd, il n’est

pas sûr que leur avis soit réellement solide et

autonome. Enfin il nous semble que les étudiants,

dont l’énergie principale est à priori investie dans

le contenu de leurs études, ne devraient pas avoir

un poids décisif dans les choix des dirigeants

opérationnels universitaires, eux même amenés

ensuite, en toute indépendance et professionna-

lisme, à déterminer les régulations et les conte-

nus pédagogiques auxquels les étudiants seront

directement soumis.

Propos recueillis par Jonas Didisse

Elu au CNESER

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Qu’est ce que la CGE ?La Conférence des Grandes Ecoles est une association qui rassemble 216 grandes écoles, 17 entreprises et 45 organismes. Elle est présidée actuellement par Pierre Tapie, directeur de l’ESSEC. Son rôle est de :

• Développer l’information interne l’entraide et la solidarité entre ses membres.

• Promouvoir les écoles, tant sur le plan national, que sur le plan international.

• Faire évoluer les formations, développer la recherche .• Effectuer les démarches d’inté-rêt commun auprès des pouvoirs publics.

// Président de la CGE