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Conférence Dr. Z. METREF La Microcirculation pulpaire 1) Données récentes sur la substance fondamentale 2) Vascularisation de la pulpe 3) Régulation des pressions intra-pulpaires 4) Microcirculation de la pulpe dentaire 4-1 : Architecture générale de la pulpe dentaire humaine 4-2 : Physiopathologie de la microcirculation pulpaire 4-2-1 : Fluide transdentinaire 4-2-2 : Stase 4-2-3 : Thrombose 4-2-4 : Inflammation 4-2-5 : Les capillaires 4-2-6 : Pression pulpaire 4-3: Contrôle de la microcirculation pulpaire 4.3.1. Régulation tonique du débit sanguin 4.3.1.1. Régulation métabolique 4.3.1.2. Régulation paracrine 1

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La Microcirculation pulpaire

1) Données récentes sur la substance fondamentale

2) Vascularisation de la pulpe

3) Régulation des pressions intra-pulpaires

4) Microcirculation de la pulpe dentaire

4-1 : Architecture générale de la pulpe dentaire humaine4-2 : Physiopathologie de la microcirculation pulpaire

4-2-1 : Fluide transdentinaire4-2-2 : Stase

4-2-3 : Thrombose4-2-4 : Inflammation4-2-5 : Les capillaires4-2-6 : Pression pulpaire

4-3: Contrôle de la microcirculation pulpaire

4.3.1. Régulation tonique du débit sanguin

4.3.1.1. Régulation métabolique4.3.1.2. Régulation paracrine

4.3.2. Régulation nerveuse de la circulation pulpaire

4.3.2.1; Système nerveux sensitif4.3.2.2. Système nerveux autonome sympathique

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4.3.2.3. Système nerveux autonome parasympathique

4.3.2.4. Interactions sensitives et autonomes

4.3.3. Régulation endocrine

5)   Hypothèses pathogéniques6)   Incidences cliniques

Bibliographie

1) Données récentes sur la substance fondamentaleSelon L.BAUME, la substance fondamentale n’a réellement commencé à être étudiée que par HJALMAR HOLMGREN (1940) : travaillant à l’aide de sa méthode de coloration métachromatique pour mettre en évidence les mucines tissulaires conjonctives des divers organes, il n’en a trouvé que dans les tissus peu

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développés : cartilage, pulpe dentaire, matrice de l’ongle, follicule pileux, papille rénale et cornée.PINCUS en 1950 a ajouté à cette liste la gelée de Wharton du cordon ombilical.Selon BENDER en 1978 la substance fondamentale est un matériau amorphe non structuré, interfibrillaire logé entre les cellules. Elle est composée de fluides provenant de plasma sanguin et de mucopolysaccharides ou plus exactement de glucose-aminoglycanes (GAGs) provenant des cellules pulpaires.Primitivement il y a quatre GAGs dans la pulpe humaine, ce sont des molécules hautement polymérisées linéairement : acide hyaluronique, sulfate de dermatan, sulfate de chondroïtine-4 et sulfate de chondroïtine-6. La substance fondamentale a une viscosité telle qu’elle donne au contenu endodontique une consistance gélatineuse semblable à celle de la gelée de Wharton du cordon ombilical. La consistance visqueuse ou la turgescence croît avec la polymérisation des colloïdes hydrophiles. Les colloïdes attirent l’eau, l’attachent au radical GAG ou bien, au contraire, la repoussent. Plus il y a des molécules d’eau liées, plus grande est la polymérisation.Par ailleurs, du fait que les GAGs retiennent l’eau dans les tissus et ne les libèrent pas, le tissu entier acquiert une certaine résistance à l’écoulement. Dans la pulpe, la présence associée de fibrilles collagènes fait que ce tissu est encore plus rigide. Il en résulte que le contenu et la nature des GAGs dans un tissu donné joue un rôle important dans la régulation de la perméabilité et des propriétés osmotiques d’un tissu ; par ailleurs il joue un rôle dans la diffusion de l’inflammation. Les réactions inflammatoires sont souvent observées histologiquement dans la région coronaire de la pulpe sans qu’il y ait inflammation de la pulpe radiculaire. La limitation de l’inflammation est due à l’état de haute polymérisation du tissu pulpaire visqueux. Cependant, si

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la cause de l’inflammation n’est pas réduite, la stase veineuse et l’ischémie continuent, ayant pour conséquence la nécrose cellulaire et la diffusion de l’inflammation est consécutive à la dépolymérisation. La diffusion circonférentielle de l’inflammation est limitée par la qualité de la substance fondamentale.

2) Vascularisation de la pulpe

La pulpe est un tissu bien vascularisé, environ 5% du volume pulpaire est occupé par les vaisseaux qui se répartissent dans un rapport 3/1, entre les vaisseaux de sortie (axes veineux) et d’entrée (axes artériels). Les artérioles pénètrent la pulpe, les veinules et les lymphatiques en sortent par le foramen apical principal. Les canaux latéraux et apicaux ainsi que ceux du plancher pulpaire sont autant de voies annexes de la vascularisation pulpaire.

Les vaisseaux aboutissent à un réseau capillaire sous-odontoblastique particulièrement dense au niveau coronaire et moins développé au niveau radiculaire. Cette architecture microvasculaire très caractéristique de la pulpe a été objectivée par des méthodes de moulage à la résine. Cette microcirculation améliore la diffusion des nutriments vers les odontoblastes engagés dans la synthèse dentinaire. De plus, grâce à l’efficacité du réseau capillaire sous-odontoblastique, toute substance qui pénètre dans la pulpe est captée par le système de surveillance immunitaire, neutralisée, puis absorbée et entrainée dans la circulation (clairance sanguine).

Les vaisseaux pulpaires ont des parois fines avec une présence discontinue de cellules endothéliales et des fenestrations. Cette configuration est adaptée aux fluides transcapillaires et facilite les échanges entre les éléments plasmatiques sanguins et le liquide interstitiel en fonction des pressions hydrostatique et osmotique efficaces (équation de Starling),

Pc – Pi =πp-πi

Pc = Pression hydrocapillaire

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Pi = Pression interstitielle

Πp = Pression plasmatique

Πi = Pression interstitielle osmotique

Les parois des vaisseaux pulpaires sont équipées de récepteurs alpha et béta-adrénergiques en contact avec les terminaisons nerveuses autonomes, aux propriétés vasoconstrictrices et vasodilatatrices, participant par ces mécanismes à la régulation du débit sanguin pulpaire.

Aux vaisseaux sanguins, s’ajoutent des vaisseaux lymphatiques impliqués dans la régulation de la pression osmotique pulpaire et participant aux fonctions immunitaires de défense. Les vaisseaux lymphatiques sont en particulier chargés d’évacuer les exsudats en dehors de la pulpe et participent au maintien d’une balance équilibrée des fluides pulpaires.

3) Régulation des pressions intra-pulpaires

La pression physiologique intra-pulpaire est estimée à 25-30mm de Hg, c'est-à-dire à 34-40 cm d’H20 (Van Hassel 1971). Il est essentiel de noter qu’il s’agit d’une pression positive qui détermine, dans les canalicules dentinaires, une pression liquidienne légère, mais constante, vers l’extérieur.

Des variations de 16-60mm Hg sont rapportées lorsque les conditions pulpaires deviennent pathologiques. Le réseau capillaire sous-odontoblastique présente une configuration particulière avec des circulations en boucle, des anastomoses artério-veineuses et des shunts capillaires. Cela permet, en cas d’agression, de dériver de la circulation, d’isoler la zone lésée et de circonscrire l’inflammation initiale (œdème et augmentation de la pression pulpaire tissulaire) dans la zone périphérique de la pulpe sans provoquer d’ischémie pulpaire.

Malgré le fait que la pulpe, contenue dans un espace incompressible, ne peut ni se dilater, ni rétrécir, le tissu

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pulpaire est capable de s’opposer aux surpressions engendrées par l’inflammation grâce à une forte capacité de réabsorption capillaire, en rapport avec la pression intrapulpaire permanente relativement élevée et la faible compliance du tissu pulpaire.

La compliance interstitielle représente le rapport entre les variations du volume interstitiel et la pression hydrostatique tissulaire. Dans la plupart des tissus, la compliance est élevée et tout accroissement des forces de filtration et/ou toute diminution des forces de réabsorption provoquent une accumulation de fluides dans le milieu interstitiel, ce qui se traduit par un œdème. Dans la pulpe, les fluides accumulés sont secondairement réabsorbés puis évacués par les vx lymphatiques ; toute variation même faible de volume induit une variation importante de pression, ce qui a pour effet de tendre à ramener les liquides sortant des capillaires (filtration) à leur point de départ, à l’intérieur du capillaire (réabsorption), limitant la formation de l’œdème. Ce système protecteur réduit la concentration des irritants dans le compartiment pulpaire tout en régulant la pression locale.

4) Microcirculation de la pulpe dentaire

La circulation sanguine peut être assimilée à un système de transport à deux voies :

- L’une artérielle, afférente, apporte aux cellules les éléments nutritionnels.

- L’autre veineuse, efférente, se charge des produits de dégradation issus du catabolisme.

Le passage d’un système à l’autre se fait au niveau des capillaires, véritable lieu géométrique du métabolisme où s’effectuent les transformations les plus subtiles : l’importance des microcirculations terminales en physiologie et en pathologie n’est certes plus à démontrer.

La pulpe dentaire animale ou humaine possède une circulation terminale particulièrement labile du fait de la fragilité générale de ses structures et de leur situation particulière : il n’existe pas

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dans l’organisme, d’autre système artério-veineux enfermé dans une cavité close, inextensible et pratiquement démunie, à l’âge adulte de circulation collatérale, représentée par les seuls canaux latéraux.

Il clair qu’en terme de conservation de la vitalité pulpaire, le facteur circulatoire est déterminant, qu’il s’agisse de l’âge, de dégénérescences variées ou de pathogénie pure, on retrouve toujours l’importance de l’élément vasculaire, principalement au moment du pronostic.

4-1 : Architecture générale de la pulpe dentaire humaine

Utilisant la microradiographie de contact et par projection Saunders a précisé l’architecture générale de la pulpe dentaire humaine chez l’adulte

L’artère apicale ou les artères pénétrant l’apex et les parois latérales de la racine tendent à se diviser presque immédiatement pour donner naissance à un faisceau d’artères pulpaires centrales ou principales, qui montent dans le canal dentaire et la chambre pulpaire en occupant une position centrale.

Le diamètre plus petit et le trajet rectiligne des artères les distinguent des veines, à la silhouette plus large et plus arrondie.

Les artères pulpaires principales sont au nombre de deux ou trois et il existe en général deux veines pulpaires principales, l’une drainant la partie supérieure de la pulpe, l’autre la partie inférieure, elles sont accompagnées de veines tributaires.

Le plexus capillaire périphérique s’étend de l’extrémité des cornes pulpaires à la zone apicale et présente un

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contour prédentinaire irrégulier : les anses capillaires isolées se situent dans des excavations à la surface de la dentine.

La densité en capillaires diminue dans la région apicale et le plexus capillaire périphérique se draine dans de larges veinules sous-jacentes dont le trajet est central ou souvent transverse, pour rejoindre les veines tributaires des veines principales.

Kramer a résolu le problème de la canulation des vaisseaux apicaux en proposant une technique de succion-injection permettant après déshydratation, de rendre la dent transparente et d’observer directement l’architecture vasculaire de la pulpe. La technique améliorée par M.Gal consiste à préparer une exposition pulpaire très étroite au niveau coronaire et à aspirer par cet orifice, d’abord une solution de citrate de sodium pour lavage, puis une solution d’encre de Chine diluée, également dans du citrate de sodium. La dent est alors rendue transparente avec un silicone (MS710) et observée au microscope stéréoscopique, ou photographiée.

Dans la plupart des pulpes, l’aspect obtenu est identique aux descriptions déjà connues : passage de vaisseaux par le foramen en direction occlusale et plexus capillaire périphérique.

Les principaux vx artériels observés sont relativement étroits, à parois lisses et suivent une trajectoire directe de l’apex vers la couronne ; dans bien des pulpes, ils ont tendance à se tenir à la périphérie donnant

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naissance à de nombreuses branches externes pour le plexus capillaire sub-odontoblastique.

Les veines sont beaucoup plus larges, leurs parois occupent une position centrale. A partir du plexus capillaire, le drainage veineux est représenté par un grand nombre de vx qui courent, obliques en dedans, vers la partie centrale et la partie apicale de la pulpe. Au niveau de cette dernière, les veines pulpaires diminuent en nombre et en nature.

Il n’est pas exceptionnel de trouver, dans les zones de bifurcation ou trifurcation radiculaire, des vx principaux traversant la dentine pour fournir à la pulpe plus de vx que le système vasculaire apical lui-même ; le drainage veineux peut suivre la même voie et les rapports entre la pulpe et le parodonte sont ainsi mieux compris (canal secondaire).

Dans les pluriradiculées on note une séparation des éléments vasculaires, une racine étant principalement artérielle, l’autre veineuse.

Dans bien des tissus, les circulations veineuses et artérielles sont réunies, en dehors des plexus capillaires, par des anastomoses artério-veineuses directes qui pourraient jouer un grand rôle dans la régulation locale du courant sanguin. La présence de schunts artério-veineux pourrait avoir une importance capitale pour la pulpe, car elle modifierait la conception que l’on a de la pathologie pulpaire, basée jusqu’ici sur l’étranglement apical des vx pulpaires et l’auto-thrombose qui s’inscrit au cours des processus inflammatoires.

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Ces schunts sont difficiles à mettre en évidence dans la pulpe dont ne peut canuler séparément les veines et les artères pour les injecter avec des masses colorées différentes ; Kramer a fourni l’écrasant travail de suivre sur ses préparations des artères et des veines, distinguées avec certitude, jusqu’à rencontrer de telles anastomoses .Très souvent, le plexus capillaire n’est présent que d’un côté du canal, l’autre étant occupé par les vx principaux.

Le plexus périphérique est avant tout sous-odontoblastique, mais un petit nombre d’anses capillaires pénètrent la couche odontoblastique et s’étendent parmi les cellules près de la face interne de la dentine : un certain nombre de ses anses donnent des projections irrégulières en direction externe ;

La couche odontoblastique et le bord interne de la prédentine sont parfaitement observés, point important, puisqu’il a permis de préciser les rapports des anses capillaires périphériques et des structures qui leur sont adjacentes.

La preuve d’anastomoses artério-veineuses à l’intérieur de la pulpe, la complexité du système vasculaire des pluriradiculées et la distribution du plexus périphérique en un seul côté du canal, sont des points dont l’intérêt est évident tant ils ont d’incidences cliniques.

La distribution du plexus capillaire paraît reliée à celle des odontoblastes ; sur les dents adultes, ces derniers n’existent souvent que sur un côté du canal, généralement le côté externe, et l’absence du plexus

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capillaire coïncide avec l’absence d’une couche odontoblastique.

Deux conclusions sont capitales : la séparation des principaux vx artériels, externes et veineux, internes et l’absence de plexus odontoblastique près du plancher de la chambre pulpaire des pluriradiculées ; ce dernier est l’un des points principaux d’apposition de la dentine secondaire.

4-2 : Physiopathologie de la microcirculation pulpaire

Pour mesurer la pression pulpaire, Poulard et col, ont eu recours à une méthode originale de plethysmographie directe de la pulpe dénudée par ablation de la partie coronaire de la canine du chien.

Dans une autre expérience, la pression a été enregistrée par une canule vissée jusqu’au contact de la pulpe selon la technique de Brown et Beveridge.

Pour les mesures du débit sanguin, ces mêmes auteurs ont enregistré le débit de l’artère mandibulaire alvéolaire à l’aide d’un débimètre électromagnétique en admettant l’hypothèse que le débit pulpaire varie comme celui de l’ensemble du territoire irrigué par la même artère.

Les tracés de la pression pulpaire indiquent nettement les oscillations systoliques et respiratoires de la pression artérielle. Les valeurs obtenues chez le chien varient de 20 à 125mm Hg avec une moyenne de 40 à 60mm Hg.

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Les mêmes auteurs ont confirmé que la stimulation électrique du ganglion cervical supérieur ou du bout périphérique sectionné du nerf dentaire provoquait une diminution de la pression pulpaire par un phénomène de vaso-constriction et la présence de terminaisons nerveuses noradrénergiques dans la pulpe dentaire.

En précisant le trajet et l’origine des éléments symptahiques vaso-constricteurs, ils ont montré :

Qu’une partie des fibres issues du ganglion cervical supérieur empruntait le trajet du nerf dentaire,

Q’un mois après l’ablation du ganglion cervical supérieur, la stimulation homolatérale du nerf dentaire provoquait toujours une vaso-constriction pulpaire démontrant la présence de fibres sympathiques non dégénérées dont les neurones se trouvent hors du ganglion supprimé et sont issus probablement des neurones ganglionnaires périphériques.

Que la stimulation des efférences du ganglion stellaire provoque une vaso-constriction au niveau pulpaire.De même l’excitation du nerf vidien ou du ganglion sphéno-palatin a permis de mettre en évidence une vaso-dilatation pulpaire et de démontrer la présence d’une innervation cholinergique.Les résultats de ces expériences permettent d’envisager la pénétration par voie transdentinaire, jusqu’à la pulpe, de médiateurs susceptibles de modifier la dynamique de la microcirculation lors des coiffages directs et indirects ou dans les stades

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initiaux d’une inflammation d’origine bactérienne, traumatique ou chimique.

4-2-1 : Fluide transdentinaire

Van Hassel a eu le grand mérite d’utiliser le premier la lumière incidente par fibres optiques pour l’enregistrement cinématographique, mais surtout de réussir à filmer, au cours d’une préparation chez le chien, le fameux fluide dentinaire. Ce fluide apparaît, sans contestation sous forme d’une bulle contractile et synchrone des pulsations cardiaques. La démonstration de son existence confirme la possibilité, évoquée par Brannström et Anderson, de phénomènes hydrodynamiques au niveau de l’organe dentino-pulpaire. Les incidences physio-pathologiques de cette démonstration sont capitales : Scheinin, pionnier en la matière, considère l’enregistrement de Van Hassel comme l’une des dates les plus importantes de la microscopie vitale appliquée à la sphère dentaire.

4-2-2 : Stase

Ce phénomène hémodynamique est évident à l’examen in vivo et riches de déductions pathogéniques. Le siège de la stase est essentiellement veinulo-capillaire : près des ¾ de la masse sanguine peuvent être répartis au niveau du système veineux, capable d’une grande adaptation aux circonstances du moment. La stase est en général secondaire :

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- A une élévation de pression du territoire veineux- A l’apparition d’un obstacle au courant sanguin

(thrombus)- A une contre-pression tissulaire accrue- A une chute du débit veineux ;

Les conséquences sont nombreuses :

- Elévation de la pression veineuse- Diminution de la vitesse circulatoire- Tendance à l’inversion du flux- Troubles trophiques- Evolution vers la thrombose définitive- Ouverture des anastomoses artério-veineuses.

La majorité de ces phénomènes a été observée en microscopie vitale.

4-2-3 : Thrombose

Les altérations de microcirculation jouent un rôle essentiel dans le déterminisme des thromboses ;

La présence d’un thrombus plaquettaire et fibrineux formé au niveau d’un vaisseau vivant est un fait fréquent à l’origine de manifestations locales et générales. En règle, le thrombus correspond à un clou plaquettaire fixé au niveau d’un endothélium lésé. Les causes et les mécanismes en sont trop nombreux ou trop complexes, mais le phénomène morphologique pur est très bien observé en microscopie vitale et certaines

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de ces causes immédiates peuvent être déterminées : la thrombose définitive d’un territoire survient systématiquement après une stase de trente minutes.

4-2-4 : Inflammation

Les modalités réactionnelles de la microcirculation, tant morphologiques que chronologiques, sont bien connues et aisément descriptibles en microscopie vitale :

- Une vasoconstriction artériolaire fugace- Une vasodilatation plus durable suivie d’une

accélération du courant sanguin et d’une augmentation de la pression capillaire.

- Le franchissement de la barrière vasculaire par le plasma

- Le ralentissement du flux sanguin et l’apparition de leucocytes avant leur diapédèse.

Ces phénomènes apparaissent dans un ordre chronologique précis. Jusqu’à la phase cellulaire, ils sont directement observables. Ils associent réactions vasomotrices, désordre de la perméabilité, phénomènes rhéologiques, phénomènes cellulaires.

Leur observation directe est d’un intérêt capital et doit amener une meilleure compréhension de la physiopathologie pulpaire, particulièrement en ce qui concerne la localisation de l’exsudation et l’apparition du phénomène d’hypérémie.

4-2-5 : Les capillaires

La plupart des capillaires observés le sont à la périphérie près de la région pulpo-dentinaire, dans la zone riche en cellules de Höhl, sous forme de boucles

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capillaires. Les capillaires d’un point de vue général, se rencontrent le plus souvent dans les régions de grande densité cellulaire, la demande fonctionnelle exigeant leur présence dans le plus grand nombre possible.

Selon Bender, la structure des capillaires périphériques diffère de celle des capillaires du corps principal de la pulpe. Les capillaires périphériques présentent des pores ou des fenestrations alors que ceux du centre de la pulpe n’en présentent pas. Cet état de fait sous-entend une relation sutructuro-fonctionnelle avec l’intense activité métabolique de la région des odontoblastes. Les fenestrations observées dans cette région correspondent à des espaces intercellulaires ouverts de la paroi capillaire qui permettent des transsudations importantes et rapides.

Avant d’aborder la microcirculation pulpaire, rappelons une notion générale : un capillaire au repos a une section d’environ 3µ et une longueur de 750µ, ce qui donne à leur paroi une surface de 15000µ carrés. Au repos, la vitesse du sang dans les capillaires est 0,3 à 0,5mm/s.

Lorsque la pulpe est au repos, les capillaires sont fermés. Dans ces conditions, le sang s’écoule des artérioles vers les veinules en évitant les capillaires, il emprunte les shunts artério-veineux.

Dans les tissus en état d’activité après demande métabolique (physiologique) ou irritation locale (pathologie) les sphincters précapillaires se dilatent

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et la pression intracapillaire s’élève neutralisant ainsi l’inertie de fermeture des capillaires qui désormais laissent passer le sang.

4-2-6 : Pression pulpaire

Il a été établi qu’il y a un rapport défini, direct, entre la pression capillaire et la pression intra-pulpaire. Une augmentation de la pression capillaire est habituellement suivie par une augmentation du fluide interstitiel. Ceci, est la conséquence de la dilatation des vaisseaux sanguins comme dans une réponse inflammatoire. Par ailleurs, une diminution du débit sanguin pulpaire entraîne une diminution de la pression intra-pulpaire.

On peut mettre en évidence une baisse de la pression intra-pulpaire en faisant une injection para-apicale d’anesthésique contenant un vaso-constricteur fortement concentré.

Un point intéressant rapporté par Bender, est que la baisse de la pression intra-pulpaire consécutive à une anesthésie locale avec VC est sans conséquence nocive sur la pulpe. Ce fait constaté cliniquement peut l’être aussi histologiquement ; plusieurs explications sont possibles :

- Il est possible que la résistance à cet effet de la baisse de pression intra-pulpaire puisse être attribuée au métabolisme anaérobie de la pulpe

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contenant une dérivation pentaphosphate lui permettant de fonctionner sous divers degrés d’ischémie.

- En complément de ce dernier point, il a été montré que la pulpe peut survivre durant une période de 5h après dépression d’oxygène.

Les variations du déplacement sanguin à l’intérieur de la pulpe après vasoconstriction ou vasodilatation n’affectent pas le volume sanguin, simplement, le sang se déplacerait des capillaires actifs dilatés vers les veinules et leurs anastomoses avec pour conséquence des capillaires vides et passifs, ou bien au contraire, le sang se déplace des méta-artérioles vers les capillaires passifs à travers les sphincters dilatés. Le sang se trouve tout simplement déplacé d’une région de la pulpe à une autre pour satisfaire aux besoins tissulaires que ce soit dans les conditions de repos ou de stimulation.

- L’augmentation de la pression intra-pulpaire qui se produit après une irritation ou une blessure de la dentine, se produit seulement en regard du site spécifique du stimulus, en général en périphérie de la pulpe qui est riche en capillaire, toutes les autres régions de la pulpe, ne montrant aucune augmentation de pression.

- Une augmentation de la pression intra-pulpaire est attribuée au relâchement des sphincters précapillaires et à un accroissement de la perméabilité. Chacun de ces facteurs produit une augmentation du volume des fluides tissulaires, cependant la pulpe est encastrée dans un

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logement rigide ; un accroissement du volume interstitiel entraîne celui de la pression intra-pulpaire. Cette explication proposée par Van Hassel, quand elle est couplée avec la mesure différentielle de la pression de la pulpe entre les régions enflammées et non enflammées de la pulpe, représente la base de la physiopathologie pulpaire. C’est cette hypothèse d’une augmentation de la pression tissulaire qui dénie le concept de l’étranglement apical de la pulpe.

- Van Hassel a donné pour dents normales, des pressions de l’ordre de 8 à 15mm Hg avec une moyenne de 10. Pour lui, une dent en état de pulpite réversible ne dépasse pas 15mm Hg, en état de pulpite irréversible, la pression atteint environ 34mm Hg, une dent à pulpe nécrosée présente une pression égale à zéro.

4.3. Contrôle de la microcirculation pulpaire

4.3.1 Régulation tonique du débit sanguin

Les variations de flux sanguin sont difficiles à mettre en évidence en conditions basales, mais la pulpe, comme les autres tissus de l’organisme, est soumise à des influences régulatrices métaboliques, nerveuses, paracrine /endocrines, et immunitaires. Les cellules actives dans ce processus sont nombreuses. Les cellules musculaires lisses de la paroi des artérioles et des veinules, les cellules endothéliales artériolaires et capillaires jouent un rôle actif. De plus, les cellules endothéliales sont réunies par des gap junctions qui permettent de les coupler et de se comporter comme une unité fonctionnelle en cas de stimulation (de Wit et Griffith 2010). Le rôle des péricytes qui les entourent

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est de plus en plus exploré. Ils peuvent réguler la circulation capillaire via le glutamate dans d’autres modèles de circulation terminale comme la rétine (Peppiattet al. 2006, Puro 2007). Par ailleurs des travaux récents indiquent que les hématies pourraient participer aussi à cette régulation (Jensen 2009) : parallèlement à leur rôle d’apport d’oxygène aux tissus, elles peuvent agir comme des capteurs d’activité métabolique et modifier en retour le débit sanguin ; en effet, le diamètre des capillaires fins est parfois peu supérieur à celui des GR, voire inférieurs et dans ce cas les GR s’y meuvent grâce à la contraction de leur cytosquelette. La faible vitesse de déplacement des GR dans les capillaires et la proximité des parois vasculaires favorisent ce rôle de senseur, qui fait par ailleurs intervenir la désoxygénation de l’hémoglobine, l’ATP et le NO (Jensen 2009, Kleinbongard et al. 2007).

4.3.1.1. Régulation métabolique

Les besoins métaboliques de la pulpe en conditions normales correspondent principalement, outre à l’entretien du tissu, à l’activité dentinogénétique des odontoblastes qui nécessite un apport en nutriments et en oxygène important. Yu et al. (2002) ont montré chez le rat une consommation hétérogène de la pulpe en O2, plus élevée au niveau périphérique où sont les odontoblastes. La consommation moyenne à ce niveau était de 3.2+/-0.2 ml O(2)/min pour 100g de tissu, un chiffre voisin de la consommation cérébrale. Il a par ailleurs été montré que les variations gazeuses - diminution de O2 et augmentation de CO2- induisaient une augmentation du flux sanguin (Okabe et al 1990, Yu et al. 2002). D’autres molécules comme l’ATP ou des ions (H+) produites

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par activité cellulaire peuvent influencer la microcirculation (Berggreen et al.2003).

4.3.1.2. Régulation paracrine (autacoïdes) :

Le système circulatoire est influencé par des molécules vaso actives produites ou libérées à proximité nommées autacoïdes. Ce sont principalement des peptides (ET1, BK) et des éicosanoïdes, dérivés de l’acide arachidonique (PGs, leucotriènes, thromboxanes).

L’ET11 est un neuropeptide sécrété par l'endothélium vasculaire à partir de molécules précurseur clivées par l’enzyme NEP2 qui dégrade également d’autres peptides comme la SP. Elle a un effet vasoconstricteur puissant au niveau de la pulpe dentaire (Yu et al. 2004, Berggreen 2003). C'est également un stimulant de la prolifération cellulaire, de la fibrose et de l'inflammation. Elle se fixe principalement sur le récepteur à ET de type A (R-ET A) exprimé à la surface des cellules musculaires lisses de la paroi des artères

Bradykinine: la BK a des effets différents selon les tissus. Au niveau des capillaires, c’est un puissant vasodilatateur dépendant de l’endothélium, dont les effets sont médiés par le NO après activation des récepteurs B1. Les taux de BK sont élevés dans les pulpites irréversibles . La BK agit directement sur l’endothélium vasculaire mais également sur

1 ET1=endothéline 1. L’ET1 se fixe également sur le récepteur R-ET B exprimé à la surface des cellules endothéliales et qui entraîne une légère vasodilatation. Dans ce cas, les cellules endothéliales produisent plus de monoxyde d'azote (ou NO) a effet relaxant sur les cellules musculaires lisses voisines.

2NEP= endopeptidase neutre

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les neurones sensitifs en amplifiant la libération de neuropeptides. Elle est par ailleurs fortement algogène. Comme l’histamine, elle augmente la perméabilité vasculaire, et sa libération provient des veinules plutôt que des artérioles.

Eicosanoïdes : les dérivés de l’acide arachidonique issu de la dégradation des lipides membranaires peuvent également modifier la vascularisation. L’administration de PGE2 par exemple augmente le flux sanguin, et amplifie l’effet de la bradykinine. L’anandamide, un endocannabinoïde, qui module également l’activité des récepteurs TRPV1 a des effets vasodilatateurs (Movahed et al. 2005, Taddei S 2005)

NO ; le NO est synthétisé à partir de l’arginine par la NOS (Nitric oxyde synthase) par les cellules endothéliales, les macrophages et les neurones. Il joue un rôle dans la régulation basale du flux sanguin pulpaire mais ne semble pas impliqué dans la régulation phasique (Kerezoudis 1993).

Autres substances : certains composés encore mal identifiées comme l’EDHF 3 semblent jouer un rôle important, et particulièrement dans les vaisseaux les plus petits. Ils n’ont pas encore été recherchés dans la pulpe.

Adénosine : l’adénosine est une base purique qui joue un rôle important dans les transferts d’énergie cellulaire. Elle exerce des effets vasodilatateurs (Yu et al 2004 ).

4.3.2. Régulation nerveuse de la circulation pulpaire

3EDHF :(endothelium-derived hyperpolarizing factor). sous ce nom sont sans doute réunis plusieurs composés différents dont l’action est similaire.

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4.3.2.1. Système nerveux sensitif

Dans un tissu sain, les fibres nerveuses peuvent présenter une activité faible spontanée ou déclenchée par des stimulations locales sans que celles-ci ne soient nécessairement perçues par la conscience car trop faibles pour passer le barrage des filtres synaptiques centraux. Cependant, l’influx nerveux pouvant se propager dans les deux sens, des PA reviendront vers la périphérie dans les terminaisons collatérales à la zone d’excitation par excitation rétrograde. Il en résultera la libération a retro de neuropeptides vasoactifs par un phénomène nommé réflexe d’axone.) Les molécules libérées telles que la SP 4, neurokinine A et CGRP exerce un effet vasodilatateur tonique sur les vaisseaux sanguins Kim 1990, Heyeraas et al, 1994, Berggreen et Heyeraas 1999a et b). Le mécanisme de ces effets est différent selon les neuropeptides. Substance P et NKA peuvent activer l’enzyme NOS qui synthétise à partir de l’arginine le monoxyde d’azote (NO), aux propriétés relaxantes sur l’endothélium vasculaire; le CGRP exerce son effet via un mécanisme NOS indépendant (Hsu et al. 2003). D’autres molécules telles que le glutamate semblent exercer aussi des effets vasodilatateurs par réflexe d’axone (Hofman et al. 2003, Braud et al. 2010).

4.3.2.2. Système nerveux autonome sympathique

L’élément principal de la vasoconstriction locale est assurée par le système sympathique (Scott et al. 1972, Kerezoudis 1992). Ces fibres exercent leur effet via des catécholamines (NA, A DA) et des neuropeptides (NPY). Les catécholamines se fixent principalement sur des récepteurs adrénergiques alpha 1 et alpha 2 , et 4Substance P

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dopaminergiques (D1-D6) des parois vasculaires des artérioles et veinules avec des effets principalement vasoconstricteurs (Yu et al. 2002). Ils se fixent aussi en préjonctionnel sur les terminaisons nerveuses et exercent un rétrocontrôle de la libération de NA. La quantité de catécholamines varie selon l’état inflammatoire ou non de la pulpe (Nup et al. 2001). Le récepteur Y1 du neuropeptide Y (NPY) a été détecté sur les parois des vaisseaux pulpaires de dents non cariées. Sur les dents cariées, le R-Y1 a été observée sur les fibres nerveuses et des cellules inflammatoires (El Karim 2006). Il y a donc une modulation de l’expression du Y1 en réponse à la pénétration carieuse, suggérant donc un rôle dans le contrôle de l’inflammation pulpaire. Par ailleurs Gibbs et al. 2008 ont montré que l’activation du récepteur Y1 entraîne une inhibition de l’activité des nocicepteurs TRPV1 de la pulpe pouvant peut-être expliquer pourquoi des pulpes enflammées ne sont pas nécessairement douloureuses.

4.3.2.3. Système nerveux autonome parasympathique

Récemment Borda et al. 2007 puis De Couto et al. 2009, ont établi les preuves fonctionnelles d’un contrôle cholinergique de l’activité vasculaire par des récepteurs muscariniques, via le NO et les PGs, dépendant de l’inflammation. La libération d’Ach entraîne la stimulation de récepteurs muscariniques présents sur l’endothélium vasculaire les fibroblastes, et les macrophages. Dans l’endothélium la stimulation des récepteurs muscariniques entraîne la production de NO via l’activation de la NOS. Le NO diffuse vers les cellules musculaires lisses et entraîne leur relaxation.

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L’activation des récepteurs m-Ach des macrophages et fibroblastes entraîne la libération de PGE2, elle aussi vasodilatatrice.

4.3.2.4. Interactions sensitives et autonomes

Des interactions entre fibres autonomes et sensitives existent aussi, qui permettent de réguler plus finement la vascularisation) (schéma Olgart NANC). Les fibres sympathiques par exemple exercent un effet inhibiteur sur la libération de neuropeptides via un mécanisme adrénergique et NPY dépendant (Kerezoudis et al, 1993a, 1993b, Olgart et Kerezoudis 1994).

D’autres études ont montré que cette libération nerveuse de neuropeptides pouvait être modulée positivement par d’autres molécules comme la bradykinine ou les PGE2. Kerezoudis et al. 1995 ont également montré que la sérotonine 5HT, d’origine non sympathique (sensitive plaquettes?) modulait la vasoconstriction induite par les catécholamines (NA, DA) du système sympathique via des récepteurs 5-HT1. Yu et al. 2002 ont montré que l’Ach exerçait un effet vasodilatateur mais sur des vaisseaux contractés au préalable.

D’autres mécanismes existent certainement et suggèrent des interactions encore plus complexes. A titre d’exemple, certains canaux TRP présents sur les fibres nerveuses sont présents sur les vaisseaux et modulent le tonus vasculaire (Di et al. 2010).

4.3.3. Régulation endocrine

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La pulpe est sensible à l’action de molécules hormonales. Comme indiqué précédemment, la pulpe contient des récepteurs aux catécholamines qui peuvent capter l’adrénaline circulante. Cependant cette composante semble faible par rapport à l’effet local des fibres nerveuses sympathiques. D’autres hormones comme l’angiotensine exercent un effet vasculaire dans la pulpe dentaire (Berggreen E, Heyeraas KJ. 2003, Souza et al. 2007).

Conclusion La pulpe dentaire est donc soumise à des influences vasoconstrictrices et vasodilatatrices qui permettent de réguler le débit sanguin et l’adapter aux besoins physiologiques. Les fibres nerveuses jouent un rôle important dans cette régulation, mais ne sont pas les seules. Les fibroblastes par exemple peuvent produire des molécules vasoactives. Il faut aussi remarquer que certaines molécules n’ont pas d’effet vasodilatateur ou vasoconstricteur mais un effet sur la perméabilité en modifiant le facteur k de l'équation de Starling ,comme l’histamine, ou de modification du facteur sigma de réflexion de la pression oncotique comme l’IL-1.

En conditions basales, le flux sanguin est donc régulé par différentes molécules bioactives d’origine diverses. En cas de situation de crise ou d’exposition à des agresseurs comme les bactéries, les paramètres hémodynamiques vont changer. Si la régulation du flux sanguin était traditionnellement vue comme les effets de réponses vasomotrices immédiates et d’adaptations à long terme via des changements structuraux incluant

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le remodelage des vaisseaux leur raréfaction, la collatéralisation, et l’angiogenèse, de nouvelles données indiquent plutôt un continuum plastique qui supprime les frontières entre ces processus distincts en dessinant un lien commun (Martinez-Lemus et al. 2009). Au lieu de considérer le vaisseau sanguin comme une structure statique comprenant adventice, cellules musculaires lisses et endothélium, on peut le voir comme des cellules en constante adaptation à l’environnement local mécanique, hémodynamique, et neurohumoral. Les cellules musculaires par exemple peuvent modifier leurs attaches, entre elles et la matrice extracellulaire, permettant ainsi un ajustement actif de leur position dans le mur vasculaire. Les effets à court terme sont relayés par des changements dans l’organisation du système de cytosquelette et des molécules d’attachement, différents de l’activation initiale ((Martinez Lemus et al. 2009).

5 : Hypothèses pathogéniques

L’hypothèse de la strangulation apicale des vaisseaux au cours de l’inflammation étant abandonnée, il reste à expliquer la diffusion de l’inflammation à l’intérieur de la pulpe et à la relier aux réalités cliniques.

L’hypothèse actuelle a été élaborée par Van Hassel qui propose, pour la séquence des événements pathologiques dont la pulpe est le siège, le schéma ci-après.

Il est évident que les parois rigides de la dentine qui entourent la pulpe ne permettent aucune adaptation aux variations locales de la pression tissulaire, qui sont

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de toute évidence le paramètre le plus important de la physiopathologie pulpaire.

Irritation cliniqueInflammation pulpaire localisée

Augmentation locale de la pression tissulaire

Collapsus veineux stase ischémie nécrose locale

Libération d’agents inflammatoires intracellulaires

Troubles vasculaires circonférentiels

Augmentation de la pression tissulaire

Nécrose tissulaire additionnelle

Pulpite totale

6 : Incidences cliniques

La physiopathologie de la pulpe dentaire, apporte des modifications essentielles aux idées classiques, leur incidence sur l’élément clinique est loin d’être négligeable ;

On a longtemps considéré le courant sanguin pulpaire comme étant lent et engorgé, particularité attribuée à la constriction des Vx au niveau du foramen et considérée comme déterminante à l’égard de la circulation veineuse de retour. Il semble bien que ce rétrécissement apical soit dû au collapsus des vx survenant au moment de l’extraction des dents examinées et consécutif à

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ATTEINTE INITIALE

EFFETS LOCAUX

DIFFUSION

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l’hémorragie inévitable quelle que soit la rapidité de l’intervention.

De plus, la présence de nombreuses anastomoses parodontales avant l’entrée du paquet vasculaire dans le canal, et à l’intérieur même de celui-ci par l’intermédiaire des canaux accessoires, a été clairement démontrée par Kramer. Elles assurent à la pulpe une circulation collatérale de nature à prévenir l’autothrombose au niveau de l’apex, base théorique de la limitation des traitements conservateurs.

Il est évident d’autre part, que la pulpe possède un réseau capillaire périphérique très riche au niveau de la couche des odontoblastes et qu’il n’est pas rare d’y rencontrer des capillaires fenêtrés, comme partout où il existe la nécessité d’échanges métaboliques importants et rapides. L’importance de ce réseau périphérique diminue à mesure que s’accroît la formation de la dentine secondaire physiologique, toujours maximale au niveau du plancher caméral et le long des parois canalaires regardant l’espace interradiculaire des pluriradiculées. Il existe très certainement une relation étroite entre la physiologie de ces capillaires et la dentinogénèse qui justifie l’emploi systématique de techniques opératoires douces.

L’observation de la microcirculation pulpaire en microscopie vitale a pu préciser quelques notions essentielles à la connaissance des événements pathologiques dont la pulpe est le siège, car elle permet d’observer dans sa totalité la dynamique d’un phénomène et non pas l’une de ses phases ;

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L’hyperhémie par exemple, souvent décrite comme une entité nosologique, n’est caractérisée que par une augmentation de la vitesse du flot et non par des dilatations des parois vasculaires.

De même des vx vides n’indiquent pas obligatoirement un état de stase et l’on peut rencontrer des vx gorgés de cellules qui ne représentent pas une thrombose définitive.

Ces constatations ont une importance si l’on admet que les possibilités de défense d’un organe sont sous la dépendance de son potentiel métabolique, lui-même conditionné par l’état du réseau vasculaire local.

De toutes les expériences pratiques, c’est l’élévation de la température qui s’est avérée la plus dangereuse pour la microcirculation : elle entraîne un ralentissement du courant sanguin pouvant amener une stase. L’exposition de la pulpe est par contre moins dramatique, elle est suivie d’une stase d’environ 30 mn, précédant obligatoirement une thrombose locale définitive, mais sans incidence sur le reste de la circulation dans les conditions expérimentales.

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Les incidences cliniques de ces diverses constatations semblent évidentes en ce qui concerne le diagnostic et le traitement des pulpopathies. L’hyperhémie doit être considérée comme un simple stade momentané d’accélération du flot dont il est difficile de dire s’il s’accompagne ou non de signes cliniques.

La présence de quantités importantes de dentine néoformée dans la cavité pulpaire entraîne à coup sûr une diminution importante de la microcirculation. Les possibilités de défense sont donc réduites et l’apparition de douleurs dans de telles conditions est pratiquement synonyme de pulpectomie.

Pour cette raison, on préfèrera au cours des préparations, des techniques évitant tout dégagement de chaleur. En effet, plus une technique est traumatique, plus la formation de dentine secondaire réactionnelle est importante, anarchique et accompagnée de calcifications diverses au niveau des canaux. La microcirculation s’en trouve gravement affectée. Une technique non traumatique n’entraîne pas de modifications importantes au niveau des capillaires, et la formation d’une couche néo-dentinaire d’apposition lente et prolongée traduira une activité physiologique normale du tissu pulpaire, c'est-à-dire une calcification post-

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traumatique après ralentissement circulatoire local.

L’âge est un facteur essentiel sur le plan des incidences cliniques, il est évident que la vascularisation diminue à mesure qu’il augmente, avec une conséquence majeure au niveau de la pulpe : la disparition des canaux accessoires et donc de la circulation collatérale, par le jeu des appositions dentinaires et cémentaires. La même situation se retrouve en cas de traumatismes antérieurs.

Les indications des coiffages pulpaires se trouvent donc réduites avec l’âge et sur les dents antérieurement atteintes par la carie : la microcirculation n’étant plus en état de supporter une thrombose localisée ou une contamination éventuelle, possibilité réservée aux pulpes jeunes ou préservées dont la circulation collatérale et le volume total circulant autorisent au contraire tous les espoirs.

On peut évaluer l’état circulatoire de la pulpe par l’examen radiologique de la racine : un rétrécissement excessif signe un trouble circulatoire dont on devra tenir compte dans le choix thérapeutique.

Il semble que l’étude de la microcirculation pulpaire apporte un certain nombre de nouvelles connaissances

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qui limitent ou étendent les indications des traitements conservateurs de la vitalité pulpaire : si on apporte ces indications à des conditions locales bien définies il semble que l’état des tissus destinés à subir un traumatisme soit le facteur déterminant qu’il est possible d’apprécier en coordonnant les renseignements issus de l’examen clinique et radiographique.

Bibliographie

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