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Paris, 2 décembre 2014 : Un grand pas pour la paix
La Commission européenne donne un ulti-matum à la France, à l'Italie et à laBelgique : fournir de nouveaux efforts
budgĂ©taires et accĂ©lĂ©rer le programme de rĂ©for-mes. Rien de dĂ©mocratique : seul le ConseileuropĂ©en oĂč siĂšgent les chefs dâĂtat a le pouvoirde dĂ©cision et le duo Hollande-Merkel en est lepilote. En octobre dĂ©jĂ , lâOCDE* reprochait Ă laFrance dâaffecter 32% de son PIB** au finance-ment des dĂ©penses sociales et incitait ManuelValls Ă rĂ©former « en profondeur des politiquesde protection sociale et d'Ă©ducation » et à « rĂ©Ă©quilibrer le financement du systĂšme deretraites et Ă rationaliser la dĂ©pense publique ».« Il ne s'agit pas d'austĂ©ritĂ© mais de modernitĂ©.Il ne s'agit pas d'efforts mais d'investissements »prĂ©cise François Hollande cependant queMacron veut non pas « assouplir » les 35 heuresmais « les faire respirer » ! Certains parlent crĂ»ment : « Lâeuthanasie est unebonne solution aux problĂšmes, pour les couchesfaibles de la sociĂ©tĂ©, nâayant pas les moyens dese payer les soins mĂ©dicaux ». On rit devant lasatire quand Swift dans son Humble propositionpour empĂȘcher les enfants des pauvres enIrlande dâĂȘtre Ă la charge de leurs parents⊠pro-pose de les manger ! Venant de la consĆur litua-nienne de Marisol Touraine qui siĂšge avec elleau Conseil europĂ©en des Ministres de la santĂ©, labarbarie des mots fait frĂ©mir.
Lâobjectif du patronat, câest faire travaillerplus et payer moins, en finir avec les Ă©lectionsprudâhomales, rĂ©duire toujours plus les droitsdes chĂŽmeurs, geler le Smic et les retraites,niveler par le bas en supprimant les retraitesspĂ©cifiques aux cadres. Pas dâautres augmen-tations que celles de lâĂ©lectricitĂ©, du gaz, delâeau, de la santĂ©, des impĂŽts. Câest un dĂ©man-tĂšlement du programme de la RĂ©sistance, unedestruction sans prĂ©cĂ©dent de nos conquĂȘtessociales. Cela provoque logiquement l'Ă©cĆu-rement ou la dĂ©sespĂ©rance, terreau de la droi-te extrĂȘme et du Front National. Le gouvernement, applaudi par le patronat,sâemploie Ă nous convaincre que le travail aun coĂ»t afin de le rĂ©duire et dâaugmenter celuidu capital. Câest pourtant le travail qui produitles richesses et le capital qui le rançonne ! LâaustĂ©ritĂ©, câest faire la guerre aux pauvres,chose naturelle pour la classe dirigeante. Lapopulation doit se serrer la ceinture et tout le« modĂšle social », patiemment gagnĂ© de hautelutte, vole en Ă©clats. Une meilleure rĂ©partitiondes richesses est possible en prenant sur lecapital et ses gigantesques profits, dâoĂč lenĂ©cessaire refus des plans dâaustĂ©ritĂ© et de lamise en cause de la dĂ©mocratie.Contre lâaustĂ©ritĂ©, des luttes dâampleur etdâune radicalitĂ© encore inconnues Ă©mergenten Europe. En Belgique, sâest tenue la plus
grande manifestation sociale jamais vue. Sononde de choc continue. En Allemagne, lagrĂšve du rail a bloquĂ© le pays. En Espagne, lesmarches de la dignitĂ© mobilisent des millionsde personnes. Mais lâindignation sans per-spectives ne suffit pas. Il faut travailler Ă lafeuille de route. En Espagne, le mouvementsocial andalou de SĂ©ville contre la propriĂ©tĂ©fonciĂšre et celui, historique, de Marinaledatracent la voie. Le sol nây est plus une mar-chandise. Il est devenu un droit pour celui quiveut le cultiver ou lâhabiter. Il faut nous inspirer de ces expĂ©riences socia-les prĂ©cieuses qui posent la question de larĂ©partition des richesses, du droit au travail,de la propriĂ©tĂ© fonciĂšre et de la dĂ©mocratie. Lavictoire des femmes espagnoles contre laremise en cause du droit Ă lâavortement, celle,ici, Ă©clatante des femmes de mĂ©nage du RoyalMonceau forçant leur patron Ă cĂ©der sur tou-tes leurs revendications, prouvent que la luttepeut gagner. Alors ce que nous ferons en 2015 doit ressem-bler Ă cela : câest possible si nous prenonsnotre destin en main !
* OCDE Organisation de CoopĂ©ration et deDĂ©veloppement Ăconomiques
** PIB Produit Intérieur Brut
Prenons notre destin en main !
ISSN: 0757-2395 MENSUEL EDITE PAR LâU.J.R.E.PNM n° 321 - DĂ©cembre 2014 - 33e annĂ©e Union des Juifs pour la RĂ©sistance et lâEntraide Le N° 5,50 âŹ
La PNM aborde de maniĂšre critique les problĂšmes politiques et culturels, nationaux et internationaux. Elle se refuse Ă toute diabolisation et combat rĂ©solument toutes les manifestations d'antisĂ©mitisme et de racisme, ouvertes ou sournoises. La PNM se prononce pour une paix juste au MoyenâOrient basĂ©e sur le droit de l'Ătat d'IsraĂ«l Ă la sĂ©curitĂ© et celui du peuple palestinien Ă un Ătat.
Ă lire(en pages 6 et 7 les analyses de Dominique Vidal et Marius Schattner, et les arguments du camp de la paix...)
Ce vote est un pas important vers la paix et la création d'unEtat palestinien. C'est un signe fort qui marque le rÎle quela France, et au-delà de la France, l'Union Européenne, sedoivent de jouer pour parvenir à une paix juste et durable et
mettre fin au conflit israélo-palestinien qui n'a que trop duré depuis 67 ans.
Jérusalem, 2 décembre 2014 : Coup de barre à droite
L'AssemblĂ©e Nationale propose la reconnaissance par la France de lâĂtat de Palestine.
Netanyahou remercie deux ministres centristes
et annonce des élections anticipées au 17 mars 2015.
FRANCE / SOCIĂTĂLa dĂ©flation hante lâEurope J. Lewkowicz p. 4Urgences mĂ©dicales NM p. 3Interdiction de sortie du territoire NM p. 5
ISRAĂL / PALESTINEVers lâinternationalisation du conflit ? D. Vidal p.6Entretien avec ... M. Schattner p.6La parole au camp de la paix (communiquĂ©s) p.7
HISTOIRE / MĂMOIRECommĂ©morations (Fusillades du 15 dĂ©cembre 1941 et EntrĂ©e des troupes soviĂ©tiques Ă Auschwitz) p.2Le Prince de Ligne ... philosĂ©mite G-G. Lemaire p.9Guelfo Zamboni, consul Ă Salonique... L. Arrighi p.9Le dernier survivant du CNR parle... H. Levart p.5
HOMMAGESĂ Pierre DAIX et Ă Alexandre Grothendieck en p.3
POINT DE VUE - Cycle âĂtre juif au XXIe siĂšcleâComment je me sens juif en 2014 M. Winnykamen p.8Ătre juif ou ne pas ĂȘtre... S. Darracq p.8
CULTUREâLes inoubliablesâ de Jean-Marc Parisis S.Endewelt p.10Lâoeil tĂ©moin de Roman Vishniac B. Frederick p.10La chronique CinĂ©ma de ... L. Laufer p.11La chronique ThĂ©Ăątre de ... S. Endewelt p.12
BILLET DâHUMEUR
DĂ©fense de cracher par terre N. Mokobodzki p.4LE CLIN DâĆIL DE... N. Malviale p.2
Laura Laufer
LA PRESSE NOUVELLE
Magazine Progressiste Juiffondé en 1934
Editions :1934-1993 : quotidienne en yiddish, NaĂŻe Presse
(clandestine de 1940 à 1944)1965-1982: hebdomadaire en français, PNHdepuis 1982 : mensuelle en français, PNM
éditées par l'U.J.R.EN° de commission paritaire 061 4 G 89897
Directeur de la publicationJacques LEWKOWICZ
CoordinationN. Mokobodzki, T. Alman
Conseil de rédactionClaudie Bassi-Lederman, Jacques Dimet,Jeannette Galili-Lafon, Patrick Kamenka,
Nicole Mokobodzki, Roland WlosAdministration - Abonnements
Secrétaire de rédactionTauba-Raymonde Alman
RĂ©daction â Administration14, rue de Paradis
75010 PARISTel : 01 47 70 62 1 6Fax : 01 45 23 00 96
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2 PNM n°321 - Décembre 2014
Aors que nous cĂ©lĂ©brions en 2014 le 80e anniversaire de la NaĂŻe Presse nous allons en 2015 commĂ©morer le 70e anniversairede la victoire et tout au long de l'annĂ©e, celui de la libĂ©ration des camps. âIl faudra raconterâ disaient les dĂ©portĂ©s. C'est ce
Ă quoi nous nous emploierons, avec leur aide. Sans oublier que le verbe rĂ©sister se conjugue au prĂ©sent et que commĂ©morer câestaussi et d'abord agir pour que cela ne se rĂ©pĂšte pas. Ce Ă quoi s'emploie notre magazine juif, laĂŻque et progressiste, qui abordetous les aspects de l'actualitĂ© politique, Ă©conomique, sociale et culturelle. Vous ĂȘtes nombreux Ă nous en fĂ©liciter parce que l'ony trouve âquantitĂ© de choses qu'on ne trouve pas ailleursâ. Vous souhaitez comme nous que cela continue ? Alors, pourquoi nepas nous donner un coup de main sur le plan de la trĂ©sorerie ? En participant Ă notre souscription permanente, vous nous permet-trez dâĂ©toffer notre presse. Un grand merci dâavance !!! Jacques Lewkowicz PrĂ©sident de lâUJRE
SOUSCRIPTION PERMANENTE DE LâUJRE n° 65 (janvier Ă novembre 2014)
« à la vie »ou pourquoi et comment des déportées ont pu
parler de la déportation
Impossible dâen parler. NĂ©cessitĂ© de dire. Câest
de cette double contrainte que témoigne le
remarquable film de Zilbermann*. Il sâouvre en
noir et blanc sur une interminable file de person-
nes qui cheminent le long dâune voix ferrĂ©e.
Auschwitz. Puis, dans un baraquement, des voix
comptent en russe. Câest la libĂ©ration du camp par
lâarmĂ©e rouge. Fin du noir et blanc. Retour dans un
appartement vide, terriblement. Vite, la machine Ă
coudre reprend ses droits.
Ă la vie, câest lâhistoire de trois copines qui se
retrouvent pour passer quelques jours au bord de la
plage. Lâune est communiste, lâautre veut ĂȘtre rab-
bine, lâautre a divorcĂ© : câest une femme libre.
Trois anciennes dâAuschwitz. Deux dâentre elles y
sont entrées ensemble. Ensemble, elles ont fait la
marche de la mort. Puis elles se sont séparées et
ont fait leur vie, une vie, lâune Ă Paris, lâautre en
Hollande, la troisiÚme à Montréal. Elles se sont
cherchĂ©es. Lâune est passĂ©e Ă lâUJRE, rue Vieille
du Temple, passer une annonce pour en retrouver
une autre : « la Naïe Presse est lue dans le mondeentier » lui dit-on. Elles se sont retrouvées. A
Berck-plage, on cause, on fait la trempette, on fait
la dĂźnette. On fait mĂȘme shabbat et on chante les
chansons yiddish dâavant. On essaye des costu-
mes de bain. Et tout à trac, ça sort, ça vous étouf-
fait. On en parle, entre rires et larmes. On peut en
parler parce que les autres savent. On se retrouve-
ra, une fois par an, pour en parler.
Alors que va sâouvrir lâannĂ©e de commĂ©morationdu 70e anniversaire de la libĂ©ration des camps, peude films montreront avec autant de sobriĂ©tĂ© quâilest impossible dâen parler mais vital de dire. Onnâoublie pas. On vit avec ça, malgrĂ© ça et aussi Ă partir de ça. Est-ce un hasard si Pierre Durand ter-mine son dernier livre « La messe est dite » sur cevers du Chant de Buchenwald : « O Buchenwald,ich kann dich nicht vergessen » ?
* Jean-Jacques Zilbermann, Ă la vie, sortie le 26/11/2014, avec
Julie Depardieu, Johanna ter Steege, Suzanne Clément sans
oublier Wojciech Pszoniak, lâacteur « reprĂ©sentant » la NaĂŻePresse ni Hippolyte Girardot, « le mari » de Julie Depardieu.
CEREMONIES DU 73Úme ANNIVERSAIREDES FUSILLADES DU 15 DECEMBRE 1941v Mme Frédérique CALANDRA, maire du 20Ú
et la municipalité
v Les familles de fusillés : m Association Nationale des Familles de fusillés et Massacrés
de la Résistance Française et leurs ami(e)s (ANFFMRFA)m Familles des Fusillés du 15 décembre 1941 à Caen,
m Amicale de Chateaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt,
m Association pour le Souvenir des Fusillés du Mont Valérien etde l'Ile de France,
v Union des Juifs pour la RĂ©sistance et l'Entraide (UJRE)
v MĂ©moire des RĂ©sistants Juifs de la M.O.I. (MRJ-MOI)
v Le Comité Mémoire Vive Mémoire commune du 20Ú
v Le Comité d'Entente des Anciens Combattants du 20Ú
vous invitent à la cérémonie du 73Úme anniversairedes fusillades du 15 décembre 1941Samedi 13 décembre 2014 à 10h.
au Monument aux morts de la Mairie du 20Ăš
Place Gambetta, métro Gambetta (ligne 3) ou bus 26,60,61, 64,69
LâUJRE et MRJ-MOI vous invitent Ă©galement Ă rendre hommage aux fusillĂ©s de la section juive dela MOI et Ă la RĂ©sistance juive, accompagnĂ©s parles associations des familles de fusillĂ©s.
Samedi 13 décembre 2014 à 15h.au CimetiÚre du PÚre Lachaise
(RDV Ă la porte dâentrĂ©e situĂ©e rue des Rondeaux)
Lancer un film par des avant-premiĂšres au bĂ©nĂ©fice dâassociations, riche idĂ©e ! Nous avons ainsi puvoir « Ă la vie » lors de la soirĂ©e organisĂ©e au profit de la Maison de la Culture Yiddish (aprĂšs celledu Casip-Cojasor). Câest peu de dire que nous avons aimĂ©. Nous avons Ă©tĂ© bouleversĂ©s. Allez-le voir !
MĂ©moire
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Vie des associations
PNM n°321 - Décembre 2014 3
DĂ©cĂ©dĂ© le 2 novembre Ă lâĂąge de92 ans, Pierre Daix laisse uneĆuvre profonde et multiforme
de romancier, dâessayiste, de critique lit-tĂ©raire et dâhistorien de lâart. Elle est toutentiĂšre marquĂ©e par son engagementtrĂšs jeune, sa dĂ©portation, son amitiĂ©avec Pablo Picasso et sa collaborationavec Aragon Ă la tĂȘte de la rĂ©daction desLettres françaises entre 1948 et 1972.Pierre Daix a 17 ans quand il adhĂšre auParti communiste français, en 1939,alors que celui-ci vient dâĂȘtre interditpar Ădouard Daladier, prĂ©sident duConseil, radical et cosignataire desaccords de Munich qui livrent laTchĂ©coslovaquie Ă Hitler. Le jeunehomme est alors Ă©tudiant en histoire.Mais en 1940, il quitte lâuniversitĂ©. Lafacâ, mais pas lâhistoire. Lâhistoire, il yentre au contraire de plain-pied.Paris est occupĂ©, la France est divisĂ©een deux, au Nord aux mains desAllemands, au Sud Ă celles de PĂ©tain etde ses sbires. Le 11 novembre 1940,Pierre Daix est lâun des organisateursde la manifestation des Ă©tudiants Ă lâArc de Triomphe de lâĂtoile. Il estarrĂȘtĂ© et relĂąchĂ© en fĂ©vrier 1941. Pas
J e commence Ă souffrir Ă 13h30,assez pour ne pas ĂȘtre en Ă©tat demarcher jusquâĂ une borne de
taxi. Suis inscrite aux urgences Ă 14h30. PrĂ©voir deux heures dâattente.Je serai prise en charge Ă 21h30 etquitterai lâhĂŽpital vers 3h du matin. Aux urgences mĂ©dicales, la sociĂ©tĂ©vient se soigner de ces maladies chro-niques que sont la misĂšre, le chĂŽmage,le grand Ăąge, la solitude. Au fil des heu-res, je peux admirer la trĂšs hauteconception que les urgentistes ont deleur mission : haute par la qualitĂ© tech-nique des soins, haute par lâhumanisme
pour longtemps : la police de VichylâapprĂ©hende Ă nouveau en 1942. Il estremis aux Allemands qui le torturentavant de lâenvoyer au camp de concen-tration de Mauthausen en Autriche. LĂ ,il rejoint les rĂ©sistants organisĂ©s dans lecamp. LâexpĂ©rience de lâhorreur le mar-quera pour la vie. Lui et son Ćuvre lit-tĂ©raire. En 2008, il Ă©crit ainsi :
« La dĂ©dicace Ă mes amis morts Ă vingtans de mon roman La DerniĂšreForteresse, en 1950, visait non seule-ment Ă briser lâoubli, mais Ă rendre jus-tice Ă mes camarades. Jâai rĂ©cidivĂ© entĂ©moignant sur eux dans Jâai cru aumatin, en 1976, puis avec mesHĂ©rĂ©tiques du PCF, quatre ans plustard. Je me rends compte que les deuxderniĂšres Ă©ditions de ma biographiedâAragon, ainsi que Tout mon temps,puis les Jalons pour lâhistoire dâunjournal et mon BrĂ©viaire pourMauthausen, enfin le prĂ©sent tĂ©moi-gnage [DĂ©nis de mĂ©moire*] participentdâune seule et mĂȘme entreprise de rĂ©vi-sion due aux rĂ©vĂ©lations de lâhistoire.Je la considĂšre comme un devoirenvers ceux qui restent, Ă jamais, lesmiens. »
qui y prĂ©side. Pas une seconde, ils necĂšdent Ă la tentation de soulager par ungeste facile et dâĂ©vacuer le problĂšme.Chaque malade bĂ©nĂ©ficie dâun entre-tien sĂ©rieux, dâun bilan rigoureux, cha-cun repart avec sa feuille de route :prescription et conseils. Qui avec untaxi, qui avec le SAMU social.Jâadmire aussi la dignitĂ© de tous lespatients sans exception. Ils compren-nent manifestement que leur souffranceest prise en compte pour ce quâelle est.
Les causes de lâinconfort sont ailleurs.Dans lâinsuffisance scandaleuse descrĂ©dits allouĂ©s Ă lâhĂŽpital public. Nous
Cela pourrait ĂȘtre un rĂ©sumĂ© de sa viemilitante. La RĂ©sistance ; la dĂ©portation; le passage, Ă la LibĂ©ration, au cabinetde Charles Tillon au ministĂšre de lâAir; la rĂ©daction en chef de lâhebdomadai-re Les Lettres Françaises que dirigeLouis Aragon ; la collaboration au men-suel du PCF La Nouvelle Critique ; lavaste production littĂ©raire â seizeromans dont La DerniĂšre Forteresse,Classe 42, Les Chemins du printemps,LâOmbre de la Forteresse, Une maĂź-tresse pour lâĂ©ternitĂ©.Mais son principal hĂ©ritage demeureson Ćuvre dâhistorien de lâart. Câest en1945 quâil rencontre Picasso. NaĂźt alorsune amitiĂ© qui durera jusquâĂ la mortdu peintre, en 1973. Pierre Daix estlâauteur, avec Georges Boudaille etJoan Rosselet, dâun ouvrage fondamen-tal : Picasso, 1900-1906 : catalogueraisonnĂ© de l'Ćuvre peint.** Mais ilĂ©crit aussi sur Monet, Gauguin, lecubisme ou encore sur Soulages,Alechinsky ou Zao Wou-Ki. Il est lâau-teur, chez Gallimard, dâun essai sur lâartmoderne qui fait rĂ©fĂ©rence :LâAveuglement devant la peinture(1971).
pouvons tous un jour nous retrouverdans un service dâurgence. Nous sou-haitons tous y trouver dans des dĂ©laisdĂ©cents lits, Ă©quipements et personnel.Ne devrions-nous pas tous voter cont-re les coupes budgĂ©taires, pour notredignitĂ©, pour celle de tous ?
En sortant, je vois quatre hommesqui dorment sur des bancs dans lasalle dâattente. Ce soir-lĂ , pour eux,lâurgence câest de ne pas dormir aufroid. Personne ne les priera de sortir.Le chauffeur de taxi qui me ramĂšnechez moi peste contre ces Ă©trangersqui encombrent nos lits avec leurs
Pierre Daix, un engagement de jeunessepar Bernard Frederick
Urgences mĂ©dicalesmaladies. Câest lâexplication facile eterronĂ©e quâon lui a soufflĂ©e. Et il nemanque pas de souffleurs. Pourtant,ce nâest pas ce que jâai vu. Ce que jâaivu, câĂ©tait des ĂȘtres humains: unĂ©chantillon reprĂ©sentatif de la sociĂ©tĂ©française. Ce que jâai vu, câest lerĂ©sultat dĂ©sespĂ©rant du vol des pauv-res par des politiques publiques dedroite et par les idĂ©ologues de lâextrĂȘ-me droite.
Lâurgence, telle quâelle mâapparaĂźt cesoir, câest de rendre sa santĂ© au corpsĂ©lectoral. Ce soir-lĂ , jâai aussi souf-fert Ă mon corps social. NM
Gendre dâArtur etde Lise London,dont il a Ă©pousĂ© lafille en troisiĂšmesnoces en 1967,Pierre Daix estbouleversĂ© parl â intervent ionsoviĂ©tique contrele Printemps dePrague, en aoĂ»t 1968. Il rompt avec lePCF en 1971. Il prend alors une positionfarouchement anticommuniste qui lepoussera Ă collaborer Ă la rĂ©daction duQuotidien de Paris (1980-1985) et Ă dâautres publications de droite. Ilexplique cette brutale (r)Ă©volution idĂ©o-logique dans ses livres Jâai cru au matin(1976) et Tout mon temps (2001). Sansjamais renier, cependant, son engage-ment de jeunesse et ses camarades deRĂ©sistance et de dĂ©portation, « les miens». En tĂ©moigne, son dernier roman, Lesrevenantes***, consacrĂ© aux femmesrescapĂ©es des camps.
* Collection TĂ©moins, Gallimard. Paris 2008
** Ides et Calendes, Paris, 1966
*** Fayard, Paris 2008
Alexandre Grothendieck vient dequitter ce monde avec lequel ilétait depuis longtemps brouillé.
Il Ă©tait nĂ© avec le siĂšcle de parents juifs etanarchistes qui boudĂšrent la coutumebourgeoise du mariage. A dĂ©faut dâunnom, son pĂšre, Alexandre Shapiro, luidonna un prĂ©nom. Selon un itinĂ©raireclassique, le couple quitta en 1933 uneAllemagne nazifiĂ©e. Peu aprĂšs ils lais-saient leur fils en France pour se battreaux cĂŽtĂ©s de la RĂ©publique espagnole.Grothendieck a 11 ans quand il est inter-nĂ© avec sa mĂšre au camp de Rieucros, ilen a 14 quand son pĂšre est assassinĂ© Ă Auschwitz. Il trouvera refuge Ă laMaison dâenfants du Secours Suisse au
Chambon sur Lignon, La Guespy. PrĂ©coce Ă lâinstar dâun Ăvariste Galois, ilfut lâun des gĂ©ants parmi les mathĂ©mati-ciens du XXe qui en compta beaucoup.Cela lui valut de se voir attribuer la pres-tigieuse mĂ©daille Fields quâil refusa dâal-ler chercher Ă Moscou. Aussi fĂ©rocementantimilitariste quâEinstein*, il sâopposa Ă la bombe atomique et, dans la foulĂ©e, Ă lâĂ©nergie nuclĂ©aire, ce qui lâamena Ă fon-der, en 1970, Ă lâimage de scientifiquesdâoutre-Atlantique, un mouvement Ă©co-logiste et une revue : Survivre.DâaprĂšs RĂ©coltes et semailles, mĂ©moiresmis en ligne par des proches, oĂč il se livreĂ une introspection qui confine Ă lâauto-analyse, il estime avoir eu trois passions :
« La premiĂšre Ă se manifester dans mavie a Ă©tĂ© ma passion pour les mathĂ©ma-tiques⊠elle mâavait servi pendant tren-te ans Ă me sĂ©parer dâune enfancereniĂ©eâŠla deuxiĂšme passion dans ma viea Ă©tĂ© la quĂȘte de la femme qui a Ă©tĂ© laseule grande force de maturation dansma vie (Ce solitaire, ce marginal, eut toutde mĂȘme cinq enfants). »La derniĂšre passion fut la quĂȘte de lavĂ©ritĂ©, quâil oppose au savoir, trĂšs prochetelle quâil la dĂ©crit, du mouvement desidĂ©es chez Platon. Dans sa pĂ©riodemathĂ©matique, il ne bouda pas le ban-quet, le festin des idĂ©es. Ensuite, il allaittourner le dos Ă cette RĂ©publique queforme la communautĂ© des mathĂ©mati-
Alexandre Grothendieck, un enfant du siĂšcleciens. La passion de larecherche lâa toujoursanimĂ©. A 86 ans,Grothendieck, qui sâĂ©-tait dĂ©jĂ Ă©loignĂ© depuislongtemps, nous quitte de façon un peuplus dĂ©finitive, nous laissant des souve-nirs, une Ćuvre et des questions. Il a eutout ce quâun homme peut demander Ă lavie : des passions, une Ćuvre, la gloire,des enthousiasmes, des colĂšres, des cha-grins. Une vie, en somme ! NM
NDLR Einstein sâĂ©tait exilĂ© en Suisse pourĂ©chapper au service militaire. Il avait en horreurtoute forme dâenrĂ©gimentement. Sâil a contribuĂ©Ă fabriquer « Little boy », la premiĂšre bombe ato-mique, câest quâil estimait nĂ©cessaire de prendreles nazis de vitesse.
Hommage
Société
4 PNM n°321 - Décembre 2014
La plupart des Ă©conomistes lereconnaissent : lâEurope est au
bord de la dĂ©flation. La hausse desprix diminue depuis plusieurs trimestresau point dâatteindre 0,4 % au cours dutroisiĂšme trimestre 2014, bien en des-sous des 2 % qui pourraient Ă©carter laperspective dĂ©flationniste. Encore unpeu et elle deviendrait nĂ©gative. Il fautcomprendre que la dĂ©flation est le plusgrand danger qui menace une Ă©cono-mie. En effet, elle se traduit par unebaisse gĂ©nĂ©ralisĂ©e des prix et des salai-res. Sous lâeffet de la baisse des prix, lesentreprises, qui cherchent Ă garder leurmarge de profit, baissent les salaires cequi diminue la demande et entraĂźne Ă nouveau la baisse des prix. A ce phĂ©no-mĂšne autoentretenu sâajoute le fait que,voyant les prix baisser, les acheteurspotentiels dĂ©cident de retarder leursachats, anticipant le bĂ©nĂ©fice de prixplus faibles Ă lâavenir, ce qui vient Ă nouveau abaisser la demande et dĂ©mul-tiplier ainsi lâeffet dĂ©flationniste. Maisla chiquenaude initiale de ce mĂ©canismerĂ©side dans le niveau Ă©levĂ© du chĂŽmagequi pĂšse sur les salaires et nourrit ainsilâinsuffisance de la demande. Le Japon,qui a connu une vague dĂ©flationniste, ily a vingt ans, peine encore aujourdâhuiĂ en sortir.Toutefois, cette situation est encoreaggravĂ©e du fait que les Ă©normes crĂ©ditsaccordĂ©s par la BCE* aux banques, aulieu de servir Ă des crĂ©ations dâemplois,ce qui aurait pu contrebalancer la ten-dance Ă lâaugmentation du chĂŽmage,ont Ă©tĂ© utilisĂ©s pour la spĂ©culation finan-ciĂšre, rĂ©crĂ©ant une bulle financiĂšre sus-ceptible dâĂ©clater Ă nouveau Ă toutmoment.Certes, la pensĂ©e dominante prĂ©tendque lâinsuffisance du niveau de lâemploiest due Ă un coĂ»t du travail excessif et Ă une dette publique trop importante. Enfait, la baisse du coĂ»t du travail ne peutgĂ©nĂ©rer quâune insuffisance de la
demande tandis que la dĂ©tĂ©rioration desservices publics ne peut aboutir quâĂ une diminution de lâefficacitĂ© Ă©cono-mique. Ainsi, par exemple, de mauvaisservices Ă©ducatifs gĂ©nĂšrent des tra-vailleurs sous-qualifiĂ©s. En 2012, 30 %de la valeur crĂ©Ă©e par les entreprises a defait Ă©tĂ© distribuĂ©e en dividendes et intĂ©-rĂȘts. VoilĂ un coĂ»t du capital que lâonpourrait largement rĂ©duire si lâon vou-lait vraiment accroĂźtre la compĂ©titivitĂ©de lâĂ©conomie française.Si lâon veut Ă©viter de tomber dans le cer-cle vicieux dĂ©flationniste, il faut aug-menter les revenus des salariĂ©s et deleurs familles pour soutenir la demandeet relancer massivement les servicespublics, notamment Ă©ducatifs et derecherche, de façon Ă dĂ©velopper la pro-ductivitĂ© et lâinnovation. Le finance-ment nĂ©cessaire Ă de telles mesures estpossible comme nous lâavons dĂ©jĂ vudans la PNM. Il faut, Ă cet effet, que laBCE* rachĂšte les titres de dettepublique Ă©mis par les pays europĂ©enspour le financement des servicespublics, grĂące Ă sa propre crĂ©ationmonĂ©taire. Un « Fonds de dĂ©veloppe-ment europĂ©en » pourrait, alors,recueillir cette monnaie. Il permet-trait dâassurer le financement desĂ©conomies europĂ©ennes grĂące Ă descrĂ©dits sĂ©lectifs dont le taux dâintĂ©rĂȘtserait inversement proportionnel aunombre dâemplois crĂ©Ă©s jusquâĂ attein-dre le niveau zĂ©ro, voire nĂ©gatif, pourles cas de plus fortes crĂ©ations dâem-plois. Cette nouvelle politique du crĂ©ditnĂ©cessite, pour ĂȘtre correctement miseen Ćuvre, sa mise en place par un pĂŽlepublic de financement rĂ©sultant de lafusion des actuels organismes publics,des banques mutualistes et nationali-sĂ©es.Telle est la politique qâun gouvernementvĂ©ritablement de gauche devrait mettreen Ćuvre immĂ©diatement pour conjurerle spectre de la dĂ©flation. * BCE : Banque Centrale EuropĂ©enne
La dĂ©flation hante lâEurope !par Jacques Lewkowicz
Economie
Hannibal est aux portes de Rome, sâĂ©criait-on Ă Rome. Du moins Romerestait-elle romaine, ce qui permit Ă lâempire romain dâen finir avec lâem-
pire carthaginois. En janvier 1939, quand Barcelone est tombĂ©e aux mains desfranquistes, quatre colonnes convergeaient vers Madrid : laquelle prendrait laville ? « La cinquiĂšme colonne », rĂ©pondit Franco. Lâennemi intĂ©rieur, qui estdĂ©jĂ dans Rome, si lâon me passe le raccourci.Quel rapport avec lâactualitĂ©? Celui qui ne le perçoit pas serait-il dĂ©jĂ tombĂ©aux mains de la cinquiĂšme colonne ? Câest vous et moi, un bon pĂšre defamille, pardon : un bon parent ! Il bosse, cherche Ă assurer ses fins de mois,Ă payer ses impĂŽts. Le petit va-t-il trouver un emploi ; enfin, un contrat parcequâun emploi, faut pas rĂȘver. Lire et relire, Fahrenheit 451. JusquâĂ la derniĂšre page, jusquâĂ la derniĂšreligne. Le roman se dĂ©roule Ă une Ă©poque oĂč la lecture est interdite, les lecteurspersĂ©cutĂ©s. Certains gagnent une forĂȘt bibliothĂšque vivante, oĂč chacun rĂ©citelâĆuvre quâil a mĂ©morisĂ©e pour la sauver de lâoubli. Et Bradbury dâapostro-pher ses hĂ©ros, ces « hommes livres », ces hommes libres en termes sĂ©vĂšres :« Ne pensez pas que vous soyez grand-chose, car quand vous aviez les livres,quâest-ce que vous en avez fait ? »Donc, aux portes de Rome, la guerre. Celle qui fait peur. Ă ceux notammentqui ne la font pas, ne la dĂ©cident pas, mais payent des impĂŽts, sans le savoirdâailleurs, pour que dâautres la fassent. La situation en Ukraine ne risque-t-ellepas de provoquer une guerre totale ? Par guerre totale, entendez une guerre quinous atteigne aussi nous. Parce quâailleurs, on meurt pas dizaines de milliers,par centaines de milliers. DĂ©jĂ au XXe siĂšcle, on ne comptait plus en mortsmais en mĂ©gamorts : « mĂ©ga » câest un million. LâunitĂ© de compte avait chan-gĂ©. Mais enfin, tant quâon a un chez soiâŠTant quâon a un chez soi, on y rentre et on ouvre la tĂ©lĂ©vision, pour oublier.On y trouve le meilleur et le pire. Pas dans les bonnes proportions, câest tout.Et mĂȘme si on ne la regarde pas â les gens intelligents, câest bien connu, laboudent â elle vous rattrape. Essayez dâouvrir votre ordinateur sans ĂȘtre inter-pellĂ© par des questions brĂ»lantes : on vu la petite culotte de x, y a dit un grosmot, Bill Clinton a appelĂ©e sa chienne Monica⊠Si encore il nây avait que lâUkraine ! Mais regardez vers le Proche Orient oule Moyen Orient. Gaza, câest fini. On a changĂ© de feuilleton, de chaĂźne.Maintenant, câest Daesh. La barbarie Ă lâĂ©tat pur. Merci au Monde diploma-tique dâavoir rĂ©sumĂ© bien des analyses et rĂ©pondu Ă bien des questions par uneformule que lâou voudrait avoir inventĂ©e : « Daesh, le monstre providentiel ».Que nous sommes prĂȘts, comme la Turquie, Ă combattre jusquâau dernierKurde.Pendant ce temps lĂ , dĂ©pĂ©rissement peu lĂ©niniste de lâĂtat. LĂ©nine le voulait.Le nĂ©olibĂ©ralisme lâa fait. Plus dâindustrie, plus de travail, plus de droit au tra-vail, plus de droit du travail. Fin programmĂ©e des conventions collectives :cela signifie des salaires Ă la carte, Ă la tĂȘte du client. Sans compter quâil estplus avantageux dâembaucher des jeunes. Tant pis pour les avantages Ă lâan-ciennetĂ©. Lâune des bases de calcul des retraites.Jâai voulu vĂ©rifier la date des guerres puniques, Hannibal aux portes : monĂ©cran sâest saturĂ© dâinformations sur un jeu vidĂ©o, pardon un game, un wargame : cela sâappelle Total war. Mumuse ! Heureusement nos idĂ©ologues sontlĂ pour nous rappeler au sens du civisme. Ainsi le courageux maire de BĂ©ziersa-t-il pris une mesure forte et qui ne coĂ»tera rien Ă ses administrĂ©s : il leurinterdit de cracher par terre. Le maire câest un certain MĂ©nard, qui passe pourproche du Front National. Je nâirai pas vĂ©rifier. Ce qui est certain câest quâil adĂ» quitter la prĂ©sidence de Reporters Sans FrontiĂšres le jour oĂč câest tombĂ©dans le domaine public, que MĂ©nard Ă©tait payĂ© par la CIA, par la NationalEndowment Foundation, enfin par plein de dĂ©mocrates dâoutre-Atlantique,pour mener campagne contre Cuba. Câest bien quâil soit devenu patriote etquâil vienne dĂ©fendre « ma » France. Câest lui, notre cinquiĂšme colonne, luiet lâami Zemmour, son invitĂ© dâhonneur. Pas prendre au tragique. Mais pren-dre au sĂ©rieux. 24 novembre 2014
DĂ©fense de cracher par terre !par Nicole Mokobodzki
Billet dâhumeur
MĂ©moire70e anniversaire de lâentrĂ©e
des troupes soviétiques à Auschwitz
Dans le cadre de la Journée mondiale decommémoration de l'Holocauste et de pré-
vention des crimes contre l'HumanitĂ©,lâAssociation Fonds MĂ©moire dâAuschwitz (AFMA) vous invite le
Mardi 27 janvier 2015 Ă 10h00 Ă lâancienne gare de Bobigny
pour commĂ©morer la libĂ©ration dâAuschwitz dans cette Gare de la dĂ©portation dâoĂčsont partis 21 convois, soit 22 407 Juifs dont plus de 3 500 enfants internĂ©s Ă Drancy.La cĂ©rĂ©monie sera ouverte par lâinauguration de la grande Halle aux marchandises,prĂšs des voies ferrĂ©es dâoĂč les internĂ©s Ă©taient embarquĂ©s dans des wagons Ă bestiaux.Allocution du PrĂ©sident de lâAFMA.
Venez nombreux pour se souvenir et rendre hommage Ă ces victimes de l'idĂ©ologienazie appliquĂ©e par l'armĂ©e allemande et par le gouvernement de Vichy. AccĂšs Gare de Bobigny : 69-151 avenue Henri Barbusse/ Parking assurĂ©. Bus 151depuis la porte de Pantin, arrĂȘt gare grande ceinture. Pour tout renseignement :AFMA 01 48 32 07 42, [email protected]
Ă vos agendasRĂ©servez votre vendredi 12 janvier, Ă 18 heures, pour uneprojection Ă lâAuditorium de la Mairie de Paris du film « Les rĂ©sistants Juifs de la MOI » coproduit par MRJ-MOIet MĂ©tis Film.RĂ©servations au 06 08 86 77 10 ou par mĂšl Ă [email protected]
Les mots pour le direpar Maurice Cling
Monde
Un mois et demi aprĂšs lâattentat ter-roriste contre le World Trade
Center, alors que la population amĂ©ri-caine Ă©tait sous le choc, les Ătats-Unisse sont dotĂ©s de lois liberticides dontcertains juristes nâont pu sâempĂȘcher depenser quâelles guettaient dans un tiroirune occasion propice de paraĂźtre augrand jour. Liberticides en ce sens aussiquâil sâagit de lois dâexception qui por-tent atteinte au droit amĂ©ricain. Ellesconstituent en effet une violation delâhabeas corpus qui garantit lâindividucontre la dĂ©tention arbitraire, câest-Ă -dire sans procĂšs Ă©quitable, et permettentla « dĂ©tention arbitraire ou cruelle ».Voir les conditions de dĂ©tention Ă Guantanamo. Cela rappelle curieuse-ment, par certains cĂŽtĂ©s, les mesuresdâexception prises dans les paysdâAmĂ©rique du Sud au temps des dicta-tures. Ces mesures ont Ă©tĂ© aggravĂ©es en2004 par le Patriot Act de Bush. Sâagissait-il vraiment et uniquement delutter contre le terrorisme et cet appareiljuridique Ă©tait-il le moyen le plus effi-cace de le faire ? On sait aujourdâhuique les Ătats-Unis avaient Ă©tĂ© informĂ©sde la prĂ©paration dâun attentat et nâontpas pris les mesures nĂ©cessaires pour
lâempĂȘcher. On a pu constater que lafamille Ben Laden nâavait pas subi, elle,la moindre restriction de ses libertĂ©s, parexemple, de circulation. Il est vrai queladite famille nâest pas Ă©trangĂšre Ă lafortune de la famille Bush. On constateaussi que le terrorisme se porte bien.Ă son tour, et toujours sous prĂ©texte delutter contre le terrorisme, la Francevient de se doter dâune loi « antiterro-riste » instaurant le dĂ©lit dâintentionpuisquâĂ la demande du seul ministĂšrede lâIntĂ©rieur, sans aucune dĂ©cision dejustice, il est possible dâinterdire Ă uncitoyen français « la sortie du territoirede personnes, majeures ou mineures,sur lesquelles pĂšse un soupçon devolontĂ© de rejoindre des zones de guer-re. » Le passeport est confisquĂ©, enĂ©change de quoi lâintĂ©ressĂ© se voitremettre un reçu ! Dâautre part, la dĂ©ci-sion est signifiĂ©e Ă tous les transpor-teurs de tous les pays de lâespaceSchengen. Certains mauvais esprits ont observĂ©que lâUkraine nâest pas considĂ©rĂ©ecomme zone de guerre. Libre donc auxmercenaires dâaller prĂȘter main forte Ă ceux qui, sur place, Ă©difient la paix et ladĂ©mocratie en battle dress. NM
Interdiction de sortie du territoire
Lisez et faites lire les interviewsaccordées par Robert Cham-beiron, le dernier survivant du
CNR dont il fut le SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral,parues dans un livre dont le titre,« RĂ©sistant », flamboie et instruit*.Lâauteur sera bientĂŽt centenaire.Nous le lui souhaitons. Sa mĂ©moire
est intacte. Lire et faire lire sonouvrage pour deux raisons. La premiĂšre : il nous plonge dansune narration scrupuleuse de la for-mation du CNR, des dangers encou-rus par ses membres pour se contac-ter, se rĂ©unir, analyser les situations,prendre les dĂ©cisions. Le courage nâapas fait obstacle aux hĂ©sitations, auxdisputes. La lĂąchetĂ© de certains nâestpas dissimulĂ©e. On croit connaĂźtremais on dĂ©couvre combien la tĂąchede Jean Moulin fut difficile, quâil futsouvent en butte Ă une hostilitĂ© inju-rieuse de la part dâun futur panthĂ©-onisĂ©. Le rĂ©cit nâest pas anecdotiqueĂ la diffĂ©rence de trop nombreusesapprĂ©ciations littĂ©raires ou cinĂ©mato-graphiques qui dĂ©naturent laRĂ©sistance. LâĂ©volution de lâopinionpublique, la vision stratĂ©gique ducombat, les conflits internes surmon-tĂ©s dans lâintĂ©rĂȘt patriotique, les rap-ports parfois conflictuels avec lesalliĂ©s ou les services londoniens de laFrance libre, le dĂ©bat interne concer-nant le dĂ©clenchement de lâinsurrec-tion parisienne et la trĂȘve sont dĂ©critsavec prĂ©cision, sâinscrivant dans unmouvement ascendant dont laRĂ©sistance populaire fut le ferment.
La seconde raison de lire et faire lirece passionnant tĂ©moignage est quâilnous motive dans lâindispensable luttepour prĂ©server les acquis du CNR. LaFrance sâĂ©tait relevĂ©e de la situationdĂ©sastreuse oĂč lâavait plongĂ©e la guer-re. Aujourdâhui, le Medef mĂšne uneattaque en rĂšgle contre tout ce quiavait Ă©tĂ© conquis de haute lutte. Lesouvenir de la victoire de 1945 serahonorĂ© lâan prochain.
Comment ne pas ĂȘtre rĂ©voltĂ© en cesjours commĂ©moratifs quand un prĂ©-tendu philosophe ose nous dire que lesjuifs se sont laissĂ©s conduire dans lescamps de la mort comme des mou-tons** ? Salir ainsi des milliersdâhommes, de femmes, dâenfants, defamilles, martyrisĂ©s, assassinĂ©s, oui,câest rĂ©voltant. Comment ne pas ĂȘtreaussi rĂ©voltĂ© quand le philosophe offi-ciel BHL ose nous dire que les juifs nese laissent plus faire aujourdâhuicomme ils le firent dans les annĂ©estrente. Bien piĂštre historien : les juifsde lâĂ©poque ont largement participĂ© aumouvement antifasciste. Olga Bancic,Marcel Rayman, MaĂŻa et GeorgesPolitzer ne sont pas entrĂ©s par hasarden RĂ©sistance. Elles et ils y ont Ă©tĂ© prĂ©-parĂ©s par leurs activitĂ©s dans de multi-ples associations civiques.
Oui, une telle allĂ©gation est rĂ©vol-tante. En mĂ©moire de toutes celles etde tous ceux, sublimĂ©s dans le livrede Robert Chambeiron, qui aux heu-res sombres, en sacrifiant leur vie, ontrĂȘvĂ© de jours heureux, nous avons Ă cĆur de croire, plus que jamais auxlendemains qui chantent. Ce livre estutile dans lâaffron-tement politiqueactuel dont lâunedes caractĂ©ristiquesest le lavage de cer-veaux auquel se li-vrent les mĂ©dias sans parler des asser-tions pĂ©tainistes du Front National.Les entretiens de Robert Chambeironaident Ă Ă©clairer trop de consciencesbrouillĂ©es par les mĂ©dias, par lesassertions pĂ©tainistes du FrontNational et plus gĂ©nĂ©ralement desidĂ©ologues de lâextrĂȘme droite.
La PNM sây emploie de son cĂŽtĂ©.
* Robert Chambeiron,RĂSISTANT - Entretiens avecMarie-Françoise Bechtel, Ăd.Fayard, 192 p., 15 âŹ
** Ă (re)lire de LucienSteinberg, Pas comme desmoutons : Les Juifs contreHitler, Ed. La Balustre, 2012,192 p., 10 âŹ
Le dernier survivant du Conseil National de la RĂ©sistance parle :Ăcoutons-le par Henri Levart
Une résolution sur la lutte contrela glorification du nazisme a été
adoptĂ©e par la TroisiĂšme Commis-sion de lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale desNations Unies, Ă lâinitiative de laRussie. Les membres des NationsUnies expriment leur « profonde prĂ©-occupation » devant « la glorificationde toute forme de mouvement nazi, denĂ©onazisme et des anciens membresde la Waffen SS, y compris par laconstruction de monuments commĂ©-
moratifs et la tenue de manifestationspubliques ». La Commission con-damne Ă©galement lâaugmentation dunombre dâincidents ayant natureraciste dans le monde entier. Seulstrois Ătats ont votĂ© contre* : les Ătats-Unis, le Canada et⊠lâUkraine.
BF23/11/20114
* NDLR 55 pays se sont abstenus, dont ceuxde l'Union européenne, dont la France.
Les Nations Unies contre la glorification des nazis
C e « billet » inaugure une série portant sur ces termes qui nous trom-pent⊠et qui sont utilisés pour nous tromper.
Ne soyons pas dupes, appelons un chat un chat.
On le sait, les mots ne sont pas innocents. Par exemple, Tsahal. Le gou-vernement israélien relayé par les grands médias occidentaux a populariséle nom hébreu de son armée. Quelle autre armée dans le monde bénéficiedans les médias d'une telle appellation particuliÚre ? Aucune, à ma connais-sance, ainsi classée à part, et dont la résonance biblique la sacralise et jus-tifie par conséquent tous les actes, y compris ceux qui sont criminels.Ne soyons pas dupes, et appelons un chat un chat.
PNM n°321 - Décembre 2014 5
La question kurde
La PNM signale le livre de Sylvie Janet Pascal Torre, La réponse kurde.
Les auteurs ont eu Ă cĆur de faire com-prendre la question kurde Ă ceux qui,comme l'immense majoritĂ© d'entre nous,ne la connaissent pas. Il suffit pour seprocurer ce livre de s'adresser Ă lâAssociation France-Kurdistan - 3, rueRibiĂšre - 75019 Paris, qui le fait parveniren Ă©change d'un chĂšque de 8 âŹ.
RĂ©sistance
Ă lire
6 PNM n°321 - Décembre 2014
Ăune large majoritĂ©, le 2 dĂ©cemb-re, lâAssemblĂ©e nationale aadoptĂ© une rĂ©solution appelant
le gouvernement Ă reconnaĂźtre lâĂtat dePalestine. Il ne sâagit pas dâun cas isolĂ© :les parlements britannique, irlandais,espagnol et slovĂšne en ont fait autant. LaSuĂšde est allĂ©e plus loin : lâexĂ©cutif aeffectuĂ© ce geste. Et le vote françaispourrait inspirer dâautres pays delâUnion europĂ©enne, Ă commencer parle Danemark. Le Parlement deStrasbourg votera, lui, Ă la mi-dĂ©cembre.Pourquoi cette vague sans prĂ©cĂ©dent ?Trois raisons lâexpliquent. La premiĂšre, câest lâhorreur de lâagres-sion israĂ©lienne contre la bande deGaza cet Ă©tĂ©. Il y a six ans, lâinterven-tion de lâarmĂ©e entraĂźna la mort de 1 315 Palestiniens (et 13 IsraĂ©liens).Cette fois, ce « record » a Ă©tĂ© pulvĂ©risĂ© :selon le ministĂšre palestinien de laSantĂ©, 2 145 morts, dont 80 % de civils(et 70 IsraĂ©liens, dont 64 soldats). Ce terrible spectacle, qui dura prĂšs dedeux mois, avec son flot dâimagesinsupportables â dont celle, inoublia-
ble, des enfants tuĂ©s sur la plage â, sou-leva une grande colĂšre aux quatre coinsdu monde. Si bien que, malgrĂ© la pĂ©rio-de estivale, des manifestations massi-ves parcoururent les rues des villes,contrastant avec la complaisance desgouvernements vis-Ă -vis du « droit Ă ladĂ©fense » dâIsraĂ«l.
La deuxiĂšme raison, ce sont les provoca-tions multipliĂ©es par BenyaminNetanyahou depuis le cessez-le-feu Ă Gaza, comme sâil voulait provoquer ledĂ©clenchement dâune troisiĂšme Intifada :Ă dĂ©faut dây parvenir, il a suscitĂ© uneescalade de violences de part et dâautre.Rappelons notamment lâannexion de400 hectares de terres cisjordaniennes(la plus vaste depuis 1967), lâannonce dela construction de milliers de logementsĂ JĂ©rusalem-Est et la modification de laLoi fondamentale pour dĂ©finir IsraĂ«lcomme « Ătat-nation du peuple juif ».Plus dangereux encore, le gouvernementa remis en cause le statu quo sur lâespla-nade des MosquĂ©es, oĂč des groupes deJuifs ultra-orthodoxes et ultra-nationalis-tes, dont des partisans de leur destruction
au profit de la reconstruction du Temple,ont Ă©tĂ© autorisĂ©s Ă dĂ©filer. Bref, le dĂ©pu-tĂ© socialiste Alexis Bachelay nâa pas tortdâaccuser le Premier ministre israĂ©liende « faire un bras dâhonneur Ă 99 % dela planĂšte ».La troisiĂšme raison, et sans nul doute laprincipale, câest lâĂ©chec des nĂ©gocia-tions de paix. Au-delĂ du sabotage parla partie israĂ©lienne de lâultime tentati-ve du secrĂ©taire dâĂtat John Kerry, laprocĂ©dure mĂȘme des accords dâOslosâavĂšre obsolĂšte : focalisĂ©e sur lesarrangements intĂ©rimaires, elle reportela discussion des principaux dossiers(frontiĂšres, capitale, sĂ©curitĂ©, colonieset rĂ©fugiĂ©s). Et, du mĂȘme coup, lâĂ©ta-blissement de lâĂtat palestinien, prĂ©vudepuis le 29 novembre 1947, se voitrenvoyĂ© aux calendesâŠVoilĂ ce Ă quoi veut remĂ©dier le projetde rĂ©solution dĂ©posĂ© par les ministresdes Affaires Ă©trangĂšres de la Liguearabe, Ă la demande de lâOrganisationde libĂ©ration de la Palestine (OLP),devant le Conseil de sĂ©curitĂ© desNations unies. Ce texte prĂ©voit la crĂ©a-
tion de lâĂtat palestinien dâici Ă novem-bre 2016, dans les frontiĂšres du 4 juin1967 et avec JĂ©rusalem-Est pour capita-le. Et Mahmoud Abbas de commenter :« La situation actuelle dans les territoi-res palestiniens ne peut plus durer. Ilnây a plus de partenaire pour nous enIsraĂ«l. Il nây a plus rien dâautre Ă faireque dâinternationaliser la question. »Tout dĂ©pendra Ă©videmment de la dĂ©cisiondu Conseil de sĂ©curitĂ©, et notamment desgrandes puissances qui y disposent dâundroit de veto. LâOLP a dâores et dĂ©jĂ prĂ©-venu quâen cas de blocage, elle adhĂ©reraitĂ la Cour internationale de justice (CIJ) etĂ la Cour pĂ©nale internationale (CPI), oĂčIsraĂ«l redoute de se retrouver sur le bandes accusĂ©s. Mais, en derniĂšre instance,les opinions seront dĂ©cisives. Lors dâunematinale de France Inter, le 25 novembre,le ministre des Affaires Ă©trangĂšres LaurentFabius nâa-t-il pas lui-mĂȘme invoquĂ© leurrĂŽle pour rendre compte du mouvementdiplomatique en cours ? 02/12/2014* Journaliste et historien, coordinateur dePalestine : le jeu des puissants (SindbadActes Sud, 2014)
IsraĂ«l-Palestine : vers lâinternationalisation du conflit ?par Dominique Vidal *
PNM Face Ă lâescalade actuelle de la violence, quelles sont les intentionsdu gouvernement israĂ©lien Ă lâĂ©gard des revendications de la Palestine ?Marius Schattner Le gouvernement israĂ©lien a clairement lâintention demaintenir la colonisation, Ă JĂ©rusalem et en Cisjordanie. En mĂȘme temps ilsouhaite Ă©viter une troisiĂšme Intifada. Or il est confrontĂ© au pourrissement dela situation, dĂ» Ă une violence palestinienne plus ou moins spontanĂ©e doublĂ©e,cĂŽtĂ© israĂ©lien, de provocations de lâextrĂȘme droite. Il a donc intĂ©rĂȘt Ă dĂ©sar-mer une opinion mĂ©contente par un processus de nĂ©gociations dont il veille-ra Ă ce quâil nâaboutisse pas.
PNM Quelle politique le gouvernement va-t-il mener ? Marius Schattner Sur le plan interne, le gouvernement, pour divisĂ© quâil soitet il lâest, veut se maintenir au pouvoir. Cela contraint Nethanyahou Ă fairedâimportantes concessions Ă lâextrĂȘme droite. Ce quâillustre, par exemple,son projet de loi visant Ă affirmer davantage encore le caractĂšre juif de lâĂtat.Ce projet est qualifiĂ© dâanticonstitutionnel par le propre conseiller juridiquedu gouvernement, câest dire ! mais il tient Ă cĆur Ă Naftali Bennett, le minis-tre de lâĂconomie, leader du Foyer juif, le parti qui se situe le plus Ă droitesur lâĂ©chiquier politique. Or ce parti recueille 18% des intentions de vote et
câest sur les terres de la droite quâil braconne. Il pourrait difficilement en ĂȘtreautrement dâailleurs puisque la gauche est inexistante.
PNM Comment lâopinion israĂ©lienne rĂ©agit-elle ? Y a-t-il des forces quisâorganisent pour contrer cette escalade ? Y a-t-il, inversement, une Ă©volu-tion des forces dâextrĂȘme droite ?Marius Schattner Face Ă une spirale sans fin de la violence, lâopinion estprofondĂ©ment dĂ©moralisĂ©e, Ă gauche comme au centre. Elle a repoussĂ© avechorreur lâassassinat dâun enfant palestinien et les rĂ©cents attentats commis Ă la synagogue, qui ont Ă©tĂ© faussement revendiquĂ©s par le FPLP. La gauche estdĂ©moralisĂ©e, dĂ©couragĂ©e, dĂ©motivĂ©e. Elle nâa pas de projet, ce qui nâest pasun garant dâefficacitĂ©. Sâil y a des Ă©lections anticipĂ©es et il y en aura, tĂŽt outard, ce nâest pas Ă elle quâelles devraient profiter, selon les rĂ©cents sondages.Câest la droite qui va tirer les marrons du feu. Les deux partis centristes ris-quent de sâeffondrer. Quand au parti travailliste, ces sondages rĂ©vĂšlent Ă quelpoint il est inexistant. Reste, et ce nâest pas Ă dĂ©daigner, une minoritĂ© trĂšs acti-ve dans les milieux intellectuels. Cette minoritĂ© nâest certes prĂ©sente pourlâheure que dans ces milieux et Ă lâuniversitĂ©. Mais elle a le mĂ©rite dâexisteret elle rĂ©flĂ©chit. Cela peut aboutir, un jour ou lâautre.
PNM Comment la situation Ă©conomique Ă©volue-t-elle et quelle influencecette Ă©volution a-t-elle sur la politique du gouvernement ?Marius Schattner Le taux de croissance de lâĂ©conomie a diminuĂ© de 4% Ă 2%. Cette tendance nĂ©gative a conduit lâune des grandes agences de notationĂ faire passer IsraĂ«l de la note A+ Ă la note A. Les causes en sont multiples.Il ne faut pas sous-estimer lâeffet des politiques de dĂ©sinvestissement quiprennent de lâimportance.
PNM Quel rĂŽle joue, dĂšs lors, le mouvement en faveur de la reconnaissan-ce de la Palestine tel quâon peut lâobserver depuis quelques mois ?Marius Schattner La pression internationale est dĂ©terminante. La reconnais-sance par la SuĂšde, les positions du parlement britannique puis du parlementespagnol sont importantes, mais la position des Ătats-Unis reste prĂ©pondĂ©ran-te, et de ce cĂŽtĂ©-lĂ non plus les choses ne bougent pas.
Propos recueillis par Nicole Mokobodzki le 24 novembre 2014
NDLR Aux derniÚres nouvelles, des élections anticipées auront lieu le 17 mars.
Entretien avec Marius Schattner
Israël / Palestine
Ă lireLa PNM signale
Palestine : le jeu des puissants*.
Cet ouvrage, Ă©crit sous la direction de Dominique Vidal, rassemble les tex-tes dâĂ©minents spĂ©cialistes (Bertrand Badie, Rosemary Hollis, Rashid
Khalidi, Henry Laurens, Farouk Mardam-Bey, Michel RĂ©al et DominiqueVidal) afin dâĂ©clairer le grand public sur le conflit israĂ©lo-palestinien. Le livreanalyse la part prise dans ce dossier par les grands acteurs de lacommunautĂ© internationale, Ătats-Unis, Grande-Bretagne,URSS puis Russie, et France, mais aussi le rĂŽle des puissancesrĂ©gionales. Ă ne pas manquer au moment oĂč l'AssemblĂ©e natio-nale vient de voter en faveur de la reconnaissance de laPalestine. PK* Une recension de lâouvrage (Ăd. Actes Sud, 184 p., 18 âŹ) sera publiĂ©e dansla prochaine Ă©dition de la PNM
LâUJRE* (Union des Juifs pour la RĂ©sistance et lâEntraide),consternĂ©e par les actes de violence qui sâenchaĂźnent depuis la
fin de lâopĂ©ration « Bordure protectrice », condamne avec force lâat-tentat commis contre des fidĂšles en priĂšre dans une synagogue deJĂ©rusalem, le 18 novembre. Ce dernier survient dans un contexte de tensions accrues, entretenupar lâintensification des implantations israĂ©liennes en Cisjordanie,particuliĂšrement Ă JĂ©rusalem, la mansuĂ©tude du gouvernementvis-Ă -vis des extrĂ©mistes israĂ©liens, les provocations des religieux⊠Il est condamnable de frapper au hasard, dans la rue, les synagogues,les mosquĂ©es... La violence, qui ne rĂ©sout rien, suscite un climat dehaine qui ne peut que sâaggraver si le Premier ministre israĂ©lien dĂ©ci-de, comme il lâa annoncĂ©, dâautoriser la population civile Ă porter desarmes dâautodĂ©fense. Le moins que lâon puisse dire est quâil nây arien lĂ de propice Ă la paix qui doit ĂȘtre notre seul objectif. LâUJRE rĂ©affirme que seule une paix nĂ©gociĂ©e permettra de mettrefin Ă un cycle infernal de violence inutile. LâUJRE demande que soit enfin appliquĂ©e la RĂ©solution desNations Unies qui, fin 1947, dĂ©cidait, au nom des peuples du monde,quâil devait y avoir deux Ătats dans lâex-Palestine mandataire. Plusque jamais, en cette annĂ©e de solidaritĂ© avec la Palestine, il est tempsque cet Ătat soit reconnu. Puissent les parlementaires français Ă lâinitiative des rĂ©solutionsdĂ©posĂ©es en ce sens, convaincre le gouvernement par leurs votes des28 novembre et 11 dĂ©cembre, de reconnaĂźtre lâĂtat palestinien,comme cent trente-cinq pays lâont dĂ©jĂ fait. Puisse la France apporter une pierre prĂ©cieuse Ă lâĂ©dification de lapaix, une paix pour tous. UJRE
Paris, le 19 novembre 2014
PNM n°321 - Décembre 2014 7
Le 14 octobre, le Parlement britan-nique reconnaissait lâĂtat palestinien.Le 6 novembre, six cents personnali-tĂ©s israĂ©liennes appelaient leParlement espagnol Ă en faire demĂȘme. Parmi eux, dâanciens ministres(ou Premier), d'anciens dĂ©putĂ©s dediffĂ©rents partis, des centaines d'uni-versitaires, de diplomates et de mili-tants pacifistes, dont plusieurs prixNobel. Ce ne fut pas en vain. Voici letexte de cet appel :
âNous, citoyens dâIsraĂ«l, qui aspi-rons Ă voir notre pays connaĂźtre la
sĂ©curitĂ© et la prospĂ©ritĂ©, nous sommesprĂ©occupĂ©s par la permanente paraly-sie politique, lâoccupation, la crĂ©ationde nouvelles colonies qui conduisentĂ de nouveaux affrontements avec lesPalestiniens et compromettent lespossibilitĂ©s de parvenir Ă un accord. Ilest clair que la sĂ©curitĂ© dâIsraĂ«l et sonexistence mĂȘme dĂ©pendent de lâexis-tence dâun Ătat palestinien aux cĂŽtĂ©sdâIsraĂ«l. Notre pays devrait reconnaĂź-tre lâexistence dâun Ătat palestinien etla Palestine devrait reconnaĂźtre IsraĂ«l,conformĂ©ment aux frontiĂšres dĂ©finiesle 4 juin 1967. Votre appui Ă la recon-naissance de lâĂtat palestinien reprĂ©-sentera un progrĂšs dans la voie de lapaix et encouragera IsraĂ©liens etPalestiniens Ă mettre un terme Ă leurconflit.â
â Nous, anciens combattants delâUnitĂ© 8200, soldats rĂ©servistes
par le passĂ© et aujourdâhui, dĂ©cla-rons refuser de participer aux actionscontre les Palestiniens et refuser decontinuer Ă servir comme outils danslâaffermissement du contrĂŽle militai-re sur les Territoires occupĂ©s. Il est gĂ©nĂ©ralement admis que laconscription dans les renseignementsmilitaires Ă©chappe aux problĂšmesmoraux et contribue uniquement Ă larĂ©duction de la violence et des dom-mages envers des personnes innocen-tes. NĂ©anmoins, notre service militai-re nous a dĂ©montrĂ© que le renseigne-ment est une partie intĂ©grale de lâoc-cupation militaire israĂ©lienne sur lesterritoires.La population palestinienne sous rĂ©gi-me militaire est complĂštement expo-sĂ©e Ă lâespionnage et Ă la surveillancedes services de renseignement israĂ©-liens. Alors quâil existe des limitationsdrastiques de la surveillance descitoyens israĂ©liens, les Palestiniens nebĂ©nĂ©ficient pas de cette protection. Ilnâexiste pas de distinction entre lesPalestiniens qui sont ou qui ne sontpas impliquĂ©s dans des violences.Lâinformation qui est recueillie et
conservĂ©e fait du tort Ă des personnesinnocentes. Elle est utilisĂ©e dans le butdâune persĂ©cution politique et pourcrĂ©er des divisions au sein de la sociĂ©-tĂ© palestinienne, en recrutant des colla-borateurs et en entraĂźnant des partiesde la sociĂ©tĂ© palestinienne contre elle-mĂȘme. Dans de nombreux cas, les ser-vices de renseignement empĂȘchent lesaccusĂ©s de recevoir un procĂšs Ă©quita-ble dans les tribunaux militaires, alorsque les preuves les concernant ne sontpas rĂ©vĂ©lĂ©es. Le renseignement autori-se un contrĂŽle continu sur des millionsdâindividus Ă travers une surveillanceapprofondie et intrusive et envahit laplupart des secteurs de la vie dâunindividu. Ce qui ne permet pas auxgens de mener des vies normales etincite Ă plus de violence, nous distan-çant toujours davantage de la fin duconflit.Des millions de Palestiniens viventsous le rĂ©gime militaire israĂ©liendepuis plus de quarante-sept ans. CerĂ©gime nie leurs droits fondamentauxet exproprie de larges Ă©tendues deterre pour les colonies juives qui sontsoumises Ă des systĂšmes lĂ©gaux sĂ©pa-rĂ©s et diffĂ©rents, et Ă lâapplication delois diffĂ©rentes. Cette rĂ©alitĂ© nâest pas
un rĂ©sultat inĂ©vitable des efforts delâĂtat pour se protĂ©ger, mais plutĂŽt lerĂ©sultat dâun choix. Lâexpansion descolonies nâa rien Ă voir avec la sĂ©cu-ritĂ© nationale. De mĂȘme en va-t-il desrestrictions Ă la construction et audĂ©veloppement, Ă lâexploitation Ă©co-nomique de la Cisjordanie, Ă la puni-tion collective des habitants de labande de Gaza, et du tracĂ© actuel dela barriĂšre de sĂ©paration. Au vu de tout cela, nous avons concluquâen tant que personnes ayant servidans lâUnitĂ© 8200, nous devons assu-mer la responsabilitĂ© de notre partici-pation Ă cette situation et quâil est denotre devoir moral dâagir. Nous nepouvons pas continuer Ă servir le sys-tĂšme en bonne conscience, en niantles droits de millions de personnes. Acet effet, ceux dâentre nous qui sontrĂ©servistes refusent de prendre partaux actions de lâĂtat contre lesPalestiniens. Nous appelons tous lessoldats servant dans les unitĂ©s de ren-seignement, passĂ© et prĂ©sent, demĂȘme que tous les citoyens dâIsraĂ«l,Ă dĂ©noncer ces injustices et Ă prendrepart Ă des actions pour y mettre fin.Nous croyons que lâavenir dâIsraĂ«len dĂ©pend.â
La parole au camp de la paix
UNE AUTRE VOIX JUIVE exprime saprofonde compassion vis-Ă -vis des proches
des victimes des tueries, dans une synagogue deJĂ©rusalem.UAVJ condamne totalement ces assassinats querien ne saurait justifier.UAVJ salue le courage de lâAutoritĂ©Palestinienne qui les a condamnĂ©s sur le champ.UAVJ sâĂ©lĂšve avec force contre les dĂ©clarationsscandaleuses de dirigeants du Hamas, du JihadIslamique et de ceux de Daesh, qui lĂ©gitimentde pareilles atrocitĂ©s.Ce climat de violence sanguinaire est le produitterrible des guerres menĂ©es par IsraĂ«l contre lepeuple palestinien, des annĂ©es dâoccupation, dediscriminations, de provocations, en particulierrĂ©cemment Ă JĂ©rusalem, et du sabotage systĂ©-matique, par le gouvernement israĂ©lien, de toutenĂ©gociation visant Ă mettre un terme au conflitsur la base des Accords dâOslo.La politique du gouvernement israĂ©lien et deson Premier Ministre est criminelle, mais lesactes visant indistinctement des civils israĂ©liensjuifs pour les assassiner de façon aveugle, nerelĂšvent dâaucune « rĂ©sistance », dâaucune sortedâ « idĂ©ologie de libĂ©ration ».Au contraire, de tels actes renforcent commejamais la propagande ultra israĂ©lienne quidepuis des annĂ©es piĂ©tine les droits du peuplepalestinien alors que celui-ci demande seule-ment de pouvoir vivre en paix dans le cadre deson Ătat, aux cĂŽtĂ©s d'IsraĂ«l, dans la coopĂ©ration.Ces meurtres portent un coup sĂ©vĂšre Ă lâactionde toutes les forces qui en IsraĂ«l, en Palestine,
comme dans le monde veulentvoir enfin une paix juste, nĂ©gociĂ©eet durable au ProcheâOrient dansle respect des droits fondamentaux du peuplepalestinien et du droit Ă la sĂ©curitĂ© des deux peu-ples. Ils donnent un prĂ©texte rĂȘvĂ© Ă lâaccentua-tion des aspects les plus rĂ©prĂ©hensibles de lapolitique israĂ©lienne.On ne saurait oublier cependant que le dĂ©but dela guerre menĂ©e par IsraĂ«l contre Gaza sâestaccompagnĂ© dâactes monstrueux de la part decolons israĂ©liens. Un adolescent palestinien aĂ©tĂ© brĂ»lĂ© vif ! Le gouvernement israĂ©lien nepeut ĂȘtre blanchi des atrocitĂ©s commises au nomde sa politique.Ces actes horribles doivent inciter toutes les for-ces progressistes en France Ă peser commejamais sur le gouvernement français pour lareconnaissance de lâĂtat de Palestine dans lesfrontiĂšres de 1967 avec JĂ©rusalem comme capi-tale partagĂ©e de deux peuples. C'est ce quedemandent six cents personnalitĂ©s israĂ©liennes.Toute tentative de diffĂ©rer une telle prise deposition serait une forme dâappui au dĂ©veloppe-ment du chaos, de la peur, de la rĂ©pression sau-vage, et ruinerait au final la sĂ©curitĂ© des citoyen-nes et citoyens juifs d'IsraĂ«l.Pour une paix juste durable et nĂ©gociĂ©e auProche-Orient, pour le respect des droits fonda-mentaux du peuple palestinien, la sĂ©curitĂ© desdeux peuples israĂ©lien et palestinien, UAVJ nemĂ©nagera aucun effort et appelle nos compa-triotes, juifs ou non, Ă sây joindre. UAVJ
Paris, le 23 novembre 2014
Israël / Palestine
La paix, lâavenir dâIsraĂ«l en dĂ©pend
CommuniquĂ© de lâUJREPuisse la France opter pour le camp de la Paix
Meurtres Ă JĂ©rusalem Point de vue
OĂč lâon voit que des membres rĂ©servistes de lâUnitĂ© dâĂ©lite du renseignement militaire israĂ©lien dĂ©noncent ce quâon leura fait faire qui, selon eux, vise non pas Ă assurer la sĂ©curitĂ© dâIsraĂ«l mais Ă accroĂźtre sa domination sur Gaza.
Ătre ou ne pas ĂȘtre juif, se sentirjuif, ce nâest pas la mĂȘme chose.Gendre de rabbin, je suis ancien
enfant cachĂ© ; communiste, puis socia-liste je fus et ne suis plus. Aujourdâhui,je suis plutĂŽt universaliste. A Paris,aprĂšs la guerre, je ne frĂ©quentais de juifsque mes copains du YASC ; je militaisavec les militants antiracistes et jecroyais quâaprĂšs la Shoah, lâantisĂ©mitis-me Ă©tait Ă©radiquĂ©, quâil ne pourraitjamais refleurir au pays du pain et desroses. Je combattais ceux qui Ă©taientcommunautaristes, juifs ou pas ! Jecontinue. Le comportement de mesamis mâimporte plus que leur revendi-cation ethnique. Je suis juif par la nais-sance, mais je ne me sens, avec les juifs,que dans une fraternitĂ© de destin.En 2000, en arrivant Ă Nice jâai crĂ©Ă©lâAMEJDAM* et jâai adhĂ©rĂ© Ă lâAssociation des Amis du MusĂ©e de laRĂ©sistance, que jâai quittĂ©e depuis. Puis,jâai crĂ©Ă© lâantenne de La paix mainte-nant pour les Alpes maritimes et rejointlâAssociation pour lâamitiĂ© judĂ©o-musulmane plus quelques autres, dĂ©mo-cratiques et antiracistes. Je suis incontestablement juif, de la
Peut-on se considĂ©rer comme juiflorsque lâon nâa pas vĂ©cu dans sacommunautĂ© dâorigine ni cĂŽtoyĂ©,
ou si peu, sa famille juive avec laquelleon nâa partagĂ© ni religion ni mode devie ? Ătre juif, nâest-ce pas grandir etsâĂ©panouir au sein de sa « tribu », dansla sĂ©curitĂ© dâun groupe ressenti commeuni et solidaire ?Mais ĂȘtre juif câest aussi assumer unehistoire commune et les souffrancesdâun peuple persĂ©cutĂ© depuis ses origi-nes. On ne peut rester Ă lâĂ©cart de cettehistoire lorsquâune partie de sa famille adisparu Ă Auschwitz et quâau seinmĂȘme de cette famille (mĂšre juive, pĂšregoy dont la mĂšre fut une autrichiennepronazie) sâest jouĂ©e lâhistoire du gĂ©no-cide des juifs.Nul ne peut trouver son Ă©quilibre sansse construire une identitĂ© propre. Aussiest-ce un parcours difficile lorsque danslâenfance et lâadolescence on a eu cesentiment de nâĂȘtre nulle part et Ă©trangerĂ sa propre famille. Dans le contexte de lâaprĂšs guerre oĂč jesuis nĂ©e et aprĂšs le traumatisme subi Ă lâadolescence lors de la dĂ©couverte desactivitĂ©s de mes grands parents pater-nels pendant lâOccupation (collabora-tion avec les nazis et dĂ©nonciations dejuifs Ă la Gestapo), Ă©cartelĂ©e entre deux
mĂȘme façon que mon pĂšre et ma mĂšrequi ne le furent que devant les antisĂ©mi-tes (voir lâhommage qui leur fut rendudans la NaĂŻe Presse** n° 274 de mars2010) : âą Elle plus juive que juive, participa Ă lacrĂ©ation du MNCR dont le R signifiaitRacisme quand lâĂ©poque Ă©tait principa-lement Ă lâantisĂ©mitisme. Ces rĂ©sistantjuifs avaient donc hautement conscien-ce, en 1942, que le racisme commencequelque part mais nâa pas de limite.Câest ce quâils mâont inculquĂ©, câest cequi mâamena Ă publier en 2007 «Grandeur et misĂšre de lâantiracisme, leMRAP est-il dĂ©passĂ© ? » âą Lui, officier de rĂ©serve, avait Ă©tĂ© pen-dant la guerre responsable des groupesde combat de lâUJJ (MOI) et instructeurmilitaire Ă Lyon. En 1953, lors de lâaf-faire des blouses blanches Ă Moscou, ilpartit un jour â et nous lâarrĂȘtĂąmes Ă temps â « expliquer » ce que juif voulaitdire Ă notre secrĂ©taire de section qui,comme dâautres avant lui, quâil avaitcombattus les armes Ă la main, avait osĂ©lui dire « Vous autres, les juifs » ?Toujours en 1953, venu me rĂ©cupĂ©rer aucommissariat oĂč jâavais Ă©tĂ© enfermĂ©
branches dâune famille mortifĂšre, je nâaipu amortir le choc et limiter les souf-frances quâen me tenant Ă©loignĂ©e psy-chiquement de tous.Avec le recul, je pense quâil aurait Ă©tĂ©plus structurant dans cette pĂ©riode cru-ciale dâĂ©laboration de la personnalitĂ©quâest lâadolescence et face au mal abso-lu (dĂ©nonciation de ma mĂšre par sabelle-mĂšre câest-Ă -dire ma grand mĂšrepaternelle), de me rapprocher de mafamille maternelle. Il nâen fut rien carMaman Ă©tait elle-mĂȘme fort Ă©loignĂ©e dessiens pour lesquels elle ressentait un cer-tain mĂ©pris en raison de leur rang social(artisans et ouvriers fourreurs). Me rap-procher de ma famille alors que ma mĂšrene les frĂ©quentait pas (exceptĂ© ma grand-mĂšre et mon oncle quâelle traitait de « ratĂ© ») Ă©tait mission impossible.Pourtant, lors des quelques fĂȘtes oĂčnous fĂ»mes conviĂ©s par ma famillematernelle (comme le retour au pays de« lâoncle dâAmĂ©rique » ! ), je les trou-vais tous fort sympathiques. Jâadmiraiset enviais la tendresse quâils manifes-taient les uns envers les autres, leurcomplicitĂ©, bref, la chaleur humaine quise dĂ©gageait de ces rĂ©unions, alors quede la famille paternelle nâĂ©manait pourmoi que tristesse et rancĆur, sinonhaine. Les juifs formaient une « vraie
dans la cage Ă poules pour avoir reven-diquĂ© sur la voie publique la libĂ©rationdes Rosenberg, il donna une leçon degĂ©ographie au commissaire en luisituant Brest-Litovsk sur la carte. âą Jâai incontestablement Ă©tĂ© un mauvaisjuif pendant la guerre â jâai huit ans audĂ©but, jâen ai treize Ă la fin. Ma maĂźtres-se mâayant convaincu que je devaischanter plus fort que les autres MarĂ©chal, nous voilĂ , « je lançaischaque matin un ânous voilĂ â clair ettriomphant, comme une offrande demoi-mĂȘme au brave MarĂ©chal qui avaitfait don de sa personne Ă la France.Albert, furieux, me montrait un poingvengeur, sous lâĆil amusĂ© et complicedu maĂźtre : âĂa, tâas pas le droit. Tu nâesquâun petit Juif ! Moi, je ne suis pas juif,rĂ©pondais-je â Si, au village, il y a deuxJuifs, toi et moi. Et en plus, tu es un traĂź-tre. Tu nâas pas le droit de servir lamesse le dimanche. Ni les vĂȘpres. Ni dechanter MarĂ©chalâ »*** Câest donc Ă Hitler et Ă mon ami Albert que je dois deme savoir juif. Albert a disparu, moi jesuis vivant, Dieu ne rĂ©compense guĂšreles siens !SauvĂ© par une famille chrĂ©tienne, fils de
famille ». Je ne comprenais pas alorspourquoi Maman sâen Ă©tait Ă©cartĂ©e.Bien quâayant gardĂ© un lien tĂ©nu aveccette famille grĂące Ă une petite cousinede mon Ăąge avec qui je militais auMRAP, quelques bar-mitsvas, mariageset... enterrements (!), je suis donc restĂ©edans ce no manâs land, dans cet entredeux. TantĂŽt je me reconnais juive, sur-tout dans un contexte antisĂ©mite (pro-pos antisĂ©mites lancĂ©s dans une conver-sation par exemple), tantĂŽt je me senstotalement Ă©trangĂšre Ă ce milieu dont jene connais pas les codes ni les tradi-tions, mĂȘme pas le calendrier des fĂȘtesdont je suis incapable chaque annĂ©e deme souvenir !Cette impossibilitĂ© de me rattacher Ă lacommunautĂ© juive, ou Ă me dĂ©finircomme juive ou non juive est en outretrĂšs liĂ©e Ă mes relations avec mesparents dans mon enfance, ces derniersayant divorcĂ© lorsque jâavais six ans.Car Ă la question « suis-je juive ou nonjuive » ou plutĂŽt « est-ce que je me res-sens juive ou non juive » correspondimplicitement la question : « fais-je lechoix de ma mĂšre ou celui de monpĂšre ? » Ce choix impossible entraĂźnantune difficultĂ© Ă me positionner dans lesmoments clĂ© de mon existence a Ă©tĂ© unhandicap Ă plusieurs reprises, tant du
rĂ©sistants athĂ©es et petit-fils de juifs pra-tiquants, je suis trĂšs respectueux de lafoi des hommes, dont 50% sont desfemmes, sous condition que lâextrĂ©mis-me inhĂ©rent Ă chaque religion ou cou-rant de pensĂ©e ne mĂšne pas Ă occire sonprochain. Si je respecte les croyants etles philosophes, jâexige quâils merespectent en retour. Nous pouvonsdĂ©fendre des points de vue diffĂ©rents,nous devons demeurer fraternels carnous sommes tous des humains !Câest Ă ce titre que, juif moderne, jâaicrĂ©Ă© Ă Nice une entente qui regroupe lesquatre cultes monothĂ©istes : catholique,protestant, musulman et juif ainsi quedix-neuf associations culturelles toutestendances confondues : « Ensemble,Respectons-nous ». Nous y reprĂ©sen-tons, car je ne suis pas seul, le juif athĂ©e,lâhomme laĂŻc garant du respect mutuel.Quand on me demanda dâintervenirdans un meeting de soutien Ă notreministre de la Justice qui avait Ă©tĂ© atta-quĂ©e au motif quâelle Ă©tait Noire, je pusdire : « CondamnĂ© Ă mort Ă lâĂąge de6 ans parce que jâĂ©tais nĂ© juif, je me per-mets dâadresser un salut confraternel Ă Madame Christiane Taubira ⊠».
(Ă suivre en page 10)
point de vue familial que professionnel,jusque dans mes choix politiques. Parexemple, je suis depuis longtemps danslâaction politique mais je suis incapablede rallier un parti (mĂȘme si dans ma jeu-nesse jâai pendant plusieurs annĂ©es mili-tĂ© au PC). Concernant ce parti, je suis Ă la fois dedans et dehors ou ni dedans nidehors. Mais revenons Ă ma judĂ©itĂ©.Je nâai pas choisi mes origines, ellessâimposent Ă moi : mes grands parentsmaternels ont Ă©migrĂ© en France audĂ©but du XXe siĂšcle, fuyant les pogromsde Lituanie et de Pologne. Mon histoirefamiliale est omniprĂ©sente : le cauche-mar de la Shoah a hantĂ© toute monenfance et me hante encore. Cela est unfait, une rĂ©alitĂ©. Ai-je pour autant le sen-timent dâĂȘtre juive ? Encore une fois ouiet non !Pour autant, lâappartenance Ă une com-munautĂ© ou Ă un groupe ressenticomme solide et protecteur est unbesoin fondamental lorsque lâon a gran-di dans une famille disloquĂ©e. Et si jenâai pas fait le choix de me fondre dansla communautĂ© juive (mais pouvais-jevĂ©ritablement choisir ?), jâai fait lechoix de rejoindre une autre commu-nautĂ©, la « grande famille communiste ».Est-ce un hasard si jây ai retrouvĂ© denombreux juifs ?
Comment je me sens juif en 2014 ?par Maurice Winnykamen
Ătre juif ou ne pas ĂȘtre...par Sylvie DarracqConseillĂšre municipale de Cachan
8 PNM n°321 - Décembre 2014
« Ătre juif au XXI e siĂšcle »
Histoire
Charles-Joseph Lamoral, septiĂšmeprince de Ligne (1735-1814), estsans doute la figure la moins
connue de la pĂ©riode des LumiĂšres. Est-ceparce quâil a Ă©tĂ© dans lâarmĂ©e autrichien-ne, quâil a pris part Ă la guerre de Sept Ans,quâil a Ă©tĂ© fait chevalier de la Toison dâoret quâil a fini sa carriĂšre marĂ©chal ? Est-ceparce quâil Ă©tait wallon ? En tout cas, il asouffert pour la postĂ©ritĂ© de lâidĂ©e reçueselon laquelle la philosophie des LumiĂšresest dâabord une invention française, ce quiest en partie faux. De lui, on retient surtout lâĆuvre*,dâailleurs considĂ©rable, du mĂ©morialiste.Ami de Casanova, il a publiĂ© des Frag-ments de lâhistoire de ma vie, ainsi quâunecorrespondance volumineuse avec tout cequi comptait en Europe. Une fois la guer-re finie, il alla visiter Voltaire Ă Ferney.MalgrĂ© la grande admiration quâil a pourlui, il lâattaque sur la question religieusecar il demeure un fervent dĂ©fenseur delâĂglise catholique : « La religion catho-lique doit plaire Ă celui quâinspire le goĂ»tdes beaux-arts ; nous lui devons le Stabatde PergolĂšse, le Miserere de Lalande, lesHymnes de Santeuil, tant de chefs-dâĆuv-re en musique, en peinture et en sculpture; lâĂ©glise de Saint-Pierre, la Descente decroix dâAnvers, et une autre de ma galerie,par Van Dyck. La mythologie parlait auxpassions ; le catholicisme, enveloppĂ© demystĂšres, parle Ă lâimagination. » Voltaire qui ne se dĂ©monte pas lui rĂ©torquequâil le considĂšre comme le plus aimabledes hommes. En fait, sa pensĂ©e est pleine
de paradoxes. Tout croyant quâil soit, il neveut pas dâune morale austĂšre et se reven-dique comme pur hĂ©doniste. Il fait du plai-sir le sommet de lâart de vivre delâ « homme aimable », quâil considĂšrecomme la nouvelle version de lâhonnĂȘtehomme. Le plaisir doit faire corps avecune foi tempĂ©rĂ©e dâhumanitĂ© et sansmoralisme extrĂȘme.Il a voulu voler au secours de Rousseau,avec qui il a longuement discutĂ©, a frĂ©-quentĂ© le salon de Mme du Deffand etcelui de Mme Geoffrin, quâil prĂ©fĂ©ra debeaucoup Ă la cour de Versailles. Il avaitdâailleurs une immense considĂ©ration pourles femmes dâesprit, au contraire du mi-santhrope de GenĂšve et de la plupart deses contemporains. Cet homme originalet dâune culture immense allait Ă contre-courant de pas mal dâopinions reçues Ă lâĂ©poque. Ce nâest pas tant sa religiositĂ©que son attitude Ă©thique qui le distingue deses pairs. Grand voyageur, il connaĂźtPrague autant que Vienne, Varsovie Ă lâĂ©-gal de Saint-PĂ©tersbourg et Paris est sonsanctuaire de prĂ©dilection. Son dĂ©sir dâĂȘt-re sans cesse en mouvement lui procureune large vision dâun monde en train dechanger. Il dialogue avec FrĂ©dĂ©ric II dePrusse, chez qui il rĂ©side, entretient desrapports Ă©troits avec lâimpĂ©ratrice Marie-ThĂ©rĂšse et avec le pĂšre de celle-ci,François Ier dâAutriche. Et sâil considĂ©raitDiderot, HelvĂ©tius, Holbach, VoltairemĂȘme, comme de piĂštres conseillers pourles rois et de mauvais instituteurs pour lespeuples, il sâest servi de leurs rĂ©flexions
novatrices pour Ă©laborer ses propresconvictions.Il est Ă son Ă©poque le seul Ă adopter uneattitude franchement positive Ă lâĂ©gard dumonde juif, Ă lâinverse de Voltaire et faceĂ lâindiffĂ©rence des philosophes les plusaudacieux, Ă commencer par Diderot,restĂ© muet sur la question. Laquelle occu-pe une place importante dans le XIe tome,paru en 1801, de ses MĂ©langes militaires,littĂ©raires et sentimentaux (34 volumes,Dresde, 1795-1811). Son MĂ©moire sur lesJuifs** commence par un fĂ©roce traitdâesprit : « Ils nâont jamais Ă©tĂ© Ă la mode,depuis que Dieu les a abandonnĂ©s : câestpour cela que les chrĂ©tiens ne sont jamaisoccupĂ©s dâeux ; et dâun autre cĂŽtĂ© les phi-losophes nây ont pas pensĂ©, parce que leurfigure ne leur revenait pas. » Il souligneque le premier « brevet philosophique » aĂ©tĂ© de reconnaĂźtre quâun NĂšgre est unhomme Ă part entiĂšre. Face aux persĂ©cu-tions dont les Juifs sont victimes, il souhai-terait que lâEmpire ottoman leur rende leterritoire de JudĂ©e, ce qui fait de lui le toutpremier prĂ©curseur de lâidĂ©e sioniste.Câest selon lui lâostracisme dont ils sontvictimes qui explique leur allure dĂ©plora-ble et leur existence Ă©trange pour autrui. Ilfait lâĂ©loge de ces populations dispersĂ©esdans toute lâEurope et sujettes Ă toutes sor-tes de brimades, parfois pire. Il veut que lacolĂšre contre les Juifs, vieille de 1 800 ans,cesse. Il fait Ă©tat de tentatives avortĂ©es,comme celle de lâempereur Joseph IerdâAutriche qui voulait les installer enGalicie. Dans un autre passage, il Ă©voque
le projet de Potemkine qui voulait crĂ©erun corps dâĂ©lite de cavaliers juifs, compa-rable aux cosaques, corps qui se seraitappelĂ© IsraĂ©lowsky. Lâamant de CatherineII voulait sâemparer de la Terre Sainte etutiliser les Juifs pour la dĂ©fendre contre lesTurcs. Le prince français de Langallerie afait des projets de rassemblement de cettepopulation, et cela lui a valu un sĂ©jour enprison. Il voulait crĂ©er une « ThĂ©ocratie duverbe divin » rĂ©unissant les confessionscatholique, protestante et juive. (Mais ilest allĂ© en prison surtout pour avoir trahilâAutriche aprĂšs avoir trahi la France deLouis XIV, au bĂ©nĂ©fice des Ottomans !)Bien des utopies ont vu le jour et sont res-tĂ©es sans lendemain.Il fait aussi de longues digressions sur lesexe faible : il Ă©prouve un faible pour lesfilles de Sion !Le prince de Ligne a-t-il Ă©tĂ© un prĂ©curseurde Theodor Herzl et de son Ătat des Juifs(1897) ? Certainement pas. Il a nĂ©anmoinssemĂ© une petite graine. Et son Ă©tonnantecompassion pour le peuple juif en exilĂ©ternel est un cas exceptionnel, Ă uneĂ©poque oĂč M. ArouĂ«t ne cessait de vili-pender ces ĂȘtres infĂąmes, cause premiĂšre,Ă lâen croire, de la foi Ă©piscopale reposantsur les aberrations bibliques ! * Charles Joseph, prince deLigne, Ćuvres III, Ă©dition Ă©ta-blie et prĂ©sentĂ©e par RomandMortier, Ed. Complexes** Prince de Ligne, MĂ©moiresur les Juifs, Ă©dition commentĂ©epar Jean-Pierre Pisetta, BernardGilson Ed., 2007
Le Prince de Ligne : un penseur des LumiÚres philosémitepar Gérard-Georges Lemaire
Lâhistoire propose parfois des Ă©piso-des inattendus, contraires Ă touteattente. Ainsi du rĂŽle dâun Guelfo
Zamboni, protagoniste dâune affaire quijette un jour nouveau sur des faits tropsouvent oubliĂ©s.NĂ© en 1897, Ă Santa Sofia (province deForlĂŹ en Ămilie-Romagne), Zamboni arri-ve Ă Salonique en fĂ©vrier 1942, en qualitĂ©de consul gĂ©nĂ©ral dâItalie. Il trouve surplace une situation compliquĂ©e, en raisonnotamment dâune importante commu-nautĂ© juive qui, forte de 56 0000 person-nes, est la cible privilĂ©giĂ©e des program-mes raciaux mis en pratique par les forcesnazies installĂ©es depuis le 9 avril 1941. Ilfait rapidement le point. Impossible decautionner ce qui se met en place.Inacceptable, le violent sentiment dehonte qui lâaccable, un certain samedi dejuillet 1942, face au spectacle de 7 000Juifs regroupĂ©s sur la place Elefteria etcontraints par les Allemands Ă exĂ©cuterdes exercices grotesques. Tous serontensuite condamnĂ©s aux travaux forcĂ©s. Huit mois seulement aprĂšs cette journĂ©etorride, câest la mise en route du program-me dâĂ©limination systĂ©matique qui fera43 000 morts. Zamboni est rĂ©solu Ă le
contrecarrer avec la derniĂšre Ă©nergie. Ilsâoccupe en prioritĂ© des juifs italiens qui,aprĂšs son intervention, seront considĂ©rĂ©scomme italiens et non comme juifs, ce quiles soustrait aux persĂ©cutions. Il entrep-rend ensuite de sâoccuper des juifs Ă©tran-gers. Il invente pour cela un stratagĂšmerisquĂ© mais efficace. Le consulat italiendĂ©livre des centaines de faux papiers, pro-curant une citoyennetĂ© provisoire Ă desgens qui nâont pas la moindre attache enItalie. ExaspĂ©rĂ©s par lâindiscipline de leuralliĂ©, les dirigeants nazis, nâen sont pasmoins paralysĂ©s par les dĂ©marchestatillonne auxquelles les soumet lâespritinventif de Zamboni. La Villa Olga, quiest le siĂšge du consulat, devient dĂšs lors unvĂ©ritable lieu de pĂšlerinage pour bon nom-bre de Juifs. Le consul trouve des arrange-ments avec le ministĂšre italien desAffaires Ă©trangĂšres qui, aprĂšs maints ater-moiements, finit par donner son aval. Ilobtient mĂȘme lâindispensable complicitĂ©de plusieurs personnalitĂ©s: Bastiani qui,sous-secrĂ©taire au ministĂšre des AffairesĂ©trangĂšres et partisan indĂ©fectible de sonaction, supervise la fabrication de la plu-part des faux papiers ; Merci, qui, officierde la Garde de Finance au consulat, y est
employĂ© en qualitĂ© dâinterprĂšte en raisonde sa parfaite connaissance de lâalle-mand ; Ghigi qui, diplomate de plus hautrang Ă AthĂšnes oĂč se trouve le quartiergĂ©nĂ©ral italien, se rĂ©vĂšle un alliĂ© prĂ©cieux;Castruccio qui, ami de Zamboni, sera sonsuccesseur. Au printemps 1943, AloĂŻsBrunner et Dieter Wisliceny arrivent deBerlin. Proches collaborateurs dâEichmann,ils sont chargĂ©s de la mise en Ćuvre de la« solution finale » Ă Salonique. La quasi-totalitĂ© de la population juive sera dĂ©por-tĂ©e dans les camps de la mort. Zamboni quitte ses fonctions le 18 juin1943, mais il a prĂ©parĂ© le terrain pour sonsuccesseur et ami Castruccio. Il a notam-ment eu lâidĂ©e du « train du sauvetage »,ce convoi ferroviaire qui permettra dâĂ©va-cuer, quelques mois plus tard, des centai-nes de juifs, dont 350 Ă©trangers munisdâun passeport italien obtenu Ă AthĂšnes,en zone dâoccupation italienne. Ă sonretour Ă Rome, il doit se dĂ©fendre avecacharnement contre ses supĂ©rieurs hiĂ©rar-chiques qui entendent le mettre Ă la retrai-te anticipĂ©e. Il obtient finalement gain decause parce que le rĂ©gime, dĂ©jĂ moribond,souhaite mettre une sourdine sur tout cequi sâest fait pendant la guerre.
Lucillo Merci rĂ©digera ultĂ©rieurement lejournal des Ă©vĂ©nements survenus Ă Salonique, Ă©vĂ©nements dont les preuvesseront publiĂ©es dans le livre dâAntonioFerrari, Alessandro Coppola et JannisChrisafis, Ebrei di Salonicco 1943, i docu-menti dellâumanitĂ italiana. (Les juifs deSalonique, 1943 : les documents qui attes-tent lâhumanitĂ© italienne). En 1992, le courageux consul est fait « Juste entre les Nations ». Ă cette occa-sion, il consent enfin Ă parler de cet Ă©piso-de de sa vie Ă un journaliste. Il dĂ©crit alorsde maniĂšre circonstanciĂ©e les mois quâil avĂ©cus Ă Salonique. Ce qui ressort de sesdĂ©clarations câest sa ferme conviction denâavoir fait que son devoir, un devoirmoral dictĂ© par lâamour authentique de sonprochain. Le destin de Zamboni permet deprendre conscience de la complexitĂ© desdynamiques souvent contradictoires qui sesont fait jour pendant la Seconde Guerremondiale : les appuis fournis par divershauts fonctionnaires italiens donnent Ă entendre que lâItalie condamne fermementles atrocitĂ©s racistes contre les Juifs, rĂ©vĂ©-lant ainsi, souvent, son visage de Juste.
Traduit de lâitalien parG.-G. Lemaire
Guelfo Zamboni, consul Ă Salonique ou le visage dâune Italie Juste par Leonardo Arrighi
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Ohr torah de Nice â qui avait invitĂ©pour lâoccasion lâĂ©cole catholiqueSainte ThĂ©rĂšse â, puis Ă lâUniversitĂ©.Un ami rabbin, appuyĂ© par un autre amiprĂȘtre, mâa affirmĂ© que ces actionsavaient Ă©tĂ© inspirĂ©es Ă un juif incroyantpar lâEternel, ce qui est aussi difficile Ă dĂ©montrer que le contraire. Mais jemâen moque ! Est-ce que je me senscomplĂštement juif ou rien quâun petitpeu ? La question ne se pose pas ! Tant
quâil y aura des antisĂ©mites, tant quâil yaura des racistes, des esclavagistes â caril y en a encore plus quâon ne peut croi-re â, je mâopposerai. Hier en dĂ©filant,aujourdâhui en Ă©crivant. Avec mescamarades juifs comme avec ceux quine le sont pas, avec les croyants commeavec ceux qui ne le sont pas ! Ah ! lalaĂŻcitĂ© !
* AMEJDAM Association pour la Mémoiredes Enfants Juifs Déportés des Alpes-Maritimes
(Suite de la page 8) Et câest conjointement que notreentente a reçu le 3 mars 2013, devantplus de trois cents personnes, Mme IbnZiaten, maman du premier des soldatsabattus par Merah et, par vidĂ©o-confĂ©-rence, M. Sandler, pĂšre et grand-pĂšre detrois des victimes du mĂȘme Ă lâĂ©colejuive de Toulouse. Le lendemain et sur-lendemain, nous sommes allĂ©s dans leslycĂ©es de la ville, puis Ă lâĂ©cole juive
** NDLR : Nous avons maintenu NaĂŻe Pressebien quâil sâagisse, depuis 1982, de PresseNouvelle Magazine, Ă©mus que nous Ă©tions de larĂ©manence de ce titre pour lâauteur.
*** Cf. Enfant caché, Hommage et malentendu.
Câest Ă Berlin quâil dĂ©bute vraiment autemps de la RĂ©publique de Weimar,avant dâassister Ă la prise de pouvoir parles nazis et dâĂȘtre, lui-mĂȘme, victime desdiscriminations imposĂ©es aux Juifs.Les passants tranquilles dans les rues, etles passages de la capitale allemande desannĂ©es vingt-trente et les enfants insou-ciants et rieurs, laissent la place aux affi-ches et aux drapeaux Ă croix gammĂ©es etĂ ce petit garçon dans sa poussette bran-dissant un fanion Ă lâeffigie dâHitler.Vishniac, comme tous les Juifs, nâa plusle droit de photographier dans les rues. Iltriche en baladant sa fille et en la faisantposer devant la vitrine dâun magasin oĂčlâon vend des ustensiles pour mesurerâŠle crĂąne des Juifs. Entre 1935 et 1939*, il parcourt laPologne, la Lituanie, la Hongrie, laTchĂ©coslovaquie, lâUkraine et fixe sur lapellicule la vie quotidienne des popula-tions juives dans les grandes villes(Varsovie, Vilna, Lodz, Cracovie) et les
nal de son pĂšre. A partir de lĂ , le narra-teur revisite La Bachellerie en se lançantsur les traces de la mĂ©moire de cesfamilles juives disparues.Destins croisĂ©s et peinture dâundĂ©partement de la France profondedans cette pĂ©riode troublĂ©e.Plusieurs axes se croisent qui donnentune palpitation Ă cet ouvrage. On y app-rend une foule de choses concernantlâHistoire et ce qui sâest passĂ© dans cedĂ©partement oĂč la vie Ă©tait rude et sansconfort, mais on y voit aussi la vie, lesmĆurs des villages de Dordogne decette Ă©poque, la vie des diffĂ©rentes com-munautĂ©s, leur travail. Lâhistoire se croi-se avec celle du narrateur et ses souve-nirs intacts, celle des natifs de la rĂ©giondurant lâOccupation et celle de cesfamilles juives et non juives venues deStrasbourg. Un village qui vivait un peuhors du temps, souffrait moins de la faimquâailleurs, Ă©tait humain et tolĂ©rant, jus-quâaux premiers signes dâantisĂ©mismeen 1941. On y apprend comment lapopulation de lâest de la France(Alsace/Loraine) a Ă©tĂ© transplantĂ©enotamment en Dordogne, alors que le1er septembre 1939, lâĂ©tat-major fran-çais avait ordonnĂ© lâĂ©vacuation desvilles entre le Rhin et la ligne Maginot.80 000 habitants de Strasbourg et des
shtĂštels des coins les plus reculĂ©s desCarpates. Il accumulera 16 000 nĂ©gatifsdont 2 000 seulement pourront ĂȘtre sau-vĂ©s. Vishniac rĂ©pond Ă une commande :lâAmerican Jewish Joint DistributionCommittee (JDC ou "Joint"), fondĂ© en1914 aux Ătats-Unis, a besoin dâargent ;il veut Ă©mouvoir lâopinion juive la plusriche et propose au photographe de four-nir des images des Juifs de lâEst les pluspauvres, les plus dĂ©munis. Roman rĂ©ali-se lĂ une Ćuvre dont il ignore la portĂ©ehistorique. MĂȘme sâil affirmera plus tard,« Je sentais que le monde allait ĂȘtrehappĂ© par lâombre dĂ©mente du nazismeet quâil en rĂ©sulterait lâanĂ©antissementdâun peuple dont aucun porte-parole nerappellerait le tourment », mĂȘme sâilavait lu Mein Kampf, nul et donc pas luiaussi, ne pouvait prĂ©voir la catastrophequâallait ĂȘtre la Shoah. Mais il est dans lavĂ©ritĂ© lorsquâil dĂ©clare, aprĂšs la guerre :« Je nâai pas pu sauver mon peuple, jâai
environs sont arrivĂ©s en Dordogne. Et avec la dĂ©bĂącle de 1940, le retour desstrasbourgeois non juifs Ă Strasbourg,tandis que restaient Ă La Bachellerie 15familles juives. On y parle des camps deGurs et de Rivesaltes oĂč lâon dĂ©portaitdes politiques de Paris, dâAragon (et deBlanche et lâoubli) venus rendre visite Ă LĂ©on Moussinac, et des rĂ©sistants abattus.On y dĂ©crit le maquis et les horreurs de ladivision Brehmer qui arrive dans la rĂ©gionfin mars 1944 pour y traquer les juifs rĂ©fu-giĂ©s dans la rĂ©gion et les rĂ©sistants.Un trĂšs beau livre qui ne fait pas dansle pathos.Instructif, il nous fait dĂ©couvrir demaniĂšre trĂšs distanciĂ©e des histoiresdouloureuses dans une Histoire troublĂ©e.Lâauteur remonte le temps, pour un ulti-me Ă©cho Ă ce drame qui sâest produitdans le village de son grand-pĂšre. EnmĂȘme temps, câest un retour sur le lieude cette enfance insouciante, une revisi-te de son village avec les yeux de celuiqui a appris et dĂ©couvert cette stĂšle Ă lasortie du hameau de la GenĂšbre, avant lacĂŽte de la Madeleine, avec les noms desrĂ©sistants et juifs assassinĂ©s parles allemands. * Jean-Marc Parisis,Les Inoubliables,Ăd. Flammarion, 2014, 240 p., 18 âŹ
On connaissait les photographiesréalisées par Roman Vishniac aumilieu des populations juives
dâEurope centrale et orientale dans lesannĂ©es trente1 ; lâexposition prĂ©sentĂ©e auMusĂ©e dâArt et dâHistoire du JudaĂŻsme(MAHJ) nous rĂ©vĂ©le les talents multiplesdâun artiste autant que dâun savant2.TrĂšs jeune le petit Roman, nĂ© Pavlovskdans la banlieue de Saint-PĂ©tersbourg en1897, est passionnĂ© de biologie et dephotographie. Pour ses sept ans, sagrand-mĂšre lui offre un premier appareilphoto et un microscope. Le garçon adap-te lâun Ă lâautre et se met Ă photographierdes insectes minuscules. La microphoto-graphie est nĂ©e. Elle lâoccupera jusquâĂ lafin de sa vie dans lâaprĂšs-guerre.Mais avant, Roman Vishniac qui suit sesparents dans leur exil berlinois en 1920 sesera formĂ© Ă lâart de la photo, mĂȘlant lesstyles et les influences des Ă©poques suc-cessives : le constructivisme et les avant-gardes Ă la Rodtchenko, le rĂ©alisme.
Un livre de mémoire qui traverse laDordogne et des destins doulou-
reux sous lâoccupation.Tout part dâune photo trouvĂ©e sur Internet,celle de la famille Schenkel, un coupleavec ses cinq enfants dĂ©portĂ©s et assassinĂ©sĂ Auschwitz en 1944. Ce clichĂ©, trouvĂ©alors quâil recherchait vainement desphotos du VĂ©lâ dâHiv lors de la rafle dejuillet 1942, le ramĂšne dans le village deson enfance, lĂ oĂč il a passĂ©, bien plus tardaprĂšs la guerre, toutes ses vacances Ă LaBachellerie en Dordogne dans la maisonde ses grands-parents paternels. Uneenfance heureuse et insouciante dans cebeau village et cette belle Dordogne qui nelaissait rien poindre de ce qui sâĂ©tait passĂ©des annĂ©es plus tĂŽt. Un thriller, une enquĂȘte vibrante pourretrouver la mĂ©moire dans les archivesdĂ©partementales et auprĂšs des der-niers tĂ©moins Câest dans lâĂ©dition 2001 du MĂ©morialdes enfants juifs dĂ©portĂ©s de France deSerge Klarsfeld que le narrateur retrouvedâautres photos de familles juives ayantĂ©tĂ© transplantĂ©es de lâest de la France Ă La Bachellerie et environs. Des famillesentiĂšres dĂ©cimĂ©es, et quelques rescapĂ©s.Parmi ceux-ci, il retrouve BenjaminSchupack, le cadet survivant dâunefamille exterminĂ©e, qui lui prĂȘte le jour-
seulement sauvĂ© son souvenir ». Car ce « monde disparu » nous est effective-ment connu aujourdâhui de par sesphotos, ou par les tĂ©moignages picturauxdâIlex Beller3 ou par ceux de TobyKnobel Fluek, nĂ©e Ă Czernica, enPologne, survivante du ghetto de Brody4.Lorsque la guerre Ă©clate, RomanVishniac se rĂ©fugie en France avec safemme et sa fille ; ses parents sont en exilĂ Nice sur laquelle il braque son objectifune fois de plus. Il est cependant internĂ©pendant trois mois dans le camp dâAnnot(Basse-Alpes) avant de partir pour lesĂtats-Unis via Lisbonne. Il essaie alors desensibiliser les AmĂ©ricains aux massac-res des Juifs dâEurope, sans succĂšs. NiRoosevelt ni son Ă©pouse ne rĂ©pondront Ă ses lettres. Ce nâest quâen 1947, quâilrĂ©ussit Ă publier ses clichĂ©s dans un livretragiquement intitulĂ© The VanishedWorld : Jewish Cities, Jewish People. Ilfaudra attendre 37 ans pour quâil paraisseen France oĂč rĂ©side la plus importantepopulation juive dâEurope.Lâexposition du MAHJ est, aujourdâhui,un Ă©crin de vie, grĂące aux fabuleux cli-chĂ©s de Vishniac. Avant tout, par la pas-sion que ce dernier voue aux enfants,dont on se dit, avec horreur, que pas unnâa survĂ©cu et qui, cependant, plus desoixante-dix ans plus tard, ouvrent surnous leurs grands yeux noirs. De quoinous inspirer une infinie tendresse enmĂȘme temps quâune une infinie tristesse.En noir et blanc. 1 Roman Vishniac, Un monde disparu, prĂ©f. ĂlieWiesel, Ăd. Le Seuil, Paris, 1984.2 MAHJ, HĂŽtel de Saint-Aignan, 71 rue duTemple Paris 3e. Jusquâau 25 janvier 2015 - lu. auve. 11 a 18h., Di. 10 a 18h., Me. nocturne jusquâa21 h.3 Ilex Beller, Ils ont tuĂ© mon village: main shtetl,Cercle d'art, 1981 - La vie du shtetl: la bourgadejuive de Pologne en 80 tableaux, Ăd. du Scribe,19864 Toby Knobel Fluek, Memories of My Life in aPolish Village 1930-1949, Hamish Hamilton,London 1990.* NDLR : Albert Londres dĂ©crivait dĂ©jĂ la misĂšrenoire des juifs dâEurope de lâEst dans un roman-reportage Le juif errant est arrivĂ© paru en 1930aux Ă©ditions Albin Michel et accessible viaInternet grĂące aux archives de la BNF :http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k206742b
« Ătre juif au XXI e siĂšcle »
Culture
Maurice Winnykamen est lâauteur deGrandeur et misĂšre de lâantiracisme - le MRAPest-il dĂ©passĂ© ? - Enfant cachĂ©, Hommage etmalentendu - La faute de Rachel, quâest-ce queje fasse ? - Symphonie de la mĂ©moire, le Collineet villa Jacob 2 tomes - Arnold Racine, unhomme dans les tourmentes - Pour ne jamaisles oublier - Les superstitions des voileux.
LâĆil tĂ©moin de Roman Vishniacpar Bernard Frederick
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« Les inoubliables » de Jean-Marc Parisislu par Simone Endewelt
I. John FORD - Du rĂȘve amĂ©ricain Ă lâĂ©cran noir
Cinéma La chronique de Laura Laufer
Mendjizky, de pĂšre en fils
Les livres Ă offrir* CINĂMATHĂQUE FRANĂAISE -Cycle John Ford du 3 dĂ©cembre au 23fĂ©vrier 2015 - Cliquer sur ce lien pour plusde dĂ©tails : http://www.cinematheque.fr/fr/dans-sal-les/hommages-retrospect ives/f iche-cycle/john-ford,609.html
En 1894, naĂźt Martin Sean Feeneydit aussi Sean Aloysius OâFeeney,cadet dâune famille pauvre dâim-
migrĂ©s irlandais qui compte onzeenfants. Son cinĂ©ma nâoubliera pas cetteorigine. Sous le nom de John Ford, entre1917 et 1966, il racontera le rĂȘve amĂ©ri-cain, puis en montrera les doutes, ledĂ©clin et la fin. Cet article non exhaustifrevient sur quelques traits de ce regardqui a saisi ainsi le mouvement delâHistoire.
Les films de Ford possĂšdent une gĂ©nialevitalitĂ© mĂȘlant tension et pause de lâac-tion, intensitĂ© tragique et humour parune Ă©criture claire, sobre, rigoureuse liĂ©eĂ un sens admirable de la compositionplastique. Que lâaction ait une durĂ©ecourte (La patrouille perdue) ou sedĂ©ploie sur de nombreuses annĂ©es (LaprisonniĂšre du dĂ©sert), que sa formesâapparente Ă la nouvelle (Inspecteur deservice), Ă la pochade (PlanquĂ© malgrĂ©lui), Ă la fresque (Ce nâest quâun aurevoir), Ford sâintĂ©resse dans un espaceprĂ©cis au microcosme humain que faitvivre sa troupe fidĂšle dâacteurs dans unjeu naturel mĂȘlant hĂ©ros et personnagespittoresques. Citons quelques vedettes :Harry Carey dans le muet, Will Rogers,Henry Fonda, John Wayne, JamesStewart, Maureen OâHara mais aussiWard Bond, Woody Strode, DonaldCrisp, Anna Lee, Mae Marsh ⊠et JaneDarwel superbe mĂšre courage desRaisins de la colĂšre dont certainessĂ©quences prĂ©figurent le nĂ©orĂ©alisme.Ford crĂ©e une comĂ©die humaine qui a satendresse. Il tourne dans des genresvariĂ©s, mais reste cĂ©lĂšbre pour ses wes-terns. La majestueuse Monument Valleyy devient son dĂ©cor favori et sa signatu-re. Autre paysage inoubliable, lâIrlande :
tantĂŽt opprimĂ©e et en lutte (Le mouchard,Le jeune Cassidy), tantĂŽt lyrique(Lâhomme tranquille, Quand se lĂšve lalune, tournĂ©s en Irlande).
Pour Ford, la figure de Lincoln incarne lerĂȘve amĂ©ricain. Le cheval de fer, Ă©popĂ©edu premier chemin de fer transcontinen-tal lui est dĂ©diĂ©. Chef-dâĆuvre poĂ©tique,Vers sa destinĂ©e trace du jeune Lincoln(Henry Fonda) le portrait dâun hommesimple, tenace, issu et proche du peupledont les qualitĂ©s morales et physiquesemportent lâadhĂ©sion, mais une figureque Ford dĂ©tache et agrandit Ă la dimen-sion du mythe national. Son aura rayon-ne encore dans Je nâai pas tuĂ© Lincoln.
Autres thĂšmes rĂ©currents : famille, Ă©gli-se, armĂ©e, nation, des institutions dontFord montre le protocole, les codes et lâĂ©-rosion. La famille se dĂ©lite jusquâĂ la rup-ture sous la contrainte Ă©conomique etsociale (Quâelle Ă©tait verte ma vallĂ©e, Lesraisins de la colĂšre, Rio Grande, Lâaiglevole au soleil). La cuisiniĂšre et lâanciencommis de cuisine forment Ă West Pointun couple irlandais stĂ©rile regardant,impuissant, dĂ©filer les soldats dâuneguerre Ă lâautre (Ce nâest quâun aurevoir). Le docteur de La chevauchĂ©efantastique heureux aide Ă une naissance.Vingt ans plus tard, celui des Cavaliers
Culture
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I l était une fois le cinéma* ou com-ment les hommes ont voulu garder
trace de leur prĂ©sence par des imagesdonnant lâillusion de la vie. Un rĂȘvedevenu rĂ©alitĂ©, le cinĂ©ma. Ce livre enĂ©crit lâhistoire, concentrant lâessentieldans un style trĂšs accessible pour ses jeu-nes lecteurs. Sa qualitĂ© est de montrer lelien existant entre le monde et le cinĂ©ma,comment ce dernier sâest inscrit danslâhistoire et lâhistoire en lui, Ă travers seshommes, ses techniques, ses styles, sonĂ©conomie, ses institutions, ses pays, sesspectateurs. ConseillĂ© dĂšs 11 ans.
Lâart du cinĂ©ma Ce beau livre dâartdeviendra une rĂ©fĂ©rence et de poids :4462 grammes ! SynthĂ©tique, il sâorga-nise en quatre grands chapitres LesdĂ©buts, Le rĂšgne du cinĂ©ma, Le bascule-ment moderne et La planĂšte cinĂ©machange de forme pour dire simultanĂ©-ment lâhistoire du cinĂ©ma et le mouve-
ment de lâhistoire qui sây reflĂšte. De lasortie du XIXe siĂšcle Ă la mondialisa-tion, de lâart de ses pionniers Ă celui desauteurs de la modernitĂ©, plus dâun siĂšclede bouleversements traverse le cinĂ©ma,de lâEurope, aux AmĂ©riques, Ă lâAfriqueet Ă lâAsie. Par ses ressources encyclopĂ©-diques et par le plaisir quâil offre auxyeux, un livre prĂ©cieux. LLJean-Michel Frodon : * Il Ă©tait une fois lecinĂ©ma, Ăd. Gallimard Jeunesse, 2014, 216 p.,22,50 ⏠** Lâart du cinĂ©ma, Ăd. Citadelles etMazenod, 2014, coll. Art et GrandesCivilisations, 624 p. reliĂ©es toile sous jaquette etcoffret., 800 ill. couleur, 205,00 âŹ
avoue Ă©prouver de lâeffroi Ă chacunedâelles. Le monde change, la dĂ©mocratiedĂ©cline : le juge Priest (nom messia-nique) lutte contre lâexclusion et le lyn-chage dans Le soleil brille pour tout lemonde et sera Ă©lu maire ; plus tard, dansLa derniĂšre fanfare, le candidat prochedu peuple appartient au passĂ© et perdcontre une potiche Ă la solde des finan-ciers et lancĂ©e par les mĂ©dias.
Ă la fin de la Piste des Mohawks, le dra-peau exalte en 1776 lâhĂ©roĂŻsme despionniers et ses premiĂšres Ă©toiles saluentla diversitĂ© culturelle dans la naissancede la nation. Vingt ans plus tard, toute ladynamique du film Les cavaliers estconstruite sur la pĂ©nĂ©tration violente etcontinue des Yankees en terre sudiste. Lapolitique de la terre brĂ»lĂ©e ouvre uneplaie dans la nation. Sous le drapeau,lâingĂ©nieur dĂ©truit les voies de cheminde fer quâil construit dans le civil et lemĂ©decin rĂ©pare sans cesse la chair Ă canon pour la renvoyer Ă la boucherie.La division du travail est le secret de lâef-ficacitĂ© dans la machine de destruction.
Le western abandonne la figure messia-nique et salvatrice du hĂ©ros guidant lacommunautĂ© en Terre promise (Leconvoi des braves). Dans le premiervolet de la trilogie de la cavalerie, LeMassacre de Fort Apache, le colonelThursday avide de gloire et mĂ©prisantlâIndien, provoque une guerre absurde etle massacre de ses hommes. Ă la fin dufilm, lâofficier survivant raconte Ă lapresse une lĂ©gende contraire Ă la rĂ©alitĂ©.Ce film inspirĂ© de la dĂ©faite de Custer Ă Little Big Horn dĂ©nonce la corruption delâadministration. La prisonniĂšre du dĂ©sertconfirme le doute. Ce film tournĂ© Ă Monument Valley raconte la recherchedâune enfant enlevĂ©e par les Comanchespar son oncle Ethan et son frĂšre adoptifMartin mĂ©tis de sang indien. La guerrecivile a dĂ©sĆuvrĂ©, et rendu amer et racis-te Ethan (John Wayne), mĂ» par la haineet la vengeance. Avec ce personnagepoignant et complexe, commence ladĂ©construction du mythe de lâOuest et lacrise de son hĂ©ros.
Nous assisterons Ă leursfunĂ©railles dans Lâhommequi tua Liberty Valance. Il reste auGuthrie Mc Cabe des Deux cavaliers Ă monnayer lâillusion du droit du sang parun pari risquĂ© sur la libre entreprise pourcourir Ă la faillite ! Le dernier western delâĆuvre revient au thĂšme de la Terre pro-mise, mais pour le droit au retour de lanation Cheyenne (Les Cheyennes) : unegeste noble et tragique.
Ford a superbement filmĂ© les femmes.Maureen OâHara, la rousse irlandaise autempĂ©rament de feu, Ava Gardnerfemme libre et superbe dans Mogambo.Il a portĂ© dans Mary Stuart, un regardamoureux sur lâactrice KatharineHepburn, femme libre et de convictions,son amie durant toute sa vie.
En 1966, il livre un film sombre etmagnifique, Seven women. FrontiĂšre chi-noise en 1935 : la docteure Cartrwright(Anne Bancroft), femme athĂ©e qui fume,boit, a aimĂ© dans lâadultĂšre, arrive dansune mission pour lâaccouchement dĂ©licatdâune femme en Ăąge de mĂ©nopause. Ladirectrice de la mission dĂ©nonce en ellelâimage du pĂȘchĂ© et de la fornication.Une Ă©pidĂ©mie sâabat sur le lieu, puis unehorde qui pille et viole. Ni armĂ©e, nipatrie, ni Dieu pour sauver la commu-nautĂ©. Le seul salut viendra deCartwright armĂ©e par la vie pour fairefront. Ce sera au prix du sacrifice dâelle-mĂȘme dans un geste ultime et lançant cesderniers mots au bourreau « So long youbastard ! » suivi du fondu au noir dâunĂ©cran qui restera noir. Ces paroles du per-sonnage mais aussi du cinĂ©aste avantlâentrĂ©e dans les tĂ©nĂšbres, signent le nau-frage dâune civilisation et lâhĂ©ritage cinĂ©-matographique dâun gĂ©ant.
Ă suivre en janvier II. John Ford. 1939-1945 de Midway Ă Nuremberg
Juste au niveau du métro Vaugirard(279 rue de Vaugirard, au fond
dâune impasse nommĂ©e squareVergennes) se trouve un magnifiquepetit musĂ©e privĂ©, le musĂ©e :MENDJINSKY - Ăcoles de Paris.
Le fonds provient des Ćuvres du pĂšre,Maurice, ami de Renoir, Picasso etdâautres artistes Ă©migrĂ©s, combattantFTP-MOI. Actuellement et jusquâĂ lafin de lâannĂ©e, y sont exposĂ©es desĆuvres magistrales*, dĂ©diĂ©es auxcombattants du ghetto de Varsovie oĂčsa famille fut exterminĂ©e.
Le fils, Serge, Ă lâorigine de ce musĂ©e,ne dĂ©mĂ©rite pas du pĂšre en joignant Ă la poursuite des recherches de ce der-nier, son propre chemin dâexpressiontout aussi impressionnant. Le tout Ă lâabri des bruits dans un bĂątiment artdĂ©co, Ă lâabri aussi des bruits des fou-les qui se bousculent lĂ oĂč les mĂ©diasles envoient. GisĂšle Jamet* Jusquâau 31 dĂ©cembre 2014, lâexpositionMaurice MENDJIZKY et la FIGUREHUMAINE, autour des dessins prĂ©paratoiressur le Ghetto (1947-1950) sera ouverte tous lesjours sauf le jeudi et jours fĂ©riĂ©s de 11 h Ă 18 h.(http://www.fmep.fr)
acteurs et particuliĂšrement MilenaVlach qui incarne Eve, la fĂ©ministeproche de JaurĂšs au journallâHumanitĂ©, et Guillaume VanâtHoff, le merveilleux Le Gavrochevendeur du journal, qui nous plongesi habilement dans lâĂ©poque, Ă cetteouverture vers la vie et les luttes. Le ThĂ©Ăątre de lâĂpĂ©e de Bois, hautlieu dâune programmation dâextrĂȘmequalitĂ©, est un cadre qui se prĂȘte par-ticuliĂšrement à « rallumer tous lessoleils ». Nous suivrons attentivement lâactua-litĂ© de cette compagnie trĂšs profes-sionnelle et talentueuse pour nos lec-teurs de la PNM. Peu subventionnĂ©e,la compagnie mĂ©rite le soutien desspectateurs (un appel aux dons estfait) afin quâelle puisse continuer Ă monter des piĂšces de qualitĂ© dont laprochaine « Antigone 14-18 ou leprocĂšs dâHĂ©lĂšne Brion », prĂ©vuepour 2017, est particuliĂšrement allĂ©-chante.
* CrĂ©Ă© au ThĂ©Ăątre de lâĂpĂ©e de Bois, ce specta-cle sera repris du 14 au 17 janvier 2015 auThĂ©Ăątre Berthelot (Montreuil) petit thĂ©Ăątre du style des Bouffes du
Nord. Bien implantĂ© depuis 1985 dansce quartier populaire, au 35 rue LĂ©ondans le XVIIIe arrondissement, il sâestsignalĂ© par une programmation auda-cieuse. Il est restĂ© ouvert aux associa-tions et aux mouvements sociaux. Sivous ĂȘtes amoureux de Paris et du thĂ©Ăą-tre, vous nâaccepterez pas que soientdĂ©truits des lieux emblĂ©matiques d'unevraie culture et d'un vrai engagementpopulaires. BChttp://www.avaaz.org/fr/petition/Il_faut_sau-ver_le_lavoir_moderne_parisien/?tUhkdbb
plaintes, morts, rĂ©volte emplissent lewagon, le narrateur rapporte cetteconversation entre un pĂšre et son filsde 12 ans, ce pĂšre qui continue, commesi de rien nâĂ©tait, Ă enseigner Ă son filslâaĂ©rodynamisme, Dieu, Mozart, lesmathĂ©matiques, Spinoza, la gĂ©ogra-phie, lâamour et lâhumour ; sept joursqui contiendront, en temps rĂ©duit, toutela vie normale qui aurait dĂ» advenirpour cet enfant, jusquâĂ son mariage.Le pĂšre et le fils se prĂȘtent au jeu : « Mon fils, ces gens crient si fort parcequâils ne veulent pas que tu entendesmes explications et que tu devrais ĂȘtrecapable de trouver la rĂ©ponse tout seul !Dit-il en souriant. En souriant ! En cetemps- lĂ , lâamour Ă©tait de mentir auxenfants. »Le comĂ©dien crĂ©e un lien avec lesspectateurs, seulement une valise et unlivre comme accessoire, et il noustransmet en direct. Magnifique !
* Mr Schpill et Mr Tippeton de Gilles Segal(disparu le 11 juin 2014) a reçu deux « MoliÚre »en 1996 et le prix SACD en 1995. Gilles Segal aété comédien, mime, metteur en scÚne, auteurdramatique.
* Le spectacle nâest plus programmĂ© dans lessalles de spectacles mais le comĂ©dien peut lejouer Ă la demande (contact : Bords de scĂšnes01 41 90 09 41)
Au dĂ©but, il y a la belle, lâĂ©tonnante JulieCloux, avec ses brĂšves contorsions, quiau fur et Ă mesure quâelle se met Ă conter, fait entrer la bĂȘte en elle pour finirpar se retrouver dâun seul coup toute nuesur scĂšne. Puis sâenchaĂźnent 14 tableauxhumoristiques et visuels au cĆur de lasavane africaine oĂč la musique, le cor-porel et le visuel, la fĂ©Ă©rie prennent alorsle pas sur la parole. Le spectacle plaĂźt oune plaĂźt pas. Toujours est-il que, mĂȘmesâil y a quelques clichĂ©s, il nous assĂšne
Une Ă©criture intelligente et un spec-tacle trĂšs vivifiant qui rĂ©sonne dansnotre actualitĂ©.« Rallumer tous les soleils » est unspectacle magnifique, engagĂ©, intelli-gent, qui nous incite Ă penser. Il nousredonne la pĂȘche et montre que thĂ©Ăą-tre et politique sont bien rĂ©concilia-bles. Surtout quand il est servi pardâexcellents comĂ©diens, une mise enscĂšne trĂšs Ă©tudiĂ©e et fine, et un textetrĂšs bien construit et documentĂ©, parun auteur, JĂ©rĂŽme Pellissier, quiconnaĂźt JaurĂšs et PĂ©guy sur le boutdes doigts. Il mĂȘle fiction et rĂ©alitĂ©,histoire et questions contemporaines. Ce spectacle nous rappelle combienles idĂ©es de JaurĂšs sont encore actuel-les et combien ses rĂ©flexions Ă©taientpertinentes jusquâĂ ĂȘtre visionnaireslorsquâil parle de lâislam, de la guer-re, du capitalisme, du colonialisme,de lâEurope, de la laĂŻcitĂ© quâil ne vou-lait pas que lâon confonde avec lâa-thĂ©isme. Un spectacle qui rendrait Ă ceux qui lâauraient perdu le goĂ»t desutopies et la nĂ©cessitĂ© du combat : « Rallumer tous les soleils » sont lesparoles de JaurĂšs, de mĂȘme que desexpressions fortes telles « Si lâhuma-nitĂ© a eu la force de concevoir la jus-tice, elle a la force de la rĂ©aliser⊠».Lâovation de la salle avec ses tonner-res dâapplaudissements rend homma-ge Ă cet homme clairvoyant qui fait sibien Ă©cho en notre siĂšcle, Ă un specta-cle si bien menĂ©, si Ă©clairant, aux Le Lavoir Moderne Parisien est en dan-
ger. L'unique thĂ©Ăątre de la Goutte d'Orrisque de tomber entre les mains d'unpromoteur immobilier. C'est la politiquede la rentabilitĂ© Ă tout prix. Pour scanda-leuse quâelle soit, lâaffaire est banale. LethĂ©Ăątre nâest pas rentable. Dâune maniĂš-re gĂ©nĂ©rale, il est rare que lâon fasse desaffaires avec la crĂ©ation artistique. Restequâil faut prĂ©server le patrimoine artis-tique de Paris. Reste que la France abesoin dâune authentique politiqueartistique. Un peuple vivant a besoindâune culture vivante. Le LavoirModerne Parisien est un magnifique
Un texte trĂšs Ă©mouvant menĂ© demain de maĂźtre par Pierre-YvesDesmonceaux, un hommage Ă la vie,un humour et une distanciationpour rĂ©sister au malheur et conti-nuer Ă se sentir homme.La mise en scĂšne et lâinterprĂ©tationpudique et forte de Pierre-YvesDesmonceaux est Ă la hauteur de ce trĂšsbeau texte profond et bouleversant quâilsert magnifiquement, lui donnant unrythme scĂ©nique, dĂ©pouillant la scĂšnede tout artifice, soulignant finement etpudiquement la force de vie et dâamour.Le dĂ©but du rĂ©cit donne le ton : « En cetemps lĂ , lâamour Ă©tait de chasser sesenfants ».DĂ©portĂ© Ă Auschwitz via les convois dela mort, un homme juif Ă©crit ces septjours passĂ©s dans ces wagons, pour lapremiĂšre fois, et des annĂ©es plus tard,pour transmettre la mĂ©moire. Câest Ă son fils parti vivre aux U.S.A. quâiladresse son livre afin que les gĂ©nĂ©ra-tions suivantes puissent en prendreconnaissance. Mais la transmissionpasse aussi par lâĂ©ducation et lâamourqui fait quâon se sent homme mĂȘmedans les situations les plus tragiques,les plus avilissantes. Au cĆur de latourmente, alors que cris de douleur,
La performance de Marielle PinsartâEn quoi faisons-nous compagnieavec le Menhir dans les landesâscotche les spectateurs.Marielle Pinsart est une pince-sans-rire,une foldingue. Elle est capable de nousexpliquer dans une confĂ©rence sur lessinges capucins que les singes « bobo »de certains quartiers en Suisse ont euxaussi certaines caractĂ©ristiques. Câestquâil existe des parallĂšles entre ces petitsprimates dâAmĂ©rique du Sud et cesgrands primates dâEurope occidentalecentrale nous affirme-t-elle. Et elle nousles dĂ©taille. Son spectacle « En quoi fai-sons-nous compagnie avec le Menhirdans les landes » ne dĂ©ment pas sa fan-taisie et son humour dĂ©capant. Qui dusinge ou de lâhomme est la bĂȘte ? Lestouristes qui viennent dans la jungle afri-caine, ceux qui entament leur chant tyro-lien, les vaudous africains ?
ERRATA de la PNM n° 320(novembre 2014)
Page 4, sous le titre : Dans lasignature, il fallait lire « Jacques »et non « Pierre » CourtĂšs Page 6, bas de 3e colonne : Il fal-lait lire « dans ce nouvel ouvrage(constate lâauteure de la prĂ©face,qui sâen fĂ©licite), les institutionssâestompent au profit des hom-mes. ». Ainsi lâincise â(constatelâauteure de la prĂ©face, qui sâenfĂ©licite)â Ă©tait de Maurice Cling etnon de Michel Laffitte.
une espĂšce de claque qui nous rĂ©veille.On est surpris par la force des images,par ce montage inhabituel. Les comĂ©-diens qui ont beaucoup travaillĂ© parimprovisation se dĂ©brouillent bien etrĂ©veillent la bĂȘte en eux de maniĂšrecocasse et remarquable. En Suisse, cetype de thĂ©Ăątre explore des formes nou-velles dans des lieux diffĂ©rents du grandthĂ©Ăątre plus traditionnel. * Le TARMAC - La scĂšne internationalefrancophone, tel. 01 43 64 80 80
Théùtre La chronique de Simone Endewelt
© T
. Laf
aye
© Laurence Leblanc
Rallumer tous les soleils : JaurÚs ou la nécessité du combat
Il faut sauver le « Lavoir Moderne Parisien »
« En ce temps-lĂ lâamour » de Gilles Segal*
PNM n°321 - Décembre 2014
Loufoque, dingo, fantaisiste
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Culture