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L’élargissement du domaine du recours de plein contentieux par rapport à celui du recours pour excès de pouvoir Par Fabrice MELLERAY Professeur de droit public à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV février 2007

L’élargissement du domaine du recours de plein contentieux ......6 de ce contentieux spécifique et ainsi à éviter ou à supprimer des divergences qui pourraient apparaître dans

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L’élargissement du domaine du recours de plein

contentieux par rapport à celui du recours pour

excès de pouvoir

Par

Fabrice MELLERAY

Professeur de droit public

à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV

février 2007

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SOMMAIRE

Sélection jurisprudentielle (extraits de décisions)

Décisions du Conseil constitutionnel :

Document n°1 : 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence. Document n°2 : 17 janvier 1989, Loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Document n°3 : 16 juin 1999, Loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs.

Décisions de la Cour européenne des droits de l’homme :

Document n°4 : CEDH, 23 octobre 1995, Schmautzer c. Autriche Document n°5 : CEDH, 1998, Malige c. France.

Décision de la Cour de cassation :

Document n°6 : Cass. Com., 29 avril 1997, Ferreira

Décisions et avis du Conseil d’Etat :

Document n°7 : CE, 8 mars 1912, Lafage. Document n°8 : CE, Ass., 17 février 1950, Dame Lamotte. Document n°9 : CE, Ass., 1er mars 1991, Le Cun. Document n°10 : CE, Sect., 30 octobre 1998, Ville de Lisieux Document n°11 : CE, Sect., avis, 30 novembre 1998, Berrad Document n°12 : CE, Sect., 28 juillet 1999, GIE Mumm-Perrier-Jouët Document n°13 : CE, 30 juin 2003, SCP Chenu-Scrive-Bérard Document n°14 : CE, Sect., 6 février 2004, Hallal Document n°15 : CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC ! et autres. Document n°16 : CE, Sect., 19 novembre 2004, Ramond. Document n°17 : CE, 25 novembre 2005, A. Document n°18 : CE, avis, 26 juillet 2006, A. Document n°19 : CE, Sect., 27 octobre 2006, Société Techna.

Plan du commentaire

1. Définitions préalables.

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2. Historique.

3. Transformation du sujet depuis une quinzaine d’années.

I. La préférence contemporaine pour le recours de plein contentieux

objectif

A. Illustrations

1°) Illustrations législatives et réglementaires

4. Une liste croissante (l’exemple de l’année 2006).

5. Diversité des hypothèses.

6. Sanctions infligées par des autorités administratives indépendantes.

7. Sanctions infligées par des autorités administratives traditionnelles, centrales ou

déconcentrées.

8. Litiges ne portant pas sur des sanctions.

2°) Illustrations jurisprudentielles

9. Réticence initiale du Conseil d’Etat à propos du contentieux des sanctions

administratives ?

10. Allongement par le Conseil d’Etat de la liste des recours objectifs de pleine

juridiction.

B. Justifications

1°) Une justification apparente : l’influence du droit européen

11. L’influence limitée du droit communautaire.

12. L’influence discutée de la convention européenne des droits de l’homme.

13. Une influence d’abord majorée.

14. Une influence ensuite minorée. 15. Une influence difficile à déterminer.

2°) Une justification réelle : l’efficacité du plein contentieux objectif

16. L’intérêt principal du plein contentieux objectif : l’étendue des pouvoirs de

décision du juge.

17. Un choix nécessairement favorable au justiciable ?

II. La transformation actuelle du recours pour excès de pouvoir : le « nouveau

recours pour excès de pouvoir », recours de pleine juridiction ?

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A. Les nouveaux pouvoirs du juge de l’excès de pouvoir

1°) L’impact de la loi du 8 février 1995

18. Mode d’emploi du pouvoir d’injonction.

19. Annulation + injonction de prendre une mesure dans un sens déterminé = pleine

juridiction ?

2°) Les évolutions jurisprudentielles postérieures

20. La jurisprudence Hallal.

21. La jurisprudence Association AC !

22. La jurisprudence Société Techna.

B. La distinction entre nouveau recours pour excès de pouvoir et pleine juridiction a-t-

elle encore un sens ?

1°) Des oppositions procédurales mineures à nuancer

23. Les conséquences de l’hétérogénéité du plein contentieux.

24. Exemples.

2°) La dernière différence significative : la date à laquelle se place le juge pour statuer

25. Une opposition en apparence absolue.

26. Une opposition à nuancer.

27. Conclusion générale.

Document n°1 : Conseil constitutionnel, décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence

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(…)

7. Considérant que les députés auteurs de la saisine défèrent au Conseil constitutionnel la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence, définitivement votée le 20 décembre 1986 ;

8. Considérant que ladite loi dispose : "Article 1er.- Le quatrième alinéa de l'article 12 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrece est ainsi rédigé : "La décision du conseil peut faire l'objet d'un recours, dans les dix jours suivant sa notification, devant la cour d'appel de Paris qui statue dans les quinze jours de sa saisine".- Article 2.- Le premier alinéa de l'article 15 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 précitée est ainsi rédigé : "Les décisions du conseil de la concurrence sont notifiées aux intéressés et au ministre chargé de l'économie qui peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la cour d'appel de Paris" ;

9. Considérant que les députés auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution de la loi précitée, notamment en tant qu'elle transfère à une juridiction de l'ordre judiciaire la mission de statuer sur les recours formés contre les décisions du conseil de la concurrence ;

(…)

- SUR LE TRANSFERT A LA JURIDICTION JUDICIAIRE DU CONTROLE DES DECISIONS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE :

15. Considérant que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor An III qui ont posé dans sa généralité le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires n'ont pas en elles-mêmes valeur constitutionnelle ; que, néanmoins, conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la République" celui selon lequel, à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la réformation des décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ;

16. Considérant cependant que, dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une législation ou d'une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au législateur, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les règles de compétence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé ;

17. Considérant que, si le conseil de la concurrence, organisme administratif, est appelé à jouer un rôle important dans l'application de certaines règles relatives au droit de la concurrence, il n'en demeure pas moins que le juge pénal participe également à la répression des pratiques anticoncurrentielles sans préjudice de celle d'autres infractions intéressant le droit de la concurrence ; qu'à des titres divers le juge civil ou commercial est appelé à connaître d'actions en responsabilité ou en nullité fondées sur le droit de la concurrence ; que la loi présentement examinée tend à unifier sous l'autorité de la cour de cassation l'ensemble

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de ce contentieux spécifique et ainsi à éviter ou à supprimer des divergences qui pourraient apparaître dans l'application et dans l'interprétation du droit de la concurrence ;

18. Considérant dès lors que cet aménagement précis et limité des règles de compétence juridictionnelle, justifié par les nécessités d'une bonne administration de la justice, ne méconnaît pas le principe fondamental ci-dessus analysé tel qu'il est reconnu par les lois de la République ;

(…)

Document n°2 : Conseil constitutionnel, Décision n° 88-248 DC du 17 janvier 1989, Loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

(…)

- SUR L'ARTICLE 19 RELATIF AUX POUVOIRS DE SANCTION DU CONSEIL SUPERIEUR DE L'AUDIOVISUEL :

(…)

23. Considérant que les auteurs de la saisine soutiennent en premier lieu que les sanctions administratives sont inconstitutionnelles dans leur principe ; qu'ils font valoir en deuxième lieu que, même si le principe de telles sanctions est admis, les sanctions prévues par la loi déférée ne satisfont pas aux exigences constitutionnelles ; qu'en tout état de cause, la sanction énoncée au 1° de l'article 42-1 est attentatoire à la liberté d'expression ;

. En ce qui concerne le principe même de l'institution de sanctions administratives :

24. Considérant que les auteurs de la saisine font valoir tout d'abord que les articles 42-1 et 42-2 ajoutés à la loi du 30 septembre 1986, en ce qu'ils confèrent à une autorité administrative et non à une autorité juridictionnelle le pouvoir d'infliger des sanctions, méconnaissent le principe de la séparation des pouvoirs affirmé par l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme ; que le respect de ce principe s'impose d'autant plus qu'est en cause la libre communication des pensées et des opinions garantie par l'article 11 de la Déclaration de 1789 ;

25. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen : "La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la loi" ;

26. Considérant qu'il appartient au législateur, compétent en vertu de l'article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, de concilier, en l'état actuel des techniques et de leur maîtrise, l'exercice de la liberté de communication telle qu'elle résulte de l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme, avec, d'une part, les contraintes techniques inhérentes aux moyens de la communication audiovisuelle et, d'autre part, les objectifs de valeur constitutionnelle que sont la sauvegarde de l'ordre public, le respect de la liberté d'autrui et la préservation du caractère pluraliste des courants d'expression socioculturels auxquels ces

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modes de communication, par leur influence considérable, sont susceptibles de porter atteinte ;

27. Considérant que, pour la réalisation de ces objectifs de valeur constitutionnelle, il est loisible au législateur de soumettre les différentes catégories de services de communication audiovisuelle à un régime d'autorisation administrative ; qu'il lui est loisible également de charger une autorité administrative indépendante de veiller au respect des principes constitutionnels en matière de communication audiovisuelle ; que la loi peut, de même, sans qu'il soit porté atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, doter l'autorité indépendante chargée de garantir l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle de pouvoirs de sanction dans la limite nécessaire à l'accomplissement de sa mission ;

28. Considérant qu'il appartient au législateur d'assortir l'exercice de ces pouvoirs de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis ;

29. Considérant que, conformément au principe du respect des droits de la défense, lequel constitue un principe fondamental reconnu par les lois de la République, aucune sanction ne peut être infligée sans que le titulaire de l'autorisation ait été mis à même tant de présenter ses observations sur les faits qui lui sont reprochés que d'avoir accès au dossier le concernant ; qu'en outre, pour les sanctions prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 42-1 ainsi que dans le cas du retrait de l'autorisation mentionné à l'article 42-3, le législateur a prescrit le respect d'une procédure contradictoire qui est diligentée par un membre de la juridiction administrative suivant les modalités définies à l'article 42-7 ; qu'il ressort de l'article 42-5 que le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans, s'il n'a été accompli "aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction" ;

30. Considérant que le pouvoir d'infliger les sanctions énumérées à l'article 42-1 est conféré au Conseil supérieur de l'audiovisuel qui constitue une instance indépendante ; qu'il résulte des termes de la loi qu'aucune sanction ne revêt un caractère automatique ; que, comme le prescrit l'article 42-6, toute décision prononçant une sanction doit être motivée ; que la diversité des mesures susceptibles d'être prises sur le fondement de l'article 42-1 correspond à la volonté du législateur de proportionner la répression à "la gravité du manquement" reproché au titulaire d'une autorisation ; que le principe de proportionnalité doit pareillement recevoir application pour l'une quelconque des sanctions énumérées à l'article 42-1 ; qu'il en va ainsi en particulier des sanctions pécuniaires prévues au 3° de cet article ; qu'à cet égard, l'article 42-2 précise que le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages tirés du manquement par le service autorisé ; qu'un même manquement ne peut donner lieu qu'à une seule sanction administrative, qu'elle soit légale ou contractuelle ; qu'il résulte du libellé de l'article 42-1 (3°) qu'une sanction pécuniaire ne peut se cumuler avec une sanction pénale ;

31. Considérant qu'il convient de relever également que toute décision infligeant une sanction peut faire l'objet devant le Conseil d'Etat d'un recours de pleine juridiction, comme le précise l'article 42-8 ; que ce recours est suspensif d'exécution en cas de retrait de l'autorisation mentionné à l'article 42-3 ; que, dans les autres cas, le sursis à l'exécution de la décision attaquée peut être demandé en application de l'article 48 de l'ordonnance n° 45-1078 du 31 juillet 1945 et du décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 ; que le droit de recours étant réservé à la personne sanctionnée, son exercice ne peut, conformément aux principes généraux du droit, conduire à aggraver sa situation ;

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32. Considérant que, s'agissant de manquements à des obligations attachées à une autorisation administrative et eu égard aux garanties prévues, qui sont d'ailleurs également applicables aux pénalités contractuelles et à la sanction susceptible d'être infligée en vertu de l'article 42-4, les articles 42-1 et 42-2 ajoutés à la loi du 30 septembre 1986 par l'article 19 de la loi déférée, ne sont pas contraires, dans leur principe, aux articles 11 et 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen ;

(…)

Document n°3 : Conseil constitutionnel, Décision n° 99-411 DC du 16 juin 1999, Loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs. (…) - SUR L'ARTICLE 8 : Considérant que l'article 8 de la loi déférée modifie le a) de l'article L. 11-1 du code de la route ; qu'il ajoute le nouveau délit institué par l'article L. 4-1 du code de la route à la liste des infractions entraînant, lorsqu'est établie leur réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation définitive, la réduction de plein droit du nombre de points affecté au permis de conduire ; Considérant que les auteurs de la saisine estiment que la perte de plein droit de points affectés au permis de conduire, encourue par l'auteur du délit instauré par l'article L. 4-1 du code de la route, porte une atteinte excessive « au principe de liberté de circulation, liberté individuelle garantie par la Constitution » ; qu'ils soutiennent également que « la décision de retrait de points doit pouvoir être soumise à l'appréciation de l'autorité judiciaire, juge des libertés individuelles au sens de l'article 66 de la Constitution » ; qu'ils font en outre valoir qu'eu égard au nombre de points pouvant être ainsi perdus, la disposition critiquée méconnaît les principes de proportionnalité et de nécessité des peines ; qu'enfin ils estiment qu'il serait porté atteinte « à l'exigence d'un recours de pleine juridiction à l'encontre de toute décision infligeant une sanction » ; Considérant, en premier lieu, que la procédure instaurée par l'article L. 11-1 du code de la route ne porte pas atteinte à la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution ; qu'eu égard à son objet, et sous réserve des garanties dont est assortie sa mise en oeuvre, elle ne porte pas davantage atteinte à la liberté d'aller et venir ; Considérant, en deuxième lieu, que, dans l'hypothèse où l'une des infractions énumérées à l'article L. 11-1 du code de la route a été relevée à l'encontre du conducteur, celui-ci est informé de la perte de points qu'il peut encourir ; que cette perte de points, directement liée à un comportement délictuel ou contraventionnel portant atteinte aux règles de la circulation routière, ne peut intervenir qu'en cas de reconnaissance de responsabilité pénale, après appréciation éventuelle de la réalité de l'infraction et de son imputabilité par le juge judiciaire, à la demande de la personne intéressée ; qu'en outre, la régularité de la procédure de retrait de points peut être contestée devant la juridiction administrative ; que ces garanties assurent le respect des droits de la défense et celui du droit au recours ; Considérant, en troisième lieu, qu'en application de l'article L. 11-2 du code de la route, la perte de points, pour la commission de délits, est égale à la moitié du nombre de points initial, alors qu'elle est, en matière contraventionnelle, au plus égale au tiers de ce nombre ; que les conditions dans lesquelles les pertes de points peuvent se cumuler sont précisées par cet article ; qu'en conséquence, la perte du nombre de points affecté au permis de conduire est

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quantifiée de façon variable en fonction de la gravité des infractions qui peuvent l'entraîner ; que cette sanction, qu'elle soit appliquée en matière contraventionnelle ou délictuelle, y compris au délit institué par l'article L.4-1 du code de la route, n'est pas manifestement disproportionnée par rapport aux faits qu'elle réprime ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les griefs soulevés à l'encontre de l'article 8 doivent être rejetés ; (…) Document n°4 : Cour européenne des droits de l’homme, 23 octobre 1995, Schmautzer c. Autriche. (…) 6. Le 30 avril 1986, M. Peter Schmautzer fit l'objet d'un contrôle par la gendarmerie alors qu'il circulait au volant de son véhicule. Il ne portait pas sa ceinture de sécurité. Par une « décision pénale » du 1er juin 1987, la direction de Graz de la police fédérale le condamna au paiement d'une amende de 300 schillings autrichiens (ATS), assortie d'une peine de vingt-quatre heures d'emprisonnement à défaut de paiement, pour non-respect de l'article III paras. 1 et 5, alinéa a), du troisième amendement à la loi sur les véhicules à moteur. 7. Le requérant interjeta appel de cette décision auprès du gouvernement du Land de Styrie, qui confirma cette dernière le 2 février 1988, mais réduisit l'amende à 200 ATS et la peine subsidiaire à quatorze heures d'emprisonnement. 8. Le 6 avril 1988, l'intéressé saisit la Cour constitutionnelle. Il dénonçait une atteinte au principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi et alléguait que sa condamnation à une peine subsidiaire par une autorité administrative qui n'est pas un tribunal « indépendant et impartial » violait les articles 5 et 6 (art. 5, art. 6) de la Convention. Il fit également valoir que l'obligation du port de la ceinture de sécurité constituait une ingérence dans sa vie privée, contraire à l'article 8 (art. 8) de la Convention. Le 27 février 1989, à l'issue d'un examen à huis clos, la Cour constitutionnelle décida de ne pas retenir le recours : eu égard à sa jurisprudence relative à l'article 6 (art. 6) de la Convention, il était dénué de chances suffisantes de succès; de plus, l'affaire n'échappait pas à la compétence de la Cour administrative. (…) 25. Le requérant dénonce une violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, ainsi libellé: « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) ». Il aurait été privé du droit à un « tribunal » et à des audiences devant celui-ci. (…) B. Sur l'observation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

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32. D'après M. Schmautzer, aucun des organes saisis dans le cadre de la procédure en question ne peut passer pour un « tribunal » au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1). Il en irait ainsi non seulement des autorités administratives, mais aussi de la Cour constitutionnelle, dont le contrôle se limite aux questions de droit constitutionnel, et surtout de la Cour administrative. En effet, celle-ci se trouverait liée par les constatations de fait des autorités administratives, sauf l'hypothèse d'un vice de procédure (…). Elle ne serait donc habilitée ni à accueillir elle-même des moyens de preuve, ni à établir les faits, ni à prendre en compte deséléments nouveaux. De plus, en cas d'annulation d'un acte administratif, elle ne pourrait se prononcer au lieu et place de l'autorité censurée, mais devrait toujours lui renvoyer le dossier. Bref, elle exercerait uniquement un contrôle de légalité, que l'on ne saurait assimiler à un contentieux de pleine juridiction. 33. Le Gouvernement combat cette thèse, tandis que la Commission y souscrit en substance. 34. La Cour le rappelle: il faut que la décision d'une autorité administrative ne remplissant pas elle-même les exigences de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention - comme c'est le cas en l'espèce de la direction de la police fédérale et du gouvernement du Land (…) - subisse le contrôle ultérieur d’un « organe judiciaire de pleine juridiction » (voir notamment, mutatis mutandis, les arrêts Albert et Le Compte c. Belgique du 10 février 1983, série A n° 58, p. 16, par. 29, Öztürk précité, pp. 21-22, par. 56, et Fischer c. Autriche du 26 avril 1995, série A n° 312, p. 17, par. 28). 35. Telle n'est pas la Cour constitutionnelle. En l'occurrence, elle ne pouvait se pencher sur la procédure incriminée que du point de vue de sa conformité à la Constitution, ce qui ne lui permit pas d'examiner l'ensemble des faits de la cause. Elle ne possédait donc pas la compétence exigée par l'article 6 par. 1 (art. 6-1). 36. Quant à la compétence de la Cour administrative, elle doit s'apprécier en tenant compte du fait qu'en l'espèce, elle était amenée à s'exercer dans un litige de nature pénale au sens de la Convention. Sa compatibilité avec l'article 6 par. 1 (art. 6-1) se mesure dès lors au regard des griefs soulevés devant ladite juridiction par l'intéressé, mais aussi à la lumière des caractéristiques constitutives d'un « organe judiciaire de pleine juridiction ». Or parmi celles-ci figure le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise, rendue par l'organe inférieur. En l'absence de pareille compétence dans le chef de la Cour administrative, celle-ci ne saurait passer pour un « tribunal » au sens de la Convention (…) 37. Partant, le requérant n'a pas eu accès à un "tribunal". Il y a donc eu violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) sur ce point. Document n°5 : Cour européenne des droits de l’homme, 23 septembre 1998, Malige c. France. (…) 1. D’après le requérant, une loi qui prévoit une sanction automatique déterminée par l’application d’un barème fixe et qui écarte toute possibilité de recours devant un juge ne saurait être conforme aux exigences de l’article 6 § 1. Par ailleurs, même en droit interne, toute personne faisant l’objet d’une sanction accessoire pourrait demander au juge judiciaire

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de la relever de cette déchéance ou de cette interdiction. Or, précisément, l’article L. 11-4 du code de la route exclurait cette possibilité et créerait un régime d’exception. De plus, le recours devant le juge administratif ne serait pas efficace, car ce dernier agirait dans le cadre d’une compétence liée ne lui accordant aucun pouvoir de décision. Son contrôle serait purement formel : il se bornerait à enregistrer le retrait de points résultant automatiquement de la constatation par l’autorité judiciaire de la réalité de l’infraction. Or le juge judiciaire serait le gardien des libertés individuelles et c’est à lui qu’il appartiendrait d’apprécier la conformité de la loi sur le permis de conduire avec la Convention. 2. Le Gouvernement soutient, à titre très subsidiaire, que l’intéressé a eu accès à un tribunal au sens de l’article 6 § 1. L’autorité administrative informerait le contrevenant qu’il est susceptible de perdre des points en raison de l’infraction qu’il a commise et de l’existence d’un traitement automatisé des pertes et reconstitutions de points. Ainsi, celui-ci pourrait-il saisir le juge pénal pour réfuter la réalité des faits qui pourraient servir de fondement à un retrait de points. De même, lors de la notification de la mesure de retrait de points, postérieurement à l’intervention du juge pénal, il serait indiqué au contrevenant qu’il a la possibilité de saisir dans un délai de deux mois les juridictions administratives. En l’occurrence, c’est ce que M. Malige aurait pu faire, car le juge administratif saisi d’un recours pour excès de pouvoir doit s’assurer que l’autorité administrative n’a pas commis d’erreur sur l’existence des faits qui ont déclenché son intervention, à savoir la condamnation pénale entraînant le retrait de points, ni d’erreur en droit. 3. La Cour rappelle que dès lors qu’une sanction relève du domaine pénal, elle doit pouvoir être contrôlée par un tribunal répondant aux exigences de l’article 6 § 1, même si la Convention ne s’oppose pas à ce que les poursuites et les sanctions relatives aux délits mineurs relèvent en premier lieu des autorités administratives (arrêt Öztürk précité, pp. 21–22, § 56). 4. Elle relève que la sanction de retrait de points intervient dès lors qu’est établie la réalité d’une des infractions énumérées à l’article L. 11-1 du code de la route (paragraphe 21 ci-dessus) par le biais soit d’une condamnation devenue définitive, soit du paiement de l’amende forfaitaire par le contrevenant, ce qui implique reconnaissance de l’infraction et acceptation tacite du retrait de points. 5. Lors de la constatation d’une infraction, le contrevenant est informé par l’autorité administrative qu’il est susceptible de perdre des points en raison de l’infraction qu’il a commise ainsi que de l’existence d’un traitement automatisé des pertes et reconstitutions de points (article R. 258 du code de la route – paragraphe 21 ci-dessus). Ainsi, il est mis en mesure de contester les éléments constitutifs de l’infraction pouvant servir de fondement à un retrait de points.

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6. La Cour observe que le requérant ne s’est pas acquitté du paiement de l’amende forfaitaire et que la perte partielle de points était donc subordonnée à l’établissement de sa culpabilité par la juridiction pénale. Or, comme l’a relevé la Commission, devant le tribunal de police et la cour d’appel de Versailles, juridictions pénales satisfaisant aux exigences de l’article 6 § 1, l’intéressé a pu contester la réalité de l’infraction pénale consistant dans l’excès de vitesse, et soumettre aux juges répressifs tous les moyens de fait et de droit qu’il a estimés utiles à sa cause, sachant que sa condamnation entraînerait en outre le retrait d’un certain nombre de points. 7. Quant à la proportionnalité de la sanction, la Cour note, avec la Commission, que la loi elle-même a prévu dans une certaine mesure la modulation du retrait de points en fonction de la gravité de la contravention commise par le prévenu. En l’espèce, celle-ci entraînait le retrait de quatre points sur les douze que compte le permis de conduire, et on ne saurait donc qualifier cette mesure de disproportionnée par rapport au comportement qu’elle entend sanctionner. D’une part, elle n’a pas pour conséquence immédiate l’annulation du permis de conduire. D’autre part, l’intéressé peut reconstituer son capital de points, soit en ne commettant pas pendant le délai de trois ans une nouvelle infraction sanctionnée d’un retrait de points, soit en suivant une formation spécifique (article L. 11-6 du code de la route – paragraphe 21 ci-dessus) ; il garde donc une certaine latitude de comportement. 8. A l’instar de la Commission, la Cour estime donc qu’un contrôle suffisant au regard de l’article 6 § 1 de la Convention se trouve incorporé dans la décision pénale de condamnation prononcée à l’encontre de M. Malige, sans qu’il soit nécessaire de disposer d’un contrôle séparé supplémentaire de pleine juridiction portant sur le retrait de points. Par ailleurs, le requérant pourra introduire un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative afin de faire contrôler que l’autorité administrative a agi à l’issue d’une procédure régulière. 9. La Cour en conclut, avec la Commission, que l’intéressé a bénéficié dans l’ordre interne d’un contrôle juridictionnel suffisant concernant la mesure litigieuse au regard de l’article 6 § 1. 10. Partant, il n’y a pas eu violation de cette disposition. (…) Document n°6 : Cass. Com., 29 avril 1997, Ferreira.

(…) Attendu, selon le jugement déféré (tribunal de grande instance de Béthune, 1er août 1995), que M. Ferreira, propriétaire d'un véhicule automobile d'une puissance fiscale de 23 chevaux, a, après le rejet de sa réclamation présentée le 11 mai 1994, assigné le directeur des services fiscaux devant le tribunal de grande instance pour obtenir la restitution de la taxe différentielle acquittée au titre de l'année 1993 ; (…) Sur le troisième moyen :

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Vu l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Attendu que, pour écarter l'application de la disposition susvisée, le Tribunal retient que les pénalités prévues par l'article 1840 N quater du Code général des impôts résultent de la seule constatation matérielle par l'administration fiscale du non-paiement de la taxe, exclusive de toute appréciation du comportement du contribuable, et que la décision de l'Administration est susceptible de recours devant un tribunal ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme qu'un système de majorations d'impôt ne se heurte pas à l'article 6 de la Convention pour autant que le contribuable puisse saisir de toute décision ainsi prise à son encontre un tribunal offrant les garanties de ce texte ; que l'amende fiscale prévue par l'article 1840 N quater du Code général des impôts constitue une sanction ayant le caractère d'une punition et que cette disposition n'a pas institué à l'encontre de la décision de l'Administration un recours de pleine juridiction permettant au tribunal de se prononcer sur le principe et le montant de l'amende ; qu'il en résulte que l'application de l'article 1840 N quater doit être écartée dans cette mesure au regard de l'article 6-1 susvisé, le Tribunal a violé cette disposition ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Ferreira au paiement des pénalités pour le non-paiement de la taxe différentielle due au titre de l'année 1993, le jugement rendu le 1er août 1995, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Béthune (…) Document n°7 : CE, 8 mars 1912, Lafage. (…) Considérant que le sieur Lafage se borne à soutenir que, par la décision susvisée du ministre des colonies, il a été privé du bénéfice d’avantages qui lui sont assurés, en sa qualité d’officier, par les règlements en vigueur ; que sa requête met ainsi en question la légalité d’un acte d’une autorité administrative ; que, par suite, le requérant est recevable à attaquer la décision dont s’agit par la voie du recours pour excès de pouvoir ; (…) Document n°8 : CE, Ass., 17 février 1950, Ministre de l’agriculture c. Dame Lamotte. (…) Considérant que, par un arrêté du 29 janvier 1941 pris en exécution de la loi du 27 août 1940, le préfet de l'Ain a concédé « pour une durée de neuf années entières et consécutives qui commenceront à courir le 1er février 1941 » au sieur de Testa le domaine de Sauberthier (commune de Montluel),appartenant à la dame Lamotte, née Vial; que, par une décision du 24 juillet 1942, le Conseil d'Etat a annulé cette concession par le motif que ce domaine « n'était pas abandonné et inculte depuis plus de deux ans »; que, par une décision ultérieure du 9 avril 1943, le Conseil d'Etat a annulé, par voie de conséquence, un second arrêté du préfet de l'Ain,

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du 20 août 1941,concédant au sieur de Testa trois nouvelles parcelles de terre, attenantes au domaine; Considérant enfin que, par une décision du 29 décembre. 1944, le Conseil d'État a annulé comme entaché de détournement de pouvoir un troisième arrêté, en date du 2 novembre 1943, par lequel le préfet de l'Ain, « en vue de retarder l'exécution des deux décisions précitées du 24 juillet 1942 et 9 avril 1943 »,avait réquisitionné au profit du même sieur de Testa le domaine de Sauberthier; Considérant que le ministre de l'agriculture défère au Conseil d'État l'arrêté en date du 4 octobre 1946, par lequel le conseil de préfecture interdépartemental de Lyon, saisi d'une réclamation formée par la dame Lamotte contre un quatrième arrêté du préfet de l'Ain, du 10 août 1944, concédant une fois de plus au sieur de Testa le domaine de Sauberthier, a prononcé l'annulation de ladite concession; que le ministre soutient que le conseil de préfecture aurait dû rejeter cette réclamation comme non recevable en vertu de l'art. 4 de la loi du 23 mai 1943; Considérant que l'article 4, alinéa 2 de l'acte dit loi du 23 mai 1943 dispose « L'octroi de la concession ne peut faire l'objet d'aucun recours administratif ou judiciaire »; que, si cette disposition, tant que sa nullité n'aura pas été constatée conformément à l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine, a pour effet de supprimer le recours qui avait été ouvert au propriétaire par l'article 29 de la loi du 19 février1942 devant le conseil de préfecture pour lui permettre de contester, notamment, la régularité de la concession, elle n'a pas exclu le recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'État contre l'acte de concession, recours qui est ouvert même sans texte contre tout acte administratif, et qui a pour effet d'assurer, conformément aux principes généraux du droit, le respect de la légalité; qu'il suit de là, d'une part, que le ministre de l'agriculture est fondé à demander l'annulation de l'arrêté susvisé du conseil de préfecture de Lyon du 4 octobre 1946, mais qu'il y a lieu, d'autre part, pour le Conseil d'Etat, de statuer comme juge de l'excès de pouvoir sur la demande en annulation de l'arrêté du préfet de l'Ain du 10 août 1944 formée par la dame Lamotte; Considérant qu'il est établi par les pièces du dossier que ledit arrêté, maintenant purement et simplement la concession antérieure, faite au profit du sieur deTesta, pour une durée de neuf ans, « à compter du 1er février 1941 » ainsi qu'il a été dit ci-dessus, n'a eu d'autre but que de faire délibérément échec aux décisions susmentionnées du Conseil d'État statuant au contentieux, et qu'ainsi, il est entaché de détournement de pouvoir. (…) Document n°9 : CE, Ass., 1er mars 1991, Le Cun.

(…) Sur la légalité interne : Considérant que la décision attaquée du 29 septembre 1989 fonde la sanction pécuniaire d'un million de francs infligée au requérant sur la méconnaissance par ce dernier, au cours des mois d'octobre à décembre 1988, des dispositions de l'article 2-6-7 du règlement général du conseil des bourses de valeurs, homologué par l'arrêté ministériel du 22 septembre 1988, aux termes duquel : « Les personnes chargées d'une fonction de négociation ne peuvent opérer pour leur propre compte sur les valeurs dont elles ont la responsabilité » ; (…)

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Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions précitées de l'article 2-6-7 du règlement général ne limitent pas l'interdiction de négociation qu'il édicte aux seules valeurs dont la cotation se fait "par casier" ; qu'en opérant pour son compte sur les valeurs supports du marché à options négociables de Paris, dont il était spécialement chargé par la société de bourses qui l'employait, le requérant a opéré sur des valeurs dont il avait la responsabilité au sens des dispositions précitées de l'article 2-6-7 du règlement général et ainsi méconnu l'interdiction ci-dessus rappelée ; qu'il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, les faits commis par M. Le Cun étaient de nature à justifier légalement la sanction pécuniaire de un million de francs qui lui a été infligée par la décision attaquée ;

(…)

Document n°10 : CE, Sect., 30 octobre 1998, Ville de Lisieux.

(…)

Sur les fins de non-recevoir opposées par la ville de Lisieux aux demandes présentées par M. André Fanton au tribunal administratif de Caen : Considérant, d'une part, qu'eu égard à la nature particulière des liens qui s'établissent entre une collectivité publique et ses agents non titulaires les contrats par lesquels il est procédé au recrutement de ces derniers sont au nombre des actes dont l'annulation peut être demandée au juge administratif par un tiers y ayant un intérêt suffisant ; que, par suite, l'annulation des contrats par lesquels le maire de Lisieux a procédé au recrutement d'agents communaux pouvait être demandée aux premiers juges par M. Fanton, qui invoquait sa qualité de conseiller municipal et soutenait que ces décisions avaient été prises en méconnaissance des compétences du conseil municipal (…) Document n°11 : CE, Sect. Avis, 30 novembre 1998, Berrad. (…) 1°) l'annulation, par le juge administratif, d'un refus de titre de séjour au motif que ce refus porte au droit de l'étranger intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, implique-t-elle nécessairement que l'administration préfectorale délivre à cet étranger un titre de séjour l'autorisant à travailler dès lors qu'il a atteint l'âge minimum requis par la loi ? (…) 1 - Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt". Lorsque l'exécution d'un jugement ou d'un arrêt implique normalement, eu égard aux

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motifs de ce jugement ou de cet arrêt, une mesure dans un sens déterminé, il appartient au juge, saisi de conclusions sur le fondement des dispositions précitées, de statuer sur ces conclusions, en tenant compte, le cas échéant après une mesure d'instruction, de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ; si, au vu de cette situation de droit et de fait, il apparaît toujours que l'exécution du jugement ou de l'arrêt implique nécessairement une mesure d'exécution, il incombe au juge de la prescrire à l'autorité compétente. (…) Document n°12 : CE, Sect., 28 juillet 1999, GIE Mumm-Perrier-Jouët. (…) Sur le moyen fondé sur l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et tiré de l'absence de proportionnalité de la sanction prononcée au regard de la gravité des infractions commises : Considérant qu'aux termes de l'article R. 341-35, pris pour l'application et sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 341-7 précité du code du travail, le montant de la contribution spéciale due pour chaque étranger employé en infraction « est égal à mille fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 141-8. Lorsque l'emploi de l'étranger n'a pas donné lieu à la constatation d'une infraction autre que l'infraction au premier alinéa de l'article L. 341-6, le directeur de l'Office des migrations internationales peut (...) réduire ce montant à cinq cents fois (...). Le montant de la contribution spéciale est portée à deux mille fois (...) lorsqu'une infraction (...) aura donné lieu à l'application de la contribution spéciale à l'encontre de l'employeur au cours de la période de cinq années précédant la constatation de l'infraction » ; Considérant que lorsque le juge administratif est, comme en l'espèce, saisi de conclusions dirigées contre un état exécutoire établi sur le fondement des dispositions des articles L. 341-7 et R. 341-35 du code du travail, il lui appartient, après avoir contrôlé les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, de décider, selon le résultat de ce contrôle, soit de maintenir le taux retenu, soit de lui substituer celui des deux autres taux qu'il estime légalement justifié, soit, s'il n'est pas établi que l'employeur se serait rendu coupable des faits visés au premier alinéa de l'article L. 341-6 du code du travail, de le décharger de la contribution spéciale ; qu'en revanche, les dispositions précitées ne l'habilitent pas davantage que l'administration elle-même à moduler les taux qu'elles ont fixés ; que le respect des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'implique pas non plus que le juge module l'application du barème résultant des dispositions précitées ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le montant de la contribution spéciale mise à la charge du groupement requérant sur la base de 500 fois le taux horaire du minimum garanti ne serait pas proportionné à la gravité des infractions commises, ne saurait être accueilli ; (…)

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Document n°13 : CE, 30 juin 2003, SCP Chenu-Scrive-Bérard. (…) Sur les règles juridiques applicables : Considérant que la loi du 10 juillet 2000 a supprimé le monopole des commissaires-priseurs dans le domaine des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ; qu'elle a prévu l'indemnisation des commissaires-priseurs pour le préjudice subi à raison de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de présentation ; qu'à cet effet, elle a confié à une commission nationale d'indemnisation le soin de fixer l'indemnité à laquelle ils peuvent prétendre ; que le dernier alinéa de son article 45 dispose : les décisions de la commission peuvent faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat ; que le recours porté devant le Conseil d'Etat est un recours de pleine juridiction ; (…) Document n°14 : CE, Sect., 6 février 2004, Hallal . (…) Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ; Considérant que la décision attaquée de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejette le recours de Mme HALLAL contre la décision du consul général de France à Annaba (Algérie) refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français au motif que l'intéressée n'était pas « isolée » dans son pays d'origine ; que la circonstance ainsi relevée ne pouvait pas, à elle seule, justifier que la qualité d'ascendante à charge de ressortissant français fût déniée à Mme HALLAL ; qu'ainsi, le motif retenu dans la décision attaquée est entaché d'erreur de droit ; Considérant il est vrai que, pour établir que la décision attaquée était légale, le ministre des affaires étrangères invoque, dans son mémoire en défense communiqué à Mme HALLAL, un autre motif, tiré de ce que cette dernière ne justifiait pas, à la date de cette décision, recevoir régulièrement des ressources de la part de ses enfants français résidant en France ; Mais considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, eu égard notamment aux éléments fournis par Mme HALLAL à l'appui de son mémoire en réplique, que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait pris la même décision si elle avait entendu se fonder initialement sur ce motif ; qu'il n'y a dès lors pas lieu de procéder à la substitution demandée ; (…)

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Document n°15 : CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC ! (…) Sur les conséquences de l'illégalité des arrêtés attaqués : En ce qui concerne l'office du juge : Considérant que l'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu ; que, toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation ; qu'il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine ; En ce qui concerne l'application de ces principes aux arrêtés litigieux : Quant aux arrêtés relatifs à la convention du 1er janvier 2004 : Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la disparition rétroactive des dispositions des arrêtés agréant les stipulations illégales relatives aux pouvoirs de la commission paritaire nationale et à l'aide à la mobilité géographique entraînerait des conséquences manifestement excessives, eu égard aux intérêts en présence et aux inconvénients que présenterait une limitation dans le temps des effets de leur annulation ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, d'assortir l'annulation de ces dispositions d'une telle limitation ; Considérant, en revanche, qu'il résulte des dispositions du code du travail mentionnées plus haut que la loi fait obligation aux organisations les plus représentatives des employeurs et des travailleurs et au ministre chargé du travail et, à défaut, au Premier ministre, de prendre les mesures propres à garantir la continuité du régime d'assurance chômage ; qu'ainsi, il incombe nécessairement aux pouvoirs publics, en cas d'annulation de l'arrêté par lequel le ministre chargé du travail agrée des accords conclus pour l'application des dispositions de l'article L. 351-8, de prendre, sans délai, les mesures qu'appellent ces dispositions ; qu'eu égard à l'intérêt qui s'attache à la continuité du versement des allocations et du recouvrement des cotisations, à laquelle une annulation rétroactive des dispositions des arrêtés attaqués qui agréent les stipulations de la convention du 1er janvier 2004, ainsi que ses annexes et accords d'application, autres que celles relatives aux pouvoirs de la commission paritaire nationale et à l'aide à la mobilité géographique, porterait une atteinte manifestement excessive, il y a lieu, pour permettre au ministre chargé du travail ou, à défaut, au Premier ministre de prendre les

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dispositions nécessaires à cette continuité, de n'en prononcer l'annulation totale - sous réserve des droits des personnes qui ont engagé une action contentieuse à la date de la présente décision - qu'à compter du 1er juillet 2004 ; (…) Document n°16 : CE, Sect., 19 novembre 2006, Ramond. (…) Considérant, d'une part, qu'il appartient aux juridictions de l'aide sociale de se prononcer sur l'existence du droit à récupération d'une créance d'aide sociale en fonction des éléments de droit existant à la date à laquelle la situation de la personne contre laquelle cette action est exercée peut être regardée comme ayant été définitivement constituée ; que, s'agissant d'un recours exercé contre un donataire, il en est ainsi lorsque les deux conditions de l'existence d'une donation et de l'admission du donateur à l'aide sociale sont réunies, sans que puissent y faire obstacle d'éventuels actes de disposition accomplis ultérieurement par le donataire ; que, d'autre part, il appartient à ces mêmes juridictions, en leur qualité de juges de plein contentieux, de se prononcer sur le bien-fondé de l'action en récupération d'après l'ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l'une et l'autre parties à la date de leur propre décision ; qu'à ce dernier titre, elles ont la faculté, en fonction des circonstances particulières de chaque espèce, d'aménager les modalités de cette récupération ; (…) Document n°17 : CE, 25 novembre 2005, A. (…) Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions le régissant que le conseil médical de l'aéronautique civile, chargé notamment aux termes du 2° de l'article D. 424�2 du code de l'aviation civile de se prononcer sur le caractère définitif des inaptitudes déclarées à l'égard des navigants par les différents centres d'expertise médicale, a également la faculté de prononcer une inaptitude à titre temporaire ; Considérant qu'une personne dont le conseil médical a écarté soit en totalité, soit pour partie, la demande justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour contester la légalité de la décision prise dans la mesure où elle rejette ses prétentions ; Considérant qu'il suit de là que M. A, steward au sein de la société Air France qui, après avoir été déclaré, le 17 septembre 2004, inapte aux fonctions de personnel navigant commercial par le centre d'expertise médicale du personnel navigant de Toulouse, a saisi le conseil médical de l'aéronautique civile d'une demande d'inaptitude définitive est recevable à contester la légalité de la décision par laquelle ce conseil l'a déclaré inapte pour un an seulement aux fonctions de steward ; Considérant que s'il appartient au Conseil d'Etat statuant au contentieux d'exercer, en tant que juge de l'excès de pouvoir, son contrôle sur la légalité des décisions prises par le conseil médical de l'aéronautique civile, il ne dispose cependant pas à leur égard des pouvoirs d'un juge de pleine juridiction dont la décision se substituerait à celle arrêtée par le conseil médical ; qu'ainsi, M. A n'est pas recevable à demander au Conseil d'Etat de déclarer son inaptitude définitive aux fonctions de personnel navigant ;

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Document n°18 : CE, avis, 26 juillet 2006, A.

(…)

Vu, enregistré le 25 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le jugement du 13 avril 2006 par lequel le tribunal administratif de Dijon, avant de statuer sur la demande de M. Martial A, a décidé, par application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante : lors de la contestation de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur notifie à l'auteur d'infractions la perte de validité de son permis de conduire pour défaut de points, s'il est constaté, par voie d'exception, l'illégalité de certains des retraits ayant conduit à l'épuisement du capital de 12 points, doit-il être tenu compte, pour calculer le solde de points restant affecté au permis de conduire de l'intéressé à la date de la décision attaquée, des points retirés au delà du nombre de 12 ? (…) I. - L'article L. 223-1 du code de la route dispose que : « Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / A la date d'obtention du permis de conduire, celui-ci est affecté, pendant un délai probatoire de trois ans, de la moitié du nombre maximal de points. Ce délai probatoire est réduit à deux ans lorsque le titulaire du permis de conduire a suivi un apprentissage anticipé de la conduite. A l'issue de ce délai probatoire, le permis de conduire est affecté du nombre maximal de points, si aucune infraction ayant donné lieu au retrait de points n'a été commise. / Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ». Il est précisé à l'article L. 223-3 de ce même code que : « Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. / Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ». Enfin, l'article R. 223-1 prévoit que : « I. - Le permis de conduire est affecté d'un nombre maximal de douze points. / II. - A la date d'obtention du permis de conduire, celui-ci est affecté d'un nombre initial de six points. / III. Pendant le délai probatoire défini à l'article L. 223-1, le permis de conduire ne peut être affecté d'un nombre de points supérieur à six ». II. - Il résulte des dispositions qui précèdent qu'il revient au ministre de l'intérieur d'informer le titulaire d'un permis de conduire, par une décision qui récapitule les retraits de points consécutifs aux infractions précédemment commises, que son permis a perdu sa validité lorsque le nombre de points qui lui est affecté est nul. Dans l'hypothèse où le juge, saisi d'un recours en excès de pouvoir contre cette décision, est conduit à constater que des points ont été illégalement retirés au conducteur, il lui appartient de soustraire du total des points retirés à ce dernier, qui peut être supérieur à douze, ceux qui l'ont illégalement été et de rechercher si, compte tenu de cette soustraction, le nombre de points qui peuvent être légalement retirés au

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permis est, au jour où il statue, égal ou supérieur à douze, ou égal ou supérieur à six pendant le délai probatoire prévu à l'article L. 223-1 du code la route. S'il apparaît alors que le capital de points dont l'intéressé disposait n'a pas été totalement épuisé, la décision par laquelle le ministre a déclaré la perte de validité du permis est illégale. L'exécution du jugement impliquera, sauf dans les cas où les motifs d'illégalité retenus par le juge ne font pas obstacle à ce que l'administration reprenne légalement la ou les mêmes décisions de retrait de points, que l'administration reconnaisse à l'intéressé le bénéfice des points illégalement retirés. (…)

Document n°19 : CE, Sect., 27 octobre 2006, Société Techna.

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Sur les conséquences du rejet des conclusions aux fins d’annulation : Considérant que le rejet d’une requête tendant à l’annulation d’un acte dont l’exécution a été suspendue par le juge administratif statuant en référé a en principe pour effet que cet acte trouve ou retrouve application dès le prononcé de cette décision juridictionnelle ; que, toutefois, s’il apparaît que cet effet est de nature, compte tenu des difficultés de tous ordres qui peuvent en résulter et auxquelles l’administration ne serait pas en état de parer immédiatement elle-même, à porter atteinte au principe de sécurité juridique, notamment dans le cas où, comme en l’espèce, la suspension a été prononcée avant tout début d’exécution d’un acte prévoyant une période transitoire dont le terme est depuis lors écoulé, il appartient au juge administratif, le cas échéant d’office, d’apprécier, en prenant en compte tant les difficultés susmentionnées que l’intérêt général qui s’attache à l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, s’il y a lieu de décider que sa décision de rejet, en tant qu’elle met fin à la suspension précédemment prononcée, ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine et, en ce cas, de prescrire la publication de sa décision au Journal officiel de la République française ; Considérant que le rejet des conclusions à fin d’annulation des présentes requêtes a pour effet de mettre fin à la suspension prononcée par le juge des référés le 29 octobre 2003 et de rendre ainsi applicables les dispositions de l’article 4 du décret du 1er août 2003 ; que si les articles 10 et 11 de ce décret prévoyaient une période transitoire en reportant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions et en permettant, jusqu’à épuisement des stocks, la commercialisation des produits étiquetés selon les règles précédemment applicables, ils en fixaient le terme au 6 novembre 2003, de sorte que ces articles ne peuvent plus, à la date de la présente décision, recevoir application ; qu’en l’espèce, doivent être conciliés, d’une part, l’objectif de sécurité sanitaire que poursuivent les nouvelles dispositions et l’obligation de pourvoir à la transposition d’une directive communautaire et, d’autre part, le principe de sécurité juridique, reconnu tant en droit interne que par l’ordre juridique communautaire, qui implique au cas présent que les entreprises qui assurent la production et la commercialisation des produits en cause puissent bénéficier, en ce qui concerne les règles d’étiquetage de ces produits, d’une période transitoire, d’ailleurs prévue par le décret du 1er août 2003, leur permettant de s’adapter aux prescriptions nouvelles ; qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de reporter au 1er février 2007 la date d’effet de la présente décision, en tant qu’elle met fin à la suspension des dispositions de l’article 4 du décret du 1er août 2003, et de prescrire sa publication au Journal officiel de la République française ; (…)