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MOUNA KNANI L’INFLUENCE DES FACTEURS ORGANISATIONNELS SUR L’APPARITION DU SYNDROME DE L’ÉPUISEMENT PROFESSIONNEL Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en sciences de l'administration pour l’obtention du grade de Maître ès sciences (M. Sc.) DÉPARTEMENT DE MANAGEMENT FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ADMINISTRATION UNIVERSITÉ LAVAL 2013 © Mouna Knani, 2013

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MOUNA KNANI

L’INFLUENCE DES FACTEURS

ORGANISATIONNELS SUR L’APPARITION DU

SYNDROME DE L’ÉPUISEMENT PROFESSIONNEL

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval

dans le cadre du programme de maîtrise en sciences de l'administration

pour l’obtention du grade de Maître ès sciences (M. Sc.)

DÉPARTEMENT DE MANAGEMENT

FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ADMINISTRATION

UNIVERSITÉ LAVAL

2013

© Mouna Knani, 2013

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i

Résumé

Cette étude s’inscrit dans le champ de recherche portant sur la gestion de la santé et de la

sécurité du travail. En particulier, ce présent mémoire examine les associations entre les

facteurs de l’environnement de travail, l’apparition du syndrome de l’épuisement professionnel

et l’intention de l’employé de quitter son travail.

Afin de mieux comprendre l’interaction entre les différents facteurs organisationnels et

l’épuisement professionnel, un cadre conceptuel est proposé. Ce cadre comporte sept variables,

notamment trois dimensions de l’épuisement professionnel (l’épuisement émotionnel, la

dépersonnalisation et l’accomplissement personnel), trois facteurs organisationnels (la demande

psychologique, la latitude décisionnelle et le soutien social) et l’intention de quitter le travail.

Le cadre conceptuel est testé à partir des données collectées, du 12 au 30 avril 2010, dans le

cadre d’une enquête réalisée par la Chaire en gestion de la santé et de la sécurité du travail

(CGSST). La population visée est celle des agents et conseillers de gestion des études

(utilisateurs du logiciel Banner) à l’emploi d’une université canadienne. L’échantillon final est

composé de 112 répondants. Onze hypothèses de recherche sont testées avec la méthode des

équations structurelles à l’aide du logiciel EQS (6.1). Les résultats montrent que les facteurs

organisationnels ont un effet pathogène sur la santé mentale, notamment sur l’apparition du

burnout. En sus, le syndrome de l’épuisement professionnel (la dépersonnalisation et

l’épuisement émotionnel) a un impact sur l’intention de quitter l’emploi.

Mots clés : Facteurs organisationnels; Épuisement professionnel (burnout); Intention de quitter

l’emploi; Agents et conseillers de gestion des études; Logiciel Banner; Méthodes des équations

structurelles.

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ii

Remerciements

D’emblée, je voulais entamer cette brève section par ce proverbe chinois « S'il n'est pas soutenu

par un tuteur, le jeune arbre se courbe facilement »

Ce mémoire n’aurait pu être réalisé sans la collaboration de certaines personnes que je tiens à

remercier chaleureusement.

Je tiens à remercier premièrement mon directeur de recherche, Monsieur Pierre-Sébastien

Fournier, de m’avoir supporté, encouragé et surtout d’avoir cru en moi. Entre autres, pour son

encadrement et ses conseils avisés au moment opportun. J’ai particulièrement apprécié son tact,

sa compréhension et son ouverture d’esprit par rapport à mes suggestions et mes propositions.

Je remercie Madame Caroline Biron, ma codirectrice, pour l’intérêt qu’elle a porté à mon

travail en me faisant l’honneur de le lire et de le commenter en profondeur.

Je remercie également, Monsieur Jean-Pierre Brun, chercheur chevronné et professeur titulaire

au département de management de l'Université Laval, de me faire l’honneur d’accepter d’agir à

titre d’examinateur de ce travail de recherche. Merci !

Je tiens à remercier également Madame Sylvie Montreuil, Professeure titulaire au département

des relations industrielles de l’Université Laval, pour avoir accepté de faire partie du comité

d’évaluation. Je vous remercie pour vos commentaires et votre disponibilité.

Je voudrais aussi témoigner ma profonde gratitude à mon cher mari, Riadh Ladhari. Je serais

toute ma vie redevable pour sa compréhension, son appui et son support incommensurable dans

les moments de doute. Sans toi, ce mémoire n’aurait jamais vu le jour. Tu as su me rassurer, me

réconforter et me pousser jusqu’au bout pour mener à terme ce mémoire. Les mots me

déguerpissent pour exprimer ma reconnaissance et mon amour envers toi !

Merci aussi à mes chers enfants d’avoir supporté mes humeurs et d’être si patients !

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iii

À la fin, je tiens à remercier mes chers beaux-parents et toute ma famille surtout ma mère

Wassila, c'est elle qui m'a mis sur la voie et ce que je suis et j’ai accompli, je lui dois. Et à mon

cher papa Fredj, même s’il n’est plus parmi nous, c’est à lui que je dédie ce mémoire. Papa tu

seras à tout jamais gravé dans ma mémoire et dans mon cœur.

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iv

Table des matières

Résumé .......................................................................................................................................... i

Remerciements ............................................................................................................................. ii

Listes des figures ......................................................................................................................... vi

Listes des tableaux ....................................................................................................................... vi

Chapitre 1 - Introduction générale ................................................................................................ 1

1. Mise en contexte ....................................................................................................................... 1

2. Problématique ........................................................................................................................... 5

3. Formulation des objectifs ........................................................................................................ 10

3.1. Objectif général ................................................................................................................ 10

3.2. Objectifs spécifiques ........................................................................................................ 10

4. Plan du mémoire ..................................................................................................................... 11

Chapitre 2 - Synthèse de la littérature ........................................................................................ 12

Introduction ................................................................................................................................... 12

1. Syndrome de l’épuisement professionnel .............................................................................. 13

1.1. Définition de l’épuisement professionnel (le burnout) .................................................... 13

1.2. Sources de l’épuisement professionnel ............................................................................ 14

1.3. Burnout : processus graduel et progressif ........................................................................ 19

2. Dimensions de l’épuisement professionnel ............................................................................. 21

2.1. Épuisement émotionnel .................................................................................................... 21

2.2. Dépersonnalisation ........................................................................................................... 22

2.3. Accomplissement personnel ............................................................................................. 23

3. Effets de l’épuisement émotionnel et de l’accomplissement sur la dépersonnalisation .......... 23

3.1. Effet de l’épuisement émotionnel sur la dépersonnalisation ............................................ 23

3.2. Effet de l’accomplissement personnel sur la dépersonnalisation ..................................... 24

4. Déterminants de l’environnement de travail et leurs effets sur l’épuisement professionnel ... 26

4.1. Demande psychologique .................................................................................................. 26

4.2. La latitude décisionnelle .................................................................................................. 38

4.3. Soutien social ................................................................................................................... 49

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v

5. Effet de l’épuisement professionnel sur l’intention de quitter ................................................ 59

5.1. Lien entre l’épuisement émotionnel et l’intention de quitter ........................................... 59

5.2. Lien entre la dépersonnalisation et l’intention de quitter ................................................. 60

Conclusion .................................................................................................................................... 62

Chapitre 3 - Méthodologie de la recherche ................................................................................ 66

1. Choix de la méthode ............................................................................................................... 66

2. Terrain de recherche ................................................................................................................ 68

2.1. Définition du cas à l’étude ............................................................................................... 68

2.2. Collecte des données ........................................................................................................ 69

2.3. Caractéristiques de l’échantillon des répondants ............................................................. 70

3. Instruments de mesure............................................................................................................. 72

3.1. Facteurs organisationnels ................................................................................................. 72

3.2. Épuisement professionnel ................................................................................................ 74

3.3. Intention de quitter ........................................................................................................... 76

Conclusion .................................................................................................................................... 77

Chapitre 4 – Résultats ................................................................................................................. 78

Introduction ................................................................................................................................... 78

1. Statistiques descriptives .......................................................................................................... 78

2. Fiabilité des construits ............................................................................................................ 83

3. Calcul des scores des construits et analyse des corrélations ................................................... 85

4. Test du cadre conceptuel et vérification des hypothèses de la recherche................................ 86

4.1. Ajustement du modèle...................................................................................................... 87

4.2. Vérification des hypothèses de la recherche .................................................................... 88

Conclusion .................................................................................................................................... 89

Chapitre 5 – Conclusion générale ............................................................................................... 91

Introduction ................................................................................................................................... 91

1. Rappel des objectifs et des hypothèses de la recherche .......................................................... 91

2. Discussion des résultats de la recherche ................................................................................. 92

2.1.1. Hypothèses confirmées ................................................................................................. 93

2.1.2. Hypothèses infirmées .................................................................................................... 99

3. Forces et limites de l’étude ................................................................................................... 103

3.1. Forces de l’étude ............................................................................................................ 103

3.2. Limites de l’étude ........................................................................................................... 103

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vi

4. Pistes de recherche future...................................................................................................... 105

5. Implications managériales ..................................................................................................... 106

Références bibliographiques .................................................................................................... 112

Annexe ...................................................................................................................................... 125

Listes des figures

Figure 1. Cadre conceptuel et hypothèses de la recherche ................................................................ 63

Figure 2. Résultats des relations entre les variables .......................................................................... 90

Listes des tableaux

Tableau 1. Rappel des hypothèses de recherche ............................................................................... 65

Tableau 2. Profil de l’échantillon final (n=112) ................................................................................ 71

Tableau 3. Mesure de la demande psychologique............................................................................. 73

Tableau 4. Mesure de la latitude décisionnelle ................................................................................. 73

Tableau 5. Mesure du soutien social ................................................................................................. 74

Tableau 6. Mesure de l’épuisement émotionnel ................................................................................ 75

Tableau 7. Mesure de la dépersonnalisation ..................................................................................... 76

Tableau 8. Mesure de l’accomplissement personnel ......................................................................... 76

Tableau 9. Mesure de l’intention de quitter ...................................................................................... 77

Tableau 10. Statistiques descriptives - Les facteurs organisationnels ............................................... 80

Tableau 11. Statistiques descriptives - L’épuisement professionnel ................................................. 82

Tableau 12. Statistiques descriptives - L’intention de quitter ........................................................... 83

Tableau 13. Fiabilité des mesures ..................................................................................................... 85

Tableau 14. Indicateurs d’adéquation du modèle.............................................................................. 88

Tableau 15. Résultats de la vérification des hypothèses de recherche .............................................. 92

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1

Chapitre 1 - Introduction générale

1. Mise en contexte

Le génie du cinéma, Charlie Chaplin, a été un véritable visionnaire ! (Grenier, 2004). Dans une

scène de ses grands classiques, un inventeur présente une machine, qui nourrit l’ouvrier

pendant qu’il travaille d’arrache-pied, en disant : « cette machine révolutionnaire permettra aux

patrons de maximiser la productivité de leurs employés tout en économisant de l’argent »

(Grenier, 2004, p-1). Nous sommes en 1936 ! Dans le monde moderne, un tel dispositif

n’existe pas en tant que tel mais l’idée de l’intensification du travail est bel et bien existante

(Grenier, 2004).

Jadis, à l’époque du taylorisme et du fordisme dominants, l’intensification de la charge de

travail résultait le plus souvent d’un effort physique ou de la simple accélération du rythme de

travail supposé homogène et maîtrisé (Stimec et al., 2007). C’est dire, l’organisation

scientifique du travail, promue par Taylor, s’est développée à partir d’une exigence de

stimulation au travail et l’augmentation de la productivité. Ensuite, elle s’est étendue pour

adopter une panoplie de principes qui reposent sur la spécialisation et la standardisation des

tâches, la réduction des aléas et le contrôle des résultats (Stimec et al., 2007).

Toujours vive dans le milieu de travail actuel, l’intensité de l’époque taylorienne, que l’on

pouvait mesurer en temps de cycles et en nombre d’opérations, a laissé de beaux restes, mais

elle n’est pas la seule qui soit en jeu. De nos jours, les exigences de l’environnement de travail

ne se limitent plus à l’effort physique, au travail répétitif et aux « cadences infernales »

fortement dénoncées dans les années 1970. Elles sont amarrées, entre autres, à d’autres formes

d’intensité comme la fixation des objectifs, la complexité des structures organisationnelles et

l’accélération du changement (Askenazy, 2004). Les employés sont soumis à des interventions

successives, à de la restructuration et à des exigences d’amélioration permanente dans leurs

prestations.

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2

La question de l’intensité au travail apparait donc comme un mouvement d’ensemble qui

dépend du déséquilibre du marché de travail, des mutations économiques et surtout des

innovations technologiques. Ces exigences de l’environnement de travail amènent les

entreprises à apporter des changements qui pourraient former une source directe de cette

intensification du travail (Askenazy et al., 2004). En fait, la venue des nouvelles technologies et

le développement de l'économie du savoir ont contribué à l'avènement de changements au sein

des organisations contemporaines (Saba, 2003). Ces changements organisationnels,

perceptibles par les mutations technologiques, ont entrainé à leur tour, des avantages

innombrables sur les modes de travail. Toutefois, maintes études ont montré qu’il existe aussi

le revers de la médaille et que la technologie a ses talons d’Achille ! (Brun et Dugas, 2005).

Dans cet ordre d’idée, la technologie a facilité le travail et a rendu l’exécution des tâches plus

rapide. En effet, elle est considérée comme un élément crucial de gain de temps et

d’amplificateur de rendement. Mais la technologie peut aussi être une arme à double tranchant !

Les avantages qu’elle recèle peuvent être amoindris par des exigences supplémentaires rendant

l’employé plus débordé (Therriault et al., 2004).

En fait, à cause d’une plus grande utilisation de la technologie, le volume de travail a augmenté.

Les problèmes de charge de travail attribuables à l’impact de l’utilisation de la technologie dans

les bureaux sont nombreux. Par exemple, les employés se trouvent parfois avec de nombreux

appels téléphoniques, une boite inondée de courriels et une boite vocale pleine de messages !

Sans oublier toutes les autres tâches urgentes à exécuter (Théry, 2006).

À la lueur de ce constat, Therriault et al. (2004) abordent le problème de la saturation cognitive

que vivent les employés dans leur milieu de travail. Les auteurs identifient ainsi une série de

facteurs à l’origine de ce phénomène dont la grande masse d’information, la multitâche et les

interruptions.

Ces nouvelles exigences du milieu de travail ont eu des effets directs sur les employés en les

exposant à des degrés de tension, de stress et à des situations de plus en plus contraignantes du

point de vue mental (Wilkins, 1998). En effet, au fur et à mesure que la technologie s'est

développée, les heures de travail n’ont pas diminué, mais s’est ajoutée une demande

psychologique additionnelle. Par conséquent, les employés deviennent davantage asociaux et

stressés (Therriault et al, 2004).

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Sur ce, lorsque la technologie s’instaure aux dépens des employés et ne répond pas à leurs

besoins, elle peut devenir une pierre d’achoppement et non pas un outil d’aide. Ainsi, Vézina et

al., (2011) soutiennent que les mutations connues dans le monde du travail, notamment l’essor

technologique, ont souvent été analysées pour leurs bienfaits économiques qu’elles procurent

aux entreprises. Toutefois, le progrès technologique peut comporter conjointement des effets

négatifs sur la santé et la sécurité des travailleurs.

Dans la même perspective, selon Saba (2003) les utilisateurs exposés à la technologie sont plus

vulnérables que d’autres travailleurs de ressentir du stress, de débordement ou de surcharge de

travail. En outre, l’enquête québécoise sur des conditions de travail, d’emploi et de santé et de

sécurité du travail (EQCOTESST) a aussi offert un portrait global de certaines conditions de

travail à risque et des conséquences sur la santé et la sécurité au travail (Vézina et al., 2011).

Dans cette enquête, les auteurs ont parlé du Technostress (stress technologique,

ou d’ergostressie) qui est un stress difficile à se défaire et qui s’induit chez une personne par

l’utilisation des technologies. À ce propos, selon Brod (1984) le technostress est « un

symptôme moderne lié à la non-adaptation d’un individu aux nouvelles technologies d’une

manière saine. » Le technostress se réfère donc à un état d’inquiétude et de crainte lorsqu’une

personne est confrontée à travailler avec une nouvelle technologie. Cette peur peut engendrer

des problèmes psychologiques et émotionnels (Wang et al., 2008).

Dans ce contexte, on peut dire que l’essor technologique, l’accroissement des pressions et les

nouvelles exigences rencontrées par l’organisation se répercutent sur ces employés « par le

biais d’une exigence à la flexibilité accrue et par une accélération du rythme et du flux du

travail » (Théry, 2006). En fait, les nouvelles méthodes du travail débouchent sur un processus

qui repose souvent sur des contradictions. On demande aux employés d’être de plus en plus

engagés envers leur entreprise, mais en assurant de moins en moins leur sécurité. On leur confie

des responsabilités croissantes, mais cette autonomie est souvent limitée par des contrôles

sévères (Askenazy, 2004). En outre, les délais stricts, emblématiques de l’intensification,

renforcent le poids des autres contraintes liées au milieu de travail et réduisent les marges de

manœuvre (Théry, 2006). À ce propos, Askenazy (2004) mentionne : « Naguère, le travail

taylorisé entraînait ennui, abrutissement, déqualification et frustration. Aujourd’hui, le travail

enrichi et autonome entraîne de nouvelles pathologies. »

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Dans ce contexte, à l’aube des années 1990, la réitération des problèmes de santé

psychologique au travail, incluant le stress, la dépression, le stress post-traumatique,

les troubles psychologiques et surtout l’épuisement professionnel, augmente de façon assez

significative. En 2010, l’association canadienne des compagnies d’assurances de personnes

affirme que les problèmes de santé psychologique comptent pour 60 % dans certains secteurs

d’activité contre 18 % en 1990. Dans la même année, l’enquête de Statistique Canada révèle

qu’un peu plus du quart des travailleurs québécois vivent un stress au quotidien et dans certains

secteurs, ce taux peut grimper à un travailleur sur deux1.

Ces nouvelles pathologies professionnelles, selon l’Organisation mondiale de la santé, résultent

des changements rapides survenus dans le monde du travail. Elles sont entre autres attribuées à

une charge psychologique intensive à laquelle s’ajoutent des facteurs organisationnels comme

le manque d’autonomie, le déséquilibre entre les efforts émis et la reconnaissance de

l’employeur, le faible soutien social, le sentiment d’iniquité et les conflits. En effet, les

nouvelles exigences de travail reposent sur le concept de « faire plus avec moins ». Pour

appuyer ce constat, Brun (2004, p. 5) souligne que :

« La pression du temps à gagner, de la qualité à livrer, de la complexité du travail à

accomplir croît sans arrêt. Avec tout ce stress, le travail est de plus en plus une

expérience négative pour les employés, nous supprimons nos pauses dans l’espoir

de finir plus tôt […] nous lunchons sur le clavier de l’ordinateur ! »

La question du mal-être au travail est devenue ainsi une réalité avec des conséquences de plus

en plus palpables ; elle ne se limite pas à des sensations de fatigue ou de pression, d’un

sentiment d’être délaissé ou d’être asservi. Les conséquences du travail débordent l’espace de

travail et elles s’étendent à la vie familiale et sociale de l’employé. Cette tendance a fait en

sorte que plusieurs pays occidentaux ont mis en place différentes législations pour donner aux

employeurs « le devoir d’assurer la sécurité et la santé des travailleurs dans tous les aspects

reliés au travail » (Théry, 2006). Ces législations reposent sur les principes de prévention

comme « éviter le risque », « adapter le travail à l’individu » et concilier « vie professionnelle

et personnelle ».

1 http://www.stacommunications.com/journals/pdfs/clinicien/clinicien%20pdf/drvezinaburnout.pdf (date de la dernière consultation : 22 juin 2012)

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5

2. Problématique

Le travail est peut-être, de toutes les activités humaines, celle qui a subi les transformations les

plus profondes (Beehr, 2010). Nouvelle pression, contrainte de temps, nouvelles normes de

qualité. En fait, aucun secteur n’échappe à ces nouvelles exigences. La pénibilité au travail ne

concerne pas seulement les métiers durs de l’industrie, de la construction, mais elle touche

presque tous les secteurs d’activité de façon souvent « plus dissimulée et moins facile à

décrypter ! » (Beehr, 2010). Si ce nouveau mode de travail se traduit par des opportunités pour

les uns, il est souvent source de « mal-être » pour les autres (Beehr, 2010).

Dans ce contexte, l’environnement de travail est une arme à double tranchant. En effet, il peut

avoir des conséquences positives sur la satisfaction et le bien-être des employés se traduisant

par une sensation d'épanouissement et de satisfaction générale sur le plan physique et mental.

Dans une perspective opposée, le milieu de travail peut représenter une source de fatigue

physique et mentale, qui dans la durée, induit des conséquences négatives sur la santé et

favorise l’apparition du burnout.

L’environnement de travail peut se présenter alors sous la forme de « conditions pathogènes »

qui jouent un rôle de médiateur entre la santé des employés et leur performance au travail

(Beehr, 2010).

À ce sujet, de multiples études, qui abordent le thème de la santé mentale des travailleurs,

démontrent que les employés souffrent de plus en plus dans leur travail et que l’épuisement

professionnel est devenu un « nouveau fléau » social (Beehr, 2010). Dans cette veine,

Statistique Canada rapporte qu’en 2009 près de 500 000 absences au travail sont dues

essentiellement au stress et aux maladies professionnelles dont la plus répandue est le burnout.

D’ailleurs, pour soutenir ce fait, des effets négatifs des conditions de travail sur la santé

physique et mentale ont été documentés par plusieurs chercheurs, notamment Karasek et

Theorell (1990) et Niedhammer et Siegrist (1998). Ces auteurs ont souligné les pouvoirs

pathogènes de certaines dimensions psychosociales de l’environnement de travail. Ils ont

développé deux modèles de risques psychosociaux, le premier « Demande-Contrôle » (Karasek

et Theorell, 1990) et le second « Effort-Récompense » (Niedhammer et Siegrist, 1998). Ces

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deux modèles sont reconnus et utilisés internationalement en raison de leur contribution

scientifique consistante sur la thématique du lien entre les facteurs sociaux et psychologiques

au travail et le développement de diverses pathologies professionnelles.

Par conséquent, la santé et l’épanouissement au travail sont devenus à la fois une priorité et un

défi pour plusieurs entreprises. Plusieurs mesures ont été mises en place pour favoriser un

milieu de travail sain. De nombreuses entreprises ont adopté ce qu’Askenazy (2004) appelle le

« productivisme réactif », un nouveau mode d’organisation du travail caractérisé par

l’injonction à la polyvalence, à la polycompétence, au travail en équipe, au soutien social et à

l’autonomie décisionnelle. Ce nouveau mode de travail est censé apporter une amélioration aux

conditions de travail. Cependant, certaines études démontrent que la pénibilité mentale et la

dégradation des conditions du travail se sont accrues depuis l’implantation de ces nouveaux

modes de travail. C’est ce qui ressort de l’enquête Conditions de Travail réalisée en 2005 par la

DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques) auprès

d’une centaine de salariés en France (Bué et al., 2007). En effet, l’émergence du productivisme

réactif s’est accompagnée de l’apparition de nouvelles exigences productives comme les

normes de qualité accrues, la gestion juste-à-temps, la haute performance, l’obligation de

résultats et la complexification des systèmes (Du Tertre, 2006). De plus, cette même étude

révèle que le travail à la chaîne progresse encore chez les ouvriers, 10% des ouvriers le

pratiquaient en 1998 et 11% en 2005. Aussi, un salarié sur quatre et quatre ouvriers sur dix

signalent que leur rythme de travail est prescrit par des normes de production strictes et des

délais à respecter (Bué et al; 2007).

Comme conséquences négatives de ces nouvelles exigences au travail, on rapporte l’apparition

de risques pathologiques liés au travail, notamment les troubles muscosquelettiques (TMS), les

maladies cardiovasculaires et la tension artérielle (Leplat, 1977; Siegrist, 1996; Theorell et

Karasek, 1996) et de certains problèmes professionnels comme la fatigue mentale, l’anxiété et

l’épuisement professionnel (Leiter, 1988). Dans les pays développés, on relate l’émergence de

certains phénomènes modernes comme le Karoshi ou la mort par surmenage (Haratani, 2006).

À la lueur de ce constat, l’environnement de travail a beaucoup évolué et semble avoir des

répercussions sur la santé mentale et physique des employés. Quand on parle de l’évolution

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dans le milieu de travail, on parle de plusieurs facteurs organisationnels, dont la demande

psychologique qui se caractérise par la transformation de la prescription.

L’appel à l’autonomie est un autre facteur émergent en milieu de travail. Ce dernier est un

leitmotiv des nouveaux modes de travail. Les employés ont la possibilité de choisir la façon

d’atteindre les objectifs organisationnels. Mais bien souvent, ils ne peuvent les faire qu’au prix

d’un contrôle strict des résultats. Certains chercheurs, pour qualifier ce nouveau mode de travail

un peu contradictoire, parlent « d’autonomie sous contrainte » (Poete et al., 1992).

La demande psychologique et l’autonomie peuvent s’accompagner aussi du soutien social. Ce

dernier est considéré comme étant un modérateur potentiel du stress au travail (Bekker et al,

2005). Il existe plusieurs types de soutien social (Karasek et Theorell, 1990) dont celui

provenant des collègues, des superviseurs ou des amis. Avec la propagation de la logique « up

or out » (soit tu montes, soit tu pars), qui alimente une sorte de rivalité entre les employés dans

l’organisation, les relations sociales au travail sont détériorées. La logique du « up or out »

incite les employés à se dépasser et à travailler pour « le système » afin d’assurer leur emploi

au sein de l’organisation. Par conséquent, les travailleurs se trouvent souvent dans des

situations de conflit ; la mentalité d’entraide et de mutualité est alors un peu absente, ce qui

peut être un générateur de stress (De Gaulejac, 2009). En fait le système managérial du « up or

out » suscite un modèle de personnalité rationaliste centrée sur l’action plutôt que sur l’entraide

et la socialisation. Bref, cette logique forge le profil d’une personne prête à se donner corps et

âme pour son travail et son entreprise et surtout prête à tout pour réussir même si cela se fait au

détriment des collègues du travail (De Gaulejac, 2009).

À la lueur de ces faits, on peut dire que le mal-être au travail est devenu un sujet d’actualité et

un centre d’intérêt de débats de société. De plus, l’environnement de travail est devenu une

préoccupation pour les employés qui tentent d’exprimer leur ressenti en recourant à un certain

vocable. Aujourd’hui, qui n’a pas entendu dans les couloirs, un ami, un collègue de travail, un

patron ou un inconnu se plaindre d’une demande psychologique incapacitante, d’un manque de

soutien ou d’une responsabilité importante. Aux expressions « je suis lessivé » ou « je suis

dévoré par le stress », ils ajoutent généralement des qualitatifs qui semblent renforcer l’idée de

l’intensification. L’adverbe « trop » ou le préfixe « sur » se rajoutent au mot « chargé » pour

adresser un message d’épuisement et de débordement (Niedhammer et al., 1998). Ou alors, ils

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utilisent des formules qui révèlent des capacités d’autodiagnostic « je dois tout faire en même

temps» », « j’ai beaucoup de responsabilités » ou « mes collègues me fassent la sourde

oreille ».

Cela amène à la réflexion qu’il ne s’agit pas de dénoncer le progrès. Le développement s’est

réalisé en matière de qualité de vie, de développement humain et de communication

(Niedhammer, et al., 1998). Cependant, il existe un revers à la médaille dans le monde du

travail.

De ce fait, la question du manque de latitude, de soutien social et de demande psychologique

forme une thématique majeure soulevée par les recherches sur l’environnement du travail. Dans

ce contexte, l’enquête de Vézina et al. (2011) permet de constater que l’environnement de

travail recèle des contraintes organisationnelles pour lesquelles il existe des évidences

empiriques démontrant leur pouvoir pathogène sur la santé mentale des employées. Cette étude

indique que près de 49 % des travailleurs visés par l’enquête rapportent une faible latitude

décisionnelle. En outre, près de 48 % d’entre eux bénéficient d’un faible soutien social au

travail, soit 18,0 % de la part des collègues et 25,3 % de la part de leur supérieur. Enfin, près de

38 % des travailleurs soutiennent qu’ils sont exposés à une forte demande psychologique. Cette

réalité est devenue un sujet de préoccupation pour la société moderne et de là vient l’intérêt de

l’étudier dans le cadre de ce mémoire.

En consultant la littérature sur la demande psychologique, cette dernière a été mise de l’avant

comme le facteur de risque majeur pour la santé psychologique et physique (Niedhammer et

Siegrist, 1998). Toutefois, même si la demande psychologique a fait l’objet de nombreuses

études dans plusieurs disciplines (par exemple, l’ergonomie, la psychologie, la sociologie et

l’épidémiologie), son étude reste assez réduite. Il est en effet surprenant de remarquer qu’il

existe une rareté de cadres intégrateurs qui englobent les caractéristiques de l’environnement du

travail et leurs conséquences sur l’individu et l’organisation.

La littérature, bien que riche en études théoriques et en applications empiriques, fournit pour le

moment une vision assez réductrice des causes et des conséquences réelles de l’environnement

du travail. Une approche moins réductrice et plus intégratrice serait bénéfique, car elle

permettrait une meilleure compréhension du phénomène et un enrichissement de notre

connaissance.

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Ce mémoire étudiera les relations entre les facteurs organisationnels et l’épuisement

professionnel dans un contexte spécifique, celui de l’implantation d’une nouvelle technologie

(l’implantation du logiciel de gestion d’étude Banner dans une université canadienne). L’étude

de cette thématique dans ce contexte spécifique peut fournir un regard éclairant sur les liens

entre les facteurs organisationnels et le syndrome de l’épuisement professionnel.

Malgré une littérature abondante sur les liens entre les facteurs psychosociaux et la santé

mentale des employés, les études spécifiques sur le burnout dans un contexte technologique

sont encore rares. Même les recherches portant sur les systèmes d’information ayant retenu la

notion de stress technologique «Technostress», n’ont débouché que sur des définitions

conceptuelles et des liens théoriques sans apport empirique (Rajesari et Anntharaman, 2003).

En fait, les effets direct et indirect des TIC sur la santé mentale ont peu été étudiés, ce qui peut

expliquer qu’elles sont souvent considérées comme des « technologies douces » vectrices de

bien-être et de prospérité (Chevallet et Moatty, 2012).

Loin de constituer des conditions de travail « douces » comme pourraient le laisser penser, les

statistiques des conditions du travail montrent que l’usage des TIC peut avoir des effets négatifs

sur la santé mentale au travail (Chevallet et Moatty., 2012). En outre, il existe plusieurs études

qui ont tenté de déterminer les différents facteurs explicatifs de la prévalence des pathologies

professionnelles notamment la tension psychologique et l’épuisement au travail, mais très peu

d’études se sont attachées à la question de la récurrence. Dans le cadre de ce mémoire, il

devient intéressant de procéder à une évaluation des mêmes facteurs organisationnels, mais

dans un contexte particulier de la récurrence de l’épuisement suite à la venue d’une nouvelle

technologie (Chevallet et Moatty, 2012)

Notre contribution s’inscrit dans le courant de la littérature scientifique vérifiant l’existence

d’une possible relation entre les facteurs organisationnels, dont la demande psychologique, le

manque de latitude décisionnelle, le manque de soutien social amarrés à une technologie

« inadaptée » (telle que perçue par les employées), et l’apparition du syndrome de l’épuisement

professionnel, qui à son tour est associé à la décision de quitter l’organisation.

Au niveau pratique, la finalité de cette recherche est de contribuer à la promotion de la santé et

de la sécurité au travail pour prévenir les maladies professionnelles et les troubles d’adaptation

dont le burnout. Ainsi, cette recherche permettrait de mieux orienter les efforts des intervenants

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dans les domaines de la santé mentale, de la sécurité au travail et de la gestion des ressources

humaines.

3. Formulation des objectifs

3.1. Objectif général

D’emblée, la littérature sur la santé de travail est unanime ; plusieurs problèmes de santé

mentale peuvent émaner d’un environnement de travail malsain tels l’épuisement professionnel,

la dépression et l’anxiété.

S’il est avéré que le monde du travail dans lequel nous évoluons aujourd’hui est source de

tension et d’anxiété pouvant occasionner des pathologies professionnelles, il convient de

s’intéresser alors aux facteurs et au contexte pouvant mener à cette problématique.

L’objectif général de cette recherche est donc d’examiner, dans un cadre intégrateur, les liens

des facteurs organisationnels (notamment, la demande psychologique, le soutien social et la

latitude décisionnelle) avec l’apparition du burnout dans un contexte spécifique, celui de

l’implantation d’une nouvelle technologie. Elle ouvre aussi sur l’influence du burnout sur

l’intention de quitter le travail.

3.2. Objectifs spécifiques

De façon à atteindre cet objectif général, les objectifs spécifiques suivants seront poursuivis.

Développer un cadre conceptuel « intégrateur » des déterminants et des conséquences de

l’épuisement professionnel (ou burnout). Dans cette recherche l’épuisement professionnel

prend les formes de l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation au travail et la

réduction de l’accomplissement personnel.

Examiner les déterminants de l’environnement de travail, dont la demande psychologique,

le soutien social et la latitude décisionnelle et leur lien avec l’apparition de burnout.

Évaluer les conséquences du burnout sur l’intention de quitter.

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Enfin, ce mémoire examine indirectement, sur une base théorique, comment les nouvelles

technologies de l’information et de la communication (TIC) affectent les conditions de

travail, en particulier en ce qui concerne la demande psychologique, la latitude

décisionnelle et le soutien social.

4. Plan du mémoire

Pour répondre à cette préoccupation, le mémoire présente un plan formé de cinq chapitres.

Le premier chapitre sensibilise le lecteur à l’importance de la thématique et présente la

problématique de la recherche ainsi que ses objectifs. Le deuxième chapitre résume la

littérature à propos du syndrome de l’épuisement professionnel et ses trois dimensions et

discute des effets des facteurs organisationnels sur l’apparition du burnout et l’intention de

l’employé de quitter son emploi. Les hypothèses de la recherche seront présentées. Le troisième

chapitre discute de la méthodologie adoptée, soit le choix de la méthode, le terrain de l’étude,

l’échantillonnage, le questionnaire et les mesures des construits. Le quatrième chapitre présente

les résultats de l’étude empirique. Le cinquième et dernier chapitre discute des résultats de cette

recherche, ses apports et ses limites et les pistes de recherches futures. En conclusion, les

implications managériales de l’étude seront mises en relief.

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Chapitre 2 - Synthèse de la littérature

Introduction

Le deuxième chapitre vise à élaborer le cadre théorique qui viendra supporter les hypothèses de

la recherche. Il présente les concepts centraux de l’étude. La première section vise à clarifier le

concept du burnout et ses origines. Selon certaines études, le burnout peut provenir d’un

environnement technologique. L’exposition accrue à la technologie augmente le risque de

développer l’épuisement professionnel (burnout). Par la suite, les trois dimensions de

l’épuisement professionnel, notamment l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation et

l’accomplissement personnel, seront analysées.

La deuxième section traite la demande psychologique (Karasek, 1979). Bien que ce concept

soit centré sur l’effort mental, son évaluation demeure toutefois mesurable. Puisque cette

demande est subjective et que le burnout est une expérience individuelle, il est donc essentiel

de se pencher sur les modes d’évaluation de la demande psychologique pour connaitre la réalité

du milieu de travail selon une perception individuelle et non pas collective.

Dans cette continuité, devant l’accroissement des défis liés à la santé mentale des travailleurs

apparait la nécessité de se pencher, entre autres, sur divers facteurs qui y contribuent. Parmi

ceux-ci, la demande psychologique identifiée comme l’un des principaux facteurs de risque

pour la santé psychologique dans l’environnement de travail.

Or, bien que la demande psychologique soit reconnue comme un facteur de risque pour la santé

mentale des travailleurs, d’autres facteurs tels que le soutien social et la latitude décisionnelle

font partie des modèles expliquant les fondements de la santé mentale au travail (Brun et al.,

2003; karasek et Theorell, 1990). C'est pourquoi cette section abordera les impacts de la

technologie sur ces trois dimensions et tentera par la suite d’examiner le degré d’implication de

la demande psychologique, de latitude décisionnelle et du soutien social dans l’apparition de

pathologies d’ordre professionnel ou de certains troubles d’adaptation, notamment le burnout.

Ces facteurs propres à l’environnement de travail semblent avoir alors des effets négatifs sur la

santé des individus. Pour situer l’origine de ces facteurs organisationnels, il peut être éclairant

de s’appuyer sur deux modèles de recherche dont les travaux sont abondants tant en

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psychologie des organisations qu’en gestion de ressources humaines et en management. Il

s’agit de deux modèles reconnus universellement pour leur apport scientifique, soient les

modèles « Demande-Contrôle au travail » de Karasek (1979) et « Demande-Contrôle-Soutien »

trouvant son origine dans les travaux de Karasek (1979) et Johnson et Hall (1988). Ces deux

modèles seront utiles pour deux raisons. D’une part parce qu’ils serviront d’assises à la

problématique et à l’état de connaissance. D’autre part, il parait important de rassembler les

divers points de vue que rapporte la littérature académique afin de bien comprendre les

variables psychosociales de l’environnement de travail ainsi que leurs répercussions sur la santé

mentale des employés.

Il sera ensuite question d’examiner les conséquences du burnout, en particulier les effets de ses

dimensions « épuisement émotionnel » et « dépersonnalisation » sur la décision de l’employé

de quitter son organisation.

Enfin, ce chapitre sera conclu par l’élaboration d’un cadre conceptuel intégrateur des variables

retenues dans cette étude et un rappel des hypothèses de recherche.

1. Syndrome de l’épuisement professionnel

1.1. Définition de l’épuisement professionnel (le burnout)

Tout d’abord, il est intéressant de regarder les différences sémantiques au sujet de l’épuisement

professionnel. En français, « to burn out » veut dire « se miner, s’échouer, se vider

émotionnellement, s’être lessivé » ; bref c’est un « substantif dérivé du verbe épuiser, qui

signifie mettre à sec un puits » (Ruiller, 2008). Par ailleurs, l’expression « to burn one self out»

signifie « travailler trop dur et mourir jeune » alors qu’au Japon, pour conceptualiser la forme la

plus extrême de burnout on utilise le terme « Karoshi » qui a un sens identique soit « la mort

par excès de travail » (Karo=mort, shi=fatigue) (Ruiller, 2008). Freudenberger (1974) définit le

burnout comme un état causé par « l’utilisation excessive de son énergie et de ses ressources,

qui provoque un sentiment d’avoir échoué, d’être épuisé […] »

De la simple métaphore d’une « petite bougie en fin de combustion », « brûler, se consumer de

l’intérieur » ou alors « incendie ou brûlure interne », l’épuisement professionnel, connu souvent

sous le vocable anglais burnout, a fait l'objet d'une littérature importante. Décrit en tant que

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syndrome, ce phénomène n’est pas nouveau. L’état d’épuisement professionnel apparaît en

France dans les études de Veil dans les années cinquante, ensuite il émerge aux États-Unis au

milieu des années soixante-dix et a commencé à susciter l’intérêt malgré sa présence exiguë

dans le milieu de travail. Les publications académiques sur le burnout sont nombreuses et on

dénombre au début de ce siècle un peu plus de 5500 études publiées à ce sujet (Kalimo, 2000;

étude citée dans Addison, 2010)..

1.2. Sources de l’épuisement professionnel

À l’origine, l’épuisement professionnel a été longtemps cantonné à une certaine catégorie de

professions. Selon Truchot (2004), l’usure professionnelle s’observe notamment chez les

professionnels de la relation d’aide et du contact, soit les enseignants, les infirmiers, les aides-

soignants, les médecins, les policiers, les surveillants de prison et les travailleurs sociaux. De

nos jours, on considère que l’inventaire de l’épuisement professionnel touche peu ou prou

toutes les activités humaines et n’épargne aucun secteur d’activités.

Alors, par sa nature intrinsèquement liée au travail, le burnout prend essentiellement sa source

dans le cadre du travail (Maslach et al., 2001). Certains chercheurs ont compris l’épuisement

professionnel sous le prisme de l’expérience vécue et de l’appréciation subjective d’une

expérience émotionnelle négative impliquant des sentiments et des comportements envers soi-

même et autrui, mais n’ayant pas nécessairement un lien étroit avec l’environnement de travail

(Kristensen et al., 2005). En effet, le burnout peut émaner de plusieurs autres facteurs comme

l’évolution dans un milieu menaçant ou l’exposition fréquente à des situations affectives

pénibles (Addison, 2010). Dans le même ordre d’idée, Veil (1959), repris dans le manuscrit de

Canoui et Mauranges (2004), considère que le burnout ne prend pas sa source du milieu de

travail, mais plutôt il est le « fruit de la rencontre d’un individu et d’une situation l’un et l’autre

sont complexes ».

Les sources professionnelles du burnout sont nombreuses. Courty et al. (2004) et Bruchon-

Schweitzer (2002) en comptent quatre facteurs : les caractéristiques de la tâche (charge de

travail, contraintes temporelles et conditions de travail); les caractéristiques relationnelles

(conflit et ambiguïté de rôle, manque de reconnaissance, harcèlement moral, manque de

soutien); les caractéristiques de la carrière (absence de promotion, instabilité professionnelle,

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congédiement) et l’interface travail-famille (incapacité de jongler la vie professionnelle et

personnelle).

Dans la même veine, Cordes et Doughery (1993) supposent que les causes du burnout se

situent à trois niveaux : organisationnel (surcharge de travail, conflits et ambiguïté de rôle),

interindividuel (manque de soutien social au travail et manque de reconnaissance) et intra-

individuel (appréciation subjective reposée sur les attentes individuelles par rapport à

l’environnement) (Cordes et Doughery 1993, étude citée dans Ruiller, 2008).

Dans une autre perspective, Cary Cherniss (1980) propose une vision transactionnelle du

burnout. D’une part, il considère que le burnout n’est pas le résultat d’une corrélation où

l’individu et son environnement sont des entités séparées. Bien au contraire, ils s’associent et

s’influencent constamment et réciproquement. D’autre part, il suggère que pour comprendre

l’origine de l’épuisement professionnel, il faut considérer le contexte institutionnel et les

changements sociaux. Il montre aussi comment la désorganisation sociale, surtout l’anomie

sociale, contribue aux désordres psychologiques.

Dans la même optique, selon Bartlett (2004), le burnout des employés, en particulier les

enseignants, est dû, en partie, à l’expansion du rôle du travail. L’argumentation se fait en trois

parties. Premièrement, le rôle du travail des enseignants a été élargi et amplifié, mais en

contrepartie le soutien structurel et social au sein des établissements n’a pas suivi cette

expansion. Deuxièmement, la nature et l’étendue du soutien organisationnel influencent

l’expérience des enseignants. Enfin, les employés qui adhèrent à la conception du rôle étendu

ou élargi s’efforcent, par eux-mêmes, à le maintenir, pour le bien des élèves, même sans la

présence du soutien organisationnel. Cette situation résulte en une surcharge de travail

(travailler au-delà des horaires fixés dans le contrat).

En se basant sur ces quelques études, il se dégage que le burnout a pris racine dans les

transmutations et les évolutions sociales (Bruchon-Schweitzer, 2002). En plus, il convient de

noter que les études les mieux soutenues au niveau méthodologique sont celles qui joignent

l’épuisement professionnel à des facteurs organisationnels (Bruchon-Schweitzer, 2002;

Maslach et al., 2001). D’ailleurs, la majorité des définitions attribuées à ce phénomène se

rattachent foncièrement à l’organisation de travail à tel point que plusieurs psychologues et

sociologues du travail exigent sa reconnaissance comme étant une maladie professionnelle. À

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ce titre, Languirand (1987) décrit l’épuisement comme « un état de mal-être, qui est

essentiellement vocationnel, car ce sont surtout les professionnels qui en sont atteints » (cité

dans Munroe et Brunette, 2001).

À cet égard, Christina Maslach, une chercheuse en psychologie sociale qui a amplement

contribué à la conceptualisation et la mesure du burnout, décrit ce dernier comme étant une

« manifestation de la détérioration de la santé suite à une exposition chronique au stress en

milieu de travail et qui se caractérise par un état d’esprit négatif persistant (Maslach et al.,

2001, p. 9). Cette définition est basée sur une prémisse fondamentale selon laquelle le

syndrome de l’épuisement professionnel est un résultat d’interférence entre l’employé et son

environnement de travail (Maslach et al., 2001). D’autres l’ont défini sous le même angle soit

un phénomène « d’ordre professionnel » caractérisé par « la présence de symptômes physiques

et comportementaux dépressifs et l’épuisement suite aux demandes excessives d’énergie, de

force ou de ressources » (Freudenberger, 1974).

Dans le même ordre d’idée, Cherniss (1980) explique qu’effectivement le burnout est lié au

milieu de travail et il décrit le syndrome de l’épuisement comme étant une réponse à un

contexte de travail stressant. Dans une perspective semblable, Gervais (1991) supporte la

position de Cherniss (1980) à l’effet que c’est l’environnement de travail qui est à l’origine de

tout abattement physique et émotionnel et que ce syndrome est le résultat d’un cumul de

tensions et d’émotions négatives vécues par l’employé dans son emploi.

En somme, plusieurs acceptions ont été attribuées au syndrome de l’épuisement professionnel

contribuant ainsi au développement d’un vaste cadre théorique et conceptuel (Munroe et

Brunette, 2001). Mais au-delà de cette perspective, si la définition du burnout donne

l’impression d’être simple, il existe des finesses d’appréhension rendant ce phénomène si

alambiqué. En effet, l’épuisement professionnel est un syndrome très complexe qui dépend de

l’effet conjugué de plusieurs facteurs organisationnels, sociaux, personnels (Munroe et

Brunette, 2001) et technologiques (Chevallet et Moatty, 2012).

Bien que le syndrome de l’épuisement professionnel se produit dans divers environnements de

travail, plusieurs chercheurs comme Moore (2000) et Shen et al. (2004) ont rapporté que les

employés qui opèrent dans un environnement de travail technologique sont les plus vulnérables

au burnout (Moore, 2000). Pour appuyer ce constat, l’Organisation mondiale de la santé

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rapporte que les conséquences du stress et de l’épuisement professionnel sur la santé mentale

des travailleurs se manifestent surtout dans les pays développés. En fait, ce phénomène

résulterait des mutations rapides opérées dans le monde du travail comme la globalisation des

marchés, le développement des technologies de l’information, la rapidité des changements, la

réorganisation et la restructuration des modes de travail.

Dans cette perspective, les nouvelles technologies font partie de presque tous les emplois. Elles

permettent, dans plusieurs cas, de faciliter le travail et le rendre plus rapide. Par contre, elles le

complexifient également de façon significative (Carayon et Karsh, 2000). Le développement

continu et la recherche de nouvelles technologies proposent des changements techniques et

technologiques à assimiler afin d’améliorer la qualité de service (Carayon et Karsh, 2000).

Mais, parfois le manque de formation continue, la complexité et l’inadéquation des systèmes

technologiques peuvent représenter un facteur de stress et de tension pour les travailleurs.

Alors, si les opérateurs ont l’impression que la charge de travail s’intensifie, que la technologie

entrave leur travail et qu’ils doivent s'ajuster à ses options, la technologie peut alors jouer en

leur défaveur (Carayon et Karsh, 2000). À titre d’exemple, dans une recherche de Schaufeli et

al. (1996) sur le travail des infirmières dans une unité de soins intensifs, l’étude rapporte que

les tâches liées aux nouvelles technologies demandent plus d’efforts cognitifs et perceptuels

comme la concentration, la précision et la vigilance. De plus, pour plusieurs infirmières, chaque

jour est un défi où l’obligation d’effectuer un tas de tâches simultanément semble

indispensable. Ceci est excellent pour affiner leurs talents de jongleuse, mais la question qui se

pose c’est à quel prix ? Et jusqu'à quel point la technologie offerte empoisonne la qualité de vie

au travail ? Selon cette étude, la technologie accroît la charge de travail cognitive, certains

chercheurs (Schaufeli et al., 1996) postulent même que cet état de fait contribue à

l'augmentation du risque de développer un burnout.

Dans la même lignée, selon une recherche américaine, certains usages des TIC incitent aux

multi-activités. Par exemple, consulter ses courriels pendant les réunions et répondre au

téléphone tout en travaillant. Cependant, les travailleurs ne gagnent pas en temps ou en

productivité, bien au contraire, cela cause une baisse des capacités cognitives. Cette recherche

révèle aussi des effets physiologiques puisque le travail en « multitâche » favorise la sécrétion

des hormones du stress ainsi que l’adrénaline (Chevallet et Moatty, 2012).

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Toujours concernant les méfaits de la technologie sur la santé mentale, une étude de Porter et

Kakabadse (2006 ; étude citée par Day et al., 2010) montre que les personnes fortement

exposées aux TIC (par exemple, les ordinateurs et les téléphones) sont plus vulnérables à

manifester des symptômes de tension et de burnout. En effet, ces chercheurs ont réalisé une

étude qualitative, auprès des managers canadiens, et ils ont ressorti leurs commentaires à

propos de l’utilisation des nouvelles technologies dans leur environnement du travail. Les

résultats de l’étude dévoilent que quatre-vingts pour cent des managers canadiens interrogés

manifestent un sentiment de stress, de maux de tête, de fatigue mentale intense et ressentent des

problèmes de concentration dus à l’introduction des TIC dans leur travail.

Dans la même veine, d’après Wang et al., (2008), une utilisation fréquente du téléphone

portable et de l’ordinateur exposerait son utilisateur à des risques comme le stress et la tension

psychologique. De plus, ces auteurs avancent l’idée selon laquelle une utilisation des TIC est

corrélée à une augmentation de la charge de travail. Ainsi, les salariés sont obligés de travailler

en dehors des heures normales de travail. Entre autres, en tant qu’outil de communication, les

technologies peuvent favoriser l’entraide et la coopération entre employés, ce qui permet

d’atténuer les risques pour la santé. Toutefois, il a été montré que la technologie peut être aussi

une vectrice d’isolement et de détachement relationnel. En effet, les technologies mobiles ou

celles du bureau remplacent souvent les échanges directs entre les employés et engendrent une

érosion de groupe (Wang et al., 2008; Chevallet et Moatty, 2012).

Cette focalisation sur les aspects négatifs de la technologie n’ambitionne pas de mettre en cause

les avantages de la technologie qui sont incontestables. Pour autant, le discours dominant met

en valeur seulement les bienfaits alors que les conséquences négatives sont rarement évoquées.

Il est opportun alors de rétablir l’équilibre pour opter d’une approche plus nuancée. Il s’agit

également d’alerter face à la prévalence de certaines pathologies professionnelles qui appellent

à la vigilance (Capgemini Consulting, 2010, Chevallet et Moatty, 2012).

En guise de conclusion, il est opportun de noter que les quelques études qui ont évoqué les

méfaits et les conséquences négatives de la technologie sur la qualité de vie au travail et

particulièrement sur la santé ne sont pas parvenues à trouver un lien direct entre la dégradation

de la santé et l’utilisation des technologies. Cela est dû au fait qu’il y a peu études

épidémiologiques consacrées aux conséquences directes de l’utilisation des TIC sur la santé.

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Il apparaît que les conséquences de la technologie sont partielles et souvent indirectes

(Chevallet et Moatty., 2012). En fait, le périmètre des TIC n’est pas le même pour tous ceux qui

s’intéressent à la santé des employés. La technologie est implantée dans des secteurs d’activités

différents, pour des fonctions hétérogènes et sur des situations de travail plurielles.

Pour certains, les TIC sont essentiellement des outils Internet (messagerie, web) et des outils

facilitant la mobilité (BlackBerry). Pour d’autres, ce sont des outils d’aide à la décision

(logiciel), ce qui rend son étude complexe (Chevallet et Moatty, 2012).

1.3. Burnout : processus graduel et progressif

En consultant les écrits portés sur ce sujet, on remarque qu’il n’y a pas vraiment un accord

entre les scientifiques concernant les antécédents organisationnels du burnout. D’une part,

l’épuisement professionnel n’est pas encore considéré comme « une maladie mentale », mais

comme « un trouble de l’adaptation ». D’ailleurs, Canaoui et Mauranges (2004) rapportent que

le syndrome de l’épuisement professionnel fait partie des nouveaux diagnostics médicaux. Il est

cependant classé dans la catégorie des troubles de l’adaptation et non pas dans les maladies

professionnelles ; ce qui peut poser un problème de taille au niveau du diagnostic curatif et des

options d’intervention (Zacchia, 2007 ; cité dans Addison, 2010). En ce sens, les spécialistes

français Canaoui et Mauranges (2004, p. 27) soulignent que « nous sommes encore face à un

concept-valise ou fourre-tout capable de recueillir toutes les revendications du monde de la

santé […] nous risquons d’avoir affaire au fameux couteau sans manche dont on aurait égaré la

lame. »

Un autre qualificatif s’ajoute à ce syndrome, c’est que l’état de l’épuisement n’est pas un

problème qui se déclenche du jour au lendemain. Au contraire, c’est un processus cumulatif qui

évolue graduellement et sur plusieurs années, suite à l’exposition permanente aux agents

stressants organisationnels, interpersonnels et émotionnels présents dans l’environnement de

travail (Karasek, 1979 ; Karasek et Theorell, 1990; Siegrist 1996).

À cet égard, Cherniss (1980) explique aussi que suite à une chronicité du stress dans un

environnement de travail malsain, le burnout se développe graduellement. Généralement, il

évolue lentement sur une période de trois à dix ans (Roche, 2008) et suit un cheminement par

étape. D’ailleurs, selon Courty et al. (2004, p. 22) l’évolution du syndrome « est lente,

insidieuse et correspond à une forme de stress spécialisé. »

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En outre, l’état de l’épuisement se caractérise par trois dimensions symptomatologiques

successives. Il débute par un sentiment de « stress perçu », qui résulte d’un déséquilibre entre

les demandes de travail et les capacités de l’individu. Ceci amène, à son tour, à un deuxième

stade soit la « tension », une réaction affective à ce déséquilibre se manifestant par une

détérioration générale de la santé, soit un anéantissement physique et émotionnel. Enfin, cette

situation s’accompagne par des « transformations attitudinales et comportementales » comme la

perte de la motivation, la réduction de l’accomplissement personnel avec une souffrance

mentale sévère et le développement d’une déshumanisation des relations à autrui et/ou un

détachement relationnel (Maslach, 2006).

Pour appuyer ce constat, Munroe et Brunette (2001) ajoutent que les facteurs explicatifs du

burnout incluent les ressources organisationnelles disponibles et des facteurs individuels. En ce

sens, l’individu éprouve dans son milieu de travail « un sentiment de se révéler ». Cela se

caractérise par un désir de réussir son travail et de se démarquer des autres, le besoin de se

prouver devient alors vital. Après, la personne commence à sentir « l’intensité ». C’est dire que

l’individu ne délègue plus les tâches ou les responsabilités aux collègues faute de perdre le

contrôle. Par la suite, vient l’état «de privation subtile», une phase qui se caractérise par un

déclin de l’attention portée aux besoins personnels, de plus les activités distrayantes se font

percevoir en tant qu’interférences ; dans ce cas on peut parler de « workoholisme ».

Enfin, un « rejet des conflits et des besoins », l’individu devient conscient de l’émergence de

conflits internes et du fait que son désir d’accomplissement et sa performance ne sont plus

synchronisés.

Le burnout, corollaire du stress, est donc une réaction à l’exposition prolongée à des contraintes

émotionnelles et à une impuissance physique de s’adapter avec la réalité de son emploi

(Karasek, 1979 ; Maslach, 2006).

En 1986, Maslach et Jacskon, dans leur étude des manifestations d’usure professionnelle, ont

proposé une définition du burnout qui a réussi à rallier les divergents points de vue. D’ailleurs,

selon ces auteurs, l’épuisement professionnel est un syndrome psychologique impliquant trois

dimensions : l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation (ou le cynisme) et la perte

d’accomplissement personnel. Les recherches portant sur les facteurs du burnout reviennent

très souvent à cette définition et se basent couramment sur l’instrument « Maslach Burnout

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Inventory (MBI) », un questionnaire auto évaluatif constitué de 22 items mesurant les trois

dimensions du burnout. Cet instrument considère que les trois dimensions de l’épuisement

professionnel font partie d’un seul et unique phénomène (Dion et Tessier, 1994). L’instrument

MBI est la perspective dominante dans l´évaluation de l’inventaire de l´épuisement

professionnel ; d’ailleurs près de 90 % des études empiriques utilisent cet instrument (Lourel et

al., 2004). Cette forte utilisation s’explique par la fiabilité et la validité de cet instrument de

mesure ainsi que la constance dans les résultats des études l’ayant utilisé.

2. Dimensions de l’épuisement professionnel

Dans cette section, il serait question des trois dimensions de l’épuisement professionnel

identifiées plus haut.

2.1. Épuisement émotionnel

« Vidé nerveusement », voilà le maitre mot de l’épuisement émotionnel (syndrome anxieux

dépressif). Cet état réfère à « une fatigue et au sentiment d’être complètement réduit après avoir

épuisé toutes ses ressources » (Maslach, 1993). Ce concept est le cœur du burnout, il renvoie

essentiellement à un assèchement et une érosion de ressources émotionnelles causés par un

stress professionnel soutenu ou par une exténuation affective sur laquelle le repos n’a aucun

effet (Schaufeli et Van Dierendonck, 1993). L’individu au travail est sollicité à la fois

psychiquement et physiquement ; il se sent lessivé, éreinté par l’effort au point de saturation

émotionnelle (Schaufeli et Van Dierendonck, 1993). Bref, l’employé se sent dépossédé

émotionnellement et physiquement pour faire face aux contraintes de son environnement

(Courty et al., 2004).

Entre autres, l’appauvrissement des ressources émotionnelles qui ressemble à la fatigabilité

dépressive, peut déboucher sur des crises d’irritation ou par un refus d’exprimer ses ressenties

(contrôler ses émotions) comme il peut se traduire aussi par un détachement relationnel envers

les autres (distanciation), une insensibilité ou une désaffection. Dans la même veine, la

personne souffrante d’un épuisement émotionnel s’installe dans une chronicité stressante et

perd tout enthousiasme pour son travail. Ce dernier devient une sorte de fardeau qui ne lui

procure aucun contentement personnel et surtout insupportable sur le plan émotif. À cet effet,

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les résultats empiriques existants dans la littérature donnent à l’épuisement émotionnel un rôle

important dans le processus de burnout (Schaufeli et Van Dierendonck, 1993)

En fait, l’épuisement émotionnel s’avère la dimension la plus rapportée par les employés ayant

vécu un burnout. Bref, c’est la manifestation la plus visible du syndrome d’épuisement

professionnel (Maslach et al., 2001) et celle qui maintiendrait un lien étroit avec les aspects

pathogènes du milieu de travail (Schaufeli et Van Dierendonck, 1993). L’épuisement

émotionnel représente la composante affective centrale du burnout ; alors que les deux autres

dimensions, soit la dépersonnalisation et la perte de l’accomplissement personnel, représentent

les aspects attitudinaux et comportementaux de l’individu (Schaufeli et Van Dierendonck,

1993). En effet, plusieurs chercheurs s’accordent pour affirmer que le burnout est un cercle

vicieux qui débute avec l’épuisement émotionnel qui entraîne, à son tour, la dépersonnalisation.

Ou alors, l’état de l’épuisement émotionnel peut conduire, d’une façon indirecte, peu à peu à

l’échec de l’accomplissement personnel, soit par l’entremise de la dépersonnalisation (Bekker

et al., 2005; Schaufeli et Van Dierendock, 1993).

Dans cette perspective, il convient donc de concevoir le burnout dans une optique dynamique

mettant en interaction la dimension affective et le cynisme. Toutefois, cette proposition va à

l’encontre du courant théorique considérant que les trois dimensions du burnout sont trois

entités distinctes et indépendantes l’une de l’autre (Maslach, 1993) puisqu’elles sont

influencées différemment par les personnes, les ressources mises en disposition et les demandes

psychologiques présentes dans le milieu de travail (Maslach, 1993)

2.2. Dépersonnalisation

La dépersonnalisation ou la perte d’empathie est la dimension interpersonnelle du burnout.

Elle renvoie à une « déshumanisation » ou à une « sécheresse relationnelle » dans les rapports

interpersonnels (Maslach, 1993). La personne bloque toute empathie ou intérêt ressenti à

l’égard de ses patients, de ses élèves ou toute autre personne dont elle a la responsabilité. Il ne

s’agit pas d’un « trouble dissociatif » qui endommage la conscience, mais plutôt d’un

détachement relationnel qui s’exprime à travers des comportements de rejet et des attitudes

négatives, impersonnelles, détachées et même parfois hostiles envers les autres (Leiter et

Maslach, 1988). La perte d’empathie peut prendre des formes plus dures, lorsque le

détachement est excessif. Elle peut amener au cynisme, la dépravation, l’évitement de tout

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contact et l’isolement (Maslach, 1993). La personne souffrante considère les demandes des

récipiendaires de l’aide comme étant inutiles, voire illégitimes. Cette attitude conduit à

l’effondrement de l’énergie et de la motivation. C’est pourquoi la personne développe une

mentalité de fuite envers son milieu et ne se sent plus concernée par son travail (Maslach,

1993).

2.3. Accomplissement personnel

L’accomplissement personnel ou l’efficacité professionnelle réduite représente la dimension

auto-évaluation du burnout (Leiter et Maslach, 1988). La personne ressentirait une véritable

crise d’identité et une baisse de moral mettant en question toutes ses qualifications. Ayant la

croyance de "moins valoir que les autres", la personne s’autoévalue de façon négative et a

tendance à sous-estimer son travail et sa vraie valeur. Cette dévalorisation, dans un contexte

professionnel en crise, est amarrée avec un sentiment de dévalorisation et de dépréciation de

soi, d’un sentiment de déception et d’une déflation du sentiment d’auto-efficacité et

d’incompétence (Leiter et Maslach, 1988).

3. Effets de l’épuisement émotionnel et de l’accomplissement sur la

dépersonnalisation

3.1. Effet de l’épuisement émotionnel sur la dépersonnalisation

À partir d’un constat théorique, peu d’études ont emprunté la voix de l’interférence entre

l’épuisement émotionnel et la dépersonnalisation. Toutefois, des études antérieures (Lourel et

Gueguen, 2007) montrent qu’il existe une relation entre ces deux dimensions. En s’appuyant

sur l’étude de Dalliard (2007), l'assèchement émotionnel fait surface lorsque la lourde charge

de travail draine les ressources émotionnelles et physiques de l'individu. Ce tarissement des

ressources provoque une incapacité de l’individu à exercer ses fonctions. Pour faire face à cette

situation exténuante, les individus développent une stratégie de contournement, qui reflète une

attitude distante envers le travail, comme une tentative désespérée d’affronter leurs problèmes

professionnels. En d’autres mots, l’exposition au stress chronique cause une « liquidation des

ressources énergétiques » de l’employé et incite chez lui le développement d'une attitude de

détachement (Leiter et Maslach, 1988).

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Le modèle de Leiter et Maslach (1988) postule que l’épuisement émotionnel conduirait à la

dépersonnalisation qui amènera à une diminution de l’accomplissement personnel. Dans la

même veine, Lee et Ashforth (1993) supposent que l’assèchement émotionnel apparaît en

premier et il entraîne à la fois la dépersonnalisation et la réduction de l’accomplissement. Ceci

est cohérent avec l’étude de Best et al. (2005) qui appuie cette thèse en faisant remarquer

l’existence d’une relation entre l’épuisement émotionnel et la dépersonnalisation

De même, les résultats des chercheurs Posing et Kickul (2003) sont concordants avec les études

antérieures, il semble que ces deux notions se développent et se consolident mutuellement chez

les individus les plus vulnérables émotionnellement. Ces auteurs soutiennent le fait que

l’épuisement professionnel est composé de trois dimensions interdépendantes présentées dans

un ordre prédéterminé. En effet, celui-ci débute par l’épuisement émotionnel, se poursuive par

la dépersonnalisation et aboutit à une diminution de la réalisation de soi. Ce processus

séquentiel de burnout a été confirmé par plusieurs recherches empiriques, dont celles de

Dougherty et Blum (1997), Leiter (1988) et Leiter et Maslach, (1988).

Sur la base de ces études, l’épuisement émotionnel et la dépersonnalisation sont deux construits

distincts conceptuellement, mais associés empiriquement dans le sens où l’épuisement

émotionnel influence la dépersonnalisation.

Hypothèse 1. Il existe une association positive entre l’épuisement émotionnel et la

dépersonnalisation.

3.2. Effet de l’accomplissement personnel sur la dépersonnalisation

Convaincue de son impuissance pour répondre aux attentes des autres, la personne privilégie

l’inertie et n’éprouve plus de volonté d’aller de l’avant (Maslach, 1993). Sa quête de réalisation

en devient astreignante et la personne se sent affaiblie et déstabilisée. Elle se retrouve dans un

état de réévaluation de son engagement envers son organisation (Foucher et al., 2004) et la

frustration envers son travail et ses réalisations professionnelles deviennent plus palpables. Elle

manifeste de la colère contre son employeur et se questionne sur la pertinence de son travail.

Alors, devenant intolérant au manque d’accomplissement professionnel et au stress chronique

du métier, le sujet garde difficilement une image positive de son organisation et perd toute

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motivation. Ce qui au départ était un travail stimulant, avec du sens et du défi devient en fait

lassant et insensé, l’énergie se transforme en épuisement émotionnel, l’engagement se modifie

à un cynisme et l’accomplissement devient une inanité (Malach et al., 2001).

D’ailleurs, l’étude de Leiter et Maslach (1988) démontre clairement que le burnout comporte

une composante affective (l’épuisement émotionnel), une composante attitudinale (la

dépersonnalisation) et une composante cognitive (la réduction de l’accomplissement personnel)

conduisant à un désengagement émotif envers l'organisation.

Aussi, les études de Truchot (2001, 2006) permettent de visualiser le rapport entre épuisement

professionnel et les dynamiques d’implication au travail. Selon cet auteur, le changement de

l’orientation professionnelle est associé au syndrome de l’épuisement professionnel. Ce constat

perdure avec la première vague théorique du burnout qui considère que l’individu, le plus

vulnérable au burnout, est celui qui recherche dans son travail un sens, une réalisation

personnelle voire un idéal. D’ailleurs, Freudenberger associe le burnout à une « maladie de

l’âme en deuil de son idéal». Cela va de pair avec les études qui font aussi du burnout un

« échec d’une quête existentielle de signification » (Pines, 1993) ou encore d’une impuissance à

se démarquer et à renforcer son estime de soi à travers son travail. Par conséquent, les individus

qui manquent d’accomplissement personnel développent une stratégie de retrait et de cynisme

plutôt que d’adopter une approche centrée sur l’amélioration des conditions au travail (Pines,

1993).

Somme toute, le burnout semble être le lot des employés qui sont profondément engagés et qui

tracent des objectifs irréalistes avec persistance. Bref, ces personnes n’admettent pas qu’elles

ont des limites et elles persistent à prouver leur propre valeur tant leur estime de soi. Pour

Scarfone (1985), le burnout se retrouve chez les personnes dont « l'idéal du moi » ne cesse de

se montrer trop demandant et exigeant.

Enfin, le déni de la réalité et de ses vraies capacités mentales et physiques ouvre la voie aux

maladies psychologiques et au développement d’une personnalité cynique et insouciante de son

entourage de travail. C'est ce que soutient Maslach (1982) qui suggère de se fixer des objectifs

réalistes, d’assumer les déboires de façon moins personnelle, de reconnaître ses limites et son

besoin d'aide, de réévaluer ses priorités, ses rêves, ses attentes face à soi et face aux autres pour

enfin restructurer son présent en fonction de cette évaluation personnelle. Dans le cas échéant,

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si les choses s’empirent et que la personne ne parvient pas à dépasser ce stade, il est essentiel

d’entreprendre une thérapie et au pire, quitter son emploi pour chercher d’autres alternatives

professionnelles. Pour récapituler, l’usure au travail conduit la personne à se disjoncter de son

activité professionnelle. Sur ce constat, il sera question de formuler la deuxième hypothèse de

recherche qui postule

Hypothèse 2. Il existe une association positive entre la réduction de l’accomplissement

personnel et la dépersonnalisation.

4. Déterminants de l’environnement de travail et leurs effets sur l’épuisement

professionnel

4.1. Demande psychologique

4.1.1. Définition

La demande psychologique et les problèmes inhérents à ce concept sont devenus un sujet

d’actualité. Si le thème de la demande psychologique trouve aujourd’hui une telle résonance,

c’est qu’il reflète une réalité plus complexe que vivent les employés.

Que ce soit en sociologie, en psychologie expérimentale ou en ergonomie, ce concept

interdisciplinaire a été traité sous différents angles. Il a donné lieu à d’autres notions proches.

On parle de l’effort mental, de la charge attentionnelle, de l’astreinte mentale, de la charge

psychique, de la charge psychologique, du débordement cognitif et du coût cognitif (Beehr et

al., 2001; Karasek et Theorell, 1990; Sperandio, 1980). Ce sont quelques-unes des nombreuses

appellations utilisées dans la littérature pour qualifier la demande psychologique. Toutefois,

dans le cadre de ce mémoire, seulement le terme demande psychologique sera utilisé dans la

perspective de simplifier et mieux saisir la globalité de ce concept déjà entouré d’ambiguïté.

À ce stade, plusieurs chercheurs ont parlé de l’évolution du travail contemporain qui engendre

une demande psychologique au travail (Du Tertre, 2006 ; Falzon et Sauvagnac, 2004; Siegrist,

1996 ; Theorell et Karasek, 1996). L’évolution du travail est associée à la transformation des

contraintes (Falzon et Sauvagnac, 2004) qui peuvent se concrétiser dans la transformation de la

prescription.

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Dans ce nouveau mode de travail, le contrôle des employés est devenu plus étroit et les

exigences sont plus strictes. Aussi, l’employé jouit d’une certaine autonomie, mais la

contrepartie de cette plus grande responsabilisation est un accroissement des exigences

psychologiques au travail. Cette demande apparaît, au début, comme un signe d’enrichissement

et non de détérioration des conditions de travail (Falzon et Sauvagnac, 2004). Cependant, les

dernières enquêtes sur les conditions de travail font état d’une augmentation des facteurs de

pénibilité psychologique. Ils sont la conséquence d’un cumul de plusieurs contraintes, dont

notamment les délais à respecter, les normes de production et le contrôle hiérarchique (Falzon

et Sauvagnac, 2004).

Dans cette perspective, le modèle de la tension au travail (nommé aussi « exigences-contrôle »

ou « demande-contrôle ») de Karasek et Theorell (1990), conceptualise l’interaction entre deux

caractéristiques de la situation au travail, notamment la demande psychologique et la latitude

décisionnelle. Ce modèle a été développé pour tester les effets de l’environnement de travail sur

la prévalence des pathologies cardio-vasculaires et leurs précurseurs (tension artérielle,

stress…). Toutefois, il est devenu une base conceptuelle dans l’étude de l’impact des facteurs

organisationnels sur la psychologie de l’individu.

Karasek (1979) définit la demande psychologique (« psychological job demand ») comme « des

stresseurs psychologiques impliqués dans la réalisation des tâches inattendues et les stresseurs

provenant des conflits personnels au travail ». En outre, d’après certains chercheurs (à l’instar

de Beehr et al., 2001; Hockey et Earle, 2006; Karasek et Theorell, 1990), la charge de travail a

été définie comme « des demandes psychologiques qui comportent les caractéristiques de la

tâche basées sur la perception des individus de leur charge de travail mentale » (Karasek et

Theorell, 1990).

Sur ce, il convient de préciser que selon ces auteurs, la demande psychologique est d’ordre

mental et englobe les charges relatives à la réalisation des tâches (Karasek, 1985). Elle évoque

principalement une charge psychologique qui se traduit par des exigences intellectuelles, de

longues périodes de concentration et de l’effort mental. En outre, elle fait appel à des éléments

psychosociaux comme la pression temporelle (l’employé n’a pas suffisamment de temps pour

faire son travail), la cadence rapide du rythme de travail (son travail exige d’aller très vite) et la

charge de travail (une quantité abusive de travail). Le morcellement du travail, le

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« bousculement » du travail, les interruptions (des tâches souvent interrompues), le

ralentissement du travail (retardement dans son travail parce que l’employé doit attendre que

les autres terminent leurs tâches), les variations et les demandes contradictoires ainsi que les

conflits de rôles (Karasek, 1985).

Sargent et Terry (2000) postulent que la demande psychologique comporte deux dimensions

principales, soient la quantité de travail à accomplir et les contraintes temporelles. Karasek et

Theorell (1990) suggèrent que la demande psychologique est, plus au moins, difficile à

conceptualiser, mais sa composante centrale est la charge mentale de travail (« mental

workload »). De leur côté, Peeters et LeBlanc (2001) distinguent trois formes de demandes

psychologiques, soient la demande quantitative, la demande émotionnelle et la demande

environnementale. La demande quantitative renvoie à des éléments quantifiables tels que la

charge de travail, le nombre d’heures au travail, les objectifs à atteindre et la masse

d’information à traiter.

La demande émotionnelle est une charge psychologique associée à des comportements sociaux

complexes, planifiés et impliquant des émotions au sein de l’exécution des tâches (De Gaulejac,

2011). Les exigences émotionnelles sont les obligations du métier qui nécessitent de camoufler

ses émotions, de refouler ses larmes, de tenir sa colère et de se montrer calme et professionnel.

Retenir ou maîtriser ses émotions et ses émois est un gage de professionnalisme et

vaut comme signal de compétences professionnelles. À titre d’exemple, dans le milieu

hospitalier, un médecin doit retenir ses émotions devant son patient ; il doit rester professionnel

et distant.

Quant à la demande environnementale, il s’agit d’une demande liée à l’environnement physique

et technique du travail (par exemple, la chaleur, la nuisance et la mauvaise conception des

lieux), mais aussi à l’environnement socio-économique de l’entreprise (par exemple, la

compétition et le changement organisationnel).

Dans une autre perspective, des chercheurs comme French et al. (1982) ont analysé la demande

psychologique sous deux angles, soient la demande quantitative et la demande qualitative. On

dit qu’il y a une demande psychologique quantitative lorsqu’un employé se trouve dans

l’obligation d’effectuer plusieurs tâches à la fois ou encore accomplir des tâches dans un laps

de temps insuffisant. En plus d’avoir à effectuer plusieurs tâches, les employés sont souvent

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interrompus par le téléphone, le courrier ou toute autre forme de technologie de bureau. Ces

interruptions ont comme conséquence de surseoir la réalisation des tâches et d’accroître le

niveau d’effort mental.

À l’égard de ce constat, des chercheurs comme Leonora et Krediet (1999 ; étude citée dans

Sargent et Terry, 2000) ont démontré qu’effectivement les interruptions dans le travail, dues en

partie au progrès technologique, ont un effet négatif sur le bien-être au travail et poussent

l’employé à fournir davantage d’effort mental. Dans ce contexte, Taylor et al. (2008) ont mené

une étude pour mesurer l’impact de la technologie de bureau (les courriels) sur la santé

mentale, le bien-être et l’accroissement de la demande psychologique. Ils rapportent que

l’utilisation des courriels en milieu professionnel nuit à la communication verbale et au

feedback tiré grâce à la communication « face à face » et génère un stress à cause des

interruptions continues.

Pour ce qui est de la demande psychologique qualitative (Sargent et Terry, 2000), elle se

manifeste lorsqu’un employé n’a pas les compétences requises ou les connaissances suffisantes

pour mener à terme son travail (par exemple, si l’employé fait face à une demande

contradictoire, à un conflit ou à une ambigüité de rôle). On parle d’un confit de rôle lorsque

l’opérateur perçoit une inadéquation entre les objectifs à atteindre et les ressources disponibles

pour l’exécution des tâches. Lorsque l’employé fait face à une situation où les objectifs définis

par l’organisation ne sont pas clairement établis et bien planifiés, on parle alors d’une

ambiguïté de rôle.

4.1.2. L’évaluation de la demande psychologique

D’après la littérature, la demande psychologique est une entité spéculative,2 mais qui reste tout

de même mesurable. Tant qu’on était dans un système de produits normés, avec des effets

tangibles du travail, on pouvait considérer que toute augmentation de la durée ou l’accélération

de la cadence du travail entraînait indubitablement une intensification de travail. Sauf que dans

la conjoncture actuelle cet enchaînement cartésien n’est plus approprié, puisque la

représentation de la demande psychologique (charge de travail) est devenue subjective.

2 Dans le sens où la charge de travail est une mesure subjective centrée sur l’être humain plutôt que sur la tâche (Young et

al., 2008).

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Contrairement à la mesure objective, qui est généralement faite sur les facteurs de risques

physiques, les facteurs de risques psychologiques se distinguent par une mesure

systématiquement subjective, c’est-à-dire propre à une situation ou à un individu (Du Tertre,

2006). On peut dire même que la subjectivité est au cœur de la notion de charge du travail et

l’appréciation de la charge reste, avant tout, d’ordre individuel et psychologique (Du Tertre,

2006). La demande psychologique subjective correspond schématiquement à l’investissement

personnel qui conduit un salarié à s’approprier les objectifs de sa tâche et les moyens qu’on lui

donne pour l’accomplir (Du Tertre, 2006).

De ce fait, la perception de l'opérateur à l’égard de sa propre charge ne doit pas être exclue.

C’est dire, une prise de conscience et une meilleure compréhension de sa propre charge

permettent à l’employé d’apporter des recommandations pertinentes et de concevoir une

meilleure adaptation avec son environnement pour assurer un certain bien-être au travail

(Young et al., 2008).

Actuellement, l’évaluation de la charge de travail est un élément fondamental pour la recherche

et pour le développement des interfaces homme-machine (Rubio et al., 2004). La recherche du

niveau de confort optimal au travail, de la satisfaction, de l’efficacité et de la sécurité au travail,

représente la finalité de ces travaux (Rubio et al., 2004). Les techniques de l’évaluation de la

charge de travail mentale ont été essentiellement basées sur des indicateurs de performance, des

indicateurs d’évaluation physiologiques et des mesures subjectives/perceptuelles (DiDomenico

et al., 2004, Rubio et al., 2004, Young et al., 2008).

Des mesures de la performance proposent que la charge de travail ou demande psychologique

puisse être évaluée par rapport à la performance qu’elle induit (Rubio et al., 2004). En ce sens,

tant que les capacités mentales du travailleur ne sont pas outrepassées, la performance peut

rester stable. Par contre, une augmentation de la difficulté de la tâche engendre une

augmentation de la demande (sa durée, sa structure) qui entrainerait, par conséquent, une

diminution de la performance (Rubio et al., 2004). D’autres auteurs comme Young et al. (2008)

se penchent plutôt vers les mesures procédurales (mesures objectives) telle que la technique de

la tâche ajoutée. Cette technique consiste à saturer la capacité de travail de l’employé en

ajoutant une deuxième tâche à la principale ; et procéder par la suite à l’évaluation de la

dégradation de la performance qui en résulte. Ainsi, la tâche additionnelle sert à mesurer la

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capacité résiduelle qui n’a pas été utilisée par l’opérateur lors de son exécution de la tâche

principale (Young et al,. 2008).

En ce qui a trait aux mesures physiologiques (des mesures plus objectives selon Young et al.

[2008]), elles peuvent fournir des indicateurs indirects du travail mental exercé par l’employé

(Rubio et al., 2004; Young et al., 2008;). En particulier, ceux qui permettent d’étudier l’activité

oculaire, la fréquence cardiaque, la contraction musculaire, le mouvement des yeux, la direction

des regards et la distance œil-tâche. Toutefois, ce genre d’évaluation comporte des lacunes qui

se traduisent par une représentation médiocre de la difficulté réelle de la tâche exercée par

l’opérateur. En d’autres termes, cette méthode d’évaluation ne permet pas une analyse complète

et fine des situations réelles du travail (Young et al., 2008, Hart, 2004).

Pour ce qui est des mesures subjectives (l’élément central de cette section sur la mesure de la

charge de travail), elles consistent à demander à l’employé de procéder à une auto-évaluation

de sa propre charge cognitive par le biais d’un questionnaire, d’un entretien ou d’une échelle à

remplir (Young et al., 2008; Hart, 2004; Roacoe, 1990; Rubio et al., 2004). L’information

obtenue permet de connaitre les facteurs de charge à l’œuvre et d’estimer subjectivement la

charge de travail. L’évaluation de la charge de travail par des techniques subjectives a suscité

beaucoup d’intérêt et a été largement utilisée (Rubio et al., 2004; Young, 2008). Elle est une

composante importante de la conception et de l'analyse du système d’évaluation (Rubio et al,

2004). En effet, l’utilisation des cotes numériques ne permet pas de mesurer directement et

précisément la performance et les réactions physiologiques au travail. Toutefois, les mesures

subjectives permettent de mieux quantifier l’effort investi lors de l'exécution des tâches

(DiDomenico et al,. 2008.). En ce sens, la mesure subjective de la charge de travail est utilisée

pour faire une analyse de l’environnement du travail et permet d’obtenir des informations

précises et spécifiques sur les difficultés ressenties lors de l’exécution de la tâche (Rubio et al,

2004).

Cette mesure comporte plusieurs avantages notamment celles de permettre de recueillir plus

facilement les données, posséder une meilleure validité apparente relativement aux mesures

physiologiques (Young, 2008). Elle est moins facile d’utilisation, moins dispendieuse et

relativement plus facile à implanter (Young et al, 2008).

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32

C’est ainsi que plusieurs instruments de mesure de la charge de travail ont vu le jour. Ces

méthodes subjectives peuvent être unidimensionnelles (c'est-à-dire elles exigent une évaluation

globale de la charge de travail) comme l’instrument Cooper Harper, l’instrument de Bedford

(Roscoe et al, 1990) et l’instrument de Borg (DiDomenico et al, 2008). Aussi, elles peuvent être

multidimensionnelles proposant une évaluation sur plusieurs dimensions de la charge de travail

à l’instar du Nationnal Aernautical and Space Administration Task Load Index (NASA-TLX)

(DiDomenico et al., 2008, Rubio et al., 2004, Hart, 2004, Young et al., 2008), du Subjective

Worload Assessment Technique (SWAT) (Rubio et al., 2004), du profil de la charge mentale

(Rubio et al., 2004) et du Multivariate Workload Evaluation Index (Miyake, 2001).

Toutefois, malgré les avantages que recèlent ces techniques d’évaluation, elles font l'objet de

plusieurs critiques. Parmi ces critiques, celles qui concernent le choix des mesures d'auto-

évaluation qui s’opérationnalisent au niveau de l'individu et non du groupe. En effet,

l’évaluation des demandes liées au travail risque de ne pas traduire fidèlement les effets de la

charge prescrite. En contrepartie, une évaluation collective aide à identifier d’une manière plus

objective le niveau des demandes liées au travail (Askenazy, 2004). En effet, le collectif peut

s’avérer un élément crucial pour une meilleure évaluation de la charge de travail. La création

d’une dynamique sociale au sein des organisations, fondée sur la communication et

l’interaction entre l’ensemble du personnel, permet en partie de mieux s’approcher des

conditions et de la situation réelle de travail. En d’autres termes, cela permet de faire le lien

entre les aspects quantitatifs de l’organisation (objectifs, temps, délais) et la réalité du terrain de

travail.

De plus, ce type de mesure subjective ne prend pas en compte certains biais reliés à l’utilisation

de l’enquête. En d’autres termes, lorsqu’un employé mentionne qu'il a une charge de travail

élevée, il ne donne pas nécessairement une appréciation adéquate de son environnement de

travail. Cette forme d’évaluation, bien qu’elle permette d’évaluer avec précision la charge

mentale liée au travail, elle rétrécit toutefois l'étendue de l'étude de la charge mentale à la seule

perception des individus. Elle n’étudie pas le problème de façon holistique et reste tributaire de

la perception de chacun des opérateurs de sa propre charge. Il faut aussi noter qu’aucune

technique d’évaluation n’est a priori supérieure ou meilleure que l’autre. Chaque méthode étant

plus au moins adaptée à un contexte ou à une situation de travail précise.

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33

En guise de conclusion, aujourd’hui, le travail nécessite de la part des employés une

mobilisation plus importante de leurs ressources cognitives. De ce fait, plusieurs outils

d’évaluation de la demande psychologique ont été développés pour mieux comprendre la

charge.

Comme expliqué ci-haut, la demande psychologique (ou la charge de travail) est une entité

mesurable de façon indirecte et implique la prise en compte de trois facteurs, que sont : la

complexité de l’activité mentale pour atteindre le résultat attendu, la contrainte de temps dans

laquelle elle doit être réalisée et les caractéristiques de celui qui l’exécute (par exemple, son

degré d’apprentissage et son expérience).

En effet, la mesure de la demande psychologique est d’une grande importance puisqu’elle

permet une meilleure compréhension des conditions réelles du travail. Dans le cas échéant, si

l’opérateur n’est pas en mesure de gérer et de comprendre la charge à laquelle il est soumis,

cela pourrait conduire à des effets négatifs sur les plans à la fois personnel (des troubles

psychiques et physiques, des troubles du sommeil, des troubles du caractère, l’isolement, la

fatigue mentale et l’épuisement professionnel) et organisationnel (taux de roulement élevé et

absentéisme). L’employé peut être amené à commettre plus fréquemment des erreurs dues à sa

baisse de concentration ; ce qui peut accentuer les risques d’un accident de travail.

Ainsi, dans les nouvelles organisations de travail, la demande psychologique semble être plus

grande et les conditions de travail ne s’améliorent pas nécessairement avec l’accroissement de

l’essor technologique, elles peuvent même se dégrader. Avant d’aborder les effets de la

demande psychologique sur la santé mentale des employés, il semble important d’évoquer

d’abord les conséquences de la technologie sur la charge des employés.

4.1.3. L’impact de la technologie sur la demande psychologique

Les changements survenus dans les organisations post tayloristes, s’inscrivant sous un fond de

nouvelles implantations technologiques (DiDomenico, 2008), ont influencé les conditions de

travail. Avec l’évolution technologique, la charge de travail physique tend à diminuer :

l’homme est de moins en moins utilisé comme un « producteur d’énergie », mais devient plutôt

un « capteur d’énergie » et « de traitement d’information » (DiDomenico, 2008; Rubio et al.,

2004; Le Plat, 1979).

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34

L’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) est partie

intégrante des nouveaux modes de travail adoptés par les entreprises. Elles ont changé le monde

du travail. La technologie est devenue omniprésente dans la plupart des secteurs d’activité et la

proportion des employés qui n’y ont pas accès se réduit régulièrement. L’utilité et la puissance

des technologies, la variété des options offertes et ses fonctions multiples, confient à la

technologie un rôle stratégique dans l’organisation, mais met sous tension le monde

professionnel (Klein, 2012). Certaines études postulent que la dégradation des conditions de

travail, dont l’intensification de la charge de travail, est due à l’avènement des technologies

(LeComte et al., 2009, Lasfargue, 2000). Selon ces chercheurs, la technologie a eu des effets

sur le rythme de travail et sur l’accroissement de la charge en général. Selon l’enquête Works

(2010), il existe une relation très forte entre l’utilisation des TIC et l’accroissement de la

charge, en particulier entre l’utilisation de la technologie et la complexité croissante des tâches.

Ces résultats ont été supportés dans plusieurs secteurs de service comme les services

d’administration publique, de transport et de communication (le Centre d’Analyse Stratégique

(CAS), 2012).

Dans la même continuité, une étude publiée en 2012 par la Direction Générale du Travail

(DGT) et le CAS a permis de dresser un premier état des lieux sur le lien entre l’utilisation des

TIC et la dégradation des conditions de travail. Particulièrement, cette étude s’intéresse aux

tensions psychologiques liées à l’usage des nouvelles technologies de l’information. Les

résultats sont révélateurs, 82 % des cadres français sondés jugent que les outils électroniques

augmentent le volume d’informations à traiter alors que 77 % des cadres affirment que les

technologies les amènent à travailler en dehors de leur lieu de travail et des horaires de travail

(Chevallet et Moatty, 2012). Environ 90 % des cadres français jugent qu’ils doivent travailler «

trop vite » et 56 % estiment que le temps disponible pour exécuter leurs tâches est insuffisant.

De plus selon l’enquête Conditions de Travail réalisé en France en 2005, la plupart des salariés,

soit 68,2 %, sont en contact avec le client ; une simple panne ou un ralentissement du système

technologique peut provoquer des problèmes comme de longues files d’attente, une impatience

chez les clients, une insatisfaction accompagnée de vexation. En retour, c’est la charge

émotionnelle et psychologique des employés qui s’accroît (déception, stress, tension)

(Chevallet et Moatty, 2012).

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35

La TIC a éminemment augmenté les flux informationnels. De plus, grâce aux technologies

mobiles, les employés deviennent joignables à n’importe quel moment et n’importe quel lieu. À

ce propos, une enquête menée en France par SUMER (Surveillance Médicale des Risques,

2003) avec la participation de la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche des Études

et des Statistiques) et la DGT (Direction Générale du Travail), montre que 60 % des employés

utilisent la technologie au travail (ordinateurs, logiciels, internet). Entre autres, ils estiment être

continuellement interrompus par le téléphone et le courrier électronique. Ces interruptions sont

souvent perçues comme une source de tension, puisqu’elles déconcentrent et retardent

l’exécution des tâches (Chevallet et Moatty, 2012). Alors la question se pose à savoir si

l’utilisation de ces technologies contribue à améliorer les conditions de travail ou si au

contraire, elle a des effets négatifs sur la qualité de vie au travail ?

Sans doute, la technologie a favorisé la diminution de la pénibilité physique. En contrepartie,

elle a augmenté la demande psychologique. L’utilisation de la technologie exige, en effet, une

activité mentale comme l’acuité, l’effort perceptif, l’attention et la concentration accrue (Saba,

2003). Pour appuyer ce constat, Du Tertre (2006) mentionne que l’informatisation et

l’automatisation sont des facteurs amplificateurs des astreintes mentales. Les symptômes de la

sollicitation mentale apparaissent sous différentes formes comme la charge informationnelle,

l’ensevelissement sous l’information, le traitement de tâches multiples, le manque de

collaborateurs et le remplacement d’une tâche par d’autres.

Parmi les constats qui se dégagent de cet état des lieux est celui de la nécessité d’accorder une

attention particulière au lien entre l’utilisation des TIC et l’accroissement de la demande

psychologique. En d’autres termes, il faut s’assurer de l’adéquation entre les TIC, les objectifs et

les besoins organisationnels et les aptitudes des employés. L’organisation peut tirer un grand

avantage d’une implantation technologique ou a contrario être lourdement pénalisée en cas de

mauvaise utilisation ou d’inadaptation avec les besoins et les attentes des employés (Klein,

2012).

Après avoir défini la demande psychologique et cerné les facteurs, notamment la technologie,

qui peuvent l’amplifier, il est temps maintenant d’examiner l’effet de la demande

psychologique sur la santé mentale des employés.

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36

4.1.4. Lien entre la demande psychologique et l’épuisement émotionnel

Il importe de noter que dans la littérature, la demande psychologique peut revêtir d’une

connotation négative. Elle fait référence à une sensation de débordement cognitif jumelée à un

sentiment de pression et de stress. Par contre, à l’intérieur de certaines limites, les demandes

psychologiques peuvent générer un bon stress qui motive et pousse au déploiement des

compétences, accroît le sentiment de valorisation et favorise le développement de l’individu

dans son emploi (Vézina et al., 1992). En fait, loin d’être a priori nuisibles, la demande

psychologique place l’individu dans un « état motivationnel » de stress (Karasek, 1990).

Cependant, lorsqu’elle est combinée à une faible latitude décisionnelle, elles peuvent ensemble

générer des tensions psychologiques. Il faut cependant noter que plusieurs chercheurs n’ont pas

réussi à mettre empiriquement en évidence l’existence d’une relation significative entre les

demandes psychologiques et l’apparition de certaines pathologies professionnelles (Vézina et

al., 1992).

Ainsi, les demandes psychologiques exigées par la hiérarchie supérieure, de même que les

efforts déployés par les subordonnés pour effectuer ces demandes sont des éléments qui

entraînent une certaine tension psychique et mentale (Karasek, 1979). La tension générée par

ces demandes n’est pas nécessairement la cause directe et unique de la prévalence de la détresse

psychologique en milieu de travail. En effet, si les objectifs (ou les défis) sont jugés

surmontables et que leur réalisation paraît réaliste et faisable, la tension engendrée peut être

perçue comme positive et incitatrice pour aller de l’avant afin de relever de nouveaux défis

(Karasek, 1979; Vézina et al., 1992).

À moins que d’autres facteurs organisationnels soient en mesure d’absorber le surplus de

travail, les demandes psychologiques semblent être pathogènes affectant ainsi la santé mentale

(Karasek, 1990). En fait, certaines études (Bourbonnais et al., 1998; Karasek et Theorell, 1990;

Van der Doef et al., 2000) supportent l’impact des contraintes psychosociales sur l’incidence

des problèmes de santé mentale (Van der Doef et al., 2000). D’ailleurs, le modèle de Karasek et

Theorell (1990) a été testé empiriquement à maintes reprises pour montrer que la combinaison

de ces deux dimensions représente un précurseur de symptômes subséquents de tension

psychologique (Brisson et al., 2001).

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37

Dans une perspective semblable, en se basant sur les travaux de Maslach et Jackson (1981), de

nombreux chercheurs se sont penchés sur les répercussions des demandes psychologiques sur

l’apparition du syndrome de l’épuisement professionnel, lequel a été relativement peu étudié à

partir du modèle de Karasek (Brisson et al., 2001). Selon Maslach et Jackson (1981) et Van der

Doef et al. (2000), la relation entre le burnout et les demandes psychologiques n’est pas directe

puisqu’il faut en tenir compte plusieurs éléments comme la perception subjective de la charge,

la complexité des relations interpersonnelles et l’environnement de travail.

Dans la même continuité, l’étude de Leblanc et al. (1998) a montré que les exigences

professionnelles sont particulièrement associées à l’épuisement émotionnel, surtout dans le

secteur hospitalier. Lourel et al. (2004) soulignent que le lien entre les exigences

psychologiques intensives et l’épuisement émotionnel a été démontré empiriquement.

D’ailleurs selon cette étude, la dimension de l’épuisement professionnel la plus influencée par

les contraintes psychologiques est celle d’ordre émotionnel (Ruiller, 2008).

Dans une optique plus globale, Van Der Doef (1999) mentionne que le lien entre la demande

psychologique et le burnout est véridique, voire incontestable, et que l’influence des exigences

psychologiques est directe sur les trois dimensions du burnout. Cependant, Boles et al. (1997)

rapportent que seul le conflit de rôle a une influence significative sur la dimension émotionnelle

de l’épuisement. Cette relation est considérée comme étant « linéaire », c’est-à-dire plus la

dimension de conflit de rôle est perceptible pour les individus, plus le risque de burnout, plus

spécifiquement « l’assèchement des ressources émotionnelles », est élevé.

Mais d’une façon schématique, l’inadéquation entre les valeurs de l’individu et les règles

organisationnelles, les contraintes au travail et l’ambigüité des informations peuvent former un

facteur d’usure. Ajoutons à cela les responsabilités sous contraintes, l’investissement dans les

nombreux rôles professionnels, la difficulté de jongler vie professionnelle et vie personnelle,

sont tous des facteurs qui créent un terrain favorable à l’assèchement des ressources

émotionnelles.

Certains auteurs ont même soutenu l’hypothèse que la demande psychologique, le stress et le

burnout sont des concepts distincts pour désigner un même vécu d’une situation de travail

pénible (Falzon et Sauvagnac, 2004). Ces derniers soulignent que ces notions, bien que

différentes, comportent un lien d’interdépendance entre elles.

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38

Hypothèse 3. Il existe une association positive entre la demande psychologique et

l’épuisement émotionnel.

4.2. La latitude décisionnelle

Aussi nommée « autonomie » ou « contrôle », la latitude décisionnelle est souvent abordée

dans la littérature en rapport avec la demande psychologique. Selon Pride (2005), le contrôle

est l’un des éléments qui contribue le plus à différencier l’expérience ou la perception d’une

charge normale de celle d’une surcharge. Entre autres, cet aspect organisationnel représente un

facteur prépondérant dans certains modèles théoriques liés à la gestion du stress, dont le plus

fameux est le « Job demand-control » élaboré par Karasek (1990).

4.2.1. Définition conceptuelle

Le modèle de Karasek est le plus répandu pour étudier le vécu et le stress des employés (Vézina

et al., 2008). D’après Kristensens (1995), « il n’est pas exagéré de dire que c’est le modèle le

plus influent dans la recherche sur l’environnement psychosocial au travail, le stress […] ».

La base théorique du modèle repose sur le constat qu’une situation de travail caractérisée par

une combinaison de demande psychologique élevée et d’une autonomie décisionnelle faible

augmente le risque de développer un problème de santé physique et mentale (par exemple,

maladie cardiovasculaire, tension artérielle) (Karasek et Theorell, 1996). Pour aller plus loin

dans l’analyse, ce modèle permet d'appréhender deux dimensions fondamentales du travail,

notamment la demande psychologique et la latitude décisionnelle.

La demande psychologique fait référence à la charge de travail, aux contraintes de travail, aux

exigences mentales ou sollicitations cognitives et au temps disponible pour compléter les tâches

à réaliser (Vézina et al., 2008). Quant à la latitude décisionnelle, elle renvoie aux possibilités de

maîtriser l'organisation de son travail, de prendre des décisions, de posséder une autonomie

d’action et de décision, d’être comptable de ses initiatives, mais aussi de pouvoir être créatif.

Selon Vézina et al. (2008), la latitude décisionnelle recouvre deux notions fondamentales : le

contrôle sur la tâche (« Decision Authority ») et l’utilisation des qualifications (« Skill

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39

Discretion »). Le contrôle sur la tâche évoque la possibilité que l’employé prenne ses propres

décisions et choisit comment réaliser son travail.

Sur ce, l’autonomie de décision, correspond à la discrétion laissée au travailleur pour réaliser

les objectifs fixés par la direction. Selon Karasek (1979), cette autonomie transforme le stress

associé à l’exécution de la tâche en énergie positive. Par contre, en l’absence de cette

autonomie l’énergie positive se transformera en pression mentale (Karasek., 1979).

Quant à l’utilisation des qualifications elle réfère à la possibilité qu’ont les employés pour

parfaire leurs compétences et leurs habilités personnelles et d’en développer d’autres, on parle

ainsi de « l’autonomie fonctionnelle » (Karasek et al, 1985).

Selon le modèle de Karasek (1990), la combinaison de la demande psychologique (faible ou

forte) et de la latitude décisionnelle (faible ou forte) engendre quatre situations

d’environnement de travail : travail actif, travail passif, travail détendu et travail tendu.

Dans le milieu de travail, on parle d’une situation de travail actif lorsque le salarié subit une

forte demande psychologique, mais en contrepartie il jouit d’une grande latitude décisionnelle.

Cette situation est la plus acceptable pour les travailleurs, puisque malgré la présence d’une

forte demande psychologique, ils ont une latitude décisionnelle élevée (Karasek et Theorell,

1990). On parle alors d’apprentissage et d’initiation ; les travailleurs qui vivent une telle

expérience seraient les plus actifs en dehors même du milieu de travail.

En situation de faible demande psychologique associée à une faible latitude décisionnelle, on

parle plutôt de contexte de travail passif. Cette combinaison apporterait une situation qui

n’insuffle pas la motivation, qui mènerait à un apprentissage négatif et une perte progressive

des compétences. Les faibles demandes peuvent être aussi problématiques dans la mesure où

cela engendre ce qu’on appelle une sous charge (l’employé ne dispose pas suffisamment de

travail pour maintenir son attention et son engagement envers son organisation). D’ailleurs

plusieurs recherches ont démontré que l’ennui et la monotonie conduisent autant à l’anxiété et à

la dépression que les demandes de travail.

On parle d’une situation de « travail détendu » lorsque le salarié assume une demande

psychologique faible associée à une forte latitude décisionnelle.

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40

Finalement, lorsque le salarié se trouve en situation de forte demande psychologique et de

faible latitude décisionnelle, on parle d’une situation « de travail tendu ». Cette dernière

situation est la plus indésirable et la plus à risque pour l’employé. Cet environnement de travail

accroît considérablement l’éventualité de vivre une tension psychologique qui se traduit par de

l’insomnie, des problèmes cardio-vasculaires, de la pression, de l’anxiété et même de

l’épuisement professionnel.

Suivant les mêmes principes du modèle de Karasek, Hockey et Earle (1996) s’intéressent à la

fatigue associée à une demande exigeante au travail. Ils examinent le rôle du renforcement de

contrôle dans la perspective de réduction des effets de la fatigue mentale (Hockey et Earle,

2006). Lorsque la fatigue mentale est combinée à un niveau élevé de contrôle, les signes de

d’anxiété sont moins présents. À l’inverse, lorsque la fatigue mentale est combinée à un faible

niveau de contrôle, les symptômes de stress et d’anxiété sont plus palpables.

Les auteurs expliquent ce résultat par une organisation et une gestion quant au but à atteindre

dans le milieu de travail. Les individus peuvent répondre plus efficacement aux changements et

aux problèmes organisationnels en alternant leurs tâches tout en modifiant leur façon de faire,

le rythme et le contenu de l’information à traiter (Hockey et Earle, 2006). Dans la même

perspective, Hockey et Earle (2006) considèrent que le stress lié au travail et la fatigue mentale

sont une réponse à la combinaison contrôle/demande plutôt qu’à l’effet de facteurs isolés reliés

à la demande de travail.

4.2.2. Lien entre latitude décisionnelle et demande psychologique

Le modèle de demande/contrôle de Karasek a pris une envergure internationale (Falzon et

Sauvagnac, 2004) en raison de son apport considérable à la production de la connaissance

scientifique sur l’importance des liens entre les facteurs psychosociaux reliés au travail et le

développement de plusieurs pathologies. Plusieurs recherches prouvent l’effet pathogène de ces

facteurs principalement sur la santé mentale, ainsi que le lien d’interdépendance entre une forte

demande psychologique, une faible latitude décisionnelle et l’apparition de pathologies

cardiovasculaires.

N’empêche que le modèle de Karasek et Theorell est considéré très « simpliste ». En effet,

une revue des études ayant testé et évalué la force empirique du modèle de Karasek (1979),

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suggère que le pouvoir décisionnel peut amoindrir la demande psychologique au travail

(Hockey et al., 1996; Johnson et Hall, 1988; Karasek et Theorell, 1990; Macdonald, 2003).

Toutefois, ces faits n’ont pas été supportés. Selon Bakker et al. (2005), la latitude décisionnelle

n’influence pas nécessairement la charge de travail. Ces deux variables organisationnelles se

caractérisent par une grande diversité conceptuelle ayant des ramifications avec d’autres

facteurs liés l’organisation du travail et à l’individu lui-même, ce qui rend difficile

l’établissement de liens entre eux (Bakker et al., 2005).

À titre d’exemple, le manque de latitude décisionnelle est attaché à plusieurs antécédents

organisationnels qui peuvent amplifier ou au contraire diminuer la perception d’une demande

psychologique au travail. Le conflit de rôles et l’ambiguïté de rôle sont deux facteurs

importants qui affectent la dimension de contrôle. Donc avant d’établir un lien entre la

demande psychologique et la latitude décisionnelle, il faut tenir compte des autres antécédents

organisationnels et individuels qui influencent à leur tour la demande psychologique et le

contrôle (Bakker et al., 2005; Beehr et al., 2001).

Partant du même constat, certains auteurs ont testé empiriquement le modèle de Karasek et ont

déduit que la latitude décisionnelle ne réduit pas nécessairement les effets de la charge de

travail sur l’individu (Beehr et al., 2001). Dans le même ordre d’idée, les études démontrent

que la latitude décisionnelle n’affecte pas la tension psychologique de la personne, mais plutôt

la satisfaction et plus spécifiquement l’accomplissement de soi et l’intention de quitter son

travail (Beehr et al, 2001). L’impact du contrôle sur la tension psychologique ne parait pas plus

important que celui d’autres facteurs stressants (Beehr et al., 2001).

Il faut noter que même si l’opérateur se réjouit d’une autonomie et d’une latitude décisionnelle,

ceci n’est pas un garant de bonnes conditions de travail. Une grande marge de manœuvre

suppose une grande responsabilisation qui peut enrichir le travail ou générer un stress. De plus,

la marge d’initiative n’entraine pas une absence de la hiérarchie ou d’un contrôle coriace des

résultats.

Dans la même optique, bien que l’autonomie décisionnelle (ou le contrôle) comporte plusieurs

avantages, il est possible que cette autonomie génère aussi une surcharge de travail. La

responsabilisation engendrée par l’encouragement à l’initiative des employés à participer dans

le processus décisionnel implique aussi un accroissement de la charge de travail. Le contrôle

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42

peut être en effet bénéfique ou nuisible : un contrôle élevé peut réduire la charge, mais aussi

l’augmenter s’il contribue à une intensification de la responsabilité.

Dans une perspective semblable, Hamon-Cholet (2001) postule la présence de deux types

d’autonomie décisionnelle. Il s’agit de l’autonomie d’initiative et de l’autonomie procédurale.

L’autonomie d’initiative semble bénéfique, car les opérateurs choisissent les moyens et les

modes de fonctionnement, qu’eux jugent pertinents, pour mener à terme leurs objectifs. En

contrepartie, l’autonomie procédurale donne une certaine latitude aux employés, mais sous

contrainte. C’est dire que la direction accorde aux employés des marges de manœuvre, mais

encadrées et limitées par des procédures très strictes. Plus de latitude décisionnelle engendrerait

une plus forte responsabilisation des salariés (Hamon-Cholet 2001). La latitude enrichit le

milieu de travail, mais peut générer l’inquiétude chez l’employé de ne pas être à la hauteur des

attentes de ses supérieurs. Selon ce même auteur, cette responsabilisation s’accompagne, dans

bien des cas, d’un devoir d’assumer conjointement un ensemble de tâches complexes et

connexes. Les auteurs avancent aussi que la présence d’une latitude décisionnelle peut être

accompagnée d’un contrôle hiérarchique.

Dans le même ordre d’idée, un article publié en 2011 sur le site canadien « Passeport Santé »3,

rapporte une étude4, dont les résultats contredisent le modèle de Karasek. Cette étude montre

que des cadres ayant une activité comprenant une forte demande psychologique et une forte

latitude décisionnelle sont plus favorables à développer « une hypertension artérielle cachée »,

c'est-à-dire que la tension augmente au travail et se normalise en dehors du travail. À ce propos,

le docteur Xavier Trudel souligne que : « l’analyse de nos données montre que les hommes qui

occupent un emploi stressant combinant une demande psychologique élevée et une grande

latitude décisionnelle sont davantage sujets à l’hypertension cachée » 5. Sous un autre angle, ce

même chercheur rapporte que les dimensions étudiées dans ce modèle sont certes

fondamentales, mais elles restent insuffisantes et très réductrices de la réalité du monde de

travail. Alors, selon lui, pour bien comprendre ce que vivent les salariés, il faut ajouter une

nouvelle dimension portant sur le « sens du travail ». Un autre constat qui ressort de cette étude

est que le modèle de Karasek ne distingue pas entre deux facteurs clés, soit le « contrôle

3 http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Nouvelles/Fiche.aspx?doc=hypertension-cachee-facteur-de-

risque-meconnu-lie-stress-au-travail_20110112 4 Cette étude a été menée par l’équipe du docteur Xavier Trudel de l’Université Laval

5 http://www.ami.mr/filesfr/pdf/horizons%205422bis.pdf

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perçu » et le « désir de contrôle ». Ainsi, il importe de souligner que le manque ou l’absence de

latitude décisionnelle n’affecte pas ceux qui ont un faible désir de contrôle (Gaziel, 1989).

Le modèle de « Demandes\Ressources » de l’environnement de travail conceptualisé par des

chercheurs hollandais (Demerouti et al., 2001) et inspiré des travaux de Karasek (1979) et de

Hobfoll (1989), représente une autre alternative pour expliquer l’interaction entre la demande

au travail et le contrôle, dans une dynamique complexe de l’environnement de travail.

Il importe de noter que ce modèle est plus contextuel que celui de Karasek (1979), car il

s’applique seulement dans l’étude d’une thématique particulière, celle de l’épuisement

professionnel. Ce modèle tente d’expliquer le développement de l’épuisement professionnel

suite à une exposition soutenue à des demandes exigeantes au travail combinée à l’absence de

ressources. En fait, c’est l’interaction entre les demandes et les ressources au travail qui

détermine le développement du burnout. Plus l’écart entre ces deux dimensions s’accroit, plus

la personne risque de développer un burnout.

Les demandes du travail réfèrent à « des aspects physiques, sociaux et organisationnels qui

demandent un effort physique ou mental et sont associés à certains coûts physiologiques et

psychologiques » (Demerouti et al., 2007, p.312). Parmi les contraintes, on cite la charge de

travail, la pression temporelle et les demandes issues de l’environnement de travail. En

contrepartie, les ressources du travail renvoient aux « aspects physiques, psychologiques,

sociaux et organisationnels du travail pouvant : 1) mener à la réalisation des objectifs

organisationnels, 2) diminuer les demandes et les coûts physiologiques et psychologiques et 3)

stimuler le développement personnel » (Demerouti et al., 2007, p. 312).

Il est important de noter que dans ce modèle, les ressources renferment un champ plus vaste

que celui du contrôle tel que conceptualisé par Karasek (1979). En effet, selon Bakker et al.

(2003), les ressources au travail peuvent prendre plusieurs formes au niveau : 1) de

l’organisation (absence d’ambiguïté\conflit de rôle, participation au processus décisionnel,

opportunités d’avancement, sécurité au travail), 2) des relations interpersonnelles (soutien

social du superviseur et\ou des collègues de travail) et 3) de la tâche (autonomie, rétroaction,

clarté).

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Alors, d’une façon schématique les emplois caractérisés par des demandes de travail

importantes amènent à une détérioration de la santé mentale et physique qui finit par un

épuisement professionnel. Alors que les emplois caractérisés par de faibles ressources (par

exemple, manque de soutien et de latitude décisionnelle) sont associés à une réduction de la

motivation et de l’apprentissage qui résulte en un désengagement envers l’organisation de

travail (Demerouti et al., 2001). Ces derniers rejettent par conséquent l’hypothèse interactive du

modèle demandes\contrôle de Karasek (1979) et suggèrent que les demandes et les ressources

sont deux concepts distincts qui influencent indépendamment le burnout.

Dans cette perspective, mais dans un contexte différent, celui de l’utilisation des TIC, Day et al.

(2010) utilisent le modèle de JD-R de Demerouti et al., (2001) pour évaluer l’impact de la

dimension du contrôle sur la charge de travail. La latitude décisionnelle se comprend dans le

contexte technologique par une faculté de contrôler, gérer et utiliser la technologie aisément

sans avoir recours aux autres pour effectuer les tâches. Alors, selon ces auteurs, si les

conditions favorables d’utilisation, d’autonomie et de flexibilité sont réunies, les TIC procurent

des gains considérables en ce qui concerne l’exécution des tâches et l’atténuation de la charge.

Hypothèse 4. Il existe une association négative entre la latitude décisionnelle et la demande

psychologique.

Après avoir traité les différents points de vue sur la possible relation entre la latitude et la

demande psychologique au travail, il serait intéressant de poursuivre notre analyse et essayer de

savoir, dans un premier lieu, comment la technologie peut affecter la latitude décisionnelle au

travail. En deuxième lieu, savoir comment la dimension de la latitude peut à son tour entrainer

le burnout.

4.2.3. Impact de la technologie sur la dimension de contrôle

Dans la plupart du temps, la technologie a un effet structurant sur l’organisation de travail.

Les TIC ont été déployées dans le milieu de travail pour normaliser les processus de production

ou pour prescrire le déroulement et le contenu du travail. Les employés se trouvent, dans bien

des cas, dans l’obligation de travailler selon un processus modélisé qui leur impose de se

conformer aux modes opératoires et aux exigences de l’outil (Klein et al., 2012; Bernard et al.,

2008) même si ce n’est pas toujours approprié à la réalité du travail et aux besoins des

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employés et des clients (sous-estimation des aléas, vulnérabilité du système, panne, etc.)

(Chevallet et Moatty, 2012).

Dans la même perspective, Greenan et al. (2012) postulent que les employés qui travaillent

pour une entreprise équipée d’une TIC, sont les plus susceptibles d’avoir une latitude

décisionnelle faible. Les salariés sont souvent appelés à appliquer les consignes de façon stricte.

En effet, l’usage d’une TIC amène à une forme « d’hyperrationalisation », standardisant non

seulement les objectifs organisationnels, mais prescrivant aussi les modes opératoires. Ce qui a

un impact sur les marges de manœuvre des salariés (Burlet et al., 2009) et sur l’intensification

de la demande psychologique permise par les TIC. Ces facteurs figurent parmi les contraintes

organisationnelles qui réduisent la qualité de vie au travail et accroissent la charge émotionnelle

des opérateurs pouvant être coincés entre les demandes des clients et les exigences du système.

En lien avec l’usage de logiciels qui standardisent aussi le travail, Chevallet et Moatty (2012)

citent quelques risques de l’usage de la technologie sur les conditions de travail de l’utilisateur.

Selon ces auteurs, l’employé est confronté à travailler selon un processus informatisé qui ne lui

laisse plus la possibilité de mobiliser ses compétences et son savoir-faire. Aussi, la

complexification des procédures véhiculées par les logiciels favorise l’émergence des

demandes contradictoires. En effet, on assiste dans le milieu de travail à deux logiques

contradictoires soit la nécessité d’industrialisation et la personnalisation du service. Cette

contradiction est vécue au quotidien par l’employé, ce qui influence négativement son état

psychologique (la fatigue, le découragement et la démotivation), sa performance et surtout la

qualité des services qu’il rend au client (temps consacré à la saisie informatique et à la

résolution des problèmes techniques).

Les domaines d’activités qui sont en interaction directe avec le client doivent reposer sur la

personnalisation de la relation, la compréhension des besoins des clients, le conseil et le

dialogue. Toutefois, les salariés sont confrontés à un risque de standardisation de la relation

client, ajoutant une latitude décisionnelle encadrée par un système d’information (Chevallet et

Moatty, 2012). C’est l’exemple du personnel infirmier où le dialogue et la relation avec le

patient sont guidés par l’informatisation du dossier patient qui peut concurrencer le temps passé

aux soins.

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De plus, cette rationalisation et ce caractère prescriptif du travail induit par la technologie

laissent une marge de manœuvre réduite et peu de place pour le dynamisme et l’utilisation des

compétences. Dans certaines études, il a été montré qu’il existe un lien étroit entre les

procédures coriaces, le manque de latitude et la tension au travail (Dab, 2008). En effet,

l’employé passe d’une activité qui demande un effort mental et comportant une certaine

autonomie à une activité informatisée qui impose l’ordre de réalisation du travail et instaure

une dépendance à la technologie. Cela peut réduire le sens de l’accomplissement et cause une

certaine tension au travail. L’employé se sent en fait instrumentalisé par l’organisation et

remplacé par la machine qui lui impose le mode de fonctionnement et lui dicte le déroulement

de son travail.

Cependant, il faut rappeler que les TIC comme moyen d’exécution des tâches sont rarement la

cause directe et unique de bouleversement des conditions de travail ou de perte de l’autonomie.

En réalité, les technologies constituent un relais venant accompagner d’autres contraintes qui

ensemble amplifient les évolutions dans le travail (Klein et al., 2012)

En guise de conclusion, on a pu voir que la technologie peut affecter de façon directe ou

indirecte les conditions de travail des employés spécifiquement en ce qui concerne leur charge

de travail ou leur latitude décisionnelle. Dans la continuité des choses, la section suivante

discute de l’effet que peut avoir le manque de latitude décisionnelle sur l’épuisement

professionnel.

4.2.4. Lien entre la latitude décisionnelle, l’accomplissement personnel et la

dépersonnalisation

4.2.4.1. Lien entre la latitude décisionnelle et l’accomplissement personnel

Sur la base de la littérature recensée, la question du contrôle a souvent été traitée en fonction de

la demande psychologique, mais très peu étudiée comme variable indépendante. Partant de ce

constat, cette recherche s’intéresse aux répercussions de la latitude décisionnelle sur la santé

mentale. Plus spécifiquement, elle examine les effets de la latitude décisionnelle et de

l’accomplissement personnel sur la dépersonnalisation.

Dans le modèle physiologique proposé par Selye (1976) (cité dans Falzon et Sauvagnac, 2004),

l’auteur aborde la latitude décisionnelle comme un « mécanisme d’adaptation » permettant à

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l’individu d’affronter les turbulences de son environnement. Ce mécanisme permet de contrer

les agents stressants et d’augmenter la vigilance à l’égard de certains facteurs organisationnels

tels que la surcharge de travail, l’ambiguïté des rôles et le conflit des rôles. Cependant, ce

même mécanisme peut aussi conduire à des pathologies et à des troubles comme l’anxiété,

l’obsession, l’insomnie et l’épuisement professionnel. Et c’est le second aspect qui est mis en

avant dans la conjoncture actuelle (Falzon et Sauvagnac, 2004).

Dans la littérature, certaines études supportent l’association entre la latitude décisionnelle,

l’épuisement professionnel et l’accomplissement personnel (Demerouti et al., 2004; Ponnelle,

2008; Verhoeven et al., 2003). En effet, une étude européenne (Euroteach), portant sur 2796

enseignants répartis dans 13 pays, a révélé que l’autonomie décisionnelle est principalement

corrélée à l’accomplissement personnel (Verhoeven et al., 2003).

À l’origine, la question de l’épuisement professionnel prend son ancrage théorique dans le

modèle de Karasek (1979) qui postule qu’une demande psychologique élevée associée à une

faible marge de manœuvre augmentent les tensions au travail et engendrent des atteintes à la

santé psychologique. Dans la même perspective, tout en s’appuyant sur des évidences

empiriques, Verhoeven et al. (2003) montrent que les enseignants qui jouissent d’une latitude

décisionnelle « dépersonnalisent » moins et s’accomplissent davantage sur le plan personnel.

En d’autres termes, plus ils ont la latitude dans la réalisation du travail et la possibilité de

participer dans la prise des décisions, plus ils éprouvent un sentiment d’accomplissement

personnel. En fait, cette étude ne fait pas l’exception, le possible lien existant entre l’autonomie

décisionnelle et l’accomplissement personnel a été montré dans plusieurs autres études

cliniques à l’instar de Näring et al. (2006).

Hypothèse 5. Il existe une association positive entre la latitude décisionnelle et

l’accomplissement personnel.

4.2.4.2. Lien entre la latitude décisionnelle et la dépersonnalisation

Le burnout est un processus pathologique qui dépend des conditions psychosociales de

l’organisation du travail. La personne se vide progressivement de l’intérieur en tentant en vain

de s’adapter aux réalités contraignantes de son emploi (Schaufeli et al., 2004). Plusieurs

chercheurs considèrent que le burnout est la conséquence d’une violation « du contrat

psychologique ou moral » qui met en balance les efforts de l’employé contre les demandes de

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l’employeur (Alarcon, 2011; Bourbonnais et al., 1999; Maslach et al., 2001; Schaufeli et al.,

2004). Ce que produirait le burnout est le déséquilibre entre la « contribution » du travailleur et

la « rétribution» de l’employeur (Maslach et al,.2001).

De nombreuses études (Bakker et al., 2005; Bourbonnais et al., 1999; Lindblom et al., 2006)

traitant du phénomène de l’épuisement professionnel propre à l’environnement du travail, ont

évoqué la dimension de la latitude décisionnelle pour montrer son effet sur le burnout. Selon

ces études, une faible latitude décisionnelle est associée à des niveaux élevés d’épuisement

professionnel.

Des études plus récentes viennent appuyer ce constat et confirmer l’existence d’une association

négative entre la latitude décisionnelle et le syndrome de l’épuisement professionnel. Ainsi,

une étude allemande de Kowalski et al. (2010), réalisée auprès de 1325 infirmières, rapporte

que la latitude décisionnelle est associée au burnout, plus spécifiquement à l’épuisement

émotionnel, la seule dimension du burnout retenue dans cette l’étude. Dans une autre étude

(Alarcon, 2011), la latitude décisionnelle est analysée selon deux dimensions, soit l’utilisation

des compétences et la latitude décisionnelle. L’auteur rapporte que ces deux dimensions

influencent différemment les dimensions de l’épuisement professionnel (Alarcon, 2011). Taris

et al. (1999) rapportent un lien significatif entre la latitude décisionnelle et les trois dimensions

du burnout. Sundin et al. (2007) associent des niveaux faibles de latitude décisionnelle à des

niveaux élevés de dépersonnalisation et d’épuisement émotionnel. Dans la même lignée, une

récente étude de Marchand et Durand (2011) rapporte une association significative entre la

latitude décisionnelle et l’épuisement émotionnel.

Donc d’une façon générale, pour faire face au manque de latitude décisionnelle, certaines

personnes développent ce qu’on appelle des « idéologies défensives de métier », un mécanisme

de protection contre la tension soutenue au travail. Il se manifeste par une dépersonnalisation au

travail pour faire face aux contraintes organisationnelles, notamment le manque de latitude

décisionnelle (Marchand et Durand, 2011)

Il faut noter aussi que d’autres n’ont pas rapporté des associations significatives entre

l’utilisation des compétences et/ou la latitude décisionnelle avec l’apparition de l’épuisement

professionnel. La latitude décisionnelle est ainsi considérée comme une variable régulatrice de

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la tension perçue au travail et non un facteur clé de la prévalence de l’épuisement au travail

(Bakker et al., 2005; Evans et al., 2006).

Hypothèse 6. Il existe une association négative entre la latitude décisionnelle et la

dépersonnalisation.

4.3. Soutien social

Dans cette section, il est question d’examiner la variable du soutien social, perçue comme une

variable déterminante dans la littérature sur la santé physique et mentale. Tout d’abord, la

définition conceptuelle ainsi que les différentes dimensions de cette variable seront présentées.

Ensuite, il sera question du lien existant entre la demande psychologique et le soutien social

avec une attention particulière aux effets de la technologie sur le soutien social au travail.

Enfin, sera abordé le lien entre le soutien social et les dimensions de l’épuisement

professionnel, soient l’épuisement émotionnel et l’accomplissement personnel.

4.3.1. Définition et dimensions du soutien social

En 1988, Johnson et Hall proposent l’adjonction d’une troisième dimension au modèle initial

de Karasek (1979). Ils introduisent le soutien social afin de prédire les risques

cardiovasculaires.

Plusieurs terminologies ont été utilisées pour définir le concept du soutien social. Ce dernier a

été compris selon plusieurs acceptations. Dans une perspective sociologique, le soutien social a

été compris comme étant « un réseau social d’obligations mutuelles englobant la personne et un

groupe de personnes ». D’un point de vue psychologique, le soutien social se réfère « à la

disponibilité et à l’évaluation subjective de la personne concernant les relations qu’elle

entretient avec les membres de son réseau de soutien social » (Ruiller, 2008). Selon Renaud

(1987), le soutien social est « le résultat de l’intégration de l’individu dans différents réseaux

qui lui fournissent un appui cognitif, normatif, affectif et matériel ». Dans la même veine,

Barrera (1986) définit le support social comme étant « le nombre de relations sociales qu’un

individu a établies avec autrui, la fréquence des contacts sociaux effectifs avec ces personnes et

l’intensité de ces liens » (Ruiller, 2008). Pour finir, selon Cobb (1976), un des pionniers dans

ce domaine, le soutien social est surtout « ce qui se passe au niveau humain et affectif entre

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deux personnes; c'est la communication d'affection, d'estime de soi et du sentiment

d'appartenance à un groupe ».

Bozzini et Tessier (1985) soutiennent que le support social représente un ensemble de

ressources auxquelles l’individu fait appel pour faire face aux difficultés de la vie. Ils insistent

sur le fait que le soutien social ne doit pas être confondu avec la participation ou l'intégration

sociale, qui serait associée plutôt à un sentiment d’appartenance à la communauté (Streeter et

Franklin, 1992) ou à l'intégration de l'individu dans la société en général. Le soutien social se

manifeste dans ce qu’on appelle « un réseau social » (une sphère restreinte comprenant la

famille, les collègues de travail et les amis). Ces rapports sont un indicateur des ressources

sociales qui sont présentes pour apporter leur soutien lors d’un tourment (Streeter et Franklin,

1992; étude citée dans Ruiller, 2008).

D’entrée de jeu, il est utile de signaler qu’il existe une multitude de points de vue concernant le

sens du soutien social. La communauté scientifique n’est pas parvenue à un accord sur sa

définition conceptuelle. Cependant, il existe un consensus sur sa multi-dimensionnalité

(Barrera, 1986). Par exemple, Barrera (1986) a identifié trois dimensions du soutien social, que

sont : l’intégration sociale (social embeddedness), le soutien reçu (enacted support) et la

perception du soutien social (perceived social support). Vaux (1992) propose aussi trois

dimensions : les ressources du réseau de soutien (support network resource), les

comportements de soutien (supportive behavior) et l’appréciation du soutien (support

appraisals). Pierce et al. (1996) proposent trois dimensions : le réseau de soutien (supportive

network), le comportement de soutien (supportive relationships) et la perception subjective du

soutien social (perceived social support). Le réseau de soutien représente « l’aide effective

apportée à un individu par son entourage » (Pierce et al., 1996). Vaux (1988) le définit comme :

« un sous-ensemble du réseau social, vers qui la personne se tourne pour obtenir de l’aide ». Il

se traduit par l’écoute, le prêt d’argent, l’assistance, l’affection envers ses pairs, l’inquiétude

envers l’autre et la compréhension. C’est l’ensemble des comportements traduisant une

expression manifeste d’aide et des gestes matériels visant à apporter du soutien à autrui. Enfin,

la perception subjective du soutien social fait référence à la perception (l’évaluation cognitive)

d’une personne à l’égard du soutien qu’elle reçoit d’autrui (Barrera, 1986). Cette appréciation

peut se traduire par un sentiment de satisfaction à l’égard du soutien reçu, de l’adéquation et de

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l’utilité du soutien ainsi que la confiance en ce que le soutien sera disponible en cas de besoin

(Vaux, 1992).

4.3.2. Lien entre le soutien social et la demande psychologique

D’emblée, le soutien social englobe toutes les interactions sociales présentes dans

l’environnement de travail. Il peut prendre plusieurs formes comme l’entraide entre les

collègues en cas de problèmes, l’ouverture envers l’autre, ainsi que la possibilité d’interagir et

de communiquer avec ses collègues, de se réunir et de se socialiser, d’écouter et de sympathiser

avec l’autre (Sargent et Terry, 2000). Le soutien social peut provenir aussi de la hiérarchie

supérieure sous la forme d’un encouragement ou d’un système de rétroaction (Theorell et

Karasek, 2000).

Avec l’ajout d’une troisième variable au modèle « Travail-demande-Contrôle » de Karasek, ce

dernier a évolué pour devenir « Demande-Contrôle-Soutien » (Karasek et Theorell, 1990).

Dans le premier modèle et comme on a vu précédemment, Karasek propose l’hypothèse selon

laquelle une demande psychologique élevée doit être jumelée à une latitude décisionnelle

élevée pour esquiver tout risque de santé. Si tel n’était pas le cas, c’est-à-dire dans le cas où il y

a une demande psychologique forte juxtaposée à une faible latitude décisionnelle, cette

situation générerait « des phénomènes de tension » (« job-strain ») pouvant engendrer des

problèmes cardiovasculaires (Karasek et Theorell, 1990). Alors, si à cela s’ajoutait le manque

de soutien social, les facteurs de risque prennent de l’ampleur et on parle dans ce cas de

« tension au travail avec isolement » (« iso-strain ») (Karasek et Theorell, 1990).

Dans cette lignée, lorsqu’on évoque la notion du soutien social, il faut mettre au point que cette

variable comporte plusieurs types. En effet, il est crucial de spécifier les différents aspects de

soutien, car le contexte spécifique de l’assistance ou du support peut varier selon la personne ou

la situation présente. Ainsi, selon la situation, certains types de soutien peuvent être inadaptés

ou inappropriés à la personne et peuvent jouer un rôle inverse, celui d’accentuer la demande

psychologique.

Sur ce, Bruchon-Schweitzer (2002) souligne que les différents types de soutien doivent être

concordants avec les caractéristiques de la situation présente ainsi qu’avec les attentes et les

besoins de la personne concernée. En d’autres termes, les besoins des individus déterminent

l’adéquation des types de soutien à recevoir.

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Dans cette perspective, plusieurs chercheurs se sont basés sur l’étude de House (1981) qui

identifie quatre types de soutien social : (i) le soutien émotionnel, (ii) le soutien d’estime, (iii)

le soutien informatif et (iv) le soutien matériel ou instrumental. Le soutien émotionnel (affectif)

consiste à exprimer à une personne les impressions ou les émotions qu’on ressent à son égard.

Ces affects positifs peuvent être traduits par une manifestation de confiance, un respect mutuel,

une manifestation d’amour ou d’amitié. Le soutien émotionnel rapporte à l’individu un certain

réconfort émotionnel, un sentiment de quiétude, de réassurance ou de protection. Entre autres,

ces apports émotionnels vont l’aider à dépasser ou surmonter des événements difficiles comme

le décès, le divorce et la perte de la garde (House, 1981).

Le soutien d’estime consiste à insuffler la motivation et l’encouragement à la personne qui vit

une période de doute sur ses savoir-faire, ses propres compétences et sa juste valeur. Cela peut

prendre la forme d’une simple appréciation ou une rétroaction (par exemple, tu fais un excellent

boulot), des louanges qui l’aident à consolider sa confiance (tu es le meilleur!) ou bien par des

encouragements verbaux ou gestuels (comme tu es capable! Une petite tape dans le dos). Quant

au soutien informatif, il implique généralement des recommandations, des conseils et des

suggestions concernant notamment la résolution d’un problème ou le partage de connaissances.

Enfin, le soutien matériel ou instrumental se traduit par une aide financière comme le prêt, le

don d’argent, le bien matériel ou le service rendu comme une assistance technique ou de

transport.

Sur la base des travaux antérieurs, notamment ceux de House (1981) et Vaux (1992), il apparaît

que le soutien social, en particulier sa dimension émotionnelle, influence le contrôle perçu et

surtout modère les effets négatifs du stress sur la santé mentale (House, 1981). Dans cet ordre

d’idée, d’autres études portant, par exemple, sur le soutien des superviseurs, rapportent la

divergence des effets du soutien émotionnel et du soutien instrumental sur la perception de la

charge (Karasek et Theorell, 1990). En effet, Macdonald (2003) explique que ces deux types de

soutien influencent différemment la demande psychologique. Le soutien instrumental (matériel)

a comme but d’améliorer la qualité du travail et le faciliter. Par exemple, l’accessibilité aux

différentes ressources organisationnelles (disponibilité des équipements, arrangement des

horaires, répartition des missions, politique de gestion facilitante, assistance technique) aide

l’employé à mieux performer, facilite le fonctionnement de son travail et ainsi allège la tension

psychologique. Pour ce qui est du soutien affectif, il vise surtout le moral du travailleur, il tend

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à stimuler sa motivation à l’effort, à consolider son engagement et sa confiance (Macdonald,

2003). Le soutien affectif influence la façon de percevoir la charge et améliore la capacité

d’adaptation au stress (Macdonald, 2003).

Toutefois, l’étude de Ferandes et al. (2008) tend à montrer que le soutien au travail, notamment

le soutien de la hiérarchie supérieure, est de nature purement matérielle ou «instrumentale » et

il est peu centré sur l’expression d’émotion. Ceci veut dire que la charge ne s’allège qu’en

présence d’un soutien matériel concret.

Dans une perspective plus générale, Hamon-Cholet (2001) parle de l’importance de l’aide

qu’apportent les collègues les uns aux autres et les bienfaits inhérents. Le support mutuel qui

donne lieu à un environnement de travail favorable à la baisse de la tension. Ces propos sont

supportés par Spérandio (1984) et Karasek et Theorell (1990). Ces auteurs considèrent que le

degré d’insertion dans le groupe de travail, la cohésion sociale au sein de l’équipe, l’intégration

sociale et émotionnelle ainsi que la collaboration entre les employés contribuent tous à la

perception du degré de la charge de travail. En effet, le soutien social joue un rôle important

lorsque les exigences du travail sont élevées et son absence entraîne un sentiment de solitude et

de tension.

Certaines études donnent une autre explication à la dynamique de la relation entre le soutien

social et la demande psychologique, en particulier quant à la relation entre l’employé et ses

superviseurs (Bakker et al., 2005; Harvey et al., 2003). En effet, selon ces auteurs, une

confiance réciproque entre l’employé et son superviseur associée à une reconnaissance de

l’engagement de l’employé créent un environnement favorable à la maximisation de sa

performance et le protège contre les effets d’une importante demande psychologique (Bakker et

al., 2005). De leur côté, Bliese et Castro (2000) soulignent l’importance de considérer le

soutien social de la hiérarchie supérieure dans l’étude des effets de la demande psychologique.

En guise de conclusion, si le soutien social est reconnu comme étant un facteur jouant un rôle

important dans la modération de la charge de travail, la plupart des études portant sur la santé

psychosociale au travail se basent sur le modèle « demandes-contrôles » de Karasek (1979) et

négligent, en quelque sorte, l’adjonction de la dimension du soutien social (Bourbonnais et al.,

2005).

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54

Hypothèse 7. Il existe une association négative entre le soutien social et la demande

psychologique.

Après avoir évoqué l’association possible entre le soutien social et la demande psychologique,

il sera question par la suite de savoir si les relations sociales au travail s’affectent par la

technologie au travail.

4.3.3. Impact de la technologie sur les collectifs de travail

Dans la littérature, il existe deux discours concernant l’impact des TIC sur la coopération au

travail. Un discours positif considère les TIC un outil facilitant la réalisation du travail. Un

discours négatif dénonce les TIC et les considère responsables du cloisonnement et

d’appauvrissement de l’échange direct, de la communication et de la sociabilité entre les

collègues. En ce sens, la technologie peut être un facteur d’extension des collectifs de travail,

mais aussi d’isolement qui affecte le soutien social au travail (Ratier et al., 2012).

Dans cette perspective les TIC peuvent réduire les échanges et les contacts directs entre

salariés. Ceux-ci peuvent alors avoir le sentiment d’une érosion des collectifs de travail et des

relations d’entraide et de coopération (Ratier et al., 2012). Dans le milieu du travail, les

employés peuvent alors être à la fois très proches physiquement mais très distants socialement.

L’employé est accaparé par la technologie et ne trouve plus le temps ni la nécessité pour la

formalisation des échanges, l’entraide et le soutien social, et ce risque est lié à l’accélération

des échanges associés aux TIC.

Dans le même ordre d’idée, dans le rapport intitulé « Bien-être et efficacité au travail »

(Capgemini Consulting, 2010), les auteurs évoquent l’utilisation à mauvais escient des TIC.

Cette utilisation aurait cannibalisé les relations humaines au travail, dépersonnalisé la relation

entre les employés et augmenté l’appauvrissement des liens sociaux entre salariés.

Cet état de fait n’est pas nouveau. En effet, dès 1961, le sociologue Naville a évoqué la

problématique entre le progrès technique et la transformation des collectifs de travail.

Cependant, selon ce sociologue la mise en cause des TIC comme facteur clé de l’isolement ou à

l’inverse son appréciation comme levier de développement des relations sociales au travail

dépend de nombreux facteurs indépendants des TIC et de leur usage. C’est dire que parfois

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55

l’hyper-rationalisation des organisations de travail (dont les centres d’appels sont un exemple)

et la nature du travail sont responsables de la dégradation des relations sociales.

À titre d’exemple, le fait d’être constamment en position d’accueil téléphonique peut couper les

salariés les uns des autres parce que le téléphone nécessite une implication physique et

psychologique importante dans l’interaction avec le client (Bercot et al., 2003). Cela rend

difficile l’interaction entre les employés puisqu’ils ne peuvent pas communiquer avec deux

personnes à la fois. Dans ce cas-là, ce ne sont pas les TIC en elles-mêmes qui causent

l’appauvrissement des relations sociales au travail, mais leur utilisation dans une organisation

fortement rationalisée.

Les études mettent en évidence le rôle de l’entraide et du soutien social au travail dans la

prévention des risques professionnels (Caroly, 2007). Ce rôle positif de la coopération et de

l’assistance vaut également pour les TIC. À titre d’exemple, pour limiter les risques lors de

l’implantation d’un nouvel outil technologique, plusieurs organisations mettent l’accent sur les

nouvelles formes de collectifs grâce aux TIC comme les forums de discussion et les autres

réseaux sociaux. Ceux-ci peuvent jouer un rôle important en matière de prévention de la santé

au travail (Caroly, 2007).

Les bouleversements causés par les TIC dans l’environnement professionnel ont affecté les

conditions de travail notamment les relations sociales au travail. L’érosion des collectifs de travail

peut amener à l’isolement et à la perte du soutien social. Ce risque se concrétise dans des

organisations contemporaines qui sont fortement outillées en TIC et qui cumulent

conjointement l’augmentation de la demande psychologique, la réduction de la latitude

décisionnelle et l’érosion des collectifs de travail. L’appauvrissement des relations peut

également se présenter dans des entreprises qui automatisent autant que possible les processus

de travail afin de réduire l’impact du facteur humain comme c’est le cas de certaines entreprises

utilisatrices des progiciels de gestion intégrés.

Toutefois, les effets de la technologie sur les conditions professionnelles résultent aussi de

l’association des TIC aux choix organisationnels, pouvant ensemble amplifier les conséquences

(Caroly, 2007). Dans une perspective opposée, les TIC peuvent être associées à des

consolidations des conditions de travail.

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56

Ainsi, le soutien social peut être appauvri par le contexte technologique. Par conséquent, il est

opportun de se pencher sur cette problématique et examiner comment la réduction du soutien

social engendre l’épuisement professionnel.

4.3.4. Effets du soutien social sur l’épuisement émotionnel et la réduction de

l’accomplissement personnel.

Les recherches montrent que l’entretien de relations de qualité fondées sur le soutien social et la

réciprocité renforcent les comportements de citoyenneté organisationnelle, l’engagement des

employés et le bien-être au travail. Ainsi, Sargent et Terry (2000) indiquent que le soutien

instrumental et le soutien émotionnel réduisent les conséquences négatives de l’environnement

pathogène du travail. En effet, ces deux types de soutien viennent contrebalancer les

conséquences négatives de la tension psychologique qui dépendra, à son tour, de l’intégration

sociale et psychologique ainsi que de la confiance témoignée par les collègues et le superviseur

(Sargent et Terry, 2000). Selon Van Dierendonck et al. (2004), le soutien des superviseurs peut

influencer la perception des employés à l’égard de leur travail. Une absence de support social

peut devenir un prédicteur important des risques associés à la santé mentale des employés

(Direndonck et al., 2004). En effet, une mauvaise relation entre subordonnés et superviseurs,

des frictions et des mésententes continuelles peuvent générer un sentiment de stress.

La majorité des recherches recensées sur le soutien social considère que le soutien social du

supérieur hiérarchique et des membres de l’équipe de travail a un effet modérateur sur la

relation entre facteurs de stress et épuisement professionnel (Burke et Greenglass, 1995; Russel

et Cutrona., 1987). En outre, le modèle « Demande-Contrôle-Soutien » stipule qu’un soutien

social élevé permet de compenser les effets négatifs du milieu de travail (par exemple, la

réduction du stress organisationnel; Bourbonnais et al., 1996). Johnson et Hall (1988) et

Sargent et Terry (2000) viennent nuancer le rôle de la latitude décisionnelle dans le modèle

initial de Karasek. Il s’avère ainsi que le soutien social devient indispensable lorsque les

niveaux de la demande psychologique et de l’autonomie sont élevés. Autrement dit, un manque

de soutien social et une latitude décisionnelle élevée combinés à une demande psychologique

élevée accentuent la prévalence des maladies cardio-vasculaires (Johnson et Hall, 1988).

Toutefois, un soutien social et une latitude décisionnelle élevés combinés à de fortes demandes

psychologiques ont un effet positif sur la satisfaction des employés et réduisent les risques de

tensions psychologiques (Sargent et Terry, 2000).

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57

Souvent, les employés qui occupent des postes d’une haute responsabilité sont exposés à de

fortes tensions au travail et ont tendance à s’installer dans un cercle vicieux. L’employé

commence par faire plus d’efforts, il s’épuise, il perd son efficacité, se démotive et il finit par

se douter de ses propres compétences et éprouver un manque d’accomplissement personnel.

Néanmoins, selon Sargent et Terry (2000), les employés qui se placent sous des conditions de

support organisationnel élevé rapportent une plus grande satisfaction ainsi qu’un niveau très

faible de dépersonnalisation et de perte d’accomplissement.

Ces résultats s’inscrivent en conformité avec l’étude de Wilk et Moynihan (2005) (étude citée

dans Ruiller, 2008) montrant que la perception et l’attitude des superviseurs envers leurs

employés jouent un rôle de taille sur la réduction de l’épuisement émotionnel. En effet, les

superviseurs peuvent devenir une source de soutien comme ils peuvent générer un stress au

travail. La même étude démontre que l’épuisement émotionnel s’influence et s’accentue plus en

fonction du comportement du superviseur qu’en fonction de la demande psychologique elle-

même. Ainsi, le support moral dans les moments pénibles, l’encouragement, l’écoute active,

l’assistance et la manifestation de reconnaissance soulagent les employés et les aident à apaiser

l’épuisement émotionnel perçu.

D’autres études ont également examiné l’effet du soutien social indépendamment du cadre

théorique de Karasek et Theorell (1990). Bartlett (2004) suggère que le soutien des employés

au travail peut prendre plusieurs formes comme le soutien intrinsèque ou extrinsèque, le soutien

formel ou informel et le soutien émotionnel ou structurel. Dans son article, l’auteure s’est

concentrée davantage sur le support formel et structurel, le soutien extrinsèque (matériel), et le

style de leadership exercé. Sans surprise, les employés qui bénéficient de ces avantages sont

moins soumis à la pression et au stress (Bartlett, 2004). Dans le même ordre d’idée, selon

Murphy et Sauter (2004), les mesures participatives et le soutien des cadres supérieurs aident à

une amélioration de la capacité d’adaptation et à une meilleure tolérance à la tension

psychologique au travail.

Dans une autre étude, Frese (1999) (étude citée dans Ruiller, 2008) démontre que le support

social joue un rôle d’inhibiteur entre les différents types de stresseurs (psychologiques,

émotionnels et physiologiques) et le dysfonctionnement psychologique (épuisement

professionnel, dépression). Des résultats similaires sont obtenus par Bourbonnais et al. (1998)

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58

démontrant que le manque de soutien social au travail est associé de façon significative à la

détresse psychologique et à l’épuisement émotionnel.

En somme, les résultats empiriques montrent que le soutien social influence l’apparition de

l’épuisement émotionnel. À titre d’exemple, les résultats de Bourbonnais et al. (1998) ont

permis d’associer la combinaison demandes élevées/contrôle faible/soutien social faible au

syndrome de l’épuisement professionnel. Selon la même étude, un faible soutien social au

travail est associé à une forte propension à développer un épuisement professionnel, en

particulier, un épuisement émotionnel (Bourbonnais et al., 1998, 1999).

Enfin, pour Buunk et Schaufeli (1999, étude citée dans Addison, 2010), un soutien social

déséquilibré en milieu de travail (c'est-à-dire privé de réciprocité) amène à un tarissement des

ressources affectives et conduirait, par conséquent, à l’épuisement émotionnel. D’après

Schaufeli (2006), lorsque l’individu constate que le soutien n’est pas conforme à ses besoins, il

risque d’accroître le déséquilibre. Celui-ci conduit à la spirale de la perte des ressources

émotionnelles : d’abord, il y aurait un désengagement dans la relation, suivi par un sentiment de

démotivation, un manque de temps consacré à l’échange et la déshumanisation des relations

avec les collègues et les superviseurs. L’employé ne remplit plus son rôle et son

accomplissement personnel diminue en conséquence. Dans une perspective tout à fait opposée,

d’autres études comme celle de Rafferty et al. (2001) rapportent l’absence d’une relation

significative entre le soutien social au travail et l’émergence de l’épuisement professionnel.

Hypothèse 8. Il existe une association négative entre le soutien social et l’épuisement

émotionnel.

Hypothèse 9. Il existe une association positive entre le soutien social et l’accomplissement

personnel.

Après avoir discuté des relations potentielles entre les facteurs organisationnels et l’apparition

du syndrome de l’épuisement professionnel, il sera question dans la prochaine section de

l’influence de ce syndrome sur l’intention de l’employé de quitter l’organisation du travail.

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5. Effet de l’épuisement professionnel sur l’intention de quitter

5.1. Lien entre l’épuisement émotionnel et l’intention de quitter

Un volume considérable de recherches conceptuelles et empiriques s’est focalisé sur les

incitatifs amenant un employé à se retirer irrémédiablement de son organisation (Cohen, 1993;

Griffeth et al., 2000; Paillé, 2004). De nombreux facteurs ont été identifiés comme étant des

causes de l’intention de départ. Parmi ceux-ci, on peut retenir (cités dans Paillé, 2004) : la

satisfaction au travail (Lambert et al., 2001), le stress (Tuten et Neidermeyer, 2002), le

changement organisationnel (Iverson et Pullman, 2000), les conflits de rôle (Borgi, 2002) et la

réduction d’effectif (McElroy et al. 2001). Toutefois, rares sont les études qui se sont

intéressées à l’effet de l’épuisement émotionnel sur l’intention de départ. D’où l’intérêt

d’examiner l’association directe entre ces deux variables.

La réaction des individus suite à une situation d'épuisement émotionnel peut prendre une forme

moins « héroïque » soit l’apathie et le désintéressement de son travail. Ces individus favorisent

une posture « passive » et ils se « désengagent de l’intérieur » sans pour autant prendre le

risque de quitter leur emploi. Mais pour d’autres, le processus d'érosion de l'implication

organisationnelle progresse jusqu’au point de quitter son organisation (Smith et al., 2008).

L’intention de quitter est donc un état d'esprit pouvant être corolaire d’une souffrance mentale

accrue où la personne développe une attitude défavorable envers son organisation et son

emploi. Elle devient contrariée par les demandes incapacitantes, la dégradation de sa santé

mentale et physique et le manque de performance (Smith et al., 2008). Autrement dit, son

implication organisationnelle se réduit et l’individu est susceptible de ne plus exprimer un

devoir moral envers son organisation.

À ce propos, l’implication organisationnelle suscite un intérêt soutenu auprès des chercheurs.

L’implication organisationnelle a été définie comme « un état d’esprit, une relation du salarié

par rapport à l’organisation » (Meyer et Allen, 1991). Dans cette veine, Mowday et al. (1979),

pionniers dans ce domaine de recherche, limitent ce concept à trois éléments respectifs : « une

forte acceptation des buts et des valeurs de l’organisation, la volonté de faire des efforts en

faveur de l’entreprise et un fort désir de faire partie de l’organisation ». Depuis, plusieurs

travaux théoriques et empiriques ont fait de l’implication organisationnelle un vaste champ

d’études.

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60

Dans cet ordre d’idée, Meyer et Allen (1991) développent une approche devenue aujourd’hui

une référence théorique, postulant que l’implication est « un état psychologique qui reflète la

relation qui existe entre les employés et leur organisation ». Selon ces auteurs, ce concept

repose sur un construit tridimensionnel : (i) la dimension « calculée » qui mesure les

conséquences perçues par l’employé suite à un départ volontaire ; (ii) la dimension « affective »

qui fait référence à un attachement émotionnel à l’organisation ; enfin, (iii) la dimension

« normative » qui signifie un certain devoir moral envers l’organisation (Meyer et Allen 1991).

Ainsi, la personne passe au début par une période « d'errance », qui se traduit par des

sentiments changeants, un découragement, une fatigue, un espoir, un ras-le-bol, une assurance,

une difficulté de communication, une envie de régresser, une envie de quitter. Mais, après un

certain temps, l’individu se sent désengagé et il parvient à s’écarter de son affect, de ses

émotions, de ses relations associatives avec ses collègues et de son organisation en général

(Meyer et Allen 1991).

L’employé est donc en situation de victime, il se déconnecte de sa capacité de choisir et il finit

par quitter son emploi. Cette phase est pleine de déception, de sentiments d'identité diffuse et de

colère. Ce qui veut dire que cette décision n'est souvent pas un choix volontaire, mais une

obligation suite à une confrontation difficile avec la réalité du travail. Par ailleurs, quelques

études suggérent que cette prise de décision est, en quelque sorte, bénéfique. La personne peut

tout simplement redéfinir un nouvel objectif et un nouveau sens à sa vie.

Hypothèse 10. Il existe une association positive entre l’épuisement émotionnel et l’intention de

quitter son emploi.

5.2. Lien entre la dépersonnalisation et l’intention de quitter

Dean et al. (1998) postulent que la dépersonnalisation est une attitude négative à l’égard de

l’organisation de travail qui comprend trois dimensions: 1) une croyance que l’organisation

manque d’intégrité, 2) un affect négatif envers l’organisation, et 3) une tendance à avoir un

comportement critique envers l’organisation.

Selon d’autres chercheurs comme Andersson et Batemen, (1997), la dépersonnalisation est

considérée comme un processus qui évolue en trois stades : le stade de stress, le stade

d’astreinte et le stade d’ajustement. Le stade de stress est causé par le déséquilibre entre les

exigences du travail et les ressources organisationnelles et individuelles mobilisées pour

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répondre à ses demandes. Le stade d'astreinte est une réaction face à ce déséquilibre (entre les

exigences du travail et les ressources individuelles). Il se manifeste par des troubles

comportementaux et neuropsychiques comme des sensations d'anxiété, de tension, de

culpabilisation, de négativisme et de désinvestissement émotionnel. Quant au stade

d'ajustement, il se révèle par des modifications comportementales et attitudinales. La victime

tend à considérer son organisation et son entourage de façon détachée, mécanique et objective

dépourvue de toute émotion. De ce point de vue, la dépersonnalisation peut être un

comportement défensif face à des astreintes de travail. Il s'agirait, en fait, d'un échappement

psychologique, une modalité d'adaptation face à un mécontentement envers l’organisation de

travail (Autissier et Wacheux, 2006).

Un fossé se creuse donc entre les caractéristiques négatives de l'environnement de travail et

l'insatisfaction personnelle. En fait, l'étude de Leiter et Maslach (1988) démontre que le burnout

conduit à une diminution de l'engagement envers l'organisation. Dans la même veine, d'après

Smith et al. (2008), le burnout a une incidence sur le désengagement qui se manifeste par une

forte méfiance et un rejet des valeurs de l’organisation. L’employé n’a plus l’envie d’exercer un

effort pour l'organisation et s’approprie un comportement de rupture et même de retrait complet

face à son organisation et son travail.

Pour arriver à ce stade de désintéressement total, Autissier et Wacheux (2006) expliquent que le

retrait organisationnel évoque nécessairement l’idée d’une « spirale du désengagement ». En

fait, envisager ce désengagement sous forme de spirale signifie qu’il existe différentes étapes

avant d’arriver à ce stade. Selon les auteurs, ces différentes étapes peuvent être regroupées en

trois phases. La première phase est celle de questionnement (Que se passe-t-il ? Est-ce que mon

travail est intéressant ?). Cette étape traduit une situation de confusion et d’inquiétude puisque

l’employé ne se retrouve plus dans ses activités quotidiennes et le travail ne convient plus à ses

aspirations. En même temps, par crainte de perdre ses acquis, ses avantages et sa position

sociale, l’employé n’ose pas franchir le pas pour quitter son travail, mais il remet le tout en

cause. La deuxième phase comprend les étapes de contestation et de retrait. C’est une phase où

l’employé exprime clairement et directement son avis (je conteste, je ne suis pas convaincu)

avec beaucoup de colère, de mécontentement, de sarcasme et même d’hostilité ce qui l’amène à

s’isoler progressivement vers une situation de retrait partiel ou total. Enfin, la troisième et

dernière reprend les phases d’opposition et de rupture (je veux détruire) et constitue le

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témoignage d’un désaccord. Le conflit, l’agacement, la déception, l’ironie, liée la plupart du

temps à une perte d’identité et à un cynisme au travail, sont désormais vraisemblables. La

personne cynique matérialise un sentiment d’impotence et de désappointement. Ce passage du

retrait au désengagement total s’opère à la suite de l’accumulation de plusieurs contraintes

organisationnelles jugées négativement par l’employé.

Cependant, il convient de noter que la dépersonnalisation et le désengagement, comme une

modalité d’adaptation, ne sont en fait qu'un palliatif, car le sujet tente de réduire son inconfort

psychologique sans changer la source de cette tension.

Hypothèse 11. Il existe une association positive entre la dépersonnalisation et l’intention de

quitter son emploi.

Conclusion

Les problèmes de santé mentale au travail constituent l'un des principaux enjeux auxquels sont

confrontées les entreprises, notamment à cause des lourdes conséquences sur la personne et sur

l’organisation. On rapporte que le burnout a un lien direct avec les facteurs de l’environnement

de travail (Theorell et Karasek, 1996; Siegrist, 1996). En plus d'avoir des effets négatifs sur les

individus, les problèmes de santé au travail sont les principales causes à l’origine de

l’apparition de plusieurs problèmes organisationnels.

En ce sens, le burnout est devenu une préoccupation pour l’entreprise surtout quand les facteurs

proviennent de l’environnement de travail. En effet, l’épuisement professionnel n’est plus un

révélateur de fragilité individuelle, mais la manifestation du dysfonctionnement de l’entreprise

(Du Tertre, 2006). Ainsi dans ce chapitre, des relations entre l’épuisement professionnel et les

facteurs organisationnels et celles entre l’épuisement professionnel et l’intention de quitter ont

été proposées.

Notre analyse de la littérature s’est articulée autour de trois points. Premièrement, le concept de

l’épuisement professionnel (burnout) a été défini tout en montrant que ces trois composantes

interagissent et s’influencent mutuellement, notamment l’épuisement émotionnel et la

dépersonnalisation ainsi que l’accomplissement et la dépersonnalisation. Deuxièmement, les

principaux déterminants de l’environnement de travail (la demande psychologique, le contrôle

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et le soutien social au travail) ont été exposés tout en discutant de leurs associations potentielles

avec l’épuisement professionnel. Enfin, le lien entre l’épuisement professionnel et l’intention

de quitter son emploi a été évoqué.

Figure 1. Cadre conceptuel et hypothèses de la recherche

Dans cette lignée, la figure (1) représente le cadre conceptuel de cette recherche mettant en

relation (les hypothèses) les divers construits retenus dans cette recherche.

En guise de conclusion, on peut retenir que le monde du travail actuel a fait une «rupture» avec

les formes traditionnelles de travail et a permis de proliférer un nouveau vocabulaire de travail

dont les maîtres mots semblent être polycompétence, sur-responsabilisation et latitude

décisionnelle (Askenasy, 2004). Une forte contradiction devient perceptible entre ce que sont

les descriptions des transformations de l’organisation du travail et ce que sont les perceptions

des salariés envers leurs conditions de travail (pénibilités, intensification du travail, pathologies

Latitude

décisionnelle

Soutien social Accomplissement

personnel

Dépersonnalisation

Épuisement

émotionnel

Intention de quitter H3 (+)

H1 (+)

H2 (-)

H4 (-)

H5 (+)

H6 (-)

H7 (-) H8(-)

H9 (+)

H10 (+)

H11 (+)

Demande

psychologique

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professionnelles, burnout). Bref, cette réalité va à contresens du discours dominant acclamant

les nouvelles conditions de travail (Askenasy, 2004).

Dans cette veine, les recherches portant sur les déterminants de l’environnement de travail, dont

la demande psychologique, la latitude décisionnelle et le soutien social, démontrent que

plusieurs situations génèrent des conséquences négatives notamment la fatigue mentale, la

tension psychologique, le stress, l’insatisfaction au travail, la frustration, le syndrome de

l’épuisement professionnel et l’intention de départ.

Cette problématique fait l’objet de plusieurs études scientifiques montrant que les antécédents

organisationnels sont liés avec la prévalence de pathologies professionnelles ou de certains

troubles d’adaptation dont le burnout. Cette étude teste à la fois toutes les associations entre les

variables incluses dans le cadre conceptuel. De plus, cette étude examine ces relations dans un

contexte spécifique, celui faisant suite à l’implantation d’une nouvelle technologie (le nouveau

logiciel de gestion des études « Banner ») dans une université canadienne.

Personne ne peut nier l’omniprésence de la technologie dans sa vie quotidienne. La technologie

automatise plusieurs tâches et les employés se trouvent, en quelque sorte, forcés de se plier à

ses exigences et à ses options. Parmi les constats qui ressortent de cet état de fait est

l’importance voire la nécessité d’accorder une attention particulière à la relation entre les TIC

et les conditions de travail.

Cependant, il faut noter qu’un facteur important pénalise encore la réflexion. En fait, les TIC

poursuivent leur évolution et ce progrès est loin d’être achevé. Les entreprises continuent

d’acquérir et de s’équiper de nouvelles technologies et c’est l’employé qui doit toujours s’y

adapter. Malgré cela, il persiste un discours acclamant les bienfaits des TIC, vectrices de

perfectionnement et de prospérité. Ce point de vue laisse, en fait, peu d’espace pour examiner

les méfaits de la technologie sur la qualité de vie et la santé psychologique au travail.

En effet, notre étude pointe des interrogations concernant cette problématique et ses potentielles

conséquences sur les conditions de travail. À savoir sous quelles conditions les TIC participent

à la dégradation de la qualité de vie au travail et à la mise sous tension. Dans un sens, on se

demande, par exemple, si la présence d’une latitude décisionnelle et d’un soutien social peuvent

compenser une demande psychologique élevée causée par l’utilisation d’une nouvelle

technologie.

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Tableau 1. Rappel des hypothèses de recherche

H1 Il existe une association positive entre l’épuisement émotionnel et la dépersonnalisation.

H2

Il existe une association négative entre l’accomplissement personnel et la

dépersonnalisation.

H3 Il existe une association positive entre la demande psychologique et l’épuisement

émotionnel.

H4

Il existe une association négative entre la latitude décisionnelle et la demande

psychologique.

H5 Il existe une association positive entre la latitude décisionnelle et l’accomplissement

personnel.

H6 Il existe une association négative entre la latitude décisionnelle et la dépersonnalisation.

H7 Il existe une association négative entre le soutien social et la demande psychologique.

H8 Il existe une association négative entre le soutien social et l’épuisement émotionnel.

H9 Il existe une association positive entre le soutien social et l’accomplissement personnel.

H10 Il existe une association positive entre l’épuisement émotionnel et la décision de quitter

son emploi.

H11 Il existe une association positive entre la dépersonnalisation et l’intention de quitter son

emploi.

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66

Chapitre 3 - Méthodologie de la recherche

Ce chapitre présente les fondements méthodologiques ayant permis l’élaboration de cette

recherche. Trois sections le composent. Tout d’abord, le choix de la méthode. La deuxième

partie porte sur le terrain de recherche soit la définition de cas d’étude, de la collecte des

données et description des caractéristiques de l’échantillon des répondants. La troisième partie

présente les instruments de mesure des variables retenues.

1. Choix de la méthode

Les études empiriques sont structurées par une « ligne de démarcation » entre deux types

d’approches : les études dites quantitatives et les études qualitatives. Ces deux types d’études

sont considérés comme différents, voire « opposés » renvoyant chacun à un paradigme de

recherche distinct. La première approche, celle de la recherche quantitative est basée sur une

démarche « hypothético-déductive » qui met l’accent sur la composante déductive de la

démarche scientifique puisque les hypothèses et les propositions théoriques sont vérifiées

empiriquement. Alors que la recherche qualitative est davantage une démarche « empirico-

inductive » (Chevrier, 1992; étude citée dans Crahay, 2006) qui met l’emphase sur la

composante inductive de la méthode scientifique, car une nouvelle hypothèse et une théorie

préliminaire sont générées à partir des données collectées sur le terrain. La recherche

qualitative est souvent qualifiée d’exploratoire, car le phénomène étudié n’est pas très connu,

de plus elle soutient que la réalité est socialement construite. Cette distinction fondamentale

entre les deux types de recherche est fondée sur la distinction mise en avant par Aristote, celle

entre la quantité et la qualité, qui correspondent à deux outils d’analyse nettement différents.

En effet, la distinction entre « les chiffres et les lettres » vient de relayer l’existence d’une

contradiction entre la démarche qualitative et la démarche quantitative, polarisée en deux

camps hétérogènes et diversifiés. Cette distinction n’est cependant pas partagée par certains

chercheurs. Selon Bourdieu (1992), l’idée de constituer deux paradigmes méthodologiques

posés comme incommensurables et contradictoires tient du « fétichisme méthodologique » qui

agit comme une entrave au progrès et au développement de la connaissance. En ce sens, ce

dualisme nuit à la créativité du chercheur.

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Partant de ce constat, il faut admettre qu’aucune méthode n’est a priori supérieure à l’autre. Il

s’agit en fait de deux approches différentes, mais d’une interrogation et d’une compréhension

de la même réalité. Sauf que parfois on privilégiera une démarche à l’autre lorsque la nature de

l’étude l’exige ou que les connaissances et les orientations personnelles des chercheurs

s’harmonisent davantage avec un paradigme plutôt qu’un autre. En d’autres termes, le

chercheur à la possibilité de diriger sa recherche vers la méthode qui convient le mieux à ses

attitudes, à ses croyances et à ses positions épistémologiques ainsi qu’à son orientation

personnelle. Mais le plus important est l’objectif de l’étude et la nature de la problématique de

recherche qui déterminent les modes de collecte de données les plus appropriés ainsi que la

nature de l’information à recueillir.

Les données ont été collectées dans le cadre d’un projet de recherche réalisé par la Chaire en

gestion de la santé et de la sécurité du travail pour examiner la santé des agents et des

conseillers de gestion des études. Cette étude répond à une préoccupation quant à

l’accroissement du taux d’absentéisme et l’augmentation apparente de l’épuisement

professionnel. Le projet de recherche a adopté une approche mixte, soit une méthode

qualitative suivie par une méthode quantitative.

La méthode qualitative (focus groupe, des analyses de l’activité de travail réelle et l’exploration

de pistes de solution en fin de processus) a été utilisée dans les premiers stades de la recherche

en forte raison de sa capacité à explorer les problèmes de cette population et débroussailler ses

réactions et ses préoccupations. Cet éclairage qualitatif a permis de mieux comprendre les

conditions réelles du travail dans toute son ampleur et sa complexité. D’une façon plus

spécifique, le volet qualitatif a permis de mieux saisir la perception individuelle des encombres,

en santé mentale, des agents et conseillers de gestion des études et leur articulation du

syndrome d’épuisement professionnel. En sus, il a permis de recueillir le témoignage des

employés sur les difficultés rencontrées dans leur travail, les sentiments vécus et les différents

moyens qu’ils utilisent pour composer avec ces difficultés.

Dans un deuxième lieu, la méthode quantitative a été utilisée. Les participants ont été invités à

remplir un questionnaire en ligne de façon anonyme.

Ce mémoire s’appuie sur les données collectées dans le volet quantitatif du projet de recherche.

Le volet a été choisi, car la finalité de la recherche est de quantifier l’influence des facteurs

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organisationnels sur l’apparition de l’épuisement professionnel. Il s’agit de mettre en évidence

les relations entre ces variables au moyen de la vérification d’hypothèses de recherche.

L’objectif étant aussi de quantifier l’association du syndrome de l’épuisement professionnel

avec la décision de quitter définitivement son organisation.

2. Terrain de recherche

2.1. Définition du cas à l’étude

Le cas étudié est celui des utilisateurs du logiciel Banner (logiciel de gestion des études) dans

une grande université canadienne. L’échantillon est composé d’agents et de conseillers de

gestion des études, utilisateurs de ce logiciel. Ces employés ont de nombreuses responsabilités

et accomplissent plusieurs tâches notamment la gestion des admissions, de l’abandon des cours

et le conseil. Ils s’occupent du suivi des dossiers des étudiants, des inscriptions, des admissions

finales et conditionnelles, de la diplomation, des exclusions, des arrimages avec les

programmes d’études et de la saisie des données. Leur tâches sont plurielles, diversifiées et

exigent effort et concentration. De plus, ces employés utilisent les TIC comme l’ordinateur, les

logiciels de gestion, le téléphone et le système de gestion des courriels.

Ce mode de fonctionnement accroit les activités multitâches et crée une « culture de

l’immédiateté ». Par exemple, avec l’adoption de la messagerie électronique, il devient

impératif de répondre à un courriel le plus rapidement possible, dès sa réception. Les employés

se trouvent, dans bien des cas, dans des situations de double tâche (par exemple, ils travaillent

sur un dossier tout en répondant au téléphone). Ce mode de travail introduit des problèmes de

morcellement et d’interruptions des tâches et augmente le nombre des tâches à réaliser

simultanément, ce qui représente une source de fatigue et de tension.

À part ces conditions de travail difficiles, le choix de conduire cette recherche s’appuie sur

d’autres constats qui étaient ressortis lors de la réalisation du projet de recherche :

(i) Premièrement, depuis l’implantation du nouveau logiciel Banner, la charge de travail

des agents et des conseillers de gestion des études s’est fortement détériorée. Les

employés, utilisateurs de ce nouveau logiciel, expriment de plus en plus leur

mécontentement. Au début, ces mêmes employés se montraient enthousiastes à l’idée

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qu’un nouveau logiciel devrait alléger leur tâche de travail et la rendre plus facile.

Cependant, c’est le contraire qui est survenu, et ce, malgré les formations auxquelles ils

ont participé pour se familiariser avec ce logiciel. En effet, les employés trouvent que le

logiciel ne répond pas à leurs attentes et leurs besoins. Ils devront s’ajuster aux

possibilités qu’offre ce logiciel et vivre avec toutes ses défaillances. Par conséquent, les

employés manquent peu à peu d’enthousiasme.

(ii) Deuxièmement, des problèmes d’ordre professionnel comme le stress, l’épuisement

professionnel et la fatigue se sont accrus. Il semble que ces symptômes se sont

accompagnés par une baisse de rendement.

(iii) Enfin, le taux d’absentéisme et les demandes de congés de maladie ont « explosé ».

2.2. Collecte des données

L’échantillon visé par cette collecte se compose de 195 employés, agents et conseillers des

études, utilisateurs du logiciel Banner. La liste des employés a été élaborée en mars 2010 à

partir du bottin téléphonique des employés de l’université. Onze personnes ont été éliminées de

cette population puisqu’elles étaient en absence de longue durée (congé de maladie, congé de

maternité) au moment de la réalisation de la collecte de données.

Les données ont été collectées via un sondage en ligne. Les participants ont été invités à remplir

le questionnaire en ligne de façon anonyme (sauf l’adresse IP transmise automatiquement

lorsque le répondant transmet sa réponse) à l’adresse suivante : www.vovici.com.

Les agents et les conseillers de gestion des études avaient toute la latitude de remplir le

questionnaire à n’importe quel moment et à l’endroit de leur choix, à partir de leur poste ou

toute autre poste à l’université ou encore à partir de la maison. En cas de problème technique,

ils avaient la possibilité de communiquer avec la coordinatrice de l’étude. Il importe de

mentionner que deux rappels par courriel ont été faits durant la période de collecte de données

pour encourager les participants à compléter le sondage. Pour solliciter davantage la

participation, une carte postale, invitant les employés visés à remplir le questionnaire en ligne, a

été envoyée via le courrier interne de l’université au cours de la deuxième semaine de passation

du questionnaire.

Le choix du sondage en ligne comme technique de collecte des données semble être la

meilleure approche pour colliger l’information nécessaire. Elle représente une alternative

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efficace et non onéreuse pour obtenir l’information. Elle fait économiser les frais postaux,

éliminer les erreurs de saisie et rend plus rapide la mise en œuvre du sondage. Elle assure

également aux répondants (dans ce cas, les employés) un certain degré d’anonymat, ce qui les

encourage à participer. Enfin, le sondage en ligne offre une grande flexibilité aux participants

pour compléter le questionnaire lorsqu’ils disposent du temps nécessaire.

En somme, le sondage en ligne cumule plusieurs avantages dont :

La rapidité de la collecte des données puisque la réalisation d’un sondage en ligne peut

être complétée en quelques jours. Les délais sont donc réduits de manière significative

comparativement à d’autres modes de collecte de données.

Il n’existe pas de coûts liés à la saisie des données sauf le temps investi dans la

préparation de la version en ligne du sondage.

Il n’est plus nécessaire de recruter des enquêteurs contrairement aux autres méthodes de

collecte qui nécessitent l'intervention de plusieurs personnes pour téléphoner aux

répondants, gérer l'envoi des courriers, distribuer les questionnaires ou faire le porte-à-

porte.

L’anonymat est protégé ce qui encourage plein de gens à participer.

La flexibilité dans le sens où le participant peut répondre au sondage à n’importe quel

moment et de n’importe quel emplacement équipé d’un ordinateur et d’une connexion

internet.

Parmi les employés visés par cette étude (184 employés : 130 agents des études et 54

conseillers des études), 112 ont complété le questionnaire en ligne, soit un taux de réponse de

60,9% (112/184).

2.3. Caractéristiques de l’échantillon des répondants

Les résultats indiquent que 50% des répondants sont âgés entre 46 ans et 55 ans, 42,9% des

vivent avec conjoint et ont des enfants à charge alors que 12,5% vivent sans conjoint et sans

enfant à charge. On compte 104 femmes (92,9 % des répondants). La majorité des répondants

(72,4%) a complété des études universitaires ou collégiales. Aussi, 86,7% des répondants ont

un poste permanent, 43,8% occupent leur poste depuis 2006 alors que 76,8% l’occupent depuis

2001. Presque la totalité d’entre eux (94, 6%) consacre la majorité de son temps à la gestion des

études.

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Tableau 2. Profil de l’échantillon final (n=112)

Variables Fréquences Pourcentages

Âge

18 à 25 ans

26 à 35 ans

36 à 45 ans

46 à 55 ans

Plus de 55 ans

Refus de répondre

2

13

28

56

11

2

1,8%

11,6%

25,0%

50,0%

9,8%

1,8%

Sexe

Masculin

Féminin

8

104

7,1%

92,9%

Situation familiale

Avec conjoint et avec enfant(s) à charge

Avec conjoint et sans enfant à charge

Sans conjoint et avec enfant(s) à charge

Sans conjoint et sans enfant à charge

Refus de répondre

48

36

9

14

5

42.9%

32,1%

8,0%

12,5%

4,5%

Dernière année de scolarité complétée

Études secondaires

Études professionnelles

Études collégiales

Études universitaires

Refus de répondre

11

19

33

48

1

9,8%

17,0%

29,5%

42,9%

0,9%

Expérience à ce poste (début)

1980-1990

1990-2000

2001-2010

8

18

76

7,1%

16,1%

76,8%

Statut à l’emploi

Personne salariée en période de probation

Personne salariée temporaire

Personne salariée permanente

En affectation temporaire

1

11

97

3

0,9%

9,8%

86,6%

2,7%

Temps moyen consacré à la gestion des études

La majeure partie de mon temps

Quelques jours par semaine

Quelques heures par semaine

106

4

2

94,6%

3,6%

1,8%

Pour des raisons liées à la confidentialité des données personnelles, il n’est pas possible

d’obtenir des informations sur les caractéristiques des non-répondants afin de conclure quant à

la représentativité de l’échantillon.

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3. Instruments de mesure

Le questionnaire est un instrument de collecte de données qui exige des participants des

réponses écrites à un ensemble de questions. Ddans la plupart des cas, il leur est demandé de

cocher des cases qui reflètent leurs opinions par rapport à certains énoncés formulés par le

chercheur. En d’autres termes, les participants doivent se borner à répondre aux questions telles

qu’elles sont présentées. Le questionnaire comporte plusieurs rubriques incluant des mesures de

tous les construits de notre cadre conceptuel : la demande psychologique, la latitude

décisionnelle, le soutien social, l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation,

l’accomplissement personnel et l’intention de quitter. Le questionnaire comporte aussi des

mesures de certaines caractéristiques individuelles comme l’âge, le sexe, la situation familiale,

la dernière année de scolarité complétée, le poste actuel, l’expérience à ce poste, le temps

moyen consacré à la gestion des études. Ces questions ont été utilisées dans la section

précédente pour décrire le profil de l’échantillon (voir tableau 1).

3.1. Facteurs organisationnels

Il est à rappeler qu’on a retenu trois facteurs organisationnels, soient (1) la demande

psychologique, (2) la latitude décisionnelle et (iii) le soutien social au travail.

3.1.1. Demande psychologique

Le modèle Demande/Contrôle de Karasek (1979) suggère que la motivation et

l’épanouissement des employés, ainsi que les tensions psychologiques au travail, sont causés

par deux caractéristiques de l’environnement de travail : la demande psychologique et la

latitude décisionnelle. La composante de la demande psychologique évoque des éléments

psychosociaux présents dans l’environnement de travail, tels que les contraintes temporelles,

les demandes contradictoires, l’ambiguïté des rôles, le rythme accéléré au travail, la quantité de

travail excessive, l’interruption et le morcellement du travail. Cette dimension évoque aussi des

exigences d’ordre mental comme l’effort mental et perceptif, l’exigence intellectuelle et la

concentration soutenue (Karasek 1979).

La demande psychologique est mesurée ici par 9 énoncés tirés de Karasek et al. (1998).

L’échelle est composée de quatre modalités de réponse : pas du tout d’accord (1), pas d’accord

(2), d’accord (3) et tout à fait d’accord (4).

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Tableau 3. Mesure de la demande psychologique

1. Mon travail exige d’aller très vite.

2. Mon travail exige de travailler très fort mentalement.

3. On me demande de faire une quantité excessive de travail.

4. J’ai suffisamment de temps pour faire mon travail. (énoncé inversé)

5. Je reçois des demandes contradictoires (opposées) de la part des autres (ces demandes peuvent

provenir de différents groupes : supérieurs, collègues, clients).

6. Mon travail m’oblige à me concentrer intensément pendant de longues périodes.

7. Ma tâche est souvent interrompue avant que je l’aie terminée; je dois alors y revenir plus tard.

8. Mon travail est très mouvementé.

9. Je suis souvent ralentie dans mon travail parce que je dois attendre que les autres aient terminé le leur.

3.1.2. Latitude décisionnelle

La variable latitude décisionnelle est mesurée par 9 énoncés tirés de Karasek et al. (1998).

L’échelle comporte quatre modalités de réponse : fortement en désaccord (1), en désaccord (2),

d’accord (3) et fortement d’accord (4).

Tableau 4. Mesure de la latitude décisionnelle

1. Mon travail exige que j'apprenne des choses nouvelles.

2. Mon travail exige un niveau élevé de qualifications.

3. Dans mon travail, je dois faire preuve de créativité.

4. Mon travail consiste à refaire toujours les mêmes choses. (inversé)

5. J’ai la liberté de décider comment je fais mon travail.

6. Mon travail me permet de prendre des décisions de façon autonome.

7. Au travail, j’ai l’occasion de faire plusieurs choses différentes.

8. J’ai passablement d’influence sur la façon dont les choses se passent à mon travail.

9. Au travail, j’ai la possibilité de développer mes habiletés personnelles.

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3.1.3 Soutien social

Le construit soutien social est mesuré par 8 énoncés tirés, encore une fois, de Karasek et al.

(1998). Les modalités de réponse sont les mêmes : fortement en désaccord (1), en désaccord

(2), d’accord (3) et fortement d’accord (4).

Tableau 5. Mesure du soutien social

1. Mon supérieur immédiat se soucie du bien-être des personnes qui sont sous son autorité.

2. Mon supérieur immédiat prête attention à ce que je dis.

3. Mon supérieur immédiat facilite la réalisation du travail.

4. Mon supérieur immédiat réussit à faire travailler les gens ensemble.

5. Les personnes avec qui je travaille sont qualifiées pour les tâches qu’elles accomplissent.

6. Les personnes avec qui je travaille s’intéressent personnellement à moi.

7. Les personnes avec qui je travaille sont amicales.

8. Les personnes avec qui je travaille facilitent la réalisation du travail.

3.2. Épuisement professionnel

Maslach (1993) situe les causes de l’épuisement professionnel dans l’environnement de travail.

Pour cerner le syndrome de l’épuisement, elle le définit en modélisant trois facettes.

Premièrement, l'épuisement ou l'assèchement émotionnel : la personne est vidée

émotionnellement et n'a plus d’énergie pour accomplir son travail. Deuxièmement, la

dépersonnalisation ou le cynisme. Il s’agit de la dimension interpersonnelle du burnout, la

personne ne se sent plus concernée par son travail, elle développe une attitude détachée,

négative, cynique envers son entourage. La personne devient un observateur extérieur, dénudé

de tout sentiment envers son environnement de travail. La dernière composante est celle de la

réduction de l’accomplissement personnel. Il s’agit de la dimension auto-évaluative du burnout.

La personne a l’impression que ses aspirations personnelles ne concordent pas avec la réalité de

son travail, elle manque d’enthousiasme qui s’accompagne d’une diminution de l’estime de soi

et du sentiment d’auto-efficacité.

L'inventaire de burnout de Maslach et Jackson (1986) a été retenu pour mesurer les trois

dimensions de l’épuisement émotionnel. Cet instrument a été largement appliqué dans la

littérature et son utilité a été mise en évidence dans plusieurs pays et dans divers secteurs de

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l’emploi (Evans et Fischer, 1993 ; Hwang et al., 2003 ; Kim et Ji, 2009; Poghosyan et al.,

2009; Tekindal et al., 2012). Cet inventaire est composé de 22 énoncés mesurant les trois

dimensions décrites plus haut : l’épuisement émotionnel (9 énoncés), la dépersonnalisation (5

énoncés) et l’accomplissement personnel (8 énoncés). De nombreuses études ont examiné et

supporté cette structure à trois facteurs. Par exemple, Kim et Ji (2009) comparent les diverses

structures factorielles relatées dans la littérature pour conclure à la supériorité de la structure à

trois facteurs proposée par Malsch et Jackson (1981, 1986).

3.2.1. Épuisement émotionnel

Cette variable est mesurée par 9 énoncés tirés de Maslach et Jackson (1986). Sept modalités de

réponse ont été retenues : jamais (0), quelques fois par année (1), une fois par mois (2),

quelques fois par mois (3), une fois par semaine (4), quelques fois par semaine (5), chaque jour

ou toujours (6). Par la suite, le total des scores sur les 9 énoncés est utilisé pour définir le

niveau de l’épuisement émotionnel. Ainsi, lorsque le total est inférieur à 17, on parle de

burnout bas. Lorsque le total est compris entre 18 et 29, on parle de burnout modéré. Enfin, on

est en présence d’un burnout élevé lorsque le total est supérieur à 30.

Tableau 6. Mesure de l’épuisement émotionnel

1. Je me sens émotionnellement vidé(e) par mon travail.

2. Je me sens à bout à la fin de ma journée de travail.

3. Je me sens fatiguée lorsque je me lève le matin et que j’ai à affronter une autre journée de travail.

4. Travailler avec des gens tout au long de la journée me demande beaucoup d'effort.

5. Je sens que je pourrais craquer à cause de mon travail

6. Je me sens frustrée par mon travail

7. Je sens que je travaille « trop dur » dans mon travail.

8. Travailler en contact direct avec les gens me stresse trop

9. Je me sens au bout du rouleau

3.2.2. Dépersonnalisation

Cette variable est mesurée par 5 items tirés de Maslach et Jackson (1986). L’énoncé 2 a été

contextualisé (pour inclure Banner). Sept modalités de réponse ont été retenues : jamais (0),

quelques fois par année (1), une fois par mois (2), quelques fois par mois (3), une fois par

semaine (4), quelques fois par semaine (5), chaque jour ou toujours (6). Par la suite, le total des

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scores sur les 5 énoncés permet d’identifier trois niveaux d’épuisement professionnel : burnout

bas (total inférieur à 5); burnout modéré (total compris entre 6 et 11); burnout élevé (total

supérieur à 12).

Tableau 7. Mesure de la dépersonnalisation

3.2.3. Accomplissement personnel

Ce construit est mesuré par 8 énoncés tirés et adaptés de Maslach et Jackson (1986). Les

mêmes sept modalités de réponse ont été retenues : jamais (0), quelques fois par année (1), une

fois par mois (2), quelques fois par mois (3), une fois par semaine (4), quelques fois par

semaines (5), chaque jour ou toujours (6). Lorsque le total des scores sur le 9 items est

supérieur à 40, on parle d’un burnout bas. Lorsque le total est compris entre 34 et 39, on parle

de burnout modéré. Enfin, on parle d’un burnout élevé lorsque le total est inférieur à 33.

Tableau 8. Mesure de l’accomplissement personnel

1. Je peux comprendre facilement ce que mes clients ressentent.

2. Je m'occupe très efficacement des problèmes de mes clients.

3. J'ai l'impression, à travers mon travail, d'avoir une influence positive sur les gens.

4. Je me sens pleine d'énergie

5. J'arrive facilement à créer une atmosphère détendue avec mes clients

6. Je me sens ragaillardie (revigorée) lorsque dans mon travail j'ai été proche de mes clients.

7. Depuis septembre 2009, j'ai accompli beaucoup de choses qui en valent la peine dans mon travail.

8. Dans mon travail, je traite les problèmes émotionnels très calmement.

3.3. Intention de quitter

L’instrument de mesure de ce construit est composé de 5 énoncés inspirés de Mobley et al.

(1979) et complètement adaptés au contexte de l’étude. L’échelle est composée de 5 modalités

1. Je sens que je m'occupe de certains clients de façon impersonnelle comme s'ils étaient des objets.

2. Je suis devenue plus insensible aux gens depuis que je travaille avec Banner.

3. Je crains que ce travail ne m'endurcisse émotionnellement.

4. Je ne me soucie pas vraiment de ce qui arrive à certains de mes clients.

5. J'ai l'impression que mes clients me rendent responsable de certains de leurs problèmes.

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de réponse : (1) fortement en désaccord, (2) en désaccord, (3) ne sais pas, (4) en accord, (5)

fortement en accord.

Tableau 9. Mesure de l’intention de quitter

1. Je souhaiterais occuper un autre emploi à l'université qui me dispenserait d'utiliser Banner et ses systèmes.

2. Je suis à la recherche d'un emploi à l'université qui me dispenserait de travailler avec Banner et ses systèmes.

3. Je pense quitter définitivement l’université depuis l'implantation de Banner.

4. En raison de l'implantation de Banner, dès que je le peux, je quitte définitivement l’université.

5. Je souhaite quitter l'université définitivement pour des raisons non liées à l'implantation de Banner.

Conclusion

Ce chapitre rapporte la méthodologie adoptée pour répondre aux questions de la présente

recherche. Ainsi, le choix de la méthode de collecte de données est justifié, suivi par la

définition du cas de l’étude et la description des caractéristiques de l’échantillon. La dernière

section du chapitre présente les instruments retenus pour mesurer les différentes variables du

cadre conceptuel.

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Chapitre 4 – Résultats

Introduction

Ce quatrième chapitre a pour objectif de présenter les principaux résultats de l’étude. La

première section présente les statistiques descriptives sur les scores rapportés par les

répondants. La deuxième section discute de la fiabilité des instruments de mesure. La troisième

section analyse les corrélations entre les variables du cadre conceptuel. Enfin, la dernière

section présente les résultats de l’analyse de la correspondance entre le cadre conceptuel et les

données, suivis par la vérification des des hypothèses de la recherche.

1. Statistiques descriptives

Dans les sections qui suivent, les tableaux (10), (11) et (12) rapportent les statistiques

descriptives pour tous les énoncés utilisés pour mesurer les variables retenues dans le cadre

conceptuel.

Pour la variable latitude décisionnelle (voir tableau 10), concernant l’énoncé #1, les répondants

trouvent que leur travail exige qu’ils apprennent de nouvelles choses (une moyenne de 3.83 sur

une échelle à 4 niveaux allant de 1 « fortement en désaccord » à 4 « fortement en accord »).

Aussi, les répondants trouvent que leur travail exige un niveau élevé de qualification (moyenne

de 3.38 sur 4). Il est fort possible que cette perception soit influencée par la récente

implantation de Banner. D’ailleurs, en s’appuyant sur les commentaires de quelques

répondants, l’implantation d’un nouveau logiciel nécessite un grand effort d’adaptation et

surtout une résiliation avec les pratiques et les outils de travail antérieurs. Une des répondants

souligne : « C’est énorme tout ce que cette implantation a demandé d’efforts d’adaptation et de

rupture quant à nos pratiques ». Les employés sont appelés alors à acquérir des nouvelles

compétences et connaitre les différentes options offertes par ce nouvel outil technologique.

Dans une autre perspective, pour l’énoncé #6, les répondants rapportent que leur travail leur

donne assez de liberté décisionnelle (une moyenne de 2.97 sur 4). Même si certains employés

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se plaignent que ce nouveau logiciel rend le processus de travail beaucoup plus mécanique et

automatisé, et que Banner ne leur donne pas la souplesse nécessaire pour interagir avec la

clientèle. N’empêche, certains employés trouvent que leur travail leur donne une certaine

latitude décisionnelle.

Dans le même ordre d’idée, pour l’énoncé #3, les répondants trouvent qu’ils doivent faire

preuve de créativité (3,29 sur 4) dans leur travail et qu’ils ont l’occasion de faire plusieurs

choses différentes (énoncé #7) soit une moyenne de (3,49 sur 4). Ceci est expliqué par le fait

que ces employés sont responsables de l’exécution de plusieurs tâches, comme on vient de le

mentionner dans la définition du cas d’étude dans le chapitre précédent. Ces employés ont des

responsabilités plurielles et leur travail exige l’exécution de plusieurs tâches.

Globalement, on peut dire que les employés trouvent qu’ils ont assez de latitude décisionnelle

dans leur travail malgré tous les inconvénients rapportés par ce nouveau mode de travail.

Au niveau de la demande psychologique, il faut remarquer que les employés ressentent une

« forte » demande psychologique. Par exemple, pour l’énoncé « Mon travail exige de travailler

très fort mentalement », les répondants rapportent un score de 3,41 sur 4.

En plus, ils trouvent que leur supérieur leur demande de faire une quantité importante de

travail. Fait marquant, ces mêmes employés rapportent que leurs tâches sont souvent

interrompues avant qu’ils les aient terminées (score de 3,72 sur 4); ils doivent alors y revenir

plus tard, ceci risque d’affecter négativement la perception qu’ils ont de leur charge de travail

(un dédoublement de la même tâche). Enfin, les répondants trouvent leur travail très

mouvementé (un score de 3,42 sur 4). Dans cette perspective, ce constat concorde avec

quelques commentaires formulés par les agents et les conseillers d’études, qui citent « j’ai été

en arrêt de travail pendant quelques mois. Cet arrêt de travail est attribuable en très grande

partie à l’augmentation de ma charge de travail à la suite de l’implantation de Banner» « j’ai du

travail par-dessus la tête et j’ai beaucoup de difficulté à me concentrer et à être efficace»,

«Nous sommes complètement débordées par notre travail […].»

Pour ce qui est du soutien social, les répondants indiquent que leur supérieur immédiat se

soucie de leur bien-être (score de 3,09 sur 4) et prête attention à ce qu’ils disent (score de 3,17

sur 4). Ils soulignent aussi que les personnes avec lesquelles ils travaillent sont amicales (score

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de 3,33 sur 4), s’intéressent personnellement à eux (score de 3,05 sur 4) et leur facilitent la

réalisation du travail (score de 3,09 sur 4). Schématiquement, il règne une ambiance de travail

amicale et d’entraide.

Tableau 10. Statistiques descriptives - Les facteurs organisationnels

Énoncés Moyenne(1)

Écart-type

Latitude décisionnelle

1. Mon travail exige que j'apprenne des choses nouvelles. 3.83 0.377

2. Mon travail exige un niveau élevé de qualifications. 3.38 0.701

3. Dans mon travail, je dois faire preuve de créativité. 3.29 0.718

4. Mon travail consiste à refaire toujours les mêmes choses. (énoncé inversé) 2.76 0.800

5. J’ai la liberté de décider comment je fais mon travail. 2.76 0.877

6. Mon travail me permet de prendre des décisions de façon autonome. 2.97 0.741

7. Au travail, j’ai l’occasion de faire plusieurs choses différentes. 3.49 0.554

8. J’ai passablement d’influence sur la façon dont les choses se passent à mon

travail.

2.63 0.863

9. Au travail, j’ai la possibilité de développer mes habiletés personnelles. 3.01 0.723

Demande psychologique

1. Mon travail exige d’aller très vite. 3.29 0.663

2. Mon travail exige de travailler très fort mentalement. 3.41 0.579

3. On me demande de faire une quantité excessive de travail. 3.19 0.729

4. J’ai suffisamment de temps pour faire mon travail. (inversé) 3.06 0.730

5. Je reçois des demandes contradictoires (opposées) de la part des autres (ces

demandes peuvent provenir de différents groupes : supérieurs, collègues, clients).

2.69 0.837

6. Mon travail m’oblige à me concentrer intensément pendant de longues

périodes.

3.25 0.719

7. Ma tâche est souvent interrompue avant que je l’aie terminée; je dois alors y

revenir plus tard.

3.72 0.523

8. Mon travail est très mouvementé. 3.42 0.696

9. Je suis souvent ralentie dans mon travail parce que je dois attendre que les

autres aient terminé le leur.

2.68 0.948

Soutien social

1. Mon supérieur immédiat se soucie du bien-être des personnes qui sont sous son

autorité.

3.05 0.799

2. Mon supérieur immédiat prête attention à ce que je dis. 3.17 0.737

3. Mon supérieur immédiat facilite la réalisation du travail. 2.90 0.812

4. Mon supérieur immédiat réussit à faire travailler les gens ensemble. 2.75 0.825

5. Les personnes avec qui je travaille sont qualifiées pour les tâches qu’elles

accomplissent.

3.17 0.616

6. Les personnes avec qui je travaille s’intéressent personnellement à moi. 3.05 0.608

7. Les personnes avec qui je travaille sont amicales. 3.33 0.562

8. Les personnes avec qui je travaille facilitent la réalisation du travail. 3.09 0.640 (1)

Sur une échelle de 1 à 4 allant de fortement en désaccord (1) à fortement d’accord (4).

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81

Pour ce qui est de l’épuisement émotionnel6 (voir tableau 11 ), 16,1% des répondants disent se

sentir émotionnellement vidés par leur travail chaque jour alors que 33,1 % des répondants ont

le même sentiment quelques fois par semaines et seulement 5,4% n’ont jamais ressenti un

épuisement émotionnel. Aussi, 33,9% des personnes disent se sentir fatiguées lorsqu’elles

terminent leur journée de travail. En outre, 31,5% des employés disent être éreintés par la

fatigue lorsqu’ils se lèvent le matin pour affronter une autre journée de travail. Ces résultats

montrent que ces employés souffrent quand même d’un épuisement émotionnel dû à une charge

de travail importante amplifiée par l’instauration du logiciel.

Quant à la dépersonnalisation, les répondants ne rapportent pas de niveaux élevés. Ainsi, 60,6%

disent n’avoir jamais traité les clients (étudiants) de façon impersonnelle comme s’ils étaient

des objets contre seulement 5,5% des répondants qui le font tous les jours. En outre, 54,2%

disent n’être jamais devenus insensibles aux demandes des étudiants depuis l’installation du

nouveau système de gestion Banner. Environ 20% des répondants disent avoir le sentiment,

chaque jour ou au moins quelques fois par semaine, que les étudiants les rendent responsables

de certains de leurs problèmes.

Il faut cependant noter que l’accomplissement personnel est à un niveau élevé. Ainsi, 79,1%

des répondants disent s’en occuper très efficacement des problèmes de leurs clients. Environ

70% des répondants disent accomplir beaucoup de choses qui en valent la peine dans leur

travail chaque jour ou du moins quelques fois par semaine. Environ 60% des répondants disent

arriver facilement chaque jour à créer une atmosphère détendue avec leurs clients.

6 Puisque l’échelle utilisée ici est une échelle ordinale, seules les fréquences d’occurrence de chaque modalité

sont rapportées dans le tableau.

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82

Tableau 11. Statistiques descriptives - L’épuisement professionnel

Énoncés 0 (1)

1 2 3 4 5 6

Épuisement émotionnel

1. Je me sens émotionnellement vidé(e) par mon

travail.

5.4% 18.8% 4.5% 17.0% 7.1% 31.3% 16.1%

2. Je me sens à bout à la fin de ma journée de travail. 0.9% 16.1% 3.6% 15.2% 10.7% 33.9% 19.6%

3. Je me sens fatiguée lorsque je me lève le matin et

que j’ai à affronter une autre journée de travail.

5.4% 15.3% 1.8% 19.8% 9.9% 31.5% 16.2%

4. Travailler avec des gens tout au long de la journée

me demande beaucoup d'effort.

21.8% 32.7% 6.4% 11.8% 1.8% 17.3% 8.2%

5. Je sens que je pourrais craquer à cause de mon

travail

11.6% 35.7% 5.4% 17.9% 5.4% 13.4% 10.7%

6. Je me sens frustrée par mon travail 3.6% 11.7% 0.9% 19.8 4.5% 34.2% 25.2%

7. Je sens que je travaille « trop dur » dans mon travail. 5.4% 15.3% 3.6% 23.4% 4.5% 26.1% 21.6%

8. Travailler en contact direct avec les gens me stresse

trop

40.9% 38.2% 4.5% 0% 10.0% 4.5% 1.8%

9. Je me sens au bout du rouleau 8.1% 24.3% 8.1% 18.9% 8.1% 20.7% 11.7%

Dépersonnalisation

1. Je sens que je m'occupe de certains clients de façon

impersonnelle comme s'ils étaient des objets

60.6% 11.9% 0.9% 9.2% 0.9% 11.0% 5.5%

2. Je suis devenue plus insensible aux gens depuis que

je travaille avec Banner.

54.2% 13.1% 2.8% 13.1% 0.9% 8.4% 7.5%

3. Je crains que ce travail ne m'endurcisse

émotionnellement

51.0% 16.3% 4.8% 11.5% 1.0% 10.6% 4.8%

4. Je ne me soucie pas vraiment de ce qui arrive à

certains de mes clients

71.8% 19.1% 0.0% 4.5% 0.9% 2.7% 0.9%

5. J'ai l'impression que mes clients me rendent

responsable de certains de leurs problèmes

17.1% 30.6% 3.6% 20.7% 8.1% 10.8% 9.0%

Accomplissement personnel

1. Je peux comprendre facilement ce que mes clients

ressentent.

0.0% 2.8% 0.0% 5.7% 3.8% 22.6% 65.1%

2. Je m'occupe très efficacement des problèmes de mes

clients.

0.0% 0.9% 0.0% 0.9% 0.9% 18.2% 79.1%

3. J'ai l'impression, à travers mon travail, d'avoir une

influence positive sur les gens.

2.7% 12.6% 3.6% 16.2% 9.0% 30.6% 25.2%

4. Je me sens pleine d'énergie 14.8% 14.8% 4.6% 21.3% 6.5% 30.6% 7.4%

5. J'arrive facilement à créer une atmosphère détendue

avec mes clients

0.9% 2.7% 0.0% 5.4% 3.6% 30.6% 56.8%

6. Je me sens ragaillardie (revigorée) lorsque dans mon

travail j'ai été proche de mes clients.

4.7% 0.9% 2.8% 14.0% 5.6% 28.0% 43.9%

7. Depuis septembre 2009, j'ai accompli beaucoup de

choses qui en valent la peine dans mon travail.

2.9% 10.8% 2.0% 14.7% 1.0% 33.3% 35.3%

8. Dans mon travail, je traite les problèmes

émotionnels très calmement.

3.8% 10.5% 3.8% 20.0% 8.6% 29.5% 23.8%

0 : Jamais; 1 : Quelques fois par année ou moins; 2 : Une fois par mois ou moins; 3 : Quelques fois par mois; 4 : une fois par

semaine; 5 : Quelques fois par semaine ; 6 : Chaque jour.

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83

À la lueur de ces résultats, même si certains employés éprouvent une difficulté à s’adapter avec

le nouveau mode de travail et que ce logiciel de gestion des études a entrainé une sensation

d’épuisement, plusieurs employés ne sont pas prêts à quitter définitivement leur emploi. En

effet, malgré tous les inconvénients qui se présentent, les employés n’ont pas l’intention de

réorienter leur carrière et ils sont très attachés à leur université.

Ainsi, les employés ne veulent pas perdre leur travail pour une inadéquation entre ce logiciel et

leurs vrais besoins. En outre, il est fort probable que la majorité pense un jour se familiariser

avec ce logiciel ou bien le remplacer par un autre dans le futur.

Tableau 12. Statistiques descriptives - L’intention de quitter

Énoncés Moyenne Écart-type

1. Je souhaiterais occuper un autre emploi à l'université qui me dispenserait

d'utiliser Banner et ses systèmes.

2.94 1.251

2. Je suis à la recherche d'un emploi à l'université qui me dispenserait de

travailler avec Banner et ses systèmes.

2.42 1.086

3. Je pense quitter définitivement l’université depuis l'implantation de Banner. 2.13 1.195

4. En raison de l'implantation de Banner, dès que je le peux, je quitte

définitivement l’université.

2.33 1.355

5. Je souhaite quitter l'université définitivement pour des raisons non liées à

l'implantation de Banner.

1.74 0.911

(1) Sur une échelle de 1 à 5 allant de extrêmement en désaccord (1) à extrêmement en accord (5).

2. Fiabilité des construits

Le coefficient alpha de Cronbach, est la mesure la plus recommandée pour évaluer la cohérence

interne (la fiabilité) d'un ensemble d’énoncés. Le coefficient de Cronbach se base sur la

variance et la covariance pour mesurer la fiabilité d’un instrument de mesure composé de

plusieurs énoncés (Evrard et al., 2000). Quand le coefficient alpha est faible, cela indique que

l'échantillon d'items reproduit mal la variable étudiée et que certains items doivent être

éliminés. En fait, l’item dont la corrélation est proche de zéro doit être retiré.

D’une façon générale, pour une étude exploratoire, un seuil de 0,60 (pour l’alpha de Cronbach)

est suffisant pour apprécier la fiabilité des items, alors que dans le cas d’une étude appliquée

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84

l'exigence se situe de 0,80 à 0,90. Mais, habituellement, un seuil de 0,70 est considéré

satisfaisant pour se prononcer sur la fiabilité d'un construit (Evrard et al., 2000).

Dans cette recherche, on considère un seuil de fiabilité de 0,70. Les valeurs de l’alpha de

Cronbach sont rapportées dans le tableau (13). On remarque que toutes les valeurs sont

supérieures à 0,70. Soit une valeur de (0,701) pour la latitude décisionnelle; (0,913) pour le

soutien social; (0,803) pour la demande psychologique; (0,901) pour l’épuisement émotionnel ;

(0,730) pour la dépersonnalisation; et (0,825) pour l’intention de quitter. Cependant, la valeur

associée au construit « accomplissement personnel » est inférieure à 0,70, mais tout de même

très proche (0,688). Cette mesure est ainsi considérée fiable. Il est à noter que toutes ces

mesures ont été tirées d’études antérieures; elles ont déjà fait l’objet d’une évaluation de la

fiabilité.

Les résultats de cette recherche supportent ceux rapportés dans les études antérieures. Ainsi,

L’inventaire du burnout de Maslach (1986) a été largement examiné dans la littérature alors que

sa fiabilité et sa validité ont été globalement supportées (Maslach et Jackson, 1981 ; Poghosyan

et al., 2009). Par exemple, Poghosyan et al. (2009) ont examiné l’instrument dans huit pays

(États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Allemagne, Nouvelle-Zélande, Japon, Russie et Arménie)

et ont rapporté des coefficients de fiabilité supérieurs à 0,70 sur les trois dimensions à la seule

exception du score de fiabilité de la dimension dépersonnalisation en Arménie (23 coefficients

de fiabilité sur 24 étaient supérieurs à 0,70). Les scores de fiabilité rapportés dans ce mémoire

se situent dans un niveau de fiabilité comparable.

Pour ce qui est de la mesure des facteurs organisationnels, les résultats de cette étude

confirment les résultats de Karasek et al. (1998). Ces derniers rapportent en effet des scores de

fiabilité acceptables pour la demande psychologique, la latitude décisionnelle et le support

social dans les quatre pays étudiés (États-Unis, Canada, Hollande, Japon). Il est à noter les

données canadiennes ont été collectées au Québec (instrument traduit en français). Enfin, dans

une étude récente, Maizura et al. (2009) concluent aussi à la fiabilité de l’instrument.

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85

Tableau 13. Fiabilité des mesures

Construit Nombre d’items Alpha de Cronbach

Latitude décisionnelle 9 0.701

Soutien social 8 0.913

Demande psychologique 9 0.803

Épuisement émotionnel 5 0.901

Dépersonnalisation 5 0.730

Accomplissement personnel 8 0.688

Intention de quitter 5 0.825

3. Calcul des scores des construits et analyse des corrélations

Ainsi, la valeur moyenne pour les construits « latitude décisionnelle », « soutien social »,

« demande psychologique », et « intention de quitter » a été calculée. Par exemple, le score

moyen sur la variable « soutien social » est équivalent à la moyenne des scores sur les 8

énoncés utilisés pour mesurer cette variable.

Pour ce qui est des trois dimensions du construit « épuisement professionnel » (l’épuisement

émotionnel, la dépersonnalisation et l’accomplissement personnel), le score total a été calculé

sur chaque dimension tout en créant trois niveaux selon les suggestions de Maslach et Jackson

(1986). Ainsi, pour la dimension « épuisement émotionnel » le score total a été calculé en

additionnant les scores sur les neuf énoncés retenus pour mesurer cette dimension. Ensuite, la

valeur 1 (épuisement émotionnel bas) a été associée lorsque le score total était inférieur ou égal

à 17, la valeur 2 (épuisement émotionnel modéré) lorsque le score était compris entre 18 et 29,

et la valeur 3 (épuisement émotionnel élevé) lorsque le score était supérieur ou égal à 30. Pour

la dimension « dépersonnalisation » le score total a été calculé sur les cinq items retenus pour

mesurer cette dimension. Ensuite, la valeur 1 (niveau de dépersonnalisation bas) a été associée

lorsque le score total était inférieur ou égal à 5, la valeur 2 (niveau de dépersonnalisation

modéré) lorsque le score était compris entre 6 et 11, et la valeur 3 (niveau de dépersonnalisation

élevé) lorsque le score était supérieur ou égal 12. Enfin, pour la dimension « accomplissement

personnel » le score total a été calculé sur les huit items retenus pour mesurer cette dimension.

Ensuite, la valeur 1 (niveau d’accomplissement personnel bas) a été associée lorsque le score

total était inférieur ou égal à 33, la valeur 2 (niveau d’accomplissement personnel modéré)

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86

lorsque le score était compris entre 34 et 39, et la valeur 3 (niveau d’accomplissement

personnel élevé) lorsque le score était supérieur ou égal 40.

L’analyse des corrélations entre les sept construits montre des corrélations significatives au

seuil de 0,05 entre les variables : latitude décisionnelle et soutien social (coefficient de

corrélation r=0,235; niveau de signification p=0,022); latitude décisionnelle et

accomplissement personnel (r=0,408; p=0,001); demande psychologique et épuisement

émotionnel (r=0,507; p=0,001); demande psychologique et dépersonnalisation (r=0,326;

p=0,001); soutien social et épuisement émotionnel (r=-0,46, p=0,016); soutien social et

accomplissement personnel (r=0,277; p=0,010); épuisement émotionnel et intention de quitter

(r=0,305, p=0,002); dépersonnalisation et intention de quitter (r=0,203, p=0,034); et

accomplissement et intention de quitter (r=-0,250, p=0,019). Les autres corrélations sont toutes

statistiquement non significatives.

4. Test du cadre conceptuel et vérification des hypothèses de la recherche

Pour tester le cadre conceptuel, la méthode (le modèle) d’équations structurelles a été utilisée.

Qualifié de méthode d’analyse multi-variée de la deuxième génération, le modèle d’équations

structurelles examine la correspondance entre le modèle conceptuel proposé (ou posé à priori)

et les données collectées (ou observées). Le test du modèle a été réalisé à l’aide du logiciel EQS

(6.1).

Contrairement à la régression multiple, la particularité de la méthode d’équations structurelles

est de traiter des relations multiples et simultanées entre variables dépendantes et indépendantes

et d’offrir, entre autres, un outil adapté pour une démarche plus analytique (Roussel et al.,

2002). À ce propos, les modèles d’équations structurelles cumulent plusieurs avantages. En

effet, ils permettent de tester de manière simultanée des relations causales hypothétiques entre

plusieurs variables dans une même analyse. Les modèles d’équations structurelles traitent les

relations linéaires entre plusieurs variables latentes (variables non directement observables

mesurées à l’aide d’indicateurs). Elles permettent ainsi d’estimer des rapports de dépendance

entre ces variables latentes. La notion de variable latente est très importante, car elle permet de

comprendre des phénomènes non directement observables par le chercheur. Contrairement aux

régressions multiples, les méthodes d’équation structurelles permettent d’incorporer l’erreur de

mesure directement dans le processus d’estimation (Bagozzi, 1994). Ces modèles sont d’une

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87

grande précision puisqu’ils prennent en considération les erreurs de mesure dans toutes les

procédures d’estimation. Enfin, ces méthodes permettent d’évaluer et de comparer de manière

globale des modèles de recherche complexes (Bagozzi, 1994).

Il est à noter que la méthode d’équation structurelle s’inscrit dans une démarche confirmatoire.

Son rôle est d’aider le chercheur à tester et valider un modèle théorique. D’emblée, on pose des

hypothèses de recherche sur les relations entre les variables dépendantes et indépendantes. La

vérification du modèle théorique se fait en deux étapes. On examine d’abord l’ajustement

global du modèle pour ensuite vérifier les hypothèses de la recherche.

4.1. Ajustement du modèle

L’évaluation de l’ajustement du modèle se fait sur la base de plusieurs indicateurs. Pour évaluer

la qualité du modèle, nous avons eu recours aux indicateurs les plus utilisés dans la littérature.

Ainsi, les indicateurs suivants ont été retenus : le khi-deux (2), le khi-deux divisé par le

nombre de degrés de liberté (2/ddl), le Non-Normed Fit Index (NNFI), le Comparative Fit

Index (CFI; Bentler, 1989), le Incremental Fit Index (IFI, Bollen, 1989), le McDonald Fit Index

(MFI), le Root Mean-Square Error of Approximation (RMSEA) et le Root Mean-Square

Residual (RMR). Pour tous ces indicateurs, il existe des valeurs critiques auxquelles seront

comparées les valeurs obtenues. Par exemple, une faible valeur du khi-deux (un khi-deux

statistiquement non significatif) veut dire que le modèle théorique est en adéquation avec le

modèle observé (les données empiriques). Lorsque cette valeur tend vers (0), on considère que

c’est une parfaite adéquation. Aussi, d’un bon ajustement du modèle théorique aux données

lorsque les valeurs des indicateurs NNFI, CFI, IFI et MFI sont supérieures à 0,90.

Ainsi, l’ajustement du modèle a été testé avec le logiciel EQS 6.1. Pour estimer le modèle, la

méthode du maximum de vraisemblance a été appliquée. Aussi les statistiques corrigées ont été

utilisées pour pallier à la non-normalité des données.7 Les résultats du test de modèle sont

rapportés dans le tableau 4.5. La valeur de l’indice S-B2 est non significative puisque la

valeur p (p=0.073) est supérieure au niveau de risque d’erreur a priori fixé dans cette recherche

7 La non-normalité des données est un problème récurrent dans les études en sciences sociales. La faible taille

de l‘échantillon par rapport au nombre de variables mesurées et la présence de variables extrêmes sont parmi

les causes possibles (Byrne, 1994; Roussel et al., 2002). Par précaution, cette recherche utilise la méthode dite

robuste pour corriger la non-normalité des données (Byrne, 1994).

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88

à 0,05.8 La valeur du S-B2 divisée par le nombre de degrés de liberté est inférieure à 3 (S-

B2/ddl = 1,707). Les valeurs des indices IFI (0,910) et MFI (0,953) sont supérieures à 0,90.

Seule la valeur de l’indice CFI est à la limite de l’acceptabilité (0,895). Enfin, les valeurs du

RMR (0,045) et du RMSEA (0,099) sont inférieures à 0,10. Globalement, ces résultats

confirment la bonne qualité de l’ajustement du modèle aux données observées.

Tableau 14. Indicateurs d’adéquation du modèle

Indices de fit Valeur Valeur critique

S-B2 (p value) 17.065 (p=0.073) valeur p supérieure à 0.05

S-B2/ddl 1,707 varie entre 1 et 3

CFI 0,895 valeur supérieure 0.90

IFI 0,910 valeur supérieure 0.90

MFI 0,953 valeur supérieure 0.90

RMR 0,045 Valeur inférieure à 0.10 (Steiger, 1990)

RMSEA 0,099 Valeur inférieure à 0.10 (Steiger, 1990)

4.2. Vérification des hypothèses de la recherche

Les résultats sont présentés dans la figure (2). Dans cette recherche, une relation entre deux

variables est considérée significative lorsque la valeur p est inférieure au seuil de 0,05. Les

sorties du logiciel EQS 6.1 rapportent seulement les valeurs du t de Student. Le seuil de

signification p=-0,05 correspond à une valeur t de Student égale à 1.96. Pour un seuil de

significativité p=0,05, lorsque la valeur t est supérieure à 1,96 (ce qui équivaut à p< 0,05), on

conclut à une relation significative entre les deux variables.

Les résultats montrent une association positive (β=0,308) et significative (t=2,788) entre la

dépersonnalisation et l’épuisement émotionnel, ce qui supporte l’hypothèse (1). L’association

entre l’accomplissement personnel et la dépersonnalisation est non significative (β=-0,122; t=-

1,027), ce qui infirme l’hypothèse (2). L’hypothèse (3) est confirmée puisqu’il existe une

relation positive (β=0,447) et significative (t=4,445) entre la demande psychologique et

l’épuisement émotionnel. Quant à l’hypothèse (4), elle est infirmée puisque l’association entre

8 Dans le cas de la non-normalité des données, Satorra et Bentler (1988) proposent de remplacer le 2 par une

statistique corrigée le S-B2 (Byrne, 1994).

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la latitude décisionnelle et la demande psychologue est non significative (β=0,100; t=0,858).

L’association entre l’accomplissement personnel et la latitude décisionnelle est positive

(β=0,375) et significative (t=3,522), ce qui confirme l’hypothèse (5). L’hypothèse (6) est non

supportée puisque l’association entre la latitude décisionnelle et la dépersonnalisation est non

significative (β=-0,087; t=-0,732). L’hypothèse (7) est aussi infirmée puisque l’association

entre le soutien social et la demande psychologique est non significative (β=-0,123; t=-1,056).

L’association entre le soutien social et l’épuisement émotionnel est significative (β=-0,240; t=-

2.390), ce qui confirme l’hypothèse (8). Les résultats montrent aussi une association positive

(β=0,208) et significative (t=1,952)9 entre le soutien social et l’accomplissement personnel, ce

qui confirme l’hypothèse (9). Quant à la relation entre l’épuisement émotionnel et l’intention de

quitter, elle est positive (β=0,239) et significative (t=2,098) confirmant ainsi l’hypothèse (10).

Enfin, l’hypothèse (11) est confirmée par une association positive et significative entre la

dépersonnalisation et l’intention de quitter (β=0,251; t=-2,209). Globalement sept hypothèses

sont confirmées et les quatre autres sont infirmées.

Conclusion

Dans ce chapitre, la procédure d’analyse des données et les résultats de la recherche ont été

décrits. Après avoir présenté certaines statistiques descriptives des instruments de mesure, la

fiabilité des instruments de mesure utilisés dans cette recherche a été examinée et supportée. À

l’aide du modèle d’équations structurelles, l’adéquation du modèle conceptuel aux données et

les hypothèses de la recherche ont été testées. Les résultats confirment sept des onze hypothèses

de recherche rapportées dans le cadre conceptuel (voir figure 2).

9 La valeur de 1.952 est très proche de la valeur critique du test de Student à 1.96. Donc, la relation est

considérée comme significative.

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90

Figure 2. Résultats des relations entre les variables

Latitude

décisionnelle

Soutien social Accomplissement

personnel

Dépersonnalisation

Épuisement

émotionnel

Intention de quitter 0.447*

0.308*

-0.122

0.100

0.375*

-0.087

-0.123 -0.240*

0.208*

0.239

0.251*

Demande

psychologique

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91

Chapitre 5 – Conclusion générale

Introduction

Le cinquième et dernier chapitre se compose de cinq sections respectives. Dans la première

section, un bref rappel des objectifs de la recherche est énoncé. Dans la deuxième section, les

résultats quant à la vérification des onze hypothèses de recherche sont discutés. Dans la

troisième section, sont présentées les forces et les limites de l’étude. La quatrième section

propose des pistes de recherches futures alors que la cinquième section présente les

implications managériales de cette étude.

1. Rappel des objectifs et des hypothèses de la recherche

La finalité de la présente recherche est d’approfondir les connaissances ainsi que la réflexion

managériale quant à l’effet des facteurs organisationnels sur l’émergence de l’épuisement

professionnel. En fait, cette étude vise la compréhension du syndrome de l’épuisement

professionnel et des facteurs qui favorisent son apparition dans un contexte peu exploré.

Autrement dit, bien que ce sujet d’étude ne soit pas nouveau en soi, mais l’apport de cette

recherche réside dans l’évaluation de ces facteurs dans un contexte bien particulier, celui de la

venue d’une nouvelle technologie.

Au niveau théorique, la recension des écrits présentée au deuxième chapitre a permis de faire le

point sur les connaissances concernant l’épuisement professionnel, les déterminants de

l’environnement de travail et l’effet de la technologie sur le fonctionnement du travail. En effet,

en se basant sur la littérature existante, on a pu conclure que la technologie affecte, de façon

directe ou indirecte, les facteurs organisationnels et les relations sociales au travail. Par après,

cette fois par des évidences empiriques, la relation entre les facteurs organisationnels, soit la

demande psychologique, la latitude décisionnelle et le soutien social et l’apparition du burnout

a été illustrée. Dans la suite des choses, il a été démontré que l’épuisement professionnel joue, à

son tour, un rôle sur la décision de quitter son travail. Le cadre théorique a permis de définir les

concepts à l’étude et de mieux comprendre les interactions qui existent entre eux. À fur et à

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mesure de l’élaboration de la revue de la littérature, onze hypothèses de recherche ont été

proposées. Pour tester ces hypothèses, la méthode des équations structurelles (MES) a été

retenue.

2. Discussion des résultats de la recherche

Onze hypothèses ont été proposées à partir de la littérature existante sur la problématique de

l’épuisement professionnel en rapport avec les variables retenues. Sur le total des onze

hypothèses de cette recherche, sept hypothèses ont été confirmées et les quatre autres ont été

infirmées par les données empiriques.

Tableau 15. Résultats de la vérification des hypothèses de recherche

Hypothèse confirmées Hypothèses infirmées

H1. Il existe une association positive entre

l’épuisement émotionnel et la

dépersonnalisation.

H2. Il existe une association négative entre

l’accomplissement personnel et la

dépersonnalisation.

H3. Il existe une association positive entre la

demande psychologique et l’épuisement

émotionnel.

H4. Il existe une association négative entre la

latitude décisionnelle et la demande

psychologique.

H5. Il existe une association positive entre la

latitude décisionnelle et l’accomplissement

personnel.

H6. Il existe une association négative entre la

latitude décisionnelle et la dépersonnalisation.

H8. Il existe une association négative entre le

soutien social et l’épuisement émotionnel.

H7. Il existe une association négative entre le

soutien social et la demande psychologique.

H9. Il existe une association positive entre le

soutien social et l’accomplissement personnel.

H10. Il existe une association positive entre

l’épuisement émotionnel et l’intention de quitter

son emploi.

H11. Il existe une association positive entre la

dépersonnalisation et l’intention de quitter son

emploi.

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93

2.1.1. Hypothèses confirmées

Hypothèse 1

La première hypothèse (H1) prédit que l’épuisement émotionnel est associé positivement à la

dépersonnalisation. Cette hypothèse est confirmée par les résultats de l’étude empirique qui

montrent une relation positive et significative entre ces deux variables. En effet, l’association

positive entre ces deux dimensions de l’épuisement professionnel a été rapportée dans des

études antérieures (Best et al., 2005; Cherniss, 1980; Lee et Ashforth, 1991; Leiter et Maslach,

1988; Lourel et Gueguen 2007; Posing et Kickul, 2003). La logique est que la

dépersonnalisation représente une réaction immédiate et un mécanisme d'adaptation face à un

état d’épuisement émotionnel. Le modèle de Leiter et Maslach (1988) vient montrer aussi que

l’épuisement émotionnel conduit à la dépersonnalisation qui amène à son tour à une diminution

de l’accomplissement personnel.

Dans cette perspective, comme c’est expliqué dans le deuxième chapitre, la personne drainée

émotionnellement ressent un profond épuisement physique et émotionnel. La personne a la

sensation d’être vidée et incapable de suivre le mouvement. Généralement, cette phase est

accompagnée de sentiments de découragement et d’une sensation d’être pris au piège, qui

s’exprime parfois en crise de colère ou en accès de larmes incontrôlables. Bref, la personne

épuisée émotionnellement s’énerve facilement et perd tout mécanisme de contrôle et de

récupération.

Ce sentiment d’impuissance et d’épuisement cause chez la personne un vide intérieur. Sur le

plan professionnel, l’individu a l’impression de ne plus être utile ni fonctionnel. Alors que sur

le plan relationnel, il tend à se refermer sur lui-même et à se détacher de ses collègues de travail

et de tout son entourage. La personne manifeste un comportement asocial et égocentrique qui

peut aller jusqu’à l’hostilité. Alors, sans tentative de s’en sortir ou de demander de l’aide, le

mal-être intérieur conduit au cynisme. Ainsi, la personne s’installe dans un état de

dépersonnalisation, de déshumanisation de la relation et la perte de sens à l’égard de son travail.

Le cynisme et les attitudes asociales deviennent, en quelque sorte, une stratégie d’ajustement

défensive vis- à- vis de l’épuisement émotionnel. Ce moyen de défense entrave davantage la

relation avec l’autre et ne réduit pas l’épuisement, mais intensifie la fragilisation de la personne

et le marasme psychologique.

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Hypothèse 3

La troisième hypothèse (H3) postule que la demande psychologique est positivement associée à

l’épuisement émotionnel. Les résultats obtenus supportent cette hypothèse. Les résultats vont

ainsi dans le même sens que les études précédentes suggérant que les contraintes

organisationnelles, notamment la demande psychologique, sont associées positivement à

l’épuisement émotionnel. Plusieurs recherches ont montré qu’une augmentation de la demande

psychologique est liée à l’apparition des risques d’épuisement professionnel, notamment celui

d’ordre émotionnel (Bourbonnais et al., 1998; Lourel et al., 2004; Marchand et al., 2005,

Maslach et Jackson,1981; Niedhammer et al., 1998; Ruiller, 2008; Van Der Doef, 1999; Van

der Doef et al., 2000). À titre d’exemple, selon Lourel et al. (2004) la relation entre demande

psychologique et épuisement émotionnel est incontestable. Dans la même perspective, Van Der

Doef (1999) montre que la demande psychologique a un effet direct sur les trois dimensions de

l’épuisement professionnel. Selon lui, la demande psychologique a un rôle dans le

développement de l'épuisement professionnel ; plus la demande psychologique est importante

plus la personne devient vulnérable émotionnellement. Il rapporte que ce problème peut être

davantage observé dans le domaine de la santé et des services sociaux en raison de la nature de

la charge de travail qui pousse la personne jusqu'aux limites de ses capacités émotionnelles

(Leiter et Maslach, 1999). Toutefois, les résultats de cette recherche vont à contre sens de ceux

de Boles et al. (1997) qui présument que seul le conflit de rôle peut avoir une influence

significative et positive sur la dimension émotionnelle de l’épuisement.

Nos résultats attestent quand même une nouveauté au regard du modèle «demande-contrôle» de

Karasek (1979). En effet, nos résultats ne valident pas un aspect du modèle de Karasek (1979)

qui soutient que l’effet des demandes psychologiques élevées n’est pas négatif en soi, mais il le

devient lorsqu’elles sont jointes à un niveau peu élevé de latitude décisionnelle. Autrement dit,

selon Karasek (1979), il y a un risque sur la santé mentale ou psychologique lorsqu’il y a de

fortes demandes psychologiques accompagnées d’une faible latitude décisionnelle. Cette

situation favorise l’état le plus défavorable où les risques de développer une détresse

psychologique sont très élevés. Cependant, notre étude a pu montrer que ce n’est pas toujours le

cas. L’approche causaliste illustrée par le modèle de Karasek évalue les conditions de travail

dans un contexte régulier, il permet d’identifier certains facteurs psychosociaux à l’origine de la

tension psychologique. Cependant, il existe des différences observées dans les résultats dont la

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littérature fait écho. Le contexte et le contenu de la demande psychologique exercent aussi un

effet sur la santé des employés. Dans ce contexte d’implantation d’un nouvel outil

technologique, les employés (les agents et les conseillers) sont soumis aux exigences des

technologies et doivent vivre avec tous ses inconvénients tels le manque de souplesse et de

modélisation du travail. Cette conjoncture semble suffisante pour l’apparition de tensions

psychologiques, dont l’épuisement émotionnel.

Hypothèse 5

En ce qui concerne la cinquième hypothèse (H5). Celle-ci suggérait une association positive

entre la latitude décisionnelle et l’accomplissement personnel. Les résultats supportent cette

hypothèse puisqu’il existe une association significative et positive entre ces deux variables.

Ceci sous-entend que le fait de posséder une certaine marge de manœuvre dans l’exécution des

tâches influence le niveau de l’accomplissement personnel. En effet, les résultats soutiennent

les modèles théoriques élaborés par Karasek (1979) et Karasek et Theorell (1990) qui stipulent

que le marasme psychologique au travail apparait lorsque l’employé jouit d’une faible latitude

décisionnelle. La latitude d’un employé pour exécuter ses tâches et l’indépendance qu’il

possède pour déterminer l’ordre et le rythme dans lequel il peut effectuer son travail permettent

de baisser les risques d’épuisement professionnel (Bakker et al, 2005). Autrement dit, plus

l’utilisation des compétences et du pouvoir décisionnel augmente plus le niveau

d’accomplissement et de réalisation de soi augmente.

Ainsi, l’employé s’accomplit personnellement quand il possède une marge de manœuvre dans

l’exécution de son travail. Il a le contrôle sur le déroulement des tâches et participe au

processus décisionnel, il a la possibilité d’utiliser ses compétences, de mettre en pratique son

savoir-faire et ses habilités. L’employé (dans ce cas, les agents et les conseillers de gestion des

études) s’accomplit dans son travail, il a le sentiment de participer à l’essor de son organisation

et de mieux servir la clientèle. Le travail devient moins monotone et l’employé use de ses

compétences et de sa créativité. Plusieurs études antérieures sont arrivées à une conclusion

semblable à savoir qu’une plus grande latitude décisionnelle est bénéfique pour la santé

psychologique de l’employé et contribuerait à réduire le niveau d'épuisement professionnel

(Alarcon, 2011; Bakker et al., 2005; Bourbonnais et al., 1998, Demerouti et al., 2004;

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Lindblom et al., 2006; Marchand et Durand, 2011; Näring et al., 2006; Ponnelle, 2008; Sundin

et al., 2007; Taris et al., 1999, Verhoeven et al., 2003).

Hypothèse 8

La huitième hypothèse (H8), supportée par les données de cette étude, postule qu’il existe une

association négative entre le soutien social et l’épuisement émotionnel. Tout d’abord, la

dimension de soutien social a toujours été considérée comme une variable médiatrice entre la

demande psychologique et les tensions psychologiques. Le surplus de tensions causé par une

demande psychologique est absorbé par le soutien social. Le soutien social atténue ainsi les

tensions psychologiques au travail. Toutefois, cette recherche contribue à élargir le champ de

compréhension en montrant que les relations sociales au travail peuvent influencer les tensions

au travail indépendamment de la demande psychologique et de la latitude décisionnelle. En

fait, l’étude a pu montrer que le soutien social a un lien direct avec l’épuisement professionnel.

Nos résultats s’accordent avec ceux des études répertoriées dans la littérature sur le sujet (Beehr

et al., 2001; Burke et Greenglass, 2001; Johnson et Hall, 1988; Karasek et Theorell, 1990;

Ruiller, 2008; Russel et Cutrona, 1987; Sargent et Terry, 2000; Wilk et Moynihan, 2005).

Dans cette lignée, nos résultats corroborent les études de Beehr et al. (2010) et de Wilk et

Moynihan (2005) qui montrent l’existence d’une association négative entre le soutien social et

l’épuisement émotionnel. Donc, le soutien social est une dimension importante qui permet

d’atténuer les effets des tensions psychologiques au travail. De fait, maintes recherches

témoignent de l’effet positif du soutien social sur le bien-être physique et psychologique des

employés. Les résultats de cette recherche appuient alors le modèle « demande-contrôle-

soutien » dont la logique suggère qu’une importante demande psychologique au travail

combinée à une faible latitude décisionnelle et un faible soutien social créent ensemble un état

défavorable chez l’employé amplifiant ainsi le risque de développer des problèmes de santé

mentale.

De fait, l’entraide des personnes dans l’entourage de travail a un effet bénéfique et direct sur la

santé mentale. Quoique ce postulat ait été confirmé dans plusieurs études antérieures,

l’hypothèse de l’influence du soutien social sur l’épuisement professionnel ressort dans cette

étude avec plus de force. Le soutien reçu par les collègues ou par les superviseurs amoindrirait

les conséquences négatives corrélées au stress dû à une forte demande psychologique. En

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d’autres termes, dans une situation stressante, le fait de disposer de l’aide de l’entourage de

travail minimise la prévalence des troubles psychologiques.

Hypothèse 9

En ce qui concerne la neuvième hypothèse (H9), celle-ci suggère l’existence d’une association

positive entre le soutien social et l’accomplissement personnel. Cette hypothèse est aussi

confirmée.

D’emblée, plusieurs chercheurs ont étudié le lien entre le soutien social et les tensions

psychologiques, le stress et la fatigue vécus par les employés. Cependant, rares sont les études

qui ont traité le lien entre le soutien social et les dimensions du burnout surtout en ce qui

concerne l’accomplissement personnel. En fait, les quelques études recensées dans la littérature

académique ont centré leur intérêt sur la dimension de l’épuisement émotionnel (Maslach et al.,

2001) et dans une moindre mesure, sur la dépersonnalisation, sous prétexte qu’il s’agissait du

cœur du syndrome (Maslach, 1998). Pourtant, la relation entre le soutien social et

l’accomplissement personnel mérite d’être analysée davantage.

L’étude de Pines (1983) sur le syndrome d’épuisement professionnel montre que le soutien

social au travail est négativement associé à l’épuisement professionnel notamment la réduction

de l’accomplissement personnel. En fait, l’auteur ressort cinq aspects du soutien social qui

atténuent l’épuisement, que sont « l’écoute, l’encouragement, l’offre de conseils, l’offre de

compagnie et l’offre d’une aide concrète. »

Alors, l’ensemble des travaux relatifs à ce courant de recherche confirme que les relations

affectives (soutien émotionnel, sentiment d'appartenance) constituent un rempart contre les

effets négatifs de la tension psychologique et de l’épuisement professionnel. Nos résultats sont

conformes à plusieurs autres études qui ont conclu la même chose (Bourbonnais et al., 1999;

1998; De Jonge et al., 2000; Lambert et al., 2010; Lindblom et al., 2006; Marchand et Durand,

2011; Schaufeli et al., 2001).

En guise de conclusion, les résultats rapportés dans les études antérieures et la présente

recherche constituent une autre démonstration du rôle du soutien social sur la santé mentale. En

effet, bien qu’il ne soit pas une panacée contre tous les problèmes de la santé psychologique, le

soutien social demeure un facteur clé d’atténuation du stress et de l’épuisement professionnel.

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98

Hypothèse 10.

L’hypothèse (H10) suggère une association positive entre l’épuisement émotionnel et l’intention de

quitter. Cette relation a été supportée par les résultats de cette étude.

Tout d’abord, cette recherche est parmi les rares études qui se sont intéressées à la question du

de la relation entre le burnout, spécifiquement sa dimension émotionnelle et l’intention de

quitter son emploi. Plusieurs chercheurs se sont penchés sur d’autres conséquences du burnout

comme la satisfaction au travail (Lambert et al., 2001), mais peu d’études se sont intéressées à

l’intention de l’employé de quitter son travail.

Généralement, le burnout apparaît chez les personnes qui ont une image parfaite d’eux-mêmes.

La personne se voit comme un être aux ressources inépuisables et extrêmement efficaces.

Toutefois, pour conserver cette image idéaliste de soi, la personne adopte des stratégies qui

drainent ses réserves émotionnelles. Face à cette situation inconfortable, commence alors la

spirale descendante, la personne concernée a le sentiment d’être dans une situation sans issue et

éprouve une difficulté à tempérer et à contrôler ses émotions, son état se dégrade

progressivement et le sentiment d’épuisement se renforce ainsi que la volonté de quitter

l’organisation.

Certains individus trouvent d’autres voies d’évitement comme travailler moins, se désengager

de son travail et adopter des comportements de citoyenneté non organisationnelle comme

l’absentéisme et le retard au travail. D’autres après avoir brulé toutes leurs réserves physiques

et émotionnelles, perdent tout intérêt envers leur organisation et leur entourage de travail et

ressentent le besoin de quitter l’emploi.

Hypothèse 11

La onzième hypothèse (H11), aussi confirmée dans cette recherche, stipule qu’il existe une

association positive entre la dépersonnalisation et l’intention de quitter son travail. Ces résultats

sont analogues à d’autres études qui ont conclu que la dépersonnalisation influence le départ

définitif de l’organisation (Anderson et al., 1997; Autissier et Wacheux, 2006; Dean et al.,

1998; Leiter et Maslach, 2001; Maslach et al., 1993).

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Sans surprise, quand l’employé est soumis à de fortes tensions, il se sent vidé

émotionnellement et physiquement, et voit son bien-être se détériorer progressivement ; il

développe une attitude négative, voire cynique, envers son organisation. À l’origine,

l’existence d’un épuisement émotionnel accru est corollaire à la genèse d’émotions négatives,

de dépersonnalisation et d’hostilité qui deviennent, à un certain moment, l'unique mode

d'expression et d'extériorisation du mécontentement ressenti envers son organisation. Maintes

études montrent les conséquences négatives de cet état sur l’engagement au travail (Lee et

Ashforth, 1993; Moore, 2000) et l’intention de départ (Anderson et al., 1997; Autissier et

Wacheux, 2006; Dean et al., 1998; Leiter et Maslach, 2001).

Alors, la dépersonnalisation, qui accompagne un vécu de tension psychologique, s’amplifie

sous l’effet de l’accumulation de circonstances de travail. Elle vulnérabilise l’employé et active

chez lui le désir et la détermination de quitter son travail définitivement. Cette décision devient

en fait la seule échappatoire pour mettre fin à son mal-être et à la pression qui s'exerce sur lui.

2.1.2. Hypothèses infirmées

Quatre hypothèses de recherche n’ont pas été supportées dans ce mémoire, il s’agit des

hypothèses (2), (4), (6) et (7).

Hypothèse 2

L’hypothèse (H2) suggérait une association négative entre l’accomplissement personnel et la

dépersonnalisation. Les résultats montrent une relation négative, mais non significative entre

l’accomplissement personnel et la dépersonnalisation. Bien que la littérature suggère que

l’employé qui s’accomplit sur le plan personnel se met rarement dans un état de

dépersonnalisation, les résultats montrent que l’accomplissement personnel ne permet pas de

modérer la dépersonnalisation et la déshumanisation des relations.

Donc l’idée que les employés puissent se protéger de la dépersonnalisation en s’épanouissant

sur le plan personnel n’est pas suportée. Ces résultats sont concordants avec quelques études

antérieures considérant que les trois dimensions du syndrome de l’épuisement professionnel

comme des entités différentes et indépendantes les unes des autres (Lee et Ashforth, 1993;

Maslach, 1993). En fait, ces trois dimensions sont influencées différemment par les

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caractéristiques individuelles de la personne, ses ressources disponibles et le niveau de la

demande psychologique (Maslach, 1993).

Hypothèse 4.

L’hypothèse (H4) stipule l’existence d’une association négative entre la latitude décisionnelle

et la demande psychologique. Cette hypothèse n’est pas supportée puisque la relation est non

significative. Rares sont les études qui ont conclu à l’indépendance entre la latitude

décisionnelle et la demande psychologique, notons celle de French et al. (1982). De plus, contre

toute attente, les résultats de l’étude ont rapporté une relation positive entre la latitude

décisionnelle et la demande psychologique, dans un sens où, plus la latitude décisionnelle est

élevée, plus la demande psychologique est importante.

S’inscrivant sous cette perspective, les résultats obtenus dans le cadre de cette étude, vont à

contre sens de plusieurs études qui ont montré l’existence d’une interaction entre ces deux

dimensions de l’environnement organisationnel (Bourbonnais et al., 1996, 1998; Karasek et

Theorell, 1990; Niedhammer et al., 1998; Van der Doef et al., 2000, Van Der Doef et Maes,

1999). Dans cette lignée, pour les adeptes de l’approche de Karasek, la latitude décisionnelle

est un élément indispensable pour modérer la charge de travail. En effet, le modèle «demande-

contrôle» postule que la latitude décisionnelle accordée au travailleur a un effet modérateur sur

la demande psychologique. Donc, plus l’employé a une latitude décisionnelle élevée dans

l’accomplissement de ses tâches, moins la tension, causée par la demande psychologique serait

considérable, car la tension résiduelle générée par un haut niveau de demande psychologique

est évincée par le contrôle.

Ce cheminement cartésien n’a pas été vérifié dans la présente étude. Les résultats ne

soutiennent pas la logique présentée dans le modèle «demande/contrôle» de Karasek (1979),

qui maintient que la demande psychologique et le contrôle sont étroitement corrélés et

conduisent ensemble, soit à la dégradation de la santé mentale, soit à son amélioration.

Il faut noter que le contexte de l’étude, la nature du travail et les tâches à accomplir par les

employés influencent l’interaction entre ces deux dimensions. Il se peut que ces employés

soient surchargés de travail que la latitude décisionnelle ne compense plus la tension générée

par la demande psychologique.

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101

Hypothèse 6.

La sixième hypothèse (H6) suggère une association négative entre la latitude décisionnelle et la

dépersonnalisation. Cela veut dire que plus l’employé jouit d’une forte autonomie, moins il

s’expose à l’état de dépersonnalisation. Cette hypothèse n’a pas été supportée.

Les résultats de cette étude vont à contre sens de certaines études (d’Alarcon, 2011; Bakker et

al., 2005; Bourbonnais et al., 1999; De Jonge et al., 2000; Kowalski et al., 2010; Leiter et

Maslach, 1999; Lindblom et al., 2006; Sundin et al., 2007; Taris et al., 1999) qui rapportent un

lien significatif entre la latitude décisionnelle et les trois dimensions du burnout. Sundin et al.

(2007) montrent qu’une faible latitude décisionnelle est étroitement liée à l’apparition de

dépersonnalisation et d’épuisement émotionnel. L’étude de Marchand et Durand (2011) a rapporté

des résultats semblables en trouvant une association significative entre la latitude décisionnelle et le

burnout.

Il semble que le contexte de la présente étude ait joué un rôle important. En effet, le deuxième

chapitre a présenté l’effet de l’environnement technologique sur la dimension de la latitude

décisionnelle. Greenan et al. (2012) stipulent que les employés qui œuvrent dans un environnement

technologique, sont les plus susceptibles d’avoir une latitude décisionnelle faible. Même si la

latitude décisionnelle est forte, la nature de la tâche imposée (influencée par la rationalisation du

travail) ne donne pas à l’employé trop de marge de manœuvre.

Une deuxième explication est aussi plausible. En effet, environ 57% des répondants rapportent une

faible dépersonnalisation alors que seulement 24% rapportent une dépersonnalisation élevée. Cela

veut dire que les agents et les conseillers de gestion des études de cette université canadienne sont

des employés très professionnels malgré la lourdeur de la tâche imposée par les difficultés du

nouveau logiciel Banner. Les agents et conseillers sont sensibles aux demandes faites par les

étudiants et se soucient de la qualité de l’information et du service qui leur est offert.

Il semblerait alors que la nature du contexte (incluant le secteur d’emplois) de l’étude peut avoir un

effet sur la nature des relations entre l’environnement organisationnel et l’épuisement professionnel.

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102

Hypothèse 7.

L’hypothèse (H7), qui postule que le soutien social a une association négative avec la demande

psychologique, n’a pas été supportée par les données de la présente étude.

Étonnamment, les résultats obtenus ne montrent pas une association significative entre ces deux

variables, deux dimensions organisationnelles qui ont fait couler beaucoup d’encre et ont donné lieu

à plusieurs études scientifiques montrant leur interaction dynamique pour modérer les tensions

psychologiques (Karasek et Theorell, 1990). Ainsi, les résultats de cette étude ne corroborent pas

les résultats de Bakker et al. (2005), Bliese et Castro (2000), Ferandes et al. (2008), Harvey et al.

(2003), Johnson et Hall (1988), Karasek et Theorell (1990), Macdonald (2003) et Spérandio (1984).

Selon ces auteurs, plus le soutien social au travail est présent, plus l’employé est outillé pour

s’ajuster aux effets négatifs du stress.

Toutefois, il est à noter que d’autres auteurs (Bourbonnais et al., 2005; de Jonge et al., 2000;

Marchand et al., 2005; Wilkins et al., 1998) ont testé de manière empirique le modèle « iso-strain »

de Karasek et Théorell (1990), mais les résultats ne sont pas parvenus à confirmer les effets

modérateurs de la latitude décisionnelle et du soutien social sur les tensions générées par la

demande psychologique.

Le contexte de travail dans lequel œuvrent les répondants de cette étude peut justifier encore une

fois le résultat obtenu. En effet, la charge de travail des agents s’est tellement amplifiée avec la

venue de la nouvelle technologie (le nouveau logiciel Banner), que les travailleurs n’ont plus le

temps de se socialiser ou d’échanger avec leur entourage de travail. En d’autres mots, cette situation

qui s’entretient dans l’urgence et l’intensification de la charge de travail laisse peu de place au

soutien social et aux relations affectives au travail. Les employés sont en fait très proches

physiquement, mais très distants socialement. Chacun, de son côté, essaye de régler ses dossiers le

plus vite possible. Donc, par manque de choix, le soutien social n’est plus une priorité pour les

travailleurs, leur principale préoccupation c’est de régler les dossiers dans les plus brefs délais pour

satisfaire leur principale clientèle, soit les étudiants. Il est possible aussi que du fait que les

employés sont tellement débordés par la quantité de travail à compléter afin de récupérer le retard

causé par cet outil technologique que le soutien des collègues au travail devient moins important ou

insuffisant pour réduire la perception de l’importance de la demande psychologique. Les agents et

les conseillers de gestion des études ont probablement davantage besoin du soutien des supérieurs.

En effet, sur les huit énoncés mesurant le soutien social au travail, les deux énoncés qui ont reçu les

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scores les moins élevés se rapportent au soutien du supérieur immédiat (« Mon supérieur immédiat

réussit à faire travailler les gens ensemble.»; « Mon supérieur immédiat facilite la réalisation du

travail. »).

3. Forces et limites de l’étude

3.1. Forces de l’étude

Diverses disciplines scientifiques ont étudié la notion de burnout, les déterminants de

l’environnement professionnel et le désengagement organisationnel (Falzon et Sauvagnac,

2004). Il importe de mentionner que dans la majorité des cas, les chercheurs ont étudié ces

notions séparément. Ils traitent soit le sujet du burnout, soit celui des facteurs organisationnels

ou celui du désengagement organisationnel, mais rarement les trois dimensions à la fois (Falzon

et Sauvagnac, 2004). Ce mémoire est parvenu à examiner et à montrer leurs interdépendances.

De plus, le fait d’intégrer ces dimensions dans un même cadre favorise une compréhension plus

lucide et complète du phénomène étudié.

En outre, même si notre étude n’a pas le caractère représentatif ou généralisable, elle se

distingue par son aspect original. Cette recherche est réalisée dans un contexte particulier celui

de l’implantation d’une nouvelle technologie.

3.2. Limites de l’étude

Bien que le burnout soit défini à travers des aspects organisationnels présents dans le milieu de

travail, ces derniers ne sont pas les seuls à en être la cause. Par exemple, les caractéristiques

individuelles n’ont pas été prises en considération dans cette recherche. Les caractéristiques

individuelles influencent la perception de la tâche ainsi que le degré de correspondance entre

l’employé et son environnement de travail. L’employé arrive à son travail avec ses propres

valeurs, attitudes et comportements qui sont façonnés par son milieu personnel et social

(familial et culturel). En ce sens, il existe des facteurs de risque personnels qui peuvent

influencer son comportement au travail. La situation familiale ou, de façon plus générale, tous

les événements de la vie personnelle (un divorce, une perte de garde d’un enfant, ou un décès

dans la famille par exemple) peuvent perturber son fonctionnement dans ses différentes

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activités y compris à son travail. En fait, la vie professionnelle et la vie personnelle ne sont pas

des compartiments étanches, mais sont en étroite interaction.

Aussi, l’âge, l’état de santé, le statut civil, le statut parental, le conflit travail-famille et le sexe

sont des éléments à considérer, puisqu’ils peuvent influencer les réactions psychologiques dans

des situations de travail exigeantes. À titre d’exemple, on peut rapporter des résultats

contradictoires sur la relation entre la situation familiale et l’épuisement professionnel.

Certaines études ont montré que les travailleurs vivant en couple seraient plus sujets à vivre de

l’épuisement professionnel que les travailleurs vivants seuls (Fleur, 2011, Ross et al., 1989)

alors que d’autres suggèrent le contraire (Maslach et Jackson, 1981; Maslach et al., 1996,

2001; Schaufeli et Enzmann, 1998). Aussi, des études ont montré que le conflit famille-travail

est associé positivement à l’épuisement professionnel.

Dans la même optique, parmi les facteurs de risque individuel à considérer est celui de la

personnalité de l’individu. Plusieurs recherches tentent de faire un profilage des traits de

personnalités qui prédisposent à une vulnérabilité aux facteurs de risques (par exemple,

personnalité fragile, sensible ou encore dépressive). Ces éléments n’ont pas été évalués dans le

cadre de cette étude. Il serait intéressant de savoir si certaines caractéristiques psychologiques

augmentent l’exposition aux risques physiques ou psychiques liés au travail. En d’autres mots,

il sera intéressant de savoir pourquoi l’expérience de l’épuisement professionnel est vécue

différemment d’une personne à une autre ? Qu’est-ce qui fait que certains individus sont

surchargés et satisfaits alors que d’autres s’y brûlent et souffrent de l’épuisement

professionnel ? Jusqu’à présent, peu d’études semblent répondre de façon satisfaisante à ces

questions puisque l’hétérogénéité des conditions de travail pourrait façonner les résultats.

Sur un autre plan, l’implantation du logiciel Banner, le nouveau système de gestion des études,

a causé un surplus de travail et, contre toute attente, a compliqué le fonctionnement du travail,

accentué la fatigue mentale et a même créé, selon les commentaires rapportés par certains

employés, l’apparition de tensions psychologiques et de l’épuisement. Ceci démontre que la

technologie, malgré les avantages qu’elle recèle, peut être une vectrice de mal-être et

d’épuisement au travail. Toutefois, notre étude n’est pas représentative, il ne faut donc pas

généraliser ses conclusions à d’autres contextes. Cette étude est effectuée dans un contexte

spécifique auprès d’un échantillon limité.

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Dans une autre perspective, la focalisation sur l’aspect « négatif » de la technologie a été mise

en relief et on a pu comprendre à partir de la littérature existante les méfaits de la technologie

sur les conditions de travail. Mais, ce constat reste purement théorique puisque ce facteur (la

perception de la technologie par les employés) n’a pas été retenu dans le cadre conceptuel. Par

conséquent, l’impact de la technologie sur les facteurs organisationnels et l’épuisement

émotionnel n’a pas été testé empiriquement.

4. Pistes de recherche future

Quelques pistes de recherches subséquentes sont proposées afin de dépasser les limites de la

présente étude et élargir le champ des connaissances dans ce domaine.

Le facteur de soutien social est un rempart contre les tensions psychologiques. Un manque de

soutien au sein de l’organisation peut influencer l’apparition du burnout notamment

l’épuisement émotionnel et la réduction de l’accomplissement. Les recherches ultérieures

pourront donc considérer davantage ce facteur et identifier les éléments (notamment les

facteurs individuels et la culture organisationnelle) qui peuvent affecter aussi bien le niveau et

la qualité du soutien social dans le milieu du travail.

Dans cette lignée, la culture du milieu de travail au Canada peut se révéler plus individualiste,

chacun est pour soi ! En effet, les employés peuvent paraître un peu distants dans leurs relations

avec leur entourage professionnel. La culture est normalisée par des règles et procédures plutôt

que sur la base de relations sociales et interpersonnelles. On note aussi que les relations

« sociales » entre les employés sont formelles et professionnelles comparativement au visage

pluraliste présent dans d’autres cultures. Bref, au sein d’un environnement qui entretient le

culte de la réussite individuelle et l’éloge de l’accomplissement personnel, un certain niveau de

professionnalisme est requis dans les relations de travail. Tout cela ne semble pas aberrant ou

nocif sur l’ambiance de travail, même l’individualisme, lorsqu’il est modéré, peut être tout à

fait acceptable. L’individualisme est en fait une dimension culturelle qui est présente dans le

milieu de travail, mais son impact comme variable modératrice a été complètement ignoré. La

culture au travail (individualiste – collectiviste) peut avoir un lien étroit avec le manque de

soutien social et l’intensification de la demande psychologique au sein de l’organisation de

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travail. En ce sens, la détérioration de la santé mentale au travail et l’apparition du burnout

peuvent être amplifiées par une culture organisationnelle qui prône l’individualisme. Cette piste

de recherche future semble très prometteuse.

Dans une autre perspective, il semble intéressant que les recherches futures examinent le

modèle (les relations entre les variables le score moyen sur chaque variable) sur la base d’une

étude longitudinale en trois temps : avant, pendant et après l’implantation d’une nouvelle

technologie. Une étude longitudinale permettra de comparer le niveau d’épuisement

professionnel des employés durant les trois phases. Ainsi, comme prolongement de la présente

recherche, il sera intéressant de refaire la collecte de données quelques années après

l’implantation du logiciel.

Pour finir, les facteurs de risques liés au problème de santé mentale résultent à la fois des

situations liées à l’environnement organisationnel, mais aussi à des caractéristiques

individuelles. Certains auteurs soulignent que les différentes facettes du burnout sont

grandement influencées par l’individu lui-même (Ballet et Kelchtermans, 2008) et également

par une construction sociale déterminée par le soutien social au travail, par le contrôle, la

récompense ou la reconnaissance au travail (Ballet et Kelchtermans, 2008 ; Bartlett, 2004 ;

Karasek 1979 ; Murphy et Sauter 2004; Siegrist, 1996). Ainsi, des facteurs individuels et des

exigences organisationnelles et collectives influencent à différents degrés l’émergence de

l’épuisement professionnel (Ballet et Kelchtermans, 2008). Dans cette perspective, il sera

intéressant d’intégrer ces variables dans les études futures pour développer un cadre plus

intégrateur.

5. Implications managériales

La finalité de la présente section consiste à donner quelques recommandations qui peuvent

aider les managers dans leur gestion des ressources humaines et les responsables de l’université

faisant l’objet de cette étude à apporter les correctifs nécessaires pour améliorer

l’environnement de travail. Les suggestions permettent aux employeurs de mieux identifier les

problèmes existants et éventuels du milieu de travail. Cette étude fournie les assises sur

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lesquelles les employeurs peuvent bâtir un plan d’action et faciliter, en quelque sorte,

l’élaboration de stratégies de prévention des problèmes de santé mentale.

D’emblée, en raison de leurs conséquences sur le fonctionnement collectif, les pathologies

professionnelles coûtent cher à l’entreprise. Plusieurs études ont montré qu’il est plus rentable

pour l’entreprise d’investir dans la prévention plutôt que dans la guérison.

Personne ne peut nier que le progrès des organisations repose sur un facteur capital celui de la

santé des employés. La question du bien-être au travail doit imprégner les mentalités et les

comportements de l’ensemble des acteurs. Dans le contexte spécifique de cette recherche, celui

des agents et des conseillers de gestion des études utilisateur de logiciel Banner, il est possible

de proposer certaines recommandations aux responsables de leur université.

Tout d’abord, il est essentiel que les professionnels de la promotion de la santé et des

ressources humaines forment une équipe, pour créer une sorte de synergie, et participent aux

débats sur le rôle de l’ensemble des intervenants en ce qui concerne le bien-être des employés.

Dans cette perspective, la participation des responsables et des cadres de cet établissement dans

la démarche de création et de maintien d’un environnement de travail « favorable à la santé

mentale et physique » est un préalable indispensable dans ce processus.

D’emblée, le soutien social doit être davantage considéré pour esquiver les tensions

psychologiques au travail. Mis à part le soutien des conseillers aux agents d’études, qui

souffrent et partagent en fait le même problème de travail, ces employés ne bénéficient pas du

soutien des autres superviseurs. C'est pourquoi les intervenants doivent de prime à bord

promouvoir une culture d’entraide et de soutien, stimuler l’interaction sociale, établir une

approche participative fondée sur les relations interpersonnelles et le travail d’équipe. De plus,

puisque les employés ont une importante demande psychologique, il faut encourager les

employés à travailler en groupe, à partager les tâches et à s’entraider au besoin. Il faut aussi les

écouter, partager leurs appréhensions et leurs frustrations, mais surtout les encourager et

reconnaître leurs efforts.

Aussi, certains employés se plaignent du manque de soutien des dirigeants (directeurs de

programmes, directeurs de département) et de leur méconnaissance des vrais problèmes

inhérents à leur milieu de travail « […] les autres dirigeants ou employés (directeur de

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programme, de département, professeurs) se fout royalement de ce qu’on vit»; « […]

Malheureusement, j’ai le sentiment que la direction de l’université n’est pas très sensible à cet

aspect […]»

Il est très recommandé alors de circuler l’information aux cadres supérieurs sur le vécu et les

difficultés rencontrées par les employés dans leur milieu de travail. Cette sensibilisation leur

permettrait sans doute de mieux comprendre les vrais défis, les défaillances et les entraves qui

se représentent et de réagir ainsi pour trouver des solutions de maintien de la productivité et du

bien-être dans les périodes de stress

D’emblée, le premier pas à faire est d’encourager la communication ouverte. La direction doit

se montrer proactive à cet égard : faire parler les employés sur leurs attentes, les raisons de leur

mécontentement et les facteurs qui accroissent leur satisfaction. En plus, les superviseurs

doivent montrer à leurs employés qu’ils sont le centre d’intérêt, dans un sens où ils doivent être

présents et empathiques envers eux, reconnaître leur bon travail ou du moins leur effort, se

montrer ouverts à leurs suggestions et à leur désir de changement, les appuyer et les

encourager dans les situations difficiles afin de créer un environnement de travail amical et

supportant. Cela permet de renforcer la connectivité au sein de l’équipe, créer un dynamise et

surtout ventiler les difficultés rencontrées quotidiennement par ces employés. Le système de

récompenses est très important aussi dans la mesure où les employés peuvent juger de la justice

et de la reconnaissance de leur supérieur à leur égard. D’ailleurs un des employés a suggéré

l’octroi de récompenses sous forme de bonus pour insuffler la motivation. En fait, des

employés ni reconnus ni récompensés dans leur travail finissent par croire que leurs efforts et

leur travail sont dépréciés. L’un des répondants fait le commentaire suivant : « un bonus serait

apprécié et démontrerait la satisfaction des supérieurs » ; « […] une prime de compétences

supérieures serait appréciée […]»

Dans le même ordre d’idée, les responsables peuvent mettre sur pied un réseau d'entraide aux

employés qui vivent une forte demande psychologique due à une charge de travail intense ou

résultante de difficultés techniques ou technologiques rencontrées par ces employés. Cela

pourrait leur être bénéfique, car ils vont s’apercevoir que les superviseurs partagent leur réalité

de travail, ce qui renforcerait leur implication au travail et leur sentiment d’être utiles. Le

sentiment de ne pas être utile aux autres est statistiquement associé à une forte souffrance au

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travail. Il est important que les supérieurs reconnaissent l’importance d’un support social et

technique plus élevé, particulièrement lorsque la charge de travail est à des niveaux élevés.

L’un des répondants rapporte : « En période d’inscription ou de mise à l’horaire, le soutien

technique devrait être augmenté pour les agentes. Merci! »

Donc, le fait d’épauler ses employés, de partager leurs problèmes et de se tenir prêt à changer

les choses pour leur offrir de meilleures conditions de travail et avoir comme effet d’apaiser les

tensions psychologiques et favoriser un environnement de travail décontracté et motivant. Bref,

il est essentiel d’instaurer « une culture de santé et de dialogue social », qui est en réalité une

stratégie gagnant-gagnant : des employés satisfaits et épanouis et une organisation performante

et efficace. Cette manière de gérer ses ressources humaines influencerait positivement sur la

réputation de l’université comme employeur et favoriserait l’engagement des employés. Une

université réputée pour son environnement de travail sain et incitant attire les candidats de

talent et réussit à mobiliser et fidéliser son personnel.

Pour la question de l’épuisement professionnel, cette problématique, intimement liée à la

qualité de vie au travail, devrait demeurer un sujet de préoccupation pour l’ensemble des

intervenants. Ces derniers devraient recenser les problèmes existants et éventuels et essayer par

la suite d’élaborer des stratégies de prévention contre l’épuisement professionnel et d’autres

pathologies liées à l’environnement de travail. La direction devrait être proactive à cet égard et

reconnaitre que le burnout est la phase finale d’une rupture d’adaptation et d’un déséquilibre

entre les exigences professionnelles et les ressources de l’employé. Si à l’apparence, les

employés sont en bonne santé, il faudrait mettre au point que le burnout est une souffrance

intérieure qui implique l’idée de « combustion interne » semblable à l’image d’un incendie qui

aurait ravagé totalement l’intérieur de l’habitation tout en laissant intacte la façade. Cette

métaphore exprime très bien l’état exact d’une personne épuisée professionnellement.

L’intensification de la charge due à l’implantation du logiciel, le manque du soutien et les

demandes contradictoires font de cet environnement professionnel un endroit propice à

l’épuisement professionnel. C’est pourquoi la direction ne devrait pas rester silencieuse sur les

risques du stress professionnel et commence sérieusement à s’investir dans leur prévention. Il

importe de noter aussi que la direction devrait écarter l’idée que reconnaître l’existence d’un

mal-être au travail, c’est risquer de mettre en cause l’organisation du travail et les méthodes de

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management. Au contraire, une volonté d’améliorer les conditions de travail est une affirmation

pour les employés que leur santé au travail est un enjeu de grande importance et qu’ils sont très

valorisés aux yeux de leur supérieur.

Alors, la prise de conscience de la gravité du problème tant au niveau patronal que syndical

s’avère indispensable. Selon plusieurs études qui titrent leur dossier sur le burnout ou sur les

tensions psychologiques au travail, il est illusoire voire un non-sens de chercher à évincer

irrémédiablement ce genre de problème de l’environnement de travail. Autrement dit, le stress

peut être bénéfique dans une certaine mesure. S’il devient un facteur qui déstabilise la personne

et la rend plus fragile, il faut prendre l’initiative de trouver des stratégies convenables pour

l’apaiser et minimiser ses conséquences défavorables.

Les tensions psychologiques rendent l’employé moins « armé » face aux événements de la vie

professionnelle. Alors, si l’employé brûle toutes ses réserves, il devient improductif et

l’organisation en serait affectée. Du fait, il est très recommandé que les différents acteurs

prennent des mesures correctives pour assurer la sécurité physique et mentale des travailleurs

dans cet établissement en adaptant le travail à l’homme et non pas le contraire ! Cela se fait par

un choix adéquat des équipements du travail, du matériel technologique, des méthodes de

travail centrées sur la socialisation et le support. L’objectif étant de limiter le travail cadencé et

d’en réduire ses effets négatifs.

S’inscrivant dans cette perspective, puisque le cœur du problème est l’implantation d’un nouvel

outil technologique soit le logiciel Banner, il serait souhaitable que les responsables et les

techniciens des TIC conjuguent leurs efforts avec ceux qui sont responsables des ressources

humaines et de la direction du personnel. Il s’agit en fait d’arriver à une approche commune des

problématiques intégrant technologies et conditions de travail. Cela passe par une meilleure

compréhension de la réalité du travail. La direction a donc le devoir d’assurer la facilité de

l’utilisation de cette nouvelle technologie, car l’impact des transformations technologiques sur

les employés dépend de leurs compétences personnelles, mais aussi de l’aide formelle et

informelle qu’ils reçoivent.

Plusieurs mois après l’implantation de ce système, il est recommandé de développer des

dispositifs d’évaluation des risques professionnels (incluant les risques psychosociaux). Il est

question d’identifier et de traiter les méfaits de la technologie combinée aux facteurs

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organisationnels sur les employés et l’organisation du travail. Ce dispositif d’évaluation est

nécessaire en cas de dégradation des conditions de travail, de l’apparition des tensions

psychologiques ou de dysfonctionnements pénalisant le déroulement du travail, ce qui est

vraiment le cas des agents et des conseillers de gestion des études. Ce document ne doit en

aucun cas représenter une simple formalité administrative.

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125

Annexe

QUESTIONNAIRE

ÉTUDE EXPLORATOIRE VISANT À IDENTIFIER LES DIMENSIONS DE LA

CHARGE DE TRAVAIL AYANT UN IMPACT SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ

(GROUPE BANNER)

CONSIGNES

Environ 25 minutes seront nécessaires pour répondre à la totalité du questionnaire.

Lisez attentivement chacune des questions et cochez une seule réponse selon les choix

de réponse proposés.

Veuillez prendre note qu’il n’y a pas de bonne ni de mauvaise réponse, vous répondez

selon ce que vous pensez, vivez et ressentez à propos de votre expérience actuelle en milieu

de travail.

Vos réponses sont anonymes et confidentielles.

AUTOMONIE, SOUTIEN ET RECONNAISSANCE AU TRAVAIL

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1 2 3 4 Fortement en désaccord En désaccord En accord Fortement

en accord

1 2 3 4

1. Mon travail exige que j'apprenne de nouvelles choses.

2. Mon travail exige un niveau élevé de qualifications.

3. Dans mon travail, je dois faire preuve de créativité.

4. Mon travail consiste à refaire toujours les mêmes choses.

5. J’ai la liberté de décider comment je fais mon travail.

6. Mon travail me permet de prendre des décisions de façon autonome.

7. Au travail, j’ai l’occasion de faire plusieurs choses différentes.

8. J’ai passablement d’influence sur la façon dont les choses se passent

à mon travail.

9. Au travail, j’ai la possibilité de développer mes habiletés

personnelles.

10. Mon travail exige d’aller très vite.

11. Mon travail exige de travailler très fort (exigences mentales ou

physiques).

12. On me demande de faire une quantité excessive de travail.

13. J’ai suffisamment de temps pour faire mon travail.

14. Je reçois des demandes contradictoires (opposées) de la part des

autres (ces demandes peuvent provenir de différents groupes :

supérieurs, collègues, clients).

15. Mon travail m’oblige à me concentrer intensément pendant de

longues périodes.

16. Ma tâche est souvent interrompue avant que je l’aie terminée; je dois

alors y revenir plus tard.

17. Mon travail est très mouvementé.

18. Je suis souvent ralentie dans mon travail parce que je dois attendre

que les autres aient terminé le leur.

19. Mon supérieur immédiat se soucie du bien-être des personnes qui

sont sous son autorité.

20. Mon supérieur immédiat prête attention à ce que je dis.

21. Mon supérieur immédiat facilite la réalisation du travail.

22. Mon supérieur immédiat réussit à faire travailler les gens ensemble.

23. Les personnes avec qui je travaille sont qualifiées pour les tâches

qu’elles accomplissent.

24. Les personnes avec qui je travaille s’intéressent personnellement à

moi.

25. Les personnes avec qui je travaille sont amicales.

26. Les personnes avec qui je travaille facilitent la réalisation de mon

travail.

27. Je reçois le respect que je mérite de mes supérieurs.

28. Je reçois le respect que je mérite de mes collègues.

29. Au travail, je bénéficie d’un soutien satisfaisant dans les situations

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127

difficiles.

30. On me traite injustement à mon travail.

31. Je suis en train de vivre ou je m’attends à vivre un changement

indésirable dans ma situation de travail.

32. Mes perspectives de promotion sont faibles.

33. Ma sécurité d’emploi est menacée.

34. Ma position professionnelle actuelle correspond bien à ma formation.

35. Vu tous mes efforts, je reçois tout le respect et l’estime que je mérite

à mon travail.

36. Vu tous mes efforts, mes perspectives de promotion sont

satisfaisantes.

37. Vu tous mes efforts, mon salaire est satisfaisant.

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CHARGE DE TRAVAIL ET PARTICIPATION AUX DÉCISIONS

1 2 3 4 5 6

7 Extrêmement En désaccord Légèrement Neutre Légèrement En accord

Extrêmement

en désaccord en désaccord en accord

en accord

1 2 3 4 5 6 7

1. J’ai assez de temps pour réaliser tout ce que je

dois faire dans le cadre de mon travail.

2. J’ai souvent l’impression qu’il y a trop de

travail à faire pour une seule personne.

3. Les attentes par rapport à ma performance au

travail sont trop élevées.

4. Généralement, je ne suis pas informée des

choses importantes qui surviennent au sein de

l’organisation.

5. Des réunions d’équipe sont souvent prévues

pour discuter de problèmes reliés au travail.

6. Généralement, avant de prendre des décisions

visant un changement, l’organisation tient

compte des consultations auprès des gens qui

auront à vivre avec les conséquences.

INTENTION DE QUITTER

1 2 3 4 5 Fortement en désaccord En désaccord Ne sais pas En accord Fortement

en accord

1 2 3 4 5

1. Je cherche activement un emploi pour travailler ailleurs.

2. Je pense souvent quitter définitivement l’université.

3. Dès que je le peux, je quitte définitivement l’université.

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129

SANTÉ PSYCHOLOGIQUE AU TRAVAIL

Il est à noter que le terme « clients » utilisé dans ce questionnaire réfère à toutes les

personnes qui peuvent vous formuler des demandes.

Dans votre travail, qui sont vos principaux clients (vous pouvez cocher plus d’une

réponse)?

Étudiants

Directeur(s) de programme ou supérieur immédiat

Professeurs

Collègues

Agentes de gestion des études

Autres employés de l’université

1 2 3 4 5 6

7 Jamais Quelques fois Une fois par mois Quelques fois Une fois Quelques fois

Chaque jour

par année par mois par semaine par semaine

1 2 3 4 5 6 7

1. Je me sens émotionnellement vidée par mon

travail.

2. Je me sens à bout à la fin de ma journée de

travail.

3. Je me sens fatiguée lorsque je me lève le matin

et que j’ai à affronter une autre journée de

travail.

4. Je peux comprendre facilement ce que mes

clients ressentent.

5. Je sens que je m'occupe de certains clients de

façon impersonnelle comme s'ils étaient des

objets.

6. Travailler avec des gens tout au long de la

journée me demande beaucoup d'effort.

7. Je m'occupe très efficacement des problèmes

de mes clients.

8. Je sens que je craque à cause de mon travail.

9. J'ai l'impression, à travers mon travail, d'avoir

une influence positive sur les gens.

10. Je suis devenue plus insensible aux gens depuis

que j'ai ce travail.

11. Je crains que ce travail ne m'endurcisse

émotionnellement.

12. Je me sens pleine d'énergie.

13. Je me sens frustrée par mon travail.

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130

14. Je sens que je travaille « trop dur » dans mon

travail.

15. Je ne me soucie pas vraiment de ce qui arrive à

certains de mes clients.

16. Travailler en contact direct avec les gens me

stresse trop.

17. J'arrive facilement à créer une atmosphère

détendue avec mes clients.

18. Je me sens ragaillardie (revigorée) lorsque

dans mon travail j'ai été proche de mes clients.

19. J'ai accompli beaucoup de choses qui en valent

la peine dans ce travail.

20. Je me sens au bout du rouleau.

21. Dans mon travail, je traite les problèmes

émotionnels très calmement.

22. J'ai l'impression que mes clients me rendent

responsable de certains de leurs problèmes.

CONSÉQUENCES LIÉES AU SYSTÈME BANNER

Les prochaines questions portent sur les conséquences de l’implantation du système

Banner sur votre travail au quotidien. Les énoncés portent donc sur les changements

observés depuis l’implantation du système à l’été 2009.

1 2 3

4

Fortement en désaccord En désaccord En accord

Fortement en accord

1 2 3 4

1. J’ai le sentiment de ne plus être compétente pour faire mon travail.

2. Les procédures liées à mon travail sont devenues plus nombreuses et

plus complexes.

3. Le temps nécessaire pour exécuter une opération est désormais moins

long.

4. Les procédures mises en place font en sorte qu’il m’est difficile de

bien répondre aux besoins de la clientèle.

5. Pour bien faire mon travail, je dois tenir compte de plusieurs

informations.

6. J’ai parfois l’impression de travailler dans le vide.

7. Je doute constamment de la qualité de mon travail.

8. Le système en place me permet d’offrir un service de qualité.

9. J’ai l’impression que mon expérience professionnelle ne me sert plus

dans mon travail.

10. Le nombre d’étapes pour exécuter une opération est maintenant

diminué.

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11. Les informations nécessaires pour réaliser mon travail sont claires et

constantes d’une fois à l’autre.

12. Mon travail exige de faire plusieurs tâches en même temps.

13. Le soutien technique que je reçois pour accomplir mon travail est

adapté à ma réalité.

14. Mon travail me demande de mémoriser beaucoup d’informations

(ex. : codes, procédures).

15. Dans mon travail, il y a beaucoup de dossiers en attente sur lesquels je

n’ai pas de contrôle.

DONNÉES SOCIODÉMOGRAPHIQUES

1. Quel âge avez-vous ?

18-25 ans

26-35 ans

36-45 ans

46-55 ans

Plus de 55 ans

2. Quel est votre sexe?

Masculin

Féminin

3. Quelle est votre situation familiale?

Avec conjoint et avec enfant(s) à charge

Avec conjoint et sans enfant à charge

Sans conjoint et avec enfant(s) à charge

Sans conjoint et sans enfant à charge

4. Quelle est votre dernière année de scolarité complétée?

Études secondaires (DES)

Études professionnelles (DEP)

Études collégiales (DEC)

Études universitaires

5. Depuis combien de temps êtes-vous en poste à l’Université Laval? _____ ans et

_____ mois

6. Quel est votre poste actuel?

Agente de gestion des études

Conseillère à la gestion des études

Technicien PGDME

Technicien DTI

Agente de secrétariat (utilisant Banner)

7. Depuis combien de temps occupez-vous ce poste? _____ ans et _____ mois

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8. Quel est votre statut d’emploi ?

Poste permanent à temps plein

Poste permanent à temps partiel

Poste temporaire ou remplaçante

9. Depuis septembre 2009, combien de jours vous êtes-vous absentée de votre travail

pour des raisons liées à votre santé physique ou psychologique ? _____ jours

Commentaires :

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___________

_________________________________________________________________________

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Lettre de rappel

Bonjour, Vous avez récemment reçu une invitation, par courriel, pour compléter un questionnaire électronique dans le cadre d’un projet de recherche s’intitulant « Étude exploratoire visant à identifier les dimensions de la charge de travail ayant un impact sur la santé et la sécurité (Groupe Banner) » et dont M. Pierre-Sébastien Fournier est le chercheur principal. Si ce n’est déjà fait, nous vous invitons à remplir le questionnaire, d’une durée approximative de 25 minutes : http://vovici.com/wsb.dll/s/38e1g43e5b. Si, au moment de soumettre le questionnaire, un message d’erreur apparaît, vous pouvez consulter le document ci-joint qui explique les sources d’erreurs possibles. De plus, à tout moment, vous pouvez communiquer avec Mme Julie Villa, coordonnatrice de l’étude. Les résultats de l’étude permettront de poser un regard critique et, éventuellement, de suggérer des actions concrètes à l’égard du système informatique Banner. Ainsi, plus vous serez nombreuses à participer à cette étude, plus la portée des résultats sera importante. Prenez note que ce projet de recherche comporte d’autres étapes, complétées préalablement,

pour évaluer les conséquences de l’implantation de Banner sur votre charge de travail réelle : 1)

deux entretiens de groupe ont été réalisés auprès d’agentes et conseillères à la gestion des études

et 2) des agentes et conseillères ont été observées dans le cadre d’une journée de travail. Une fois

toutes les données analysées, une présentation des résultats est prévue auprès de l’ensemble des

agentes et conseillères. Dès que le moment de cette communication orale sera déterminé, vous

en serez informée par courriel.

Nous vous remercions de votre précieuse collaboration ! Bien à vous, L’équipe de recherche de la Chaire en gestion de la santé et de la sécurité du travail