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© Sabine Brels, 2016
Le droit du bien-être animal dans le monde : évolution et universalisation
Thèse
Sabine Brels
Doctorat en droit
Docteure en droit (LL. D.)
Québec, Canada
Le droit du bien-être animal dans le monde :
Évolution et universalisation
Thèse
Sabine Brels
Sous la direction de :
Lyne Létourneau, directrice de recherche
Richard Ouellet, codirecteur de recherche
iii
Résumé : Le droit du bien-être animal dans le monde : évolution et universalisation
Le droit du bien-être animal s'universalise.
En plus de présenter son évolution mondiale, cette thèse démontre l'existence de solides
fondements au soutien d'une protection universelle du bien-être animal en droit international.
Qu'est-ce que le droit du bien-être animal ? Domaine peu connu de la science juridique
francophone, le droit du bien-être animal (de l'anglais "animal welfare law") concerne
l'ensemble des prescriptions qui règlementent le traitement des animaux utilisés à diverses
fins (production alimentaire et vestimentaire, expérimentation, divertissements, captivité,
compagnie etc.). Au-delà des prescriptions visant à interdire certains actes de cruauté, elles
visent généralement à promouvoir de meilleurs traitements envers les animaux.
Mais les intérêts humains, d'ordre économique, scientifique, culturel ou traditionnel,
constituent autant de limitations et d'exceptions à ces dispositions protectrices. En plus de
présenter une vue d'ensemble du droit du bien-être animal dans le monde, cette étude permet
d'en dégager les principales forces et faiblesses du point de vue de la protection des animaux.
Dans une première partie, cette thèse met en lumière la progression croissante du droit du
bien-être animal. Les premières lois interdisant la cruauté envers les animaux sont nées dans
les pays anglo-saxons et européens au XIXe siècle, avant de s'étendre aux autres pays du
monde au XXe siècle. À partir des années 1960 est apparu un nouveau modèle législatif visant
explicitement le bien-être animal. Peu après sont nés les instruments européens à ce sujet.
Ceux-ci visent désormais à réglementer l’élevage, le transport, l’abattage et l'expérimentation
animale, afin de réduire les souffrances des animaux, désormais reconnus par l’Union
européenne comme des "êtres sensibles" dont le bien-être doit être protégé.
Dans une seconde partie, cette thèse permet d'établir que le bien-être animal est en train
d'émerger comme un nouvel objectif international, voire universel, sur la scène mondiale.
En ce sens, l'objectif de protéger le bien-être des animaux a été récemment intégré au sein des
instruments internationaux, notamment dans les normes de l'Organisation mondiale de la
santé animale au début des années 2000. Aujourd'hui, la protection du bien-être animal attire
l'attention des plus importantes organisations mondiales, comme l'Organisation mondiale du
commerce et même l'Organisation des Nations Unies.
La protection du bien-être animal peut-elle être formellement reconnue par la Communauté
des États et consacrée comme un nouvel impératif universel en droit international ?
L'utilisation du cadre théorique des sources formelles du droit international conduit aux
résultats suivants : il existe un fond commun du droit du bien-être animal, dont peuvent être
dégagés des principes généraux, qui représentent des fondements solides vers la consécration
du bien-être animal comme impératif universel, notamment au sein d’une convention globale.
Enfin, la conclusion principale souligne que le droit du bien-être animal demeure un droit
faible quant à l’objectif protecteur visé. Actuellement, il permet moins le bien-être réel des
animaux que l’atténuation de leurs souffrances. Mais en progressant vers une plus grande
considération de leurs intérêts, le droit pourrait un jour véritablement protéger leur bien-être.
Mots-clefs : bien-être animal ; droit animal ; droit comparé ; droit européen ;
droit international ; principes généraux de droit ; conventions ; organisations internationales.
iv
Abstract: Animal Welfare Law in The World: Evolution and Globalization
Animal welfare law is globalizing.
Beyond presenting its world-wide evolution, this thesis demonstrates the existence of legally
strong foundations toward a universal protection of animal welfare in international law.
What is animal welfare law? Mostly unknown in the legal science of French-speaking
countries, animal welfare law concerns all the prescriptions which aim at reducing the poor
welfare of the animals used for various ends (such as food and clothes production,
experiments, entertainments, captivity, company etc.). Those prescriptions generally aim at
condemning some acts of cruelty and promoting the good treatment of these animals.
However, economic, scientific, cultural or traditional purposes pose often severe limitations
or exceptions. This study presents the general content and outlines the main strengths and
weaknesses of animal welfare law in the world.
In a first part, this thesis brings to light the increasing progression of animal welfare law. First
adopted by Anglo-Saxon and European countries in the XIXth century, anti-cruelty laws then
spread to other countries in the XIXth century. From the 1960s onwards, a new model of
legislation was born, explicitly concerning animal welfare. Right after appeared the European
instruments on this subject, now regulating activities such as farming, transports, slaughter
and experiments. They are aimed to reduce the suffering of the animals, recognized by the
European Union as "sentient beings" deserving protection.
In a second part, this thesis states that animal welfare is emerging as a new objective
internationally, even universally, since the beginning of this XXIth century. In this sense, the
objective of animal welfare protection has been integrated recently in international
instruments, most notably in the standards of the World Organisation for Animal Health from
early 2000'. Today, animal welfare is beginning to be addressed by the largest global
organizations, such as the World Trade Organization and even the United Nations.
Can the protection of animal welfare be formally recognized by the Community of States and
enshrined in international law as a new universal imperative?
Using the theoretical framework of the formal sources of international law lead to the
following results: there is a common ground on animal welfare law, from which general
principles can be identified, in order to allow the establishment of solid foundations towards
the recognition of animal welfare protection as a new universal imperative for the
Community of States, particularly in a global convention.
Finally, the main conclusion underlines that animal welfare law is currently weak regarding
its protective goal. Indeed, it aims less to truly protect the welfare of the animals, than to
merely reduce their suffering. However, in progressing towards a better consideration of
animals' interests, a real protection of animal welfare can become a future reality in the law.
Key words: animal welfare; animal law; comparative law; European law; international law;
general principles of law; conventions; international organizations.
v
TABLE DES MATIÈRES
RESUMÉ ............................................................................................................................................................. III
ABSTRACT ......................................................................................................................................................... IV
TABLE DES MATIÈRES .................................................................................................................................... V
- LISTE DES TABLEAUX ................................................................................................................................. VI
- LISTE DES FIGURES ....................................................................................................................................VII
- LISTE DES ANNEXES ................................................................................................................................. VIII
- LISTE DES ABREVIATIONS ........................................................................................................................ IX
REMERCIEMENTS .......................................................................................................................................... XI
INTRODUCTION ................................................................................................................................................. 1
PARTIE I- LA PROGRESSION NATIONALE ET EUROPÉENNE
DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL ........................................................................................................49
TITRE 1- L’ÉVOLUTION CONSTANTE DES DROITS NATIONAUX SUR LE BIEN-ÊTRE
ANIMAL ...............................................................................................................................................................50
Chap. 1- LES LOIS ANTI-CRUAUTÉ COMME MODÈLE INITIAL DE PROTECTION .......................51 S.1- Les lois anti-cruauté issues des pays anglo-saxons et européens au XIXe siècle .......................51 S. 2- L'expansion des lois anti-cruauté dans de nombreux pays du monde au XXe siècle ...............66
Chap. 2- LES LOIS PRO-BIEN-ÊTRE COMME NOUVEAU MODÈLE DE PROTECTION ..................80 S.1- Les lois pro-bien-être toujours issues des pays anglo-saxons et européens ...............................80 S.2- L'expansion du modèle pro-bien-être dans le monde au début du XXIe siècle .......................101
TITRE 2- LA CONSOLIDATION CROISSANTE DU DROIT EUROPÉEN SUR LE BIEN-ÊTRE
ANIMAL .............................................................................................................................................................114
Chap. 1- LA DOUBLE PROTECTION EUROPÉENNE ET COMMUNAUTAIRE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL ...............................................................................................................................115
S.1- La protection européenne et communautaire des animaux de production .............................115 S.2- La protection européenne et communautaire des animaux de laboratoire et de compagnie 138
Chap. 2- LA PROTECTION RENFORCÉE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL EN DROIT
COMMUNAUTAIRE ........................................................................................................................................150 S.1- De la valeur secondaire à la valeur prioritaire de l'objectif communautaire de
bien-être animal ...................................................................................................................................151 S.2- De la promotion à l'imposition de l'objectif communautaire de bien-être animal sur la scène
internationale .......................................................................................................................................162 PARTIE II- L'ÉMERGENCE INTERNATIONALE ET UNIVERSELLE
DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL ......................................................................................................183
TITRE 1- L'APPARITION RÉCENTE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL EN DROIT INTERNATIONAL ....184
Chap. 1- LA NORMALISATION INTERNATIONALE DE L'OIE ............................................................185 SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL .......................................................................................................................185
S.1- Les caractéristiques et fondements des normes de l'OIE sur le bien-être animal ..................185 S.2- Le contenu des normes de l'OIE sur le bien-être animal ..........................................................192
Chap. 2- LES MANIFESTATIONS ÉLARGIES DU BIEN-ÊTRE ANIMAL .............................................216 EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DE L'OMC ............................................216
S.1- Une protection incidente en droit international de l'environnement .......................................216 S.2- Une protection inédite dans le droit de l'OMC ..........................................................................224
TITRE 2- LA CONSÉCRATION LATENTE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL EN DROIT UNIVERSEL .....245
Chap. 1- L'UNIVERSALITÉ DES PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL .247 S.1- L'identification des principes généraux du droit du bien-être animal....................................248 S.2- La valeur juridique universelle des principes généraux du droit du bien-être animal ..........264
Chap.2- L'ADOPTION D'UNE CONVENTION GLOBALE SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL ................287 S.1- Justification d'une convention globale sur le bien-être animal ................................................288 S.2- Proposition de convention globale sur le bien-être animal .......................................................303
CONCLUSION ..................................................................................................................................................326
BIBLIOGRAPHIE THEMATIQUE ................................................................................................................365
ANNEXES ..........................................................................................................................................................422
vi
- Liste des tableaux
Tableau 1 : Lois protectrices des animaux en Afrique .................................................................. 424
Tableau 2 : Lois protectrices des animaux aux Amériques ........................................................... 425
Tableau 3 : Lois protectrices des animaux en Asie ........................................................................ 427
Tableau 4 : Lois protectrices des animaux en Europe ................................................................... 429
Tableau 5 : Lois protectrices des animaux en Océanie .................................................................. 432
vii
- Liste des figures
Figure 1 : Pays de l’UE producteurs de foie gras et interdisant le gavage ..................... 126
Figure 2 : Carte du monde représentant les pays disposant de lois de protection des
animaux (anti-cruauté et pro-bien-être) ............................................................................ 423
viii
- Liste des annexes
Annexe 1 : Lois nationales anti-cruauté et pro-bien-être animal .................................................. 423
Annexe 2 : Instruments européens et communautaires sur le bien-être animal .......................... 434
Annexe 3 : Normes internationales sur le bien-être animal........................................................... 439
Annexe 4 : Proposition de Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA) ................ 441
ix
- Liste des abréviations
CBI : Commission baleinière internationale
CDB : Convention sur la diversité biologique
CEE : Communauté économique européenne
CIJ : Cour internationale de Justice
CITES : Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages
menacées d’extinction
CJCE : Cour de justice des Communautés européennes
CJUE : Cour de justice de l'Union européenne
CMS : Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage
CCNUCC : Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques
DUBEA : Déclaration universelle sur le bien-être animal
FAO : Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (de l'anglais :
Food and Agriculture Organization of the United Nations)
GIEC : Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat
OIE : Organisation mondiale de la santé animale (acronyme officiel issu du nom originel :
Organisation internationale des Epizooties)
OMC : Organisation mondiale du commerce
OMS : Organisation mondiale de la Santé
ONU : Organisation des Nations Unies
PGD : Principe général de droit
PGDI : Principe général du droit international
UE : Union européenne
UNESCO : Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture
x
« Une société n'est vraiment juste, sociale, civilisée,
que si elle respecte et protège l'animal »
Professeur Alfred Kessler
La Faculté n'entend donner aucune approbation aux opinions émises dans les thèses :
celles-ci sont propres à leurs auteurs.
xi
Remerciements
Je tiens tout d'abord à remercier chaleureusement mes directeurs : Lyne Létourneau et
Richard Ouellet. Je leur suis infiniment reconnaissante pour leurs conseils judicieux et la
grande liberté qu'ils m'ont laissé dans mes recherches. Je tiens aussi à remercier très
sincèrement les organismes subventionnaires qui m'ont permis de réaliser ce travail : le CRSH
à travers l'attribution de la bourse Vanier, le CRDP, la Chaire de droit de l'environnement
dirigée par la Professeure Paule Halley et l'Université Laval pour les bourses et aides
octroyées par la Faculté de droit. J'aimerais aussi remercier la professeure Véronique
Guèvremont.et les évaluateurs de ce travail. Enfin les vices-doyens Pierre Rainville et
Georges Azzaria, avec leurs assistantes indispensables : Marjolaine Caron et Martine Duquet.
J’adresse aussi un profond remerciement à mes proches humains (famille et amis) et non-
humains (animaux de tous poils), de m’avoir épaulé par leur soutien et toute leur affection.
Parmi mes collègues qui œuvrent pour le(s) droit(s) des animaux, je remercie tous ceux que
j’ai eu la chance de rencontrer, qui m’ont encouragé et inspiré. En particulier, Merci à :
Antoine Goetschel, Jean-Marc Neumann, Bryan Pease, Peter Fitzgerald, David Coates, Dirk
Verdonk, Marita Candela, Olivier Le Bot, Jean-Pierre Marguénaud, Muriel Falaise, Rebeka
Breder, Bettina Cagnat, Clémentine Griveaud, Helène Thouy, Oriol Caudevilla, Christian
Razeau, Gieri Bolliger, Pamela Frash, Kathy Hessler, Saskia Stuki, Livia Boscardin, Alex
Bruce, Birgitta Wahlberg, Tom Kelch, Randall Abate, Steven Wise, Danielle Duffield et
Marcelo Rodriguez. Aux spécialistes en éthique animale : Jean-Baptiste Jeangène-Vilmer,
Thomas Lepeltier, Florence Burgat, Valéry Giroux, Élise Desaulniers, Frédéric Côté-
Boudreau, Christiane Bailey, Renan Larue, Martin Gibert, Patrick Llored, Matthieu Ricard,
David Olivier, Estiva Reus, Georges Chapouthier, Jean-Claude Nouët, Thierry Auffret Van
Der Kemp, Peter Singer et Gary Francione. Aux journalistes et auteurs Aymeric Caron et
Karine-Lou Matignon. Et aux indispensables, parmi lesquels : Joëlle Verdier, Dominique
Siccardi, Jérôme Dumarty, Dominique Droz, Maxime Ginolin et Brigitte Gothière. Merci
aussi à toutes les organisations de protection des animaux pour leur travail extraordinaire.
Parmi mes proches et amis qui m’ont aidé et soutenu, Merci à : Evelyne Faure, Pauline Faure,
Janine Faure, Philippe Gouy, Manon Couderc, Max Couderc, Clothilde Capus, Jade Pollack,
Molly Mednikow, Sabine Minsky, Dominique Morin et sa famille, la famille Legoy, la
famille Roy (Jean-Philippe, Emmanuel et leurs parents), la famille Faure (Marie, Nicolas,
Danielle et Pierre), les Marcos (Aline, Daniel et Axel), la famille Diebler, Geneviève et Rémy
Villata, Alain Bonal, Allan Conter, Evans Fouché, Alexie Etilé, Mohsen Kayal, Nora
Linsenmaier, Thibaud Delaunois, Christian Biltgen, Marie Chetcuti, Philippe Magri, Marie
Coelf, Pauline Foubert, Valentine Tasset, Corinne Vigier, Michel Marty, Nicolas Pitavy,
Warren MacDonald, Robert Cowell, Laurent Chaloupe, Audrey Gratadour, Marc Desalliers,
Jacques et Amira.
Merci à mes proches animaux qui m’ont toujours confortée dans la voie que j’ai choisie :
Counie, Radja, Téa, Hermine, Quinoa, Sueño, Eclipse, Maya, Tiken, Youki, Vicky et Oriane.
Enfin un grand Merci à tous ceux qui œuvrent pour un monde meilleur. Un monde plus moral
et plus juste ; vers moins de souffrances et plus d'égalité entre les êtres, pour tous les êtres.
1
INTRODUCTION
« Alors, est-ce qu'on ne pourrait pas, de nation à nation, commencer par tomber
d'accord sur l'amour qu'on doit aux bêtes ? [...] Et cela, simplement, au nom de la
souffrance, pour tuer la souffrance, l'abominable souffrance dont vit la nature et
que l'humanité devrait s'efforcer de réduire le plus possible, d'une lutte continue,
la seule lutte à laquelle il serait sage de s'entêter »1.
Dans son apologie de l'amour des bêtes, Zola parle de la lutte contre la souffrance comme
d'une lutte prioritaire dans le monde. Une lutte universelle pour tous les individus, humains et
animaux. L'objectif ultime est un monde de paix. Un monde où les animaux humains et non-
humains seraient traités selon le même "code de justice", un monde où des lois uniraient les
hommes dans les "vastes liens d'une société universelle de protection envers eux-mêmes"2.
Nous vivons à une époque extraordinaire où tout est possible. Le meilleur comme le pire.
À l'heure où les consciences s'éveillent à la cause animale, de plus en plus d'êtres humains se
mobilisent dans le monde entier, face aux souffrances infligées aux animaux.
Celles-ci n'ont jamais été aussi importantes qu'aujourd'hui. Tant quantitativement que
qualitativement. Quantitativement, un nombre exponentiel d'animaux sont tués
volontairement et légalement chaque année : plus de 150 milliards pour l'alimentation3 et 100
millions pour l'expérimentation4 ; des millions pour l'industrie de la fourrure ; et des milliers à
d'autres fins comme les divertissements (combats d'animaux avec mise à mort, chasse etc.)5 ;
sans compter les milliers d'espèces terrestres et marines qui disparaissent de la surface
planétaire à une vitesse inquiétante6. C'est le plus grand zoocide de l'histoire de l'humanité7.
Qualitativement, cette grande hécatombe n'a d'égal que la sophistication des souffrances
infligées aux autres animaux8. Des mutilations de convenance aux tortures expérimentales, en
passant par le broyage des poussins vivants et tant d'autres horreurs banalisées ou occultées.
1 ZOLA, E., "L'amour des bêtes", Le Figaro, 24 mars 1896. 2 Id. Zola avance l'idée que : "De cet amour universel des bêtes, par dessus les frontières, peut-être en arriverait-on à
l'universel amour des hommes" et "rêve d'un acheminement vers la cité du bonheur futur". 3 Voir ADAPTT, "More Than 150 Billion Animals Slaughtered Every Year", The Animal Kill Counter, en ligne :
http://www.adaptt.org/killcounter.html (date d'accès 8.12.2014). 4 Voir PETA, "Animal Experiments : Overview", en ligne: http://www.peta.org/issues/animals-used-for-
experimentation/animals-used-experimentation-factsheets/animal-experiments-overview/ (accès le 8.12.2014). 5 Ce terme est employé pour caractériser les activités où l’être humain utilise les animaux pour se "divertir".
Voir JEANGÈNE VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p. 199. 6 Voir BROWSWIMMER, F., Écocide : Une brève histoire de l’extinction en masse des espèces, Broché, 2006. 7 Le mot "zoocide" est employé à l'instar de RICARD, M., Plaidoyer pour les animaux, Allary éditions, 2014, p.172. 8 Entendus comme animaux non-humains. À des fins pratiques, nous parlerons le plus souvent des "animaux" au sens
usuel. Notons que Montesquieu, dans L'esprit des lois, parlait aussi des "autres animaux" (Flammarion, 2013, p.63).
2
Il ne nous revient pas ici d’en dresser une liste exhaustive9. De nombreux cas seront abordés à
travers leurs règlementations, puisque cette étude vient présenter l'état du droit du bien-être
animal, plus particulièrement concernant le traitement, légal ou illégal, des animaux à ce jour.
Les multiples atteintes causées aux animaux sont perpétrées, moins au nom de la nécessité
vitale que d' "alibis"10 comme le plaisir gustatif, la commodité, la tradition et l'amusement11.
Le poids de ces arguments est-il suffisant pour légitimer objectivement qu'elles perdurent ?
Il s’agit d’atteintes à la vie, à l'intégrité, à la liberté, voire à la dignité d’individus vivants.
La plupart de ces atteintes sont aujourd’hui commises en toute légalité, sur une base régulière
et généralisée partout dans le monde. Ne s'agit-il pas pourtant de "crimes contre l'animalité" ?12
De nos jours, la culmination des souffrances animales, comme leur contestation, semblent
avoir atteint un point de non-retour. Même si notre part d'inhumanité n'a jamais causé autant
de torts aux autres animaux, notre part d'humanité n'a jamais autant souhaité les protéger.
C'est ici que le droit joue un rôle crucial, comme outil de médiation entre les intérêts humains
et ceux des animaux, ainsi qu'en vue de protéger les animaux contre certains agissements
humains de plus en plus controversés. Si notre point de vue se place ouvertement du côté de la
défense des animaux, cette étude n'en est pas moins le fruit d'une analyse juridique objective.
La lutte contre la souffrance des êtres est identifiée de longue date comme l'une des missions
du droit. En 1909, le Professeur René Demogue exprimait cette noble fonction en ces termes :
« le droit apparaît comme une chose infiniment belle, comme étant en quelque sorte
la communion, le terrain de rapprochement [...] de ceux qui peuvent souffrir. Le
droit apparaît comme un immense syndicat de luttes contre les souffrances, entre
tous les êtres qui sont pitoyables, parce qu'il peut leur être fait du mal, beaucoup de
mal. »13
9 Voir à ce sujet CIVARD-RACINAIS, A., Dictionnaire horrifié de la souffrance animale, FAYARD, 2010. 10 Voir les "discours-alibi" dans JEANGÈNE VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, pp.126-131. 11 "We do not need to eat animals, wear animals, or use animals for entertainment purposes, and our only defense of
these uses is our pleasure, amusement, and convenience", FRANCIONE, G., Animals as Persons, C.U.P., 2008, p.118. 12 Sur cette notion, voir généralement CAO, D., "Crimes against Animality", dans ARRIGO, B.A. et H. BERSOT (ed),
The Routledge Handbook of International Crime and Justice Studies, Routledge, 2014, pp. 169-190. Cette expression a
été utilisé au Québec, par exemple dans le Rapport du Barreau du Québec sur le document de consultation "Crimes
contre les animaux", approuvé par le cabinet du bâtonnier le 11 janvier 1999. 13 Voir DEMOGUE, R., "La notion de sujet de droit", Revue trimestrielle de droit civil, pp.611-655, 1909, p. 620.
3
Dans son article, l'auteur plaidait déjà en faveur de la reconnaissance du statut juridique de
"sujet" pour tout animal étant, comme nous, capable de souffrir14. Que cette souffrance
concerne les êtres humains ou les animaux, tout individu mériterait la protection du droit.
En ce sens, nous postulons que les animaux devraient être juridiquement protégés face à
toutes les souffrances qui leur sont infligées et ce universellement, partout dans le monde.
Tel est le point de départ de cette étude qui constitue à la fois sa source, son sens et sa finalité.
De l'objectif de lutter contre les souffrances infligées aux animaux découle la notion de
protection du bien-être animal. En effet, le bien-être vient s'opposer à la souffrance, autant
que la protection (de ce bien-être) vient s'opposer à l'infliction (de ces souffrances).
Dans quelle mesure le droit du bien-être animal permet-il d'empêcher l'infliction des
souffrances causées aux animaux et d'encourager les actions bienveillantes envers eux ?
C'est ce que le lecteur découvrira à travers la présentation de son contenu et de ses limites.
Le droit du bien-être animal concerne l’ensemble des mesures qui visent à réduire les
souffrances et à améliorer les conditions de vie (et de mort) des animaux utilisés à des fins
humaines. Il s'agit des fins alimentaires, vestimentaires, pharmaceutiques, cosmétiques,
scientifiques, éducatives, ou encore relatives à la compagnie et aux divertissements15.
Puisque le droit vise à réglementer certaines actions ou activités humaines16, le droit du bien-
être animal s'inscrit ainsi dans le cadre des différentes utilisations (ou instrumentalisations17)
des animaux à des fins humaines, lesquelles sont présentes partout à travers le monde18.
De l'instrumentalisation multiple de l'animal procède sa réification (du latin "res", chose),
c'est-à-dire sa réduction à l'état de chose ou d'objet, dans le vocabulaire courant comme en
droit positif. En effet, les animaux peuvent se voir considérés comme des produits de
consommation, du matériel expérimental, des cibles de chasse, jusqu'à des gadgets jetables19.
Aujourd'hui en effet, l'instrumentalisation de l'animal a atteint des sommets sans précédents.
14 Id. L'auteur parle des animaux sensibles comme de ceux "ayant comme nous des réactions psychiques douloureuses
ou désagréables". 15 Comme nous le verrons, il s'agit notamment des méthodes d'élevage, de transport et d'abattage des animaux de
production ; de l'expérimentation des animaux de laboratoire ; de la chasse, la pêche, la capture et la captivité des
animaux sauvages ; ainsi que du traitement des animaux de compagnie et des animaux utilisés pour les combats,
compétitions ou autres spectacles. 16 Le "droit" désigne "un ensemble de règles de conduite". Voir CORNU, G. (dir.), Vocabulaire juridique, PUF, 2001. 17 L'instrumentalisation des animaux consiste à les utiliser comme des instruments aux fins de l'homme. Voir
RICARD, M., "L'instrumentalisation en masse des animaux pose un problème éthique", Sciences et avenir,
19.06.2015. 18 OCKERMAN, H.W. et C. L. HANSEN, Animal by-product processing & utilization, Technomic Pub. Co., 2000. 19 Illustrons cette gadgétisation de l'animal par l'exemple des petits animaux vivants (poissons, salamandres et tortues)
vendus sous forme de porte-clefs à la mode en Asie. Notons qu'ils ne survivent que quelques heures dans les pochettes
où ils sont enfermés. Voir l'article à ce sujet CNN, "Live animals sold as key rings in China", CNN Asia, 15.04.2011.
4
Dans son Plaidoyer pour les animaux, Matthieu Ricard vient appuyer sur un point sensible :
« Le point commun le plus frappant entre l'homme et l'animal est la capacité de
ressentir de la souffrance. Pourquoi nous aveuglons-nous encore, en ce début du
XXIe siècle, sur les douleurs incommensurables que nous leur faisons subir,
sachant qu'une grande part d'entre elles ne sont ni nécessaires ni inévitables ? »20
Du caractère inutile (dans le sens de non vital) et évitable (à travers le recours à des
alternatives) pour la plupart des souffrances causées, résultent d'importantes implications
abordées en éthique animale21. La prémisse est celle selon laquelle l'animal ne doit plus être
traité comme un objet à notre service mais pour ce qu'il est, c'est-à-dire un être vivant et
souffrant. Par définition, l'animal est un être vivant doué de sensibilité22. Sur le plan
scientifique, cette sensibilité est définie comme l'aptitude à souffrir et à éprouver des
sensations douloureuses ou désagréables (mais aussi agréables), avérée pour l'ensemble des
vertébrés et certains invertébrés comme les céphalopodes23. Certaines études vont jusqu’à
démontrer le degré élevé d’intelligence des invertébrés supérieurs comme les pieuvres, ainsi
que leur capacité à ressentir des émotions, au-delà de simples sensations agréables ou non24.
Coupant court aux débats sur l'absence de langage articulé et de raisonnement complexe chez
les animaux non-humains, Jeremy Bentham a fait place à la sensibilité (ou "sentience"25) des
animaux comme critère de considération éthique et juridique dans sa citation notoire de 1789 :
« La question n'est pas : "Peuvent-ils raisonner ?", ni "Peuvent-ils parler ?", mais
"Peuvent-ils souffrir ?"26 ».
Depuis lors, la pertinence du critère de sensibilité a été avancée et maintenue27, pour justifier
l'octroi d'un statut moral et juridique aux animaux en tant qu'êtres sensibles (ou "sentients").
20 RICARD, M., Plaidoyer pour les animaux, Allary éditions, 2014, p.15. 21 Citons notamment les implications les plus importantes développées par les partisans de la théorie des droits des
animaux, comme Tom Regan, et du courant abolitionniste, comme le juriste Gary Francione. Voir respectivement
REGAN, T., The case for animal rights, Berkeley, University of California Press, 1983 ; et FRANCIONE, G.L.,
Animals as persons: Essays on the abolition of animal exploitation, New York, Columbia University Press, 2008. 22 Voir la définition commune du terme "animal" comme "Être vivant organisé, doué d'une sensibilité et capable de
mouvement" dans le Dictionnaire de la langue française de 2011. 23 Voir BOVET, D. et G. CHAPOUTHIER, "Les degrés de sensibilité dans le monde animal et leur identification
scientifique", dans AUFFRET VAN DER KEMP, T. et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au
Droit, Yvon Blais, 2013, p.13. 24 Voir par exemple : MATHER, J.A., "Cognition in cephalopods", Advances in the Study of Behaviour, 1995. 25 De l'anglais "sentient" pour désigner un animal "sensible" ou "sentant". Voir à ce sujet REUS, E., "Sentience !",
Cahiers antispécistes, n° 26, 2005. Nous utiliserons par la suite le terme "sensible" qui est celui usité en droit positif. 26 BENTHAM, J., An Introduction to Principles of Morals and Legislation [1789], Athlone, 1977, pp. 411-412. 27 Selon Peter Singer : "Le critère de la sensibilité [...] fournit la seule limite défendable à la préoccupation pour les
intérêts des autres". Voir SINGER, P., La libération animale, 2e éd., Grasset, 1993, pp. 37-39.
5
Quelles sont les implications de cette sensibilité ? Sur le plan éthique, il s'agit de bien traiter
les animaux et de leur épargner toute souffrance évitable28. Sur le plan juridique, il s'agit
d'intégrer ces prescriptions pour protéger les animaux comme êtres sensibles en droit positif.
Désormais, certaines législations mentionnent expressément que les animaux sont des êtres
sensibles29. Plus généralement, de nombreuses législations visent à protéger les animaux
contre la cruauté et la notion de bien-être animal devient plus présente à l'échelle mondiale.
Qu'en est-il de la volonté de protéger juridiquement le bien-être des animaux de manière
universelle ? Un régime de protection pourrait-il voir le jour à l'avenir, notamment au sein de
l'organisation universelle par excellence qu'est l'Organisation des Nations Unies (ONU) ?
Par exemple par le biais d'un accord multilatéral (convention ou traité) et/ou toute autre voie ?
Pour l'heure, il n'existe aucun accord multilatéral permettant de protéger le bien-être animal de
manière globale -c'est-à-dire dans le cadre de toutes les utilisations, pour tous les animaux et
dans tous les pays du monde.
Ce vide juridique a été identifié comme une lacune, de la part de plusieurs internationalistes30.
Afin d'y remédier, l'adoption d'un tel accord serait-elle possible, voire même pertinente ?
Du point de vue de la protection des animaux, un accord conventionnel serait approprié pour
plusieurs raisons. Tout d'abord, les animaux sont présents partout dans le monde et victimes
de multiples atteintes généralisées. Ensuite, ceux-ci ne disposent d'aucune forme de protection
dans plusieurs pays. Enfin et surtout, une protection universelle du bien-être animal
permettrait d'établir une base normative commune pour tous les pays en droit international.
Puisqu'il s'agit d'un problème universel, l'ensemble des maux infligés aux animaux en appelle
aussi à une réponse juridique universelle. Mais l'objectif de protection du bien-être animal
n'est pas formellement reconnu à ce jour comme un impératif juridique universel31.
Dans quelle mesure pourrait-il le devenir ? Pourquoi et comment ? Telles sont les questions
clés de cette étude, globale et inédite, sur le droit du bien-être animal dans le monde.
28 L’éthique animale est une sous-discipline de la philosophie morale qui étudie le "statut moral des animaux" et notre
"responsabilité à leur égard". Voir à ce sujet : JEANGÈNE VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p.15. 29 Citons l'exemple de la France (Art. L214-1 du Code rural et Art. 515-14 du Code civil) au niveau national et celui
de l'Union européenne (Art. 13 du Traité de Lisbonne) au niveau supranational. Voir infra les Titres 1 et 2 (Partie I). 30 Voir AUSTEN, M. et T. RICHARDS, Basic legal documents on international animal welfare and wildlife
conservation, Kluwer Law International, 2000, p.1 (“There is a distinct absence in international law for the protection
of animals from cruelty and mistreatment”) ; NIELSEN, L., The WTO, animals and PPM, Martinus Nijhoff Publishers,
2007, p.325 (“Animal welfare protection is not laid down in any international agreements”) : CURNUTT, J., Animals
and the law : a sourcebook, Calif, ABC-CLIO, 2001, p.15 (“A comprehensive treatise on global animal law has not
yet been written”). 31 Le terme "universel" concerne l'ensemble des pays du monde dans son sens commun.
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Avant d'entrer au cœur de celle-ci, expliquons pourquoi le droit du bien-être animal est un
domaine d'intérêt grandissant (I), avant d'établir que cette recherche globale constitue une
étude novatrice du droit du bien-être animal dans la science du droit à l'échelle mondiale (2).
I- Le droit du bien-être animal comme domaine d'intérêt grandissant
Selon l'historienne Elisabeth Hardouin-Fugier32 :
« l'implantation d'un jus animalium [...] constitue une véritable révolution
culturelle dont les ouvrages récents ne semblent pas encore mesurer
l'importance »33.
L'expression latine "jus animalium" est traduite en français par "droit animal", "droit
animalier" ou encore "droit des animaux". Bien que l'appellation "droit animal" ne fasse pas
l'unanimité parmi les juristes francophones34, il s'agit de la traduction littérale de l'expression
"animal law" en anglais35. Elle est aussi consacrée au Québec sur le plan académique36, c'est
pourquoi nous utiliserons celle-ci par la suite. Cette étude porte plus précisément sur le
domaine que les anglophones appellent "Animal welfare law", ou "droit du bien-être animal".
Dans cette thèse, nous traiterons ainsi du droit du bien-être animal, d'une manière inédite à la
fois pour la science juridique en général et la science juridique francophone en particulier.
Qu'est-ce que le droit du bien-être animal ? Et quelle est la pertinence d'une étude à ce sujet ?
Afin d’y répondre, définissons tout d’abord le droit du bien-être animal en précisant ses
fondations éthiques (1). Puis nous verrons qu'il s'agit d'un sujet d'intérêt juridique grandissant
à travers le monde, permettant d'amener l'intérêt de cette étude et la démarche envisagée (2).
1- Description du droit du bien-être animal : un droit spécifique, historiquement fondé
Présentons les idées qui sous-tendent le droit du bien-être animal (a), avant de le définir (b).
32 Cette expression figure notamment dans l'intitulé de cet article : HARDOUIN-FUGIER, E., "Du mal-être au bien-
être des animaux : une lente conquête du jus animalium en Europe", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal,
éditions du Conseil de l’Europe, 2006, pp. 185-198. 33 HARDOUIN-FUGIER, E., “Naissance de la protection animale dans le droit européen”, dans MARGUÉNAUD, J.-
P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Pédone,
pp.21-34, 2009, p.21. 34 Le professeur Jean-Pierre Marguénaud objecte notamment que l'expression "droit animal" serait grammaticalement
inadaptée en français. Voir MARGUÉNAUD, J.-P., "L’Animal en droit français", Derecho animal, Avril 2013, §1. 35 Si le "droit animal" provient de l'anglais "animal law", cette appellation se retrouve notamment en espagnol à travers
l'expression "derecho animal". En ce sens, il n'y est pas question de "animalian law" ou "derecho animalista" qui
seraient les traductions fidèles du "droit animalier" en français. 36 Notre choix porte ainsi sur la traduction fidèle et la concision de l'expression droit animal, présente au Québec dans
le cadre du "Groupe de Recherche International en Droit Animal" (GRIDA) dirigé par Martine Lachance à l'UQAM.
Elle se retrouve aussi en France, dans le cadre de "La Fondation Droit Animal, éthiques et sciences" (LFDA).
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a) Brève histoire des idées qui sous-tendent le droit du bien-être animal37
Avant d’en arriver au droit, il convient de parler de l’avant-droit, c’est-à-dire de tout le
discours philosophique et moral qui a conduit à l’idée d'un droit des animaux et qui légitime
l’action du législateur. D'où vient l'idée de protéger le bien-être des animaux ? Et pourquoi
est-il moralement légitime d'intervenir pour fixer des règles afin de protéger ce bien-être
(contre les souffrances infligéeaux animaux et pour une plus grande bienveillance humaine) ?
La condamnation de la cruauté et le devoir de respecter les animaux font partie des règles
morales universelles. Elles sont présentes à travers le monde depuis des temps ancestraux.
Après une brève présentation des racines morales du droit du bien-être animal (1°), nous
verrons la convergence de l'éthique au(x) droit(s) avec les principales thèses en présence (2°).
1°) Les racines morales universelles et ancestrales du droit du bien-être animal
Dans l’histoire de l’humanité, l'idée selon laquelle les animaux doivent être respectés remonte
à la nuit des temps. Parmi les premières civilisations qui les vénéraient38, relevons que :
« les Égyptiens enterraient les loups, les ours, les crocodiles, les chiens et les
chats, en lieux sacrés, embaumaient leur corps, et portaient le deuil à leur
trépas »39.
De tout temps, les souffrances causées aux animaux ont été dénoncées.
a- Des pères antiques de l'éthique animale aux penseurs occidentaux et orientaux
Au VIe siècle avant J.-C., Pythagore prônait déjà une alimentation végétarienne et condamnait
les sacrifices, en reconnaissant que les animaux avaient une âme40. L’éthique animale serait
née avec lui et ses disciples, comme Empédocle, Théophraste et Plutarque dans l’antiquité41.
Depuis cette époque et jusqu’à l’époque actuelle, Lyne Létourneau dresse ce constat :
37 Voir à ce sujet WALDAU, P. et K. PATTON (ed.), A Communion of Subjects : Animals in Religion, Science, and
Ethics, Columbia University Press, 2006. 38 Voir LE BON, G., Les premières civilisations, Flammarion, p.271. 39 MONTAIGNE (DE), M., Essais de Montaigne, 1669, imprimeurs de l’Institut de France, 1939, p.218. En référence
aux écrits d’Hérodote. 40 JEANGÈNE VILMER, J.-B. (dir.), Anthologie d'éthique animale, PUF, 2011, pp.19-25. Platon reconnaissait aussi
une âme aux animaux au Ve siècle avant J.-C., en affirmant que : "Ce monde vivant est vraisemblablement doué d’une
âme et d’une intelligence, une seule entité vivante visible contenant toutes les autres entités vivantes qui par nature
sont liées entre elles", cité dans BLOOM, S., L’esprit sauvage, Gründ, 2007, p.104. 41 Voir LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit de la protection des animaux en
Occident", Lex Electronica, vol. 10, no 2 (numéro spécial), Automne 2005, p.4.
8
« une attitude unique, cohérente et remarquablement constante sous-tend tout le
discours contre la cruauté envers les animaux et en faveur du traitement
humanitaire de ces derniers »42.
Pour ne mentionner que les auteurs français les plus célèbres, citons Montaigne à la
Renaissance, Rousseau et Voltaire au siècle des Lumières, ainsi qu'Hugo et Zola au XIXe
siècle. Plus connus comme humanistes que comme animalistes, leurs textes en faveur de la
cause animale -comme ceux d'auteurs anglophones, germaniques et autres- sont désormais
compilés dans l'ouvrage de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, Anthologie d'éthique animale43.
Non seulement le bien-être animal a été prôné de tous temps, mais aussi partout dans le
monde. Toutes les philosophies et toutes les religions contiennent en leur sein la notion de
respect pour toute forme de vie. Au-delà de la pensée occidentale (comme avec les penseurs
précités), la notion de respect pour les animaux se retrouve aussi dans la pensée asiatique44.
Citons en particulier le néo-confusianisme, avec Wang Yang-Ming, qui fut le premier dans la
dynastie de Ming a prôné "l'amour pour toutes choses", avant que le confucianiste japonais
Kaibara Ekken n'érige en devoir religieux le traitement humain des animaux45.
Élevé en devoir universel dans les droits religieux, le principe de respect de l'animal existe
dans les différentes religions du monde.
b- Le respect de l'animal dans les droits religieux du monde entier
À l'image du confucianisme, le shintoïsme prône le respect pour toute création de la nature46.
Il en va de même du taoïsme en Chine, où est prônée une approche non-agressive et non-
violente, de pair avec la sauvegarde des créatures comme priorité, ainsi que le végétarisme47.
Pour les religions orientales, citons aussi l'exemple de l’hindouisme, représenté en particulier
par les pensées du Mahatma Gandhi, considérant tout être vivant comme un semblable et
prônant la non-violence48. Parmi ses citations en faveur des animaux, en voici une célèbre :
« Il est possible de juger de la grandeur et la valeur morale d’une nation à la façon
dont elle traite ses animaux »49.
42 LÉTOURNEAU, L., L'expérimentation animale : l'homme, l'éthique et la loi, Éditions Thémis, 1994, pp.14-15. 43 JEANGÈNE VILMER, J.-B. (dir.), Anthologie d'éthique animale, PUF, 2011. 44 Voir MONOD, T., L’hippopotame et le philosophe, Actes Sud, Babel, 1993, pp. 333-340. 45 Celui-ci est inscrit au Chapitre "serving Heaven" du Mencius 7A:1.Voir ADLER, J.A., "Of Animals and Man: The
Confucian Perspective", Conference on Religion and Animals, Harvard-Yenching Institute, Cambridge, 21.05.1999. 46 HARTZ, P., Shinto, World Religions, 3rd ed., Infobase publishing, p.11. 47 Voir HU, H.L. et W. ALLEN, Taoism, Chelsea House Publishers, 2009, p.50. 48 Voir STOENESCU, R., Gandhi ou le scepticisme fanatique, Radu intello, 2007, p.47. 49 Voir BLOOM, S., L’esprit sauvage, Gründ, 2007, p. 24.
9
Le jainisme est un courant très protecteur puiqu’il interdit totalement de leur faire du mal50.
Pour le bouddhisme, le devoir de compassion envers toute créature vivante est très
important51. Il s'agit de ne pas être indifférent à la souffrance de l'autre et souhaiter
sincèrement qu'il en soit libéré52.
Pour Kalou Rimpotché, c'est « un acte de grande compassion que de les protéger »53.
Il s'agit aussi d'un devoir de "non-agressivité" consistant à ne pas nuire aux autres (animaux
inclus), puisque la notion d'interdépendance implique que notre bonheur est lié à celui des
autres, sachant que les animaux ont aussi "droit à une existence heureuse"54.
L'islam reconnaît que l'animal est doté d'une "âme et conscience" et que l'être humain est
responsable de l'harmonie des vies, sur lesquelles il doit veiller avec science et équité55.
Selon le Coran, les croyants doivent avoir "une attitude de respect total des créatures"56.
De même, le judaïsme défend de faire souffrir les animaux57 et rend l'assistance aux animaux
obligatoire58. Il existe aussi des prescriptions comparables à celles du droit positif, à l'image
de l'interdiction de frapper un animal, d'un droit au repos hebdomadaire, du devoir
d'assistance aux animaux en détresse, comme des interdictions de castration et de chasse59.
Une question peut ici se poser : comment se fait-il que ces deux dernières religions, qui se
soucient du sort des animaux, prônent leur égorgement vivant pour l'abattage rituel ?
Halal pour l'islam et Kasher pour le judaïsme, l'abattage rituel doit être réalisé selon certaines
règles. L’abatteur doit être qualifié, le couteau bien affuté et l’exécution rapide, tout en
permettant de libérer l'âme de l'animal (représentée par son sang) avant de prendre sa chair60.
Aujourd'hui encore, certains croyants revendiquent que cette méthode serait l'une des plus
efficaces pour limiter les souffrances de l'animal, y compris par rapport aux nouvelles
50 Voir NAKOS, J., "Le jaïnisme et les animaux", Cahiers Antispécistes, n°32, mars 2010. 51 Voir CHEVASSUT, D., "Le bouddhisme" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de
l’Europe, 2006, p. 149-152. 52 Id., p.149. 53 Id. En référence à "Paroles et Visages de Kalou Rimpotché : Lama du Tibet", Éditions Claire Lumière, 1986. 54 Id., p.151. 55 SARI ALI, R.H.E., "L'islam", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, pp.159-
163, 2006, p.159. 56 Id., Coran, X, 36 à 39. 57 Selon le Talmud : "il est défendu de faire souffrir les animaux, par précepte de la Torah", Chabbath, 128b ;
Baba Metsia, 36b. Cité dans GUIGUI, A., "Le judaïsme", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du
Conseil de l’Europe, pp.165-169, 2006, p.165. 58 Id., Deutéronome, XXII. 59 Id., 165-166. 60 "Il s'agit en même temps d'offrir symboliquement l'âme de la bête à Dieu et sa chair aux hommes", dans OUBROU,
T., "L'abattage rituel musulman, réflexion théologique et considérations éthiques", dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O.
DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Pédone,
pp.103-113, 2009, p.108.
10
technologies, dont le pistolet à tige perforante qui intervient lors de l'étourdissement préalable
des animaux dans le système d'abattage classique61. Ces arguments sont toutefois critiqués par
de nombreuses personnes, notamment des vétérinaires, qui réclament un étourdissement
préalable systématique, y compris dans le cadre des abattages rituels62. Certains imams et
rabbins progressistes se montrent favorables à cet étourdissement, sachant que les textes
religieux préconisent que les animaux soient vivants, mais pas conscients63. Relevons aussi
qu'aucun croyant, même pratiquant, n'est obligé de sacrifier un animal de sa vie entière64.
En tout état de cause, prendre la vie d'un animal est reconnu comme un acte lourd de sens, qui
ne doit pas être effectué à la légère et sans nécessité65. Or, le sacrifice (étymologiquement
"sacré") est devenu un acte largement banalisé et l'abattage à la chaîne, un fléau généralisé66.
De fait, aucun texte religieux originel n'exige de tuer les animaux, y compris pour les
consommer67. En effet, les théologiens s'entendent pour dire que les croyants peuvent s'en
passer68. Ainsi, aucune religion ne serait opposée au végétarisme ni au véganisme (impliquant
un mode de vie respectueux des animaux au-delà de l'alimentation). Bien au contraire, cela est
confirmé par une étude de 2005 de la "Société des végétariens éthiques et religieux"69.
Selon le professeur de théologie Karsten Lehmküler, il s'agirait même d'une voie d'avenir :
« Le projet originel du Créateur, aussi bien que la vision eschatologique d'une vie
nouvelle, ne connaît pas cette mise à mort de l'animal en vue de l'intérêt de
l'homme. Il serait donc possible d'anticiper cet avenir par un mode de vie
végétarien »70.
61 Id., pp.11-112. Voir aussi GUIGUI, A., "Le judaïsme" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, Conseil de
l’Europe, pp.165-169, 2006, p.168. 62 Voir The Times of Israel, "UK debate on ritual slaughter mobilizes Muslims and Jews", en ligne :
http://www.timesofisrael.com/uk-debate-on-ritual-slaughter-mobilizes-muslims-and-jews/ (date d'accès : 20.08.2015). 63 Selon un rapport de 2010 : "L'abattage des animaux sans étourdissement préalable est inacceptable en toutes
circonstances". Voir Federation of Veterinarians of Europe, Slaughter of Animals Without Prior Stunning, 2010. 64 "Le musulman a ainsi la possibilité de ne jamais sacrifier, dans le sens rituel du terme, un bête de sa vie".
OUBROU, T., "L'abattage rituel musulman, réflexion théologique et considérations éthiques", dans MARGUÉNAUD,
J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses,
Pédone, 2009, p.113. 65 Tout mise à mort non essentielle est considérée comme un "massacre" inutile. "Quelle que soit la mort d'une bête,
celle-ci laisse l'Homme devant une double dette tant au niveau spirituel qu'au niveau biologique". Id., pp.108-109. 66 Id., p.113. 67 Le droit canon n'impose pas la mise à mort des animaux, selon Alexandre M. Stavropoulos dans son article sur
"L'orthodoxie" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, Conseil de l’Europe, 2006, p.173. 68 Voir Vegetarianism and the Major World Religions, Society of Ethical and Religious Vegetarians, 2005. 69 En ce sens, le végétarisme pourrait mettre tout le monde d'accord, tel qu'il est mis en avant écrit par plusieurs
journalistes, écrivains, politiques et philosophes français dans cet article : "Le repas végétarien, le plus laïc de tous",
paru dans Lemonde.fr le 26.03.2015. Les auteurs sont: Sandrine Bélier, Allain Bougrain-Dubourg, Florence Burgat,
Aymeric Caron, Franz-Olivier Giesbert, Jean-Baptiste Jeangène Vilmer et Matthieu Ricard. 70 Voir LEHMKÜLER, K., "le protestantisme" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, Conseil de l’Europe,
pp.165-169, 2006, p.168.
11
Enfin, la religion chrétienne n'échappe pas à la règle puisqu'elle prône le respect de l'animal
d'une manière générale, qu'il s'agisse des églises catholique, protestante et orthodoxe71.
Pour justifier la domination humaine sur la nature et les animaux, il est souvent avancé que la
Genèse, qui retrace la création du monde, affirme que l'être humain doit régner en maître sur
le reste de la création72. Mais s'agit-il ici d'octroyer à l'homme une autorisation d'exploitation
illimitée de la nature et des autres espèces vivantes ? Ou plutôt de lui confier une
responsabilité envers celles-ci, en tant que gardien des autres vies ? À ce propos, l’Ancien
Testament précise que l’homme doit régner en "bon berger" sur les animaux, sachant que le
juste connaît leurs besoins, alors que "les entrailles des méchants sont cruelles"73. L’idée que
l’homme doit satisfaire les besoins propres aux animaux, de pair avec la réprobation de toute
forme de cruauté à leur égard y est ainsi mentionnée. Un bon gardien n'est pas un tyran.
Il y a presque mille ans, Saint-Jean de Jérusalem nous avertissait déjà dans sa 25ème prophétie :
« Lorsque commencera l'An Mille qui vient après l'An Mille, les animaux que
Noé avait embarqués sur son Arche ne seront plus entre les mains de l'Homme
que bêtes transformées selon sa volonté. Et qui se souciera de leur souffrance
vivante ? L'homme aura fait de chaque espèce ce qu'il aura voulu et il en aura
détruit d'innombrables. Que sera devenu l'homme qui aura changé les lois de la
vie et qui aura fait de l'animal vivant une motte de glaise ? Sera-t-il l'égal de Dieu
ou l'enfant du Diable ? »74.
En résumé, l’ensemble des droits religieux semblent s’entendre sur le respect dû aux animaux.
Voyons désormais quels sont les liens entre l'éthique animale et le(s) droit(s) des animaux ?
2°) De l'éthique animale au(x) droit(s) des animaux
Différentes approches éthiques se reflètent en droit positif. Qu'il s'agisse des dispositions
autorisant l'utilisation des animaux, ou celles préconisant de minimiser leurs souffrances car
ils sont sensibles, ou encore des interdictions (de certaines pratiques, méthodes ou activités).
71 Voir FAGGIONI, M. P., "Le catholicisme" (pp.153-157) ; LEHMKÜLER, K., "le protestantisme" (pp.165-169) ;
STAVROPOULOS, A. M., "L'orthodoxie" (pp.171-176) ; dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal,
Conseil de l’Europe, 2006. 72 "Dieu dit : faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu'il domine sur les poissons de la mer, sur
les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre". Genèse, 1, 26. Bien
que les premiers écrits de la Genèse ne soient toujours pas datés de source sure, ceux-ci pourraient remonter au XVe
siècle av. J.-C. Voir à ce sujet : LACORDAIRE, J.-B., Conférences de Notre-Dame de Paris, Sagnier et Bray,
Librairies éditeurs, 1848, p.225. 73 PURY (DE), A., Homme et animal Dieu les créa: les animaux et l'Ancien Testament, Labor et Fides, 1993, p.54. 74 MAREUIL (DE), J., Les prophéties de Jean de Jérusalem, Grancher, 2002 (celles-ci auraient été écrites en 1099).
12
a- L'histoire des conceptions de l'animal-objet à l'animal-sensible
Encore aujourd'hui prédomine l'idée selon laquelle l'être humain est supérieur aux animaux.
En vertu de celle-ci, les êtres humains auraient tous les droits, ou presque, sur ces derniers.
Droits de vie et de mort, de les utiliser et de les exploiter, ou encore de les torturer pour la
science, le commerce ou les traditions, de leur prendre leurs terres et leurs petits, etc.
Finalement, l'animal serait réduit à l'état d'objet utilisable par l'être humain. Parallèlement à
cette conception de l' "animal-objet", encore ancrée dans la société actuelle et confirmée par le
droit positif, se développe la conception de l' "animal-sensible". Celle-ci vient dores et déjà
limiter certains agissments des humains envers les animaux, mais sans être encore assez forte
pour permettre la reconnaissance juridique des animaux comme véritables sujets de droits.
- La conception ancrée de l' "animal-objet"
L'homme s’est posé en maître de la création depuis des temps ancestraux. Cela vient
expliquer, encore majoritairement aujourd'hui, une approche que l’on peut qualifier de
"spéciste" et "anthropocentrée" du reste du monde. Si le spécisme vise à privilégier l'espèce
humaine sur les autres espèces75, l'anthropocentrisme place l'être humain au centre de tout,
comme s'il était, en termes familiers, le "nombril du monde"76.
L'idée que l’animal a été créé au service de l’homme se retrouve depuis l’antiquité avec
Aristote. Au IVe s. av. J.-C., celui-ci affirmait que les animaux seraient inférieurs à l’homme
et qu’ils auraient été créés dans le seul but de satisfaire nos besoins77. Cette conception de
l’animal instrumentalisable à des fins humaines rejoint la conception de l'"animal-objet" et
culmine avec la théorie de "l’animal-machine" de René Descartes. Dans son Discours de la
méthode de 1637, il pose que les animaux seraient comparables à des machines78, agissant
mécaniquement comme des horloges79. Puisque ceux-ci ne parlent pas et selon lui ne
raisonnent pas, ils seraient ainsi dénués de toute sensibilité, de toute pensée, et donc d’âme,
laquelle serait le privilège de l’être humain80. Ce père de la philosophie moderne s’oppose
ainsi à Pythagore, qui fut le premier à concéder une âme aux animaux dès l’antiquité81.
75 Voir OLIVIER, D., "Qu'est ce que le spécisme ?", Les cahiers anti-spécistes, n°5, décembre 1992. 76 Voir à ce sujet ARMENGAUD, F., "L’anthropocentrisme : vraie question ou faux débat", dans BURGAT, F. et
R. DANTZER (dir.), Les animaux d'élevage ont-ils droit au bien-être ?, Paris, INRA, pp.173-186, 2001. 77 ARISTOTLE, Politics, Everyman’s library, 1959 dans SINGER, P., Animal liberation: a new ethics of our
treatment of animals, 2nd ed., Pimlico, 1995, pp. 188-189. Selon lui, puisque "l’homme est un animal rationnel",
sa capacité de raisonner le placerait au dessus des autres créatures vivantes. 78 Descartes reconnait néanmoins qu’en tant qu’êtres vivants créés par Dieu, les animaux sont plus perfectionnés que
les machines créées par les hommes. Voir DESCARTES, R., Discours de la méthode (1637), Hachette, 1856, p.39. 79 Id., p.41. 80 Id., p.40. 81 Voir CHAPOUTIER, G. et J.-C. NOUËT (dir.), Les droits de l'animal aujourd'hui, Arléa-Corlet, 1997, p.51-52.
13
Dans la continuité de Descartes, Malebranche affirme que "les animaux ne sentent pas" et
même que "leurs cris et convulsions n’ont pas plus d’importance que le bruit d’une porte qui
grince ou d’un ressort qui se brise"82. En ce sens, la pensée cartésienne a écarté toute
culpabilité concernant les souffrances causées aux animaux, puisque ceux-ci ne sentiraient
rien. Bien que les études scientifiques démontrent désormais leur aptitude à souffrir, cette idée
est toujours présente. On la retrouve notamment chez le philosophe contemporain Peter
Carrhuters, selon lequel les animaux ne pourraient pas éprouver de souffrance puisqu'ils
n'auraient pas la conscience de leur douleur83. En ce sens, les animaux n’auraient pas de statut
moral et nos devoirs envers eux seraient tout au plus des devoirs indirects. Comme l’affirmait
Kant avant lui, nous n’aurions des devoirs directs qu’envers les êtres humains, et protéger les
animaux devrait d’abord viser à protéger les intérêts humains84.
Des interrogations restent : la question du statut moral et juridique d'un être est-elle seulement
liée à sa capacité d'exprimer ou de défendre son intérêt ? Et notre devoir n'est-il pas plutôt lié
à notre capacité de prendre en compte l'appel, souvent muet, qui émane de son existence ?85
Le fait que la conception de l’animal-objet soit encore très ancrée dans notre société actuelle
paraît renforcer la difficulté d’élever le statut des animaux d'objet de droit à celui de sujet de
droits. Or nous verrons certaines avancées avec la reconnaissance des animaux comme êtres
sensibles, désormais inscrite dans le droit positif de plusieurs pays et au niveau européen86.
- La conception actuelle de l' ‘‘animal-sensible’’
Cette nouvelle conception juridique de "l’animal-sensible", telle que nous la qualifions, puise
ses fondements dans la philosophie de Jeremy Bentham. Opposé à Descartes, tout comme
l’était notamment Voltaire en France87, Bentham affirme que les animaux sont capables de
souffrir et que cet attribut fait en sorte qu’ils méritent d’être protégés juridiquement face aux
souffrances inutiles88. Puisque les animaux peuvent souffrir, il affirme qu'ils devraient être
reconnus comme des êtres sensibles et légalement protégés face aux actes de cruauté et aux
82 Voir GOFFI, J.-Y., "La souffrance animale : aspects philosophiques", dans OUÉDRAOGO, A.P. et
P. LE NEINDRE, L'homme et l'animal: un débat de société, INRA, 1999, p. 21-22. 83 Voir CARRUTHERS, P., The animals issue: moral theory in practice, Cambridge University Press, 1992. 84 KANT, E., "Duties to animals" dans REGAN, T. et P. SINGER, Animal rights and human obligations, Englewood
Cliffs, N. J, Prentice-Hall, 1989, p.122-123. 85 Voir BROOM, D.M. et al, Bien-être animal, éd. Conseil de l’Europe, 2006, p.155. 86 Voir les Titres 1 et 2 de la Partie I de cette étude. 87 Voir VOLTAIRE, "A reply to Descartes" dans REGAN, T. et P. SINGER, Animal rights and human obligations,
Englewood Cliffs, N. J, Prentice-Hall, 1989, pp.67-68. 88 BENTHAM, J., An introduction to the principles of morals and legislation, Queen's College, Oxford, 1823.
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souffrances causées par l’homme89. Celui-ci devrait alléger le fardeau de ceux qui
subviennent à ses besoins90. Relevons ici que, comme Bentham, les partisans de la théorie dite
du "traitement humanitaire" des animaux, ne remettent nullement en cause le principe même
de l'utilisation des animaux à des fins humaines91. Selon cette approche, l'homme serait :
« totalement en droit de domestiquer des animaux et de les tuer pour se nourrir et
se vêtir. Mais il n’aurait pas à les tyranniser ou leur faire subir de souffrances
inutiles »92.
Selon Lyne Létourneau, c'est principalement de cette conception que relève le droit de la
protection des animaux en Occident93. Celui-ci refléterait une forme d’"égoïsme de groupe"
en protégeant les animaux de sorte que leur utilisation soit considérée comme "moralement
acceptable", sans toutefois nuire aux intérêts propres à l’espèce humaine94. Il est même
possible d'aller jusqu'à penser que les mesures de protection du bien-être des animaux
permettraient en quelque sorte de se donner "bonne conscience", en affirmant disposer de
mesures protectrices, sans remettre en cause le principe même de domination, d'exploitation et
d'extermination mondiale des êtres appartenant à d'autres espèces animales.
b- Les nouvelles conceptions éthico-juridiques de l'"animal-sujet" de droit(s)
Les nouvelles conceptions de l'animal vont toujours plus dans le sens de sa reconnaissance
comme sujet, non seulement du droit mais de droits, reliant l'éthique aux questions juridiques.
- Les propositions contemporaines en éthique animale
Les mouvements contemporains de l'éthique animale permettent les "réformes de demain"95.
Les nouveaux courants de pensées prônent notamment la reconnaissance d'une forme d'égalité
entre humains et animaux, de pair avec l’attribution de droits pour ces derniers96. Les deux
pionniers de l’éthique animale moderne que son Peter Singer et Tom Regan méritent d’être
cités. Peter Singer se base sur la théorie utilistariste fondée par Jeremy Bentham pour créer le
89 En 1848, John Stuart Mill s’est également prononcé comme Bentham en faveur de la protection animale par la voie
légale. Voir STUART MILL, J., "A defense of Bentham", dans REGAN, T. et P. SINGER, Animal rights and human
obligations, Englewood Cliffs, N. J, Prentice-Hall, 1989, pp.131-132. 90 LÉTOURNEAU, L., L'expérimentation animale : l'homme, l'éthique et la loi, Éditions Thémis, 1994, p.21. 91 Id., p.22. 92 THOMAS, K., Dans le jardin de la nature - La mutation des sensibilités en Angleterre à l'époque moderne (1500-
1800), traduit de l'anglais par Catherine Malamoud, Paris, Gallimard, 1985, p. 202. 93 Voir LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit de la protection des animaux en
Occident", Lex Electronica, vol. 10, no 2 (numéro spécial), Automne 2005. 94 Id., p.7. 95 LÉTOURNEAU, L., L'expérimentation animale : l'homme, l'éthique et la loi, Éditions Thémis, 1994, p.14. 96 Voir CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des droits, Seuil, 2013.
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mouvement de libération animale97 et prôner l’"égale considération des intérêts" entre les
hommes et les animaux98. Et Tom Regan fonde quant à lui la théorie des droits des animaux99
à la base du mouvement abolitionniste, qui vise à éliminer toute forme d’utilisation animale.
Selon la théorie de l’égale considération des intérêts de Peter Singer, les intérêts humains
doivent être considérés à égalité avec les intérêts similaires des animaux, ni plus ni moins100.
En privilégiant systématiquement leurs propres intérêts, les humains font preuve de
"spécisme"101, comme on dirait de "racisme" en privilégiant les intérêts d'une race ou de
"sexisme" pour ceux d'un sexe en particulier. La doctrine utilitariste de Singer vise la
maximisation du bien et la minimisation du mal, sans forcément condamner l'utilisation des
animaux à des fins humaines. Un exemple souvent cité est celui de l’expérimentation animale,
jugée morale d’après cette théorie si le fait de sacrifier quelques animaux peut permettre la
survie d'un plus grand nombre d'individus et que, dans la balance des conséquences, un poids
identique a été accordé aux intérêts similaires des animaux et des êtres humains102.
Dans la lignée de la perspective offerte par Henry Salt dans Les droits de l’animal de 1914103,
Tom Regan formule la théorie des droits des animaux dans son livre-phare de 1983 : The case
for animal rights104. Regan est d'avis que tous les "sujets-d'une-vie" possèdent une valeur
intrinsèque et que celle-ci doit être respectée au titre de droit moral fondamental. Il considère
aussi que les droits individuels ne peuvent pas être enfreints pour le plus grand bénéfice de la
collectivité. En ce sens, Regan conteste l’approche utilitariste de Singer en posant que :
« toute utilisation des animaux pour les fins et les besoins de l’espèce humaine est
immorale et que l’attitude morale consiste en leur non-utilisation »105.
Parmi les buts poursuivis par le mouvement des droits des animaux figure ainsi l'abolition de
toute forme d'instrumentalisation des animaux. Il vise ainsi "l'abolition totale de l'utilisation
des animaux dans les sciences ; l'élimination totale de l'élevage à des fins commerciales ;
l'interdiction totale de la chasse pour le sport et le commerce, ainsi que l'interdiction du
piégeage", de pair avec les spectacles d'animaux, la captivité des animaux sauvages etc.106.
97 Voir SINGER, P., Animal liberation: a new ethics for our treatment of animals, New York review, 1975. 98 Voir SINGER, P., L'égalité animale expliquée aux humain-es, Lyon, Tahin-Party, 2002. 99 REGAN, T., The case for animal rights, Berkeley, University of California Press, 1983. 100 SINGER, P., op.cit., note 98. 101 SINGER, P., In defense of animals: the second wave, Blackwell Publishing, 2006, p.3. 102 SINGER, P., op.cit., note 97, p.81. 103 SALT, H., Les droits de l’animal, H. Welter, 1914. 104 REGAN, T., The case for animal rights, Berkeley, University of California Press, 1983. 105 LÉTOURNEAU, L., op.cit., note 95, p.26. 106 REGAN, T., "Pour les droits des animaux", Les cahiers antispécistes, CA n°5, décembre 1992, p.1.
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Qu'en est-il des animaux de compagnie ? Il s'agit ici d'un cas-limite, car adopter des animaux
de compagnie peut comporter un bénéfice mutuel, tout en étant exempt de souffrances107.
L'objectif consiste souvent à avoir un compagnon, voire à secourir un animal dans le besoin.
Le fait de "garder" des animaux (au sens d'un gardiennage qui respecte leurs intérêts propres)
n'est pas forcément remis en cause par le courant abolitionniste lorsqu'il s'agit de sauver un
animal, plutôt que de cautionner ledit "business" des animaux de compagnie108.
En ce sens, c'est plutôt la reproduction outrancière des animaux à des fins commerciales qui
est remise en cause, alors que nombre d'entre eux pourraient être sauvés dans la rue ou des
refuges. En effet, le commerce des animaux de compagnie entraîne des problèmes croissants.
Citons par exemple les nombreux abandons suite à des "coups de cœur" en animalerie.
Or, l'animal n'étant pas un objet, il ne devrait pas pouvoir faire l'objet d'achats compulsifs109.
Concernant les droits des animaux, une question centrale mérite d’être soulevée, à savoir :
Quels sont les droits concernés par les droits des animaux ?
En plus d'un droit à la non-souffrance, les droits fondamentaux à la vie, à la liberté et à
l'intégrité, sont notamment défendus par la juriste et philosophe Valéry Giroux110.
D'autres philosophes, comme Will Kymlicka et Sue Donaldson, ont établi une théorie des
droits politiques pour les animaux111, à l'exemple de la citoyenneté pour les animaux de
compagnie et de la souveraineté pour les animaux sauvages112.
La théorie des droits est profondément antispéciste, en ce qu'elle vise la non-discrimination
selon les espèces et une plus grande égalité de traitement entre les animaux humains et non-
humains. Celle-ci est de même nature que les revendications dénonçant les discriminations
selon les races et les sexes, et qui ont permis l’attribution de droits à l'ensemble de l'humanité.
107 Notons que ceux-ci peuvent néanmoins être victimes d’abus, maltraitance, cruauté et négligences courantes. 108 Voir en particulier : FRANCIONE, G. L., Introduction to animal rights: your child or the dog?, Philadelphia,
Temple University Press, 2000. 109 Les législations pourraient poser comme pré-requis que l'acquéreur soit conscient de ses responsabilités, témoigne
de bonnes intentions, de connaissances appropriées et de la capacité à pourvoir aux besoins spécifiques de l'animal. 110 GIROUX, V., Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste, thèse de doctorat en philosophie,
Université de Montréal, 2011. 111 DONALDSON, S. et W. KYMLICKA, Zoopolis: A Political Theory of Animal Rights, Oxford University, 2011. 112 Le lecteur intéressé est invité à consulter les références, de plus en plus nombreuses, qui existent au sujet des droits
des animaux. Plusieurs figurent en bibliographie sur les "aspects éthiques du bien-être animal". Citons notamment :
CAVALIERI, P., The animal question: why nonhuman animals deserve human rights, Oxford University Press, 2001;
CHAPOUTHIER, G., Les droits de l'animal, Paris, Presses universitaires de France, 1992; CHAPOUTIER, G. et J.-C.
NOUËT (dir.), Les droits de l'animal aujourd'hui, Condé-sur-Noireau, France, Arléa-Corlet, 1997; CLARKE, P. A. B.,
Animal rights: a historical anthology, Columbia University Press, 2004; CLIFFORD, J. S., Animal rights: a reference
handbook, Greenwood, 2009; COCHRANE, A., CAPSI, J. et W.J. REID, Animal Rights Without Liberation: Applied
Ethics and Human obligations, Columbia University Press, 2013; COHEN, C. et T. REGAN, The animal rights
debate, Rowman & Littlefield, 2001; CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des
droits, Seuil, 2013; FRANCIONE, G. L. et R. GARNER, The animals rights debate: abolition or regulation?, New
York, Columbia University Press, 2010; REGAN, T., “Sentience and Rights” dans TURNER, J. et J. D'SILVA (dir.),
Animals, ethics, and trade: the challenge of animal sentience, Earthscan, 2006, pp. 79-86.
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Le défi de notre nouvelle ère peut désormais consister à reconnaître des droits aux
animaux113.
b- Le débat sur la personnification juridique et l'octroi de droits aux animaux
D'origine éthique et de plus en plus présente en droit animal général, la notion de "valeur
intrinsèque" est importante en ce qu'elle considère la valeur propre de l'animal en dehors de
toute utilisation pour l'homme, opposée à celle de "valeur instrumentale" qui ne reconnaît la
valeur des animaux que comme des moyens (ou instruments) servant des fins humaines.
Sur ce point, Catherine Larrère soulève la question suivante :
« Dans la dualité constitutive de l’anthropocentrisme, celle de la personne et des
choses, les animaux ont toujours représenté un point critique, et sensible. […]
Peut-être ne sont-ils pas des personnes […] Mais peut-on, pour autant, les
considérer comme des choses, comme une matière inerte, instrumentalisable à
plaisir ? »114.
Comme nous l’avons vu, la conception posant le principe de la domination humaine sur les
animaux remonte étymologiquement à l’"origine" de l’humanité dans la Genèse115, quand
bien même l’idée de devoir respecter les animaux a aussi toujours existé. Plus proche de
nous, la théorie cartésienne de l’"animal-machine" est venue consacrer la conception de
l'animal-objet, face à celle de l’"animal-sensible" née avec Jeremy Bentham et relayée par les
penseurs contemporains de l'éthique animale. Cette double conception se reflète en droit.
D'une manière générale, les animaux sont toujours considérés comme des biens, par
opposition aux personnes116, soit physiques (êtres humains), soit morales (sociétés) dans le
droit civil ou droit commun des pays du monde117. La reconnaissance d'un nouveau statut
comme être vivant sensible est de plus en plus mise en avant, conformément à leur protection
existante. Ainsi en droit général, les animaux ont le statut de bien appropriable. Alors que les
animaux domestiques et familiers ont généralement le statut de biens appropriés, les animaux
sauvages sont plutôt considérés comme des "res nullius" (du latin "choses sans maîtres")118.
113 Nous entendons dans ce cas l’ensemble du monde animal y compris l’espèce humaine. Sur ce point, Albert
Schweitzer disait que "Tant que le cercle de la compassion n’aura pas été élargi à toute chose vivante, l’homme ne
trouvera pas la paix", cité dans BLOOM, S., L’esprit sauvage, Gründ, 2007, p.106. 114 LARRERE, C., Les philosophies de l’environnement, PUF, 1997, p.39. 115 Du grec "Genesis", signifiant "origine" ou "commencement". Cf. BOGROS, M., La Genèse. Origine du monde et
de l'homme, L. Cloix, 1894. 116 Il s'agit dans le langage juridique de la Summa divisio (ou division sommaire) entre les "biens" et les "personnes". 117 Voir LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit de la protection des animaux en
Occident", Lex Electronica, vol. 10, n 2 (numéro spécial), Automne 2005, p.11. 118 Voir BUGAT, F., "Res nullus, l’animal est objet d’appropriation", dans CHAPOUTIER, G. et J.-C. NOUËT (dir.),
Les droits de l'animal aujourd'hui, Condé-sur-Noireau, France, Arléa-Corlet, 1997, pp. 199-212.
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Mais de nos jours, les animaux sont de plus en plus protégés face à certains agissements en
étant considérés comme des êtres sensibles. Le bâtonnier Albert Brunois souligne en ce sens :
« Le droit positif, national et international, la jurisprudence, une partie de la
doctrine montrent que, par une série de transformations successives, le statut de
l’animal est devenu celui de l’animal prolongement de l’homme »119.
En tout état de cause, aucun système juridique, même parmi les plus avant-gardistes,
n’accorde aux animaux un statut qui pourrait équivaloir au nôtre. Pourtant, certaines
propositions sont formulées en vue de la consécration de leur personnalité juridique, en tant
que "personnes animales", pouvant permettre la reconnaissance de droits aux animaux sur le
plan juridique120. Jusqu'à ce jour, le principe d'instrumentalisation des animaux n'est pas remis
en cause par les systèmes juridiques. Mais pourtant, là où il existe des mesures pour les
protéger en obligeant les êtres humains à bien les traiter, ils sont déjà des sujets de droit121.
À défaut de reconnaître des droits aux animaux, la proposition dominante consiste à renforcer
les devoirs des êtres humains envers eux. Par exemple, Jean-Marc Varaut limite strictement à
l’homme l’application du droit : "L’animal doit être l’objet de devoirs" puisque "l’homme n’a
pas à attribuer de droits en dehors de sa propre espèce"122. D’autres opposants à une
conception élargie du droit (et a fortiori des droits) en faveur des animaux, comme Sohm
Bourgeois, rejettent la "tentation" d’attribuer une personnalité juridique aux animaux, alors
que rien n’empêcherait le fait d’accroître les obligations humaines à travers les législations123.
En réponse à la revendication du statut de sujet pour les animaux, certains juristes allèguent
que les animaux ne peuvent être que des biens, puisqu’ils ne peuvent pas être considérés
comme des personnes. Ceux-ci sont généralement réticents à remettre en cause la "Summa
divisio" ou (division sommaire), notamment à travers l’idée que les animaux pourraient faire
partie d’une catégorie intermédiaire, ou troisième catégorie, entre les personnes et les biens124.
119 BRUNOIS, A., "L’animal, sujet du droit", dans Ligue française des droits de l’animal, Les droits de l’animal et la
pensée contemporaine, Colloque de la Ligue française des droits de l’animal, 1984, p.41-48. 120 Id. 121 Id. 122 VAURAUT, J.-M., "L’animal, sujet de droits ou objet de devoirs ?", Actes du Colloque « Nécessité de
l’expérimentation animale pour la sécurité et le progrès dans la recherche biomédicale », éditions ACTAM, Neuilly-
sur-Seine, 1990, pp. 10-17. Cité dans CHAPOUTIER, G., "Pour ou contre une personnalité juridique des animaux",
dans BURGAT, F. (dir.), L'animal dans nos sociétés, Paris, Documentation française, 2004, p. 49. 123 Id. SOHM-BOURGEOIS, A.-M., "La personnification de l’animal : une tentation à repousser", Recueil Dalloz-
Sirey, n° 7, 15 février 2010, p. 33-37. 124 ANTOINE, S., Rapport sur le régime juridique de l’animal, Ministère de la justice de la république française, 2005.
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Jusqu’à aujourd’hui, cette proposition est restée sans suite, sachant que ce changement a pu
apparaître comme un "obstacle insurmontable" aux yeux de certains puristes du droit125.
N'est-il pas possible d'accorder la personnalité juridique, de pair avec l'octroi de droits, à
d'autres entités que les personnes humaines ? Si les sociétés ont aujourd’hui le statut de
personne morale, pourquoi ne pas concéder le statut de personne animale aux animaux ?126.
Dans sa thèse de doctorat en droit à l'Université Laval, Charlaine Bouchard affirme que :
« La question d’attribuer ou non la personnalité juridique aux animaux n’est pas le
dernier délire d’une société à l’affut du sensationnel […] tout ce qui se présente
comme le support d’un intérêt spécifique peut prétendre au titre de sujet de droit :
l’animal autant que le regroupement »127.
Face à la proposition de conférer la personnalité juridique, permettant l'octroi de droits aux
animaux, les opposants avancent généralement que : même si les animaux avaient des droits,
ils ne pourraient pas les revendiquer ni de les défendre devant un tribunal, puisqu’ils ne
parlent pas128. En effet, les animaux ne disposent pas d'un langage articulé comme le nôtre, et
ne peuvent sans doute pas concevoir la notion de "droits" au sens juridique du terme.
Est-ce pour autant que les bébés, les personnes séniles ou les handicapés mentaux n’ont pas
de droits ? Si et ceux-ci ont des représentants légaux pour les défendre. Il en va de même pour
les animaux. Dans certains pays, comme en France depuis 1976, les associations de protection
animale se portent partie civile pour défendre les animaux devant les tribunaux129.
Ces animaux protégés sont donc déjà, en théorie comme en pratique, soumis au même régime
d'incapacité que les personnes précitées, incapables de se défendre par elles-mêmes en justice.
Les opposants à la modification du statut juridique de l’animal considèrent aussi que, si les
animaux ne sont plus des objets appropriables, cela porterait atteinte au droit de propriété130.
Notons que ce droit de propriété, qui suppose l'usus, le fructus et l'abusus (soit le droit d'user,
de jouir et de détruire sa propriété), est déjà soumis à certaines limitations en ce qui concerne
les animaux protégés, face à certains agissements. En particulier, de nombreuses lois viennent
désormais interdire d'abuser de son animal et de le tuer sans nécessité131. L'abusus est donc
125 COULON, J.-M., Les droits de l'animal, Paris, Dalloz, 2009, p.134. 126 Voir BRUNOIS, A., "L’animal, sujet du droit", dans CHAPOUTHIER, G. et J.-C. NOUËT (dir.), Les droits de
l'animal aujourd'hui, Arléa-Corlet, pp. 83-94, 1997, p. 94. 127 Voir BOUCHARD, C., La personnalité morale démystifiée, Les presses de l’Université Laval, 1997, p.278. 128 CHAPOUTIER, G., "Pour ou contre une personnalité juridique des animaux", dans BURGAT, F. (dir.),
L'animal dans nos sociétés, Paris, Documentation française, 2004, p.48. 129 Loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, n°76-629, ancien article 14. 130 Voir à ce sujet l'excellente thèse de doctorat de Lucille BOISSEAU-SOWINSKI, La désappropriation de l'animal,
Université de Limoges, 2008. 131 De nombreuses lois nationales seront présentées au Titre 1 de la Partie I de cette étude.
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déjà remis en cause pour les animaux protégés. Rappelons aussi que le régime de la propriété
a subi des transformations majeures au cours de l’histoire, notamment lorsque les esclaves
humains sont passés de la catégorie de biens appropriables à celui de personnes132.
La notion de "personnes" au sens juridique, pouvant disposer de "droits", a ainsi évolué vers
une extension progressive à de nouveaux détenteurs. Comme le fait remarquer Daigueperse :
"le droit n’est que le reflet des mœurs d’une époque" et ce qui paraissait inconcevable
auparavant est devenu une "réalité parfaitement admissible"133. Il semblerait ainsi
"indispensable et urgent de doter l’animal d’un statut qui ne le relègue pas au rang d’objet de
droit"134. Si certains juristes considèrent que les temps sont mûrs pour leur accorder des
droits135, d’autres s’y opposent encore136. Selon Sonia Desmoulin-Canselier : "la question du
statut de l'animal provoque le débat au-delà des querelles de technique juridique"137.
En tout état de cause, l'évolution actuelle témoigne d'un important élan en faveur d'un
nouveau statut juridique pour les animaux, à savoir celui de sujet sensible, pouvant aller
jusqu’aux droits138. Les fondements du droit actuel sembleraient aujourd'hui mériter d'être
repensés en profondeur, afin de considérer plus équitablement les intérêts des animaux non-
humains, vers la construction d'un nouveau droit universel et d'une vraie justice pour tous.
Pierre Giberne introduisait ainsi sa thèse de 1931 sur la protection juridique des animaux :
« La science juridique, si riche en aspects variés, nous semble dominée par un
principe général qui peut ainsi s'exprimer : le nombre des êtres titulaires de droits,
à l'origine très restreint, augmente sans cesse, sous l'influence d'une évolution
émancipatrice, qui, après une apparition timide, est devenue si agissante, qu'elle
finira peut-être, par englober tous les êtres vivants ».139
132 Voir par exemple le Traité de Droit Civil et de Jurisprudence françoise de 1781, dans lequel il est dit que :
"les nègres étant des choses qui sont dans le commerce, ceux-ci sont susceptibles d’estimation". Cité dans AUFFRET
VAN DER KEMP, T. et J.C NOUËT, Homme et animal : de la douleur à la cruauté, Paris, Harmattan, 2008,
p.19. Notons que l’on retrouve cette même idée dans le Code civil français actuel où les animaux, en tant que biens
"meubles" (art. 528) ou "immeubles" (art. 524), sont des "choses qui sont dans le commerce" (art. 1128). 133 DAIGUEPERSE, C., "L’animal sujet du droit : réalité de demain", Gazette du Palais, 1981-1, doct. 160, cité dans
CHAPOUTIER, G., "Pour ou contre une personnalité juridique des animaux", dans BURGAT, F. (dir.), L'animal dans
nos sociétés, Documentation française, 2004, p. 49. 134 Id. 135 Par ex : FRANCIONE, G.L., “Animal rights and animal welfare”, Rutgers Law Review, vol.48, pp.397-470, 1996. 136 MELKEVIK, B., "La nature, un sujet de droit ? Interrogation philosophique et critique", Horizons de la philosophie
du droit, Collection Diké, 1998, p.39. Il est notamment qualifié d’"anthropomorphisme" le fait de vouloir attribuer aux
animaux les mêmes attributs que les nôtres, tels que des droits, ce qui constituerait pour certains juristes une
revendication "inacceptable". 137 DESMOULIN-CANSELIER, S., "Quel droit pour les animaux ? Quel statut juridique pour l’animal ?",
dans BURGAT, F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Pouvoirs n° 131, 2009, p.44. 138 HERMITTE, M.-A., "L’animal est déjà un sujet de droits", dans BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés,
Documentation française, 2004, p.50. 139 GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie
Thierry, Nîmes, 1931, p.9.
21
Après cet historique de l'avant-droit et cette présentation préalable des questions débattues,
définissons désormais le droit du bien-être animal dont il est question dans cette étude.
b) Définition du droit du bien-être animal comme domaine particulier du jus animalium
Tout d'abord, précisons en quoi le droit du bien-être animal relève du droit animal stricto
sensu (1°), ainsi que les distinctions avec le droit de la conservation des espèces animales et
l'approche des droits des animaux (2°).
1°) Définition du droit du bien-être animal comme domaine spécifique
Nous verrons pourquoi le droit du bien-être animal renvoie au droit animal au sens strict (a),
avant de souligner qu'il s'agit d'un droit visant la "protection" des animaux (b).
a- Définition comme droit animal stricto sensu
Au sens large, le droit animal est le droit concernant les animaux (non-humains)140.
Au sens strict, il s'agit du droit relatif à notre traitement de ces animaux141.
Largo sensu, le droit animal couvre d'autres domaines comme le droit de la conservation des
espèces animales sauvages (en tant que domaine relevant du droit de l'environnement).
Pouvant être défini comme l'ensemble des règles visant à protéger les animaux en tant
qu'individus (considérés comme êtres sensibles ou capables de souffrir), le droit du bien-être
animal renvoie au droit animal en tant que droit de la protection des animaux. Attachée à cette
protection, la notion de bien-être animal est de plus en plus présente mondialement.
b- Un droit de la "protection" du bien-être animal
De l'anglais "animal welfare law", dont la traduction littérale est "droit du bien-être animal",
la notion de "protection" a ici toute son importance en ce qu'elle vient marquer deux
distinctions essentielles. L'expression "droit du bien-être animal" est très proche des termes
"droit au bien-être animal", avec lesquels elle peut prêter à confusion. Or, ces derniers
concernent les droits des animaux (comme intérêts défendus), alors que le premier concerne
le droit des animaux (comme domaine juridique). De plus, le droit du bien-être animal vise un
objectif de protection des animaux, distinct de l'objectif de conservation relatif aux espèces
animales en droit de l'environnement (dans le cadre des mesures de préservation de la faune
sauvage).
140 Sous-entendu par le terme "animaux" au sens commun, contrairement à l'acception scientifique selon laquelle
l'espèce humaine appartient aussi au règne animal. Sur cette définition générale du droit animal, voire par exemple
BROOMAN, S. et D. LEGGE, Law relating to animals, Cavendish, 1997. 141 Voir CURNUTT, J., Animals and the law: a sourcebook, Calif, ABC-CLIO, 2001, p.2.
22
Pris au sens strict en tant que droit du bien-être animal, le droit animal est donc un domaine
juridique spécifique, autonome du droit de l'environnement avec lequel il a encore tendance à
être confondu. Une autre confusion encore fréquente est celle entre le droit et les droits des
animaux. Revenons sur ces distinctions, comme sur les liens existants.
2°) Distinctions et liens entre le droit de la conservation et les droits des animaux
En tant que domaine juridique spécifique, le droit du bien-être animal est distinct, tout en
étant lié au droit de la conservation des espèces animales (a) et aux droits des animaux (b).
a- Un droit distinct mais lié au droit de la "conservation" des animaux
Tel que précédemment défini, le droit du bien-être animal se distingue du droit relatif à la
conservation des espèces sauvages (ou droit de la vie sauvage, de l'anglais "wildlife law") qui
est une branche du droit de l'environnement et ne relève du droit animal qu'au sens large.
Ces deux domaines juridiques se distinguent dans les approches qui les sous-tendent, comme
dans les objectifs qu'ils poursuivent.
D'un côté, le droit animal stricto sensu relève de l'éthique animale, en ce qu'il vise la
protection des animaux en eux-mêmes, sur le plan individuel et comme individus. D'un autre
côté, le droit de la faune sauvage relève de l'éthique environnementale, en ce qu'il vise à
conserver les animaux en tant qu’entités faisant partie intégrante de l'environnement. En ce
sens, le premier considère les animaux selon une approche "zoocentrique", accordant une
place centrale à l'animal, alors que le second considère les animaux selon une approche
"écocentrique" qui n'accorde de la valeur aux animaux sauvages qu'en tant qu'espèces ou
organismes constitutifs de leur écosystème142. Ainsi, le droit du bien-être animal vise la
protection des animaux en tant qu'individus (le plus souvent parce qu'ils sont sensibles), alors
que le droit de la faune sauvage vise la conservation des animaux en tant qu'espèces (le plus
souvent parce qu'elles sont menacées d'extinction). Plus précisément, le premier tend à
protéger les animaux afin d'éviter leurs souffrances, alors que le second tend à conserver les
espèces afin d'éviter leur disparition.
Selon les circonstances, il arrive que le fait de conserver les espèces permette de protéger le
bien-être des individus qui appartiennent à ces espèces. Il peut donc s'agir à l’occasion des
142 Le "zoocentrisme" est défini comme la philosophie au sein de laquelle l'animal à la place centrale, contrairement au
"biocentrisme" où la notion de vie est centrale, ou de l' "écocentrisme" où la notion d'écosystème est centrale.
Voir VILKKA, L., The intrinsic value of nature, Rodopi, 1997, p.37.
23
"deux facettes d’un même problème"143, sachant que les mesures conservatoires peuvent aussi
permettre de garantir une meilleure protection du bien-être des individus concernés144.
b- Un droit distinct mais lié aux droits des animaux
Dans le cadre de sa définition, il a été précisé que le droit du bien-être animal pose des règles
relatives au traitement des animaux. En effet, celui-ci vise généralement à réduire les mauvais
traitements et à encourager les bons traitements des animaux (le plus souvent pour les
animaux qui sont dépendants des humains, à savoir : domestiques, familiers et en captivité).
Cet ensemble de règles est établi par les humains et à destination des humains, qui doivent les
respecter. En tant que droit objectif, le droit du bien-être animal se distingue de la
consécration de droits subjectifs pour les animaux145. Ces derniers sont toutefois liés en ce
que le premier tend de plus en plus à prendre en compte les seconds. Notons notamment la
considération croissante, par le juge et le législateur, des intérêts des animaux dont, à tout le
moins, celui de ne pas souffrir en tant qu'êtres sensibles. En effet, rappelons que "les droits
sont des intérêts juridiquement protégés"146. Dans le cadre de la théorie des droits
fondamentaux, il s'agit notamment des intérêts à la vie, à la liberté et à l'intégrité. Ces droits
moraux sont reconnus en éthique animale147. Rappelons aussi que, plus récemment, une
réflexion sur l'octroi de droits politiques a été engagée148. Or, nous avons vu que la question
de leur reconnaissance comme droits légaux, consacrés en droit positif et impliquant la
reconnaissance de la personnalité juridique aux animaux non-humains, demeure débattue.
Parmi leurs promoteurs bien connus, citions les professeurs de droit américains comme Gary
Francione, ou encore Alan Dershowitz et Laurence Tribe de l'Université de Harvard149.
Voyons désromais la pertinence de cette étude sur le droit du bien-être animal dans le monde.
143 PAQUET, P.C. et C.T. DARIMONT, “Wildlife conservation and animal welfare: two sides of the same coin?”,
Animal Welfare 2010, Chap. 19, pp. 177-190, 2010. 144 Citons comme exemples le fait d'interdire la destruction des habitats ou lesdits "prélèvements" pour la chasse,
la pêche ou encore le commerce, comme dans le cadre de la Convention sur le commerce international des espèces de
faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) contre la surexploitation des espèces menacées par le
commerce international. 145 Alors que droit objectif concerne l'ensemble des règles qui constitue ce domaine juridique, les droits subjectifs
concernent les prérogatives individuelles des sujets de droit. Voir CORNU, G. (dir.), Vocabulaire juridique,
Association Henri Capitant, PUF, 2001, p.694 et p.982. 146 Voir DEMOGUE, R., "La notion de sujet de droit", Revue trimestrielle de droit civil, 1909, p.620. 147 Voir à ce sujet la thèse de Valéry Giroux, Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste,
thèse de doctorat en philosophie, Université de Montréal, 2011. 148 DONALDSON, S. et W. KYMLICKA, Zoopolis: A Political Theory of Animal Rights, Oxford University Press,
2011. 149 Voir notamment DERSHOWITZ, A.M., Rights from Wrongs: A Secular Theory of the Origins of Rights, Basic
books, 2009 ("Do animals have rights?", pp.193-199) et FRANCIONE, Animals as persons, CUP, 2008.
24
2- Pertinence du droit du bien-être animal : un sujet d'intérêt grandissant
Au-delà de sa pertinence sociale et scientifique (a), ce domaine suscite un intérêt juridique
grandissant (b).
a) Pertinence sociale et scientifique
Les questions relatives au bien-être animal suscitent l’intérêt croissant de la société en général
(1°) et de la communauté scientifique en particulier (2°).
1°) Pertinence sociale
"La protection animale est le mouvement actuel le plus pressant de la justice sociale"150.
La société mondiale est de plus en plus sensibilisée aux questions relatives à la protection
animale. En plus de l'émoi suscité par la disparition de nombreuses espèces animales, une
réflexion mondiale inédite émerge contre les problèmes de cruauté envers les individus
animaux. Une nouvelle prise de conscience envers le bien-être animal, favorisée et relayée par
les médias (presse, documentaires, internet, réseaux sociaux), est donc en train d'éclore151.
Sujet brûlant, la question du traitement des animaux est en train de devenir incontournable152.
Le fait de s'intéresser de plus en plus aux animaux va-t-il "animaliser" l'homme comme le
prétend le philosophe Francis Wolf ?153 De nombreux penseurs s'accordent pour promouvoir
l'extension de notre considération aux animaux, afin de rendre l'homme plus humain, au sens
compassionnel du terme154. Au contraire, cautionner les souffrances infligées aux animaux en
ignorant leur sort contribuerait à toujours plus "déshumaniser" l'homme155.
Malgré l'augmentation de la couverture médiatique pour la cause animale, une large partie de
la population globale ignore encore quels sont les problèmes éthiques réellement posés156.
150 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p. 37. 151 Voir BEKOFF, M., "Animals in the Media: Guidelines for Accurate Representation", Psychology, 15.10.2014 152 Id. "Articles, news reports, and documentaries about nonhuman animals (animals) are "hot" items. It's difficult to
pick up a newspaper or magazine or turn on the TV and not see something about the fascinating cognitive and
emotional lives of other animals, including commercials, or a discussion of our complex, frustrating, challenging, and
paradoxical relationships with them (anthrozoology)". 153 Voir WOLFF, F., 50 raisons de défendre la corridas, Mille et une nuits, 2010. 154 Voir dans la bibliographie les "Aspects éthiques du bien-être animal" et parmi les recueils de textes en ce sens, voir
notamment (en français) : CHAPOUTHIER, G. et J.-C. NOUËT (dir.), Les droits de l'animal aujourd'hui, Arléa-
Corlet, 1997 ; et plus récemment CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des
droits, Seuil, 2013; et (en anglais) SINGER, P. (ed.), In Defense of Animals: The Second Wave, Blackwell, 2006 ; et
récemment LINZEY, A. (ed.), The Global Guide to Animal Protection, University of Illinois, 2013. 155 Voir généralement LESTEL, D., L’animal est l’avenir de l’homme, Fayard, 2010. 156 Sur l'intérêt des médias pour ces questions, voir OUÉDRAOGO, A.P. et P. LE NEINDRE, L'homme et l'animal :
un débat de société, INRA, 1999, p.63 ; BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe,
2006, p.225 ; PHILLIPS, C. J. C, The welfare of animals : the silent majority, Springer, 2009, p.60 ; et BEKOFF, M.,
Encyclopedia of Animal Rights and Animal Welfare, Greenwood, 2009, p. xxix.
25
Par exemple, les conditions de production des produits ne sont pas toujours transparentes,
mais un nombre croissant de consommateurs s'avère soucieux de faire des choix plus éthiques
et éclairés lors de leurs achats157. De nos jours, le système d'élevage intensif est de plus en
plus dénoncé, du fait de ses implications désastreuses sur les animaux, l'environnement et la
santé humaine158. Mais les produits animaux issus de cette production industrielle sont
également les plus consommés du fait des prix bas pratiqués, au détriment de la préservation
du bien-être animal, de l'écologie planétaire et de la santé des consommateurs159. D'une
manière générale, le manque d'information, comme la désinformation généralisée de ces
derniers, sont à déplorer. Au nom de la productivité à outrance, des publicités encouragent à
surconsommer ces produits, conduisant à une surproduction déraisonnée et non durable, à
l'origine de nombreux maux pour des milliards d'animaux, d'êtres humains, et de la planète160.
De pair avec la contestation croissante de la (sur)consommation des produits animaux, il est
possible de constater la montée du végétarisme et du végétalisme, ainsi que l'apparition du
véganisme en tant que mode de vie respectueux des animaux non-humains161.
Néanmoins, la demande en produits carnés ne cesse de croître et la production de viande
devrait doubler d'ici 2050 d'après l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et
l'agriculture (FAO), surtout dans les pays en voie de développement162.
En plus du mouvement sur l'abolition de la viande, de nombreux autres mouvements se
propagent en faveur de la cause animale et ce partout dans le monde, qu'il s'agisse des
mouvements anti-fourrure, anti-corrida, anti-foie gras, anti-usines à chiots, anti-chasses etc163.
157 Voir HARRISON, R., NEWHOLM, T. et D. SHAW, The ethical consumer, SAGE, London, 2005. 158 Voir généralement COLLECTIF D'EXPERTS, La vérité sur la viande, les arènes, 2013. 159 Id. 160 Id. Mentionnons notamment : la déforestation pour l'élevage et perte de biodiversité, l'appauvrissement des sols,
l'expansion des monocultures afin de nourrir essentiellement le bétail (alors que les céréales produites et l'eau
consommées pour la production animale pourrait remédier à la faim dans le monde et à une meilleure répartition des
ressources), l'augmentation de la pollution agrochimique et des émissions de gaz à effet de serre (première cause des
changements climatiques avant les transports). Extrêmement énergivore et polluante pour la planète, en plus d'utiliser
une surface considérable et d'appauvrir les sols, la production animale pratiquée de manière industrielle utilise
également des hormones et des antibiotiques (sources d'antobiorésistance chez les humains). Une trop grande
consommation de produits animaux est également la cause de diabète, d'obésité et de cancer du côlon (pour la viande),
d'ostéoporose (pour le lait) et de mauvais cholestérol (produits animaux). Enfin, plus les élevages sont intensifs, plus
ils sont générateurs de souffrances pour les animaux. Généralement enfermés et confinés, bien souvent suralimentés et
mal soignés, volontairement mutilés et parfois isolés, forcés à produire et à se reproduire, le tout dans des conditions
antinaturelles, leur vie est loin d'être source de bien-être de nos jours. 161 Selon la Vegan Society : "Le véganisme est un mode de vie qui cherche à exclure, autant qu'il est possible et
réalisable, toute forme d'exploitation et de cruauté envers les animaux, que ce soit pour se nourrir, s'habiller, ou pour
tout autre but" (traduction libre). Voir sur le site de la Vegan Society, en ligne :
http://www.vegansociety.com/about/who-we-are.aspx (date d'accès: 22.05.2012). 162 STEINFELD, H. et al., Livestock's Long Shadow: Environmental issues and options, FAO, Rome, 2006, p.xx.
Aussi FAO, Meat & Meat Products, FAO, 2014, en ligne : http://www.fao.org/ag/againfo/themes/en/meat/home.html
(date d'accès : 9.12.2014). 163 Voir par exemple à ce sujet : BURGAT, F., "La mouvance animalière. Des "petites dames de la protection animale"
à la constitution d’un mouvement qui dérange", dans BURGAT, F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Collection
26
Cette contestation montante de la société mondiale n'a d'égal que l'augmentation grandissante
du nombre d'organisations de protection animale164. Citons aussi l'implication croissante des
personnalités politiques et médiatiques pour faire avancer la cause animale dans le monde165.
À ce jour, il n'est plus possible d'affirmer que la protection animale est une préoccupation de
riches occidentaux. Elle est présente partout dans le monde, y compris dans les pays en
développement. De plus, même si la conscientisation des problèmes de cruauté et le pro-bien-
être animal est un phénomène récent à l'échelle mondiale, il serait faux d'affirmer que le sort
des animaux est une préoccupation récente.
En effet, la cruauté envers les animaux est dénoncée au moins depuis l'Antiquité, selon les
premiers textes retrouvés des philosophes grecs depuis Pythagore au VIe siècle avant J.-C166.
La cause animale fut régulièrement évoquée par de grands penseurs, en particulier par de
grands humanistes célèbres, mais plus méconnus pour leur engagement envers les animaux,
comme Léonard de Vinci, Rousseau, Montaigne, Hugo, Voltaire, Tolstoï, Schopenhauer,
Thomas More, Milan Kundera, Gandhi et bien d'autres167.
Ainsi, certains esprits se sont montrés favorables aux animaux de tous temps. Pierre Giberne
l'évoquait déjà dans sa thèse de 1931 sur la protection juridique des animaux, en ajoutant :
« puisque de nos jours, on semble s'occuper davantage d'améliorer le sort des
animaux [...] établissons bien, pour donner aux tendances modernes une autorité
réelle, qu'elles ne sont pas le fruit d'un engouement passager, mais que tout au
contraire, elles puisent leurs forces vives dans les enseignements d'un passé
reculé »168.
Pouvoirs, n° 131, 2009, pp. 57-72; et BEST, S., Terrorists or freedom fighters? : Reflections on the liberation of
animals, Lantern Books, 2004. 164 Voir IRWIN, P.G., “A Strategic review of International animal protection”, The State of the Animals II, Humane
Society Press, 2003, pp.1-8. 165 Voir par exemple : BRISTOL, M., "Famous Animal Activists: Celebrities Who Care About The Creatures Around
Them", Huffingtonpost, 28.04.2013 ; OLESEN, A., "Animal Rights In China Get Boost From Celebrity Activists And
Shifting Attitudes", Huffingtonpost, 21.02.2012 ; SPCA, "Une trentaine de personnalités québécoises demandent la
révision du statut juridique des animaux", 22.01.2014 ; Animalter, "51 personnalités s’engagent contre la fourrure en
France", 4.11.2014 ; et IFAW: "International Fund For Animal Welfare Celebrity Supporters ", en ligne :
https://www.looktothestars.org/charity/international-fund-for-animal-welfare. 166 Pythagore (VIe siècle avant J.-C.) et Empédocle (490-435 avant J.-C.) seraient ainsi considérés comme les
fondateurs de l’éthique animale. Voir LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit
de la protection des animaux en Occident", Lex Electronica, vol. 10, n° 2 (numéro spécial), Automne 2005, en ligne :
http://www.lex-electronica.org/articles/v10-2/LÉTOURNEAU.pdf (date d'accès : 22.12.2014). 167 Voir généralement le recueil des écrits de ces penseurs, compilé par Jean-Baptiste Jeangène Vilmer dans l’ouvrage
de référence, Anthologie d'éthique animale, paru aux Presses universtaires de France en 2011. 168 GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie
Thierry, Nîmes, 1931, p.19.
27
Plus largement, le principe de respect du vivant est présent dans toutes les religions et toutes
les philosophies du monde depuis la nuit des temps169. Le devoir de respecter les animaux en
tant qu'êtres vivants fait donc partie de la morale universelle de l'humanité, prise dans son
sens le plus compassionnel. Comme témoignage de la conscientisation croissante en faveur du
bien-être animal, de grands guides spirituels et religieux prennent ainsi la parole et la plume
afin de prôner la bienveillance170, ainsi que le respect et la compassion envers les animaux171.
D'une manière générale, il existe un sentiment largement partagé parmi les humains selon
lequel il est mal d'être cruel envers les animaux172. En ce sens, presque personne n’est
favorable à la souffrance et la cruauté envers les animaux173. C'est pourquoi, un nombre
croissant de personnes manifestent ouvertement leur désaccord face à celles-ci174. En tout état
de cause, force est de constater que le mouvement de protection animale prend de
l’ampleur175. De même, les actions menées en faveur du bien-être animal se multiplient
partout dans le monde, à l'image des diverses législations et décisions protectrices que nous
présenterons par la suite176.
Précisons en quoi la protection du bien-être animal intéresse aussi la communauté scientifique
dans les domaines des sciences pures et des sciences sociales.
2°) Pertinence scientifique
Les domaines scientifiques intéressés par la protection du bien-être animal incluent
notamment les sciences de la vie, l'éthique et le droit177. Située entre science, éthique et droit,
la protection bien-être animal est donc un sujet interdisciplinaire. Parmi les sciences de la vie,
l’un des principaux champs disciplinaires concernés est la biologie. Tout particulièrement,
l’évaluation de la sensibilité (comme capacité de ressentir la douleur et la souffrance178) chez
169 Voir généralement WALDAU, P. et K. PATTON, A Communion of Subjects: Animals in Religion, Science, and
Ethics, Columbia University Press, 2006. 170 Voir RICARD, M., Plaidoyer pour les animaux, Allary éditions, 2014. 171 Voir la préface de l'Archevêque Desmond TUTU, "Extending Justice and Compassion", dans LINZEY, A., The
Global Guide to Animal Protection, University of Illinois, 2013. 172 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.29 173 FAVRE, D., “Movement toward and international convention for the protection of animals”, dans BLACKMAN,
D.E., Animal welfare and the law, Cambridge University Press, pp. 247-269, 1989, p.251. 174 PREECE, R. et L. CHAMBERLAIN, Animal welfare & human values, Wilfrid Laurier University Press, 1993,
p.62. 175 Sur ce mouvement, voir BURGAT, F., "La mouvance animalière. Des "petites dames de la protection animale" à la
constitution d’un mouvement qui dérange", dans BURGAT, F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Collection
Pouvoirs n° 131, 2009, pp. 57-72. 176 Voir WILKINS, D.B. et al, “Animal welfare: the role of non-governmental organizations”, dans BAYVEL,
A.C.D., Animal Welfare, global issues, trends and challenges, OIE, 2005, pp. 625-636. 177 Voir les ouvrages pertinents en bibliographie à : "Aspects éthiques, scientifiques et juridiques du bien-être animal". 178 Même si les termes de "souffrance" et de "douleur" sont synonymes au sens commun, la "souffrance" supposerait
scientifiquement "une forme de conscience des phénomènes douloureux". Voir AUFFRET VAN DER KEMP, T. et
J.-C. NOUËT, Homme et animal : de la douleur à la cruauté, Harmattan, 2008, p.31-32.
28
les animaux et l’étude des comportements relatifs au bien-être animal renvoient aux sous-
domaines de la neurobiologie, de la physiologie et de l'éthologie. Sur le plan de l'éthique,
définie comme discipline de la philosophie morale179, le domaine concerné est l'éthique
animale. Quant au droit, il s'agit du droit animal et de la science juridique qui lui est attachée.
Le sujet choisi est scientifiquement pertinent puisqu’il s’inscrit au cœur de l'intérêt croissant
manifesté pour lesdites sciences du bien-être animal (dans le domaine des sciences pures)180,
ainsi que pour l'éthique animale, et surtout pour le droit animal, dans le cadre de cette étude.
b) Intérêt juridique grandissant
À travers le monde, le bien-être animal éveille l'intérêt croissant des juristes de tous horizons
comme nouveau sujet de réflexion. Cette étude sur le droit du bien-être animal est pertinente
pour la science du droit comme domaine de plus en plus reconnu internationalement et plus
particulièrement comme domaine émergent en droit francophone.
En plus de susciter un intérêt juridique mondial (1°), cet intérêt est de plus en plus actuel (2°).
1°) Intérêt juridique mondial
Le droit animal est un phénomène mondial181.
En ce début de XXIe siècle en effet, la prise de conscience planétaire qui s'opère en faveur du
bien-être animal se reflète de manière notable en droit positif comme dans la science du droit.
En droit positif, un nombre croissant de textes, législations nationales et instruments
supranationaux sont adoptés pour sanctionner les actes de cruauté et promouvoir le bien-être
des animaux. Alors que les mesures dites "anti-cruauté" visent généralement à sanctionner les
mauvais traitements des animaux placés sous notre responsabilité (qu'ils soient domestiques
ou sauvages en captivité), les mesures qualifiées de "pro-bien-être" visent, quant à elles, à
limiter les souffrances et améliorer le traitement des animaux utilisés à toutes fins. Il s'agit le
plus souvent de réglementer les activités de production (alimentaire et vestimentaire) et
d'expérimentation (tests de toxicité et recherche biomédicale), mais il peut également s'agir de
réglementer des activités visant la captivité des animaux (dans les zoos et parcs aquatiques)
ainsi que les spectacles avec animaux (cirques, rodéos, combats) ou autres comme les
méthodes de chasse, ainsi que les réglementations destinées aux animaux de compagnie.
179 L' "éthique" est une discipline de la "philosophie morale". Voir la définition dans CANTO-SPERBER, M.,
Dictionnaire d'éthique et de philosophie morale, PUF, 2004, p. 585. 180 Voir MELLOR, D.J., PATTERSON-KANE, E. et K. J. STAFFORD, The Sciences of Animal Welfare, Wiley-
Blackwell, 2009. 181 Voir TISCHLER, J., "Animal Law: A World Phenomenon!", ALDF, 16.07.2014.
29
Dans la science juridique, le droit animal se développe mondialement. Depuis le début du
XIXe siècle, l'Angleterre a fait figure de pays précurseur dans l'adoption de lois de protection
des animaux, et c'est également le premier pays à avoir enseigné le droit animal182. Depuis le
début des années 2000, une explosion mondiale des cours de droit animal a été constatée183.
De nos jours, des centaines d'universités proposent des programmes spécifiques dans ce
domaine à travers le monde. Il s'agit majoritairement des pays pionniers en matière de
protection animale que sont les pays anglophones (Royaume-Uni, Australie, Nouvelle-
Zélande, Canada anglais et Etats-Unis : plus de 130 universités enseignent cette matière dans
ce pays), mais aussi de certains pays européens (Pays-Bas, Autriche, Suisse, Espagne), ou
d'autres encore comme l'Inde, Israël184 ou le Kazakhstan185.
Dans les systèmes anglophones, le droit animal fait partie intégrante des disciplines juridiques
depuis le XXe siècle186 et celui-ci se manifeste de plus en plus dans d'autres systèmes. En droit
francophone, il en est à un stade embryonnaire187, mais il est possible d'espérer la
reconnaissance et l'enseignement du droit animal dans les universités francophones à l'avenir.
Concernant les domaines émergents issus de nouvelles prises de conscience, soulignons que :
« Les facultés de droit n'accueillent le nouveau courant de pensée qu'avec un
judicieux retard »188.
Des exemples encourageants commencent toutefois à émerger en France et au Québec189.
En plus de la création de la Revue Semestrielle de Droit Animalier (RSDA) et de la direction
de doctorants par le Professeur Jean-Pierre Marguénaud de l'Université de Limoges en
France, citons au Québec la création du Groupe de Recherche International en Droit Animal
(GRIDA), dirigé par la professeure Martine Lachance, parallèlement à la mise en place de
182 RADFORD, M., Animal welfare law in Britain: Regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001. 183 EADIE, E.N., Education for Animal Welfare, Springer, 2011, p.44. 184 Des programmes de Master en droit animalier sont proposés par les Universités de Lewis & Clark aux Etats-Unis et
à l'Université Autonome de Barcelone en Espagne, un programme de doctorat étant également proposé par l'Université
de Bâle en Suisse. Sur les autres pays, voir notamment Peter Sankoff, Animal Law in Australasia: A New Dialogue,
Federation Press, 2009, p. 116. 185 Voir Jean-Marc NEUMANN, "Le droit animalier enseigné au Kazakhstan !", Animal et droit, 19 juillet 2014. 186 Voir COOPER, M. E, An introduction to animal law, San Diego, London, Academic Press, 1987, p.1. 187 Voir NEUMANN, J.M., "L’enseignement du droit des animaux en France, c’est pour quand ?", Opinion
internationale, L'avis des bêtes, 31 mai 2013. 188 HARDOUIN-FUGIER, E., “Naissance de la protection animale dans le droit européen”, dans MARGUÉNAUD, J.-
P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses,
Pédone, 2009, p.22 en référence à M.VILLEY, Leçons d'histoire de la philosophie du droit, Dalloz, 2002, p.76. 189 En plus de la création de la Revue Semestrielle de Droit Animalier (RSDA) et la direction de doctorants en droit
animalier par le Professeur Jean-Pierre Marguénaud de l'Université de Limoges en France, citons outre-Atlantique la
création du Groupe de Recherche International en Droit Animal (GRIDA), dirigé par la professeure Martine Lachance
et les cours donnés par celle-ci à ce sujet à l'UQAM l'Université du Québec à Montréal (UQAM) au Québec, Canada.
30
premiers cours en droit animal à l'Université du Québec à Montréal (UQAM). La réalisation
de cette thèse à l'Université Laval vient également abonder dans le sens de cette évolution.
Les sciences du bien-être animal sont établies depuis plusieurs années et le concept même de
"bien-être animal" (traduit de l’anglais "animal welfare") est issu des sciences pures190.
Or nous verrons que, si la science ne cesse de faire des découvertes sur la sensibilité et les
capacités étonnantes des animaux non humains, le droit peine encore à suivre le mouvement.
Outre le déploiement des cours universitaires, des publications spécialisées se multiplient.
En effet, la protection du bien-être des animaux génère une littérature de plus en plus
abondante191. Relevons la création de plusieurs revues académiques en droit animal192,
une recrudescence de travaux juridiques -dont des thèses-193, ainsi que la multiplication des
colloques internationaux dans ce domaine, surtout depuis le début des années 2010194.
2°) Intérêt juridique actuel
Comme le souligne très clairement Fabien Marchadier :
« L’attitude à l’égard de l’animal a incontestablement évolué. Comparer les
motivations des décisions et les commentaires doctrinaux d’hier et d’aujourd’hui
révèle la considération désormais portée à l’animal et aux relations l’unissant à
l’homme »195.
190 DESMOULIN, S., L’animal, entre science et droit, PUAM, no 951, 2006, p. 530-531. 191 En plus de la bibliographie, voir par exemple comme ouvrages récents : CURNUTT, J., Animals and the law : a
sourcebook, Calif, ABC-CLIO, 2001 ; COULON, J.-M., Les droits de l'animal, Paris, Dalloz, 2009 ; DESMOULIN,
S., L’animal, entre science et droit, PUAM, no 951, 2006 ; FAVRE, D. S., Animal law welfare, interests, and rights,
New York, Aspen Publ., 2008 ; INGHAM, J. H., The law of animals : a treatise on property in animals, wild and
domestic, and the rights and responsibilities arising therefrom, The Lawbook Exchange, 2003 ; PALMER, J., Animal
law, Shaw & Sons, 2001, et HALPERN, C., Le droit des animaux, Paris, Eska, 2007. 192 Au-delà de la revue pionnière, Animal Law Review, créée en 1994 aux Etats-Unis, citons plus récemment la
création des revues académiques suivantes : Revue semestrielle de droit animalier (RSDA) depuis 2009 (version
papier et en ligne sur : www.unilim.fr) ; Derecho animal depuis 2010 (en ligne sur : www.derechoanimal.info) ;
Global Journal of Animal Law (GJAL) depuis 2012 (en ligne sur : www.gjal.abo.fi). 193 Outre cette thèse, voir par exemple : DESMOULIN, S., L’animal, entre science et droit, PUAM, n° 951, 2006 ;
BOISSEAU-SOWINSKI, L., La désappropriation de l'animal, Université de Limoges, 2008 ; et LAMBERT-HABIB,
M.-L., Le commerce des espèces sauvages : entre droit international et gestion locale : réflexions sur la CITES, Paris,
L'Harmattan, 2000. 194 Citons notamment les conférences internationales auxquelles nous avons assisté et participé pour certaines, dont :
"L'animal souffre t'il en droit ?", Ottawa (Canada), 20 mai 2011 ; Conference "Animal Law", Lewis & Clark Law
School, Portland (Etats-Unis), 14-16 octobre 2011 ; "Animal and the Law Conference", 24-25 octobre 2011, Barcelone
(Espagne) ; "Enforcement of European Animal Welfare Related Legislation", Bruxelles (Belgique), 12-13 juin 2012 ;
"Animal Law and Ethics", Université de Zurich (Suisse), 7-8 juillet 2012 ; "La Souffrance Animale: De la Science au
Droit" (oraganisateurs LFDA et GRIDA), siège de l’OIE à Paris (France), 18-19 Octobre 2012 ; "Law and Animals:
Ethics at Croassroads", Université de Bâle (Suisse), 1 mars 2013 ; Conférence "Nous et l'animal", Palais du
Luxembourg à Paris (France), 7 février 2014 ; "The Animal Turn and the Law", Université de Bâle (Suisse), 4-5 avril
2014 ; "L’animal de demain : sujet ou objet?", Faculté de droit de Nice (France), 11 avril 2014 ; Global Animal Law
Conference II, Barcelone (Espagne), 10-11 Juillet 2014 ; Conference "Animal Law", Lewis & Clark Law School,
Portland (Etats-Unis), 16-18 octobre 2015 ; Conférence "Interdependence", Bruxelles (Belgique), 13-15 mai 2016 ;
Conférence "Sentience", Université de Berlin (Allemagne), 21-22 mai 2016. 195 Les "droits légaux" se distinguent des "droits moraux" en se que les premiers sont juridiquement reconnus.
31
Autour de l'accroissement palpable de cet intérêt mondial porté au droit de l’animal, les
discussions sont le plus souvent axées sur l'objectif général d'améliorer la protection des
animaux et leur statut juridique en tant qu'êtres sensibles. Les propositions se rejoignent
généralement sur l'idée que les animaux devraient être considérés et traités légalement comme
des sujets de droit, voir de droits, et méritant en tout état de cause, respect et protection.
Bien que distincte du droit animal, la question des droits des animaux est mise en exergue de
manière croissante dans les débats d'experts. Marquant une étape supérieure dans la prise en
compte des intérêts des animaux, les premières manifestations des droits légaux196
commencent également à poindre en droit positif, notamment pour les grands primates.
Proches cousins de l'être humain, ceux-ci sont classés dans la grande catégorie des animaux
qui va jusqu'aux organismes primitifs. En tenant compte du continuum de la vie, il est
toutefois possible de supposer que les intérêts des animaux les plus proches de l'homme sont
aussi plus proches des intérêts humains que ceux d'organismes primitifs comme l'éponge197.
En ce sens, l'approche progressiste met de l'avant que les droits légaux devraient d'abord être
accordés aux animaux les plus proches de l'homme (avant de s'étendre aux autres), c'est-à-dire
aux hominidés (chimpanzés, gorilles, orang outangs et bonobos), tel que reflété par le "Projet
grands singes" dirigé par Peter Singer et Paola Cavalieri198 et le "Nonhuman Rights Project"
dirigé par le juriste Steven Wise. Ce projet est désormais étendu aux éléphants et aux
baleines, pour leur proximité (cognitive, émotionnelle ect.) aussi reconnue avec l'espèce
humaine199.
Désormais, l'octroi de la personnalité juridique et de droits légaux aux animaux ne peut plus
être qualifié d'utopie200. Depuis le début du XXIe siècle en effet, des exemples apparaissent en
ce sens. En particulier, des pays comme la Nouvelle-Zélande, l'Espagne (et les Baléares) ont
proposé d'octroyer des droits fondamentaux aux grands primates afin qu'ils ne soient plus
soumis à des expérimentations201. L'Inde reconnaît aux cétacés le droit de ne pas être exploité
196 MARCHADIER, F., "L’animal du point de vue du droit civil des personnes et de la famille après l’article 515-14
du Code civil", Revue Semestrielle de Droit Animalier, pp.433-443, RSDA 1/2015, p.436. 197 "Les intérêts du chimpanzé sont plus proches de ceux de l'homme que de ceux de l'éponge", dans JEANGÈNE
VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p.64. 198 PROSIN, N. et S. M. WISE, "The Nonhuman Rights Project: Coming to a Country Near You", Global Journal of
Animal Law, Vol.2, 2014. 199 CAVALIERI, P., et P., SINGER, The great ape project: equality beyond humanity, St. Martin's Griffin, 1996. 200 Voir par exemple à ce sujet CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des droits,
Seuil, 2013, p.148. 201 Nouvelle-Zélande: Law banning great ape research, 2000 ; Baléares : Resolution granting great apes legal rights,
2007 ; Espagne : Resolution granting great apes legal rights, 2008.
32
dans des parcs aquatiques202. Fin 2014, l'Argentine a aussi adopté une décision pionnière, en
validant l’Habeas Corpus pour Sandra, une Oran-Outang détenue au zoo de Buanos Aires, en
reconnaissant d’une manière générale et inédite, que les animaux sont des "sujets de
droits"203.
Evoquons aussi les tentatives de Steven Wise dans le cadre du NonHuman Rights Project
avec les cas connus des chimpanzés Hercules et Leo, proches de cette reconnaissance aux
Etats-Unis. Bien que celle-ci ne soit pas encore gagné, chaque pas semble avancer dans cette
direction204.
Enfin, cette transformation du statut juridique de l’animal est confirmée par la plus récente
adoption, à ce jour, du Projet de loi révolutionnaire au Luxembourg qui reconnaît que les
animaux peuvent être "titulaires de certains droits"205. Reste à voir si ce projet de loi sera
adopté en l’état et si les implications qui suivront seront à la hauteur de cette affirmation206.
Ainsi, la barrière de l'espèce a déjà été franchie. Non seulement les êtres humains mais aussi
les animaux non-humains commencent à se voir reconnaître la possibilité de disposer de
droits légaux. Il s'agit là d'un premier pas pour le droit mais d'un grand pas pour l'animalité.
En effet, la porte est désormais ouverte à la reconnaissance de droits légaux pour les animaux
les plus proches de nous et peut-être à l'avenir pour l'ensemble des mammifères, puis des
vertébrés et pourquoi pas un jour jusqu'aux invertébrés ? Au siècle dernier seulement, il
semblait impensable pour certains hommes blancs que les hommes de couleur et les femmes
puissent disposer des mêmes droits207. "Le progrès est la réalisation d'utopies" disait Oscar
Wilde208.
202 News Editor, "India Bans Captive Dolphin Shows as ‘Morally Unacceptable’", Environment News Service, New
Delhi, India, 20.05.2013. 203 Cette décision a été adoptée dans l'affaire d'une orang-outang nommée Sandra, et devrait résulter en sa libération du
zoo de Buenos Aires où elle est détenue depuis plus de 20 ans. Voir BBC, "Court in Argentina grants basic rights to
orangutan", BBC News, 21.12.2014; et sur la portée incertaine de la décision elle-même: WISE, S., "Sandra Orangutan
and Personhood", Psychologytoday, 24.12.2014 précisant que la phrase clef de celle-ci est: "[..] it is necessary to
recognize the animal as a subject of rights, because non-human beings (animals) are entitled to rights, and therefore
their protection is required by the corresponding jurisprudence". 204 MONTMARTIN, V., "Personne non-humaine : le futur statut de Hercules et Léo ?", Siences et Avenir, 22.04.2015. 205 Le Quotidien, "Les animaux ont (enfin) des droits", Indépendant luxembourgeois, 7 mai 2016, en ligne :
http://www.lequotidien.lu/politique-et-societe/les-animaux-ont-enfin-des-droits/ (date d’accès 30.06.2016). 206"Ainsi, les animaux ne sont plus à considérer comme une chose, mais comme des êtres vivants non humains doués
de sensibilité et titulaires de certains droits". Projet de loi ayant pour objet d’assurer la dignité, la protection de la vie,
la sécurité et le bien-être des animaux, Luxembourg, 4 mai 2016. Voir en ligne :
http://www.gouvernement.lu/5957189/04-conseil-gouvernement (date d’accès : 30.06.2016). 207 Cf. ISHAY, M.R., The History of Human Rights: From Ancient Times to the Globalization Era, University of
California Press, 2008. 208 En réference à Oscar Wilde, cité dans GUY, J.M., The Complete Works of Oscar Wilde: The Complete Works of
Oscar Wilde, Oxford University Press, 2007, p.247.
33
De nos jours, la protection du bien-être des animaux et ses questions connexes soulèvent une
réflexion juridique en plein essor. Cette étude s'inscrit ainsi dans un contexte d'actualité.
Permettons-nous de citer une nouvelle fois Pierre Giberne qui, dès 1931, faisait ce constat en
parlant au nom des juristes animaliers, désormais beaucoup plus nombreux qu'à son époque :
« on voit poindre dans les ténèbres une lumière vacillante qui, peu à peu augmente
d'intensité. L'homme s'éveille lentement à la vérité, et il comprend enfin qu'il n'est
pas seul sur la terre, mais que, bien au contraire, il se trouve environné d'êtres
auxquels il doit des égards. [...] Or, après la période d'indifférence dont le grand
public commence à peine à sortir, ce que nous réclamons le plus ardemment, c'est
un examen de la question complet et sincère. »209.
C'est à cet examen à la fois complet et sincère, global et objectif, auquel nous avons procédé à
travers l'étude exhaustive des textes portant sur le droit du bien-être animal dans le monde.
II- Une étude globale comme appréhension novatrice du droit du bien-être animal
"La protection du bien-être animal est une préoccupation globale"210.
À ce jour, cette préoccupation globale est sans réponse globale en droit international.
Comment parvenir à une prise en compte suffisamment sérieuse et complète de la question
par la communauté mondiale ? Cette étude permettra d'envisager les possibilités en ce sens.
1- Analyse du droit du bien-être animal : innovations globales
Bien que suscitant un intérêt croissant et de plus en plus actuel, ce domaine demeure à ce jour
inexploré de manière globale. Afin d'y remédier, nous avons opté pour un champ d'étude
global (a), tout en permettant des contributions innovantes dans le cadre de l'étude menée (b).
a) Champ d'étude global
Le champ d'analyse de notre étude est qualifié de global car il recouvre généralement toutes
les activités, tous les animaux et tous les systèmes juridiques concernés par le droit du bien-
être animal.
Précisons les activités concernées par les normes de protection du bien-être animal -afin de
décrire leur objet- (1°), avant d'évoquer les animaux protégés -afin d'identifier leurs sujets-
(2°). Ensemble, ces éléments permettront de délimiter les contours de cette étude globale.
209 GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie
Thierry, Nîmes, 1931, p.31. 210 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.29.
34
1°) Les activités concernées
De plus en plus d'activités impliquant l'utilisation des animaux sont concernées par les normes
de protection du bien-être animal. Ces activités sont soit interdites, soit réglementées, soit
autorisées ; d'une manière générale, dérogatoire ou exceptionnelle, selon le droit en vigueur.
Les activités visées concernent toutes les utilisations des animaux qui font l'objet de normes
interdisant les pratiques cruelles et encourageant le bien-être des animaux. Il s'agit notamment
des systèmes d’élevage intensif211 et de certaines méthodes comme le gavage des palmipèdes
pour la production du foie gras212 (à des fins alimentaires) ; des méthodes d'élevage et
d'abattage des animaux à fourrure213 (à des fins vestimentaires) ; de l'expérimentation animale
en laboratoire214 (à des fins cosmétiques, pharmaceutiques et médicales) ; de la maltraitance
des animaux domestiques et familiers (utilisés à des fins de travail ou de compagnie)215 ; de
certains spectacles comme les combats de chiens216, de coqs217, les cirques218 et la
tauromachie219 (à des fins de divertissements) ; de la garde en captivité d’animaux sauvages
211 L’élevage intensif est réglementé dans de nombreux pays, ainsi qu'au niveau européen et international (dans les
normes de l'OIE). Sur les problèmes éthiques liés aux conditions d'élevage intensif, voir par notamment BURGAT, F.
et R. DANTZER (dir.), Les animaux d'élevage ont-ils droit au bien-être ?, INRA, 2001. 212 La production du foie gras est désormais interdite en Allemagne, en Italie, au Luxembourg, en Norvège, en
Finlande, au Danemark, en Pologne, dans les provinces autrichiennes, en Israël, en Turquie et en Californie aux États-
Unis. Sur les problèmes éthiques relatifs au gavage des canards et des oies, voir par exemple : EUROPEAN
COMMISSION, Welfare aspects of the production of foie gras in ducks and geese, European Commission, Report of
the Scientific Committee on Animal Health and Animal Welfare, 1998. 213 Les élevages d’animaux à fourrure sont désormais interdits au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Suisse, au
Danemark, en Croatie, ainsi que dans certaines provinces d’Allemagne et d’Autriche. Sur le piégeage et l’élevage des
animaux à fourrure et les problèmes soulevés, voir BARBERO, C., "Piégeage et élevage des animaux à fourrure", dans
BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés, Documentation française, 2004, pp.76-78. 214 À l'image de l'élevage intensif, l’expérimentation animale est réglementée dans de nombreux pays, ainsi qu'au
niveau européen et international (dans les normes de l'OIE). Sur les questions éthiques liées à l'expérimentation voir
BAIRD, R. M., Animal experimentation: The moral issues, Prometheus Books, 1991, et plus récemment : MONAMY,
V., Animal Experimentation: A Guide to the Issues, 2d ed., Cambridge university Press, 2009. 215 Les animaux familiers sont généralement protégés par les lois dites "anti-cruauté" adoptées dans de nombreux pays
ainsi qu'au niveau européen. Sur les maltraitances des animaux de compagnie, voir CARLISLE-FRANK, P., Silent
victims : recognizing and stopping abuse of the family pet, Toronto, University Press of America, 2006 et sur leur
bien-être en général, voir STEIGER, A., "Animaux de compagnie : hébergement, élevage et bien-être", dans BROOM,
D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, pp.121-146. 216 Les combats de chiens sont interdits au Canada, aux États-Unis, et dans les pays européens comme au Royaume
Uni depuis 1835. Sur les combats de chiens et les préoccupations éthiques qui en résultent, voir MILLER, F.P.,
VANDOME, A.F. et J. MCBREWSTER, Dog Fighting, Alphascript Publishing, 2010. 217 Les combats de coqs sont interdits dans certains pays comme au Canada, aux Etats-Unis et en Angleterre mais
autorisés dans le nord et les îles en France par exemple. Voir O., Combats de coqs, ACCT-L'Harmattan, 1990. 218 Sur les problèmes de détention, de transport et de dressage des animaux dans les cirques, voir NOUËT, J.-C. et
S.NÉ, "La condition animale dans les cirques", dans BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés, Documentation
française, 2004, pp. 90-91. 219 Interdite ou autorisée dans certains pays d'Amérique latine, la corrida est aussi pratiquée en France, au Portugal, en
Espagne mais l’une de ses régions, la Catalogne, l’a interdite depuis 2010. Sur la corrida, voir HUGON, C., "La
corrida et la souffrance animale", dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-
delà de la distinction entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, 2009, pp. 167-179.
35
dans les zoos220, les parcs aquatiques221 ou encore les fermes d’ours en Asie222. Concernant
plus particulièrement les animaux sauvages en liberté, les méthodes remises en cause incluent
notamment des techniques de capture comme les pièges à mâchoires223, des méthodes de
chasse comme la chasse à courre224 ou aux mammifères marins (ex : phoques225 et cétacés226),
ou certains types de pêche comme l’ablation des ailerons de requins227.
Sans être exhaustive, cette énumération précise l'étendue des cas visés par notre étude, afin de
mieux cibler le champ du droit de la protection du bien-être des animaux dans le monde228.
2°) Les animaux protégés
En plus des animaux domestiques, familiers et captifs, qui se trouvent sous la responsabilité
de l'homme, cette étude s'intéresse aussi aux animaux sauvages. Certaines études juridiques
contestent en effet l’exclusion des animaux sauvages des normes de protection du bien-être
220 La détention des animaux sauvages en captivité dans les zoos est réglementé par certains pays ainsi qu'au niveau
européen. Sur les problèmes éthiques relatifs à la captivité des sanimaux sauvages, voir notamment : BOSTOCK, S.
St.- C., Zoos and animal rights : the ethics of keeping animals, London, Routledge, 1993. 221 Les réglementations relatives aux animaux sauvages en captivité peuvent également s'appliquer aux parcs
aquatiques, où le stress intense subi par les mammifères marins et surtout les cétacés est de plus en plus critiqué par les
spécialistes. Voir à ce sujet EATON, R. L., “Orcas and dolphins in captivity”, dans ARMSTRONG, S. J. (dir.), The
animal ethics reader, Routledge, 2008, pp.497-500 ; ainsi que le film documentaire primé "The cove" (ou "La baie de
la honte" en français) réalisé par Louis Psihoyos (Oscar du Meilleur Documentaire en 2010). 222 Ces fermes sont interdites au Vietnam depuis 2005 mais des milliers d'ours sont encore détenus en en Corée du Sud
et surtout en Chine. Les méthodes de détention et d’extraction de bile des ours pour la médecine traditionnelle
asiatique sont dénoncées pour leur cruauté. Voir RALOFF, J., “A Galling Business: The inhumane exploitation of
bears for traditional Asian medicine”, Science News Online, n°16, vol. 168, 15.10.2005. 223 Les pièges à mâchoires font l'objet d'une réglementation communautaire depuis 1991 et d'accords internationaux
passés en 1998 entre l'Union européenne - le Canada et la Russie, ainsi qu'avec les États-Unis. Sur la cruauté des
pièges à mâchoires, voir JEANGÈNE VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p.245. 224 La chasse à courre est interdite en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne. Notons que la chasse à courre
était déjà dénoncée par Montaigne dans ses Essais en 1669 au Chapitre XI : "De la cruauté", pp. 216-217. 225 Les pays pratiquant la chasse aux phoques ont adopté certaines réglementations (ex : Règlement sur les mammifères
marins au Canada) et les produits dérivés du phoque sont interdits en Europe depuis 2009. Sur les questions éthiques
débattues, voir entre autres LINZEY, A., Why animal suffering matters : philosophy, theology, and practical ethics,
Oxford University Press, 2009, chap. 5 : "Commercial sealing", pp.115-149. 226 Bien qu'un moratoire international sur la chasse à la baleine ait été décidé en 1986 par la Commission baleinière
internationale (CBI), certains pays continuent à pratiquer cette chasse comme la Norvège et Japon. Outre les méthodes
de chasse à la baleine, celles aux petits cétacés (dauphins et marsouins - non protégés par ce moratoire) sont dénoncées
comme cruelles dans de nombreux Etats (ex : Groenland, iles Féroé, Japon, Russie, iles Salomon et Pérou). Voir
BRAKES, P. et S. FISHER, Hunted Dead or Still Alive - A report on the cruelty of whaling, WDCS-HSUS, 2003. 227 Bien qu'il existe une loi de protection animale au Japon depuis 2000, elle ne s'applique pas aux fins commerciales
comme celle de l'ablation des ailerons de requins. Cette pratique est critiquée du fait que les requins demeurent vivants
lors du processus et remis à l'eau, agonisants. Voir BROUS, R., “Shark fin cruelty”, New scientist, 23 Feb. 2002. 228 Le débat sur les biotechnologies et l’impact des modifications génétiques sur le bien-être animal ne seront abordés
que dans le cadre de l'expérimentation. Voir à ce sujet BROOM, D.M., “The effects of biotechnology on animal
welfare”, dans HOLLAND, A. et A. JOHNSON, Animal biotechnology and ethics, Chapman & Hall, 1998, pp.69-82 ;
MARIE, M., Animal bioethics : principles and teaching methods, Wageningen, Wageningen Academic Publishers,
2005 ; GJERRIS, M., OLSSON, A. et P. SANDOE, "Biotechnologie animale et bien-être des animaux", dans
BROOM, D.M., Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, pp.97-120 ; AUFFRET VAN DER KAMP.
T., RENAVILLE, R. et A. BURNY, Biotechnology in animal husbandry, Kluwer Academic Publishers, 2001 ou
encore TWINE, R., Animals as Biotechnology : Ethics, Sustainability and Critical Animal Studies, Earthscan, 2010.
36
animal, en contestant l’"idée fausse selon laquelle seule la sensibilité des animaux
domestiques mériterait d’être protégée"229.
Parmi les animaux domestiques et sauvages, cette étude concerne tant les animaux vertébrés
(ex : oiseaux, reptiles, mammifères) que certains invertébrés (ex : mollusques et crustacés).
Au regard des nouvelles preuves scientifiques et des considérations éthiques sur la souffrance
animale, il est possible d'affirmer que les animaux sauvages (en plus des animaux
domestiques), comme les animaux invertébrés (en plus des vertébrés), méritent tous de figurer
au rang des animaux protégés par les réglementations relatives au bien-être animal.
Précisons ici que, si notre étude n'a pas pour vocation d'être prescriptive, ces implications
logiques seront prises en compte dans le but de suggérer une extension du champ
d’application des normes de protection du bien-être animal, conformément aux connaissances
éthiques et scientifiques actuelles. Ultimement, cette extension pourrait viser à rejoindre
l'acception commune, aussi reflétée dans une ancienne définition juridique selon laquelle :
« On entend par animaux, dans le langage du droit, tous les êtres animés
autres que l’homme »230.
En somme, notre champ d'étude couvre toutes les activités impliquant l'ensemble des
catégories d'animaux. Cependant, les prescriptions visées se limitent majoritairement aux
animaux dépendants de l'homme (animaux familiers, domestiques et sauvages en captivité),
qui font l'objet du plus grand nombre de dispositions relatives au droit du bien-être animal.
En plus des lois nationales et des accords européens et internationaux, les décisions judicaires
les plus pertinentes seront également évoquées, comme nous l'expliciterons par la suite.
Cette thèse vise ainsi à présenter l'état du droit du bien-être animal de la manière la plus
globale et la plus actuelle possible, en intégrant les dernières avancées (jusqu'au mois de juin
2016).
Relevons enfin que le champ d'analyse couvert par cette étude se suffit en lui-même, de sorte
que les modes d'adoption des normes de protection du bien-être animal, comme leur
229 DUBOS, O. et J.-P. MARGUÉNAUD, "La protection internationale et européenne des animaux", dans BURGAT,
F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Pouvoirs n° 131, pp. 113-126, 2009, p.114. 230 CARPENTIER, A et G.-M.-R. DE FREREJOUAN DU SAINT, Répertoire général alphabétique du droit français,
Librairie de la société du Recueil général des lois et des arrêts et du Journal du Palais, Paris, 1896, v° "Animaux", cité
dans LE BOT, O., "La protection de l’animal en droit constitutionnel : étude de droit comparé", Lex Electronica, vol.
12 n° 2, Automne 2007.
37
application pratique231, peuvent faire l'objet d'études postérieures. Voici quelques exemples
d'ouvertures prospectives permises par cette étude pour l’avenir de la science du droit232.
D'une manière novatrice, cette étude présente l'intérêt de poser les bases théoriques du droit
du bien-être animal, tout en offrant un panorama global du droit positif général actuel.
b) Contributions innovantes
"Aucun travail contemporain en sciences sociales ne peut plus faire abstraction du
contexte de la mondialisation"233.
Tout en tenant compte de ce contexte, cette étude est à la fois inédite et avant-gardiste. En ce
sens, elle offre une vue d'ensemble du droit du bien-être animal, à travers un panorama
général et détaillé (1°), ainsi qu'une analyse à la fois globale et globalisante (2°).
1°) Un panorama général et détaillé du droit du bien-être animal
La principale contribution de cette thèse consiste à présenter une vue d’ensemble du droit du
bien-être animal dans le monde. Cette contribution est inédite puisqu'un tel panorama global
n’a encore jamais été dressé dans la science du droit (que ce soit en langue française ou autre).
La docteure Sonia Demoulin-Canselier relève à ce sujet que, parmi les auteurs objectivistes :
« Certains formulent d'ailleurs le souhait que de voir élaborer un droit spécial de
l'animal permettant de systématiser de manière cohérente des solutions qui
demeurent éparses »234.
En effet, jusqu'à ce jour, la protection du bien-être animal a fait l'objet d'études spécifiques
concernant soit certains droits nationaux (y compris en droit comparé)235, soit le droit
européen et communautaire, soit le droit international, mais aucune étude n'a encore permis
231 Notre étude pourrait permettre d'ouvrir sur une nouvelle étude relative aux modes d'adoption des normes du droit du
bien-être animal (acteurs et processus en jeux), ainsi que sur le contrôle d’efficacité de ces normes en vue de l'objectif
de protection du bien-être animal. Cette dernière pourrait par exemple avoir pour intérêt d’effectuer l'analyse comparée
de l'efficacité des normes de protection juridiques et extra-juridiques (techniques et économiques) comme par exemple
les labellisations des produits respectueux du bien-être des animaux. 232 D'après le Dictionnaire Larousse, le terme "prospectif" se dit de quelque chose "qui est orienté vers l’avenir" ou
"qui anticipe sur l’avenir". 233 Voir KIEFFER, B., L'Organisation mondiale du commerce et l'évolution du droit international public, Larcier,
2008, p. 23. 234 DESMOULIN-CANSELIER, S., "Quel droit pour les animaux ? Quel statut juridique pour l’animal ?", dans
BURGAT, F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Pouvoirs n° 131, pp. 43-56, 2009, p.50. 235 Voir notamment : HUGHES, E. L. et C. MEYER, “Animal Welfare Law in Canada and Europe”, Animal Law, vol.
6, pp. 23-76, 2000 ; LE BOT, O., "La protection de l’animal en droit constitutionnel : étude de droit comparé", Revue
de la recherche juridique - droit prospectif, vol. 32, chap. 4, pp. 1823-1869, 2007 ; MEYER, C., “Animal welfare
legislation in Canada and Germany: a comparison”, Journal of Agricultural and Environmental Ethics, no 2, vol. 11,
Hannover, Lang, 1996 ; PONTHOREAU, M.C., “Constitution et protection animale, perspectives théorique et
comparée”, dans MARGUENAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction
entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, 2009, pp. 35-47.
38
d’aborder tous ces domaines. Pour la première fois, cette étude permet ainsi de rassembler et
de synthétiser les informations, et surtout les législations, relatives au droit du bien-être
animal dans le monde.
À ce jour, le plus grand nombre d’études concerne les pays anglo-saxons (Angleterre, États-
Unis, Australie et Nouvelle-Zélande236) et une relative pénurie est constatée pour les autres.
Quant au niveau européen237 et surtout international238, les études juridiques sont aussi
relativement rares239. Cette étude se propose ainsi de relever le défi de présenter un état global
du droit du bien-être animal dans le monde, malgré le peu d'études doctrinales à ce sujet,
notamment en droit comparé. Or, puisque ce sujet connaît un engouement croissant, le
nombre de sources doctrinales augmente et le droit du bien-être animal est amené à se
dévélopper.
Ainsi, cette recherche est basée sur tous les textes et travaux relatifs à la protection du bien-
être animal en droit positif général, tant au niveau national qu'au niveau supranational.
La première contribution de cette thèse consiste à proposer une vue d’ensemble du droit de la
protection juridique du bien-être animal dans le monde, sur la base des dispositions existantes
en droit général. Celles-ci se manifestent dans de nombreuses lois nationales, au sein
d'instruments européens adoptés par le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, ainsi que
dans des instruments internationaux et certaines déclarations universelles240.
Envisagée à tous les niveaux, cette vue d'ensemble permet d'explorer les possibilités d'une
protection globale (complète et universelle) du bien-être animal en droit international positif.
236 Voir pour l’Angleterre : RADFORD, M., Animal welfare law in Britain : regulation and responsibility, Oxford
University Press, 2001 ; l’Australie : SANKOFF, P.J. et S. W. WHITE, Animal law in Australasia : a new dialogue,
The Federation Press, 2009 ; le Canada : CANADA, MINISTERE DE LA JUSTICE, DIRECTION DES
COMMUNICATIONS ET DES SERVICES EXECUTIFS, Crimes contre les animaux : document de consultation,
Ministère de la justice Canada, 1998 ; le Québec : SOCIÉTÉ QUÉBÉCOISE POUR LA DÉFENSE DES ANIMAUX,
L'Animal, son bien-être et la loi au Québec, Wilson & Lafleur ltée, cop. 1990 ; Les Etats-Unis : FAVRE, D. S., Animal
law welfare, interests, and rights, Aspen, 2008 ; la France : COULON, J.-M., Les droits de l'animal, Dalloz, 2009, la
Nouvelle-Zélande : BROSNAHAN, P., “New Zealand’s Animal welfare Act : What is its value regarding non-human
hominids”, Animal Law, vol. 6, pp. 185-192, 2000. 237 Voir notamment : MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la
distinction entre les hommes et les choses, Pédone, 2009. 238 Voir notamment : BAYVEL, A. C. D. (dir.), Animal Welfare, global issues, trends and challenges, Revue
scientifique et technique, vol. 24 (2), Paris, Office international des épizooties, 2005 ; BOWMAN, M., “Conflict or
compatibility ? The trade, conservation and animal welfare dimension of CITES”, Journal of International Wildlife
Law & Policy, vol. 1, chap. 1, pp. 9-63, 1998 ; HARROP, S. R, “From cartel to conservation and on to compassion :
animal welfare and the International Whaling Commission”, Journal of International Wildlife Law & Policy, vol. 6,
chap.1, pp. 79-104, 2003 ; et VEDDER, A. (dir.), The WTO and concerns regarding animals and nature, Wolf Legal
Publishers, 2003. 239 En effet, les études évoquées ci-dessus abordent le bien-être animal sous l’aspect de la santé, du commerce ou de la
conservation des espèces, mais aucune étude juridique n’aborde globalement le droit du bien-être animal. 240 Voir l’Annexe 1 sur les lois nationales adoptés par les différents Etats, l’Annexe 2 sur les instruments européens
adoptés par le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, et l’Annexe 3 sur les normes internationales adoptées par
l’Organisation mondiale de la santé animale.
39
2°) Une vision globale et globalisante du droit du bien-être animal
Cette thèse constitue une innovation puisqu'il n'existe à ce jour aucune étude globale sur le
droit du bien-être animal. En permettant à la fois d'envisager mondialement ce qui est en droit
positif général, comme ce qui pourrait être universellement en droit international prospectif,
cette étude en offre ainsi une vision à la fois globale et globalisante.
Comme nous l'avons vu, cette étude reflète une approche globale du droit du bien-être animal
à travers la photographie générale qu'elle prend du droit positif actuel.
Son approche est également globalisante dans le sens où elle envisage ultimement la
concrétisation, c'est-à-dire la matérialisation formelle, d'une protection universelle du bien-
être animal en droit international.
En présentant un panorama global du droit du bien-être animal et de son évolution mondiale,
cette étude présente ainsi l'intérêt majeur de poser les bases théoriques de ce droit et d'en
dégager les principales caractéristiques, de sorte à pouvoir finalement en dresser le bilan,
quant à l'objectif de protection du bien-être des animaux.
Dans sa dimension globalisante, cette thèse permet enfin d'envisager la possibilité d'établir
des fondations solides pour une protection globale du bien-être animal en droit international,
applicable à tous les animaux, toutes les activités et tous les pays du monde. Notre référence
pour ces derniers concerne les 193 États souverains reconnus à ce jour par l'ONU241.
Précisons notre méthodologie afin d'expliquer la démarche suivie dans notre démonstration.
2- Etude du droit du bien-être animal : précisions méthodologiques
Commençons par positionner cette étude dans la science du droit (a), avant d'en préciser la
question centrale conduisant à la démonstration proposée (b)
a) Positionnement de cette étude dans la science du droit
Précisons notre position épistémologique (1°), puis notre approche méthodologique (2°).
241 Voir sur le site de l'ONU, "L'ONU compte actuellement 193 États Membres", en ligne :
http://www.un.org/fr/members/ (date d'accès: 21.11.2014).
40
1°) Position épistémologique
« Un mouvement de juristes animaliers est récemment apparu [et] les juristes ont
un rôle important à jouer afin de faire avancer la cause des animaux et leur
protection »242.
Certains juristes peuvent être amenés à penser que le droit du bien-être animal est un domaine
dénué d'intérêt, ou qui ne présenterait qu'une densité législative insignifiante à travers le
monde. Au contraire, nous avons établi l'intérêt de ce domaine, suffisamment conséquent pour
que cet ouvrage ne puisse en présenter qu'une esquisse générale, et ce pour chaque niveau
législatif abordé (national, européen, international et universel).
En tout état de cause, le droit du bien-être animal existe bien. En tant que domaine juridique
spécifique, celui-ci mériterait ainsi, autant que les autres domaines du droit, d'être reconnu et
enseigné. Cette étude donnera un aperçu de son étendue concernant les règles relatives au
traitement des animaux. De plus, le fait que les animaux soient définis comme des êtres
sensibles et que cette sensibilité soit désormais scientifiquement prouvée pour de nombreux
animaux, à savoir tous les vertébrés et certains invertébrés, ne fait plus de doute. Ce constat
mériterait ainsi d'être pris en compte par le droit positif général, vers une première
reconnaissance universelle du caractère impératif de protéger leur bien-être.
Cependant, l'ampleur réelle du droit animal est encore largement méconnue de la science
juridique, en particulier dans les pays francophones. Alors que ce domaine apparaît comme
une discipline à peine émergente en droit francophone, il est reconnu et enseigné depuis le
siècle dernier en droit anglo-saxon243. Aujourd'hui, ce domaine juridique mériterait sans doute
d'être abordé à sa juste valeur dans les universités francophones, au même titre que d'autres
droits novateurs comme le droit de l'environnement. De la même manière, il est possible de
considérer les animaux comme des sujets de droit extérieurs à l'homme qui méritent d'être
protégés par -et contre les abus de- celui-ci. En dressant un panorama global du droit du bien-
être animal dans le monde, cette étude invite ainsi à en réaliser l'importance et à encourager sa
reconnaissance comme domaine juridique à part entière.
242 GLASGOW, D., "The Law of the Jungle: Advocating for Animals in Australia", Deakin Law Review, Vol.13, Issue
1, pp. 181-210, 2008, p.181 (traduction libre). 243 Voir RADFORD, M., Animal welfare law in Britain: Regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001.
41
2°) Approche méthodologique
Au-delà d'une simple finalité idéale du droit international, la protection du bien-être animal
revêt déjà une force juridique qui dépasse la simple aspiration éthique au regard de l'ensemble
de ses manifestations dans les textes de droit positif général que nous présenterons. Ainsi :
« Pour avoir une vue pertinente de la nature et du rôle effectif du droit
international dans les relations internationales, il faut en effet se défier des visions
idéales, même si, à l'inverse, c'est trahir une démarche scientifiquement positive
que de méconnaître la réintégration déjà signalée des valeurs éthiques dans les
assises du droit international de l'après-guerre. »244.
Si la protection du bien-être animal fait partie des valeurs éthiques universellement partagées,
nous verrons qu'elle fait également partie des valeurs juridiques mondialement partagées.
La référence à des valeurs communes et la demande sociale croissante pour une plus grande
protection du bien-être animal à l'échelle mondiale contribuent aussi à renforcer le sentiment
d'impérativité de l'établissement d'un régime de protection adapté en droit international245.
Dans le cadre de notre démonstration conduisant aux voies d'universalisation de la protection
du bien-être animal en droit international, notre approche peut être qualifiée d'universaliste.
Elle s'inscrit ainsi dans une démarche fréquente des internationalistes, qui tend à favoriser le
progrès du droit international au profit de valeurs universelles dans un objectif fonctionnel246.
Si nous reconnaissons la connotation morale attachée à l'idée d'une protection universelle du
bien-être animal, notre approche ne relève pas pour autant du droit naturel. En effet, plutôt
que de prétendre à un devoir-être du droit international en matière de protection du bien-être
animal, notre approche positiviste revêt un caractère objectivement vérifiable en prenant le
parti d'observer les faits, c'est-à-dire en constatant l'existence, ou l'absence, d'instruments de
protection du bien-être des animaux, et en analysant les textes pertinents en droit général.
Cette étude met en lumière les indicateurs permettant d'affirmer la prise en compte croissante
du bien-être animal en droit général et désormais aussi, au sein de la Communauté
mondiale247.
Soulignons que notre démonstration relève de la technique juridique, contrairement à la
philosophie du droit qui semblerait s'imposer comme une méthodologie privilégiée, étant
244 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, Droit international public, 10e éd., Précis Dalloz, 2010p. 7. 245 Voir MERLE, M., Le droit international et l'opinion publique, RCADI, 1973, pp. 377-411. 246 Voir JEAN-COMBACAU, S., Droit international public, 8e éd., Montchrestien, 2010, p.57. 247 Voir CORTEN, Méthodologie du droit international public, Université de Bruxelles, 2009, pp. 68-83.
42
donné la forte connotation morale du sujet choisi. En choisissant la technique juridique,
considérée comme un mode de démonstration privilégié par beaucoup de facultés de droit248,
ce travail respecte la neutralité axiologique inhérente à tout travail scientifique, tout en
reconnaissant les postulats théoriques qui sous-tendent l'ensemble des raisonnements
scientifiques249.
Nous avons précisé l'approche adoptée pour les principaux éléments du sujet et insisté sur
ceux relatifs à la construction et à la finalité du droit international. Il convient désormais
d'expliciter notre démarche, ou comment notre démonstration sera menée en respectant les
exigences de cohérence et de rigueur propres à la réalisation d'une thèse de doctorat en droit.
b) De la question posée à la démonstration proposée
Posons notre problème de droit (1°) avant de spécifier notre démarche pour y répondre (2°).
1°) Le problème posé
Notre problématique nous amènera à présenter notre question de recherche et notre hypothèse.
À ce jour, il n'existe aucun régime juridique universel sur le bien-être animal, ni aucun cadre
global de protection des animaux en droit international positif250. Face à la demande
croissante d'une plus grande protection des animaux et de leur bien-être à l'échelle mondiale,
sans doute revient-il à la communauté des États d'y répondre favorablement en intégrant cette
préoccupation en droit international ?
Notre problématique est donc liée à l'existence d'une lacune en droit international et aux
possibilités d'y remédier. Plus précisément, cette étude globale consiste à présenter ce qui a
existé, ce qui existe, et ce qui pourrait exister concernant l'avenir du droit du bien-être animal.
Sur la base de la protection existante et de son développement (en droit positif), nous verrons
s'il existe des éléments pouvant permettre la construction d'une future protection universelle
(en droit prospectif). À cette fin, nous envisagerons l'existence d'universalités juridiques,
extraites du fonds commun du droit du bien-être animal. Celui-ci peut être dégagé d'une étude
comparative exhaustive, de pair avec une analyse complète de ce domaine juridique251.
248 Id., p.43. 249 Id., p.45. 250 Le "droit international" fait référence au "droit international public" défini comme "l’ensemble des normes
juridiques qui régissent les relations internationales" dans ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public,
6e éd., Yvon Blais, 2012, p.1. 251 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963, p. 507.
43
Dans leur article sur le fonds commun des systèmes juridiques, les professeurs Rudolph
Schlesinger et Pierre Bonassies affirment en ce sens :
« il semble important de rechercher, sujet par sujet, s'il est possible, -et dans
quelle mesure-, qu'un noyau commun aux systèmes juridiques soit découvert et
formulé »252.
Ce point nous amène directement à la question et à l'hypothèse qui sous-tendent cette étude.
Puisqu'il n'existe pas de protection globale du bien-être animal, la question que nous posons
est : dans quelle mesure une protection universelle du bien-être animal est-elle réalisable en
droit international ? Et plus précisément : pourquoi est-elle fondée et comment peut-elle se
concrétiser en droit international public positif ?
Tel est le questionnement au cœur de cette étude. En réponse, nous formulons l'hypothèse
selon laquelle : une protection universelle du bien-être animal est possible, sur la base d'un
fonds juridique commun. Plus précisément, nous postulons que cette protection universelle est
réalisable par la reconnaissance de principes universels (comme manifestations de ce fonds
commun), ainsi que par l'adoption d'une convention globale (comme voie de concrétisation
privilégiée) en droit international. En référence à la théorie générale des sources formelles du
droit international public, les voies d'universalisation principielle et conventionnelle seront
ainsi retenues comme les plus pertinentes aux fins de cette étude253.
Afin de vérifier cette hypothèse, nous présenterons l'évolution spatio-temporelle (à la fois
historique et géographique) du droit du bien-être animal à tous les niveaux législatifs
(national, européen, international et universel).
Il convient désormais de préciser notre manière de procéder à travers la méthodologie suivie.
2°) La méthodologie employée
Commençons par préciser notre démarche méthodologique, avant d'annoncer le plan général.
Du point de vue méthodologique, j'ai tout d'abord procédé à un inventaire documentaire
exhaustif des sources pertinentes relatives au droit positif général du bien-être animal254.
Il s'agit surtout des instruments nationaux, européens, internationaux et universels, à savoir
notamment les textes législatifs (ainsi que quasi-législatifs), la doctrine juridique et, dans une
252 Id. 253 "L'importance d'une théorie générale des sources du droit international ne saurait être sous-estimée car la
connaissance approfondie de ces sources constitue la base même de la réflexion et du raisonnement juridiques", dans
ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd., Yvon Blais, 2012, p.63. 254 Recherche effectuée, entre autres, avec les moteurs de recherche et les bases de données du portail "droit" de
l'Université Laval.
44
moindre mesure, les décisions de jurisprudence et les documents (ouvrages et articles)
émanant d'autres disciplines comme l'éthique et la biologie, ainsi que des documents
pluridisciplinaires. Toutes ces sources documentaires figurent dans la bibliographie annexée.
Notons que les législations qui seront présentées permettent d'offrir une large représentation
de l'état du droit du bien-être animal dans le monde. Celles-ci offrent une base pertinente aux
fins de cette étude, en plus d'être désormais accessibles en ligne dans la base de données de
l'auteure pour le site qu’elle a co-créé et dirige, le Global Animal Law (GAL) Project255.
Quant aux décisions de jurisprudence, nous ne manquerons pas de mentionner celles
permettant d'illustrer la réalité judiciaire et ses avancées, tout en prenant le parti de nous
limiter à certaines décisions, parmi les plus pertinentes pour cette étude. Ainsi, au moins une
décision sera citée au niveau provincial, national, européen et international, afin d'avoir une
idée de l'application actuelle du droit du bien-être animal à chacun de ces niveaux256.
Cette étude sur le droit du bien-être animal se concentre ainsi sur les législations plutôt que
sur la jurisprudence. Cette décision se justifie du fait qu’une revue exhaustive de la
jurisprudence aurait mené à la réalisation d’un second travail de recherche à l’intérieur d’un
projet déjà considérablement substantiel lorsque limité aux législations mondiales257.
Il s’agit donc là d’une limite, sans pour autant constituer une faiblesse de cette étude.
En effet, l’étude des lois est une première étape essentielle, qui pourra être suivie dans un
deuxième temps par une analyse comparative de la jurisprudence dans la perspective de
bonifier, le cas échéant, les résultats de cette étude, notamment concernant l'énonciation de
principes généraux de droit sur le bien-être animal.
255 Voir la base de données "Animal Welfare Legislations Database" (AWLD) au niveau national, accessible en ligne :
https://www.globalanimallaw.org/database/national/index.html (date d'accès: 22.08.2015). 256 Nous mentionnerons en particulier la décision Ménard au Québec (au niveau provincial), la décision de la Cour
Suprême d'Israël interdisant le foie gras (au niveau national), la décision "Jippes" de la CJCE (au niveau européen) et
les décisions pertinentes de l'OMC au niveau international, notamment celles sur les produits dérivés du phoque. 257 Alors que ces décisions sont nombreuses dans certains pays, notamment aux États-Unis, elles sont très pauvres
voire inexistantes ou peu accessibles pour de nombreux pays du monde. D'une manière générale, elles sont plus
nombreuses dans les pays anglo-saxons et européens qui sont les pays les plus avancés en la matière. Par exemple, les
décisions traitant des cas de cruauté, de négligence ou encore de zoophilie, que ce soit aux États-Unis ou au Canada,
pourraient faire l'objet d'études par province/état, pays, ou pour tout le continent nord-américain. Il en va de même
pour l'Europe, où des analyses de la jurisprudence peuvent s'avérer utiles pour les juristes et avocats œuvrant pour les
animaux. Une étude comparative sur la jurisprudence mondiale pourrait notamment venir mettre en lumière certaines
similarités, à l'image des décisions équivalentes à différents endroits du monde survenant au même moment. Pour ne
mentionner que deux exemples récents, citons les condamnations jugées "sévères" (comparativement aux précédents
cas) de un an de prison ferme pour un chat violemment molesté aux États-Unis et en France (Oscar) au début de
l'année 2014 ; ainsi que des décisions sur l'octroi de droits à des grands primates en Argentine (orang-outang) et aux
États-Unis (chimpanzés), concernant la question de leur droit à la liberté et en référence au principe d'Habeas corpus à
la fin de l'année 2014.
45
Cette étude sur le droit du bien-être animal se concentre donc sur les législations plutôt que
sur la jurisprudence. Pourquoi ? Parce que le corpus documentaire à analyser pour inclure une
revue exhaustive de la jurisprudence, en plus du corpus législatif, n'aurait pas permis de
satisfaire aux contraintes de cette recherche. Nous avons ainsi choisi de limiter au corpus
législatif, sachant que l’analyse de la jurisprudence pourrait en soi prendre la forme d’un autre
travail de recherche substantiel258. Cette limite ne constitue pas pour autant une faiblesse de ce
travail de recherche car l’étude des lois est une première étape essentielle, qui pourrait être
suivie dans un deuxième temps par une analyse comparative de la jurisprudence dans la
perspective de bonifier, le cas échéant, les résultats de cette étude, notamment concernant la
reconnaissance de principes généraux de droit sur le bien-être animal en droit international.
Comme nous l'avons précisé précédemment, notre démarche méthodologique relève
principalement du droit positif, puisqu'elle observe des faits en se concentrant sur l'étude des
textes existants concernant le droit du bien-être animal. Elle relève également du droit
prospectif à la fin de notre démonstration, lorsqu'il est question de formuler des propositions
vers la concrétisation d'une protection universelle du bien-être animal, notamment au sein
d'une convention internationale. Nous ferons ainsi ressortir certains principes existants (de
lege lata) et d'autres qui pourraient être reconnus à l'avenir vers une plus grande protection du
bien-être animal (de lege feranda). Pourquoi est-il pertinent de regarder dans cette direction ?
Car selon l'adage : Lex prospicit, non respicit ; le droit regarde en avant et non pas en arrière.
Par ailleurs, cette étude est à la fois descriptive et évaluative. Elle est d'abord descriptive, dans
le sens où cette étude permet de décrire l'état du droit positif général en matière de protection
du bien-être animal à tous les niveaux : national, européen, international et universel.
Elle est ensuite évaluative, dans le sens où elle permet d'évaluer les modes de concrétisation
d'une protection universelle du bien-être animal en droit international, au sein de chaque
source formelle retenue : principes généraux de droit et conventions internationales.
258 Alors que ces décisions sont nombreuses dans certains pays, notamment aux États-Unis, elles sont très pauvres
voire inexistantes ou peu accessibles pour de nombreux pays du monde. D'une manière générale, elles sont plus
nombreuses dans les pays anglo-saxons et européens qui sont les pays les plus avancés en la matière. Par exemple, les
décisions traitant des cas de cruauté, de négligence ou encore de zoophilie, que ce soit aux États-Unis ou au Canada,
pourraient faire l'objet d'études par province/état, pays, ou pour tout le continent nord-américain. Il en va de même
pour l'Europe, où des analyses de la jurisprudence peuvent s'avérer utiles pour les juristes et avocats œuvrant pour les
animaux. Une étude comparative sur la jurisprudence mondiale pourrait notamment venir mettre en lumière certaines
similarités, à l'image des décisions équivalentes à différents endroits du monde survenant au même moment. Pour ne
mentionner que deux exemples récents, citons les condamnations jugées "sévères" (comparativement aux précédents
cas) de un an de prison ferme pour un chat violemment molesté aux États-Unis et en France (Oscar) au début de
l'année 2014 ; ainsi que des décisions sur l'octroi de droits à des grands primates en Argentine (orang-outang) et aux
États-Unis (chimpanzés), concernant la question de leur droit à la liberté et en référence au principe d'Habeas corpus à
la fin de l'année 2014.
46
Pour procéder à la description de l'état du droit du bien-être animal à travers le monde, j'ai
commencé par recenser les instruments existants à chaque niveau juridictionnel, c'est à dire
national, européen (sachant qu'il n'existe pas d'autre protection régionale) et international.
- Au niveau national, j'ai recensé 107 pays dotés de lois de protection des animaux en tant
qu'individus (lois anti-cruauté, de protection et sur le bien-être animal) à l'échelle mondiale.
Ces législations figurent dans l'Annexe I de ce document, comme première base de données
exhaustive à ce sujet. Les décisions jurisprudentielles (issues des tribunaux, cours suprêmes et
constitutionnelles) les plus pertinentes seront également présentées dans cette étude.
- Au niveau européen, j'ai recensé les instruments pertinents du Conseil de l'Europe
(Convention et protocoles sur le bien-être animal) et de l'Union européenne (dispositions de
traités, ainsi que les directives et règlements adoptés sur le bien-être animal).
Ces instruments figurent dans l'Annexe II de ce document. Seront également évoquées les
principales décisions sur le bien-être animal adoptées par la Cour de justice des Communautés
européennes (CJCE), désormais renommée la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE).
- Au niveau international, j'ai recensé les normes internationales sur le bien-être animal de
l'Organisation mondiale de la santé animale qui figurent à l'Annexe III de ce document. J'ai
également relevé plusieurs instruments pertinents en droit international de l'environnement et
de la vie sauvage, ainsi qu'en droit international économique à l'OMC, en me penchant
notamment sur de récentes décisions.
- Au niveau universel, le projet de Déclaration universelle pour le bien-être animal (DUBEA)
figure à l'Annexe IV de ce document259. Sachant que le droit universel concerne le droit de
l'ONU, j'ai également identifié certains documents onusiens pertinents pour notre étude, dont
des rapports de la FAO, ainsi que des décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ).
Au-delà de la présentation des principaux textes à ces différents niveaux, en faisant ressortir
les prescriptions les plus pertinentes, nous ferons appel à la méthode comparative afin de voir
s'il est possible d'extraire un noyau dur du droit général relatif au bien-être animal et d'en
identifier les universalités. Il s'agit même d'un prérequis dans le cadre de cette étude globale :
259 Outre la WSPA, cette campagne en faveur d'une déclaration universelle bénéficie du soutien croissant de 330
organisations - notamment de la part de l’OIE, ainsi que des gouvernements tels que le Cambodge, la Nouvelle-
Zélande, les îles Fiji, Palau, et Seychelles, la Suisse et les 27 états membres de l'Union européenne. Voir en ligne :
http://fr.wspa.ca/travail/DUBEA/ (date d’accès : 4 octobre 2011).
47
« Ceux qui préfèrent une attitude scientifique sont donc obligés de se fier
entièrement aux études comparatives pour établir l'existence d'éléments universels
ou multinationaux de l'ordre juridique »260.
À défaut d'une couverture mondiale des études comparatives sur le sujet, notre étude
comprendra une dimension comparative afin d'identifier s'il existe un fonds commun du droit
du bien-être animal, notamment en vérifiant s'il est possible de dégager certains grands
principes généraux. Cette méthode nous permettra également d'envisager dans quelle mesure
la protection du bien-être animal pourrait elle-même se voir qualifiée de norme valide en droit
international. À cet effet, il est confirmé que "la validité multinationale d'une norme ne peut
être établie que par la recherche comparative"261. Afin d'évaluer les possibilités de
concrétisation d'une protection universelle du bien-être animal en droit international en
finalité de cette étude, je me suis appuyée sur les ouvrages de référence en droit international
public et sur les travaux doctrinaux spécialisés à ce sujet262.
Quant aux indicateurs d'universalisation de la protection du bien-être animal, ceux-ci sont
identifiés en fonction du degré d’adhésion des Etats aux dénominateurs communs qui sous-
tendent l’ensemble des textes recensés. Bien que le phénomène décrit concerne
particulièrement la protection du bien-être animal, il s'inscrit dans le processus plus général
d'universalisation des normes destinées à régir la société internationale, tout comme dans la
dynamique d'expansion constante du champ d'application du droit international263. Pour
l'instant, celui-ci ne couvre le domaine de la protection animale qu'en matière
environnementale à travers la conservation des espèces menacées, mais ne concerne la
protection du bien-être animal dans aucun accord multilatéral qui aurait été adopté
spécifiquement à ce sujet. C'est pourquoi nous irons plus loin en proposant une convention
globale sur la protection du bien-être animal qui contiendrait, en plus des grands principes
issus du droit général sur le bien-être animal, de nouveaux principes ouverts sur l'avenir. En
effet, dans la continuité du l'adage précité, l'adage "Nova constitutio futuris formam immonere
debet non praeteritis" précise que les nouvelles législations affectent le futur et non le passé.
260 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963, p. 508. 261 Id., p. 507. 262 Notamment les ouvrages de référence suivants : ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd.,
Yvon Blais, 2012 ; CORTEN, O., Méthodologie du droit international public, Université de Bruxelles éditions, 2009 ;
DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, Droit international public, 10e éd., Précis Dalloz, 2010 ; JEAN-COMBACAU, S.,
Droit international public, 8e éd., Montchrestien, 2010 ; PELLET, A., Droit international public, PUF, Mémentos
Thémis, 1981 ; ROCHE, C., Droit international public, 4e éd., Gualiano, 2010 ; SALMON, J., Dictionnaire de droit
international public, Bruylant, 2001. 263 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, Droit international public, 10e éd., Précis Dalloz, 2010, p. 7 et 20.
48
Tel qu'indiqué en titre, cette étude concerne le droit du bien-être animal dans le monde, et plus
précisément son évolution et son universalisation. Son évolution mondiale est présentée à
travers la description des textes existants en droit positif à trois niveaux : national, européen et
international. Quant à ses voies d'universalisation, celles-ci concernent le dernier niveau qu'est
le droit universel264. D’une part, celui-ci concerne le droit international général265, en ce qui
concerne les sources formelles du droit international identifiées comme voies de construction
d’un droit universel applicable à tous les pays du monde, notamment à travers les principes
généraux de droit. D’autre part, le droit universel est aussi le droit de l’ONU266, cette
organsation universelle réunissant l’ensemble des Etats souverains de la planète.
Au fil de ces lignes, nous verrons ainsi que la possibilité d'une protection universelle du bien-
être animal est favorisée tant par son évolution mondiale que ses prémisses d'universalisation.
Dans une première partie, nous verrons que le droit du bien-être animal est en progression
croissante aux niveaux national et européen (P.I), avant de voir dans une deuxième partie que
le bien-être animal est en pleine émergence aux niveaux international et universel (P.II).
264 Précisons que l'expression "droit universel" (en tant que droit applicable à tous les pays) est utilisée par certains
internationalistes comme par exemple CAVARE, L., Le droit international public positif, A. Pedone, 1967, p.211. 265 "Le droit international général est l'ensemble des règles qui s'appliquent uniformément à l'ensemble des Etats", dans
ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd., Yvon Blais, 2012, p.42. 266 Le droit de l’ONU est entendu au sens large, comme l’ensemble des instruments adoptés par l’ONU. Qu’il s’agisse
des chartes, déclarations et résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies ou des conventions adoptées sous
l’égide de l’ONU.
49
PARTIE I
LA PROGRESSION NATIONALE ET EUROPÉENNE
DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
Dans cette première partie, nous verrons que la progression du droit du bien-être animal
ressort tant de l’évolution des droits nationaux que de la consolidation du droit européen.
En ce sens, le bien-être animal est protégé par un nombre croissant de législations nationales
dans de nombreux pays du monde, cet objectif devenant aussi de plus en plus important au
sein d’instruments de droit européen (entendu au sens strict comme le droit du Conseil de
l'Europe et au sens large comme incluant le droit communautaire de l'Union européenne).
Dans un premier temps, nous présenterons l'évolution des droits nationaux, depuis les
premières lois contre la cruauté envers les animaux vers les nouvelles lois de protection du
bien-être animal, ainsi que leur expansion progressive dans le monde entier (Titre 1).
Dans un second temps, nous verrons que la protection du bien-être animal fait l'objet d'une
consolidation constante en droit européen. Celle-ci se manifeste au sein des instruments du
Conseil de l'Europe et de l'Union européenne (UE) adoptés dans des domaines communs.
Au-delà de la base constituée par ce double régime de protection, nous verrons que l’UE ne
cesse de renforcer ses dispositions vers une protection accrue du bien-être animal (Titre 2).
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Titre 1
L’ÉVOLUTION CONSTANTE DES DROITS NATIONAUX SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL
Des lois anti-cruauté aux lois pro-bien-être267
À ce jour, l'auteure a inventorié 107 pays disposant de législations générales de protection
animale (anti-cruauté et pro-bien-être) à travers le monde268. Sur 193 pays membres de l’ONU
au total, il s'agit de plus de la moitié du globe. Ainsi, la majorité des pays du monde considère
que les animaux, en tant qu'individus, méritent d'être juridiquement protégés face à certains
actes de maltraitance et qu'il convient d'encourager les actes de bientraitance à leur égard.
Les législations sur la répression de la cruauté envers les animaux, dites lois "anti-cruauté",
constituent le modèle législatif initial de protection des animaux en tant qu'individus.
Nées au XIXe, elles se sont propagées dans le monde entier au cours du XIXe siècle (Chap. 1).
Depuis la seconde moitié du XXe siècle, sont apparues de nouvelles législations protectrices
du bien-être des animaux, qualifiées de lois "pro-bien-être". Celles-ci constituent le nouveau
modèle législatif qui s’impose désormais à l'échelle mondiale (Chap. 2).
267 Les sources documentaires pour ce premier chapitre figurent notamment dans la bibliographie annexée sous le titre :
"La protection du bien-être animal dans les droits nationaux". 268 Voir l'Annexe I. Cette liste figure également dans la base de données constituée par l'auteure pour le projet dont elle
assure la codirection, à savoir le Global Animal Law project en ligne sur : www.globalanimallawproject.org.
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CHAP. 1- LES LOIS ANTI-CRUAUTÉ
COMME MODÈLE INITIAL DE PROTECTION
Selon le Pr. David Favre, spécialiste américain en droit animal ("Animal Law" en anglais)269 :
"Le XIXe siècle a vu une transformation significative de l'attitude de la société envers
les animaux qui s'est reflétée dans le système juridique"270.
Cette évolution protectrice se reflète dans de nombreux systèmes juridiques à travers le
monde. En effet, les lois contemporaines du droit animal sont nées au XIXe siècle dans les
pays anglo-saxons et européens (S.1), avant d'être adoptées par d'autres pays du monde (S.2).
S.1- Les lois anti-cruauté issues des pays anglo-saxons et européens au XIXe siècle
Au début du XIXe siècle, les pays anglo-saxons font figure de pionniers (§1), avant que les
pays du continent européen n'adoptent leurs propres lois anti-cruauté au milieu du siècle (§2).
§1) La naissance des premières lois anti-cruauté dans les pays anglo-saxons271
Au XVe siècle, les religieux anglais ont été les premiers auteurs anglo-saxons à dénoncer la
cruauté envers les animaux272. Parmi eux, le pasteur Thomas Hodges a sollicité la
criminalisation légale des actes de cruauté dès le XVIIe siècle 273. Dans son ouvrage de 1776,
le prêtre anglican Humphrey Primatt recommandait aussi de ne jamais commettre aucune
"cruauté ou injustice envers n'importe quelle créature quelle qu'elle soit"274.
269 Le Professeur David Favre est l'auteur de nombreuses publications (dont l'ouvrage le plus récent est Animal law :
welfare, interests, and rights, Wolters Kluwer Law and Business, 2011) et responsable du site internet "Animal Legal
& Historical Center", en ligne : http://www.animallaw.info/ (date d'accès : 25.06.2013). 270 FAVRE, D. et V. TSANG, “The development of anti-cruelty laws during the 1800’”, Detroit College of Law
review, pp. 1-35, 1993, p.1 (traduction libre). 271 Les principaux ouvrages ayant permis de dresser ce portrait historique sont, par ordre alphabétique : BROOMAN,
S. et D. LEGGE, Law relating to animals, Cavendish, 1997; M. E COOPER, An introduction to animal law, San
Diego, London, Academic Press, 1987 ; D. FAVRE et V. TSANG, "The development of anti-cruelty laws during the
1800’ ", Detroit College of Law review, pp. 1-35, 1993H. KEAN, Animal Rights : Political and Social Change in
Britain Since 1800, Reaktion books Ltd, 1998 ; M. RADFORD, Animal welfare law in Britain : regulation and
responsibility, Oxford University Press, 2001. 272 Thomas Hodges fit également cette confession : "J'avoue avoir souvent souhaité qu'une loi soit promulguée en
faveur de ces pauvres bêtes pour contraindre leur maître à bien agir envers elles [...] on ne devrait pas laisser impuni le
crime de celui qui met à mort ses propres bêtes en les sacrifiant sur l'autel de sa passion, de sa folie ou de sa fantaisie".
HODGES, T., The Creatures Goodness as they came out of God's Hands, and the Good Man Mercy to the Brute
Creature which God hath put under his Feet, London, 1675, pp.26-38 (traduction H.-S. Afeissa) dans JEANGÈNE
VILMER, J.-B. (dir.), Anthologie d'éthique animale, Broché, 2011, pp.42-43. 273 "Ainsi, les hommes devraient-ils témoigner des égards aux [animaux] et ne pas les soumettre à des mauvais
traitements sans raison. [...] Par conséquent, ceux qui par cruauté et vanité décapitent ou tourmentent les bêtes et la
volaille, plus que ne l'exige la survie de l'homme, pêchent très gravement". Id., pp.27-28 en référence à Dives and
pauper, "Traité moyen-anglais, probablement écrit aux alentours de 1410", dans R. PREECE, Awe for the Tiger, Love
for the Lamb, University of British Columboa Press, 2002, p.90 (traduction H.-S. Afeissa). 274 PRIMATT, H., A Dissertation on the Duty of Mercy and Sin of Cruelty to Brute Animals, T. Cadell, 1776, p.325
(traduction libre).
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Succédant à ces précurseurs, certains penseurs eurent un rôle particulièrement important en
amont du droit animal anglo-saxon au XIXe siècle. En particulier, Jeremy Bentham a établi les
principes de la morale et de la législation, aux fondements de la protection juridique des
animaux dès 1823275. Henri Salt fut le premier à traiter des droits des animaux en 1894276.
Leurs théories ont constitué un terreau fertile pour permettre les lois anti-cruauté dans les pays
anglo-saxons. Suite aux lois précoces (A) sont nées les premières lois contemporaines (B).
A- Les lois précoces en Irlande, en Angleterre et aux États-Unis au XVIIe et XVIIIe s.
Parmi les instruments annonciateurs des premières lois anti-cruauté, la loi irlandaise de 1635
sur la protection des moutons d'élevage visait à leur éviter les mauvais traitements courants,
comme lors de la tonte à vif, cette loi interdisant de tirer les moutons par la queue277.
Avant de protéger directement les animaux contre les actes de cruauté, les lois premières
anglaises protégeaient les intérêts des propriétaires face à diverses atteintes par des tiers,
comme le vol et la destruction de leurs animaux, considérés en tant que biens à valeur
monétaire278. À ce titre, citons le "Black Act" de 1723 qui punissait de peine de mort les
infractions contre la propriété animale d'autrui279.
En Amérique du Nord, la première loi ayant interdit la cruauté envers les animaux parmi ses
dispositions fut le "Massachussets Body of Liberty" de 1641. En vertu de son article n° 92 :
« Aucun homme ne doit exercer d'actes de torture ou de cruauté envers une bête
habituellement destinée à l'utilisation humaine »280.
Cette disposition mérite d'être relevée pour sa dimension à la fois générale et avant-gardiste.
En effet, presque deux siècles avant l'apparition des premières lois contemporaines, cette
disposition interdit généralement la cruauté envers les animaux utilisés à des fins humaines.
275 BENTHAM, J., An introduction to the principles of morals and legislation, Queen's College, Oxford, 1823. 276 SALT, H. S., Animals’ Rights: Considered in Relation to Social Progress, Macmillan & Co, 1894. 277 "Act Against Plowing by the Tayle, and Pulling the Wooll off Living Sheep" (traduction possible : "Loi contre le
tractage par la queue, et la tonte de la laine des moutons vivants") dite "Thomas Wentworth Act" (1635) du nom de
son initiateur au Parlement irlandais. Voir The Statutes at Large, Passed in the Parliaments Held in Ireland, 2è éd.,
Dublin, 1786, vol. 2, pp. 168-169. 278 Notons qu'en 1671 a été adoptée la loi sur la chasse et la pêche à des fins de préservation des habitats sauvages, dite
"Game Law 1671". Voir An Act for the better preservation of the Game, and for securing Warrens not inclosed, and
the severall Fishings of this Realme, Statutes of the Realm: volume 5: 1628-80 (1819), pp. 745-746. 279 RADFORD, M., Animal welfare law in Britain: regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001, p.27. 280 Massachussets Body of Liberty de 1641, Liberty 92: "No man shall exercise any tyranny or cruelty toward any brute
creature which are usually kept for man's use" (traduction libre).
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B- Les premières lois contemporaines dans les pays anglo-saxons au début du XIXe siècle
Selon l'historienne Dorothy George, le mouvement anti-cruauté a émergé au XVIIIe siècle :
« La reconnaissance du fait que les animaux ont la capacité d'éprouver le plaisir et la
douleur a conduit directement à la dénonciation de la cruauté »281.
Cette dénonciation a permis l'apparition des lois anti-cruauté dans les pays anglo-saxons au
siècle suivant. Nous verrons ainsi que l'Angleterre a adopté sa première loi en 1822, la même
année que la Nouvelle-Ecosse au Canada, suivies par les États-Unis en 1829, l'Australie en
1837 et la Nouvelle-Zélande en 1840.
Avant cela, une proposition de loi avait été formulée en Angleterre en 1800 afin d'interdire le
"bull-baiting", ou combat consistant à opposer un taureau attaché à divers animaux, dont des
chiens dressés à l'attaque282. Mais la première loi adoptée dans ce pays fut celle sur la
prévention de la cruauté et des mauvais traitements du bétail en 1822, appelée "Martin's Act"
du nom de son initiateur Richard Martin283. Si cet "Act historique"284 est souvent cité comme
la première loi contemporaine de protection des animaux dans le monde285, celle-ci constitue
une prémisse à la première loi générale anti-cruauté que fut le "Cruelty to Animals Act" de
1835286. En plus de l'interdiction générale de cruauté et de mauvais traitements, cette loi
interdit de manière novatrice tous les combats d'animaux287.
281 RADFORD, M., Animal welfare law in Britain: regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001, p.26-
27 (traduction libre). 282 Proposition de Sir William Pulteney du 2 avril 1800 à la Chambre des Communes contre les "bull baiting". Ces
combats seront finalement abolis, comme tous les combats d'animaux, par la loi de 1835. Voir James TURNER,
Reckoning with the Beast: Animals, Pain and Humanity in the Victorian Mind 15, Johns Hopkins U. Press 1980, p.148. 283 Act to Prevent the Cruel and Improper Treatment of Cattle, 1822 [D 1822, 3 Geo 4, C 70] : "[...] si une ou des
personnes ayant la charge, le soin ou la garde de n'importe quel cheval, vache, bœuf, génisse, bouvillon, moutons ou
autres bovins, [ou en ayant] la propriété, bât arbitrairement, abuse ou maltraite l'un de ces animaux, ces personnes sont
portées devant un juge de paix ou un autre magistrat" (traduction libre). 284 En référence à l'expression utilisée par Elisabeth HARDOUIN-FUGIER, “Naissance de la protection animale dans
le droit européen”, dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la
distinction entre les hommes et les choses, Pédone, pp. 21-34, 2009, p.22. 285 Voir par exemple : BROOMAN, S. et D. LEGGE, Law relating to animals, Cavendish, 1997, pp. 41 ("first major
piece of animal welfare legislation") ; et HUGHES, E.L. et C. MEYER, “Animal Welfare Law in Canada and
Europe”, Animal Law, vol. 6, pp. 23-76, 2000, p. 25 ("in 1822, the British Parliament passed the Martin's Act, the first-
ever anti-cruelty statute"). 286 Cruelty to Animals Act 1835 (5 & 6 William IV. c. 59). 287 Id., Art. III : "Sont notamment interdits les combats de : "n'importe quel taureau, ours, blaireau, chien ou autre
animal (de nature domestique ou sauvage), [et] les combats de coqs" (traduction libre). À travers cette loi, l'Angleterre
a été le premier pays à interdire l'ensemble des combats d'animaux sur tout son territoire. Notons que la première
proposition de loi de protection présentée en 1800 à la Chambre des communes concernait l'activité de "bull-baiting"
(combats entre chiens et taureaux), laquelle n'a été abolie en 1835. Voir James TURNER, Reckoning with the Beast:
Animals, Pain and Humanity in the Victorian Mind, Hopkins U. Press, 1980, p. 148.
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Afin de renforcer ses dispositions protectrices, d'autres ont été adoptées par la suite288.
Citons la loi sur l'expérimentation animale de 1876289, laquelle a été adoptée suite au
soulèvement du mouvement antivivisectionniste290.
L'Angleterre fait figure de pionnière pour avoir été le premier pays à instaurer tout un arsenal
juridique en faveur de la protection des animaux dans de nombreux domaines, et ce dès le
XIXe siècle. Au cours du XXe siècle, le mouvement législatif s'est poursuivi avec un nombre
florissant de nouvelles lois291. En 1911, le "Protection of Animals Act" fut adopté afin de
réprimer les mauvais traitements envers les animaux sauvages en captivité, en plus de ceux
concernant les animaux domestiques292. Afin d'actualiser la loi de 1876 sur l'expérimentation
animale, une nouvelle loi a vu le jour en 1986, du nom de "Animals (Scientific Procedures)
Act", toujours en vigueur293. Plusieurs autres lois spécifiques ont également été adoptées dans
de nombreux domaines : animaux de compagnie, combats de coqs, élevages de chiens,
animaux sauvages, zoos et bien d'autres294.
À la fin du XXe siècle, le régime de protection du bien-être des animaux dans ce pays est très
riche, comparé à la plupart des autres pays du monde non encore dotés de lois de
protection295.
En Amérique du Nord, la première loi fut celle adoptée en 1822, en Nouvelle-Ecosse au
Canada296. Elle fut aussi la première loi adoptée au sein des colonies de l'Empire britannique.
Aux États-Unis, l'état de New-York fut le premier à avoir adopté une loi entièrement dédiée à
la protection des animaux dès 1829. En tant que loi représentative de la première vague de
lois anti-cruauté aux États-Unis297, celle-ci prévoit la disposition suivante :
288 Voir notamment les lois de 1849, 1854 et 1879. 288 A Bill Intituled An Act to Make Provision for the More Effectual Prevention of Cruelty to Animals, Sessional Papers
of the House of Lords, in the Session 1878-9, (42 & 43 Victoria) vol. 3 Public Bills, pp. 191-200. 289 La loi de 1876 vise notamment à instaurer un système de permis pour l'expérimentation animale et à limiter cette
pratique. Voir Lambert M. Surhone et al., Cruelty to Animals ACT 1876, VDM Publishing, 2010. 290 KEAN, H., Animal Rights: Political and Social Change in Britain Since 1800, Reaktion books, 1998, p.96. 291 Ex: Act extended by Protection of Animals 1933 (Cruelty to Dogs) (c. 17), s. 1, Protection of Animals 1954
(Amendment) (c. 40), s. 1(1) and Abandonment of Animals Act 1960 (c. 43), s.1 ; Agriculture 1968 (Miscellaneous
Provisions) (c. 34), s. 8(5). 292 La détention des animaux sauvages est régie depuis le "Wild Animals in Captivity Protection Act" de 1900. 293 Animals (Scientific Procedures) 1986, (1986, c.14). 294 Ex: Performing Animals (Regulation) Act 1925 ; Pet Animals Act 1951 (amendé en 1983) ; Cock fighting Act 1952
; Abandonment of Animals Act 1960 ; Animal Boarding Establishments Act 1963, Riding Establishments Act 1964 and
1970 ; The Breeding of Dogs Act 1973 ; The Dangerous Wild Animals Act 1976 ; The Zoo Licensing Act 1981 ;
Breeding of Dogs Act 1991 ; Breeding and Sale of Dogs (Welfare) Act 1999 ; Farriers (Registration) Act 1975 ;
Farriers (Registration) (Amendment) Act 1977. 295 Pour une liste complète des lois adoptées pendant les sessions parlementaires de 1985 à 2001, voir RADFORD, M.,
Animal welfare law in Britain : regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001, pp.407 à 410. 296 HUGHES, E.L. et C. MEYER, “Animal Welfare Law in Canada and Europe”, Animal Law, vol. 6, 2000, p.26. 297 FAVRE, D. et V. TSANG, “The development of anti-cruelty laws during the 1800’ ”, Detroit College of Law
review, pp.1-35, 1993, p.9.
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« Toute personne qui malicieusement tue, mutile ou blesse n'importe quel cheval,
bœuf ou autres bovins, ou des ovins, appartenant à une autre personne, ou bât ou
torture malicieusement et cruellement un de ces animaux, qu'ils appartiennent à
elle-même ou à une autre, doit, sur déclaration de culpabilité, être jugé coupable
d'un délit »298.
Dans cette loi, le caractère malicieux ("malicious") de l'acte est une condition essentielle à la
constitution du délit. Au-delà du caractère intentionnel exigé dans certaines lois anti-cruauté,
c'est le vice qui est ici réprimé. Cette loi semble refléter une pensée sous-tendue depuis
l'origine des lois anti-cruauté, à savoir que la cruauté manifestée par une intention malicieuse
de faire souffrir un être vulnérable, comme torture sadique, est un mal social qui doit
emporter une réprobation morale, laquelle doit être socialement traduite par une sanction
légale299.
D'une manière générale, les lois du début du XIXe siècle se limitaient à la protection des
animaux de travail et d'élevage, soit aux animaux ayant une valeur économique300.
Ces premières lois visaient à protéger les propriétaires des "biens-animaux" de l'interférence
des tiers, plutôt qu'à protéger directement les animaux contre la douleur et la souffrance301.
Par la suite, une évolution notable s'est produite puisque, non seulement les tiers, mais aussi
les propriétaires, pouvaient être reconnus coupable d'actes de cruauté envers leurs animaux302.
L’interdiction des souffrances inutiles est omniprésente dans les lois d'origine britannique, à
travers l'expression "unnecessary suffering". Par extension, cette expression figure aussi très
largement dans les lois anti-cruauté adoptées par les colonies britanniques à travers le monde.
D'autres termes sont plus fréquemment employés par les premières lois américaines.
Notamment, le fait de commettre des actes répréhensibles, soit cruellement ("cruelly"), soit
arbitrairement ou gratuitement ("wantonely"), soit malicieusement ("maliciously").
298 New York Revised Statutes 1829, Titre 6, Section 26 (traduction libre). 299 Voir CURNUTT, J., Animals and the law: a sourcebook, Santa Barbara, Calif, ABC-CLIO, 2001, p.29. 300 En 1843, le New Hampshire punit le fait de "volontairement et malicieusement tuer, mutiler, battre ou blesser des
chevaux, bovins, moutons et porcs". Cette notion est encore mieux reflétée dans la loi du Vermont de 1846, qui ajoute
aux actes précédemment prohibés, le vol et l'empoisonnement de ces animaux. Voir New Hampshire Revised Statutes
1843 : "Offences Against Chastity, Decency and Morality") et Vermont Laws 1846, n°34 : "An Act in Alteration of
Chapter Ninety-Five of The Revised Statutes, Entitled "Of Offences Against Private Property". 301 Voir FAVRE, D. et V. TSANG,, “The development of anti-cruelty laws during the 1800’ ”, Detroit College of Law
review, pp.1-35, 1993, p.7 (traduction libre). 302 La disposition assez répandue dans les lois américaines du 19è siècle est celle selon laquelle : "Toute personne qui
cruellement bât ou torture des chevaux, bœufs ou un autre animal, qu'ils appartiennent à elle-même ou à une autre, doit
être punie". On retrouve cette interdiction similaire dans les lois adoptées au Michigan en1838, au Minnesota en 1858,
au Tennessee en 1858, en Pennsylvanie en 1860 et en Californie en 1872. Voir Minnesota Public Statutes 1860-1872
(Chap. 96, Section 18 : "Offenses against chastity, morality etc.") ; Tennessee Code, 1858 (Article V, Section 1668 :
"Cruelty to Animals") ; Pennsylvania Session Law, 1860, (Section 46 : "Cruelty to animals") ; General Laws of
California 1872 (Section 597 : "Cruelty to animals").
56
En Australie, la législation anti-cruauté est née avec la loi du "Van Dieman's Land" en 1837.
Par la suite, cette protection s'est progressivement étendue à tous ses territoires303.
Quant à la Nouvelle-Zélande, la première loi anti-cruauté fut adoptée en 1840 (afin d'intégrer
les dispositions de la loi anglaise de 1835)304.
Que retenir de la naissance des lois anti-cruauté dans les pays anglo-saxons au XIXe siècle ?
Les pays anglo-saxons ont été les premiers pays au monde à protéger juridiquement les
animaux à travers l'adoption de lois anti-cruauté. L'Angleterre en tête, ce pays a initié les
premières lois de protection dans plusieurs domaines. Citons l'interdiction des mauvais
traitements du bétail dès 1822 et de tous les combats d'animaux dès 1835 ; la réglementation
de l'expérimentation dès 1876 et la captivité des animaux sauvages dès 1911305.
En droit animal anglo-saxon, les premières lois de protection du début du XIXe siècle
concernaient plus généralement le traitement du bétail. Les infractions de cruauté les plus
répandues interdisaient de battre, surmener, surcharger, maltraiter, torturer ou terrifier un
animal, ainsi que de faire souffrir inutilement un animal. Dans un premier temps, seule la
cruauté volontaire était réprimée. Par la suite, la négligence comme la permission du
propriétaire de commettre de tels actes ont été aussi condamnées.
Notons aussi que les organisations de protection animale, créées simultanément à la naissance
des lois protectrices au XIXe siècle, ont aussi contribué au développement de la législation
anti-cruauté dans les pays anglo-saxons306. Ces organisations jouent toujours un rôle
important en matière de contrôle et d'inspection, ainsi que pour encourager les réformes
législatives et informer le public en faveur d'une plus grande protection des animaux307.
Les pays anglo-saxons sont les pionniers du droit animal et font toujours figure de moteurs
sur la scène internationale. Aujourd'hui, le droit animal anglo-saxon s'impose comme l'un des
modèles les plus avancés au niveau mondial. Suite aux pays anglo-saxons, les pays européens
ont à leur tour adopté des lois anti-cruauté à partir du milieu du XIXe siècle.
303 CAO, D. et S. WHITE, Animal Law in Australia and New Zealand, Thomson Reuters Australia, 2010, p.102. 304 Protection of Animals Act 1835. Voir A. C. D. BAYVEL (dir.), "Animal Welfare in New Zealand", Ministry of
Agriculture and Forestry, 2009, p.6, en ligne : http://www.biosecurity.govt.nz/files/regs/animal-welfare/animal-
welfare-in-nz.pdf (date d'accès : 26.06.2013). 305 Voir dans l'ordre cité : Act to Prevent the Cruel and Improper Treatment of Cattle, 1822 ; Cruelty to Animals Act
1835 ; Cruelty to Animals Act 1876 ; Protection of Animals Act 1911. 306 En Angleterre la RSPA (Royal Society for the Prevention of Cruelty to Animals) a été la première organisation
créée en 1824, suivi en Ecosse par la Scottish Society for Prevention of Cruelty to Animals (1839), en Irlande : the
Dublin Society for the Prevention of Cruelty to Animals (1840), aux États-Unis : the American Society for the
Prevention of Cruelty to Animals (1866), en Nouvelle-Zélande : the Royal New Zealand Society for the Prevention of
Cruelty to Animals (1882) et plus tard après la réunion de plusieurs organisations en Australie : the Royal Society for
the Prevention of Cruelty to Animals Australia (1981). 307 EADIE, E.N., Education for Animal Welfare, "Animal Protection Organisations", Springer, 2001, pp.59-60.
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§2) L'apparition des lois anti-cruauté dans les pays européens308
Dans cette section, les pays européens concernent les pays du continent européen au sens
géographique309, c'est-à-dire sans l'Angleterre dont la législation a été abordée précédemment.
Dans ces pays, l'objectif initial des premières lois était de protéger la moralité publique face à
la cruauté envers les animaux. De fait, un dégoût croissant pour la cruauté visible se manifeste
dans l'Europe du XIXe siècle :
"La ville devient la vitrine d'une maltraitance dont la visibilité est à la fois nouvelle et
accrue par les besoins croissants de l'industrialisation, en force motrice et en viande"310.
À cette époque, la pauvreté ambiante pousse à surexploiter les chevaux qu'il n'est pas rare de
voir s'effondrer sous la surcharge de travail311. Les mauvais traitements, comme les coups de
fouets donnés par les charretiers pour faire relever les chevaux épuisés, sont de plus en plus
contestés. Il en va de même pour les combats d'animaux (entre chiens, taureaux, coqs ou rats),
devenus de plus en plus populaires auprès des classes sociales les plus pauvres312. En réponse
à cette contestation sociale, les premières législations visaient ainsi à réprimer les actes de
cruauté commis en public et jugés abusifs, soit les plus insoutenables aux yeux du public.
308 La naissance des premières lois européennes de protection des animaux est décrite en référence aux documents
suivants : GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier,
Imprimerie Thierry, Nîmes, 1931 ; FERRY, L. et C. GERME, Des animaux et des hommes : anthologie des textes
remarquables, écrits sur le sujet, du XVe siècle à nos jours, Paris, Librairie générale française, 1994 (pp.485-57 :
"Législations comparées des années 30’") ; HARDOUIN-FUGIER, E., “Naissance de la protection animale dans le
droit européen”, dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la
distinction entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, pp.21-34, 2009. 309 Les pays du continent européen concernent, non seulement les actuels pays membres de l'Union européenne (UE),
mais aussi les pays membres du Conseil de l'Europe. En effet, l'étendue géographique de ces derniers est représentative
du continent européen. Par exemple, certains pays ne font pas partie des 27 pays de l'UE, comme la Russie, l'Ukraine
et la Turquie mais ils font en revanche partie des 47 pays du Conseil de l'Europe. 310 HARDOUIN-FUGIER, E., “Naissance de la protection animale dans le droit européen”, dans MARGUÉNAUD,
J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses,
Pédone, pp.21-34, 2009, p.21. 311 Dans ses ouvrages historiques sur l'animal, Eric Baratay traite notamment du "martyre des chevaux exploités
jusqu'à l'agonie" (dans Et l'homme créa l'animal : histoire d'une condition, Odile Jacob, 2003, p.129) et du fait que les
"difficultés à transformer ces êtres vivants en machine expliquent leur remplacement par de vraies machines
motorisées à partir de 1900". En France, le "dernier trajet hippomobile parisien en 1913 est salué par la presse comme
"la fin de l'esclavage chevalin" " (dans Point de vue animal : Une autre version de l'histoire, Éditions du Seuil, 2012
Chap. VIII: "Des efforts surchevalins"). 312 KEAN, H., Animal Rights: Political and Social Change in Britain Since 1800, Reaktion books Ltd, 1998, p.32.
58
A- La protection indirecte de l'animal : la condition de publicité au début du XIXe siècle
En conditionnant la répression des actes de cruauté aux seuls actes publics, la condition de
publicité menait à une protection indirecte des animaux, en visant d'abord à protéger la
sensibilité humaine face aux actes de cruauté et non pas directement celle des animaux.
En vertu de la condition de publicité contenue dans les premières lois des pays européens,
seuls les actes de cruauté commis publiquement, et bien souvent aussi abusivement, pouvaient
être punis. Au contraire, les actes de cruauté commis en privé, à l'abri des regards,
demeuraient impunis. Notons que la condition de publicité est absente des législations anglo-
saxonnes précédemment évoquées.
L'historienne Elizabeth Hardouin-Fugier précise ainsi que ces pays pratiquent une "protection
désintéressée", c'est-à-dire sans clause de publicité313. En ce sens, la protection indirecte des
animaux considère les "dégâts moraux" causés à l'homme à travers la maltraitance animale, et
non pas la souffrance de l'animal lui-même314.
Au début du XIXe siècle, l'exigence de publicité des actes de cruauté envers les animaux se
retrouve dans plusieurs pays européens. Apparue dans les codes germaniques, cette clause
s'est ensuite répandue dans les premières lois anti-cruauté adoptées dans les pays du continent
européen. Ces lois visaient à protéger la moralité publique face aux actes jugés scandaleux.
Nous présenterons successivement les législations les plus pertinentes qui en témoignent.
1- Le concept de publicité né dans le Code Pénal de Saxe de 1838 en Allemagne
En Allemagne, le Code pénal de Saxe est le premier à intégrer une disposition contre la
cruauté publique envers les animaux dès 1838315. L'exigence de publicité s'est ensuite
répandue dans les codes pénaux et les premières lois de protection des autres pays européens.
2- La moralité publique protégée dans le Code criminel de 1886 aux Pays-Bas
Les mauvais traitements envers les animaux ont été condamnés dès 1886 aux Pays-Bas.
L'article 254 du Code criminel jugeait qu'il s'agissait d'un véritable "crime", et non pas d'un
simple délit comme partout ailleurs dans le monde. Il s'agit ainsi d'une disposition inédite.
Néanmoins, puisque les animaux n'ont pas de droits légalement reconnus, cette protection
313 HARDOUIN-FUGIER, E., op.cit., note 310, p.27. 314 Id., p.25. 315 Projet de Code pénal de Saxe (1821), "Délit contre la sécurité et la police des mœurs", §930-932. Cité dans
EBERSTEIN, W., Das Tierschutzrecht, in Deutchland bis zum Erlass des Reichs-Tierchutzgesetzes vom 24 November
1933 (traduction possible : "La législation de protection des animaux en Allemagne jusqu'au règne de la Loi de
protection des animaux du 24 novembre 1933), Franckfurt am Main, Peter Lang, 1999, p.24.
59
visait d'abord les êtres humains en tant que crime envers la moralité publique humaine316.
C'est ainsi que les mauvais traitements commis en public s'avéraient plus sévèrement réprimés
que les actes commis en privé (sachant qu'un mois de prison était ajouté à l'amende
prévue317).
3- Le scandale réprimé en Prusse, Suisse, Autriche, Russie et en Bulgarie au XIXe siècle
Le Code pénal de Prusse de 1851 (intégré par le II° Reich en 1871) condamne :
« quiconque torture des animaux en public ou de manière à susciter le scandale ou
les maltraite grossièrement »318.
La double condition de publicité et d'abus se retrouve dans le caractère scandaleux et grossier
des actes répréhensibles. Au lieu de s'intéresser prioritairement à la protection des animaux,
c'est encore la protection de la moralité publique qui est ici concernée en priorité.
En réalité, il s'agit bien plus de préserver l'ordre social, à la manière dont l'illustre
explicitement le Code pénal du canton de Vaud en Suisse319. Pour avoir porté atteinte à
l'ordre public, les actes de cruauté publics justifiaient une répression relevant elle aussi du
domaine public320. Aujourd'hui, cette idée de répression de la cruauté envers les animaux à
travers la sanction pénale est généralisée à toutes les lois protectrices à travers le monde321.
En Autriche, l'arrêté ministériel du 15 février 1855 punissait également "les mauvais
traitements publics et scandaleux exercés sur des animaux"322.
Dans la même veine, le Code pénal de 1864 en Russie punissait les "traitements indignes,
indécents, suscitant le scandale dans un lieu public"323.
À la fin du XIXe siècle, le Code pénal de Bulgarie de 1896 prévoit aussi l'interdiction de
cruauté, à la fois publique et abusive, envers les animaux324.
316 Voir DE BORDES, E.C., Dieren in het Geding (en anglais: "Animals in jeopardy. A legal history of the prohibition
of animals in the Netherlands"), Sdu Uitgevers, 2010. 317 Id., p.180 318 Code pénal du IIe Reich, 15 mai 1871, § 360, nº 13 (traduction libre). 319 À son Chapitre VII : "Des atteintes à la paix et à l'ordre public", l'article 139 du Code pénal vaudois de 1843 punit :
"Celui qui cause un scandale public en se livrant à des mauvais traitements graves ou à des actes de cruauté contre un
animal". 320 Alors que lors de sa proposition initiale à l'Assemblée Nationale en 1850, le duc de Grammont soumet une
formulation générale afin de réprimer tout "acte de cruauté envers les animaux", la formulation retenue consiste à ne
"réprimer que les faits qui, par leur gravité et leur publicité, attaquent la moralité publique". Voir Assemblée
Nationale, Délibérations de la chambre des Députés, "Examen de la proposition de M. le général de Grammont,
relative aux mauvais traitements exercés envers les animaux", dans Le Moniteur universel, n°184, 3 juillet 1850,
p.2269. 321 Voir Annexe I (colonne sur les peines). 322 Voir GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier,
Imprimerie Thierry, Nîmes, 1931, p.77. 323 §43 du Code pénal de Russie de 1864, cité dans HARDOUIN-FUGIER, E., op.cit., note 310, p.26.
60
En 1850, une loi similaire a été adoptée en France. Toutefois celle-ci n'a pas pu empêcher
l'instauration de la corrida (ou tauromachie), également autorisée en Espagne et au Portugal.
4- La cruauté publique autorisée pour les corridas en France, en Espagne et au Portugal
Sous l'influence des codes germanophones, la loi Grammont a été adoptée en France en 1850.
Du nom de son initiateur le duc de Grammont, cette loi est formulée en ces termes :
« Seront punis d'une amende de cinq à quinze francs, et pourront l'être d'un à cinq
jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement des mauvais
traitements envers les animaux domestiques »325.
On retrouve ainsi l'exigence de publicité et le caractère abusif ou scandaleux des actes qui,
pour avoir porté atteinte à l'ordre public, justifient une répression relevant elle aussi du
domaine public, c'est-à-dire une sanction pénale326. Relevons que cette loi comporte certaines
limites relatives aux peines prévues, ainsi qu'à son champ d'application. En effet, celle-ci ne
prévoit que cinq jours de prison maximum contre deux semaines dans les lois du Canton de
Vaud et en Autriche par exemple327. De plus, cette loi ne concerne que les animaux
domestiques quand d'autres lois ne sont pas limitatives. Enfin, elle n'a pas pu empêcher
l'instauration de la pratique de la corrida et son développement sur le territoire français.
Pourtant, la corrida tombe précisément dans le champ d'application de la loi Grammont
puisqu'il s'agit d'un spectacle impliquant le sacrifice public d'un animal domestique, le
taureau. Or cette loi s'est avérée inapte à interdire cette pratique venue d'en haut. En effet, la
femme de l'Empereur Napoléon III, Eugénie de Montijo, friande de corridas dans son pays
d'origine en Espagne, a fait importer la pratique tauromachique en France à partir de 1853328.
Etant donné les échecs successifs des propositions de loi visant à faire interdire la corrida et à
l'inefficacité manifeste de la loi Grammont face à l'institutionnalisation de cette pratique sur le
324 Article 489 du Code pénal de Bulgarie du 2 février 1896, cité dans FERRY, L. et C. GERME, Des animaux et des
hommes : anthologie des textes remarquables, écrits sur le sujet, du XVe siècle à nos jours, Paris, Librairie générale
française, 1994, p.502. 325 Loi du 2 juillet 1850 dite Grammont sur les mauvais traitements envers les animaux domestiques, JORF du 20 août
1944. 326 Alors que lors de sa proposition initiale à l'Assemblée Nationale en 1850, le duc de Grammont soumet une
formulation générale afin de réprimer tout "acte de cruauté envers les animaux", la formulation retenue consiste à ne
"réprimer que les faits qui, par leur gravité et leur publicité, attaquent la moralité publique". Voir Assemblée
Nationale, Délibérations de la chambre des Députés, "Examen de la proposition de M. le général de Grammont,
relative aux mauvais traitements exercés envers les animaux", dans Le Moniteur universel, n°184, 3 juillet 1850,
p.2269. 327 Lois précitées ci-dessus. 328 Voir MIEUSSENS, D., L'exception corrida : de l'importance majeure d'une entorse mineure, La tauromachie et
l'animal en France, L'Harmattan, 2006, p.55.
61
territoire français, la tauromachie fut finalement légalisée un siècle après par la loi de 1951329.
Celle-ci est venue confirmer de jure le constat de facto selon lequel la loi Grammont est
"inapplicable aux courses de taureaux lorsqu'une tradition ininterrompue peut être
invoquée"330. Aujourd'hui, l'exception traditionnelle au principe d'interdiction de la cruauté
envers les animaux demeure. Ainsi, les corridas sont dérogatoirement autorisées dans le Sud
de la France et cette exception pénale vaut également pour les combats de coqs dans la région
du Nord et dans les îles françaises. Consignée à l'article 521-1, al.7 du Code pénal français,
cette exception a été déclarée conforme à la Constitution française le 21 Septembre 2012331.
Alors même que la corrida apparaît comme une tradition plus hispanique que française, elle a
également été inscrite au patrimoine culturel immatériel français en 2011 et retirée de cette
liste en 2015332.
Notons que, depuis son apparition dans l'illégalité théorique de la loi Grammont dès 1853, la
corrida a été dénoncée par de grands auteurs français comme Émile Zola et Victor Hugo.
Selon Zola : "La corrida n'est ni un art ni une culture, mais la torture d'une victime désignée,
avec autour, des badauds qui regardent"333. Selon Hugo : "Torturer un taureau pour le plaisir,
pour l'amusement, c'est beaucoup plus que de torturer un animal, c'est torturer une
conscience"334. Mais alors que les penseurs anglo-saxons ont inspiré les premières lois anti-
cruauté en Angleterre, ces grands auteurs français de la fin du XIXe siècle n'ont pas été
écoutés par les autorités françaises afin d'empêcher la légalisation d'une telle exception
pénale. L'exception tauromachique vaut également pour les premières lois anti-cruauté
adoptées en Espagne et au Portugal en 1928.
En Espagne, l'autorisation pour les corridas de 1928335 n'a nullement été remise en cause par
l'Ordonnance anti-cruauté adoptée l'année suivante en 1929336. Celle-ci apporte néanmoins
329 En effet, bien que deux propositions d'interdiction des combats d'animaux aient été présentées en 1900 et en 1911,
celles-ci ont finalement échouées. Voir Elisabeth HARDOUIN-FUGIER, Histoire de la corrida en Europe du XVIIIe
au XXIe siècle, Connaissances et savoirs, 2005, p.146. 330 Loi n°51-461 du 24 avril 1951complétant la loi du 2 juillet 1850 relative aux mauvais traitements exercés envers
les animaux domestiques, JORF 4139 du 25 avril 1951. 331 Décision n° 2012-271 QPC du 21 septembre 2012. 332 Décision du 22 avril 2011 à l'initiative du ministre de la culture Frédéric Mitterrand. par exemple "La corrida entre
au patrimoine culturel immatériel français", Midilibre.fr, 22.04.2011 ; et LAHANA, R., "La corrida radiée du
patrimoine culturel immatériel français", Huffpost, 4 juin 2015. L'Espagne a inscrit la corrida à son patrimoine culturel
en 2013. 333 Cité dans LABORDE, C., Corrida, Basta !, Éditions Robert Laffont, 2009. 334 Cette citation serait issue d'un discours ou d'une lettre de Victor Hugo. Voir Elisabeth HARDOUIN-FUGIER,
Histoire de la corrida en Europe du XVIIIe au XXIe siècle, Connaissances et savoirs, 2005, p. 140. 335 Ordonnance royale du 7 février 1928 (complétée par celle du 12 mars 1928). 336 Ordonnance royale circulaire n° 863 du 31 juillet 1929.Celle-ci punit d'une amende les personnes coupables de
mauvais traitements envers les animaux sans condition de publicité. Elle interdit en particulier de porter des "coups",
d'administrer des "substances nocives", de forcer un animal à se "battre", d'"abandonner" un animal, de tuer
cruellement un animal sans "nécessité", de transporter un animal de manière à ce qu'il ne puisse se "mouvoir", de
62
quelques "adoucissements". Elle interdisait notamment l'accès aux corridas aux mineurs de 14
ans, l'usage des banderilles à feu337 et imposait des caparaçons pour protéger les chevaux, en
réponse aux protestations des spectateurs suite aux blessures parfois mortelles des chevaux
encornés338. Au moment d'écrire ces lignes, la corrida demeure autorisée en Espagne, mais
une province espagnole, la Catalogne, l'a interdite par référendum populaire en 2010.
Au Portugal, le décret de 1928339 interdit la mise à mort publique du taureau et la présence des
picadors340. Aujourd'hui, la corrida est une exception autorisée par la loi anti-cruauté de
1995341. Celle-ci témoigne d'un recul considérable par rapport à l'esprit du décret de 1928, qui
dénonçait fortement le spectacle tauromachique comme étant :
« un divertissement barbare et indigne des nations civilisées, servant uniquement à
habituer l'humanité au crime et à la férocité »342.
B- La protection directe de l'animal : la "dépublicisation" de la cruauté au début du XXe s.
Avec le temps, la protection indirecte de l'animal, justifiée par la protection de la sensibilité
humaine, a laissé place à une protection plus directe de l'animal, celle de sa propre sensibilité.
Présentons de nouveau certains exemples de législations qui témoignent de cette évolution.
1- La rupture avec la condition de publicité dans la loi italienne de 1913
En Italie, la loi de 1913343 est la première loi européenne à ne pas exiger que les mauvais
traitements envers les animaux soient commis en public pour être réprimés. Cette loi apparaît
d'autant plus avancée qu'elle protège indistinctement les animaux domestiques et les animaux
sauvages. Elle s'inscrit ainsi en rupture avec la condition de publicité précédemment exigée,
ainsi qu'avec la limitation de la protection des animaux aux seuls animaux domestiques.
"plumer ou dépouiller un animal avant de le tuer" ainsi que certaines tortures courantes envers les animaux à cette
époque. Par exemple le "jet de pierre à un animal", "lui attacher par plaisanterie quelque objet" ou "verser sur lui des
liquides bouillants, inflammables ou corrosifs". Voir GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour
le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie Thierry, Nîmes, 1931, p.66. 337 Notons que les banderilles normales (ou sans feu) sont toujours plantées dans le dos du taureau lors des corridas.
Les "banderilles à feu" ("dont le harpon est plus pénétrant que celui des banderilles ordinaires") étaient "garnies de
fusées d'artifice qui prenaient feu au contact du garrot". Celles-ci étaient réservées aux taureaux craintifs condamnés à
être "embrasés". SAUMADE, F., Des sauvages en Occident : Les cultures tauromachiques en Camargue et en
Andalousie, Maison des sciences de l'homme, Paris,1994, p.49. 338 GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie
Thierry, Nîmes, 1931, p. 70. Notons toutefois que cette protection n'empêche pas les accidents, par exemple lorsque le
taureau encorne le cheval sous le ventre pour désarçonner le "picador". 339 Id., pp. 72-73. 340 Comme son nom l'indique, le picador à cheval plante des pics dans le taureau. Notons aussi que si la mise à mort
n'est plus autorisée en public, les taureaux doivent être abattus suite au corridas car ils ne peuvent généralement pas
survivre à leurs blessures. 341 Art. 3(2) de la loi de protection des animaux de 1995 du Portugal (traduction libre) : "Les corridas sont autorisées
(sous conditions)". 342 GIBERNE, P., La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université de Montpellier, Imprimerie
Thierry, Nîmes, 1931, p. 72. 343 Id., p. 63.
63
Par la suite, les lois adoptées dans les autres pays européens confirment cette
"dépublicisation" de la cruauté sur le plan légal. En d'autres termes, les agissements cruels
envers les animaux n'ont plus à être commis publiquement pour être répréhensibles. En ce
sens, les actes de cruauté commis en privé deviennent également punissables. De plus, la
protection auparavant octroyée aux seuls animaux domestiques se voit étendue aux animaux
sauvages captifs. Cette continuité est confirmée notamment dans les lois adoptées en Pologne,
Belgique et Allemagne, qui établissent aussi d'autres avancées pour la protection des animaux.
2- Les avancées protectrices en Pologne en 1928
D'une manière novatrice, la loi polonaise de 1928344 sur la protection des animaux permet
notamment aux associations de protection animale de collaborer à la répression des abus et de
déclarer les parents pénalement responsables des fautes commises par leurs enfants345.
3- Cruauté excessive et combats de coqs interdits en Belgique en 1929
En 1929, la loi belge pénalise tout acte de cruauté ou mauvais traitement excessif envers un
animal346. Bien que cette loi n'impose pas de condition de publicité, elle ne réprime que les
comportements jugés "excessifs", à l'image de la condition d'abus requise également par les
premières lois européennes du XIXe siècle347. Cette loi témoigne néanmoins de certaines
avancées notables. Dans sa thèse sur la protection juridique des animaux de 1931, Pierre
Giberne en fait l'éloge à travers l'affirmation forte selon laquelle il conviendrait de :
« féliciter hautement le législateur belge d'avoir osé heurter les passions de la foule, en
proscrivant des jeux comme les combats de coqs, aussi populaires qu'immoraux, ainsi
que la détention d'oiseaux chanteurs. C'est en effet aimer son pays d'une façon intense et
éclairée, que de vouloir le régénérer en s'attaquant courageusement à ses passions
honteuses, au nom de la morale »348.
Cette loi présente également l'intérêt de ne pas distinguer entre les animaux sauvages et les
animaux domestiques, puisque tous font l'objet de la sollicitude du législateur349.
344 Id., pp. 74-76. Art. 2 et 3 du décret polonais du 22 mars 1928. 345 Id., pp. 75-76. Notons que l'on retrouve cette notion de responsabilité parentale pour les mineurs de 16 ans se
retrouve désormais dans les lois actuelles comme dans le Animal Welfare Act de 2006 au Royaume Uni (Art.(4) :
"Responsibility for animals"). 346 Voir HARDOUIN-FUGIER, E., "Quelques étapes du droit animalier : Pie V, Schœlcher et Clemenceau", dans
BURGAT, F. et al, Les animaux, Éditions du Seuil, Pouvoirs n° 131, pp. 29-41, 2009, p. 35. 347 Id. : "On oppose, un peu abusivement, la protection anthropocentrée dite égoïste ou par ricochet, inhérente à la
publicité, à la protection "désintéressée" comme la loi belge du 22 mars 1929, qui pénalise tout "acte de cruauté ou de
mauvais traitement excessif envers un animal". En effet cette opposition hâtive ne tient pas compte du caractère
"excessif" requis afin de pénaliser les actes de cruauté. 348 GIBERNE, P., op.cit., note 342, p.54. 349 Id.
64
4- Le passage au zoocentrisme juridique dans la loi allemande de 1933
Alors que le concept de publicité est apparu en Allemagne en 1838, ce même pays opère un
siècle plus tard un changement radical de perspective en ouvrant la voie au "zoocentrisme"
juridique, c'est-à-dire à un droit centré sur l'animal. L'idée est confirmée par ses rédacteurs :
« La cruauté n'est plus punie sous l'idée qu'il faudrait protéger la sensibilité des
hommes du spectacle de la cruauté envers les animaux, l'intérêt des hommes n'est
plus ici au premier plan, mais il est reconnu que l'animal doit être protégé pour
lui-même »350.
Cette loi marque une autre avancée quant aux animaux considérés en visant tous les animaux :
« Du point de vue pénal, on ne fera donc aucune différence, ni entre les animaux
domestiques et d'autres types d'animaux, ni entre des animaux inférieurs et
supérieurs, ou encore entre des animaux nuisibles ou utiles à l'homme »351.
Formulons quelques remarques sur la condition de publicité dans les premières lois
européennes au XIXe siècle.
Au XIXe siècle, la condition de publicité est limitée en ce qu'elle n'a pas pu permettre de
mettre fin à l'ensemble des spectacles et combats cruels impliquant les animaux. Elle s'avère
également très restrictive en ce qu'elle ne permet pas de sanctionner les abus commis dans le
cadre privé. Or, les mauvais traitements de tout ordre sont commis depuis longue date en
dehors des yeux du public, comme les actes de violence et abus sexuels dans le cadre privé352.
En vertu de la condition de publicité présente dans les premières lois européennes, la
sensibilité des animaux n'était pas directement protégée face aux souffrances infligées,
contrairement à la sensibilité humaine qui, elle, l'était de la vue de celles-ci. De plus, les actes
de cruauté devaient être généralement excessifs, abusifs, grossiers ou scandaleux, pour être
réprimés.
En ce sens, seules les maltraitances les plus insoutenables au regard du public étaient
interdites. Ainsi, seule la perception humaine de la cruauté était alors considérée353.
350 GIESE, C.H. et W. KAHLER, Das deutsche Tierschutzrecht : Bestimmungen zum Schutz der Tiere (traduction
possible : "La loi allemande de protection animale : dispositions relatives à la protection des animaux"), Duncker &
Humblot, 1951, p.5. Ces auteurs ont contribué à la rédaction de la loi allemande de 1933. 351 Id. 352 ASCIONE, F.R., The International Handbook of Animal Abuse and Cruelty: Theory, Research, and Application,
Purdue University Press, 2010, p.388. 353 Cela renvoie à l'interprétation subjective de ces lois anti-cruauté sachant que la moralité publique ne se définit qu’en
fonction des mœurs et valeurs d’une société donnée à un moment donné.
65
Néanmoins, ce point de vue "anthropocentriste", ou centré sur l'être humain, a
progressivement évolué vers un point de vue plus "zoocentriste", ou centré sur l'animal, à
partir du XXe siècle354.
Malgré le fait que la condition de publicité a conduit à l'impunité des actes de cruauté commis
en privé et à une protection seulement indirecte de l'animal à travers celle de la moralité
publique, elle semble avoir été une amorce aux lois de protection animale. Au-delà de ses
limites en effet, la condition de publicité semble avoir permis à certains pays de franchir le
pas vers la protection juridique des animaux à partir du milieu du XIXe siècle. En ce sens, il
semblerait que les pays réticents à intégrer la question animale dans leur droit interne aient pu
y parvenir grâce à la protection de la moralité publique humaine comme première étape.
Revenons sur les principaux aspects des premières lois anglo-saxonnes et européennes.
Dans les lois anglo-saxonnes nées au début du XIXe siècle, les premières interdictions
concernaient les mauvais traitements du bétail et les combats d'animaux. Comme nous le
verrons dans la section suivante, les formulations usitées dans ces lois se retrouvent
aujourd'hui encore dans les législations de l'ensemble des pays ayant été sous influence
britannique à cette époque. Les infractions typiques concernent les interdictions de battre,
surmener, surcharger, maltraiter, torturer ou terrifier et plus généralement de faire souffrir
inutilement un animal.
Dans les pays du continent européen, les premières infractions concernaient les interdictions
de commettre des actes de cruauté en public. Qu'ils soient abusifs, excessifs ou grossiers, ils
devaient être propres à provoquer le scandale et ainsi à troubler la moralité et l'ordre publics.
Notons que l'interdiction des combats d'animaux constitue un point commun entre les
premières lois anglo-saxonnes et européennes. Néanmoins, celle-ci ne vaut que dans certains
pays puisque des exceptions demeurent dans certains pays européens, à l'image de la France
et des pays de tradition hispanique pour les corridas, mais aussi pour les combats de coqs355.
L'ensemble des premières lois du XIXe siècle sont aussi caractérisées par une protection
indirecte des animaux. En effet, le devoir de lutter contre la cruauté envers les animaux
apparait prioritairement comme un devoir moral envers l'être humain. Cette idée se reflète
notamment dans les écrits des précurseurs influents du XVIIIe siècle comme Thomas Paine en
354 Rappelons que ces termes ne font pas référence aux courants philosophiques mais aux approches juridiques
respectives. 355 Alors que l'Angleterre fut le premier pays à interdire tous les combats d'animaux, ceux-ci subsistent dans certains
pays sous diverses formes. Citons notamment les corridas dans les pays de traditions hispaniques (Espagne, Portugal et
Sud de la France) ainsi que les combats de coqs en France.
66
Angleterre (pour les pays anglo-saxons) et Emmanuel Kant en Allemagne (pour les pays
européens). Pour Thomas Paine, la cruauté envers les animaux était considérée comme une
violation du devoir moral356. Pour Kant, protéger les animaux face aux actes cruels
apparaissait d'abord un devoir de l'homme envers lui-même, celui-ci n'ayant que des devoirs
indirects envers les animaux357.
En ce sens, les mauvais traitements qui offusquaient le plus l'opinion publique ont donné
naissance aux premières lois anti-cruauté dans les pays anglo-saxons et européens.
Si la protection directe des animaux se manifeste dès les premières lois anglo-saxonnes du
XIXe siècle, une transition plus nette s'est opérée dans les pays européens au début du XXe
siècle. D'une part, la loi italienne qui met fin à la condition de publicité. D'autre part, la loi
allemande de 1933 qui prend en compte l'intérêt de l'animal à être protégé des actes cruels.
À partir du XXe siècle, la législation vise ainsi une protection plus directe de l'animal. En ce
sens, on ne parle plus seulement de l'impératif d'éradiquer la cruauté en tant que mal social,
mais aussi de la nécessité de protéger la sensibilité de l'animal pour lui-même. Cette approche
correspond au zoocentrisme juridique qui tend actuellement à progresser en droit animal.
Au cours du XXe siècle, les lois anti-cruauté se sont largement propagées à travers le monde.
S. 2- L'expansion des lois anti-cruauté dans de nombreux pays du monde au XXe siècle
L'expansion mondiale des lois anti-cruauté a commencé avec les colonies de l'Empire
britannique (puis les pays du Commonwealth), avant de s'étendre aux autres pays du monde.
Ainsi en va-t-il des exemples précoces dans de nombreuses régions du monde comme au
Pakistan en 1890 et au Bangladesh en 1920 (pour la région indo-pakistanaise) ; dans les îles
Tonga en 1918 (pour l'Océanie) et en Zambie en 1921 (pour l'Afrique). Les lois de ces régions
seront brièvement présentées (§1), de même que pour l'Asie et l'Amérique latine (§2).
§1) Les régions illustrées par des lois précoces
Ces régions concernent la région indo-pakistanaise et l'Afrique (A), ainsi que les îles
océaniennes et caribéennes (B).
356 PAINE, T., The Age of reason, Partie 1 (traduction libre), cité dans RADFORD, M., Animal welfare law in Britain :
regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001, p.25. 357 Selon Kant, la cruauté envers les animaux est "intérieurement plus opposé au devoir de l'homme envers lui-même,
parce que l'on émousse en l'homme ainsi le sentiment de sympathie qui concerne leurs souffrances". À l'inverse, bien
traiter les animaux "appartient indirectement au devoir de l'homme, si on le considère relativement à ces animaux,
mais considéré directement il s'agit toujours d'un devoir de l'homme envers lui-même". KANT, E., Métaphysique des
mœurs, Doctrine de la vertu, tome 2, Vrin, 1968, pp.117-118.
67
A- La région indo-pakistanaise et l'Afrique
L'influence du modèle britannique sur ses colonies a permis l'adoption de lois anti-cruauté dès
la fin du XIXe siècle dans les pays de la région indo-pakistanaise (1) et en Afrique dès le
début du XXe siècle (2).
1- La région indo-pakistanaise
Dans la région indo-pakistanaise, la première loi anti-cruauté fut adoptée au Pakistan en
1890358, laquelle sera reprise en partie 30 ans plus tard dans la loi du Bangladesh de 1920359.
En particulier, la loi du Bangladesh précise que les abattages cruels sont interdits (sauf à des
fins religieuses, scientifiques et médicales)360. La loi pakistanaise précise aussi l'obligation de
fournir au bétail la quantité d'espace, de nourriture et d'eau appropriée361, ainsi que de
remettre les animaux souffrants à des instances spécialisées comme des hôpitaux
vétérinaires362.
Bien que précoces, ces lois sont confrontées à d'importants problèmes d'application. Au
Pakistan notamment, les combats d'animaux sont en principe interdits en vertu de l'article 6-C
de la loi anti-cruauté, sauf si ceux-ci n'engendrent pas de douleur ou de souffrance. Or, les
combats d'ours contre des chiens, qui provoquent de graves blessures, perdurent dans ce pays.
La corruption y est tellement importante qu'à défaut d'appliquer la loi, les policiers encaissent
parfois les frais d’entrée lors de ces combats363.
Pionnière dans la région, la loi pakistanaise de 1890 reflète ainsi la transposition du modèle
anglais dans un pays où le manque de moyens et de volonté, à la fois politique et populaire, se
font sentir. En effet, il ne suffit pas d'adopter des lois pour que les problèmes de cruauté
envers les animaux soient réglés. Il faut aussi et surtout que la volonté d'y remédier vienne des
358 The Prevention of Cruelty to Animals Act (Act n° XI of 1890) [ci-après : "Loi du Pakistan"]. 359 Cruelty to Animals Act (Act n° I of 1920) [ci-après : "Loi du Bangladesh"]. 360 Art.7 de la Loi du Bangladesh : "If any person kills any animal in an unnecessarily cruel manner he shall be
punished [...] Provided that nothing in this section shall render it an offence to kill any animal in a manner required by
the religion or religious rites and usages of any race, sect, tribe or class, or for any bona fide scientific purpose or for
the preparation of any medicinal drug". 361 Art.15, h) de la Loi du Pakistan. Notons que cette obligation fait penser aux dispositions actuelles sur la protection
du bien-être des animaux d'élevage, notamment dans le cadre du principe des "5 libertés" internationalement consacré
depuis 2004 au sein des normes sur le bien-être animal de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) (Art. 7.1.
du Code sanitaire sur les animaux terrestres). 362 Art.15, d) de la Loi du Pakistan (traduction libre). Notons que ceux-ci ont été établis du temps des décrets de
l'Empereur Ashoka au 3è siècle avant J.-C., alors que celui-ci régnait sur toute la région indo-pakistanaise. Voir Ven S.
Dhammika, The Edicts of King Ashoka, The Weell Publication, Buddhist Publication Society, n° 386/387, 1993. 363 Voir JEANGÈNE VILMER, J.-B., Ethique animale, PUF, 2008, p.223. Sur ces combats et leur caractère cruel, on
peut lire les précisions suivantes : "On trouve au Pakistan des combats d'ours contre des chiens, lors de festivals qui
ont lieu une centaine de fois par an. Les ours ont été capturés dans la nature. Ils combattent enchaînés, un anneau dans
le museau, édentés et dégriffés. Les chiens eux-mêmes sont battus et privés de nourriture, pour développer leur
agressivité. A l'issu du combat, qui est court (trois minutes) et d'une violence extrême, l'ours a souvent le museau
déchiré et arraché".
68
populations concernées, sans quoi ces lois sont vouées à l'échec. Bien qu'il semble louable de
demander à tous les pays de légiférer vers un monde moins cruel envers les animaux, le
travail d'information et de sensibilisation préalables des populations s'avère donc essentiel,
afin que les lois de protection soient bien acceptées et correctement appliquées. Sans cette
compréhension et cette volonté d'application en amont, ces lois demeurent lettres mortes.
Quant à l'Inde, ce pays est marqué par une longue histoire de protection des animaux.
Celle-ci remonte aux décrets de l'Empereur Ashoka au IIIe siècle avant J.-C.
Bouddhiste, cet empereur prôna le végétarisme et légiféra en vue de la protection des animaux
sur tout son empire (incluant le Népal, le Pakistan et l’Afghanistan, en plus de l’Inde
moderne)364. Il était ainsi interdit de tuer des animaux, de les sacrifier, de les manger ou de
leur faire du mal en général, et il était obligatoire de les soigner et de leur venir en aide
comme pour des êtres humains365. Les animaux étaient alors considérés sur un pied d’égalité
et le principe bouddhiste de compassion se voyait étendu à toutes les créatures vivantes.
Autant dire que les décrets édictés par l’empereur Ashoka allaient beaucoup plus loin que
toutes les lois de protection existantes à l’heure actuelle, même en Inde.
Désormais, le principe de compassion demeure néanmoins consacré pour toutes les créatures
vivantes, en tant que devoir fondamental dans la Constitution indienne de 1950366. Il est aussi
à la base de la loi de prévention de la cruauté envers les animaux de 1960367. Une précédente
loi avait été adoptée dès 1890 (soit la même année que son voisin le Pakistan) et une nouvelle
loi sur le bien-être animal serait en projet afin d'actualiser les dispositions de la loi actuelle368.
2- L'Afrique
Hormis la première loi de 1921 en Zambie369, la plupart des pays africains ont adopté leur loi
de protection entre 1957 et 1977. L'influence britannique semble ici confirmée sachant que
seuls les pays membres du Commonwealth se sont dotés de lois de protection des animaux370.
En effet, les pays africains ont adopté leurs lois anti-cruauté alors qu'il s'agissait de colonies
364 Voir WAGMAN, B. A. et M., LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.153. 365 DHAMMIKA, V.S., The Edicts of King Ashoka, The Weell Publication, Buddhist Publication Society n° 386/387,
1993. 366 La Constitution de l'Inde de 1950 consacre le principe de "compassion pour les créatures vivantes" sous forme de
"devoir fondamental" pour tous les citoyens indiens (Art. 51-A, g). En version originale : Constitution of India, 1950,
Part. IVA : "Fundamental duties", Art.51A : "It shall be the duty of every citizen of India[...] (g) to protect and
improve the natural environment including forests, lakes, rivers and wild life, and to have compassion for living
creatures". 367 Prevention of Cruelty to Animals Act, 1960 (59 of 1960). 368 Voir la section suivante. 369 Prevention of Cruelty to Animals Act, Cap 245, 1921. Il s'agit de la première loi adoptée sur le continent africain. 370 Le seul autre pays dans lequel il existe une disposition protectrice dans le code pénal est l'Egypte sur le modèle
français alors que les pays du Maghreb étaient sous protectorat Français.
69
britanniques. Dans l'ordre chronologique, ces lois concernent : le Botswana en 1936371,
Malawi en 1944372, l'Ouganda en 1957373, le Zimbabwe en 1960374, l'Afrique du Sud375 et le
Kenya en 1962376. Ces lois concernent les animaux domestiques et sauvages en captivité.
Elles prévoient des listes d'infractions visant à punir les actes de cruauté sur le modèle anglo-
saxon. Il est ainsi interdit de battre, surcharger, surmener, maltraiter, torturer ou effrayer un
animal377.
L'Egypte, sous domination anglaise entre 1882 et 1952, est le seul pays d'Afrique du Nord qui
contient une disposition anti-cruauté dans son Code pénal de 1937, à son article 357, lequel
interdit de tuer, d'empoisonner et de faire du "mal" ("harm") à un animal domestique378.
Depuis 2014, l’article 45 de la Constitution d’Egypte prévoit que l’Etat doit garantir le
"traitement humain" des animaux, en plus de la protection des espèces animales menacées379.
B- Les îles océaniennes et caribéennes
En Océanie, les Îles Tonga ont inauguré l'adoption de lois anti-cruauté dès 1918380. Par la
suite, d'autres îles océaniennes ont suivi, comme la Papouasie Nouvelle-Guinée en 1952381, la
Malaisie en 1953382 et le Vanuatu en 1974383. Plusieurs îles océaniennes ont également adopté
une loi spécifique sur l'expérimentation en 1957, soit les îles Salomon, Fidji, Kiribati et
Tuvalu384. Notons que le commerce de viande de chien a été interdit aux Philippines mais que
cette industrie y perdure néanmoins, faute d'application385.
371 Cruelty to Animals Act, 1936. 372 Protection of Animals Act, 1944. 373 The Animals Prevention of Cruelty Act, 1957. 374 Prevention of Cruelty to Animals Act, 1960. Notons que le Zimbawe s'est retiré du Commonwealth en 2003. 375 Animal Protection Act, 1962. Notons que l'Afrique du Sud s'était doté précédemment d'une loi anti-cruauté en 1935
(Performing Animals Protection Acts) et que les combats d'animaux sont interdits depuis l'amendement de 1993 à la
loi actuelle. 376 Prevention of Cruelty to Animals Act, 1962. 377 Voir tableau lois nationales concernant l'Afrique. 378 Code pénal, Egypte, 1937, Art. 357: "Any individual who willfully kills or poisons without purport a tame animal
[...] or does it any major harm shall be punished by a jail sentence that does not exceed 6 months or by a fine that will
not exceed 200 LE" (traduction llibre). 379 Constitution of The Arab Republic of Egypt, 2014, Art. 45: "The State shall protect [...] those under the threat of
extinction or danger; garantee humane treatment of animals". 380 Pounds and Animals Act (Cap 147), 1918, (version consolidée de 1988). 381 Animals Act, 1952 (consolidée en 2006). 382 Animals Act, 1952 (amendée en 2013 par le Animals (Amendment) Act). 383 Prevention of Cruelty to Animals Act, 1974 (consolidated in 2006). 384 Animals (Control of Experiments) Act, 1957. Le titre de la loi comme l'année d'adoption est identique pour toutes
ces îles. 385 Voir WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011,
p.94 ("Dogs-as food") et HSI, "Dog Meat Trade", Humane Society International, 2012, en ligne :
http://www.hsi.org/issues/dog_meat/ (date d'accès : 15.10.2012).
70
Dans les Caraïbes, deux pays ont adopté des lois anti-cruauté : la Jamaïque et les Bermudes.
La loi jamaïquaine de 1904386 protège généralement les animaux domestiques des actes de
cruauté, des mauvais traitements et de la négligence387. En tant que territoire britannique
d'Outre-mer, la loi de protection des Bermudes de 1975388 prévoit en outre des obligations de
soin (alimentation, logement et entretien appropriés), ainsi que des interdictions de cruauté sur
le modèle des premières lois britanniques389.
§2) Les régions aux lois plus récentes
L'Asie (A) et l'Amérique latine (B) ont adopté leurs lois anti-cruauté au XXe siècle.
A- L'Asie
Sur le continent asiatique, des lois ont été adoptées chronologiquement au Sri Lanka en
1907390; à Hong-Kong en 1935391 ; au Japon en 1973392 ; en Corée en 1991393 ; en Birmanie
en 1993394 et à Taiwan en 1998395. Notons que la loi taïwanaise présente la particularité
d'interdire tout acte qui viole les "bonnes mœurs sociales" ("good social custom" en
anglais)396. Assez large et imprécise, cette disposition laisse néanmoins au juge la liberté de
déterminer quels agissements constituent des actes de cruauté contraires à la moralité
publique dans ce pays, et ce sans autre forme de limitation397. Spécialement décriés sur la
scène mondiale quant à leur traitement des animaux, le Japon (1), la Corée (2) et la Chine (3)
disposent de législations qu'il convient de présenter.
1- Japon
Au Japon, les "Lois de la Compassion" ont été adoptées par le Dog Shogun au XVIIe siècle398.
Celles-ci prévoyaient la peine de mort pour les actes de cruauté envers les animaux, en
386 Cruelty to Animals Act, 1904. L'archipel des Bermudes n'étant pas membre du Commonwealth, sa loi de protection
est traitée indépendamment de la partie précédente bien que cet archipel soit politiquement rattaché au Royaume Uni
comme en témoignent ses dispositions. 387 Cruelty to Animals Act, 1965 et Care and Protection of Animals Act, 1975. L'archipel des Bermudes n'étant pas
membre du Commonwealth, sa loi de protection est traitée indépendamment de la partie précédente bien que cet
archipel soit politiquement rattaché au Royaume Uni comme en témoignent ses dispositions. 388 Care and Protection of Animals Act, 1975. 389 Id., Art.1 ; Art.7 (2) ; et Art.8 (1). 390 Prevention of cruelty to animals Ordinance, 1907 (consolidée en 1955). 391 Prevention of Cruelty to Animals Ordinance, 1935 (consolidée en 2006). À Hong-Kong, l'Ordonnance de
prévention de la cruauté envers les animaux de 1997 est venue renforcer la première loi adoptée en 1935 sur le modèle
de la loi anti-cruauté de 1911 en Angleterre. Selon son titre long, cette loi vise explicitement à "interdire et punir la
cruauté envers les animaux" et couvre globalement les animaux vertébrés et invertébrés, domestiques ou sauvages.
392 Law Concerning the Protection and Control of Animals, 1973 (dernière révision de 2005). 393 Animal Protection Act, 1991 (dernière révision de 2011). 394 Animal Health and Development Law, 1993. 395 Animal Protection Law, 1998, Art 3 (1) : "“Animal” means a dog, a cat and a vertebrate that is fed or kept by
people. It includes the economic animal, the experimental animal, a pet and other kinds of animals" (traduction libre). 396 Id., Art. 10 (2) “any animal race or contest for the purpose of gambling directly or indirectly” et 10 (3) : “any act
[against animals] that violates good social custom” (traduction libre). 397 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.175. 398 En tant que protecteur des chiens en particulier, Tokugawa Tsunayoshi a hérité du surnom de "Dog Shogun".
71
particulier envers les chiens399. Notons que dès 676, l'Empereur Tenmu avait interdit la
consommation d'animaux sous l'influence du Bouddhisme, le Japon étant demeuré un pays
largement végétarien jusqu'au XIXe siècle400.
Depuis 1973, le Japon est doté d'une loi concernant la protection et le contrôle des
animaux401. Au-delà du respect de la vie, les termes de cette loi font explicitement référence
aux sentiments d'amour, d'amitié et de paix envers les animaux402. Cette loi vise la protection
des animaux domestiques et sauvages, mais seulement ceux en captivité403. À l'image de
nombreuses lois à travers le monde, les animaux sauvages en liberté tombent en dehors de
toute protection. Or, le Japon est hautement décrié sur la scène internationale pour ses
pratiques envers les animaux sauvages, notamment les animaux marins. Parmi celles-ci,
citons notamment la chasse aux cétacés (baleines et dauphins), ainsi que l'ablation des
ailerons de requins404.
Concernant les peines prononcées en vertu de la loi japonaise en vigueur, un cas
internationalement médiatisé mérite d'être mentionné. En 2002, un homme ayant cruellement
mutilé un chat errant et diffusé des photos sur internet s'est vu condamné à 6 mois de prison
avec sursis405. En l'occurrence, le coupable a donc été acquitté, alors même qu'il s'agissait d'un
cas d'une extrême cruauté ayant suscité une indignation importante de la part de la population,
également au Japon406. Face à la relative inapplication de cette loi malgré sa rhétorique
hautement protectrice, il est possible de se demander si celle-ci ne sert pas de mesure
cosmétique, visant plus à redorer l'image du Japon sur la scène mondiale, plutôt que d'outil de
répression efficace contre toute forme de cruauté envers les animaux quels qu'ils soient407.
399 D'où le nom de protecteur des chiens ("Dog Shogun") en anglais Voir B. M. BODART-BAILEY, The Dog Shogun:
The Personality And Policies of Tokugawa Tsunayoshi, University of Hawai'i Press, 2006, p.158-159. 400 NAGAYAMA, H,「たべもの江戸史」 新人物往来社, 1976, p.66, sur le décret interdisant de tuer les animaux
pour les manger. Pendant 1200 ans, jusqu'en 1868, le Japon est demeuré un pays largement végétarien.
401 Law Concerning the Protection and Control of Animals, 1973 (dernière révision de 2005). 402 Son Art. 1 précise que : "Le but de cette loi est de régir les questions relatives à la prévention de la cruauté envers
les animaux, le traitement approprié des animaux et d'autres questions relatives à la protection des animaux et de
susciter un sentiment d'amour pour les animaux parmi le peuple, contribuant ainsi au développement du respect de la
vie et des sentiments d'amitié et de paix" (traduction libre). 403 En effet, la définition des "animaux protégés" inclue d'une part, une liste des animaux domestiques, et d'autre part,
une liste des animaux sauvages en captivité. Id., Art.27-4 : "Animal protégé" [...] désigne les animaux spécifiées dans
chacun des éléments suivants : i. bovins, chevaux, porcs, moutons, chèvres, chiens, chats, lapins domestiques, poules,
pigeons domestiques et les canards domestiques. ii. les mammifères, les oiseaux ou les reptiles autres que ceux visés
au point précédent, qui sont en la possession d'une personne". 404 Voir par exemple, D'ESTE, L., La condition animale : Plaidoyer pour un statut de l'animal, Sang de la Terre, 2006,
p.104. Ces cas seront traités plus en détail dans la section relative au droit international de l'environnement. 405 Voir WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.32 (en référence à l’article "Mutilated Cat Pics Posted
on Top Site", Mainichi Daily News, 9 may 2002). 406 Id. Référence à l’article "Cat-Killer Spared After Privacy "Invaded"", Japan Times Online, 22 oct. 2002, en ligne :
http://www.japantimes.co.jp/text/nn20021022a6.html (date d'accès : 29.10.2012). 407 Id., "how a country treats its companion animals may influence it standing in the international community as well".
72
2- Corée du Sud
La Corée du Sud (ou République de Corée) a adopté sa loi de protection animale en 1991408.
Depuis 2008, cette loi a été renforcée afin d'intégrer des dispositions modernes sur la
protection du bien-être animal. En particulier, elle met en avant le principe de "dignité des
êtres vivants" dans le cadre de l'expérimentation animale409. Précisons que le principe de
dignité appliqué aux animaux d'expérimentation est issu de la constitution Suisse de 1999 et
qu'il est désormais consacré dans sa loi sur le bien-être et la dignité des animaux de 2005410.
Comme en Chine et aux Philippines, la viande de chien est traditionnellement consommée en
Corée. Or, suite à la réprobation internationale pour cette pratique, le gouvernement a interdit
la consommation de viande de chien depuis les jeux olympiques de Séoul en 1988411. Malgré
cette interdiction, environ 2 millions de chiens seraient encore tués chaque année pour être
consommés412. Seulement une minorité de coréens consomment effectivement de la viande de
chien. Néanmoins, la majorité serait opposée à une interdiction légale afin de résister à la
critique impérialiste extérieure et préserver cette pratique traditionnelle perçue comme un
"symbole culturel du nationalisme"413.
Le cas coréen témoigne ici de l'influence que peut exercer la pression internationale pour
imposer une interdiction légale afin de se conformer, au moins en théorie, à un standard
partagé par de nombreux pays à l'échelle mondiale. En l'occurrence, il s'agit de ne pas
consommer de viande de chien. Ce cas permet également de renouveler l'importance de
l'approbation interne d'une mesure légale pour son application effective. En effet, lorsqu'une
mesure est imposée de manière extérieure, alors même que la population à laquelle elle
s'applique désapprouve majoritairement cette mesure, son application risque d'être vouée à
l'échec. En ce sens, toute mesure légale a plus de chance d'être appliquée si elle résulte du fait
que la population concernée est convaincue de son utilité. La protection animale est un
exemple symptomatique de cette affirmation en ce que les problèmes de mise en œuvre
découlent généralement du manque de volonté politique de certains pays d'employer les
408 Animal Protection Act, 1991 (dernière révision de 2011). 409 Id., Art. 13 (1) : "Animal experimentation must be performed after considering the promotion of mankind's welfare
and the dignity of animal lives". 410 Art.120 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999 et Art. 1 de la Loi fédérale sur la protection
des animaux de 2005. 411 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.33. Notons qu'une loi sur le bien-être animal fut adoptée
aux Philippines cette année là (Animal Welfare Act, 1998). 412 KIM, R.E, “Dog Meat in Korea: A Socio-Legal Challenge”, Animal Law, vol.14, 2008, p.202. La viande de chien
est la quatrième viande la plus consommée après le bœuf, le porc et le poulet. 413 Id., p.231 et 233 : "cultural symbol of nationalism" (traduction libre). Contrairement à la croyance selon laquelle la
jeune génération serait plus "occidentalisée", le plus grand support en faveur de la consommation de viande de chiens
viendrait de personnes dans la vingtaine (76,3 %).
73
mesures de contrôles et de sanctions nécessaires pour une application effective. Le manque de
volonté politique est d'autant plus manifeste dans le cadre des lois adoptées sous la pression
exercée par d'autres pays, plutôt que d'une demande émanant de la population elle-même.
Notons enfin que lesdites "fermes d'ours" constituent une autre pratique controversée en
Corée comme dans d'autres pays d'Asie, notamment au Vietnam et en Chine. Elles font l'objet
de dénonciations des pays étrangers, ainsi que de la part d'un nombre croissant de coréens414.
À ce jour, 1400 ours à collier seraient détenus dans ces fermes en Corée du Sud415.
Une campagne a été lancée auprès des citoyens coréens afin de demander au gouvernement
d'interdire ces fermes, ce qu'il semblerait désormais prêt à faire en vertu de la désapprobation
croissante de sa population416. Sans être totalement contraire au phénomène précédent puisque
cette contestation provient d'abord des pays étrangers, il semblerait néanmoins que le fait
qu'une majorité de coréens soit défavorable à cette pratique permette une interdiction plus
efficace de ces fermes, que de la consommation de viande de chien. Quant à l'application
effective d'une telle interdiction, il est possible que celle-ci rencontre certaines difficultés à
l'image du Vietnam. En effet, alors même que ce pays a adopté une loi d'interdiction des
fermes d'ours en 2005417, elle n'a pas réussi à mettre fin à cette pratique extrêmement
lucrative, sachant que 3600 ours seraient encore détenus dans ces fermes418. La plus grande
quantité de fermes se trouve en Chine où 7000 ours y seraient détenus en toute légalité419.
3- Chine
Contrairement à ce qu'on pourait penser, la Chine n'est pas démunie de toute disposition anti-
cruauté. En effet, son Code criminel condamne la cruauté envers les animaux de ferme de 3 à
414 Voir par exemple : SUDWORTH, J., “South Korea activists use G20 to highlight bear farms”, BBC News, Seoul, 7
Nov. 2010. 415 WSPA, Bear Farming: "Right now over 1,400 bears suffer on bear farms in South Korea", en ligne :
http://www.wspa.ca/helping/action/bearfarming/default.aspx (date d'accès : 1.11.2012). 416 WSPA, Bear Farming: "For the very first time the South Korean government is considering a phase out of bear bile
farming", en ligne : http://www.wspa.ca/helping/action/bearfarming/default.aspx (date d'accès : 1.11.2012). 417 TUAN, H.C., “Memorandum of Understanding: Phase-out of bear farms in Vietnam”, World Society for the
Protection of Animals, February 2005. 418 WSPA, “New report from Vietnam exposes persistent use of bear bile”, WSPA, 23.10.2010, en ligne :
http://www.wspa.org.au/latestnews/2010/Vietnam_exposes_persistent_use_of_bear_bile.aspx (date d'accès :
1.10.2012). 419 LOEFFLER, K., ROBINSON, J. et G. COCHRANE, "Compromised health and welfare of bears in China's bear
bile farming industry, with special reference to the free-dripping extraction technique", Animals Asia Foundation
Report, March 2007, p.2. Voir en ligne :
http://wildpro.twycrosszoo.org/000ADOBES/Bears/D312_AAF_VetReport_200703.pdf (date d'accès : 1.11.2012).
74
7 ans de prison420. En outre, ce pays dispose de plusieurs règlementations, notamment sur les
animaux de laboratoire, qui font l'objet de lignes directrices vers leur traitement éthique421.
Précisons également que certaines espèces sauvages bénéficient d'une protection bien
établie422. Suite à son adhésion à la CITES en 1981, la Chine a adopté des lois interdisant le
trafic des espèces menacées423. En vertu de cette règlementation, des peines d'une sévérité
hors du commun ont déjà été prononcées. Par exemple, des contrevenants ont été condamnés
à la prison à perpétuité pour le trafic d'ivoire d'éléphants et d'autres ont été condamnés à la
peine de mort en 1992, pour avoir tué un panda, emblème national aimé de la population424.
Enfin, une loi contre la maltraitance animale est officiellement en projet depuis 2009425.
B- L'Amérique latine
À ce jour, les pays d'Amérique latine disposent surtout de lois récentes datant de la fin des
années 1990 et surtout du début des années 2000. Néanmoins, le Brésil et l'Argentine (1) font
figure de précurseurs sur ce continent avec leurs lois du début et du milieu du XXe siècle.
Nous présenterons aussi chronologiquement les nouveaux cas du Costa Rica, de l'Equateur,
du Mexique, du Pérou, de l'Uruguay et enfin de la Bolivie.
1- Les précurseurs : le Brésil et l'Argentine
Au Brésil, le décret fédéral anti-cruauté de 1934 est inspiré du modèle des premières lois
britanniques426. Le principe d'interdiction de la cruauté envers les animaux est aussi consacré
dans la Constitution brésilienne de 1988, à son article 225, §1. Ainsi le gouvernement doit :
« protéger la faune et la flore, en interdisant, de la manière prescrite par la loi,
toutes les pratiques qui [...] soumettent les animaux à de la cruauté »427.
Bien que la section de la constitution concernée traite de la protection de l'environnement et
de la faune sauvage, cette interdiction de cruauté s'applique généralement à toutes les
420 Art. 276 du Code criminel de la République Populaire de Chine de 1979 (révisé en 1997) : "Quiconque [...] blesse
ou tue cruellement un animal de ferme [...] sera condamné à une peine d'emprisonnement ferme d'au moins 3 ans et au
plus 7 ans" (traduction libre). 421 Regulations for the Administration of Affairs Concerning Experimental Animals (1988); Guiding Opinions
Concerning Ethical Treatments to Laboratory Animals (2006). 422 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.173. 423 Law of the People's Republic of China on the Protection of Wildlife, 1989, (Order No. 9). 424 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.173. 425 Voir WEDDERBURN, P., "China unveils first ever animal cruelty legislation", The Telegraph, 18.09.2009. 426 Federal Decree on Anti-Cruelty, 1934. Il est interdit de : "confiner un animal d'une manière cruelle ; surmener un
animal ; de frapper, de blesser ou de mutiler un animal ; de pousser un animal à se battre avec un autre ; [et] de dresser
un animal au moyen de châtiments corporels" (traduction libre). Plus particulièrement, il est aussi interdit de détenir un
animal dans de mauvaises conditions, d'abandonner un animal ou de faire travailler un animal dans un état de gestation
avancé, cette dernière interdiction se démarquant des autres par son originalité. 427 Constitution brésilienne de 1988, Art.225, §1 (traduction libre).
75
catégories d'animaux428. En effet, la Cour Suprême du Brésil a appliqué cette disposition
constitutionnelle afin d'interdire certaines pratiques cruelles envers les animaux domestiques,
comme les combats de coqs ou la fête du bœuf, évènement traditionnel au cours duquel un
bœuf était torturé et frappé à coup de pierres et de bâtons par tout le village429.
En Argentine, la loi de 1954430 interdit en particulier de maltraiter les animaux de travail,
ainsi que la cruauté envers les animaux d'expérimentation431. Elle interdit aussi les actes
commis intentionnellement dans un esprit de perversité en causant des blessures, en torturant
ou en tuant un animal sans nécessité432. Dans la continuité de cette cruauté délibérée, cette loi
interdit explicitement les spectacles cruels, publics ou privés, dans lesquels les animaux sont
tués, blessés ou agressés comme les corridas de taureaux (interdites dans ce pays depuis 1899)
et les "novilladas"433 (ou corridas de jeunes taureaux face à de jeunes toreros434).
Parmi les dispositions particulières adoptées depuis en Argentine, citons par exemple la
résolution de 2003 sur l'interdiction de l'alimentation forcée des oiseaux435, précisant que :
« l'alimentation forcée doit être considérée comme un abus ou un acte de cruauté
[...] en contradiction avec le bien-être des animaux. »436
Enfin, il est possible de relever que la protection animale se manifeste aussi au niveau
constitutionnel en Argentine. En effet, la Constitution de sa capitale, Buenos Aires, prévoit
depuis 1996 de protéger les animaux, dont les animaux errants, en respectant la vie et en
évitant la cruauté (par le recours à des méthodes éthiques)437.
3- Les nouveaux pays : Costa Rica, Équateur, Mexique, Pérou, Uruguay, Bolivie et Colombie
En 1994, le Costa Rica a adopté une loi sur le bien-être des animaux. En particulier, celle-ci
prévoit une réglementation détaillée concernant l'expérimentation animale (alimentation,
transport, logement, euthanasie, opérations, espèces etc.)438.
428 CLAYTON, L.A., "Overview of Brazil's Legal Structure for Animal Issues", Animal Legal & Historical Center,
Michigan State University College of Law, 2003, Partie II : Brazil Federal Constitution. 429 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, pp.39-40. 430 Ley de Malos tratos y Actos de Crueldad a los Animales, 1954. 431 Id., Art. 2 et 3 concernant les mauvais traitements (animaux de travail) et actes de cruauté (vivisection). 432 Id., Art.3, §7 (traduction libre). 433 Id., Art.3, §8 (traduction libre). 434 MAUDET, J.-B., Terres de taureaux-Les Jeux taurins de l'Europe à l'Amérique, Casa Velasquez, 2010, p. 260. 435 Resolución 413/2003: Se prohibe el método de alimentación forzada en las aves, cualquiera fuera la posible
utilización de las mismas, sus productos u órganos. 436 Id., Préamb. § 6-7. 437 Constitución de la ciudad de Buenos Aires, 1996, Art. 27, al. 5 : "La protección de la fauna urbana y el respeto por
su vida: controla su salubridad, evita la crueldad y controla su reproducción con métodos éticos". 438 Ley sobre el bienestar de los animales, 1994.
76
Depuis les années 2000, le Costa Rica légifère fermement pour la protection du bien-être des
animaux sauvages. Contre leur captivité, ce pays a interdit leur utilisation dans les cirques
depuis 2002, ainsi que dans les zoos depuis 2013. Jugeant cruel de mettre en cage des
animaux sauvages, ceux-ci ont été relâchés dans leur milieu naturel439. Il s’agit d’un exemple
sans précédent de libération animale. Et la protection des animaux sauvages, unique dans ce
pays, ne s’arrête pas là. En 2012, l’Assemblée législative a adopté à l’unanimité une révision
de la loi de conservation de la vie sauvage afin d’interdire toute forme de chasse440, en
particulier la chasse sportive, les seules exceptions possibles étant la chasse de contrôle et de
subsistance441. Le Costa Rica, particulièrement riche en biodiversité442 offre ainsi un modèle
législatif singulièrement avancé pour la protection du bien-être des animaux sauvages.
Notons également le caractère exceptionnel de ces mesures en droit du bien-être animal,
sachant que les lois de protection du "bien-être" concernent généralement les animaux
domestiques et familiers, quand les lois de "conservation" visent plutôt les animaux sauvages.
Ainsi, le Costa Rica dispose désormais d’un noyau de dispositions qui permet de transcender
la dichotomie contestable discossiant la protection du bien-être, des animaux sauvages. Ce
pays offre ainsi un modèle novateur en ouvrant la voie à cette protection casi-inexistante, tout
aussi souhaitable contre les souffrances infligées aux animaux sauvages qu’à l’encontre de
ceux qui sont domestiqués. En ce sens, la loi de conservation de la vie sauvage de 1992
consacre la notion de "bien-être de la vie sauvage"443. La loi sur la biodiversité de 1998 va
plus loin en consacrant dans ses principes généraux le respect de la vie sous toutes ses formes:
« Tous les êtres vivants ont un droit à la vie, indépendamment de leur valeur
économique, actuelle ou potentielle »444.
À l'image du Costa Rica, le droit à l'existence des êtres vivants est également consacré parmi
les droits de la nature de la Constitution d'Equateur445. Dans cette constitution figure
439 WILLIAMS, R., "Costa Rica set to close public zoos and release the animals back into the wild", The Independent,
12.08.2013, en ligne: http://www.independent.co.uk/news/world/americas/costa-rica-set-to-close-public-zoos-and-
release-the-animals-back-into-the-wild-8757266.html (date d'accès: 19.11.2013). 440 José Meléndez, "Costa Rica, primer país de América Latina que prohíbe la caza deportiva", El País, 12.12.12. 441 Ley de Conservación de la Vida Silvestre, n° 7317, CAPÍTULO IV Conservación y manejo de la vida silvestre (Así
reformado el capítulo anterior por el artículo 1° de la ley N° 9106 del 20 de diciembre de 2012), Artículo 14. a) Caza :
"Se prohíbe la caza de vida silvestre excepto en los casos en que, con base en los estudios técnico-científicos, esa
práctica se requiera para el control de especies con altas densidades de población que atenten contra su propia especie,
otras especies silvestres o la estabilidad misma del ecosistema que las soporta. La caza deportiva queda totalmente
prohibida, únicamente será permitida la caza de control y la caza de subsistencia". 442 Notons à ce sujet que "Costa Rica" signifie littéralement "côte riche", notamment en biodiversité, laquelle est
protégée par la Ley de Biodiversidad, 1998 (n° 7788). 443 Ley de conservación de la vida silvestre, 1992 (n° 7317), Art.48 (3) (traduction libre). 444 Ley de Biodiversidad, 1998 (n° 7788), Art. 9 : "Principios Generales" (traduction libre).
77
également la notion de respect envers tous les éléments qui forment les écosystèmes, parmi
lesquels figurent notamment les espèces animales446.
Au Mexique, la loi de protection des animaux adoptée en 1997 promeut en des termes forts :
"l'amour, le respect et la considération envers eux"447.
En ce début de XXIe siècle, certains pays d'Amérique latine ont adopté des lois générales de
protection, alors que d'autres ont adopté des lois spécifiques visant certaines activités.
Au Pérou, la loi de protection des animaux domestiques et des animaux sauvages en captivité
a été adoptée en 2000448. Les objectifs de cette loi consistent à éradiquer et prévenir les
mauvais traitements et les actes de cruauté envers les animaux (en leur évitant toute
souffrance inutile) et à encourager le respect de la vie et les droits des animaux grâce à
l'éducation, ainsi qu'à assurer la santé et le bien-être des animaux449. À cette fin, cette loi
prévoit des obligations spécifiques pour les propriétaires et les personnes en charge
d'animaux450. Malgré son champ d'application étendu, elle autorise les corridas de taureaux,
les combats de coqs et les autres spectacles à caractère culturel451. Néanmoins, cette exception
est remise en cause depuis 2012 où une proposition de loi a été formulée afin d'interdire les
mauvais traitements et sacrifices d'animaux dans le cadre de spectacles publics et privés452.
Concernant l'Uruguay, ce pays dispose d'une loi qui concerne moins la protection des
animaux que les modifications génétiques sur les bovins, caprins, équins et porcins453.
Quant à la Bolivie, celle-ci est devenue le premier pays au monde à interdire l'utilisation de
tous les animaux dans les cirques dans sa loi du 17 juin 2009, laquelle vise explicitement à :
445 Constitución de la República del Ecuador, 1979 (révision 2008), Art.71 : "La naturaleza o Pacha Mama, donde se
reproduce y realiza la vida, tiene derecho a que se respete integralmente su existencia y el mantenimiento y
regeneración de sus ciclos vitales, estructura, funciones y procesos evolutivos" (traduction libre). 446 Id. "[...] El Estado incentivará a las personas naturales y jurídicas, y a los colectivos, para que protejan la naturaleza,
y promoverá el respeto a todos los elementos que forman un ecosistema" (traduction libre). 447 Ley protectora de animales del Estado de México, 1997, Art. 3 (traduction libre): "El objeto de esta Ley se orientará
a [...] d) : "Fomentar el amor, respeto y consideración para con ellos". 448 Ley de protección a los animales domésticos y a los animales silvestres mantenidos en cautiverio, 2000 (n°27265). 449 Id., Art.2 (traduction libre). 450 Ces obligations consistent notamment à : "assurer une alimentation, une santé et des conditions de vie appropriées,
en fonction de l'espèce ; ne pas causer ou permettre que leur soit causer des souffrances inutiles" ; ne pas entasser les
animaux en trop "grand nombre" ; et ne pas les "abandonner". Id., Art.3 (traduction libre). 451 Id., "Disposiciones finales y transitorias", "Tercera- Excepciones a la ley: Exceptúanse de la presente Ley las
corridas de toros, peleas de gallos y demás espectáculos declarados de carácter cultural por la autoridad competente"
(traduction libre). 452 Ley que prohíbe el maltrato y sacrificio animal como parte de espectáculos público y privado, 2012 (n°1454/2012-
IC). 453 Treatment of Animal Genetics Decree, 2000 (traduction libre).
78
« éliminer l'utilisation des animaux sauvages et/ou domestiques dans les cirques
sur tout le territoire national, cette pratique étant considérée comme un acte de
cruauté envers les animaux »454.
Outre les interdictions locales et nationales de plus en plus nombreuses contre les cirques avec
animaux sauvages (ou seulement certaines espèces) à travers le monde455, l'interdiction totale
amorcée par la Bolivie en 2009 a déjà été suivi par d'autres pays. Dans les années
consécutives, citons notamment la Chine en 2010456 et le Pérou en 2011457. D'autres pays
comme la Slovénie et le Royaume-Uni ont également interdit tous les animaux sauvages dans
les cirques en 2013458, suivis par les Pays-Bas459 et le Mexique en 2014460, avec à ce jour une
trentaine de pays ayant interdit les cirques avec animaux sauvages à travers le monde461.
Ainsi, les pays d'Amérique latine font figure de leaders mondiaux en matière d'abolition des
activités relatives à la captivité des animaux sauvages. Il s'agit de précurseurs comme en
témoignent la première interdiction totale d'animaux dans les cirques en Bolivie en 2009 et
l'interdiction totale des zoos avec la libération inédite des animaux au Costa Rica en 2013462.
Notons également que depuis début 2016, la Colombie a adopté une révision législative visant
à renforcer sa loi de 1989 sur la protection des animaux, les condamnations prévues au Code
pénal et mentionnant la reconnaissance de la qualité d’êtres sensibles dans son Code civil463.
454 Ley de Prohibición de circos con animales silvestres y/o domésticos, 2009 (nº 4040), Art.1: "El objeto de la
presente Ley es eliminar el uso de animales silvestres y/o domésticos en espectáculos circenses en todo el territorio
nacional, por considerarse la práctica un acto de crueldad en contra de los animales" (traduction libre). 455 Voir la "Législation sur la détention et le dressage des animaux dans les cirques dans les pays du monde", en ligne :
http://www.code-animal.com/legis/legis.htm (date d'accès : 19.11.2013). 456 MOORE, M., “China bans animal circuses”, The Daily Telegraph, 18 January 2011. 457 LIN, D., "Peru Bans Wild Animals in Circuses", About.com, 20 Janvier 2011, en ligne :
http://animalrights.about.com/b/2011/07/26/peru-bans-wild-animals-in-circuses.htm (date d'accès : 6.10.2013). 458 Pour la Slovénie, voir Art. 15§22 The Law on Additions to and Changes of the Law for protection of Animals et
pour le Royaume-Uni, voir WINTER, S., "AT LAST! Ban on ALL wild animals in circuses is passed", Express,
23.10.2013, en ligne: http://www.express.co.uk/news/nature/438753/AT-LAST-Ban-on-ALL-wild-animals-in-
circuses-is-passed (date d'accès : 19.02.2014). 459 Voir ADI, "Netherlands to ban wild animals in circuses", 13.12.2014, en ligne:
http://www.stopcircussuffering.com/news/europe/netherlands-ban-wild-animals-circuses/ (date d'accès: 14.12.2014). 460 Voir ADI, "Mexico bans wild animals in circuses!", 12.12.2014, en ligne :
http://www.stopcircussuffering.com/news/latin-america/mexico-bans-wild-animals-circuses/ (date d'accès:
14.12.2014). 461 Id. 462 WILLIAMS, R., "Costa Rica set to close public zoos and release the animals back into the wild", The Independent,
12.08.2013, en ligne : http://www.independent.co.uk/news/world/americas/costa-rica-set-to-close-public-zoos-and-
release-the-animals-back-into-the-wild-8757266.html (date d'accès : 19.11.2013). 463 Ley n°1774 por medio de la cual se modifica la ley 84 de 1989, se modifica el código de procedimiento penal y se
dictan otras disposiciones, 6.01.2016. Codigo civil, Art. 655 : "Reconózcase la calidad de seres sintientes a los
animales".
79
- Conclusion du Chapitre 1 :
Précédées par quelques exemples précoces, les premières lois visant à interdire la cruauté
envers les animaux sont nées dans les pays anglo-saxons dès la première moitié du XIXe
siècle. Tenant compte des arguments avancés par les grands penseurs de l'éthique animale
moderne, l'Angleterre a fait figure de grande pionnière, suivie de près par les autres pays
anglo-saxons, dont les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
Dans la continuité de ces premières lois anti-cruauté furent adoptées les premières lois
européennes au milieu du XIXe siècle, avec pour particularité de ne condamner que les actes
de cruauté commis publiquement envers les animaux. Cette condition de publicité a été levée
dans les lois européennes suivantes à partir du début du XXe siècle, de sorte à condamner à la
fois la cruauté publique et privée. Il ressort ainsi de ces lois que la cruauté a été condamnée
d’abord en tant que mal social, heurtant la sensibilité humaine, avant d'être condamnée
comme un mal en soi, nécessitant de protéger les victimes animales des souffrances infligées.
En commençant par les colonies britanniques, le XXe siècle a vu l'expansion mondiale des
lois anti-cruauté à tous les continents. Si le continent européen a vu leur naissance, les lois
anti-cruauté se sont ensuite propagées partout dans le monde : des Amériques à l'Asie en
passant par l'Afrique et l'Océanie.
Les dispositions anti-cruauté contenues dans ces premières lois constituent la souche
immuable des législations protectrices des animaux. En ce sens, elles établissent les
fondements solides des nouvelles lois, de sorte que le modèle anti-cruauté demeure, y compris
au sein du nouveau modèle de protection du bien-être animal.
Après avoir traité de la mondialisation des lois anti-cruauté comme modèle initial de
protection, voyons ainsi dans quelle mesure les législations protectrices du bien-être animal
constituent un nouveau modèle juridique de protection.
80
CHAP. 2- LES LOIS PRO-BIEN-ÊTRE
COMME NOUVEAU MODÈLE DE PROTECTION
Depuis la fin du XXe siècle, les lois anti-cruauté ont laissé place aux lois de protection du
bien-être animal, de plus en plus nombreuses dans les pays anglo-saxons et européens (S.1).
En ce début de XXIe siècle, elles voient également le jour dans d'autres pays du monde (S.2).
S.1- Les lois pro-bien-être toujours issues des pays anglo-saxons et européens
Après avoir initié le modèle anti-cruauté, les pays anglo-saxons (§1) et européens (§2) sont à
nouveau les pionniers du nouveau modèle de lois protectrices du bien-être animal. Leurs
dispositions les plus originales et les plus avancées méritent d'être relevées dans cette section.
§1) Les nouvelles lois des pays anglo-saxons
La notion de bien-être animal a d'abord été consacrée en anglais, sachant que la première loi
dans laquelle elle figure explicitement est le "Animal welfare Act" de 1966 aux États-Unis,
toujours en vigueur à ce jour. Par la suite, cette formulation a essaimé dans les autres pays
anglo-saxons à partir des années 1990. D'une manière synthétique, nous présenterons
successivement les nouvelles lois des systèmes fédéraux aux États-Unis, au Canada et en
Australie (A), avant de présenter les lois nationales en Angleterre et en Nouvelle-Zélande (B).
A- Les systèmes fédéraux
Comme aux États-Unis (1), le Canada (2) dispose de dispositions fédérales, en plus de ses
législations provinciales. Quant à l'Australie, ce pays ne dispose que de lois territoriales (3).
1- Les États-Unis
Depuis le XIXe siècle, chaque état des États-Unis s'est doté de lois anti-cruauté, plus ou moins
détaillées et plus ou moins répressives464. La fourchette des peines prévues peut aller de
1000$ et 6 mois de prison, comme au Mississipi465, jusqu'à 150 000$ en Arizona466 et 10 ans
de prison en Louisiane467 ou en Alabama468. Ces peines sont parmi les plus fortes au monde.
Au niveau fédéral, la protection des animaux en tant qu'individus est régie principalement par
deux lois : le "Animal Welfare Act" de 1966 qui concerne le transport, le commerce et le
464 Pour un tableau de l'ensemble des lois adoptées dans chaque Etat des États-Unis, voir en ligne :
http://www.straypetadvocacy.org/cruelty_laws.html (date d'accès : 4.10.2012). 465 Mississippi Code, 1972, Sec. 97-41-1 : "Living creatures not to be cruelly treated". 466 Arizona Code, 2011 version, 13-2910: "Cruelty to animals; interference with working or service animal ;
classification ; definitions". 467 Louisiana Code, 2011 version, RS 14 :102.1 : "Cruelty to animals ; simple and aggravated". 468 Alabama Code, 1977, Section 13A-11-14: "Cruelty to animals".
81
traitement de certains animaux469 et le "Humane Methods of Slaughter Act" de 1978470 ou loi
sur l'abattage humain du bétail. Relevons qu'il est possible de percevoir une forte
contradiction éthique entre les termes surlignés471. En effet, est-il pertinent de juxtaposer le
fait de tuer à celui d'être humain dans son sens le plus noble ? En tout état de cause, il semble
que le fait d'allier le meurtre et la compassion peut apparaître légitimement comme paradoxal.
Notons que ces lois contiennent des exceptions notables. D'une part, le Animal Welfare Act
exclut de son champ d’application tous les animaux de production élevés à des fins
alimentaires et vestimentaires, ainsi que les rats, les souris et les oiseaux en matière
d'expérimentation472. Or, ces animaux comptent pour plus de 90% des animaux utilisés en
recherche, à l'image de la loi sur les méthodes d'abattage (Slaughter Act) qui exclut de son
champ d'application les oiseaux, alors que ceux-ci comptent pour plus de 90% des animaux
tués pour la consommation aux États-Unis473. Par conséquent, les lois en vigueur dans ce pays
protègeraient moins de 10% des animaux utilisés pour la recherche et la consommation.
Les combats d'animaux sont en principe interdits par le Animal Welfare Act. Néanmoins, les
combats de coqs ont constitué une exception longtemps autorisée dans certains états. Ils sont
désormais interdits dans tous les états américains, les derniers à les avoir interdits étant la
Louisiane en 2007474 et le Texas en 2011475.
Le Animal Welfare Act contient d'autres exceptions importantes. En particulier, la chasse n'est
pas réglementée, puisque les animaux sauvages en liberté sont exclus de la protection de cette
loi476. Tel est généralement le cas, sachant que les animaux sauvages sont plutôt concernés par
les lois environnementales de conservation des espèces, et la plupart du temps délaissés des
lois de protection des individus477.
469 "Animal Welfare Act" 1966 (7 U.S.C.), Chap. 54: "Transportation, sale, and handling of certain animals" (traduction
libre). 470 "Humane Methods of Slaughter Act" 1978 (7 U.S.C.), Chap. 48: "Humane methods of livestock slaughter". 471 Parmi les auteurs qui dénoncent l'exploitation dite "humaine" des animaux non-humains, voir notamment les
publications du professeur Gary L. Francione, en particulier : FRANCIONE, G. L., Animals as persons : essays on the
abolition of animal exploitation, Columbia University Press, 2008. 472 Voir ORLANS, F.B., “The injustice of excluding laboratory rats, mice, and birds from the Animal Welfare Act”,
Kennedy Institute of Ethics Journal, vol. 10, no. 3, pp. 229-238, Sept. 2000. 473 Voir WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.39. 474 "Animal Fighting Prohibition Enforcement Act of 2007", Louisiana, (H.R. 137). 475 "An Act relating to creating an offense for engaging in certain conduct relating to cockfighting", Texas, 2011. 476 Néanmoins, il existe des règlementations particulières sur la protection des mammifères marins ("Marine Mammal
Protection Act", 1972), les méthodes de piégeages ("Refuge from Cruel Trapping Act" 2011), la chasse des espèces
exotiques ("Sportsmanship in Hunting Act" 2011) ou la conservation des espèces menacées (H.RES. 47 CITES 2011). 477 Aux États-Unis, la principale loi de conservation fédérale est le Endangered Species Act de 1973 (7 U.S.C. § 136,
16 U.S.C. § 1531 et seq.).
82
Dans le cadre de l'Animal Welfare Act, les rodéos sont exclus des "exhibitions" d'animaux,
contrairement aux cirques par exemple478. Cependant, certaines localités américaines
interdisent ou réglementent les rodéos479. Il en va de même de l'utilisation des animaux dans
les cirques480 et de la détention d'animaux sauvages en tant qu'animaux de compagnie481.
Selon les villes et les états américains, ces utilisations et détentions d'animaux sauvages
peuvent être totalement autorisées, totalement interdites, ou encore sujettes à certaines
restrictions. Relevons aussi que, selon les états américains, les lois sont plus ou moins
protectrices car ceux-ci sont libres d'adopter leurs propres réglementations. Il en va de même
au Canada et dans tous les systèmes fédéraux, où seules les lois adoptées au niveau fédéral
s'appliquent dans le pays entier. Les normes fédérales prévoient des standards minimalistes
pour la protection du bien-être des animaux, mais les localités autonomes sont libres d'adopter
des normes plus strictes si elles le souhaitent482. Aux États-Unis, la Californie apparaît comme
l'état le plus avancé en matière de protection animale. D'une manière novatrice, cet état a par
exemple interdit la production et le commerce du foie gras depuis le 1er juillet 2012483.
La Floride se place également parmi les États ayant innové en matière de protection animale.
En effet, elle présente la particularité d'avoir adopté une disposition constitutionnelle contre
les stalles pour les truies gestantes depuis 2002, jugeant cette méthode d'élevage inhumaine484.
478 Voir USDA (United States Department of Agriculture Animal and Plant Health Inspection Service), Licensing and
Registration Under the Animal Welfare Act Guidelines for Dealers, Exhibitors, Transporters, and Researchers, 2005,
p.7, en ligne: http://www.aphis.usda.gov/animal_welfare/downloads/aw/awlicreg.pdf. 479 Par exemple, les villes de Pasadena en Californie et de Fort Wayne dans l'Indiana ont complètement interdit les
rodéos. D'autres interdisent l'utilisation du lasso pour les veaux comme Rhode Island depuis 1989 ou imposent des
restrictions sur l'utilisation sur l'utilisation des sangles de flanc, aiguillons électriques et éperons comme Pittsburgh en
Pennsylvanie et Leestown en Virginie. Voir sur le site "Animal Law" de l'Université du Michigan, "Regulation of
Animal Cruetly During Rodeo Events", en ligne : http://www.animallaw.com/rodeos.htm (accès :10.10.2012). 480 Voir sur le site de Born Free USA, "Local Restrictions Governing Traveling Shows and Circuses in the U.S. and
Canada", en ligne: http://www.bornfreeusa.org/b4a3_circuses_and_shows.php (date d'accès: 19.02.2014). 481 Voir la liste sur le site de Born Free USA, " Summary of State Laws Relating to Private Possession of Exotic
Animals", en ligne: http://www.bornfreeusa.org/b4a2_exotic_animals_summary.php (date d'accès: 20.02.2014). 482 Comme nous le verrons, ce principe est le même pour les pays de l'Union européenne (UE), qui peuvent adopter des
standards de protection plus élevés que ceux prévues par l'UE dans leurs législations internes. 483 California foie gras law, (S.B. 1520), ("Act [...] relating to force fed birds") chap. 904, 2004 (en vigueur depuis le
1er juillet 2012 et intégré au "California Health and Safety Code", § 25982. En juillet 2004, le Parlement de Californie
a voté une loi interdisant de gaver un oiseau dans le but d´engraisser son foie au-delà de sa taille normale et de vendre
tout produit qui en est le résultat. La loi est entrée en application le 1er juillet 2012, un délai ayant été accordé aux
producteurs pour organiser leur reconversion. Des propositions de loi similaires ont été déposées dans d´autres États, à
savoir à Hawaï, dans l'Illinois, le Massachusetts, le New Jersey, la Pennsylvanie et Washington . Dans la ville de
Chicago, la vente de foie gras a été interdite en 2006, mais cette interdiction a été annulée en 2008 (voir ALLEN, L.,
“Chicago Repeals Ban on Foie Gras”, Animal Law Coalition journal, 18 May 2008). Notons qu'au Canada, une
pétition a également été initiée par la Société protectrice des animaux afin de demander l'abolition du foie gras au
maire de Montréal. Voir la Pétition adressée au maire de Montréal : "Bannissons le foie gras à Montréal", en ligne:
http://www.petitions24.net/bannissons_le_foie_gras_a_montreal (date d'accès: 19.02.2014). 484Art. 10 § 21 de la Constitution de Floride, 1968 (révision), Amendement de 2002. La Section 21 de la Constitution
de Floride est entièrement dédiée à l'interdiction de confinement cruel et inhumain des truies gestantes et dispose que :
"Le traitement inhumain des animaux est un sujet de préoccupation des citoyens de la Floride" (traduction libre).
83
Au Canada et surtout en Australie, la législation protectrice des animaux est aussi plus
présente et plus développée au niveau provincial ou territorial qu'au niveau fédéral.
2- Le Canada
En matière de protection animale, le Canada dispose de lois provinciales et, au niveau fédéral,
d'une section anti-cruauté contenue dans son code criminel aux articles 444 à 447.
Promulguées pour la première fois en 1892, ces dispositions ont été peu modifiées depuis les
années 1950485. En 2008 en particulier, une loi est venue renforcer les peines maximales
prévues en cas de cruauté envers les animaux. Désormais, les peines sont de 5 ans de prison
pour les actes criminels et de 10 000$ et/ou 18 mois de prison pour les autres infractions486.
Deux interdictions générales sont prévues par le Code criminel : le fait de tuer ou blesser le
bétail (ou autres animaux) et la cruauté. Quant aux infractions spécifiques, citons l’abandon et
l'omission d’accorder des soins raisonnables à un animal sous sa garde487, ainsi que le fait de
causer, par négligence volontaire, des blessures ou des lésions en cours de transport488. Deux
activités spécifiques sont également interdites, à savoir la pratique consistant à tirer sur des
oiseaux libérés de leur cage489 et les combats d'animaux (notamment les combats de coqs)490.
Notons que depuis 2013, un texte de loi sur le bien-être animal est proposé par plusieurs
personnes œuvrant pour la protection animale au Canada491. Ses principales finalités
consistent en la reconnaissance des animaux comme être sensibles, ainsi que le renforcement
des mesures protectrices des animaux et des peines prononcées au niveau fédéral492.
Au-delà des dispositions fédérales, chaque province du Canada dispose de sa propre
législation anti-cruauté493. En général, les lois provinciales protègent seulement les animaux
485 Voir MACKAY, R., Bill C-50: An Act to Amend the Criminal Code in Respect of Cruelty to Animals (LS-509E),
Aug. 18, 2005, cité dans Charles HALL, "Canadian Animal Anti-Cruelty Legislation", Animal Legal & Historical
Center, Michigan State University College of Law, 2006, en ligne:
www.animallaw.info/nonus/articles/ddcananimalcrueltylegislation.html (date d'accès: 19.02.2014). 486 Voir la Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux), L.C. 2008, ch. 12. Auparavant, les peines
maximales pour les actes de cruauté envers les animaux étaient de 2000 $ CAN et/ou 6 mois de prison 487 Art. 445.1, §3 et 446 §3. 488 Art. 446. 489 L'article 445.1,§1, d) interdit tout "événement au cours duquel des oiseaux captifs sont mis en liberté avec la main
ou par une trappe, un dispositif ou autre moyen pour essuyer un coup de feu au moment de leur libération". 490 Art.445.1, §1, c) sur "le combat ou le harcèlement d’animaux ou d’oiseaux" et Art. 447 sur les "combats de coqs"
en particulier. 491 Voir DAVIES, C., Animal Cruelty Legislation Canada, 2013, en ligne: http://www.terryslaw.ca/wp-
content/uploads/2013/12/Animal-Welfare-Bill-Canada-V11.pdf (date d'accès: 17.08.2015). 492 Id., p.2 : Animal Welfare Bill Canada Rationale. 493 Pour une liste complète des "Lois provinciales et territoriales sur le bien-être des animaux d'élevage" (ainsi que des
animaux domestiques et en captivité), voir le site de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, en ligne :
http://www.inspection.gc.ca/francais/anima/trans/provlegf.shtml (accès : 19.09.2012).
84
d'élevage494 ou les animaux en général495 (incluant ou non les animaux sauvages496) contre la
souffrance durant toute activité, le plus souvent à l'exception desdites "pratiques généralement
acceptées de gestion des animaux". La loi provinciale la plus sévère est la loi ontarienne de
2008497. Celle-ci prévoit jusqu'à 2 ans de prison et 60 000$ d'amende pour les manquements
aux obligations de soin ("care") et aux interdictions de faire du mal ("harm") aux animaux498.
Dans son préambule, cette loi pose la responsabilité de protéger les animaux et précise que :
« la manière de traiter les animaux [...] aide à définir notre humanité, moralité et
compassion en tant que société »499.
Cette loi de protection est un exemple législatif à la fois moderne et avancé à notre époque500.
Le Québec a repris certaines dispositions innovantes, comme l'obligation des vétérinaires de
dénoncer tout cas d'abus ou de négligence, au sein du Projet de loi 54 visant l'amélioration de
la situation juridique des animaux depuis 2015501. L'année précédente, un rapport du Animal
Legal Defense Fund (ALDF) avait placé la province de Québec au dernier rang de la
protection animale au Canada502. Adoptée à l’unanimité le 4 décémbre 2015, la loi visant
l’amélioration de la situation juridique de l’animal vient notamment reconnaître la sensibilité
animale dans le code civil québecois et renforce considérablement les peines de crauté envers
les animaux avec une amende pouvant aller jusqu'à 250 000 $ pour une première infraction503.
Plus généralement, il existe aussi au Canada des normes d'éthique pour l'expérimentation
animale et des codes de pratiques en matière d'élevage. Les Normes d'éthique pour
494 Québec, Manitoba, Nouveau-Brunswick, Nunavut, Terre-Neuve et Labrador, , Territoire du Nord-Ouest et Yukon
(Loi sur la protection des animaux) 495 Alberta (Animal Protection Act), Saskatchewan (Animal Protection Act), Ile du Prince Édouard (Loi sur le soin des
animaux) et Ontario (Animal Welfare Act). 496 Ex : En Colombie-Britannique où les animaux sauvages sont exclus du Prevention of Cruelty to Animals Act. 497 Provincial Animal Welfare Act, 2008, (Bill 50, S.O. 2008 C.16). 498 Id., Art. 8 : "Obligations and Prohibitions re Care of and Harm to Animals". 499Id., Préambule: "The people of Ontario and their government: Believe that how we treat animals in Ontario helps
define our humanity, morality and compassion as a society" (traduction libre). 500 Au delà des dispositions classiques, cette loi présente l'avantage d'établir des "standards de soin" pour tous les
animaux (Art.11-1) et prévoit l'obligation pour les vétérinaires de dénoncer toute suspicion raisonnable d'abus ou de
négligence envers un animal (Art. 11.3). Elle accorde également un pouvoir important de contrôle et d'inspection à
l'OSPCA ("Ontario Society for the Prevention of Cruelty to animals") (Art. 11.4 et 11.5). 501 Voir le Projet de loi n°54 : Loi visant l’amélioration de la situation juridique des animaux, déposé le 5 juin 2015 à
l'Assemblée nationale par le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, M. Pierre Paradis. Voir en
ligne: http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-54-41-1.html (date d'accès : 14.08.2015). 502 ALDF, "Quebec Remains Best Province to be an Animal Abuser", 22.06.2015, en ligne: http://aldf.org/press-
room/quebec-remains-best-province-to-be-an-animal-abuser-2/ (date d'accès : 14.08.2015). 503 Loi visant l’amélioration de la situation juridique de l’animal, en ligne :
http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=5&file=2015C35F.PDF (date
d’accès : 29.12.2015). En particulier, le Code civil du Québec est modifié par l’ajout de ce qui suit : “898.1. Les
animaux ne sont pas des biens. Ils sont des êtres doués de sensibilité et ils ont des impératifs biologiques’’. Notons que
ces dispositions ne sont pas sans faire penser aux articles L.214-1 du Code rural français ("Tout animal étant un être
sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son
espèce") et le nouvel article 515-14 adopté l’année précédente en 2014 au sein du Code civil français ("Les animaux
sont des êtres vivants doués de sensibilité").
85
l'expérimentation animale sont adoptées par le Conseil national de recherches Canada
(CNRC), qui a mis en place des comités régionaux chargés de vérifier l'application des
normes à travers la revue et l'approbation des protocoles de recherche504. Quant aux Codes de
pratiques pour les soins et la manipulation des animaux d’élevage, ceux-ci sont adoptés par le
Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE)505. Ces derniers sont
volontaires, sauf dans les provinces de Terre-Neuve et du Labrador, où ils ont pu acquérir une
valeur réglementaire, du fait de leur intégration à la réglementation sur la protection des
animaux depuis 2012506.
3- L'Australie
Contrairement aux États Unis et au Canada, où il existe des dispositions fédérales en plus des
dispositions provinciales, la protection animale en Australie est uniquement régie par les lois
propres à chacun de ses territoires.
Les formulations des lois australiennes fournissent un bon exemple de l'évolution du modèle
anti-cruauté vers le modèle pro-bien-être. En effet, alors que les lois adoptées jusqu'à la fin du
XXe siècle visaient la prévention de la cruauté envers les animaux ("Prevention of Cruelty to
Animals Act"507), celles adoptées depuis les années 1990 sont des lois sur le bien-être animal
("Animal Welfare Act"508), ou visant à leur apporter protection et soin509. Notons que cette
évolution terminologique s'est opérée dans les autres pays du monde de manière similaire510.
La répression de la cruauté reste présente de manière concourante avec la protection du bien-
être animal dans l'ensemble de ces lois. Les peines sont généralement variables et peuvent
aller jusqu'à 50000 $ et 5 ans de prison en Australie de l’Ouest511. Les domaines de l'élevage
504 Voir sur le site du CNRC, " Des normes d'éthique pour l'expérimentation animale", en ligne : http://www.nrc-
cnrc.gc.ca/fra/apropos/ethiques_integrite/animaux.html (dernière modification : 22.10.2013). 505 Les Codes de pratiques en vigueur concernent les : Bovins de boucherie ; Bison ; Bovins laitiers ; Équidés ; Cerf
d'élevage ; Renards d'élevage ; Chèvres ; Visons ; Moutons ; Transport ; Veaux de boucherie. Les codes en cours de
révision concernent les : Poulets, dindons et reproducteurs ; Porcs ; Volaille -Poules pondeuses. Voir sur le site du
CNSAE, "Codes de pratiques pour les soins et la manipulation des animaux d’élevage", en ligne :
http://www.nfacc.ca/codes-de-pratiques (date d'accès : 7.01.2014). 506 Newfoundland and Labrador Regulation 36/12, Animal Protection Standards Regulations under the Animal Health
and Protection Act, 2012, Art.4. 507 "Loi de prévention de la cruauté envers les animaux" ("Prevention of Cruelty to Animals Act") est le titre des lois
adoptées dans les territoires suivants : New South Wales (1979) ; Australie du Sud (1985) et Victoria (1986). 508 "Loi sur le bien-être animal" ("Animal Welfare Act") est le titre des lois adoptées dans les territoires suivants :
Territoire de la capitale australienne (1992) ; Tasmanie (1993) ; Territoires du Nord (1999) ; Australie de l’Ouest
(2002). 509 "Loi de soin et de protection des animaux" ("Animal Care and Protection Act"), Queensland, 2001. 510 Voir les titres des lois nationales, Annexe I. 511 Voir le tableau sur les lois nationales, Annexe 2
86
et de l'expérimentation sont quant à eux régis par des codes de pratiques, similaires aux Codes
de bien-être en Nouvelle-Zélande512.
Parmi les obligations récentes, on retrouve le devoir de soin et d'entretien, la protection de la
santé, la notion de responsabilité, ainsi que l'impératif de respecter la dignité et les besoins des
animaux. Il en va de même dans les nouvelles lois en Angleterre et en Nouvelle-Zélande.
B- Les nouvelles lois nationales
L'Angleterre (1) figure toujours parmi les pays les plus avancés en matière de législation
protectrice du bien-être animal, mais certaines lois anglo-saxonnes vont plus loin, comme
celle adoptée en Nouvelle-Zélande (2).
1- L'Angleterre
L'Angleterre a adopté une loi générale sur le bien-être animal ("Animal Welfare Act") en
2006513. Au-delà de la prévention de la cruauté, la loi de 2006 établit le devoir, pour toute
personne responsable d'un animal, d'assurer son bien-être514. Cette responsabilité implique
notamment de satisfaire les besoins fondamentaux de l'animal sur le plan comportemental,
physiologique et individuel, tout en protégeant l'animal des douleurs, souffrances, blessures et
maladies515. Tout contrevenant aux dispositions de la loi de 2006 encourt une peine maximale
de 20 000 livres d'amende et de 51 semaines de prison, ou les deux516.
La loi de 2006 traite également des codes de pratiques qui consistent en des lignes directrices
pour le bien-être des animaux517. Ces codes, en vigueur depuis 2010, concernent en particulier
les chiens, chats, chevaux (et autres équidés) et les primates non-humains gardés par des
particuliers518. Ceux-ci donnent des indications aux propriétaires et autres personnes en
charge de ces animaux afin d'assurer leur bien-être, conformément aux dispositions légales.
512 Voir CAO, D. et S. WHITE, Animal Law in Australia and New Zealand, Thomson Reuters Australia, Limited,
2010, pp.102-106. 513 Animal Welfare Act, 2006 (Chap. 45). 514 Id., Art.9. 515 Id., Art. 9 (2) : For the purposes of this Act, an animal’s needs shall be taken to include (a) its need for a suitable
environment, (b) its need for a suitable diet, (c) its need to be able to exhibit normal behaviour patterns, (d) any need it
has to be housed with, or apart from, other animals, and (e) its need to be protected from pain, suffering, injury and
disease" (traduction libre). 516 Id., Art.32 : "Imprisonment or fine". 517 Animal Welfare Act, 2006, Art.14 -17 ("Codes of Practice"). 518 UK/Codes of Practice: "Welfare of Dogs", "Welfare of Cats", "Welfare of Horses, Ponies, Donkeys and their
Hybrids", "Welfare of Privately Kept Non-Human Primates" ("in force from 6 April 2010"). Voir DEFRA
(Department for Environment, Food and Rural Affairs), "Key guidance and legislation", Protecting pets from cruelty,
en ligne : http://www.defra.gov.uk/wildlife-pets/pets/cruelty/ (dernière modification : 16 juillet 2012).
87
Notons qu'au-delà de la loi, ces codes de pratiques peuvent être invoqués devant un tribunal à
l'encontre de toute personne qui n'assure pas le bien-être de son animal519.
Au XXIe siècle, l'Angleterre, pionnière en la matière, tend toujours à assurer un rôle de chef
de file en matière de protection des animaux sur la scène internationale520. En effet, ce pays
semble vouloir montrer l'exemple en faisant passer les raisons éthiques au-dessus des intérêts
économiques et des pratiques traditionnelles attentatoires au bien-être animal. En témoignent
notamment l'interdiction de l'entreprise lucrative constituée par les élevages d'animaux à
fourrure depuis 2000521 et l'interdiction de la tradition britannique séculaire constituée par la
chasse à courre depuis 2004522. Les lois progressistes adoptées par l'Angleterre dans le
domaine de la protection animale ont parfois été suivies par d'autres pays. Par exemple,
l'Ecosse a interdit les élevages d'animaux à fourrure deux ans après en 2002523. À ce sujet,
notons que la Hollande constitue un cas intéressant. Auparavant première productrice de
fourrure de vison, ce pays a interdit ces élevages en 2013 (pour 2024)524. Ce cas démontre
aussi que les profits économiques ne passent plus systématiquement avant la protection du
bien-être animal, au moins dans les pays les plus protecteurs.
2- La Nouvelle-Zélande
En Nouvelle-Zélande, la loi sur le bien-être animal de 1999 est en vigueur depuis 2000. Celle-
ci apparaît comme un modèle de loi moderne. En effet, elle incarne l'approche de protection
du bien-être animal venant se substituer à la législation anti-cruauté525. Alors qu'il est
généralement question d'infractions de cruauté envers les animaux (comme dans la précédente
loi de 1960526), il est désormais question dans celle-ci d'"infractions au bien-être animal"527.
De plus, cette loi prévoit une sanction forte en cas de cruauté intentionnelle ou de mauvais
traitements volontaires envers les animaux, à savoir : jusqu'à 5 ans de prison avec une amende
519 Id. 520 RADFORD, M., Animal welfare law in Britain: regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001,
p.137. 521 Fur Farming (Prohibition) Act, 2000 (chap. 33). 522 Hunting Act, (chap. 37), 2004. 523 Fur Farming (Prohibition) (Scotland) Act, (asp. 10), 2002. 524 Amendement du 4 janvier 2013 à la loi interdisant l'élevage de fourrure ("Wet van 4 januari 2013 tot wijzigin van
de wet verbod pelsdierhouderij"). 525 Ce terme apparait seulement pour mentionner la "Royal New Zealand Society for the Prevention of Cruelty to
Animals" ("Société royale de Nouvelle-Zélande pour la prévention de la cruauté envers les animaux") et non pour
qualifier des infractions. 526 "Offences of Cruelty", Art.3 du Animals Protection Act, 1960. 527 Animal Welfare Act, 1999, Art.12: "Animal welfare offences".
88
de 100 000$ pour les personnes physiques, ou 500 000$ pour les personnes morales528.
À ce jour, cette peine d'amende d'un demi-million de dollars est la plus forte au monde.
Cette loi interdit l'expérimentation sur les grands primates à l'instar des lois d'autres pays que
sont : le Royaume-Uni depuis 1997, les Pays-Bas depuis 2002, la Suède depuis 2003,
l'Autriche depuis 2006, la Belgique depuis 2008 et l'Espagne depuis 2008529. Mais dans le
cadre de cette loi, la Nouvelle-Zélande est le premier pays à avoir pris l'initiative de consacrer
des droits fondamentaux pour les grands primates. Cette initiative a été suivie par l'Espagne
en 2008, à commencer par les Baléares espagnoles en 2007530. Il est reconnu que les droits
fondamentaux des hominidés non-humains (gorilles, chimpanzés, bonobos et orang-outans)
concernent le droit à la vie, le droit à la liberté et le droit de ne pas être torturé531.
Peter Singer, co-fondateur du Projet grands singes avec Paula Cavalieri, a fait une déclaration
éloquente concernant la décision pionnière prise par la Nouvelle-Zélande en l'an 2000 :
« C'est peut-être un petit pas en avant pour les grands singes, mais il est
néanmoins historique - c'est la première fois qu'un parlement vote en faveur de la
modification du statut d'un groupe d'animaux, d'une façon si cruciale que l'animal
ne peut pas être traité comme un outil de recherche, destiné à être utilisé pour le
bénéfice des humains »532.
Elle présente aussi l'intérêt d'alléger le fardeau de la preuve au profit des plaignants à travers
la notion de "responsabilité stricte"533. Alors que dans les autres pays, les représentants légaux
des animaux victimes doivent généralement prouver le caractère intentionnel des actes
commis (ou omis)534, la nécessité de prouver cette intention est ici explicitement levée535.
En effet, le principe pénal de mens rea consiste à affirmer que "l'intention et l'acte doivent
528 Id., Art.28 (3): "Willful ill-treatment of animals" (traduction libre). Notons qu'un amendement de 2011, en vigueur
au 1er juillet 2013, a doublé les peines d'amende prévues. 529 Royaume-Uni : Policy banning licenses for great ape research); Pays-Bas : Law banning great ape research;
Suède : Regulation banning great ape research; Autriche: Law banning great ape research; Belgique : Law banning
great ape research, et Espagne : Resolution granting great apes legal rights. 530 Baleares: Resolution granting great apes legal rights, 2007; Espagne: Resolution granting great apes legal rights,
2008. 531 Voir ABEND, L., "In Spain, Human Rights for Apes", Time, 18.07.2008, en ligne:
http://content.time.com/time/world/article/0,8599,1824206,00.html (date d'accès: 17.02.2014). 532 SANKOFF, P., “Five years of the new animal welfare regime: lessons learned from New Zealand's decision to
modernize its animal welfare legislation”, Animal Law, vol. 11, pp. 7-38, 2005, pp.8-9 : "This may be a small step
forward for the great apes, but it is nevertheless historic - the first time a parliament has voted in favor of changing the
status of a group of animals so dramatically that the animal cannot be treated as a research tool, to be used for the
benefit of humans." (traduction libre). 533 Id., Art. 13 et 30 : "Strict liability" (traduction libre). 534 En France par exemple, c'est la "preuve d'une intention coupable d'infliger une souffrance à l'animal" qui permet de
constituer le "délit d'acte de cruauté" (ex : mauvais traitements des chevaux non réprimés en l'absence d'une intention
coupable dans CARIUS, M., Le droit du cheval et de l'équitation, France Agricole, 2005, p.24). 535 Animal Welfare Act, 1999, Art. 13(1) et 30(1) : "In a prosecution for an offence [...], it is not necessary for the
prosecution to prove that the defendant intended to commit an offence".
89
concourir pour constituer l'infraction", en l'occurrence l'infraction de cruauté envers les
animaux536. Or dans ce cadre, tant que le défenseur n'a pas d'argument recevable pour sa
défense, celui-ci est déclaré coupable et puni des peines prévues par la loi537. Ce changement
opère une évolution majeure. En effet, il facilite les poursuites et les déclarations de
culpabilité en tenant compte de la difficulté à prouver le caractère intentionnel des actes pour
les plaignants, contrairement à la relative facilitée, pour le défenseur, de prouver le caractère
non-intentionnel de ses actes. Cette loi fournit un exemple progressiste pour mettre fin au
déséquilibre défavorable aux victimes animales et à leurs défenseurs dans le cadre judiciaire.
Parmi les dernières actualisations de cette loi, notons l’obligation de garantir le bien-être des
animaux pour les propriétaires et le fait que les animaux sont des êtres sensibles (sentients)538.
Ce pays prévoit aussi des codes de bien-être pour certaines espèces et activités539. Si ceux-ci
n'ont pas force de loi, ils peuvent être invoqués lors de procès540. Mais ces codes apparaissent
plutôt comme une réglementation de façade en regard de leur effectivité relative541.
Relevons certains points communs entre les nouvelles législations anglo-saxonnes.
Pionniers du droit animal, nous avons vu que les pays anglo-saxons jouent aujourd'hui un rôle
de leaders. Disposant des sanctions les plus fortes au monde, ils se distinguent également par
l'existence de dispositions avancées. Ils ont également la particularité de disposer de codes de
pratiques sur le bien-être des animaux, complémentaires et flexibles en tant qu'instruments
quasi-juridiques. Le système fédéral est aussi présent dans ces pays où les lois de protection
sont principalement décentralisées. Ces lois existent dans toutes les provinces du Canada, tous
les états des États-Unis et tous les territoires d'Australie542. À ce jour, l'Australie ne dispose
pas de loi fédérale sur le bien-être animal, contrairement au Canada doté d'une section anti-
cruauté dans son code criminel, ainsi qu’aux États-Unis, dotés de deux grandes lois fédérales.
536 PEARSON, S. J., The Rights of the Defenseless, University of Chicago Press, 2011, p.80: "The intention and the act
must concur to make the offense" (traduction libre). 537 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, p.171. 538 Replaced, on 10 May 2015, by Section 4 of the Animal Welfare Amendment Act (No 2) 2015 (2015 No 49) :
"(a) to recognise that animals are sentient; (ia) to require owners of animals, and persons in charge of animals, to
attend properly to the welfare of those animals". 539 Les espèces concernées sont les chiens, chats (de compagnie), cerfs, porcs, chèvres, vaches laitières, poules
pondeuses, poulet de chair, moutons et bœuf (bétail). Les activités concernées sont les cirques, rodéos, zoos, abattage
(commercial), transport interne et manipulations douloureuses. 540 Animal Welfare Act, 1999, Art. 13(3) et 30(3) : iii) "where the defendant intends to rely on [...] the relevant code of
welfare that was in existence at the time of the alleged offence, and the facts that show that the minimum standards
established by that code of welfare were in all respects equaled or exceeded". 541 Voir DALE, A., "Animal Welfare Codes and regulations - The devil in Disguise?", dans SANKOFF, P. J. et S. W.
WHITE, Animal Law in Australasia: A New Dialogue, The Federation Press, 2009, pp.174-178. 542 Voir l'Annexe 1 où figurent les lois des territoires australiens et les liens vers les lois des provinces canadiennes et
des états américains.
90
Depuis le début de l'histoire du droit animal, les pays anglo-saxons ont une longueur d'avance
sur les autres pays du monde. Néanmoins, les pays européens ne mettent jamais très
longtemps à suivre le mouvement, en adoptant toutefois leurs propres législations
protectrices.
§2) Les nouvelles lois des pays européens
Parmi les nouvelles lois européennes, certaines reflètent toujours le modèle anti-cruauté (A).
Au contraire, d'autres plus avancées, reflètent le nouveau modèle législatif pro-bien-être (B).
A- Les lois tardives sur le modèle anti-cruauté
Parmi les nouvelles lois européennes, quatre exemples de lois adoptées sur le modèle anti-
cruauté peuvent être cités : le Code pénal français de 1994 (1), la loi italienne de 2004 (2) et
les lois de République tchèque en 1992 (3) et en Ukraine en 2006 (4).
1- Le Code pénal français de 1994 sur les sévices graves et les actes de cruauté
En France, la loi du 10 juillet 1976 a permis aux associations de protection animale de se
porter partie civile dans un procès pour défendre les animaux victimes de maltraitance543.
Celle-ci a également permis de reconnaître la sensibilité animale à son article 9, désormais
retranscrit à l'identique dans l'article L.214-1 du Code rural :
« Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des
conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ».
Depuis 2014, cette notion clef apparaît aussi à l'article 515-14 du Code civil en ces termes :
« Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les
protègent, les animaux sont soumis au régime des biens corporels »544.
Malgré la reconnaissance de la sensibilité animale, l'exception tauromachique demeure
légalement autorisée en France depuis 1951. Résistant d'abord à l'interdiction de cruauté
publique dans le cadre de la loi Grammont de 1850, la corrida, comme les combats de coqs,
échappent désormais à l'interdiction de cruauté générale envers les animaux, tel que confirmé
par la nouvelle version du Code pénal français de 1994.
543 Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, Art. 14 : "Les associations de protection
animale reconnues d'utilité publique peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les
infractions [..] portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'elles ont pour objet de défendre". 544 Cet article est un nouvel article préliminaire à la section du Code civil relative aux biens. Voir la modification
adoptée sur le site de l'Assemblée nationale en ligne : www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/1808/AN/59.asp
(date d'accès : 16.04.2014).
91
À l'interdiction des "sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux", punis d'une peine
maximale de 2 ans de prison et 30000 euros d'amende en vertu de l'article 521-1 du Code
pénal, subsiste une exception à son alinéa 7, pour les corridas et les combats de coqs, là où
une tradition peut être invoquée545. Alors que ces pratiques sont reconnues comme cruelles
(puisqu'elles sont intégrées sous les actes de cruauté envers les animaux), celles-ci demeurent
dérogatoirement autorisées en tant que pratiques traditionnelles, dans les îles françaises et la
région Nord Pas-de-Calais pour les combats de coqs, et les départements du Sud de la France
pour les corridas. Si la dérogation du Code pénal concerne seulement les traditions locales
ininterrompues, cela ne semble pas être le cas de la corrida. En effet, plusieurs règlements
d'interdiction ont été adoptés avant sa légalisation en 1951, notamment dans les localités du
Sud de la France où elle demeure autorisée à ce jour. Citons par exemple l'application
réglementaire ayant nécessité l'intervention des forces de l'ordre, afin de reconduire un toréro
espagnol à la frontière à Nîmes en 1895546.
2- La loi italienne de 2004 sur l'interdiction des mauvais traitements envers les animaux
Au sein de la loi italienne de 2004, la peine la plus lourde est prévue pour les combats
d'animaux, soit de 1 à 3 ans de prison et de 50 000 à 160 000 euros d'amende547.
Plus généralement, cette loi interdit les actes de cruauté et les mauvais traitements envers les
animaux, comme de causer la mort ou une blessure à un animal sans nécessité548. Il existe
également une règlementation spécifique sous forme d'accord entre l'Etat et les régions d'Italie
sur le bien-être et les soins des animaux de compagnie depuis 2003549. Dans ce cadre, les
gouvernements locaux ont adopté des dispositions spécifiques pour leur protection à l'image
de Rome qui, depuis 2005, interdit notamment le dégriffage des chats (ou onyxectomie), les
colliers électriques ainsi que la coupe de la queue et des oreilles des chiens (sans nécessité
545 L'alinéa 7 de l'article 521-1 du Code pénal de 1994 (révisé en 2006) dispose : "Les dispositions du présent article ne
sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont
pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie". 546 Voir NOUËT, J.-C., "Les bœufs, le joug et la charrue ? Sciences, éthique et droit, dans quel ordre ?", dans
AUFFRET VAN DER KEMP, T. et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au Droit, Yvon Blais, pp.
229- 238, 2013, p.232. 547 Art. 544-quinquies, Disposizioni concernenti il divieto di maltrattamento degli animali, nonche' di impiego degli
stessi in combattimenti clandestini o competizioni non autorizzate, Gazzetta Ufficiale n°
178 del 31 Luglio 2004 (Journal officiel n° 178 du 31 juillet 2004), (traduction possible : "Dispositions concernant
l'interdiction des mauvais traitements envers les animaux, ainsi que leur utilisation dans les combats clandestins et les
compétitions non autorisées"). 548 Id., Art. 544-bis ("Uccisione di animali") et 544-ter ("Maltrattamento di animali"), (traduction libre). 549 Voir PASSANTINO, A., "Companion animals: an examination of their legal classification in Italy and the impact
on their welfare", Animal Law Journal, pp. 59-92, 2008, p.60.
92
thérapeutique), et impose d'une manière plus novatrice sur le plan légal, des promenades
quotidiennes pour les chiens550.
Autre avancée pionnière, la loi du 12 octobre 1993 établit l'objection de conscience contre
l'expérimentation animale551. Les étudiants, enseignants et chercheurs, peuvent ainsi invoquer
leur droit à l'objection de conscience afin de refuser d'effectuer toute expérimentation pour
des raisons éthiques. Cette loi contient également une interdiction de discrimination envers les
personnes ayant exprimé un tel refus, de sorte à faciliter son d'application pratique. Une loi
encore plus avancée visant à interdire l'expérimentation animale pourrait aussi voir le jour552.
3- La loi tchèque de 1992 sur la protection des animaux face à la cruauté
En République tchèque, la loi de 1992 contre la cruauté553 vise notamment à :
« protéger les animaux, qui sont des êtres vivants capables d'éprouver de la
douleur et de la souffrance, contre la cruauté, les atteintes à leur santé et leur mise
à mort sans raison que ce soit, causée par l'homme, même par négligence »554.
Cette disposition résume le principe d'interdiction de la cruauté envers les animaux sensibles,
principe désormais partagé par de nombreux pays. Or, bien que cette loi reconnaisse le
caractère sensible des animaux (à travers leur aptitude à éprouver de la douleur et de la
souffrance), elle ne protège que la sensibilité des animaux vertébrés555. Ainsi, les invertébrés
ne sont pas protégés, alors même que la sensibilité de certains est désormais scientifiquement
avérée comme pour les céphalopodes. En plus de l'interdiction générale de cruauté556, cette loi
établit une liste d'infractions557 où seules des amendes sont encourues, sans peine de prison.
4- La loi ukrainienne de 2006 sur la protection des animaux face à la cruauté
En Ukraine, l'article 4 de la loi de 2006 énonce des "Principes fondamentaux de protection
des animaux contre la cruauté"558. Selon le premier principe :
550 WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, op.cit., note 397, pp.44-45. 551 Loi du 12 octobre 1993, n° 413, relative à l'objection de conscience pour les étudiants, enseignants et chercheurs
concernant l'expérimentation animale 552 Voir FALAISE, M., "Regard sur quelques remarquables avancées du droit animal dans 7 nations d'Europe
(Autriche, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Luxembourg, Suède et Suisse)" dans AUFFRET VAN DER KEMP, T.
et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au Droit, Yvon Blais, 2013, p.251. 553 "Act on the protection of animals against cruelty", 1992. 554 Id., Art. 1 (1) : "Purpose of the Act" (traduction libre). 555 Id., Art. 3 (a) : ""animal" means a live vertebrate, other than man, excluding foetal or embryonic forms". 556 Id., Art.2 (1) : "Cruelty to animals shall be prohibited" ; (2) "All forms of promoting cruelty to animals shall be
prohibited". 557 Id., Art. 27 (1) à (9). 558 Law on the Protection of Animals from Cruelty, 2006.
93
« La cruauté envers les animaux n'est pas compatible avec les exigences de
moralité et de compassion et provoque un préjudice moral pour l'humanité »559.
Cette loi anti-cruauté rencontre néanmoins certains problèmes d'applications comme dans le
cadre de l'Euro 2012. Afin d'accueillir les milliers de visiteurs venant assister à ce
championnat international de soccer, des mesures d'éradication de milliers de chiens errants
ont été mises en œuvre dans les villes ukrainiennes, notamment dans la capitale de Kiev560.
Suite à la dénonciation internationale des méthodes cruelles employées, comme le recours à
des incinérateurs mobiles, le gouvernement ukrainien aurait déclaré prendre des mesures pour
tenter de sauver ces chiens561. À cette fin, les organisations locales ont été aidées par d'autres
organisations de protection venues sur place pour vacciner et stériliser les animaux errants
dans le but de les placer dans des familles d'accueil562. Ce soulèvement n'est pas sans faire
penser à la protestation internationale ayant précédé un autre évènement sportif, les jeux
Olympiques de Séoul, qui ont également conduit à l'adoption d'une mesure de protection, à
travers l'interdiction légale de consommation de viande de chien en Corée en 1988563.
B- La nouvelle génération des lois européennes protectrices du bien-être animal
La plupart des nouvelles lois européennes comportent dans leur intitulé et dans leur contenu
les objectifs de protection, de bien-être et de santé des animaux. En effet, parmi les lois
répertoriées en 2010, 11 ont pour titre la protection des animaux564, 8 concernent aussi le
bien-être animal565 et 3 ajoutent à cet objectif la santé des animaux566. Parallèlement à leurs
559 Id., Art.4, al.1 (traduction libre). Les autres principes énoncés par cet article (al. 2 à 6) sont : l'obligation de s'assurer
que les "conditions nécessaires" soient remplies en vue de la satisfaction des "besoins spécifiques et individuels des
animaux" ; le fait que le "droit de propriété" peut être retiré en cas de traitement cruel des animaux" ; l'"interdiction de
mise à mort cruelle des animaux" ; le principe de "responsabilité pour cruauté envers les animaux" ; et celui selon
lequel les animaux doivent être "gardés et traités de manière à éviter de nuire à autrui ou à lui-même". 560 AFP, "Euro 2012 : les chiens errants tués", Le Figaro, 01/06/2012, en ligne : http://www.lefigaro.fr/flash-
actu/2012/06/01/97001-20120601FILWWW00567-euro-2012-les-chiens-errants-tues.php (accès : 14.10.2012). 561 The Gardian, "Ukraine to stop killing stray dogs before Euro 2012 football championship: Environment ministry
tells mayors to build animal shelters after bowing to pressure from Naturewatch in UK", The Gardian Associated
Press in Kiev, 17 November 2011, en ligne: http://www.guardian.co.uk/world/2011/nov/17/euro2012-ukraine-stops-
killing-stray-dogs (accès : 14.10.2012). 562 Fondation 30 millions d'amis, "Les chiens errants d'Ukraine", Communiqué sur les actions de la Fondation dans le
monde, en ligne : http://www.30millionsdamis.fr/la-fondation/nos-actions/proteger-les-animaux/les-actions-de-la-
fondation-a-travers-le-monde/action/les-chiens-errants-dukraine-39.html (accès : 14.10.2012). 563 KIM, R. E., “Dog Meat in Korea: A Socio-Legal Challenge”, Animal Law, vol.14, 2008, p.210. 564 "Animal Protection Act" en Pologne (1998), Slovénie (1999), Autriche (2004), Turquie (2004), Croatie (2006),
Espagne (2007) ; "Act on the Protection of Animals" au Danemark (1991) et en Roumanie (2004) ; "Protection of
Animals Act" en Irlande (1965), au Portugal (1995) et en Finlande (1996). 565 De même, les lois concernant le "bien-être animal" se retrouvent sous les appellations suivantes : "Animal Welfare
Act" en Norvège (1974), Suède (1988), Allemagne (1998), à Malte (2002) et au Royaume Uni (2006) ; ainsi que la
"Loi relative à la protection et au bien-être des animaux" en Belgique (1986) et la "Loi sur la protection de la vie et le
bien-être des animaux" au Luxembourg (1983). 566 "Animal Health and Welfare Act" aux Pays-Bas (1992), Écosse (2006) et Islande (2009).
94
intitulés, certaines lois portent ces notions au rang d'objectifs explicites. Certains pays les ont
même érigées au niveau constitutionnel. Présentons brièvement ces nouvelles législations.
1- Les lois visant la protection et le bien-être des animaux au Luxembourg et en Belgique
Au Luxembourg, la protection et le bien-être des animaux est un objectif légal depuis 1983567.
Cette loi est la première à avoir consacré explicitement le concept de "bien-être animal" en
langue française. Il s'agit également d'un devoir constitutionnel inédit depuis 2007568, ce pays
étant le seul à avoir érigé cet objectif au niveau constitutionnel.
L'exemple législatif initié par le Luxembourg a été suivi par la Belgique mitoyenne 3 ans
après. Dans les mêmes termes que la loi luxembourgeoise, la Belgique a adopté sa Loi
relative à la protection et au bien-être des animaux en 1986.
En plus de la protection des animaux et de leur bien-être, certaines des nouvelles lois
européennes ajoutent comme objectif phare la protection de la vie des animaux.
2- Les lois sur la protection de la vie et le bien-être animal : Croatie, Allemagne et Autriche
La loi de 2006 en Croatie vise la protection de la vie, de la santé et le bien-être des
animaux569. Contrairement à la plupart des lois protectrices, le terme de "cruauté" n'est pas
explicitement mentionné. Toutefois l'intentionnalité de faire souffrir un animal (en le tuant, le
blessant ou l'effrayant volontairement) est évoquée570 et punie d'une simple amende571.
Parmi les autres lois ayant affirmé comme objectif la protection de la vie et le bien-être des
animaux, citons la loi allemande de 1998572 et la loi autrichienne de 2004573, lesquelles basent
ces objectifs sur la notion de responsabilité des êtres humains envers les animaux574.
567 Loi du 15 mars 1983 ayant pour objet d´assurer la protection de la vie et le bien-être des animaux. Selon l’Art. 1 :
"La présente loi a pour objectif d´assurer la protection de la vie et le bien-être des animaux". 568 Depuis 2007, l'Art. 11 bis de la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg de 1868 prévoit que l'Etat "promeut
la protection et le bien-être des animaux". 569 Animal Protection Act, 2006 (traduction libre). 570 Id., Art.4. 571 Id., Art.66. L'amende peut aller de 50.000 à 100.000 HRK. 572 Animal Welfare Act de 1998 en Allemagne (révisé en 2006), Art.1 : "The aim of this Act is to protect the lives and
well-being of animals, based on the responsibility of human beings for their fellow creatures" (traduction libre). 573 Animal Protection Act de 2004 en Autriche, Art.1. 574 En 2004, il était prévu que la formulation suivante soit intégrée à la constitution autrichienne : "L'État protège la vie
et le bien-être des animaux en vertu de la responsabilité spécifique de l'humanité envers les animaux en tant qu'êtres
semblables" (traduction libre) ; BALLUCH, M., "How Austria achieved a historic breakthrough for animals", dans
SINGER, P., In Defense of Animals : The Second Wave, Blackwell, pp. 157-166, 2006, p.162. Si cette formule ne
figure pas dans la Constitution fédérale à ce jour, elle figure à l’article 9 (tiret 6) de la Constitution du Land de
Salzbourg en termes similaires, l'un des objectifs du land étant "le respect et la protection des animaux semblables à
l'homme ainsi que la responsabilité envers les êtres vivants".
95
La loi allemande présente la particularité d'interdire les "souffrances et douleurs évitables"575
commises "sans bonne raison"576. Quant à la loi autrichienne, celle-ci condamne également
les souffrances psychologiques comme la peur577.
L'objectif de protection des animaux figure dans la Constitution allemande depuis 2002578.
En Autriche, une loi fédérale de 2014 précise que ce pays s'engage à protéger les animaux579
et le Land de Salzbourg prévoit plus précisément parmi ses objectifs constitutionnels "le
respect et la protection des animaux", ainsi que la responsabilité humaine "envers les êtres
vivants"580.
Notons que l'Autriche est le premier pays à avoir reconnu dans son code civil que "les
animaux ne sont pas des choses" en 1988, suivie par l'Allemagne en 1990581. En 2002, la
Suisse a adopté la même formulation582.
3- Les lois protégeant la dignité et le bien-être animal en Suisse et au Liechtenstein
L'article 80 de la Constitution suisse prévoit la compétence législative en matière de
protection animale583 et son article 120 consacre le principe de "dignité des êtres vivants" (ou
"intégrité des organismes vivants" dans sa version française)584. La valeur prioritaire du
575 Animal Welfare Act, 1998, Art.3 (8), a) et c): "It shall be prohibited [to] cause the animal pain or avoidable
suffering or harm" (souligné par nous). 576 Id., Art. 1: "No one may cause an animal pain, suffering or harm without good reason" (souligné par nous). 577 Animal Protection Act, 2004, Art.5 (al.1): "It is prohibited to inflict unjustified pain, suffering or injury on an
animal or expose it to heavy fear" (souligné par nous). 578 Art.20, a) de la Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne de 1949 (révision de 2002). Rappelons
que le Luxembourg a également constitutionalisé l'objectif de protection des animaux (avec leur bien-être) dans sa
Constitution en 2007. 579 §2 de la Loi constitutionelle fédérale, Bundesrecht konsolidiert: Gesamte Rechtsvorschrift für Nachhaltigkeit,
Tierschutz, umfassender Umweltschutz, Sicherstellung der Wasser- und Lebensmittelversorgung und Forschung,
Fassung vom 08.10.2014. 580 Article 9 de la Constitution du Land de Salzbourg. Voir sur ces points LE BOT, O., "L’Autriche ajoute la protection
de l’animal dans sa Constitution", RSDA, 2015. 581 Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch (ABGB), 1812, § 285 a) et Bürgerliches Gesetzbuch (BGB), 2002, Section
90 a) : "Animals are not things" (traduction libre). 582 Code civil suisse, 1907, Art. 641 a), al.1 : "Les animaux ne sont pas des choses" (disposition du 4 oct. 2002 en
vigueur depuis le 1er avril 2003). Sur cette réforme, voir Jean-Pierre MARGUÉNAUD, “Les animaux sont-ils encore
des biens? Prendre au sérieux la sage réponse du droit suisse”, dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.),
Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Pédone, 2009, pp. 49-56. 583 Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999, Art. 80 "Protection des animaux" : 1) "La Confédération
légifère sur la protection des animaux", 2) "Elle règle en particulier : a.la garde des animaux et la manière de les traiter;
b. l’expérimentation animale et les atteintes à l’intégrité d’animaux vivants ; c. l’utilisation d’animaux ; d.
l’importation d’animaux et de produits d’origine animale ; e. le commerce et le transport d’animaux ; f. l’abattage des
animaux". Notons que la proposition de révision vers un texte plus protecteur a été rejeté en 2005 (mais certains des
principes proposés se retrouvent dans la législation actuelle, notamment la "protection du bien-être et de la dignité et
des animaux" en tant "qu'êtres vivants doués de sensibilité"). Voir PONTHOREAU, M.C., “Constitution et protection
animale, perspectives théorique et comparée”, dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits
européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, pp. 35-47, 2009, pp. 45-46. 584 Alors que dans la version anglaise (ainsi qu'en allemand et en italien), il est question de "dignity of living beings"
(dont la traduction fidèle en français serait la "dignité des êtres vivants"), il est question de respecter l'"intégrité des
organismes vivants" dans le cadre du "génie génétique" dans la version française de l'art.120 de la Constitution Suisse.
Malgré le fait que la signification et la portée des termes employés diffèrent, cette divergence de traduction s'explique
96
principe de dignité en Suisse est clairement confirmée dans la Loi fédérale sur la protection
des animaux de 2005 qui vise à protéger la dignité et le bien-être de l’animal585. En Suisse, la
dignité animale a donc une double valeur légale et constitutionnelle, à l'image de la protection
animale en Allemagne et du bien-être animal au Luxembourg.
Les concepts de dignité et de bien-être animal ont également leur définition légale.
D'une part, le concept de "dignité" est défini largement comme étant "la valeur propre de
l’animal"586. Notons que cette notion se rapproche de la "valeur intrinsèque" des animaux,
consacrée comme base fondamentale de protection des animaux aux Pays-Bas587. D'autre part,
la définition fournie du "bien-être" animal vise notamment des conditions de détention et
d'alimentation appropriées ; la possibilité pour les animaux de se comporter conformément à
leur espèce ; un bon état de santé ; ainsi que l'absence de douleurs, de maux, de dommages et
d’anxiété588.
La Suisse fournit aussi des exemples novateurs, comme en établissant un avocat spécialisé
pour les animaux, le Dr. Antoine Goetschel, dans le canton de Zurich entre 2007 et 2010589.
Le Liechtenstein, petit état mitoyen de la Suisse, a repris intégralement sa loi fédérale de 2005
dans sa loi sur le bien-être animal de 2010590.
4- Les lois visant à protéger la valeur intrinsèque des animaux aux Pays-Bas
La notion de valeur intrinsèque est intégrée au cœur de la législation protectrice des animaux
aux Pays-Bas. Elle fut consacrée pour la première fois dans la loi de protection de la santé et
du bien-être animal en 1981, laquelle définit clairement cette notion en ces termes :
par une décision du Comité d'éthique fédéral de changer le terme "dignité" par celui d'"intégrité" en 2000 (en regard
des différentes implications de ces termes). Voir MICHEL, M. et E. SCHNEIDER KAYASSEH, "The Legal Situation
of Animals in Switzerland: Two Steps Forward, One Step Back - Many Steps to Go", Journal of Animal Law, vol.VII,
May 2011, p. 4. 585 Loi fédérale sur la protection des animaux[RS 455], Art.1 (entrée en vigueur le 1 septembre 2008). 586 Id., Art.3 (a). 587 "La valeur intrinsèque des animaux est reconnue" au premier alinéa de l'Art.1.3 de la loi sur les animaux (Wet
dieren) de 2011, ou "Loi du 19 mai 2011, établissant un cadre complet des règles sur les animaux détenus et sujets
connexes" (Wet van 19 mei 2011, houdende een integraal kader voor regels over gehouden dieren en daaraan
gerelateerde onderwerpen), (traduduction libre). 588 Id., Art.3 (b). Ces critères ne sont pas sans rappeler le principe des "5 libertés" qui prévoit les mêmes exigences en
vue de réaliser l'objectif de bien-être animal 589 Voir par exemple HICKMAN, L., "The lawyer who defends animals", The Guardian, 5.03.2010, en ligne :
http://www.theguardian.com/world/2010/mar/05/lawyer-who-defends-animals (date d'accès : 6.08.2014). 590 Tierschutzgesetz, 23 Sept. 2010 (TSchG) (traduction possible : "Animal welfare act" en anglais ou "Loi sur le bien-
être animal" en français). Celle-ci remplace la première loi sur la protection des animaux de 1988 et son Ordonnance
respective de 1990.
97
« La valeur intrinsèque des animaux signifie que les animaux possèdent une
valeur en eux-mêmes et par conséquent leurs intérêts ne sont plus
automatiquement subordonnés aux intérêts humains »591.
Consacrée spécifiquement pour les animaux sauvages en 1997592, cette notion constitue
désormais un principe fondamental dans la nouvelle loi de protection des animaux de 2011,
où elle renvoie dans son acception au principe (consacré en Suisse) de "dignité des animaux
en tant qu'êtres sensibles"593. Toujours en 2011, le Code civil néerlandais a été amendé pour
extraire les animaux de la catégorie des choses, à l'image de l'Autriche, de l'Allemagne, de la
Suisse et de la Catalogne auparavant594. Comme dans ces pays, il est reconnu que "les
animaux ne sont pas des choses". Notons qu'une formulation plus spécifique est adoptée par la
suite car ce code ne se contente pas de mentionner que "les dispositions concernant les choses
s'appliquent aux animaux", mais impose de tenir compte des exigences, règles, obligations et
principes juridiques, ainsi que de l'ordre et la moralité publics595. Ainsi l'application du régime
des choses aux animaux ne s'oppose pas à l'application de leur régime de protection.
Contrairement à la consécration de la valeur intrinsèque ou inhérente des animaux dans les
grands textes du droit international de l'environnement que nous verrons par la suite596, cette
reconnaissance légale n'a pas qu'une valeur symbolique aux Pays-Bas. En effet, ce principe
revête une valeur légale suffisamment forte pour avoir déjà emporté certaines implications
concrètes. Citons tout d'abord l'exemple de la première loi de protection de 1981, établie selon
la structure dite "no-unless" en anglais597. En consacrant la valeur intrinsèque (ou valeur
propre) des animaux, opposée à leur valeur instrumentale (soit leur valeur seulement comme
instruments ou moyens servant des fins humaines), cette loi était rédigée de manière à
interdire toute forme d'utilisation et d'exploitation des animaux, à moins que certaines
exceptions ne soient permises afin de satisfaire les intérêts humains. Cette formulation a pu
conduire à des situations paradoxales. Par exemple, une exception était consacrée pour
591 Animal Health and Welfare Act, 1981 (traduction libre). 592 Flora and Fauna Bill, Preambule. 593 Wet van 19 mei 2011, houdende een integraal kader voor regels over gehouden dieren en daaraan gerelateerde
onderwerpen (Wet dieren), Art.1.3 : 1) "The intrinsic value of animals is recognized" ; 2) [...]"meaning the recognition
of the dignity of animals as sentient beings". 594 Autriche en 1988, Allemagne en 1990, Suisse en 2003 et Catalogne en 2006. 595 Civil Code of the Netherlands, 2011, Book 3, Title 1, Section 1, Article 2 a) 1: "Animals are not things" ; 2.
"Provisions regarding things are applicable to animals, taking into account the legal requirements and rules of common
law, reasonable restrictions, obligations and principles of law, as well as public order and morality." (Traduction libre). 596 Notamment la Charte mondiale de la Nature de 1982 et la Convention sur la diversité biologique de 1992. 597 Voir BROM, F.W.A. "The use of ‘intrinsic value of animals’ in the Netherlands" dans DOL, M. et al. (éd.),
Recognizing the intrinsic value of animals: beyond animal welfare, Van Gorcum, pp. 15-28, 1999, Section 3.1.
98
l'utilisation des animaux à des fins de production alimentaire, alors qu'il s'agit de millions
d'animaux.
Sous couvert d'exception, cette utilisation revêt plutôt le caractère du principe. C'est pourquoi
cette structure a été révisée dans la nouvelle loi avec une rédaction classique.
Enfin, la reconnaissance de la valeur intrinsèque des animaux a constitué un argument-clef au
soutien de la loi de 2012 qui interdit les élevages d'animaux à fourrure pour 2024, malgré
l'importance des bénéfices économiques de ce secteur aux Pays-Bas598. Cette loi précise que :
« La reconnaissance de la valeur intrinsèque des animaux par la société et son
intégration dans la loi est considérée comme une étape importante dans le
processus de civilisation. [...] Les gens profitent de vivre dans une société où les
actes inacceptables contre les animaux sont découragés et punissables »599.
Précisons enfin que l'adoption de la nouvelle loi de 2011 a permis la création d'une police
spéciale pour protéger les animaux contre les actes de cruauté et de maltraitance600. Cette
innovation mérite ainsi d'être citée comme un exemple à suivre par les autres pays du monde,
afin de renforcer les moyen d'application de proximité des législations protectrices601.
5- Les droits et libertés des animaux dans la loi turque de 2004
Adoptée par la Turquie en 2004602, la loi sur la protection des animaux mérite d'être soulignée
pour ses dispositions novatrices. En effet, l'article 4 de cette loi traite en termes généraux des
"Principes fondamentaux relatifs à la protection des animaux et leur bien-être". Elle consacre
notamment le "droit à la vie" ("right to life") pour les animaux, et ce d'une manière inédite sur
le plan légal603. En effet, bien que les pays d'Amérique latine, comme le Costa Rica et le
Pérou, réfèrent respectivement au droit à l'existence et au respect de la vie dans leurs
législations, celles-ci semblent plutôt concerner la préservation de la vie des espèces
sauvages, que la protection de la vie des individus.
598 Voorstel van wet van de leden Van Velzen en Waalkens houdende een verbod op de pelsdierhouderij 30 826 (Wet
verbod pelsdierhouderij), [Fur Farming Prohibition Act], 2012. La fermeture de ces élevages est prévue pour 2024. 599 Id., Explanatory memorandum, p.6 600 Voir "Netherlands Create Animal Police Officers to Act Against Animal Cruelty", Paws for the News, 28.07.2014,
en ligne: http://www.pawsforthenews.tv/1news/1featured-news/netherlands-create-animal-police-officers-to-act-
against-animal-cruelty/ (date d'accès : 5.08.2014). 601 Pour appeler ce service de police spécialisé pour la protection des animaux du nom de "animal cops", il existe un
numéro spécial, le slogan étant "appelez le 144, sauvez une vie" ("bel 144, red een dier" en néerlandais). 602 Animal Protection Bill Law, 2004. 603 Id., Art. 4 a) : "tous les animaux naissent égaux et ont droit à la vie dans le cadre des dispositions de la présente loi"
(traduction libre).
99
La loi turque consacre également l'égalité des animaux en ces termes : "les animaux naissent
égaux"604. Quant aux droits à la liberté et à la survie des espèces sauvages605, ceux-ci font
penser à la Déclaration Universelle des Droits de l'Animal de 1978606, elle-même inspirée des
grandes déclarations sur les droits de l'homme.
Ainsi, la consécration des droits à la vie, à l'égalité et à la liberté pour les animaux est une
innovation majeure de la loi turque. En effet, ces derniers n'avaient pas d'existence légale
auparavant, en dehors des déclarations de principes non contraignantes comme celle précitée.
Dans les pays européens représentatifs du nouveau modèle législatif pro-bien-être, il convient
de revenir sur deux changements importants. Il s'agit d'un changement de stratégie de
protection en droit pénal, ainsi que d'un changement du statut des animaux en droit civil.
- La déréification en droit civil : l'extraction de l'animal de la catégorie des choses
Du latin "res" qui signifie "chose", la déréification de l'animal consiste en la reconnaissance
du fait que l'animal n'est pas (ou plus) considéré juridiquement comme une chose. Certains
pays ont opéré cette précision sans pour autant changer fondamentalement le statut de
l'animal, puisqu'il reste soumis au régime des biens appropriables.
L'animal n'est pas une chose. Cette formulation figure désormais dans les codes civils de
plusieurs pays européens. L'Autriche a initié l'intégration de cette disposition en 1988607 et
l'Allemagne a suivi en 1990608. Plus tard, cette mention a été introduite dans le code civil
Suisse en 2003609, dans la province de Catalogne en Espagne en 2006610, ainsi qu'aux Pays-
604 Id. Notons que cette formulation se rapproche autant de l'Article 1 de la Déclaration des droits de l'Homme et du
citoyen de 1789 ("Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits") et de la Déclaration universelle des
droits de l'homme de 1948 ("Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits") que de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Animal de 1978 selon laquelle : "Tous les animaux ont des droits égaux à
l'existence". 605 Id., Art.4 (e) et (f). 606 Voir la Déclaration Universelle des Droits de l'Animal de 1978, Art.4 (1) : "L'animal sauvage a le droit de vivre
libre dans son milieu naturel, et de s'y reproduire" et Art.8 (1) : "Tout acte compromettant la survie d'une espèce
sauvage, et toute décision conduisant à un tel acte constituent un génocide, c'est-à-dire un crime contre l'espèce". 607 (Code civil général d'Autriche), Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch (ABGB), 1812 (amendement 1988), ABGB.
§ 285 a : "Tiere sind keine Sachen ; sie werden durch besondere Gesetze geschützt. Die für Sachen geltenden
Vorschriften sind auf Tiere nur soweit anzuwenden, als keine abweichenden Regelungen bestehen". ("Les animaux ne
sont pas des choses ; ils sont protégés par des lois particulières. Les dispositions en vigueur pour les choses sont
applicables aux animaux, seulement si aucun règlement contraire n'existe."). (Traduction libre). 608 Bürgerliches Gesetzbuch (BGB), 2 Jan. 2002 (version révisée). German Civil Code, Section 90 a) : "Animals are
not things. They are protected by special statutes. They are governed by the provisions that apply to things, with the
necessary modifications, except insofar as otherwise provided". 609 Article 641 a) du Code civil Suisse introduit par le ch. I de la LF du 4 oct. 2002 (Animaux), en vigueur depuis le 1er
avril 2003 (RO 2003 463 ; FF 2002 3885 5418). 610 Libro V del Código Civil de Cataluña, Artículo 511-1. Bienes (Ley de 2006) : 3. "Los animales, que no se
consideran cosas, están bajo la protección especial de las leyes. Solo se les aplican las reglas de los bienes en lo que
permite su naturaleza".
100
Bas depuis 2011611. Bien que novatrice, cette affirmation ne précise pas pour autant ce que
sont les animaux sur le plan légal, mais simplement ce qu'ils ne sont pas, à savoir des choses.
Dans le droit civil de ces pays, l'animal est donc passé du statut de chose à celui de non-chose.
Néanmoins, les dispositions s’appliquant aux choses sont également valables pour les
animaux, à l'exception de toute disposition contraire612. Ainsi, l'animal est légalement régi
comme une chose, même s'il n'est plus considéré comme tel. Il s'agit ainsi de distinguer les
animaux de la catégorie des choses (en tant qu'objets inanimés), mais non de celle des biens
appropriables (aliénables et potentiellement exploitables comme auparavant les esclaves613).
Dans la même veine que les précédents pays européens, le Code civil français a été modifiéle
16 février 2014614. Toujours dans la catégorie des biens et soumis au même régime, les
animaux se voient néanmoins reconnaitre leur caractère particulier d' "êtres vivants doués de
sensibilité"615. Depuis le 4 décembre 2015, le Code civil du Québec a suivi et précisant aussi
explicitement que "les animaux ne sont pas des biens"616. Peu après le 6 janvier 2016, la
Colombie a suivi en reconnaissant aux animaux la qualité d’êtres sensibles dans son Code
civil617.
Bien que n'étant plus considéré comme une simple chose, l'animal demeure objet
d'appropriation. Les animaux conservent ainsi leur statut de propriété, mais ils sont reconnus
comme une propriété spécifique, distincte des choses sans vie. En effet, ils bénéficient d'une
protection supérieure aux autres types de biens, puisqu'ils sont protégés par des lois
particulières618. Par conséquent, les codes civils de ces pays opèrent plus un changement
terminologique et symbolique qu'une véritable transformation du statut juridique de l'animal.
En d'autres termes, la déréification opérée n'emporte pas pour autant la personnification
611 Burgerlijk wetboek, Netherlands Civil Code, Book 3, Title 1, Section 1, Art. 2a) : "1. Animals are not things" ;
"2. Provisions regarding things are applicable to animals, taking into account the legal requirements and rules of
common law, reasonable restrictions, obligations and principles of law, as well as public order and morality". 612 Selon l'Art. 641 a),al.2 du Code civil Suisse : "Sauf disposition contraire, les dispositions s’appliquant aux choses
sont également valables pour les animaux". Cette mention est également précisé dans les autres codes civils allemand
(Section 90 a), autrichien (§285 a) et catalan (Art.511-1). 613 Voir CHARLIN, F., Homo servilis. Contribution à l’étude de la condition juridique de l’esclave dans les colonies
françaises (1635-1848), Thèse de droit soutenue à la Faculté de droit de Grenoble le 3 décembre 2009. 614 AFP, "Les députés valident le changement de statut des animaux", Libération, 15.04.2014, en ligne :
http://www.liberation.fr/societe/2014/04/15/le-statut-des-animaux-progresse-dans-le-code-civil_997893 (date d'accès
le 15 avril 2014). 615 En vertu du nouvel article 515‑ 14 du Code civil français : "Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité.
Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens corporels". 616 Art. 898.1 du Code civil du Québec : "Les animaux ne sont pas des biens. Ils sont des êtres doués de sensibilité et
ils ont des impératifs biologiques ". 617 Artículo 655: "Reconózcase la calidad de seres sintientes a los animales". 618 Id. Cette précision est mentionnée dans les codes civils allemand, autrichien et catalan.
101
juridique de l'animal619. Or, même si l'animal demeure appropriable, il s'agit d'un pas essentiel
que de distinguer, en droit civil, les êtres sensibles que sont les animaux, des choses
inanimées, dont les propriétaires peuvent "user, jouir et abuser" selon leur volonté (d'après la
traduction de l'adage juridique latin "usus, fructus, abusus" applicable au droit de propriété).
C'est pourquoi cette extraction de la catégorie des choses est une tentative louable en vue de
faire évoluer le statut juridique des animaux. Ces pays ont-ils ouvert la voie à une véritable
remise en question du statut juridique de l'animal ? La question mérite sans doute d'être posée.
Malgré l'évolution toute relative de ces dispositions, mentionnons néanmoins une implication
pratique à travers l'exemple suisse. À la différence des choses inertes, la valeur sentimentale
d'un animal de compagnie y est reconnue, voire dédommagée lorsque celui-ci est blessé ou
tué, et son bien-être est pris en compte en cas de divorce ou de décès de ses propriétaires620.
Suite aux pays anglo-saxons et européens, les lois protectrices du bien-être animal sont
progressivement en train de voir le jour dans d'autres pays du monde au début du XXIe siècle.
S.2- L'expansion du modèle pro-bien-être dans le monde au début du XXIe siècle
Présentons tout d'abord les exemples de protection avancée (§1), avant d'évoquer les
exemples de révision et d'élaboration législatives (§2).
§1) Les exemples d'avancées législatives
Certains exemples de lois avancées ont été adoptés par la Tanzanie en Afrique (A), et dans
d'autres pays du monde en Amérique latine, en Asie et dans les pays du Moyen-Orient (B).
A- L'exemple de la Tanzanie en Afrique
En Afrique, la loi de Tanzanie de 2008 offre un modèle législatif avancé sur la protection du
bien-être animal621. Celle-ci mérite d'être présentée sur le fond comme sur la forme.
Sur le fond, cette loi couvre largement tous les animaux non-humains (vertébrés et
invertébrés)622. De plus, elle établit une liste complète de définitions des expressions
couvertes par son champ d'application623. Elle consacre également des "Principes
fondamentaux du bien-être animal" qui concernent à la fois les principes directeurs
619 Sur le débat entourant la question de la personnification juridique des animaux, voir : G. CHAPOUTHIER, "Pour
ou contre une personnalité juridique des animaux", dans BURGAT, F. (dir.), L'animal dans nos sociétés,
Documentation française, 2004, pp. 47-49. 620 Voir MICHEL, M. et E. SCHNEIDER KAYASSEH, "The Legal Situation of Animals in Switzerland: Two Steps
Forward", One Step Back - Many Steps to Go", Journal of Animal Law, vol.VII, pp.1-43, May 2011, p.42. 621 Animal Welfare Act, 2008 (n°19 of 2008). 622 Id., Art.3 : " "animal" means any vertebrate or invertebrate other than a human being". 623 Id. Cette loi fournit notamment des définitions légales pour les animaux "domestiques", "captifs" et "de compagnie"
ainsi que pour les concepts de "sensibilité" et de "mauvais traitements".
102
mondialement reconnus que sont : les "5 libertés" (en matière d'élevage) et les "3R" (en
matière d'expérimentation). Le principe des "5 libertés" est consacré en ces termes :
« (1) Absence de soif, la faim et la malnutrition ; (2) Absence de peur et de
détresse ; (3) Absence d'inconfort physique ; (4) Absence de douleur, de blessure
et de maladie ; et (5) Liberté d'exprimer des modes normaux de
comportement »624.
Ce principe est un devoir pour les gestionnaires du bétail, comme le principe des "3 R" est un
devoir pour les expérimentateurs selon la formule suivante :
« L'expérimentation animale favorise la réduction du nombre d'animaux utilisés,
le raffinement des méthodes expérimentales et le remplacement des animaux par
des techniques non-animales" (souligné par nous pour indiquer la signification
des 3 R) »625.
Elle consacre aussi d'autres grands principes de protection que sont la reconnaissance de : la
sensibilité animale, l'importance d'assurer le bien-être animal, et la triple obligation de soin,
de respect et de protection de l'animal. S'appuyant sur les connaissances éthiques et
scientifiques actuelles, comme sur les dernières avancées juridiques, ces derniers principes
fondamentaux sur le bien-être animal sont énoncés en ces termes :
- « Un animal est un être sensible » ;
- « Le bien-être animal est un aspect important de toute société développée qui reflète le degré
moral et la maturité culturelle de cette société » ;
- « Le bien-être animal améliore la productivité du bétail et l'être humain a une obligation
morale de soin, de respect et de protection de l'animal »626.
Notons que les principes posés par la loi tanzanienne sont formulés en termes universels. En
effet, il n'y est pas seulement question de la société tanzanienne, mais de toute société. En ce
sens, non seulement le citoyen tanzanien, mais l'être humain en général, aurait des obligations
morales envers les animaux. En plus de s'inscrire dans une dynamique moderne en matière de
protection juridique des animaux, il semble tout à fait possible d'imaginer que ces principes
puissent figurer dans un instrument juridique universel sur la protection du bien-être animal.
624 Id., Art. 4 (a) (traduction libre). Chiffres ajoutés par nous pour souligner les 5 libertés consacrées. 625 Id., Art. 4 (c) (traduction libre). Souligné par nous afin d'indiquer la signification des 3 "R". 626 Id., Art. 4 (b) (traduction libre).
103
Sur la forme, cette loi établit une série d'obligations et d'interdictions, par catégories
clairement divisées. La partie sur la garde des animaux concerne : les animaux de ferme, les
animaux de compagnie, le transport des animaux, les soins aux animaux blessés et l'abattage
des animaux627. Les parties sur le traitement des animaux concernent : l'utilisation des
animaux de travail et de spectacle628, ainsi que l'expérimentation animale (opérations
chirurgicales et biotechnologie)629. Les obligations explicites qui transparaissent de ces
dispositions sont notamment : le devoir de soins (envers les animaux de compagnie et de
travail630), ainsi que l'abattage humain des animaux d'élevage (c'est-à-dire le plus indolore et
instantané possible)631. Certaines interdictions sont aussi prévues, contre le fait de surmener
un animal de travail et contre les combats d'animaux (à l'image des dispositions prévues dans
les premières lois anti-cruauté anglo-saxonnes)632. Puisque la Tanzanie est un pays du
Commonwealth, les ONG britanniques ont pu aider à la rédaction de lois comme celle-ci.
En plus de cet exemple, d'autres lois sur le bien-être animal ont été adoptées à travers le
monde.
B- Les autres exemples à travers le monde
Parmi les autres pays du monde qui ont adopté des lois de protection du bien-être des animaux
ces dernières années, citons les pays d'Amérique latine (1), d'Asie et du Moyen-Orient (2).
1- L'Amérique latine
Au Chili, la loi sur la protection des animaux de 2009633 vise à :
« connaître, protéger et respecter les animaux comme des êtres vivants faisant partie de
la nature, afin de leur offrir un traitement approprié et leur éviter des souffrances
inutiles »634.
Cette loi prévoit notamment une obligation de soins, d'alimentation et d'hébergement adéquats
des animaux sous sa garde ; l'interdiction de restreindre la liberté des animaux sauvages sans
nécessité ; et de bien traiter les autres animaux en cours de transport (dans les meilleures
627 Id., Part III, "Keeping of Animals : a) Farm animals ; b) Companion animals ; c) Transportation of animals ; d) Care
of injured animals ; e) Slaughtering of animals". 628 Id., "Part IV : The use of an Animal for Working and Entertainment". 629 Id., "Part V : Surgical and Operations, Biotechnology and Animal Experiment". 630 Id., "Art.16 : Companion animal and duty to care" ; "Art.33 : Duty of care to a working animal". 631 Id., "Art.29 : Humane slaughtering". Précisons que, bien que le principe de l'abattage "humain" soit une mise à mort
"instantannée" ("instantaneous killing"), cette loi autorise l'abatage religieux comme exception à son article 30
("Approval of religious slaughter"). 632 Id., "Art.34 : Working animal not to be overworked" ; "Art.36 : Animal fight". 633 Ley sobre Protección de Animales, 2009 (n° 20.380). 634 Id., Art.1 : "Esta ley establece normas destinadas a conocer, proteger y respetar a los animales, como seres vivos y
parte de la naturaleza, con el fin de darles un trato adecuado y evitarles sufrimientos innecesarios" (traduction libre).
104
conditions) comme les animaux en captivité (en prévoyant des installations appropriées dans
les cirques, les zoos etc.)635. Cette loi réglemente aussi la vivisection636, ainsi que l'abattage
des animaux destinés à fournir de la viande, des fourrures, des plumes ou d'autres produits637.
Quant à la loi adoptée au Venezuela l'année suivante en 2010638, celle-ci présente l'intérêt
d'établir une définition de la protection du bien-être animal. Bien que limitée aux animaux
domestiques, elle pourrait se voir étendue à tous les animaux puisqu'elle consiste en des :
« mesures garantissant l'intégrité physique et psychologique des animaux [...] selon
leurs besoins, dans des conditions n'impliquant pas de mauvais traitement, d'abandon,
de dommage, de cruauté ou de souffrance »639.
Si ces illustrations sont relevées quant à leur pertinence, d'autres pays d'Amérique latine ont
adopté des lois de protection du bien-être animal depuis les dernières années. Il s'agit
notamment de l'Uruguay en 2009, du Nicaragua en 2011, de Panama en 2012 et du Paraguay
en 2013640. Ces lois insistent sur la protection de la vie et la responsabilité envers les animaux
sous sa garde, en particulier sur les animaux domestiques et de compagnie. Notons que des
projets de lois sont également en cours au Honduras641, en Bolivie642, en Equateur643 et au
Salvador644. Ces exemples confirment que les pays d'Amérique latine se sentent désormais
pleinement concernés par les problèmes relatifs au bien-être des animaux et comptent de plus
en plus se doter de lois en la matière.
635 Id., Art. 3, 4 et 5 (traduction libre). 636 Id., Título IV : "De los experimentos en animales vivos" (traduction libre). 637 Id., Art. 11 (traduction libre). 638 Ley para la Protección de la Fauna Doméstica libre y en cautiverio, 2010. 639 Id., Art.3 : "Se entiende por bienestar de la fauna doméstica, aquellas acciones que garanticen la integridad física y
psicológica de los animales domésticos de acuerdo con sus requerimientos, en condiciones que no entrañen maltrato,
abandono, daños, crueldad o sufrimiento" (traduction libre). 640 Voir respectivement: Ley de protección, bienestar y tenencia responsable de los animales, 2009 ; Ley para la
protección y el bienestar de los animales domésticos y animales silvestres domesticados, 2011 ; Ley deproteccióna
losanimales domésticos, 2012 ; Ley de protección y bienestar animal, 2013. 641 Le 20 janvier 2014, la loi de protection des animaux ("Ley de Protección de Animales")
a été approuvé par les parlementaires du Honduras. Voir El Heraldo, " Masiva aprobación de contratos y decretos",
http://www.elheraldo.hn/csp/mediapool/sites/ElHeraldo/AlFrente/story.csp?cid=566407&sid=300&fid=209 (date
d'accès : 23.11.2014). 642 Voir Proyecto de ley modificado n°185 sobre la protección de los animales, en ligne:
http://www.animalessos.org/pag/nota/PL-185%20PROTECCION%20DE%20ANIMALES.doc (date d'accès :
23.11.2014). 643 Proyecto de Ley Orgánica de Bienestar Animal (LOBA). Voir TELESUR, "Ecuador: Presentarán Ley de
Protección Animal", 28.10.2014, en ligne : http://www.telesurtv.net/news/Ecuador-Presentaran-Ley-de-Proteccion-
Animal-20141028-0028.html (date d'accès : 23.11.2014). 644 Voir ARENA, "Proyecto de ley especial de bienestar y protección animal domésticos", 20.05.2014, en ligne :
http://www.arena.org.sv/noticias/684-proyecto-de-ley-especial-de-bienestar-y-proteccion-animal-domesticos.html
(date d'accès : 23.11.2014).
105
2- Les autres pays en Asie et au Moyen-Orient
Le droit du bien-être animal est désormais de plus en plus présent en Amérique latine et dans
le monde entier. Même si, d'une manière générale, plusieurs pays d'Afrique, d'Asie et du
Moyen-Orient sont encore dépourvus de lois protectrices, les premiers pas vers l'adoption de
lois pro-bien-être ont été faits partout dans le monde. Nous avons vu que les pays africains
dotés de lois protectrices concernent pour la plupart ceux qui ont été encore sous influence
britannique, laquelle exerce une force motrice incontestable dans ces pays. Concernant l'Asie,
nous avons également vu que de plus en plus de pays adoptent des lois de protection.
Parmi les plus récentes, citons notamment la loi adoptée au Népal en 2011645 ainsi que la loi
adoptée par la Thaïlande contre la cruauté et pour le bien-être animal en 2014646.
Pour les pays du Moyen-Orient, citons la loi sur le bien-être animal adoptée par les Émirats
Arabes Unis en 2007647. Cette loi moderne fait suite aux précédentes lois anti-cruauté
adoptées au Koweït en 1960648 et au Qatar en 1974649.
En plus des lois adoptées, d'autres sont en cours d'élaboration, comme en Inde et en Chine.
§2) Les cas des projets de révision et d'élaboration
L'Inde souhaite réviser sa législation pour l'actualiser vers une plus grande protection du bien-
être animal (A), et la Chine a annoncé en 2009 son intention d'adopter une loi à ce sujet (B).
A- L'exemple du projet de révision en Inde
En Inde, une loi sur le bien-être animal est actuellement en projet afin d'actualiser les
dispositions de sa loi de 1960, conformément aux nouvelles dispositions existantes en la
matière. En particulier, la version prévisionnelle de 2011650 ajoute à la loi en vigueur les
devoirs des personnes en charge des animaux, selon la formulation suivante :
« il sera du devoir de toute personne ayant la garde ou la charge d'un animal », en
tant que « propriétaire ou autre », d'assurer le « bien-être de cet animal » et de lui
éviter tout « traumatisme, douleur ou la souffrance »651.
645 Animal Welfare and Protection Act, 2011. 646 Animal Anti-Cruelty and Welfare Law, 2014. 647 Federal Law on Animal Welfare, 2007. 648 Art. 253 of the Criminal Law, 1960. 649 Law on the abandoning and neglecting of animals, 1994. 650 Draft "Animal welfare Act", 2011, en ligne : http://www.awbi.org/awbi-pdf/draftawact2011.pdf. 651 Id., Art. 3 : "Duties of persons having charge of animals : It shall be the duty of every person having the care or
charge of any animal, whether as owner or otherwise, to ensure the welfare and well-being of such animal and to
prevent the infliction of trauma, pain or suffering upon such animals" (traduction llibre).
106
Elle consacre aussi deux nouveaux chapitres sur l'expérimentation animale et les animaux de
spectacle652. Enfin, les peines applicables sont augmentées. Elles passent de 100 roupies et 3
mois de prison dans la loi actuelle, à 5000 roupies et 3 ans de prison (pour une première
infraction) et 75000 roupies et 5 ans de prison (en cas de récidive)653. Même si l'adoption de
cette nouvelle loi n'est pas encore certaine, elle semble fort probable en regard de la dévotion
constante de l'Inde pour la protection du bien-être animal depuis une époque ancestrale.
B- L'exemple du projet de loi en Chine
Dans le cadre de la conscientisation croissante des problèmes de souffrance animale dans le
monde, la Chine est en train de s'éveiller à la protection des animaux654. De nos jours, de plus
en plus de protestations s'élèvent envers certaines pratiques de la part des pays étrangers,
comme de la part de la population655 et plus particulièrement de la jeune génération chinoise
qui réclame une plus grande protection des animaux face à la cruauté656. Le gouvernement
chinois a ainsi annoncé en 2009 la préparation d'une loi contre la maltraitance animale657.
Cette loi mettra-t-elle un terme aux problèmes éthiques les plus décriés mondialement ?
Citons la cruauté des méthodes d'élevage et de mise à mort des chats et chiens (pour leur
viande et leur fourrure) ; des fermes d'ours pour leur bile (pour la médecine traditionnelle) ;
ou les élevages intensifs de palmipèdes pour la production de foie gras658. À cet égard, il
parait peu probable que les intérêts économiques de ce pays, en pleine croissance sur la scène
mondiale, soient laissés au profit de la protection du bien-être des animaux659. Mais cette
initiative gouvernementale témoigne pourtant d'une vraie révolution animale en marche660.
652 Id., Chap. V : "Experimentation of Animals" et Chap. 6 : "Performing Animals". 653 Id., Art. 28, b). 654 Voir LITTLEFAIR, P., "Why China is waking up to animal welfare?", dans TURNER, J. et J. D'SILVA (dir.),
Animals, ethics, and trade: the challenge of animal sentience, Earthscan, 2006, pp. 225-237. 655 Voir WEI, S., "Animal welfare legislation in China: public understanding and education", dans TURNER, J. et J.
D'SILVA (dir.), Animals, ethics, and trade: the challenge of animal sentience, Earthscan, 2006, pp. 101-110. 656 LEVITT, T., "Younger generation face long wait for law-change on animal cruelty", Chinadialogue, 26.02.2013. 657 Voir WEDDERBURN, P., "China unveils first ever animal cruelty legislation", The Telegraph, 18.09.2009. 658 Proportionnée aux restrictions européennes. La chine est devenue le 2è producteur mondial de foie gras après la
France. 659 Certains avanceront d'autant plus que les droits de l'homme n'y sont déjà pas respectés 660 NEALE, D., "China’s animal revolution rises", Red pepper, Sept. 2009, en ligne :
http://www.redpepper.org.uk/China-s-animal-revolution-rises/ (date d'accès : 16.10.2012).
107
- Conclusion du Chapitre 2
Alors que la base anti-cruauté demeure, les nouvelles lois pro-bien-être, visant plus
explicitement le bien-être animal, constituent un nouveau modèle de protection. En ce sens,
ces nouvelles législations insistent sur les bons traitements à prodiguer aux animaux, en plus
d'interdire les mauvais traitements de ceux-ci. Précisons que ces nouvelles législations ne sont
pas limitées aux lois stricto sensu puisqu'elles incluent aussi des codes de conduite sur le
bien-être animal (typiques des pays anglo-saxons) et certaines dispositions constitutionnelles.
Nous verrons aussi dans quelle mesure ces nouvelles lois témoignent d'une évolution
croissante de l'approche protectrice, face à l'approche répressive, en conclusion de ce titre.
108
Conclusion du Titre 1
Ce premier titre a permis de catégoriser des systèmes de droit interne propres au droit du bien-
être animal et de déceler une approche toujours plus protectrice dans les lois du monde entier.
- Les grands systèmes du droit du bien-être animal dans le monde
En droit animal positif, notre étude exhaustive sur l'évolution des législations nationales a
permis de dégager des systèmes juridiques particuliers dans le monde. En effet, la
qualification de "systèmes juridiques" permet de catégoriser les principaux groupes de pays
qui revêtent des caractéristiques spécifiques quant à leurs législations protectrices des
animaux. Précisons néanmoins que les systèmes identifiés ne viennent pas se substituer aux
systèmes juridiques classiques que sont notamment les institutions du droit commun (ou
"common law" dans les pays anglo-saxons), du droit romano-germanique, du droit coutumier
ou du droit religieux661.
Il nous est possible d’identifier trois catégories de systèmes, à savoir : les systèmes pionniers
et désormais leaders, les systèmes intermédiaires et enfin, les nouveaux systèmes émergents.
- Les systèmes pionniers et désormais leaders
Les systèmes pionniers et désormais leaders sont les pays anglo-saxons et les pays européens.
. Les pays anglo-saxons
Les pays anglo-saxons apparaissent comme les véritables pionniers du droit animal. À ce jour,
les législations anglo-saxonnes sont également parmi les plus avancées. Ces pays se
distinguent aussi à travers leurs codes de bien-être adoptés comme réglementation supplétive
aux lois protectrices pour différentes espèces et domaines d'activité (en Angleterre, au
Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande). Ces pays disposent aussi des sanctions les plus
fortes au monde en cas de cruauté intentionnelle envers les animaux : une amende maximale
de 500 000$ est prévue pour les personnes morales en Nouvelle-Zélande662, et la peine de
prison encourue peut aller jusqu'à 10 ans en Louisiane et en Alabama aux États-Unis.
. Les pays européens
La condition de publicité caractérise les premières lois anti-cruauté des pays européens. Quant
aux nouvelles lois européennes, celles-ci mettent un point d'honneur à la protection de la vie,
de la santé, de la dignité, mais aussi et surtout du bien-être des animaux. Dans le cadre de ces
661 Voir CUNIBERTI, G., Grands systèmes de droit contemporains, LGDJ-Lextenso éd., 2011. 662 Notons qu'il est existe aussi de fortes peines d'amendes dans d'autres pays comme 160 000 euros en Italie pour les
combats d'animaux ou 200 000$ à Hong Kong pour les cas de cruauté les plus graves. Voir les références à l'Annexe 1.
109
nouvelles législations européennes, relevons aussi la suppression des peines de prison et
l'extraction de l'animal de la catégorie des choses dans les codes civils de certains pays, en
plus de la constitutionnalisation de principes comme la protection en Allemagne, la dignité en
Suisse et le bien-être des animaux au Luxembourg. Notons que ces principes sont également
aux fondements mêmes des lois de protection des animaux dans ces pays, comme l'est le
principe de valeur intrinsèque des animaux aux Pays-Bas.
À l'inverse, d'autres pays du vieux continent se distinguent en restant attachés au modèle anti-
cruauté. En outre, certains autorisent encore les combats d'animaux comme les corridas dans
les régions de tradition hispanique (Espagne, Portugal et Sud de la France) et les combats de
coqs (comme au Nord de la France et dans les îles françaises).
- Les systèmes intermédiaires
Il s’agit des pays où l'influence coloniale semble avoir été l'amorce protectrice : dans la région
indo-pakistanaise, les pays africains et les îles océaniennes et caribéennes.
Ces systèmes particuliers concernent les pays indo-pakistanais, les anciennes colonies
britanniques, les pays asiatiques et les pays sud-américains.
. Les pays de la région indo-pakistanaise
La région indo-pakistanaise est imprégnée d'une culture bouddhique ancestrale. En plus de
l'influence britannique sur ses anciennes colonies, cette culture de la compassion envers toute
forme de vie, et en particulier les animaux, a permis l'adoption de lois de protection précoces
comme celle de 1890 en Inde et au Pakistan, avant celle de 1920 au Bangladesh.
. Les anciennes colonies britanniques
Les pays africains et océaniens ont eu des lois relativement précoces grâce à l'influence
britannique sur ses anciennes colonies (comme les îles Tonga en 1918 et la Zambie en 1920).
- Les systèmes émergents
Ceux-ci sont représentés par les pays d'Asie et surtout ceux d'Amérique latine.
. Les pays asiatiques
Les premières lois adoptées dans les pays asiatiques ont tout d'abord reflété l'influence anglo-
saxonne exercée sur les anciennes colonies de l'Empire britannique, comme à Hong Kong.
Dans les nouvelles lois, l'influence européenne semble manifeste à l'image du principe de
dignité consacré dans la loi coréenne, lequel est issu de la législation Suisse dans le cadre de
110
l'expérimentation animale663. De plus, ces pays sont caractérisés par un ensemble de
problèmes éthiques fortement décriés sur la scène internationale. Citons notamment la
consommation de viande de chien, la fourrure de chat et de chien, les fermes d'ours pour le
prélèvement de leur bile, la chasse aux cétacés, la surpêche des requins pour leurs ailerons.
Récemment en Chine s'est même développée la gadgétisation d'animaux, où de petits animaux
comme des bébés-tortues, salamandres ou poissons, sont enfermés dans une pochette
hermétique pour servir de porte-clefs vivants, où ils ne survivent que quelques heures.
. Les pays sud-américains
Dans les pays d'Amérique du Sud, certaines lois précoces ont aboli la corrida, alors que
d'autres autorisent encore cette pratique, à l'image du clivage qui existe aussi entre les pays
européens. Le Brésil, premier pays ayant adopté un décret de protection des animaux sur ce
continent, a également constitutionalisé l'interdiction de cruauté envers les animaux664. Quant
aux nouvelles lois sur le bien-être animal dans cette région du monde, celles-ci se
caractérisent notamment par l'interdiction d'utiliser les animaux dans les cirques.
Contrairement à l'influence externe des pionniers anglo-saxons et européens dans d'autres
régions du monde (principalement en Afrique, en Asie et en Océanie), l'Amérique latine
dispose d'une protection autonome en progrès croissant.
Selon les résultats d'une étude sur le droit animal à l'échelle mondiale, les régions qui
accordent la plus haute protection seraient l'Europe, l'Amérique du Nord, l'Australie et la
Nouvelle-Zélande ; alors que les régions qui accordent la plus faible protection seraient
l'Asie, l'Afrique et les Caraïbes (ainsi que l'Amérique latine, à l'époque où cette étude a été
réalisée, alors que cette protection est devenue plus importante depuis ces dernières
années)665.
- L’évolution vers une approche plus protectrice des animaux
Le passage du concept de cruauté (initialement) à celui de bien-être animal (actuellement),
témoigne de l'évolution d'une stratégie répressive des mauvais traitements, vers une stratégie
plus protectrice insistant sur les besoins et les bons traitements des animaux. Il ne s'agit pas
d'un changement radical car la base anti-cruauté demeure comme fondement originel dans la
plupart de ces lois. Néanmoins, certaines s'en démarquent désormais en évitant l'emploi de
termes emprunts d'une connotation négative comme le terme de "cruauté". De plus, il existe
663 Animal Protection Act 1991 (révisée en 2008), Art. 13. 664 Federal Decree on Anti-Cruelty 1934 et Constitution brésilienne de 1988 (Art.225 (1), §7). 665 TRENT, N., EDWARDS, S., FELT, J. et K. O’MEARA, “International Animal Law, with a Concentration on Latin
America, Asia, and Africa”, dans SALEM, D. J. et A.N. ROWAN, The State of the Animals III, 2005, pp. 65-77.
111
un fort contraste entre certaines nouvelles lois européennes, qui vont vers une sorte de
décriminalisation des infractions de cruauté en supprimant les peines de prison, et les lois
anglo-saxonnes qui renforcent toujours plus leurs sanctions, y compris les peines de prison.
Ainsi les systèmes anglo-saxons et européens continuent à se distinguer même s'ils demeurent
des pionniers, aujourd'hui leaders, en matière de protection juridique des animaux.
La lecture de l'intitulé, comme du contenu, des nouvelles lois protectrices des animaux, révèle
que les interdictions laissent de plus en plus place aux obligations, et que la notion de cruauté
laisse une place de plus en plus importante au concept de bien-être animal. Alors que les
interdictions de cruauté étaient les seules présentes dans les premières lois, celles-ci sont
désormais complétées par des obligations visant à assurer le bien-être des animaux. Les
interdictions de maltraitance semblent ainsi coexister de plus en plus avec le devoir de bien
traiter les animaux. Le concept de cruauté, synonyme d'abus et de mauvais traitements, réfère
à la culpabilité criminelle annonçant la répression pénale. Or, cette connotation négative
limitée à la formulation d’interdits semble évoluer vers une vision plus positive de la
protection animale, à l'image notamment des lois des pays européens les plus progressistes.
En effet, conjointement à la notion de protection des animaux, de leur vie, de leur santé voire
de leur dignité, le concept de bien-être animal est de plus en plus mis en avant. De celui-ci
découlent, entre autres, des obligations de responsabilité, de soins et de traitements appropriés
des animaux sous sa garde.
Alors que les lois dont le contenu est axé sur l'interdiction de cruauté se placent plus du côté
des êtres-humains, les lois de protection du bien-être animal se placent plus du côté des
animaux. En d'autres termes, les premières lois anti-cruauté formulaient des interdictions de
maltraitance des animaux du point de vue de la moralité humaine, alors que les dernières
formulent des obligations afin d'assurer leur bien-être, du point de vue de l'intérêt des
animaux à moins souffrir et à être bien traités. De l'interdiction de cruauté envers les animaux
s'opère un changement de paradigme vers l'obligation, pour les êtres humains, de prendre
aussi certaines mesures en vue d'assurer leur bien-être, ou au moins, de réduire leur mal-être.
En outre, il convient de relever que trois pays dans le monde consacrent des principes
fondamentaux sur la protection du bien-être animal depuis le début des années 2000 :
la Turquie depuis 2004, en consacrant des droits et libertés pour les animaux ; l'Ukraine
depuis 2006, en insistant sur l'incompatibilité de la cruauté envers les animaux avec la
moralité humaine ; et la Tanzanie depuis 2008, en consacrant certaines universalités comme
l'importance de protéger le bien-être animal. Précisons que les principes des 5 libertés et 3 R
112
sont consacrés dans plusieurs pays, soit d'une manière explicite, comme en Tanzanie et en
Corée, soit d'une manière plus implicite, comme en Suisse.
Ainsi, retenons surtout l'évolution terminologique de la cruauté au bien-être animal,
accompagnée de l'évolution stratégique de la répression punitive à la protection positive666.
Le tournant en faveur de la protection animale s'observe non seulement à travers la
multiplication et l’expansion mondiale des lois anti-cruauté et désormais pro-bien-être, mais
aussi au plus niveau dans les constitutions et dans les fondements juridiques des codes civils
de certains pays. Comme les législations protectrices générales observées un peu partout dans
le monde, ces dispositions fondamentales ne sont pas non plus réservées au pays occidentaux.
En effet, la Colombie mentionne désormais la sensibilité de l'animal dans son Code civil
(comme en France et au Québec) en plus de la déréification opérée dans les codes civils de
certains pays européens (Autriche, Allemagne, Suisse, Pays-Bas et Catalogne)667.
Certains pays comme la Nouvelle-Zélande évoquent également la sensibilité des animaux668
dans leurs lois protectrices générales. D’abord prévu à l’Art. L.214-1 du Code rural français,
le caractère sensible (ou "sentient") des animaux a été consacré plus récemment dans les
législations et au niveau des codes civils susmentionnés entre 2014 et 2015.
Comme l’exprime Fabien Marchadier, le fait de reconnaître à l’animal son caractère sensible :
« Ne constituerait-il pas le point de départ d’une législation toute empreinte de la
sensibilité animale conduisant à terme à l’élaboration d’un véritable statut civil,
d’une condition juridique de l’animal ? »669.
Cette nouvelle qualification de l’animal sensible n’est pas seulement symbolique puisqu’elle
extrait celui-ci des choses (a contrario insensibles) et vient ouvrir la porte à un statut
juridique de l’animal, dont la sensibilité emporte des implications qu’il convient de définir et
de traduire à tous les niveaux législatifs comme dans le traitement général des animaux en
droit.
La protection des animaux se trouve également renforcée de part sa consécration au plus haut
niveau légisatif dans les constitutions de plusieurs pays du monde.
666 Notons que la dernière loi adoptée en Thaïlande en novembre 2014 présente l'intérêt de mélanger les deux notions
et approches anti-cruauté et pro-bien-être dans son titre même : "Animal Anti-cruelty and Welfare Act". 667 Voir supra le Chapitre 2, Section 2, §2, B. 668 Replaced, on 10 May 2015, by section 4 of the Animal Welfare Amendment Act (No 2) 2015 (2015 No 49) :
"(a) to recognise that animals are sentient". 669 MARCHADIER, F., "L’animal du point de vue du droit civil des personnes et de la famille après l’article 515-14
du Code civil", Revue Semestrielle de Droit Animalier, pp.433-443, RSDA 1/2015, p. 439.
113
En ce sens, les dispositions constitutionnelles des pays européens prévoient le devoir général
de protection des animaux en Allemagne, de respect de l’intégrité des animaux en Suisse et du
bien-être animal au Luxembourg670. Les constitutions de l'Inde, du Brésil et d'Egypte
prévoient également la protection de l'animal comme devoir suprême de l'Etat et des citoyens,
à savoir respectivement le devoir de compassion, de non-cruauté et d'humanité671.
Le droit du bien-être animal n'est donc pas un droit seulement occidental mais bien un droit
mondial. Et la protection des animaux ne cesse de se renforcer dans un nombre croissant de
pays, à tous les niveaux.
En plus du législateur, le juge prend également la protection de l'animal et de son bien-être de
plus en plus au sérieux. En effet, les décisions vont toujours plus loin, tant dans la sévérité des
peines prononcées en cas de cruauté, que dans les avancées concernant le statut des
animaux672. Bien que les juges soient plus enclins à se prononcer en faveur des animaux, ces
avancées demeurent toutefois relatives. La progression se fait lentement, mais sûrement.
En effet, la question du bien-être animal est traitée avec un égard croissant sur le plan du droit.
Contrairement aux droits nationaux qui sont historiquement passés par les lois anti-cruauté
avant de faire du bien-être animal la pierre angulaire des législations protectrices, le droit
européen a d’emblée visé la protection du bien-être animal. La consécration des animaux
comme "êtres sensibles" est également présente au niveau communautaire depuis 2008.
De même que la protection du bien-être animal fait l'objet d'une évolution patente au niveau
national, nous verrons que celle-ci fait l'objet d'une consolidation croissante en droit
européen.
670 Voir supra le Chapitre 2, Section 2, §2, B. 671 Voir supra le Chapitre 1, Section 2, §1, A. 672 Par exemple la decision précitée rendue à Buenos Aires en Argentine accordant le statut de sujet de droits à une
Orang-Outang nommée Sarah. BBC, "Court in Argentina grants basic rights to orangutan", BBC News, 21.12.2014.
114
Titre 2
LA CONSOLIDATION CROISSANTE DU DROIT EUROPÉEN SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL
Du double régime de protection au renforcement communautaire673
L'Europe est la seule région du monde qui dispose d'un corpus juridique spécifiquement
consacré à la protection du bien-être animal. Cette protection allouée par le droit européen
émane de ses institutions politiques que sont : d'une part, le Conseil de l'Europe (constitué de
47 membres à ce jour et dont les instruments forment le droit européen au sens strict) et
d'autre part, l'Union européenne (constituée de 28 membres à ce jour et dont les instruments
forment le droit communautaire). Nous verrons tout d'abord que le bien-être animal fait l'objet
d'un double régime de protection dans des domaines communs du droit européen et du droit
communautaire (Chap. 1). Nous présenterons ensuite le renforcement constant du régime
communautaire à travers les diverses mesures adoptées par l'Union européenne (Chap. 2).
673 Les sources documentaires pour ce second chapitre figurent notamment dans la bibliographie annexée sous le titre :
"La protection du bien-être animal en droit européen".
115
CHAP. 1- LA DOUBLE PROTECTION EUROPÉENNE ET COMMUNAUTAIRE
DU BIEN-ÊTRE ANIMAL674
Le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont adopté des instruments de protection du
bien-être des animaux dans des domaines communs. Au départ, ces instruments ont porté sur
le transport, l'élevage et l'abattage des animaux de production (S.1), avant de porter sur
l'expérimentation animale et les animaux de compagnie (S.2).
S.1- La protection européenne et communautaire des animaux de production
Afin d'améliorer le sort des animaux de production, les instances européennes se sont tout
d'abord penchées sur le transport international (§1), avant de réglementer leurs conditions
d'élevage (§2) et enfin d'encadrer leur mise à mort ou abattage (§3).
§1) La réglementation européenne et communautaire sur le transport
Dès 1935, la Société des Nations (précédant l'ONU avant 1945), a adopté la Convention
internationale concernant le transit des animaux, des viandes et des autres produits d'origine
animale675. Si cette convention mérite d'être mentionnée à des fins indicatives, celle-ci ne sera
pas traitée dans cette étude sachant qu'elle a été adoptée dans le but de garantir la qualité des
aliments, et non afin de protéger le bien-être des animaux. Au contraire, celui-ci constitue le
leitmotiv des instruments du Conseil de l'Europe (A) et de l'Union européenne (B).
A- Les instruments du Conseil de l'Europe sur le transport international
Premier instrument de protection des animaux adopté au niveau européen, la Convention sur
le transport international de 1968 (1) a fait place à une nouvelle convention en 2003 (2).
1- Convention européenne sur la protection des animaux en transport international de 1968676
Il y a plus de 50 ans, le Conseil de l'Europe a été la première organisation inter-
gouvernementale à se préoccuper du sort des animaux utilisés par les humains677.
674 Le droit européen concerne les instruments du Conseil de l'Europe et le droit communautaire ceux de l'Union
européenne. Les ouvrages de référence pour ce chapitre sont : BROOM, D.M. et al, Le bien-être animal, Strasbourg,
éditions du Conseil de l'Europe, 2006 ; MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-
delà de la distinction entre les hommes et les choses, Pédone, 2009 et WILKINS, D.B., Animal welfare in Europe :
European legislation and concerns, The Hague, Kluwer Law International, 1997. 675 Convention internationale concernant le transit des animaux, des viandes et des autres produits d'origine animale,
Genève, 20 février 1935. 676 Convention européenne sur la protection des animaux en transport international (n°65), ouverte à signature le
13/12/1968 et entrée en vigueur le 20/2/1971 [ci-après : "Convention transport de 1968"] . 677 AUSEMS, E., "Le Conseil de l’Europe et la protection des animaux", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal,
éditions du Conseil de l’Europe, pp. 249-271, 2006, p.249.
116
En effet, dès 1961, l'Assemblée parlementaire adressait une recommandation officielle au
Comité des Ministres (organe exécutif du Conseil de l'Europe) dans laquelle elle estimait que:
« le traitement humain des animaux constitue l'une des caractéristiques de la
civilisation occidentale »678.
Initialement préoccupée par les conditions dans lesquelles les animaux étaient transportés sur
de longues distances, l'Assemblée réclama l'élaboration d'une convention de protection679.
Ainsi fut adoptée la première Convention européenne sur la protection des animaux en
transport international en 1968. De manière novatrice à l'époque, le préambule de cette
convention indique que le bien-être des animaux fait partie des "idéaux" et des "principes"
communs que les membres du Conseil de l'Europe doivent promouvoir et sauvegarder, et ce
afin d'éviter, dans la mesure du possible, toute souffrance aux animaux transportés680. De
plus, cette convention émet pour la première fois l'idée que l'adoption de dispositions
communes constitue un "progrès" en faveur de la protection du bien-être animal au niveau
européen681. Cette idée est à la base des autres conventions adoptées par le Conseil de
l'Europe, ainsi que des instruments adoptés par l'Union européenne.
Afin que les animaux souffrent le moins possible682, cette convention impose que les délais de
transport soient réduits au minimum683. Tel est la ligne directrice de la réglementation
européenne visant la protection du bien-être des animaux transportés sur de longues distances.
Présentant un certain manque d'efficacité pour atteindre l'objectif visé, cette convention a été
remplacée par une nouvelle en 2003.
2- La nouvelle convention sur la protection des animaux en transport international de 2003684
Le texte de 2003 a été conçu comme une convention-cadre établissant les conditions de
transports applicables à toutes les espèces d'animaux vertébrés685.
678 Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe, Recommandation 287 (1961) relative aux transports
internationaux d'animaux, Préamb., al.2. 679 Id., al.4 : "Recommande au Comité des Ministres d'élaborer une convention relative à la réglementation des
transports internationaux d'animaux, fondée sur le projet suivant préparé par la Fédération mondiale pour la protection
des animaux". 680 Convention transport de 1968, Préamb., al.2-4. 681 Id., Préamb., al.5. 682 Id., Art.1. 683 Id., Art. 14 : "Les animaux doivent être acheminés aussi rapidement que possible, et les délais, en particulier ceux
de correspondance, doivent être réduits au minimum". 684 Convention européenne sur la protection des animaux en transport international (révisée) (n°193), ouverte à
signature le 6/11/2003 et entrée en vigueur le 14/3/2006 [ci-après : "Convention transport de 2003"]. 685 Voir MERMINOD, J., "Le transport international et l'abattage des animaux", dans BROOM, D.M. et al, Le bien-
être animal, Strasbourg, éditions du Conseil de l'Europe, pp. 59-69, 2006, p.65.
117
Le préambule de la nouvelle convention commence comme la précédente, en ajoutant cette
affirmation générale :
« toute personne a l’obligation morale de respecter tous les animaux et de prendre
dûment en considération leur aptitude à souffrir ».
En plus de cette obligation générale, cette nouvelle convention insiste plus que la précédente
sur la nécessité de sauvegarder le bien-être des animaux686. En ce sens, elle vise à ce que les
animaux soient transportés de façon à préserver leur bien-être et leur santé687. Le bien-être
animal apparaît donc comme une grande priorité dans cette convention, de telle sorte que :
« lorsque les exigences de bien-être des animaux ne peuvent être satisfaites, une
alternative au transport d’animaux vivants doit être mise en œuvre »688.
Afin de renforcer les mesures de protection, celle-ci prévoit aussi des exigences plus
rigoureuses que la convention précédente. Par exemple, une déclaration est obligatoire pour
les transports d'une durée supérieure à 8h689 et les animaux transportés doivent être
préalablement acclimatés pour réaliser le voyage (en particulier les animaux sauvages)690.
D'une manière générale, cette convention prescrit la ligne de conduite selon laquelle :
« Les animaux doivent être traités avec calme et ménagement afin de réduire à un
minimum leur inquiétude et leur agitation, et pour les protéger des douleurs, de la
détresse et des blessures qui peuvent être évitées »691.
Ainsi se trouvent explicitées les notions fondamentales que l'on retrouve dans l'ensemble des
instruments européens, à savoir l'objectif de bien-être des animaux, lié à l'obligation d'éviter
ou réduire les souffrances physiques (douleurs et blessures) et psychologiques (stress et
détresse). Ces notions se retrouvent dans la plupart des instruments de l'Union européenne.
686 Présent dès le préambule, l'objectif de bien-être animal est très présent dans cette convention. 687 Convention transport de 2003, Art.4 (1), l'Article 4 concernant les "Principes fondamentaux de la Convention". 688 Id., Préamb., al.5. Précisons que l'Autriche a même proposé "l'interdiction au niveau de l'Union européenne, du
transport d'animaux vivants", dans DEFFIGIER, C. et H. PAULIAT, "Le bien-être animal en droit européen et
communautaire", dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la
distinction entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, pp.57-79, 2009, p.78. 689 Id., Art.7 : "2) Quand la durée du voyage prévu dépasse huit heures pour le transport des solipèdes domestiques et
des animaux domestiques des espèces bovine, ovine, caprine et porcine, la personne responsable du transport doit
établir un document qui spécifie, entre autres, 4) à quels moments et en quels lieux les animaux transportés ont été
nourris, abreuvés et ont pu se reposer durant le voyage". 690 Id., Art.11 : "1) Les animaux doivent être préparés pour le voyage prévu, être accoutumés à la nourriture qui leur
sera fournie et être capables d’utiliser les systèmes de distribution d’eau et d’aliments. Ils doivent, de façon appropriée,
être abreuvés, alimentés et disposer d’une période de repos. 2) Afin de réduire le stress du transport, le besoin de
certaines catégories d’animaux – par exemple les animaux sauvages - d’être acclimatés au moyen de transport avant le
voyage prévu doit être pris en compte". 691 Id., Art. 14 sur le "Traitement des animaux".
118
B- Les instruments de l'Union européenne sur le transport des animaux
En droit communautaire, deux règlements concernent la protection des animaux pendant le
transport. D'une manière générale, le règlement de 2004 vise à mettre en œuvre les
dispositions de la nouvelle convention du Conseil de l'Europe au sein de l'Union européenne
(1). Plus spécifiquement, le règlement de 2003 vise à garantir le bien-être des bovins par le
biais de l'octroi de restitutions à l'exportation (2).
1- Le Règlement général de 2004 sur la protection des animaux pendant le transport692
Peu après avoir signé la convention européenne sur la protection des animaux en transport
international693, l'Union européenne a adopté un règlement visant à conférer un effet direct à
ces dispositions conventionnelles, tout en précisant certaines exigences supplémentaires694.
Ce règlement s'applique aux transports réalisés à des fins économiques, pour les seuls
"animaux vertébrés vivants", au sein de l'Union européenne695 Il reprend également les
principes de la dernière convention du Conseil de l'Europe. Ainsi, ce règlement exige de
garantir le bien-être des animaux avant et pendant le transport. À l'obligation d'éviter les
souffrances inutiles, tant physiques (comme le fait d'infliger des blessures), que
psychologiques (comme le fait d'effrayer les animaux), il s'agit également de répondre à leurs
besoins spécifiques en matière d'abreuvement, de nourriture, de repos et d'espace, de s'assurer
de la formation du personnel responsable, du bon traitement des animaux (sans violence) et
du caractère approprié des équipements utilisés pour assurer la sécurité des animaux
transportés696.
Mais d'importants problèmes d'application demeurent. Une résolution parlementaire de 2012 a
demandé de meilleures conditions de transport et des sanctions plus strictes à l'encontre des
contrevenants. Alors que le nombre d'animaux transportés dans l'UE a fortement augmenté
entre 2005 et 2009, les conditions de transport restent précaires et un tiers des voyages dure
692 Règlement n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et
les opérations annexes et modifiant les directives 64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) n° 1255/97, J.O. L 3
du 05.01.2005. 693Décision 2004/544/CE du Conseil, du 21 juin 2004, relative à la signature de la convention européenne sur la
protection des animaux en transport international (révisée), J.O. L 241 du 13.7.2004. 694 Celui-ci vient compléter une directive de 1991 et le règlement communautaire de 1997 sur les contrôles aux "points
d'arrêt" (où les animaux sont déchargés lorsqu'ils font l'objet de longs trajets). Voir le Règlement (CE) n° 1255/97
concernant les critères communautaires requis aux points d'arrêt et adaptant le plan de marche visé à l'annexe de la
directive 91/628/CE, J.O. L 174 du 2.7.1997. 695 Id., Art.2 (a), définition des "animaux". 696 Id. Art.3, al.2.
119
au moins 8 heures. Cette résolution en appelle ainsi à une mise en œuvre "adéquate et
uniforme" de la législation existante dans l'ensemble des États membres de l'UE697.
Peu avant l'adoption de ce règlement très détaillé, un autre règlement avait été adopté afin de
protéger plus spécifiquement le bien-être des bovins en cours de transport698.
2- Le Règlement spécifique de 2003 sur le bien-être des bovins en cours de transport699
En cas de non-respect du bien-être des bovins en cours de transport, ce règlement prévoit
comme sanction de supprimer les restitutions à l'exportation. En ce sens, l'octroi des
restitutions en argent est conditionné par l'arrivée des bovins en "bon état"700. Au contraire, si
ceux-ci décèdent ou si une femelle met bas (ou avorte) en cours de transport, ces restitutions
sont supprimées701. Puisqu'il en résulte une perte financière pour le transporteur, celui-ci est
économiquement incité à s'assurer du bien-être des animaux transportés. Ce règlement offre
un exemple intéressant du système économique d'incitation-sanction, pouvant être mis en
place pour encourager les personnes responsables des animaux à respecter leur bien-être.
Après les instruments européens et communautaires qui visent la protection du bien-être des
animaux en cours de transport, présentons désormais les instruments qui régissent l'élevage.
§2) La réglementation européenne et communautaire sur l'élevage
Alors que le Conseil de l'Europe s'est penché sur la protection des animaux dans les élevages
dès les années 1970 (A), la réglementation communautaire date des années 1990 (B).
A- Les instruments du Conseil de l'Europe sur l'élevage
En plus de la convention générale adoptée par le Conseil de l'Europe sur l'élevage des
animaux en 1978 (1), des recommandations spécifiques ont été adoptées concernant les
bovins, les palmipèdes à foie gras et les animaux à fourrure (2).
697"Le Parlement européen réclame une amélioration du transport des animaux", La France agricole.fr, 12.12.2012, en
ligne : www.lafranceagricole.fr/actualite-agricole/bien-etre-animal-le-parlement-europeen-reclame-une-amelioration-
du-transport-des-animaux-65926.html (date d'accès : 7.02.2013). Selon le rapporteur polonais Janusz Wojciechowski :
"Nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour réduire la souffrance des animaux. Notre appel pour des
mesures visant à réduire le temps de transport des animaux, notamment des actions concrètes pour limiter à 8 heures le
transport des animaux vers l'abattoir, prouve que nous nous soucions de leur bien-être". 698 Règlement (CE) n° 639/2003 de la Commission du 9 avril 2003 portant modalités d'application en vertu du
règlement (CE) n° 1254/1999 du Conseil en ce qui concerne les exigences en matière de bien-être des animaux vivants
de l'espèce bovine en cours de transport pour l'octroi de restitutions à l'exportation, J.O. L 093 du 10.04.2003 [ci-
après : "Règlement bovins 2003"]. 699 Règlement (CE) n° 639/2003 de la Commission du 9 avril 2003 portant modalités d'application en vertu du
règlement (CE) n° 1254/1999 du Conseil en ce qui concerne les exigences en matière de bien-être des animaux vivants
de l'espèce bovine en cours de transport pour l'octroi de restitutions à l'exportation, J.O. L 093 du 10.04.2003 [ci-
après : "Règlement bovins 2003"]. 700 Concernant les "restitutions à l'exportation" concernant les "produits relevant de la PAC", voir en ligne :
http://www.douane.gouv.fr/page.asp ?id=360 (date d'accès : 12.11.2012). 701 Règlement bovins 2003, Art.5.
120
1- La Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages702
Selon le même processus que pour la convention européenne sur les transports, la convention
sur la protection des animaux dans les élevages est issue d'une demande de l’Assemblée
parlementaire en 1971703. Comme pour les autres conventions, celle-ci a été élaborée par un
comité d’experts avec la participation d’organisations professionnelles et d’associations de
protection des animaux, ainsi qu’avec celle de la Commission européenne, particulièrement
intéressée par cette initiative dans le cadre de sa politique agricole commune (PAC)704.
Ouverte à signature en 1976, cette convention est entrée en vigueur en 1978. Elle est issue
d'un long processus de codification afin de trouver des points d’accord pouvant donner
naissance à des dispositions conventionnelles acceptées par les différents pays européens en
matière d'élevage705. Majoritairement réticents à faire des concessions sur leurs méthodes
d’élevage, les États comptaient au contraire accroître leur compétitivité dans ce domaine706.
Cette convention couvre largement tous les animaux élevés ou gardés pour la production de
denrées alimentaires, de laine, de peaux, de fourrures ou à d'autres fins agricoles707.
Elle s’applique à l'alimentation, aux soins et au logement des animaux, en particulier dans les
systèmes modernes d'élevage intensif708. En particulier, elle insiste sur le fait que les besoins
physiologiques et éthologiques (ou comportementaux) propres à chaque espèce doivent être
satisfaits, conformément à l'expérience acquise et aux connaissances scientifiques709.
En ce sens, le logement, l’alimentation et les soins doivent être appropriés, les animaux
doivent avoir la liberté de se mouvoir et les conditions ambiantes (ex : éclairage, température,
aération) comme l'intensité du bruit, ne doivent pas nuire aux animaux710. Afin de contrôler le
respect de ces exigences, des inspections quotidiennes doivent être effectuées concernant l'état
de santé des animaux et les installations techniques711.
Cette convention interdit la méthode du gavage pour la production de foie gras en ces termes :
702 Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages (n°87), ouverte à signature le 10/03/1976
et entrée en vigueur le 10/09/1978 [ci après : "Convention élevage de 1976"]. 703 Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Recommandations n°620 et 642 de 1971. 704 AUSEMS, E., "Le Conseil de l’Europe et la protection des animaux", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal,
éditions du Conseil de l’Europe, pp. 249-271, 2006, p. 255. 705 Id., p. 256. 706 Notons qu'une plus grande rentabilité économique a généralement lieu au détriment du bien-être animal. En effet,
produire plus au moindre au coût implique le plus souvent un plus grand mal-être des animaux d'élevage. En ce sens,
les animaux paient le prix des diminutions de coût sur les produits commercialisés qui en sont issus. 707 Convention élevage de 1976, Art.1. 708 Id., Les "systèmes modernes d'élevage intensif" sont définis comme "ceux qui utilisent surtout des installations
techniques exploitées principalement à l'aide de dispositifs automatiques". 709 Id., Ces expressions apparaissent de manière récurrente dans la convention. 710 Id., Art. 3, 4 et 5. 711 Id., Art. 7.
121
« Aucun animal ne doit être alimenté de telle sorte qu'il en résulte des souffrances
ou des dommages inutiles »712.
Si cette interdiction est implicite en ce que la convention n'interdit pas directement la
production du foie gras, son énoncé fait néanmoins directement allusion à la méthode du
gavage utilisé à cette fin. Si un doute pouvait subsister sur l'interprétation du terme "inutiles",
dans le sens où cette production pourrait être considérée comme utile (et donc justifier les
souffrances et les dommages causés à ces animaux), les recommandations spécifiques sur
l'élevage des canards et des oies viennent confirmer l'interdiction du gavage. Pourtant, cette
pratique demeure tolérée dans les pays où elle est autorisée par les législations nationales en
vigueur713. Le Conseil de l'Europe mentionne toutefois la nécessité de résoudre les problèmes
liés au bien-être des palmipèdes à foie gras dans ces pays, notamment à travers la recherche
de méthodes alternatives n'impliquant pas la prise forcée d'aliments714.
2- Les recommandations pour les bovins, les palmipèdes à foie gras et les animaux à fourrure
En 1992, un protocole à la convention est venu ajouter certaines exigences dans le domaine de
la biotechnologie715 et depuis 1986, de nombreuses recommandations spécifiques sont venues
préciser les principes conventionnels concernant l'élevage de certaines espèces716.
Alors que les dispositions des conventions européennes sont intégrées dans le droit interne
des États suite à un processus de ratification717, les recommandations du Comité permanent
deviennent obligatoires une fois acceptées par les États membres du Conseil de l'Europe718.
Chaque recommandation précise des exigences particulières pour les espèces concernées et
712 Id., Art. 6. 713 Les principaux pays européens producteurs de foie gras concernent notamment la France et la Hongrie. 714 Voir les préambules (alinéa 8) et les articles 24 et 25 des recommandations respectives sur les canards et les oies
(Recommandation concernant les canards de barbarie (Cairina moschata) et les hybrides de canards de barbarie et
de canards domestiques (Anas platyrhynchos) et la Recommandation concernant les oies domestiques (Anser anser f.
domesticus, Anser cygnoides f. domesticus) et leurs croisements du 22 juin 1999). 715 Protocole d'amendement à la Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages (n°145) du
6/02/1992. 716 Id., pp.258-259. Dans l'ordre chronologique, ces recommandations ont d'abord concerné les porcs et les volailles en
1986 ; les bovins en 1988 ; les animaux à fourrure en 1990 ; les moutons et les chèvres en 1992 ; les ratites (espèces
d'oiseaux) en 1997 ; les canards et les oies domestiques ainsi que les canards musqués et les hybrides en 1999 ; les
dindes en 2001 et les poissons d'élevage en 2005. Afin d'actualiser ces dispositions protectrices à la lumière des
connaissances scientifiques les plus récentes, certaines ont été révisé, à savoir les recommandations sur les volailles en
1995, sur les animaux à fourrure en 1999 et sur les porcs en 2004. 717 L'entrée en vigueur des conventions du Conseil de l'Europe est généralement conditionnée par le dépôt de 4
instruments de ratification. La liste complète des pays ayant signé et ratifié les conventions européennes sur le bien-
être animal est disponible dans le document suivant du Conseil de l'Europe, "Animal Welfare in Europe:
Achievements and future prospects", Joint COE-E-OIE Workshop, Strasbourg, 23-24 Nov. 2006. 718 AUSEMS, E., op.cit., note 704, p.258 : "S'il est vrai que, par définition, les recommandations obligent simplement
les États à les examiner en toute bonne foi, celles adoptées par le Comité permanent perdent cette flexibilité une fois
acceptées par les Parties et deviennent alors des "directives" ayant force obligatoire". Notons que ces directives du
Conseil de l'Europe diffèrent des directives en tant qu'instruments du droit communautaire dérivé au sein de l'Union
européenne.
122
règlemente certaines pratiques particulièrement controversées sur le plan de la protection du
bien-être des animaux. Evoquons notamment l'écornage des bovins, la production de foie gras
et l'élevage des animaux à fourrure, tels que ces cas sont abordés par les recommandations.
Concernant l'écornage des bovins, celui-ci est interdit, sauf s’il est réalisé par ablation
chirurgicale et si la partie produisant la corne peut être enlevée à un stade précoce de
bourgeon (afin d'éviter un écornage postérieur plus douloureux)719. Bien que l'écornage soit
encore couramment pratiqué dans les systèmes d'élevage intensif pour des raisons
pratiques720, l'administration de sédatifs ou d'anesthésiants n'est pas systématique,
d'importantes douleurs étant ainsi causées721. C'est pourquoi une avancée législative en la
matière pourrait notamment viser à imposer une anesthésie locale de manière systématique
pour ce type d'opérations722.
Bien que déclarée non-conforme aux exigences de la convention européenne de 1976, la
méthode du gavage pour la production du foie gras demeure néanmoins tolérée dans les pays
où elle est déjà autorisée en vertu des législations nationales en vigueur. Conscient des
problèmes de bien-être liés à cette pratique dans ces pays, le Conseil de l'Europe mentionne
toutefois la nécessité de les résoudre, en encourageant notamment la recherche sur les
méthodes alternatives n'impliquant pas la prise forcée d'aliments723.
Aussi, l'élevage des animaux pour leur fourrure est particulièrement controversé quant à la
captivité de certaines espèces sauvages, les conditions dans lesquelles celles-ci sont
maintenues dans de petites cages, certaines méthodes de mise à mort et la non-satisfaction des
besoins spécifiques à certaines espèces724. L'ensemble de ces aspects sont abordés dans une
recommandation de 1990, laquelle a été révisée en 1999725. Celle-ci prévoit des dispositions
générales concernant l'élevage des animaux à fourrure ainsi que des dispositions spécifiques
719 Art. 17 de la Recommandation du Conseil de l'Europe concernant les bovins du 21 octobre 1988. 720 Plusieurs raisons pratiques sont avancées pour justifier l'écornage des bovins et notamment le fait d'éviter les coups
de cornes et que les bovins ne se coincent dans les barreaux des mangeoires. Actuellement, plusieurs signes
témoignent de la douleur ressentie par les bovins suite à l'écornage (ex : perte d'appétit, battement des oreilles etc.). Cf.
BRAITHWAITE, V., "Évaluation et traitement de la douleur chez les animaux vertébrés", La souffrance animale : de
la science au droit, Colloque international LFDA-GRIDA, OIE, 18 octobre 2012. 721 GUATTEO, R. et D. HOLOPHERNE, Anesthésie des bovins, éd. point vétérinaire, 2006, p.80 : "Actuellement,
l'écornage, aussi bien chez le bovin que le jeune se réalise sans anesthésie locale. L'injection post-écornage
d'antalgiques de types anti-inflammatoire non-stéroïdiens est lui aussi non pratiqué systématiquement." 722 Id. : "De nouvelles directives européennes risquent de modifier ces pratiques et sinon d'instaurer l'interdiction de
l'écornage, du moins d'inciter au recours à l'anesthésie locale". 723 Voir les préambules (alinéa 8) et les articles 24 et 25 des recommandations respectives sur les canards et les oies
(Recommandation concernant les canards de barbarie (Cairina moschata) et les hybrides de canards de barbarie et
de canards domestiques (Anas platyrhynchos) et la Recommandation concernant les oies domestiques (Anser anser f.
domesticus, Anser cygnoides f. domesticus) et leurs croisements du 22 juin 1999). 724 Voir par exemple LINZEY, A., "The Ethical Case for European Legislation Against Fur Farming", Animal Law,
vol.13, 2006, pp.147-165. 725 Recommandation concernant les animaux à fourrure du 22 juin 1999 (remplaçant celle du 19 octobre 1990).
123
pour chaque espèce726. Concernant la mise à mort de ces animaux, cette recommandation
prévoit qu'elle doit être réalisée par une personne compétente, sans causer d'agitation et de
douleur indues ou d'autre forme de détresse727. Une réglementation détaillée est également
fournie pour chacune de ces méthodes728. De surcroît, cette recommandation insiste sur le fait
que les besoins propres à chaque espèce doivent être satisfaits. Par exemple, les visons
doivent avoir accès à un point d'eau pour la thermorégulation et pour nager, disposer d'une
liberté de mouvement suffisante et satisfaire leurs comportements sociaux et d'exploration729.
Ces recommandations n'ont pas été adoptées par l'Union européenne, de sorte qu'il n'existe
pas de règlementation communautaire spécifique sur la production du foie gras ou l'élevage
des animaux à fourrure. Néanmoins, celles-ci pourraient un jour faire partie du droit
communautaire, à l'image d'autres recommandations déjà intégrées sous forme de directives et
de règlements communautaires pour certaines pratiques et certaines espèces.
B- Les instruments de l'Union européenne sur l'élevage
En plus de la directive-cadre de 1998 (1), des instruments spécifiques ont été adopté par
l'Union européenne concernant certaines espèces et certaines méthodes d'élevage (2).
1- La directive-cadre de 1998 sur la protection des animaux dans les élevages730
Afin d'intégrer les dispositions de la convention européenne de 1976, une directive
communautaire a été adoptée en 1998 pour donner effet aux normes relatives au logement, à
l'alimentation et aux soins appropriés des animaux, conformément à l'expérience acquise et
aux connaissances scientifiques731. Sur ce point, notons que les dispositions adoptées par l'UE
se basent généralement sur les rapports du Comité scientifique vétérinaire de la Commission
européenne chargé du bien-être animal732.
726 Id., Annexes A à F concernant les visons, les putois et furets, les renards, les myocastors et les chinchillas. 727 Id., Art. 22. 728 Annexe F, "Méthodes de mise à mort des animaux à fourrure" : "I. Méthodes physiques : Electrocution ; Projectiles
pénétrant le cerveau ; II. Méthodes d'inhalation : Monoxyde de carbone, Dioxyde de carbone, Chloroforme ; III.
Agents injectables : Injections létales". 729 Id., Annexe A, "Dispositions spéciales pour les visons (Mustela vison)". 730 Directive 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages , J.O. L
221 du 8.8.1998 [ci-après : "Directive élevage de 1998"]. 731 Id., Préamb. 3e Considérant. 732 De nombreux rapports scientifiques ont été remis par le Comité scientifique vétérinaire de la Commission
européenne chargé du bien-être animal. Ces rapports concernent le transport (1999 et 2002) ; l'abattage (1996) et
l'élevage du bétail (2001). Concernant les directives spécifiques, il s'agit des rapports sur les veaux (1995), les porcs
(1997), les poulets (2000) et les poules pondeuses (1996). D'autres domaines controversés sur le plan éthique (et plus
ou moins pris en compte couverts dans la réglementation communautaire) ont également été couverts tels que
l'utilisation des primates non-humains pour la recherche (2007), le gavage des canards et des oies pour la production
de foie gras (1998), l'élevage des animaux à fourrure (2001).
124
Cette directive-cadre vise à établir des normes minimales relatives à la protection des animaux
dans les élevages733. Comme dans les autres domaines de protection du bien-être animal, ces
normes, qualifiées de "minimales", constituent le standard commun de protection auquel tous
les États membres de l'UE doivent se conformer. Ceux-ci sont libres d'adopter des normes
plus strictes dans leurs législations internes s'ils le souhaitent.
Adoptant une définition plus précise des animaux concernés, tout en couvrant un champ
d'application aussi large que la convention européenne, cette directive concerne largement
tout animal (y compris les poissons, reptiles et amphibiens) élevé ou détenu pour la
production d'aliments, de laine, de peau ou de fourrure ou à d'autres fins agricoles734.
Dans cette directive, la protection du bien-être animal apparaît comme un principe bien plus
fondamental que dans la convention européenne de 1976. En effet, même si les premières
conventions du Conseil de l'Europe avaient le mérite de faire référence au bien-être des
animaux, de manière inédite dans les années 1970, ce concept ne s'est vraiment imposé au
niveau européen et communautaire qu'à partir des années 1990. Cette directive exige que :
« les propriétaires ou détenteurs prennent toutes les mesures appropriées en vue de
garantir le bien-être de leurs animaux et afin d'assurer que lesdits animaux ne
subissent aucune douleur, souffrance ou dommage inutile »735.
Notons que l'article 14 de la directive interdit le gavage dans les mêmes termes que la
convention européenne précitée736.
Nous avons vu qu'une recommandation du Conseil de l'Europe précise aussi que le gavage est
interdit, mais seulement là où il n´est pas déjà pratiqué737. Ainsi, principalement la France
mais aussi la Bulgarie, la Hongrie, la Belgique et l'Espagne738 demeurent des pays
733 Directive élevage de 1998, Art.1. 734 Id., Art. 2. La précision "(y compris les poissons, reptiles et amphibiens)" ne figure pas dans la convention. 735 Id., Art. 3. 736 "Aucun animal n'est alimenté ou abreuvé de telle sorte qu'il en résulte des souffrances ou des dommages inutiles".
Art.14 de la Directive 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages,
J.O. L. 221 du 8.8.1998. 737 Recommandation concernant les canards de Barbarie et les hybrides de canards de Barbarie et de canards
domestiques, Adoptée par le Comité Permanent de la Convention européenne sur la protection des animaux dans les
élevages, le 22 juin 1999. 738 Notons qu'en Espagne, une exploitation produit du foie gras sans gavage. Voir MOREL, S., "Espagne: une
exploitation "éthique" produit du foie gras sans gavage des oies", Le Monde, 28.12.2013, en ligne:
http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/12/28/en-espagne-une-exploitation-ethique-produit-du-foie-gras-sans-
gavage-des-oies_4340991_3244.html (date d'accès: 05.03.2014).
125
producteurs de foie gras739. De même, la protection du bien-être animal a ses limites
communautaires "en matière de traditions culturelles et de patrimoines régionaux"740.
Ces domaines relèvent de la juridiction de chaque pays. L'UE affirme ainsi qu'elle préfère ne
pas intervenir dans ces domaines sensibles. Abondant en ce sens, la France a déclaré le foie
gras comme faisant partie de son patrimoine culturel et gastronomique en 2005741, de sorte à
préserver cette pratique face aux interdictions croissantes dans les pays voisins742.
Des interdictions ont tout d'abord été adoptées dans les pays européens extérieurs à l'UE, à
savoir en Norvège dès 1974743 et en Suisse dès 1978, sa nouvelle ordonnance de 2008
confirmant expressément cette interdiction744.
Les pays de l'UE qui ont interdit le gavage à des fins de production du foie gras sont
chronologiquement : le Luxembourg en 1983745 ; l'Irlande en 1984746 ; la Suède en 1988747 ; le
Danemark en 1991748 ; les Pays-Bas en 1992749 ; l'Allemagne750 et la République-Tchèque en
1993751 ; la Finlande en 1996752 ; la Pologne753 et le Royaume-Uni en 1998754 ; ainsi que l'Italie
en 2001 (pour 2004)755. Les lois des provinces autrichiennes l'interdisent aussi à ce jour756.
Ainsi, le gavage des palmipèdes à foie gras (canards et oies) est interdit dans les lois générales
de protection animale de 14 pays européens, dont 12 sont des pays de l'Union européenne.
Ces pays protecteurs ainsi que les pays producteurs sont indiqués ci-après (voir la légende).
739 En dehors des pays européens, notons que cette production augmente considérablement en Chine depuis les
dernières années. En 2012, la Chine a doublé sa production de foie gras depuis 2006 avec désormais 1 000 tonnes à
l'année, la France restant le premier producteur mondial avec 20 000 tonnes par an. Voir FULI, S. et L. YUANYUAN,
"China to Open World's Largest Foie Gras Production Facility", Economic Observer Online, 2 mars 2012, en ligne:
http://www.eeo.com.cn/ens/2012/0312/222507.shtml (accès: 28.10.2012). 740 Voir l'article 13 du Traité sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne (version
consolidée), J.O. C 115/01 du 09.05.2008. 741 Amendement n°1001 à la Loi d'orientation agricole (n° 2341) du 5.10. 2005, Art. L. 654-27-1 du Code rural. 742 Voir au sujet de cette inscription l'article de JEANGÈNE VILMER, J.-B., "Les sophismes du foie gras", L’Express,
15 décembre 2005, p. 104. 743 Animal welfare Act, 1974, Section 8, Art. 4. 744 La Loi de protection animale de 1978 était explicitement interprétée comme interdisant l'alimentation forcée.
L'ordonnance sur la protection des animaux du 23 avril 2008 l'interdit explicitement à son article 20. 745 Loi sur la protection de la vie et le bien-être des animaux, 15 mars 1983, Chapitre VIII, Art. 20, al.6. 746 L´article 5 de la loi de protection des animaux de ferme de 1984 proscrit les mauvais traitements aux animaux et est
interprété comme interdisant le gavage. 747 Les articles 3 et 4 de la loi de protection des animaux de 1988 sont interprétés comme interdisant le gavage. 748 Act on the Protection of Animals 1991, Art. 5. 749 Animal Health and Welfare Act, 1992, Art. 36.1 et 37. 750 Animal Protection Act, 1993, Section II, Art. 3, al. 9. 751 Act on the protection of animals against cruelty (19.05.1993, No. 162 et 27.09.1994, No. 193), Section 4 (P). 752 Act on the Protection of Animals, 1996, Art. 11. 753 Animal Protection Act, 1998, Art.12.7. 754 Farm Animals Regulations, Art. 22-24. 755 Décret législatif, 26 mars 2001, n°146, Annexe Art. 2, Sous-section 1, Point b, al. 19. 756 Voir "Le gavage interdit à travers le monde", en ligne: http://www.stopgavage.com/interdiction-gavage-monde
(date d'accès: 19.02.2014).
126
Figure 1 : Pays de l’UE producteurs de foie gras et interdisant le gavage
Source: http://www.stopgavage.com/interdiction-gavage-monde757
Plus récemment, des interdictions de gavage ont été adoptées dans des pays non-européens.
Parmi celles-ci, citons la Californie depuis 2012 et auparavant l'Argentine en 2003. Plus
proche de l'Europe, Israël a aussi adopté une interdiction en 2003758. Celle-ci mérite d'être
mentionnée comme possible source d'inspiration vers des avancées protectrices dans l'UE.
Sur la base de la loi de protection animale en vigueur759, la Cour suprême d'Israël a interdit la
méthode du gavage pour la production du foie gras760, en reconnaissant notamment que :
« personne ne peut nier que ces créatures ressentent également la douleur qui leur
est infligée par une blessure physique ou une violente intrusion dans leur
corps »761.
757 Site de Stop Gavage (campagne de l'association L214 (Ethique & Animaux), "Le gavage interdit à travers le
monde", en ligne: http://www.stopgavage.com/interdiction-gavage-monde (date d'accès: 19.02.2014). 758 Sans être un pays membre de l'UE, Israël entretient des relations avec elle dans le cadre de plusieurs partenariats :
European Neighbourhood Policy (ENP), Euro-Mediterranean Partnership, Union for the Mediterranean. 759 Cruelty to Animals Law, 1994 [Animal Protection 5754-1994]. 760 Cette décision semble d'autant plus remarquable qu'à cette époque Israël était un des principaux producteurs de foie
gras dans le monde. Voir WAGMAN, B.A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press,
2011, p.35. 761 Juge T. Strasberg-Cohen, décision rendue le 11 août 2003 par la Cour Suprême d´Israël [ci-après: "Décision foie
gras Israël"]. Voir la traduction en anglais dans CHAI, "Foie Gras Verdict, Supreme Court of Israel", Animal Legal &
Historical Center, 2003, p.39 (traduction libre). Voir en ligne :
http://www.animallaw.info/nonus/cases/cas_pdf/Israel2003case.pdf (accès: 14.10.2012).
127
Elle affirme également que la pratique du gavage ne saurait être plus longtemps tolérée,
sachant que le "maintien des revenus des agriculteurs" ou du plaisir gastronomique n'a pour
autre prix que celui de réduire la dignité humaine762. Confirmée en 2006763, cette décision
semble d'autant plus remarquable qu'à cette époque Israël était l'un des principaux pays
producteurs de foie gras dans le monde764. En outre, cette décision va bien au-delà de la
protection des palmipèdes à foie gras en ce qu'elle affirme que les besoins de l'agriculture ne
doivent pas systématiquement primer sur l'intérêt de protéger les animaux765.
De manière novatrice voire révolutionnaire, cette décision constitue un précédent unique au
monde, faisant primer la protection des animaux d'élevage face aux souffrances qui leurs sont
infligées. Elle ouvre également la voie à une agriculture plus protectrice des animaux et ce,
même s'il s'agit de pratiques agricoles établies de longue date, qui témoignent d'une certaine
légitimité accordée à celles-ci par la société766. Précisons qu'à la date d'entrée en vigueur de
l'interdiction générale en 2005, le gouvernement israélien a mis en place une commission pour
l´indemnisation et la reconversion des producteurs de foie gras dans ce pays.
Alors que le foie gras est encore produit en France et dans d'autres pays européens, l'exemple
israélien ouvre la voie vers une application du principe de respect du bien-être des animaux en
tant qu'êtres sensibles, tel qu'il est reconnu dans le dernier traité de Lisbonne767, ainsi que vers
une application plus ferme de l'interdiction du gavage telle qu'elle a déjà été adoptée par l'UE.
2- La réglementation sur les veaux, les porcs, les poules, les poulets et l'agriculture biologique
Outre la directive-cadre sur l'élevage en général, il existe une règlementation communautaire
spécifique sur les conditions d'élevage des veaux (a), des porcs (b), des poulets de chair (c) et
des poules pondeuses (d), ainsi que sur l'agriculture biologique (e).
762 Id. 763 Ministère de l'Environnement d'Israël, "High Court of Justice Rejects Appeal to Continue Force-Feeding of Geese",
News, 23 février 2006, en ligne :
http://old.sviva.gov.il/bin/en.jsp?enPage=e_BlankPage&enDisplay=view&enDispWhat=Object&enDispWho=News^l
2884&enZone=e_news (accès: 14.10.2012). 764 En effet, Israël était le 4ème producteur de foie gras au monde après la France, la Hongrie et la Bulgarie. Voir en
ligne "Israël interdit définitivement la production de foie gras":
http://www.stopgavage.com/communiques/InterdictionIsrael-3-oct-2005.pdf (date d'accès: 19.02.20014). 765 Décision foie gras Israël, point 16. 766 Id. 767 Art.13 du Traité sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne (version consolidée), J.O.
C 115/01 du 09.05.2008.
128
a- La réglementation communautaire sur les veaux
La directive de 2008768 établit des normes minimales relatives à la protection des veaux (c'est
à dire les bovins de moins de 6 mois769) et plus particulièrement ceux confinés à des fins
d'élevage et d'engraissement770. Cette directive ainsi concerne lesdits "veaux de lait", élevés et
engraissés pour produire de la viande blanche771. Bien que l'élevage en stabulation demeure
autorisé, celui-ci doit permettre à chaque veau de s'étendre, de se reposer, de se relever et de
faire sa toilette sans difficulté772. En principe, les veaux ne doivent pas être attachés, sauf
lorsqu'ils sont en groupe durant une heure au maximum, pendant la période de nourrissage773.
Il est également interdit de maintenir les veaux en permanence dans l'obscurité774. Il est
généralement recommandé que les conditions ambiantes (isolation, chauffage, ventilation,
éclairage) et de bien-être (alimentation, santé, hygiène, sécurité) doivent être "appropriées"775.
Contrairement à la recommandation du Conseil de l'Europe sur les bovins en 1988776, ladite
"Directive veaux" ne réglemente pas l'écornage pratiqué à vif, pourtant source de souffrances.
b- La réglementation communautaire sur les porcs
La directive de 2008777 vise la protection des porcs détenus en groupes et exige de prendre des
mesures de gestion propres à améliorer leur bien-être778. La directive autorise néanmoins la
section partielle de la queue et la réduction des coins, mais en théorie seulement lorsqu'il
existe des preuves que des blessures (causées aux mamelles des truies ou aux oreilles ou aux
queues d'autres porcs) ont eu lieu779. Avant de pratiquer ces interventions douloureuses, les
exploitants doivent également s'assurer que les conditions d'élevage soient propres à éviter ces
comportements780.
768 Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection
des veaux (version codifiée), J.O. L 010 du 15/01/2009 [ci-après : "Directive veaux 2008"]. 769 Id., Art.2. 770 Id., Art.1. 771 BROBERG, B., "Agriculture et élevage", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de
l’Europe, pp.43-58, 2006, p.46. 772 Directive veaux 2008, Annexe I, al.7. 773 Id., al.8. 774 Id., al.5. 775 Id., Annexe I. 776 Conseil de l'Europe, Recommandation concernant les bovins, adoptée par le comité permanent lors de sa 17ème
réunion (21 octobre 1988). Selon l'Article 17 : "1. Les opérations entraînant la perte d'une quantité significative de
tissu ou la modification de la structure osseuse des bovins doivent être interdites, et en particulier : [...] b. l'écornage
par d'autres moyens que l'ablation chirurgicale des cornes". 777 Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection
des porcs (version codifiée), J.O. L du 18.02.2009 [ci-après : "Directive porcs de 2009"]. 778 Id., Préamb., al.9. 779 Id., Annexe I, Chap. I, al.8. 780 Id.
129
Cette directive reconnaît que la section partielle de la queue et le meulage des dents peuvent
causer aux porcs une douleur immédiate, qui peut se prolonger781. Elle reconnaît également
que la castration peut entraîner une douleur de longue durée qui est encore plus vive en cas de
déchirement des tissus782. Afin de réduire ces douleurs, la directive impose une anesthésie
complétée par une analgésie prolongée, devant être pratiquées par un vétérinaire, pour les
porcelets de plus de 7 jours 783. A contrario, la coupe de la queue et la castration à vif
demeurent donc autorisées pour les porcelets de moins de 7 jours. Néanmoins, la directive
prévoit de limiter le recours à la castration chirurgicale784 et une alternative à celle-ci devrait
être prescrite pour 2018 dans l'UE785.
En plus des atteintes courantes à l'intégrité des porcs dès leur naissance, la directive
réglemente lesdites "cases de gestation", ou stalles à truies, dans lesquelles celles-ci sont
enfermées durant leur gestation et lors de la mise-bas. Si l'attache des truies est interdite
depuis 2006786, certaines restrictions concernant les cases de gestation sont applicables depuis
le 1er janvier 2013787. En ce sens, les stalles individuelles demeurent autorisées pendant les
quatre premières semaines de gestation, ainsi qu'une semaine avant la mise-bas. Entre temps,
les truies peuvent être maintenues en groupe dans des enclos un peu plus grands. Néanmoins,
les exploitations de moins de 10 truies peuvent continuer à garder les truies en stalles
individuelles pendant toute la durée de leur gestation, à la condition qu'elles puissent se
retourner facilement788. Cette méthode pourrait aussi se voir interdite dans l'UE en 2019789.
c- La réglementation communautaire sur les poulets de chair
La directive communautaire sur les poulets destinés à la production de viande (dits "poulets
de chair") à vu le jour en 2007790, soit plusieurs années après l'adoption des recommandations
du Conseil de l'Europe sur l'élevage des volailles en 1986 et 1995791. Afin de se conformer
aux exigences européennes, la directive déclare qu'il est nécessaire d’établir des règles
781 Id., Préamb., al.11. 782 Id. 783 Id., Annexe I, Chap. I, al.8. 784 Id., Art.7 (1). 785 La fin de la castration chirurgicale des porcs est prévue pour le 1 janvier 2018 en vertu de la déclaration de 2010 :
"European Declaration on alternatives to surgical castration of pigs". Voir en ligne :
http://ec.europa.eu/food/animal/welfare/farm/docs/castration_pigs_declaration_en.pdf (date d'accès : 19.11.2012). 786 Directive porcs de 2009, Art.3, al.3. 787Id., Art.3, al.9. Cette interdiction vaut pour toute nouvelle exploitation depuis 2003. 788 Id., Art.3, al.4. 789 Déclaration d'Andrea Gavinelli de la Commission européenne lors de son intervention à la Conférence
"Enforcement of European Animal Welfare Related Legislation" à Bruxelles (Belgique), les 12-13 juin 2012. 790 Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales relatives à la protection des poulets
destinés à la production de viande (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE), J.O. L 182 du 12.7.2007 [ci-après :
"Directive poulets"]. 791 Id., Preamb., al.3. La première recommandation du Conseil de l'Europe sur les volailles destinées à la protection de
viande a été adoptée en 1986 et révisée en 1995.
130
minimales relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande, afin de
réaliser "l’objectif fondamental consistant à améliorer le bien-être des animaux"792.
Notons que cette directive a dû être qualifié d'excessivement protectrice en ce qu'elle justifie
ses dispositions par le recours au principe de proportionnalité et précise qu'elle n’excède pas
ce qui est "nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis"793. À la lecture des normes
prévues, celle-ci ne semble pourtant pas excessive dans la protection allouée aux poulets de
chair. En effet, la densité maximale prévue pour les exploitations peut atteindre 33 kg/m2 et
peut permettre une dérogation allant jusqu’à 42 kg/m2794. Contrairement à une protection
élevée, les densités d’élevage excessives sont dénoncées par l'organisation de Protection
mondiale des animaux de ferme (PMAF) sachant que cette densité correspond à 22 poulets
par m2 et plus encore dans un grand nombre d’élevages industriels795.
Peut-on vraiment parler de normes de "bien-être" pour ces animaux ? Ou plutôt d’une
apparence de protection ? En effet, si l'on se contente de lire le texte de la directive en surface,
il semble que l’objectif d’assurer le bien-être des poulets soit omniprésent. Afin de répondre à
cet objectif, une série d'obligations est prévue pour les États membres de l'UE. Au-delà de se
conformer aux normes, ceux-ci doivent établir des rapports annuels, procéder à des
inspections régulières et élaborer des guides de bonnes pratiques etc.796. Mais à y regarder de
plus près, la densité maximale de poulets, qui constitue l'un des principaux problèmes dans les
élevages intensifs, cautionne le mal-être des animaux797. En ce sens, la PMAF précise que :
« les poulets dont la densité d’élevage est trop élevée, souffrent de nombreuses
pathologies [...] et d’une mortalité bien plus importante que lorsque les oiseaux
sont moins entassés »798.
Ainsi, derrière les apparences protectrices de certains instruments comme celui-ci, on constate
que ceux-ci ne permettent pas d'enrayer le mal-être des animaux mais, au contraire, de le
cautionner à travers des normes légales, pourtant censées garantir leur bien-être.
792 Id., Préamb, al. 7. 793 Id. 794 Id., Art.3, al.2, 4 et 5 (39 kgs et 3 kgs supplémentaires). 795 Voir PMAF : "Des densités d’élevage excessives" concernant les "Poulets élevés pour leur chair", en ligne :
http://pmaf.org/s-informer/nos-campagnes/poulets-eleves-pour-leur-chair.html (date d'accès : 16.11.2012). 796 Directive poulets, Art.6-8. 797 Sachant que les producteurs cherchent généralement à maximiser la rentabilité de leur production, ils atteignent
ainsi bien souvent le seuil maximal autorisé. 798 Id.
131
d- La réglementation communautaire sur les poules pondeuses
En plus de poser les normes minimales relatives aux poules pondeuses799, la directive de 1999
interdit les cages en batterie traditionnelles à partir du 1er janvier 2012800. Celles-ci doivent
être remplacées par des cages aménagées plus conformes aux besoins fondamentaux et
comportementaux des poules. Dans ces cages enrichies, elles doivent pouvoir disposer d'une
alimentation à volonté et d'un abreuvement approprié, ainsi que d'une litière, d'un nid et d'un
perchoir801. Concernant l'augmentation de la superficie prévue pour chaque individu, celle-ci
demeure néanmoins très relative. En effet, la PMAF précise ici que :
« l’espace à la disposition de chaque oiseau demeure à peine plus grand qu'une
surface de papier A4 (750 cm2), soit à peine plus de la surface d'une carte postale
de gagné sur les cages précédentes »802.
Alors que l'interdiction des cages en batterie traditionnelles, depuis le 1er janvier 2012, a été
annoncée treize ans auparavant, soit en 1999, certains pays de l'Union européenne tardent
encore à s'y conformer803. Pourtant, peu avant la date butoir, la Commission européenne
émettait un communiqué dans lequel elle exhortait les États membres à appliquer
l’interdiction des cages à poules non aménagées sous peine de poursuites804. Notons qu'afin de
vérifier leur mise en conformité, les élevages de poules pondeuses doivent faire l'objet d'un
enregistrement obligatoire805.
Depuis 2008, un règlement communautaire impose aussi le marquage des œufs en fonction du
mode d’élevage des poules, afin que ce dernier soit facilement identifiable par le
799 Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des
poules pondeuses, J.O. L 203 du 3.8.1999 [ci-après : "Directive poules de 1999"]. 800 Id., Art. 5 (2). Cet article précise que la construction ou la mise en service de nouvelles cages sont interdites à
compter du 1er janvier 2003. 801 Id., Art.6. 802 Voir sur le site de la PMAF, "Interdiction des cages conventionnelles en 2012", concernant les "Poules pondeuses",
en ligne : http://pmaf.org/s-informer/nos-campagnes/poules-pondeuses.html (date d'accès : 16.11.2012). Alors que,
dans les cages en batterie conventionnelles, les poules disposent de 555 cm2 chacune (soit l'équivalent d'une feuille
A4), l'Art. 6 de la Directive poules de 1999 prévoit "750 centimètres carrés de la superficie de la cage par poule, dont
600 centimètres carrés de surface utilisable". 803 En juin 2012, 10 états membres ont fait l'objet d'un avis motivé de la Commission avant saisine de la Cour de
Justice (en vertu de l'art.258 du Traité de Lisbonne), à savoir la Belgique, la Grèce, l'Espagne, la France, l'Italie, la
Chypre, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne et le Portugal. Voir FOUR PAWS EUROPEAN POLICY OFFICE,
"Laying Hens - Cage-eggs ban", EU Commission steps up in the on-going infringement procedures against 10 non
compliant Member States, Brussels, 22 June 2012. 804 COMMISSION EUROPÉENNE, Bien-être animal : la Commission exhorte les États membres à appliquer
l’interdiction des cages à poules non aménagées sous peine de poursuites, Communiqué de presse, 20/10/2011. 805 Directive 2002/4/CE de la Commission du 30 janvier 2002 concernant l'enregistrement des établissements
d'élevage de poules pondeuses relevant de la directive 1999/74/CE du Conseil, J.O. L 30 du 31.1.2002. Art.2 : "Les
États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se
conformer à la présente directive au plus tard le 31 mars 2003".
132
consommateur806. Ainsi, les boîtes d’œufs doivent impérativement mentionner s’il s’agit
d’œufs de poules élevées en cage, au sol, en plein air ou d'œufs "bio" issus de l'agriculture
biologique807. Un code est attribué pour chaque type d’œufs, allant de 0 pour les œufs bio, à 3
pour les œufs de poules élevées en cage808. Les consommateurs les plus soucieux du bien-être
animal peuvent ainsi choisir des œufs bio ou issus d’élevages en plein air809. L'écart de prix
entre ces différents types d'œufs est notamment compensé par des subventions européennes
visant à encourager la protection du bien-être animal dans les élevages810. En effet,
l'application de normes élevées pour protéger le bien-être des animaux à un coût, car elle
implique de plus grandes dépenses en terme d’alimentation et de soins, provoquant ainsi une
moindre rentabilité en privilégiant la qualité à la quantité. Précisons qu'un sondage réalisé en
2005 affirme que les consommateurs européens sont prêts à payer plus cher pour des produits
plus respectueux du bien-être des animaux811.
À ce jour, il n'existe encore aucune réglementation visant à minimiser les douleurs engendrées
par les mutilations courantes, telles que la coupe du bec des poules. Il s'agit pourtant de
pratiques contraires au bien-être de ces animaux, car douloureuses et attentatoires à leur
intégrité physique812. Aux Pays-Bas, une interdiction de la coupe des ergots et de la crête est
prévue pour 2015, ainsi que la coupe du bec des poules pour 2018813. Ce pays en appelle à
une interdiction générale de cette pratique au niveau de l'UE, à l'image de celle déjà adoptée
sur les cages en batterie814.
806 Règlement (CE) 589/2008 de la Commission du 23 juin 2008 portant modalités d'application du règlement (CE)
1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les normes de commercialisation applicables aux œufs, J.O. L 163 du
24.06.2008. 807Id., Annexe 1 du règlement de 2008, Partie A, Mentions visées à l'article 12, 2è paragraphe, 2è alinéa, a). 808 Cette obligation de codage figure dans l'Annexe de la Directive 2002/4/CE au point 2.1. 809 Voir HARPER, G.C. et S.J. HENSON, Strategies to address consumer concern about animal welfare -
the Comparative Report, The University of Reading. United Kingdom, EU FAIR CT98-3678, 2001, p.6. 810 Notons que le Plan d’action pour la protection et le bien-être des animaux 2006-2010 prévoit des fonds de
subventions spécifiques pour aider les producteurs soucieux du bien-être animal. Voir COMMISSION
EUROPÉENNE, Communication concernant un plan d'action communautaire pour la protection et le bien-être des
animaux au cours de la période 2006-2010, J.O. C 49, 28 février 2006. 811 EUROPEAN COMMISSION, Attitudes of EU Citizens Towards Animal Welfare, Special Eurobarometer 270,
Wave 66.1, 2007. Voir p.50 concernant le bien-être de spoules pondeuses et le surcoût des œufs. Même si l’écart de
prix demeure, celui-ci se réduit grâce aux aides européennes visant à promouvoir le bien-être animal dans les élevages,
notamment dans le cadre de l'agriculture biologique. 812 Voir les rapports scientifiques de la Commission sur les poulets de chair et les poules pondeuses : EUROPEAN
COMMISSION, The welfare of chickens kept for meat production (broilers), Report of the Scientific Committee on
Animal Health and animal Welfare, 2000 ; EUROPEAN COMMISSION, The welfare of laying hens, Report of the
Scientific Veterinary Committee- Animal Welfare Section, 1996. 813 Voir Government of the Netherlands, "Ban on beak trimming improves animal welfare in poultry sector",
9.06.2013, en ligne : http://www.government.nl/news/2013/06/09/ban-on-beak-trimming-improves-animal-welfare-in-
poultry-sector.html (date d'accès : 2.02.2014). 814 Id.
133
Notons que ces pratiques demeurent autorisées dans le cadre de la réglementation sur les
produits biologiques815, alors même que ces produits sont censés garantir un plus grand
respect du bien-être animal816.
e- La réglementation sur l'élevage animal dans le cadre de l'agriculture biologique817
Dans le cadre de l'agriculture biologique, les animaux doivent bénéficier d'une meilleure
qualité de vie, laquelle se traduit notamment par une meilleure alimentation (elle-même
biologique et ne contenant ni antibiotiques, ni organisme génétiquement modifié (OGM)818),
de meilleurs soins, plus d'espace et la satisfaction de leurs besoins physiologiques et
comportementaux spécifiques819. Certaines pratiques sont interdites, comme le gavage pour la
production du foie gras820, alors que d'autres, comme les mutilations courantes, ne le sont pas.
En pratique, il n'est donc pas possible d'avoir du foie gras certifié "bio" dans l'Union
européenne (à tout le moins tant qu'aucune méthode alternative au gavage ne sera employée).
Par contre, il est possible d'avoir des œufs biologiques alors même que les poules pondeuses
ont subi des mutilations douloureuses comme la coupe de leur bec821. La plupart des
mutilations courantes demeurent ainsi autorisées pour l'ensemble des espèces, y compris dans
le cadre de l'agriculture biologique. C'est pourquoi, les méthodes d'élevage en général et celles
relatives aux produits biologiques en particulier, comportent toujours de réelles insuffisances
quant à la protection du bien-être des animaux822. Et bien que les normes de bien-être soient
beaucoup plus élevées dans les élevages biologiques que les élevages industriels, le bien-être
des animaux ne pourra être optimal tant que des atteintes à leur intégrité seront autorisées.
En matière de protection du bien-être des animaux d'élevage, l'Union européenne fait figure
de modèle international pour ses dispositions avancées comme les interdictions adoptées.
815 Règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l'étiquetage des
produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91, JOUE n° L 264 du 3.10.2008. 816 Id., Art. 3 (a) iv) : La production biologique "respecte des normes élevées en matière de bien-être animal et, en
particulier, répond aux besoins comportementaux propres à chaque espèce animale" et c) "utilise des "procédés qui ne
nuisent pas à l'environnement, à la santé humaine, à la santé des végétaux ou à la santé et au bien-être des animaux". 817 Cf. BOY, L., "Production, étiquetage et contrôles des produits "bio" en droit communautaire", Droit de
l'environnement, no 165, pp. 24 -28, 01.01.2009, p.27. 818 Id., Art. 5 (k), Art. 9 (1) et 14 (e) ii). Notons que recours aux médicaments comme les antibiotiques est possible si
nécessaire à titre curatif et non à titre préventif comme dans la plupart des élevages industriels. 819 Id., Art.14 (1) ii. 820 Règlement (CE) no 889/2008 de la Commission du 5 septembre 2008 portant modalités d'application du règlement
(CE) no 834/2007 du Conseil relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques en ce qui
concerne la production
biologique, l'étiquetage et les contrôles, J.O. L 250/1 du 18.09.2008, Art.20 (5) : "Le gavage est interdit". 821 Voir le rapport du FARM ANIMAL WELFARE COUNCIL, "Beak Trimming of Laying Hens", Opinion of the
Farm Animal Welfare Council, 2007, p.1 : "Since the beak is a sensory organ [...] beak trimming itself may cause pain,
suffering and distress", en ligne "Le bien-être animal et les Signes de qualité" : http://pmaf.org/s-informer/nos-cam-
pagnes/le-bien-etre-animal-et-les-signes-de-qualite.html (date d'accès : 24.11.2012). 822 Voir BRELS, S., "Les limites de la réglementation "bio" en matière de protection du bien-être animal", Revue
trimestrielle de la Fondation Droit Animal Ethique et Sciences, n°75, octobre 2012, p. 6.
134
Depuis 2012, les cages en batterie sont interdites pour les poules pondeuses et la durée de
confinement dans les stalles de gestation est réduite pour les truies. Cette méthode devrait être
interdite en 2019 et une alternative à la castration des porcelets devrait être trouvée pour 2018.
Néanmoins, certaines limites importantes ressortent des instruments présentés. Contrairement
à l'objectif recherché, certaines normes peuvent aller jusqu'à cautionner le mal-être des
animaux derrière des apparences protectrices. En ce sens, les instruments relatifs aux élevages
intensifs autorisent toujours des espaces de vie restreints et des pratiques mutilantes
douloureuses. Celles-ci sont également autorisées dans les élevages biologiques, censés être
les plus protecteurs du bien-être des animaux. Outre le confinement et les conditions de vies
contre-nature dues à l'enfermement, certaines pratiques dont le caractère douloureux est
scientifiquement établi demeurent donc légalement autorisées par la réglementation
communautaire, laquelle figure pourtant parmi les plus protectrices au monde. Ainsi, il ressort
clairement que, malgré les avancées notables initiées par l'Union européenne, le bien-être des
animaux demeure un objectif secondaire face aux intérêts économiques des 27 pays membres.
Le bien-être des animaux est également secondaire face à la pratique religieuse constituée par
l'abattage rituel, comme en témoignent les divers instruments européens et communautaires.
§3) La réglementation européenne et communautaire sur l'abattage
Alors que les conventions du Conseil de l'Europe ont généralement précédé les instruments de
l'UE, la question de l'abattage des animaux constitue l'exception. En effet, la convention
européenne de 1979 (A) a été devancée par une directive communautaire dès 1974 (B).
A- La convention européenne de 1979 sur la protection des animaux d'abattage823
En 1973, une recommandation du Conseil de l'Europe invitait les pays membres à conclure
une convention européenne pour l'humanisation et l'harmonisation des méthodes d'abattage824.
Cette convention fut adoptée six ans plus tard, en 1979, et entra en vigueur en 1982.
Celle-ci s'applique aux animaux dits de "boucherie" destinés à la consommation alimentaire, à
savoir les solipèdes (ou équidés825), ruminants (bovins, ovins, caprins), porcins, lapins et
823 Convention européenne sur la protection des animaux d'abattage (n°102) , ouverte à signature le 10/5/1979 et
entrée en vigueur le 11/6/1982 [ci-après : "Convention abattage de 1979"]. 824 Recommandation 709 (1973) relative aux méthodes d'abattage des animaux de boucherie, citée dans le §1 de
l'introduction du rapport explicatif de la Convention abattage de 1979. 825 Dans le dictionnaire Larousse en ligne on peut lire que le terme "solipède" est le "synonyme ancien de équidé".
Peut-être celui-ci est 'il plus préféré car plus acceptable face à l'opposition croissante de la population européenne
envers la consommation d'équidés et en particulier envers l'hippophagie (ou consommation de viande de cheval vu les
liens de proximité pouvant exister avec cet espèce). Voir en ligne :
http://www.larousse.com/en/dictionaries/french/solip%C3%A8des (date d'accès : 14.11.2012).
135
volailles826. Dans le cadre de leur abattage, l'objectif de cette convention est d'épargner aux
animaux des souffrances et des douleurs, mais seulement "dans la mesure du possible"827.
Il ne s'agit donc que d'une obligation de moyens, et non de résultat, sachant qu'il est encore
impossible de garantir que la mise à mort d'un animal soit totalement exempte de douleurs de
nos jours. De plus, l'évitement des souffrances tant physiques que psychologiques des
animaux lors de l'abattage, est justifié par des arguments économiques plutôt qu'éthiques. En
effet, cette convention précise que : "la crainte, l'angoisse, les douleurs et les souffrances d'un
animal lors de l'abattage risquent d'influencer la qualité de la viande"828. En ce sens, le texte
précise qu'ils doivent être traités avec ménagement et ne doivent pas être apeurés829.
Cette convention prévoit l'immobilisation et l'étourdissement des animaux avant leur
abattage830. Cette obligation d'étourdissement préalable souffre néanmoins de plusieurs
exceptions relatives à plusieurs catégories d'abattages, à savoir les abattages rituels, d'urgence
et sanitaires, sachant qu'elle ne s'applique pas non plus aux lapins ni aux volailles831. En ce
qui concerne la dérogation religieuse, l'abattage rituel sans étourdissement était autorisé dans
la plupart des états membres du Conseil de l'Europe lors de l'adoption de la Convention en
1979. Il était toutefois déjà interdit dans certains pays comme en Islande, en Norvège, en
Suède, en Suisse et certains Landërs autrichiens832. Cette dérogation à l'obligation
d'étourdissement préalable pour les abattages rituels a été reprise dès les premiers instruments
communautaires.
B- Les directives de 1974 et 1993 et le règlement de 2009 sur les méthodes de mise à mort
La première législation communautaire sur la protection du bien-être des animaux est apparue
en 1974, avec la directive sur l'étourdissement des animaux avant leur abattage833. Alors que
les instruments communautaires ont été généralement adoptés suites aux conventions
européennes, la première directive communautaire sur l'abattage a été adoptée 5 ans avant la
826 Convention abattage de 1979, Art.1 (1). Tel qu'il a été vu dans la section précédente, les méthodes de mise à mort
des animaux élevés pour leur fourrure font l'objet d'une recommandation spécifique. 827 Id., Préambule, Considérant 2. 828 Id., Préambule, Considérant 3. 829 Id., Art.4 (1) et (3). 830 Id., Art.12. "Les animaux doivent être immobilisés immédiatement avant leur abattage si cela s'avère nécessaire et
[...] étourdis selon les procédés appropriés". Ces procédés sont décrit à l'article 16 de la convention et résumés de la
façon suivante : "L'insensibilisation des grands animaux doit être provoquée par un pistolet (instrument avec
percussion ou perforation au niveau du cerveau), par électronarcose ou par le gaz. L'utilisation du merlin, de la masse
et de la puntilla est interdite par la Convention. En outre, les grands animaux ne doivent pas être suspendus ou entravés
avant l'étourdissement". Voir le résumé de la convention en ligne :
http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Summaries/Html/102.htm (date d'accès : 14.11.2012). 831 Id., Art.17. 832 AUSEMS, E., op.cit., note 704, p.261. 833 Directive 74/577/CEE du Conseil, du 18 novembre 1974, relative à l'étourdissement des animaux avant leur
abattage, J.O. L 316 du 26.11.1974 [ci-après : "Directive étourdissement 1974"].
136
convention européenne de 1974. Cette directive reflétait alors l'émergence d'une
préoccupation communautaire pour la protection des animaux en ces termes :
« Considérant [...] qu'il est opportun d'entreprendre au niveau communautaire une
action visant à épargner aux animaux d'une façon générale tout traitement cruel ;
qu'il paraît souhaitable, dans un premier stade, de faire porter cette action sur les
conditions permettant de ne faire subir aux animaux, lors de leur abattage, que les
souffrances absolument inévitables.834 »
Le principe énoncé n'est toutefois pas absolu, puisque cette directive fait notamment primer la
liberté religieuse sur l'évitement des souffrances, à travers l'exception prévue pour les
abattages rituels835. Cette exception sera confirmée par la nouvelle directive de 1993836.
Celle-ci précise que l'obligation générale d'étourdissement préalable et de mise à mort
instantanée des animaux ne s'applique pas pour "certains rites religieux"837, en particulier
kasher et hallal.
À ce jour, les instances européennes continuent d'autoriser les anciennes méthodes au lieu de
se conformer aux avancées progressistes permettant une plus grande protection du bien-être
animal. En effet, les législations de plusieurs pays européens, comme le Luxembourg, la
Suède, la Suisse et la Slovénie imposent l'étourdissement (ou l'anesthésie) préalables dans le
cadre de tous les abattages, y compris dans le cadre des abattages rituels838. Depuis 2014, le
Danemark a aussi adopté une interdiction générale d'abattage sans étourdissement en arguant
de manière inédite que : "les droits des animaux passent avant les droits religieux"839.
En plus de l'épineuse question des abattages rituels, d'autres points controversés méritent
d'être soulevés. Par exemple, la directive de 1993 prévoit l'élimination systématique des
poussins en surnombre à la naissance840. Parmi les procédés autorisés, les poussins peuvent
834 Id., Préamb., Consid. 2. 835 Id., Art.4 : "La présente directive n'affecte pas les dispositions nationales relatives aux méthodes particulières
d'abattage nécessitées par certains rites religieux". 836 Directive 93/119/CE du Conseil, du 22 décembre 1993, sur la protection des animaux au moment de leur abattage
ou de leur mise à mort, J.O. L 340 du 31.12.1993 [ci-après : "Directive abattage 1993"]. 837 Id., Art.5 (2). 838 Art. 8 de la Loi sur la protection de la vie et le bien-être des animaux de 1983 au Luxembourg ; Art.14 (1) du
Animal Welfare Act en Suède ; Art.5§12 de la nouvelle Loi de protection des animaux de 2013 en Slovénie et Art.21
(1) de la Loi fédérale sur la protection des animaux de 2005 en Suisse. 839 EUROGROUP FOR THE ANIMALS, "Denmark bans slaughter without stunning", Eurobulletin, n°278,
17.02.2014, en ligne : http://us6.campaign-archive2.com/
?u=37bb3f4ec2d4325919242aa11&id=edbaec8e20&e=0016510d64#mo3 (date d'accès : 18.02.2014). 840 Directive abattage 1993, Art. 10 (3) : "Les poussins d'un jour [...] et les embryons en surnombre dans les couvoirs
et à éliminer sont mis à mort le plus rapidement possible".
137
être gazés, ou passés dans des broyeurs alors qu'ils sont encore vivants841. Généralisée en tant
que pratique courante, cette dernière méthode apparaît néanmoins particulièrement cruelle842.
Ainsi donc, la législation européenne sur la protection des animaux de production est encore
loin d'être idéale pour assurer le bien-être de ces animaux et leur épargner toute souffrance
évitable. En effet, ces dispositions confirment que l'objectif annoncé de protéger le bien-être
animal ne vise pas tant le bonheur des animaux visés, mais plutôt une réduction de leurs
souffrances dans la mesure du possible, c'est-à-dire dans la mesure où les intérêts
économiques, culturels ou religieux restent prioritaires.
Notons toutefois que les instances européennes encouragent la recherche de solutions
alternatives pour améliorer la protection des animaux, en s'assurant que celles-ci soient
transposables dans les législations internes des différents États membres, à savoir tant dans les
pays les plus protecteurs du bien-être des animaux, que dans les pays les moins protecteurs843.
Notons que le règlement de 2009844 exclut explicitement de son champ d'application la mise à
mort des animaux à des fins de recherche scientifique, de chasse ou de pêche récréatives et
lors de manifestations culturelles ou sportives845. Dans ce cadre, une manifestation comme la
corrida (ou tauromachie), où "le respect des exigences en matière de bien-être animal altère la
nature même de la manifestation concernée" est directement visée846. Tant que l'Union
européenne protégera les traditions culturelles plus que les animaux847, certains tels que les
taureaux de corrida ne pourront trouver aucun secours auprès de la législation communautaire.
Ce règlement de 2009 impose de recourir à l'emploi de certaines méthodes d'abattage
normalisées848, uniquement pour les animaux de production849. En plus du rappel de la
841 Id., Annexe G : "Procédés autorisés de mise à mort des poussins" : 1. "Utilisation d'un dispositif mécanique
entraînant une mort rapide" (broyeurs) ; 2. "Exposition au dioxyde de carbone" (gazage). 842 Voir GUICHET, J.-L. (dir.), Douleur animale, douleur humaine : Données scientifiques, perspectives
anthropologiques, questions éthiques, éditions Quae, 2010, p.119 : "Jeter des poussins dans un broyeur, même si, pour
certains humains, c'est l'habitude, le faire est aussi cruel. Le mot cruel convient bien à cette façon de faire.". 843 Parmi les anciens pays de l'UE, les États-membres pouvant être qualifiés de "protectionnistes" (ou moteur de
protection) sont notamment l'Angleterre et l'Allemagne. Quant aux pays "non-protectionnistes" (plus réticents envers
cette protection), il s'agit par exemple de la France et de l'Espagne. Voir MELIK, N., "La France face au "droit des
animaux" " et M.R., GAMERO, "L’Espagne, un pays non-protectionniste", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être
animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, pp. 227-248. 844 Règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur
mise à mort, J.O. L 303 du 18.11.2009 [ci-après : "Règlement mise à mort 2009"]. 845 Id., Art.1 (3). 846 Id., Préamb. §15. 847 Id., Préamb. §15 et 16. 848 Id., Annexe I. Liste des méthodes d'étourdissement (incluant les méthodes de mise à mort) : Méthodes mécaniques,
électriques, gazage et autres (injection mortelle). 849 "Le présent règlement établit des règles applicables à la mise à mort des animaux élevés pour la production de
denrées alimentaires, de laine, de peau, de fourrure, etc. Il fixe également des règles applicables à la mise à mort
d’urgence et en cas de lutte contre les maladies contagieuses. Les règles établies par le présent règlement ne
s’appliquent pas aux animaux mis à mort dans le cadre d’expériences scientifiques, d’activités de chasse, de
138
dérogation à l'étourdissement préalable pour les abattages rituels850, certaines interdictions y
sont formulées. Citons notamment l'interdiction de frapper les animaux ou de leur causer des
douleurs ou des souffrances évitables851. Cette prescription n'est pas nouvelle en ce qu'elle
était déjà dans la première loi britannique sur le traitement du bétail en 1822 (Martin's Act).
Au-delà des animaux terrestres, qu'en est-il de la mise à mort des poissons d'élevage ?
Ce règlement souligne un manque d'informations scientifiques et commande un rapport à ce
sujet pour décembre 2014852. En attendant, le principe selon lequel : "toute douleur, détresse
ou souffrance évitable est épargnée aux animaux lors de la mise à mort" leur est applicable853.
Suite aux premières conventions sur les animaux de production dans les années 1970, le
Conseil de l'Europe s'est tourné vers la protection des animaux de laboratoire et de compagnie
à partir des années 1980. Ces prescriptions ont été suivies seulement en partie par l'UE.
S.2- La protection européenne et communautaire des animaux de laboratoire et de
compagnie
Les instruments européens et communautaires se sont d'abord penchés sur les animaux de
laboratoire (§1), avant de concerner la protection et le transit des animaux de compagnie (§2)
§1- La réglementation européenne et communautaire sur l'expérimentation
La convention européenne sur l'expérimentation (A), comme la première directive
communautaire sur l'expérimentation (B), a été adoptée puis renforcée.
A- Les instruments du Conseil de l'Europe sur l'expérimentation
La convention sur l'expérimentation de 1986 (1) a été amendée par un protocole en 1998 (2).
manifestations culturelles ou sportives et de l’euthanasie pratiquée par un vétérinaire, ni aux volailles ou aux lapins
tués pour une consommation personnelle". Synthèse du Règlement n° 1099/2009 en ligne sur Europa :
http://europa.eu/legislation_summaries/food_safety/animal_welfare/sa0002_fr.htm (date d'accès : 8.01.2013). 850 Règlement mise à mort 2009, Art. 4 (4). 851 Id., Annexe II (1.8) : "Il est interdit a) de frapper les animaux ou de leur donner des coups de pied ; b) d’exercer des
pressions aux endroits particulièrement sensibles du corps des animaux d’une manière qui leur cause des douleurs ou
des souffrances évitables ; c) de soulever les animaux par la tête, les oreilles, les cornes, les pattes, la queue ou la
toison ou de les manipuler d’une manière qui leur cause des douleurs ou des souffrances. Toutefois, l’interdiction de
soulever les animaux par les pattes n’est pas applicable aux volailles, lapins et lièvres ; d) d’utiliser des aiguillons ou
d’autres instruments pointus ; e) de tordre, d’écraser ou de casser la queue des animaux ou de les saisir aux yeux". 852 Id., Préamb. § 6 et 58 et Art. 27 (1) : ""1. Au plus tard le 8 décembre 2014, la Commission présente au Parlement
européen et au Conseil un rapport sur la possibilité d’introduire certaines prescriptions relatives à la protection des
poissons au moment de leur mise à mort, qui tiennent compte des aspects liés au bien-être des animaux ainsi que des
incidences socio-économiques et environnementales. Ce rapport est, le cas échéant, accompagné de propositions
législatives visant à modifier le présent règlement en y ajoutant des dispositions spécifiques concernant la protection
des poissons au moment de leur mise à mort". 853 Id., Art. 3 (1) sur la base du Préamb. §11 et Art. 1 (1) : "en ce qui concerne les poissons, seules les prescriptions
énoncées à l’article 3, paragraphe 1, s’appliquent".
139
1- La convention européenne sur l'expérimentation de 1986
En 1971, une recommandation de l'Assemblée condamnait "les pratiques et les méthodes
vivisectionnistes, qui infligent inutilement des souffrances aux animaux"854. Quinze ans après,
fut adoptée la Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des
fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques en 1986855. Le titre renseigne sur son
champ d'application puisque cette convention concerne "tout vertébré vivant non humain"
dans le cadre de "toute procédure expérimentale ou autre procédure scientifique susceptibles
de provoquer des dommages durables, des douleurs, des souffrances ou de l'angoisse"856.
La convention vise à limiter l'utilisation des animaux à des fins expérimentales ou d'autres
fins scientifiques, avec pour finalité de remplacer cette utilisation lorsque c'est possible, par
des méthodes de substitution, ainsi qu'à réduire les souffrances causées, au minimum,
lorsqu'elles sont jugées inévitables857. L'expérimentation animale est justifiée en ces termes :
« l'homme, dans sa quête de connaissance, de santé et de sécurité, a besoin
d'utiliser des animaux lorsqu'on peut raisonnablement espérer que cela fera
progresser la connaissance, ou produira des résultats utiles d'une façon générale
pour l'homme ou pour l'animal, au même titre qu'il utilise les animaux pour se
nourrir, pour se vêtir et comme bêtes de somme »858.
Cette affirmation résume bien l'approche adoptée par les instruments européens en matière de
bien-être animal. Au lieu de remettre en cause les différentes formes d'utilisation des
animaux, ils visent juste à réduire leurs souffrances. En ce sens, la convention reconnaît que :
« l'homme a l'obligation morale de respecter tous les animaux et de prendre
dûment en considération leur aptitude à souffrir et à se souvenir »859.
Afin de se conformer à cette obligation morale, la convention pose des normes minimales
pour la protection des animaux dans le cadre expérimental. Elle prévoit notamment certaines
exigences en termes de soin et d'hébergement, ainsi que la suppression des dommages
854 Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Recommandation 621 (1971) relative aux problèmes posés par
l'utilisation d'animaux vivants à des fins expérimentales ou industrielles, §3. 855 Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins
scientifiques, Ouverte à signature le 18/3/1986 et entrée en vigueur le 1/1/1991 [ci-après : "Convention
expérimentation 1986"]. 856 Id., Art.1 (2) et (1). 857 Id., Préamb., al.6. Sans le mentionner explicitement, cette convention vise ainsi le principe dit des "3 R" qui
concerne la réduction du nombre d'animaux utilisés ; le remplacement des animaux par des méthodes alternatives ; et
le raffinement des méthodes expérimentales vers une diminution des souffrances des animaux. 858 Convention expérimentation 1986, Préamb., al.4. 859 Convention expérimentation 1986, Préamb., al.3.
140
durables, des douleurs, des souffrances et de l'angoisse des animaux, à travers l'utilisation
d'une anesthésie, d'une analgésie ou d'autres méthodes, à chaque fois que cela est possible860.
2- Le protocole d'amendement de 1998 sur l'expérimentation
Sept ans après son entrée en vigueur en 1991, la convention a été amendée par un protocole
en 1998. Entré en vigueur en 2005, il tend à faciliter l'actualisation des dispositions
conventionnelles à la lumière de l'évolution des connaissances scientifiques et de l'expérience
pratique acquise861. En effet, la prise en compte de ces informations semble essentielle à
l'amélioration de la protection des animaux en général et ceux de laboratoire en particulier.
Notons que l'année où la convention principale a été adopté, l'Union européenne a elle aussi
adopté sa première directive sur l'expérimentation en 1986.
B- Les instruments de l'Union européenne sur l'expérimentation
Avant la dernière directive sur l'expérimentation de 2010 (1), l'Union européenne avait adopté
un règlement interdisant de tester les produits cosmétiques sur les animaux en 2009 (2).
1- La directive sur l'expérimentation de 2010862
La première directive sur l'expérimentation animale adoptée en 1986863 a été remplacée par
une nouvelle directive plus protectrice en 2010864. Celle-ci consacre notamment certains
principes fondamentaux comme la valeur intrinsèque des animaux (devant être respectée), le
fait que les animaux sont des créatures sensibles (devant être traitées comme telles), celle-ci
insistant réellement sur l'objectif de bien-être des animaux (devant être systématiquement
recherché)865.
860 Id., Art. 5 et Art. 1 (2), c). 861 Voir le résumé du Protocole d'amendement à la Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés
utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, ouvert à signature le 22 juin 1998 et entré en vigueur
le 2 décembre 2005. 862 Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des
animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33 du 20.10.2010 [Ci-après : "Directive expérimentation 2010"]. 863 Directive du Conseil 86/609/CEE du 24 novembre 1986 concernant le rapprochement des dispositions législatives,
réglementaires et administratives des États membres relatives à la protection des animaux utilisés à des fins
expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, J.O. L 117 du 05.05.1987. 864 La nouvelle directive semble tenir compte des critiques formulées par les spécialistes sur la protection insuffisante
de la précédente directive (notamment quant à la nécessité de protéger les invertébrés sensibles comme les
céphalopodes). Ces critiques figurent notamment dans l'article de J.-C. NOUËT, “L’utilisation expérimentale de
l’animal” dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.), Animaux et droits européens : au-delà de la distinction
entre les hommes et les choses, Paris, Pédone, 2009, pp. 151-162 865Directive expérimentation 2010, Préamb. al.12, 6 et 7.
141
Ainsi, le concept de bien-être animal apparaît dans la plupart des dispositions de cette
directive comme une priorité incontournable866. Dès son préambule, elle reconnaît que le
bien-être animal est une valeur importante du droit communautaire867. Elle reconnait aussi
l'importance de la protection et du bien-être des animaux utilisés à des fins scientifiques au
niveau international, comme la nécessité de l'améliorer en faisant référence aux attentes de
l'opinion publique868. Elle encourage aussi l'optimisation de l'utilisation des animaux dans le
cadre expérimental afin de causer le moins de douleurs, souffrances ou angoisses possibles869.
Tout en reprenant les bases de la convention européenne de 1986870, cette directive élargit son
champ de protection en tenant compte des dernières avancées scientifiques. Elle accorde ainsi
une protection plus extensive, appliquée pour la première fois aux invertébrés comme les
céphalopodes vivants, ainsi qu'aux formes larvaires autonomes et aux formes fœtales des
mammifères871. L'Union européenne témoigne ainsi d'une avancée notable en affirmant la
"volonté d'accorder sa protection à toute forme de vie animale susceptible d'être affectée par
la souffrance et la douleur"872.
Cette directive semble d'autant plus protectrice qu'elle annonce, à terme, l'objectif final visant
le remplacement total des procédures appliquées à des animaux vivants873. Dans cet objectif
de mettre fin à la vivisection des animaux, elle préconise le recours aux méthodes alternatives,
tout en se référant au principe dit des "3R" (ou triple objectif "de réduction, de remplacement
et de raffinement"874). L'utilisation d'animaux vivants doit ainsi être remplacée par d'autres
moyens dans toute la mesure du possible et, si cette utilisation est inévitable, le nombre
d'animaux utilisés, comme les souffrances infligées, doivent être réduits au minimum875.
Sans interdire l'utilisation des primates non-humains, la directive recommande de l'éviter,
lorsque le recours à d'autres espèces peut permettre d'atteindre le but recherché876. Malgré
866 L'ensemble des dispositions suivantes font référence au "bien-être" des animaux : Préamb. al.
2,3,6,7,13,25,26,28,30,31,35,48,49,54 et Art. 5, 11, 16, 19, 20, 21,24, 25, 26, 27, 33, 42, 44, 49, 58 ; Annexe III et
Section I. 867 Id., Préamb. al.2. 868 Id., Préamb. al.3, 6 et 7. Cette première affirmation se situe dans le cadre de l'adhésion à la convention européenne
en 1999. 869 Id., Préamb. al.13. 870 La précédente directive de 1986 reprenait également les dispositions de la convention sans lui être identique sachant
que le Parlement européen jugeait déjà celle-ci "trop faible". Voir AUSEMS, E., op.cit., note 704, p.265. 871 Art.1 (3) du préambule de la Directive expérimentation 2010. 872 MARGUÉNAUD, J.-P., "La nouvelle directive européenne du 22 septembre 2010 relative à la protection des
animaux utilisés à des fins scientifiques : une révolution masquée", Revue semestrielle de droit animalier, 2/2010, pp.
35-42. Au delà de s'étendre aux invertébrés comme les "céphalopodes", cette directive concerne aussi les "formes
fœtales des mammifères" (Directive expérimentation 2010, Préamb. al. 8 et 9). 873 Directive expérimentation 2010, al.10. 874 Id., Préamb. al.11. 875 Id., Art.4 explicitant le "Principe de réduction, de remplacement et de raffinement". 876 Id., Art.8 (1), b).
142
tout, leur utilisation est toujours courante en vertu de leur proximité avec l'être humain877.
Il est donc exceptionnellement autorisé de les capturer dans la nature, même lorsqu'il s'agit
d'espèces menacées d'extinction, contrairement aux autres espèces animales878. Les chats et
les chiens font également l'objet de dispositions particulières879. La directive précise que, suite
à leur utilisation, ceux-ci doivent pouvoir être replacés dans des foyers sachant que :
"l'opinion publique se préoccupe grandement de leur sort"880. Afin que les animaux puissent
être adoptés (ou remis en liberté pour les animaux capturés dans la nature), leur état doit être
jugé "convenable" suite aux expérimentations, même répétées881. Dans les faits, les animaux
sont le plus souvent mis à mort par des méthodes réglementées, en particulier l'euthanasie882.
L'année précédant cette directive, un règlement particulier est venu interdire l'expérimentation
des animaux à des fins cosmétiques au sein de l'Union européenne.
2- Le règlement sur les produits cosmétiques de 2009883
Le règlement de 2009 est venu remplacer une première directive de 1976 sur les produits
cosmétiques884. Ce règlement rappelle l'obligation imposant que les expérimentations
animales soient remplacées par des méthodes alternatives, dès lors que de telles méthodes
existent et sont scientifiquement acceptables885. Etant donné qu'il est déjà possible d'assurer la
sécurité des produits cosmétiques finis sur la base des connaissances acquises, des
dispositions interdisant l'expérimentation animale pour ces produits ont été prévues886.
En vigueur depuis 2013, ce règlement interdit l'expérimentation animale pour les produits
finis et leurs ingrédients, ainsi que la mise sur le marché des produits ou des ingrédients testés
sur les animaux au sein de l'UE887. Dans des circonstances exceptionnelles, un Etat membre
peut toutefois demander une dérogation si un ingrédient largement utilisé et ne pouvant être
remplacé suscite de graves préoccupations pour la sécurité des consommateurs888.
877 Voir par exemple : KALISTE, E., The Welfare of Laboratory Animals, Kluwer, 2004, p. 333. 878 Id., Préamb. al.19 : la capture des primates à l'état sauvage est néanmoins découragée, Art.7 (2) et Art.9 (1) :
interdictions générales de capture des animaux sauvages et de recourir aux espèces menacées d'extinction à des fins
d'expérimentation, sauf pour les primates non-humains. 879 Art.31 et 32. 880 Id., Préamb. al.26. 881 Id., Art.16 et 19. 882 Id., Art.6 et Annexe VI. 883 Règlement (CE) n o 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits
cosmétiques, J.O. L 342 du 22.12.2009 [ci-après : "Règlement cosmétique 2009"]. 884 Directive 76/768/CEE du Conseil, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des législations des États
membres relatives aux produits cosmétiques, J.O. L 262 du 27.9.1976. 885Règlement cosmétique 2009, Préamb. al.39. En référence à l'art.7 de la Directive expérimentation 1986. 886 Id., Préamb., al. 41. 887 Id., Art.18. 888 Id.
143
Suite à l'expérimentation animale, le Conseil de l'Europe s'est penché sur la protection des
animaux de compagnie.
§2) La réglementation européenne et communautaire sur les animaux de compagnie
Au niveau européen, le traitement des animaux de compagnie est réglementé par la
convention du Conseil de l'Europe de 1987 (A). L'Union européenne n'a pas adhéré à cette
convention et dispose seulement d'un règlement sur les mouvements non-commerciaux des
animaux de compagnie (B).
A- La convention européenne sur la protection des animaux de compagnie de 1987889
En 1979, le Conseil de l'Europe recommandait d'éviter les problèmes d'hygiène et de
surnombre des animaux errants, à travers le contrôle du commerce et des populations
d'animaux de compagnie890. Ainsi, l'objectif initial du projet de convention européenne
consistait moins à protéger le bien-être des animaux de compagnie, que la sécurité et la santé
humaine891. Comme nous le verrons, cette idée est encore celle reflétée par la réglementation
communautaire. La convention européenne de 1987 définit un animal de compagnie comme :
« tout animal détenu ou destiné à être détenu par l'homme, notamment dans son
foyer, pour son agrément et en tant que compagnon »892.
Sachant que les conditions de détention des animaux de compagnie ne permettent pas toujours
de promouvoir leur santé et leur bien-être, la convention décourage notamment la détention
d'animaux sauvages893. Une résolution a été adoptée face aux problèmes posés par la
détention croissante d'animaux sauvages, dits nouveaux animaux de compagnie (NAC)894.
Aux fondements de cette convention, le Conseil de l'Europe reconnaît généralement que :
889 Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie (n°123), ouverte à signature le 13/11/1987 et
entrée en vigueur le 1/5/1992 [ci-après : "Convention animaux de compagnie 1987"]. 890 Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Recommandation 860 (1979) relative aux dangers de la
surpopulation des animaux de compagnie pour l'hygiène et la santé de l'homme, et aux moyens humanitaires de les
limiter, 5. "Recommande au Comité des Ministres de charger le comité d'experts intergouvernemental compétent en la
matière d'élaborer une convention européenne, portant en particulier: i. sur le contrôle du commerce des animaux ; ii.
sur le contrôle des populations animales". 891AUSEMS, E., op.cit., note 704, p.267-268. Au départ le Comité des Ministres n'était pas convaincu de la nécessité
d'adopter une convention sur les animaux de compagnie et c'est grâce aux travaux du Comité d'experts, en
collaboration étroite avec des organisations comme la Société mondiale pour la protection des animaux et l'Eurogroupe
pour la protection des animaux que cette convention a pu voir le jour. 892 Convention animaux de compagnie 1987, Art.1 (1). 893 Id., Préamb. al.9 et 7. 894Résolution sur la détention d'animaux sauvages comme animaux de compagnie, Consultation Multilatérale des
Parties à la Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, Strasbourg, 10 mars 1995.
144
« l'homme a une obligation morale de respecter toutes les créatures vivantes et [...]
les liens particuliers existant entre l'homme et les animaux de compagnie »895.
En tant que principes à la base du bien-être animal, la convention pose la double interdiction
de causer inutilement des douleurs, des souffrances ou de l'angoisse ; ainsi que d'abandonner
un animal de compagnie896. Elle émet également une double obligation de responsabilité et de
satisfaction des besoins des animaux, afin d'assurer leur santé et leur bien-être, pour toute
personne qui en a la garde 897. Il s'agit notamment de leur procurer des installations, des soins
et de l'attention conformes aux besoins de leur espèce898. Il s'agit également de leur fournir de
la nourriture et de l'eau convenables, en quantité suffisante, des possibilités d'exercice
adéquates, et de prendre toutes les mesures raisonnables pour ne pas les laisser s'échapper899.
Une interdiction générale est formulée pour les interventions chirurgicales à des fins non-
curatives900. En particulier, la coupe de la queue, des oreilles, la section des cordes vocales,
ainsi que l'ablation des griffes et des dents sont en principe interdites pour les animaux de
compagnie901. Enfin, les opérations chirurgicales et les conditions d'élevage des animaux de
compagnie font l'objet de dispositions détaillées au sein de résolutions spécifiques902.
En 2003, un règlement communautaire a aussi été adopté sur les animaux de compagnie.
B- Le règlement communautaire sur le transit des animaux de compagnie903
Le règlement sur les mouvements non-commerciaux des animaux de compagnie de 2003
porte notamment sur les formalités de police sanitaire. Il s'agit ici de protéger la santé
humaine, plus que le bien-être animal. Ce règlement exige par exemple un certificat de santé
valide lors du transit de ces animaux dans les pays de l'Union européenne904. Contrairement
aux autres conventions protectrices du Conseil de l'Europe, les dispositions européennes sur le
traitement des animaux de compagnie n'ont pas été intégré en droit communautaire à ce jour.
895 Id., Préamb., al.3. 896 Id., Art.3 (1) et (2). 897 Id., Art.4 (1) 898 Id., Art.4 (2). 899 Id., Art.4 (2), a, b, c. 900 Id. Art.10. 901 Id. Art.10 (1) a,b,c. Deux exceptions sont prévues à cette interdiction par l'Art.10 (2) en cas de nécessité de
procéder à une intervention non curative soit pour des raisons de médecine vétérinaire ou dans l'intérêt d'un animal
particulier, soit pour empêcher la reproduction. 902 Résolution sur les opérations chirurgicales chez les animaux de compagnie et Résolution sur l'élevage des animaux
de compagnie, Consultation Multilatérale des Parties à la Convention européenne sur la protection des animaux de
compagnie, Strasbourg, 10 mars 1995. 903 Règlement (CE) n°998/2003 du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 concernant les conditions de
police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d'animaux de
compagnie, et modifiant la directive 92/65/CEE du Conseil, J.O. L. 146 du 13.6.2003. 904 Id. Art. 8(2).
145
En regard de la protection accordée au bien-être animal dans de nombreux domaines
communs au niveau européen et communautaire, pourquoi les animaux de compagnie ne font
pas encore l'objet d'une protection communautaire spécifique ? Notons que les dispositions de
la convention du Conseil de l'Europe s'appliquent aux pays membres qui l'ont ratifié, dont
plusieurs sont également membres de l'Union européenne. Ainsi, les principes de la
convention européenne s'appliquent aux pays de l'UE que sont : l'Allemagne, la Belgique, le
Danemark, la France, la Finlande, la Lettonie, le Luxembourg, le Portugal et la République
Tchèque905.
Émettons des remarques générales sur le traitement différentiel entre les animaux d'élevage et
les animaux de compagnie, tel qu’il ressort des instruments européens présentés.
Une opposition forte entre la protection accordée aux animaux de compagnie et aux animaux
d'élevage ressort des instruments européens (à l'image d'autres pays du monde). En effet, alors
que les interventions chirurgicales non-curatives (dont les mutilations esthétiques) sont
interdites par la convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, les
mutilations courantes dans le cadre de l'élevage sont encore majoritairement autorisées,
lorsqu'elles ne sont pas réglementées. En pratique, il est donc interdit de couper les oreilles et
la queue d'un chien sans raison médicale valable, mais il est parfaitement autorisé de couper le
bec des volailles, les cornes des bœufs ou la queue des porcs pour des raisons pratiques.
Au-delà des différentes finalités visées (esthétiques vs. pratiques), cette différence de
traitement semble pouvoir s'expliquer par une logique de sensibilité variable selon les
catégories d'animaux concernées. En effet, les animaux de compagnie figurent en tête de la
considération affective des européens (et des citoyens du monde en général). Ceux-ci
bénéficient ainsi d'une protection supérieure aux animaux d'élevage qui, eux, font l'objet d'une
considération moindre en tant qu'animaux destinés à la consommation. Néanmoins, afin de
satisfaire une logique plus cohérente, ne serait-il pas temps de rechercher une plus grande
égalité de traitement juridique entre tous les animaux ?
Puisque les animaux d'élevage comme les animaux de compagnie, sont des êtres sensibles,
tous semblent mériter d'être respectés et traités équitablement, notamment en vertu de
l'obligation d'évitement des souffrances, répétée dans les différentes conventions européennes
sur la protection du bien-être des animaux906.
905 Voir l'état des signatures et ratifications de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie
sur le site du Conseil de l'Europe, en ligne : http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ChercheSig.asp
?NT=125&CM=8&DF=09/11/2012&CL=FRE (date d'accès : 18.11.2012). Notons que l'Azerbaïdjan l’a aussi ratifié. 906 Notamment celles précitées sur le transport international, l'expérimentation et les animaux de compagnie.
146
- Conclusion du chapitre 1 :
En matière de protection européenne du bien-être animal, il est possible de conclure que les
instruments du Conseil de l'Europe et ceux de l'Union européenne coïncident bien souvent
mais pas systématiquement. Alors que la directive communautaire de 1974 sur l'abattage a
précédé la convention européenne de 1979, les conventions du Conseil de l'Europe ont
généralement devancé les instruments adoptés par l'Union européenne dans les autres
domaines, à commencer par les premières conventions sur le transport en 1968 et l'élevage en
1976. Le droit communautaire a intégré la plupart des dispositions européennes sous forme de
directives et de règlements. Néanmoins, les dispositions conventionnelles relatives à la
protection des animaux de compagnie sont absentes du droit communautaire, lequel ne
prévoit que des formalités sanitaires lors du transit de ces derniers. Notons aussi que,
contrairement aux autres recommandations du Conseil de l'Europe, les recommandations
relatives à l'élevage des animaux à fourrure et des palmipèdes à foie gras n'ont pas non plus
été intégrées sous forme de directive ou de règlement spécifique en droit communautaire.
À l'inverse, le champ de protection communautaire a parfois dépassé celui des normes
conventionnelles dans certains domaines. Dans le cadre de l'élevage par exemple, la
réglementation sur les produits biologiques vise des normes de protection plus élevées quant
au bien-être des animaux. Dans le cadre expérimental, la réglementation sur les produits
cosmétiques interdit de tester ces produits ou leurs ingrédients sur les animaux depuis 2013.
De plus, les exigences communautaires peuvent aller au-delà des exigences européennes dans
ces domaines. De nouveau en matière d'élevage, il existe des restrictions supplémentaires
concernant les cases de gestation pour les truies et l'obligation de remplacer les cages en
batterie traditionnelles par des cages aménagées pour les poules pondeuses depuis 2012. Pour
ce qui est de l'expérimentation, certaines espèces font l'objet de dispositions spéciales comme
les primates, les chiens et les chats, et la protection classique des vertébrés est étendue aux
invertébrés comme les céphalopodes, jusqu'aux formes précoces de développement comme
les larves autonomes et les fœtus des mammifères.
Malgré le caractère avancé de la protection européenne du bien-être animal sur la scène
internationale, certaines lacunes méritent d'être relevées concernant les animaux sauvages
captifs et libres, les animaux élevés pour leur fourrure, ainsi que les animaux mis en spectacle.
Néanmoins, ces avancées semblent d'autant plus envisageables que de nombreux pays
européens ont déjà adopté des interdictions concernant certaines méthodes de chasse comme
la chasse à courre, les animaux sauvages dans les cirques, l'élevage des animaux à fourrure,
147
les combats d'animaux pour lesquels seuls subsistent l'autorisation des combats de coq en
France (dans la région du nord et dans les îles) et la tauromachie dans 3 pays européens (au
Portugal, en Espagne -sauf en Catalogne- et dans le Sud de la France). Or il semble
souhaitable, pour les animaux concernés, que l'Union européenne aborde aussi ces problèmes.
L'UE mériterait également d'étendre sa réglementation sur les zoos à la protection du bien-être
des animaux captifs. En effet, s'il existe une réglementation communautaire sur les espèces
sauvages dans les zoos, il n'existe aucune réglementation visant à protéger spécifiquement le
bien-être des animaux sauvages en captivité. Il en est de même pour les parcs aquatiques, les
cirques et plus généralement les spectacles avec animaux. Pourtant, une telle réglementation
semble s'avérer nécessaire en regard des souffrances physiques et psychologiques subies par
les animaux concernés907. Dans les zoos et les parcs aquatiques, les animaux sauvages en
captivité sont souvent victimes d'une grande détresse psychologique. Dans les cirques, le
domptage des animaux peut impliquer le recours à des instruments violents comme les fouets
pour les fauves et les crochets pour les éléphants908. Concernant d'autres spectacles comme les
combats d'animaux, certaines atteintes extrêmes sont constituées par des blessures profondes,
lesquelles causent des souffrances prolongées, allant même jusqu'à la mort, comme celle,
ritualisée, du taureau de corrida dans certains pays909 (en Espagne, au Portugal et en France
concernant les pays de l'Union européenne910). À ce sujet, notons que le Comité d'experts sur
la protection des animaux du Conseil de l'Europe a été supprimé en 1987, alors même qu'il
proposait d'étudier la protection des animaux exposés au public (dans les jardins zoologiques,
parcs safari, cirques, corridas etc.)911. Cette décision apparaît : "regrettable compte tenu du
rôle de pionnier que le Conseil de l'Europe a joué en la matière au plan international"912.
Concernant les espèces sauvages en liberté, notons également l'absence de réglementation
européenne sur les méthodes de capture, de chasse et de pêche. À l'image des autres
instruments sur le bien-être animal, celle-ci pourrait permettre d'établir des normes minimales
à respecter dans ces domaines, en interdisant par exemple l'emploi de certains pièges comme
907 Voir NOUËT, J.-C. et S.NE, "La condition animale dans les cirques", dans BURGAT, F., L'animal dans nos
sociétés, Paris, Documentation française, 2004, pp.90-91. 908 Voir DERIABKINE, V., "L’expérience d’un dompteur", dans BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés, Paris,
Documentation française, 2004, pp.91-92. 909 Voir BARATAY, E. et E. HARDOUIN-FUGIER, "La corrida : esthétisation et intellectualisation du combat", dans
BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés, Paris, Documentation française, 2004, pp.92-93. 910 Voir MAUDET, J.-B., Terres de taureaux - Les Jeux taurins de l'Europe à l'Amérique, Madrid, Casa de Velasquez,
2010. 911 AUSEMS, E., op.cit., note 704, p.270. Bien qu'une recommandation de 1999 demandait que le Comité puisse
"continuer à développer les activités" pour protéger le bien-être des animaux, le Comité des Ministres du Conseil de
l'Europe a refusé de la suivre. 912 Id.
148
l'utilisation de gluaux (qui engluent les oiseaux), ou des pratiques visant à tirer sur des oiseaux
libérés de leur cage, ou encore la chasse à courre (interdite dans plusieurs pays européens913).
Concernant les méthodes de pêche, il serait possible d'interdire l'utilisation des poissons
vivants comme appât et les hameçons avec ardillon, à l'image de la législation suisse914.
Néanmoins, comme nous le verrons dans la section suivante, certaines méthodes de piégeage,
comme les pièges à mâchoires, ont été interdit depuis 1991 et font l'objet d'accords
internationaux à l'initiative de l'Union européenne. Celle-ci conteste également une méthode
de chasse en particulier, à savoir la chasse aux phoques, puisqu'elle a interdit le commerce des
produits dérivés du phoque depuis 2009, afin de protéger le bien-être de ces animaux915.
Enfin, il convient de préciser que d'autres instruments communautaires ont été adoptés, mais
plus dans un objectif de conservation des espèces menacées d'extinction que de protection du
bien-être des animaux. Il s'agit notamment de la directive sur les zoos de 1999 (visant à
préserver la biodiversité916), de la directive sur les bébés-phoques de 1983 (visant à préserver
les populations de phoques harpés et à capuchon, alors menacées917) et du règlement sur les
captures accidentelles des cétacés dans les pêcheries de 2004 (visant la population gravement
menacée des marsouins en mer Baltique918). Bien que la notion de bien-être animal ne soit pas
mentionnée dans ces instruments, elle n'en est pas totalement absente. En effet, la directive
sur les zoos précise que les animaux doivent être détenus et élevés dans des conditions
appropriées919, la directive sur les peaux de bébé-phoques avait, déjà en 1983, pour
motivation implicite la contestation des méthodes de chasse au phoque (pratiquées alors sur
lesdits blanchons920) et le règlement sur les cétacés remet également en cause des méthodes de
913 La chasse à courre est interdite en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne mais perdure en France. 914 Art. 23(1), b) et c), de l'Ordonnance sur la protection des animaux, RS 455.1 du 23 avril 2008. 915 Préamb., al.1 du Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 sur le
commerce des produits dérivés du phoque, J.O. L 286/36 du 31.10.2009. 916 Art.1de la Directive 1999/22/CE du Conseil, du 29 mars 1999, relative à la détention d'animaux sauvages dans un
environnement zoologique, J.O. L 094 du 09.04.1999 [ci-après : "Directive zoo"]. 917 Préamb., Consid.1 de la Directive 83/129/CEE du Conseil du 28 mars 1983 concernant l'importation dans les États
membres de peaux de certains bébés-phoques et de produits dérivés, J.O. L 091/30 du 09.04.1983. 918 Préamb., al.8 du Règlement (CE) n° 812/2004 du Conseil du 26 avril 2004 établissant des mesures relatives aux
captures accidentelles de cétacés dans les pêcheries et modifiant le règlement (CE) n° 88/98, J.O. L 150 du
30.04.2004. 919 Directive zoo, Art. 3 : "la détention des animaux dans des conditions visant à satisfaire les besoins biologiques et de
conservation des différentes espèces, en prévoyant, notamment, un enrichissement des enclos en fonction de chaque
espèce et le maintien de conditions d'élevage de haut niveau, assorti d'un programme étendu de soins vétérinaires
prophylactiques et curatifs et de nutrition". 920 Par exemple, le Canada a interdit depuis 1987 la chasse des petits du phoque du Groenland (blanchons) et des petits
du phoque à capuchon (dos bleu). Il est fort possible de supposer que l'embargo européen imposé de 1983 à 1985 pour
ces espèces de "bébé-phoques" a eu une influence sur l'adoption de cette interdiction, notamment en considération du
regard défavorable de l'opinion public pour cette chasse. Désormais, ceux-ci ne peuvent être chassés que lorsqu'ils sont
devenus "autonomes" (après 12 jours). Voir le site "Pêches et Océans Canada" en ligne : http://www.dfo-
mpo.gc.ca/fm-gp/seal-phoque/myth-fra.htm#Mythe_04 (date d'accès : 7.12.2012).
149
pêche massacrant des populations entières921. Au-delà de l'objectif de préservation des
espèces menacées d'extinction, l'UE en viendra peut-être à aborder plus généralement
l'ensemble de ces problèmes par le prisme de l'objectif communautaire de bien-être animal.
Dans cette section, nous avons vu que les premières conventions de protection du bien-être
animal ont été généralement adoptées par le Conseil de l'Europe, avant d'être retranscrites en
droit communautaire922. Ces instruments constituent ainsi une double protection juridique, à
la fois européenne et communautaire, du bien-être animal923. Dans la section suivante, nous
verrons que cette protection fait l'objet d'une consolidation constante en droit communautaire.
921 En plus des dauphins, les baleines, tortues et oiseaux sont pris dans les filets maillants et les filets perdus qui
dérivent en mer : "On dénombre chaque année plus d'un million de ces morts non intentionnelles". Voir JEANGÈNE
VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p.254. 922 Notons l'exception en matière d'abattage d'abord abordée par l'UE dans sa première directive protectrice du bien-
être animal en 1974. 923 Voir le Tableau sur la double protection européenne et communautaire à la fin de l'Annexe 2.
150
CHAP. 2- LA PROTECTION RENFORCÉE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
EN DROIT COMMUNAUTAIRE
Bien que cette thèse ait pour objectif de traiter des instruments juridiques de la protection du
bien-être animal, plus que des acteurs de cette protection, ceux-ci ne doivent pas être oubliés
pour autant. Au niveau communautaire notamment, les principaux acteurs ayant permis cette
protection, ainsi que sa progression constante, méritent d'être brièvement présentés. Il s'agit
notamment de l'Eurogroupe ("Eurogroup for Animals") en tant qu'organisation unificatrice et
centralisatrice des associations européennes de protection des animaux, laquelle joue un rôle
fondamental afin de promouvoir et améliorer la protection du bien-être animal au niveau
européen924. En tant qu'organe législatif, le Parlement européen joue également un rôle clé en
faveur du bien-être animal. En tant qu'organe exécutif, la Commission européenne peut
également apporter son soutien essentiel au niveau décisionnel925. Quant au niveau judiciaire,
la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a un rôle important à jouer afin de
reconnaître l'importance croissante de l'objectif de bien-être animal en droit communautaire.
En effet, l'arsenal juridique, comme la valeur accordée à la protection du bien-être animal,
n'ont cessé de croître au niveau communautaire. Alors que nous avons précédemment
présenté des instruments de droit communautaire dérivé à travers les directives et règlements
de l'UE, nous allons désormais aborder le droit communautaire primaire à travers les traités et
d'autres instruments de droit dérivé pertinents relatifs à la politique internationale de l'UE926.
924 Voir D.B. WILKINS, “Outlawed in Europe: animal protection progress in the European Union”, dans TURNER, J.
et J. D'SILVA (dir.), Animals, ethics, and trade: The challenge of animal sentience, Earthscan, pp. 219-224, 2006, p.
221 : "in 1980 the Eurogroup for Animal Welfare was formed. Animal welfare had arrived in the heart of Europe". 925 Id. 926 Alors que le droit communautaire dérivé concerne les règlements, directives et décisions (abordés dans une large
part dans la section précédente), le droit communautaire primaire concerne les traités (ainsi que leurs annexes et
protocoles) qui seront abordés dans cette section, toujours en relation avec la protection du bien-être animal. Sur la
description du droit communautaire primaire et dérivé, voir LE HARDŸ DE BEAULIEU, L., L'Union Européenne :
introduction à l'étude de l'ordre juridique et des institutions communautaires, Presses universitaires de Namur,
Belgique, 2002
151
S.1- De la valeur secondaire à la valeur prioritaire de l'objectif communautaire de
bien-être animal
Initialement consacré dans une déclaration et un protocole annexés respectivement aux traités
sur l'Union européenne de 1992 et 1997, l'objectif de bien-être animal figure désormais au
cœur même des objectifs du dernier traité de 2008. Alors qu'il s'agissait d'un objectif
secondaire selon la décision "Jippes" rendue en 2001 par la CJCE (ancien nom de la CJUE927)
(§1), les nouvelles mesures prises en vue d'améliorer le bien-être des animaux semblent
témoigner qu'il s'agit d'un objectif désormais prioritaire au sein de la politique de l'UE (§2).
§1- La valeur anciennement secondaire de l'objectif de bien-être animal en droit
communautaire
En plus de figurer en annexe des traités communautaires de 1992 et 1997 (A), la valeur
secondaire de l'objectif de protéger le bien-être animal a été établie par la CJCE en 2001 (B).
A- Un objectif annexe dans les traités de 1992 et 1997
Présentons la déclaration annexée au Traité de 1992 (1) et le protocole du Traité de 1997 (2).
1- Déclaration sur la protection des animaux annexée au Traité de Maastricht de 1992
L'objectif de bien-être animal est intrinsèquement lié à la politique de l'Union européenne. En
droit communautaire primaire, celui-ci a été initialement consacré dans une déclaration
annexée au Traité de Maastricht instituant l'Union européenne en 1992928 selon ces termes :
« La Conférence invite le Parlement européen, le Conseil et la Commission, ainsi
que les États membres, à tenir pleinement compte, lors de l'élaboration et de la
mise en œuvre de la législation communautaire dans les domaines de la politique
agricole commune, des transports, du marché intérieur et de la recherche, des
exigences en matière de bien-être des animaux ». 929
Ce nouvel objectif de droit communautaire a été confirmé 5 ans après dans le Traité
d'Amsterdam de 1997, venu consolider le traité de Maastricht sur l'Union européenne.
927 Notons qu'avant sa création en 1992 avec l'adoption du Traité de Maastricht, l'Union européenne était appelée
Communauté économique européenne (CEE) depuis sa création lors de l'adoption du Traité de Rome en 1957. 928 Traité sur l'Union européenne, Maastricht, J.O. C 191 du 29 juillet 1992 [ci-après : "Traité de Maastricht de
1992"]. 929 Déclaration relative à la protection des animaux (n°24) annexée au Traité de Maastricht de 1992 [ci après :
"Déclaration de 1992"].
152
2- Protocole sur la protection et le bien-être animal annexé au Traité d'Amsterdam de 1997
Tout en conservant les éléments présents dans l'énoncé de la déclaration de 1992, le protocole
annexé au traité d'Amsterdam de 1997930 ajoute certains éléments notables. En plus de
l'objectif de protection, le bien-être des animaux apparaît explicitement dans le titre même de
ce protocole. Au fondement même de cet objectif, le caractère sensible des animaux est
reconnu, puisque les parties contractantes expriment leur désir "d'assurer une plus grande
protection et un meilleur respect du bien-être des animaux en tant qu'êtres sensibles"931.
Néanmoins, le protocole ajoute trois exceptions à la prise en compte du bien-être animal en
matière "de rites religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux"932. En effet,
les "dispositions législatives ou administratives et les usages" afférents dans les États
membres doivent être respectés. Il est possible de citer plusieurs exemples de cas où ces
exceptions priment sur les exigences relatives au bien-être des animaux.
En matière de rites religieux tout d'abord, citons le cas des abattages rituels. Alors que
l'étourdissement préalable à l'abattage est obligatoire depuis le premier instrument
communautaire de protection des animaux datant de 1974933, une dérogation à cette obligation
est également prévue depuis le début pour les abattages rituels. L'obligation d'étourdissement
préalable, comme la dérogation pour les abattages rituels, sont désormais confirmées par la
directive communautaire de 1993, laquelle intègre les dispositions de la convention
européenne de 1979934. Concernant les traditions culturelles ensuite, il est possible de
mentionner le cas de la tauromachie (ou corrida). Cette pratique implique une mise à mort
douloureuse, en principe interdite par les normes protectrices des animaux dans le cadre de
leur abattage. Notons néanmoins que ce cas diffère de l'abattage rituel. En effet, ce dernier fait
l'objet d'une dérogation explicitement prévue par les dispositions européennes et
communautaires. Au contraire la tauromachie, comme les autres pratiques relevant des
traditions culturelles, tombent en dehors du champ d'application de ces instruments qui
apparaissent exclusivement consacrés aux animaux abattus à des fins économiques. En ce
sens, les instances européennes n'interviennent pas dans le cadre des traditions culturelles et
930 Traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes
et certains actes connexes, Amsterdam, J.O. C 340 du 10.11.1997 [ci-après : "Traité d'Amsterdam de 1997"]. 931 § 2 du Protocole sur la protection et le bien-être des animaux (n°10) annexé au Traité d'Amsterdam de 1997
[ci-après : "Protocole de 1997"]. 932 Id., § 4. 933 Art.4 de la Directive 74/577/CEE du Conseil, du 18 novembre 1974, relative à l'étourdissement des animaux avant
leur abattage, J.O. L 316 du 26.11.1974. 934 Voir l'Art.5 (2) de la Directive 93/119/CE du Conseil, du 22 décembre 1993, sur la protection des animaux au
moment de leur abattage ou de leur mise à mort, J.O. L 340 du 31.12.1993.
153
laissent chaque pays libre de légiférer en la matière935. En ce sens, tant que la pratique en
cause est nationalement autorisée (légalement, réglementairement ou de manière coutumière),
celle-ci l'est aussi aux niveaux européen et communautaire. Dans les pays membres de l'UE,
la corrida avec mise à mort est légalement autorisée dans le Sud de la France et toutes les
provinces d'Espagne à l'exception de la Catalogne. Au Portugal, bien que la corrida soit
autorisée sans mise à mort dans l'arène, le taureau doit généralement être abattu par la suite
car il ne peut survivre à ses blessures. Notons que le taureau agonise parfois pendant plusieurs
jours avant d'être emmené à l'abattoir936. En tout état de cause, cette pratique semble très
éloignée du principe européen et communautaire de minimisation des souffrances, issu des
règlementations visant le bien-être animal. Concernant l'exception relative aux patrimoines
régionaux enfin, évoquons l'exemple du foie gras en France, déclaré comme faisant partie du
patrimoine culturel et gastronomique légalement protégé dans ce pays depuis 2005937. Dans
les faits, il s'agit plus particulièrement de protéger la pratique du gavage, sachant que le foie
gras est défini comme "le foie d’un canard ou d’une oie spécialement engraissé par
gavage"938. Bien que cette méthode soit interdite par la convention de 1976 et la directive de
1998 sur les élevages939, elle demeure dans les pays européens où elle est légalement
autorisée comme en France, en Belgique, en Espagne, en Bulgarie et en Hongrie940.
En plus des limites importantes qui ressortent de ces exceptions, l'objectif de bien-être animal
a été interprété comme n'ayant qu'une valeur secondaire dans la décision "Jippes" de 2001.
935 En effet, en vertu du principe de subsidiarité, la réglementation de ce type de manifestations comme les spectacles
avec animaux relèvent de la compétence de chaque Etat et ne sont pas du ressort de l'UE. 936 Voir par exemple la note sur "la corrida portugaise" sur le site du CRAC Europe, en ligne :
http://www.anticorrida.com/5-La-corrida-portugaise.html (date d'accès : 29.01.2014). 937 Amendement n°1001 à la Loi d'orientation agricole (n° 2341) du 5.10. 2005, Art. L. 654-27-1 du Code rural. 938 Id. 939 Voir l'Art. 6 de la Convention européenne de 1976 sur la protection des animaux dans les élevages et l'Annexe
(al.14) de la Directive 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages, J.O. L
221, 08/08/1998. 940 En effet, le foie gras est également produit à l'extérieur de l'UE comme en Chine où la production de foie gras a
doublé depuis 2006 avec désormais 1 000 tonnes à l'année en 2012, la France restant néanmoins le premier producteur
mondial avec 20 000 tonnes par an. Voir S. FULI et L. YUANYUAN, "China to Open World's Largest Foie Gras
Production Facility", Economic Observer Online, 2 mars 2012, en ligne :
http://www.eeo.com.cn/ens/2012/0312/222507.shtml (accès : 28.10.2012).
154
B- Une valeur secondaire d'après la décision Jippes de la CJCE en 2001
En 2001, la décision "Jippes" a permis de fournir une interprétation de l'objectif de bien-être
animal par la CJCE, tel qu'il est énoncé au sein du Protocole de 1997941. Même s'il s'agit d'une
exigence à prendre en compte dans le cadre des politiques communautaires (1), cet objectif fut
alors considéré comme inférieur à d'autres impératifs d'intérêt général de l'UE (2).
1- Une exigence à prendre en compte dans le cadre de la politique communautaire
La décision Jippes fut formelle : l'objectif de bien-être animal ne constitue pas un principe
général de droit communautaire. En effet, tel que formulé dans le Protocole annexé au traité
d'Amsterdam, il s'agissait simplement d'une exigence à prendre en compte dans le cadre de
certains domaines de la politique communautaire942.
Au-delà du libellé du protocole de 1997, la CJCE basa son interprétation sur la place de ce
protocole dans le traité, à savoir en annexe, et non au sein même de ses objectifs. Elle affirma
en ce sens que l'exigence d'assurer le bien-être des animaux ne faisait pas partie des objectifs
du traité, à l'image des objectifs de la politique agricole commune (PAC)943. L'article 33 du
Traité d'Amsterdam précisait le but de la PAC d'accroître la productivité de l'agriculture en
développant le progrès technique et en assurant le développement rationnel de la production
agricole944. En vertu de ce traité, un objectif majeur de l'UE consistait donc à accroître la
rentabilité agricole et non de protéger le bien-être des animaux. La CJCE mentionne
néanmoins que les instruments de droit dérivé, tels que les directives et règlements qui visent
le bien-être des animaux dans certains domaines (comme le transport, l'abattage, l'élevage et
l'expérimentation), indiquent l'intérêt de l’UE pour cette question945. Cependant, la cour
décide que le bien-être animal n'a pas la valeur d'un principe général de droit communautaire,
mais constitue seulement une exigence annexe à prendre en compte dans la mesure du
possible. Ainsi, la CJCE fait passer d'autres intérêts avant la protection du bien-être animaux.
941 CJCE, H.Jippes, Aff. C-189/01, [ECR I-5689], 12 juillet 2001, Recueil de jurisprudence 2001 page I-05689
[ci-après : "Décision Jippes"]. 942 Id., §73 : "S'agissant du protocole, il ressort de son libellé même qu'il n'établit pas un principe général de droit
communautaire d'un contenu bien déterminé qui s'impose aux institutions de la Communauté. En effet, s'il impose de
«tenir pleinement compte» des exigences du bien-être des animaux lors de la formulation et de la mise en œuvre de la
politique communautaire, il limite cependant cette obligation à quatre domaines spécifiques de l'activité de la
Communauté et prévoit le respect des dispositions législatives ou administratives et des usages des États membres en
matière notamment de rites religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux". 943 Id., §71. 944 Art. 33 (1), a) du Traité d'Amsterdam de 1997. 945 Décision Jippes, §76 : "s'il existe un certain nombre de dispositions de droit dérivé afférentes au bien-être des
animaux, elles ne donnent pas non plus d'indications permettant de considérer l'exigence de veiller au bien-être des
animaux comme un principe général de droit communautaire".
155
2- Une exigence inférieure à d'autres impératifs d'intérêt général
Lors de la décision Jippes de 2001, le bien-être animal passait après les impératifs d'intérêt
général946, notamment l'objectif de rentabilité économique947. Prioritaire depuis la
construction de la Communauté économique européenne en 1957, cette dernière vocation
économique demeure importante au sein des politiques menées par l'Union européenne948.
D'une valeur que l'on peut qualifier de secondaire dans le cadre de cette décision, l'objectif de
bien-être animal revête désormais une valeur supérieure dans les nouveaux traités
communautaires. En regard de la valorisation juridique croissante de cet objectif, il n'est pas
certain que la décision rendue serait la même aujourd'hui. En effet si cette cour, renommée la
Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), était amenée à reconsidérer la valeur du bien-
être animal, celui-ci pourrait bien être désormais reconnu comme un nouveau principe général
du droit communautaire949. Au-delà de sa reconnaissance explicite dans les instruments
européens et communautaires, le bien-être animal est présent dans les lois nationales des pays
membres de l'UE950. Ce constat vient ainsi au soutien de cette reconnaissance par la CJUE951.
§2- La valeur nouvellement prioritaire de l'objectif de bien-être animal en droit
communautaire
L'élévation de la valeur juridique du bien-être animal, vers un nouvel objectif prioritaire de
l'Union européenne, transparaît du dernier traité adopté en 2008 (A), ainsi que des mesures
prévues afin de renforcer son application tant au niveau européen qu'internationalement (B).
A- Un objectif principal dans le nouveau Traité de Lisbonne de 2008
Le bien-être animal figure désormais à l'article 13 du traité de Lisbonne de 2008 (1), parmi les
nouveaux principes fondamentaux de l'Union européenne (2).
946 Id., §78. 947 Dans cette décision était discutée la légalité de la mesure communautaire sur l'abattage massif du bétail suite à
l'épidémie d'encéphalite spongiforme bovine sévissant dans les pays de l'Union européenne à cette époque. 948 Alors que la Communauté économique européenne a été instituée par le Traité de Rome en 1957, l'Union
européenne a été instituée par le Traité de Maastricht en 1992. 949 Voir BRELS, S., "El bienestar de los animales : un nuevo principio general y constitucional de derecho
comunitario" ("Le bien-être des animaux : un nouveau principe général et constitutionnel de droit communautaire"
(traduction personnelle), Derecho animal, mai 2012, en ligne : http://www.derechoanimal.info/images/pdf/comentario-
sentencia-sabine.pdf (date d'accès : 27.11.2012). 950 Voir l'Annexe 1 (pays de l’Europe) et les références ci-dessous. 951 Au sujet des principes généraux de droit communautaire voir : SPITZER, J.P. "Les principes généraux de droit
communautaire dégagés par la Cour de Justice des Communautés Européennes", Gaz.Pal., pp. 26-27, nov.1986 et plus
récemment TRIDIMAS, T., The general principles of EU law, Oxford University Press, 2006.
156
1- L'article 13 du Traité de Lisbonne sur l’Union européenne de 2008
Signé en 2008, le traité de Lisbonne qui remplace les derniers traités sur l’Union européenne
(Maastricht et Amsterdam) est entré en vigueur le 1er décembre 2009952. Dans la première
partie sur les "Principes" de l'Union européenne figure désormais le bien-être des animaux en
tant qu'êtres sensibles953. L'article 13 du Traité de Lisbonne réunis les éléments précités (de la
déclaration de 1992 et du Protocole de 1997) dans un article plus complet en ces termes :
« Lorsqu'ils formulent et mettent en œuvre la politique de l'Union dans les
domaines de l'agriculture, de la pêche, des transports, du marché intérieur, de la
recherche et développement technologique et de l'espace, l'Union et les États
membres tiennent pleinement compte des exigences du bien-être des animaux en
tant qu'êtres sensibles, tout en respectant les dispositions législatives ou
administratives et les usages des États membres en matière notamment de rites
religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux. »954.
Notons que cet article reprend exactement la même formulation que l'article III-121 du projet
de Traité établissant une Constitution pour l’Europe ayant précédé le Traité de Lisbonne955.
Aux domaines de la politique communautaire précédemment évoqués dans la déclaration de
1992 et le protocole de 1997, à savoir l'agriculture, les transports, le marché intérieur et la
recherche, sont ajoutés les domaines de la pêche, du développement technologique et de
l'espace956. Concernant le domaine de la pêche, il convient de noter que l'intérêt à l'égard du
bien-être des poissons est relativement nouveau957. En effet, notons qu'aux niveaux européen
et communautaire, comme au niveau international, le bien-être des poissons a été considéré
après celui des animaux terrestres, notamment dans le cadre de l'élevage intensif et de
952 Art.13 du Traité sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne (version consolidée), J.O.
C 115/01 du 09.05.2008 [ci-après : "Traité de Lisbonne de 2008"]. Ce traité modifie les traités fondateurs existants, à
savoir le traité sur l'Union européenne (TUE) (ou Traité de Maastricht de 1992), qui conserve son nom, et le traité
instituant la Communauté européenne (TCE) (ou Traité d'Amsterdam de 1997), lequel se nomme désormais traité sur
le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). 953 Puisque les animaux sont désormais reconnus en tant qu'"être sensibles" au sein même des grands principes de ce
nouveau traité sur l'Union européenne, il ne serait plus possible "de les assimiler purement et simplement à des
produits asservis aux exigences du marché" en droit communautaire. Voir MARGUÉNAUD, J.-P., "La promotion des
animaux au rang d'êtres sensibles dans le Traité de Lisbonne", Revue semestrielle de droit animalier, n°2, 2009, p.16. 954 Article 13 du Traité de Lisbonne de 2008. 955 Art. III-121 du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, J.O.U.E. C 310/55 du 16.12.2004. 956 Il est possible de préciser que "l'adjonction du développement technologique et de l'espace" aux domaines prévus
précédemment par le Protocole de 1997 semble pouvoir s'expliquer par le "souci de soumettre aux exigences du
respect du bien-être des animaux en tant qu'êtres sensibles toutes les expérimentations qu'ils subissent à quelque titre
que ce soit et où que ce soit". Voir J.-P. MARGUÉNAUD, "La promotion des animaux au rang d'êtres sensibles dans
le Traité de Lisbonne", Revue semestrielle de droit animalier, n°2, 2009, p.18. 957 Voir BROBERG, B., "Agriculture et élevage", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de
l’Europe, pp.43-58, 2006, p.52.
157
l'abattage. Puisque les découvertes scientifiques avancent sur la sensibilité des poissons958, il a
été considéré par les scientifiques que leur bien-être méritait également d'être réglementé959.
C'est pourquoi de nouvelles normes sont apparues au niveau européen et international,
respectivement à travers la Recommandation concernant les poissons d’élevage adoptée par le
Conseil de l'Europe en 2005960 et le Code sanitaire pour les animaux aquatiques de
l'Organisation mondiale de la santé animale depuis 2008961. Au sein de l’UE, la directive sur
la protection des animaux dans les élevages de 1998 s'applique également aux poissons962.
Néanmoins, aucun instrument spécifique de droit communautaire dérivé n'est encore venu
mettre en œuvre la recommandation européenne, les normes internationales, ou encore cette
nouvelle disposition de droit communautaire primaire visant à tenir compte du bien-être des
poissons dans le cadre de la pêche. À l'image du traitement d'autres espèces non encore
réglementé, la protection du bien-être des poissons a été identifiée comme une lacune à la
réglementation communautaire, laquelle devrait être comblée dans les prochaines années963.
Quant aux domaines du développement technologique et de l'espace, une communication de
2002 vient réaffirmer le principe de remplacement et de minimisation des souffrances des
animaux dans le cadre des expérimentations, selon l'impératif suivant :
« Les expériences effectuées sur des animaux doivent être remplacées par des
méthodes de substitution chaque fois que cela est possible, et les souffrances des
animaux doivent être évitées ou limitées au maximum. »964.
958 Voir ROSE, J.D., “The neurobehavioural nature of fishes and the question of awareness and pain”, Reviews in
Fisheries Science, vol. 10, pp. 1-38, 2002; et L.U. SNEDDON, “The evidence for pain in fish: the use of morphine as
an analgesic”, Applied Animal Behaviour Science, vol. 83, pp.153-162, 2003. 959 Voir FARM ANIMAL WELFARE COUNCIL, The Welfare of Farmed Fish, Report of the Farm Animal Welfare
Council, 1996 ; LYNBERY, P., In too deep: the welfare of intensively farmed fish, Compassion in World Farming,
Petersfield, 2002. 960 Recommandation concernant les poissons d’élevage, adoptée par le Comité Permanent de la Convention
européenne sur la protection des animaux dans les élevages (T-AP) a adopté au cours de sa 47e réunion (5-7 décembre
2005), en vigueur depuis le 5 juin 2006. 961 Voir "Bien-être des poissons d’élevage", Code sanitaire pour les animaux aquatiques, Titre 7. 962 Directive élevage de 1998, Art. 2 qui précise l'application aux "poissons, reptiles et amphibiens". 963 En effet, la Stratégie 2012-2015 pour le bien-être animal prévoit l'adoption de normes sur l'élevage des poissons et
en particulier leur transport et leur mise à mort. Voir l'Annexe de la COMMISSION EUROPEENNE, Communication
sur la stratégie de l’Union européenne pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-
2015, COM (2012) 6 final/2, 15 février 2012. 964 Communication de la Commission au Parlement européen conformément à l'article 251, paragraphe 2, deuxième
alinéa, du traité CE concernant la position commune arrêtée par le Conseil en vue de l’adoption d’une Décision du
Parlement Européen et du Conseil relative au septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des
activités de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013), [COM(2006) 548 final,
2005/0043 (COD)], Bruxelles, le 26.9.2006.
158
2- Le bien-être animal comme nouvel objectif fondamental de l'Union européenne
En vertu de sa décision Jippes rendue en 2001, la CJCE considérait que le bien-être animal ne
pouvait pas être considéré comme un principe général de droit communautaire car il ne
figurait pas au sein même des objectifs du traité sur l'Union européenne965. Or, puisque le
bien-être animal constitue désormais l'un des objectifs généraux du traité de Lisbonne966,
celui-ci pourrait donc éventuellement être considéré comme un nouveau principe général de
droit communautaire967. À l'appui de cette affirmation, soulignons que les principes généraux
du droit européen se caractérisent par un degré de généralité et d'abstraction élevé et se
distinguent par une importance particulière pour l'ordre juridique de l'Union968. Le principe de
bien-être animal semble ainsi correspondre à cette définition. En effet, celui-ci est présent
dans des instruments de protection depuis 1974, comme objectif explicite de l'Union
européenne depuis 1992 en droit primaire et dans de nombreux instruments en droit dérivé.
Néanmoins, précisons que seul le juge communautaire est à même de décider si le bien-être
animal constitue désormais un principe général de droit communautaire. À l'appui de la
valorisation juridique du bien-être animal comme objectif impératif de droit communautaire,
notons que l'article 13 du traité de Lisbonne place le bien-être animal sur un pied d'égalité
avec les autres principes fondamentaux de l'Union européenne. En effet, il figure aux côtés de
la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes, la protection de la santé humaine, la
lutte contre les discriminations ou encore la promotion du développement durable969.
Le fait que le bien-être animal constitue désormais un principe fondamental de l'Union
européenne est confirmé par l'interprétation que donne la Commission européenne elle-même
de l'article 13 du traité de Lisbonne. En vertu des principes d'attribution de compétences et de
subsidiarité, elle rappelle toutefois que l'Union européenne n'est pas compétente pour protéger
le bien-être animal dans tous les domaines et que certains continuent à être du ressort des
965 Voir supra l'interprétation de la décision "Jippes". 966 Au sein de l'art.13 du traité de Lisbonne, l'objectif de bien-être animal figure parmi les "dispositions d'application
générale" (Titre II) des "Principes" (Partie I) de l'Union européenne. 967 Pour une analyse plus détaillée de cette affirmation basée sur une révision actualisée de la décision "Jippes" voir
BRELS, S., "Comentario Sentencia "Jippes", TJCE, 2001 : ¿ Es el objetivo de protección del bienestar animal un
principio general de derecho comunitario ?" ("Commentaire de la décision "Jippes", CJCE, 2001 : L'objectif de
protection du bien-être des animaux est-il un nouveau principe général de droit communautaire ?" -traduction
personnelle), Derecho animal, mai 2012, en ligne : http://www.derechoanimal.info/images/pdf/comentario-sentencia-
sabine.pdf (date d'accès : 27.11.2012). 968 BESSON, S. et N. LEVRAT, Les principes en droit européen, LGDJ, 2011, p.171. 969 Partie I du Titre II du Traité de Lisbonne.
159
États membres, comme la participation d'animaux à des compétitions, à des expositions et à
des manifestations culturelles ou sportives et la gestion du problème des chiens errants970.
Au-delà de l'élévation juridique de la protection du bien-être animal comme nouveau principe
fondamental de l'Union européenne, des mesures visant à renforcer la mise en œuvre de cet
objectif ont été adoptées depuis 2006.
B- Une valeur prioritaire en regard des ses mesures d'application depuis 2006
Suite à son premier plan d'action pour 2006-2010 (1), l'UE a adopté une nouvelle stratégie sur
le bien-être animal pour la période 2012-2015 (2).
1- Le Plan d’action sur la protection et le bien-être des animaux 2006-2010971
D'une manière générale, le plan d’action communautaire 2006-2010 pour le bien-être des
animaux vise à améliorer la réglementation communautaire en favorisant la consolidation des
instruments législatifs sur le bien-être animal972, notamment les directives et les règlements
présentés précédemment. Il s'agit également de remédier aux lacunes existantes à travers
l'élaboration de normes minimales pour les espèces et aspects non couverts par la
réglementation de l'Union européenne973.
Les mesures ultérieures visent à améliorer la mise en œuvre de l'objectif communautaire de
bien-être animal, en insistant sur l'extension et le renforcement de la législation d'une part,
ainsi que sur sa clarification et son uniformisation d'autre part. Ce plan d'action rappelle la
nécessité d'accroître l'information et la communication du public, la formation du personnel
travaillant avec les animaux, et l'élaboration d'indicateurs mesurables sur le bien-être animal.
Il s'agit aussi d'encourager la recherche afin d'actualiser les dispositions protectrices en regard
des dernières avancées scientifiques. Enfin, il s'agit de continuer à promouvoir la protection
du bien-être animal sur la scène internationale974. Le défi souligné par ce plan d'action
consiste à tenir compte des dernières connaissances scientifiques comme des préoccupations
de la société civile sur le bien-être animal, tout en les conciliant avec les incidences socio-
économiques, afin de conserver de bonnes relations avec les partenaires commerciaux975.
L'ensemble des points de ce plan d'action a été repris dans la nouvelle stratégie plus complète.
970 Voir sur le site de la Commission européenne "L'UE et la protection animale : objectifs politiques", en ligne :
http://ec.europa.eu/food/animal/welfare/policy/index_fr.print.htm (date d'accès : 27.11.2012). 971 COMMISSION EUROPEENNE, Communication concernant un plan d'action communautaire pour la protection
et le bien-être des animaux au cours de la période 2006-2010, J.O. C 49, 28 février 2006 [ci-après : "Plan d'action
2006-2010"]. 972 Id., Introduction §2. 973 Id., Domaine d'action n°1. 974 Id., Mesures ultérieures. 975 Id., §1.
160
2- La Stratégie sur la protection et le bien-être des animaux 2012-2015976
La Stratégie 2012-2015 fut adoptée sur la base de l'article 13 du Traité de Lisbonne.
L'introduction de cette stratégie présente l'intérêt de fournir un résumé concis des principaux
instruments de protection du bien-être animal, ainsi que certains chiffres pertinents sur la
quantité des vies animales et les sommes d'argent en jeux au sein de l'Union européenne.
Concernant le nombre d'animaux concerné, il est précisé que :
« [D]es milliards d’animaux [sont] détenus à des fins économiques dans l’Union.
L’élevage exploite environ deux milliards d’oiseaux et trois cents millions de
mammifères977. Douze millions d’animaux seraient utilisés chaque année à des
fins expérimentales. Il y aurait à peu près cent millions de chiens et de chats,
appartenant principalement à des particuliers »978.
Sur l'importance financière des secteurs de l'élevage et de l'expérimentation, il est indiqué :
« La valeur annuelle du secteur de l’élevage dans l’Union est de 149 milliards
d’euros et celle de l’utilisation d’animaux à des fins expérimentales est estimée à
930 millions d’euros »979.
Ces quantités témoignent de l'ampleur considérable de ces secteurs sur le plan économique,
ainsi que des questionnements qui en découlent sur le plan éthique. En effet, loin de ne
concerner que quelques individus, ce sont des milliards de vies qui sont annuellement
impliquées. En contrepartie, la Stratégie communautaire sur le bien-être animal précise que :
« Ces dernières années, l’Union a consacré au bien-être des animaux près de 70
millions d’euros par an en moyenne, dont 71 % étaient destinés aux agriculteurs
sous la forme des paiements en faveur du bien-être animal du Fonds européen
agricole pour le développement rural »980.
Bien que la grande majorité de ces fonds soit destiné au secteur de l'élevage, notons que 21%
sont destinés au secteur de la recherche et que les 8% restants sont affectés à des domaines
divers (études économiques, communication, enseignement, formation et questions
976 COMMISSION EUROPEENNE, Communication sur la stratégie de l’Union européenne pour la protection et le
bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015, 15 février 2012, COM(2012) 6 final/2 [ci-après : "Stratégie
2012-2015"]. 977 Il est précisé en note de bas de page que "793 millions de poulets destinés à la production de viande, 453 millions
de poules pondeuses et 197 millions de dindes. Les données pour les dindes, les canards et les oies n’étaient pas
disponibles dans tous les États membres". 978 Stratégie 2012-2015, Introduction, §2. 979 Id., Introduction, §5. 980 Id., Section 2, §1.
161
internationales, contrôle de l’application etc.)981. Les sommes investies indiquent que l'Union
européenne s'implique financièrement afin de renforcer la protection du bien-être animal.
Ainsi, le bien-être animal a une valeur juridique et pratique bien réelle au sein de l'UE comme
en témoignent les mesures adoptées pour sa mise en œuvre et sa consolidation constante.
Afin de relativiser les coûts impliqués par la protection du bien-être animal, il est précisé que :
« les normes de bien-être ont fait peser sur les secteurs de l’élevage et des essais
en laboratoire des coûts supplémentaires estimés à 2 % de la valeur générale de
ces secteurs. Il n’est pas attesté que cela ait pour l’instant menacé leur viabilité
économique »982.
Sur ce point, la stratégie recommande de saisir toutes les occasions d’exprimer en termes
économiques la valeur ajoutée de la politique de bien-être animal et ce, afin de renforcer la
compétitivité des producteurs européens983. Loin d'être un handicap économique, la protection
du bien-être animal doit être perçue à l'inverse comme une plus-value des produits européens.
La stratégie prévoit aussi d'opérer une simplification du cadre législatif communautaire sur le
bien-être animal. Une proposition législative visant à codifier et clarifier l'ensemble des
normes protectrices selon une approche globale devrait être initiée en 2014984. Cette
codification concernera tant les normes existantes que de nouvelles normes éventuelles. Par
exemple, afin de remédier à l'absence de protection du bien-être des poissons d’élevage, des
études scientifiques devraient mener à des dispositions sur leur mise à mort pour 2015985.
Il est enfin question d'élaborer un étiquetage européen sur les produits respectueux du bien-
être animal, ainsi que de créer un centre européen de référence pour la protection du bien-être
animal986. Comme nous le verrons par la suite, l'UE souhaite aussi renforcer sa coopération
internationale avec les organisations pertinentes en matière de protection du bien-être animal.
Ce résumé des grandes lignes du plan d'action et de la stratégie communautaires sur le bien-
être animal permet de mettre en évidence la volonté de l'Union européenne de renforcer la
mise en œuvre des instruments de protection et d'employer les moyens nécessaires pour y
parvenir dans tous les domaines, qu'ils soient juridique, politique, économique ou social.
981 Id. 982 Id., Section 2, §4. 983 Id. 984 Id., Annexe. 985 Id. 986 Voir à ce sujet : COMMISSION EUROPEENNE, Solutions possibles pour l'étiquetage en matière de bien-être
animal et l'établissement d'un réseau européen de centres de référence pour la protection et le bien-être des animaux,
28 octobre 2009, COM (2009) 584 final.
162
La Conférence qui s'est déroulée à Bruxelles en 2012 sous l'égide de l'Eurogroupe pour les
animaux est venue confirmer la volonté de l'UE de s'impliquer toujours plus afin de mieux
protéger le bien-être animal987. En outre, cette implication ne se cantonne pas au niveau
européen puisque l'UE joue un rôle clé, en tant qu'organisation supranationale, pour
promouvoir la protection du bien-être animal à l'échelle internationale, voire imposer ses
standards de protection aux pays tiers avec lesquels elle entretient des échanges commerciaux.
S.2- De la promotion à l'imposition de l'objectif communautaire de bien-être animal sur
la scène internationale
Non seulement l'Union européenne promeut l'objectif de protection du bien-être animal à
l'échelle internationale (§1), mais elle a déjà eu l'occasion d'imposer ses standards de
protection par la voie de restrictions commerciales (§2).
§1- La promotion internationale de l'objectif communautaire de bien-être animal
Le plan d'action et la stratégie évoqués visent, entre autres, la promotion internationale de
l'objectif de protection du bien-être animal. Cette promotion se manifeste notamment à travers
le soutien aux initiatives internationales (A) et dans le cadre du commerce international (B).
A- La promotion communautaire du bien-être animal sur la scène internationale
L'Union européenne soutient à la fois les initiatives (1), et la coopération (2) en faveur du
bien-être animal sur la scène internationale.
1- Le soutien communautaire aux initiatives internationales en faveur du bien-être animal
L'un des objectifs de l'Union européenne est de continuer à promouvoir des normes élevées en
matière de bien-être animal, non seulement au niveau communautaire, mais plus largement au
niveau international988. L'UE apporte ainsi son soutien aux initiatives protectrices, notamment
dans le cadre du Conseil de l'Europe (ayant joué un rôle majeur afin d'établir une protection
européenne du bien-être animal depuis les années 1970) et de l'Organisation mondiale de la
santé animale (dont les normes servent désormais de références mondiales sur le bien-être
animal depuis les années 2000989). L'UE assure également leur coordination dans ce but990.
En ce sens, le rôle clé joué par l'UE afin de promouvoir la protection du bien-être animal sur
987 Enforcement of European Animal Welfare Related Legislation, Eurogroup for Animals Conference, Brussels, 12-13
juin 2012. 988 Plan d'action 2006-2010, "Objectifs", n°2. 989 Si les instruments du Conseil de l'Europe ont été décrits dans la section précédente de ce chapitre, les normes
internationales de l'OIE sur le bien-être animal seront abordées dans le titre suivant de cette première partie. 990 Id., §7.
163
la scène internationale ces dernières années semble incontestable991. Dans le cadre de ses
actions internationales, elle souhaite permettre un consensus plus large sur les questions liées
au bien-être animal. Elle entend également explorer d’éventuelles possibilités d’échanges
avec des pays en voie de développement, fondées sur des systèmes de production respectueux
du bien-être animal. Il est également question de répondre aux problèmes transfrontaliers qui
se posent dans le domaine du bien-être animal avec les animaux de compagnie et d’élevage, la
faune sauvage etc.992. Il s'agit aussi de favoriser des méthodes de production et d’élevage plus
respectueuses du bien-être animal, ainsi qu'à faciliter leur mise en œuvre aux niveaux
communautaire et international993. L'UE relève enfin l'intérêt croissant de ses pays membres
et des organisations internationales pour les questions relatives au bien-être animal994.
2- Le soutien à la coopération internationale en faveur du bien-être animal
Dans le cadre de son objectif de coopération internationale, la stratégie 2012-2015 précise que
l'UE a déjà mis en place un certain nombre d'activités bilatérales et multilatérales qui doivent
être optimisées et soutenues995. À cette fin, la Commission européenne entend rester active
dans ses relations avec l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et l'Organisation
mondiale des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), sachant que ces deux
organisations mondiales ont pris des initiatives concernant le bien-être animal996. Il s'agit des
normes internationales de l'OIE sur le bien-être animal et des initiatives de la FAO visant à
renforcer les moyens de protection du bien-être des animaux d'élevage997.
L'UE insiste également sur la promotion de son approche de protection du bien-être animal
sur la scène internationale. À travers l'organisation d'évènements internationaux de premier
plan998, elle entend ainsi partager mondialement sa vision du bien-être animal999. La
promotion de l'approche communautaire semble même prioritaire. En effet, l'UE entend faire
991 Voir le résumé des actions menées avec les organisations intergouvernementales ces dernières années où la
Commission décide de continuer à "œuvrer en faveur de la cause du bien-être animal au niveau international",
en ligne : http://ec.europa.eu/food/animal/welfare/international/index_fr.htm#wto (date d'accès : 28.11.2012). 992 Plan d'action 2006-2010, "Domaines d'action", n°5. 993 Id., Domaines d'action, n°3. 994 Id., Objectif, al.7 : "Ces objectifs ont été définis [...] avec les États membres, les autres institutions communautaires
et les parties intéressées et organisations internationales qui participent en nombre sans cesse croissant à ces
discussions". 995 Stratégie 2012-2015, Section 3.3 : "Soutien à la coopération internationale" (§1). 996 Id., al. 2. Sur les acronymes de ces organisations, notons que l'OIE concerne l'ancienne Organisation internationale
des Epizooties (devenue l'organisation mondiale de la santé animale) ayant conservé son acronyme d'origine. Quant à
la FAO, son acronyme officiel vient de l'anglais : Food and Agriculture Organization. 997 Id., note n°31. 998 Id., 4è tiret. 999 Id., dernier paragraphe.
164
un usage optimal des ressources disponibles consacrées aux activités internationales sur le
bien-être des animaux, dans le but de conserver un certain "leadership" en la matière1000.
En plus de contribuer à renforcer la protection du bien-être animal et de promouvoir son
approche à l'échelle mondiale, l'UE entend aussi aborder les problèmes commerciaux sur cette
question, tout en continuant à s'assurer de sa compétitivité sur la scène internationale.
B- La promotion du bien-être animal par l'UE dans le cadre du commerce international
Dans le cadre de ses relations commerciales, l'UE vise à promouvoir une vision commune de
la protection du bien-être animal. Tout en souhaitant renforcer cette protection, elle entend
tenir compte des règles en vigueur au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
1- Le développement d'accords commerciaux internationaux sur le bien-être animal
En premier lieu, l'UE prévoit de renforcer et de contrôler efficacement l'application des
normes minimales sur le bien-être animal, tout en respectant les règles du commerce
international1001. À l'avenir, elle propose d'adopter un instrument législatif destiné à valider
les systèmes de production appliquant des normes supérieures, toujours conformément aux
règles définies par l'OMC1002. Bien que l'UE se soit engagée à respecter ces règles,
notamment celles contenues dans les accords du GATT sur les tarifs douaniers et le
commerce, elle compte exercer une certaine "pression à l'OMC afin que la problématique du
bien-être des animaux soit considérée comme une question non commerciale dans les
échanges agricoles"1003.
En ce sens, l'UE se mobilise pour que l'OMC tienne compte des préoccupations non-
commerciales, comme les préoccupations d'ordre éthique liées aux méthodes de production
impliquant les animaux dans le cadre du commerce international. Déjà en 2002, l'UE avait
émis une communication à l'OMC pour trouver un consensus international sur ces
problèmes1004. Afin de parvenir à une concordance des vues sur l’application de normes
mutuellement acceptées sur le bien-être animal dans le cadre d’accords bilatéraux et
1000 En effet, il s'agit pour l'Union européenne de se "montrer à la hauteur des enjeux et de renforcer la contribution de
ses ressources à la compétitivité des éleveurs européens dans un monde globalisé". Un rapport sur les actions
internationales menées par l'UE afin de promouvoir la protection du bien-être animal est également prévu pour 2014. 1001 Plan d'action 2006-2010, Domaine d'action, n°1. 1002 Id., "Mesures ultérieures", §4. Il y est précisé qu'un "système de commercialisation et d'information spécifique sera
développé pour promouvoir l'application de ces normes supérieures en matière de bien-être dans l'UE et dans le monde
entier et pour faciliter leur identification par les consommateurs de l'UE". 1003 Id., Mesures ultérieures, §7. 1004 COMMISSION EUROPEENNE, Communication sur la législation applicable au bien-être des animaux d'élevage
dans les pays tiers et sur son incidence pour l'UE, COM (2002) 626 final,018.11.2002, p.12 : "À la recherche d'un
consensus international" des "problèmes, tels qu'ils apparaissent dans les relations avec l'OMC".
165
multilatéraux, il est également prévu que l'UE œuvre de concert avec les partenaires
commerciaux internationaux qui ont développé des politiques sur le bien-être animal1005.
2- Le développement d'accords commerciaux internationaux sur le bien-être animal
La Stratégie 2012-1015 reprend l'idée d'intégrer le bien-être animal dans les accords
commerciaux bilatéraux et dans les forums de coopération afin de multiplier les possibilités
stratégiques de développer une collaboration plus concrète avec les pays tiers1006. Notons
l'importance de ces actions sachant que les accords de libre-échange en rapport avec les
questions de bien-être animal ont doublé depuis 20111007. En insistant sur la nécessité
d'assurer la compétitivité des éleveurs européens dans un monde globalisé1008, la Stratégie
précise que :
« Des conditions de concurrence équitables au niveau mondial dans le domaine du
bien-être animal sont importantes pour assurer la compétitivité internationale des
exploitants de l'Union »1009.
En résumé, l'UE souhaite renforcer ses normes de protection tout en maintenant la
compétitivité de ses producteurs et de bonnes relations commerciales avec les pays tiers, le
tout dans le respect des règles du commerce international. Néanmoins, les restrictions
commerciales adoptées par l'UE en vue d'imposer ses standards de protection du bien-être
animal aux pays tiers peuvent parfois sembler contraires aux règles du commerce
international en vigueur à l'OMC. Ces restrictions méritent d'être brièvement présentées.
§2- L'imposition internationale de l'objectif communautaire de bien-être animal
Les premières interdictions d'importation des peaux de bébés-phoques en 1983 et des
fourrures issues d'animaux capturés par des pièges à mâchoires en 1991, étaient justifiés par
un motif de conservation des espèces menacées d'extinction (A). Mais les dernières sur les
fourrures de chiens et chats en 2007, ainsi que sur les produits dérivés du phoque en 2009,
témoignent de la volonté de l'UE de protéger le bien-être animal à l'échelle internationale (B).
1005 Plan d'action 2006-2010, Mesures ultérieures, §7. À cette fin, le plan d'action prévoyait pour 2007 la "Création
d'outils spécifiques de communication pour élaborer, de concert avec les partenaires commerciaux internationaux, une
conception commune de la mise en œuvre de normes en matière de bien-être des animaux convenues d’un commun
accord" (Id., "Actions dans le domaine de la protection du bien-être des animaux"). 1006 Stratégie 2012-2015, Section 3.3, 1er tiret. 1007 Id., n°30. 1008 Id., dernier paragraphe. 1009 Id., premier paragraphe.
166
A- Les premières interdictions commerciales visant la conservation des espèces menacées
Les premières restrictions indiquées ont été adoptées avant que le bien-être animal ne figure
parmi les objectifs des traités de l'UE. Bien que ces interdictions expriment le rejet de
certaines méthodes, comme celles concernant la chasse aux bébés-phoques et la capture
d'animaux sauvages par des pièges à mâchoires, ces mesures d'interdiction sont justifiées par
des arguments environnementaux relatifs à la conservation des espèces sauvages menacées,
plutôt que par la protection du bien-être animal. Il s'agissait pourtant déjà d'un motif implicite.
1- L'interdiction d'importation des peaux de bébés-phoques en 19831010
Justifiée par la volonté de préserver les populations de phoques harpés et de phoques à
capuchon, l'interdiction d'importer des peaux de bébé-phoques appartenant à ces espèces est
entrée en vigueur le 1er octobre 19831011. Alors que celle-ci devait initialement s'appliquer sur
2 ans, jusqu'au 1er octobre 19851012, une directive adoptée en 1989 est venue supprimer la date
limite de cette interdiction, sachant que celle-ci est encore en vigueur. Notons que cette
interdiction d'importation et de commercialisation des peaux de bébé-phoques ne s'applique
pas pour les produits provenant de la chasse traditionnelle pratiquée par les populations
inuites1013. Cette exception a été reprise 26 ans plus tard par la directive de 2009 sur
l'interdiction relative à tous les produits dérivés du phoque1014.
Si les pays visés par cette interdiction ne sont pas mentionnés dans la directive de 1983, la
directive suivante de 1989 fait explicitement référence au Canada et à la Norvège1015.
Notons que ces mesures communautaires font suite à la campagne internationale menée
depuis les années 1970 pour dénoncer le "massacre des bébés-phoques" dans ces pays1016.
Cette campagne a eu un fort retentissement médiatique sur l'opinion publique, en Europe et
1010 Directive 83/129/CEE du Conseil du 28 mars 1983 concernant l'importation dans les États membres de peaux de
certains bébés-phoques et de produits dérivés, J.O. L 091/30 du 09.04.1983 [ci-après : "Directive bébés-phoques de
1983"]. 1011 Id., Consid.2 et 3 : Objectif de "limiter l'importation ou la commercialisation des peaux de bébés-phoques harpés
("à manteau blanc") et de bébés-phoques à capuchon ("à dos bleu") dans le but de leur "conservation". 1012 Id., Art.2. 1013 Id., Art.3. 1014 Voir infra. 1015 Consid. 5 et 6 de la Directive 89/370/CEE du Conseil du 8 juin 1989 modifiant la directive 83/129/CEE
concernant l'importation dans les États membres de peaux de certains bébés phoques et de produits dérivés, J.O. L
163 du 14.6.1989. 1016 Le Point, Numéros 537 à 545, 1983, p.78. Un sondage commandité par Brigitte Bardot ayant révélé la
désapprobation majoritaire de l'opinion publique pour la chasse aux bébés-phoques est un facteur ayant conduit à
l'embargo européen sur leurs peaux en 1983.
167
dans le monde, et reste marquée par la participation active de Brigitte Bardot aux côtés de
l'IFAW (International Fund for Animal Welfare)1017.
2- L'interdiction d'importation des fourrures issues de pièges à mâchoires en 19911018
Le règlement communautaire de 1991 interdit l'utilisation des pièges à mâchoires dans l'UE,
ainsi que l'importation des fourrures et produits manufacturés qui en sont issus, à l'image
d'autres méthodes non-conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté1019.
D'après la définition du règlement de 1991, les pièges à mâchoires consistent en un :
« dispositif destiné à entraver ou capturer un animal à l'aide de mâchoires qui se
referment étroitement sur un ou plusieurs membres de l'animal, empêchant ainsi le
ou les membres en question d'échapper au piège »1020.
La cruauté de ces pièges est dénoncée du fait qu'ils provoquent d'importantes souffrances aux
animaux. Par exemple, lorsque le trappeur tarde à revenir pour les abattre, ils peuvent mourir
de faim, de soif ou de leur(s) blessure(s), lorsqu'ils ne sont pas devenus la proie facile des
prédateurs, certains animaux allant jusqu'à amputer leurs membres prisonniers en les rongeant
pour se libérer1021. Bien que ce soit la méthode de piégeage qui soit contestée, comme
précédemment pour la chasse aux bébés-phoques, c'est l'argument de conservation des
espèces menacées qui est mis de l'avant. En effet à cette époque il n'existait pas encore de
base juridique pour la protection du bien-être animal en droit communautaire primaire. La
Déclaration sur la protection des animaux énonçant pour la première fois le bien-être animal
n'a été adoptée que l'année suivante dans le traité de Maastricht en 1992.
Le contenu du règlement de 1991 est clair : à partir du 1er janvier 1995, sont interdites
l'utilisation de piège à mâchoires et l'introduction des fourrures et autres produits qui sont
issus d'animaux capturés par ces pièges1022. Les espèces protégées par ce règlement sont : le
Castor, la Loutre, le Coyote, le Loup, le Lynx, la Martes, le Raton laveur, le Rat musqué, le
Blaireau, la Martre et l'Hermine1023. Quant aux marchandises interdites, il s'agit de toutes les
1017 Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, "Chasse aux phoques", Document de Séance n°11008, 2006,
p.68. 1018 Règlement n° 3254/91 du Conseil du 4 novembre 1991 interdisant l'utilisation des pièges à mâchoire dans la
Communauté et l'introduction dans la Communauté de fourrures et de produits manufacturés de certaines espèces
animales sauvages originaires des pays qui utilisent pour leur capture le piège à mâchoire ou de méthodes non-
conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté, J.O. L 308 du 09.11.1991 [ci-après : "Règlement
pièges à mâchoires de 1991"]. 1019 Référence au titre long du Règlement pièges à mâchoires de 1991 (voir supra). 1020 Id., Art.1. 1021 Voir SINGER, P., “L’Organisation mondiale du commerce : un obstacle au progrès de la protection légale des
animaux”, Les cahiers antispécistes, n°274, CA n°25, 2005, p.4. 1022 Règlement pièges à mâchoires de 1991, Art.2 et 3. 1023 Id., Annexe I.
168
fourrures sous forme de peaux brutes (provenant de n'importe quelle partie du corps de ces
espèces), ainsi que de tous les vêtements ou accessoires manufacturés1024.
À l'appui de cette mesure d'interdiction, les bases juridiques invoquées sont la Convention de
Berne sur la conservation de la vie sauvage de 1979 et le Règlement sur la conservation des
espèces de la faune sauvage menacées d'extinction1025. La Convention de Berne, ratifiée par la
Communauté économique européenne (CEE) en 19821026, prévoit en effet d'interdire :
« l'utilisation de tous les moyens non sélectifs de capture et de mise à mort de
certaines espèces, y compris les pièges-trappes, si ces derniers sont appliqués pour
la capture ou la mise à mort massive ou non sélective »1027.
Ainsi, l'interdiction des pièges à mâchoires prévu par ce règlement vise la conservation des
espèces de la faune sauvage menacées d'extinction, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la
Communauté européenne1028. Il s'agit ainsi d'une mesure d'externalisation ouvertement
affirmée, puisqu'elle vise à protéger les animaux à l'extérieur de la Communauté européenne.
Cette externalisation de la protection communautaire des animaux est particulièrement
controversée au sein de l'OMC. Afin d'éviter de recourir à une procédure de règlement des
différends au sein de cette organisation, les pays visés par cette interdiction qu'étaient la
Russie, le Canada et les États-Unis, sont parvenus à trouver un terrain d'entente avec l'UE en
signant des accords sur cette question.
Après plusieurs années de négociations, l'Accord sur les normes internationales de piégeage
sans cruauté (ANIPSC) fut passé en décembre 1997 entre l'UE, la Canada et la Russie1029.
Celui-ci précise que l'objectif de ces normes est de garantir un niveau suffisant de bien-être
des animaux pris dans des pièges et de l’améliorer1030. Notons que l'utilisation de la notion de
bien-être, en parlant des animaux pris dans ces pièges, semble assez paradoxale. Plutôt que de
parler du bien-être de ces animaux, il semblerait plus juste, en toute honnêteté intellectuelle,
de parler de l'objectif de réduire leurs souffrances1031.
1024 Id., Annexe II. 1025 Règlement (CEE) n° 3626/82 du Conseil du 3 décembre 1982 relatif à l'application dans la Communauté de la
convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction. 1026 Décision 82/72/CEE, Décision du Conseil, du 3 décembre 1981, concernant la conclusion de la convention
relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe. 1027 Règlement pièges à mâchoires de 1991, Consid.1. 1028 Id., Consid. 2. 1029 Accord sur des normes internationales de piégeage sans cruauté entre la Communauté européenne, le Canada et
la Fédération de Russie, 1997, en ligne : http://www.canadainternational.gc.ca/eu-ue/assets/pdfs/eu28-fr.pdf
(date d'accès : 11.12.2012). 1030 Id., Annexe I (1.1). 1031 Les espèces listées correspondent aux espèces protégées par le Règlement sur les pièges à mâchoires de 1991,
Annexe I (4.1).
169
Le second accord à été conclu entre l'UE et les États-Unis en 1998. Celui vise à permettre
l'importation de fourrures dans l'UE, en échange de l'engagement des États-Unis, de ne pas
utiliser de pièges à mâchoires ou tout autre piège interdit par l'UE1032.
Suite à l’adoption du règlement communautaire visant à interdire les pièges à mâchoires en
1991, des travaux furent entrepris au sein de l’Organisation Internationale de Normalisation
(ISO) par le biais de son Comité Technique nommé "TC 191", afin d'élaborer des normes de
piégeage acceptables du point de vue du bien-être animal1033. En 1999, ces travaux ont
débouché sur les normes ISO sur les "Pièges pour animaux (mammifères)", la première partie
concernant les "Méthodes d'essai de systèmes de piégeage mortels utilisés sur la terre ferme
ou sous l'eau" (ISO 10990-4 :1999) et la seconde les "Méthodes d'essai pour pièges de
capture" (ISO 10990-5 :1999)1034.
Suite aux premières interdictions de 1983 et 1991, l'objectif de protection du bien-être animal
ressort plus nettement des interdictions commerciales adoptées par l'UE en 2007 et 2009.
B- Les dernières interdictions commerciales visant la protection du bien-être animal
Les dernières restrictions commerciales adoptées par l'UE concernent les fourrures de chats et
chiens depuis 2007, et les produits dérivés du phoque depuis 2009. Elles ont été adoptées dans
le cadre du plan d'action 2006-2010 et de façon concomitante avec la consécration de
l'objectif de bien-être animal dans le traité de Lisbonne en 2008. Ainsi, l'objectif de bien-être
animal est explicitement mis en avant dans ces nouvelles interdictions. Depuis les années
2000 en effet, l'objectif de conservation des espèces menacées tend à laisser une place de plus
en plus importante à la protection du bien-être animal, comme nouvelle préoccupation
européenne mais aussi internationale.
1032 Décision 98/487/CE du Conseil du 13 juillet 1998 relative à la conclusion d'un Accord international sous forme de
procès-verbal agréé entre la Communauté européenne et les États-Unis d'Amérique sur des normes de piégeage sans
cruauté, J.O. L 219 du 07/08/1998. 1033 Voir le document de la FACE (Fédération des associations de chasse et conservation de la faune sauvage de l'UE)
sur le "Piégeage" en ligne : http://www.face-europe.org/Communication/Position%20papers/Trapping/PP-
trapping_FR.pdf (date d'accès : 11.12.2012). 1034 Voir sur le site de l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) en ligne :
http://www.iso.org/iso/home/store/catalogue_ics/catalogue_ics_browse.htm ?ICS1=65&ICS2=145& (date d'accès :
11.12.2012).
170
1- L'interdiction d'importation des fourrures de chat et de chien en 20071035
L'article 3 du règlement communautaire de 2007 prévoit qu'à partir de fin 2008 :
« La mise sur le marché, l'importation dans la Communauté ou l'exportation
depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et de produits en contenant
sont interdites »1036.
Celles-ci demeurent néanmoins possibles à des fins éducatives et de taxidermie, selon
l'exception formulée par la suite1037. Ainsi, la liberté d'éducation et la pratique de la
taxidermie priment sur cette triple interdiction adoptée en vue de protéger le bien-être des
chiens et des chats. Ce règlement a été adopté afin de tenir compte de la désapprobation de
l'opinion publique européenne pour laquelle les chiens et les chats sont des animaux de
compagnie, considérant qu' "il n'est pas acceptable d'utiliser leur fourrure ou les produits en
contenant"1038.
Relevons toutefois que les instruments sur l'expérimentation, dont la dernière directive de
2010, continuent d’autoriser les expérimentations sur les chiens et les chats. Ainsi, bien que
les animaux de compagnie bénéficient d'une protection supérieure dans certains cas, leur
protection demeure néanmoins limitée par certains intérêts humains, comme la liberté de
recherche et autres exemples précités. Leur protection est néanmoins supérieure dans certains
cas. Pour reprendre le cas de la production de fourrure de chat et de chien, celle-ci est
considérée comme "inacceptable" dans l'esprit des citoyens européens, contrairement à celle
d'autres animaux couramment élevés pour leur fourrure (comme les visons, les renards ou les
chinchillas) qui ne fait à ce jour l'objet d'aucune restriction dans l'UE.
L'autre raison motivant cette interdiction concerne l'absence d'étiquetage des produits de
fourrure. En effet, le manque d'information sur la provenance de ces produits ne permet pas
d'identifier clairement les fourrures de chat et chien et les produits qui en contiennent. Puisque
de tels produits circulaient librement dans l'UE, les consommateurs s'inquiétaient du fait qu'ils
pouvaient acheter ce type de fourrure1039. Sur la base de la désapprobation européenne et des
difficultés de contrôler l'origine des celles-ci, l'UE a donc opté pour une interdiction de ces
produits afin d'éviter tout risque que ceux-ci ne circulent légalement sur le territoire. Afin de
1035 Règlement (CE) n° 1523/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 interdisant la mise sur
le marché, l'importation dans la Communauté ou l'exportation depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et
de produits en contenant, Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE, J.O. L 343 du 27.12.2007 [ci-après : "Règlement
chiens et chats 2007"]. 1036 Id., Art.3. 1037 Id., Art.4. 1038 Id., Préamb., §1. 1039 Id.
171
contrôler le respect de ce règlement, des méthodes analytiques doivent être utilisées par les
États-membres pour déterminer quelle espèce animale est à l'origine de la fourrure1040.
Aussi, en vue d'assurer la bonne application de ce règlement, les États doivent prendre des
mesures efficaces de sanction, à la fois proportionnées et dissuasives, dans leurs droits
internes1041.
Si le règlement ne mentionne aucun pays en particulier, il précise néanmoins que l'élevage de
chats et de chiens pour leur fourrure n'est pas une tradition dans la Communauté et que la
grande majorité des produits en fourrure de chat et de chien proviennent de pays tiers1042. Ces
pays tiers concernent notamment les pays d'Asie que sont les Philippines, la Thaïlande et plus
particulièrement la Chine, laquelle fait figure de premier producteur mondial1043. Précisons
que cette interdiction communautaire a fait suite à une campagne internationale dénonçant les
pratiques usitées, notamment le fait que les chats et les chiens seraient dépecés vivants, selon
une enquête réalisée en Chine1044. Comme pour les peaux de bébés-phoques, la médiatisation
de ces informations a scandalisé l'opinion publique européenne qui a alors exigé des décideurs
européens une action de rétorsion forte, laquelle a été adoptée.
Ce règlement a fait suite à plusieurs interdictions adoptées aux États-Unis en 20001045, en
Australie en 20051046 et en Suisse en 20081047. Notons qu’à ce jour, l’importation et la
commercialisation de fourrures de chien et chat demeurent légales au Canada1048.
Contrairement aux restrictions commerciales sous-tendues par des problèmes de bien-être
animal, la dernière interdiction d'importation des produits du phoque de 2009 est celle qui
insiste le plus explicitement sur l'objectif communautaire de protéger le bien-être animal.
1040 Id., Art.5. La Commission a exigée d'être informée de ces méthodes au plus tard le 31 décembre 2008. 1041 Id., Art.8. La Commission doit également être informée de ces sanctions au plus tard le 31 décembre 2008 ainsi
que de leurs modifications ultérieures. 1042 Id., Préamb., §11. 1043 Voir CLUBB, R., “The welfare of animals bred for their fur in China”, dans J. TURNER et J. D'SILVA (dir.),
Animals, ethics, and trade: the challenge of animal sentience, Earthscan, 2006, pp. 180-192. 1044 Id. et FEUERBERG, G., “Dogs and cats skinned alive for their fur in China”, Epoch Times, 21 Feb. 2007. 1045 Dog and Cat Protection Act, 19 U.S.C. §1308, 2000. 1046 Cette interdiction d'importation a été décidée par le gouvernement australien en 2004. Voir "Dog and Cat fur",
Humane Socitey International (HSI) Australia, en ligne : http://www.hsi.org.au/ ?catID=160 (date d'accès :
13.12.2012). 1047 L'interdiction communautaire ne vaut pas pour la Suisse sachant que ce pays ne fait pas partie de l'UE mais la
confédération a décidé d'interdire l'importation, l'exportation et le commerce des fourrures de chat et chien en 2008 de
la même manière. 1048 Voir le Projet de Loi C-296 de 2011, Loi modifiant la Loi canadienne sur la sécurité des produits de
consommation et la Loi sur l'étiquetage des textiles (peau et fourrure d'animaux.
172
2- L'interdiction d'importation des produits dérivés du phoque en 20091049
La désapprobation de l'opinion publique européenne envers les méthodes de chasse aux
phoques est le moteur de la nouvelle interdiction adoptée par l'Union européenne en 2009 :
« La chasse aux phoques a soulevé de vives inquiétudes auprès du public et des
gouvernements sensibles au bien-être des animaux, en raison de la douleur, de la
détresse, de la peur et des autres formes de souffrance infligées à ces animaux lors
de la mise à mort et de l’écorchage tels qu’ils sont la plupart du temps
pratiqués »1050.
De même que pour le dépeçage à vif des chats et chiens en Chine, le problème de l'écorchage
des phoques encore conscients à été dénoncé par les organisations de protection des animaux,
notamment dans le cadre de la campagne menée par l'IFAW ("International Fund for Animal
Welfare") au Canada. Le gouvernement canadien se défend du cautionnement de telles
pratiques, en assurant que les phoques ne doivent plus être conscients lorsque leur peau est
enlevée. L'emploi du "hakapik" (bâton terminé par un crochet), traditionnellement utilisé pour
assommer les phoques, est également dénoncé comme une méthode cruelle par le règlement
de 2009. Celui-ci vise ainsi à :
« interdire toutes les méthodes de chasse cruelles ne garantissant pas une mort
instantanée, sans souffrances, des animaux, et à interdire l’assommage des
animaux avec des instruments tels que des hakapiks, des massues et des fusils,
ainsi qu’à promouvoir des initiatives visant à interdire le commerce des produits
dérivés du phoque »1051.
Ce règlement rappelle la directive de 1983 sur l'interdiction d'importation des peaux de bébés-
phoques, qu'il vient renforcer sur plusieurs plans. Tout d'abord, il s'agit d'un règlement, c'est-
à-dire d'un instrument d'application directe dans les États membres, contrairement aux
directives qui doivent être transposées dans les droits internes1052. Ainsi les règlements
communautaires ont un pouvoir contraignant immédiat, à l’inverse aux directives permettant
une plus grande flexibilité. À la différence de la précédente directive, ce règlement ne
concerne pas seulement les bébés de deux espèces de phoques en particulier (harpés et à
1049 Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 sur le commerce des
produits dérivés du phoque, J.O. L 286/36 du 31.10.2009 [ci-après : "Règlement phoques 2009"] . 1050 Id., Préamb., §4. 1051 Id., Préamb., §1. 1052 Voir MASSON, A., Droit communautaire : Droit institutionnel et droit matériel, Broché, 2008, p. 243.
173
capuchon), mais toutes les espèces et plus généralement tous les pinnipèdes, y compris les
otaries et les morses1053.
La protection du bien-être animal est le point de départ du règlement de 2009 selon lequel :
« Les phoques sont des animaux sensibles qui peuvent ressentir de la douleur, de
la détresse, de la peur et d’autres formes de souffrance »1054.
Précisons que ce règlement a été adopté suite au Traité de Lisbonne de 2008, lequel a érigé le
statut des animaux au rang d'êtres sensibles et le bien-être animal en principe fondamental de
droit communautaire. Précisons toutefois que ce règlement a été adopté le 31 octobre 2009,
soit un mois avant l'entrée en vigueur dudit traité le 1er décembre 2009. Ceci explique
pourquoi ce règlement réfère toujours au protocole de 1997 et non pas à l'article 13 du traité
de Lisbonne, lorsqu'il fait référence au bien-être animal1055.
Il est également précisé que ce règlement s'inscrit dans le cadre du plan d'action sur le bien-
être animal au cours de la période 2006-20101056. Rappelons que celui-ci visait à renforcer les
mesures de protection la scène mondiale, y compris dans le cadre du commerce international.
Comme pour les fourrures de chien et de chat en 2007, l'UE opte pour une interdiction totale
d'importation des produits du phoque en vertu des difficultés de contrôle. Selon le règlement :
« les conditions dans lesquelles la chasse au phoque est pratiquée rendent
concrètement impossibles, ou, à tout le moins, très difficiles, une vérification et un
contrôle cohérents du respect par les chasseurs des exigences relatives au bien-
être animal »1057.
En vertu de ce règlement, les produits interdits dans l'UE depuis le 20 août 20101058
concernent les produits tels que la viande, l'huile, la graisse, les organes, les gélules d’oméga-
3 et les vêtements confectionnés à partir de peaux et de fourrures de phoque transformées1059.
1053 Règlement phoques 2009, Art.2 (1). 1054 Id., Préamb., §1. 1055 Id., Préamb., §9. 1056 Id., Préamb., §1. 1057 Id., Préamb., §11. 1058 Id., Art.8. 1059 Id., Préamb., §3.
174
La disposition clé de ce règlement est contenue à son article 3(1) selon cette formulation :
« La mise sur le marché de produits dérivés du phoque est autorisée uniquement
pour les produits dérivés du phoque provenant de formes de chasse
traditionnellement pratiquées par les communautés inuites et d’autres
communautés indigènes à des fins de subsistance »1060.
D'une manière originale, ce règlement ne prévoit pas d'interdiction explicite. Mais cette
exception de mise sur le marché pour les seuls produits issus de la chasse traditionnelle de
subsistance contient en son sein une interdiction implicite applicable à tous les autres cas.
De plus, si aucun pays n'est explicitement visé par ce règlement, il mentionne néanmoins que
les phoques sont chassés dans la Communauté et en dehors de celle-ci1061. Au sein de l'UE, il
s’agit principalement de la Norvège. Notons que ce pays également mentionné dans la
directive de 1989 venant prolonger l'interdiction d'importation des peaux de bébés-
phoques1062. En dehors de l'UE, la référence explicite aux communautés inuites, pour
lesquelles la vente demeure permise, concerne le Canada également mentionné dans la
directive de 1989.
Les plaintes formulées par le Canada et la Norvège à l'encontre de l'interdiction
communautaire sur les produits dérivés du phoque ont mené à la création d’un groupe
d’experts au sein de l'OMC en 20111063. La première décision de 2013 a été confirmée en
appel en 2014. Bien que favorables au bien-être des phoques, ces décisions demandent à l'UE
la mise en conformité de son règlement du fait de la violation de plusieurs règles de
l'OMC1064.
Émettons une remarque sur l'incohérence du droit communautaire concernant la protection
des animaux à fourrure. Concernant les animaux de production, il existe en effet beaucoup
plus d'instruments de protection sur le bien-être des animaux d'élevages que sur les animaux à
fourrure. Concernant les méthodes de mise à mort particulièrement controversées, seule une
recommandation du Conseil de l'Europe de 1990, révisée en 19991065, prévoit que celles-ci
1060 Id., Art.3 (1). 1061 Id., Préamb., §3. 1062 Voir supra. 1063 Voir ECKSTEIN, A., "Phoques : l’interdiction de l’UE examinée par un panel de l’OMC", Europolitique, 26 avril
2011, en ligne : http://www.europolitique.info/phoques-l-interdiction-de-l-ue-examinee-par-un-panel-de-l-omc-
art302322.html (date d'accès : 13.12.2012). 1064 Voir respectivement les décisions : Communautés européennes - Mesures prohibant l'importation et la
commercialisation de produits dérivés du phoque, Rapports du groupe spécial, OMC, WT/DS400/R - WT/DS401/R,
25.11.2013 ; Communautés européennes - Mesures prohibant l'importation et la commercialisation de produits
dérivés du phoque, Rapports de l'Organe d'appel, OMC, WT/DS400/AB/R - WT/DS401/AB/R, 22.05.2014. 1065 Recommandation concernant les animaux à fourrure du 22 juin 1999 (qui remplace celle du 19.10.1990).
175
doivent être réalisées par une personne compétente sans causer d'agitation, de douleur ou
d'autre forme de détresse1066.
Malgré l'adoption de plusieurs restrictions commerciales afin de protéger le bien-être de
plusieurs animaux à fourrure à l'encontre de certaines méthodes, relevons le paradoxe selon
lequel l'UE demeure la première productrice de fourrure industrielle à l'échelle mondiale1067.
Pourtant, les rapports rendus par le comité scientifique de la Commission européenne
déclarent que les méthodes de détention et de mise à mort des animaux à fourrure dans les
élevages sont contraires aux normes européennes de protection du bien-être animal1068.
Alors que l'UE détient de nombreux élevages d'animaux à fourrure à l'intérieur de ses
frontières1069, elle impose la protection du bien-être de ceux-ci à l'extérieur.
À travers ses différentes restrictions commerciales, l'UE a affiché ouvertement sa politique
anti-fourrure sur la scène internationale. Audacieuses en regard des règles du commerce
international, ces interdictions d'importation ont été d'autant plus risquées que les sanctions,
lorsqu'elles sont prononcées par l'OMC, peuvent s'élever à plusieurs millions d'euros1070.
Au sein de l'Union européenne, il semblerait donc que la protection du bien-être des animaux
à fourrure soit confinée aux phoques ainsi qu'aux chats et aux chiens dans les pays étrangers
(notamment au Canada pour les phoques et en Chine pour les chats et les chiens), au
détriment des visons, renards et autres espèces dans les pays européens1071. En ce sens, la
réglementation européenne semble témoigner d'une protection pouvant être qualifiée de
"spéciste", c'est-à-dire d'une protection qui privilégie certaines espèces au détriment d'autres,
mais aussi d'une politique d'ingérence contestable sur le plan du droit international. En effet,
l'UE a pris des initiatives afin de dicter aux autres pays la marche à suivre en matière de bien-
être animal, alors qu'elle-même ne montre pas l'exemple idéal.
Pour plus de cohérence, une interdiction des élevages d'animaux à fourrure serait-elle possible
au sein de l'UE ? En plus d'être souhaitable pour rétablir la logique de la politique européenne
1066 Id., Art. 22. 1067 European Fur Breeders’ Association, 2010 Annual Report, en ligne :
http://www.efba.eu/download/annual_report/2010/index.html (date d'accès : 13.12.2012). 1068 EUROPEAN COMMISSION, Study into the legal, technical and animal welfare aspects of fur farming, Office for
Official Publications of the European Communities, 1991; EUROPEAN COMMISSION, The welfare of animals kept
for fur production, Report of the Scientific Committee on Animal Health & Animal Welfare, 2001. 1069 Pas moins de 6000 élevages d'animaux à fourrure ont été recensés dans les pays de l'UE. Voir en ligne :
http://www.fondationbrigittebardot.fr/s-informer/fourrure (date d'accès). 1070 Par exemple, dans le cadre de l'interdiction de vendre de la viande de bœuf aux hormones de croissance en
provenance des États-Unis, l’Union européenne a été condamnée par l'OMC à payer droits de douane de 100% (soit
116 millions de dollars) pour exporter ses produits agricoles aux États-Unis comme mesure de rétorsion. Voir P.
SINGER, “L’Organisation mondiale du commerce : un obstacle au progrès de la protection légale des animaux”, Les
cahiers antispécistes, n°274, CA n°25, 2005, p.5. 1071 Les principaux pays producteurs de fourrure issue d'élevages sont les États-Unis et la Russie.
176
anti-fourrure, laquelle conteste les méthodes contraires au bien-être animal sur la scène
internationale, il semblerait que des avancées soient d'autant plus envisageables que la
Commission européenne souhaite remédier aux problèmes éthiques que constituent les
élevages d'animaux à fourrure1072. Une consultation réalisée en 2005 révèle également que
plus de 80% des européens considèrent qu’il faut améliorer le niveau du bien-être des
animaux à fourrure dans ces élevages1073. En outre, la fin des élevages d'animaux à fourrure
peut raisonnablement être envisagée dans l'UE sachant qu'un nombre croissant de pays
européens adopte des lois d'interdiction et de restriction de ces élevages. Par exemple, ceux-ci
sont interdits au Royaume-Uni, en Suisse, en Autriche, aux Pays-Bas et en Slovénie, et des
restrictions existent en Suède, en Norvège et en Allemagne1074.
1072 EUROGROUP FOR ANIMAL WELFARE, “Commission report reveals serious welfare problems in fur farming”,
Communiqué de presse, Bruxelles, 20 décembre 2001. 1073 EUROPEAN COMMISSION, Response statistics for Community Action Plan on Animal Welfare and Protection:
Welfare and protection of farmed animals, 2005. 1074 Par exemple, le Royaume-Uni a interdit tout élevage d’animaux à fourrure pour des raisons éthiques depuis 2000
(Fur Farming (Prohibition) Act), tout comme la Suisse en vertu de la Loi fédérale sur la protection des animaux
depuis 2005. Depuis 2012, les Pays-Bas ont prévu d'interdire tous ces élevages pour 2024. La Slovénie a interdit les
élevages d'animaux à fourrure dans sa nouvelle loi de 2013. Les élevages de renards et de chinchillas seront interdits
en Croatie en 2017, ainsi qu’au Danemark pour les renards en 2024.
177
- Conclusion du chapitre 2 :
La protection communautaire du bien-être animal ne cesse de se renforcer au sein de l’UE.
Tant en regard du droit primaire (dans les traités), que du droit dérivé (dans les directives et
règlements). En effet, le Traité de Lisbonne de 2008 a érigé le statut des animaux au rang
d'êtres sensibles et consacré le bien-être animal comme principe fondamental de l'UE. Depuis
la première directive imposant l'obligation d'étourdissement préalable à l'abattage en 1974, les
directives et les règlements sur le bien-être des animaux se sont également succédés afin
d'étendre et de renforcer la protection communautaire, notamment dans le cadre de l'élevage
et de l'expérimentation. Par exemple, la dernière directive de 2010 sur l'expérimentation a
nettement étendue la protection allouée aux animaux de laboratoire puisqu'elle concerne
désormais des invertébrés sensibles, comme les céphalopodes, et les stades précoces de
développement, comme les formes larvaires et fœtales.
Au vu de l'ensemble des instruments communautaires sur le bien-être animal, l'avancée la
plus notable est sans doute l'interdiction de tester les produits cosmétiques sur les animaux,
ainsi que la mise sur le marché des produits testés depuis 20131075.
D'autres avancées revendiquées comme importantes sont néanmoins plus limitées. Citons par
exemple l'obligation de remplacer les cages en batterie traditionnelles par des cages
aménagées pour les poules pondeuses depuis le 1er janvier 2012. Au-delà des litières, grattoirs
et perchoirs prévus dans ces nouvelles cages, les poules ne disposent que de l'équivalent d'une
carte postale comme espace supplémentaire à la superficie d'une feuille de papier A4 pour
chaque poule dans les cages précédentes1076. Comme pour les autres espèces, les normes
communautaires permettent ainsi d'augmenter quelque peu l'espace alloué aux individus
détenus, mais l'état de confinement reste malgré tout intensif, à proprement parler, dans la
plupart des élevages industriels. En ce sens, les instruments communautaires sur le bien-être
animal ne manquent pas de préciser qu'ils visent seulement à établir des normes minimales.
Dans les faits, ces normes ne semblent même pas minimales lorsqu'elles autorisent les
mutilations courantes des animaux d'élevage sans anesthésie ni analgésie systématique.
1075 La fin de toutes les expérimentations date du 11 mars 2013. Voir l'Art.18 du Règlement (CE) n° 1223/2009 du
Parlement européen et du Conseil du 30.11.2009 relatif aux produits cosmétiques, J.O. L 342 du 22.12.2009. 1076Art.5-2 de la Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la
protection des poules pondeuses, J.O. L 203 du 3.8.1999. L'espace réglementaire est passé de 550 à 750 cm2 d'espace
disponible par poule (Art. 5-1 (1) et 6-1 (a)).
178
Pratiquées à vif, celles-ci concernent notamment l'édentage, ainsi que la castration et la coupe
de la queue des porcelets (avant sept jours), l'écornage des bovins ou encore la coupe du bec
des poules1077. L'argument pratique pour justifier de telles pratiques est d'éviter que les
animaux ne se blessent entre eux1078. À cela, il est possible de répondre que ces blessures
n'arrivent pas lorsque les animaux ont plus d'espace, comme lorsqu'ils sont en liberté dans les
systèmes d'élevage plus extensifs. Quant à l'argument économique, celui-ci vient expliquer
pourquoi les anesthésies et analgésies coûteuses ne sont pas pratiquées, contrairement à
l'objectif de réduction des souffrances des animaux. Parmi les avancées prévues, une
alternative à la castration des porcs devrait voir le jour en 2018 et une interdiction totale des
cases de gestation pour les truies -dont la durée de détention est désormais réduite- pour 2019.
En tout état de cause, une question se pose : est-il possible de parler de normes protectrices
des animaux lorsque le confinement intensif, l'égorgement à mort et les mutilations à vifs des
animaux sont toujours cautionnées par les législations-mêmes censées garantir leur bien-être ?
Ces législations, même lorsqu’elles semblent plus avancées que d’autres, contiennent encore
de nombreuses faiblesses, contradictions et incohérences qu’il convient de mettre en lumière.
1077 Directive porcs (Directive 2008/120/CE), Directive veaux (Directive du Conseil 2008/119/CE) et Directive poules
pondeuses (Directive du Conseil 1999/74/EC). 1078 Par exemple la directive sur les porcs autorise la "section partielle de la queue et la réduction des coins", en
principe seulement "lorsqu'il existe des preuves que des blessures causées aux mamelles des truies ou aux oreilles ou
aux queues d'autres porcs ont eu lieu" (Annexe I, Chap. I, al.8).
179
Conclusion du Titre 2
Les conventions (et protocoles subséquents) du Conseil de l'Europe ont joué un rôle moteur
dans la protection européenne du bien-être animal. Au-delà du double régime européen et
communautaire dans les domaines des transports, de l'abattage, de l'élevage et de
l'expérimentation, l'Union européenne est allé plus loin en accordant une place de choix au
bien-être des animaux.
Bien qu'avant-gardiste dans certains domaines, nous avons relevé que la règlementation
communautaire n'en demeure pas moins timide sous d'autres aspects. En effet, celle-ci est
tiraillée par la contradiction interne aux divergences protectionnistes et non-protectionnistes
de ses États membres1079. Alors que certains pays poussent en faveur d'une protection accrue
et d'un leadership affirmé en matière de protection du bien-être animal sur la scène
internationale, d'autres viennent freiner cette protection afin de protéger leurs intérêts
particuliers. Cette schizophrénie communautaire sur la protection du bien-être animal résulte
en une protection qui semble à la fois très enthousiaste mais finalement très relative.
Derrière l'apparence parfois très protectrices des instruments européens réitérant de
nombreuses fois l'objectif de protection du bien-être des animaux en tant qu'être sensibles,
notamment à travers l'obligation de leur éviter toute douleur et souffrance jugée inutile,
certaines exceptions ou dispositions particulières viennent toutefois annihiler, sinon amoindrir
considérablement, la portée protectrice de ces instruments. Dans le droit en général et, en
particulier concernant le bien-être animal, il est ainsi possible d'affirmer que "le diable est
dans les détails" !
En résumé, bien que la protection européenne allouée au bien-être des animaux soit élevée sur
la scène internationale, celle-ci comporte encore de nombreuses failles. Néanmoins, elle
permet de fournir un exemple opératoire unique en son genre. En effet, il s'agit du seul régime
de protection du bien-être animal au niveau régional qui prévoit des dispositions obligatoires
envers les États-membres au sein de l'UE, ainsi qu'aux pays tiers dans le cadre commercial.
Les mesures de protection adoptées par l'UE permettent également de "tirer vers le haut" les
États membres qui sont les plus réticents à faire des concessions en faveur de cette protection.
1079 Parmi les anciens pays de l'UE, les États pouvant être qualifiés de "protectionnistes" (ou moteur de protection) sont
notamment l'Angleterre et l'Allemagne ; quant aux pays "non-protectionnistes" (plus réticents envers cette protection),
il s'agit par exemple de la France et l'Espagne. Voir MELIK, N., "La France face au "droit des animaux" et GAMERO,
M.R., "L’Espagne, un pays non-protectionniste", dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de
l’Europe, 2006, pp. 227-248.
180
En ce sens, certaines avancées n'auraient jamais eu lieu dans les pays dits "non-
protectionnistes" si les normes de protection de l'UE n'avaient pas vu le jour1080.
Bien que certaines interdictions commencent à poindre dans les domaines de
l'expérimentation et de l'élevage, l'UE ne remet pas en question le principe même de
l'utilisation des animaux, même si elle précise que leur bien-être ne doit pas être ignoré.
1080 En plus des cases de gestation (déjà interdites en Angleterre et en Suède), citons l'interdiction des cages en batterie.
Certains pays comme la France tardent à mettre en application cette interdiction communautaire, malgré plus de douze
ans pour s'y conformer, entre l'adoption de la directive en 1999 et l'entrée en vigueur de l'interdiction en 2012. Au
contraire, la Suisse fut le premier pays à avoir adopté une telle interdiction en 1992, ainsi que l'Allemagne en 2007,
soit 5 ans avant l'entrée en vigueur de la directive communautaire.
181
CONCLUSION DE LA PARTIE I
Cette première partie a mis en lumière que le droit du bien-être animal progresse
constamment et de manière croissante au niveau national et européen. De plus, son champ
d'application implique de plus en plus d'animaux protégés et d'activités réglementées. Les
prescriptions, comme les obligations et les interdictions relatives, augmentent et se renforcent.
- Dans les droits nationaux : des lois sont présentes sur tous les continents, à commencer par
les premières lois anti-cruauté, nées dans les pays anglo-saxons et européens dès la première
moitié du XIXe siècle. Celles-ci sont ensuite apparues dès la fin du XIXe dans les colonies
britanniques (en Afrique, en Asie et en Océanie). Les lois anti-cruauté se sont ensuite
propagées à travers le monde, y compris dans certains pays du Moyen-Orient et d'Amérique
latine, dans le courant du XXe siècle.
Quant aux nouvelles lois protectrices du bien-être animal, celles-ci sont apparues à partir de la
seconde moitié du XXe siècle, toujours dans les pays anglo-saxons et européens. Elles font
figure de nouveau modèle législatif dont la base anti-cruauté demeure comme socle fondateur.
Depuis le début du XXIe siècle, une explosion législative a lieu en faveur des lois pro-bien-
être à l'échelle mondiale. Il s'agit tant de pays qui ont remplacé leurs lois anti-cruauté par des
lois pro-bien-être, que de révisions législatives, ou encore de toutes nouvelles lois adoptées
dans certains pays, directement selon ce nouveau modèle, qui tend à s'imposer mondialement.
En ce début de XXIe siècle, le modèle anti-cruauté reste fort mais coexiste complètement avec
le modèle pro-bien-être. En ce sens, même si les lois anti-cruauté restent les plus répandues à
travers le monde, les lois sur le bien-être animal se font de plus en plus nombreuses1081.
Parmi les 107 pays recensés au total, 7 d'entre eux ont des dispositions anti-cruauté inclues
dans des Codes (pénal ou criminel)1082, quand les 100 autres disposent de législations
particulières dédiées spécifiquement à protéger les animaux1083. Parmi ces pays, la majorité
des 2/3 dispose actuellement de lois anti-cruauté (dont l'intitulé concerne la cruauté envers les
1081 Voir la liste des pays à l'Annexe 1 ci-après. 1082 Par ordre d'apparition dans la base de données de l'Annexe I, ces pays sont : l'Egypte, le Nigeria, le Canada,
l'Indonésie, le Kazakhstan, la France et le Koweït. Contrairement à ces pays, la Russie dispose elle-aussi d'un article
anti-cruauté, mais présente l'originalité de le prévoir dans son Code civil (et non pénal ou criminel). 1083 Rappelons que ces législations sur la protection des animaux concernent les animaux en tant qu'individus et se
distinguent ainsi des législations sur la conservation des animaux en tant qu'espèces sauvages. En effet, ces dernières
sont plus proches du droit de l'environnement, alors que les premières sont plus proches du droit animal au sens strict,
c'est-à-dire du droit du bien-être animal.
182
animaux), quand 1/3 dispose de lois pro-bien-être (visant explicitement le bien-être des
animaux)1084.
La carte de l'Annexe I représente (en foncé) les 107 pays recensés qui disposent de lois anti-
cruauté et/ou pro-bien-être sur la protection des animaux à ce jour (jusqu'à juin 2016)1085.
- En droit européen : les instruments du Conseil de l'Europe ont fait figure de précurseurs
avant ceux de la CEE, et désormais de l'Union européenne (et auparavant la CCE).
Si des normes anti-cruauté ont été adoptées en matière de piégeage en 1991, l'ensemble des
instruments européens font référence au bien-être des animaux. Qu'il s'agisse des anciennes
conventions et protocoles du Conseil de l'Europe, comme des instruments communautaires.
Ainsi, il s'agit d'une différence notable sur le plan conceptuel entre le niveau national et
européen. En effet, alors que les législations anti-cruauté constituent le modèle initial et
toujours la base générale de protection du bien-être animal au niveau national, la répression de
la cruauté fait figure d'exception au niveau européen, quand le modèle pro-bien-être s'est
quant à lui imposé d'emblée. En effet, les instruments européens sont nés à la fin des années
1960, à l'époque où le concept de bien-être animal commençait à apparaître dans les
législations nationales. Citons en ce sens la première "loi sur le bien-être animal" ("Animal
Welfare Act") aux États-Unis en 1966, deux ans avant la première allusion au bien-être animal
par le Conseil de l'Europe dans le préambule de la convention pionnière sur la protection des
animaux en transport international de 1968.
En tant que principes directeurs sur la protection du bien-être animal, les 5 libertés (en matière
d'élevage) et les 3 R (en matière d'expérimentation) sont désormais consacrés dans plusieurs
législations au niveau national, ainsi que dans les instruments du Conseil de l'Europe et de
l'Union européenne au niveau européen. Comme nous allons le voir, ces principes sont
également présents au niveau international, tout comme la protection du bien-être animal est
en train de faire sa place en droit international, de l'échelle mondiale à l'échelle universelle.
1084 Voir la liste des pays à l'Annexe 1. 1085 Voir la liste à l'Annexe 1 et la base de données du Global Animal Law Project, réalisée par l'auteure et intégrant les
actualisations survenues jusqu'en 2015, en ligne : https://www.globalanimallaw.org/database/national/index.html.
183
PARTIE II
L'ÉMERGENCE INTERNATIONALE ET UNIVERSELLE
DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
Cette deuxième partie vient mettre en lumière l'émergence des premières manifestations de
protection du bien-être animal en droit international et universel. Entendu comme droit
international général, le droit universel renvoie au droit de l’ONU (seule organisation
véritablement universelle puisqu’elle réunit tous les États souverains de la planète).
La protection du bien-être animal est apparue récemment en droit international. Cette
apparition est constatée dans le droit de certaines organisations internationales, notamment au
sein des normes de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et dans le droit de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Certaines allusions à la protection du bien-être
animal préexistent également en droit international de l'environnement, plus précisément dans
certains accords internationaux relatifs aux espèces animales menacées d'extinction (Titre 1).
D'autre part, il est possible de relever certaines des prémisses d'universalisation de la
protection du bien-être animal. Peut-elle être reconnue universellement comme valable et
consacrée dans un instrument onusien visant à pallier à l'absence de protection globale en
droit international positif ? Si oui, comment ? À cette fin, il existe certaines voies privilégiées
sur le plan de la technique juridique. En vertu de la théorie générale des sources formelles du
droit international, nous retenons la voie principielle et la voie conventionnelle. La première
concerne les principes généraux du droit du bien-être animal dont nous établirons le caractère
universel, et la seconde nous permettra d'envisager l'adoption d'une convention globale qui
viserait à poser les bases d'un nouveau droit universel du bien-être animal (Titre 2).
184
Titre 1
L'APPARITION RÉCENTE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL EN DROIT INTERNATIONAL
De sa normalisation spécifique à ses manifestations élargies1086
En plus d'être abordée spécifiquement au sein des normes de l'Organisation mondiale de la
santé animale (OIE) depuis le début des années 2000 (Chap. 1), la protection du bien-être
animal se manifeste plus largement en droit international. Avant ces normes, certaines
manifestations transparaissaient déjà des instruments du droit international de
l'environnement. Depuis peu, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a aussi adopté
des décisions qui font désormais explicitement référence au bien-être animal (Chap. 2).
1086 Les principaux ouvrages consultés pour la rédaction de ce titre figurent dans la bibliographie annexée sous :
"La protection du bien-être animal en droit international".
185
CHAP. 1- LA NORMALISATION INTERNATIONALE DE L'OIE
SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL1087
Créée en 1924, l'Office international des épizooties (OIE) a été renommée en 2003
l'Organisation mondiale de la santé animale, mais elle a conservé son acronyme OIE1088.
Alors que son mandat initial consistait à lutter contre les maladies animales transmissibles aux
hommes, il s’est étendu à la protection de la santé des animaux puis, depuis le début des
années 2000, au bien-être animal qui constitue désormais un "domaine d'action
prioritaire"1089. Après avoir exposé les caractéristiques et les fondements des normes de l'OIE
sur le bien-être animal (S.1), nous présenterons leur contenu par la suite (S.2).
S.1- Les caractéristiques et fondements des normes de l'OIE sur le bien-être animal
Présentons leurs principales caractéristiques (§1), avant d'en explorer les fondements (§2).
§1- Les caractéristiques des normes de l'OIE sur le bien-être animal
En plus de leur caractère novateur en tant que premières normes internationales sur le bien-
être animal (A), elles sont sous-tendues par une approche plus utilitaire et économique que
protectrice des animaux (B).
A- Le caractère novateur des normes internationales de l'OIE sur le bien-être animal
Selon le directeur général de l'OIE, le docteur Bernard Vallat :
« Les maladies étant un facteur important et constant de souffrance chez l’animal,
la lutte contre les épizooties au niveau mondial doit faire partie des priorités pour
tous ceux qui cherchent à protéger le bien-être animal. Ce postulat a incité nos
Pays membres à élargir le mandat de l’OIE pour y inclure la protection du bien-
être animal, en dépit du fait que ce domaine n’est pas spécifiquement abordé dans
les accords de l’OMC »1090.
1087 Les sources documentaires pour cette section se trouvent dans la bibliographie annexée sous le titre: "L'OIE et le
bien-être animal". L'ouvrage de référence principal étant A.C.D. BAYVEL (dir.), Animal Welfare, global issues,
trends and challenges = Bien-être animal, enjeux mondiaux, tendances et défis = Bienestar de los animales :
planteamientos mundiales, tendencias y desafíos, Revue scientifique et technique, vol. 24 (2), Office international des
épizooties, 2005. 1088 Voir la présentation de l'OIE, en ligne: http://www.oie.int/fr/a-propos/ (date d'accès: 2.01.2013). Notons que l'OIE
est l'une des plus anciennes organisations intergouvernementales existantes. 1089 Le bien-être animal a été défini pour la première fois comme un domaine d'action prioritaire dans le cadre du Plan
stratégique de l'OIE couvrant la période 2001-2005 [...]Le Groupe de travail de l'OIE sur le bien-être animal a été
officiellement mis en place lors de la 70e Session générale de l'OIE, en mai 2002". Voir OIE, Objectifs et actions de
l'OIE en matière de bien-être animal, en ligne : http://www.oie.int/fr/bien-etre-animal/themes-principaux/ (date de
mise à jour : 15 août 2012). 1090 Voir la Préface de Bernard Vallat dans BAYVEL, A.C.D. (dir.), Bien-être animal, enjeux mondiaux, tendances et
défis, Revue scientifique et technique, vol. 24 (2), Paris, Office international des épizooties, 2005.
186
Désormais, les normes de l'OIE sur le bien-être animal sont reconnues comme des références
internationales par l'OMC afin de faciliter les échanges internationaux des animaux et de leurs
produits dérivés, tout en garantissant leur sécurité sanitaire1091. En ce sens, un accord de
collaboration a été passé entre l'OIE et l'OMC en 1998 afin de favoriser l'application des
normes de l'OIE dans le cadre du commerce international1092.
Reconnaissant que la santé est une composante clé du bien-être animal, l'OIE est désormais
reconnue comme "chef de file mondial en matière de bien-être animal"1093.
Applicables à ses 180 États-membres, soit la plupart des États de la planète sauf quelques
petits États insulaires1094, les normes de l'OIE sont des recommandations techniques à valeur
non-contraignante1095. Bien que celles-ci soient adoptées par l'ensemble des États membres
qui s'engagent à les respecter1096, il n'existe aucun mécanisme de sanction en cas de non-
application. Seul un processus de médiation est prévu1097. Néanmoins, ces normes peuvent
acquérir une force obligatoire lorsqu'elles sont intégrées dans le droit interne des États
membres. Ces derniers peuvent aussi sommer d'autres États de les respecter sous peine de
sanction commerciale. Par exemple l'Australie a adopté des interdictions d'exportation envers
les pays du Moyen-Orient, du fait que le transport et l'abattage du bétail ne respectaient pas
les normes minimales de l'OIE sur le bien-être animal, incitant ainsi ces pays à les
appliquer1098.
1091 OIE, "Procédures suivies par l’OIE pour l’élaboration de ses normes et recommandations applicables au commerce
international", p.1. En ligne: http://www.oie.int/doc/ged/D11146.PDF (date d'accès: 14.01.13). 1092 OIE-OMC, Accord entre l’Organisation mondiale du commerce et l’Office international des épizooties, 4 mai
1998, en ligne: http://web.oie.int/fr/OIE/accords/fr_accord_omc.htm (date de mise à jour : 16-07-2006). 1093 Voir les "Objectifs et actions de l'OIE en matière de bien-être animal", en ligne: http://www.oie.int/fr/bien-etre-
animal/themes-principaux/ (Mise à jour: 5 juillet 2013). 1094 Voir "les 180 Membres de l'OIE", en ligne: http://www.oie.int/fr/a-propos/nos-membres/pays-membres-new/ (date
d'accès: 2.01.2013). 1095 Voir les Chapitres 7.1. des Codes sanitaires de l'OIE sur les animaux terrestres et aquatiques traitant
respectivement des "recommandations relatives au bien-être animal" et des "recommandations sur le bien-être des
poissons d’élevage" et la Préface de Bernard Vallat, op.cit., note 1090, p. 470. 1096 Les normes de l'OIE sont adoptées lors des réunions annuelles de l'Assemblée générale, sachant que 3 conférences
mondiales ont déjà eu lieu sur le thème du bien-être animal, la première à Paris en 2004, puis au Caire en 2008 et enfin
à Kuala Lumpur en 2012. Voir sur le site de l'OIE, "Conférences mondiales sur le bien-être animal", en ligne:
http://www.oie.int/fr/bien-etre-animal/themes-principaux/ (date d'accès: 4.01.2012). 1097 OIE, Le processus de médiation de l’OIE: communication de l’Organisation mondiale de la santé animale, 37e
réunion du Comité sur les mesures sanitaires et phytosanitaires, Genève (Suisse), 11-13 octobre 2006,
G/SPS/GEN/731, OIE, 2006. "La médiation est un mode de règlement amiable des conflits commerciaux au moyen
duquel une tierce personne (le médiateur) intervient auprès des parties afin de les aider à résoudre leurs désaccords".
Voir OIE, Commerce international: Droits et obligations des membres de l’OIE, 2009, en ligne :
http://www.oie.int/doc/ged/D9893.PDF (date d'accès: 4.01.2012). 1098 MORFUNI, L., "Pain for Profit: An Analysis of the Live Export Trade", Deakin Law Review, Vol.16, n°2, pp.497-
538 (en particulier les pages 530 et 531 sur l'OIE et l'OMC).
187
L'ensemble de ces normes sont élaborées et actualisées par des experts vétérinaires sur la base
des dernières connaissances scientifiques disponibles1099. Elles sont ensuite soumises à
l'Assemblée générale des États-membres pour adoption. Une fois adoptées, elles sont
intégrées aux Codes sanitaires de l'OIE sur les animaux terrestres (mammifères, oiseaux et
abeilles) et sur les animaux aquatiques (amphibiens, poissons, crustacés et mollusques)1100.
Actuellement, les normes de l'OIE sur le bien-être animal sont au nombre de 16, dont 12
concernent le Code sanitaire sur les animaux terrestres et 4 le Code sanitaire sur les animaux
aquatiques1101. Plus précisément, les normes de l'OIE sur le bien-être animal ont trait aux
transports (terrestre, maritime et aérien) et aux abattages (alimentaire et sanitaire) et ce, tant
pour les animaux terrestres, que pour les poissons d'élevage. Nous verrons qu'elles portent
aussi l'expérimentation animale, le contrôle des populations de chiens errants, l'élevage des
bovins et des poulets, ainsi que sur les équidés de travail.
En tant qu'organisation mondiale chargée en premier lieu de protéger la santé animale, l'OIE
insiste sur le lien entre la santé et le bien-être des animaux à la fois terrestres1102 et
aquatiques1103. Au delà de leur caractère sanitaire, ces normes sont sous-tendues par une
approche à connotation fortement utilitaire et économique.
B- L'approche utilitaire et économique des normes de l'OIE sur le bien-être animal
Loin de remettre en cause l'utilisation animale, les normes de l'OIE l'encouragent. En effet,
elles affirment que l'utilisation des animaux apporte une contribution majeure au bien-être des
personnes1104. Elles précisent que les animaux terrestres sont utilisés pour l'agriculture,
l’enseignement et la recherche, ainsi que pour la compagnie, les loisirs ou les spectacles1105.
Quant aux animaux aquatiques, elles mentionnent qu'ils sont utilisés pour la pêche de récolte
ou de capture, la recherche et les loisirs comme les poissons d’ornement dans les
aquariums1106.
En plus de cette perspective utilitaire, les normes de l'OIE mettent en avant les avantages
économiques liés à la protection du bien-être animal. Une meilleure protection est considérée
1099 OIE, Comprendre les activités normatives de l’OIE, p.2. Voir en ligne :
http://www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Media_Center/docs/pdf/Key_documents/COMMODITIES-FR.pdf (date d'accès:
18.08.2015). 1100 Voir la définition de "Animal" dans le glossaire du Code sanitaire sur les animaux terrestres et la définition de
"Animaux aquatiques" dans le glossaire du Code sanitaire sur les animaux aquatiques. 1101 Voir l'Annexe 3. 1102 Code terrestre, Art. 7.1.2. (1): "Il existe une relation très forte entre la santé des animaux et leur bien-être". 1103 Code aquatique, Art. 7.1.2. (1), b): "il existe une relation très forte entre la santé des poissons et leur bien-être". 1104 Code terrestre, Art. 7.1.2. (5) et Code aquatique, Art. 7.1.1. (1), a). 1105 Code terrestre, Art. 7.1.2. (5). 1106 Code aquatique, Art. 7.1.1. (1), a).
188
comme une source de productivité et donc de rentabilité économique1107. Selon ces normes :
"le bien-être des animaux d'élevage est garant d'une santé et une productivité normales"1108.
L'argument de la qualité est également invoqué sachant que le fait de protéger le bien-être des
animaux permet d'assurer la sécurité sanitaire des aliments1109. Ainsi, les arguments
économiques et sanitaires sont avancés afin d'encourager la protection du bien-être des
animaux, puisque celui-ci conduit à une plus grande rentabilité économique et à une meilleure
qualité alimentaire.
Les normes de l'OIE, à travers leur vision utilitaire et économique de la protection du bien-
être animal, témoignent ainsi d'une approche nettement anthropocentrée, c'est-à-dire centrée
sur les intérêts humains, bien plus que sur ceux des animaux eux-mêmes.
Dans leur introduction, les normes de l'OIE fournissent une définition du bien-être animal et
précisent les principes directeurs relatifs au bien-être des animaux terrestres et aquatiques.
§2- Fondements des normes de l'OIE sur le bien-être animal
La partie introductive du Chapitre 7.1. du Code sanitaire sur les animaux terrestres fournit
une définition du bien-être animal (A) et précise aussi certains principes de protection (B).
A- La définition du bien-être animal par les normes de l'OIE
Le "bien-être animal" est défini par les normes de l'OIE de la façon suivante :
« On entend par bien-être la manière dont un animal évolue dans les conditions
qui l’entourent. Le bien-être d’un animal (évalué selon des bases scientifiques) est
considéré comme satisfaisant si les critères suivants sont réunis : bon état de santé,
confort suffisant, bon état nutritionnel, sécurité, possibilité d’expression du
comportement naturel, absence de souffrances telles que douleur, peur ou
détresse »1110.
En fait, cette définition énumère les éléments qui permettent le bien-être animal, mais elle ne
définit pas réellement ce qu'il est. Cette définition évoque notamment la faculté d'adaptation
de l'animal à son environnement, dans la lignée de Donald Broom qui définit lui-même le
bien-être en regard des efforts que l'animal fournit pour s'adapter à son environnement1111.
1107 Notons que certains producteurs invoquent pourtant le fait que le bien-être des animaux impliquerait des coûts
supplémentaires, et donc, une perte de profit. 1108 Code terrestre, Art. 7.1.4. (6). 1109 Id., Art. 7.1.2. (7): "L’amélioration du bien-être des animaux d’élevage peut souvent accroître la productivité et la
sécurité sanitaire des aliments, et donc être source d’avantages économiques". 1110 Chapitre 7.1. du Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE. 1111 BROOM, D. M. et al., Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, p.19.
189
D'après la définition fournie par les normes de l'OIE, le bien-être animal est jugé "satisfaisant"
lorsque les critères énoncés sont réunis. Or cette affirmation fait appel à une évaluation
subjective du point de vue humain, qui juge si ce bien-être lui semble satisfaisant ou non.
Au contraire, les critères en eux-mêmes se placent du côté des animaux puisqu'ils concernent
leur santé, leur confort, leur nutrition, leur sécurité, l'expression du comportement naturel et
l'absence de souffrances (douleur, peur ou détresse).
Suite à ces premiers critères, d'autres précisions sont énumérées par cette vaste définition :
« Le bien-être animal requiert les éléments suivants : prévention et traitement
approprié des maladies, protection, soins, alimentation adaptée, manipulations
réalisées sans cruauté, abattage ou mise à mort effectuées dans des conditions
décentes. La notion de bien-être animal se réfère à l’état de l’animal, le
traitement qu’un animal reçoit est couvert par d’autres termes tels que soins,
conditions d’élevage et bientraitance. »1112
Du point de vue juridique, cette dernière phrase a tout son intérêt car elle permet de distinguer
le bien-être animal, qui concerne l'état de l'animal lui-même, des actions à réaliser par les
êtres humains en vue de ce bien-être, notamment à travers la notion clé de bientraitance.
Si l'obligation de soins, comme celle relative aux conditions d'élevage, se retrouve au niveau
national et européen, la notion de bientraitance appliquée aux animaux apparaît ici de manière
novatrice.
Après avoir présenté la définition - ou plutôt l'énumération des éléments constitutifs- du bien-
être animal d'après les normes de l'OIE, voyons désormais les principes qu'elles consacrent.
B- Les principes sur le bien-être animal consacrés par l'OIE
Les principes directeurs sur le bien-être animal sont en introduction des chapitres 7.1. des
codes sanitaires sur les animaux terrestres d’une part et aquatiques d’autre part. Si certains
principes sont repris dans le Code sur les animaux aquatiques, les grands principes sont
surtout contenus dans le Code sur les animaux terrestres, où ils ont été initialement consacrés
en 20051113.
1- Les principes directeurs universellement reconnus : les "5 libertés" et les "3 R"
Présentons le principe des "5 libertés" (a) avant celui des "3 R" (b), tels qu'ils sont évoqués
dans les normes de l'OIE.
1112 Chapitre 7.1. du Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE (dernière phrase soulignée par nous). 1113 Préface de Bernard Vallat, op.cit., note 1090, p. 470.
190
a) Les "5 libertés"
Les normes de l'OIE précisent que les 5 libertés, universellement reconnues, offrent des
orientations précieuses pour le bien-être des animaux1114. Pour tout animal, elles consistent à :
- Etre épargné de la faim, de la soif et de la malnutrition ;
- Etre épargné de la peur et de la détresse ;
- Etre épargné de l’inconfort physique et thermique ;
- Etre épargné de la douleur, des blessures et des maladies ;
- Etre libre d’exprimer des modes normaux de comportement" 1115.
Ces normes consacrent également le principe des "3 R" en matière d'expérimentation animale.
b) Les "3 R"
De même, il est précisé que les 3R sont universellement reconnus et qu’ils offrent des
orientations précieuses pour l’utilisation des animaux par la science1116. Ces 3R impliquent :
- La réduction du nombre d’animaux ;
- Le raffinement des méthodes expérimentales ;
- Le remplacement des animaux par des techniques non animales1117.
Deux autres principes sont également consacrés dans l'introduction des normes sur le bien-
être animal, à savoir la scientificité de ces normes et les principes en matière d’élevage.
2- Les autres principes consacrés : scientificité des normes et principes d’élevage
En plus de reposer sur une base scientifique (a), ces normes viennent préciser certains grands
principes relatifs à l'élevage des animaux (b).
a) La scientificité des normes
Tant le Code sanitaire sur les animaux terrestres que celui sur les animaux aquatiques
affirment le fondement scientifique des normes de l'OIE sur le bien-être animal1118. En effet,
celles-ci sont élaborées et révisées par des experts vétérinaires, en vertu des dernières
découvertes scientifiques, avant d’être validées par l’Assemblée générale des États-membres
1114 Code terrestre, Art. 7.1.2. (2). 1115 Id. 1116 Id., Art. 7.1.2. (3). 1117 Id. 1118 Code terrestre, Art. 7.1.3 et Code aquatique, Article 7.1.2.
191
de l’OIE à chaque réunion annuelle, puis intégrées dans les Codes pertinents (animaux
terrestres ou poissons d’élevage)1119. En ce sens, l’OIE précise que sa mission consiste à :
« Jouer le rôle de tête de file internationale dans le domaine du bien-être animal, à
travers l’élaboration de normes et de lignes directrices scientifiquement
fondées »1120.
b) Les principes d’élevage
Les principes en matière d'élevage ont été ajoutés en 2012. Il s'agit des principes généraux sur
le bien-être des animaux dans les systèmes de production animale1121. Afin d’assurer leur
bien-être, ces derniers requièrent de bonnes conditions ambiantes (qualité de l'air, température
et hygrométrie), un espace suffisant, un environnement adapté à chaque espèce, la prévention
et traitement des maladies, une nutrition et un abreuvement suffisants, et enfin le traitement de
la douleur lorsque des procédures douloureuses sont jugées "inévitables"1122. Sur ce dernier
point, il est précisé que, si des procédures douloureuses ne peuvent être évitées, la douleur
doit être traitée dans toute la mesure permise par les méthodes disponibles.
Concernant les obligations humaines, il est précisé que la manipulation des animaux doit
favoriser une relation positive entre les hommes et ces derniers, et ne provoquer ni blessure,
ni panique, ni peur durable, ni stress évitable. De plus, les éleveurs et les préposés aux
animaux doivent posséder suffisamment de compétences et de connaissances pour garantir
que les animaux seront traités dans le respect des principes sur le bien-être des animaux1123.
Il est intéressant de relever que le traitement préconisé pour les animaux d'élevage fait appel à
une relation positive entre les hommes et les animaux, comme au respect du bien-être animal.
Selon le directeur de l’OIE Bernard Vallat, la consécration de ces principes constitue un
"grand pas en avant à l’échelle mondiale"1124.
Après leur introduction, présentons désormais le contenu des normes sur le bien-être animal.
1119 OIE, Comprendre les activités normatives de l’OIE, p.2. Voir en ligne :
http://www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Media_Center/docs/pdf/Key_documents/COMMODITIES-FR.pdf (date d'accès:
2.01.2013). 1120 Voir OIE, Bien-être animal, Bulletin n° 2008-2, OIE, 2008, P.3 en ligne :
http://www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Publications_%20%26_Documentation/docs/pdf/bulletin/Bull_2008-2-FRA.pdf
(date d'accès: 14.01.2013). 1121 Code terrestre, Article 7.1.4. 1122 Id., Article 7.1.4. (2) à (8). 1123 Id., Article 7.1.4. (9) et (10). 1124 Id., Art. 7.9.3.: "Systèmes de production industrielle de bovins à viande".
192
S.2- Le contenu des normes de l'OIE sur le bien-être animal
Élaborées par des experts vétérinaires, les normes de l'OIE reflètent une grande précision et
technicité. Basées sur les dernières connaissances scientifiques, elles sont détaillées et
illustrées (avec des chiffres et des schémas)1125. Celles-ci sont contenues aux septièmes Titres
des codes sanitaires sur les animaux terrestres et aquatiques de l'OIE.
Nous résumerons les grandes lignes des normes relatives aux animaux de production (§1),
avant d'aborder les autres normes en vigueur, ainsi que celles en discussion pour l'avenir (§2).
§1- Les normes internationales sur le transport, l'abattage et l'élevage des animaux1126
Nous verrons successivement les normes adoptées par l'OIE afin de promouvoir le bien-être
des animaux en matière de transport (A), d'abattage (B) et d'élevage (C).
A- Les normes internationales sur le transport des animaux 1127
Les normes sur le transport par voie terrestre, maritime et aérienne s'appliquent uniquement
aux animaux domestiques vivants, qu'ils soient terrestres ou aquatiques. En effet, les animaux
sauvages et les animaux errants n'étant pas, ou plus, sous le contrôle de l'homme sont exclus.
La justification alléguée est que ceux-ci sont susceptibles de nécessiter des "conditions
distinctes"1128. Alors que les normes sur les transports terrestre et maritime seront présentées
ensemble compte tenu de leurs similarités (1), celles sur le transport aérien (2) et le transport
des poissons (3) seront présentées séparément.
1- Les transports terrestre et maritime1129
La première prescription des normes internationales sur les transports terrestre et maritime,
courte et clairement énoncée, est que la "durée du transport doit être réduite au minimum"1130.
1125 Par exemple, les normes sur les transports terrestres et maritimes présentent un exemple de "zone de fuite" pour les
bovins ainsi qu'un "schéma de déplacement pour faire avancer des bovins"; les normes sur l'abattage des animaux à des
fins alimentaires et sanitaires représentent ces schémas ainsi que des schémas du "point de pénétration idéal" pour
l'étourdissement des bovins, porcins, ovins, caprins, équidés et volailles, ce point étant situé en haut du front entre les
deux yeux. Notons l'absence de schémas concernant les animaux aquatiques et notamment l'étourdissement des
poissons. 1126 OIE, Code sanitaire pour les animaux terrestres, 2012 [ci-après: Code terrestre]. 1127 Code terrestre, Chap.7.2; 7.3 et 7.4. 1128 Id., Le Préambule de chaque norme sur les transports dispose que: "les présentes recommandations s’appliquent
aux animaux domestiques vivants appartenant aux catégories suivantes : bovins, buffles, chameaux, ovins, caprins,
porcins, volailles et équidés. Elles peuvent également s’appliquer à d’autres catégories d’animaux (cervidés, autres
camélidés et ratites). Les animaux sauvages et les animaux féraux sont susceptibles de nécessiter des conditions
distinctes". Précisons que la glossaire définit un "animal féral" comme "un animal appartenant à une espèce
domestiquée ne vivant plus sous surveillance ni sous contrôle direct par l'homme" et un "animal sauvage" comme un
animal "qui vit indépendamment de toute surveillance ou de tout contrôle direct par l'homme". 1129 Code terrestre, Chap.7.2: "Transport des animaux par voie maritime" et 7.3: "Transport des animaux par voie
terrestre". 1130 Id., Art. 7.2.1 et 7.3.1.
193
Ce principe est également celui contenu dans les instruments européens et communautaires
sur le transport des animaux. Les personnes responsables des animaux, dites préposés aux
animaux, doivent avoir l’expérience et la compétence professionnelle nécessaires pour
manipuler et déplacer des animaux d’élevage et comprendre leurs modes de
comportement1131. Ils doivent aussi être en mesure d'identifier les signes généraux de maladie
et les indicateurs de dégradation du bien-être (tels que le stress, la douleur ou la fatigue) et
connaître les moyens de les atténuer1132. De plus, il est interdit de recourir à des procédures
douloureuses comme les coups de fouet, la torsion de la queue, le tord-nez, la pression
exercée sur les yeux, les oreilles ou les parties génitales externes ou de faire l'usage
d’aiguillons ou autres instruments inadaptés (comme des gros bâtons, bâtons pointus, bâtons à
embout métallique, fil de clôture ou ceinturons en cuir épais) pour faire avancer les animaux,
ou encore de crier, pour ne pas causer d'agitation risquant de conduire à des bousculades ou à
des chutes1133. Les animaux doivent être saisis ou soulevés de manière à éviter douleurs,
souffrances et blessures (liées à des contusions, fractures ou luxations) et il est même précisé
qu'"[i]l ne faut pas jeter à terre ni traîner, ni faire tomber des animaux conscients"1134. Ici se
trouve ainsi l'interdiction des pratiques cruelles ou génératrices de souffrances, ainsi que
l'obligation de prendre les dispositions nécessaires pour éviter de maltraiter les animaux
transportés et leur causer un plus grand mal-être, sachant que le transport en lui-même n'est
pas un facteur de bien-être.
Il est également précisé que les animaux doivent être aptes au voyage1135, disposer d'un
espace suffisant1136 et pouvoir se reposer et s'alimenter à des intervalles appropriés1137.
1131 Id., Art. 7.2.2. et 7.3.2. Les "préposés aux animaux" sont définis dans le glossaire du Code terrestre comme des
personnes "disposant de connaissances sur le comportement et les besoins des animaux, qui, ayant un comportement
professionnel correspondant positivement à ces derniers associé à une expérience appropriée, peut assurer l’efficacité
de leur prise en charge et le respect de leur bien-être". 1132 Id., Art. 7.2.4, d) et 7.3.4, d). Tel que nous le verrons plus loin, le "bien-être" des animaux est défini par l'OIE
comme "la manière dont un animal évolue dans les conditions qui l’entourent. Le bien-être d’un animal (évalué selon
des bases scientifiques) est considéré comme satisfaisant si les critères suivants sont réunis: bon état de santé, confort
suffisant, bon état nutritionnel, sécurité, possibilité d’expression du comportement naturel, absence de souffrances
telles que douleur, peur et détresse. Le bien-être animal requiert les éléments suivants : prévention et traitement des
maladies, protection appropriée, soins, alimentation adaptée, manipulations réalisées sans cruauté et abattage ou mise à
mort effectué(e) dans des conditions décentes. La notion de bien-être se réfère à l’état de l’animal ; le traitement qu’un
animal reçoit est couvert par d’autres termes tels que soins, conditions d’élevage et bientraitance". 1133 Id., Art. 7.2.8 (3) d) et e) et 7.3.8 (3) d) et e). 1134 Id., Art. 7.2.8, (3) g) et h) et 7.3.8, (3) g) et h). 1135 Id., Art. 7.2.7 (3) et 7.3.7 (3). Les animaux ne sont pas aptes à voyages s'il sont "malades, blessés, faibles, invalides
ou fatigués"; "incapables de se lever"; atteints de "cécité totale"; s'ils ne peuvent être "déplacés sans éprouver de
souffrance additionnelle"; les "nouveau-nés"; les "femelles gravides"; celles qui ont "mis bas au cours des 48 heures
précédentes" si elles voyages sans leurs petits et enfin "ceux dont la condition physique ne supporterait pas les
conditions climatiques prévues". Des "conditions particulières" et une attention supplémentaire" sont également
requise pour certains animaux (jeunes, âgés, nerveux, sujets au mal des transports etc.) ainsi que ceux "présentant des
plaies non cicatrisées résultant d’actes chirurgicaux tels qu’un écornage". 1136 Id., Art. 7.2.5 (7) et 7.3.5 (8).
194
Le terme "approprié" apparaît à plusieurs reprises, concernant le traitement des animaux, les
conditions de transport, la quantité d'eau, de nourriture et de repos, ou encore les
manipulations des préposés, mais ce terme n'est nullement défini par ces normes. Des
dispositions spécifiques sont toutefois prévues en dernière partie pour préciser les
particularités de chaque catégorie d'espèce concernée, à savoir les bovins, les caprins, les
équidés, les porcins et les ovins1138.
2- Le transport aérien1139
Les normes sur le transport aérien contiennent une première partie sur les conteneurs
transportant les animaux. Les conditions de sécurité, d'espace et de ventilation, ainsi que des
dispositions spécifiques pour chaque espèce y sont notamment précisées1140. De nombreuses
dispositions sont prévues concernant les animaux en gestation, la préparation des animaux au
transport aérien, les densités de chargement, la désinfection, la radiation, la sédation etc.1141
Relevons que ces normes prévoient également la mise à mort d'urgence d'un animal dans les
cas où la sécurité de l’appareil, de l’équipage ou des autres animaux est en jeu1142. La mise à
mort doit être exécutée par une personne formée, les méthodes indiquées étant un pistolet
d'abattage, une injection létale ou une arme à feu1143. Notons que le principe d'évitement des
souffrances inutiles est réitéré voire même renforcé dans cette situation d'urgence où tout
mouvement de panique doit être évité lorsque la sécurité est menacée à bord d'un avion.
Pourtant, il peut sembler surprenant que l'utilisation d'armes à feu soit ici recommandée.
3- Le transport des poissons
Le Code sanitaire sur les animaux aquatiques prévoit des normes sur le bien-être des poissons
d’élevage pendant leur transport1144. Celles-ci s’appliquent aux transports par voie aérienne,
maritime ou terrestre et prévoient des conditions visant à assurer le bien-être des poissons1145.
On y retrouve les dispositions générales sur la compétence et la responsabilité du personnel
1137 Id., Art. 7.2.5 (8) et 7.3.9 (6) a). 1138 Id., 7.2. 12 et 7.3.12. 1139 Code terrestre, Chap.7.4: "Transport des animaux par voie aérienne". 1140 Id., Article 7.4.1. 1141 Id., Article 7.4.4. à 7.4.7. 1142 Id., Article 7.4.9. 1143 Id. Bien que les "armes à feu" soient mentionnées, il est toutefois précisé que les "compagnies de transport aérien
n’autorisent pas l’emploi des armes à feu classiques, en raison du danger qu’elles constituent pour l’aéronef".
Concernant les injections chimiques, il est également précisé que certaines substances (comme l’"utilisation de
curarisants tels que le suxaméthonium) ne constitue pas une méthode humanitaire", l'expression de "méthode
humanitaire" étant intéressante à relever car celle-ci fait penser au principe de traitement humanitaire, appliqué ici à la
mise à mort des animaux. 1144 Code aquatique, Chapitre 7.2 : "Bien-être des poissons d’élevage pendant le transport". 1145 Id., Préambule.
195
chargé de s'assurer du bien-être des animaux transportés1146, ainsi que certaines dispositions
spécifiques pour les différentes espèces de poisson.
D'une manière générale, les conteneurs utilisés pour le transport des poissons doivent être
adaptés à l’espèce, à la taille et au poids des poissons transportés, ainsi qu’à leur nombre"1147.
La qualité de l’eau doit aussi être adaptée à l’espèce transportée et à la méthode de
transport1148.
B- Les normes internationales sur l'abattage des animaux
Deux types d'abattage sont traités dans les normes de l'OIE sur le bien-être animal : l'abattage
à des fins alimentaires (1) et l'abattage à des fins sanitaires (ou prophylactiques) (2).
1- L'abattage alimentaire1149
Les normes sur l'abattage des animaux terrestres destinés à la consommation alimentaire (a)
seront présentées avant celles sur les poissons d'élevage (b).
a) L'abattage alimentaire des animaux terrestres
L'objectif des normes sur l'abattage alimentaire des animaux terrestres est énoncé ainsi :
« Les présentes recommandations visent à répondre aux impératifs de bien-être
des animaux élevés pour la production alimentaire, pendant les opérations de pré-
abattage et d’abattage jusqu’à ce que leur mort intervienne. »1150
À l'instar des normes européennes, il peut sembler paradoxal de parler du bien-être des
animaux lorsqu'il est question de leur mise à mort. Néanmoins, une disposition vient
renseigner sur le sens du bien-être visé en tant que limitation du stress des animaux concernés.
En effet, la prescription générale énonce que les opérations préalables à l'abattage (transport,
déchargement, acheminement, stabulation et soins), comme les opérations d'abattage
(immobilisation, étourdissement et/ou mise à mort), doivent être conduites sans causer un
stress inutile aux animaux1151. Ces normes insistent sur le fait que les personnes préposées à
ces opérations jouent un rôle important en matière de protection animale. En ce sens :
1146 Id., Art. 7.2.2 : "Responsabilités" et Art. 7.2.3.: "Compétences". 1147 Id., Art. 7.2.4 (2), a). 1148 Id., Art. 7.2.4. 3), a). 1149 Code terrestre, Chapitre 7.5. "Abattage des animaux". 1150 Id., Article 7.5.1.: "Principes généraux", 1."Objectif". 1151 Id.
196
« les abattoirs doivent disposer d’un nombre suffisant d’opérateurs compétents,
patients et prévenants, ayant une bonne connaissance des présentes
recommandations et de leur application au niveau national »1152.
Ces normes fournissent des schémas qui indiquent ledit "point de pénétration idéal", sur le
front entre les deux yeux, pour l'étourdissement des bovins, des porcins, des ovins, des
caprins, des équidés et des volailles1153. Des tableaux permettent également de préciser les
différentes méthodes de manipulation, d’immobilisation, d’étourdissement et d’abattage des
animaux1154. Par exemple, l'immobilisation peut se faire notamment par collier d'attache (pour
les bovins, équidés, camélidés), par entrave des pattes ou des ailes (pour les autruches), par
suspension (pour les volailles), par renversement (pour les bovins et camélidés) ou enfin par
ligature de 3 ou 4 pattes (pour les ovins, caprins, petits camélidés et porcs)1155.
Dans le cas de l'abattage des cervidés en liberté, les préoccupations relatives au bien-être
animal concernent notamment les tirs imprécis qui n’entraînent pas une mort immédiate, ainsi
que les immobilisations, extrêmement stressantes, qui doivent être aussi brèves que
possible1156.
Dans ces normes, aucune disposition ne précise que l'étourdissement préalable à l'abattage est
obligatoire, celles-ci ne faisant que préciser les méthodes d'étourdissement recommandées.
Ainsi, les pays ou groupes de pays (comme dans le cadre des organisations européennes) sont
libres d'imposer l'étourdissement préalable dans tous les cas ou de prévoir des dérogations,
par exemple dans le cas des abattages rituels. En vertu des normes d'étourdissement
préconisées par l'OIE, l'abattage doit avoir lieu dans les 20 secondes qui suivent un
étourdissement électrique ou par pistolet à percussion, ou dans les 60 secondes qui suivent la
sortie de l'animal d'une chambre à gaz (par CO2)1157. Dans ce cas, la compétence des
opérateurs, le bon entretien et fonctionnement du matériel, ainsi que la qualité de
l'immobilisation et la précision de l'étourdissement, sont essentiels pour limiter les
souffrances des animaux1158.
1152 Id., Article 7.5.1.: "Principes généraux", 2."Personnel". 1153 Id., Figures 1 à 6. 1154 Id., Art. 7.5.6.: "Récapitulatif des méthodes de manipulation et d’immobilisation et problèmes de bien-être animal
associés"; Art. 7.5.8.: "Récapitulatif des méthodes d’étourdissement et problèmes de bien-être animal associés"; Art.
7.5.9.: "Récapitulatif des méthodes d’abattage et problèmes de protection animale associés". 1155 Id. Art. 7.5.6.: "Récapitulatif des méthodes de manipulation et d’immobilisation et problèmes de bien-être animal
associés". 1156 Id. 1157 Id., Tableau "Méthode d’étourdissement/Intervalle maximum entre l’étourdissement et le coup". 1158 Id., Art. 7.5.8.: "Récapitulatif des méthodes d’étourdissement et problèmes de bien-être animal associés". Notons
que la percussion manuelle est généralement déconseillée.
197
Quant aux méthodes d'abattage préconisées, celles-ci incluent la saignée par égorgement, avec
ou sans étourdissement préalable, pour les gros animaux (soit les mammifères) ; la
décapitation (pour les ovins, caprins et volailles) ; la dislocation du cou (pour les volailles) et
l'électrocution dans un bain d'eau (pour les volailles et cailles)1159.
Il est précisé que les couteaux doivent être très tranchants et que les incisions doivent être
rapides et précises, la compétence de l'opérateur devant être d'autant plus grande dans le cas
des saignées sans étourdissement préalable, c'est-à-dire dans le cas des abattages rituels1160.
Précisons également que trois méthodes sont jugées "inacceptables" par souci de protection
animale et ce, pour toutes les espèces1161. Il s’agit de l'électro-immobilisation, source de
blessures, stress et douleurs ; de l'étourdissement électrique appliqué entre les deux pattes,
étant donné son inefficacité comparativement à celui pratiqué sur la tête comme précisé par
les schémas pour chaque type d'espèce ; ainsi que la section du tronc cérébral sans
étourdissement préalable1162.
b) L'abattage alimentaire des poissons d'élevage
Ces normes énoncent notamment les méthodes d’étourdissement et de mise à mort
considérées comme "humainement acceptables", selon les espèces de poissons. Il s'agit de la
percussion pour la carpe et les salmonidés ; de la décérébration à l’aide d’une pointe ou d’un
emporte-pièce et du tir à balle pour le thon1163 ; de l'électrocution pour la carpe, l’anguille et
les salmonidés1164. D'autres méthodes de mise à mort sont possibles mais déconseillées, à
savoir le refroidissement en déposant de la glace dans l’eau des poissons, l'exposition au
dioxyde de carbone (CO2) dans l'eau, ou les deux : refroidissement et CO2, l'immersion dans
des bains de sels ou d’ammoniaque, l'asphyxie par le retrait de l’eau et l'exsanguination sans
étourdissement préalable1165. À la différence des premières méthodes énoncées, ces méthodes
sont déconseillées car elles sont jugées moins respectueuses du bien-être des poissons1166.
1159 Article 7.5.9.: "Récapitulatif des méthodes d’abattage et problèmes de protection animale associés". 1160 Id. 1161 Id., Art. 7.5.10.: "Méthodes, procédures ou pratiques inacceptables par souci de protection animale". 1162 Id. 1163 Contrairement aux normes d'abattage des animaux terrestres, ces normes ne fournissent pas de schéma alors qu'il
aurait pu être pertinent dans le cas du tir à balle pour le thon, étant précisé que le cerveau doit être soigneusement visé
avant de tirer. Voir l'Art. 7.3.7.: "Récapitulatif des méthodes d’étourdissement et de mise à mort des poissons et de
leurs inconvénients en matière de bien-être". 1164 Code aquatique, Art. 7.3.8.: "Exemples de méthodes d’étourdissement et de mise à mort en fonction des espèces
de poissons". 1165 Article 7.3.6.: "Méthodes d’étourdissement et d’abattage", (4): "Les autres méthodes de mise à mort". 1166 Id., "ces méthodes s’avèrent peu respectueuses du bien-être des poissons. Par conséquent, il est préférable de ne
pas avoir recours à ces méthodes s’il est faisable d’employer les [autres] méthodes décrites".
198
2- L'abattage sanitaire (à des fins prophylactiques1167)
Les normes sur l'abattage sanitaire des animaux visent à éradiquer les épidémies en abattant
les animaux malades ou susceptibles d'être contaminés. Les normes sur l'abattage sanitaire des
animaux terrestres (a) seront abordées avant celles des poissons (b).
a) L'abattage sanitaire des animaux terrestres1168
De la même manière que les normes sur l'abattage alimentaire, ces normes visent le bien-être
des animaux jusqu’à ce que leur mort intervienne1169. La mise à mort des animaux doit être
"décente" et le personnel impliqué doit avoir les qualifications et compétences nécessaires1170.
Aucune définition du concept de "mise à mort décente" n'est formulée explicitement dans les
normes de l'OIE, mais elles permettent néanmoins de circonscrire cette notion comme une
mise à mort rapide (voire immédiate) et indolore (ou la moins douloureuse possible) de cette
façon :
« les méthodes utilisées doivent entraîner la mort immédiate ou la perte immédiate
de conscience [...] et ne provoquer aucune anxiété, douleur, détresse ou souffrance
chez l’animal »1171.
Ces normes précisent que les animaux contaminés doivent être abattus en premier, suivis de
ceux qui ont été en contact avec eux, puis enfin les autres1172. Des plans d’urgence sanitaire
doivent être en place au niveau national afin de décrire, entre autres, les structures de gestion,
les stratégies de lutte contre les maladies, les procédures opérationnelles et traiter des
questions de bien-être animal1173. Ces normes prévoient aussi les responsabilités et les
compétences de l'équipe spécialisée, notamment les vétérinaires, les préposés aux animaux et
les exploitants1174. Le responsable de l’équipe doit élaborer un "plan de mise à mort décente"
sur le site contaminé1175. Un récapitulatif des méthodes préconisées pour la mise à mort de
chaque espèce (mécaniques, électriques ou gazeuses) est également fourni sous forme de
tableau1176. La suite du texte présente chaque type de méthode d'abattage, ses conditions
1167 Selon le dictionnaire Larousse, la prophylaxie est définie comme: l'"ensemble de moyens médicaux mis en œuvre
pour empêcher l'apparition, l'aggravation ou l'extension des maladies". Voir en ligne:
http://www.larousse.com/en/dictionaries/french/prophylaxie (date d'accès: 6.01.2012). 1168 Code terrestre, Chapitre 7.6: "Mise à mort d’animaux à des fins de contrôle sanitaire". 1169 Id., Art. 7.6.1. (1). 1170 Id., Art. 7.6.1. (2). 1171 Id., 7.6.1. (6). 1172 Code terrestre, 7.6.1. (7). 1173 Id., Art. 7.6.2. 1174 Id., Art. 7.6.3.: "Responsabilités et compétences de l’équipe spécialisée". 1175 Id., Art.7.6.4: "Dispositions relatives à l’élaboration d’un plan de mise à mort". 1176 Id., Art. 7.6.5.
199
d'efficacité, ses avantages, ses inconvénients, ainsi que des conclusions concernant leur
adéquation pour chaque catégorie d'animaux.
Ainsi, le tir à balle serait adapté aux bovins, ovins, caprins et porcs, ainsi qu’aux grands
animaux se trouvant dans des espaces ouverts ; le pistolet à tige perforante serait adapté aux
volailles, ainsi qu’aux bovins, ovins, caprins et porcs (à l'exception des nouveau-nés)
lorsqu’elle est suivie du jonchage ou de la saignée ; le pistolet à percussion serait adapté aux
volailles, ainsi qu’aux ovins, caprins et porcs nouveau-nés jusqu’à un poids maximum de
10 kgs ; la macération serait adaptée aux volailles nouveau-nées et aux œufs embryonnés ;
l'électrocution serait adaptée aux veaux, aux ovins, aux caprins et surtout aux porcs (âgés de
plus d’une semaine) ; le mélange de CO2 avec de l'air, azote ou gaz inerte serait adapté aux
volailles ainsi qu'aux ovins, caprins et porcs nouveau-nés ; l'injection létale serait adaptée
chez les bovins, ovins, caprins, porcs et volailles en petit nombre ; l'addition d’anesthésiques
aux aliments ou à l’eau de boisson est jugée adaptée à la mise à mort de volailles se trouvant
en grand nombre à l’intérieur d’un bâtiment ; enfin des précisions sont apportées sur la
dislocation cervicale et la décapitation, ainsi que sur le jonchage et la saignée des animaux1177.
Bien que ces précisions soient énoncées dans le cadre particulier de l'abattage sanitaire, le
récapitulatif fourni pour chaque méthode est généralement valable pour tout type d'abattage.
b) L'abattage sanitaire des poissons d'élevage1178
Les normes de mise à mort des poissons d’élevage à des fins sanitaires rappellent les
dispositions générales sur les compétences et les responsabilités requises pour l’équipe
opérationnelle, son aptitude à apprécier le bien-être des poissons, notamment au regard de
l’efficacité des techniques d’étourdissement et de mise à mort, ainsi que pour la planification
des opérations globales sur le site contaminé1179. Pour la mise à mort des poissons à des fins
sanitaires, des méthodes différentes de celles recommandées à des fins alimentaires sont
prévues. Il s'agit notamment d'administrer une dose massive d’agent anesthésique, ou d'autres
méthodes comme la décapitation et la macération (broyage des œufs et des alevins)1180.
1177 Id., Art.7.6.6 à 7.6.18. 1178 Code aquatique, Chap. 7.4.: "Mise à mort des poissons d’élevage à des fins de contrôle sanitaire". 1179 Id., Art. 7.4.4.: "Compétences et responsabilités de l’équipe opérationnelle". 1180 Id., Art. 7.4.5. et 7.4.6. L'Art. 7.4.6 (2) a) sur la "macération" précise que cette méthode "fait appel à un appareil
mécanique muni de lames rotatives ou d’un système de projections provoque une fragmentation et la mort immédiate
des poissons nouvellement éclos et des œufs embryonnés, ainsi que des œufs fécondés ou non de poissons. La méthode
est adaptée à ce type d’opération. Un grand nombre d’œufs et d’alevins fraîchement éclos peuvent ainsi être
rapidement détruits".
200
En guise de remarque générale sur les normes de l'OIE en matière d'abattage (alimentaire et
sanitaire, des animaux terrestres et aquatiques), celles-ci témoignent de l'ampleur et de la
sophistication des méthodes employées pour tuer les animaux en fonction des différentes
espèces et contextes en présence, sans permettre de faire abstraction de toute souffrance.
C- Les normes internationales sur l'élevage des bovins et des poulets
En tant que productions quantitativement importantes mais éthiquement contestées, à l'image
de toutes les formes d'élevage industriel des animaux, l'OIE a adopté des normes sur l'élevage
desdits "bovins à viande" (A), avant de traiter desdits "poulets de chair" (B).
1- L’élevage des bovins à viande et vaches latières
Les termes de "production" et de "bovins à viande", tels qu'ils sont employés dans ces normes,
témoignent du fait que les bovins ne pas considérés comme des individus à part entière mais
comme de simples instruments de production ou des machines à produire de la viande1181.
Le champ sémantique utilisé est plus celui de l'objet de production ou de la marchandise, que
celui du sujet animal en tant qu'être vivant sensible. En vertu des termes employés, les bovins
sont considérés comme des objets, alors même que l'objectif affirmé par ces normes consiste à
protéger le bien-être des animaux. Il semble ainsi étrange d'associer le concept de bien-être à
celui d'instruments de production, au sein du titre complet de ces normes ainsi : "Bien-être
animal dans les systèmes de production de bovins à viande"1182. En ce sens, la juxtaposition
d'un concept qui se préoccupe de protéger les animaux en tant qu'individus sensibles, le bien-
être animal, avec des termes de productivité faisant passer les bovins pour des marchandises,
semble en effet paradoxal.
Ces normes couvrent les phases de reproduction, d'élevage et d'engraissement de bovins
destinés à la consommation de viande1183. Or, bien que ces normes couvrent ces phases depuis
la naissance jusqu'à l'engraissement, elles ne concernent pas la production de viande de
veau1184. En d'autres termes, ces normes ne visent pas les méthodes de production concernant
ladite "viande blanche" desdits "veaux de lait", bien que cette précision ne soit pas explicite.
Ces normes sur les bovins semblent avoir ouvert la voie à de prochaines normes concernant
l'élevage d'autres espèces, à l'image des normes spécifiques du Conseil de l'Europe et de
l'Union européenne présentées précédemment. Les plus récentes normes sur l'élevage (dits
1181 Chapitre 7.9.: "Bien-être animal dans les systèmes de production de bovins à viande". 1182 Id. 1183 Article 7.9.1.: "Définition". 1184Id., Article 7.9.2.: "Champ d'application".
201
systèmes de production) concernent désormais les vaches laitières et les poulets de chair1185,
tel qu’annoncé par le directeur de l'OIE Bernard Vallat lors d'un colloque au siège de
l'Organisation à Paris en 20131186. L'OIE élaborera t'elle aussi des normes internationales sur
les poules pondeuses, les veaux et les porcs ? Ou encore sur la production du foie gras, des
fourrures et autres ? Précisons que ces productions font l'objet de recommandations du
Conseil de l'Europe, compte tenu des problèmes de bien-être animal associés, et pourraient
servir de base pour l'élaboration de normes correspondantes par l'OIE.
Bien que limitées aux bovins, ces normes viennent définir tous les systèmes de production :
intensifs, semi-intensifs et extensifs1187. Alors que, dans les systèmes d'élevage intensifs, les
animaux sont confinés et dépendent de l'homme pour satisfaire leurs besoins les plus
élémentaires (alimentation, abreuvement et abri), ils sont libres de se déplacer à l'extérieur et
de répondre à leurs besoins dans les systèmes d'élevage extensifs1188. Quant aux systèmes
d'élevage semi-intensifs, ils combinent les pratiques intensives et extensives1189.
Outre les spécifications propres à la rentabilité des élevages (ex : en matière de reproduction
et de mortalité) et aux conditions de détention (ex : en termes d'alimentation et de densité)1190,
les pratiques douloureuses et attentatoires à l'intégrité physique des bovidés, sont également
traitées. Citons notamment les cas de la castration des mâles, l'ovariectomie des femelles,
l'écornage, la caudectomie (coupe de la queue), ainsi que les procédures d'identification
(tatouage, marquage au fer, perçage des oreilles avec étiquetage etc.)1191. Ces normes
reconnaissent que ces pratiques sont génératrices de souffrances et couramment mises en
œuvre sur les bovins. Selon la première prescription générale, ces procédures doivent limiter
au maximum la douleur et le stress pour l'animal. À cette fin, elles doivent être envisagées le
plus tôt possible dans la vie de l'animal et se dérouler sous anesthésie ou analgésie, avec les
recommandations ou sous la supervision d'un vétérinaire.
1185 Voir ci-dessous. 1186 VALLAT, B., "L’amélioration du bien-être animal dans le monde – la contribution de l’Organisation mondiale de
la santé animale (OIE)", La souffrance animale: de la science au droit, Colloque international LFDA-GRIDA, Siège
de l'OIE, Paris, 19 octobre 2012. 1187 Id., Art. 7.9.3.: "Systèmes de production industrielle de bovins à viande". 1188 Id., 1. Les systèmes intensifs: "Il s'agit des systèmes dans lesquels les bovins sont placés en confinement, avec une
dépendance totale et quotidienne vis-à-vis de l'homme pour la satisfaction de leurs besoins élémentaires tels
qu'alimentation, abri et abreuvement"; 2. Les systèmes extensifs: "Il s'agit des systèmes dans lesquels les bovins ont la
liberté de se déplacer à l'extérieur et bénéficient d'une certaine autonomie pour sélectionner leur nourriture (pacage),
accéder à l'eau et s'abriter". 1189 Id., 3. Les systèmes semi-intensifs: "Il s'agit des systèmes dans lesquels les bovins sont soumis à une combinaison
de pratiques intensives et extensives, soit simultanément, soit en alternance en fonction des conditions climatiques ou
de leur état physiologique". 1190 Id., Art.7.9.4. et Article 7.9.5. 1191 Id., Article 7.9.5. (3) : "La conduite d'élevage", e) "Procédures douloureuses".
202
Afin de supprimer le recours à ces pratiques douloureuses, ces normes proposent 3 options :
« 1) cessation de la procédure grâce à de nouvelles stratégies d'élevage ;
2) élevage de bovins chez lesquels cette pratique n'est pas nécessaire ; ou
3) remplacement de la procédure par une pratique alternative non chirurgicale
apportant une amélioration avérée du bien-être animal »1192.
Couramment pratiquées dans les systèmes d'élevage intensifs, ces procédures sont néanmoins
déconseillées. Pour éviter l'écornage par exemple, il est recommandé de recourir à des races
de bovins sans cornes dans la mesure du possible, certains systèmes d'identification
(étiquettes des oreilles et tatouages) étant également préférés au marquage au fer chaud1193.
Les systèmes d'élevage extensifs ne sont pas totalement exempts de procédures douloureuses,
l'ovariectomie y étant pratiquée pour éviter les grossesses non désirées dans les pâturages1194.
Les normes sur les vaches laitières, dites "bien-être animal dans les systèmes de production
des bovins laitiers" ont été adoptées plus récemment1195. Celles-ci confirment la chosification
technicisée de l’animal à des fins de production1196. En ce sens, elles ne font qu’entériner les
méthodes déjà pratiquées, réellement se soucier du bien-être des vaches et de de leurs petits,
notamment en n’adressant nullement le problème de la séparation précoce entre la mère et son
petit. Pourtant, celle-ci cause d’importantes souffrances psychologiques, voire physiques
allant jusqu’à la mort de certains veaux (qui meurent en l’absence de leur mère).
Même si le "taux de mortalité" est bien mentionné à plusieurs reprises comme un indicateur
de mal-être animal, aucune mesure efficace n’est proposée contre ce phénomène1197.
En effet, la meilleure solution serait de ne pas séparer le petit veau de sa mère. Mais alors, le
lait produit par la vache pour son petit irait à celui-ci et non plus à la consommation humaine.
1192 Id. 1193 Id., ii et v. 1194 Id. iii: "Ovariectomie: L'ovariectomie des génisses est parfois requise pour éviter les gestations non souhaitées
dans les systèmes de pâturage extensif". 1195 Code terrestre, Chapitre 7.11. : "Bien-être animal dans les systèmes de production de bovins laitiers". 1196 “La vache laitière est l’exemple suprême de la mère surmenée. De tous nos animaux d’élevage, c’est celui qui
travaille le plus dur et il est possible de calculer cela scientifiquement. C’est l’équivalent d’un coureur qui courrait six
à huit heures par jour, ce qu’on pourrait appeler une course folle.” (John Webster, professeur à l’École vétérinaire de
l’Université de Bristol). "Aujourd’hui, ce ne sont plus que des machines à produire du lait". Voir L 214, 5 avril 2009,
en ligne: http://www.protection-des-animaux.org/ipb/index.php?showtopic=29333 (date d'accès: 6.01.2013). 1197 Ex : Article 7.11.4. §3 : "Taux de mortalité".
203
2- L'élevage des poulets de chair
Les normes sur lesdits "poulets de chair" répondent à la même approche que celles sur les
bovins de boucherie, adaptées aux problèmes et besoins spécifiques des poulets d'élevage1198.
Les problèmes abordés, à l'image du picage et du cannibalisme, sont notamment issus de la
surdensité propre aux élevages intensifs1199. Quant aux besoins spécifiques des poulets, ces
normes traitent par exemple de celui consistant à prendre des bains de poussière. Ainsi :
« Les bains de poussière contribuent à conserver le plumage en bon état, ce qui
aide les oiseaux à maintenir leur température corporelle et à se protéger des
blessures »1200.
Puisqu'elles ne concernent les poussins qui ont au moins un jour, ces normes évitent d'aborder
le problème du broyage des poussins mâles à la naissance1201. Notons ici que l’Allemagne est
le premier pays à avoir décidé de mettre fin à cette pratique cruelle pour 2016, en appliquant
une technique de sexage des poussins visant à n’obtenir que des femelles, destinées à devenir
des poules pondeuses et éviter de sacrifier les mâles considérés inutiles à cette industrie1202.
Comme les autres normes, celles-ci traitent explicitement du confinement extrême des poulets
et des autres maux qui leur sont causés. La protection du bien-être des animaux, au sein de
normes qui ne remettent nullement en question leur mal-être, vient confirmer que ceux-ci
n'ont pas pour vocation d'être réellement protectrices, mais plutôt de fournir des orientations
vers une souffrance amoindrie.
En plus des activités relatives aux animaux de production (transports, abattages et élevages),
l’expérimentation et le contrôle des chiens errants font aussi partie des normes à l'OIE.
§2- Les normes internationales sur l'expérimentation, les chiens errants, les équidés de
travail et les développements annoncés
Adoptées suite aux précédentes, les normes sur l’expérimentation (A) et les chiens errants (B)
sont contenues dans le Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE. À l'avenir, de
nouvelles normes sur le bien-être animal sont amenées à se développer au sein de l'OIE (C).
1198 Code terrestre, Chapitre 7.10.: "Bien-être animal dans les systèmes de production des poulets de chair". 1199 Code terrestre, Article 7.10.3., § 6 (f). 1200 Id., Article 7.10.3., § 6 (d). 1201 Id., Article 7.10.2. 1202 En effet, les mâles de poules pondeuses ne peuvent pas devenir des poulets de chair qui ont été selectionné pour
des caractéristiques différentes. Sur "la détermination du sexe par une méthode d’optique fondée sur la différence de
taille des chromosomes sexuels de l’embryon" comme voie technique retenue par le ministre fédéral allemand et les
autres considérations générales à ce sujet, voir NOUËT, J.-C., "Poussin ou poussine ?", dans Revue trimestrielle de la
Fondation LFDA, n°87, octobre 2015.
204
A- Les normes sur l'expérimentation
Le préambule des normes sur l’utilisation des animaux pour la recherche et l’enseignement
précise d'emblée la position éthique de l'OIE sur l'expérimentation animale. Considérée
comme nécessaire, celle-ci doit être conciliée avec l'impératif de bien-être animal1203.
Il est donc de la responsabilité des expérimentateurs de réduire autant que possible la
souffrance des animaux lorsqu'elle est jugée inévitable1204. L’OIE reconnaît que l’utilisation
d’animaux vivants en recherche et dans l’enseignement est importante pour les progrès de la
santé animale et humaine, sachant qu'il est crucial de traiter humainement les animaux,
notamment en application de la règle des "3R"1205. Rappelons que cette règle vise le
remplacement des animaux par des méthodes de substitution, la réduction du nombre
d'animaux utilisés et le raffinement des méthodes expérimentales vers une diminution des
souffrances1206. En ce sens :
« La plupart des scientifiques et l’opinion publique conviennent que l’utilisation
d’animaux ne doit s’effectuer que si elle revêt un caractère de nécessité et doit se
justifier d’un point de vue éthique (ce qui évite ainsi la répétition inutile de
travaux de recherche impliquant l’utilisation d’animaux), que s’il n’existe aucune
autre méthode de substitution, que le nombre d’animaux utilisé doit être le
nombre minimal permettant d’atteindre les objectifs scientifiques ou
d’enseignement qui ont été fixés et enfin que l’utilisation d’animaux doit
s’effectuer de manière à engendrer le moins de douleur et/ou de stress
possible »1207.
Ces normes sur l’expérimentation concernent les animaux élevés, obtenus et/ou destinés à la
recherche (y compris les tests) et à l’enseignement supérieur, ainsi que les animaux destinés à
la production de matériaux biologiques et dont l’euthanasie dans des conditions décentes est
considérée comme étant indispensable au prélèvement de cellules, de tissus et d'organes"1208.
1203 Code terrestre, Chapitre 7.8.:"Utilisation d’animaux pour la recherche et l’enseignement", Préambule. 1204 Id., "L’OIE rappelle la nécessité de traiter humainement les animaux et que la qualité des travaux de recherche
dépend du bien-être animal. Il est de la responsabilité de tous les utilisateurs d’animaux de s’assurer du respect
scrupuleux de ces recommandations. En conservant l’approche globale du bien-être animal détaillée dans les principes
directeurs, l’OIE insiste sur l’importance de normes respectueuses des impératifs de protection animale". 1205 Id., Préambule. 1206 Id. Cette règle est présentée plus en détails à l'article 7.8.3.: "La règle des Trois R". 1207 Id., Notons qu'il est précisé que "la souffrance animale est souvent considérée comme un concept distinct de celui
de la douleur et celui du stress alors qu’elle devrait être considérée comme n’importe quel autre dommage à long terme
habituellement infligé aux animaux". 1208 Id., Article 7.8.2 : "Champ d’application"
205
Des définitions de la détresse, la douleur et la souffrance sont fournies1209, ainsi que d'autres
qui dépassent le cadre de l'expérimentation, comme celles sur les espèces menacées1210 et
l'enrichissement du milieu1211. Alors que l’état de souffrance est généralement opposé à l’état
de bien-être1212, la douleur est plus particulièrement définie comme impliquant une atteinte
physique suscitant des réactions comportementales1213. La détresse est quant à elle induite par
des facteurs de stress trop importants pour l'animal, lequel peut alors présenter des
comportements anormaux1214. Cette définition renvoie à la définition du "point limite",
désignant le seuil maximal de douleur et/ou de stress nécessitant l’administration d'un
traitement soulageant la souffrance et/ou la détresse, ainsi que l’arrêt de la procédure
douloureuse, avec éventuellement le retrait de l’animal de l’étude jusqu'à son euthanasie
(étant précisée que celle-ci doit s'effectuer systématiquement dans des conditions
décentes)1215.
En tant que remarque incidente, notons que l’on parle d'abattage pour les animaux d'élevage,
mais d'euthanasie pour les animaux de laboratoire1216. Ces termes ont des connotations bien
distinctes car l'abattage concerne ledit "bétail" (considéré comme marchandise ou produit de
consommation), alors que le terme d'euthanasie semble plus respectueux de l'animal sensible,
ce terme étant aussi employé pour les êtres humains. Les méthodes employées sont également
différentes puisque l’euthanasie concerne généralement l’injection létale (qui engendre un
endormissement mortel), alors que l'abattage fait appel à des méthodes plus violentes (telles
qu'elles ont été énumérées précédemment).
1209 Id., Art. 7.8.1. : "Définitions". 1210 Id., "Espèces menacées: est considérée comme menacée toute population risquant l’extinction parce que les
individus la composant sont en faible nombre ou sont menacés par des modifications de leur environnement ou par
l’augmentation de la pression de prédation". 1211 Id., "Enrichissement du milieu: désigne la complexification de l’environnement d’un animal captif (par exemple,
avec des jouets, en aménageant la cage, en lui offrant des possibilités de fourrager, en le logeant avec d’autres
congénères, etc.) afin de stimuler l’expression de comportements propres à son espèce sans caractère préjudiciable,
réduire l’expression de comportements inadaptés et stimuler ses fonctions cognitives". 1212 Id., "Souffrance : désigne une expérience désagréable et non désirée résultant de l’effet sur un animal de divers
stimuli nocifs et/ou de l’absence de stimuli positifs. L’état de souffrance s’oppose à l’état de bien-être". 1213 Id., "Douleur : désigne une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une atteinte tissulaire
réelle ou potentielle. Elle peut induire des réactions de défense, d’évitement et de stress et modifier certains aspects du
comportement naturel des espèces, comme leur comportement social". 1214Id., "Détresse : désigne l'état d'un animal qui n'a pas été capable de s'adapter à des facteurs de stress ; cet état se
manifeste par des réponses physiologiques ou comportementales anormales. La détresse peut être aiguë ou chronique
et peut avoir des conséquences organiques". 1215 Id., "Point limite : désigne le moment à partir duquel la souffrance et/ou le stress d’un animal d’expérimentation
doi(ven)t être évité(es), supprimé(es), atténué(es) ou réduit(es) au moyen de mesures telles que l’administration de
traitement soulageant la souffrance et/ou la détresse, l’arrêt de la procédure douloureuse, le retrait de l’animal de
l’étude ou l’euthanasie de l’animal dans des conditions décentes". 1216 Id., "Animal de laboratoire : désigne un animal destiné à être utilisé à des fins de recherche ou d'essai. Le plus
souvent, l’animal est spécifiquement obtenu et élevé afin d'avoir un certain statut physiologique, métabolique,
génétique ou sanitaire exempt d'agents pathogènes".
206
Les normes sur l'expérimentation précisent que tout projet de recherche doit faire l’objet d'une
évaluation éthique1217 et décrire les moyens visant le bien-être des animaux, à savoir :
« les méthodes permettant d’éviter ou de réduire au minimum la douleur,
l’inconfort, le stress, la souffrance ou toute altération durable d’une fonction
physique ou d’un paramètre physiologique, telles que l’anesthésie et/ou
l’analgésie ou les autres moyens permettant d’améliorer le confort tels que le
réchauffement, la mise à disposition de litières douces ou l’alimentation
assistée »1218.
Ainsi, les normes de l’OIE sur l’expérimentation ne se limitent pas aux procédures de
vivisection, mais prévoient plus largement les conditions d'élevage, de transport et de
détention des animaux pour la recherche1219. L'utilisation d'animaux sauvages est autorisée, à
condition que la technique de capture employée soit jugée "humainement acceptable", étant
précisé que l’utilisation d’espèces menacées doit demeurer "exceptionnelle"1220.
Quant aux prescriptions prévues, ces normes insistent sur la responsabilité de l'ensemble des
utilisateurs d'animaux : personnel scientifique, vétérinaires, étudiants et personnel affecté aux
soins aux animaux. Ceux-ci doivent être suffisamment formés et compétents pour travailler
avec les espèces utilisées, exécuter les procédures à suivre et tenir compte des considérations
éthiques1221. Il s'agit ainsi de respecter les impératifs liés au bien-être animal ou, selon une
formulation plus appropriée, réduire le mal-être des animaux sujets aux expérimentations.
Bien que ces normes traitent du bien-être animal, notons que les animaux expérimentés sont
toutefois considérés comme du matériel de laboratoire. De même que l’instrumentalisation
des animaux de production se manifeste à travers leur considération comme des machines à
produire (de la viande, du lait, de la fourrure etc.), les animaux de laboratoire sont traités
comme des outils de recherche. Ainsi, avant de considérer les animaux comme des sujets
sensibles dont le bien-être mérite d’être respecté, les normes de l'OIE les traitent plus comme
des objets utiles, à savoir comme des objets de consommation ou des objets de recherche.
1217Id., "Évaluation éthique : désigne l’évaluation de la validité de l’étude et justification de l’utilisation d’animaux.
Doivent être décrits l’identification et l’appréciation de l’ensemble des contraintes que risquent de subir les animaux,
les potentiels bénéfices retirés de leur utilisation ainsi que la manière dont ces deux aspects s’équilibrent (voir balance
risques / bénéfices ci-dessous), le protocole expérimental, l’application de la règle des Trois R, l’aménagement et le
fonctionnement de l’animalerie, les soins aux animaux ainsi que d’autres aspects tels que le niveau de formation du
personnel. Les avis rendus en matière d’éthique sont influencés par l’opinion publique". 1218Id., Article 7.8.4 (1) f). 1219 Id., Art. 7.8.7 à 7.8.10. 1220 Id., Art. 7.8.7. (6) et (7). 1221 Id., Art. 7.8.5.: "Assurance en termes de formation et de compétences".
207
B- Les normes sur les chiens errants1222
Le préambule des normes sur le contrôle des populations de chiens errants précise que la
santé publique, y compris la prévention des zoonoses et notamment de la rage, constitue une
priorité pour l'OIE1223. Une zoonose est définie comme "toute maladie ou infection
naturellement transmissible des animaux à l’homme"1224. La rage fait l'objet d'une
préoccupation prioritaire en tant que virus mortel, tant pour les animaux que pour les
humains. Même s'il existe un vaccin préventif, la rage est presque toujours mortelle une fois
le virus contracté1225. En effet, malgré une certaine atténuation de la rage depuis l'apparition
du vaccin antirabique découvert par Louis Pasteur en 1885, ce virus est encore présent dans
150 pays et territoires, et tue chaque année plus de 55 000 personnes dans le monde,
principalement en Asie et en Afrique1226. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) insiste
sur l'élimination de la rage chez le chien, en vertu du fait que ces derniers sont à l’origine de
la grande majorité des cas mortels de rage humaine1227. Dans le cadre d'une collaboration
étroite avec l'OMS et la FAO, les normes sur le contrôle des populations de chiens errants ont
vu le jour au sein de l'OIE1228. Dans sa mission de lutte la rage dans le monde, l'OIE précise :
« Une personne meurt de la rage toutes les dix minutes dans le monde. [...] 99%
des cas humains sont dus à des morsures de chiens infectés. Le chien est le
principal vecteur de la rage dans les pays où elle tue encore, et la lutte contre la
maladie chez les chiens, notamment les chiens errants, doit être la première des
priorités pour prévenir les cas mortels chez l'homme »1229.
1222 Code terrestre, Chapitre 7.7.: "Le contrôle des populations de chiens errants". 1223 Id., Préambule. 1224 Code terrestre, Glossaire, "zoonose". 1225 Données de l'OMS sur la rage, voir en ligne: http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs099/fr/ (date d'accès:
7.01.2013). 1226 Id. 1227 Id. 1228 "L’OIE s’engage pour combattre la rage dans le monde", en ligne sur le site de l'OIE: http://www.oie.int/fr/pour-
les-medias/editoriaux/detail/article/oies-commitment-to-fight-rabies-worldwide/ (8.01.2013): "Au niveau international,
l’OIE, la FAO et l’OMS développent des recommandations notamment pour assurer une bonne collaboration
intersectorielle. Depuis 2010, les normes de l’OIE en matière de rage sont sous révision afin d’aboutir à une approche
de contrôle de la maladie par étapes, en privilégiant l’importance épidémiologique de l’espèce majoritairement
impliquée dans les cas humains (le plus souvent le chien)". 1229 Id.
208
C'est pourquoi, l'OIE concentre ses efforts normatifs sur les chiens errants plutôt que sur les
autres animaux vecteurs de cette maladie1230. Les prescriptions sur la responsabilité des
propriétaires de chiens pourraient aussi se voir appliquer aux propriétaires de chats, voire aux
propriétaires d'animaux en général. En plus des obligations d'identifier, faire vacciner et
stériliser son animal, les normes de l'OIE précisent que tout propriétaire est responsable de
son animal pendant toute la durée de la vie de ce dernier, ou jusqu'à ce qu'il ne soit confié à un
autre propriétaire. Cette prescription revient à une interdiction d'abandon. Tout propriétaire
doit également s'assurer du bien-être de son animal dans le respect de ses besoins
comportementaux1231. Ces prescriptions ne sont pas sans faire rappeler celles de la
Convention du Conseil de l'Europe sur les animaux de compagnie de 1987. Elles pourraient
servir de base à l'élaboration de normes visant le bien-être des animaux de compagnie au sein
de l'OIE1232.
La notion de responsabilité des propriétaires est très présente. Ces normes précisent que le
moyen le plus efficace pour réduire la prévalence des morsures de chien consiste à sensibiliser
et à responsabiliser les propriétaires1233. Puisque ces normes visent le contrôle des
populations, elles prévoient aussi des mesures d'élimination des chiens errants en cas de
surpopulation, l'un des objectifs étant de réduire leur nombre à un niveau dit "tolérable"1234.
En matière d'euthanasie, elles précisent qu'il est important de réduire au minimum la détresse,
l’anxiété et la souffrance infligées aux chiens en veillant que les opérateurs soient
parfaitement formés1235.
1230 Ceux-ci sont par exemple les chats errants et le furet (parmi les animaux domestiques), ainsi que certains animaux
sauvages comme la chauve-souris, le renard ou le chacal. Notons que le renard est l'hôte sauvage principal en Europe
et en Amérique du Nord et le chacal en Afrique et en Asie. Voir HUNTER, A., La santé animale: les principales
maladies, éditions Quae, 2006, p.45. 1231 Code terrestre, Art. 7.7.4. (6): "Propriétaires de chiens: Toute personne qui prend possession d’un chien accepte
immédiatement la responsabilité de cet animal et de sa progéniture éventuelle, et ce pour toute la durée de vie des
animaux, ou jusqu’à ce qu’un nouveau propriétaire soit trouvé. Le propriétaire doit faire en sorte que le bien-être de
son chien soit respecté (y compris ses besoins comportementaux) et que le chien soit protégé autant que possible
contre les maladies infectieuses (par la vaccination et la lutte antiparasitaire ; il doit également veiller à ce qu’il ne se
reproduise pas de manière non souhaitée (par exemple, en recourant à la contraception ou à la stérilisation). Le
propriétaire doit veiller à identi) et, lorsque la législation l’exige, il doit se faire enregistrer dans une base de données
centralisée. Le propriétaire doit prendre toutes les mesures raisonnables pour que le chien n’échappe pas à son contrôle
d’une manière qui pourrait poser un problème à d’autres personnes et/ou à l’environnement". 1232 Voir la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie de 1987 et notamment ses articles 3
et 4 concernant le bien-être et la détention des animaux de compagnie: "Article 3: Nul ne doit causer inutilement des
douleurs, des souffrances ou de l'angoisse à un animal de compagnie. Nul ne doit abandonner un animal de
compagnie". Article 4 : "Toute personne qui détient un animal de compagnie ou qui a accepté de s'en occuper doit être
responsable de sa santé et de son bien-être. Toute personne qui détient un animal de compagnie ou s'en occupe doit lui
procurer des installations, des soins et de l'attention qui tiennent compte de ses besoins éthologiques [ou
comportementaux], conformément à son espèce et à sa race [...]". 1233 Code terrestre, Art. 7.7.6., 10. 1234 Id., Art. 7.7.3.(2). 1235 Id., Art. 7.7.6. (11).
209
Elles fournissent aussi la liste des méthodes de mise à mort jugées inacceptables en vertu des
exigences du bien-être animal1236. Cette énumération vise notamment certaines méthodes
chimiques (ex: produits d’entretien et solvants) et mécaniques (embolie gazeuse chez l’animal
conscient ; incinération de l’animal vivant ; exsanguination de l’animal conscient1237). Elle
s’étend à la décompression (étant précisé que la dilatation du gaz piégé dans les cavités
corporelles peut être très douloureuse) ; la noyade ; l’hypothermie (congélation rapide) ;
l’étourdissement (étant précisé qu'il ne s'agit pas d'une méthode d’euthanasie puisqu'il doit
toujours être suivi d’une technique induisant la mort) ; le piège mortel ; et enfin l'électrocution
de l’animal conscient1238. Lesdites "exigences du bien-être animal" (expression également
usitée en droit communautaire), permettent ainsi de décourager (pour ne pas dire interdire
puisqu'il ne s'agit que de simples recommandations) le recours à certaines méthodes de mise à
mort. Quant aux méthodes d'euthanasie jugées au contraire "acceptables", il s'agit des
injections létales, des techniques mécaniques (tir à balle, pistolet à tige perforante, jonchage,
exsanguination chez l’animal inconscient), ainsi que le gazage et l'électrocution1239.
Au lieu d'avoir recours aux méthodes préventives (stérilisation et vaccination) coûteuses, des
milliers de chiens errants sont ainsi abattus, le plus souvent par balle, notamment dans les
pays de l'Est comme en Russie où le problème est quantitativement important1240. Le tir à
balle est autorisé par ces normes en tant que méthode simple, rapide et jugée acceptable. Au
contraire, le fait de passer des chiens errants dans des crématoires mobiles, comme dans le cas
médiatisé de l'Ukraine en 20121241, est contraire à ces normes qui déclarent l'incinération
d'animaux vivants comme une méthode inacceptable.
Il est toutefois possible de se demander si ces normes ne permettraient pas de légitimer
l'extermination massive des chiens errants, au nom de l'éradication de la rage à l'échelle
mondiale ? Avant d'en venir à des programmes d'extermination, sans doute serait-il pertinent
d'insister sur la mise en place de programmes de prévention et sur le déblocage de fonds pour
aider ces pays à stériliser et à vacciner les chiens et ce, tant pour la protection de la santé
humaine et celle des animaux, que contre la cruauté massive.
1236 Id., Art. 7.7.6. (11), c). 1237 Notons que cette dernière méthode est néanmoins autorisée pour l'abattage rituel des animaux de consommation. 1238 Id., Art. 7.7.6. (11), c). 1239 Id., Art. 7.7.6. (11), Tableau sur les méthodes d'euthanasie. 1240 LESHCHINSKAYA, N., "Russian Dog Hunters Exterminate Stray Canines", Crime library, 5.12.2012, en ligne:
http://www.trutv.com/library/crime/blog/2012/12/05/russian-dog-hunters-exterminate-stray-canines-boast-about-
killings-online/index.html (date d'accès: 18.01.2013). 1241 EBENHOCH, A., "Ukraine cruel dog killing continues, Facing Football-Worldcup 2012 Ukraine carries on with
incredible cruel dog-massacres since 2009", 18 Nov. 2011, Hounds and people magazin, en ligne:
http://www.houndsandpeople.com/de/magazin/aktuelles/ukraine-cruel-dog-killing-continues/
(date d'accès: 18.01.2013).
210
Enfin, bien que les normes de l'OIE sur le bien-être animal aient le mérite d'exister, celles-ci
demeurent des recommandations non-contraignantes en elles-mêmes. C'est pourquoi il semble
intéressant, si ce n'est important, de mettre en avant l'idée d'un instrument international plus
contraignant, contre les méthodes inhumaines ou inacceptables, de traitement et de mise à
mort des animaux en général, qu'ils soient familiers, domestiques, sauvages ou errants.
Après avoir présenté les grandes lignes des normes adoptées sur le bien-être animal, voyons
celles qui sont en cours de discussion au sein de l'OIE.
C- Les normes sur les équidés de travail1242
Adoptées en mai 2016, soit les plus récentes à ce jour, les normes de l’OIE sur les équidés de
travail visent à assurer le bien-être des "chevaux, ânes et mulets utilisés ou destinés à être
utilisés pour la traction, le transport ou une activité lucrative, y compris les animaux réformés
de ces utilisations", mais il est possible de regretter que celles-ci ne concernent pas la grande
partie des "équidés utilisés pour les sports ou les compétitions, les activités de loisir, la
production de produits biopharmaceutiques ou la recherche"1243.
Ces normes posent d’abord les prescriptions générales concernant les obligations de soin,
d’alimentation et d’abreuvement appropriés aux besoins individuels, ainsi que de disposer
d’un hébergement convenable en tout temps -à l’abri du stress climatique, des prédateurs, des
blessures et suffisament grand pour pouvoir s’allonger, se relever et se retourner- cette
description excluant ainsi les stabulations individuelles trop étroites1244. Les personnes qui
s’en occupent doivent avoir les connaissances spécifiques de leur comportement1245. Aussi, et
de manière très importante, ces normes précisent que les équidés de travail ne doivent pas être
enfermés durant des périodes prolongées et qu’ils ne doivent pas être mis à l'attache ou
entravés en permanence.
Relevons aussi que ces normes viennent préciser l’adéquation de la charge de travail, dont
notamment le fait de ménager les jeunes équidés avant la fin de leur croissance (5 ans) et de
ne pas être mis au travail avant trois ans, voire plus tard, mais jamais avant l'âge de deux ans,
de sorte à ne pas causer de lésions à cause de trop grandes charges de travail dont ils
pourraient souffrir par la suite1246. De plus, les juments ne doivent pas être montées ni
1242 OIE, Code sanitaire pour les animaux terrestres, Chap. 7.12. "Bien-être des équidés de travail". 1243 Id., Art. 7.12.2. "Champ d'application". 1244 Id., Art. 7.12.9. "Pratiques de manipulation et d'entretien". 1245 Id., Art. 7.12.10. "Comportement". 1246 Id., Art. 7.12.12. "Adéquation de la charge de travail".
211
utilisées pendant les trois mois avant et après leur poulinage, et une attention particulière doit
être portée aux animaux âgés.
Notons également de manière importance que les animaux ne doivent pas travailler plus de
six heures par jour et devraient avoir tous les sept jours au moins un jour de repos complet et
de préférence deux jours. La condition physique et l'âge de l'animal doivent être considérés et
la charge de travail doit être adaptée en conséquence1247.
Aussi, les conditions météorologiques doivent être prises en compte (le travail doit être réduit
par temps très chaud), et des pauses doivent être prévues au moins toutes les deux heures et de
l'eau de boisson doit être mise à disposition1248.
Enfin, ces normes ont la spécificité de prévoir que la ferrure doit être contrôlée et adaptée, et
que le harnachement doit être correctement conçu, bien ajusté et confortable permet à l'animal
de tirer le matériel au mieux de sa capacité, efficacement et sans risque de douleur ou de
blessure1249.
En ce sens, l’utilité de ces normes est indiscutable en vue du mieux-être des équidés de travail
qui souffrent, encore trop souvent et partout dans le monde, de maltraitance diverses et de
conditions de travail extrêmes, tant par la surcharge de travail (poids et durée), conditions
climatiques (surtout dans les pays chauds et de manque d’eau et de nourriture est qutidien), et
de blessures répétées, de harnachement inadaptés, de confinement et d’isolement forcés. Ces
derniers points sont aussi valables en ce qui concerne les équidés de sports et de loisirs1250.
Ainsi, ces normes devraient s’étendre à tous les équidés. Plus généralement, tous les animaux
devraient bénéfier de normes de bien-être, même minimales. L’OIE a un rôle à jouer, au
moins pour montrer la voie, en tant que chef de file international pour le bien-être animal.
D- Les futurs développements normatifs prévus par l'OIE sur le bien-être animal
La stratégie dudit "changement incrémentiel" est développée par l'OIE afin que les normes sur
le bien-être animal constituent une "évolution sans révolution"1251. Si les normes de protection
de l'OIE sont de plus en plus nombreuses, l'élaboration de principes directeurs (dans les
1247 Id. 1248 Id. 1249 Id., Art. 7.12.13. "Ferrure et harnachement". 1250 Il s’agit ici d’un témoignage personnel de l’auteure ayant passé une grande partie de sa vie dans ledit "monde du
cheval" et voyagé aux quatre coins du monde où ce constat demeure valable. Citons par exemple le confirnement en
stabulations individuelles et la privation de contacts sociaux très importants pour les équidés, qui leur manque souvent. 1251 BAYVEL, A.C.D., “The use of animals in agriculture and science: historical context, international considerations
and future direction”, dans BAYVEL, A.C.D. (dir.), Animal Welfare, global issues, trends and challenges, Paris,
Office international des épizooties, pp. 791-806, 2005, p.796: "Progress in the area of animal welfare will be a case of
‘evolution not revolution’ based on the principle of incremental change management".
212
différents domaines d'utilisation des animaux), ainsi que le développement des normes
publiques et privées, élaborées sur une base volontaire, sont préférées à une approche
prescriptive axée sur la réglementation1252. Afin d'encourager un plus grand respect du bien-
être des animaux dans le cadre de la commercialisation internationale de leurs produits et
sous-produits1253, ainsi que dans le cadre de la restauration, l'OIE encourage ces initiatives
auxquelles elle apporte son soutien1254.
Si l'OIE préfère éviter le recours à une approche prescriptive afin de laisser suffisamment de
flexibilité aux États et autres acteurs, elle s'assure toutefois de la bonne intégration et de la
mise en œuvre des normes sur le bien-être animal dans le droit interne de ses États-membres.
Elle joue aussi un rôle crucial afin de favoriser le développement de la législation protectrice
du bien-être animal partout dans le monde1255.
À l'avenir, l'OIE devrait renforcer les normes existantes et en adopter de nouvelles, tout en
continuant à les actualiser en vertu des dernières connaissances scientifiques disponibles.
Deux autres problématiques spécifiques sont actuellement en discussion1256. Le premier cas
concerne les conditions de transport et d'abattage dans les pays islamiques. Ces conditions ont
1252 Id., pp. 800-802 : "Parallèlement au débat sur le bienêtre animal et le commerce international, des initiatives
importantes ont été prises par certains producteurs et détaillants [...] Cette démarche, appuyée par des normes
nationales fondées sur des bases scientifiques, offre l’occasion d’établir des repères pour mesurer les résultats en
matière de bien-être animal. On la préfère à l’approche prescriptive axée sur la réglementation. Ces programmes ont
certainement eu un effet positif sur le bien-être animal et ils ont permis de répondre directement aux préoccupations
des consommateurs. [...]Si l’Europe dans son ensemble doit respecter les accords de l’OMC et ne peut donc pas
interdire les importations pour des raisons de bien-être animal, les détaillants sont libres de le faire". Voir aussi :
Rapport de la réunion du groupe de travail de l'OIE sur le bien-être animal, Paris, 16-18 octobre 2002 : "Première
contribution -projet de principes directeurs (de préférence à une approche prescriptive des limites)". 1253 Selon l'OIE, les produits animaux sont : les poissons et les fruits de mer, la viande et les produits carnés, les œufs,
le miel, le lait et autres produits laitiers" (y compris "la semence, les embryons et les ovules à des fins de reproduction
animale"). Les sous-produits d’origine animale sont par exemple: "les cuirs, les plumes ou les farines animales, ainsi
que les aliments du bétail". Voir OIE, Comprendre les activités normatives de l’OIE, p.3. 1254 Voir OIE, Rôles des normes publiques et privées en santé animale et en bien-être animal, Résolution n° 26 adoptée
par l’Assemblée mondiale des Délégués de l’OIE à Paris, le 27 mai 2010, ainsi que: C. WOLFF et M. SCANNELL,
Conséquences de la mise en œuvre des normes privées dans le commerce international des animaux et produits
d’origine animale, OIE, 2008, en ligne :
http://www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Internationa_Standard_Setting/docs/pdf/normes_20priv_C3_A9es_fr.pdf (date
d'accès: 18.01.13). 1255 En parlant des normes de l'OIE sur le bien-être animal, le directeur Bernard Vallat annonçait en 2005 que "ces
lignes directrices déboucheront sur une harmonisation progressive des législations nationales et régionales existantes;
en particulier, elles apporteront un soutien aux nombreux pays dont la législation ne couvre pas encore ce domaine, de
manière à ce qu’ils puissent préparer leurs textes législatifs en se fondant sur les recommandations de l’OIE".
Voir BAYVEL, A.C.D. (dir.), Bien-être animal, enjeux mondiaux, tendances et défis, Revue scientifique et technique,
vol. 24 (2), Paris, Office international des épizooties, 2005, p.470. Ces propos ont également été avancés par le
directeur de l'OIE Bernard Vallat lors de sa présentation sur "L’amélioration du bien-être animal dans le monde - la
contribution de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE)" dans le cadre du Colloque international intitulé "La
souffrance animale: de la science au droit" à Paris le 19 octobre 2012. 1256 Voir "Développement" futur en matière de "Bien-être animal" sur le site de l'OIE, en ligne:
http://www.oie.int/fr/bien-etre-animal/developpement-futur/ (date d'accès: 18.01.2013).
213
notamment justifié des interdictions d'exportation du bétail en provenance d'Australie vers
certains pays islamiques 1257. L'OIE déplore ce qui peut se passer dans ces pays, sachant que :
« Bon nombre de pratiques actuelles [...] peuvent se traduire par un traitement très
cruel des animaux »1258.
Afin de résoudre ce problème, l'OIE a émis un document sur la compatibilité entre ses normes
et les exigences du droit islamique, avec une emphase particulière sur la prévention des
mauvais traitements aux animaux lors du transport et de l'abattage, duquel il ressort que :
« les normes de l’OIE sont compatibles avec le droit islamique qui en appelle à la
protection des animaux contre les mauvais traitements et prévoient des
dispositions particulières à l’abattage des animaux »1259.
Toutefois, l'affirmation de cette compatibilité théorique ne permet pas de remédier au constat
des mauvais traitements des animaux en pratique. Notons qu'à l'image de la problématique sur
l'abattage rituel, la liberté religieuse passe avant le bien-être animal dans les instances
supranationales (européennes et mondiale dans le cas de l'OIE), contrairement à l'échelle
nationale plus réduite, puisque certains pays, notamment européens comme nous l'avons vu
précédemment, se sont opposés à l'abattage rituel pratiqué sans étourdissement préalable.
Le second cas en discussion à l'OIE sur le bien-être animal concerne le transport aérien des
animaux de laboratoire1260. En collaboration avec l'Association internationale du transport
aérien (IATA), l'OIE souligne le déclin de la disponibilité d'animaux de recherche. En effet,
les compagnies aériennes refusent de plus en plus d'effectuer de transporter ces animaux pour
plusieurs raisons. Tout d'abord, elles n'y sont pas obligées. Ensuite, ce transport nécessite des
contraintes supplémentaires en termes d'équipements, ainsi que de contrôles vétérinaires et
administratifs. Enfin, les demandes des associations de protection ont amené certaines
compagnies aériennes à exclure cette activité1261. Insistant sur le "rôle vital des animaux de
1257 Voir MORFUNI, L., "Pain for Profit: An Analysis of the Live Export Trade", Deakin Law Review, Vol.16, n°2,
pp.497-538. 1258 OIE, Compatibilité entre les normes de l'OIE et les exigences du droit islamique, avec une emphase particulière
sur la prévention des mauvais traitements aux animaux lors des opérations de transport et d'abattage , p.5. En ligne:
www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Animal_Welfare/docs/pdf/Autres/Religious_Slaughter/F_Religious_slaughter.pdf
(date d'accès: 18.01.2013). 1259 Id., p.1. 1260 Voir le document de l'OIE, "Document de réflexion de l’Organisation mondiale de la santé animale destiné à la
Commission sur les animaux vivants et les denrées périssables de l'Association internationale du transport aérien",
Montréal, 20-22 octobre 2009, en ligne:
http://www.oie.int/fileadmin/Home/fr/Animal_Welfare/docs/pdf/Autres/IATA/FR__IATA_paper_2009.pdf 1261 Id., p.2: "Certaines compagnies aériennes ont, sous la pression d’organisations de défense des droits des animaux,
adopté une politique excluant le transport de certaines espèces d’animaux de laboratoire (par exemple, le cas des
214
laboratoire dans la préservation de la santé humaine et animale" et précisant que les animaux
ne peuvent pas être systématiquement remplacés pour l'expérimentation, l'OIE encourage les
compagnies aériennes à poursuivre le transport des animaux vivants pour la recherche et en
particulier celui des chats, chiens et primates non-humains1262.
Ainsi, ces deux derniers développements montrent que l'approche de l'OIE s'inscrit dans une
conception plus utilitaire que protectrice, privilégiant les intérêts humains à consommer et
expérimenter les animaux), plutôt que leurs intérêts à ne pas être instrumentalisés ni souffrir.
primates non humains, des chats et des chiens). Il s’agit souvent des compagnies les plus importantes, disposant des
réseaux aériens les plus étendus, ce qui exacerbe encore le problème". 1262 Id.
215
- Conclusion du Chapitre 1
Depuis le début des années 2000, l'OIE a permis de reconnaître la nécessité de protéger le
bien-être animal à l'échelle mondiale, notamment à travers l'adoption de normes spécifiques.
Celles-ci s'appliquent à la quasi-totalité des pays du monde puisque seuls quelques petits états
insulaires ne sont pas membres de cette organisation. À ce jour, ces normes sont les seules
permettant d'établir une protection du bien-être des animaux à l'échelle mondiale, même si
celle-ci est minimale. Malgré les importantes disparités entre les différents pays du monde à
ce sujet1263, un consensus a malgré tout été trouvé dans les secteurs d'activité évoqués, ainsi
que sur la définition-même du bien-être animal et de ses principes directeurs fondamentaux.
Il est également possible de relever certaines similarités entre les normes internationales de
l'OIE et celles adoptées par les instances européennes. Tout d'abord, ces normes
intergouvernementales concernent les animaux de production et de laboratoire. Les principes
communs concernent les 5 libertés en matière d'élevage et les 3R en matière
d'expérimentation. Il existe également des règlementations communes sur le transport des
animaux et les méthodes d'abattages. Par exemple concernant le transport, la durée doit être
réduite au minimum et les animaux doivent être traités avec ménagement. Concernant les
méthodes d'abattage, l'abattage sans étourdissement est autorisé pour les abattages rituels et la
mise à mort doit être "décente" (selon les termes de l'OIE), soit la plus instantanée et indolore
possible (selon les orientations fournies par les instruments européens et communautaires).
De plus, les preuves scientifiques constituent un fondement commun. L'UE et l'OIE font
également référence à la prise en compte des "exigences" minimales en matière de bien-être
animal. Mais contrairement aux instruments de l'UE, les normes de l'OIE ne font pas
référence aux animaux en tant qu' "êtres sensibles". Enfin, ces dernières sont de simples
recommandations, contrairement aux instruments européens. La formulation des normes de
l'OIE est aussi beaucoup plus technique. En plus d'être désormais abordée de manière
prioritaire au sein des normes de l'OIE, la protection du bien-être animal est également
présente, de manière plus incidente, dans les accords du droit international de
l'environnement, et depuis récemment dans le droit de l'Organisation mondiale du commerce
(OMC). Le chapitre suivant permettra de voir de quelle manière cette protection transparaît et
tend à évoluer dans ces domaines du droit international.
1263 En effet, avant 2000, les pays membres de l'OIE étaient réticents à couvrir la protection du bien-être animal.
Néanmoins, comme le mandat de l'OIE est de protéger la santé animale et que les représentants des pays membres sont
surtout des vétérinaires, ceux-ci ont avancé la nécessité de se préoccuper du bien-être des animaux afin d'assurer leur
bon état de santé. Cette précision est fournie sur la base des propos recueillis lors de la présentation de Bernard Vallat,
"L’amélioration du bien-être animal dans le monde - la contribution de l’Organisation mondiale de la santé animale
(OIE)", La souffrance animale: de la science au droit, Colloque international LFDA-GRIDA, OIE, Paris, 19.10. 2012.
216
CHAP. 2- LES MANIFESTATIONS ÉLARGIES DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT ET DE L'OMC
Alors que la protection du bien-être animal est seulement incidente dans les instruments du
droit international de l'environnement (S.1), elle est également prise en compte depuis peu
dans le droit de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (S.2).
S.1- Une protection incidente en droit international de l'environnement1264
En droit international de l'environnement, la protection du bien-être animal n'est qu'incidente.
En ce sens, les instruments environnementaux relatifs aux animaux portent principalement sur
la conservation des espèces animales afin d'éviter leur disparition et non sur la protection des
individus afin d'éviter leurs souffrances. Néanmoins, il est possible de repérer certaines
allusions à la protection bien-être animal. Sans consacrer explicitement cette notion, certaines
dispositions se rapprochent de la protection individuelle des animaux, tant dans certains
accords généraux de protection de la nature et de la biodiversité (§1), que dans des accords
spécifiques sur la conservation des espèces animales sauvages menacées d'extinction (§2).
§1- Les allusions au sein des accords généraux sur l'environnement et la biodiversité
Certains principes qui se rapprochent de la protection du bien-être animal sont consacrés dans
la Charte mondiale de la nature et la Charte de la terre (A), ainsi qu'au sein de la Convention
sur la diversité biologique (B).
A- Les principes consacrés dans la Charte mondiale de la nature et de la Charte de la terre
Deux grands instruments environnementaux consacrent le principe de valeur intrinsèque des
êtres vivants. Ces derniers termes reflètent le courant philosophique de l'écologie
profonde1265.
La Charte mondiale de la nature, adoptée en 1982 par l'Assemblée générale des Nations Unis,
énonce que :
1264 Les ouvrages de référence pour cette section se trouvent dans la bibliographie annexée sous le titre: "Le droit
international de l’environnement et le bien-être animal". 1265 Théorisée par Arne Naess en 1973, l'écologie profonde (de l'anglais "deep ecology") considère que "toute forme de
vie est placée sur un pied d’égalité, parce que toute forme de vie a une valeur intrinsèque, est unique et mérite d’être
respectée, qu’elle que soit son utilité pour l’homme". Voir LARRERE, C., Les philosophies de l’environnement, PUF,
1997, p.11.
217
« Toute forme de vie est unique et mérite d'être respectée, quelque soit son utilité
pour l'homme, et, afin de reconnaître aux autres organismes vivants cette valeur
intrinsèque, l'homme doit se guider sur un code moral d'action. »1266.
La Charte de la terre dispose d'une formulation similaire en prévoyant comme 1er principe de:
« Reconnaître le lien d’interdépendance entre tous les êtres vivants ainsi que la
valeur de toute forme de vie, quelle qu’en soit son utilité pour l’être humain. »1267.
Ce principe vise également à respecter la Terre et toute forme de vie. Son principe 15 prévoit
de traiter tous les êtres vivants avec respect et considération. Il se décline en trois impératifs :
- « Empêcher la cruauté envers les animaux domestiques et d’élevage, et atténuer
leurs souffrances ;
- Protéger les animaux sauvages des techniques de chasse, de trappe et de pêche
qui causent des souffrances extrêmes, prolongées ou inutiles ;
- Éviter ou éliminer dans la mesure du possible la capture ou la destruction
d’espèces non ciblées »1268.
Le texte de cette déclaration n'a pas encore été adopté par l'ONU à ce jour, mais il a fait l'objet
d'une résolution de l'UNESCO en 20031269. Selon cette résolution, les principes fondamentaux
de la Charte de la terre énoncent des valeurs communes devant servir de cadre éthique à
l'échelle mondiale. Elle précise aussi l'importance des principes de la Charte de la terre dans
la poursuite de l'objectif de développement durable, ainsi que la vocation éducative de cette
déclaration vers un plus grand respect et une plus grande responsabilité envers la communauté
du vivant.
Ces deux déclarations ont donc pour vocation de promouvoir la valeur et le respect de toute
forme de vie, quelle que soit son utilité pour l'homme, et ce dans le cadre plus large de la
protection de la nature. Cette idée ressort également de la Convention sur la diversité
biologique dans le cadre de la préservation de la richesse et la variété des espèces vivantes.
1266 Charte mondiale de la nature, Annexe, Préamb. § 3, a) (souligné par nous). Voir la version française du texte en
ligne: http://droitnature.free.fr/pdf/Chartes%20et%20Declarations/1982_Charte%20Mondiale%20Nature_JO.pdf (date
d'accès: 26.01.13). 1267 Charte de la terre, Principe 1 (souligné par nous). Voir la version française du texte officiel en ligne:
http://www.earthcharterinaction.org/contenu/pages/La-Charte-de-la-Terre.html (date d'accès: 26.01.13). 1268 Id., Principe 15, a), b) et c) 1269 UNESCO Resolution adopted at General Conference Plenary Session, 16 October 2003, Item 5.23-UNESCO’s
support for the Earth Charter, en ligne:
http://www.earthcharterinaction.org/invent/images/uploads/UNESCO%20Resolution%20Adopted%20at%20Plenary%
20Session.pdf (date d'accès: 26.01.13).
218
B- Les principes consacrés au sein de la Convention sur la diversité biologique1270
En tant que convention-cadre sur la conservation de la biodiversité mondiale, la Convention
sur la diversité biologique (CBD) reconnaît la valeur intrinsèque de ses éléments constitutifs,
lesquels incluent les espèces animales, en posant comme premier principe celui de leur
utilisation durable1271. Notons que l'approche sous-tendue par la CBD apparaît comme
nettement anthropocentrique en regard de la signification donnée à ces expressions. En effet,
la valeur intrinsèque des éléments de la biodiversité n'est reconnue qu'à travers les intérêts
qu'ils offrent à l'être humain, qu'ils soient d’ordre environnemental, génétique, social,
économique, scientifique, éducatif, culturel, récréatif et esthétique1272. Au contraire, la notion
de valeur intrinsèque ne peut être reconnue aux animaux qu'indépendamment de leur utilité
pour l'homme, conformément à l'adjectif "intrinsèque", telle que cette acception est reflétée
dans la Charte mondiale de la nature précitée et définie dans la législation des Pays-Bas1273.
Quant à la notion d'utilisation durable, précisons que celle-ci est définie par la CBD comme :
« l'utilisation des éléments constitutifs de la diversité biologique d'une manière et
à un rythme qui n'entraînent pas leur appauvrissement à long terme »1274.
Appliquée aux animaux, la notion d'utilisation durable ne revêt donc aucune dimension
morale visant à protéger le bien-être des individus dans le cadre de leur utilisation, mais
seulement une dimension environnementale afin d'éviter l'extinction massive des espèces.
En conclusion, il est possible de retrouver dans chacun de ces trois instruments généraux du
droit international de l'environnement la notion de valeur intrinsèque, consacrée comme
fondement du respect et de la protection de toute forme de vie. Bien que cette protection se
situe sur un plan environnemental, les deux premières déclarations visent explicitement les
utilisations des animaux. La Charte mondiale de la Nature réfère même à la moralité des
actions humaines. La Charte de la terre a également le mérite de décliner le principe de
respect du vivant en faisant référence aux pratiques cruelles et aux souffrances des animaux
domestiques et sauvages. En dehors de ces dispositions, les animaux ne sont généralement pas
appréhendés comme des individus sensibles à part entière, mais comme appartenant à un tout
1270 Convention sur la diversité biologique, 5 juin 1992, Rio de Janeiro, BC 230, EmuT, 992 :35. 1271 Convention sur la diversité biologique (CBD), 1992, Préamb. al. 1 et Art.1. 1272 Id., Préamb. al. 1. 1273 Aux Pays Bas, la nouvelle loi de protection des animaux consacre la notion de valeur intrinsèque déjà présente
dans l'ancienne loi de 1981 (Dutch Animal Health and Welfare Act) où elle y est définit comme la valeur que les
animaux possèdent pour eux-mêmes, emportant pour conséquence que leurs intérêts ne sont plus automatiquement
subordonnés aux intérêts humains. 1274 Id., Art.2.
219
plus large puisqu'ils sont qualifiés d'"organismes vivants" ou d'"éléments constitutifs de la
diversité biologique" dans la CBD.
Bien que la Charte de la terre n'ait pas été formellement adoptée, relevons que celle-ci semble
s'inscrire dans l'évolution du droit général - et du droit international en particulier depuis ces
dernières années -, vers une plus grande prise en compte du bien-être des animaux face aux
actes de cruauté. En effet, l'une de ses innovations consiste à aborder le cas des animaux
d'élevage, au-delà des seules espèces sauvages habituellement concernées par les instruments
environnementaux. De plus, la Charte de la terre a l'originalité de se démarquer de l'approche
environnementale -qui concerne la conservation des animaux en tant qu'espèces-, en abordant
aussi les souffrances des animaux domestiques et sauvages en tant qu'individus sensibles.
Dévoilé en 2003, ce texte s'inscrit dans la continuité de l'importance de protéger le bien-être
animal reconnue par l'OIE depuis 2001. Les instruments du droit international pourraient en
venir à jouer un rôle croissant afin de décourager les souffrances infligées aux animaux de
toutes catégories. Grâce à cette évolution, la nécessité de lutter contre la cruauté et de protéger
le bien-être des animaux pourrait aussi devenir un nouvel objectif du droit international1275.
Certaines références à la protection du bien-être animal sont également présentes dans les
accords du droit international de la vie sauvage, visant la conservation des espèces animales.
§2- Les références au sein des accords de conservation des espèces menacées d'extinction
Les accords du droit international de la vie sauvage qui font référence à la protection du bien-
être animal seront présentés successivement. Il s'agit d'une part de la convention sur la
conservation des espèces dans le cadre du commercial et de celle sur les espèces migratrices
(A), et d'autre part de celle relative à la chasse à la baleine (B).
A- La protection du bien-être animal au sein des conventions de conservation des espèces
dans le cadre du commerce international (CITES)1276 et des espèces migratrices (CMS)1277
La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages
menacées d’extinction (CITES) a été signée le 3 mars 1973 à Washington afin de lutter contre
la surexploitation des espèces sauvages dans le cadre de leur commercialisation
internationale1278. L'objectif visé consiste à utiliser plus durablement les espèces menacées
1275 Ce point sera développé dans le dernier titre de cette étude. 1276 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction,
Washington, 3 mars 1973, BC, 170, EmuT, 973:18 [ci-après : "CITES"]. 1277 Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, Bonn, 23 juin 1979, BC,
206 [ci-après : "CMS"]. 1278 CITES, Préamb., al.4.
220
afin d'éviter leur disparition, principe qui se retrouve généralement dans les instruments du
droit international de l'environnement et plus particulièrement au sein des instruments du droit
de la vie sauvage traités dans cette section. Notons que, à l'image de la CBD précitée et de la
CITES, la Convention relative aux zones humides d’importance internationale (dite
Convention Ramsar) prône également la notion d’utilisation durable à travers celle
d’utilisation rationnelle1279. La Convention sur la conservation des espèces migratrices
appartenant à la faune sauvage (CMS) reprend cette notion, en préconisant l’utilisation
prudente des animaux migrateurs1280. Sans être remise en cause, l'utilisation actuelle des
animaux sauvages est ainsi amenée à être reconsidérée, vers une utilisation plus durable, afin
de lutter contre l'extinction massive des espèces animales sauvages à travers le monde.
À l'image de la CBD précitée, la CITES fait référence à la valeur de la faune sauvage d'un
point de vue anthropocentrique, c'est-à-dire du point de vue des différents intérêts qu'elle
présente pour les humains1281, contrairement à la nécessité de la protéger pour elle-même.
Tout au long du texte de la CITES, certaines dispositions prévoient de traiter les animaux
avec soin et de leur éviter des traitements rigoureux1282, qualifiés de traitements cruels ("cruel
treatment") dans leur version originale en anglais. Il est ainsi précisé que tout animal vivant
doit être "transporté et traité de façon à éviter les risques de blessures, de maladie ou de
traitement rigoureux" et que "le destinataire a les installations adéquates pour le conserver et
le traiter avec soin"1283. Ces dispositions renvoient à l'obligation de soin et à l'interdiction de
cruauté, qui sont des prescriptions présentes dans les lois nationales de protection du bien-être
animal. La CITES présente ainsi l'intérêt de ne pas se cantonner à la dimension conservatrice
des espèces animales, en abordant aussi la dimension protectrice des individus, tant à travers
l'interdiction de les maltraiter ou de les négliger, qu'à travers l'obligation de les bien-traiter.
De plus, précisons que la CITES a adopté des résolutions permettant d’aborder les problèmes
de protection du bien-être de certains animaux appartenant à des espèces animales menacées
1279 Convention relative aux zones humides d’importance internationale (Ramsar) 1971, art. 3.1. 1280 Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS), 1979, Préamb.,
al.2: "chaque génération humaine détient les ressources de la terre pour les générations futures et a la mission de faire
en sorte que ce legs soit préservé et que, lorsqu’il en est fait usage, cet usage soit fait avec prudence". 1281 CITES, Préamb., al.2: Les États contractants reconnaissent "la valeur toujours croissante, du point de vue
esthétique, scientifique, culturel, récréatif et économique, de la faune et de la flore sauvages". 1282 Sur l'obligation de soin, voir les articles III.3(b); III.5(b) et VIII.5. Sur l'interdiction de cruauté, voir les articles
III.2(c), III.4(b); IV.2(c), IV.5(b), IV.6(b); V.2(b), VII.7(c) et VIII.3. 1283 Id.
221
d'extinction, comme les cétacés en relation avec la Commission baleinière internationale1284,
ou les espèces utilisées par la médecine traditionnelle asiatique (comme le tigre, les
rhinocéros et certaines espèces d'ours et le cerf porte-musc)1285. La Résolution 14.19 de la
CITES se prononce en faveur de l'utilisation d'autres ingrédients et contre l'élevage en
captivité de ces espèces1286. Dans sa Résolution 10.8, elle se prononçait directement contre les
fermes d’ours à collier pour la production de bile à des fins médicinales, ainsi que pour son
remplacement par des produits de substitution1287. Notons qu'il existe désormais de nombreux
produits de substitution de nature végétale et synthétique pour remplacer la bile d’ours1288.
Bien qu’adoptées par l’ensemble des membres de la CITES1289, ces résolutions sont des
recommandations non-contraignantes. Il en va de même de certaines mesures adoptées par la
Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage
(CMS). Parmi celles-ci, citons le Mémorandum d’entente sur la conservation des requins
migrateurs1290, laquelle aborde directement le problème relatif à l'ablation des ailerons de
requins vivants1291.
Interdite dans de nombreux pays y compris pour l'ensemble de l'Union européenne1292, celle-
ci est définie par la CMS comme :
« la pratique consistant à prendre les ailerons de requins et à les embarquer,
uniquement dans le but de prélever ces ailerons tandis que la carcasse du requin
est rejetée à la mer »1293.
1284 Résolution 11.4 sur la "Conservation des cétacés, commerce des spécimens de cétacés et relations avec la
Commission baleinière internationale", Onzième session de la Conférence des Parties, Gigiri (Kenya), 10-20 avril
2000. 1285 Résolution 14.19 sur le "Commerce de remèdes traditionnels", Quatorzième session de la Conférence des Parties,
La Haye (Pays-Bas), 3 -15 juin 2007. 1286 Id. 1287 Résolution 10.8 "Conservation et commerce des ours", Dixième session de la Conférence des Parties, Harare
(Zimbabwe), 9 - 20 juin 1997. 1288 Voir FRANCOEUR, L.-G.,"Vendre ou ne pas vendre les vésicules d'ours noir?", Le Devoir, 27 janvier 2006.
Précisons que plus d’une cinquantaine d’herbes médicinales ont les mêmes vertus thérapeutiques que la bile d'ours et
que la version synthétique de la molécule d’UDCA qu’elle contient peut être utilisée à sa place. 1289 Actuellement, la CITES comprend 175 États-membres. Voir en ligne
http://www.cites.org/fra/disc/parties/index.shtml (date d’accès : 28 novembre 2010). 1290 L’Article 1 précise que le "Mémorandum d’Entente n’est pas juridiquement contraignant pour les Signataires".
Voir le Mémorandum d'Entente sur la conservation des requins migrateurs, CMS/Sharks/MOS1/Inf.1. 1291 Cf. BROUS, R., “Shark fin cruelty”, New scientist, 23 Feb. 2002, et WITCHALLS, C., “Bloody scenes from the
shark fin trade”, New scientist, 08 Sept. 2010. 1292 Il s'agit notamment de plusieurs territoires australiens, du Shark Conservation Act adopté en 2011 aux États-Unis,
de l'île de Palau qui constitue désormais un sanctuaire protégé pour les requins dans le pacifique et pour l'Union
européenne, voir le Règlement (UE) n° 605/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 modifiant le
règlement (CE) n° 1185/2003 du Conseil relatif à l’enlèvement des nageoires de requin à bord des navires , J.O. L.
181/1 du 29.06.2013. 1293 Mémorandum requin, Art. 3 u).
222
Ainsi, la CITES et la CMS ont adopté des mesures visant à décourager certaines pratiques
cruelles envers les animaux sauvages, mais leur mandat reste limité à la conservation des
espèces sauvages concernées par leur champ de compétence. Il s'agit des espèces migratrices
pour la CMS et de celles menacées par le commerce international pour la CITES.
En l'occurrence, ces instruments n'auraient pas pu aborder la réglementation de ces méthodes
cruelles s'il s'agissait d'espèces non menacées. En tout état de cause, les considérations liées
au bien-être des individus restent accessoires par rapport à l'objectif principal de conservation.
Cette limite est également valable pour la Convention internationale pour la réglementation
de la chasse à la baleine, sachant que seules les espèces de baleines menacées d’extinction
sont protégées face à certains types de chasse, contrairement aux cétacés non menacés1294.
B- La protection du bien-être animal au sein de la Convention internationale pour la
réglementation de la chasse à la baleine1295
Bien avant la consécration du concept de développement durable dans la Déclaration de Rio
en 19921296, la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine est
le premier instrument international à avoir fait référence à l'importance de préserver les
ressources naturelles pour les générations futures, ce dès 19461297.
Au départ, cette convention avait pour objectif la gestion durable desdites "ressources
baleinières"1298, avant d'interdire la chasse à la baleine (sauf à des fins scientifiques), à travers
le moratoire adopté en 19821299.
Elle prévoit la réglementation des méthodes de chasse à son article V 1300. Sur la base de cet
article, l’usage des harpons non-explosifs a été interdit en 19801301. L’utilisation de la lance
électrique fait aussi l’objet d’une proposition d’interdiction non adoptée à ce jour1302.
1294 Voir HARROP, S.R, “From cartel to conservation and on to compassion: animal welfare and the International
Whaling Commission”, Journal of International Wildlife Law & Policy, vol. 6, chap.1, pp. 79-104, 2003. Précisions
que l’on parle bien de méthodes de "chasse" et non de "pêche" pour les cétacés puisque, même si ceux-ci vivent dans
l’eau, ce sont des mammifères et non des poissons. 1295 Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine [ci-après: "Convention sur la chasse à
la baleine"], Washington, 2 décembre 1946, EMuT 946 : 89. 1296 Voir notamment ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd., Yvon Blais, 2012, p.832. 1297 La Convention sur la chasse à la baleine a été signée en 1946 afin de "sauvegarder, au profit des générations
futures, les grandes ressources naturelles représentées par l’espèce baleinière". Id., Préamb. al.1. 1298 Id., Préamb., al.1. L'objectif initial de la convention est de garantir l’exploitation rationnelle et productive des
ressources baleinières afin de "sauvegarder, au profit des générations futures, les grandes ressources naturelles
représentées par l’espèce baleinière". 1299 Id., Art. VIII (1). 1300 Id., Art. V (1). 1301 Secrétariat de la Commission baleinière internationale, Questions liées au bien-être des baleines, Informations et
recherches relatives aux méthodes d’abattage des baleines et aux questions liées à leur bien-être, CBI, 2008, p.1. 1302 Id., pp.1-2. En effet, cette proposition n'a pas obtenu la majorité nécessaire lors des discussions de 1996.
223
En plus des travaux menés par la Commission baleinière internationale (CBI) afin d’améliorer
les méthodes de chasse utilisées, les dispositions de la convention permettent de protéger le
bien-être des baleines, mais seulement dans une mesure limitée. En effet, malgré le moratoire
de 1986 sur la chasse à la baleine, la chasse scientifique demeure autorisée en vertu de l'article
VIII (1) de la convention. Largement utilisée par le Japon entre 1987 et 2014, cette exception
ne permet pas pour autant de pratiquer une chasse commerciale en prétendant qu'il s'agit d'une
chasse scientifique1303. Tout en confirmant ce point, l'arrêt rendu par la Cour internationale de
Justice (CIJ) le 31 mars 2014 a permis de révoquer l'ensemble des autorisations délivrées au
Japon pour sa "pseudo-chasse scientifique" dans l'océan austral1304.
Notons par ailleurs que les petits cétacés ne bénéficient d’aucune protection sous cette
convention1305. Or, la majorité des trois-quarts des membres est requise pour tout changement
concernant les méthodes de chasse autorisées ou les espèces à protéger1306. Il serait ainsi
théoriquement possible d'élargir la protection octroyée par la convention aux petits cétacés,
notamment pour les marsouins et les dauphins, puisqu'ils sont aussi victimes de méthodes
cruelles dans certains pays comme en Norvège (dans les îles Féroé) et au Japon (en particulier
dans la baie de Taiji1307), où ils sont traditionnellement tués à coup de lances. Mais cette
proposition n'a pas abouti à ce jour étant donné le nombre important de votes requis pour faire
cette modification1308, en plus de l'opposition tenace des pays qui pratiquent cette chasse1309.
Que conclure de la protection du bien-être animal en droit international de l'environnement ?
S'il n'est pas fait explicitement référence au concept de bien-être animal dans le cadre des
instruments du droit international de l'environnement précités, certaines dispositions
1303 Voir HIRATA, K., “Why Japan Supports Whaling”, Journal of International Wildlife Law & Policy, Vol.8, Chap.
2, pp. 129-149, 2005 et PAPASTAVROU, V. et P., RAMAGE, “Commercial Whaling by Another Name. The
Illegality of Japan's Scientific Whaling: Response to Dan Goodman”, Journal of International Wildlife Law & Policy,
vol. 13, chap. 2, pp. 183-187, 2010. 1304 Cour internationale de Justice, Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon; Nouvelle-Zélande
(intervenant)), Arrêt du 31 mars 2014. 1305La chasse aux petits cétacés est pratiquée au Groenland, dans les iles Féroé, au Japon, en Russie, dans les iles
Salomon et au Pérou et les controverses soulevées quant aux méthodes utilisées a conduit la CBI a établir un Comité
sur les petits cétacés afin d'aborder ces problèmes. Voir BRAKES, P. et S. FISHER, Hunted Dead or Still Alive - A
report on the cruelty of whaling, WDCS-HSUS, 2003; et Action Plan 34 on Whale Killing Methods, Point 9, Appendix
8, Report of the Workshop on Whale Killing Methods, IWC/51/12, 1999. 1306 Convention baleine, Art. III-2. 1307 Voir à ce sujet le film documentaire "The cove" (version originale en anglais) traduit par "La baie de la honte"
dans la version française, réalisé par Louis Psihoyos en 2010. 1308 Id., Art. V: "1. La Commission pourra, de temps à autre, modifier les dispositions du règlement en adoptant des
clauses relatives à la conservation et à l’utilisation des ressources représentées par les baleines, qui désigneront : (a) les
espèces protégées et les espèces non protégées; (e) les époques, les méthodes et l’amplitude de la chasse à la baleine (y
compris le nombre maximum de baleines pouvant être capturées au cours d’une saison donnée) ; (f) les types d’attirail,
d’engins et de dispositifs pouvant être employés, ainsi que leurs caractéristiques". 1309 Notamment la Norvège et le Japon précités. Voir HARROP, S.R, “From cartel to conservation and on to
compassion: animal welfare and the International Whaling Commission”, vol. 6, chap.1, pp. 79-104, 2003, p.102.
224
témoignent néanmoins d'un intérêt pour la protection des animaux en tant qu'individus
sensibles. Au-delà de leur vocation à préserver les espèces animales en tant qu'éléments de
l'environnement, ces instruments abordent les problèmes de cruauté de manière ponctuelle.
Ces deux aspects du droit animal que sont la conservation des espèces menacées d'une part, et
la protection du bien-être animal d'autre part, sont désormais pris en compte par l'OMC,
notamment à travers ses récentes décisions inédites.
S. 2- Une protection inédite dans le droit de l'OMC1310
À ce jour, les accords de l'OMC ne font aucune référence explicite à la protection du bien-être
animal. Néanmoins, de nombreux auteurs se sont prononcés en faveur de sa prise en compte
par cette organisation, chargée d'établir et de faire respecter les règles du commerce
international1311. Une intégration de cette considération dans les accords de l'OMC est non-
seulement souhaitable du point de vue moral, mais aussi juridiquement possible.
En effet, les rédacteurs de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce
(GATT)1312 ont prévu, dès 1947, que certaines considérations, comme celles d'ordre moral,
puissent prévaloir sur la règle du libre-échange international des produits commerciaux1313.
L’objectif de l’OMC est de favoriser les échanges commerciaux à l'échelle mondiale entre ses
pays membres, au nombre de 160 à ce jour1314. La règle générale prévoit ainsi d'interdire toute
restriction au commerce international1315. En particulier, trois grands principes du GATT
viennent s'opposer à ces restrictions. Présentons ces derniers en précisant dans quelle mesure
leur application s'avère particulièrement pertinente dans le contexte qui nous intéresse, c'est-à-
dire dans le cadre de restrictions commerciales adoptées pour protéger le bien-être animal.
1310 Les ouvrages de référence pour cette section se trouvent dans la bibliographie annexée sous le titre: "L'OMC et le
bien-être animal". 1311 Voir notamment : ARCHIBALD, C.J., “Forbidden by the WTO? : discrimination against a product when its
creation causes harm to the environment or animal welfare”, Natural Resources Journal, vol. 48, chap. 1, pp. 15-51,
2008, p.50 ; CHARNOVITZ, S., “The moral exception in trade policy”, Virginia Journal of
International Law, vol. 38, pp.689-716, 1998, p.20; DUFOUR, G., “Les phoques, la science et l’OMC-La preuve
scientifique doit-elle vraiment être à la base de toute décision commerciale?”, Le devoir, 31 Juillet 2009 ;
FITZGERALD, P. L., International Issues in Animal Law: The Impact of International Environmental and Economic
Law, Carolina Academic Press, 2012; NIELSEN, L., The WTO, animals and PPMs, Martinus Nijhoff, 2007, p. 256 ; et
VEDDER, A. (dir.), The WTO and concerns regarding animals and nature, Wolf Legal, 2003, p.34. 1312 Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, 30 octobre 1947, 55 R.T.N.U. 187. 1313 Sur ce point, voir en particulier, CHARNOVITZ, S., “The moral exception in trade policy”, Virginia Journal of
International Law, vol. 38, pp.689-716, 1998, p.20. 1314 L’OMC réunit 160 membres au 26 juin 2014. Voir en ligne :
http://www.wto.org/french/thewto_f/whatis_f/tif_f/org6_f.htm (date d’accès: 11 février 2014). 1315 Le Préambule, alinéa 3 du GATT vise notamment à "la réduction substantielle des tarifs douaniers et des autres
obstacles au commerce et à l'élimination des discriminations en matière de commerce international".
225
- Tout d'abord, le principe de la nation la plus favorisée (Article I du GATT), s’oppose aux
interdictions d’importation envers des pays ayant des standards différents, comme envers les
pays qui auraient des standards de bien-être animal moins élevés.
Citons par exemple l'interdiction d'importation adoptée par l'UE en 1991, envers les fourrures
et autres produits issus des pièges à mâchoires1316.
- Ensuite, le principe de traitement national (Article III du GATT), interdit de privilégier les
produits domestiques ou issus de la production interne, comme ceux qui seraient plus
respectueux du bien-être des animaux.
Citons le cas de l'UE ayant interdit de commercialiser les produits cosmétiques testés sur les
animaux. Ainsi, seuls les produits non testés sont commercialisés dans l'UE depuis 20131317.
- Enfin, le principe d’interdiction des restrictions quantitatives (Article XI du GATT), vient
s'opposer à la limitation des importations de produits qui ne répondraient pas à certaines
exigences, comme certaines exigences minimales en matière de bien-être animal1318.
Citons le cas des interdictions adoptées par l'Australie contre l'exportation du bétail dans les
pays du Moyen-Orient, afin d'inciter ces pays à se mettre en conformité avec les exigences
minimales requises par les normes de l'OIE pour le transport et l'abattage des animaux1319.
Précisons que les cas cités pour illustrer ces principes n'ont fait l'objet d'aucune procédure de
règlement des différends à l'OMC, contrairement à d'autres dont nous traiterons par la suite.
Mais ces principes, et plus généralement la règle du libre-échange, contiennent des
exceptions. En vertu des exceptions générales prévues à l’article XX du GATT, certaines
circonstances permettent ainsi de justifier l'adoption de restrictions commerciales. Trois de
ces exceptions sont particulièrement pertinentes en matière de protection animale. Elles
permettent de justifier les restrictions nécessaires à la protection de la moralité publique (Art.
XX, a) ; la protection de la santé et de la vie des animaux (Art. XX, b) ; ou se rapportant à la
conservation des espèces (considérées comme ressources naturelles épuisables) (Art. XX, g).
1316 Règlement n° 3254/91 du Conseil du 4 novembre 1991 interdisant l'utilisation des pièges à mâchoire dans la
Communauté et l'introduction dans la Communauté de fourrures et de produits manufacturés de certaines espèces
animales sauvages originaires des pays qui utilisent pour leur capture le piège à mâchoire ou de méthodes non-
conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté, J.O. L 308 du 09.11.1991. 1317 Règlement (CE) n o 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits
cosmétiques, J.O. L 342 du 22.12.2009. L'article 18 de ce règlement interdit l'expérimentation animale pour les
produits finis et leurs ingrédients, ainsi que la mise sur la marché des produits ou ingrédients testés sur les animaux au
sein de l'UE. Voir titre précédent. 1318 HARROP, S.R. et D., BOWLES, “Wildlife management, the multilateral trade regime, morals and the welfare of
animals”, Journal of International Wildlife Law & Policy, vol. 1, chap.1, pp. 64-94, 1998, p.83. 1319 MORFUNI, L., "Pain for Profit: An Analysis of the Live Export Trade", Deakin Law Review, Vol.16, n°2, pp.497-
538 (en particulier les pages 530 et 531 sur l'OIE et l'OMC).
226
Jusqu’au début des années 2000, les décisions de l’OMC révélaient que la protection animale
n'avait pas sa place pour remettre en cause la règle du libre-échange1320. Des auteurs
affirmaient alors que ce régime était un obstacle au développement des normes de protection
du bien-être animal à l’échelle internationale, et même à l’échelle nationale ou régionale1321.
Mais depuis, des avancées notables ont été réalisées en faveur de la protection des animaux à
l'OMC (§1). Malgré ces premiers pas importants, des obstacles restent à franchir (§ 2).
§1- Les avancées réalisées en faveur de la protection des animaux à l'OMC
En 2001, la décision dite Crevettes-tortues II a marqué une évolution importante en matière
de protection animale à l'OMC, dans le cadre de la conservation des espèces menacées
d'extinction (A). Plus récemment, dans le cadre du différend sur l'interdiction des produits du
phoque dans l'UE, l'OMC a décidé que l'exception de moralité publique permettait de justifier
une restriction commerciale adoptée en vue de protéger le bien-être des animaux (B).
A- La protection indirecte du bien-être animal dans la décision crevettes-tortues II de 2001
Dans la décision Crevettes-tortues II de 20011322, l’Organe d’appel de l’OMC a reconnu que
la restriction commerciale prise par les États-Unis afin de protéger les tortues marines était
justifiée, sur la base de l’exception prévue à l’article XX g) du GATT visant à protéger les
ressources naturelles épuisables. En l'occurrence, les tortues marines prises dans les cages à
crevettes appartenaient aux espèces figurant à l’Annexe I de la CITES1323, c'est-à-dire aux
espèces les plus menacées1324. Leur bien-être était également en cause puisque la contestation
américaine concernait les méthodes utilisées pour la pêche aux crevettes. Mais cette question
a été évitée, contrairement à la conservation des tortues menacées. Cette dernière s'inscrit
dans la continuité du nouveau préambule du GATT de 1994, visant à préserver
l’environnement et consacrant l'objectif de développement durable, ainsi qu'en conformité
avec les instruments du droit international de la vie sauvage et en particulier la CITES1325.
Rappelons que les premières interdictions communautaires adoptées en 1983 sur les peaux de
bébés-phoques et en 1991 sur les fourrures issues de pièges à mâchoires, ont également été
1320 STUMBERG, R. et L. JENKINS, “Animal Protection in a World Dominated by the World Trade Organization”,
dans SALEM et ROWAN, The State of the Animals 2001, Humane Society Press, Washington, 2001, p.149. 1321 Voir HARROP, S.R. et D. BOWLES, op.cit., note 1318, p.67. 1322 États-Unis- Prohibition à l'importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes,
WT/DS58/AB/RW, 22 octobre 2001. 1323 ARCHIBALD, C.J., “Forbidden by the WTO? Discrimination against a product when its creation causes harm to
the environment or animal welfare”, Natural Resources Journal, Vol. 48(1), 2008, p.39. 1324 La CITES contient trois annexes où sont listées les espèces les plus menacées et faisant l'objet d'une interdiction
totale de commerce à l'Annexe I, les espèces menacées pouvant faire l'objet d'autorisation de commerce à l'Annexe II
et celles que certains pays souhaitent protéger du commerce international à l'Annexe III. 1325ARCHIBALD, C.J., op.cit., note, 1323, p.41.
227
adoptées en vertu de considérations écologiques afin de préserver des populations d'espèces
menacées1326. Non soumises aux organes juridictionnels de l'OMC, il est possible de penser
que ces restrictions auraient pu être validées à partir du moment où ces espèces étaient
effectivement menacées d'extinction et surtout si elles faisaient l'objet d'une protection
internationale. Mais avant 2001, les considérations environnementales n'emportaient pas la
même attention de la part de l'OMC. En effet, les manifestations de Seattle lors du sommet de
1999 y sont pour beaucoup dans cette évolution1327.
De la protection indirecte du bien-être animal à travers la conservation des espèces menacées
en 2001, l'OMC a directement abordé la protection du bien-être animal dans le cadre du
différend sur la chasse aux phoques en 2013 et 2014.
B- La protection directe du bien-être animal dans l'affaire des phoques en 2013 et 2014
Afin de répondre aux préoccupations de l'opinion publique européenne, dont les sondages
réprouvent les méthodes employées pour la chasse aux phoques, l'UE a adopté un règlement
d'interdiction des produits du phoque en 20091328. En vigueur depuis 2010, il vise à interdire
l’importation et le commerce des produits dérivés du phoque dans le territoire de l’UE1329.
Ces produits concernent les fourrures, les gélules et huiles oméga-3 et les produits en cuir1330.
Cette restriction commerciale vise principalement les produits du phoque issus de la chasse
commerciale opérée par le Canada et la Norvège, lesquels se sont constitués parties
plaignantes auprès de l'OMC. Mais le règlement communautaire prévoit aussi des exceptions
à son interdiction. Dans le territoire de l'UE, la commercialisation des produits du phoque
demeure autorisée dans les cas où ces produits sont issus de : la gestion des ressources
marines en provenance de Suède et de Finlande (pays membres de l'UE), ainsi que de la
chasse des Inuits (en provenance du Canada et du Groenland en particulier)1331.
En vertu de ces considérations, les pays plaignants ont avancé que le règlement
communautaire était contraire au droit de l’OMC. Les dispositions suivantes ont été plus
précisément invoquées. Il s’agit des articles I.1 et III.4 de l’Accord général sur les tarifs
1326 Voir le titre précédent. 1327 Voir HOLDER, J. et M. LEE, Environmental Protection, Law and Policy: Text and Materials, Cambridge, 2007,
p.306. 1328 Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 sur le commerce des
produits dérivés du phoque, J.O. L 286/36 du 31.10.2009 [ci-après: "Règlement phoques"]. 1329 Art.8 du Règlement phoques (entrée en vigueur de l'interdiction depuis le 20 août 2010). 1330 Règlement phoques, Préamb. § 7. 1331 Notons que les produits de phoque peuvent être encore importés à des fins personnelles, transiter et se voir
transformés au sein des pays de l’UE, bien que ce dernier point ait moins été traité lors des débats, ainsi que dans la
décision du groupe spécial.
228
douaniers et le commerce (GATT) et des articles 2.1 et 2.2 de l’Accord sur les obstacles
techniques au commerce (OTC).
L'article I.1 du GATT concerne l'interdiction de discriminer des produits similaires en
fonction de leur origine, à savoir les pays dont ils proviennent. Lié à celui-ci, l'article III.4 du
GATT interdit le traitement différentiel visant à favoriser les produits internes (comme ceux
issus des pays de l'UE) sur d'autres (comme ceux issus du Canada et de la Norvège). Dans le
même esprit, l'article 2.1 de l'Accord OTC interdit d'adopter des règlements qui défavorisent
les produits d'autres nations. Quant à son article 2.2, il interdit d'adopter des mesures plus
restrictives pour le commerce qu'il n'est nécessaire pour réaliser un objectif légitime.
Afin de justifier son interdiction sur les produits du phoque, l’UE à invoqué l’exception de
moralité publique prévue à l’article XX a) du GATT1332. Dans le cadre de ce différend, cette
dérogation au principe de libre-échange a été validée pour la première fois afin de protéger le
bien-être animal. Parmi les deux décisions rendues par l'OMC en 2013 et 2014, la première
décision, plus riche sur le fond, mérite d'être présentée plus avant. Celle-ci a été
substantiellement confirmée par la décision rendue par l'organe d'appel le 22 mai 20141333.
La décision rendue par le groupe spécial de l'OMC le 25 novembre 20131334 fut de loin
inédite. Le groupe spécial a jugé que, malgré son caractère discriminatoire, l'interdiction
adoptée par l'UE était nécessaire pour protéger la moralité publique européenne en vertu de
l'Art. XX a) du GATT. Cette jurisprudence a ouvert une grande porte afin de permettre
l'adoption de restrictions commerciales visant à protéger le bien-être animal, dès lors qu'elles
sont jugées nécessaires pour répondre adéquatement aux préoccupations de l'opinion publique
concernée.
Marquant un véritable tournant par rapport à ses précédentes décisions, l'OMC s'est prononcé
pour la première fois en faveur de la protection du bien-être des animaux. En effet, même s'il
a été décidé que le règlement de l'UE contenait plusieurs violations au règles du commerce
international, la chasse aux phoques a été condamnée comme une pratique cruelle et ce,
quelques soient les méthodes utilisées. Le rapport du groupe spécial a été clair sur ce point :
qu'il s'agisse des chasseurs commerciaux du Canada et de Norvège, ou des Inuits du Canada
1332 L'Art. XX a) autorise, sous conditions, l'adoption de mesures commerciales nécessaires à la protection de la
moralité publique. 1333 Communautés européennes-Mesures prohibant l'importation et la commercialisation de produits dérivés du
phoque, Rapports de l'Organe d'appel, OMC, WT/DS400/AB/R - WT/DS401/AB/R, 22.05.2014 [Ci-après: "Décision
Phoques II"]. 1334 Communautés européennes-Mesures prohibant l'importation et la commercialisation de produits dérivés du
phoque, Rapports du groupe spécial, OMC, WT/DS400/R - WT/DS401/R, 25.11.2013 [Ci-après: "Décision Phoques
I"].
229
et du Groenland, les droits de chasse de ces communautés ne font aucune différence quant à la
cruauté des méthodes de chasse reportée dans les rapports scientifiques1335.
Pour l'avenir de la protection animale, l'élément le plus porteur de cette première décision est
l'affirmation selon laquelle les préoccupations liées au bien-être des animaux constituent "une
valeur ou un intérêt important"1336. De plus, la confirmation tant attendue par les juristes
animaliers est enfin arrivée : le bien-être animal est un objectif qui relève de la protection de
moralité publique sous l'article XX a) du GATT1337. Enfin, il a été reconnu que la protection
du bien-être animal peut constituer un objectif légitime permettant de faire obstacle aux règles
du commerce international, selon les conditions de l'article 2.2 de l'Accord OTC1338. L'organe
d'appel est néanmoins revenu sur cette affirmation du groupe spécial puisqu'en l'espèce,
l'interdiction communautaire ne pouvait être pas considérée comme une mesure technique1339.
En tout état de cause, cette jurisprudence constitue un grand pas en avant pour l'avenir de la
protection animale dans le cadre du commerce international. En effet, ce qui semblait
irréaliste voire impossible aux yeux des moins optimistes, s'est pourtant produit. Mieux
encore. Non seulement l'interdiction de l'UE sur les produits du phoque a considérée comme
nécessaire en vue de protéger la moralité publique européenne soucieuse du bien-être animal,
mais cette mesure a été remise en cause par le groupe spécial en regard de ses incohérences
non-protectrices1340. En effet, l'OMC a décidé que l'objectif de bien-être animal ne pouvait
souffrir d'exceptions lorsque la cruauté des méthodes était avérée. Ainsi, le règlement de l'UE
a été contesté en regard de la double exception qu'il prévoit :
- Premièrement, l'UE aurait fait preuve de "discrimination arbitraire", en autorisant
uniquement les produits issus de la chasse des Inuits, afin de privilégier les droits des
autochtones face au bien-être des phoques1341 ;
- Deuxièmement, l'UE aurait fait preuve de "protectionnisme déguisé", en autorisant les
produits du phoque issus de la gestion des ressources marines dans ses États membres, alors
même que les méthodes employées sont toutes aussi contraires au bien-être des phoques1342.
1335 Décision Phoques I, § 7.224 et 7.247. 1336 Id., § 7.632. 1337 Id., § 7.639. 1338 Id., § 7.505. 1339 Décision Phoques II, §2.151. 1340 Sur ces incohérences et l'ensemble des arguments des parties, voir cet article issu de l'audience publique préalable
à cette décision: BRELS, S., "Chasse aux phoques à l'OMC : Bien être animal et moralité publique en débat", Derecho
animal, juin 2013, en ligne: www.derechoanimal.info/images/pdf/SBrels-Chasse-aux-phoques-fra.pdf (date d'accès :
10.02.2014). 1341 Id., p.7. Préférence justifiée notamment à travers la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones de 2007.
230
Souvent accusée d'aller contre les intérêts environnementaux et ceux des animaux, et de ne
servir que les intérêts du commerce international, l'OMC a ainsi opéré un réel revirement de
situation depuis le début des années 2000. Comme nous l'avons vu précédemment, cette
évolution a commencé en 2001, lorsque l'organe d'appel de l'OMC a décidé que la protection
des tortues marines menacées d'extinction pouvait permettre de faire obstacle au commerce
international1343. Le cas de l'interdiction des produits du phoque est différend puisque les
espèces concernées n'étaient pas menacées d'extinction1344. En effet, le règlement
communautaire n'a été adopté que dans le but éthique de protéger le bien-être des animaux, et
non pas dans un but écologique afin de conserver des espèces menacées. Unique en son genre,
ce règlement communautaire est le premier qui vise explicitement la protection du bien-être
des phoques en tant qu'êtres sensibles, en affirmant dès le début de son préambule :
« Les phoques sont des animaux sensibles qui peuvent ressentir de la douleur, de
la détresse, de la peur et d’autres formes de souffrance »1345.
Typique des accords commerciaux depuis le début du XXe siècle1346, l'exception de moralité
publique étaient auparavant systématiquement occultée par la jurisprudence de l'OMC dans le
cadre de la protection du bien-être animal. La question peut se poser de savoir : pourquoi ?
Plusieurs éléments de réponse peuvent être avancés. Tout d'abord, il pouvait sembler difficile,
pour les organes judiciaires de l'OMC, de trancher sur le sujet sans disposer de lignes
directrices, en l'absence d'indication sur l'interprétation d'une telle exception, ni dans le GATT
lui-même, ni dans les travaux préparatoires des accords de l'OMC, ni même dans les
précédentes décisions jurisprudentielles. Certaines publications doctrinales avaient néanmoins
fourni des orientations. Alors que les travaux préparatoires des rédacteurs du GATT ne
donnent pas d'informations sur la signification ni sur la portée possible de l'exception de
moralité publique1347, certains auteurs comme Charnovitz ont affirmé la possibilité d'inclure la
protection du bien-être animal dans le champ des préoccupations morales visées par l'article
1342 Id., p. 3-5 et 10. Ces pays concernent notamment la Suède et de Finlande, lesquels pourraient subvenir seuls à la
demande de l'UE. 1343 Voir la décision Crevettes-Tortues II de 2001 précitée (WT/DS58/AB/RW, 22 Oct. 2001). 1344 Voir DUFOUR, G., “Les phoques, la science et l’OMC - La preuve scientifique doit-elle vraiment être à la base de
toute décision commerciale ?”, Le devoir, 31 Juillet 2009. 1345 Règlement phoques, Préamb. §1. 1346 L'exception visant à déroger aux règles commerciales pour des raisons morales ou humanitaire est présente dans
les accords commerciaux depuis 1927. Notons que l'exception de moralité publique de l'Art. XX a) du GATT se
retrouve de manière similaire au niveau communautaire depuis qu'elle a été consacrée à l'Art. 36 du traité de Rome en
1957. Voir CHARNOVITZ, S., “The moral exception in trade policy”, Virginia Journal of International Law, vol. 38,
pp.689-716, 1998, p.706. 1347 Id., pp.697-699.
231
XX a) du GATT1348. En outre, il pouvait également sembler délicat pour les organes
judiciaires de l'OMC, de décider de l'externalité (ou portée externe) d'une telle mesure1349,
c'est-à-dire de la possibilité ou non d'imposer des standards moraux à d'autres pays par le biais
de restrictions commerciales. Notons que les avis des États-membres de l'OMC diffèrent à ce
sujet, comme le reflètent notamment les débats des affaires Thon-dauphins I et II dans les
années 19901350.
Dans l'affaire des produits du phoque, l'UE avance que son règlement d'interdiction vise
seulement à protéger la moralité publique des citoyens européens1351. Néanmoins, tel que
nous l'avons vu au sein du chapitre précédent, tant le plan d'action que la stratégie de l'UE sur
le bien-être animal, prévoient explicitement de promouvoir les standards communautaires à
l'échelle internationale1352. C'est pourquoi les pays visés par ce règlement, notamment le
Canada et la Norvège, ont pu y voir la volonté de l'UE de leur imposer ses standards moraux,
d'autant que la contestation éthique des pratiques de chasse au phoque ressort explicitement
des termes du règlement qui les qualifie de "cruelles". Son objectif vise ainsi clairement à
"interdire toutes les méthodes de chasse cruelles ne garantissant pas une mort instantanée,
sans souffrances" des phoques1353. Ainsi, bien que le règlement européen soit
incontestablement animé par la volonté explicite de protéger la moralité interne des citoyens
européens, il n'est pas impossible qu'il poursuive également un objectif externe, plus
controversé à l'OMC, et plus généralement en droit international, en ce qu'il rejoint le principe
d'ingérence sur le plan moral.
Enfin, précisons que les exceptions générales de l'article XX du GATT sont conditionnées par
un test en 3 temps qui rend leur validation ardue. Dans le cas de l'article XX a), le premier test
concerne l'objectif visé par la restriction commerciale. Le second test concerne la nécessité de
la restriction pour atteindre son objectif. Enfin, ledit "chapeau" (ou texte introductif de l'article
XX) est un test visant à interdire les discriminations arbitraires ou injustifiables, ainsi que les
restrictions déguisées au commerce international. Ce triple test permet d'éviter les restrictions
1348 Id., p.709. Charnovitz précise que les politiques couvertes par l'Art. XX a) concernent, au moins, l'esclavage, les
armes, les drogues, l'alcool, la pornographie (ainsi qu'a pu le confirmer la décision WT/DS363/AB/R de 2009 sur les
vidéos à caractère pornographique), la religion le travail obligatoire et le bien-être animal. 1349 Id., p. 706. 1350 Id. Par exemple, dans l'affaire Thon-dauphin I, le représentant australien postulait que l'Art. XX a) pourrait justifier
des mesures concernant le traitement inhumain des animaux, si ces mesures s'appliquent identiquement aux produits
nationaux et étrangers; alors que dans l'affaire Thon-dauphin II, le représentant de la Commission européenne et le
représentant hollandais s'opposaient au fait qu'un pays prenne des mesures pour protéger les mœurs publiques en
dehors de sa juridiction nationale pour protéger sa propre moralité publique. 1351 Voir par exemple es paragraphes 7.363. et suivants de la Décision phoques. 1352 Supra Chap.2, section sur "La promotion de l'objectif communautaire de bien-être animal dans le cadre de son
application internationale". 1353 Règlement phoques, Préamb. §1.
232
abusives au commerce international, sachant que seules les restrictions dûment justifiées sous
les exceptions de l'article XX du GATT peuvent se voir validées.
En effet, rappelons que l'objectif de l'OMC consiste à lutter contre les barrières au commerce
international et non à faciliter les restrictions commerciales, quelqu'un soient les raisons. Les
dérogations doivent donc demeurer exceptionnelles.
Les précédents jurisprudentiels montrent qu'au-delà de l'objectif recherché, le test de nécessité
de l'article XX a) est dur à valider et que celui du chapeau de l'article XX l'est encore plus1354.
Tel fut le cas pour le règlement communautaire sur les produits du phoque qui a passé les
deux premiers tests, mais pas celui du chapeau. En effet, il a été décidé que cette mesure avait
bien pour objectif la protection de la moralité publique (à travers celle du bien-être animal)1355
et qu'une telle mesure était nécessaire pour atteindre son objectif (sachant qu'aucune mesure
moins contraignante n'y aurait pas aussi bien répondu)1356. Le fait d'avoir passé ces deux tests
constitue déjà une grande première dans l'histoire de la protection animale, ainsi que dans
celle de l'interprétation de l'article XX a) du GATT par les organes juridictionnels de l'OMC.
Cependant, le règlement communautaire n'a pas été jugé conforme au texte introductif de
l'article XX, en vertu des exceptions prévues pour les produits issus de la chasse des
communautés Inuits et de la gestion des ressources marines dans les pays de l'UE1357.
En outre, précisons que l'article XX b) est la seule exception qui fait explicitement référence
aux animaux dans le GATT, en ce qu'elle vise la protection de leur vie et de leur santé.
Mais celle-ci a été brièvement évacuée dans cette affaire1358. Aucune avancée ne peut donc
être mentionnée au sujet de l'article XX b) afin de protéger le bien-être des animaux.
Néanmoins, rien ne semble s'opposer à ce que celui-ci soit interprété de manière à inclure
cette protection. Pour l'instant, cette exception a fait l'objet d'une interprétation assez
restrictive dans le cadre de l'affaire du Bœuf aux hormones, opposant les États-Unis (et autres
pays dont le Canada) et l'Union européenne1359. Cependant, une interprétation plus extensive
1354 Voir les principales références à ce sujet, op. cit., note 1311. 1355 Décision phoques, §7.397: "[...] la majorité des observations et déclarations consignées dans ces pièces attestent le
soutien global dont la mesure bénéficie, les citoyens de l'UE ayant exprimé à de nombreuses reprises le souhait que les
produits dérivés du phoque soient interdits sur le marché de l'UE en raison de leurs préoccupations concernant le bien-
être des phoques". 1356 Décision phoques I, §7.639. 1357Id., §7.651. 1358 Id., 7.4.4.4: "[...] Dans ces circonstances et compte tenu de la portée limitée de ses arguments au titre de l'article
XX b), nous estimons que l'Union européenne n'a pas établi prima facie le bien-fondé de son allégation au titre de
l'article XX b)". 1359 Notons que dans le cadre de ce différend Communautés européennes - Mesures concernant les viandes et les
produits carnés (hormones), une solution mutuellement acceptable concernant la mise en œuvre est notifiée depuis le
25 septembre 2009. Voir en ligne sur le site de l'OMC: http://www.wto.org/french/tratop_f/dispu_f/cases_f/ds26_f.htm
(date d'accès: 11.02.2014).
233
pourrait voir le jour à l'avenir, dans la continuité de l'évolution remarquable vers une plus
grande prise en compte de la protection du bien-être animal sur la scène internationale.
L'OMC a marqué une avancée importante dans sa prise de position en 2013, puis en 2014.
Elle considère la protection du bien-être animal, non seulement comme une valeur importante,
mais comme un objectif à défendre lorsqu'il s'agit d'une nécessité visant à préserver la
moralité publique, même lorsque la défense t'un tel objectif s'oppose à la règle du libre-
échange. Dans l'affaire des phoques, la moralité publique s'est clairement imposée comme un
impératif supérieur au libre-échange. En rupture avec les décisions précédentes1360, cette
décision donne un nouveau feu vert afin de valider les restrictions commerciales protectrices
du bien-être animal à travers la moralité publique, tant qu'elles sont cohérentes et répondent
pleinement à leur objectif.
Insistons sur le caractère novateur de cette jurisprudence. Pour la première fois, la question du
bien-être animal a pu faire son entrée à l'OMC. Loin d'être abordée comme un sujet dérisoire,
cette préoccupation a fait l'objet de discussions sérieuses sur la base de données scientifiques.
Bien qu'a priori ambitieuse du point de vue de la protection des animaux, la mesure débattue
contient néanmoins des exceptions qui viennent affaiblir considérablement sa force morale.
C'est pourquoi, loin d'être une interdiction générale en vue de protéger le bien-être de tous les
phoques, son éthique partielle semble effectivement contestable. Bien que cette jurisprudence
puisse être infirmée à l'avenir étant donné qu'il n'existe aucune obligation pour les organes
judiciaires de l'OMC de se conformer aux décisions précédentes1361, cette prise de position
inédite conservera sa valeur progressiste pour l'avenir de la protection du bien-être animal.
En définitive, cette affaire aura présenté l'intérêt majeur de mettre en avant cette
préoccupation à l'OMC. D'une manière innovante, la jurisprudence du groupe spécial, suivie
par l'organe d'appel, aura permis de traiter de cette question à travers l'exception de moralité
publique (de l'article XX a) du GATT). Longtemps attendue des internationalistes et juristes
animaliers, cette jurisprudence est à marquer d'une pierre blanche.
Cette évolution vient confirmer le mouvement international amorcé en faveur de la protection
du bien-être animal depuis le début des années 2000. Comme toute évolution morale amenant
une prise de conscience mondiale, ce mouvement sera sans doute amené à progresser dans les
années à venir. Il est même possible de présager que le droit international général ne pourra
1360 Citons notamment les décisions Thons-dauphins I et II, respectivement en 1991 et 1994, ainsi que la décision sur
l'affaire Bœuf aux hormones opposant les États-Unis et l'Union européenne en 1998. 1361 ARCHIBALD, C. J., op.cit., note 1323, p.17.
234
plus s'abstenir de prendre en compte cette nouvelle préoccupation, de pair avec d'autres,
comme la protection environnementale, en tant qu'impératifs du nouveau millénaire.
Malgré l'avancée notable opérée à l'OMC en matière de protection du bien-être animal,
certains obstacles continuent de freiner la pleine prise en compte des considérations éthiques.
§2- Les freins à dépasser en faveur du bien-être animal à l'OMC
Parmi ces freins, nous nous concentrerons en particulier sur la remise en cause de la
distinction dite "processus-produit" (A) et sur la nécessité de prendre en compte l'ensemble
des préoccupations morales, ou non-commerciales, des consommateurs au sein de l'OMC (B).
A- La distinction processus-produit contraire à la protection du bien-être animal
La distinction processus-produit est une règle élaborée par la jurisprudence de l’OMC
concernant les méthodes de production. Cette règle peut être résumée ainsi :
« un pays ne peut pas interdire un produit en fonction du processus de production
employé pour l’obtenir, mais uniquement en prouvant que la nature intrinsèque du
produit interdit diffère de celle des autres produits »1362.
Cette distinction fait abstraction des méthodes de production pour ne juger que de l’aspect
physique des produits1363. Tel fut notamment le cas dans l’affaire Thons-dauphins. Dans cette
affaire, une plainte était formulée envers les États-Unis pour avoir adopté une restriction
commerciale contre les produits de thons, car ces derniers étaient pêchés en sacrifiant des
dauphins dans les filets de pêche. L’Organe de règlement des différends de l’OMC estima que
la mesure américaine était contraire aux règles du GATT, même si les États-Unis invoquèrent
spécifiquement l’exception prévue à l'article XX b) destinée à protéger la vie des animaux1364.
Notons que le bien-être des dauphins était en cause puisque la contestation américaine
concernait la méthode utilisée pour la pêche aux thons. Cette méthode consiste à repérer les
dauphins qui nagent au dessus des bancs de thons et à lancer les filets au dessus des dauphins.
Une telle méthode fait généralement de nombreuses victimes de dauphins, lesquels peuvent
agoniser longuement de leurs blessures, alors même qu’ils ne sont nullement visés par cette
pêche1365. Toutefois, en vertu de la distinction processus-produit à l'OMC, du thon pêché en
sacrifiant des dauphins ou non (méthode ou processus utilisé), reste du thon (qualité
1362 SINGER, P., “L’Organisation mondiale du commerce : un obstacle au progrès de la protection légale des
animaux”, Les cahiers antispécistes, Article n°274, CA n°25, octobre 2005, p.4. 1363 HARROP, S.R. et D. BOWLES, op.cit., note 1318, p.73. 1364 VAN CALSTER G., "Animal welfare, the EU and the World Trade Organisation" dans VEDDER Anton et al.,
The WTO and concerns regarding animals and nature, Wolf Legal Publishers, 2003, p.14. 1365 SINGER, P., op.cit., note 1362, p.4.
235
intrinsèque du produit). De plus, comme les dauphins n’appartenaient pas à une espèce
menacée, l’exception environnementale de l'article XX g) (acceptée plus tard pour les tortues
marines), n’a pas été validée dans les décisions rendues en 1991 et 1994 sur cette affaire1366.
Ainsi, la règle processus-produit vient invalider les restrictions commerciales basées sur les
méthodes de production. Même dans le cas de l’interdiction européenne d’importer du bœuf
élevé aux hormones de croissance afin de protéger la santé humaine, l’OMC a décidé que
cette interdiction était injustifiée en vertu de cette règle. Selon celle-ci, du bœuf élevé aux
hormones de croissance ou non reste du bœuf. Ajoutons que face au principe de précaution
allégué par l'UE, les données scientifiques sur les risques réels ont été jugées insuffisantes1367.
Or la distinction processus-produit semble contestable sur plusieurs points. Tout d'abord, il
s'agit d'une création jurisprudentielle qui ne repose sur aucun accord textuel de l'OMC.
Elle est aussi critiquable en ce qu'elle peut s'avérer lourde de conséquences dommageables.
En effet, ne pas pouvoir discriminer un produit en vertu des méthodes employées pour le
produire empêche aux pays de s'opposer à toutes les méthodes de production contestables du
point de vue moral, tant envers les animaux qu'envers les êtres humains. Citons notamment
les atteintes aux droits humains et en particulier à ceux des enfants ou des salariés exploités
dans certains pays du monde, pour la production de textiles ou d’autres produits1368.
La question se pose alors de savoir si un revirement jurisprudentiel acceptant les restrictions
commerciales basées sur les méthodes de production serait possible ? Rien ne semble
l'empêcher, d'autant que la règle interdisant de distinguer les produits en fonction de leurs
processus de production n’est imposée par aucun de accord de l’OMC et que les organes
juridictionnels de l'OMC ne sont pas tenus de se conformer aux décisions précédentes1369.
En matière de protection animale, un tel revirement s’inscrirait dans la continuité des
précédentes avancées jurisprudentielles de l'OMC, sachant que le GATT doit être interprété,
1366 Précisons que suite à ces décisions, un règlement communautaire a été adopté afin de protéger les cétacés contre
les prises accidentelles dans le cadre des pêcheries. Voir le Règlement (CE) n° 812/2004 du Conseil du 26 avril 2004
établissant des mesures relatives aux captures accidentelles de cétacés dans les pêcheries et modifiant le règlement
(CE) n° 88/98, J.O. L 150 du 30.04.2004. 1367 SINGER, P., op.cit., note 1362, p.5. Dans cette décision, l’Union européenne invoquait le principe de précaution
mais l’absence de preuves scientifiques suffisantes concernant les risques d’ingestion viande aux hormones pour la
santé humaine n’a pas permis de justifier l’embargo européen envers les États-Unis. Au contraire, ceux-ci ont pu
imposer comme mesure de rétorsion des droits de douane à 100% à pour les produits agricoles en provenance de l’UE
d’une valeur minimum de 116 millions de dollars. 1368 Id., p.6-7. 1369 ARCHIBALD, C. J., op.cit., note 1323, p.50.
236
entre autres, "à la lumière […] des préoccupations actuelles et des autres traités
internationaux"1370.
Si la protection du bien-être animal apparaît comme une nouvelle préoccupation sur la scène
mondiale, elle ne fait l'objet d'aucun traité international spécifique à ce jour. Par contre, nous
avons vu précédemment que des normes internationales ont été adoptées par l’OIE à ce
sujet1371. Celles-ci sont même reconnues explicitement comme des "références mondiales" par
l’OMC1372. Ajoutons que la mise en conformité des règles de l’OMC avec les normes de
l’OIE semblerait cohérente en vertu de l’Accord de coopération conclu entre ces deux
organisations1373. Si cette coopération concerne spécifiquement l'Accord relatif à l'application
des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS)1374, elle pourrait se voir élargie plus
généralement au bien-être animal à l'avenir. En effet, il s'agit désormais d'une priorité
affirmée pour l'OIE depuis le début des années 2000 et l'OMC en a reconnu récemment
l'importance depuis sa position adoptée dans l'affaire des produits du phoque en 20131375.
Un cas particulier vient soulever des questions juridiques concernant la compatibilité des
normes de l'OIE sur le bien-être animal et le droit de l'OMC en matière de commerce
international. Il s'agit des interdictions d'exportation adoptées par l'Australie envers les pays
du Moyen-Orient, sur la base du non-respect des normes de l'OIE en matière de transport et
d'abattage du bétail dans ces pays1376. Si les pays concernés (notamment l'Egypte et
l'Indonésie), avaient formulés une plainte devant l'OMC pour restriction injustifiée au
commerce international, une hypothèse peut être avancée en l'état actuel du droit de l'OMC.
Tout d'abord, cette organisation reconnaît la valeur des normes de l'OIE en matière de santé
animale. À ce sujet l'Accord SPS, comme l'article XX b) du GATT (sur la protection de la
santé et de la vie des animaux), pourraient être invoqués au soutien des interdictions
australiennes visant à protéger son bétail. Comme celles-ci ont été adoptées suite aux
dénonciations médiatiques qui ont scandalisé l'opinion publique australienne1377, l'article XX
a) du GATT (sur la protection la moralité publique) pourrait également permettre de valider
1370 Id., p. 39. En référence à la décision Crevettes-Tortues II. 1371 Voir ci-dessus et l'Annexe 3. 1372 Voir "à propos" de l’OIE, en ligne : http://www.oie.int/fr/OIE/fr_about.htm?e1d1 (date d’accès : 2 décembre
2010). 1373 OIE-OMC, Accord entre l’Organisation mondiale du commerce et l’Office international des épizooties, 4 mai
1998, en ligne : http://www.oie.int/fr/OIE/accords/fr_accord_omc.htm (date de mise à jour : 16 Juillet 2006). 1374 Id. Notons que l'affaire du Bœuf aux Hormones a permis d'explorer les liens entre le GATT et l'Accord SPS. 1375 Voir les développements précédents sur l'OIE et la décision de l'OMC sur les produits du phoque de 2013. 1376 MORFUNI, L., "Pain for Profit : An Analysis of the Live Export Trade", Deakin Law Review, Vol. 16, n° 2, pp.
497-538 (en particulier les pages 530 et 531 sur l'OIE et l'OMC). 1377 Id., p.5.
237
ces mesures de protection du bien-être animal. Cette validation s'inscrirait alors dans la
continuité de la position de l'OMC sur l'affaire des produits du phoque (vue précédemment).
Ces exemples mettent en avant l'importance d'adopter des réponses appropriées face aux
préoccupations de l'opinion publique. Les consommateurs peuvent vouloir faire des choix
éthiques en faveur de la protection de l'environnement et du bien-être animal. Ces préférences
peuvent être favorisées par des législations ou se voir exprimées par des interdictions
commerciales envers les méthodes de production contraires à ces objectifs1378.
Une étude menée à ce sujet dénonce ainsi la distinction processus-produit établie par l'OMC :
« Il ne fait aucun doute que, pour régler les nombreux problèmes
environnementaux de la planète et les atrocités contraires au bien-être animal, il
faut faire attention à la façon dont les produits sont fabriqués »1379.
En tout état de cause, il semble que les préoccupations éthiques des consommateurs
concernant les méthodes de production devraient être mieux considérées par l'OMC et qu'une
plus grande prise en compte des questions non-commerciales en général devrait avoir lieu.
B- La faible prise en compte des considérations éthiques (ou non-commerciales) par l'OMC
Les récentes décisions rendues sur les phoques ont marqué une première prise en compte mais
le bien-être animal est encore ignoré des négociations relatives à l'Accord sur l'agriculture.
Pourtant l'OMC "laisse aux gouvernements une grande latitude pour tenir compte de
considérations “autres que d’ordre commercial” importantes"1380.
Il n'est pas impossible que le bien-être animal vienne s'ajouter aux autres considérations déjà
prises en compte, comme la sécurité alimentaire et la protection de l'environnement1381.
Il convient également de noter que cette question commence aussi à poindre au sein de
l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), laquelle offre
désormais un portail, ainsi que plusieurs rapports d'experts sur le bien-être des animaux
d'élevage1382. Dans le cadre des accords passés entre la FAO et l'OMC, cette préoccupation
1378 ARCHIBALD, C. J., op.cit., note 1323, p. 25. 1379 Id., p.19: "There is no doubt that in order to fix the world’s numerous environmental problems and animal welfare
atrocities, attention must be paid to the way that products are made". 1380 Voir sur le site de l'OMC, "Considérations “autres que d’ordre commercial” : l’agriculture peut servir à des fins
multiples", en ligne : http://www.wto.org/french/tratop_f/agric_f/negs_bkgrnd17_agri_f.htm (date d'accès :
10.11.2014). 1381 Id., négociations de la "phase 2". 1382 Le portail sur le bien-être animal de la FAO est accessible en ligne à cette adresse:
http://www.fao.org/news/story/fr/item/19904/icode/ (date d'accès: 11.01.2014). Quant aux rapports d'experts les plus
pertinents, citons notamment celui de David FRASER, D. et al, "Renforcement des capacités pour la mise en place
238
pourrait être intégrée parmi les considérations non-commerciales, notamment dans le cadre
des négociations relatives à l'Accord sur l'agriculture à l'OMC.
Depuis la décision protectrice des tortues menacées et de la récente affaire sur le bien-être des
phoques, l'OMC a montré qu'elle pouvait prendre des décisions favorables à la protection
animale. Cette évolution permet de penser que l'OMC peut également avancer dans la prise en
compte des préoccupations éthiques et autres considérations non-commerciales des
consommateurs, parmi lesquelles figure la protection des animaux.
Pour faciliter cette prise en compte, la question d'une certification des produits respectueux du
bien-être animal est débattue dans le cadre l’Accord OTC1383. L'objectif de cet accord est que :
« les normes […] d’étiquetage […] ne créent pas d'obstacles non nécessaires au
commerce international »1384.
Rien n’est encore décidé à ce jour quant à la compatibilité entre les étiquetages (certifications
ou labels), fondés sur les méthodes de production et les règles de l’OMC. L’avis des pays
membres est partagé, entre ceux qui redoutent que la validation de tels labels ne crée de
distorsions commerciales, et ceux qui défendent le droit des consommateurs d’être informé
des méthodes de production, afin de pouvoir choisir leurs produits en toute connaissance de
cause1385. C’est pourquoi les possibilités d’étiquetage (volontaire ou obligatoire), comme
moyen de répondre aux préoccupations des consommateurs est dors et déjà en discussion1386.
Après avoir commencé à prendre en compte les préoccupations écologiques des
consommateurs, l'OMC semble amenée à prendre également en compte leurs préoccupations
éthiques, vers une économie non seulement plus "verte", mais aussi plus morale. En regard
de la considération montante pour la protection du bien- être animal au sein des
instances mondiales, cette nouvelle prise en compte semble aussi aller dans le sens de
l'évolution actuelle. En outre, il est dans l'intérêt de l'OMC de veiller à son image de marque
autant que possible, face à l'immoralité de la course au profit bien souvent dénoncée1387.
des bonnes pratiques pour le bien-être des animaux", Rapport de la réunion d’experts de la FAO, 30 septembre-3
octobre 2008, FAO, Rome, 2009. 1383 Voir en ligne : http://www.standardsinfo.net/info/livelink/fetch/2000/148478/6301438/fr/inttrade.html#2 (date
d’accès : 2 décembre 2010). 1384 Préambule, alinéa 5 de l’Accord sur les obstacles techniques au commerce, Annexe 1a) de l’Accord de Marrakech
instituant l’organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1867 R.T.N.U. I-31874. Voir à ce sujet: JOSHI, M.,
“Are eco-labels consistent with the World Trade Organization agreements?”, Journal of World Trade, vol.38, chap.1,
pp. 69-92, 2004. 1385 HARROP, S.R. et D. BOWLES, op.cit., note 1318, p.73. 1386 Voir sur le site de l’OMC : "Information des consommateurs et étiquetage : Phase 2", en ligne :
http://www.wto.org/french/tratop_f/agric_f/negs_bkgrnd12_market_f.htm#consumer (date d’accès : 14.08.2014). 1387 Par exemple, lors des manifestations de Seattle au sommet de l'OMC en 1999 ayant dénoncé les problèmes
environnementaux.
239
- Conclusion du Chapitre 2
Suite à la protection des tortues marines à travers l'objectif de conservation des espèces
menacées en 2001, l'OMC a traité directement de la protection du bien-être animal d'une
manière explicite, en condamnant les méthodes de chasse aux phoques dans sa décision 2013,
suivie par celle de 2014. Relevons que cette nouvelle prise en compte est certainement issue
de la considération croissante de cette question par les instances internationales, ainsi que de
la pression exercée par l'UE en vue de promouvoir cette protection au sein de l'OMC.
Comme nous l'avons vu précédemment, l'UE s'est mobilisée pendant plusieurs années en ce
sens1388. Son ancien plan d'action comme sa nouvelle stratégie sont éloquents à ce sujet1389.
Plus largement, ces derniers encouragent toutes les initiatives protectrices à l'échelle
mondiale1390. Parmi ces initiatives, l'OIE joue un rôle important à travers l'adoption des
normes internationales sur le bien-être animal, ainsi qu'à travers l'accord de coopération avec
l'OMC vers une meilleure prise en compte de la santé animale dans le cadre de l'Accord
SPS1391. L'OIE s'affirme comme chef de file mondial en matière de bien-être animal et ce
dernier constitue désormais un domaine d'action prioritaire pour cette organisation1392. Celle-
ci a donc certainement un rôle à jouer en vue d'une plus grande prise en compte de cette
question par les autres instances mondiales. La FAO semble aussi avoir son rôle à jouer
concernant l'intégration du bien-être animal dans les discussions relatives à l'Accord sur
l'agriculture de l'OMC, et plus généralement au sein de l'ONU.
Depuis 2001, la protection animale a fait des progrès importants dans la jurisprudence de
l'OMC. Les États-Unis, ainsi que l'Union européenne, ont été des acteurs clefs afin de faire
avancer cette protection. Rappelons que les initiatives les plus pertinentes des États-Unis
concernent les affaires Thons-dauphins et Crevettes-tortues, et pour l'UE les affaires Bœuf aux
hormones et surtout celle sur les Produits du phoque1393.
1388 Dès 2002, l'UE avait émis une communication concernant notamment l'OMC pour trouver un consensus
international sur ces problèmes. COMMISSION EUROPEENNE, Communication sur la législation applicable au
bien-être des animaux d'élevage dans les pays tiers et sur son incidence pour l'UE, COM (2002) 626
final,018.11.2002, p.12.. 1389 Voir COMMISSION EUROPÉENNE, Communication concernant un plan d'action communautaire pour la
protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2006-2010, J.O. C 49, 28 février 2006; COMMISSION
EUROPEENNE, Communication sur la stratégie de l’Union européenne pour la protection et le bien-être des
animaux au cours de la période 2012-2015, COM (2012) 6 final/2, 15 février 2012. 1390 Voir la section sur "La promotion internationale de l'objectif communautaire de bien-être animal" au Chap.2. 1391 Voir ci-dessus. 1392 Voir sur le site de l'OIE "Objectifs et actions de l'OIE en matière de bien-être animal", en ligne:
http://www.oie.int/fr/bien-etre-animal/themes-principaux/ (Mise à jour: 15 juillet 2013). 1393 Tel est le nom qu'il est prossible de donner à cette affaire, sans que cette appellation ne soit aujourd'hui officielle.
Relevons que l'Union Européenne a adopté plusieurs interdictions commerciales qui n'ont fait fait l'objet d'aucune
procédure de règlement des différends au sein de l'OMC. Toutes concernaient des produits de fourrures issues
240
Bien que risquées en regard des règles de l'OMC, les initiatives prises par les États-Unis et
l'UE ont parfois coûté cher aux pays protecteurs, mais elles ont pu aussi s'avérer payantes
pour faire avancer la protection animale. En général, les États ou groupes d'États (comme
l'UE), sont assez réticents à adopter des restrictions commerciales envers d'autres, sachant que
les sanctions imposées par l'OMC peuvent s'avérer très lourdes. Par exemple, dans le cas de
l'interdiction de viande de bœuf aux hormones en provenance des États-Unis, l'UE a été
condamnée par l'OMC à payer des droits de douane de 100%, soit 116 millions de dollars,
comme mesure de rétorsion afin d'exporter ses produits agricoles aux États-Unis1394.
Malgré cette sanction prononcée en 1998, l'UE a continué à défendre les valeurs
communautaires, parmi lesquelles figure la protection du bien-être animal. En adoptant
l'interdiction des produits du phoque en 2009, sa prise de position audacieuse a permis à
l'OMC de franchir un premier pas vers la prise en compte du bien-être animal dans le cadre de
l'exception de moralité publique de l'article XX a) du GATT.
Dans le droit de l'OMC, deux grandes portes sont désormais ouvertes à la protection animale
parmi les exceptions générales du GATT :
- L'article XX g) du GATT en faveur des espèces animales menacées, dans le cadre des
mesures se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables (depuis 2001) ;
- L'article XX a) du GATT en faveur du bien-être animal, dans le cadre des restrictions
commerciales nécessaires à la protection de la moralité publique (depuis 2013).
À l'avenir, d'autres portes pourraient s'ouvrir en faveur de la protection des animaux, comme :
- L'article XX b) du GATT concernant la protection de la vie et de la santé des animaux ;
- L'Accord SPS sur la santé animale, notamment en regard de l'accord entre l'OMC et l'OIE ;
- L'Accord OTC pour valider un étiquetage des produits respectueux du bien-être animal1395.
Ainsi, certaines portes sont déjà ouvertes et d'autres peuvent encore s'ouvrir en faveur du
bien-être animal à l'OMC. En ce sens, cette organisation a déjà reconnu que les restrictions
d'espèces variées. Il s'agissait notamment de l'interdiction des peaux de bébés-phoques en 1983, des fourrures issues de
pièges à mâchoires en 1991 et enfin des fourrures de chat et de chien en provenance d'Asie en 2007. Voir la section sur
"L'imposition de l'objectif communautaire de bien-être animal dans le cadre du commerce international" au Chapitre 2. 1394 European Communities - Measures affecting meat and meat products, 13.02.1998, WT/DS26/AB/R 7-
WT/DS48/AB/R. Voir à ce sujet P. SINGER, “L’Organisation mondiale du commerce : un obstacle au progrès de la
protection légale des animaux”, Les cahiers antispécistes, n°274, CA n°25, 2005, p.5. 1395 En tant que préoccupation de la moralité publique, rappelons que le bien-être animal a été reconnu comme un
objectif légitime pour faire obstacle au commerce international, sous l'article 2.2 de l'Accord OTC en 2013.
241
commerciales constituent l'arme la plus puissante dont un pays (ou groupe de pays) dispose
afin de s'opposer aux méthodes attentatoires à l'environnement et au bien-être animal1396.
En résumé, comment l'OMC peut-elle mieux tenir compte l’impératif de bien-être animal ?
Plusieurs propositions peuvent être formulées en ce sens. Tout d'abord, il est possible de
modifier le texte du GATT afin d'y intégrer la protection du bien-être animal, à l'image des
considérations environnementales et du développement durable qui figurent désormais dans
son préambule de 1994. Il est également possible d'adopter un accord spécifique sur le bien-
être animal, ou encore un amendement à l'Accord SPS, afin d'y ajouter cette question.
Enfin, la jurisprudence de l'OMC peut confirmer sa position favorable à la protection du bien-
être animal par le biais de l'exception de moralité publique dans ses décisions à venir, ainsi
que renforcer cette protection déjà octroyé en vertu de l'Article XX a) du GATT par celle de
son Article XX b) faisant explicitement référence à la protection des animaux.
Au fond, la confrontation entre le bien-être animal et le commerce international soulève de
grandes questions où les préoccupations éthiques font face aux intérêts économiques.
Entre la non-souffrance et la recherche du profit, quel objectif doit encore primer ?
Et plutôt que de déployer des efforts considérables au nom de la croissance économique,
pourquoi ne pas envisager des moyens de reconversion vers une économie qui respecterait
généralement les droits humains et ceux des animaux à la non-exploitation et à la non-
souffrance ? En plus des discussions éthiques sur l'environnement, ces questions méritent
d'être posées sérieusement et abordées juridiquement par la Communauté internationale.
1396 “Trade restrictions are the "heaviest weapon" a country has to prevent harmful process”, en référence à la decision
Crevettes-tortues I de 1998 dans ARCHIBALD, C. J., op.cit, note 1323, p.18.
242
Conclusion du Titre 1
Ce titre a permis de montrer que le droit animal international est en train d'évoluer de
l'objectif de conservation des espèces menacées, vers celui de protection du bien-être animal.
Du point de vue de l'éthique environnementale, la conservation des espèces vise à lutter
contre leur extinction accélérée du fait des activités humaines. Désormais, les organisations
mondiales tendent à prendre en compte le point de vue de l'éthique animale, qui concerne la
protection des individus face aux souffrances engendrées par les activités humaines.
Nous avons vu qu'au sein des conventions relatives à la conservation des espèces menacées,
apparues au début des années 19701397, certaines dispositions font allusion au bien-être
animal, mais seulement de manière sporadique (une ou deux par instrument). Dans le cadre de
la CITES dont l'efficacité est reconnue1398, citons notamment l'interdiction de traitement cruel
et l'obligation de soins des animaux confisqués, ainsi que la valeur intrinsèque des animaux au
sein de la Charte mondiale de la nature et de la CBD. Cette dernière consécration, au sein
d'instruments de protection de la nature et de la biodiversité, reflète plutôt l'expression d'une
approche écocentrique (considérant la valeur des espèces animales en tant qu'éléments de leur
écosystème), voire biocentrique (considérant la valeur des animaux en tant qu'organismes
appartenant à la biodiversité)1399, plutôt qu'une approche zoocentrique1400 (considérant la
valeur de l'animal en tant qu'individu à part entière)1401.
De même, les considérations liées au bien-être des animaux n'étaient pas absentes des plaintes
formulées par les États-Unis auprès de l'OMC dans les années 1990, tant concernant le
massacre des dauphins pour la pêche au thon, que les nombreuses tortues victimes de la pêche
aux crevettes. Néanmoins, c'est uniquement sur le plan de l'éthique environnementale que ces
plaintes ont trouvé écho auprès de l'OMC à cette époque. Déjà bien intégrée en droit
1397 Bien que la convention sur la chasse à la baleine est antérieure puisqu'elle date de 1946, celle-ci visait au départ à
assurer la pérennité de l'exploitation baleinière, plutôt que la protection réelle des baleines, bien que l'objectif de
conservation des espèces menacées était déjà présent à travers l'objectif de gestion durable. 1398 Cf. HUTTON, J. et D. BARNABAS, Endangered species, threatened convention: the past, present and future of
CITES, the Convention on International Trade in Endangered Species of Wild Fauna and Flora, London earthscan,
2000. 1399 Voir par exemple LARRERE, C., Les philosophies de l’environnement, PUF, 1997. 1400 Voir VILKKA, L., The intrinsic value of nature, Rodopi, 1997, p.37. 1401 Notons que la consécration de la valeur intrinsèque des animaux d'un point de vue zoocentré, c'est-à-dire
indépendamment du contexte de protection de la nature qui les intègre et contient cette valeur pour l'ensemble de ses
éléments, se retrouve notamment dans les lois de protection des animaux aux Pays-Bas. Ce pays consacre cette valeur,
à la fois dans la loi de conservation des espèces sauvages et celles de protection des animaux, lesquelles reflètent
respectivement le point de vue de l'éthique environnementale et celui de l'éthique animale.
243
international, l'objectif de conservation des espèces menacées d'extinction a ainsi permis une
décision favorable à la plainte américaine pour la protection des tortues marines en 2001.
C'est à cette même date que l'OIE a décidé de faire une place de choix à la considération du
bien-être animal d'une manière directe, c'est-à-dire indépendamment de l'objectif de
conservation des espèces. Adoptées dans le contexte spécifique de la santé des animaux en
tant qu'objectif indissociable du bien-être animal, ces normes ont permis d'établir des
exigences minimales au niveau mondial dans certains domaines (production alimentaire,
expérimentation, contrôle des populations de chiens errants, élevage des bovins, vaches
laitières et poulets). Aussi, des questions délicates comme l'abattage rituel ou le transport
aérien des animaux à des fins expérimentales sont actuellement en discussion. Au sein de
cette organisation dédiée à la protection de la santé des animaux et réunissant des vétérinaires
du monde entier, il semblerait également important de promouvoir un principe général d'accès
aux soins, tant dans les pays développés, que dans les pays en voie de développement où
l'OIE concentre de nombreuses actions pour améliorer la situation sanitaire des animaux.
Depuis le début des années 2000, l'adoption des normes de l'OIE a permis une véritable prise
en compte du bien-être animal comme un nouvel objectif à considérer sur la scène mondiale.
L'OMC n'a pas échappé à cette évolution dans ses récentes décisions sur les produits du
phoque. En plus des nouvelles avancées mondiales encourageant sa prise en compte, la
protection du bien-être animal était au cœur-même de cette affaire dans le cadre du débat sur
la chasse aux phoques1402. C'est dans le sens d'une remise en cause de cette chasse qu'est allée
la décision rendue par le groupe spécial de l'OMC en 2013. En plus d'ouvrir la porte au bien-
être animal, sa prise de position inattendue a permis au droit international public de faire un
grand pas en avant. En effet, cette question fait désormais l'objet d'une considération sérieuse.
Selon le rapport du groupe spécial, il s'agit même d'une valeur ou d'un intérêt important à
prendre en compte. Le bien-être animal n'est donc plus une considération secondaire ou
seulement incidente en droit international. Au contraire, cette problématique est en pleine
émergence sur la scène mondiale.
À l'image de la protection environnementale il y a quelques années, la protection du bien-être
animal fait ainsi son entrée dans les discussions internationales. Il semble même que, malgré
son caractère politiquement sensible, ce sujet ne puisse plus être totalement ignoré des
grandes instances qui dirigent le monde. En droit international public, le tournant favorable à
1402 Voir à ce sujet BRELS, S., "Chasse aux phoques à l'OMC : Bien être animal et moralité publique en débat",
Derecho animal, juin 2013, en ligne: www.derechoanimal.info/images/pdf/SBrels-Chasse-aux-phoques-fra.pdf (date
d'accès: 10 février 2014).
244
la protection animale a été opéré depuis le début du troisième millénaire, tout d'abord à travers
les normes de l'OIE, puis par les décisions pionnières de l'OMC (sur les phoques) et de la CIJ
(sur les baleines) rendues en 2013 et 2014. En plus d'être basé sur des faits scientifiques
secondés par l'éthique, le droit général et le droit international en viennent progressivement à
déduire les implications juridiques de ces connaissances. Il s'agit notamment de reconnaître le
caractère vivant et sensible des animaux, ainsi que de dégager des principes de conduite qui
s'imposent aux êtres humains comme aux États, tels qu'ils seront développés par la suite.
245
Titre 2
LA CONSÉCRATION LATENTE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL EN DROIT UNIVERSEL
De l'universalité des principes généraux à l’adoption d’une convention globale1403
Comme en témoignent les développements précédents, l'idée qu'il convient de protéger le
bien-être animal est endossée à tous les niveaux juridiques. Récemment consacré au niveau
international, le bien-être animal est désormais en train de poindre au niveau universel.
Dans quelle mesure la protection du bien-être animal pourrait être universellement consacrée
en droit international ? Cette question rejoint notre problématique principale sur les
possibilités de remédier à une lacune du droit international, à savoir l'absence de protection
globale du bien-être animal.
Les éléments de réponse à cette question seront envisagés principalement par le prisme des
sources formelles du droit international, ainsi que de ses nouveaux modes de construction.
D'après Kelsen, les sources du droit international permettent non seulement de créer le droit
international, mais aussi d'asseoir la validité de ses normes1404.
La théorie des sources formelles du droit international est issue de l'Article 38-1 du Statut de
la Cour internationale de Justice (CIJ). En vertu de celui-ci, il existe 3 sources principales et 2
sources subsidiaires permettant de construire le droit international. Les 3 sources principales
sont : les conventions, la coutume et les principes généraux de droit. Les 2 sources
subsidiaires sont : la jurisprudence et la doctrine faisant autorité en droit international.
Les deux sources principales retenues pour leur pertinence sont les principes généraux de
droit et les conventions internationales1405.
Pourquoi ces deux sources ? D'abord, parce que la théorie des principes généraux de droit
permet de dégager l'existence de principes juridiques à valeur universelle, lorsque ceux-ci
sont largement partagés dans les droits internes à travers le monde. Ensuite, parce que
1403 Ce titre a été rédigé sur la base des ouvrages généraux sur le droit international qui figurent en bibliographie. 1404 KELSEN, H., Principles of International Law, Rinehart & Company, 1952, p. 303. 1405 Malgré son importance, la coutume internationale ne retiendra pas autant notre attention que les deux autres
sources identifiées comme les plus pertinentes aux fins de cette étude. En effet, la coutume est définie comme un usage
(ou droit non-écrit) alors que le droit du bien-être animal appartient déjà au droit positif en ce qu'il relève d'un large
corpus de textes écrits (nombreuses législations évoquées). De plus, cette protection est apparue récemment sur la
scène internationale, soit depuis le début des années 2000, alors que la coutume suppose un usage répété dans le temps.
Relevons toutefois que certaines pratiques déjà observables, comme l’utilisation répétée des restrictions commerciales
en vue de protéger le bien-être animal (voir supra la section sur l'OMC), pourraient éventuellement acquérir une valeur
coutumière à l’avenir. Reste à voir si ces pratiques interétatiques seraient propres à faire ressortir des règles
coutumières.
246
l'adoption d'une convention globale apparaît aujourd'hui comme une voie privilégiée en vue
de la concrétisation d'une protection universelle du bien-être animal en droit international.
Nous verrons ainsi que la voie des principes généraux constitue une source fondamentale du
droit international. En ce sens, ils permettent de mettre en lumière des principes communs,
pouvant constituer les fondements solides d'une protection universelle du bien-être animal.
Quant à la voie conventionnelle, ou l'adoption d'une convention globale sur le bien-être
animal, il s'agit d'une source principale de construction du droit international positif, pouvant
permettre de poser les bases générales d'une protection universelle du bien-être animal.
Suivant cette argumentation, nous établirons que le droit du bien-être animal est sous-tendu
par des principes généraux à valeur universelle (Chapitre 1). Leur reconnaissance par la
communauté des États pourrait passer par l'adoption d'une convention comme instrument
privilégié de protection universelle du bien-être animal en droit international (Chapitre 2).
247
CHAP.1- L'UNIVERSALITÉ DES PRINCIPES GÉNÉRAUX
DU DROIT DU BIEN-ÊTRE ANIMAL1406
Tout en offrant un panorama global de l'état du droit du bien-être animal dans le monde, les
développements précédents nous ont permis de dégager l'existence d'un fonds juridique
commun1407. En effet, malgré de nombreuses divergences entre les pays et groupes de pays
étudiés (des plus protecteurs au moins protecteurs), tous les grands systèmes juridiques sont
basés sur les mêmes principes généraux.
Quels sont ces principes ? Et dans quelle mesure peut-on conclure à leur universalité ?
Le terme de "principe" est synonyme de commencement. Les principes identifiés concernent
ainsi les principes fondateurs, ou ceux qui sont aux fondements mêmes du droit du bien-être
animal. L'usage de "la raison intuitive procédant par induction"1408 a permis de dégager ces
principes de l'ensemble des prescriptions constituant le corps des règles présentées en amont.
Les deux grands principes identifiés concernent les principes de conduite qui sous-tendent
l'ensemble des prescriptions du droit du bien-être animal, à savoir les principes de non-cruauté
et de bientraitance envers les animaux.
Afin d'envisager leur caractère universel, nous ferons appel à la théorie des principes
généraux de droit en droit international. Alors que ceux-ci concernent généralement
l'administration de la justice internationale (ex : principe d'autorité de la chose jugée (res
judicata), bonne foi etc.), les principes généraux du droit du bien-être animal concernent les
1406 Les ouvrages et articles de référence à ce sujet sont les suivants : BROWNLIE, I., Principles of Public
International Law, Oxford University Press, 4th ed., 1990 ; CUNIBERTI, G., Grands systèmes de droit contemporains,
LGDJ-Lextenso éd., 2011 ; KELSEN, H., Principles of International Law, Rinehart & Company, 1952 ; PELLET, A.,
Recherches sur les principes généraux de droit en droit international, Thèse de doctorat, Paris, 1974 ; ROEMER,
W.F., Ethical basis of International Law, The Lawbook Exchange Ltd., 2007 ; FRIEDMANN, W., "The Uses of
"General Principles" in the Development of International Law", The American Journal of International Law, Vol. 57,
No. 2, pp. 279-299, 1963 ; PELLET, A., "Article 38" dans ZIMMERMANN, A. TOMUSCHAT, C. et K. OELLERS-
FRAHM, The Statute of the International Court of Justice, A commentary, Oxford University Press, 2006, pp. 677-
792 ; PROTIERE, G., "Les principes généraux dans la jurisprudence internationale : éléments d’une différenciation
fonctionnelle", Revue du Droit Public et de la Science Politique en France et à l’Etranger, p.259-292, 2008 ; RAZ, J.,
"Legal Principles and the Limits of Law", Yale Law Journal, 81:5, pp.823-854 ; SCHLESINGER, R.B. et P.
BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un nouveau projet de recherches", Revue
internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, 1963, pp. 501-540 ; VIRALLY, M., "Le rôle des "principes" dans le
développement du droit international", Le droit international en devenir: essais écrits au fil des ans, PUF, 1990,
pp.195-212. 1407 Sur cette notion, voir SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques.
Observations sur un nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540,
1963. 1408 Voir la définition des "Principes" selon Patrick Morvant dans ALLAND, D. et S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la
culture juridique, PUF, 2003, p.1201.
248
principes fondamentaux à l’origine de ce droit1409. Sans avoir la même fonction, nous verrons
que la théorie qui sous-tend les principes généraux de droit est pertinente pour assoir la valeur
juridique universelle des principes généraux du droit du bien-être animal.
Dans ce chapitre, nous établirons ainsi la nature principielle et le caractère général des
principes de non-cruauté et de bientraitance (S.1), avant d'envisager leur valeur universelle, à
la lumière de la théorie des principes généraux de droit (PGD) en droit international (S.2).
S.1- L'identification des principes généraux du droit du bien-être animal
Les premiers chapitres de cette étude nous ont permis de dresser un panorama global de l'état
du droit général sur la protection du bien-être animal. En appliquant une méthodologie
comparative, nous avons pu en extraire deux grands principes qui sous-tendent l'ensemble des
prescriptions du droit du bien-être animal. Tel que nous les avons identifiés, ces piliers du
droit du bien-être animal sont les principes de non-cruauté et de bientraitance envers les
animaux.
Dans quelle mesure peut-on les qualifier de principes généraux ? Afin d'y répondre, voyons
dans quelle mesure ils peuvent être qualifiés de principes au sens juridique (§1), avant
d'établir leur caractère général (§2).
§1- Non-cruauté et bientraitance définis comme principes juridiques
La nature principielle des principes de non-cruauté et bientraitance (A) est induite de leur
définition pouvant être dégagée du fonds commun du droit du bien-être animal (B).
A- Non-cruauté et bientraitance envers les animaux comme principes de conduite
Les principes de non-cruauté et de bientraitance, en tant qu'interdiction de cruauté et devoir de
bien traiter les animaux, sont les principales règles de conduite humaines au double sens du
terme (des humains et d’humanité), envers les animaux.
Selon la définition-même des "principes" en droit international, non-cruauté et bientraitance
constituent des principes internationalement valables. En ce sens :
- Le principe de non-cruauté est à l’origine du droit du bien-être animal en tant que "cause ou
source première des règles"1410.
1409 Notons que toutes les branches du droit ont leurs propres principes généraux. Par exemple, parmi les principes
généraux du droit communautaire citons par exemple les principes de non-discrimination et d'égalité de traitement (en
fonction de la nationalité). TRIDIMAS, T., The general principles of EU law, Oxford University Press, 2006. 1410 SALMON, J., Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001, p.876.
249
- Le principe de bientraitance constitue l’esprit général du droit du bien-être animal comme :
« Proposition de portée générale, présentée sous une forme ramassée et
synthétique, exprimant une norme juridique d'une importance particulière et
susceptible de servir de fondement à des règles de droit »1411.
Présent depuis les premières lois anti-cruauté, le principe initial de non-cruauté peut être
qualifié d'axiome de base du droit du bien-être animal1412. Quant au principe de bientraitance,
celui-ci revêt plutôt un caractère englobant en tant qu'il sous-tend l'ensemble des prescriptions
du droit du bien-être animal.
Tels qu'identifiés, les principes de non-cruauté et de bientraitance renvoient à la fonction du
droit formulée par Kelsen. Il affirme en effet que le droit, en tant qu'ordre social, consiste à :
« induire les hommes à s'abstenir de certains actes qui, pour une raison ou une
autre sont nuisibles à la société, et à effectuer d'autres qui, pour une raison ou une
autre sont considérés comme utiles à la société »1413.
En tant qu'interdiction de cruauté, le principe de non-cruauté renvoie à la première catégorie
en tant qu'actions visant le bien-être animal et le principe de bientraitance à la seconde.
Ceux-ci peuvent être qualifiés de principes de conduite juridiques. En effet, ils dictent des
règles de conduite, à savoir des actions négatives à refreiner (non-cruauté), ainsi que des
actions positives à accomplir (bientraitance) de la part des personnes qui interagissent, ou sont
amenées à interagir avec les animaux.
B- Définition des principes de non-cruauté et de bientraitance
Il n'existe pas de définitions généralement acceptées des principes de non-cruauté et de
bientraitance en tant que principes mis en lumière par cette étude. Étymologiquement, la
cruauté vient du latin crudelis ("qui aime le sang"). Quant à la notion de bientraitance, il s'agit
d'un néologisme de plus en plus usité au sujet du bien-être animal.
1411 Id., p.876-877. 1412 Sur la notion de principes entendus comme axiomes fondateurs de la science du droit comme édifice rationnel, voir
les "Principes" définis par Patrick Morvant dans ALLAND, D. et S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique,
PUF, 2003, p.1201. 1413 KELSEN, H., Principles of International Law, Rinehart & Company, 1952, p. 3 : "induce men to refrain from
certain acts which for one reason or another are deemed detrimental to the society, and to perform others which for one
reason or another are regarded as useful to society" (traduction libre).
250
Ces principes seront définis à la lumière des éléments pertinents du droit du bien-être animal.
Dans une perspective extensive, le principe de non-cruauté peut être défini comme
l'interdiction générale de faire souffrir les animaux (1) et le principe de bientraitance comme
l'ensemble des actions visant à assurer le bien-être des animaux (2).
1- Le principe de non-cruauté comme interdiction générale de faire souffrir les animaux
Comme l'expression l'indique, le principe de non-cruauté consiste à interdire la cruauté envers
les animaux. Au sens strict, son acception est limitée à l'interdiction de causer
intentionnellement des souffrances inutiles ou excessives. Au sens large, son acception s'étend
à l'interdiction générale de maltraiter les animaux. Présentons chacune de ces acceptions.
Au sens strict, les infractions de cruauté intentionnelles peuvent être qualifiées de "malum in
se" (du latin "mauvais en soi"), en ce qu'elles relèvent d'un esprit criminel à travers la
présence de "mens rea" (intention coupable) et du caractère gratuit des souffrances infligées.
Généralement cité en référence, Ascione définit la cruauté envers les animaux comme un :
« comportement socialement inacceptable qui cause intentionnellement de la
douleur, souffrance, détresse et/ou la mort inutiles d'un animal »1414.
(Soulignés par nous)1415.
De même, l'intention et le caractère inutile des souffrances infligées constituent généralement
le double critère constitutif des infractions de cruauté au sens strict. Ce double critère est
présent dans l'ensemble des législations et décisions jurisprudentielles à travers le monde1416.
Par exemple au Canada, la première section du Code criminel concernant la cruauté envers les
animaux interdit le fait de "faire souffrir inutilement un animal", l'Art.445.1(1) en ces termes :
« Commet une infraction quiconque, selon le cas [...] volontairement cause ou, s’il
en est le propriétaire, volontairement permet que soit causées à un animal [...] une
douleur, souffrance ou blessure, sans nécessité »1417.
1414 ASCIONE, F.R., "The Abuse of Animals and Humane Interpersonal Violence: Making the Connection", dans
ASCIONE, F.R. et P. ARKOW, Child Abuse, Domestic Violence, and Animal Abuse, Purdue Research Foundation,
1999, p.51 (traduction libre). 1415 En plus du double caractère intentionnel et inutile des souffrances, Brown englobe les humains et les animaux dans
la communauté des victimes de cruauté qu'il définit comme : "[T]oute souffrance inutile sciemment infligée sur un être
sensible (animal ou humain)" (soulignés par nous). BROWN (1988), cité dans GULLONE, E., Animal Cruelty,
Antisocial Behaviour, and Aggression: More Than a Link, Palgrave Mac Millan, Animal Ethics Series, 2012, p.11
(traduction libre). 1416 Par exemple, la loi de Papouasie Nouvelle-Guinée de 1952 précise que la cruauté est "l'infliction intentionnelle ou
délibérée de douleur à un animal" de manière "déraisonnable, injustifiée ou malicieuse". Aux États-Unis, le "Animal
Welfare Act" de 1966 ne précise aucune définition de la cruauté envers les animaux, mais les lois de chaque Etat ont
leur propre définition. En Louisiane par exemple, un acte cruel désigne au sens large "tout acte ou omission où une
douleur physique ou une souffrance injustifiable est causée ou autorisée. Voir l'Annexe I.
251
A contrario, les souffrances jugées utiles ou nécessaires ne sont pas condamnées par le droit.
Dès 1889 en Angleterre, le cas Ford v. Wiley sur la cruauté envers les animaux précise ainsi :
« la cruauté n'est pas illégale si elle est "raisonnablement nécessaire »1418.
Par la suite, nombre de décisions jurisprudentielles se sont inscrites dans cette continuité.
Citons notamment l'Arrêt "Ménard" de 1978 au Canada, précisant que les souffrances inutiles
concernent généralement les souffrances qui auraient pu être raisonnablement évitées1419.
Notons l'importance de ces termes sachant que, de nos jours, nombre de souffrances peuvent
être considérées comme raisonnablement évitables du point de vue éthique1420. En effet, les
méthodes alternatives à l'utilisation des animaux se développent, y compris dans le cadre de
l'expérimentation1421. Il en va de même des produits de substitution aux produits animaux,
notamment en matière alimentaire, vestimentaire et médicinale1422.
Relevons que le caractère non-nécessaire ou inutile des souffrances est déterminé au cas par
cas par les tribunaux, tant en vertu des circonstances que des moyens disponibles pour éviter
raisonnablement ces souffrances1423. Il ressort généralement des décisions que très peu
d'actions sont considérées prima facie comme cruelles. Au contraire, la cruauté est déterminée
en considérant notamment si les actions en cause ont été menées dans un "but légitime" ou
non1424. De nos jours, cette légitimité est souvent jugée à l'aune des pratiques socialement
acceptées, plutôt que de leur caractère objectivement évitable (par le recours à des produits de
substitution ou des méthodes alternatives sans-cruauté ou non génératrices de souffrances
pour les animaux).
Quant à l'intention coupable (ou mens rea) qui constitue le deuxième critère de cruauté au
sens strict, celle-ci est condamnée par l'ensemble des législations à travers le monde. En effet,
les développements précédents nous ont permis d'extraire le seuil commun selon lequel :
1417 Art.445.1 (1) du Code criminel (souligné par nous). 1418 Ford v. Wiley (1889) 23 QBD, p. 203 : "cruelty is not unlawful if it is "reasonably necessary"" (traduction libre),
voir DALE, A., "Animal Welfare Codes and regulations - The devil in Disguise ?", dans SANKOFF, P. J. et S. W.
WHITE, Animal Law in Australia : A New Dialogue, The Federation Press, 2009, p.174. 1419 R. c. Ménard [1978], 43 C.C.C. (2d) 458 (C.A. Qué.). 1420 Voir notamment les publications du professeur Gary L. Francione, en particulier : FRANCIONE, G. L., Animals as
persons : essays on the abolition of animal exploitation, Columbia University Press, 2008. 1421 Il s'agit notamment des méthodes "in vivo" sur des cellules souches et "in silico" par le biais de logiciels
informatiques. 1422 Il s'agit notamment des protéines végétales (à la place des protéines animales) dans le contexte alimentaire, des
vêtements synthétiques (pour remplacer la fourrure ou le cuir issus d'animaux) et des médicaments de synthèse ou à
base de plantes dans le contexte médicinal (pour remplacer les produits issus d'animaux). 1423 Voir notamment la décision R. v. D.L. [1999] A.J. No. 539 (c. prov. Alb.), § 30. 1424 Voir PEARSON, S. J., The Rights of the Defenseless, University of Chicago Press, 2011, p.80.
252
la cruauté délibérée, visant à faire souffrir pour faire souffrir en dehors de tout autre motif, est
universellement condamnée pour son caractère sadique et contraire à la moralité publique1425.
Dans le cadre des infractions de cruauté intentionnelle, précisons que la plupart des pays
exigent des preuves à charge, c'est-à-dire que les défenseurs des animaux doivent prouver
l'intention cruelle de l'auteur de commettre l'infraction. Or, la Nouvelle-Zélande a opéré une
avancée majeure en renversant le fardeau de la preuve en faveur des victimes animales1426.
Depuis l'entrée en vigueur de sa nouvelle loi en 2000, c'est en effet à l'auteur de démontrer
qu'il n'avait pas l'intention d'agir contrairement aux lois protectrices des animaux1427.
À la différence, dans son acception la plus large, la cruauté concerne l'ensemble des mauvais
traitements envers les animaux. Contrairement aux précédentes infractions "malum in se"
communément condamnées, ces infractions peuvent être ainsi qualifiées de "malum
prohibitum" (mauvaises parce qu'interdites).
En ce sens, les dispositions interdisant les mauvais traitements sont généralement énoncées
dans les lois visant à interdire la cruauté, ou dans les nouvelles législations plus complètes,
dans la (ou les) section(s) sur la cruauté envers les animaux. Par exemple, le Code criminel
canadien inclut parmi les infractions de cruauté envers les animaux l' "omission d’accorder des
soins raisonnables" ainsi que la négligence volontaire1428. Cette illustration reflète l'état du
droit actuel sachant que la plupart des lois anti-cruauté qui protègent les animaux répriment
tant les infractions intentionnelles que non-intentionnelles, et tant les commissions que les
omissions.
En règle générale, l'interdiction des mauvais traitements tombe ainsi sous le coup des
prescriptions interdisant la cruauté envers les animaux. C'est pourquoi le principe de non-
cruauté peut être entendu au sens large comme l'interdiction générale de maltraitance, soit le
fait de causer ou permettre que soient causées des souffrances aux animaux, par action ou par
omission, volontaire ou non (dans le cas des négligences involontaires par exemple).
1425 Comme nous l'avons vu au Titre I de cette étude, l'idée de protéger la moralité publique, avant de protéger les
animaux pour eux-mêmes, se reflète nettement des premières lois anti-cruauté adoptées dans les pays européens au
milieu du XIXe siècle contre la cruauté publique envers les animaux. 1426 Animal Welfare Act, 1999, Art. 13(1) et 30(1) : "In a prosecution for an offence [...], it is not necessary for the
prosecution to prove that the defendant intended to commit an offence". 1427 Voir les nouvelles lois des pays anglo-saxons dans le Titre I. 1428 Respectivement les articles 445.3 et 446 du Code criminel canadien.
253
2- Le principe de bientraitance comme ensemble des actions visant le bien-être animal
Opposée à la maltraitance, la bientraitance désigne le fait de bien traiter des individus1429.
Au départ formulé comme principe de conduite envers les êtres humains, notamment pour les
très jeunes enfants et les personnes âgées, ce néologisme est désormais employé pour les
animaux qui sont également dans une situation de dépendance et de vulnérabilité1430.
Le rapport français sur l’utilisation du néologisme "bientraitance" à propos de la protection
des animaux définit cette notion comme "l’ensemble des actions en faveur du bien-être des
animaux"1431. Cette acception a été entérinée par les normes de l'OIE sur le bien-être
animal1432. Une Résolution de l'OIE adoptée en 2007 insiste sur celle-ci en ces termes :
« après en avoir vérifié les fondements scientifiques, le Comité international a adopté
des normes internationales sur le bien-être animal qui reconnaissent la nécessité de la
"bientraitance" des animaux en tant qu’êtres sensibles »1433.
En tant que principe de conduite visant le bien-être animal, la notion de bientraitance est
constituée par un ensemble d'actions positives, au-delà de la non-cruauté ou non-maltraitance
envers les animaux. En d'autres termes, il ne s'agit pas seulement de ne pas maltraiter les
animaux pour les bien traiter. En effet, il convient aussi d'entreprendre toutes les mesures
permettant d'aller dans le sens de la satisfaction de leur bien-être.
En référence à Bentham et Ross, la maltraitance constitue une obligation négative, alors que
la bientraitance constitue une obligation positive1434. En ce sens, la première est une
obligation de ne pas faire (ou interdiction de faire), à savoir maltraiter les animaux ; alors que
la seconde est une obligation de faire, à savoir bien traiter les animaux. Si les interdictions de
maltraitance sont généralement assujetties à des sanctions pénales (précédemment
envisagées), les manquements aux obligations de bientraitance sont moins souvent
condamnés, sauf dans les cas de certaines négligences. Citons les cas d'omission de nourrir ou
1429 Plus particulièrement, il s'agit de toute mesure active permettant d'assurer une qualité de vie optimale aux
individus. FALAISE, M., "Droit animalier : Quelle place pour le bien-être animal ?", RSDA, Vol.2, 2010, p.14. 1430 Id. 1431 Voir MILHAUD, C. (coord.), Rapport sur l’utilisation du néologisme "bientraitance" à propos de la protection
des animaux, Académie Vétérinaire de France, Commission chargée de la réflexion sur les relations entre l’Homme et
les Animaux, 21 juin 2007. Il précise: "La bientraitance des animaux [...] constitue, pour une société donnée en la
formalisation, morale ou réglementaire, d’une volonté visant à satisfaire les besoins physiologiques et
comportementaux propres à chaque espèce et à chacun de leurs milieux de vie, dans le but d’atteindre, chez l’animal,
au-delà de l’état d’adaptation, un état imaginé comme comparable à l’état de bien-être chez l’homme." 1432 Code terrestre de l'OIE, Chapitre 7.1. relatif à l’introduction sur les recommandations relatives au bien-être
animal. La bientraitance réfère au traitement que l’animal reçoit afin d'atteindre l'objectif de bien-être animal. 1433 OIE, "Déclaration universelle sur la bientraitance animale", Résolution n° XIV, 25 mai 2007, en ligne :
http://www.oie.int/doc/ged/D4081.PDF (date d'accès : 18.01.13). 1434 Voir BEAUCHAMP, T.L. et J.F. CHILDRESS, Principles of Biomedical Ethics, Oxford University Press, 5th ed.,
2001, p.167.
254
soigner un animal sous sa garde. Relevons ici que les actes de négligence se situent, selon leur
degré de gravité, à la frontière entre la cruauté involontaire et le défaut de bientraitance.
Le principe de bientraitance envers les animaux va plus loin. En effet, celui-ci fut évoqué par
des penseurs comme St-François d'Assise (fin XIIe-début XIIIe siècle) en ces termes :
« Ne pas blesser nos humbles frères les animaux est notre premier devoir envers
eux, mais cela ne suffit pas. Nous avons une mission plus grande : les aider
chaque fois qu’ils en ont besoin »1435.
Certaines législations viennent désormais réprimer la non-assistance aux animaux en danger.
Ainsi en va-t-il au Canada, dans les lois de 2000 en Alberta1436 et de 1996 en Colombie-
Britannique qui ajoute l'obligation de rapporter la détresse d'un animal par les vétérinaires1437.
Le principe de bientraitance est intimement lié au devoir de respecter tout être vivant.
Tel que nous l'avons précisé en introduction générale, toutes les cultures, philosophies et
religions à travers le monde s'accordent sur le principe de respect du vivant (pensée
occidentale et asiatique, christianisme, bouddhisme, judaïsme, islam, hindouisme et même
shintoïsme). En effet, toutes se rejoignent sur le précepte selon lequel : tout individu, humain
ou animal, mérite d'être respecté et bien traité1438. Il s'agit là d'un impératif moral universel.
À ce titre, le principe de bientraitance et de respect des animaux pourrait se voir reconnaître le
statut de principe éthique universel, ou "principe universel fondé sur des valeurs éthiques
communes" en droit international, comme ceux de la déclaration sur la bioéthique de 20051439.
§2- Le caractère général des principes de non-cruauté et bientraitance
Un principe général est une "proposition générale induite de règles particulières"1440.
En l'espèce, nous avons ainsi utilisé un processus d'induction1441 afin de dégager les principes
de non-cruauté et de bientraitance des règles du fonds commun du droit du bien-être
1435 Voir WARNER, K.W., "Conversations", Franciscan Sisters of the Poor, April 2011, vol.3, n°1, p.2. 1436 Animal Protection Act, Revised Statutes of Alberta 2000, Chapter A-41, Art.3.1. 1437 Prevention of Cruelty to Animals Act [RSBC 1996], Chapter 372, Art.11 (Relieving distress in animals) ; Art.12
(Relieving critical distress in animals) ; Art. 22.1 ("Duty to report distress"). L'article Art. 1 (2) définit largement un
animal en détresse comme : Un animal en détresse est largement défini comme étant "un animal privé de nourriture,
d'eau, de logement, de ventilation, de lumière, d'espace, d'exercice, de soins ou de traitements vétérinaires appropriés ;
conservé dans des conditions insalubres, ni protégé de la chaleur excessive ou du froid ; blessé, malade, éprouvant de
la douleur ou de la souffrance ; maltraité ou négligé" 1438 Voir la section sur "La position des religions" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de
l’Europe, 2006, pp. 149-182. 1439 Déclaration universelle sur le bioéthique et les droits de l'homme, UNESCO, 19 octobre 2005, Préamb., al.10. 1440 Voir ALLAND, D. et S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p.1203. 1441 Ce processus d'induction des principes incarnerait l'esprit du droit. Id., p.1204.
255
animal1442. Nous verrons tout d'abord dans quelle mesure ces principes généraux sont issus et
créateurs de normes plus précises (A), avant d'envisager la généralité (ou manifestation
généralisée) de chacun des principes de bientraitance et de non-cruauté (B).
A- Des principes généraux issus et créateurs de normes plus précises
« Qu'est ce donc qu'un principe général ? C'est une règle générale et importante
qui en commande d'autres »1443.
Si le principe de non-cruauté procède de l'interdiction générale de cruauté envers les animaux,
le principe de bientraitance procède de l'obligation générale de bien traiter les animaux.
En plus d'être dégagés de l'ensemble des règles qui constituent actuellement le droit du bien-
être animal (1), ces principes peuvent également générer des règles plus précises (2).
1- Des principes issus de normes plus précises sur le bien-être animal
Sans reprendre l'ensemble des prescriptions énumérées dans les développements précédents,
reprenons les principales catégories de règles dont résultent les principes de non-cruauté et
bientraitance.
D'une part, le principe de non-cruauté est issu des nombreuses interdictions de cruauté envers
les animaux. Rappelons les principales catégories d'interdiction de cruauté en général (par
action et omission), de mauvais traitements (volontaires et issus de négligences), de pratiques
de production spécifiques (méthodes de confinement en élevage industriel) ou encore
d'activités de production (comme l'ablation des ailerons de requins, la production du foie gras
ou les élevages d'animaux à fourrures dans certains pays), mais aussi concernant certaines
méthodes (ex: chasse et piégeage), ainsi que certaines pratiques traditionnelles (combats
d'animaux, corridas etc.) et religieuses (ex : abattages sans étourdissement préalable).
D'autre part, le principe englobant de bientraitance est issu des règles consistant à assurer le
bien-être des animaux en subvenant à leurs besoins physiologiques et comportementaux, en
plus de promouvoir généralement les obligations de soin et d'entretien des animaux sous sa
garde (le plus souvent les animaux de compagnie, domestiques et sauvages en captivité).
Les principes généraux sont aussi créateurs de normes1444. Dans les faits, les principes de non-
cruauté et bientraitance ne sont pas formellement reconnus comme principes généraux
1442 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963. 1443 G. Ripert cité dans SALMON, J., Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001, p.877 sur la définition
de "principe" en droit international.
256
pouvant constituer le terreau fertile de nouvelles règles générales. Pourtant, leur
reconnaissance formelle pourrait permettre d'établir une base commune vers l'adoption de
nouvelles règles contraignantes sur la non-cruauté et la bientraitance envers les animaux.
Ainsi, le principe de non-cruauté pourrait servir d'assise juridique solide pour l'adoption de
nouvelles interdictions de cruauté envers les animaux, comme le principe de bientraitance
permettrait d'assoir le caractère obligatoire de nouvelles règles visant le bien-être animal.
1- Des principes créateurs de normes plus précises sur le bien-être animal
Non seulement larges, ces principes extensifs présentent l'intérêt fondamental de pouvoir
générer de nouvelles règles allant toujours plus loin que les précédentes. Ainsi, le principe de
non-cruauté peut servir de base afin de formuler des interdictions de nouvelles pratiques
condamnable pour leur cruauté, puisqu'elles génèrent des souffrances évitables aux animaux.
Le principe de bientraitance pourrait aussi permettre de formuler de nouvelles obligations afin
de renforcer le respect des besoins et généralement le bien-être des animaux.
Ainsi, les principes de non-cruauté et de bientraitance ressortent de l'ensemble des
prescriptions du droit du bien-être animal. Alors que le principe de non-cruauté englobe toutes
les interdictions de maltraitance, le principe de bientraitance englobe toutes les obligations
visant le bien-être animal. Ces principes se manifestent à tous les niveaux législatifs.
B- La généralité du principe de non-cruauté et du principe de bientraitance
À l'appui des développements précédents, il convient tout d'abord de préciser que les grands
principes identifiés sont présents à tous les niveaux mais dans des mesures différentes.
En effet, le principe de non-cruauté est surtout présent au niveau national dans l'ensemble des
lois adoptées depuis le XIXe siècle par de nombreux pays à travers le monde.
Quant au principe de bientraitance, celui-ci ressort des législations pro-bien-être adoptés au
niveau national par certains pays, mais aussi au niveau supranational dans les instruments pro-
bien-être adoptés par les instances européennes et les normes internationales de l'OIE.
Rappelons brièvement les occurrences de ces principes, d'abord pour le principe de
non-cruauté (1), puis pour le principe de bientraitance (2).
1444 VOIGT, C., Sustainable Development as a Principle of International Law: Resolving Conflicts between Climate
Measures and WTO Law, BRILL, 2009, p.166, en référence à la décision ICJ, North Sea Continental Shelf cases,
Reports 1969, p.74.
257
1- La généralité du principe de non-cruauté
Omniprésent au niveau national (a), le principe de non-cruauté se retrouve ponctuellement au
niveau supranational (b).
a) Le principe de non-cruauté dans les législations nationales
Au niveau national, il s'agit d'un principe législatif initial dans les pays du monde entier.
Le principe de non-cruauté ressort en effet de l'ensemble des législations anti-cruauté. Dans
leurs titres et leurs objectifs, les lois ou articles de codes visent explicitement à prévenir et à
lutter contre les actes de cruauté envers les animaux1445.
Ce principe constitue toujours la base fondamentale de l'ensemble des législations protectrices
du bien-être animal, y compris des nouvelles lois qui insistent plus sur la bientraitance.
Par exemple, la base anti-cruauté (depuis la loi de 1835 en Angleterre) est aujourd'hui
contenue aux articles 4 à 8 de la nouvelle loi de 2006 sur le bien-être animal, sous le titre
"Prevention of harm"1446. En matière de bientraitance, celle-ci prévoit une série d'obligations
comme le devoir, pour toute personne responsable d'un animal, d'en assurer le bien-être1447.
Rappelons que le principe de non-cruauté est également érigé au constitutionnel au Brésil,
sachant que l'Art.225 (§1) de la Constitution brésilienne de 19881448 interdit généralement les
actes de cruauté envers toutes les catégories d'animaux1449.
b) Le principe de non-cruauté dans les instruments supranationaux
Au niveau supranational, le principe de non-cruauté transparaît essentiellement des accords de
piégeage sans cruauté. Tel que nous l'avons vu précédemment, le premier instrument adopté
contre les méthodes de piégeage cruelles, en particulier les pièges à mâchoire, fut le règlement
communautaire de 19911450. Cette initiative a été suivie par l'Accord sur les normes
internationales de piégeage sans cruauté (ANIPSC) passé en 1997 entre l'UE, le Canada et la
1445 Voir le premier Titre et l'Annexe I. 1446 En effet, on y retrouve les mêmes interdictions de base que dans la loi anti-cruauté de 1835 à savoir celles de
causer des souffrances inutiles ("Unnecessary suffering") et les combats d'animaux ("Fighting"), entre autres. Voir
respectivement les articles 4 et 8 du Animal Welfare Act, C.45, 2006. 1447 Id., Art. 9 : "Duty of person responsible for animal to ensure welfare". 1448 Constitution brésilienne de 1988, Art.225, §1. Il y est mentionné que le le gouvernement doit : "protéger la faune et
la flore, en interdisant, de la manière prescrite par la loi, toutes les pratiques qui [...] soumettent les animaux à de la
cruauté" (traduction libre). 1449 CLAYTON, L.A., "Overview of Brazil's Legal Structure for Animal Issues", Animal Legal & Historical Center,
Michigan State University College of Law, 2003, Partie "II. Brazil Federal Constitution": "This last phrase gives
authority to the State to deal with cruelty issues involving any category of animal" (souligné par nous). 1450 Règlement n° 3254/91 du Conseil du 4 novembre 1991 interdisant l'utilisation des pièges à mâchoire dans la
Communauté et l'introduction dans la Communauté de fourrures et de produits manufacturés de certaines espèces
animales sauvages originaires des pays qui utilisent pour leur capture le piège à mâchoire ou de méthodes non-
conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté, J.O. L 308 du 09.11.1991.
258
Russie1451, ainsi que par un accord conclu entre l'UE et les États-Unis en 19981452.
Puis en 1999, l’Organisation internationale de normalisation (ISO) a adopté une série de
normes sur les méthodes de piégeage sans cruauté pour les mammifères1453.
Rappelons que l'UE a également condamné explicitement la cruauté envers les animaux dans
d'autres instruments, comme dans son règlement d'interdiction des produits du phoque de
2009, qui vise à : "interdire toutes les méthodes de chasse cruelles ne garantissant pas une
mort instantanée, sans souffrances, des animaux"1454.
Le principe de non-cruauté ressort également de certains textes internationaux comme la
CITES, où des dispositions prévoient d'éviter les "traitements rigoureux"1455 aux animaux
vivants, qualifiés plus explicitement de "traitements cruels" ("cruel treatment") en anglais1456.
Dans les normes de l'OIE, la définition du bien-être animal précise qu'elle implique des
"manipulations réalisées sans cruauté"1457. Notons que cette formulation rappelle la
prescription européenne selon laquelle les animaux doivent être traités avec ménagement, en
particulier dans le cadre de leur transport et de leur abattage.
Rappelons également que le texte de la Charte de la Terre prévoit d'"Empêcher la cruauté
envers les animaux domestiques et d’élevage, et atténuer leurs souffrances"1458.
Enfin, le principe de non-cruauté est présent dans le texte provisionnel de la DUBEA.
Dans sa dernière version de 2007, son 3e principe prévoit en effet que :
« Les [États] doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la
cruauté infligée aux animaux et réduire les souffrances de ces derniers »1459.
1451 Accord sur des normes internationales de piégeage sans cruauté entre la Communauté européenne, le Canada et
la Fédération de Russie, 1997, en ligne : http://www.canadainternational.gc.ca/eu-ue/assets/pdfs/eu28-fr.pdf
(date d'accès : 11.12.2012). 1452 Décision 98/487/CE du Conseil du 13 juillet 1998 relative à la conclusion d'un Accord international sous forme de
procès-verbal agréé entre la Communauté européenne et les États-Unis d'Amérique sur des normes de piégeage sans
cruauté, J.O. L 219 du 07/08/1998. 1453 Normes ISO sur les "Pièges pour animaux (mammifères)", dont la première partie concerne les "Méthodes d'essai
de systèmes de piégeage mortels utilisés sur la terre ferme ou sous l'eau" (ISO 10990-4 :1999) et la seconde les
"Méthodes d'essai pour pièges de capture" (ISO 10990-5 :1999). 1454 Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 sur le commerce des
produits dérivés du phoque, J.O. L 286/36 du 31.10.2009, Préamb., §1. 1455 Voir les articles III.2(c), III.4(b) ; IV.2(c), IV.5(b), IV.6(b) ; V.2(b), VII.7(c) et VIII.3. 1456 Id. Voir Titre 3. 1457 Chapitre 7.1. du Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE, "Introduction sur les recommandations
relatives au bien-être animal". 1458 Charte de la terre, Principe 15. Voir la version française du texte officiel en ligne :
http://www.earthcharterinaction.org/contenu/pages/La-Charte-de-la-Terre.html (date d'accès : 26.01.13). 1459 Texte provisionnel de la Déclaration universelle pour le bien-être animal de 2007, Principe 3. Voir l'Annexe 4 ci-
après.
259
Contrairement à l'omniprésence du principe de non-cruauté dans les législations nationales, il
n'existe que peu d'occurrences de ce principe au niveau supranational. À ce sujet, relevons que
si les interdictions de cruauté envers les animaux sont pénalement sanctionnées au niveau
national, il n'existe à ce jour aucun de moyen de sanction directe au niveau supranational1460.
2- La généralité du principe de bientraitance
Les références au principe de bientraitance sont de plus en plus présentes au niveau national
(a) et de plus en plus explicites au niveau supranational (b). Il est possible de rappeler
quelques exemples en vertu des développements précédents.
a) Le principe de bientraitance dans les législations nationales
En plus d'être un principe inclusif de grands concepts constitutionnels sur la protection des
animaux, le principe de bientraitance est généralement sous-tendu par l'ensemble des
législations pro-bien-être.
En effet, plusieurs pays ont érigé de grands principes de bientraitance animale au rang
constitutionnel, à savoir : la protection des animaux en Allemagne1461 ; la protection et le
bien-être des animaux au Luxembourg1462 ; le devoir de compassion en Inde1463 et le respect
de la dignité (ou de l'intégrité) des animaux en Suisse1464. Protection, bien-être, compassion et
respect se rapportent tous au principe de bientraitance dans son acception la plus large1465.
Conformément à sa définition comme ensemble des actions visant le bien-être animal, le
principe de bientraitance est sous-tendu par l'ensemble des législations pro-bien-être. Comme
nous l'avons vu au début de cette étude, ces législations encouragent de plus en plus les actes
de bientraitance, en plus de condamner les actes de maltraitance. D'une manière étonnante,
certaines législations font explicitement référence aux notions d'amitié envers les animaux
(comme la loi japonaise qui ajoute la notion de paix1466), ainsi qu'aux notions de respect, de
considération et même d'amour des animaux (la loi mexicaine promouvant ces trois-ci1467).
1460 Notons néanmoins que les interdictions mentionnées peuvent être sanctionnées par le juge national si elles font
l'objet de lois d'application en droit interne. Notons également que la Commission européenne est amenée à
sanctionner de plus en plus les États de l'UE pour leur retard ou mauvaise application des instruments communautaires
sur le bien-être animal. Quant à l'OIE, celle-ci ne prévoit qu'un processus de médiation en cas de manquement à ses
recommandations, telles que celles adoptées dans les normes sur le bien-être animal. 1461 Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne de 1949, révision de 2002, Art.20, a). 1462 Constitution du Grand-Duché de Luxembourg de 1868 (Art. 11 bis), révision de 2007. 1463 Constitution de l'Inde de 1950 (Art. 51-A, g). 1464 Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999 (Art.120). 1465 Voir la définition de la bientraitance ci-dessus. 1466 Act on Welfare and Management of Animals (Act No. 105 of October 1, 1973), Art.1 : "The purpose of this Act is
to engender a spirit for animal welfare among citizens and contribute to the development of a respect for life and
sentiments of amity and peace by providing for the prevention of cruelty to animals, the proper handling of animals
260
Ces lois encouragent les actions bienveillantes envers les animaux. Elles mettent en avant la
notion de responsabilité des propriétaires et des personnes en charge des animaux.
Cette responsabilisation est accompagnée du devoir de soin, très présent dans les nouvelles
législations anglo-saxonnes à travers l'expression de "duty of care".
En plus de prodiguer les soins nécessaires aux animaux sous sa responsabilité (domestiques et
captifs), il convient de leur assurer tout ce dont ils peuvent avoir besoin en matière
d'alimentation, de logement, de traitement et de manipulations. Les législations les plus
protectrices prévoient aussi de satisfaire aux besoins d'activités et de sociabilité, surtout pour
les animaux de compagnie.
Indissociable de l'absence de souffrances (physiques et psychologiques) et d'un bon état de
santé général, le bien-être des animaux est également lié à la satisfaction des besoins propres à
chaque animal, physiologiques et éthologiques (ou comportementaux).
Sur la prise en compte des besoins éthologiques (ou comportementaux), citons l'exemple
Suisse. L'Ordonnance sur la protection des animaux de 2008 exige en effet de tenir compte
du besoin de vivre à plusieurs pour les espèces sociables, afin qu'elles ne souffrent pas de
solitude et d'isolement1468. Ainsi, les animaux de compagnie ayant besoin de contacts sociaux,
comme c’est le cas pour certaines espèces d'oiseaux et de rongeurs, doivent être maintenus au
moins à deux sinon en groupe1469.
La Suisse apparaît aussi comme le pays le plus protecteur des poissons de compagnie, presque
toujours oubliés des législations protectrices. Il est notamment imposé aux propriétaires des
poissons de les maintenir dans un aquarium reproduisant le cycle normal jour/nuit1470. Enfin,
il n'est plus possible d'acquérir un chien sans avoir préalablement obtenu un permis à l'issue
d'une formation spécialisée. Celle-ci vise non seulement à former le propriétaire en vue
and other matters concerning animal welfare, as well as to prevent animals from causing an infringement on the life,
body or property of humans by providing for matters concerning the management of animals". En plus de la notion
d'amitié nous avons surligné les notions de paix et de respect. Voir cette traduction anglaise officielle en ligne:
http://www.env.go.jp/en/laws/nature/act_wm_animals.pdf (date d'accès : 24.11.2014). 1467 Ley protectora de animales del Estado de México, 1997, Art. 3 : "El objeto de esta Ley se orientará a : [...] d):
"Fomentar el amor, respeto y consideración para con [los animales]". 1468 Art.13 de l'Ordonnance sur la protection des animaux, RS 455.1, 23.04.2008: "Les animaux d'espèces sociables
doivent avoir des contacts sociaux appropriés avec des congénères". 1469 Voir GOETSCHEL, A.F., "La législation comme moyen de garantir les intérêts des animaux", dans AUFFRET
VAN DER KEMP, T. et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au Droit, Yvon Blais, 2013, pp.361-
370. 1470 Voir FALAISE, M., "Regard sur quelques remarquables avancées du droit animal dans 7 nations d'Europe
(Autriche, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Luxembourg, Suède et Suisse)" dans AUFFRET VAN DER KEMP, T.
et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au Droit, Yvon Blais, 2013, p.255.
261
d'assurer le bien-être de son chien, mais aussi à des fins de sécurité publique afin que le
propriétaire soit responsable de son contrôle1471.
Bien traiter son animal, ou tout animal sous sa garde, se résumerait par le fait de s'en occuper
d'une manière responsable et de répondre à l'ensemble de ses besoins spécifiques.
Dans le Code rural français, l'obligation de respecter les besoins spécifiques de chaque animal
approprié est déduite du caractère sensible des animaux1472.
Concernant les animaux sauvages en captivité, certaines provinces canadiennes, comme le
Québec1473 et l'Ontario, prévoient l'obligation aussi de réaliser "un programme d’activités
quotidiennes qui facilite et stimule les mouvements et le comportement naturels"1474.
Certains pays sont allés beaucoup plus loin dans la considération des besoins des animaux
sauvages. Considérant comme cruel de les maintenir en cage, le Costa Rica a adopté des lois
d'interdiction des cirques en 2002, puis des zoos en 2013 en relâchant les animaux dans leur
milieu naturel1475. Espérons que l'exemple du Costa Rica montrera la voie aux autres pays du
monde, afin que le besoin de liberté des animaux sauvages soit mieux pris en compte.
Espérons aussi qu'à l'avenir d'autres besoins aussi fondamentaux que le fait de voler pour les
oiseaux, de nager pour les animaux aquatiques, ou de se mouvoir pour les animaux terrestres,
seront mieux considérés par les législations dites protectrices du bien-être animal.
Citons aussi leurs intérêts primordiaux à la vie, à la liberté et à l'intégrité, vers la consécration
de droits subjectifs dont les prémisses semblent déjà se faire sentir en faveur de certaines
espèces1476.
En plus de ses manifestations législatives et constitutionnelles, le principe de bientraitance est
un principe de plus en plus explicite au niveau supranational.
1471 Id. Il y est précisé que : "Tout nouvel acquéreur doit suivre une formation théorique d'une durée minimum de
quatre heures (dispense pour les personnes ayant déjà un chien) et une formation pratique d'une durée équivalente dans
l'année qui suit l'acquisition". 1472 Article L.214-1 du Code rural : "Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des
conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce". 1473 Voir le Règlement sur les animaux en captivité, Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune (chapitre
C-61.1, a. 55, 97 et 162). 1474 Art.4 (2) de la Loi sur la Société de protection des animaux de l’Ontario et Règlement de l'Ontario 60/09, Normes
de soins pour les animaux sauvages en captivité. 1475 Voir WILLIAMS, R., "Costa Rica set to close public zoos and release the animals back into the wild", The
Independent, 12.08.2013, en ligne : http://www.independent.co.uk/news/world/americas/costa-rica-set-to-close-public-
zoos-and-release-the-animals-back-into-the-wild-8757266.html (date d'accès : 19.11.2013). 1476 Citons les exemples récents qui mettent en avant le droit à la liberté de certaines espèces comme l'interdiction
d'exploiter les dauphins dans les parcs aquatiques en Inde et la libération d'une Orang-outang nommée Sarah qui se
trouvait au zoo de Buenos Aires en Argentine dans les deux dernières années en 2013 et 2014.
262
b) Le principe de bientraitance dans les instruments supranationaux
Au niveau européen et communautaire, les références au principe de bientraitance
transparaissent notamment des prescriptions consistant à traiter les animaux avec
ménagement, ainsi qu'à répondre à leurs besoins et à leur prodiguer les soins nécessaires.
En particulier, le fait de traiter les animaux avec ménagement concerne notamment la
manipulation des animaux en matière de transport et d'abattage. En ce sens, rappelons que les
conventions européennes sur le transport1477 et l'abattage1478 précisent que les animaux
doivent être traités avec ménagement, c'est-à-dire avec calme afin de limiter leur inquiétude et
leur agitation, ainsi que pour les protéger des douleurs, de la détresse et d'éventuelles
blessures.
Très présentes au niveau communautaire, les prescriptions de soin et de satisfaction des
besoins (physiologiques et éthologiques) des animaux ressortent notamment des deux grandes
conventions européennes sur les animaux d'élevage et les animaux de compagnie.
La première convention sur les animaux d'élevage insiste sur le fait que les besoins
physiologiques et comportementaux propres à chaque espèce doivent être satisfaits1479. Cette
obligation signifie que le logement, l’alimentation et les soins doivent être appropriés, que les
animaux doivent pouvoir se mouvoir et que les conditions ambiantes (éclairage, température,
aération, bruit etc.) ne doivent pas nuire aux animaux1480.
Quant à la seconde convention sur les animaux de compagnie, elle émet une double obligation
de responsabilité vis-à-vis de la satisfaction de leurs besoins1481. Toute personne ayant la
garde d'animaux doit ainsi assurer leur santé et leur bien-être1482, notamment en leur procurant
les installations, les soins et l'attention conformes à leurs besoins1483. Il s'agit également de
1477 Convention européenne sur la protection des animaux en transport international (révisée), (n°193), ouverte à
signature le 6/11/2003 et entrée en vigueur le 14/3/2006. L'article 14 sur le traitement des animaux prévoit que : "Les
animaux doivent être traités avec calme et ménagement afin de réduire à un minimum leur inquiétude et leur agitation,
et pour les protéger des douleurs, de la détresse et des blessures qui peuvent être évitées". 1478 Convention européenne sur la protection des animaux d'abattage (n°102) , ouverte à signature le 10/5/1979 et
entrée en vigueur le 11/6/1982. Art. 4, al. 1 : "Les animaux doivent être déchargés et acheminés avec ménagement" et
al. 3 : "Les animaux ne doivent être ni apeurés ni excités". 1479 Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages (n°87), ouverte à signature le 10/03/1976
et entrée en vigueur le 10/09/1978. Notons que ces expressions apparaissent de manière récurrente. 1480 Id., Art. 3, 4 et 5. 1481 Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie (n°123), ouverte à signature le 13/11/1987
et entrée en vigueur le 1/5/1992. 1482 Id., Art.4 (1) 1483 Id., Art.4 (2).
263
leur fournir de la nourriture convenable et de l'eau propre, en quantité suffisante et des
possibilités d'exercice adéquates1484.
Au niveau international, certaines dispositions de la CITES prévoient de traiter les animaux
avec soin1485. Pour tout animal vivant objet du commerce international, il est précisé que :
« le destinataire a les installations adéquates pour le conserver et le traiter avec soin »1486.
Le principe de bientraitance animale ressort également d'un instrument à valeur universelle, à
savoir la Charte mondiale de la Nature, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies
en 1982, évoquant que : "Toute forme de vie est unique et mérite d'être respectée [...] et [...]
l'homme doit se guider sur un code moral d'action."1487
Bien que non encore formellement adoptée, la Charte de la terre prévoit à son 15e principe
l'impératif selon lequel il faut traiter tous les êtres vivants avec respect et considération.
La proposition de Déclaration universelle pour le bien-être animal reconnaît également que :
« les animaux sont des êtres vivants, sensibles, capables de souffrir et qu'ils
méritent par conséquent respect et considération »1488.
De manière novatrice, la notion de bientraitance figure explicitement au sein des normes de
l'OIE sur le bien-être animal. Il y est précisé dès l'introduction que le "bien-être animal se
réfère à l’état de l’animal", alors que la bientraitance concerne le bon "traitement qu’un
animal reçoit"1489.
Le devoir de bientraitance peut également se voir rattaché aux impératifs de traitement décent
et de responsabilité envers les animaux. L'introduction des normes de l'OIE aborde ainsi
l'abattage et la mise à mort effectués dans des conditions décentes.
Contrairement à ce qui est avancé dans les normes de l'OIE, ce traitement décent ne peut
permettre d'assurer le bien-être des animaux. En effet, il est paradoxal de parler de bien-être
dans un contexte comme celui de l'abattage. À des fins d'honnêteté intellectuelle, il semble
plus correct d'avancer que ce traitement décent, similaire à celui de ménagement des animaux
1484 Id., Art.4 (2), a, b ,c. 1485 Sur l'obligation de soin, voir les articles III.3(b) ; III.5(b) et VIII.5. 1486 Id. 1487 Charte mondiale de la nature, Annexe, Préamb. § 3, a) (souligné par nous). 1488 Texte provisionnel de la Déclaration universelle pour le bien-être animal de 2007, al.1. Voir l'Annexe 4. 1489 Article 7.1.1. du Code sanitaire pour les animaux terrestres de l'OIE : "Introduction sur les recommandations
relatives au bien-être animal".
264
au niveau européen, pourrait permettre de limiter le mal-être des animaux, si ce n'est les
souffrances de ces derniers1490.
Dès leur introduction, les normes de l'OIE posent le principe de la "responsabilité éthique" de
protéger les animaux1491. Cette notion de responsabilité est au cœur des normes sur les chiens
errants. En plus des obligations d'identifier, faire vacciner et stériliser son animal, il est
précisé que tout propriétaire est responsable de son chien pendant toute la durée de la vie de
ce dernier (ou jusqu'à ce qu'il soit confié à un autre propriétaire). Cette prescription revient à
une interdiction d'abandon, bien qu'elle soit formulée en termes positifs. Tout propriétaire doit
aussi s'assurer du bien-être de son animal dans le respect de ses besoins comportementaux1492.
Bien qu'elles ne fournissent pas de définition du terme "bientraitance", les normes de l'OIE
ont néanmoins le mérite de faire explicitement référence à ce terme et de fournir quelques
éléments utiles. En tant qu'ensemble d'actions humaines, la notion de bientraitance doit
notamment être distinguée du bien-être animal, en tant qu'état de l'animal. À la lumière de ces
normes mondialement entérinées, il s'agirait plus particulièrement de traiter décemment, ou
humainement (avec compassion)1493, les animaux ainsi que de leur prodiguer les soins
nécessaires, tout en respectant leurs besoins fondamentaux.
Après avoir défini les principes de non-cruauté et de bientraitance, établi leur nature
principielle et leur généralité, tout en ayant précisé les règles juridiques générales et
particulières qu'ils comprennent, voyons désormais dans quelle mesure ces grands principes
du droit du bien-être animal peuvent se voir reconnaître une valeur universelle en droit
international.
S.2- La valeur juridique universelle des principes généraux du droit du bien-être animal
Depuis une époque ancestrale, les philosophies et les religions du monde entier s'entendent
pour condamner la cruauté et promouvoir la bientraitance, non-seulement envers les êtres
humains, mais aussi envers les animaux1494. Au-delà de leur origine morale universelle, nous
avons vu que l'interdiction de cruauté envers les animaux, comme l'obligation de bien les
1490 Id. 1491 Art. 7.1.2. (6) du Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE. 1492Id., Art. 7.7.4. (6). 1493 Rappelons que, dans les normes de l'OIE, la notion de "traitement décent" est traduite en anglais par "humane
treatment", qui se rapproche de la notion de traitement humanitaire. Selon la traduction espagnole, il est aussi question
de traitement compassionnel ou "trato compasivo". 1494 Voir l'introduction générale référant à "La position des religions" dans BROOM, D. M. et al, Bien-être animal,
éditions du Conseil de l’Europe, 2006, pp. 149-182.
265
traiter, revêtent désormais une valeur juridique en tant que des règles de conduite générales du
droit du bien-être animal.
Nous commencerons par nous appuyer sur la théorie des PGD pour établir le caractère
juridique universel des principes généraux du droit du bien-être animal (§1), avant d'envisager
la reconnaissance de nouveaux principes universels, notamment au sein de la CIJ (§2).
§1- La thèse de l'universalité des principes communs issue de la théorie des principes
généraux de droit (PGD) en droit international
Dans quelle mesure est-il pertinent de recourir à la théorie des PGD dans cette étude ?
« le recours aux principes généraux du droit permet de combler les lacunes du
droit écrit et de l'adapter "en souplesse" aux changements de la société »1495.
En plus d'être appropriée en tant que source supplétive, permettant de venir pallier au silence
du droit dans certains domaines du droit international, notamment dans les domaines
émergents qui ne disposent pas de règles formellement reconnues, la théorie des PGD permet
également d'appuyer la thèse de l'universalité des principes communément admis dans les
droits internes, à l'image des principes généraux dégagés sur le droit du bien-être animal.
Expliquons plus avant les éléments théoriques justifiant la pertinence du recours à la théorie
des PGD dans cette étude (A), avant de nous concentrer sur la thèse de leur universalité (B).
A- La pertinence du recours à la théorie des principes généraux de droit
L'Art. 38-1 c) du Statut de la CIJ fait référence aux "principes généraux de droit reconnus par
les nations civilisées". De nos jours, la doctrine s'accorde pour dire que tous les États doivent
être tenus comme étant des "nations civilisées"1496.
Alors qu'une partie de la doctrine assimile les principes généraux de droit (PGD) aux
principes généraux du droit international (PGDI)1497, la doctrine majoritaire les distingue1498.
De manière succincte, la distinction retenue est celle selon laquelle les PGD sont issus des
droits internes, alors que les PGDI sont issus du droit international. Bien qu'issus des droits
internes (in foro domestico), les PGD ont la particularité d'être "transposables" en droit
international, c'est-à-dire de pouvoir être intégrés aux règles du droit international tout en
1495 CARREAU, D. et F. MARRELLA, Droit international, 11e ed., Pedone, 2012, p.343. 1496 Voir PELLET, A., Droit international public, PUF, Mementos Themis, 1981, p.33. 1497 Voir par exemple DANILENKO, G.M., Law Making in the International Community, Martinus Nijhoff Publishers,
1993, p.180 et 187. 1498 Voir entres autres, PELLET, A., op.cit., note 1496, p.32.
266
s'adaptant à ses particularités1499. Quant aux PGDI, ceux-ci sont issus de la coutume et des
conventions internationales1500.
Tout en retenant la distinction émise, tout principe général de droit, une fois transposé dans
une convention internationale, peut potentiellement devenir un principe général du droit
international. C'est ce que nous envisagerons quant à l'évolution possible des principes de
protection du bien-être animal en regard de leur concrétisation en droit international.
Tout en précisant qu'il n'existe toujours pas de consensus sur la formation des principes
généraux de droit, Danilenko relève que :
« l'ordre juridique international ne peut fonctionner efficacement sans une
compréhension claire de la façon dont les principes et les normes
internationalement contraignantes émergent au sein de la communauté
mondiale »1501.
En ce sens, l'article 38 du Statut de la CIJ fournit une base essentielle, endossée par la
doctrine et la pratique, afin de valider les sources formelles du droit international. De plus, ces
sources permettent un test de validité en tant que précondition nécessaire pour renforcer les
règles de la Communauté internationale1502.
Comme les autres sources formelles du droit international, les principes généraux de droit
remplissent une fonction importante dans la construction du droit international, ainsi que pour
asseoir la validité de ses normes. En particulier concernant les droits émergents, leur théorie,
qui s'appuie sur une méthode comparative exhaustive, peut permettre de mettre en lumière
l'existence de principes communs aux différents systèmes juridiques du monde1503. La théorie
des PGD permet ainsi d'ériger des principes mondialement partagés au rang de principes
juridiques universels. En ce sens, qu'ils soient explicitement consacrés, ou implicitement
présents dans les droits internes, leur reconnaissance en tant que principes généraux de droit
(au sens de l'Art. 38-1 c) du Statut de la CIJ) les rendrait valables pour tous les pays de la
communauté internationale prise dans son ensemble.
1499 PELLET, A., Recherches sur les principes généraux de droit en droit international, Thèse, 1974, p. 277. 1500 DAILLIER, P., FORTEAU, M. et A. PELLET, Droit international public, L.G.D.J., 2009, p.381. 1501 DANILENKO, G.M., Law Making in the International Community, Martinus Nijhoff Publishers, 1993, p.301
(traduction libre). 1502 Id. 1503 PELLET, A., op.cit., note 1499, p. 241.
267
L'un des intérêts majeurs de cette source est de révéler des principes communs aux différents
systèmes juridiques afin de faire émerger de nouveaux principes universellement valables en
droit international1504.
Les principes généraux de droit sont reconnus dans certains domaines de la justice
internationale1505. Les professeurs Jean-Maurice Arbour et Geneviève Parent précisent que :
« Ce sont surtout les domaines du droit des obligations conventionnelles, de la
responsabilité internationale et de l'administration de la justice qui ont servi de
terrain privilégié à la découverte des principes généraux : principe de la bonne foi,
principe de justice naturelle, principe de l'indemnisation intégrale du dommage,
principe de la due diligence, reconnaissance de la force majeure et du cas fortuit,
estoppel, non-abus de droit »1506.
Rappelons que les principes de non-cruauté et de bientraitance ne sont pas de même nature.
Ceux-ci ont une vocation animalitaire1507 (en tant que principes du droit du bien-être animal)
alors que les PGD ont jusqu’alors remplit une vocation prétorienne (en tant que principes de
justice internationale). En effet, la fonction initiale des principes généraux de droit est d'éviter
les cas de "non liquet" (déni de justice) en permettant au juge international de recourir à cette
source en l'absence de norme conventionnelle ou coutumière permettant de rendre justice1508.
Mais la fonction des principes généraux, entendue de manière extensive en droit international,
ne s'arrête pas là. Relevons avec intérêt le constat de Dominique Carreau et Fabrizio Marrella :
« on ne peut s'empêcher de noter l'importance croissante de ces principes
généraux du droit avec l'extension du droit international à de nouveaux secteurs à
commencer par la protection de l'environnement en général que ce soit celle des
hommes, des animaux ou de la planète dans son ensemble »1509.
En ce sens, la source des PGD constituerait une "base" de développement du droit
international en permettant de l'adapter aux nécessités nouvelles de la société mondiale1510.
Ainsi, cette source sert surtout les droits émergents, qui commencent à poindre mais qui n'ont
1504 PELLET, A., op.cit., note 1496, p.33. 1505 Voir PROTIERE, G., "Les principes généraux dans la jurisprudence internationale : éléments d’une différenciation
fonctionnelle", Revue du Droit Public et de la Science Politique en France et à l’Etranger, p.259-292, 2008. 1506 ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd., Yvon Blais, 2012, p.147. 1507 Ce néologisme a été notamment utilisé par le professeur Jean-Pierre Marguénaud dans sa thèse de doctorat sur
L’animal en droit privé (éditions PUF, Paris, 1992, p. 352). Jean-Pierre DIGARD traite aussi des "revendications
animalitaires" dans BURGAT, F. et al, Les animaux, Seuil, Collection Pouvoirs n° 131, 2009, pp. 97-113. 1508 DANILENKO, G.M., Law Making in the International Community, Martinus Nijhoff Publishers, 1993, p.181. 1509 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.343. 1510 Id, p.345.
268
pas encore de reconnaissance formelle au sein d'une coutume ou d'une convention
internationale. Tel est le cas pour le droit du bien-être animal et les principes de non-cruauté
et de bientraitance, aux fondements mêmes de ce droit émergent dans le système international.
En effet, dans sa thèse de référence sur les principes généraux de droit, Alain Pellet insiste sur
l'importance des PGD en droit international1511. Ceux-ci permettent notamment de reconnaître
l'existence de principes juridiques universels lorsqu'ils sont largement partagés par les droits
nationaux. Ils servent également de source transitoire, comme étape dans l'élaboration des
règles positives du droit international, consacrées notamment dans les traités1512. Ces deux
points sont ceux qui viennent justifier à eux seuls le recours à cette source du droit dans cette
étude ; d'une part, afin de mettre en lumière l'universalité des principes de non-cruauté et de
bientraitance, et d'autre part, comme étape transitoire de reconnaissance de fondements
solides pouvant permettre la concrétisation d'une protection universellement valable du bien-
être animal en droit international.
B- Le caractère juridique universel des PGD
En plus de revêtir un caractère juridique obligatoire (1), les principes généraux de droit
revêtent une valeur universelle selon une approche objectiviste de la théorie des sources du
droit international1513 (2).
1- Le caractère juridique des PGD
Alors qu'une partie de la doctrine considère que les principes généraux de droit ne revêtent un
caractère contraignant que lorsqu'ils sont attachés à une coutume préexistante, la Convention
de Vienne sur le droit des traités de 1969 reconnaît quant à elle le caractère contraignant des
principes généraux de droit d'une manière autonome, sans passer par la coutume1514.
En ce sens, ces principes seraient "intrinsèquement contraignants"1515. Avec une existence
autonome, ils peuvent même être vus comme une source supérieure à la coutume, qui reste
toujours dépendante de la pratique des États1516.
1511 Id., p. 408. 1512 Id., p.423. 1513 L'"objectivisme" est une "doctrine juridique selon laquelle les droit international est le produit des solidarités
sociales découlant des nécessités de la "communauté internationale" et de son évolution". Voir PELLET, A., "Article
38" dans ZIMMERMANN, A. TOMUSCHAT, C. et K. OELLERS-FRAHM, The Statute of the International Court of
Justice, A commentary, Oxford University Press, 2006, p.764. 1514 Voir DANILENKO, G.M., op.cit., note 1508, p.187. 1515 PELLET, A., "Article 38" dans ZIMMERMANN, A., TOMUSCHAT, C. et K. OELLERS-FRAHM, The Statute
of the International Court of Justice, A commentary, Oxford University Press, 2006, p.768. 1516 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, Droit international public, 10e éd., Précis Dalloz, 2010 p. 379. Précisons que
certains auteurs comme par exemple Pellet soutiennent néanmoins l'"absence de hiérarchie entre les sources" du droit
international : PELLET, A., op.cit., note 1496, p.36.
269
En vertu des travaux préparatoires de l'article 38 du Statut de la CIJ en 1920, les principes
généraux témoigneraient d'une "conscience légale universelle"1517. En ce sens, les principes de
non-cruauté et de bientraitance seraient à rapprocher des "universaux du droit" consacrés dans
le Digeste1518 qui seraient, selon Ulpien, des principes de justice naturelle applicables à tous
les animaux (y compris les humains)1519.
Nous avons vu que ces principes de conduite universels existent sur le plan moral et juridique.
Selon Kelsen, ceux-ci peuvent être considérés comme des systèmes normatifs simultanément
valables, sachant que la morale universelle constitue souvent la source des principes
juridiques universels1520.
Notons que dans le domaine de l'environnement comme de la protection du bien-être animal :
« la prise de conscience de solidarités objectives (transcendant les disparités
idéologiques ou de développement) amène quelquefois les États [...] à reconnaître
rapidement l'émergence de certaines règles nouvelles »1521.
Considérant la profonde hétérogénéité propre à la communauté internationale, ces principes
viendraient transcender les disparités entre les différents États pour établir des objectifs
communs. En tant que source du droit international, les principes généraux seraient alors :
« une partie de la conscience légale des nations qui transforme les idéaux et les
espoirs collectifs en principes généraux et ainsi en droit international
contraignant »1522.
En exprimant la volonté de protéger les animaux face aux souffrances et d'assurer leurs
besoins, la protection du bien-être animal reflèterait ainsi une conscience juridique globale.
Cette volonté est exprimée de manière grandissante au niveau national et européen, et
désormais de manière officielle dans le droit des organisations internationales. Ainsi, le droit
1517 Procès-Verbaux of the Proceedings of the Advisory Commitee of Jurists (1920), p.318 (Descamps).
Voir PELLET, A., op.cit., note 1515, p.765. 1518 ALLAND, D. et S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p.1201. 1519 Selon Ulpien : "Le droit naturel est celui que la nature enseigne à tous les animaux", Digeste (I, 1.1, 3). 1520 KELSEN, H., Principles of International Law, Rinehart & Company, 1952, p.426. Notons que cette affirmation,
avérée pour les principes juridiques universels attachés aux droits des êtres humains, est également valable pour les
droits des animaux. En effet, alors que les droits n'avaient initialement qu'un statut moral, ils revêtent aujourd'hui un
statut juridique universel pour les êtres humains. De même, les droits des animaux sont en train d'évoluer du statut
moral au statut juridique en commençant à être reconnus dans certains pays. 1521 Id. 1522 VOIGT, C., op.cit., note 1444, p.163.
270
positif évolue en réponse aux demandes sociales et les principes généraux du droit
international viennent cristalliser la volonté générale de la Communauté internationale1523.
2- La thèse de l'universalité des PGD du point de vue objectiviste
Pour se voir reconnaître une valeur universelle, les PGD doivent être largement partagés dans
les droits internes à travers le monde. Même si cette condition est remplie, l'école volontariste
s'oppose à reconnaître leur application universelle en dehors du consentement (ou de la non
objection) explicite des États souverains. En effet, pour les volontaristes, les principes
intrinsèquement universels n'existent pas, mais leur caractère universel peut découler de la
volonté exprimée par tous les États d'être liés par ces principes, ou par une absence totale de
refus en ce sens1524. C'est pourquoi certains partisans du volontarisme vont jusqu'à contester la
légitimité même des principes généraux de droit, tant que ceux-ci n'ont pas été formulés par la
volonté souveraine des États, en plus de s'opposer à leur application universelle1525.
Selon la position objectiviste contraire, l'idée d'une "présomption d’acceptation unanime"
pour tous les États peut se voir appliquée aux PGD comme pour la coutume internationale1526.
À l'exception desdits "objecteurs persistants"1527, les principes généraux peuvent s'imposer à
tous les États, à condition qu'ils soient présents dans une majorité d'États représentatifs1528.
L'opposabilité comme le caractère transposable de ces principes en droit international
provient ainsi de leur généralité dans les droits internes1529. Ainsi, dès que des principes sont
reconnus dans les principaux systèmes juridiques du monde, ils peuvent se voir reconnaître
une valeur objectivement universelle1530.
Afin que les PGD soient considérés comme des principes à valeur universelle, le nombre de
pays importe moins que le fait qu'ils soient suffisamment représentatifs des différents
systèmes juridiques1531. C'est pourquoi la reconnaissance unanime des PGD par tous les pays
1523 Voir à ce sujet REISMAN, W.M., "The Democratization of Contemporary International Law - Making Processes
and the Differentiation of Their Application", dans WOLFRUM, R. et R. VOLKER, Developments of International
Law in Treaty Making, Springer, pp.15-30, 2005, p.33. 1524 Le "volontarisme" est une "doctrine juridique selon laquelle les droit international est fondé sur la volonté des
Etats", dans SALMON, J., Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001, p.1140. 1525 TUNKIN, G., "Co-existence and International Law", RCADI, 1958, III, tome 95, p.25. L'auteur estime que le
concept de "principes généraux de droit" est inutile dans la mesure où d'autres sources peuvent servir plus aisément à
établir la volonté de l'Etat, voire dangereux dans la mesure où il pourrait servir à contourner l'exigence du respect de la
volonté de l'Etat. 1526 ROCHE, C., Droit international public, 4e éd., Gualiano, 2010, p.31. 1527 CORTEN, O., Méthodologie du droit international public, éditions de l'Université de Bruxelles, 2009, p.52. 1528 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.332. 1529 Id. 1530 PELLET, A., op.cit., note 1499, p.226 s. 1531 DANILENKO, G.M., op.cit., note 1508, p.177.
271
n'est pas nécessaire1532. En effet, l'universalité des PGD repose moins sur la règle de
l'unanimité que celle de la représentativité. À partir du moment où des principes sont
largement partagés par les grands systèmes juridiques, ils auraient ainsi une valeur
universelle. Témoignant d'une conscience commune, ceux-ci seraient également applicables
aux pays qui n'ont pas adopté ces principes dans leur droit interne (in foro domestico)1533.
En se basant sur les textes du droit du bien-être animal, notre analyse comparative exhaustive
a permis de dégager certains principes largement partagés par les droits internes et dont la
validité pourrait ainsi faire l'objet d'une reconnaissance universelle. Notons également que :
« Ceux qui [...] se refusent à affirmer a priori l'existence de principes
universellement valables [...] croient qu'il est possible de suggérer (et, en fait, ils
suggèrent souvent) comme une hypothèse sujette à vérification par une recherche
comparative plus poussée qu'il y a des principes, méthodes ou concepts juridiques
d'importance qui ont trouvé dans le monde une aire d'acceptation large sinon
même universelle »1534.
Ainsi, les principes de non-cruauté et de bientraitance sont bien des principes universels en ce
qu'il s'agit de principes communs -aux pays de la communauté internationale- et qui
poursuivent une finalité universelle1535.
§2- La reconnaissance des principes juridiques universels du droit du bien-être animal
Les principes de non-cruauté et de bientraitance envers les animaux peuvent ils se voir
reconnaître le statut de PGD ?
En effet, bien que les PGD aient été jusqu'alors appliqués au domaine du droit procédural
général plutôt qu'à des domaines particuliers comme le droit du bien-être animal, il s'agit
d'une catégorie ouverte illimitée. Ainsi, ce n’est pas parce qu’ils ont été surtout reconnus dans
le domaine de la procédure judiciaire qu’ils doivent être limités à ce champ1536.
Loin de prétendre assimiler les principes de non-cruauté et de bientraitance à des principes
généraux de droit au sens strict, ou "maximes du droit" procédural (comme les principes de
1532 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963, p. 514. 1533 PELLET, A., op.cit., note 1499, p.226 s. 1534 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963, p.508 (en
référence à JENKS, W., The Common Law of Mankind, Praeger, 1958). 1535 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.332. 1536 ELIAS, O. et C., LIM, " "General Principles of Law", "soft" law and the identification of international law", dans
TMC Asser Instituut, Netherlands Yearbook of International Law 1997, The Hague, TMC Asser Press, pp.3-51, 1998.
272
bonne foi, d'autorité de la chose jugée ou encore de la parole donnée selon l'adage Pacta sunt
servanda)1537, il s'agit plutôt d'établir que ceux-ci constituent des principes généraux
spécifiques au droit du bien-être animal, tout en s'appuyant sur l'interprétation admise de cette
source pour établir leur universalité en droit international. D'une manière générale, précisons
que le raisonnement juridique peut venir mettre en évidence l'existence de principes juridiques
généraux en relevant des indices suffisants, tels que ceux mis en exergue par cette étude1538.
En s'appuyant sur la description des PGD et de leur rôle reconnu pour le développement du
droit international, appliquons la théorie présentée aux principes généraux du droit du bien-
être animal. En ce sens, l'extension de la théorie des PGD à de nouveaux domaines juridiques
-au-delà de ceux qui concernent leur emploi classique- est mise en avant par certains auteurs
comme Friedman, affirmant que : "le fait que les PDG sont seulement des principes de droit
privé n'est plus vrai aujourd'hui"1539.
Quoi qu'il en soit des nombreuses discussions et controverses sur les PGD, il s'agit
indubitablement de "principes juridiques communs aux divers systèmes de droit interne"1540.
Envisageons successivement les questions relatives à l'universalité et à la force juridique des
principes de non-cruauté et de bientraitance (A) puis celle d'une éventuelle reconnaissance de
principes de protection du bien-être animal par la Cour de justice universelle qu'est la CIJ (B).
A- Universalité et force juridique des principes de non-cruauté et de bientraitance
Avant d'être transposés en droit international, les principes généraux de droit sont issus des
droits internes. Concernant le droit du bien-être animal, nous avons vu que le principe de non-
cruauté est directement issu des droits internes, c'est-à-dire des lois nationales qui
mentionnent explicitement leur objectif de lutter contre la cruauté envers les animaux. Quant
au principe de bientraitance, nous avons vu que celui-ci est induit de l'ensemble des règles qui
sous-tendent le droit du bien-être animal, tant au niveau national qu'au niveau supranational
(dans le droit des institutions européennes et des organisations internationales).
Envisageons tout d'abord le caractère universel de ces principes communs (1) avant d'aborder
la question de leur force juridique (2).
1537 DANILENKO, G.M., op.cit., note 1508, p.175. 1538 COMBACAU, J. et S. SUR, Droit international public, 8e éd., Montchrestien, 2010, p. 62. 1539 FRIEDMANN, W., The Changing Structure of International Law, Stevens and Sons, 1964, p.190 (traduction
libre). 1540 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.331.
273
1- L'universalité des principes largement partagés par les droits internes à travers le monde
Les principes de non-cruauté et de bientraitance sont mondialement partagés par tous les
systèmes et par tous les niveaux législatifs à travers le monde. Issus de préceptes éthiques
ancestraux, ces principes revêtent une valeur universelle, au moins sur le plan moral. Mais
quels éléments permettent d'affirmer la valeur universelle des principes de non-cruauté et de
bientraitance sur le plan juridique ? Et dans quelle mesure s'agit-il de principes
universellement valables pour tous les pays ? C'est ce que nous allons envisager quant à
l'application de la théorie ds PGD aux principes généraux du droit du bien-être animal.
De nombreux pays disposent de lois anti-cruauté et désormais aussi de lois pro-bien-être. Si
cette représentation n'est pas universelle puisqu'elle ne représente pas la totalité des pays du
monde, son aire de répartition est généralisée. En effet, les recherches entreprises en vertu des
informations disponibles, nous ont permis de recenser 107 pays disposant à ce jour de lois
protectrices des animaux à travers le monde1541. Les droits internes disposant de ces lois, avec
en leur sein les principes de non-cruauté et de bientraitance envers les animaux, ont en ce sens
une représentation large puisqu'ils sont présents dans tous les continents, à savoir : en Europe,
dans les Amériques, mais aussi en Afrique, en Asie et en Océanie (voir l'Annexe I ci-jointe).
Le premier titre de cette étude a permis d'identifier des systèmes juridiques propres au droit
du bien-être animal, qui renvoient aux principaux systèmes juridiques classiquement
reconnus, à l'image du droit romano-germanique et de la Common law1542. Rappelons que les
droits religieux, abordés dans l'introduction générale de cette étude, prévoient tous le respect
de l'animal. Comme nous l'avons également vu au premier titre sur les droits internes, les
différents systèmes juridiques identifiés puisent leur source dans l'histoire même des
législations qui fondent actuellement le droit national du bien-être animal. Tels que nous les
avons préalablement décrits en première partie, il s'agit des systèmes pionniers (anglo-saxons
et européens), d'influence britannique (pays africains et océaniens) et des systèmes émergents
(Pays d'Amérique du Sud et d'Asie).
La notion de systèmes juridiques revêt une importance particulière en vertu de la théorie des
PGD. En effet, ces principes ont une valeur universelle lorsqu'ils sont partagés par les
1541 Voir l'Annexe I. 1542 Voir CUNIBERTI, G., Grands systèmes de droit contemporains, LGDJ-Lextenso éd., 2011. Tels que nous les
avons envisagés au premier titre, les grands systèmes juridiques classiques concernent notamment le droit commun (ou
"common law" dans les pays anglo-saxons), le droit romano-germaniques, le droit coutumier et le droit religieux.
274
systèmes juridiques qui représentent les grandes formes de civilisation à travers le monde1543.
Rappelons qu'il n'est pas nécessaire que tous les pays de ces différents systèmes partagent ces
principes, mais simplement qu'il y ait une représentation mondiale suffisante1544.
Selon la thèse d'Alain Pellet sur les PGD en droit international, l'universalité des PGD résulte
aussi de leur généralité1545. En d'autres termes, la consécration des principes de non-cruauté et
bientraitance par un nombre de pays suffisamment représentatifs des grands systèmes
juridiques suffit pour que ces principes puissent se voir reconnaître une valeur universelle.
Nous l'avons vu, ces principes existent au sein de nombreuses législations mondialement
présentes : à l'Est comme à l'Ouest et au Nord comme au Sud, cette large expansion mondiale
ayant commencé dès la fin du XIXe siècle, pour aller plus tard vers le niveau européen depuis
la fin du XXe siècle et se manifester désormais au niveau international depuis le début du
XXIe siècle.
Les principes de non-cruauté et bientraitance constituent ainsi les principes universels à la
base du fond juridique commun visant à réprimer les mauvais traitements et à promouvoir le
bien-être des animaux.
2- La juridicité accrue du principe de non-cruauté comme un impératif juridique universel
Comme nous l'avons vu au premier titre de cette étude, le principe de non-cruauté, qui
regroupe l'ensemble des interdictions de cruauté envers les animaux, est présent dans les
premières lois anti-cruauté ainsi que dans les nouvelles lois pro-bien-être. En plus de prévoir
des obligations de bientraitance, ces dernières sont toujours basées sur des interdictions de
cruauté. En ce sens, le principe de non-cruauté est mondialement présent dans la majorité des
droits internes. Ce constat vient au soutien de la thèse de son universalité, c'est-à-dire de son
caractère universellement valable en droit international pour tous les pays (y compris ceux qui
ne disposent pas d'un tel principe dans leur droit interne)1546.
En plus de son universalité tirée de son omniprésence dans les lois nationales de protection
animale, le principe de non-cruauté revêtirait un caractère obligatoire en droit international.
Une telle affirmation résulte des éléments constitutifs des principes généraux de droit :
1543 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p. 334. Au sein de la CIJ : [s]i les juges doivent représenter
ces grandes formes de civilisation et les principaux systèmes juridiques, il est clair que certains principes généraux de
droit [...] peuvent, en raison de leur qualité, recevoir la sanction du droit international". 1544 "Pour qu'il y ai universalité du principe, il suffit qu'il ait été reconnu dans le droit positif, si ce n'est de tous les
pays de la communauté internationale, du moins des plus représentatifs d'entre eux". Id., p.332. 1545 PELLET, A., op.cit., note 1499, 1974, p. 226 s. : "Universalité ou généralité ?" Selon l'auteur, la reconnaissance
dans la majorité des droits nationaux suffit. 1546 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.332.
275
« Les principes généraux se rapprochent étroitement de la coutume dans leurs
éléments constitutifs. Ils possèdent, comme elle, un élément matériel, à savoir une
présence généralisée dans les divers systèmes juridiques existants et un élément
psychologique, à savoir une reconnaissance en tant que règles de droit
obligatoires »1547.
En effet, la cruauté est pénalement sanctionnée par toutes les lois nationales de protection
animale, qu'il s'agisse de peines de prison et d'amende (ou seulement d'amendes, comme dans
certaines des nouvelles lois européennes, tel que nous l'avons envisagé au Titre 1).
Le caractère obligatoire et sanctionnable des interdictions de cruauté, ou du principe de non-
cruauté, compris dans l'ensemble des droits internes est donc incontestable. La reconnaissance
de son caractère contraignant pourrait ainsi se voir entérinée au plan du droit international.
Il en va différemment du principe de bientraitance. En effet, nous avons établi qu'il s'agit d'un
principe englobant, comprenant à la fois les interdictions de cruauté et les obligations visant le
bien-être animal. Or ce principe apparaît moins solidement ancré en droit positif que le
principe de non-cruauté. Comme nous l'avons vu en effet, les manquements aux obligations
de bientraitance ou de bienveillance envers les animaux apparaissent plutôt comme des
obligations allégées, qui ne sont pas pénalement sanctionnées, sauf dans le cas de négligences
graves (comme l'omission de nourrir ou soigner tout animal sous sa responsabilité, pouvant
alors s'apparenter à de la cruauté). En ce sens, le caractère obligatoire du principe de
bientraitance n'apparaît pas aussi évident que l'impérativité du principe de non-cruauté.
B- La reconnaissance des principes de protection du bien-être animal par la CIJ
Si les principes généraux de droit sont généralement rattachés à la jurisprudence
internationale, ils constituent néanmoins une source distincte des décisions de justice1548.
D'après la théorie des sources du droit international, les principes généraux de droit sont :
« initialement révélés par la jurisprudence internationale, mais se transforment
rapidement en règle coutumière ou même conventionnelle lorsqu’ils sont
réceptionnés par le droit international »1549.
En tant que source supplétive, ils fournissent ainsi au juge le moyen d'apporter une solution
juridique aux litiges soumis en cas de silence du droit coutumier ou conventionnel1550.
1547 Id., p.331. 1548 Si les PGD sont mentionnés à l'article 38-1 c) du Statut de la CIJ, les décisions judiciaires le sont à l'alinéa d). 1549 ROCHE, C., Droit international public, 4e éd., Gualiano, 2010, p.36.
276
Comme nous l'avons évoqué précédemment, le rôle des principes généraux est effectivement
de combler les lacunes du droit international en "empruntant des concepts solidement
implantés dans la pratique juridique"1551. En ce sens, la consécration de tels principes pourrait
permettre de remédier au silence du droit international positif en matière de protection du
bien-être animal. Si un litige lui était soumis sur cette question, le rôle du juge international
pourrait alors consister à puiser dans le "vaste réservoir des principes fondamentaux des
ordres juridiques nationaux" afin de dégager certains principes généraux de droit1552.
Dans l'hypothèse d'un différend que le juge international devrait régler en matière de
protection du bien-être animal, quels principes pourrait-il invoquer (1) ? Et dans quelle
mesure la CIJ pourrait-elle reconnaître l'existence de principes universels sur la protection du
bien-être animal (2) ? C'est ce que nous envisagerons successivement.
1- Quels principes de justice le juge international pourrait-il invoquer sur le bien-être animal ?
Pour reprendre les termes de Jean-Maurice Arbour et Geneviève Parent, quels "concepts
solidement implantés dans la pratique juridique" pourraient être érigé en principe de justice ?
Tel qu'il ressort de cette étude, le concept le plus présent en droit du bien-être animal et le
plus solidement implanté dans la pratique juridique concerne le concept de bien-être animal
lui-même. La CIJ pourrait ainsi aborder la valeur principielle du bien-être animal si une
affaire lui était soumise en ce sens, par exemple le cadre d'un règlement de différend entre
l'Australie et les pays du Moyen-Orient1553. Si toutefois ces pays invoquaient la valeur non
contraignante des recommandations de l'OIE sur le bien-être animal, mais que la CIJ en venait
à déclarer que ces pays doivent malgré tout s'y conformer en vertu de leur engagement à les
respecter, elle pourrait alors consacrer par la même occasion l'existence d'un principe général
de protection du bien-être animal. Une telle décision viendrait alors s'inscrire dans l'essor
mondial de la protection juridique du bien-être animal depuis le début des années 2000.
En tant que concept solidement ancré dans la pratique internationale, relevons que la notion
de moralité publique a également joué un grand rôle dans les récentes décisions sur les
produits du phoque à l'OMC1554. Si cette notion se voyait reconnaître le statut de principe
général de droit en matière de protection du bien-être animal, elle pourrait permettre la
résolution de nouveaux différends internationaux à ce sujet. Pour reprendre l'exemple précité,
1550 DAILLIER, P., FORTEAU, M. et A. PELLET, Droit international public, L.G.D.J., 2009, p.382. 1551 ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, Droit international public, 6e éd., Yvon Blais, 2012, p.147. 1552 Id. 1553 Voir les développements du Titre précédent à ce sujet. 1554 Id.
277
rappelons que les restrictions commerciales adoptées par l'Australie envers les pays du
Moyen-Orient ont été adoptées à l'issue des demandes du public australien suite aux scandales
suscitées par les vidéos et autres témoignages sur les conditions déplorables dans lesquelles le
bétail était transporté (en mer sur des milliers de kilomètres) puis abattu dans ces pays. Ainsi,
les embargos australiens ont été justifiés par la protection de la moralité publique australienne
contestant de telles conditions de transport et d'abattage1555.
En outre, nous avons vu que la protection de la moralité publique constitue le motif des
premières lois anti-cruauté adoptées dans les pays européens au milieu du XIXe siècle contre
la cruauté publique envers les animaux1556. De nouvelles lois y font également référence,
comme la loi taïwanaise de 1998 condamnant la cruauté envers les animaux afin de protéger
les "bonnes mœurs sociales"1557. Enfin, cette notion se dégage aussi de certaines interdictions
particulières sur la cruauté envers les animaux. Citons la loi néerlandaise de 2012 contre la
production de fourrure animale1558, qui l’avance c contre l'immoralité de cette pratique :
« infliger des souffrances à un animal et le priver de sa vie pour un objectif
non-essentiel et même trivial ne peut être moralement justifiée [...] c'est
manifestement contraire à la moralité publique ».
En ce sens, il est possible d'entrevoir l'émergence d'un principe de moralité publique contre
les souffrances évitables, en tant que norme applicable en droit international. Après une
première application à l'OMC ouvrant la porte à de nombreuses autres possibilités
d'application en matière de bien-être animal, ce principe pourrait également s'appliquer au
bien-être humain, par exemple pour protéger les enfants exploités dans certains pays1559.
Rappelons que, dans le cadre du commerce international, l'Article XX a) du GATT prévoit
l'exception générale de moralité publique afin de valider des restrictions commerciales1560. En
ce sens, il s'agit déjà d'une norme conventionnelle du droit international qui commence à avoir
certains effets juridiques en matière de protection animale, telle qu'elle a pu être appliquée
1555 Voir à ce sujet MORFUNI, L., "Pain for Profit: An Analysis of the Live Export Trade", Deakin Law Review,
Vol.16, n°2, pp.497-538. 1556 Rappelons un exemple explicite à ce sujet, à savoir le Chapitre VII du Code pénal du canton de Vaud de 1843 en
Suisse intitulé : "Des atteintes à la paix et à l'ordre public", qui punit à son article 139 : "Celui qui cause un scandale
public en se livrant à des mauvais traitements graves ou à des actes de cruauté contre un animal". 1557 De l'anglais "good social custom". Art. 10 (3) Animal Protection Law, 1998. 1558 Loi interdisant l'élevage des animaux à fourrure : Voorstel van wet van de leden Van Velzen en Waalkens houdende
een verbod op de pelsdierhouderij 30 826 (Wet verbod pelsdierhouderij), 2012. 1559 Voir par exemple HUMBERT, F., The Challenge of Child Labour in International Law, Cambridge University
Press, 2009. 1560 Notons que la clause de moralité publique a toujours été présente dans les accords de droit commercial
international et se trouve également consacré en droit communautaire. Voir à ce sujet CHARNOVITZ, S., “The moral
exception in trade policy”, Virginia Journal of International Law, vol. 38, pp.689-716, 1998.
278
pour la première fois en ce sens dans les décisions Phoques de 2013 et 2014 qui constituent
un précédent inédit en faveur du bien-être animal1561.
Or, nous avons vu que les PGD sont des principes non-écrits qui viennent suppléer à l'absence
de règles coutumières ou conventionnelles en droit international. En restant axé sur la théorie
des PGD, posons la question en ces termes : en cas de silence du droit international, quel
principe de justice pourrait aider à la résolution d'éventuels conflits interétatiques en matière
de protection du bien-être animal ?
Suggérons ici plusieurs idées, comme la reconnaissance d'un principe d'intérêt moral. Tout en
se rapprochant du principe de moralité publique, il permettrait d'aller plus loin à partir du
moment où un intérêt moral de protection du bien-être animal serait reconnu par tous les
systèmes juridiques, comme la volonté d'éviter des souffrances inutiles aux animaux.
Cette idée est également inspirée de la décision Phoques I de 2013, qui a permis de
reconnaître que le bien-être animal représente un "intérêt" important pour la communauté
internationale1562.
Il pourrait aussi être question d'un "intérêt animal" (afin de prendre en compte les intérêts des
animaux, par analogie avec la notion d' "intérêt environnemental"), voire d'un intérêt
"animalitaire" (afin de sauver les animaux en détresse, par analogie avec la notion d'aide
"humanitaire"). Pour éviter toute confusion, une distinction mérite ici d'être relevée : alors que
la "conception humanitaire" de la protection animale est fondée sur les sentiments moraux de
l’homme et centrée sur la protection des intérêts humains plutôt que sur le bien-être animal, la
"conception animalitaire" de celle-ci est fondée sur l'intérêt de l'animal et vise sa protection
pour lui-même1563. Ainsi, alors que la notion de moralité publique se rapporte à la conception
humanitaire, la notion d'intérêt animal se rapporte à la conception animalitaire, et celle
d'intérêt moral se situerait à la frontière entre les deux.
Précisons enfin que le principe de non-cruauté correspond parfaitement aux interprétations
des PGD dans les décisions de justice internationale.
Ainsi, tel qu'il a été précédemment décrit, le principe de non-cruauté semble bien faire partie
des "principes ancrés dans le bon sens et la pratique générale de l'ensemble des nations"1564.
1561 Voir le Titre précédent. 1562 Id. 1563 Ces notions sont empruntées au Professeur Marguénaud (MARGUÉNAUD, J.-P., L’animal en droit privé, PUF,
Paris, 1992, p. 352), cette distinction étant ainsi résumée par le professeur Olivier Le Bot dans cet article : LE BOT,O.,
"La protection de l’animal en droit constitutionnel. Étude de droit comparé", Lex Electronica, vol. 12 n° 2, 2007, p. 26. 1564 I.C.L.Q., 1952, p.247.
279
De plus, l'interdiction de faire souffrir inutilement les animaux fait partie des "règles de droit
fondées sur la raison commune "1565. Il est possible d'en déduire une "maxime juridique d'une
portée universelle"1566, à l'image de cette proposition personnelle :
Lex prohibet crudelitatem (la loi interdit la cruauté).
En effet, nous avons vu que toutes les lois de protection des animaux posent des interdictions
de cruauté. La loi, en tant que "lex", est également à prendre au sens large comme
manifestation du droit. Celui-ci n'est pas limité aux lois nationales mais concerne aussi les
législations supranationales reprouvant la cruauté, telles que préalablement évoquées.
En tant que maxime universelle, précisons que l'interdiction de cruauté vaut aussi pour tous
les individus, tant humains qu'animaux. Mentionnons par exemple l'article 5 de la Déclaration
universelle des droits de l'homme interdisant la cruauté envers les êtres humains :
« Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants »1567.
Bien qu'appliquée aux seuls humains, notons que le terme "nul" sous-entend "nul individu" et
peut théoriquement se voir aussi appliqué aux animaux. Le principe de non-cruauté figure
ainsi spécifiquement dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Animal à son article 3 :
« Aucun animal ne doit être soumis à de mauvais traitements ou à des
actes cruels »1568.
Rappelons que, si cette déclaration a été solennellement proclamée au siège de l'UNESCO à
Paris en 1978, elle n'a pas été formellement adoptée par l'ONU et ne revêt donc pas la même
valeur juridique que la précédente.
2- Une reconnaissance plus probable en dehors de toute référence aux PGD
Comme nous l'avons vu, la CIJ s'est toujours montrée réticente quant à la consécration de
principes généraux de droit, d'autant que ceux ont toujours concerné jusqu'alors le domaine
des différends interétatiques, relativement lointain de celui du droit du bien-être animal.
Malgré des sollicitations fréquentes des parties, la Cour mondiale n'a fait qu'un usage
rarissime des PDG dans ses décisions1569. Cependant, nombre de juges de cette Cour ont
1565 I.L.R. 1953, 534 et s. 1566 R.G.D.I.P. 1963.315. 1567 Article 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par les Nations Unies en 1948. 1568 Article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Animal de 1978.
280
souvent insisté, dans leurs opinions individuelles ou dissidentes, sur le rôle important cette
source pour combler les lacunes du droit international1570. Précisons que les arbitres
internationaux et la Cour de justice de l'Union Européenne ont plus eu recours aux PGD1571
que la CIJ, qui n'en a fait usage qu'avec une "extrême parcimonie"1572.
Alors qu'un avis de la CIJ a reconnu le principe de la res judicata en 19541573, les décisions de
la haute cour n'ont que rarement fait référence aux PGD. En outre, lorsque celle-ci a fait
explicitement aux PGD dans l'Affaire du Sud-Ouest africain, leur existence a été rejetée en
l'espèce1574. Aussi, la Cour a systématiquement éludé de préciser la manière dont un PGD
pouvait être dégagé. Ce constat est assez regrettable quant à la justice internationale. Ainsi :
« En fait, juge et arbitres internationaux se contentent, le plus souvent, d'affirmer
ou de refuser l'existence d'un principe général de droit sans s'efforcer de justifier
leur démarche intellectuelle »1575.
Rappelons néanmoins que, pour prouver la présence d'un PGD dans les grands systèmes de
droit contemporains, il convient de passer par une méthode comparative1576. En ce sens, les
travaux des comparatistes et des internationalistes s'avèrent utiles pour mettre en lumière
l'existence de certains principes en dehors du contexte judiciaire1577. Une revue exhaustive des
droits nationaux peut alors permettre de dégager l'existence fond normatif commun, comme
dans le cadre de cette étude sur le droit du bien-être animal. Tel que nous l'avons vu,
l'identification de ce fonds commun permet de faire ressortir la substantifique moelle ou
quintessence normative de ce droit sous forme de principes généraux. Largement endossés par
les pays du monde, ceux-ci sont alors universellement reconnaissables et valables en droit
international (en vertu de la théorie générale des sources du droit international appliquée en
l'espèce). Ainsi, les principes de non-cruauté et de bientraitance reflètent bien l'esprit
"commun à tous les grands systèmes de droit"1578 en matière de protection du bien-être animal
1569 La CIJ n'y aurait référé que 4 fois depuis 1922. Voir PELLET, A., "Article 38" dans ZIMMERMANN, A.,
TOMUSCHAT, C. et K. OELLERS-FRAHM, The Statute of the International Court of Justice, A commentary,
Oxford University Press, pp. 677-792, 2006, p.766. 1570 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.344. 1571 Id., p.333. 1572 PELLET, A., op.cit., note 1515, p.766. 1573 ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, op.cit., note 1551, p.147. 1574 Dans cette décision de 1966, la Cour refusa de voir l'un des "principes généraux de droit" mentionnés à l'article 38,
§1 (c) de son statut (Rec., p.47, voir en particulier les §44 et 88 de la décision). 1575 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.336. 1576 PELLET, A., op.cit., note 1499, p.241 et s. 1577 Voir CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.342. 1578 Id., p.334.
281
En d'autres termes, il convient d'insister ici sur l'idée selon laquelle c'est plutôt la théorie des
PGD que leur application concrète qui s'avère la plus porteuse dans le cadre de cette étude.
En dehors de toute référence aux PGD, la CIJ n'a pas hésité à reconnaître l'universalité de
certaines valeurs, comme dans des domaines émergents à l'image de la protection
environnementale. Comme pour la protection de la nature, la valeur à la fois légale et
universelle des principes de protection du bien-être animal pourrait être consacrée par la CIJ :
« Les concepts juridiques d'une civilisation procèdent des valeurs enracinées de
celle‐ci, elles sont l'étalon et la pierre de touche de leur validité. Il en va de la
sorte dans les systèmes juridiques tant internationaux qu'internes, sous cette
réserve qu'il faut au droit international une reconnaissance mondiale de ces
valeurs. Il ne serait pas faux de dire que l'amour de la nature, le désir de la
préserver et la nécessité pour l'activité humaine de respecter les conditions de sa
protection et de sa pérennité comptent parmi ces valeurs primitives et
universelles, qui exigent la reconnaissance internationale. »1579.
Sur la notion de "valeur", rappelons que l'OMC a souligné dans sa première décision Phoques
que la protection du bien-être animal constituait une valeur importante pour la communauté
internationale1580. Cette affirmation peut constituer une source d'inspiration vers une
formulation similaire en faveur de la reconnaissance du bien-être animal, à la fois comme
valeur universelle et comme concept juridique (pour reprendre les termes précités), lors d'une
future décision éventuelle en ce sens.
En effet, ayant récemment pris position en faveur de la protection des baleines1581, la CIJ est
théoriquement habilitée à franchir un nouveau pas en adoptant une décision favorable au bien-
être animal, si toutefois un différend lui était soumis sur cette question à l'avenir.
En l'espèce, cette décision est venue confirmer la prise de conscience universelle opérée en
faveur de la protection des animaux. Cette évolution se manifeste de plus en plus clairement
en droit international, y compris au sein de la plus haute cour de justice internationale,
habilitée à rendre des décisions obligatoires et sans appel pour tous les États-membres de la
Communauté internationale, ainsi qu'à attester de l'existence de certains principes juridiques
communs voire universels. En ce sens, les décisions de la haute juridiction de l'ONU ont une
1579 Affaire relative au projet Gabcikovo‐Nagymaros (Hongrie c Slovaquie), [1997] CIJ rec. 7 aux pp. 108‐109. 1580 Voir le Titre précédent. 1581 Cour internationale de Justice, Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon ; Nouvelle-Zélande
(intervenant)), Arrêt du 31 mars 2014.
282
portée universelle et celle-ci est particulièrement qualifiée pour consacrer des principes qui
favorisent l'évolution du droit international sur toutes les questions d'intérêt mondial, des plus
larges aux plus précises.
Une décision en faveur de l'universalité des principes de bien-être animal pourrait également
se baser sur la notion d'opinio juris communis. En effet, celle-ci manifeste l'existence d'une
conscience juridique commune1582. Plus souvent rattachée à la coutume dans la théorie des
sources formelles du droit international, elle est également liée aux principes généraux, tant
ceux du droit général, que du droit international1583. En vertu des développements précédents,
il semblerait que la protection du bien-être animal soit une norme qui renvoie largement à
cette opinio juris ; d'une manière croissante en droit général et d'une manière émergente sur la
scène internationale. Or, s'il est reconnu qu'une norme reflète cette conscience juridique
commune, elle devient alors une norme impérative en tant que principe général1584.
À l'image du développement durable, la protection du bien-être animal a également vocation à
devenir un vecteur d'évolution des politiques globales1585. Des précédents existent déjà en ce
sens et il est possible de présumer que ceux-ci seront amenés à se multiplier dans les temps à
venir. En effet, cet objectif est déjà reconnu au niveau normatif (au sein des normes de l'OIE)
et jurisprudentiel (par les organes judiciaires de l'OMC) en droit international. Le concept de
bien-être animal commence également à faire partie des termes onusiens au sein des objectifs
du développement durable.
C'est pourquoi sa large portée, son caractère normatif et sa reconnaissance à tous les niveaux
législatifs permettent de soutenir qu'il s'agit un principe ayant vocation à être reconnu.
Quant à la valeur obligatoire, qui serait issue de l'existence d'une opinio juris communis
rattachée au principe de protection du bien-être animal, il convient d'émettre cette précision :
« on ne doit pas retenir, dans l'opinio juris révélée par la pratique une perception
univoque. L'expression de volonté [...] peut aussi être un assentiment diffus de la
communauté des États à l'émergence de nouvelles normes générales »1586.
L'expression de cette volonté de reconnaissance n'est pas forcément explicite mais peut être
seulement tacite, en se manifestant par une abstention d'objection1587. Ce consensus global est
déjà manifesté au sein de l'OIE dans les discussions afférentes aux normes internationales sur
1582 FAVRE, A., Principes du Droit des Gens, Fribourg, 1974, p. 275. 1583 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p. 328. 1584 VOIGT, C., op.cit., note 1444, p.157. 1585 Id., p.168. 1586 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, op.cit., note 1516, p.371. 1587 Id.
283
le bien-être animal (qui réunissent les représentants de la plupart des États souverains) et
désormais aussi, de manière plus importante sur le plan politique, au sein des discussions
menées au sein des instances de l'ONU (qui réunit l'ensemble des États de la planète).
Tel que nous l'avons établi précédemment, la règle commune sur laquelle tous les pays du
monde pourrait s'accorder -puisqu'elle existe déjà dans les droits internes- concerne
l'interdiction de causer des souffrances inutiles. En plus de constituer le seuil commun du
droit du bien-être animal, relevons qu’il s’agit également d’un principe de droit international
humanitaire1588.
Les principes de conduite universellement reconnus revêtent une valeur juridique élevée en
droit international1589. Thomas Franck affirme en ce sens que :
« Les États ne peuvent simplement pas échapper à la force obligatoire des
principes de conduite universels »1590.
De même, le principe d'aide humanitaire se rapproche du devoir d'assistance aux animaux en
détresse (tel qu'il est présent dans certaines lois nationales)1591. Alors que celui-ci renvoie au
principe de bientraitance, le principe de non-cruauté renvoie au principe de non-violence, à
l'origine de principes internationaux comme le non-recours à la force ou non-agression.
L'ensemble de ces principes fondamentaux témoignent de l'existence d'une conscience légale
universelle sur la protection des être sensibles, qu'ils soient humains ou animaux.
Si la reconnaissance de ces principes peut passer par la CIJ, Friedmann relève toutefois que :
« Les développements contemporains du droit international [...] se produisent
principalement en dehors du domaine contentieux. Même lorsqu'il n'est fait
aucune référence spécifique aux "principes généraux" ou une formulation
similaire, leur utilisation est implicite dans la préparation et la portée des accords
du droit international »1592.
Ainsi, les principes de protection du bien-être animal semblent avoir plus de chances d'être
consacrés dans un accord multilatéral. C'est pourquoi, tel que nous le verrons dans le chapitre
suivant, un accord conventionnel constitue une voie privilégiée en vue de la concrétisation des
fondements universels dégagés en droit international.
1588 CROWE, J. et K. WESTON-SCHEUBER, Principles of International Humanitarian Law, Edward Elgar, 2013. 1589 La valeur des principes de conduite universels serait supérieure aux principes qui ne figurent que dans des traités.
Voir FRANCK, T.M., "Non-Treaty Law-Making: When, Where and How ?", dans WOLFRUM, R. et R. VOLKER,
Developments of International Law in Treaty Making, Springer, pp.417-435, 2005, p.418. 1590 Id. (traduction libre). 1591 Voir le premier titre de cette étude. 1592 FRIEDMANN, W., op.cit., note 1539, p.189 (traduction libre).
284
- Conclusion du Chapitre 1
Puisant leurs racines dans les préceptes religieux et philosophiques universellement partagés à
travers le monde, l'interdiction de cruauté envers les animaux, comme l'obligation de bien les
traiter, constituent les règles de conduite générales du droit du bien-être animal.
Bien que les principes de non-cruauté et de bientraitance puisent leurs racines dans des
fondements éthiques universels et ancestraux, ces derniers ont dépassé le cadre éthique et
religieux pour revêtir le statut de véritables principes juridiques. Qu'ils soient explicitement
consacrés, comme le principe de non-cruauté, ou plus implicitement présents, comme le
principe de bientraitance, nous avons vu que ces principes sont présents à tous les niveaux
législatifs. En ce sens, ces principes généraux reflètent le "sens commun"1593 de l'ensemble
des législations anti-cruauté et pro-bien-être, tant au niveau national, qu'au niveau
supranational.
Nous avons vu que le principe de non-cruauté -qui concerne largement les interdictions de
causer des souffrances aux animaux- et le principe de bientraitance -qui vise les actions
bienveillantes en vue d'assurer le bien-être des animaux- peuvent être qualifiés de principes
généraux du droit du bien-être animal. Selon une interprétation progressiste de la théorie
générale des PGD, ces principes pourraient même se voir reconnaître un caractère universel et
potentiellement contraignant. Ainsi à la question de savoir :
« Est-il possible d'établir un quelconque consensus international sur la cruauté et
la compassion - et, si oui, [serait-il] suffisant pour contraindre la communauté
mondiale à s'y conformer ou à prohiber certaines conduites envers les
animaux ? »1594.
La réponse semble être oui. Tant en regard du fond juridique commun dégagé, que de leur
valeur universelle et potentiellement contraignante en tant que principes juridiques généraux.
Revenons sur les points importants caractérisant ces deux principes de conduite. Alors que le
principe de non-cruauté est l'axiome de base omniprésent dans les droits nationaux, le
principe de bientraitance est l'esprit englobant l'ensemble des prescriptions du droit du bien-
être animal à tous les niveaux envisagés.
1593 DUPUY, P.-M, Droit international public, Broché, 2006, p.345. 1594 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p. 29
(traduction libre).
285
- Le principe de non-cruauté envers les animaux a une valeur juridique universelle.
En effet, il tire sa haute valeur juridique de l'application de la théorie des principes généraux
de droit en droit international. Il s'agit d'un principe au sens propre du terme en tant que
précepte initial représenté dans le droit de la grande majorité des pays du monde, ainsi que
dans les droits internes représentatifs des grands systèmes juridiques contemporains.
Rappelons que ce principe souffre toutefois de nombreuses exceptions d'ordre culturel,
économique, religieux et bien d'autres venant protéger les intérêts humains avant ceux des
animaux. C'est pourquoi il se limite à l'interdiction des souffrances inutiles -dont la nécessité
est jugée à l'aune de certains intérêts humains- plutôt que de leur caractère objectivement
évitable par les recours à toutes les solutions disponibles (comme les produits de substitution
et méthodes alternatives) afin d'épargner systématiquement les animaux.
Nous avons vu que dans sa formulation comme dans sa vocation, le principe de non-cruauté
n’est pas sans faire penser aux principes existants en droit international, comme le principe de
non-agression ou de non-recours à la force. Ces principes visent ainsi à prohiber toute action
immorale par la négation qui précède. Rappelons également qu’il s’agit d’un principe
universel à tout point de vue. Ce principe est tout d’abord universel du fait qu’il est largement
présent en droit interne (dans l’ensemble des grands systèmes juridiques du monde en vertu
de la théorie des PGD), ainsi que dans certains instruments supranationaux. Il est également
universel en ce qu’il est consacré pour tous les individus, humains et non-humains, à l’image
des grandes déclarations des droits de l’homme et de l’animal qui évoquent ce principe.
Dans le même esprit, nous avons vu que certains principes du droit international humanitaire
rappellent ceux concernant les animaux. Parmi ces principes communs, l’interdiction des
souffrances inutiles constitue le seuil commun du droit du bien-être animal, ou norme
généralement acceptable par l’ensemble des pays du monde en matière de répression de la
cruauté. Le principe d’humanité est aussi à rapprocher du principe de bientraitance1595.
- Le principe de bientraitance animale est l'esprit général du droit du bien-être animal.
Plus "soft" (moins contraignant) que le principe de non-cruauté, le principe de bientraitance
est intimement lié à l'objectif de bien-être animal, puisqu'il implique de prendre toutes les
mesures en vue de sa réalisation comme le fait de prendre soin et de subvenir aux besoins des
animaux (généralement ceux qui sont placés sous la responsabilité des personnes humaines).
1595 Sur les principes d'interdiction des souffrances inutiles et d'humanité en droit international humanitaire,
voir CROWE, J. et K. WESTON-SCHEUBER, Principles of International Humanitarian Law, Edward Elgar, 2013.
286
Ce chapitre nous a permis d'identifier, de définir et de déterminer la valeur et la portée
juridiques des principes de non-cruauté et de bientraitance envers les animaux, en tant que
piliers du droit du bien-être animal. Alors que ces principes ne sont pas (encore ?) reconnus
par la communauté internationale, il est de plus en plus explicitement question du bien-être
animal, qui apparaît comme un nouvel objectif émergent au sein des instances mondiales.
Les principes identifiés peuvent ainsi constituer les fondements universels d'une protection
globale du bien-être animal, laquelle pourrait se concrétiser sous forme de convention adoptée
par l'ONU. Sachant que le droit international est en évolution constante, celle-ci répondrait à
la demande sociale croissante, afin de mieux protéger le bien-être animal.
287
CHAP.2- L'ADOPTION D'UNE CONVENTION GLOBALE
SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL1596
Sur la base des fondements dégagés, comment la protection du bien-être animal peut-elle se
concrétiser de manière universelle en droit international public positif1597 ?
Nous verrons dans ce chapitre qu'une convention globale constitue un mode privilégié en vue
de cette concrétisation, formalisation ou matérialisation1598, en droit universel1599.
Précisons que la concrétisation est une expression normative positive qui remplit également
une fonction révélatrice de Droit1600. Selon le Professeur Weil en effet :
« le procédé de développement du droit par voie de concrétisation croissante de la
norme se retrouve massivement dans le système [...] du droit international »1601.
1596 Les références spécifiques pour ce chapitre sont les suivantes : DANILENKO, G.M., Law Making in the
International Community, Martinus Nijhoff Pub., 1993 ; FRIEDMANN, W., The Changing Structure of International
Law, Stevens and Sons, 1964 ; GOWLLAND-DEBBAS, V., HADJ-SAHRAOUI, H. et N. HAYASHI, Multilateral
Treaty-making, Matinus Nijhoff Publishers, 2000 ; GURUSWAMY, L., International Law and World Order, West
Publishing Co., 1994 ; KAMMERHOFER, J. et J. D'ASPREMONT, International Legal Positivism in a Post-Modern
World, Cambridge University Press, 2014 ; NATIONS UNIES, Recueil des clauses finales des traités Multilatéraux,
Manuel préparé par la Section des traités du Bureau des affaires juridiques des Nations Unies, 2007 ;
OTETELECHANO, J., De la valeur obligatoire des traités internationaux, Thèse pour le doctorat, Université de Paris,
1916 ; ABBOTT, K.W. et D. SNIDAL, "Hard and Soft Law in International Governance", IO, 2000, pp.421-456 ;
BOISSON DE CHAZOURNES, L., "Treaty Law-Making and Non-Treaty Law-Making: The Evolving Structure of the
International Legal Order", dans WOLFRUM, R. et R. VOLKER, Developments of International Law in Treaty
Making, Springer, 2005, pp.463-480
BOYLE, A., "Some Reflections on the Relationship of Treaties and Soft Law", dans V. GOWLLAND-DEBBAS, H.
HADJ-SAHRAOUI et N. HAYASHI, Multilateral Treaty-making, Matinus Nijhoff Publishers, 2000, pp.25-38 ;
CHATZISTAVROU, F., "L’usage du soft law dans le système juridique international et ses implications sémantiques
et pratiques sur la notion de règle de droit", Le Portique, Revue de philosophie et de sciences humaines, Vol.15, 2005 ;
GUZMAN, A., "The design of International Agreements", EJIL, pp.579-612, 2005 ; KISS, A., "Les traités-cadre : une
technique juridique caractéristique du droit international de l'environnement", Annuaire français de droit international,
éditions du CNRS, vol.39, pp.792-797, 1993 ; TOOPE, S.J., "Redefining Norms for the 21st Century" dans LE
BOUTHILLIER, Y., Mc RAE, S.M. et D. PHARAND (eds.), Selected Papers in International Law: Contribution of
the Canadian Council on International Law, Kluwer International, 1999 ; VIRALLY, M., "A propos de la "lex
ferenda"", Le droit international en devenir: essais écrits au fil des ans, PUF, 1990, pp.213-223. 1597 Le "droit international public positif" renvoie aux normes formelles reconnues par la communauté internationale.
Voir à ce sujet CAVARÉ, L., Le droit international public positif, A. Pedone, 1951. 1598 En plus des notions de "matérialisation" ou de "formalisation" pouvant ici servir de synonymes au terme de
"concrétisation", les termes de "consécration" ou même de "réalisation" usités dans la science du droit peuvent aider à
circonscrire la notion choisie. Celle-ci permet néanmoins de mieux représenter le processus intellectuel décrit, à savoir
vérifier comment la protection du bien-être animal peut passer du statut d'objectif abstrait à celui d’objectif concret en
droit international. Notons aussi que le phénomène de "concrétisation" des normes est très présent dans la Théorie pure
du droit de Kelsen en tant que processus de création dynamique du droit. Voir J. STONE, Legal System and Lawyers'
Reasonings, Stanford University Press, 1964, p.112 (en référence à Kelsen). Notons aussi le terme de "concrétisation"
va au-delà de celui de celui de consécration puisqu'il implique une matérialisation concrète (au delà d'une simple
reconnaissance théorique). 1598 En plus des notions de "matérialisation" ou de "formalisation 1599 Le droit universel est ici synonyme du droit de l’ONU. 1600 Voir la thèse de Georges MARASCO, Expression et concrétisation du droit, Université de Paris, 1930, p.12. 1601 Voir WEIL, P., Le droit international en Quête de son identité, Académie de droit international de la Haye, 1996.
288
Mondialisée à tous les niveaux, la protection juridique du bien-être animal est une protection
universelle en devenir, notamment si elle en venait à faire l'objet d'un accord tel qu'une
convention globale, adoptée sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies (ONU).
Nous expliquerons tout d'abord pourquoi une convention globale constitue un instrument
privilégié en droit international (S.1), avant d'émettre des propositions en ce sens (S.2).
S.1- Justification d'une convention globale sur le bien-être animal
Qu'est ce qu'une convention globale sur le bien-être animal ? Il s'agit d'une convention-cadre,
c’est-à-dire couvrant tous les aspects de la protection du bien-être animal (§1), et d'une portée
universelle, c’est-à-dire potentiellement applicable à l'ensemble des pays du monde (§2).
§1- Les raisons d'une convention-cadre sur le bien-être animal
Présentons tout d'abord les raisons du choix portant sur le bien-être animal comme objectif
favorisé (A), avant celui d'une convention-cadre comme instrument privilégié (B).
A- Pourquoi sur le bien-être animal ?
Dans l'hypothèse d'une future convention, le bien-être animal apparaît comme un sujet
privilégié, au double sens du terme : en tant que sujet (ou thème) pour cette convention et afin
de reconnaître l'animal comme sujet (plutôt qu'objet) de droit international1602.
Il s'agit ainsi comme un concept privilégié, d'abord parce qu'il est mondialement reconnu (1)
et aussi parce qu'il émerge comme un nouvel objectif universel (2).
1- Un concept mondialement reconnu
Tout au long des développements précédents, nous avons vu que le bien-être animal est
mondialement consacré dans les législations existantes à tous les niveaux, tant dans les droits
nationaux (au sein des nouvelles lois de tous les systèmes de droit interne), qu'en droit
européen (dans les instruments du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne) ainsi que
dans le droit des organisations internationales (notamment dans les normes de l'OIE)1603.
D'après Robert Garner, le bien-être animal demeure, malgré ses faiblesses d'application, le
concept fort qui sous-tend l'ensemble du droit protégeant les animaux1604.
1602 Dans la continuité des conventions sur la conservation plus générale des espèces menacées, l'adoption de cette
convention permettrait la reconnaissance du statut de sujet de droit international pour les animaux en tant qu'individus
ou êtres sensibles (vs. espèces). 1603 Voir les titres précédents. 1604 GARNER, R., "The politics of animal rights", British Politics, vol.3, April 2008, pp. 110-119.
289
De plus, il est communément admis que ce concept suffisamment flexible pour permettre de
plus amples réformes, y compris la reconnaissance de droits pour les animaux1605.
D'une manière générale, la nécessité de protéger le bien-être des animaux est plus largement
reconnue que celle de leur octroyer des droits légaux1606. En effet, celle-ci est encore
débattue1607, même si les premiers balbutiements commencent à poindre dans certains
pays1608. En ce sens, la communauté des États est aujourd'hui prête à consacrer
universellement l'objectif de bien-être animal1609. Déjà largement entériné en droit interne
dans les législations étatiques, nous avons vu qu’il constitue désormais un nouvel objectif
mondial au sein de l'OIE.
Il n'est pas impossible de penser que la reconnaissance des droits avancera de sorte qu'il sera
un jour possible d'adopter un accord universel sur le respect des droits des animaux.
Toutefois, tel qu'il ressort de la lettre des législations actuelles, comme de leur interprétation
jurisprudentielle à l'échelle mondiale, l'acception du bien-être animal demeure encore
largement limitée au principe de traitement humanitaire. Selon celui-ci en effet :
« les animaux doivent bénéficier de la bienveillance et de la compassion des êtres
humains, sans pour autant remettre en question l’utilisation des animaux pour les
fins et les besoins des êtres humains »1610.
Or, nous avons vu que le droit du bien-être animal ne se limite pas, per se, au principe de
traitement humanitaire. En effet, certains droits internes sont déjà allés au-delà, en remettant
en cause certaines utilisations des animaux. En ce sens, plusieurs activités jugées comme
cruelles ont fait l'objet de diverses interdictions législatives.
Au niveau national, elles concernent notamment les spectacles (surtout les spectacles
sanglants comme les combats d'animaux et les corridas) ; la captivité des animaux sauvages
(dans les cirques et les zoos) et comme animaux de compagnie ; certaines activités de
1605 Id. 1606 Voir à ce sujet FRANCIONE, G. L. et R. GARNER, The animals’ rights debate: abolition or regulation? New
York, Columbia University Press, 2010. 1607 Id. 1608 Voir le premier titre de cette étude. 1609 En ce sens, le fait de poursuivre l'objectif de protection du bien-être animal serait plus largement accepté par les
États qu'une convention (ou traité) sur les droits des animaux aujourd'hui. Voir à ce sujet GIBSON, M., "The Universal
Declaration of Animal Welfare", Deakin Law Review, Vol.16, Issue 2, pp.539-567, 2011. 1610 LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit de la protection des animaux en
Occident", Lex Electronica, vol. 10, n 2 (numéro spécial), Automne 2005, p.3-4.
290
production (comme le secteur du foie gras et de la fourrure industrielle) ; et les
expérimentations (à des fins de recherche, d'éducation ou pratiquées sur les grands singes)1611.
Au niveau européen, citons principalement l'interdiction de tester les produits cosmétiques sur
les animaux, d'élever des poules pondeuses dans des cages en batterie et d'importer certains
produits, notamment les fourrures issues de pièges à mâchoires, de chiens et chats, ainsi que
l'ensemble des produits dérivés du phoque1612.
Ces premiers exemples d'interdictions peuvent ouvrir la voie à une remise en cause plus
substantielle de l'ensemble des instrumentalisations des animaux à l'échelle mondiale, et ce au
nom de la protection du bien-être animal. Sans pouvoir encore parler d'une démarche
réellement abolitionniste (visant la fin de toute utilisation et exploitation des animaux),
laquelle est liée à l’approche relative aux droits des animaux, ces interdictions reflètent
néanmoins une abolition partielle ou sectorielle (de certaines pratiques, méthodes et activités)
qui relève du nouveau courant sur la protection du bien-être animal reflété par les législations
les plus progressistes1613.
2- Un objectif universel émergent
Désormais mondialisée, la protection du bien-être animal semble tendre vers son
universalisation. Parmi les premiers indices d'universalisation, citons notamment :
- La consécration du bien-être animal comme nouvel objectif de développement durable (en
particulier dans le cadre des objectifs de production agricole durable) à la FAO (ONU)1614 ;
- La proposition de DUBEA, qui dispose d'un soutien politique et social croissant en vue
d'une éventuelle adoption par l'Assemblée générale des Nations Unies1615.
Ces prémisses reflètent l'universalisation actuelle des préoccupations de la société mondiale
en faveur d'une plus grande protection du bien-être animal. La communauté internationale
pourrait ainsi aller vers une considération plus globale de cette question en droit international.
Revenons brièvement sur chacune de ces manifestations à la FAO et dans la DUBEA.
1611 Voir le premier titre de cette étude. 1612 Voir le second titre de cette étude. 1613 Voir à ce sujet JOSSE, M., Militantisme politique et droits des animaux, éditions Droits des Animaux, 2013. 1614 Principle 8: UN Commitee on World Food Security, Principles for responsible Investment in Agriculture and Food
Systems, 2014. 1615 Voir en ligne sur le site de la WAP : www.worldanimalprotection.org.uk/about/animal-protection-beliefs (date
d'accès : 16.08.2014).
291
Au niveau universel, le bien-être animal fait désormais partie des nouveaux objectifs de
développement durable adoptés par la FAO en 2014. Ce nouvel objectif est donc entré à
l'ONU par la porte du développement durable.
Avec sa reconnaissance croissante au sein de grandes organisations mondiales, cet objectif
pourrait bien s’affirmer à l'avenir de manière autonome dans le droit de l'ONU.
Relevons avec intérêt que le "respect du bien-être animal" figurait déjà parmi les Objectifs du
millénaire pour une consommation durable, tels que proposés à l'ONU pour la période 2012-
20201616. À l'image du développement durable, et même indépendamment de celui-ci, le bien-
être animal pourrait ainsi devenir un "nouveau précepte idéologique du droit
international"1617.
Certains juristes s'accordent pour dire que ceux-ci sont essentiels pour l'évolution du droit en
général, et du droit international en particulier1618. Citons ici Marie-Laure Lambert-Habib :
« Les nouveaux concepts qui apparaissent dans le droit international sont
remarquables en ce qu'ils correspondent à une vision résolument moderne du
monde, que l'on peut considérer comme le fruit d'un progrès de la pensée et de
l'action collective humaines [...] Ces nouveaux concepts sont en premier lieu
modernes car ils sont globaux ou englobants: ils permettent d'embrasser dans un
concept ou une idée unique des éléments du réel qui étaient jusque là appréhendés
séparément »1619.
Rappelons également que la proposition de Déclaration universelle sur le bien-être animal
(DUBEA) bénéficie d'un soutien croissant1620. La dernière version de son texte provisionnel
émet l'idée que le bien-être animal est un principe devant être considéré universellement par
tous les gouvernements1621. Or, s'il peut se voir reconnaître le statut de principe, il revêtira
1616 Voir Declaration A/66/750 of the United Nations General Assembly, 20 March 2012, at 8 & 15. 1617 Voir KIEFFER, B., L'Organisation mondiale du commerce et l'évolution du droit international public, Larcier,
2008, p. 30. 1618 Notons toutefois que certains auteurs critiquent l'apparition de ces nouveaux concepts, que le professeur Melkevik
qualifie de "Novdroit". Voir MELKEVIK, B., "Parler "Novdroit"! Un désarroi saisi par la philosophie du droit", Revue
roumaine de droit privé, juin 2007, p.215. 1619 Voir LAMBERT-HABIB, M.-L., Le commerce des espèces sauvages: entre droit international et gestion local :
réflexions sur la CITES, L'Harmattan, 2000, p. 314. 1620 Plus de 2 millions de personnes, 330 organisations de protection (y compris l'OIE) et près d'une cinquantaine de
gouvernements soutiennent la DUBEA. Voir en ligne sur le site de l'organisation "World Animal Protection" :
http://www.worldanimalprotection.org.uk/about/animal-protection-beliefs (date d'accès : 16.08.2014). Voir l’Annexe
4. 1621 Id. Voir le texte provisionnel de 2007, Préamb., al.1.
292
alors une valeur supérieure à celle d'un simple concept ou d'objectif naissant en droit
international1622. La reconnaissance de ce statut principiel est-elle envisageable ?
A priori, rien ne semble empêcher que le bien-être animal fasse partie des futurs principes
reconnus en droit international1623, surtout s'il en venait à être consacré dans une convention.
Comme nous l'avons vu dans les titres précédents, le bien-être animal est non seulement un
concept, mais aussi un objectif juridique mondialisé. En effet, il est présent à tous les niveaux
juridiques (national, européen et international) précédemment envisagés. En vertu de son
énonciation récente au sein des normes et des décisions de grandes instances mondiales
comme l'OIE, l'OMC et la FAO, il est également possible d'affirmer qu'il constitue un objectif
émergent en droit international public.
Au-delà de sa nature de concept et d'objectif, est-il possible de parler de l'émergence d'un
principe de bien-être animal ?
En effet, à l'instar de nouveaux softs-concepts, aussi considérés de soft-principes lorsqu'ils
sont internationalement reconnus, à l'image du développement durable1624, celui-ci semble
être en train d'émerger sur la scène internationale. Sans contenu impératif en lui-même, ce
nouveau principe "instrumental" est en train de glisser vers le système de droit international
qui le requiert1625. Précisons que les principes instrumentaux importés en droit international
prospèrent, puisque ce système évolue en s'enrichissant de "principes communs
(instrumentaux)" avant de les transformer en "principes propres (normatifs)"1626.
Les principes instrumentaux font ici référence aux principes modernes du droit international,
ayant généralement une vocation universelle et pouvant englober de nombreux aspects et
sous-objectifs variés. Comme nous l'avons vu, les différents aspects du bien-être animal
couvrent les différentes formes d'utilisation des animaux à des fins alimentaires,
vestimentaires, médicales, pharmaceutiques, de compagnie ou de divertissement. Les sous-
objectifs du bien-être animal pourraient aussi concerner l'amélioration du traitement des
animaux utilisés, l'interdiction de toute forme de maltraitance et la suppression de toute
souffrance évitable.
1622 SANDS, P., Principles of International Environmental Law, Manchester University Press, 1995, p. 305. 1623 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, op.cit., note 1516, p.373. Notons que le terme de "principe", appliqué à une
notion juridique, n'est pas une "appellation contrôlée" en droit international. 1624 Sur le concept de développement durable, voir ARBOUR, J.-M. et S. LAVALLÉE, Droit international de
l’environnement, 2e éd., Yvon Blais, 2012, pp. 94-108. 1625 Sur la notion de principe instrumental, voir la définition des "Principes" selon Patrick Morvant, dans ALLAND, D.
et S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p.1203. 1626 Id., p.1204.
293
En outre, précisons que les activités des organisations internationales fournissent des graines
fertiles afin de faire évoluer le droit international en lui permettant d'adresser des sujets
émergents. À l'image de la protection du bien-être animal, ceux-ci font bien souvent l'objet
d'une demande d'une partie de la société mondiale qui réclame des réponses rapides1627.
Puisque le droit est en perpétuelle évolution, les principes internationaux offrent une base
suffisamment large pour permettre le développement continu du droit international en ce sens.
Les grandes instances mondiales, voire universelles au sein de l'ONU, commencent désormais
à se préoccuper explicitement du bien-être animal. Dans le système juridique international, le
droit du bien-être animal apparaît ainsi comme un droit in statu nascendi (ou droit à venir1628).
Le bien-être animal émerge ainsi comme un principe "nouvelle génération". Suite aux
principes environnementaux qui concernaient la préservation des animaux en tant qu'espèces,
il concerne la protection des animaux en tant qu'individus. En plus d'être consacré
explicitement à l'OIE où il fait l'objet d'un corpus de normes en développement croissant, il a
fait son entrée à l'OMC dans le cadre du commerce international de produits éthiquement
contestables. Bien qu'elle ne soit pas encore flagrante, cette considération croissante en faveur
de cet objectif contribue déjà à l'évolution du droit international. À l'image du principe de
précaution lors de son apparition, il semblerait ainsi que le concept de bien-être animal puisse
revêtir un "statut fort singulier et de haute valeur symbolique en droit", à savoir celui de
principe émergent en droit international1629.
Plus précisément, étant donné sa reconnaissance mondiale et son apparition récente dans le
droit de l'ONU sur la scène universelle, le bien-être animal peut ainsi être reconnu comme un
principe universel émergent en droit international.
Rappelons qu'il ne s'agit pas ici d'un principe juridiquement fort, comme le principe de non-
cruauté (dont nous avons précédemment établi la valeur juridique impérative et universelle en
droit international). En ce sens, nous avons vu qu'il s'agit plutôt d'un soft-principe à valeur
instrumentale, à l'image des nouveaux principes englobants du droit international. En effet,
ceux-ci émergent sur des sujets d'intérêt universel qui en viennent à être considérés de
manière globale par la communauté mondiale. À l'image du développement durable, le bien-
être animal constituerait ainsi un nouvel objectif universel, non seulement à considérer, mais à
1627 VOIGT, C., op.cit., note 1444, p.151. 1628 Voir la définition de "in statu nascendi" dans MAYRAND, A., Dictionnaire de maximes et locutions latines
utilisées en droit, Yvon Blais, 1985, p.123. 1629 Sur le principe de précaution dont est issu cette affirmation voir DUPUY, P.-M., "Le principe de précaution, règle
émergente du droit international", dans Le principe de précaution, Aspects de droit international et communautaire,
Paris, Éditions Panthéon-Assas, 2002, p. 95.
294
poursuivre par la communauté internationale. Au-delà d'être un objectif idéal moderne, il
s'agit initialement d'un impératif moral qui puise ses racines dans les préceptes de la sagesse
ancestrale. En ce sens, s'il passait du statut d'impératif moral à celui d'impératif juridique
universel, les animaux devraient, comme les êtres humains, voir leurs intérêts défendus par
tous les moyens disponibles en droit international. En ce sens, il est possible d'imaginer par
exemple la pénalisation internationale des crimes de cruauté envers les animaux.
Avant d'en arriver là en droit international prospectif, présentons une première étape
fondamentale constituée par l'adoption d'une convention universelle sur le bien-être animal.
B- Pourquoi une convention-cadre ?
Si une convention sur la protection du bien-être animal constitue un instrument privilégié (1),
l'adoption d'un cadre global revêt un intérêt fondamental afin d'en couvrir tous les aspects (2).
1- L'intérêt d'une convention comme instrument privilégié
Avant d'expliquer les avantages de cet instrument en lui-même, il convient de justifier
préalablement les raisons d'y recourir par rapport aux principes précédemment établis.
Certains auteurs soutiennent que les principes généraux, dont la valeur obligatoire et
universelle est établie, ont plus de force et d'intérêt en eux-mêmes qu'une convention dont la
faiblesse et l'insuffisance pour régler les problèmes sont légion1630. En effet, la recrudescence
d'adoption de conventions sur la protection de l'environnement ou la biodiversité n'ont pas
permis de résoudre définitivement ces problèmes pour autant. Notons qu'elles ont toutefois
permis l'universalisation d'une nouvelle conscience environnementale. Il est possible de
penser qu'une convention sur le bien-être animal aura le même effet, d'autant qu'il s'agit d'un
sujet de plus en plus d'actualité.
De plus, la voie conventionnelle est aujourd'hui reconnue par l'ONU comme la source
principale du droit international (en tant que droit écrit)1631. Et tous les sujets qui présentent
un intérêt pour la communauté internationale peuvent faire l’objet de ces accords, sans
1630 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.342-343: "le droit conventionnel, quand il existe, demeure
très "parcellaire", incomplet et insuffisant. Dans ces conditions, les principes généraux de droit jouent -avec la
coutume- un rôle irremplaçable. Il y a là une illustration frappante de la revanche et du triomphe du droit non-écrit
dans l'ordre international". 1631 Dans sa résolution 36/112 du 10 décembre 1981 intitulée "Examen de l'élaboration des traités multilatéraux",
l'Assemblée générale des Nations Unies a souligné l'importance des traités multilatéraux comme source principale du
droit international. Voir NATIONS UNIES, Recueil des clauses finales des traités Multilatéraux, Manuel préparé par
la Section des traités du Bureau des affaires juridiques des Nations Unies, 2007, p. vii.
295
exclusion a priori1632. Comme pour la protection du bien-être animal, Boisson de Chazournes
soutient qu'il est même nécessaire d'établir des normes internationales sur les nouveaux sujets
inscrits dans le processus de mondialisation1633.
Les avantages du droit écrit semblent incontestables quant à la clarté des principes et des
règles inscrites ; son mode de formation étant aussi plus rapide et mieux adapté aux besoins
actuels de la société mondiale1634. En ce sens, il serait justifié de fixer dans un texte écrit les
principales règles de protection du bien-être animal. Le processus de consécration de ces
règles fondamentales viendrait ainsi répondre à un objectif de sécurité juridique, tout en
permettant d'affirmer de nouveaux impératifs propres au système juridique international1635.
Comme pour le droit de la mer, la codification de ces règles permettrait la consolidation
textuelle d'éléments dispersés dans les différents systèmes juridiques1636, à travers la
cristallisation de nouvelles règles universelles1637
En ce sens, le rôle majeur joué par le positivisme dans la construction du droit international
actuel est indéniable1638. En ce sens, il est généralement reconnu que les conventions sont
devenues prioritaires dans l'élaboration du droit actuel de la Communauté mondiale. Cette
primauté du positivisme en tant que droit écrit dans le système international actuel ne vient
pas pour autant supplanter l'intérêt des principes généraux à la base du droit du bien-être
animal, ni à l'importance de celui-ci comme principe universel, ou au moins international, en
émergence sur la scène mondiale. Au contraire, l'idée d'une concrétisation textuelle par la voie
d'une convention globale viendrait compléter cette reconnaissance principielle et même
s'inscrire dans sa continuité. En ce sens, il a été traité des principes relatifs au bien-être
animal, ses piliers en droit général et son émergence en droit international, et il convient
désormais d'envisager leur consécration universelle au sein d'un accord général approprié.
Par delà les grands principes de fonds précédemment identifiés, la voie conventionnelle
mérite d'être abordée comme mode de formalisation privilégiée d'une protection universelle.
Une convention sur le bien-être animal permettrait ainsi de matérialiser et de révéler (de
1632 BOISSON DE CHAZOURNES, L., "Treaty Law-Making and Non-Treaty Law-Making: The Evolving Structure
of the International Legal Order", dans Wolfrum, R. et R. Volker, Developments of International Law in Treaty
Making, Springer, pp. 463-480, 2005, p. 463. 1633 Id., p. 464. 1634 COMBACAU, J. et S. SUR, op.cit., note 1538, p.76-77. 1635 ROCHE, C., Droit international public, 4e éd., Gualiano, 2010, p.32. 1636 Si la codification concerne généralement les règles coutumières, elle peut aussi concerner des sujets qui ne sont pas
encore réglés par le droit international. Notons que ce travail de codification est principalement l'œuvre de la
Commission du droit international, laquelle est notamment chargée de compiler les règles coutumières. 1637 COMBACAU, J. et S. SUR, op.cit., note 1538, p.75. 1638 KAMMERHOFER, J. et J. D'ASPREMONT, International Legal Positivism in a Post-Modern World, Cambridge
University Press, 2014.
296
manière explicite par écrit), l'existence des principes dégagés, en plus de consacrer d'autres
principes pertinents, flexibles et permettant de s'adapter aux évolutions de la protection
mondiale du bien-être des animaux et d'une éventuelle progression de leur statut, dépassant le
statut actuel extrêmement réducteur de biens appropriables et instrumentalisables à souhait.
En outre, une protection globale du bien-être animal est possible par le biais d'une
convention-cadre, qui permettrait un encadrement englobant tous les aspects du sujet.
2- L'intérêt d'un cadre global comme instrument fondamental
Outil en vogue, la convention-cadre est notamment utilisée pour les sujets émergents qui
requièrent l'établissement d'un cadre global. En l'occurrence, l'adoption d'une convention-
cadre sur la protection du bien-être animal permettrait de poser un cadre réglementaire
pertinent pour consacrer ses fondations universelles, ou principes fondateurs. Adapté à
l'élaboration d'un nouveau régime de droit international, il s'agirait d'un cadre global, c'est-à-
dire à la fois englobant (couvrant tous les aspects de cette protection) et universel
(s'appliquant universellement à tous les pays du monde).
L'un des avantages d'une convention-cadre consisterait ainsi à établir les bases d'un régime de
protection universel, vers la création d'une nouvelle branche : le droit international du bien-
être animal. En tant qu'instrument de base, son rôle consisterait notamment à poser les grands
principes qui sous-tendent cette protection, tout en permettant à ce nouveau domaine du droit
international d'émerger et de se développer, en laissant place à la formulation de règles plus
détaillées sur les différents aspects de cette protection par la suite. Dans son article sur le rôle
des "principes" dans le développement du droit international, Michel Virally confirme cette
fonction de l'accord-cadre en ces termes :
« un instrument international établissant un régime juridique déterminé se borne à le
définir dans ses grandes lignes, en laissant à d'autres décisions le soin de le compléter,
en tenant compte éventuellement des particularités propres à chacune des situations
auxquelles il sera appliqué »1639.
En tant qu'instrument fondateur de nouveaux régimes du droit international, la convention-
cadre a notamment été utilisée à la fin du XXe siècle concernant la protection de
l'environnement1640. Dans cette continuité, les problèmes mondiaux relatifs aux différentes
1639 VIRALLY, M., Le droit international en devenir : essais écrits au fil des ans, PUF, 1990, p. 196. 1640 En effet, suite à la résolution recommandant à l'Assemblée générale de l'ONU de traiter de la question
environnementale en 1968, la déclaration de Stockholm fut adoptée en 1972, puis la Charte mondiale de la Nature en
297
instrumentalisations des animaux pourraient être considérés par l'ONU selon un processus
similaire. Partant de la demande croissante de traiter mondialement la question du bien-être
animal1641, une résolution onusienne pourrait ainsi suggérer à l'Assemblée générale d'aborder
cette question.
Cette discussion pourrait éventuellement mener à l'adoption de la proposition de Déclaration
universelle sur le bien-être animal, voire à l'adoption d'une convention-cadre sur cette
question.
Le principal objectif des conventions-cadres est d'énoncer des principes, sachant que les
détails réglementaires sont généralement apportés par d'autres textes conventionnels qui leur
seront liés1642. L'accord-cadre constitue ainsi un "pactum de contrahendo" atténué, exprimant
l'intention des parties d'accepter des obligations plus précises1643. Selon Alexandre Kiss :
« Aujourd'hui, on s'oriente vers des formules de négociation permanente où l'adoption
d'un traité-cadre est une importante étape, mais seulement une étape. Ces processus
permettent non seulement aux négociateurs et aux gouvernements de se familiariser
avec de nouveaux principes devenus nécessaires, mais aussi à l'opinion publique et aux
milieux intéressés de mieux suivre le développement des systèmes en construction et
d'apporter leur point de vue, voire leur contribution »1644 (soulignés par nous).
Une convention-cadre constitue un instrument privilégié en vue de la concrétisation d'une
protection universelle du bien-être animal en droit international. Le professeur David Favre
soutient aussi la nécessité d'un tel instrument1645. En effet, un accord englobant permettrait
notamment de consacrer des bases de protection pour tous les animaux, dans le cadre de
toutes les activités et pour tous les pays du monde.
Un accord global présenterait ainsi l'intérêt d'offrir une base reflétant une vision universelle.
1982, et ensuite la déclaration de Rio en 1992, avec les 3 grandes conventions-cadres adressant les problèmes globaux
relatifs à la déforestation, la perte de la biodiversité et les changements climatiques. 1641 Cette affirmation fait notamment référence au soutien croissant dont bénéficie la DUBEA (voir ci-dessus). 1642 KISS, A., "Les traités-cadre : une technique juridique caractéristique du droit international de l'environnement",
Annuaire français de droit international, éditions CNRS, vol.39, pp.792-797, 1993, p.795. 1643 "Le "Pactum de contrahendo" est une expression latine utilisée en droit international, pour désigner une
convention préalable à la négociation d'un accord international dans laquelle les représentants des États signataires
établissent la liste des questions sur lesquelles portera une future négociation et par laquelle ils déterminent les limites
de ce qui est négociable". Dictionnaire juridique en ligne : http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/pactum-
de-contrahendo.php (date d'accès : 13.08.2014). 1644 KISS, A., op.cit., note 1642, p.797. 1645 "The Need for an Animal Welfare Treaty", FAVRE, D. S., "An international Treaty for Animal Welfare", Animal
Law review, Vol. 18, Issue 2, pp. 237-280, 2012, p. 243.
298
§2- Les raisons d'une convention à valeur universelle sur le bien-être animal
Une convention universelle sur le bien-être animal permettrait d'établir une base de protection
commune pour tous les États (A) et constitue également un instrument à la fois adapté et
adaptatif en regard de la construction du droit international public contemporain (B).
A- La portée universelle comme base de protection commune pour tous les États
En plus de couvrir tous les animaux et activités dans le monde, cette convention ne serait
véritablement globale qu'à condition d'être applicable dans tous les pays du monde.
De nos jours, l'adoption d'accords véritablement universels passe par l'Assemblée générale
des Nations Unies, laquelle réunit à ce jour l'ensemble des 193 États souverains de la planète.
Le droit international s'est progressivement universalisé1646. Comme nous l'avons vu, le droit
universel par excellence est le droit de l'ONU (en tant que seule organisation
intergouvernementale véritablement universelle puisqu’elle réunit tous les Etats souverains).
L'une des caractéristiques du droit universel est sa grande souplesse puisqu'il doit tenir
compte des disparités existantes entre les pays et refléter l'hétérogénéité propre à la
communauté mondiale dans son ensemble. Son rôle est néanmoins de transcender leurs
disparités afin de mettre en lumière les universalités qui rassemblent tous les pays sur des
objectifs communs.
Conformément à notre argumentation dans cette section, Louis Cavaré confirme que le droit
universel est avant tout un outil de concrétisation de principes juridiques universels :
« On doit comprendre d'abord, dans le [droit] universel, les grands principes
normatifs qui dominent tout le système juridique, qui doivent s'imposer
inéluctablement à tous les sujets de droit [...]. Ce sont là des principes qui
dominent toute société humaine »1647.
En ce sens, une convention-cadre sur la protection du bien-être animal formerait une base
universelle venant pallier, d'une part à une lacune existante à ce sujet en droit international et
d'autre part, à l'absence de législation relative à cette protection dans certains États.
Tel qu'il a été évoqué dès l'introduction de cette étude, il n'existe à ce jour aucun accord
multilatéral portant spécifiquement sur la protection du bien-être animal de manière globale.
1646 CAVARÉ, L., Le droit international public positif, Pedone, 1967, p. 210. 1647 Id., p.211.
299
En ce sens, notre question de départ concerne la possibilité (ou non) de pouvoir dégager et
concrétiser une base juridique universelle permettant de pallier à cette lacune1648.
Plusieurs tentatives ont déjà eu lieu, mais aucune n'a donné lieu à l'adoption d'un accord signé
par les États. Citons notamment le projet de convention internationale sur la protection
animale1649 et la Déclaration universelle sur les droits de l'animal proclamée en 1978 à
l'Unesco, comme pionnière à valeur non contraignante mais hautement symbolique1650.
Si la manifestation des droits juridiques pour les animaux en est encore à un stade
embryonnaire, tel que reflété dans le droit positif de quelques pays du monde1651, la question
du bien-être animal est, tel que nous l'avons vu, en plein essor à l'échelle mondiale. C'est
pourquoi il semblerait que la communauté mondiale soit aujourd'hui, bien plus qu'avant, prête
à traiter de cette question au sein d'un accord universel sous l'égide de l'ONU.
Les accords-cadres à portée universelle forment une ombrelle (de l'anglais "umbrella") qui
vient suppléer à l'absence de législation dans certains pays. En l'occurrence, les principaux
pays sans législation sont les pays en développement, notamment en Afrique et au Moyen-
Orient, ainsi qu'en Asie (malgré le nombre croissant de lois adoptées sur ce continent)1652.
Un instrument de protection universel pourrait aussi permettre de faire avancer cette
protection, surtout là où aucun instrument de protection n'existe, voire là où aucune
conscientisation de leur nécessité n'a encore été effectuée, comme dans de nombreux pays
d'Afrique et du Moyen-Orient1653.
Une base de protection commune du bien-être animal peut néanmoins être entendue entre les
différents pays du monde, puisque, tel que nous l'avons fait ressortir, il existe déjà un fond
juridique commun sur la protection du bien-être animal.
En matière de protection du bien-être animal, il existe plusieurs types de pays : les pays non-
protectionnistes (ne disposant pas de lois de protection), les pays faiblement protectionnistes
(disposant d'une protection minimale), les pays moyennement protectionnistes (disposant
1648 Voir l'introduction générale de cette étude. 1649 Ce projet, resté sans suite à ce jour, a été initié par le Professeur américain David Favre dans les années 1980. Voir
FAVRE, D. S., “Movement toward an international convention for the protection of animals”, dans BLACKMAN,
D. E., Animal welfare and the law, Cambridge University Press, pp. 247-269, 1989. 1650 Déclaration universelle sur les droits de l'animal, proclamée solennellement le 15 octobre 1978 à la Maison de
l'Unesco à Paris. Voir à ce sujet CHAPOUTHIER, G. et J.-C. NOUËT (ed.), The universal declaration of animal
rights, comments and intentions, Éditions Ligue Française des Droits de l’Animal, Paris, 1998. 1651 Ex : La loi turque de 2004 reconnaît le droit à la vie des animaux et des lois espagnole et néo-zélandaise interdisent
l'expérimentation sur les grands primates en leur reconnaissant des droits fondamentaux. Voir le 1er titre de cette étude. 1652 Ces pays sont indiqués en clair dans la carte de l'Annexe I. 1653 Id.
300
d'une protection ordinaire) et enfin les pays protectionnistes (disposant d'une protection
supérieure comme les pays nord-européens et anglo-saxons, pionniers dans ce domaine).
Une base commune peut-elle être consacrée malgré les disparités existantes entre les
différents pays du monde ? Même si ces divergences sont bien réelles, nous avons vu
précédemment que les normes de protection tendent également à converger vers de grandes
prescriptions communes (qui sont liées aux principes de non-cruauté et de bientraitance).
Concernant l'élaboration d'une convention universelle, il convient aussi de préciser que :
« Plus nombreux sont les États qui se présentent en une solide ligne de file
derrière une proposition donnée, plus lourd est le poids que l'on reconnaîtra à cette
proposition »1654.
Un nombre croissant de pays disposent de lois de protection des animaux, avec à ce jour 107
pays inventoriés. Rappelons également que les normes de l'OIE sur le bien-être animal sont
endossées par non moins de 180 pays à ce jour et que le concept de bien-être animal fait
désormais partie du vocabulaire de l'ONU qui réunit l'ensemble des États de la planète.
De plus, un nombre grandissant de pays soutient l'idée d'une protection universelle du bien-
être animal à travers le projet de Déclaration universelle pour le bien-être animal (DUBEA).
B- Le caractère adapté et adaptatif d'une convention universelle sur le bien-être animal
Les nouveaux instruments comme les conventions globales présentent plusieurs avantages
pour la construction du droit international. Les nouvelles conventions permettent notamment
de fournir un cadre spécifique sur un sujet donné, tout en permettant d'adapter les grands
principes consacrés aux évolutions contemporaines, grâce à leur caractère flexible et de plus
en plus adapté au developpement actuel du droit international et de ses nouvelles branches1655.
Au sens large, les termes de "traité" et de "convention" sont généralement entendus comme
synonymes. Au sens strict, les conventions doivent être ratifiées par les États pour obtenir la
force juridique attribuée aux traités internationaux1656. De nos jours, les accords multilatéraux
adoptés dans les nouveaux domaines du droit international sont moins qualifiés de "traités"
que de "conventions". En ce sens, les conventions et en particulier les conventions-cadres
1654 SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques. Observations sur un
nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, pp. 501-540, 1963, p. 514. 1655 Voir HELFER, L.R., "Flexibility in International Agreements", Interdisciplinary perspectives on international law
and international relations, Jeffrey Dunoff & Mark A. Pollack, eds., Cambridge University Press, 2013, pp. 175-196. 1656 A. BOYLE, "Some Reflections on the Relationship of Treaties and Soft Law", dans V. GOWLLAND-DEBBAS,
H. HADJ-SAHRAOUI et N. HAYASHI, Multilateral Treaty-making, Matinus Nijhoff Publishers, 2000, p.27.
301
forgent désormais la construction du droit international contemporain, sachant qu'elles
concernent certaines branches récentes comme le droit international de l'environnement1657.
Malgré l'adéquation actuelle des instruments conventionnels, les normes adoptées à l'issue des
grandes discussions diplomatiques aux fins d'adoption de conventions internationales ne sont
pas "idéales" comme le relèvent les professeurs Jean-Maurice Arbour et Sophie Lavallée :
« Les formules alambiquées, les obligations de moyen, la prise en compte de
situations particulières, les clauses de style du genre "dans la mesure du possible
et selon qu'il conviendra" et les exceptions à la règle générale sont encore le lot de
très nombreuses conventions »1658.
Ainsi, dans le cas où une convention universelle sur la protection du bien-être animal en
venait à être discutée, celle-ci ne serait sans doute pas exempte de ce type d'allègements.
Mais en application de la règle du plus petit dénominateur commun1659, une base de
protection minimale du bien-être animal peut être entendue entre les pays du monde, puisqu'il
existe déjà un fond juridique commun mis en lumière par cette étude. Ce point n'est pas
négligeable.
De nos jours, la Communauté internationale est plus encline à élaborer des instruments qui
laissent une grande liberté d'action aux États. En ce sens, ils contiennent ce type d'allègements
et les instruments de "soft law" (ou droit mou) sont plus fréquemment adoptés que ceux de
"hard law" (ou droit dur)1660. Le professeur Weil relève ainsi que les instruments actuels
témoignent d'une "normativité relative" ou plus atténuée en droit international1661.
Si la protection du bien-être animal en venait à se concrétiser de manière universelle, il est
possible que cette concrétisation passe ainsi par des instruments de "soft law" dans un premier
temps, à l'image de la Déclaration universelle sur le bien-être animal ; avant de permettre la
reconnaissance de normes plus contraignantes en droit international, à l'image des principes
généraux dégagés, qui pourraient être consacrés dans une convention universelle1662.
1657 Voir KISS, A., op.cit., note 1642, 1993. 1658 Id. 1659 La règle du plus petit dénominateur commun est la "solution la moins contraignante susceptible de rallier le plus
grand nombre", ARBOUR, J.-M. et S. LAVALLÉE, Droit international de l’environnement, 2e éd., Yvon Blais, 2012,
p.93. 1660 BEDJAOUI, M. et H. THIERRY, Droit international, Bilan et Perspectives, Pédone, 1991, p. 1309. 1661 WEIL, P., "Vers une normativité relative en droit international ?", RGDIP, 1983, pp.5-47. 1662 Les instruments de "soft law" peuvent parfois constituer une simple étape préalable à la "hard law", sachant que
les glissements entre soft law et hard law sont souvent imperceptibles Par exemple "le droit de l'OMC fournit des
illustrations convaincantes de ce phénomène". KIEFFER, B., L'Organisation mondiale du commerce et l'évolution du
droit international public, Larcier, 2008, p.27.
302
Quelles sont les points de comparaison entre une convention et une déclaration universelles ?
Alors qu'une convention est plus contraignante qu'une déclaration1663, les deux peuvent
permettre de consacrer de grands principes propres à une matière donnée1664. Dans sa thèse
sur la valeur obligatoire des traités internationaux, Otetelechano émet cette précision :
« Pour que les obligations résultant d'une convention internationale aient un
caractère juridique, il faut que chaque Etat apprécie ces obligations non d'après
son propre droit, qui pourrait être différent de celui de l'autre partie contractante,
mais d'après des principes communs, des principes de droit international »1665.
En pratique, une convention signée mais non ratifiée par un Etat peut toutefois s'avérer
contraignante pour celui-ci, à partir du moment où elle consacre des principes généraux à
valeur universelle1666. Ainsi, une convention qui consacrerait par exemple le principe de non-
cruauté pourrait donner un caractère obligatoire aux obligations qui en découlent, si sa valeur
de principe universel était préalablement reconnue par la communauté internationale1667.
Rappelons également qu'une convention pourrait permettre d'ériger une norme générale
comme la protection du bien-être animal en principe général du droit international (PGDI)1668.
À l'image des autres concepts ou objectifs émergents sur la scène internationale, le bien-être
animal pourrait ainsi devenir un principe général du droit international s'il en venait à être
consacré par une convention internationale, à l'image de celle envisagée. Pour devenir un
PGDI, toute norme doit être préalablement reconnue formellement par la voie coutumière ou
conventionnelle et faire ainsi partie des principes reconnus en droit international positif1669.
En ce sens, les principes de précaution et de développement durable font désormais partie des
principes généraux du droit international de l'environnement1670. Ainsi, rien ne semble
empêcher que, comme d'autres principes d' "énonciation contemporaine"1671, le bien-être
animal soit reconnu à l'avenir comme un principe international dans une convention1672.
1663 Voir ABBOTT, K.W. et D. SNIDAL, "Hard and Soft Law in International Governance", IO, 2000, pp.421-456. 1664 Voir BOYLE, A., "Some Reflections on the Relationship of Treaties and Soft Law", dans V. GOWLLAND-
DEBBAS, H. HADJ-SAHRAOUI et N. HAYASHI, Multilateral Treaty-making, Matinus Nijhoff Publishers, 2000,
pp.25-38. 1665 OTETELECHANO, J., De la valeur obligatoire des traités internationaux, Thèse pour le doctorat, Université de
Paris, 1916, p.8. 1666 Voir BROWNLIE, I., Principles of International Public Law, 4th ed., 1990, p.12. 1667 Voir la section précédente. 1668 BROWNLIE, op.cit., note 1666, p.13. 1669 DAILLIER, P., FORTEAU, M. et A. PELLET, Droit international public, L.G.D.J., 2009, p.381. 1670ARBOUR, J.-M. et S. LAVALLÉE, Droit international de l’environnement, 2e éd., Yvon Blais, 2012, p.93 : il
s'agit des "principes fondamentaux qui sont propres au droit international de l'environnement" (décrits aux pp. 93-146). 1671 DUPUY, P.-M. et Y. KERBRAT, op.cit., note 1516, p.376. 1672 Celui-ci pourrait être consacré comme principe suis generis ou comme appartenant à une branche qui reste
également à reconnaître, à savoir le droit animal international.
303
Enfin, si une convention globale sur le bien-être animal en venait à être adoptée par la
Communauté des États, sa ratification pourait notamment avoir comme effet de permettre
l'adoption de nouvelles législations nationales sur le bien-être animal (plus complètes et plus
actuelles), la consécration d'un nouveau statut juridique pour les animaux, plus conforme à
leur nature d'être vivant sensible et tenant compte des connaissances éthiques et scientifiques
actuelles, ainsi que le renforcement global des mesures protectrices du bien-être des animaux.
Après avoir expliqué les avantages d'une convention globale et englobante sur le bien-être
animal, voyons ses possibles voies d'adoption et d'application, comme son contenu possible.
S.2- Proposition de convention globale sur le bien-être animal
Présentons d'abord les voies retenues pour l'adoption et l'application d'une convention globale
sur le bien-être animal (§1), avant de formuler une proposition de son contenu possible (§2).
§1- Les voies d'adoption et d'application possibles
Après ses possibles voies d'adoption (A), nous présenterons brièvement quelques options
d'application d'une éventuelle convention sur la protection du bien-être animal (B).
A- Voies d'adoption d'une convention globale sur le bien-être animal
Tel que nous venons de l'évoquer, la Déclaration universelle sur le bien-être animal
(DUBEA) pourrait être un tremplin vers l'adoption d'une convention globale à ce sujet.
Initiée par l'organisation mondiale de protection animale (WSPA devenue WAP1673), cette
déclaration d'initiative populaire présente à la fois l'intérêt et l'originalité de puiser sa force
dans les racines de la société civile. En effet, cette déclaration bénéficie d'un soutien
important. Plus de 2 millions de personnes, 330 organisations de protection (y compris l'OIE)
et une cinquantaine de gouvernements soutiennent officiellement la DUBEA1674. Son
caractère populaire inédit est un atout en faveur de son adoption par l'Assemblée générale des
Nations Unies.
En projet depuis 2005, cette déclaration de principes est, par définition, sans valeur
contraignante. Mais elle pourrait permettre la reconnaissance universelle d'éléments
fondamentaux comme le fait que "le bien-être animal doit être un objectif commun à tous les
1673 WSPA : World Society for the Protection of Animals ; WPA : World Animal Protection. 1674 Voir en ligne sur le site de l'organisation "World Animal Protection" :
http://www.worldanimalprotection.org.uk/about/animal-protection-beliefs (date d'accès : 16.08.2014).
304
États" et que "les animaux sont des êtres vivants, sensibles, capables de souffrir et qu'ils
méritent par conséquent respect et considération"1675.
De plus, relevons que le texte provisionnel de 2007 prévoit que :
« Le bien-être animal est un principe qui doit être pris en considération par les
gouvernements » (entendus comme tous les gouvernements)1676.
Principe déjà mondialisé, le bien-être animal apparaît bien comme un principe universel en
devenir s'il en venait à être entériné par l'Assemblée générale des Nations Unies à travers
l'adoption de cette déclaration ou d'un autre instrument comme une convention-cadre.
Pourquoi une éventuelle convention sur le bien-être animal devrait-elle être endossée par cette
assemblée ? Tout d'abord pour pouvoir revêtir une valeur juridique véritablement universelle,
puisque cette assemblée est constituée par l'ensemble des représentants des États souverains
de la planète. Aussi parce que cette assemblée est chargée de faire évoluer le droit
international en abordant les nouvelles préoccupations mondiales1677. En effet, selon l'Art. 13
de la Charte des Nations Unies :
« L'Assemblée générale provoque des études et fait des recommandations en vue
[...] [du] développement progressif du droit international et sa codification »1678.
De nos jours, force est de constater que le droit international est moins le fruit de la volonté
des États pris individuellement que de la communauté internationale prise dans son
ensemble1679. Issues de longues négociations, les grandes conventions multilatérales obéissent
le plus souvent à la règle du consensus et de la majorité1680. En effet, la règle du consensus est
désormais d'une importance cruciale pour l'adoption d'accords multilatéraux. Ceux-ci sont le
plus souvent négociés dans le cadre d'organisations intergouvernementales et au sein des
institutions spécialisées de l'ONU pour les accords universels1681. Concernant ces derniers, il
convient de noter que leur universalité va de pair avec certaines difficultés. En effet, plus les
États sont nombreux, plus les divergences sont présentes, surtout lorsque les accords
1675 Respectivement le premier principe et le premier alinéa du préambule de la proposition de Déclaration universelle
pour le bien-être animal. Voir l'Annexe 4. 1676 Id., Préamb., al.1. 1677 FRANCK, T.M., "Non-Treaty Law-Making: When, Where and How?", dans WOLFRUM, R. et R. VOLKER,
Developments of International Law in Treaty Making, Springer, pp.417-435, 2005, p.422. 1678 Art.13-1 (a) de la Charte des Nations Unies, 1945. 1679 DANILENKO, G.M., op.cit., note 1508, p.193. 1680 BOYLE, A., "Some Reflections on the Relationship of Treaties and Soft Law", dans V. GOWLLAND-DEBBAS,
H. HADJ-SAHRAOUI et N. HAYASHI, Multilateral Treaty-making, Matinus Nijhoff Publishers, pp.25-38, 2000,
p.27. 1681 Voir par exemple l'article sur les organisations internationales dans VIRALLY, M., Le droit international en
devenir: essais écrits au fil des ans, PUF, 1990, pp.169-194.
305
impliquent la totalité des États de la communauté internationale1682. La tâche est toutefois plus
aisée lorsqu’un fonds juridique commun a pu être identifié1683. Tel est le cas dans le cadre de
cette étude qui a notamment permis de dégager l'existence de principes juridiques communs
en matière de protection du bien-être animal. Ainsi, les négociations risquent moins de se
heurter aux principes eux-mêmes qu'à leurs effets juridiques et aux règles spécifiques qui
pourraient en être dégagées.
Sachant que la majorité des pays du monde disposent de lois protectrices du bien-être animal,
une telle résolution pourrait voir le jour, afin de recommander à l'Assemblée générale
d'aborder cette protection au sein d'un accord universel (conduisant éventuellement à
l'adoption une convention). En effet, précisons que les résolutions de l'ONU jouent un rôle
crucial pour la prise en compte de nouvelles problématiques à l'échelle mondiale1684.
La Commission du droit international (CDI) pourrait également jouer un rôle important si elle
en venait à considérer le bien-être animal comme un nouvel objectif d'intérêt universel, tel
qu'il a été établi dans cette thèse. En effet :
« Aux termes de l'article 23 de son Statut, la CDI peut recommander à
l'Assemblée générale de l'ONU de recommander le projet aux membres en vue de
la conclusion d'une convention ou de convoquer une conférence pour conclure
une convention »1685.
Outre les voies d'adoption proposées, voyons quelles pourraient être les voies d'application
d'une convention globale sur le bien-être animal.
B- Voies d'application d'une convention globale sur le bien-être animal
L'organisation responsable de l'application d'une convention sur le bien-être animal pourrait
être, par exemple, une nouvelle institution spécialisée de l'ONU, laquelle pourrait s'appeler
par exemple l'UNAP pour "UN Animal Programme"1686. Comme les autres organismes en
charge de faire appliquer des conventions onusiennes, à l'instar du Secrétariat de la
Convention sur la Diversité Biologique, cette organisation pourrait se charger d'établir des
1682 VERHOEVEN, J., Droit international public, Larcier, 2000, p.38. 1683 Voir à ce sujet SCHLESINGER, R.B. et P. BONASSIES, "Le fonds commun des systèmes juridiques.
Observations sur un nouveau projet de recherches", Revue internationale de droit comparé, vol. 15, n° 3, Juillet-
septembre 1963, pp. 501-540. 1684 BROWNLIE, I., op.cit., note 1666, p. 168. 1685 ARBOUR, J.-M. et G. PARENT, op.cit., note 1551, p. 91. 1686 Ou plus spécifiquement sur le bien-être animal UNAWP (UN Animal Welfare Protection) sur le modèle de l'actuel
Programme des Nations Unies pour l'Environnement (en anglais UNEP : "UN Environment Program").
306
documents d'information, de solliciter aux États-membres des rapports d'application annuels,
d'organiser des conférences régulières (bisannuelles ou d'une autre fréquence) etc.1687.
Il serait également dans l'intérêt de la bonne application de cette convention, de développer
des collaborations avec les autres organismes chargés des conventions existantes sur la
protection des espèces animales sauvages en droit international (comme la CITES, la CMS et
la CBI), ainsi qu'avec des organismes intéressés par le bien-être animal comme l'OIE et, en
vertu de son importance en droit international comme de son intérêt récent à ce sujet, l'OMC.
D'une manière ouverte aux différentes possibilités, les voies d'application d'une convention
sur la protection du bien-être animal pourraient être de nature juridique ou extra-juridique.
Sur le plan juridique, le contrôle de l'application et la prise en charge des différends afférents
à une éventuelle convention onusienne sur le bien-être animal pourraient passer par la CIJ. En
effet, celle-ci pourrait assurer l'application de ses dispositions dans le cas de différends qui lui
seraient soumis. Par exemple, dans sa récente décision de 2014, la CIJ a ainsi permis de faire
appliquer le moratoire sur la chasse commerciale à la baleine en condamnant le Japon, sur la
base de la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine1688.
Quant à la voie extra-juridique proposée, les sanctions économiques s'avèreraient privilégiées.
Un tel système de sanctions pourrait être prévu, par exemple, dans la convention elle-même
ou un protocole annexe, en cas de non-respect des normes de protection du bien-être animal.
En effet, tel qu'il ressort nettement du fonctionnement de l'OMC, le système des sanctions
économiques apparaît comme étant le plus fort actuellement disponible en droit international.
Dans sa décision Crevettes-tortues I de 1998, l'OMC a affirmé que les restrictions
commerciales représentent "l'arme la plus lourde" dont un pays dispose pour s'opposer à un
processus dommageable, tant envers l'environnement que pour la protection des animaux1689.
Si les restrictions sont jugées contraires aux règles du commerce international, l'OMC est en
mesure de prononcer des sanctions très lourdes1690. Puisque la labellisation des produits
éthiquement responsables est de plus en plus discutée à l'OMC (dans le cadre des écolabels),
1687 Ces exemples sont issus de l'expérience professionnelle de l'auteure au Secrétariat de la CBD à Montréal. 1688 Cour internationale de Justice, Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon ; Nouvelle-Zélande
(intervenant) ), Arrêt du 31 mars 2014. Voir le Titre précédent. 1689 ARCHIBALD, C. J., “Forbidden by the WTO? : discrimination against a product when its creation causes harm to
the environment or animal welfare”, Natural Resources Journal, vol. 48, chap. 1, 2008, p.18. 1690 European Communities - Measures affecting meat and meat products, 13.02.1998, WT/DS26/AB/R 7-
WT/DS48/AB/R. Voir à ce sujet SINGER, P, “L’Organisation mondiale du commerce : un obstacle au progrès de la
protection légale des animaux”, Les cahiers antispécistes, n°274, CA n°25, 2005, p.5. Citons par exemple les 116
millions de dollars que l'UE a dû régler aux Etats-Unis pour exporter ses produits agricoles suite à l'affaire du bœuf
aux hormones.
307
une labellisation internationale des produits respectueux du bien-être animal constitue
également une voie extra-juridique prometteuse à prendre en compte en vertu de son attrait
potentiel pour les consommateurs soucieux de faire des choix éthiques et plus éclairés1691.
En dehors des normes publiques de nature juridique, à l'image des législations nationales et
européennes, ou de nature quasi-juridique, à l'image des codes de bien-être dans les pays
anglo-saxons et des recommandations internationales, les initiatives privées permettent aussi
de faire avancer mondialement la protection du bien-être animal. Cette normalisation privée
est notamment encouragée par l'OIE afin de mieux protéger le bien-être des animaux1692.
Par exemple, il est possible de citer les initiatives de certaines grandes compagnies de
restauration, dont les antennes sont présentes partout dans le monde comme les enseignes
Subway, Mc Donald’s ou Tim Hortons. Par exemple, au Canada, la compagnie Tim Hortons a
annoncé en 2013 la prise d'initiatives importantes pour le bien-être animal, contre les
méthodes de confinement intensif dans des stalles (pour les truies) et les cages en batterie
(pour les poules pondeuses)1693.
L'ensemble de ces initiatives, tant juridiques qu'extra-juridiques, mériteraient d'être
encouragées et développées, à l'image de l'information, de la sensibilisation et de l'éducation
du grand public, vers une meilleure protection du bien-être animal partout dans le monde.
Voyons désormais dans les grandes lignes quel pourrait être le contenu possible d'une
convention globale sur le bien-être animal
§2- Le contenu possible d'une convention globale sur le bien-être animal
Nous verrons tout d'abord les grandes lignes du contenu possible (A) avant de formuler une
proposition de convention, expliquée sur la base des recherches et résultats de cette étude (B).
A- les grandes lignes du contenu
En plus de poser des fondements universels (1), le contenu de cette convention mériterait
d'être assez flexible pour s'adapter aux évolutions possibles en faveur du bien-être animal (2).
1691 "Les partisans prétendent qu’un étiquetage volontaire ou obligatoire serait un moyen de répondre à certaines
préoccupations autres que d’ordre commercial - telles que le bien-être des animaux [...]". Voir sur le site de l’OMC :
"Information des consommateurs et étiquetage : Phase 2", en ligne :
http://www.wto.org/french/tratop_f/agric_f/negs_bkgrnd12_market_f.htm#consumer (date d’accès : 14.08.2014). 1692 Voir le document de l'OIE, "Implication des normes privées dans le commerce international des animaux et des
produits d'origine animale", n° XXXII , 29 mai 2008. 1693 "L’entreprise en appelle à l’élimination des stalles de gestation pour les truies ; elle s’engage également à ce que
plus de 10 pour cent de son approvisionnement d’œufs proviennent de poulaillers aménagés et sans cruauté d’ici la fin
de 2013". Voir "Tim Hortons annonce des initiatives importantes pour améliorer le bien-être des porcs et des poulets",
en ligne : http://www.timhortons.com/ca/fr/about/animal-welfare-initiatives.html (date d'accès : 19.02.2014).
308
1- Un contenu fondateur du droit universel du bien-être animal
Tout d'abord, il semble nécessaire d'établir des "fondations théoriques claires" pour une base
de protection fiable du bien-être animal en droit international général1694. Une convention
peut permettre de consacrer de telles fondations vers l'élaboration d'un nouveau régime
universel.
Le contenu d'une telle convention pourrait se situer entre le droit existant et le droit idéal,
sachant que les déclarations exposant des principes peuvent mélanger des principes de droit
positif (de lege lata) et de droit prospectif (de lege feranda)1695. Tel est le cas dans la
proposition ci-après. Tout en se basant sur les principes existants, elle reflète la position selon
laquelle l'évolution du droit repose sur un dépassement du droit existant à travers la
formulation d'idées nouvelles.
Cet accord universel pourrait aussi permettre de prendre en compte les dernières
connaissances éthiques et scientifiques et de les actualiser en s'adaptant à leur évolution ; qu'il
s'agisse des connaissances scientifiques sur la sensibilité d'un nombre croissant d'espèces
animales (des mammifères aux invertébrés )1696, et des préceptes de l'éthique animale moderne
vers un plus grand respect des animaux non-humains.
Si la première partie du contenu de la proposition (qui sera exposée ci-après) est issue des
instruments du droit positif présentés, sa partie prospective provient des réflexions éthico-
juridiques permettant d'aller plus loin dans la protection des intérêts des animaux. Précisons
que cette proposition n'a qu'une valeur indicative. En effet, il ne nous appartient ni de
formuler une proposition officielle, ni d'affirmer que les dispositions énoncées devraient être
adoptées telles quelles. Le contenu d'une telle convention, s'il en venait à être rédigé, devrait
être prioritairement élaboré par les parties intéressées, c'est-à-dire les États ou l'Assemblée
générale des États à l'ONU.
2- Un contenu suffisamment adaptatif et évolutif
Une convention-cadre sur le bien-être animal pourrait déjà poser les bases universelles de
cette protection en consacrant ses grands principes fondamentaux. Le contenu d'une telle
convention pourrait aussi renvoyer au fonds commun du droit dégagé dans les
1694 BOWMAN, M., DAVIES, P., REDGWELL, C. et S. LYSTER, "Animal welfare - the way ahead", Lyster's
international wildlife law, Cambridge University Press, 2010, p.698. 1695 SALMON, J., Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001, p. 877. 1696 Les invertébrés dont la sensibilité est avérée sont notamment les céphalopodes. Voir à ce sujet GUICHET, J.-L.
(dir.), Douleur animale, douleur humaine : Données scientifiques, perspectives anthropologiques, questions éthiques,
éditions Quae, 2010.
309
développements précédents. Suffisamment souple pour pouvoir s'adapter aux évolutions du
droit international, ce contenu devrait permettre d'élaborer une base de protection
suffisamment large et flexible. Comme toute convention internationale, celle-ci commencerait
logiquement par un préambule explicatif, lequel pourrait notamment mentionner que les
animaux sont des êtres sensibles dont le bien-être doit être universellement protégé.
Ce cadre pourrait ensuite venir définir les termes clefs du droit du bien-être animal. En
premier lieu, il semble important de définir ce qu'est le bien-être animal. Au-delà de
l'énumération de ses éléments constitutifs du bien-être animal (comme dans la définition de
l'OIE1697), une véritable définition peut notamment être déduite des éléments dégagés dans
cette étude. Proposons ici cette définition du bien-être animal :
État positif de l'animal, résultant de l'absence de souffrances physiques et psychologiques,
ainsi que de la satisfaction de ses besoins physiologiques et éthologiques.
Enfin, le corps même de la convention serait constitué d'une série de principes fondamentaux,
comme il en va généralement des grandes déclarations et conventions onusiennes.
Ces principes seraient, d'une part, ceux qui appartiennent au fonds commun du droit du bien-
être animal et d'autre part, ceux qui permettent d'établir de nouveaux fondements universels
en droit international. En ce sens, ces principes devraient être suffisamment ouverts pour
permettre au droit actuel d'évoluer.
B- La proposition du contenu
Le contenu de la convention proposée offre une synthèse qui vient parfaire cette étude.
En effet, plutôt que de faire figurer ce projet de convention en annexe, celui-ci fait partie
intégrante de cette thèse qu'il vient finaliser en posant des principes issus, à la fois du fond
commun du droit du bien-être animal actuel, et permettant l'évolution possible de ce droit.
Cette proposition ne prétend pas se substituer à toute proposition interétatique qui pourrait
être formulée à ce sujet. Elle tend plutôt à offrir une base de réflexion à valeur pédagogique,
afin de permettre la discussion sur le plan juridique mais aussi de la politique internationale.
Elle ambitionne de faire évoluer le statut juridique des animaux et la protection de leur bien-
être, vers la construction d'un nouveau droit universel, plus équitable pour tous, afin d'établir
de nouveaux rapports entre êtres humains et animaux.
En plus de poser les grands principes de protection du bien-être animal (1), cette convention
pourrait être assortie de protocoles annexes afin de réglementer chaque aspect particulier (2).
1697 Voir le premier Chapitre du Titre 1 de la Partie 2.
310
Convention-cadre universelle sur le bien-être animal
Proposition expliquée
Reconnaissant que l'évolution morale de la civilisation humaine passe par un plus grand
respect des animaux non-humains ;
Reconnaissant la valeur intrinsèque des animaux en dehors de leur utilité pour l'homme ;
Considérant que les animaux sont des êtres sensibles dont le bien-être doit être protégé ;
Considérant qu'il convient de reconnaître le bien-être animal comme un objectif universel ;
Les États-membres des Nations Unies décident d'adopter la convention suivante :
Article 1 : Objectif
Cette convention a pour objectif de protéger le bien-être des animaux.
Article 2 : Définitions
- "Animaux" : Tout animal autre que l'homme.
- "Bien-être des animaux" : État positif des animaux, résultant de l'absence de souffrances
physiques et psychologiques, ainsi que de la satisfaction de leurs besoins physiologiques et
comportementaux.
1) Les principes de protection du bien-être animal
En matière de droit du bien-être animal, les principes reconnus relèvent du droit existant de
lege lata (1°) et les principes novateurs relèvent d'un droit souhaitable de lege feranda1698 (2°).
1°) Les principes reconnus de lege lata
Les principes reconnus sont issus du droit général positif sur la protection du bien-être animal,
tel qu'ils ressortent de cette étude sous forme condensée avec une brève explication.
- Principe fondamental : Sensibilité animale
Absent des premières lois anti-cruauté, le principe de sensibilité est de plus en plus présent à
tous les niveaux. Cette sensibilité (ou aptitude à souffrir) constitue le critère fondamental, à la
base du devoir de protection du bien-être animal. En effet, puisque les animaux sont des êtres
sensibles, capables de souffrir, il convient de les protéger contre toute forme de souffrance.
1698 MAYRAND, A., Dictionnaire de maximes et locutions latines utilisées en droit, Yvon Blais, 1985, p. 59.
311
Le fait que les animaux soient des êtres sensibles est explicitement reconnu dans certaines
législations nationales (ex : Nouvelle-Zélande avec consécration dans le Code civil en France,
au Québec et en Colombie) et supranationale dans le traité de Lisbonne en droit
communautaire)1699. Ainsi, le statut d' "être sensible" pourrait sans doute faire l'objet d'un
consensus permettant l'établissement d'un statut juridique universel pour l'animal,
actuellement inexistant en droit international. À cette fin, une convention pourrait permettre
de consacrer universellement que les animaux sont des êtres sensibles et leur reconnaître
explicitement ce nouveau statut juridique universel. En ce sens, les êtres animaux non-
humains seraient reconnus comme de sujets de droit(s), à l'image des êtres humains.
- Principes directeurs : 5 libertés et 3 R
Les 5 libertés consistent pour les animaux à être :
- Libres de ne plus souffrir de la faim, de la soif et de la malnutrition ;
- Libres de ne plus souffrir de blessures, de douleurs et de maladies ;
- Libres de ne plus souffrir de désagréments physiques et thermiques ;
- Libres de ne plus souffrir de la peur, du stress et de l'angoisse ;
- Libres d'exprimer leur comportement naturel.
Les 3 R consistent pour les êtres humains à :
- Réduire le nombre d'animaux utilisés,
- Raffiner les méthodes utilisées pour éviter les souffrances,
- Remplacer les animaux par des alternatives non-animales.
Ces principes sont largement reconnus à tous les niveaux : dans les législations de certains
pays, au niveau européen, au niveau international dans l'introduction des normes de l'OIE,
ainsi que dans la proposition de Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA).
Les principes des 5 libertés et des 3 R peuvent être qualifiés de principes directeurs sachant
qu'ils orientent les actions à réaliser et à éviter en faveur du bien-être animal. Si ces principes
s'appliquent classiquement en matière d'élevage (pour les 5 libertés) et d'expérimentation
(pour les 3R), ils pourraient se voir appliqués plus largement à toute forme d'activité
impliquant les animaux. Par exemple, les 3R pourraient s'appliquer en matière d'élevage dans
le but de : réduire de plus en plus le nombre d'animaux utilisés jusqu'à les épargner
1699 Respectivement les articles 515-14 du Code civil français, 898.1 du Code civil du Québec, 655 du Code civil
colombien et pour la Nouvelle-Zélande, la Section 4 du Animal Welfare Amendment Act (No 2) 2015 (2015 No 49),
ainsi que l’Art. 13 du Traité de Lisbonne au niveau européen.
312
complètement (à des fins de consommation ou autres comme la production de fourrure) ;
remplacer les produits animaux par d'autres produits (comme les protéines végétales en
matière alimentaire, et autres produits de substitution en matière vestimentaire etc.) ; raffiner
les méthodes afin qu'elles ne soient plus génératrice d'aucune souffrance.
Idéalement en effet, il conviendrait de mettre un terme à toutes les méthodes et activités
génératrices de souffrances pour les animaux. Le droit avance et des premiers pas sont faits en
ce sens. Par exemple, il l'UE a interdit de tester les produits cosmétiques sur les animaux.
Rappelons que les consommateurs disposent d'un grand pouvoir afin d'influencer le marché.
Selon la règle de l'offre et de la demande, une baisse de la demande pour les produits non-
respectueux du bien-être des animaux entrainera automatiquement une baisse de la production
de ces produits. Sachant que des produits de remplacement sont désormais largement
accessibles, des solutions existent afin d'épargner des milliards d'animaux. Or, c'est toute une
façon de vivre, de consommer et de concevoir nos rapports avec les animaux, qui est à revoir.
- Principe éthique universel : Respect de la vie
Dans son acception étymologique, le terme respecter vient de "respoitrer" qui signifie
épargner1700. Présent dans toutes les religions et philosophies du monde1701, le principe de
respect du vivant pourrait être reconnu comme un principe universel fondé sur des valeurs
éthiques communes, tel que ceux contenus dans la déclaration onusienne sur la bioéthique de
20051702. Ce principe est consacré dans plusieurs législations nationales, européennes et
internationales. Aussi, le 1er principe de la Charte de la terre vise à respecter la Terre et toute
forme de vie, et son 15e principe prévoit de traiter tous les êtres vivants avec respect et
considération1703.
- Base de protection : Valeur intrinsèque
Cette base de protection est largement reconnue pour les animaux sauvages en droit
international de l'environnement et pourrait le devenir pour tous les animaux dans un futur
droit international du bien-être animal. La valeur intrinsèque des animaux s'oppose à leur
1700 PRÉAUBERT, C., La protection juridique de l'animal en France, Thèse de doctorat, Presses universitaires du
Septentrion, 2002, p.324. 1701 Voire les références à ce sujet en introduction générale. 1702 Déclaration universelle sur le bioéthique et les droits de l'homme, 19 octobre 2005, en particulier l'alinéa 10 du
Préambule précise que : "les êtres humains font partie intégrante de la biosphère et qu’ils ont un rôle important à jouer
en se protégeant les uns les autres et en protégeant les autres formes de vie, en particulier les animaux". 1703 Charte de la terre. Voir la version française du texte officiel en ligne :
http://www.earthcharterinaction.org/contenu/pages/La-Charte-de-la-Terre.html (date d'accès : 22.05.2015).
313
valeur actuellement instrumentale1704. Cette consécration pourrait permettre de faire évoluer le
droit du bien-être animal vers une approche plus centrée sur la protection des intérêts des
animaux (zoocentrée), en les considérant équitablement avec la protection des êtres humains
(qui demeurent aujourd'hui largement prédominants selon une approche anthropocentrée).
Le principe de valeur intrinsèque est déjà reconnu et consacré à tous les niveaux. Par exemple,
il s'agit d'un principe fondamental aux Pays-Bas dans toutes les lois protectrices des
animaux1705. En Suisse, le principe de dignité renvoie directement à la valeur intrinsèque de
l'animal1706. Elle est aussi consacrée dans le préambule de la Convention sur la diversité
biologique1707 et de la Charte mondiale de la nature adoptée en 1982 par l'Assemblée
générale des Nations-Unis1708. Elle figure enfin au 1er principe dans la Charte de la terre1709.
- Principe de durabilité : Consommation durable
Le bien-être animal fait désormais partie des objectifs de l'ONU sur la consommation durable.
Pour aller plus loin dans le lien entre le bien-être animal et le développement durable,
relevons qu'un plus grand respect des animaux va certainement dans le sens d'un
développement moralement plus durable, afin de répondre aux aspirations des générations
présentes et futures en matière d'éthique animale1710. En effet, un traitement plus éthique des
animaux répond à un développement plus durablement acceptable. Notons également qu'en
matière d'élevage, le bien-être animal est lié aux préoccupations environnementales et de
santé humaine, qui font aussi directement partie des objectifs du développement durable.
1704 ABBARNO, J., Inherent and Instrumental Values: Excursions in Value Inquiry, University Press of America,
2014. 1705 Voir le premier Titre de cette étude. 1706 Voir l'Art.3 (a) de la Loi fédérale sur la protection des animaux de 2005: "Au sens de la présente loi, on entend
par: a. dignité: la valeur propre de l'animal, qui doit être respectée par les personnes qui s'en occupent; il y a atteinte à
la dignité de l'animal lorsque la contrainte qui lui est imposée ne peut être justifiée par des intérêts prépondérants; il y a
contrainte notamment lorsque des douleurs, des maux ou des dommages sont causés à l'animal, lorsqu'il est mis dans
un état d'anxiété ou avili, lorsqu'on lui fait subir des interventions modifiant profondément son phénotype ou ses
capacités, ou encore lorsqu'il est instrumentalisé de manière excessive". 1707 En tant que convention-cadre sur la conservation de la biodiversité mondiale, la Convention sur la diversité
biologique (CBD) reconnaît aussi la valeur intrinsèque de ses éléments constitutifs, lesquels incluent les espèces
animales, en posant comme premier principe celui de leur utilisation durable. Convention sur la diversité biologique
(CBD), 1992, Préamb. al. 1 et Art.1. 1708 "Toute forme de vie est unique et mérite d'être respectée, quelque soit son utilité pour l'homme, et, afin de
reconnaître aux autres organismes vivants cette valeur intrinsèque, l'homme doit se guider sur un code moral d'action".
Charte mondiale de la nature, Annexe, Préamb. § 3, a). 1709 "Reconnaître le lien d’interdépendance entre tous les êtres vivants ainsi que la valeur de toute forme de vie, quelle
qu’en soit son utilité pour l’être humain". Charte de la terre, Principe 1 (souligné par nous). Voir la version française
du texte officiel en ligne : http://www.earthcharterinaction.org/contenu/pages/La-Charte-de-la-Terre.html (date d'accès
: 22.05.2015). 1710 En vertu du rapport Brundtland : "le principal objectif du développement durable consiste à satisfaire les besoins et
aspirations de l’être humain", dans Commission mondiale sur l’environnement et le développement, Notre avenir à
tous, Éditions du Fleuve, 1988, p. 52.
314
- Principes spécifiques : Recommandations communes
Plusieurs principes spécifiques constituent autant de recommandations communes qui
parsèment le droit général positif sur la protection du bien-être animal. Parmi ceux présentés
dans les titres précédents, citons notamment : la réduction des souffrances physiques et
psychologiques, la satisfaction des besoins physiologiques et éthologiques, la nécessité de
traiter les animaux avec ménagement (ou traitement décent), la réduction du temps de
transport, la responsabilité des gardiens d'animaux, le devoir de soins etc.
2°) Les principes novateurs (de lege feranda)
Les principes suivants relèvent du droit prospectif en ce qu'ils dépassent le droit positif actuel
en posant des bases universelles visant à améliorer la protection du bien-être des animaux.
- Principes de conduite universels : Non-cruauté et bientraitance
Entendus dans leur sens le plus extensif, le principe de non-cruauté vise à ne pas causer de
souffrances aux animaux et le principe de bientraitance à mettre en œuvre toutes les actions
permettant le bien-être des animaux. Du principe de non-cruauté découlent toutes les
interdictions de cruauté par action ou omission. Du principe de bientraitance découle
l'ensemble des obligations corrélatives, depuis la satisfaction des besoins fondamentaux des
animaux par les responsables, au devoir d'assistance envers tous les animaux en détresse.
- Principe d'action : Evitement des souffrances
Jusqu'à aujourd'hui, l'interdiction des souffrances inutiles (injustifiables, déraisonnables,
inacceptables etc.) a fait l'objet d'interprétations variables et subjectives selon les sensibilités
en présence. Par exemple, un pays considérera que telle pratique cause des souffrances
inutiles aux animaux, alors qu'un autre les jugera nécessaires (justifiable ou autres) en vertu
des intérêts humains qu'il souhaite préserver. Au contraire, le critère d'évitement des
souffrances revêt un caractère plus objectif. En ce sens, il consisterait à interdire de causer
(directement ou indirectement) des souffrances aux animaux, à chaque fois qu'il est
objectivement possible de l'éviter. En pratique, il s'agit de recourir aux méthodes alternatives
à l'utilisation des animaux, ainsi qu'aux produits remplaçant les produits d'origine animale.
315
- Principe de priorisation des intérêts : Les intérêts fondamentaux priment sur les
intérêts secondaires
En toute logique, il est possible de postuler que les intérêts fondamentaux doivent primer sur
les intérêts secondaires1711. Parmi ces intérêts fondamentaux figurent les intérêts à la vie, la
liberté et la non-souffrance, partagés par tous les animaux, humains et non-humains1712. En
l'état actuel de nos interactions avec les animaux, cette règle n'est toutefois pas appliquée. Au
contraire, les intérêts humains qui pouvent être qualifiés de "secondaires" (comme les plaisirs
gustatifs, de porter de la fourrure animale, voir des spectacles avec animaux ou autres),
priment sur les intérêts fondamentaux des animaux à vivre, à être libres et ne pas souffrir1713.
Pourtant, ces intérêts devraient primer sur les intérêts secondaires, qu'ils soient traditionnels,
religieux, culturels, économiques, récréatifs, éducatifs ou scientifiques. Sur ce dernier point,
citons la Déclaration d'Helsinki sur les principes de recherche médicale sur les humains :
« Si l’objectif premier de la recherche médicale est de générer de nouvelles
connaissances, cet objectif ne doit jamais prévaloir sur les droits et les intérêts des
personnes impliquées dans la recherche »1714.
Ce principe pourrait se voir aussi appliqué aux animaux, par exemple en substituant le terme
d' "individus" à celui de "personnes", à moins que la notion de personne animale ne soit un
jour reconnue. Parmi ses principes généraux, la Déclaration d'Helsinki pose aussi le principe
selon lequel la recherche médicale destinée aux êtres humains doit impliquer les êtres
humains (non les animaux) et qu'à défaut, le bien être des animaux utilisés doit être
respecté1715.
À l'image des déclarations sur les droits de l'homme qui ont inspiré celles sur les droits des
animaux, cette déclaration ouvre une nouvelle porte vers la possibilité d'une plus grande prise
en compte des intérêts des animaux dans le contexte de la recherche expérimentale.
1711 La règle de priorisation des intérêts rejoint celle énoncée par Paul Taylor dans son éthique biocentrique. Voir
TAYLOR, P., Respect for Nature. A Theory of Environmental Ethics, Princeton University Press, 1986. 1712 Voir à ce sujet GIROUX, V., Les droits fondamentaux des animaux: une approche anti-spéciste, thèse de doctorat
en philosophie, Université de Montréal, 2011. 1713 Ces intérêts ramènent aux droits fondamentaux des animaux à la vie, à la liberté et à l'intégrité. Voir GIROUX, V.,
Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste, Thèse de doctorat en philosophie, Université de
Montréal, 2011. 1714 Déclaration d'Helsinki de l'Association Médicale Mondiale (AMM), Principes éthiques applicables à la recherche
médicale impliquant des êtres humains, Helsinki, 1964 (dernier amendement 2013). 1715 Id., Voir respectivement les principes 5, 8 et 21.
316
- Principe de précaution : Présomption de sensibilité
Pris au sens large au delà de son acception environnementale, ce principe signifie que
l’absence de certitudes scientifiques ne doit pas empêcher l’adoption de mesures de
précaution1716.
Les connaissances scientifiques actuelles permettent d'établir que certains animaux souffrent.
Mais qu’en est-il des autres ? Doit-on impérativement démontrer qu’ils souffrent pour
supposer cette éventualité ? La présomption de sensibilité vient retourner la charge de la
preuve en présumant que les animaux peuvent souffrir tant qu'il n'est pas démontré qu'ils ne
souffrent pas.
Comme les connaissances scientifiques évoluent sans cesse, elles sont toujours susceptibles
d’actualisations. Dans le domaine des sciences animales, ces connaissances ne cessent
d'agrandir la sphère des animaux sensibles. Hier les vertébrés, aujourd'hui les céphalopodes,
demain les insectes et pourquoi pas ensuite le reste du gigantesque monde des invertébrés ?
Pour l'heure, les recherches menées sur la sensibilité des animaux permettent de démontrer
que la capacité de ressentir de la douleur, et même d'éprouver de la souffrance, est partagée
par un grand nombre d'animaux. À la différence, la nociception (réaction de fuite à un
stimulus négatif permettant l'auto-préservation de l'intégrité et de la vie) est partagée par
l'ensemble des animaux, même unicellulaires1717. Tout d'abord démontrée pour les
mammifères, la sensibilité -entendue comme aptitude à souffrir- a ensuite été prouvée pour les
vertébrés en général et désormais pour certains invertébrés, comme les céphalopodes1718. En
ce sens, certains pays étendent leur champ de protection à tous les animaux sensibles ou dont
la sensibilité est avérée1719. Certaines législations témoignent aussi d'une nouvelle évolution
1716 Le principe de précaution est formulé dans le Principe 15 de la Déclaration de Rio de 1992 en ces termes : "En cas
de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de
prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de
l'environnement". 1717 NOUËT, J.-C. et T. AUFFRET VAN DER KEMP, Homme et animal : de la douleur à la cruauté, Harmattan,
2008, p.29. 1718 Voir BOVET, D. et G. CHAPOUTHIER, "Les degrés de sensibilité dans le monde animal et leur identification
scientifique", dans AUFFRET VAN DER KEMP, T. et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au
Droit, Yvon Blais, 2013, p.13. 1719 Par exemple en Suisse, l'Art.2 de la Loi fédérale sur la protection des animaux prévoit que : "La présente loi
s’applique aux vertébrés. Le Conseil fédéral détermine à quels invertébrés elle s’applique et dans quelle mesure. Il
s’appuie à cet égard sur les résultats de la recherche scientifique menée sur les capacités sensitives de ces derniers". Au
Royaume-Uni, le Animal Welfare Act de 2006 prévoit aussi à son Art.1 de protéger les vertébrés et autres animaux
capables de ressentir la douleur et la souffrance (sur la base de preuves scientifiques).
317
en élargissant leur protection aux stades précoces de développement des vertébrés, et
notamment aux formes fœtales des mammifères dans le cadre expérimental1720.
Rappelons que jusque dans les années 1979, des chirurgies étaient pratiquées sur des
nourrissons humains sans anesthésie, en postulant qu'ils ne souffraient pas1721. Même si la
situation a bien évolué depuis, il convient de tirer les leçons du passé en appliquant le principe
de précaution, à travers la présomption de sensibilité pour les animaux dont celle-ci n’est pas
(encore ?) démontrée. Il s'agit ainsi de laisser place au bénéfice du doute selon ce postulat :
« rien n’autorise à prétendre […] que l’animal ne souffre pas sous prétexte qu’il
n’est pas prouvé qu’il souffre »1722.
Notons que les animaux pour lesquels la sensibilité n'est pas encore prouvée sont
généralement les invertébrés (à l'exception des invertébrés supérieurs), qui représentent à eux-
seuls 99% du règne animal1723. Conformément à ce qui précède, certains scientifiques
s’entendent pour déclarer qu’il n’est "ni scientifiquement ni éthiquement
admissible" d’utiliser encore les invertébrés comme "matériel de substitution" aux animaux
vertébrés pour les expériences1724.
Au-delà des invertébrés supérieurs (comme les céphalopodes) pour lesquels les capacités
sensitives et cognitives ont été démontrées, qu'en est-il des autres invertébrés ? Alors que le
ver de terre produit des substances antidouleur, le homard se débat et fuit l'agression
physique1725. Qu'en est-il des insectes ? Ceux-ci représentent à eux-seuls les 3/4 de toutes les
espèces animales et possèdent un système nerveux centralisé doté de milliers de neurones1726.
1720 Par exemple la Directive communautaire de 2010 sur l'expérimentation précise à l'alinéa 9 de son Préambule : "Il
convient que la présente directive s’applique aussi aux formes fœtales des mammifères, car certaines données
scientifiques montrent que ces formes, dans le dernier tiers de leur période de développement, présentent un risque
accru d’éprouver de la douleur, de la souffrance et de l’angoisse, qui peuvent aussi affecter négativement leur
développement ultérieur. Il est aussi démontré scientifiquement que des procédures appliquées à des formes
embryonnaires et fœtales à un stade de développement plus précoce peuvent occasionner de la douleur, de la
souffrance, de l’angoisse ou un dommage durable si on laisse vivre ces formes au-delà des deux premiers tiers de leur
développement". Voir les développements du Titre 2 sur la Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du
Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33 du
20.10.2010. 1721 NOUËT, J.-C. et T. AUFFRET VAN DER KEMP, Homme et animal : de la douleur à la cruauté, Harmattan,
2008, p.71 : "Jusque dans les années 1970 [...] on considérait d'une façon générale, dans le milieu médical, que les
nouveau-nés, les tout jeunes nourrissons, ne ressentaient pas la douleur. L'attitude était, en conséquence, de pratiquer
les interventions chirurgicales [...] sans anesthésie." 1722 Id., p.16. 1723 PONDER, W. F. et D. LUNNEY, The other 99%: the conservation and biodiversity of invertebrates, Royal
Zoological Society of New South Wales, 1999. 1724 Voir NUËT, J.-C., “L’utilisation expérimentale de l’animale” dans MARGUÉNAUD, J.-P. et O. DUBOS (dir.),
Animaux et droits européens : au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Pédone, 2009, p.156. 1725 JEANGÈNE VILMER, J.-B., Éthique animale, PUF, 2008, p.54. Notons qu'un électrocuteur spécial permet
désormais de tuer les homards en moins de 5 secondes, contre environ 40 secondes lorsqu'ils sont ébouillantés. 1726 Id., p.55.
318
À défaut de leur sensibilité, leurs capacités d'apprentissage et de mémorisation ont déjà été
scientifiquement démontrées1727. Aussi, l'établissement d'une présomption de sensibilité pour
ces derniers pourrait constituer un argument supplémentaire afin d'encourager la
consommation de protéines végétales, au lieu des protéines animales dont celles des insectes
comme nouvelles sources de protéines1728. Une telle présomption pourrait également conduire
à promouvoir l'utilisation de mesures préventives, plutôt que des mesures d'éradication pour
l'ensemble des animaux dits "nuisibles"1729.
Où fixer la limite de protection ? La question est n'est pas nouvelle. En toute objectivité, cette
limite pourrait relever du principe d'auto-préservation, lequel est propre à toute forme de vie.
- Principe d'auto-préservation : La légitime défense appliquée entre hommes et animaux
Selon le principe d'auto-préservation1730, les êtres vivants sont programmés pour vivre et
éviter toute atteinte à leur intégrité (par la souffrance, douleur ou nociception selon le degré
d'évolution concerné)1731. Sur le plan éthique, s’ensuit la reconnaissance des droits à la vie et
à l'intégrité1732. Peut-être qu'un jour ces droits seront légalement reconnus pour les animaux ?
Si tel était le cas, la notion de légitime défense pourrait alors s'étendre aux animaux non-
humains. Dans quelle mesure cette extension serait-elle justifiée ? Tout d'abord afin de ne
plus banaliser les atteintes à la vie et à l'intégrité des animaux. Ensuite dans le but de limiter
ces atteintes aux seuls cas de stricte nécessité vitale pour les êtres humains. De telles atteintes
seraient alors jugées légitimes, comme entre êtres humains, dans les seuls cas où la vie ou
l'intégrité d'un autre individu se trouveraient directement menacées. Tel que le principe de
légitime-défense est déjà appliqué entre êtres humains, une réponse proportionnée au danger
peut alors être adoptée. Par exemple, il serait légitime de se défendre contre un animal en
attentant à sa vie, si celui-ci s'attaque à la nôtre (même si ces cas sont relativement rares).
Dans le cas contraire, il deviendrait illégal d'attenter à la vie et à l'intégrité des animaux, tant
que ces atteintes sont objectivement évitables.
1727 Voir NOUËT, J.-C., op.cit., note 1724, p.155. 1728 Voir les nouvelles protéines végétales dites "New Protein Food" (NPF) en anglais dans COLLECTIF D'EXPERTS,
La vérité sur la viande, Les arènes, 2013, p. 27 s. 1729 Voir sur ce terme REEVES, H., "Animaux "nuisibles" et "mauvaises" herbes", Chroniques du ciel et de la vie,
Seuil, 2005, p.20. 1730 Ce principe est notamment utilisé dans le domaine des neurosciences. Voir par exemple : D. PURVES et al,
Neurosciences, 2è éd., De Boeck, 2003, p. 627. 1731 Selon le Professeur Jean-Claude Nouët : "La capacité pour un animal de ressentir la douleur est donc un facteur
essentiel de préservation de son intégrité et de sa vie", dans AUFFRET VAN DER KEMP, T. et J.-C. NOUËT,
Homme et animal : de la douleur à la cruauté, Harmattan, 2008, p.17. 1732 Dans sa thèse, Valéry Giroux rajoute à ceux-ci le droit à la liberté. GIROUX, V., Les droits fondamentaux des
animaux : une approche anti-spéciste, Thèse de doctorat en philosophie, Université de Montréal, 2011.
319
En plus de l'adoption d'un cadre posant les grands principes de la protection juridique du bien-
être animal, cette convention globale, portant sur une problématique aux multiples facettes,
pourrait être assortie de protocoles spécifiques dans tous les domaines. En effet, chaque
activité fait l'objet de problèmes spécifiques qui impliquent des réglementations particulières.
2- Les protocoles annexes
Ces protocoles pourraient concerner les animaux domestiques et familiers (a), ainsi que les
animaux sauvages captifs et libres (b).
a) Les protocoles sur les animaux domestiques et familiers
Ces protocoles pourraient concerner les animaux de production, d'expérimentation et de
travail (1°), ainsi que les animaux de compagnie, de spectacle et de compétition (2°).
1°) Les animaux de production, d'expérimentation et de travail
Chaque année dans le monde, les animaux les plus massivement utilisés se comptent en
milliards pour les animaux de production et en millions pour les animaux d'expérimentation.
Il s'agit ainsi de plus de 150 milliards d'animaux pour la production alimentaire seulement
(dont environ 60 millions d'animaux terrestres1733 et plus de 100 milliards d'animaux
aquatiques) 1734 et d'une centaine de millions d'animaux environ pour l'expérimentation1735.
En outre, les animaux de travail, à des fins de transport ou de force motrice, sont très peu
concernés par les législations protectrices du bien-être animal, d'autant qu'ils sont surtout
utilisés dans les pays du tiers-monde qui ne disposent pas ou peu de législations à ce sujet1736.
- Un protocole sur les animaux de production pourrait avoir pour objectif de régler les
différents problèmes liés à l'élevage, au transport et à la mise à mort des animaux. Les
différents problèmes liés à la production alimentaire, vestimentaire, et autres (comme à des
fins médicinales en Asie) pourraient aussi figurer ou faire l'objet de sous-protocoles distincts.
- Un protocole sur les animaux d'expérimentation pourrait viser à solutionner problèmes liés
aux différentes utilisations des animaux à des fins expérimentales (ex : tests de toxicité,
recherche biomédicale et les autres fins éducatives et scientifiques).
1733 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.61. 1734 Voir ADAPTT, "More Than 150 Billion Animals Slaughtered Every Year", The Animal Kill Counter, en ligne :
http://www.adaptt.org/killcounter.html (date d'accès 8.12.2014). 1735 Voir PETA, "Animal Experiments: Overview", en ligne: http://www.peta.org/issues/animals-used-for-
experimentation/animals-used-experimentation-factsheets/animal-experiments-overview/ (date d'accès 8.12.2014). 1736 Voir l'Annexe I.
320
- Un protocole sur les animaux de travail pourrait permettre d'interdire les conditions
extrêmes, de surmenage, de mauvaise alimentation, de manque de soins, de mauvaise
condition physique et d'hygiène, de harnachements blessants, de traitements inadaptés etc.
2°) Les animaux de compagnie, de spectacle et de compétition
Si certains animaux sont adoptés à des fins de compagnie, d'autres sont utilisés à des fins de
divertissements comme les animaux de spectacle et de compétition.
- Un protocole sur les animaux de compagnie pourrait viser les interdictions de maltraitance
et de négligence, ainsi que l'obligation de soins et de santé, le contrôle et la responsabilité (en
prévenant l'abandon), ainsi que d'autres problèmes croissants comme ceux liés aux animaux
errants, au commerce illégal d'animaux et aux nouveaux animaux de compagnie (NAC)1737.
- Un protocole sur les animaux de spectacle pourrait concerner les problèmes liés aux
spectacles cruels comme les combats d'animaux, les corridas et autres.
- Un protocole sur les animaux de compétition pourrait viser les problèmes liés aux
compétitions comme les courses d'animaux et autres.
b) Les protocoles sur les animaux sauvages captifs et libres
Les animaux sauvages en captivité, et surtout ceux qui vivent en liberté, sont bien souvent
oubliés des législations protectrices du bien-être des animaux.
1°) Les animaux sauvages en captivité
- Un protocole sur les animaux sauvages en captivité pourrait viser la réglementation des
problèmes liés à la captivité elle-même dans les zoos, les parcs aquatiques et les cirques, ainsi
que les démonstrations qui sont effectuées dans ces endroits et les méthodes employées.
En effet, la captivité est bien souvent source de détresse pour les animaux1738. De plus,
certaines méthodes employées pour les spectacles sont dénoncées, notamment celles des
dompteurs dans les cirques, comme les fouets pour les félins et les piques pour les
éléphants1739.
1737 Voir sur ce point BATISTE, M., "Les nouveaux animaux de compagnie: un engouement, un trafic", dans
BURGAT, F. (dir.), L’animal dans nos sociétés, documentation française, 2004, pp.82-83. 1738 Voir JORDAN, B., "Science-based assessment of animal welfare: wild and captive animals", dans BAYVEL, A.
C. D. (dir.), Animal Welfare, global issues, trends and challenges, Scientific & Technical Review, vol. 24 (2), OIE,
2005, pp. 515-528. 1739 Voir DERIABKINE, V., "L’expérience d’un dompteur", dans BURGAT, F., L'animal dans nos sociétés, Paris,
Documentation française, 2004, pp.91-92.
321
2°) Les animaux sauvages en liberté
- Un protocole sur les animaux sauvages en liberté pourrait viser la réglementation des
activités de chasse (des animaux terrestres et des mammifères marins1740), de pêche (y
compris pour les requins en interdisant la méthode d'ablation d'ailerons de requins vivants) et
de capture (en interdisant les méthodes de piégeage reconnues comme cruelles, notamment en
vertu de l'Accord sur des normes internationales de piégeage sans cruauté comme les pièges
à mâchoires), ainsi que d'autres activités comme la consommation d'animaux sauvages liée au
braconnage (ex : viande de brousse) ou encore leur commercialisation (interdite par la CITES
au niveau international concernant les espèces menacées d'extinction). Ce protocole pourrait
également faire le lien entre la conservation des espèces et le bien-être des animaux sauvages.
Ce protocole pourrait ainsi spécifier un paragraphe comme celui que nous proposons ici :
« Les espèces en voie d'extinction doivent faire l'objet de mesures de conservation
in situ afin d'éviter le maintien des animaux en captivité. Ces mesures sont
conjointes aux mesures de protection des habitats naturels de ces espèces,
d'interdiction des prélèvements des espèces en danger critique d'extinction, et au
contrôle du respect de cette réglementation par la mise en place d'agents habilités
à sanctionner les actes de chasse, de pêche, de capture et d'autres prélèvements, à
des fins commerciales ou personnelles (ex : trophées), dans le but de protéger le
bien-être des animaux sauvages ».
1740 La réglementation de la chasse aux animaux marins inclurait le moratoire en vigueur sur la chasse à la baleine.
322
- Conclusion du Chapitre 2 :
Revenons sur les points importants justifiant qu'une convention traitant explicitement du bien-
être animal pourrait être universellement adoptée. Tout d'abord, le bien-être animal est un
concept mondialement reconnu et endossé sur le plan juridique à tous les niveaux législatifs.
Une convention globale pourrait également permettre de consacrer le bien-être animal comme
étant un nouvel objectif (ou principe) commun à tous les États de la communauté
internationale1741. Une convention sur le bien-être animal ne devrait donc pas rencontrer
d'obstacles quant à son intitulé même, ni quant à la légitimité de son adoption, puisqu'il s'agit
déjà d'un sujet d'intérêt mondial, tant pour les pays pris individuellement que collectivement
au sein de la communauté mondiale (notamment sous l'égide de l'OIE reconnue comme chef
de file international sur le bien-être animal et réunissant la plupart des pays du monde).
De plus, cette convention pourrait permettre de poser les bases d'un nouveau droit universel
des animaux, qui complèterait le corpus du droit international et s'inscrirait dans l'actuel
processus d'évolution juridique mondial en ce sens. En effet, nous avons vu que la protection
du bien-être animal est une protection en expansion au niveau national, croissante au niveau
européen, naissante au niveau international et désormais embryonnaire au niveau universel. Il
n'y a plus qu'un pas vers la concrétisation d'une protection universelle du bien-être animal en
droit universel. Celui-ci reste à franchir.
1741 Voir la section précédente à ce sujet.
323
Conclusion du Titre 2
En tant que système normatif, le droit international n'est pas statique. Il évolue et progresse
sans cesse en réponse aux défis contemporains.
En légiférant dans de nouveaux domaines, la communauté internationale manifeste sa volonté
de tenir compte des nouvelles préoccupations de la société mondiale1742. En ce sens, le droit
mondial vit actuellement un profond changement puisqu'un nombre croissant de problèmes en
appellent à des solutions globales1743. En outre, relevons que les idées neuves sur la justice
internationale, allant de pair avec la conception d'approches innovantes, favorisent l'évolution
des prémisses sur lesquelles le droit international était basé depuis des temps
immémoriaux1744. De plus, le développement actuel du droit international repose sur les "soft
concepts" qui, comme le bien-être animal, font déjà partie du volcabulaire de demain1745.
L'adoption d'un accord universel, à l'image d'une convention globale, pourrait permettre de
consacrer formellement la protection du bien-être animal en tant que nouveau principe
international1746 et comme nouvel objectif commun à l'ensemble des États de la planète1747.
Ainsi, les développements précédents on permis de constater l'expression d'une volonté
mondialisée de protéger le bien-être animal au sein de la majorité des pays du monde, des
instances européennes et même de la communauté internationale dans son ensemble, puisque
cette protection, encore embryonnaire au sein de l'ONU semble indiquer que le bien-être
animal apparaît comme un objectif universel émergent.
En effet, le bien-être animal apparaît parmi les nouvelles préoccupations qui viennent frapper
à la porte de l'ONU1748. En plus de sa prise en compte croissante au sein des organisations
mondiales (OIE, OMC, FAO), la demande montante de la société civile en faveur d'une
protection universelle se manifeste notamment à travers le large soutien mondial dont
bénéficie la DUBEA. Ce soutien est représenté par l'ensemble des acteurs du droit
1742 Voir ALLOT, P., "The Concept of international law", EJIL, 1999, pp. 31-50. 1743 DANILENKO, G.M., op.cit., note 1508, p. xiii. 1744 Id. 1745 Voir KIEFFER, B., L'Organisation mondiale du commerce et l'évolution du droit international public, Larcier,
2008, p. 349. L'auteur précise que ces derniers sont "souvent empruntés à d'autres sciences sociales", comme pour le
bien-être animal, emprunté à la science animale. 1746 Comme nous l'avons vu précédemment, si le principe de bien-être animal en venait à être consacré en droit
international positif, il pourrait alors se voir reconnaître le statut de principe général du droit international. 1747 Voir la section sur les "objectifs" dans SALMON, J., Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001, p.
763 : "Résultats de caractère général (souvent plus politiques que juridiques) que les auteurs d'un acte juridique,
notamment les parties d'un traité, se proposent d'atteindre grâce à son application". 1748 RIEDEL, E., "The Developement of International Law: Alternatives to Treaty-Making ? International
Organizations and Non-State Actors", dans Wolfrum, R. et R. Volker, Developments of International Law in Treaty
Making, Springer, pp.301-318, 2005, p.301.
324
international : individus, États, Organisations non-gouvernementales et Organisations
intergouvernementales. Plus ce soutien augmente, plus il renforce l'impératif d'une prise en
compte universelle des questions liées au bien-être animal par la communauté mondiale dans
son ensemble, au sein de l'Assemblée générale des Nations Unies. Même si un tel accord n'est
pas adopté par l'ONU, notons que les actes des organisations internationales jouent un rôle
important afin d'établir des normes générales, même lorsqu'il ne s'agit que d'instruments
déclaratoires1749. D'après Brownlie, la pratique des organisations internationales reflète
l'existence d'un droit1750. En ce sens, la protection du bien-être animal serait du "déjà-droit
international" au sein des normes de l'OIE, même s'il ne s'agit que de recommandations non
contraignantes sur le plan formel1751.
La protection du bien-être animal apparaît ainsi comme une branche émergente et
complémentaire à celle de conservation des espèces en droit animal international. Au fil du
temps, le droit international contemporain s'est étendu tant rationae personae que rationae
materiae1752. L'adoption d'une convention sur le bien-être animal pourrait permettre de
reconnaître universellement que les animaux non-humains sont des êtres sensibles et faire que
ce nouveau statut soit explicitement consacré. En ce sens, les "êtres-animaux" deviendraient
de nouveaux sujets du droit international, après que les espèces animales menacées aient été
considérées en droit international de l'environnement. Pour Elisabeth de Fontenay en effet :
« Les temps sont mûrs pour que le statut des animaux [...] relève un jour du droit
international afin que soit opposée une communauté des vivants à l’omnipotence
humaine »1753.
1749 BROWNLIE, I., op.cit., note 1666, p.11-12. 1750 Id., 701. 1751 Voir à ce sujet "La valeur juridique des recommandations des organisations internationales", dans VIRALLY, M.,
Le droit international en devenir : essais écrits au fil des ans, PUF, 1990, pp.169-194. 1752 CARREAU, D. et F. MARRELLA, op.cit, note 1495, p.338. 1753 DE FONTENAY, E., Sans offenser le genre humain, Albin Michel, Bibliothèque idées, 2008, p. 210.
325
CONCLUSION DE LA PARTIE II
La protection juridique du bien-être animal est en train de se généraliser à tous les niveaux.
En pleine expansion au niveau national, celle-ci s'est aussi imposée dans le droit européen et
communautaire depuis la fin des années 1960, avant d'émerger sur la scène mondiale depuis
le début des années 2000, d'abord au niveau international et désormais universellement.
Comme nous l'avons soulevé dès notre introduction générale, jamais la mobilisation sociétale
n'a été aussi grande à l'encontre des souffrances infligées aux animaux et celle-ci ira sans
doute en augmentant tant que rien d'important ne sera fait en réponse. Il semble non
seulement possible mais aussi souhaitable que celle-ci soit apportée par la communauté
mondiale, sachant que les problèmes de mal-être des animaux sont universellement présents.
Même si le droit international n'est pas la panacée pour résoudre tous les maux dont souffrent
les individus (humains et non-humains) à travers le monde, il conviendrait toutefois de
reconnaître universellement que les animaux ne sont pas des choses à notre service, mais bien
des individus méritant d'être respectés comme tels. D'un impératif moral, le devoir de
respecter les animaux pourrait ainsi devenir un impératif juridique universel.
Comme pour la protection de l'environnement, le rôle joué par le droit universel de l'ONU est
crucial en ce qu'il permet de consacrer de nouvelles prises de conscience et favorise leur
généralisation à l'échelle planétaire, vers une nouvelle vision du monde et du droit pour tous.
En ce sens, il permet aussi l'évolution du droit général et l'extension de son champ de notre
considération depuis notre espèce, vers celle de notre planète et enfin des autres animaux.
Le bien-être animal semble être en passe de devenir un nouveau lieu-commun. Non seulement
dans le vocabulaire courant, mais aussi, conformément à l'étymologie de cette expression,
comme sujet de réflexions générales et témoin de l'existence d'une conscience commune,
voire universelle.
326
CONCLUSION
À l'issue de cette étude, il est possible d'affirmer que le droit du bien-être animal est en voie
d'universalisation. Aussi que ce droit a vocation à devenir un nouveau droit universel.
Au soutien de cette affirmation, cette thèse a permis de montrer que, de facto, le droit du bien-
être animal évolue vers son universalisation. Elle a aussi permis de démontrer que, de jure, ce
droit est sous-tendu par des principes universels juridiquement valables pour tous les pays.
En effet tel qu'il ressort de cette étude, la protection du bien-être animal emporte une
reconnaissance croissante dans les législations et décisions adoptées à travers le monde.
En effet, nous avons pu voir que la protection du bien-être animal progresse à tous les niveaux
législatifs. Encore à l’état embryonnaire en droit universel, les mesures protectrices sont en
expansion croissante dans les droits nationaux, en consolidation constante en droit européen,
en pleine émergence en droit international.
Cette thèse a successivement démontré que la volonté de protéger le bien-être des animaux
ressort tant des législations nationales que des instruments européens, de manière croissante.
Plus encore, elle commence à faire son apparition dans le droit des organisations mondiales,
jusqu'à poindre au sein de l'organisation universelle qu'est l'Organisation des Nations Unies.
Cette étude a également permis d'établir qu'il existe de plus en plus d'obligations de
bientraitance, de règlementations sur le bien-être des animaux, ainsi que d'interdictions
générales (ex : cruauté intentionnelle) et particulières (concernant des pratiques spécifiques).
Malgré d'importantes divergences selon les pays concernés, cette étude a mis en lumière une
tendance à la convergence progressive des dispositions protectrices du bien-être animal.
Celle-ci s'observe à tous les niveaux : au niveau national par le passage des lois anti-cruauté
aux lois pro-bien-être ; et au niveau supranational par les normes européennes et
internationales dans des domaines communs (élevage, transport, abattage, expérimentation).
Au niveau national, cette convergence tend vers un renforcement des obligations de
bientraitance, tout en conservant la base de répression des actes de cruauté (présente dans les
premières lois). Au niveau supranational, il s'agit d'une augmentation des normes protectrices
visant à améliorer le bien-être des animaux utilisés et, plus exactement, réduire leurs mal-être.
En résumé, la présentation de l'ensemble des instruments de protection du bien-être animal,
conduit à attester de leur accroissement partout dans le monde. Qu'il s'agisse des lois
327
nationales et des instruments européens obligatoires, ainsi que des dispositions internationales
à valeur non-contraignantes.
Revenons sur la question centrale de cette étude et les réponses que nous avons pu y apporter.
Dans quelle mesure une protection universelle du bien-être animal est-elle possible en droit
international ? Pourquoi est-elle fondée et comment peut-elle se concrétiser ?
En réponse à la première partie de cette question (pourquoi), cette étude a permis de
confirmer notre hypothèse en dégageant l'existence d'un fond commun du droit du bien-être
animal, lequel se traduit notamment par les principes généraux de non-cruauté et de
bientraitance. Quant à la seconde partie de cette question (sur le comment), cette étude a
permis de démontrer que la protection du bien-être animal pourrait se concrétiser par
l'adoption d'un accord général et qu'un tel accord permettrait une protection la fois globale
(c'est-à-dire couvrant l'ensemble des aspects du bien-être animal) et universelle (c'est-à-dire
applicable à l'ensemble des pays).
Cette étude a donc permis d'envisager les possibilités d'aller vers une protection universelle du
bien-être animal et de la concrétiser grâce aux sources du droit international public positif.
Son intérêt majeur est aussi d'avoir contribué à poser les bases théoriques d'un possible futur
droit international du bien-être animal, lequel complèterait le corpus actuel du droit animal
international et s'inscrirait dans le processus actuel d'évolution juridique mondiale en ce sens.
En plus de revenir sur les éléments principaux qui ont pu être dégagés au fil de cette étude,
axons cette synthèse conclusive sur les deux grandes conclusions qui résultent de celle-ci :
1- Désormais mondialisé, le droit du bien-être animal est en voie d'universalisation.
2- Malgré sa progression croissante, le droit du bien-être animal a des limites persistantes.
Revenons tout d'abord sur les aspects essentiels de l'évolution mondiale du droit du bien-être
animal, avant de revenir sur les points permettant de dresser un bilan mitigé quant à l'objectif
protecteur visé. Nous reviendrons enfin sur le fond commun dégagé ainsi que sur les voies de
concrétisation d'une protection universelle du bien-être animal en droit international.
328
- L'évolution mondiale du droit du bien-être animal
La protection du bien-être animal est en pleine mondialisation. Celle-ci s'opère tant au niveau
national, qu'au niveau supranational. Au niveau national, les législations protectrices des
animaux sont en pleine expansion dans de nombreux pays à travers le monde. Au niveau
supranational, de plus en plus d'actes protecteurs sont adoptés par les institutions européennes
et les organisations mondiales.
- Au niveau national : les législations adoptées dans les pays du monde entier
Nées dans les pays anglo-saxons et européens dans la première moitié du XIXe siècle, les
législations protectrices des animaux se sont propagées dans de nombreux pays du monde au
cours du XXe siècle. Suite à cette mondialisation des lois anti-cruauté (visant à réprimer la
cruauté envers les animaux), un nouveau modèle législatif tend à s'imposer depuis le début du
XXIe siècle, à savoir le modèle pro-bien-être (visant à promouvoir le bien-être des animaux).
. La naissance des lois anti-cruauté dans les pays anglo-saxons et européens au XIXe siècle
Les pays anglo-saxons font figure de pionniers en matière de législation protectrice des
animaux. Dans l'Amérique pré-constitutionnelle, le Massachussets Body of Liberty de 1641
prévoyait déjà un principe général de non-cruauté envers les animaux parmi ses
dispositions1754. Quelques années auparavant, en Irlande, une loi était également adoptée sur
la protection des moutons d'élevage dès 16351755. C'est en 1822 qu'est apparue la première loi
britannique visant à prévenir la cruauté et les mauvais traitements du bétail. Le Martin's Act
(du nom de son initiateur Richard Martin1756), est souvent cité comme la première loi
contemporaine de protection des animaux dans le monde1757. En effet, celle-ci a constitué le
1754 Selon son article 92 : "Aucun homme ne doit exercer d'acte de torture ou de cruauté envers une bête habituellement
destinée à l'utilisation humaine", Massachussets Body of Liberty de 1641, Liberty 92. 1755 "Act Against Plowing by the Tayle, and Pulling the Wooll off Living Sheep" (traduction possible : "Loi contre le
tractage par la queue, et la tonte de la laine des moutons vivants"), 1635. Voir The Statutes at Large, Passed in the
Parliaments Held in Ireland, 2è éd., Dublin, 1786, vol.2, p. 168-169. 1756 "Act to Prevent the Cruel and Improper Treatment of Cattle". Voir The Statutes of the United Kingdom of Great
Britain and Ireland, His Majesty's Printers, Great Britain, 1835, p. 274-282. 1757 Voir notamment BROOMAN, S. et D. LEGGE, Law relating to animals, Cavendish, 1997, p. 41 ; et E. L. Hughes
et C. Meyer, “Animal Welfare Law in Canada and Europe”, Animal Law, vol. 6, p. 23-76, 2000, p. 25.
329
point de départ du rayonnement législatif qui allait suivre, tant en Angleterre1758 que dans les
autres pays anglo-saxons1759, puis en Europe.
En Europe, les codes germaniques ont été les précurseurs des lois anti-cruauté dans de
nombreux pays européens dès 18381760. Les dispositions de ces codes, comme les lois qui
suivirent jusqu'au début du XXe siècle, avaient toutes en commun une particularité notable :
celle de ne réprimer les actes de cruauté envers les animaux que lorsqu'ils étaient commis en
public. À l'image de la Loi Grammont de 1850 en France1761, les premières législations
européennes visaient ainsi à réprimer le caractère scandaleux, excessif, abusif ou grossier des
actes de cruauté, dans le but de préserver la moralité publique. En ce sens, ces lois visaient
bien plus à protéger la sensibilité humaine -de la vue des souffrances-, que la sensibilité des
animaux eux-mêmes -à l'encontre des souffrances infligées-. Ces lois visaient à condamner la
cruauté comme un mal social, selon l'idée qu'il est mal d'être cruel per se, tant envers les
hommes qu'envers les animaux, plutôt qu'en vertu de l'idée plus actuelle selon laquelle il est
mal de faire souffrir les animaux puisqu'il s'agit d'être sensibles (ou capables de souffrir). En
rupture avec les lois précédentes, les lois européennes du début du XXe siècle ont marqué la
fin de la condition de publicité en condamnant aussi les actes de cruauté commis en privé1762.
C'est au cours de ce même siècle que les lois anti-cruauté se sont propagées dans les pays du
monde entier.
. L'expansion des lois protectrices dans les pays du monde entier à partir du XXe siècle
Les lois anti-cruauté ont d'abord été adoptées par les pays sous influence britannique, sur le
modèle anglo-saxon, avant de s'étendre à d'autres pays du monde.
1758 Depuis la première loi visant à réprimer généralement les mauvais traitements et à interdire tous les combats
d'animaux dès 1835, en passant par la première loi adoptée suite au mouvement antivivisection en 1876 , l'Angleterre a
étendu sa protection à différents domaines d'utilisations des animaux ainsi qu'aux animaux sauvages en captivité dès
1900 . 1759 Ces lois anti-cruauté se sont également manifesté dès le début du XIXe siècle dans les autres pays anglo-saxons, à
savoir au Canada en Nouvelle-Ecosse dès 1822, aux Etats-Unis dès 1829 dans l'Etat de New-York, en Australie dès
1837 et en Nouvelle-Zélande dès 1840. 1760 En Allemagne, le Code pénal de Saxe est le premier à avoir adopté une disposition sanctionnant les mauvais
traitements publics envers les animaux dès 1838. Par la suite, le Code pénal du canton de Vaud de 1843 en Suisse, le
Code pénal prussien de 1851 et un arrêté ministériel de 1855 en Autriche, condamnèrent également les mauvais
traitements grossiers ou abusifs propres à susciter le scandale et troubler l'ordre public. Ces exemples ont été suivi par
le Code pénal de 1864 en Russie ou le Code pénal de Bulgarie de 1896. Voir généralement sur ces législations
précoces, la thèse pionnière de Pierre Giberne, La protection juridique des animaux, Thèse pour le doctorat, Université
de Montpellier, Imprimerie Thierry, Nîmes, 1931. 1761 Du nom de son initiateur le duc de Grammont, cette loi était formulée en ces termes : "Seront punis d'une amende
de cinq à quinze francs, et pourront l'être d'un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et
abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques" ; Loi du 2 juillet 1850 dite Grammont sur les
mauvais traitements envers les animaux domestiques, JORF du 20 août 1944. 1762 Cette rupture a été marqué par la Loi italienne du 12 juin 1913 qui, pour la première fois sur le continent européen,
condamnait indistinctement les actes de cruauté commis en public ou en privé envers les animaux.
330
Historiquement, les pays sous influence britannique ont d'abord concerné les colonies de
l'Empire britannique. Ainsi en va-t-il des lois de protection précoces adoptées dans de
nombreuses régions du monde, comme au Pakistan en 1890 et au Bangladesh en 1920 (pour
la région indo-pakistanaise) ; à Belize en 1865 ou en Jamaïque en 1904 (pour les Caraïbes),
dans les îles Tonga en 1918 (pour l'Océanie) et en Zambie en 1921 (pour l'Afrique)1763.
Depuis la constitution du Commonwealth en 1926, des lois protectrices des animaux ont été
adoptées en Inde en 1960, ainsi que dans des pays africains, asiatiques et océaniens au cours
du XXe siècle.
Depuis le début des années 2000, une révision générale a eu lieu dans les législations du
monde entier. Ces dernières ont permis de renforcer les dispositions protectrices des animaux,
ainsi que les peines encourues en cas de maltraitance. Elles ont également permis, à travers
l'adoption de législations protectrices du bien-être animal, de formuler des obligations de
bientraitance (ex : obligation de soins) en insistant sur la satisfaction des besoins
fondamentaux, tant physiologiques (ex : alimentation, conditions d'hébergement etc.) que
comportementaux (ex : besoin de sociabilité de certaines espèces1764). Relevons également
l'apparition de nombreuses lois dans les pays qui ne disposaient pas encore de législations
protectrices. Parmi celles-ci, citons des législations innovantes tenant compte des dernières
avancées législatives. Celles-ci peuvent être très complètes, en couvrant la plupart, si ce n'est
toutes les formes d'utilisation des animaux. Elles ont vu le jour dans le monde entier, tant dans
les pays anglo-saxons et nord-européens, que dans certains pays où on ne les attendait pas
comme en Afrique et au Moyen-Orient. Même si des lois récentes sur le bien-être animal ont
été adoptées aux Emirats Arabes Unis en 2007 et en Tanzanie en 20081765, ces deux régions
du monde restent à ce jour les plus démunies en matière de législations protectrices des
animaux.
Depuis la fin du XXe siècle et surtout depuis le début du XXIe siècle, les pays d'Asie et
d'Amérique latine sont également enclins à adopter de plus en plus de législations protectrices
des animaux. Notons que ces derniers témoignent d'exemples juridiques inédits, notamment
en faveur de la libération des animaux sauvages en captivité dans les cirques et les zoos.
1763 Voir le niveau national de la base de données créée sous le nom de "Animal Welfare Legislation Database"
(AWLD), en ligne : www.globalanimallaw.org/database/national/index.html. 1764 Ce besoin de sociabilité est pris en compte par la législation Suisse sous l'article 13 de l'Ordonnance sur la
protection des animaux, RS 455.1, 23.04.2008. Il prévoit en effet que : "Les animaux d'espèces sociables doivent avoir
des contacts sociaux appropriés avec des congénères". 1765 Voir respectivement : Federal Law on Animal Welfare, N°. 16 of 2007 ; Animal Welfare Act, 2008.
331
Depuis les premières lois anti-cruauté adoptées dans les années 1820, les lois pro-bien-être se
sont développées à partir de la seconde moitié du XXe siècle. Elles sont de plus en plus
présentes à travers le monde1766. De nos jours, il existe des lois destinées spécifiquement à
protéger les animaux dans de nombreux pays, qu'il s'agisse de lois anti-cruauté selon l'ancien
modèle, ou de lois pro-bien-être selon le nouveau modèle. Contrairement aux lois détaillées,
d'autres pays ne disposent encore que de quelques articles épars, contenus notamment dans
des codes, à l'image de la base anti-cruauté contenue dans le Code pénal en France et le Code
criminel au Canada1767. Afin de faire évoluer la protection juridique des animaux en regard
des avancées souhaitables, l'adoption de législations plus complètes ne peut qu'être
encouragée.
À ce jour, nous avons inventorié 107 pays disposant de législations anti-cruauté ou pro-bien-
être à travers le monde1768. Sur 193 Etats souverains membres de l'ONU à ce jour, la majorité
des pays du monde (soit 55%) dispose donc de lois protectrices des animaux en droit interne.
Notons également que certains pays du monde ont érigé des principes englobants au rang de
normes constitutionnelles1769. Il s'agit notamment du principe de protection des animaux en
Allemagne1770 ; du principe de protection et bien-être des animaux au Luxembourg1771 ;
du devoir de compassion en Inde1772 ; du respect de la dignité (ou de l'intégrité) des animaux
en Suisse1773 ; et de l'interdiction de cruauté envers les animaux au Brésil1774.
Au niveau national, le modèle législatif pro-bien-être tend ainsi à s'imposer mondialement, en
substitution à l'ancien modèle anti-cruauté, dont la base d'interdiction de maltraitance et de
cruauté est maintenue. En effet, ce nouveau modèle contient plus d'obligations positives par
rapport à l'ancien modèle uniquement répressif. Les obligations de bientraitance sont ainsi
1766 La première loi pro-bien-être a été adoptée aux Etats-Unis en 1966 sous le nom de Animal Welfare Act (toujours en
vigueur à ce jour). Ces lois sont désormais présentes dans de nombreux pays à travers le monde, notamment dans les
pays anglo-saxons et nord-européens. 1767 Les dispositions anti-cruauté sont prévues aux articles 521-1 et 521-2 du Code pénal en France et aux articles 444 à
447 du Code criminel au Canada. 1768 La liste complète de ces législations, ainsi queles instruments supranationaux de protection du bien-être animal, est
désormais accessible en ligne, grâce à la création du "Global Animal Law Project", en ligne :
www.globalanimallaw.org. 1769 Voir à ce sujet l'article d'Olivier Le bot, "La protection de l’animal en droit constitutionnel : étude de droit
comparé, Lex Electronica, vol. 12 n° 2, Automne 2007, en ligne : www.lex-electronica.org/docs/articles_27.pdf. 1770 Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne de 1949, révision de 2002, Art.20 a). 1771 Constitution du Grand-Duché de Luxembourg de 1868 (Art. 11 bis)- révision de 2007. 1772 Constitution de l'Inde de 1950 (Art. 51-A, g). 1773 Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999 (Art.120). Alors que dans la version anglaise, il est
question de "dignity of living beings" (dont la traduction fidèle en français serait la "dignité des êtres vivants"), il est
question de respecter l'"intégrité des organismes vivants" dans la version française. On retrouve explicitement le
principe de dignité en français dès l'article 1 de la Loi Suisse sur la protection des animaux de 2005 dont le but est en
effet de "protéger la dignité et le bien-être de l’animal". 1774 Constitution brésilienne de 1988 (Art.225 (1) §7).
332
davantage mises en avant que les interdictions de maltraitance. Celles-ci sont néanmoins
toujours présentes, en tant que solides fondations du droit du bien-être animal. Sans passer par
le modèle anti-cruauté, le modèle pro-bien-être s'est imposé d'emblée au niveau
supranational : d'abord au niveau européen puis mondial (international vers universel).
- Au niveau supranational : les instruments des institutions européennes et mondiales
Les instruments supranationaux concernent les instruments de protection du bien-être animal
adoptés par les institutions européennes depuis les années 1970, et ceux adoptés par des
organisations mondiales depuis le début des années 2000.
. Les institutions européennes : le Conseil de l'Europe et l'UE depuis le début des années 1970
Au niveau européen, le Conseil de l'Europe a initié la protection des animaux avec sa
convention sur le transport international de 19681775. Par la suite, la Communauté
Economique Européenne, ex-Union européenne (UE), a adopté une directive sur
l'étourdissement lors de l’abattage des animaux dès 19741776.
Le Conseil de l'Europe, réunissant aujourd'hui 47 pays à travers toute l'Europe (y compris la
Russie et la Turquie), a adopté une série de conventions et de protocoles additionnels en
matière de protection du bien-être animal dans les domaines suivants : transport1777,
abattage1778, élevage1779, expérimentation1780 et animaux de compagnie1781.
La plupart de ces instruments ont été intégrés au sein du droit de l'Union européenne sous
forme de directives et de règlements, sauf pour les animaux de compagnie. En effet, bien
qu'un règlement communautaire existe quant au transit non-commercial des animaux de
compagnie1782, celui-ci ne régit en rien leur bien-être, contrairement à la convention du
1775 Convention européenne sur la protection des animaux en transport international (n°65), ouverte à signature le 13
décembre 1968, entrée en vigueur le 20 février 1971. 1776 Directive 74/577/CEE du Conseil, du 18 novembre 1974, relative à l'étourdissement des animaux avant leur
abattage, JO L 316 du 26 novembre 1974. 1777 Suite à la première convention précitée de 1968, la nouvelle convention en vigueur concerne la Convention
européenne sur la protection des animaux en transport international (révisée), Chisinau, 6 novembre 2003, STE n°
193. 1778 Convention européenne sur la protection des animaux d’abatage, Strasbourg, 10 mai 1979, STE n° 102. 1779 Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages, Strasbourg, 10 mars 1976, STE n° 87 ;
Protocole d’amendement à la Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages, Strasbourg, 2
février 1992, STE n° 145. 1780 Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d’autres
fins scientifiques, Strasbourg, 18 mars 1986, STE n° 123 ; Protocole d’amendement à la Convention européenne sur
la protection des vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d’autres fins scientifiques, Strasbourg, 22 juin 1998,
STE n° 170. 1781 Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, Strasbourg, 13 novembre 1987, STE n° 125. 1782 Règlement (CE) n°998/2003 du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003 concernant les conditions de
police sanitaire aplicables aux mouvements non commerciaux d'animaux de compagnie, et modifiant la directive
92/65/CEE du Conseil, JO L 146 du 13 juin 2003.
333
Conseil de l'Europe, qui prévoit l'interdiction des mutilations esthétiques et autres1783. Bien
qu'en discussion1784, la protection du bien-être des animaux de compagnie fait donc encore
défaut au sein de l'Union européenne. Outre cette exception, il existe un double régime de
protection, commun au Conseil de l'Europe et à l'Union européenne. En plus des instruments-
cadres adoptés par l'UE dans chacun des domaines communs (transport1785, abattage1786,
élevage1787, expérimentation1788), des réglementations particulières ont été ajoutées en matière
d'élevage pour certaines espèces : les porcs, les veaux, les poules pondeuses et les poulets de
chair1789.
Le droit communautaire de l'UE, qui réunit 27 pays membres à ce jour1790, ne cesse de
s'étendre et se renforcer en faveur du bien-être animal. En droit communautaire primaire,
l'exigence de prendre en compte le bien-être animal est prévue depuis 1992 dans le cadre du
Traité de Maastricht établissant l'Union européenne1791. Cinq ans plus tard, l'exigence de
prendre en compte le bien-être animal parmi les objectifs communautaires figurait dans le
Protocole annexé au Traité d'Amsterdam de 19971792. Cette exigence figure désormais
comme un principe fondamental de l'UE dans le traité de Lisbonne de 20081793.
En droit communautaire dérivé, un nombre croissant de directives et de règlements existent en
matière de production et de commerce impliquant les animaux. Dans le cadre de l'objectif de
1783 Article 10 de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie (n°123), ouverte à signature
le 13 novembre 1987 et entrée en vigueur le 1 mai 1992. 1784 Notamment dans dans le cadre des programmes "Carodog" (www.carodog.eu) et "Carocat" (www.carocat.eu). 1785 Règlement n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et
les opérations annexes et modifiant les directives 64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) n° 1255/97, JO L 3
du 5 janvier 2005. 1786 Règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur
mise à mort, JO L 303 du 18 novembre 2009. 1787 Directive du Conseil 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages, JO L
221 du 8 août 1998. 1788 Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des
animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33 du 20 octobre 2010. 1789 Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives a la protection
des porcs, JOUE du 18.02.2009 ; Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008.établissant les normes
minimales relatives à la protection des veaux, JO L 10/7 du 15.01.2009 ; Directive 1999/74/CE du Conseil du 19
juillet 1999 établissant les normes minimales relatives au traitement des poules pondeuses, JO L 203/53 du 3 août
1999 ; Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales relatives à la protection des
poulets destinés à la production de viande, JO L 182/19 du 12 juillet 2007. 1790 L’une des dernières actualisations concerne la sortie du Royaume-Uni de l’UE, avec avant 27 Etats membres. 1791 Déclaration relative à la protection des animaux (n°24) annexée au Traité sur l'Union européenne ,
Maastricht, JO C 191 du 29 juillet 1992. 1792 Protocole sur la protection et le bien-être des animaux (n°10) annexé au Traité d'Amsterdam modifiant le
traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes ,
Amsterdam, JO C 340 du 10 novembre 1997. 1793 Art.13 du Traité sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne (version consolidée), JO
C 115/01 du 9 mai 2008 : "Lorsqu'ils formulent et mettent en œuvre la politique de l'Union dans les domaines de
l'agriculture, de la pêche, des transports, du marché intérieur, de la recherche et développement technologique et de
l'espace, l'Union et les États membres tiennent pleinement compte des exigences du bien-être des animaux en tant
qu'êtres sensibles, tout en respectant les dispositions législatives ou administratives et les usages des États membres,
notamment en matière de rites religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux." (souligné par nous).
334
protéger le bien-être animal, les percées les plus importantes qui peuvent être relevées
concernent l'interdiction des cages en batterie pour les poules pondeuses (en matière de
production)1794 ; l'interdiction des tests sur les animaux pour les produits cosmétiques (en
matière d'expérimentation)1795 ; et les interdictions d'importation et de commercialisation de
certaines fourrures animales issues de pièges à mâchoires1796, de chiens et chats1797, ou de
phoques1798 (en matière de commerciale).
Tant dans son premier plan d'action que dans sa récente stratégie sur le bien-être animal,
l'Union Européenne revendique sa place de leader international1799. En plus de promouvoir le
modèle communautaire, l'UE incite même les organisations mondiales à suivre son exemple.
. Les organisations mondiales : l'OIE, l'OMC et l'ONU depuis le début des années 2000
Au niveau mondial, l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) a fait le premier pas
normatif en matière de protection du bien-être animal depuis le début des années 2000.
Avec 180 Etats-membres à ce jour, l'OIE considère désormais le bien-être animal comme une
priorité1800. Les normes internationales de l'OIE sur le bien-être animal ont trait aux transports
(terrestre, maritime et aérien) et aux abattages (alimentaire et sanitaire), tant pour les animaux
terrestres que pour les poissons d'élevage1801. Elles concernent également l'expérimentation
animale, l'élevage des bovins et des poulets de chair, ainsi que le contrôle des populations de
chiens errants. Quant à l'originalité de cette dernière règlementation, rappelons que le mandat
initial de l'OIE (initialement l'Office international des épizooties) visait à lutter contre les
1794 Article 5 (2) de la Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à
la protection des poules pondeuses, JO L 203 du 3 août 1999. 1795 Article 18 du Règlement (CE) n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux
produits cosmétiques, JO L 342 du 22 décembre 2009. 1796 Règlement n° 3254/91 du Conseil du 4 novembre 1991 interdisant l'utilisation des pièges à mâchoire dans la
Communauté et l'introduction dans la Communauté de fourrures et de produits manufacturés de certaines espèces
animales sauvages originaires des pays qui utilisent pour leur capture le piège à mâchoire ou de méthodes non-
conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté, JO L 308 du 9 novembre 1991. 1797 Règlement (CE) n° 1523/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 interdisant la mise sur
le marché, l'importation dans la Communauté ou l'exportation depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et
de produits en contenant, Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE, JO L 343 du 27 décembre 2007. 1798 La première interdiction adoptée en 1983 concernait uniquement les peaux de bébé-phoques avant de concerner
l'ensemble des produits dérivés du phoques depuis 2009. Voir respectivement : Directive 83/129/CEE du Conseil du
28 mars 1983 concernant l'importation dans les États membres de peaux de certains bébés-phoques et de produits
dérivés, JO L 091/30 du 9 avril 1983 ; et Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16
septembre 2009 sur le commerce des produits dérivés du phoque, JO L 286/36 du 31 octobre 2009. 1799 Voir respectivement COMMISSION EUROPEENNE, Communication concernant un plan d'action
communautaire pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2006-2010, JO C 49, 28 février
2006 ; et COMMISSION EUROPEENNE, Communication sur la stratégie de l’Union européenne pour la protection
et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015, 15 février 2012, COM(2012) 6 final/2. 1800 "Le bien-être animal a été défini pour la première fois comme un domaine d'action prioritaire dans le cadre du Plan
stratégique de l'OIE couvrant la période 2001-2005" ; OIE, Objectifs et actions de l'OIE en matière de bien-être
animal, en ligne : www.oie.int/fr/bien-etre-animal/themes-principaux/ (date d'accès : 10.10.2014). 1801 Titre 7 sur le bien-être animal du Code sanitaire pour les animaux terrestres et du Code sanitaire pour les animaux
aquatiques. Voir l’Annexe 3.
335
zoonoses (maladies animales transmissibles aux humains1802), parmi lesquelles figurent
notamment la rage, dont les chiens sont les principaux porteurs à travers le monde1803.
Bien qu'il ne s'agisse que de recommandations minimales quant au bien-être animal et que
celles-ci ne revêtent pas de valeur juridiquement contraignante, les normes de l'OIE
constituent une première étape vers la mondialisation de la protection du bien-être animal.
Elles permettent également d'établir qu'il s'agit désormais d'un objectif commun à la plupart
des pays du monde1804.
Dans cette continuité, d'importantes décisions judiciaires ont propulsé la protection des
animaux à l'échelle mondiale. Ce tournant s'est opéré sur moins d'un an, entre 2013 et 2014,
dans le cadre des décisions de deux grandes instances mondiales que sont l'Organisation
mondiale du commerce (OMC) et la Cour internationale de Justice (CIJ).
Pour la première fois en novembre 2013, l'OMC a pris position en faveur de la protection du
bien-être animal1805. Cette décision faisait suite à la plainte formulée par le Canada et la
Norvège contre l'interdiction d'importation et de commercialisation des produits du phoque,
adoptée par l'Union européenne en 2009. De manière inédite, l'organe judiciaire de l'OMC a
reconnu que la chasse aux phoques est une pratique cruelle1806 et que le bien-être des animaux
constitue une valeur morale, un intérêt à défendre et un objectif légitime sur la scène
internationale1807. Cette affirmation n'a pas été remise en question lors de la décision finale de
l'organe d'appel fin mai 20141808. Au contraire, elle a confirmé la possibilité d'adopter des
restrictions commerciales en vue de protéger le bien-être des animaux, dès lors que celles-ci
sont justifiées par l'exception de moralité publique prévue à l'Article XX a) de l'Accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)1809.
1802 Le Code terrestre de l'OIE définit une "zoonose" comme "toute maladie ou infection naturellement transmissible
des animaux à l’homme". 1803 Voir les données de l'OMS sur la rage, en ligne : www.who.int/mediacentre/factsheets/fs099/fr. 1804 Sur ses 180 Etats membres (par rapport aux 193 pays au total dans le monde), seuls quelques petits Etats insulaires
ne sont pas membres de l'OIE. 1805 Communautés européennes - Mesures prohibant l'importation et la commercialisation de produits dérivés du
phoque, Rapports du groupe spécial, OMC, WT/DS400/R-WT/DS401/R, 25 novembre 2013. 1806 Id., § 7.224 et § 7.247. 1807 Id., § 7.632 et § 7.505. 1808 Communautés européennes - Mesures prohibant l'importation et la commercialisation de produits dérivés du
phoque, Rapports de l'organe d'appel, OMC, WT/DS400/R-WT/DS401/R, 22 mai 2014. 1809 Id., § 5.290 : "En conséquence, ayant rejeté les allégations formulées en appel par le Canada et la Norvège qui se
rapportent à l'article XX a), nous confirmons la constatation formulée par le Groupe spécial au paragraphe 7.639 de ses
rapports, selon laquelle "le régime de l'UE est provisoirement considéré comme nécessaire au sens de l'article XX a)
du GATT de 1994"."
336
Par la suite, la Cour internationale de Justice (CIJ) a adopté une décision cruciale en faveur de
la protection des baleines le 31 mars 20141810. Cette haute juridiction de l'ONU a
effectivement condamné la chasse à la baleine, soi-disant scientifique mais réellement
commerciale, menée par le Japon dans l'océan austral1811.
Suite à la préservation des espèces animales sauvages menacées d'extinction, le droit
international semble ainsi s'ouvrir à la protection du bien-être animal. Après le concept de
développement durable apparu à la fin du siècle dernier, le bien-être animal fait désormais son
entrée sur la scène mondiale et commence à poindre le bout de son nez à l'échelle universelle.
En effet, le bien-être animal fait l'objet d'une nouvelle prise en compte par l'Organisation des
Nations Unies (ONU). Celle-ci s'observe notamment au sein de son organisme spécialisé pour
l'alimentation et l'agriculture, la FAO, qui émet de plus en plus de rapports soulignant
l'importance du bien-être animal. Il est toutefois possible de regretter que le secteur de
l'élevage industriel ne soit pas mieux réglementé, du fait des dégâts majeurs qu'il cause pour
la santé globale, c'est-à-dire celle de la planète, des animaux, et en finalité celle des
consommateurs humains1812. Etant donné l'importance des émissions de gaz à effet de serre
générées par ce secteur, aussi importantes -si ce n'est plus- que le secteur des transports dans
son ensemble, suggérons que ce problème global soit pris en compte par la Convention-cadre
des Nations-Unis sur les changements climatiques et que des propositions soient formulées
par son groupe d'experts, le GIEC, à l'image des solutions alternatives proposées pour rendre
les transports plus écologiques. Car rendre l'alimentation humaine plus écologique est tout à
fait possible à travers la consommation de protéines végétales. Si la solution est simple, elle
semble pour l'heure moins économiquement attrayante qu'éthiquement, écologiquement et
sanitairement recommandée.
Depuis 2005, une Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA) est également
proposée par plusieurs Organisations non gouvernementales, gouvernements et organisations
intergouvernementales (comme l'OIE) dans le but d'être adoptée par l'Assemblé générale des
Nations Unies. Si tel était le cas, elle pourrait constituer la base d'un régime de protection
universelle du bien-être animal, commun à tous les pays du monde. Celui-ci pose plusieurs
1810 CIJ, Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon ; Nouvelle-Zélande (intervenant), Arrêt du 31 mars
2014. 1811 Si la chasse scientifique est autorisée en vertu de l'Article 8 de la Convention internationale pour la règlementation
de la chasse à la baleine, l'ensemble des éléments de preuve versés au dossier de cette affaire révèlent que la chasse
japonaise n'est pas une chasse scientifique, mais bien une chasse commerciale strictement interdite depuis le moratoire
sur la chasse à la baleine adopté en 1986. 1812 Voir à ce sujet COLLECTIF D'EXPERTS, La vérité sur la viande, Les arènes, 2013.
337
principes dont la reconnaissance universelle semble non seulement possible, mais aussi
essentielle de nos jours. Il s'agit notamment du caractère sensible des animaux et du devoir de
les respecter, en plus d'autres principes mondialement reconnus comme les 5 libertés en
matière d'élevage et les 3R en matière d'expérimentation.
Instrument de droit mou (de l'anglais "soft law") à valeur non contraignante, sa forte valeur
symbolique pourrait être porteuse de changement. Un changement de perception et une
reconsidération universelle de l'animal en droit, ou à tout le moins, un début de considération
de l'animal-sujet en droit universel.
Contrairement au droit européen et à de nombreux droits nationaux sur l'ensemble du globe,
le droit international général ne comporte que quelques recommandations non-contraignantes,
mais aucun texte d'une valeur juridique supérieure sur la protection du bien-être des animaux.
En effet, si de grandes conventions internationales visent à conserver les animaux sauvages en
tant qu'espèces menacées d'extinction (comme impératif environnemental), aucune ne vise à
protéger le bien-être des animaux en tant qu'individus sensibles (comme impératif moral)1813.
Mais comme nous l'avons vu, cette question suscite un intérêt croissant à l'échelle
mondiale1814.
De plus en plus de personnes se soucient du sort des animaux et des demandes d'amélioration
de leur protection émanent des différents acteurs sociaux (associations de protection,
consommateurs) et scientifiques (biologistes, éthiciens, juristes) partout à travers le monde.
Sur la base du fond juridique commun dégagé sur la protection du bien-être animal (au regard
des différentes législations nationales et supranationales adoptées à travers le monde), nous
avons pu démontrer l'intérêt d'adopter une convention-cadre à portée universelle à ce sujet.
1813 Les grandes conventions du droit international de la vie sauvage (sur la conservation des espèces animales
sauvages) sont notamment : la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, signée à
Washington le 2 décembre 1946 ; La Convention relative aux zones humides d’importance internationale,
particulièrement comme habitat des oiseaux d’eau (RAMSAR), signée à Ramsar le 2 février 1971 ; la Convention
concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (WHC), signée à Paris le 16 novembre 1972 ; la
Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES)
signée à Washington le 3 mars 1973 ; la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la
faune sauvage (CMS), signée à Bonn le 23 juin 1979 ; et la Convention sur la diversité biologique (CBD), signée à
Rio le 5 juin 1992 (qui offre un cadre de protection global). 1814 Voir APPLEBY, M.C. et B.O. HUGHES, Animal Welfare, CABI, 1997 (“Concern for animal welfare has recently
increased and continues to increase in many countries”) ; BEKOFF, M., Encyclopedia of Animal Rights and Animal
Welfare, Greenwood, 2009, p. xxix (there is a “growing general concern around the world about […] animal
protection”); BROOM, D. M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, p.14 ("Dans de nombreux
pays, au cours des trente dernières années et plus particulièrement des dix dernières, l’opinion publique se préoccupe
de plus en plus du bien-être animal") ; FRASER, D., Understanding animal welfare : The science in its cultural
context, Wiley-Blackwell, 2008, p.vi (“The welfare of animals has, in recent years, become a matter of widespread and
prominent concern around the word”) ; GRANDIN, T., Improving animal welfare : a practical approach, CAB
International, 2010, p.viii (“Animal welfare is an increasing concern all over the world”).
338
Ainsi, nous avons établi la force juridique supérieure d'un tel accord par rapport aux
recommandations non-contraignantes de l'OIE et aux déclarations de principes comme la
DUBEA1815. Au-delà de tirer cette force de sa nature d'accord multilatéral (comme contrat
conclu entre plusieurs voire tous les pays du monde), un tel accord pourrait revêtir un
caractère obligatoire et une portée universelle, de part la reconnaissance de principes
communs aux différents systèmes juridiques du monde, notamment les grands principes
dégagés de non-cruauté et de bientraitance envers les animaux, qui pourraient se voir
reconnaître la valeur de principes généraux de droit sur la protection du bien-être animal, forts
en droit international.
Comme méta-principe, la protection du bien-être animal vient elle-même chapeauter le tout en
tant que principe-phare, ou lumière d'horizon permettant de guider l'évolution du droit vers
cet objectif. Car le bien-être animal en encore loin d'être devenue une réalité de manière
globale.
L'ensemble de ces principes pourraient donc être consacrés dans un accord conventionnel de
droit international général au niveau universel. En ce sens, s'il n'existe pas de convention
internationale sur la protection du bien-être animal, celle-ci serait possible à partir du moment
où les Etats manifesteraient clairement leur volonté de conclure un tel traité au plan du droit
international. Cette volonté de protéger le bien-être animal est déjà partagée par de nombreux
Etats pris tant individuellement (107 pays ont des lois de protection sur l'ensemble du
globe1816), qu'en groupe (47 Etats du Conseil de l'Europe et 27 Etats de l'Union européenne)
sont dotés d'instruments de protection du bien-être animal1817, et collectivement (les 180 Etats
membres de l'OIE ont adopté les normes internationales sur le bien-être animal1818).
Il ne reste plus qu'un pas à franchir vers l'universalisation de la protection du bien-être animal
en droit international. Celle-ci est déjà en train d'émerger à l'ONU, en passant par la FAO.
En tout état de cause, la protection du bien-être animal apparaît comme une norme émergente
dans le droit de la Communauté mondiale. Dans un futur prospectif, peut-être non si lointain,
il pourra s'agir d'un nouveau principe de droit international positif, officiellement consacré.
Notre conclusion vient ainsi confirmer notre hypothèse de départ selon laquelle une protection
universelle du bien-être animal est possible en droit international sur la base d'un fond
1815 Mentionnons avant celle-ci l'exemple de la Déclaration universelle des droits de l'animal (DUDA) prononcée au
siège de l'UNESCO en 1978. 1816 Voir l'Annexe 1. 1817 Voir l'Annexe 2. 1818 Voir l'Annexe 3.
339
juridique commun préexistant, sachant qu'elle peut se concrétiser par la reconnaissance de
principes généraux et par l'adoption d'accords multilatéraux de droit international général.
Malgré la progression des législations nationales et instruments supranationaux de protection
bien-être des animaux à travers le monde, jamais leur mal-être n'a été aussi grand.
Comment expliquer ce paradoxe ?
En vertu des éléments apportés dans cette étude, nous pouvons développer cette seconde
conclusion : en dépit de sa progression constante, le droit du bien-être animal souffre de
limites persistantes. Le bilan qu'il est possible d'en dresser est donc très mitigé.
- Le bilan de protection mitigé du droit du bien-être animal
Si le droit du bien-être animal connaît aujourd'hui une évolution mondiale sans précédent, le
bilan de cette évolution demeure toutefois mitigé quant à son efficacité à atteindre son
objectif, à savoir protéger le bien-être des animaux (en réduisant leurs souffrances et en
améliorant leur sort). Même si le droit du bien-être animal est en progression constante, ses
principales limites demeurent relativement persistantes.
- Un droit en progression constante
Comme nous l'avons vu, l'expansion mondiale du droit du bien-être animal s'observe à tous
les niveaux. Du niveau national (à travers l'adoption de législations protectrices dans les
différents pays du monde), au niveau supranational (à travers l'adoption d'instruments
européens, de normes internationales et de décisions à portée mondiale). Mais cette
progression ne s'arrête pas à son expansion géographique ou à l'escalade des niveaux
législatifs jusqu'au niveau universel, tel qu'il est sans doute possible de l'entrevoir à l'avenir.
En effet, une analyse globale des textes législatifs et jurisprudentiels révèle une importante
extension de son champ d'application, comme un renforcement constant des prescriptions et
des sanctions protectrices des animaux.
. L'extension du champ d'application
Le droit du bien-être animal s’est non seuelement étendu à un nombre croissant de pays et
groupes de pays à travers le monde, mais aussi de catagories d'animaux et d'activités
humaines.
Ce droit a évolué de la protection des animaux domestiques aux animaux sauvages captifs, et
des vertébrés à certains invertébrés reconnus sensibles (comme les céphalopodes dans le cadre
expérimental). Quant aux activités répréhensibles, celles-ci sont passées des actes de cruauté
340
intentionnels (publics puis privés) aux actes de négligence même involontaires. Elles sont
aussi passées des activités à vocation économique (ex : méthodes de confinement, interdiction
des élevages d'animaux à fourrure ou de production du foie gras dans un nombre croissant de
pays), aux activités à connotation culturelle (ex : interdiction des corridas et chasse à courre)
et d'autres comme les pratiques religieuses (ex : interdiction des abattages rituel sans
étourdissement). À cet égard, relevons que de nombreux pays européens ont adopté des
interdictions pour l'ensemble de ces pratiques, notamment ceux d'Europe du Nord. Ces
derniers font figure de pays protectionnistes face aux pays européens moins avancés en
matière de protection animale, parmi lesquels il est possible de citer la France1819.
Au-delà de l'extension du champ d'application, il est également possible de souligner le
renforcement des prescriptions et des sanctions visant à protéger juridiquement les animaux.
. Le renforcement des prescriptions et des sanctions
Comme nous l'avons vu au cours de cette étude, les interdictions de maltraitance, comme les
obligations de bientraitance, se voient constamment renforcées à tous les niveaux législatifs.
Si les interdictions de cruauté classiques sont généralisées dans le monde, les nouvelles
interdictions sectorielles (ou visant un secteur d'activité en particulier) sont plus sporadiques.
Sur les premières, il s'agit des interdictions d'actes volontaires de cruauté, commis par une
personne physique envers un animal protégé, les animaux de compagnie étant généralement
les plus protégés face aux actes de cruauté intentionnelle et de négligence notoire.
Sur les secondes, des exemples précurseurs montrent que les intérêts humains peuvent être de
plus en plus remis en question, qu'il s'agisse des intérêts économiques, culturels et autres.
Rappelons notamment les récentes interdictions adoptées par plusieurs pays concernant
plusieurs secteurs d'activité dont : les élevages d'animaux à fourrure, la production de foie
gras, la chasse à courre, les corridas, ou les cirques avec animaux. Ces interdictions ont été
adoptées majoritairement en Europe et en Amérique latine quant aux deux dernières activités.
Concernant les deux plus grandes institutions utilisatrices d'animaux que sont la production
alimentaire et l'expérimentation animale, citons pour la première les interdictions de certaines
méthodes de confinement (stalles pour les veaux et pour les truies gestantes, cages en batterie
pour les poules pondeuses) et pour la seconde certaines sortes d'expérimentations (sur les
grands primates, à des fins cosmétiques et autres). Celles-ci proviennent des pays européens
et anglo-saxons qui représentent les grandes puissances productrices et pharmaceutiques.
1819 Voir BROOM, D.M. et al, Bien-être animal, éditions du Conseil de l’Europe, 2006, p. 267-234.
341
Mais bien que de plus en plus de règlementations sur le bien-être animal voient le jour (afin
d'agrandir un peu les cages, de les enrichir, de diminuer les souffrances causées, ou de mieux
répondre à leur besoins spécifiques), le bien-être des animaux est encore loin d'être optimal !
Certaines méthodes d'élevage, d'abattage, d'expérimentation et autres sont désormais remises
en cause, même si ces activités ne sont pas interdites en elles-mêmes sur le plan juridique.
Toutefois, celles-ci sont de plus en plus sujettes à débat dans notre société du XXIe siècle1820.
Certains pays ont déjà montré qu'il était possible de mettre fin à certaines pratiques en vertu
d'arguments éthiques. Précédemment cités, ces cas ont fait prédominer l'intérêt des animaux
sur ceux des hommes de les utiliser à diverses fins, dans le but de ne plus les exploiter, les
maintenir captifs, les torturer, les tuer etc. Ces interdictions d'avant-garde pourraient
constituer des exemples annonciateurs de changements juridiques plus importants à l'avenir.
Ils s'inscrivent aussi dans le cadre des propositions visant à repenser notre traitement des
animaux vers un plus grand respect de ces individus qui, sans appartenir à la même espèce,
mériterait une considération similaire qui pourrait trouver sa place en droit général positif1821.
Parmi les deux objections les plus fortes et les plus souvent invoquées à l'encontre de tels
changements substantiels, mentionnons les intérêts économiques et l'argument de la tradition.
Toutefois, il ne s'agit pas (ou plus) d'objections absolues sachant que des interdictions
viennent contrecarrer celles-ci en droit positif général.
Rappelons que certains pays ont commencé à interdire certaines pratiques traditionnelles en
les condamnant pour leur cruauté envers les animaux. Comme nous l'avons vu dans cette
étude, ces exemples existent partout dans le monde. Citons les deux illustrations récentes que
sont l'abolition de la corrida en Catalogne (en Espagne) en 2011, et l'interdiction de la chasse
à courre en Angleterre en 2005. Alors que l'Espagne est le berceau de la corrida, l'Angleterre
est celui de la chasse à courre. C'est pourquoi ces illustrations sont fortes de sens quand aux
remises en cause effectuées envers des traditions ancrées auxquelles ces pays étaient
mondialement associés. Les pays qui ont donné naissance à ces pratiques y mettent un terme.
Quant à l'argument économique, soulignons les deux exemples récents que sont l'interdiction
de production du foie gras en Israël en 2003 et l’interdiction des élevages d'animaux à
fourrure aux Pays-Bas en 2012. Ces exemples sont tout aussi forts de sens puisque ces pays
1820 Voir par exemple CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des droits, Seuil,
2013. 1821 Voir GIROUX, V., Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste, thèse de doctorat en
philosophie, Université de Montréal, 2011.
342
figuraient parmi les plus importants producteurs mondiaux (respectivement de foie gras et de
fourrure animale) lors de l'adoption des ces interdictions.
Parallèlement aux interdictions croissantes, les obligations de bientraitance augmentent.
Celles-ci consistent généralement à satisfaire les besoins physiologiques et comportementaux
des animaux placés sous la garde d'une personne, qu'il s'agisse des animaux domestiques,
familiers, ou sauvages en captivité). Relevons que les nouvelles législations mettent de plus
en plus en avant le devoir de soin. De récentes lois imposent également de venir en aide aux
animaux en détresse, ou punissent, notamment les vétérinaires, de s'abstenir de dénoncer les
suspicions de maltraitance1822.
En outre, les sanctions ne cessent d'augmenter en cas de manquement à ces prescriptions, en
particulier concernant les infractions de cruauté envers les animaux. Trop nombreuses pour
toutes les citer, mentionnons simplement les exemples de la France et du Canada. En France
la peine maximale, qui était de 5 à 15 francs et de 1 à 5 jours de prison (en cas de cruauté
publique envers un animal domestique) dans le cadre de la Loi Grammont de 18501823, est
passée à 2 ans de prison et 30 000 euros d'amende (en cas de cruauté, d'abandon ou de sévices
graves envers un animal domestique, captif ou apprivoisé), en vertu de l'Article 521-1 du
Code pénal1824. Plus récemment au Canada, la loi de 2001 modifiant le Code criminel sur la
cruauté envers les animaux, à fait passer les peines de 6 mois de prison et 2 000 $ d'amende à
18 mois de prison et 10 000 $ d'amende1825.
Les peines les plus fortes au monde sont prévues dans les pays anglo-saxons en cas de cruauté
aggravée envers les animaux. L'amende maximale est prévue en Nouvelle-Zélande avec un
demi-million de dollars pour les personnes morales1826. Quant à la peine de prison la plus
forte, celle-ci est prévue aux Etats-Unis dans les états de Louisiane et d'Alabama, avec une
peine maximale de 10 ans de prison1827.
D'une manière générale, la jurisprudence demeure timide et les juges sont réticents à
appliquer des peines sévères, même en cas de cruauté aggravée envers les animaux.
1822 Par exemple en Ontario le Provincial Animal Welfare Act de 2008, (Bill 50, S.O. 2008 C.16) prévoit l'obligation
pour les vétérinaires de dénoncer toute suspicion raisonnable d'abus ou de négligence envers un animal (Art. 11.3). 1823 Loi du 2 juillet 1850 dite Grammont sur les mauvais traitements envers les animaux domestiques, JORF du 20 août
1944 : "Seront punis d'une amende de cinq à quinze francs, et pourront l'être d'un à cinq jours de prison, ceux qui
auront exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques". 1824 L'Article 521-1 du Code pénal prévoit que : "Le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves, ou de
nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité,
est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende". 1825 En référence au Projet de Loi C-15B : Loi modifiant le Code Criminel. 1826 Animal Welfare Act, 1999, Art.28 (3). 1827 Louisiana Code, 2011 version, RS 14 :102.1; Alabama Code, 1977, Section 13A-11-14.
343
En effet, il est possible de constater que les peines prononcées sont toujours inférieures aux
peines maximales prévues, bien que celles-ci tendent à augmenter progressivement1828.
À cet effet, relevons l'influence croissante des demandes populaires pour des peines
exemplaires sur les cas qui attirent le plus l'attention publique, aujourd'hui mondialisée à
travers les médias et les réseaux sociaux, notamment à travers des pétitions et autres
réclamations émanant d'individus ou d'associations afin de rendre justice aux animaux1829. En
particulier, les juges semblent réticents à prononcer des peines de prison, sauf à des fins
d'exemplarité sous l'influence de l'opinion publique, comme dans certains cas récents à travers
le monde1830. Notons que certains pays européens sont allés jusqu'à supprimer les peines de
prison de leurs nouvelles législations sur le bien-être animal pour ne conserver que des peines
d'amendes, toutefois plus élevées, en cas de cruauté envers un animal1831. Cette évolution
semblerait mériter une analyse approfondie en droit pénal comparé, afin de voir si ces
nouvelles lois ne perdraient pas de leur caractère dissuasif, ou si, au contraire, des peines
pécuniaires plus fortes -qui se verraient systématiquement ou au moins plus souvent
prononcées- pourraient avoir l'effet inverse, à savoir celui d'un plus grand respect des
prescriptions protectrices des animaux. La question peut se poser, à l'image de nombreuses
autres questions concernant plus généralement l'efficacité des normes de protection des
animaux à l'encontre des maltraitances commises envers les animaux. Quotidiennement,
celles-ci sont exercées non seulement par des personnes physiques, mais aussi par des
personnes morales à une échelle industrielle.
- Un droit aux limites persistantes
Quelles sont les limites du droit du bien-être animal ? En premier lieu, il s'agit d'un droit
partiel et relativement faible. En effet, il peut être qualifié de partiel car, comme nous l'avons
vu précédemment, il n'est pas global. En ce sens, il ne concerne que certains animaux,
certaines activités et certains pays du monde. Tel que nous avons postulé en, introduction et
démontré dans cette étude, il est toutefois possible de se prononcer en faveur de la
1828 Voir à ce sujet BREWSTER, M.P. et C.L. REYES, Animal Cruelty: A Multidisciplinary Approach to
Understanding, Carolina Academic Press, 2013. 1829 Citons l'impressionnant soulèvement populaire demandant justice pour le lion Cécil, tué par un dentiste américain
au Zimbabwe en Juillet 2015. Voir par exemple, WINCHESTER L., "Justice for Cecil", Express, 3.08.2015, en ligne:
http://www.express.co.uk/news/world/595842/Cecil-lion-petition-million-signatures (date d'accès: 17.08.2015). 1830 Citons le cas du chat Oscar en France, l'auteur de la vidéoagression ayant écopé d'un an de prison ferme. Voir
BRELS, S., "La republicisation de la cruauté envers les animaux : les cas d'Oscar et Marius", Derecho animal, avril
2014, en ligne : www.derechoanimal.info/images/pdf/Republicisation-de_la_cruaute_envers_les_animaux.pdf. 1831 Par exemple : l'Autriche, la Belgique, la Croatie et la Turquie ne prévoient que des peines d'amendes sans peine
privative de liberté, contrairement au modèle initial des lois anti-cruauté. D'autres pays ayant adopté de nouvelles lois
de protection depuis les années 2000' se limitent également aux sanctions pécuniaires à l'image de la loi croate de
2006, espagnole de 2007 et islandaise de 2009 .
344
consécration d'une protection juridique globale du bien-être animal en droit international pour
tous les animaux, dans le cadre de toutes les activités, et dans tous les pays du monde. Ce
droit est aussi relativement faible car, dans l'ensemble, les prescriptions adoptées ne sont que
faiblement protectrices du bien-être animal. En effet, il s'agit d'un droit largement
anthropocentré qui privilégie majoritairement les intérêts humains au détriment des animaux.
Dans cette synthèse conclusive, nous traiterons plus spécifiquement de la limite générale du
droit du bien-être animal qui tient au caractère légal des souffrances jugées utiles bien
qu'évitables, avant de relever les lacunes et paradoxes dégagés dans notre analyse.
. La limite générale : le caractère légal des souffrances utiles bien qu'évitables
Revenons tout d'abord sur la nécessité des souffrances comme limite générale de protection
du bien-être animal, avant de souligner l'impératif moral d'éviter toute atteinte évitable.
. La nécessité des souffrances comme limite générale de protection du bien-être animal
Au niveau pénal, rappelons les actes de cruauté sont le plus souvent considérés comme
répréhensibles lorsqu'ils sont source de souffrances jugées "excessives" ou causées "en dehors
de toute nécessité"1832. Comme nous l'avons vu, la notion de souffrances "inutiles" est la plus
communément utilisée en tant qu'expression présente dès les premières lois anglo-
saxonnes1833. C'est aussi la notion la plus répandue, tant dans les anciennes législations anti-
cruauté, que dans les nouvelles législations pro-bien-être de plus en plus répandues à travers
le monde1834. Cette notion rejoint le principe de traitement humanitaire, visant à ne pas causer
de souffrances inutiles aux animaux utilisés mais sans remettre en cause le principe
d'utilisation en lui-même. Présent comme formule légale dans les pays anglo-saxons à travers
l'expression "humane treatment", il l'est désormais à l'échelle internationale au sein des
normes de l'OIE1835.
En plus des souffrances dites "inutiles"1836, certaines législations emploient les termes
synonymes de souffrances "déraisonnables"1837, "injustifiables"1838 ou "évitables"1839.
1832 Id. 1833 Voir RADFORD, M., Animal welfare law in Britain : regulation and responsibility, Oxford University Press, 2001 1834 Voir le tableau de l'Annexe I et le développement du Titre I sur les lois nationales. 1835 Voir notamment l'introduction des normes de l'OIE sur le bien-être animal en anglais, Art. 7.1.1. du Code terrestre
intitulé "Introduction to the recommendations for animal welfare". 1836 Par exemple, on l'interdiction des souffrances inutiles (ou de faire souffrir un animal "sans nécessité") se retrouve
à Art.445.1, §1, a) du Code criminel Canadien. En anglais l'expression "unecessary suffering" se retrouve dans de très
nombreuses lois de protection à travers le monde. Voir le tableau de l'Annexe I. 1837 Par exemple, la loi néo-zélandaise (Art.12), la loi japonaise (Art.27-1) ou la loi allemande (Art.17-1). 1838 Par exemple en Australie les lois de Queensland (Art.3-c) et en Tasmanie (Art.8-1)
345
Ce dernier terme nous semble objectivement plus pertinent, sachant que le caractère
nécessaire des souffrances est plus subjectif et sujet à des interprétations variables selon les
pays. En effet, telle ou telle activité sera considérée comme nécessaire dans un pays et inutile
dans un autre. Or comme vient le confirmer cette étude en droit, la définition de la cruauté est
culturelle. Par exemple, les corridas sont autorisées dans les régions hispaniques, l'Espagne
(sauf la Catalogne) ou le Sud de la France, comme l'est la chasse aux phoques dans les régions
nordiques, la Norvège ou le Canada. Au contraire, la consommation de viande de chien et de
chat est interdite dans les pays occidentaux, la production de foie gras dans plusieurs pays
européens. Ces exemples renvoient à l'argument de la tradition abordé précédemment, qui
vient souvent légitimer certaines pratiques considérées ailleurs, là où elles ne sont pas
traditionnelles, comme des pratiques cruelles. À ce sujet, il est possible d'avancer que ce n'est
pas parce qu'une pratique existe depuis longtemps qu'elle est légitimée à perdurer si elle n'est
plus justifiée sur le plan moral. C'est pourquoi certaines pratiques, jugées tout à fait
acceptables à un moment donné, peuvent être considérées comme cruelles avec le temps.
. L'impératif moral d'éviter toute atteinte évitable
Convient-il d'éviter toute atteinte évitable ? Ou devons-nous éviter de faire souffrir si nous le
pouvons ? Cela ne fait pas l'ombre d'un doute du point de vue de l'approche abolitionniste en
éthique animale. Celle-ci est défendue notamment par le juriste Gary Francione qui affirme :
« Nous n'avons pas besoin de manger les animaux, porter les animaux, ou utiliser
les animaux [...] et notre seule défense par rapport à ces utilisations est notre
plaisir, divertissement, et habitude »1840.
Si le devoir d'éviter toute atteinte évitable en venait à être consacré en droit positif, cet
impératif pourrait permettre d'épargner les animaux de la plupart des atteintes causées par le
recours aux méthodes alternatives et aux produits de substitution disponibles. Pour les
méthodes alternatives, citons par exemple les modèles informatiques (méthodes in silico) et
les cellules souches (méthodes in vitro) dans le cadre de l'expérimentation animale. Quant aux
produits de substitution aux produits issus d'animaux, ceux-ci existent dans tous les domaines,
1839 Par exemple en Belgique, Loi relative à la protection et au bien-être des animaux, 1986, Art.4§ 2 : "Aucune
personne qui détient un animal, en prend soin, ou doit en prendre soin, ne peut entraver sa liberté de mouvement au
point de l'exposer à des douleurs, des souffrances ou des lésions évitables". 1840 "We do not need to eat animals, wear animals, or use animals [...] and our only defense of these uses is our
pleasure, amusement, and convenience" (traduction libre). Voir en ligne:
http://www.goodreads.com/author/quotes/137384.Gary_L_Francione (date d'accès : 25.10.2014). Promoteur du
véganisme (comme mode de vie excluant la consommation des produits issus d'animaux et refusant de cautionner leur
exploitation), sa position vient mettre en lumière le point important selon lequel les différentes utilisations encore
généralement considérées comme "nécessaires" ne consistent pas (ou plus) à satisfaire des besoins vitaux de nos jours.
346
à savoir en matière alimentaire (protéines végétales), vestimentaire (vêtements synthétiques
ou en fibres végétales) et pharmaceutique (médicaments de synthèse ou à base de plantes).
Bien qu'il soit recommandé d'épargner les animaux des souffrances évitables dans plusieurs
législations nationales et instruments supranationaux1841, il ne s'agit que d'une obligation de
moyens, plutôt que d'une obligation de résultat vers laquelle il conviendrait toutefois de tendre
dans l'objectif de renforcer la protection du bien-être animal.
Par ailleurs, notons que plusieurs législations considèrent encore certaines souffrances comme
"inévitables", notamment dans le cadre de l'abattage alimentaire1842 et de l'expérimentation
animale1843. Pourtant, le végétarisme est une alternative possible afin d'éviter l'exploitation
animale à des fins alimentaires1844. Quant à l'expérimentation animale, certains experts
scientifiques remettent eux-mêmes en question la pertinence du modèle animal pour les
expérimentations destinées à bénéficier aux êtres humains1845. Il est également possible de se
passer d'expérimenter des animaux si l'on accepte de faire passer le bien-être des individus
avant l'avancée des connaissances scientifiques, priorité consacrée notamment par la
déclaration d'Helsinki pour les êtres humains1846.
Bien qu'étant les plus socialement acceptées et juridiquement défendues comme "nécessaires",
ces deux activités institutionnalisées sont néanmoins celles qui exploitent et sacrifient le plus
grand nombre d'animaux par an, à savoir des milliards pour l'alimentation et des millions pour
l'expérimentation1847. Or, comme nous l’avons vu précédemment, la sensibilité de la plupart
des animaux qui en sont victimes n’est plus à démontrer, qu’il s’agisse des animaux terrestres
et marins exploités pour l’alimentation industrielle, comme des nombreux mammifères et
primates utilisés pour l’expérimentation.
1841 Par exemple la loi belge (Art.4§2), la loi allemande (Art.3-8 c) et la Convention européenne pour la protection des
animaux de compagnie de 1987 (Art.12). 1842 Préamb., Consid. 2 de la Directive 74/577/CEE du Conseil, du 18 novembre 1974, relative à l'étourdissement des
animaux avant leur abattage, J.O. L 316 du 26.11.1974. 1843 Préamb., al.6 de la Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins
expérimentales ou à d'autres fins scientifiques de 1986. 1844 Voir notamment les ouvrages de Peter Singer, Tom Regan et Gary Francione - ce dernier prônant le véganisme
(courant refusant l'exploitation animale et incluant le végétalisme) comme point de départ- dans la bibliographie finale. 1845 Voir par exemple la Revue des questions scientifiques, Université de Namur, Vol. 176, 2005, p.331. 1846 Voir la Déclaration d'Helsinki de l'Association Médicale Mondiale (AMM), Principes éthiques applicables à la
recherche médicale impliquant des êtres humains, Helsinki, 1964, dernier amendement de 2013. 1847 Voir généralement WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press,
2011.
347
Selon la position utilitariste en éthique animale, il conviendrait de condamner toute pratique
immorale qui procure plus de souffrances aux animaux que de bienfaits utiles à l'homme,
celle-ci est-elle effectivement appliquée en droit ?1848
Nous avons vu que de nombreuses législations condamnent actuellement le fait de causer aux
animaux des souffrances inutiles, déraisonnables, injustifiables etc. Toutefois, la plupart des
pratiques actuelles sont jugées utiles, raisonnables et justifiables, lorsqu'elles procurent un
bienfait à l'homme et, le plus souvent, quelque soit le degré ou la quantité de souffrances
impliquées pour les animaux. Or, si ce bienfait peut être obtenu autrement, en épargnant des
vies et une quantité de souffrances incommensurable, ne conviendrait-il pas d'imposer
juridiquement d'éviter ces dernières par tous les moyens disponibles ?
De nos jours en effet, l'utilité des pratiques en cause est couramment jugée à l'aune de l'intérêt
qu'elles présentent pour l'homme, plutôt qu'en vertu de la somme des souffrances des
animaux. Un équilibre plus juste peut-il être trouvé sur le plan juridique, entre les intérêts
humains et ceux des animaux non-humains ?
Non seulement un traitement plus équitable envers les animaux peut être trouvé, mais il est
tout à fait possible d'affirmer qu'il devrait l'être d'un point de vue éthique. Cette évidence
apparaît désormais comme un nouvel impératif moral, amené à devenir prochainement un défi
incontournable pour notre société du troisième millénaire. En tant que bras armé de la justice,
le droit constitue sans doute le remède le plus efficace pour parvenir à ce nouvel équilibre,
vers un monde plus humain envers les non-humains.
. Les lacunes et paradoxes
Présentons les lacunes et les paradoxes propres au droit du bien-être animal.
. Les lacunes
Les lacunes identifiées concernent principalement les animaux et les activités oubliés du droit,
ainsi que la non prise en compte des intérêts fondamentaux des animaux à vivre, à ne pas
souffrir et à être libres.
- Les animaux et activités oubliés du droit du bien-être animal
Les animaux oubliés du droit du bien-être animal concernent en premier lieu les animaux
sauvages en liberté. En effet, ces derniers peuvent bénéficier de certaines mesures de
1848 Proposition issue de la position de John Stuart Mill. Voir MILL, J.S., "Whewell on Moral Philosophy" [1852],
dans ROBINSON, J.M. (ed.), The Collected Works of John Stuart Mill, Routledge and Kegan Paul, 1985, pp. 186-187.
348
préservation lorsqu'il s'agit d'espèces menacées d'extinction, mais il n'en est rien lorsque les
populations de ces espèces sont en nombre suffisant, ou lorsque celles-ci sont considérées
comme "nuisibles". Au contraire dans ce cas, leur éradication systématique ne souffre
d'aucune restriction juridique. Notons que le sort réservé aux animaux sauvages est le même
concernant les animaux errants, lorsqu'ils sont également estimés en surnombre -comme par
exemple les chiens et les chats- dans les pays où des mesures d'éradication sont adoptées.
Par conséquent, les animaux sauvages vivant en liberté et les animaux errants ne disposent
presque pas de protection individuelle. Certaines méthodes d'éradication (pour les animaux
errants) et certains quotas comme certaines méthodes de chasse, pêche et piégeages peuvent
être réglementées (pour les animaux sauvages). À ce sujet, relevons que la Constitution du
canton de Genève offre un exemple réduit mais inédit, en interdisant la chasse sur l'ensemble
du territoire genevois depuis 19741849.
Parmi les activités de production, notons l'absence de réglementations spécifiques pour les
élevages laitiers, contrairement aux normes sur les animaux élevés pour leur chair (dits
"poulets de chair" ou "bovins à viande" dans les normes européennes et celles de l'OIE).
Plus généralement, relevons que si les actes de cruauté commis intentionnellement par une
personne physique contre un animal familier sont généralement répréhensibles (en vertu de
l'ensemble des législations adoptées à travers le monde), les actes les plus massivement
générateurs de souffrances, mais aussi les plus banalisés dans le cadre des grandes institutions
de la souffrance animale, sont aussi exempts de toute forme de répression légale.
Ainsi, le "droit de soumettre et de tuer" est généralement légalisé pour l'espèce humaine1850.
- La non prise en compte des intérêts fondamentaux des animaux
Les intérêts fondamentaux des animaux à vivre, à être libres et à ne pas souffrir sont
notamment présentés dans la thèse de doctorat en philosophie de Valéry Giroux, qui en déduit
des droits fondamentaux pour les animaux selon une approche anti-spéciste1851.
1849 Accepté en votation populaire depuis le 19 mai 1974, l'art. 178 A) de la Constitution du Canton de Genève énonce
que: "1) La chasse aux mammifères et oiseaux est interdite sous toutes ses formes sur l’ensemble du territoire du
canton de Genève". Cette interdiction n'est toutefois pas absolue sachant que l'exception qui suit est que: "2) Le
Conseil d’Etat peut, sur préavis d’une commission formée des représentants des associations protectrices des animaux
et de la nature, lever l’interdiction pour assurer une sélection et un meilleur état sanitaire de la faune ou pour détruire
les espèces nuisibles". Il est intéressant de relever ici l'accent mis sur l'information préalable des associations de
protection des animaux. 1850 CYRULNIK, B., DE FONTENAY, E. et P. SINGER, Les animaux aussi ont des droits, Seuil, 2013, p. 148. 1851 GIROUX, V., Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste, thèse de doctorat en
philosophie, Université de Montréal, 2011.
349
Revenons sur chacun d'entre eux, en soulignant l'omniprésence des souffrances physiques et
psychologiques malgré l'objectif de réduction généralisé, avant de voir que le droit positif de
la protection du bien-être des animaux fait abstraction de leur intérêt à vivre et être libres.
- Malgré l'objectif de réduction, des souffrances physiques et psychologiques omniprésentes :
Le principe des 5 libertés impose les obligations générales d'épargner aux animaux les
souffrances physiques (douleur, blessures et maladies) et psychologiques (peur et
détresse)1852. Ce principe est relayé à tous les niveaux par les normes de l'OIE, les instruments
européens et communautaires, ainsi que les législations nationales sur la protection du bien-
être animal1853.
Avec la prise en compte du caractère sensible (c'est-à-dire de l'aptitude à souffrir), de
nombreux animaux, le droit du bien-être animal tend ainsi à réduire, plus qu'à supprimer, les
souffrances infligées sur le plan physique. Mais celles-ci demeurent. Néanmoins, celles-ci
commencent -à tout le moins- à faire l'objet d'une attention croissante de la part des
législateurs, tant au niveau national que supranational.
En tout état de cause, les souffrances physiques des animaux exploités ou expérimentés sont
toujours présentes et ce malgré les réglementations censées les protéger. De nombreux
exemples peuvent être évoqués, mais nous n'en reprendrons ici que quelques uns. Citons les
cas de mutilations de convenance pour les animaux d'élevage, en plus des fractures dues au
surpoids des poulets de chair, des mammites des vaches laitières, de la stéatose des
palmipèdes à foie gras etc.). Notons que le droit communautaire tend à réduire ces pratiques
pour les animaux d'élevage et à les "adoucir", par le biais d'anesthésie ou d'analgésie pour les
procédures douloureuses, bien que ces palliatifs ne soient pas encore généralisées (exemple de
la castration à vif autorisée pour les porcelets de moins de 7 jours). À la différence des
animaux d'élevage, rappelons que les mutilations non-curatives des animaux de compagnie
sont désormais largement interdites par les législations occidentales1854.
Il est également possible d'évoquer la légalité des souffrances générées volontairement à des
fins expérimentales (tests de douleurs) ou récréatives dans le cadre des spectacles sanglants
(combats d'animaux et corridas). Citons enfin les méthodes de dressage cruelles pour les
1852 Voir par exemple l'Art. 7.1.2. (2) du Code sanitaire sur les animaux terrestres de l'OIE. 1853 Voir les développements précédents. 1854 Voir les législations nationales et la convention européenne évoquées dans la première partie de cette étude.
350
animaux de cirque (même si de plus en plus de pays interdisent les animaux sauvages dans les
cirques et certaines pratiques comme les piques pour les éléphants)1855.
D'une manière générale, les souffrances physiques sont toutefois mieux prises en compte que
les souffrances psychologiques, encore largement ignorées du droit.
Les souffrances psychologiques des animaux sont dues notamment à l'enfermement, au
confinement, à l'ennui dû à l'isolement et au manque de stimulation, ou au contraire, au stress
de la surdensité et à l'impossibilité, pour de nombreux animaux, de satisfaire leurs besoins
comportementaux. Elles sont également issues de l'angoisse de la douleur dans les
laboratoires et de la mort dans les abattoirs, de la peur du chasseur pour les animaux sauvages
ou du dompteur pour les animaux de cirque, de la détresse des animaux sauvages en captivité,
ou encore de la séparation précoce des mères et leurs petits dans les élevages laitiers.
Concernant les normes sur les vaches laitières, il serait souhaitable de décourager l'écornage,
comme dans le cadre de celles sur les bovins, mais aussi d'aller plus loin en traitant du
problème de la séparation des mères et de leurs petits après la naissance1856.
En ce sens, la souffrance psychologique est de plus en plus reconnue par les études
scientifiques qui viennent même confirmer l'existence d'importantes souffrances
émotionnelles chez les animaux1857. L'absence de stimulations extérieures et de contacts
sociaux sont notamment source d'ennui et de dépression, comme dans le cas des animaux
isolés et/ou enfermés, qu'il s'agisse d'animaux domestiques, sauvages captifs ou d'animaux de
compagnie qui sont parfois laissés seuls sur de longues durées1858.
Les souffrances psychologiques peuvent également engendrer des comportements atypiques,
depuis les tics nerveux des animaux enfermés jusqu'aux automutilations des animaux en cage
(par exemple les renards élevés pour leur fourrure). Ce type de comportement s'observe aussi
entre les individus en cas de surdensité. Cette dernière est source d'un grand stress générant
des comportements agressifs et défensifs : les poules en batterie se déplument, les poulets
s'attaquent, les vaches se donnent des coups de cornes et les cochons se mordent la queue.
C'est pourquoi les premiers sont débéqués, les secondes écornées et les derniers édentés. Non
1855 Voir la dernière interdiction adoptée en Californie à ce sujet : CAMPBELL, S., "Oakland Bans the Bullhook!",
Veganoutreach, 13.12.2014, en ligne : http://veganoutreach.org/oakland-bans-the-bullhook/ (date d'accès :
14.12.2014). 1856 Tel que nous l’avons vu précédemment, la séparation des veaux de leur mère peu après leur naissance est
désormais reconnue scientifiquement comme émotionnellement douloureuse. SANDEM, A.-I. et B.O. BRAASTAD,
"Effects of cow–calf separation on visible eye white and behaviour in dairy cows-A brief report", Applied Animal
Behaviour Science, n°95, pp. 233-239, 2005. 1857 Voir MATIGNON, K.-L., Emotional Life of Animals, Hachette, 2006. 1858 Certaines législations imposent ainsi des balades régulières pour ces derniers comme à Rome et la récente
Ordonnance Suisse de 2008 tient compte du besoin de sociabilité des animaux.
351
parce qu'ils sont naturellement agressifs, mais parce que leurs conditions de vie antinaturelles
les rendent agressifs. Alors que ces conditions de vie artificielles sont les causes-mêmes de
ces stéréotypies, le fait d'autoriser les mutilations à des fins pratiques vient pallier aux
conséquences sans remédier à la cause du problème. À toute fin logique, une réelle protection
du bien-être animal qui viserait à y remédier viendrait interdire la cause, c'est-à-dire la
surdensité, permettant alors d'éviter de recourir à ce type de pratique. Car lorsque les animaux
ont suffisamment d'espace, alors les comportements problématiques ne s'observent pas1859.
Dans le cas des vaches laitières enfin, les études démontrent que les mères et les petits
souffrent psychologiquement d'une séparation précoce1860.
Bien qu'il n'existe à ce jour aucune législation consacrée spécifiquement à la protection
animale dans les industries laitières, des discussions seraient en cours au sein de l'OIE afin
d'établir des normes internationales, en particulier pour les vaches laitières1861. Notons
toutefois qu'il existe des réglementations et recommandations nationales à ce sujet, comme
celle du Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE) au Canada1862.
En résumé, l'obligation de principe visant à limiter les souffrances des animaux comporte
d'importantes limites générales. En effet, malgré les efforts législatifs de plus en plus
soutenus, la souffrance animale est toujours d'actualité, que celle-ci soit d'ordre physique ou
psychologique. Alors que les atteintes à l'intégrité physique sont généralement réglementées à
tous les niveaux, celles-ci ne sont pas pour autant interdites puisqu'elles demeurent encore
largement autorisées dans tous les domaines d'utilisation des animaux.
1859 Voir BURGAT, F. et R. DANTZER (dir.), Les animaux d'élevage ont-ils droit au bien-être ?, Paris, INRA, 2001. 1860 Au-delà de l'évidence scientifique, le bon-sens suffit à le réaliser en entendant les appels déchirants des mères
réclamant leurs petits, ces derniers pouvant même se laisser mourir sans leur mère. Voir généralement
DESAULNIERS, E., Vache à lait, Dix mythes de l'industrie laitière, Stanké, 2013. Notons que le lait produit par la
vache (naturellement pour son veau), est destiné aux êtres humains. Le veau lui est alors retiré pour partir à
l'engraissement, puis à l'abattoir afin de fournir de la viande de veau. Lorsque la mère aura elle-même atteint son
rendement optimal de lait (et de veaux), elle partira aussi à l'abattoir pour fournir de la viande dite de "bœuf". En ce
sens, toutes les mammifères femelles ont besoin de faire des petits pour produire du lait. Dans le cas des vaches
laitières, le rendement dit "optimal" en zootechnie est d'un veau par an, sachant que le cycle de lactation est d'une
durée moyenne de dix mois . Même si l'exploitation des vaches constitue la plus grande industrie laitière au monde,
leur cas n'est pas isolé sachant que le lait et les produits qui en sont issus (notamment le fromage, la crème et le beurre)
des autres espèces laitières sont soumis à la même règle. Citons notamment le cas des produits de brebis (contribuant à
fournir de la viande d'agneau) et de chèvre (pour la viande de chevreau surtout consommée en Asie, en Afrique et au
Moyen-Orient). 1861 Déclaration de Bernard Vallat, Directeur général de l'OIE lors du Colloque international "La Souffrance Animale:
De la Science au Droit", Siège de l'OIE, Paris, 18-19 Octobre 2012. 1862 Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE), Code de pratiques pour le soin et la manipulation
des bovins laitiers (1998), 3.8 - "Veaux : Généralement, les veaux laitiers sont séparés de leur mère peu après la
naissance. Toutefois, il est avantageux de laisser un lien s'établir entre la vache et son veau".
352
- Le non-droit à la vie et à la liberté :
Comme nous l'avons vu dans le premier titre de cette étude, les nouvelles législations sur le
bien-être animal, notamment européennes, mentionnent la protection de la vie des animaux.
Or, il semblerait plutôt que le droit positif, y compris le droit du bien-être animal actuel,
viennent plutôt consacrer un non-droit à la vie des animaux. En ce sens, il est possible
d'attenter à leur vie dans tous les domaines et à tous les niveaux (sauf exception). Ainsi, les
animaux sauvages peuvent être tués légalement (avec un permis) sans n'avoir aucun compte à
rendre -tant qu'il ne s'agit pas d'espèces protégées- et il en va de même pour les animaux dits
nuisibles ou errants. Les animaux domestiques peuvent être abattus à toutes fins (notamment
alimentaires et vestimentaires), les animaux de laboratoire sont le plus souvent euthanasiés
suite aux opérations subies, et les animaux de compagnie peuvent être euthanasiés par les
vétérinaires à des fins de convenance uniquement (par exemple les animaux âgés ou des
portées non désirées).
Soulignons aussi les méthodes juridiquement autorisées pour attenter à la vie des animaux.
Qu'il s'agisse des égorgements, ébouillantages, électrocutions, broyages de poussins vivants et
bien d'autres, celles-ci sont notamment détaillées dans les normes de l'OIE, qui servent de
références mondiales sur ledit "bien-être des animaux" dans le cadre de leurs mises à mort.
Ainsi, des milliards de meurtres volontaires d'animaux sont perpétrés quotidiennement, bien
souvent dans la souffrance, en dépit de l'existence de législations protectrices du bien-être et
de la vie des animaux. Il en va de même concernant les espèces censées être protégées par le
droit environnemental, mais qui disparaissent comme peau de chagrin à l'échelle planétaire.
Ainsi, notre espèce est la seule capable d'éradiquer toutes les autres espèces animales et ce, en
toute légalité ou, à tout le moins, en toute impunité. En effet, même lorsque ces
"animalicides" (prélèvements, abattages ou autres termes employés) sont interdits, ceux-ci ne
tombent que rarement sous le joug de sanctions dissuasives à l'encontre des personnes
physiques ou morales -voire à l'encontre des Etats- coupables. Soulignons à ce sujet qu'il
n'existe aucun tribunal international chargé spécifiquement de réprimer les crimes massifs
commis envers l'environnement et les animaux (en tant qu'espèces et en tant qu'individus)
faute de base légale et sans doute faute d'une volonté politique mondiale suffisante en ce sens.
De jure comme de facto, l'intérêt de l'animal à vivre est ainsi relativement ignoré du droit.
Au-delà de l'intérêt à ne pas souffrir, l'intérêt à vivre semble pourtant rattaché à tout être
sensible, tel que l'indique la docteure Valéry Giroux dans sa thèse précitée en ces termes :
353
« À ce moment-ci de notre histoire, il semble que nous réalisions n’avoir aucune
raison de douter du fait que de nombreux non humains sont des êtres sensibles et
qu’ils ont intérêt à ne pas souffrir". Elle ajoute : "à partir du moment où un être est
sensible, il semble que celui-ci puisse avoir des intérêts en général et l’intérêt à
vivre en particulier, et que la privation engendrée par la mort puisse donc lui
porter préjudice »1863.
Parmi les intérêts fondamentaux des animaux, le plus présent dans les textes de droit positif
concerne ainsi l'intérêt de ne pas souffrir physiquement en vertu de la reconnaissance du
critère de sensibilité (ou aptitude à souffrir) comme base de protection du bien-être animal.
Au contraire, nous avons vu que les souffrances psychologiques sont totalement ignorées du
droit. Il en va de même de l'intérêt à vivre pour les animaux, sachant que la répression des
atteintes à la vie des animaux demeure une exception plutôt qu'un principe.
Quant au troisième droit fondamental qu'est le droit à la liberté, relevons que celui-ci n'est pas
pris en compte par le droit, sauf à travers quelques exemples récents comme la libération des
animaux sauvages captifs détenus dans les des zoos au Costa Rica, ou encore la libération des
cétacés exploités dans les parcs aquatiques en Inde en 2013, et plus généralement
l'interdiction des animaux sauvages dans les cirques, dans un nombre croissant de pays1864.
En plus de ces premières limites, relevons certains paradoxes.
. Les paradoxes
L'analyse des prescriptions du droit du bien-être animal nous amène à dégager certains
paradoxes rhétoriques (qui tiennent au vocabulaire) et intrinsèques (propres à ce droit).
- Les paradoxes rhétoriques : les normes protectrices du bien-être des animaux
qui cautionnent leurs souffrances
Les paradoxes dits "rhétoriques" tiennent au vocabulaire employé dans les textes présentés.
Citons l'exemple des normes européennes et internationales. Celles-ci annoncent
explicitement leur objectif de protéger le bien-être des animaux, de façon juxtaposée aux
contextes comme l'élevage intensif, l'expérimentation et l'abattage. En des termes plus
explicites, il s'agit d'extrême confinement, de torture et de mise à mort. N'est-il pas aberrant
de parler de bien-être dans de telles circonstances ? En effet, il nous semble incorrect de
1863 GIROUX, V., Les droits fondamentaux des animaux : une approche anti-spéciste, thèse de doctorat en
philosophie, Université de Montréal, 2011, respectivement p.145 et 156. 1864 Voir Code animal, "Législation sur la détention et le dressage des animaux dans les cirques dans les pays du
monde", en ligne : http://www.code-animal.com/legis/legis.htm (date d'accès : 26.12.2014).
354
parler de bien-être des animaux alors que le mal-être de ces derniers est omniprésent et ce,
malgré les mesures visant à améliorer quelque peu leurs conditions de vie et de mort. Ainsi, il
nous semblerait plus juste de mettre en avant l'objectif réellement recherché, à savoir celui de
réduction des souffrances des animaux concernés1865. Bien que le changement terminologique
proposé consacrerait l'aveu selon lequel le bien-être est incompatible voire antinomique avec
de telles pratiques, il s'agit pourtant d'un impératif de cohérence et d'honnêteté intellectuelle.
Il semble peu probable qu'un tel changement soit opéré prochainement, puisque le fait de
viser explicitement le bien-être des animaux, même si un tel objectif ne peut être atteint dans
les faits, revêt une connotation rassurante pour les citoyens et les consommateurs1866. En toute
confiance envers le pouvoir législatif, tous sont effectivement influencés à penser que le bien-
être des animaux est réellement protégé grâce à de telles mesures, y compris dans des
circonstances parfaitement opposées à l'objectif protecteur allégué1867.
Puisqu'il est surtout question du bien-être des animaux sensibles, revenons brièvement sur le
critère de sensibilité, comme base de protection du bien-être animal.
Alors que le critère de sensibilité était absent des premières lois anti-cruauté, il constitue
désormais la pierre angulaire du droit du bien-être animal. Comme nous l'avons vu au début
de cette étude, les premières lois du XIXe siècle condamnaient la cruauté envers les animaux
en tant que mal social, dans le but de protéger la moralité humaine plutôt que la sensibilité des
animaux. Ce n'est qu'à partir de la seconde moitié du XXe siècle que le critère de sensibilité
est devenu une considération visant à protéger le bien-être des animaux eux-mêmes. Avant
cela, les animaux étaient protégés uniquement en vertu du principe moral selon lequel il est
mal d'être cruel envers un animal (parce qu'il est mal pour les humains d'être cruel), et non pas
en vertu du principe selon lequel il ne faut pas faire souffrir un animal (parce qu'il s'agit un
être sensible disposant d'un intérêt à ne pas souffrir).
De nos jours, la référence à la sensibilité des animaux est de plus en plus présente dans les
législations protectrices. Au niveau national, la France, le Québec et la Colombie ont intégré
cette précision dans leurs codes civils respectifs, ainsi que la Nouvelle-Zélande dans sa loi sur
1865 Voir à ce sujet : FALAISE, M., "Droit animalier : Quelle place pour le bien-être animal ?", RSDA, Vol.2, 2010.
Dans son article, Muriel Falaise relève la définition négative du bien-être animal qui vise plus une absence de mal-être. 1866 Voir HARPER, G.C. et HENSON, S.J., Strategies to address consumer concern about animal welfare – the
Comparative Report, The University of Reading, 2001 1867 Cf. TANABANU, C., "Le droit et le pouvoir", Société civile, 3.12.2007.
355
le bien-être animal1868. Au niveau supranational, cette référence est présente au sein de
l'UE1869.
La sensibilité, entendue comme la capacité de ressentir de la douleur ou la souffrance, est
donc devenue un critère important du droit de la protection des animaux depuis la fin du XXe
siècle. Or, si la plupart des pays protègent seulement les animaux sensibles, quelques pays
protègent tous les animaux indistinctement. Citons notamment le cas de l'Inde, où est
consacré le principe de compassion envers tous les animaux non-humains, indépendamment
de toute référence à leur sensibilité1870.
Les découvertes scientifiques sur la sensibilité des animaux ont également permis d'étendre le
champ de protection du droit, qui a d’abord concerné les vertébrés et plus récemment certains
invertébrés pour lesquels la sensibilité est avérée, notamment les céphalopodes. Cette
protection peut même s'étendre aux stades précoces de développement des mammifères
(fœtus au dernier tiers de la gestation) comme dans la directive comunautaire de 2010 sur
l’expérimentation1871.
Même lorsque la sensibilité des animaux est avérée, comme pour les vertébrés et notamment
les mammifères, ceux-ci font encore l'objet des souffrances les plus massives à l'échelle
mondiale dans le cadre des activités de production et d'expérimentation. Pas moins de 60
milliards de vertébrés terrestres (ainsi que des centaines de milliards de poissons) sont tués
chaque année à des fins alimentaires, et une centaine de millions de vertébrés (dont les
mammifères comme les chiens et chats et les primates) sont utilisés chaque année à des fins
d'expérimentation à travers le monde1872.
Ainsi, les animaux victimes de ces atteintes légales et institutionnalisées sont aussi ceux pour
lesquels la sensibilité n'est plus à démontrer. Alors que les animaux sensibles sont ceux qui
bénéficient du plus grand nombre de dispositions protectrices, il s’agit des animaux les plus
maltraités quantitativement, puisqu’ils sont les plus utilisés. En d’autres termes, les animaux
censés être les mieux protégés (en théorie), sont ceux qui souffrent le plus (en pratique).
D'autres paradoxes propres au droit du bien-être animal peuvent être relevés.
1868 Respectivement les articles 515-14 du Code civil français, 898.1 du Code civil du Québec, 655 du Code civil
colombien et pour la Nouvelle-Zélande, la Section 4 du Animal Welfare Amendment Act (No 2) 2015 (2015 No 49). 1869 Art. 13 du Traité de Lisbonne. 1870 Prevention of Cruelty to Animals Act, 1960, Art. 2 a) : " "animal" means any living creature other than a human
being". 1871 Voir Préamb. Art.1 (3) de la Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010
relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33 du 20.10.2010. 1872 WAGMAN, B. A. et M. LIEBMAN, A Worldview of Animal Law, Carolina Academic Press, 2011, p.61 et s.
356
- Les paradoxes intrinsèques : les animaux à la fois sujets et objets, protégés et non protégés
Le second grand paradoxe mis en lumière par cette étude concerne le statut juridique des
animaux, à la fois objets instrumentalisés et sujets protégés.
La réification (ou chosification) de l'animal se reflète dans son statut juridique de bien (en
droit civil ou en droit commun1873) et plus particulièrement de bien appropriable, en tant que
propriété qu'il est possible d'utiliser, de céder et même de supprimer (dans la limite des abus
punis par la loi). Ce statut est généralisé dans le monde entier, sans exception à ce jour.
En effet, même dans les pays qui ont modifié leur code civil en reconnaissant que les animaux
ne sont pas des choses ou des biens, ceux-ci restent soumis au même régime1874. Par exemple,
l’article 898.1 du Code civil du Québec précise désormais que "les animaux ne sont pas des
biens", quand bien même cette disposition se trouve au débu du quatrième livre sur les
biens1875.
Si cette reconnaissance semble mériter d'exister afin de faire évoluer la vision cartésienne de
l'animal-objet, toujours profondément ancrée dans la conscience sociale comme dans le droit
contemporain, cette modification n'a pas encore créé le changement attendu des juristes
animaliers, à savoir la création d'une nouvelle catégorie pour les animaux, telle qu'une
catégorie intermédiaire entre les personnes et les biens1876, voire d'une personnalité
animale1877. Toutefois, le statut juridique de l'animal est en train d’évoluer. Les connaissances
éthiques et scientifiques ne cessent de progresser et le droit tend à les intégrer de manière
croissante.
Relevons également le degré de protection variable des animaux selon leur utilité et leur degré
de proximité (évolutive ou affective) par rapport à l'homme. Ce traitement différentiel, reflété
dans la conscience sociale, se dégage aussi nettement du droit positif sur le bien-être animal.
Un même animal, par exemple un chien ou un chat, qui bénéficie généralement d'un régime
juridique de protection renforcé en tant qu'animal de compagnie, ne bénéficie plus de la même
protection lorsqu'il s'agit d'un animal de laboratoire. Les mêmes animaux peuvent donc se
1873 Voir LÉTOURNEAU, L., "De l’animal-objet à l’animal-sujet ? : Regard sur le droit de la protection des animaux
en Occident", Lex Electronica, vol. 10, n 2 (numéro spécial), Automne 2005, p.11. 1874 Cette formulation figure désormais dans les codes civils de plusieurs pays européens. L'Autriche a initié
l'intégration de cette disposition en 1988 et l'Allemagne a suivi en 1990 . Plus tard, cette mention a été introduite dans
le code civil Suisse en 2003, dans la province de Catalogne en Espagne en 2006 , ainsi qu'aux Pays-Bas depuis 2011. 1875 Modification issue du projet de loi 54 adopté le 4 décembre 2015 à l’unanimité. 1876 Voir notamment Suzanne Antoine, Rapport sur le régime juridique de l’animal, Ministère de la justice de la
république française, 2005. 1877 Voir BRUNOIS, A., "L’animal, sujet du droit", dans CHAPOUTHIER, G. et J.-C. NOUËT (dir.), Les droits de
l'animal aujourd'hui, Arléa-Corlet, pp. 83-94, 1997, p. 94.
357
voir protégés ou non selon leur utilité, ainsi que selon leur degré de proximité par rapport à
l'homme.
D'une manière générale, les animaux les plus protégés sont les animaux les plus proches, qu'il
s'agisse d'une proximité affective comme avec les animaux de compagnie, ou d'une proximité
évolutive comme avec les grands primates. À l'extrême inverse, les animaux les plus éloignés
sont les moins protégés. Il s’agit notamment des animaux sauvages en liberté (éloignés de
nous sur le plan relationnel) et des invertébrés (les plus éloignés de nous sur le plan
biologique).
Ainsi, l'être humain accorde ou non sa protection, à un degré plus ou moins élevé, en fonction
de l'utilité et du degré de proximité des animaux par rapport à ses propres intérêts. Encore
largement anthropocentré (ou centré sur l'homme et ses intérêts), le droit du bien-être animal
peut-il évoluer vers une approche plus zoocentrée (centrée sur l'animal et ses intérêts) ? L
a question mérite d'être posée. Dans les faits, le droit positif semble évoluer, doucement mais
sûrement, vers une considération toujours plus accrue des intérêts des animaux, notamment
sous l'influence de l'avancée des connaissances éthiques et scientifiques à ce sujet.
Toutefois, rappelons le paradoxe selon lequel de nos jours, les animaux les plus touchés par la
cruauté institutionnalisée concernent un grand nombre d'animaux proches de nous sur le plan
évolutif, dont des milliards de mammifères et de vertébrés utilisés à des fins alimentaires,
vestimentaires, expérimentales et récréatives1878. En dépit de leur dégré de proximité
biologique et de la sensibilité avérée de ces animaux, c'est donc le critère d'utilité qui domine
pour l'homme.
Par exemple, même si un cochon est aussi sensible, affectueux et intelligent qu'un chien1879, il
ne sera pas protégé de la même manière en droit positif, tant qu'il sera considéré comme un
animal, non pas destiné à la compagnie mais à la consommation. En ce sens, relevons qu'il est
question d'euthanasie pour les animaux de compagnie, alors qu'il est question d'abattage pour
les animaux d'élevage. Cette distinction de vocabulaire vient refléter la différence de
traitement accordé. Ainsi, les seconds sont moins protégés que les premiers (pour lesquels le
terme d'euthanasie est le même que celui employé pour les hommes).
Les étiquettes collées aux animaux en fonction de leur utilisation, ou de leur réputation bonne
ou mauvaise (ex : ours polaires vs. requins), ou encore les catégories créées (ex : compagnons
1878 Voir LINZEY, A., The Global Guide to Animal Protection, University of Illinois, 2013. 1879 Voir CRARY, D., "Pigs have the smarts over dogs", Science, 30.07.2013.
358
vs. bétail) rendent aveugles à la considération des animaux pour eux-mêmes, avec leurs
facultés spécifiques, comme leur intérêt commun à vivre une vie exempte de souffrances. En
particulier de souffrances évitables, qu'elles soient d'ordre physique ou psychologique, issues
des atteintes à leur vie, à leur liberté, à leur intégrité, voire à leur dignité (ex : lorsqu'ils sont
affublés de costumes et maquillages, ou humiliés publiquement dans des cirques, arènes etc.).
Ne conviendrait-il pas de reconsidérer le traitement des animaux de manière plus objective, en
les considérant pour ce qu'ils sont, plutôt que pour ce que les êtres humains veulent en faire ?
Les animaux sont des êtres vivants et non des objets à notre service. Il peut sembler
souhaitable que cet état de fait, scientifiquement établi, vienne se substituer aux croyances
tenaces. En ce sens, cette reconsidération des sujets-animaux pourrait devenir la nouvelle base
juridique de protection des animaux et de leur bien-être à l'échelle universelle.
L'ensemble de ces croyances, sur lesquelles tout le système d'exploitation des animaux est
basé à l'échelle mondiale, nuisent à leur protection face à toutes les atteintes qui leur sont
causées en tant qu'individus, non pas inférieurs, mais différents de l'homme1880. En ce sens,
tant que les animaux seront considérés comme des êtres inférieurs au service des hommes,
leur exploitation sera tout autant légitimée socialement, que cautionnée juridiquement1881.
Les normes de protection actuelles permettent-elles de protéger réellement le bien-être des
animaux, en évitant systématiquement leurs souffrances et en répondant à leurs besoins
fondamentaux par tous les moyens disponibles ? La réponse est un non franc. Car si des
exemples encourageants ont été adoptés en ce sens, il reste encore un long chemin à parcourir
avant d'y parvenir globalement. Le droit du bien-être animal permet encore largement le mal-
être animal, surtout lorsque ce dernier est institutionnalisé et causé à l'abri des regards, dans
des bâtiments sécurisés (laboratoires, élevages intensifs et abattoirs). Ces activités sont même
protégées lorsqu'elles sont synonymes d'intérêts économiques ou culturels, indépendamment
des atteintes causées dans la plupart des cas. En définitive, les mesures sur le bien-être animal
sont limitées à la réduction de quelques souffrances et à la satisfaction de quelques besoins,
face aux multiples atteintes encore légalement autorisées.
1880 Voir BRELS, S., “L’animalité humaine : du constat scientifique aux conséquences éthico-juridiques”, Lex
electronica, Vol.17, n° 2, 2012. 1881 Notons que les arguments invoqués pour les animaux sont similaires à ceux qui étaient invoqués pour les esclaves
humains. Voir à ce sujet : GIROUX, V., "Des droits légaux fondamentaux pour tous les êtres sensibles", Revue
philosophie Klesis, 2010, p.151.
359
- Conclusions finales
En premier lieu, nous avons pu définir juridiquement le bien-être animal sur la base du fond
commun mis en lumière par cette étude. En ce sens, la double règle générale, qui constitue la
base minimale commune du droit du bien-être animal, concerne : la limitation des souffrances
et la satisfaction des besoins des animaux (de compagnie, domestiques et captifs, soit ceux
placés sous la responsabilité d'une personne).
Nous avons vu que des différences existent selon les pays plus ou moins protecteurs. En effet,
les pays les moins protecteurs se limitent à viser, comme objectif idéal, une réduction mineure
des souffrances physiques les plus importantes et la satisfaction basique des besoins vitaux les
plus essentiels. Quant aux pays les plus protecteurs, ceux-ci imposent non seulement de
réduire les souffrances physiques mais aussi de tenir compte des souffrances psychologiques,
et de prendre en compte les besoins comportementaux des animaux, en plus de leurs besoins
vitaux. Néanmoins nous avons pu voir que, si les prescriptions protectrices du bien-être
animal ont permis quelques améliorations des conditions de vie (et de mort) des animaux à
travers le monde, leurs souffrances demeurent néanmoins omniprésentes dans la plupart des
cas, de sorte que les législations actuelles ne permettent pas de parler d'une réelle protection
du bien-être des animaux, mais plus d'un adoucissement du traitement qui leur est réservé.
En tout état de cause, le droit du bien-être animal ne remet pas (encore ?) en cause le principe
même d'instrumentalisation des animaux (comme moyens servant les fins des êtres humains).
En l'absence d'une remise en en cause fondamentale des pratiques et activités génératrices de
multiples souffrances pour les animaux, que nous savons aujourd'hui évitables, le droit du
bien-être animal demeure ainsi un droit qui cautionne généralement la souffrance animale, à
quelques exceptions et adoucissements près. Les activités générant les souffrances les plus
massives pour les animaux que sont l'alimentation (des centaines de milliards d'animaux par
an) et pour l'expérimentation (une centaine de millions par an), ne sont pas fondamentalement
remises en cause par le droit du bien-être animal, alors même que les connaissances
scientifiques rejoignent aujourd'hui l'éthique animale sur le fait que nous devrions éviter de
manger des animaux (aussi pour notre santé et pour l'environnement), mais aussi que nous
devrions cesser de faire souffrir inutilement ces milliards d'êtres à des fins contestables.
360
Pour l'heure, le droit actuel reflète majoritairement les intérêts humains, ainsi que les
réticences sociales à octroyer une plus grande protection aux animaux1882. En d'autres termes :
« La science avance mais le droit claudique", Louis Schweitzer ajoutant : "certes,
mais celui-ci claudique dans la bonne direction quand même »1883.
À titre d'exemple, des pratiques universellement reconnues pour leur cruauté comme les
combats à mort ou le gavage pour la production de foie gras ne sont pas encore
universellement interdite. On peut toutefois présager, du fait de l'avancée des connaissances
éthiques et scientifiques, que le droit continuera à prendre en compte ces évolutions de
manière progressive, comme cela a toujours été tant concernant la condition humaine que la
condition animale au cours des deux derniers siècles. Les deux siècles derniers ont vu la
reconnaissance des droits humains et l'évolution du droit du bien-être animal. Peut-être que
notre siècle verra l'apparition de droits pour les animaux ? Leurs intérêts seraient alors pris en
compte, vers l'apogée d'un nouveau droit universel, plus équitable pour tous les individus.
Qu'en est-il du statut juridique des animaux ?
Aujourd’hui, les animaux ne sont plus vraiment des biens mais pas (encore ?) des
personnes…
Partie des pays européens et commençant à se propager vers les pays d’Amérique du Nord
(Québec) et du Sud (Colombie), le statut juridique de l’animal est passé du statut de "bien" à
celui d’"êtres sensibles" dans ces pays. Mais cette qualité d’êtres sensibles n’est pas un statut
reconnu, plutôt une sorte de statut ad hoc ou intérimaire puisque les deux seuls statuts
juridiques aujourd’hui reconnus en droit civil sont les personnes et les biens, tels que définis
par la summa divisio ou division sommaire, toujours valable à l’heure actuelle en droit civil.
Dans les pays qui reconnaissent dans leurs codes civils que les animaux ne sont pas des biens,
ceux-ci précisent nénamoins animaux sont toujours soumis au régime des biens. Les animaux
sont donc des biens non-biens. Le paradoxe est frappant. Tellement que l’incertitude qui
entoure aujourd’hui le statut juridique de l’animal soulève de réels questionnements. Plusieurs
voies se présentent pour tenter de remédier à cette incertitude et au statut plutôt équivoque de
l’animal.
1882 Selon le juriste Steven White: "The way in which the law regulates the treatment of animals reflects how society
regards animals". Voir WHITE, S., "The emergence of animal law in Australian Universities" (2008) 91 Reform 51–
53, cité dans SCHILLMOLLER, A.L., Animal Law, 2nd edition, Southern Cross University, 2013. 1883 AUFFRET VAN DER KEMP, T. et M. LACHANCE, Souffrance animale : De la Science au Droit, Yvon Blais,
2013, p.383.
361
Tout d’abord, la création d’une troisième catégorie pour les animaux entre les personnes et les
biens a été proposée de longue date1884. En effet, pourquoi pas ne pas repenser la summa
divisio afin de créer de nouveaux statuts juridiques plus appropriés aux nouvelles catégories
actuelles ? Une autre voie, proposée par le Professeur Marguénaud, consisterait en l’octroi de
la personnalité morale (ou technique) aux animaux1885. En effet, la personnalité technique est
libre de l’imposition de devoirs corrélatifs aux droits. Elle présente aussi l’avantage d’être un
statut déjà opérationnel et applicable aux animaux. En effet, ceux-ci ont les deux aspects
essentiels pour y prétendre, à savoir des intérêts distincts et des organes habilités à les
représenter (ceux-ci sont déjà défendus dans certains pays –comme par les associations de
protection pouvant se porter partie civile en France depuis la loi de 1976). Le professeur
Marguénaud insiste aussi sur l’importance de reconnaître aux animaux la personnalité
juridique à des fins de cohérence1886.
En regard du dernier projet de loi luxembourgeois qui reconnaît que les animaux peuvent être
"titulaires de certains droits", ainsi que des avancées jurisprudentielles évoquées en
introduction, il n’est pas non plus impossible que le statut juridique de l’animal passe d’un
extrême à l’autre dans les temps à venir, à savoir des biens aux personnes physiques. Cette
transformation irait naturellement de paire avec la reconnaissance de droits, au moins
fondamentaux, dans les pays les plus progressistes qui pourrait montrer la voie en ce sens.
Et pourquoi pas, un nouveau statut non encore non envisagé à ce jour pourrait être créé. Quoi
qu’il en soit, souhaitons qu’un statut permettant de protéger au mieux leurs intérêts voit le
jour.
Notre conclusion sur ce point est que le statut juridique de l’animal est en pleine
transformation. À l’image d’une métamorphose, il est difficile de savoir exactement ce qu’il
est en train de se passer dans la chrysalide du droit. De la larve au papillon, des biens aux
personnes animales ? Si le processus est difficile à percevoir avec exactitude, un souhait peut
être formulé. Puisque le statut des animaux est en pleine mutation, espérons qu’il en sortira un
beau papillon !
D’une manière générale, cette étude a permis de mettre en lumière que le statut des animaux
est en train de progresser de celui d'objets instrumentalisés à celui de sujets sensibles, au
moins partiellement protégés. Tout en demeurant majoritairement instrumentalisés à des fins
1884 Celle-ci a été reprise et explicitée avec clarté par Suzanne Antoine dans le fameux rapport suivant : ANTOINE, S.,
Rapport sur le régime juridique de l’animal, Ministère de la justice de la république française, 2005. 1885 Intervention du Professeur Jean-Pierre Marguénaud à la Conférence Interdependence, Bruxelles, 15 mai 2016. 1886 Celle-ci est importante pour ne plus que les animaux demeurent des "morts-vivants" sur le plan du droit civil.
362
humaines, leur intérêt à ne pas souffrir est de plus en plus pris en considération par le
législateur, à travers leur qualité d'êtres sensibles (ou sentients). Toutefois, malgré l'ampleur
des connaissances éthiques et scientifiques venant plaider en faveur d'une véritable révolution
du statut juridique des animaux -de l'objet au sujet, de la chose à l'individu, de la réification à
la personnification- la primauté des intérêts humains demeure largement entérinée par le droit.
Il en va de même de la position dominante de l'espèce humaine sur le reste de la Création,
selon une vision aussi ancestrale que la Génèse. Cette position spéciste et anthropocentrée est
de plus en plus remise en question. Non seulement sur le plan éthique, mais aussi sur le plan
juridique.
À l'issue de cette étude, le bilan du droit du bien-être animal est donc mitigé. Relativement
partiel et faible sur le fond, de plus en plus de législations et décisions favorables aux
animaux sont toutefois adoptées à l'échelle mondiale. Des exemples précurseurs permettent
même d'entrevoir que ce droit pourrait évoluer vers une réelle protection du bien-être des
animaux.
En réponse à notre question initiale, nous confirmons notre hypothèse selon laquelle une
protection universelle du bien-être animal peut se concrétiser en droit international,
notamment par le biais d'un accord multilatéral (ou convention globale) comme instrument
privilégié permettant de reconnaître formellement l'existence de principes universels (qui
sous-tendent l'ensemble du droit du bien-être animal).
Bien que la communauté internationale soit de plus en plus prête à reconnaître formellement
la nécessité de protéger le bien-être animal pour le bien commun, nous émettons toutefois une
nuance quant à la volonté politique de l'ensemble des pays membres de l'Assemblée des
Nations Unies de signer et ratifier prochainement une telle convention à court terme. En effet,
il semble plus probable que cette reconnaissance formelle passe, dans un premier temps, par
l'adoption de la Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA), avant de laisser
place à un instrument plus substantiel tel qu'une convention-cadre.
Nous émettons une autre nuance quant à la reconnaissance universelle de la valeur juridique
des principes fondamentaux du droit du bien-être animal dégagés par cette étude, tant par la
haute Cour de Justice des Nations Unies, qui s'est toujours montré réticente à reconnaître
l'existence de principes généraux de droit en général, que par la communauté des Etats, dont
la plupart des membres refuserait sans doute d'être liée par des principes contraignants,
pouvant avoir des effets juridiques contraires à leur intérêts d'exploitation des animaux à
l'heure actuelle. Mais à l'avenir, avec la progression croissante de la prise de conscience en
363
faveur de la cause animale, comme de l'avancée et de la divulgation de plus en plus rapide des
connaissances éthiques et scientifiques favorables à la protection des animaux et de leur bien-
être, il est possible de présager que la situation va évoluer, y compris en droit international.
Selon le professeur Jean-Claude Nouët :
« Les générations à venir seront très probablement horrifiées par nos errements
actuels, et scandalisées pour le temps que nous aurons mis à les éliminer.
[...] Efforçons nous donc de nous civiliser pleinement en abolissant au plus vite
l’esclavage destructeur et souvent cruel ou nous maintenons encore les autres
animaux que nous-mêmes, comme d’ailleurs l’ensemble du monde vivant, et notre
planète Terre. »1887.
Pendant la renaissance, Léonard de Vinci émettait le souhait que les crimes contre les
animaux puissent être punis de la même manière que les crimes envers les être humains1888.
Irons-nous à l'avenir vers la pénalisation des crimes contre l'animalité en droit international ?
Tous les crimes contre l'humanité (meurtres, génocides, séquestration, esclavagisme, torture et
viols), sont aussi perpétrés quotidiennement contre les animaux, comme autant d'animalicides,
de disparition d'espèces, de confinements, d'exploitations, de vivisections et d'actes zoophiles.
Certains de ces crimes sont déjà condamnés au niveau national1889, mais aucun ne l'est pour
l'instant à l'échelle supranationale, et encore moins mondiale en droit pénal international.
Suite à une éventuelle prise en compte de l'impératif universel de protéger le bien-être animal
à l'avenir, la question de sanctionner les crimes contre les animaux pourrait devenir l'un des
futurs défis du droit international. Utopie ou non ? L'histoire de l'humanité à montré que les
utopies d'aujourd'hui peuvent devenir les réalités de demain1890. Le processus de prise en
compte des intérêts des animaux non-humains a déjà commencé. Il ne peut que s'amplifier.
Face aux arguments prônant l'inertie des comportements humains, voire la recrudescence des
souffrances animales, générées notamment par l'augmentation de demande en produits carnés
à l'échelle planétaire, s'observe la montée d'un contre-pouvoir animalitaire. En effet, nous
1887 J.-C. NOUËT et T. AUFFRET VAN DER KEMP, Homme et animal: de la douleur à la cruauté, Harmattan, 2008,
p.21. 1888 DE VINCI, L., Prophéties, précédé de Philosophie et Aphorismes, Gallimard, 1942, p.14 s. 1889 Notamment la vivisection, complètement interdite dans le petit Etat de San Marino, et la zoophilie, interdite dans
plusieurs pays, mais encore autorisée dans d'autres, comme au Danemark où il existe même des "bordels d'animaux".
Voir PETA, "Ask Denmark to Ban Animal Brothels", en ligne : http://action.peta.org.uk/ea-
action/action?ea.client.id=5&ea.campaign.id=30894 (date d'accès : 12.11.2014). 1890 En référence à la citation de Victor Hugo : "L’utopie d’aujourd’hui est la réalité de demain.", cité dans GODIN, C.,
Le triomphe de la volonté, Champ Vallon, 2007, p.247.
364
sommes à l'heure où le véganisme1891 fait ses preuves en tant que mode de vie respectueux
de la vie et de l'intégrité des animaux (en refusant de cautionner les pratiques et d'acheter
tous les produits générateurs de souffrances et de mort pour ces derniers ; qu'ils soient
alimentaires, vestimentaires, cosmétiques etc.1892). Aussi, le régime végétarien est de plus en
plus mis en avant pour protéger la santé humaine, l'environnement et les animaux.
Le Président de la Chambre des représentants en Belgique, Siegfried Bracke, déclara en 2014 :
« Dans 100 ans, [...] notre façon de nous comporter avec les animaux sera tout à
fait différente. Je suis convaincu que tout le monde sera végétarien. [...] Les
animaux sont des êtres vivants qui ont des droits. Quand on parle des esclaves
d'autrefois, on se demande comment c'était possible. [...] Dans 200 ans on se
demandera comment on a pu traiter les animaux comme on l'a fait dans les années
2000 »1893.
Animal de compagnie, de production ou d'expérimentation… Taureau de corrida ou vache
sacrée… Le droit du bien-être animal demeure pour beaucoup un droit du bien naître animal !
Et si de grands progrès ont déjà été accomplis à ce jour, des progrès plus grands restent encore
à réaliser. Car il conviendrait de repenser toutes nos activités impliquant les animaux.
Notamment celles, toutes ou presque, qui sont génératrices d'atteintes aussi graves
qu'évitables. En effet, l'ironie du sort réservé aux animaux réside dans un fait : nous savons
aujourd'hui que ces souffrances existent et sont parfaitement évitables, au moins pour la
plupart d’entre elles. Alors, si l'homme se définit comme un être moral, ne devrait-il pas agir
moralement ?
Si l'homme est un animal juridique, celui-ci peut également étendre sa conception du droit
vers un idéal de justice et d'équité, d'une manière universelle, envers tous les êtres, humains et
non-humains. Et ce pour le bien de l'animalité dans son ensemble incluant l'homme, comme
pour celui de l'humanité, dans son sens le plus noble.
Il est non seulement possible, mais souhaitable, de mettre un terme à la destruction effrénée
de notre terre nourricière, comme de nos cousins biologiques plus ou moins éloignés que sont
les autres animaux. Des solutions existent. Aussi grand que soit ce défi, il doit être relevé !
1891 De l'anglais "veganism", ce terme est désormais intégré dans le dictionnaire, comme "Mode de vie qui exclut toute
utilisation de produits animaux (laitages, viande, cuir, etc.) dans le Dictionnaire Hachette, 2013. 1892 Voir HELAYEL, C., Vegan! Le choix de la vie, LME, 2012. 1893 Déclaration de Siegfried Bracke, Président de la Chambre des représentants de Belgique au Journal télévisé RTBF
du 23 décembre 2014.
365
Bibliographie thématique
Accords internationaux ................................................................................................. 366
Accords européens ......................................................................................................... 366
Conseil de l’Europe ................................................................................................ 366
Union européenne .................................................................................................. 367
Jurisprudence de l’Organisation mondiale de commerce (OMC) ................................ 367
Jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) ............................................ 369
Jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) ............. 370
Aspects éthiques du bien-être animal ........................................................................... 370
Aspects scientifiques du bien-être animal .................................................................... 377
Aspects juridiques du bien-être animal ....................................................................... 379
L’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et le bien-être animal ............. 383
L’Organisation mondiale du Commerce (OMC) et le bien-être animal ................... 386
Le droit international de l’environnement et le bien-être animal ............................. 390
L’exemple européen de protection du bien-être animal ............................................. 392
Les exemples nationaux de protection du bien-être animal ....................................... 396
L’élevage et le bien-être animal .................................................................................... 401
L’expérimentation et le bien-être animal .................................................................... 404
Les autres cas d’études sur le bien-être animal........................................................... 406
- Abattages ....................................................................................................................... 406
- Ailerons de requins ........................................................................................................ 406
- Animaux de compagnie .................................................................................................. 407
- Baleines ......................................................................................................................... 407
- Chasse ............................................................................................................................ 408
- « Divertissements » ........................................................................................................ 408
. Chasse à courre ............................................................................................................. 408
. Cirques ........................................................................................................................... 409
. Combats de chiens ......................................................................................................... 409
. Combats de coqs ............................................................................................................ 409
. Corridas ......................................................................................................................... 409
- Fermes d’ours en Asie ................................................................................................... 410
- Foie gras ........................................................................................................................ 410
- Fourrure ........................................................................................................................ 411
- Transports ...................................................................................................................... 412
- Zoos et parcs aquatiques ............................................................................................... 412
- Autres ............................................................................................................................. 412
Les consommateurs et le bien-être animal................................................................... 413
Les associations de protection et le bien-être animal .................................................. 415
Liens entre cruauté animale et cruauté humaine........................................................ 416
Ouvrages juridiques de référence................................................................................. 416
Sites internet ................................................................................................................... 420
366
Accords internationaux - Accord sur des normes internationales de piégeage sans cruauté, 1998
- Accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1867
R.T.N.U. 3
- Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, 30 octobre 1947, 55 R.T.N.U. 187
- Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires annexe 1b de l’Accord instituant
l’Organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1869 R.T.N.U. 332
- Accord sur les obstacles techniques au commerce, annexe 1a de l’Accord de Marrakech
instituant l’organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1867 R.T.N.U. I-31874
- Charte mondiale de la nature, New York, 28 octobre 1982, BC, 35
- Convention de vienne sur le droit des traités, Vienne, 23 mai 1969, 1155 R.T.N.U. 331
- Convention internationale concernant le transit des animaux, des viandes et des autres
produits d'origine animale, Genève, 20 février 1935, 193 LNTS 39
- Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, Washington, 2
décembre 1946, EMuT 946 : 89
- Convention relative aux zones humides d’importance internationale, particulièrement
comme habitat des oiseaux d’eau, 2 février 1971, Ramsar, BC, 147, EMuT, 971:09
- Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage,
Bonn, 23 juin 1979, BC, 206
- Convention sur la diversité biologique, 5 juin 1992, Rio de Janeiro, BC 230, EmuT, 992 :35
- Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages
menacées d’extinction, Washington, 3 mars 1973, BC, 170, EmuT, 973 :18
Accords européens
Conseil de l’Europe
- Convention européenne sur la protection des animaux d’abatage, Strasbourg, 10 mai 1979,
STE n° 102
- Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages, Strasbourg, 10
mars 1976, STE n° 87
- Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, Strasbourg, 13
novembre 1987, STE n° 125
- Convention européenne sur la protection des animaux en transport international (révisée),
Chisinau, 6 novembre 2003, STE n° 193
- Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins
expérimentales ou à d’autres fins scientifiques, Strasbourg, 18 mars 1986, STE n° 123
- Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, 19
septembre 1979, Berne, BC, 206
- Protocole additionnel à la Convention européenne sur la protection des animaux en
transport international, Strasbourg, 10 mai 1979, STE n° 103
- Protocole d’amendement à la Convention européenne sur la protection des animaux dans
les élevages, Strasbourg, 2 février 1992, STE n° 145
- Protocole d’amendement à la Convention européenne sur la protection des vertébrés
utilisés à des fins expérimentales ou à d’autres fins scientifiques, Strasbourg, 22 juin 1998,
STE n° 170
367
Union européenne
- Décision 98/142/CE du Conseil, du 26 janvier 1998, relative à la conclusion d'un accord
sur des normes internationales de piégeage sans cruauté entre la Communauté européenne,
le Canada et la Fédération de Russie ainsi que d'un procès-verbal agréé entre le Canada et
la Communauté européenne relatif à la signature de cet accord, J.O. L 42 du 14.2.1998
- Décision 98/487/CE du Conseil, du 13 juillet 1998, relative à la conclusion d'un accord
international sous forme de procès-verbal agréé entre la Communauté européenne et les
États-Unis d'Amérique sur des normes de piégeage sans cruauté, J.O. L 219 du 7.8.1998
- Directive 1999/22/CE du Conseil, du 29 mars 1999, relative à la détention d'animaux
sauvages dans un environnement zoologique, J.O. L 094 du 09.04.1999
- Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales
relatives au traitement des poules pondeuses, J.O. L 203/53 du 03.08.1999
- Directive 2003/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 février 2003 modifiant la
directive 76/768/CEE du Conseil concernant le rapprochement des législations des États
membres relatives aux produits cosmétiques, J.O. L 66/26 du 11.03.2003
- Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales relatives à la
protection des poulets destinés à la production de viande, J.O. L 182/19 du 12.07.2007
- Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales
relatives à la protection des veaux, J.O. L 10/7 du 15.01.2009
- Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales
relatives a la protection des porcs, J.O.U.E. du 18.02.2009
- Directive 2010/3/UE de la Commission du 1er février 2010 modifiant, pour les adapter au
progrès technique, les annexes III et VI de la directive 76/768/CEE du Conseil relative aux
produits cosmétiques, J.O. L 29 du 2.2.2010
- Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative
à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33 du 20.10.2010
- Directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux
sauvages, J.O. L 103 du 25.04.1979
- Directive 83/129/CEE du Conseil du 28 mars 1983 concernant l'importation dans les États
membres de peaux de certains bébés-phoques et de produits dérivés, J.O. L 091/30 du
09.04.1983
- Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats
naturels ainsi que des espèces de faune (biologie) et de la flore sauvages, J.O. L 206 du
22/07/1992
- Directive 96/22/CE du Conseil du 29 avril 1996 concernant l'interdiction d'utilisation de
certaines substances à effet hormonal ou thyréostatique et des substances bêta-agonistes
dans les spéculations animales, J.O. L 125 du 23.05.1996
- Directive du Conseil 86/609/CEE du 24 novembre 1986 concernant le rapprochement des
dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à la
protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, J.O.
L 117 du 05.05.1987
- Directive du Conseil 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux
dans les élevages, J.O. L 221 du 08.08.1998
368
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Animal Law Coalition : < www.animallawcoalition.com >
Animal Law Review: < www.law.lclark.edu/law_reviews/animal_law_review/ >
Animal Legal Defense Fund: < www.aldf.org >
Animal Welfare Foundation of Canada: < www.awfc.ca >
Animal Welfare Institute: < http://www.awionline.org >
Animaux Magazine : < www.magazineanimal.com >
Association of Lawyers for Animal Welfare : < www.alaw.org.uk >
Cahiers antispécistes : < www.cahiers-antispecistes.org >
Compassion in World Farming (CIWF): < www.ciwf.org >
Code animal: < www.code-animal.com >
Compassion in World Farming: < www.ciwf.org.uk >
Convention on Biological Diversity (CBD): < www.cbd.int >
Convention on International Trade in Endangered Species of Wild Fauna and Flora (CITES) :
< www.cites.org >
Convention Ramsar: < www.ramsar.org >
Économie internationale: < www.economie-internationale.com >
Eurogroup for Animal Welfare: < www.eurogroupanimalwelfare.org >
Europa: < www.europa.eu >
European Forum for Animal Welfare Councils: < www.eurofawc.com >
Farm Animal Welfare Council (FAWC) : < http://www.fawc.org.uk >
Fondation Droit animal, éthique et sciences : < www.fondation-droit-animal.org >
Fondation Ligue française des droits de l'animal: < www.fondation-droits-animal.org >
Global Animal Law Project (GAL): < www.globalanimallaw.org >
Global Partnership for Good Agricultural Practice: < www.globalgap.org >
Greenfacts: < www.greenfacts.org >
Greenpeace: < www.greenpeace.org >
Groupe de Recherche International en Droit Animal: < www.grida.uqam.ca/ >
Humane Society of United states: < www.hsus.org >
International Animal Law: < www.animal-law.biz >
International Fund for Animal Welfare: < www.ifaw.org >
International Fur Trade Federation: < www.iftf.com >
International Institute for Animal Law: < www.animallawintl.org >
International Union for Conservation of Nature (IUCN): < www.uicn.org >
421
International Wildlife Law: < www.internationalwildlifelaw.org >
IUCN Red List of Threatened species: < www.redlist.org >
Journal of Animal Law: < www.animallaw.info/policy/pojouranimlawinfo.htm >
L214 Éthique & Animaux: < www.l214.com >
Lawyers for animal welfare: < www.lawyersforanimalwelfare.com >
Légifrance: < www.legifrance.gouv.fr >
Les amis de la terre : < www.amisdelaterre.org >
Mercy For Animals: < www.mercyforanimals.org >
Millennium Ecosystem Assessment: < www.millenniumassessment.org >
Notre planète info : < www.notre-planete.info >
Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO): < www.fao.org >
Protection des animaux : < www.protection-des-animaux.org >
Protection mondiale des animaux de ferme: < www.pmaf.org >
Respect animal : < www.respect-animal.org >
Ressources juridiques: < www.liensutiles.org/droit.htm >
Science magazine : < www.sciencemag.org >
Sciences humaines: < www.scienceshumaines.com >
United Nations Conference on Trade and Development (UNCTAD) : < www.unctad.org >
United Nations Environment Programme (UNEP) : < www.unep.org >
Universities Federation for Animal Welfare: < www.ufaw.org.uk >
Whale and Dolphin Conservation Society (WDCS): < www.wdcs.org >
World Animal Net (WAN) : < www.worldanimal.net >
World Animal Protection (WAP): < www.worldanimalprotection.org >
World Trade organization (WTO): < www.wto.org >
World Wildlife Foundation (WWF): < www.wwf.org >
422
ANNEXES
- Annexe 1 : Lois nationales anti-cruauté et pro-bien-être animal dans le monde
- Annexe 2 : Instruments européens et communautaires sur le bien-être animal
- Annexe 3 : Normes internationales sur le bien-être animal (de l'OIE)
- Annexe 4 : Projet de Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA)
423
ANNEXE 1
Lois nationales anti-cruauté et pro-bien-être animal
Figure 2 : Carte du monde représentant les pays disposant de lois de protection
des animaux (anti-cruauté et pro-bien-être)
Source : www.globalanimallaw.org/database/national/index.html
Tels que représentés sur la carte, 107 pays (sur les 193 pays représentés à l’ONU) disposent à
ce jour de lois (anti-cruauté/pro-bien-être animal) à travers le monde.
Cette base de données sur les lois générales de protection des animaux est issue des
recherches doctorales effectuées pour cette étude (jusqu'à juin 2016).
Cette base de données apparaît sur le site du Global Animal Law (GAL) project, dont
l'auteure est Manager (en ligne : www.globalanimallaw.org), sous forme de base interactive et
actualisée. Celle-ci renvoie aux textes officiels en ligne (en versions anglaise et/ou originale).
Les éléments de cette base de données ont été conservés en anglais ci-après, afin de faciliter
leur lecture internationale.
424
Index des pays disposant de lois protectrices des animaux
(classement par continent et par ordre alphabétique)
AFRICA
Tableau 1 : Lois protectrices des animaux en Afrique
State Law Date
Botswana Cruelty to Animals Law
1936
Last revised in 1966
Egypt Penal Code, Art. 357 1937
Kenya Prevention of Cruelty to Animals Act 1962
Consolidated in 2012
Malawi Protection of Animals Act 1944
Consolidated in 1970
Mauritius Animal Welfare Act 2013
Namibia Animal Protection Act 1962
Nigeria Criminal code, Cruelty to animals
(Part.7, Chap.50)
1990
Sao Tome and
Principe
Law No. 13/2005 approving the
Animal Health Basic Legislation
2005
Seychelles Prevention of Cruelty to Animals Act
(Chap. 179)
1902
Consolidated in 2012
South Africa Animals Protection Act 1962
Tanzania Animal Welfare Act 2008
Uganda The Animals Prevention of Cruelty
Act
1957
Consolidated in 2000
Zambia Prevention of Cruelty to Animal Act 1921
Consolidated in 2006
Zimbabwe Prevention of Cruelty to Animals Act 1960
Consolidated in 1986
425
AMERICAS
Tableau 2 : Lois protectrices des animaux aux Amériques
State Law Date
Argentina Law against mistreatments and acts of
cruelty on animals
1954
Barbados Prevention of Cruelty to Animals Act 2000
Consolidated in 2002
Belize Cruelty to Animals Act
(Cap. 115)
1865
Consolidated in 2000
Bermuda
Care and Protection of Animals Act
1975
Consolidated in 2011
Brazil Federal Decree on Anti-Cruelty 1934
British virgin
islands
Protection of Animals Act 2005
Canada Criminal Code, §446 2000
Chile Animal Protection Law 2009
Columbia Ley de Protección de los Animales 1973
Costa Rica Animal Welfare Law 1994
Dominica Animal Protection Law 2012
Greenland
Animal Welfare Act 2003
Grenada Animals (Prevention of Cruelty) Act
(Cap. 16)
1952
Consolidated in 1990
Guyana Art. 120-121 Criminal Law (offences)
Act
1998
Jamaica Cruelty to Animals Act 1904
Consolidated in 1997
426
Mexico Animals Protection Law of Mexico
State 1997
Nicaragua Animal protection and welfare law 2011
Panama Animal (pets) Protection Act 2012
Paraguay Animal Welfare and Protection Law 2013
Peru Protection of Domestic Animals 2000
Puerto Rico Animal Welfare & Protection Act 2008
United States
- Animal Welfare Act
- Humane Methods of Slaughter Act
1966
(As from 2012)
1958
(As from 2012)
Uruguay Law on the protection, welfare and
responsibility to animals
2009
Venezuela Law on the Protection of Domestic
Fauna free and in captivity
2010
427
ASIA
Tableau 3 : Lois protectrices des animaux en Asie
State Law Date
Bangladesh Cruelty to Animals Act 1920
Consolidated in 1973
China Criminal Law of the People's
Republic of China, Art.276
1979
Revised in 1997
Hong Kong Prevention of Cruelty to Animals
Ordinance
1935
Consolidated in 2006
India Prevention of Cruelty to Animals
Act
1960
Consolidated in 1982
Indonesia Art. 302 of the Penal Code 1982
Israel Cruelty to Animals (Animal
Protection) Law
1994
Japan Act on Welfare and Management of
Animals
1973
Last revised in 2005
Kazakhstan Article 276 of the Criminal Code
(Cruel Treatment of Animals)
1997
Korea (South) Animal Protection Act
1991
Last revised in 2011
Kuwait Art. 253 of the Criminal Law 1960
Revised in 1970
Malaysia Animal Act
Animals (Amendment) Act
1953
2013
Myanmar Animal Health and Development
Law
1993
Nepal Animal Welfare and Protection Act 2011
428
Pakistan The Prevention of Cruelty to
Animals Act
1890
Philippines Animal Welfare Act 1998
Qatar Law No. 9 of 1994 on the
abandoning and neglecting of
animals
1974
Russian
Federation
Civil Code, Art.137 1994
Sri Lanka Prevention of cruelty to animals
Ordinance
1907
Consolidated in 1955
Taiwan Animal Protection Law 1998
Thaïland Animal anti-cruelty and welfare law 2014
UnitedArab
Emirates
Federal Law No. 16 of 2007 on
Animal Welfare
2007
429
EUROPE
Tableau 4 : Lois protectrices des animaux en Europe
State Law Date
Andorra Law on animal keeping and protection 1998
Austria
Federal Act on the Protection of
Animals (Animal Protection Act)
2004
In force since 2005
Belgium Law on the protection and welfare of
animals
1986
Last revised in 2007
Bosnia Act on the Protection and Welfare of
Animals
2008
In force since 2009
Bulgaria Animal Protection Act 2008
Last amended 2011
Croatia Animal Protection Act 2006
Cyprus Animal Health Law 2001
Czech Republic Act on the protection of animals
against cruelty
Act amending the Act on the protection
of animals against cruelty
1992
2012
Denmark Animal Welfare Act 2005
Estonia Animal Protection Act 2000
Consolidated in
2010
Finland Animal Welfare Act 1996
Last amended
in 2006
France Penal Code, Art. 521-1 & 521-2 1992
Last amended 5 Oct.
2006
Germany Animal Welfare Act 2006
Amended in 2013
430
Greece Law n° 4039 Concerning domestic and
stray companion animals and the
protection of animals from any
exploitation or use for economic profit
2012
Hungary Law on animal protection
1998
Consolidated in
2012
Iceland Animal Health and Protection Act 1988
Consolidated in
2013
Ireland Animal Health and Welfare Act 2013
Italy Provisions concerning the prohibition
of cruelty to animals, as well as their
use in clandestine fighting or
unauthorized competitions
2004
Latvia Animal Protection Law 1999
Consolidated in
2012
Liechtenstein Animal Welfare Act 2010
In force since 2011
Lithuania Law on the care, keeping and use of
animals
1991
Consolidated in
2012
Luxembourg Law on the protection of animal life
and welfare
1983
Macedonia Law on Animal Protection and Welfare 2007
Malta Animal Welfare Act 2001
Netherlands Law on Animals 2011
Norway Animal Welfare Act 2009
Poland Animal Protection Act 1998
Portugal Protection of Animals Law 1995
Romania Law on the Protection of Animals 2004
San Marino Animal Protection Law 2003
431
Serbia Animal Welfare Act 2009
Slovakia Government Ordinance on the
protection of animals kept for farming
purposes
Government Ordinance establishing
requirements for the protection of
animals at the time of slaughter or
killing
Governmental Ordinance establishing
requirements for the protection of
animals used for experimental purposes
or other research purposes
Government Ordinance on the
protection of animals during transport
2002
2002
2003
2003
Slovenia Law on the protection of animals
Law Amending the Law on the
protection of animals
1999
2013
Spain Law 32/2007 on the care of animals on
farming, transport, slaughter and
experiment
2007
Last modified 2013
Sweden Animal Welfare Act
Animal Welfare Ordinance
1988
2008
Switzerland Animal Welfare Act
Animal Welfare Ordinance
2005
2008
Turkey Animal Protection Bill Law 2004
Ukraine Law on the Protection of Animals from
Cruelty
2006
United
Kingdom
Animal Welfare Act 2006
432
OCEANIA
Tableau 5 : Lois protectrices des animaux en Océanie
State Law Date
Australia
(Australian
Capital Territory)
Animal Welfare Act
1992
Australia
(Northern
Territory)
Animal Welfare Act 1999
Australia
(New South
Wales)
Prevention of Cruelty to Animals Act 1979
Australia
(Queensland)
Animal Care and Protection Act 2001
Consolidated in 2013
Australia
(South Australia)
Prevention of Cruelty to Animals Act 1985
Consolidated in 1994
Australia
(Tasmania)
Animal Welfare Act
1993
Australia
(Victoria)
Prevention of Cruelty to Animals Act
1986
Australia
(Western
Australia)
Animal Welfare Act 2002
Fiji Animals (Control of Experiments)
Act
1957
Consolidated in 2005
Kiribati Animals (Control of Experiments)
Ordinance
1957
Consolidated in 1977
433
New Zealand Animal Welfare Act
Animal Welfare Amendment Bill
1999
2013
Papua New
Guinea
Animals Act 1952
Consolidated in 2006
Solomon Islands Animals (Control of Experiments)
Act
1957
Consolidated in 2006
Tonga Pounds and Animals Act 1918
Consolidated in 1988
Tuvalu Animals (Control of Experiments)
Act
1957
Consolidated in 2008
Vanuatu Prevention of Cruelty to Animals Act 1974
Consolidated in 2006
434
ANNEXE 2
Instruments européens et communautaires sur le bien-être animal
CONSEIL DE L’EUROPE
Élevage
- Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages, Strasbourg,
10 mars 1976, STE n° 87
- Protocole d’amendement à la Convention européenne sur la protection des animaux
dans les élevages, Strasbourg, 2 février 1992, STE n° 145
Abattage
- Convention européenne sur la protection des animaux d’abatage, Strasbourg, 10
mai 1979, STE n° 102
Transport
- Convention européenne sur la protection des animaux en transport international
(révisée), Chisinau, 6 novembre 2003, STE n° 193
Animaux de compagnie
- Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, Strasbourg, 13
novembre 1987, STE n° 125
Expérimentation
- Convention européenne sur la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins
expérimentales ou à d’autres fins scientifiques, Strasbourg, 18 mars 1986, STE n°
123
- Protocole d’amendement à la Convention européenne sur la protection des vertébrés
utilisés à des fins expérimentales ou à d’autres fins scientifiques, Strasbourg, 22 juin
1998, STE n° 170
435
UNION EUROPEENNE
Bien-être animal en général
- Art.13 du Traité sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union
européenne (version consolidée), J.O. C 115/01 du 09.05.2008 :
"Lorsqu'ils formulent et mettent en œuvre la politique de l'Union dans les
domaines de l'agriculture, de la pêche, des transports, du marché intérieur, de la
recherche et développement technologique et de l'espace, l'Union et les États
membres tiennent pleinement compte des exigences du bien-être des animaux en
tant qu'êtres sensibles, tout en respectant les dispositions législatives ou
administratives et les usages des États membres, notamment en matière de rites
religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux."
Élevage
- Directive du Conseil 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des
animaux dans les élevages, J.O. L 221 du 08.08.1998
- Poules pondeuses
- Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales
relatives au traitement des poules pondeuses, J.O. L 203/53 du 03.08.1999
- Poulets de chair
- Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales
relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande, J.O. L 182/19
du 12.07.2007
- Porcs
- Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes
minimales relatives à la protection des porcs, J.O.U.E. du 18.02.2009
- Veaux
- Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes
minimales relatives à la protection des veaux, J.O. L 10/7 du 15.01.2009
436
Transport
- Règlement (CE) n° 639/2003 de la Commission du 9 avril 2003 portant modalités
d'application en vertu du règlement (CE) n° 1254/1999 du Conseil en ce qui
concerne les exigences en matière de bien-être des animaux vivants de l'espèce
bovine en cours de transport pour l'octroi de restitutions à l'exportation, J.O. L 093
du 10.04.2003
- Règlement n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des
animaux pendant le transport et les opérations annexes et modifiant les directives
64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) n° 1255/97, J.O. L 3 du 05.01.2005
Abattage
- Directive 74/577/CEE du Conseil, du 18 novembre 1974, relative à l'étourdissement
des animaux avant leur abattage, J.O. L 316 du 26.11.1974
- Directive du Conseil 93/119/EC du 22 décembre 1993 sur la protection des animaux
au moment de leur abattage ou de leur mise à mort, J.O. L 340, 31.12.1993
- Règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des
animaux au moment de leur mise à mort, J.O. L 303 du 18.11.2009
Expérimentation
- Directive du Conseil 86/609/CEE du 24 novembre 1986 concernant le
rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des
Etats membres relatives à la protection des animaux utilisés à des fins
expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, J.O. L 117 du 05.05.1987
- Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010
relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, J.O. L 276/33
du 20.10.2010
- Cosmétiques
- Directive 2003/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 février 2003
modifiant la directive 76/768/CEE du Conseil concernant le rapprochement des
437
législations des États membres relatives aux produits cosmétiques, J.O. L 66/26 du
11.03.2003
- Directive 2010/3/UE de la Commission du 1 février 2010 modifiant, pour les adapter
au progrès technique, les annexes III et VI de la directive 76/768/CEE du Conseil
relative aux produits cosmétiques, J.O. L 29 du 2.2.2010
Animaux de compagnie
- Règlement (CE) n°998/2003 du Parlement européen et du Conseil du 26 mai 2003
concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non
commerciaux d'animaux de compagnie, et modifiant la directive 92/65/CEE du
Conseil, J.O. L. 146 du 13.6.2003
Fourrure
- Pièges à mâchoires
- Règlement n° 3254/91 du Conseil du 4 novembre 1991 interdisant l'utilisation des
pièges à mâchoire dans la Communauté et l'introduction dans la Communauté de
fourrures et de produits manufacturés de certaines espèces animales sauvages
originaires des pays qui utilisent pour leur capture le piège à mâchoire ou de
méthodes non-conformes aux normes internationales de piégeage sans cruauté,
J.O. L 308 du 09.11.1991
- Phoques
- Directive 83/129/CEE du Conseil du 28 mars 1983 concernant l'importation dans les
États membres de peaux de certains bébés-phoques et de produits dérivés, J.O. L
091/30 du 09.04.1983
- Directive 89/370/CEE du Conseil du 8 juin 1989 modifiant la directive 83/129/CEE
concernant l'importation dans les États membres de peaux de certains bébés phoques
et de produits dérivés, J.O. L 163 du 14.6.1989
- Règlement (CE) n° 1007/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre
2009 sur le commerce des produits dérivés du phoque, J.O. L 286/36 du 31.10.2009
438
- Chats and chiens
- Règlement (CE) n° 1523/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre
2007 interdisant la mise sur le marché, l'importation dans la Communauté ou
l'exportation depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et de produits en
contenant, Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE, J.O. L 343 du 27.12.2007
Requins
- Règlement (CE) n° 1185/2003 du Conseil du 26 juin 2003 relatif à l'enlèvement des
nageoires de requin à bord des navires, J.O. L. 167/1 du 4.07.2003
- Règlement (UE) n° 605/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013
modifiant le règlement (CE) n° 1185/2003 du Conseil relatif à l’enlèvement des
nageoires de requin à bord des navires, J.O. L. 181/1 du 29.06.2013
Cétacés
- Règlement (CE) n° 812/2004 du Conseil du 26 avril 2004 établissant des mesures
relatives aux captures accidentelles de cétacés dans les pêcheries et modifiant le
règlement (CE) n° 88/98, J.O. L 150 du 30.04.2004
Zoos
- Directive 1999/22/CE du Conseil, du 29 mars 1999, relative à la détention
d'animaux sauvages dans un environnement zoologique, J.O. L 094 du 09.04.1999
439
Annexe 3
Normes internationales sur le bien-être animal
Organisation mondiale de la santé animale (OIE)
Code sanitaire pour les animaux terrestres (2016)
TITRE 7. BIEN-ÊTRE ANIMAL
Chapitre 7.1. Introduction sur les recommandations relatives au
bien-être animal
Chapitre 7.2. Transport des animaux par voie maritime
Chapitre 7.3. Transport des animaux par voie terrestre
Chapitre 7.4. Transport des animaux par voie aérienne
Chapitre 7.5. Abattage des animaux
Chapitre 7.6. Mise à mort d’animaux à des fins de contrôle sanitaire
Chapitre 7.7.
Chapitre 7.8. Utilisation d’animaux pour la recherche et
l’enseignement
Chapitre 7.9. Bien-être animal dans les systèmes de production de
bovins à viande
Chapitre 7.10. Bien-être animal dans les systèmes de production de
poulets de chair
Chapitre 7.11. Bien-être animal dans les systèmes de production de
bovins laitiers
Chapitre 7.12. Bien-être des équidés de travail
Le contrôle des populations de chiens errants
440
C o d e s a n i t a i r e p o u r l e s
a n i m a u x a q u a t i q u e s ( 2 0 1 6 )
Titre 7. BIEN-ÊTRE DES POISSONS D'ÉLEVAGE
Chapitre 7.1. Introduction aux recommandations sur le bien-être des
poissons d’élevage
Chapitre 7.2. Bien-être des poissons d’élevage pendant le transport
Chapitre 7.3. Aspects du bien-être animal liés à l’étourdissement et à
l'abattage des poissons d’élevage destinés à la
consommation humaine
Chapitre 7.4. Mise à mort des poissons d’élevage à des fins de
contrôle sanitaire
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ANNEXE 4
Proposition de Déclaration universelle sur le bien-être animal (DUBEA)
PROPOSITION DE TEXTE INITIALE DÉCOULANT DE LA CONFÉRENCE DE MANILLE SUR
LE BIEN-ÊTRE ANIMAL (2003) ET DE LA RÉUNION DU COMITÉ DE PILOTAGE
DU COSTA RICA (2005) SOUMISE À LA CONFERENCE MINISTÉRIELLE
Texte provisionnel de la Déclaration universelle pour le bien-être animal (DUBEA) de 2007
Ce texte forme la base du travail de rédaction d’une Déclaration universelle pour le bien-être animal
PRÉAMBULE
[Le Comité de pilotage du Costa Rica, suite à la Conférence de Manille sur le bien-être
animal, confirme les éléments suivants :]
Le bien-être animal est un principe qui doit être pris en considération par les
gouvernements.
La promotion du bien-être animal nécessite une action collective et toutes les parties
intéressées et affectées doivent être impliquées dans ce processus.
Le travail mené en vue du bien-être animal est un processus sur le long terme.
UNE PROPOSITION DE DÉCLARATION SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL DÉCOULANT
DE LA CONFÉRENCE DE MANILLE [SUR LE BIEN-ÊTRE ANIMAL (MARS 2003) ET
DE LA RÉUNION DU COMITÉ DE PILOTAGE DU COSTA RICA (NOVEMBRE 2005)
RECONNAISSANT que les animaux sont des êtres vivants, sensibles, capables de
souffrir et qu'ils méritent par conséquent respect et considération ;
RECONNAISSANT que le bien-être animal englobe la santé des animaux [et que les
vétérinaires jouent un rôle essentiel dans la préservation de la santé et du bien-être des
animaux]
RECONNAISSANT que les êtres humains [partagent] la planète avec d'autres espèces
et d'autres formes de vie et que toutes ces formes de vie coexistent au sein d'un
écosystème interdépendant ;
[RECONNAISSANT l’importance du travail de longue haleine de l’OIE (Organisation
mondiale de la Santé animale) dans la définition de normes internationales sur le bien-
être animal] ;
CONVENANT que le terme [état] comprend le peuple et la société civile ;
RECONNAISSANT que de nombreux [états] ont déjà mis en place un système de
protection juridique des animaux domestiques et sauvages ;
CHERCHANT à assurer l'efficacité sur le long terme de ces systèmes ainsi que
l’élaboration de dispositions plus complètes en vue du bien-être animal ;
RECONNAISSANT que l'utilisation des animaux par les hommes peut présenter des
avantages considérables pour les êtres humains ;
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CONSCIENTS que les « cinq libertés (être libre de boire, de manger et de ne pas être
sous-alimenté, être libre de vivre sans peur et sans stress chronique, être libre de ne pas
souffrir de désagréments physiques et physiologiques, être libre de vivre sans
souffrance, blessures et maladies, et être libre d’exprimer un comportement normal,
naturel) » et les « trois R (réduction du nombre d’animaux utilisés, raffinement des
méthodes expérimentales et remplacement des animaux par des méthodes alternatives)
» constituent des principes à suivre quant à l’utilisation des animaux ;
RECONNAISSANT que les dispositions de la présente déclaration n’affectent les droits
d’aucun [état] ;
PRINCIPES DE LA DÉCLARATION
1. Le bien-être animal doit être un objectif commun à tous les [états] ;
2. Les normes de bien-être animal développées par chaque [état] seront promues,
reconnues et observées par le biais d’un renforcement des mesures, tant au niveau
national qu’international. [Malgré la présence de différences significatives entre les
sociétés humaines au niveau social, économique, religieux et culturel, ces dernières
doivent toutes traiter les animaux et s'en occuper de manière humaine et durable
[conformément aux principes de la Déclaration] ;
3. Les [états] doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la cruauté
infligée aux animaux et réduire les souffrances de ces derniers ;
4. Il convient de développer et d’élaborer des normes adaptées à l’égard du bien-être
animal comprenant notamment des normes gouvernant l’utilisation et la gestion des
animaux de ferme, des animaux de compagnie, des animaux utilisés dans les études
scientifiques, des animaux de trait, des animaux sauvages et des animaux utilisés pour
les sports ou les loisirs.
Proposition d’initiatives gouvernementales en vue de la promotion du bien-être animal
- Nécessité d’établir des relations avec les organisations locales
- Nécessité d’établir des relations avec les organisations internationales
- Nécessité d’une interactivité sur le long terme par le biais de conférences, etc.
- Nécessité d’une convergence/alliance de principes
- Nécessité d’une identification des objectifs communs
- Nécessité d’identifier les similitudes entre les approches des différents pays
- Nécessité d’une législation et d’une réglementation permettant de renforcer chaque
avancée (notez bien l’importance de l’éducation)
- Nécessité d’une coopération internationale
- Soutien gouvernemental accordé aux études et au développement sur le bien-être
animal
Source : http://media.animalsmatter.org/media/resources/fr/fr_draft.pdf