12
2 LE DROIT À LA SANTÉ   ET LE PRINCIPE   D’ÉGALITÉ DE TRAITEMENT

LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

2LE droIT Agrave LA SANTEacute   ET LE PrINcIPE   

drsquoEacutegALITEacute dE TrAITEmENT

Le droit agrave la protection de la santeacuteLa loi relative aux droits des personnes malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute du 4 mars 2002 dite laquo loi Kouchner raquo reacuteaffirme degraves lrsquoexposeacute des motifs le droit agrave la pro-tection de la santeacute comme un droit agrave valeur constitutionnelle reconnu par lrsquoalineacutea 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 laquo La Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la famille les conditions neacutecessaires agrave leur deacuteveloppement Elle garantit agrave tous notamment agrave lrsquoenfant agrave la megravere et aux vieux travailleurs la protection de la santeacute la seacutecuriteacute mateacute-rielle le repos et les loisirs raquo Ce droit a eacuteteacute consacreacute par plusieurs deacutecisions du Conseil constitutionnel (notamment CC 23 juillet 1999 ndeg 99-416) Le droit agrave la protection de la santeacute est eacutegalement garanti par des textes internationaux ratifieacutes par la France Il lrsquoest indirectement par lrsquoarticle 3 de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de lrsquohomme et des liberteacutes fondamentales interdisant la tor-ture et les traitements inhumains ou deacutegradants et par lrsquoarticle 8 de ladite Convention proteacutegeant le droit agrave la vie priveacutee et familiale Ce droit est aussi proteacutegeacute directement par la Charte de lrsquoOrganisation mondiale de la Santeacute du 27 juillet 1946 laquo La possession du meilleur eacutetat de santeacute qursquoil est capable drsquoatteindre constitue lrsquoun des droits fondamen-taux de tout ecirctre humain quelles que soient sa race sa religion ses opinions politiques sa conduite eacuteconomique raquoSur ces bases lrsquoarticle 1 de la loi de 2002 introduit un droit agrave la protection de la santeacute en faveur de toute personne sans discrimination laquo La mise en œuvre de ce droit passe par le deacuteveloppement de la preacutevention lrsquoeacutegal accegraves de chaque personne aux soins les plus approprieacutes agrave son eacutetat de santeacute la continuiteacute des soins la seacutecuriteacute sanitaire raquo

Extraits du Code de santeacute publique

article l1110-1 Le droit fondamental agrave la protection de la santeacute doit ecirctre mis en œuvre par tous moyens disponibles au beacuteneacutefice de toute personne Les professionnels les eacutetablissements et reacuteseaux de santeacute les organismes drsquoassurance maladie ou tous autres organismes par-ticipant agrave la preacutevention et aux soins et les autoriteacutes sanitaires contribuent avec les usagers agrave deacutevelopper la preacutevention garantir lrsquoeacutegal accegraves de chaque personne aux soins neacutecessiteacutes par son eacutetat de santeacute et assurer la continuiteacute des soins et la meilleure seacutecu-riteacute sanitaire possible

article l1110-3 Aucune personne ne peut faire lrsquoobjet de discriminations dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention ou aux soins

article l1110-5 Toute personne a compte tenu de son eacutetat de santeacute et de lrsquourgence des interventions que celui-ci requiert le droit de recevoir les soins les plus approprieacutes et de beacuteneacuteficier des theacuterapeutiques dont lrsquoefficaciteacute est reconnue et qui garantissent la meilleure seacutecuriteacute sanitaire au regard des connaissances meacutedicales aveacutereacutees Les actes de preacutevention drsquoin-vestigation ou de soins ne doivent pas en lrsquoeacutetat des connaissances meacutedicales lui faire courir de risques disproportionneacutes par rapport au beacuteneacutefice escompteacute

article l1411-1-1 Lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins des populations fragiliseacutees constitue un objectif prioritaire de la politique de santeacuteLes programmes de santeacute publique mis en œuvre par lrsquoEacutetat ainsi que par les collectiviteacutes territoriales et les organismes drsquoassurance maladie prennent en compte les difficulteacutes speacutecifiques des populations fragiliseacutees

25

DROIT APPLICABLE

rEFUS dE SoINS

Le droit agrave la santeacute et le principe drsquoeacutegaliteacute de traitement bien que proteacutegeacutes par des textes agrave valeurs constitutionnelle et internationale peinent parfois agrave trouver une traduction effective Dans le champ du VIH sida et des heacutepatites virales les exemples sont leacutegions Sans preacutetendre agrave lrsquoexhaustiviteacute AIDES retient pour 2015 trois expressions drsquoatteintes agrave ces droits fondamentaux Drsquoabord des personnes seacuteropositives au VIH sont confronteacutees agrave des refus de soins en raison de leur statut seacuterologique Ensuite des personnes infecteacutees par le virus de lrsquoheacutepatite C sont eacutecarteacutees de lrsquoaccegraves aux nouveaux traitements innovants Enfin les personnes mineures ne peuvent acceacuteder agrave tous les moyens de preacutevention et de deacutepistage disponibles actuellement Ces sujets constituent les trois axes de ce chapitre

Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de comparer les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique

Bien que lrsquoaccegraves aux soins sans discrimination soit garanti par des dispositions leacutegales sans ambiguiumlteacute dans les faits des entraves existent Lrsquoexistence mecircme des refus de soins ne fait pas consensus la plupart des professionnel-le-s de santeacute tendant agrave nier ou au moins agrave minimiser le pheacutenomegravene que les personnes concerneacutees rapportent pourtant de maniegravere reacutecurrente Le deacuteficit drsquoeacutetudes officielles ne permet pas drsquoen objectiver la nature et lrsquoampleur En France seules quelques enquecirctes meneacutees par des associations et des institutions documentent ces pheacutenomegravenes mais essentiel-lement cibleacutees sur des motivations drsquoordre social Il srsquoagit drsquoeacutetudes concernant des beacuteneacuteficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) de la CMU compleacutementaire (CMU-C) de lrsquoaide meacutedicale drsquoEacutetat (AME) et de lrsquoaide agrave lrsquoacquisition drsquoune compleacute-mentaire santeacute (ACS) 11 Les discriminations dans le champ meacutedical agrave lrsquoencontre des PVVIH sont notamment documenteacutees par Sida Info Service qui a meneacute cinq enquecirctes agrave ce sujet et agrave travers les enquecirctes ANRS-VespaPourtant des cas reacutecurrents de refus de soins ou de discriminations sont rappor-teacutes par des PVVIH Ils concernent principalement lrsquoaccegraves agrave des soins dentaires ou gyneacutecologiques dans un contexte ougrave les mesures de preacutecaution standard drsquohygiegravene ont eacuteteacute maintes fois rappeleacutees par diverses instances publiques scientifiques et professionnellesAfin drsquoobjectiver ces refus trop souvent minimiseacutes AIDES a meneacute un testing en avril 2015 agrave lrsquooccasion de deacutebats autour du projet de loi de modernisation de notre sys-tegraveme de santeacute susceptible de renforcer les moyens de lutte contre les refus de soins Cette enquecircte vise agrave saisir lrsquoampleur et documenter les refus de soins laquo sur le vif raquo agrave lrsquoencontre des PVVIH

11 MEacuteThODOLOGIE

111 qursquoest-ce qursquoun testing Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de com-parer toutes choses eacutegales par ailleurs les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique Si lrsquoune des personnes est traiteacutee diffeacuteremment de lrsquoautre alors cette diffeacuterence est imputeacutee agrave lrsquounique caracteacuteristique qui les distingue

112 Le protocole drsquoenquecircteAfin de parvenir agrave eacutetablir lrsquoexistence de traitements discriminatoires dans lrsquoaccegraves aux soins dentaires ou gyneacutecologiques des PVVIH AIDES a recouru agrave une opeacuteration de tes-ting srsquoappuyant sur lrsquoobservation de prises de rendez-vous teacuteleacutephoniques

Les testeur-se-sLes appels teacuteleacutephoniques sont reacutealiseacutes par 44 testeur-se-s tous militant-e-s de AIDES Chaque testeur-se doit jouer un personnage en srsquoappuyant sur une identiteacute fictive qui se reacutepartit selon quatre profils

Hommefemme Seacuteropositif-ve au VIH ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH

Les diffeacuterentes lois sur la santeacute rarement remises en causes se sont depuis inscrites dans la continuiteacute Elles positionnent le droit agrave la santeacute pour tous et toutes comme une finaliteacute des politiques de santeacute jusqursquoau dernier projet de loi preacutesenteacute par Marisol Touraine ministre des Affaires sociales de la Santeacute et des Droits des femmes qui rap-pelle dans la version initiale de lrsquoarticle 1er laquo Elle [la politique de santeacute] tend agrave assurer la promotion de conditions de vie favorables agrave la santeacute lrsquoameacutelioration de lrsquoeacutetat de santeacute de la population la reacuteduction des ineacutegaliteacutes sociales et territoriales de santeacute et agrave garantir la meilleure seacutecuriteacute sanitaire possible et lrsquoaccegraves effectif de la population agrave la preacutevention et aux soins raquo 9

Les dispositions speacutecifiques aux refus de soinsLe droit agrave la santeacute est un eacuteleacutement fondamental des droits de lrsquohomme Si les textes qui rappellent ce principe sont nombreux il reste que ce droit nrsquoest pas acquis pour tous et toutes en particulier pour les personnes en situation de vulneacuterabiliteacute Au-delagrave des dif-ficulteacutes drsquoaccegraves aux soins les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) peuvent ecirctre expo-seacutees agrave des pratiques illeacutegales de refus de soins qui portent atteinte au droit agrave la santeacute Mecircme si les refus de soins ne sont pas geacuteneacuteraliseacutes les reacutesultats de nombreux testing montrent leur reacutecurrence Le droit actuel permet-il de lutter efficacement contre ces pratiques illeacutegales les reacuteponses juridiques sont-elles suffisantes Lrsquoencadrement juri-dique des refus de soins est eacuteclateacute entre Code peacutenal Code de la santeacute publique Code de la consommation et Code de deacuteontologie meacutedicale ce qui ne rend pas visible cet enjeuLe rapport du Deacutefenseur des droits remis au Premier Ministre en mars 2014 sur laquo Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME raquo a permis de montrer lrsquoinefficaciteacute de lrsquoencadrement juridique actuel La loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (HPST) a mis en place une proceacutedure particuliegravere de signalement des refus de soins complexe et peu effective instances compeacutetentes et modaliteacutes de saisines multiples difficulteacutes des usager-e-s agrave faire valoir leurs droits rareteacute des signalements et manque de mobilisation des ins-tances en charge du traitement des signalements Crsquoest pourquoi il est neacutecessaire de renforcer les droits des patient-e-s pour une meilleure connaissance des lois et voies de recours existants de mettre en œuvre un accompagnement des victimes dans le cadre des proceacutedures de conciliation ou les recours en justice et de mieux qualifier les refus de soins illeacutegaux pour en faciliter lrsquoidentification

Exemple de deacutecision du Deacutefenseur des droits Le Deacutefenseur a eacuteteacute saisi drsquoune reacuteclamation relative au refus de proceacuteder agrave lrsquoextraction de dents de sagesse en raison de la seacuteropositiviteacute de la patiente Celle-ci pensant que le chirurgien accegravederait agrave son dossier informatique de suivi au sein du mecircme hocircpital nrsquoa pas indiqueacute sa maladie lors de la consultation preacuteopeacuteratoire Apregraves avoir appris la seacuteropositiviteacute de la reacuteclamante le mis en cause a annuleacute lrsquoopeacuteration preacutevue en propo-sant une date trois mois plus tard inacceptable pour cette derniegravere Afin de justifier le refus des soins le mis en cause a invoqueacute lrsquoapplication drsquoun protocole speacutecifique pour la prise en charge drsquoun patient seacuteropositif Lrsquohocircpital dans lequel exerccedilait le mis en cause a deacutementi lrsquoexistence drsquoun tel protocole Dans le cadre de cette deacutecision le Deacutefenseur des droits a donc recommandeacute la mise en œuvre de sanctions disciplinaires agrave lrsquoeacutegard du meacutedecin et a informeacute de sa deacutecision le ministegravere de la Santeacute le conseil national de lrsquoordre des chirurgiens-dentistes ainsi que le conseil deacutepartemental de lrsquoordre des meacutedecinsDeacutecision MLD-2011-94 du 13 janvier 2012 10

1 UN TESTINg PoUr objEcTIVEr  

LES rEFUS dE SoINS mdash

9 Au moment de la reacutedaction de ce rapport la reacutedaction deacutefinitive de lrsquoarticle 1er nrsquoest pas connue 10 httpwwwdefenseurdesdroitsfrfractionsprotection-des-droits-libertesdecisiondecision-mld-2011-94-du-13-janvier-2012-

relative-un

11 MEacuteDECINS DU MONDE Testing sur les refus de soins des meacutedecins geacuteneacuteralistes pour les beacuteneacuteficiaires de la Couverture Maladie Universelle ou de lrsquoAide Meacutedicale Eacutetat dans 10 villes de France 2006 DEacuteFENSEUR DES DROITS Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME 2014 FONDS CMU-DIES Analyse des attitudes de meacutedecins et de dentistes agrave lrsquoeacutegard des patients beacuteneacuteficiant de la CMUC dans 6 villes du Val-de-Marne 2006 FONDS CMU-IRDES Les refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMUC agrave Paris 2009 FONDS CMU-IRDES Analyse territoriale des obstacles agrave lrsquoaccegraves aux soins des beacuteneacuteficiaires de la CMUC dans les deacutepartements de lrsquoOrne et de la Niegravevre 2012 CISS Droits des malades Refus de soins aux beacuteneacuteficiaires de la CMUC de lrsquoAME et de lrsquoACS 2015

26 27PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Rouen

Evreux

Pontoise

Chacircteauroux

ParisStrasbourg

Auxerre

Dijon

Lyon

Marseille

Gap

Clermont-ferrandPuy-en-Velay

Toulouse

Niort

Angoulegraveme

Cahors

Bourg-en-Bresse

Tours

Colmar

Lrsquoeacutechantillon repreacutesentatif de lrsquoeacutetude comprend 100766810076680 cabinets dentaires et 100766510076691007668 cabinets de gyneacutecologie

Le sceacutenarioUn mecircme cabinet dentaire ou de gyneacutecologie est appeleacute deux fois pour une prise de rendez-vous par deux testeur-se-s diffeacuterent-e-s qui ont des caracteacuteristiques sociodeacute-mographiques similaires Les prises de rendez-vous gyneacutecologiques sont effectueacutees uniquement par des femmes Dans le premier cas le-la testeur-se annonce sa seacutero-positiviteacute au VIH dans le second cas lrsquoautre testeur-se ne dit rien Seule la mention du statut seacuterologique diffeacuterencie ces deux personnes Un script eacutetabli en concertation avec des militant-e-s des PVVIH et des professionnel-le-s de santeacute (meacutedecins speacutecia-listes en chirurgie dentaire en gyneacutecologie et de santeacute publique) reacuteuni-e-s au sein drsquoun groupe de pilotage a permis drsquoeacutetablir

Une feuille de route pour chaque testeur-se proposant des reacuteponses concregravetes aux eacuteventuelles questions que pourrait susciter la demande de rendez-vous (iden-titeacute motifs de la demande orientations adresse teacuteleacutephone numeacutero de seacutecuriteacute sociale etc)

La conduite agrave tenir en cas de mise en attente ou drsquoheacutesitations agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute

Le choix du motif de la consultation deacutetartrage ou frottis Il est important de choisir un acte meacutedical susceptible de provoquer des saignements mais simple ne justifiant pas une orientation vers un-e meacutedecin speacutecialiste ou vers un service drsquourgences et ou un plateau technique particulier

Les eacutechanges teacuteleacutephoniques sont enregistreacutes leur contenu est retranscrit dans une base de donneacutees pour recueillir de faccedilon standardiseacutee les reacuteponses apporteacutees par les praticien-ne-s Des seacuteances de deacutebriefing ainsi qursquoun guide meacutethodologique sont mis agrave disposition des testeur-se-s

Remarque lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute au VIH drsquoembleacutee lors de la prise de ren-dez-vous est justifieacutee par les teacutemoignages de certaines PVVIH qui trop souvent expo-seacutees agrave la stigmatisation et la discrimination de la part de professionnel-le-s de santeacute preacutefegraverent eacuteviter un refus frontal de la ou du meacutedecin dans son cabinet Elle est eacutegale-ment approuveacutee par les professionnel-le-s de santeacute du groupe de pilotage au regard de leur expeacuterience

Constitution de lrsquoeacutechantillon geacuteographiqueLa meacutethodologie de lrsquoenquecircte srsquoappuie sur une technique drsquoeacutechantillonnage aleacuteatoire de maniegravere agrave garantir une seacutelection repreacutesentative des chirurgiens-dentistes et des gyneacutecologues en France Afin de deacutefinir les villes dans lesquelles est reacutealiseacutee lrsquoeacutetude plusieurs eacutetapes sont retenues

Un classement des reacutegions en fonction de leur incidence au VIH (faible moyenne eacuteleveacutee)

Une seacutelection de trois reacutegions par niveau drsquoincidence Une identification pour chaque reacutegion seacutelectionneacutee drsquoun deacutepartement agrave haute densiteacute meacutedicale et drsquoun deacutepartement agrave faible densiteacute meacutedicale pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Un choix des chefs-lieux de chacun de ces deacutepartements comme ville pour effectuer lrsquoenquecircte

Pour les trois plus grandes villes de France (Paris Lyon Marseille) un deacutecoupage par arrondissement selon le niveau de richesse (eacuteleveacute moyen faible) est reacutealiseacute Au total 20 villes sont seacutelectionneacutees La base de sondage est reacutealiseacutee agrave partir de plusieurs sources de donneacutees lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques (Insee) pour le nombre drsquohabi-tants lrsquoInstitut de veille sanitaire (InVS) pour lrsquoincidence du VIH lrsquoObservatoire natio-nal de la deacutemographie des professions de santeacute et lrsquoAtlas de la deacutemographie meacutedicale en France pour la densiteacute meacutedicale deacutepartementale respectivement pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Constitution de lrsquoeacutechantillon meacutedicalLe testing vise les seul-e-s speacutecialistes secteurs 1 et 2 chirurgiens-dentistes et gyneacuteco-logues Ainsi deux bases de sondage sont reacutealiseacutees

Lrsquoune agrave partir de lrsquoensemble des chirurgiens-dentistes conventionneacute-e-s pour les soins dentaires classiques preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Lrsquoautre agrave partir de lrsquoensemble des gyneacutecologues conventionneacute-e-s avec les speacuteciali-teacutes meacutedicale etou obsteacutetrique preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Pour lrsquoensemble des secteurs geacuteographiques 2 297 chirurgiens-dentistes et 290 gyneacute-cologues sont recenseacute-e-s Afin de creacuteer un eacutechantillon repreacutesentatif de ces professions 30 des chirurgiens-dentistes et 60 des gyneacutecologues sont tireacute-e-s au sort agrave lrsquoaide drsquoun programme de tri aleacuteatoire

Moins de 45 000 habitants

45 000 agrave 200 000 habitants

Plus de 200 000 habitants

les 20 villes selectionneacutees

pour le testing aupregraves des cabinets

dentaires et gyneacutecologiques

29PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 1

laquo Pour vous ce sera 21h raquo laquo Je ne prends pas de nouveaux patients raquo

laquo Eh bien on mettra deux paires de gants raquo

laquo Vous me remplirez un questionnaire meacutedical avant le rdv raquo

laquo Je le note dans le carnet de rdv raquo

laquo Les gens comme voushellip raquo

laquo Je nrsquoai pas le mateacuteriel adapteacute raquo

laquo Ok mais vous viendrez avec toutes vos analyses raquo

laquo Je ne pratique pas le deacutetartrage raquo

laquo Le deacutetartrage crsquoest 150 euros raquo

laquo Vous serez mieux soigneacute agrave lrsquohocircpital raquo

laquo Je nrsquoai pas eacuteteacute formeacute au vih raquo

laquo Heuhellip veuillez patienter raquo

Bonjour je souhaite un rendez-vous

pour un deacutetartrage et je suis seacuteropo

la face cacheacutee des refus

de soins chez les dentistes

envers les personnes vih+

Florilegravege des verbatims des cabinets dentaires agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute par ordre de citation

Le motif le plus souvent invoqueacute par les cabinets dentaires est celui des ameacutenagements ou des horaires speacutecifiques requis pour les personnes seacuteropositives Vient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute

Peacuteriode drsquoenquecircteLe testing est reacutealiseacute sur une peacuteriode courte du 7 au 10 avril 2015 pour garantir la confi-dentialiteacute de lrsquoopeacuteration et assurer un environnement comparable entre les diffeacuterents appels (actualiteacute meacutediatique et politique etc) Une fois la semaine de testing passeacutee les rendez-vous pris sont annuleacutes afin de ne pas peacutenaliser les laquo vrais raquo malades et les meacutedecins dans la gestion des rendez-vous meacutedicaux

Eacutechantillon finalParmi les 570 cabinets dentaires et les 154 cabinets de gyneacutecologie contacteacutes par teacuteleacute-phone durant la peacuteriode drsquoenquecircte pour une prise de rendez-vous un certain nombre sont exclus en raison de non-reacuteponses aux appels de non-conformiteacute de la speacutecialiteacute de fermeture ou de congeacutes Lrsquoeffectif final des praticien-ne-s retenu-e-s srsquoeacutelegraveve agrave 440 pour les chirurgiens-dentistes et 116 pour les gyneacutecologues Lors des appels il est pos-sible de relever la fonction des reacutepondant-e-s dans la majoriteacute des cas (praticien-ne-s ou secreacutetaires meacutedicaux-ales) Ainsi les interlocuteur-trice-s dans les cabinets dentaires sont des secreacutetaires meacutedicaux-les dans 764 des cas (n=336) et des chirurgiens-den-tistes dans 193 des cas (n=85) Pour les cabinets de gyneacutecologie la reacutepartition eacutetait de 802 de secreacutetaires meacutedicaux-les (n=93) et 78 de gyneacutecologues (n=9)

113 Limites de lrsquoeacutetudeCette opeacuteration de testing comporte des limites qui sont autant de pistes pour ameacutelio-rer encore ce type drsquoenquecirctes et leur donner un cadre leacutegalLa premiegravere limite tient agrave la classification a posteriori des motifs des refus de soins En effet la liste exhaustive des motifs de refus ainsi que la combinaison de plusieurs motifs eacutetaient difficiles agrave anticiper La deuxiegraveme limite concerne la perception des testeur-se-s quant aux reacuteponses four-nies par les dentistesgyneacutecologues Ainsi la notion de subjectiviteacute permise par la non-cateacutegorisation a priori des reacuteponses a probablement induit une sous-deacuteclaration de certains refus Les retours drsquoexpeacuteriences des PVVIH qui pointent des refus frontaux dans les cabinets des praticien-ne-s apregraves un rendez-vous fixeacute preacutealablement au teacuteleacute-phone laissent augurer eacutegalement drsquoune sous-eacutevaluation de ces pratiquesLa troisiegraveme limite est celle du champ de lrsquoenquecircte Seule la seacuteropositiviteacute au VIH a eacuteteacute testeacutee il est pourtant neacutecessaire drsquoeacutetendre aux personnes vivant avec une heacutepatite virale chronique ou co-infecteacutees par le VIH et les heacutepatites virales De plus les repreacutesen-tations sociales eacuteconomiques et morales associeacutees agrave la pathologie VIH (CMU ou AME preacutecariteacute pratiques sexuelles usages de drogues etc) peuvent geacuteneacuterer des cumuls de motifs de refusEt enfin la taille de lrsquoeacutechantillon des professionnel-le-s ne permet pas de reacutealiser des analyses statistiques pousseacutees notamment par ville et de conclure agrave drsquoeacuteventuelles dynamiques locales de discrimination

12 DES REacuteSULTATS ACCABLANTS

Parmi les reacuteponses des chirurgiens-dentistes et de leur secreacutetariat meacutedical agrave lrsquoan-nonce de la seacuteropositiviteacute le motif le plus souvent invoqueacute est celui des ameacutena-gements ou des horaires speacutecifiques qui seraient requis soit eacutenonceacutes comme tels soit mis en eacutevidence par comparaison des reacuteponses faites aux personnes supposeacutees seacuteroneacutegatives Il est important de rappeler que le Haut conseil de la santeacute publique a publieacute en 2007 un avis laquo ne recommandant pas lrsquoinstauration drsquoun ordre de pas-sage pour tout patient porteur des virus VHC VHB ou VIH lors drsquoactes invasifs meacutedico-chirurgicaux En revanche il considegravere comme une prioriteacute lrsquoapplication des preacutecautions standard et le respect des mesures de preacutevention (hellip) raquo LrsquoOrdre natio-nal des chirurgiens-dentistes a drsquoailleurs redit lors de la parution de ce testing que laquo les patients doivent tous beacuteneacuteficier drsquoune mecircme chaicircne de deacutecontamination et de steacuterilisation raquoVient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute surcharge de travail pas de nou-veaux-elles patient-e-s deacutelais de rendez-vous trop importants etc non eacutevoqueacutee pour les testeur-se-s nrsquoannonccedilant pas de seacuteropositiviteacute au VIHPour les gyneacutecologues ou leur secreacutetariat meacutedical les testeuses seacuteropositives sont accepteacutees sous reacuteserve de la preacutesentation de leur dossier meacutedical et du rappel de la pathologie au moment de la consultation Lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute est aussi avanceacute agrave plusieurs reprises Tous ces motifs sont ensuite cateacutegoriseacutes

Figure 2

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS30

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 2: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

Le droit agrave la protection de la santeacuteLa loi relative aux droits des personnes malades et agrave la qualiteacute du systegraveme de santeacute du 4 mars 2002 dite laquo loi Kouchner raquo reacuteaffirme degraves lrsquoexposeacute des motifs le droit agrave la pro-tection de la santeacute comme un droit agrave valeur constitutionnelle reconnu par lrsquoalineacutea 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 laquo La Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la famille les conditions neacutecessaires agrave leur deacuteveloppement Elle garantit agrave tous notamment agrave lrsquoenfant agrave la megravere et aux vieux travailleurs la protection de la santeacute la seacutecuriteacute mateacute-rielle le repos et les loisirs raquo Ce droit a eacuteteacute consacreacute par plusieurs deacutecisions du Conseil constitutionnel (notamment CC 23 juillet 1999 ndeg 99-416) Le droit agrave la protection de la santeacute est eacutegalement garanti par des textes internationaux ratifieacutes par la France Il lrsquoest indirectement par lrsquoarticle 3 de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de lrsquohomme et des liberteacutes fondamentales interdisant la tor-ture et les traitements inhumains ou deacutegradants et par lrsquoarticle 8 de ladite Convention proteacutegeant le droit agrave la vie priveacutee et familiale Ce droit est aussi proteacutegeacute directement par la Charte de lrsquoOrganisation mondiale de la Santeacute du 27 juillet 1946 laquo La possession du meilleur eacutetat de santeacute qursquoil est capable drsquoatteindre constitue lrsquoun des droits fondamen-taux de tout ecirctre humain quelles que soient sa race sa religion ses opinions politiques sa conduite eacuteconomique raquoSur ces bases lrsquoarticle 1 de la loi de 2002 introduit un droit agrave la protection de la santeacute en faveur de toute personne sans discrimination laquo La mise en œuvre de ce droit passe par le deacuteveloppement de la preacutevention lrsquoeacutegal accegraves de chaque personne aux soins les plus approprieacutes agrave son eacutetat de santeacute la continuiteacute des soins la seacutecuriteacute sanitaire raquo

Extraits du Code de santeacute publique

article l1110-1 Le droit fondamental agrave la protection de la santeacute doit ecirctre mis en œuvre par tous moyens disponibles au beacuteneacutefice de toute personne Les professionnels les eacutetablissements et reacuteseaux de santeacute les organismes drsquoassurance maladie ou tous autres organismes par-ticipant agrave la preacutevention et aux soins et les autoriteacutes sanitaires contribuent avec les usagers agrave deacutevelopper la preacutevention garantir lrsquoeacutegal accegraves de chaque personne aux soins neacutecessiteacutes par son eacutetat de santeacute et assurer la continuiteacute des soins et la meilleure seacutecu-riteacute sanitaire possible

article l1110-3 Aucune personne ne peut faire lrsquoobjet de discriminations dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention ou aux soins

article l1110-5 Toute personne a compte tenu de son eacutetat de santeacute et de lrsquourgence des interventions que celui-ci requiert le droit de recevoir les soins les plus approprieacutes et de beacuteneacuteficier des theacuterapeutiques dont lrsquoefficaciteacute est reconnue et qui garantissent la meilleure seacutecuriteacute sanitaire au regard des connaissances meacutedicales aveacutereacutees Les actes de preacutevention drsquoin-vestigation ou de soins ne doivent pas en lrsquoeacutetat des connaissances meacutedicales lui faire courir de risques disproportionneacutes par rapport au beacuteneacutefice escompteacute

article l1411-1-1 Lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins des populations fragiliseacutees constitue un objectif prioritaire de la politique de santeacuteLes programmes de santeacute publique mis en œuvre par lrsquoEacutetat ainsi que par les collectiviteacutes territoriales et les organismes drsquoassurance maladie prennent en compte les difficulteacutes speacutecifiques des populations fragiliseacutees

25

DROIT APPLICABLE

rEFUS dE SoINS

Le droit agrave la santeacute et le principe drsquoeacutegaliteacute de traitement bien que proteacutegeacutes par des textes agrave valeurs constitutionnelle et internationale peinent parfois agrave trouver une traduction effective Dans le champ du VIH sida et des heacutepatites virales les exemples sont leacutegions Sans preacutetendre agrave lrsquoexhaustiviteacute AIDES retient pour 2015 trois expressions drsquoatteintes agrave ces droits fondamentaux Drsquoabord des personnes seacuteropositives au VIH sont confronteacutees agrave des refus de soins en raison de leur statut seacuterologique Ensuite des personnes infecteacutees par le virus de lrsquoheacutepatite C sont eacutecarteacutees de lrsquoaccegraves aux nouveaux traitements innovants Enfin les personnes mineures ne peuvent acceacuteder agrave tous les moyens de preacutevention et de deacutepistage disponibles actuellement Ces sujets constituent les trois axes de ce chapitre

Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de comparer les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique

Bien que lrsquoaccegraves aux soins sans discrimination soit garanti par des dispositions leacutegales sans ambiguiumlteacute dans les faits des entraves existent Lrsquoexistence mecircme des refus de soins ne fait pas consensus la plupart des professionnel-le-s de santeacute tendant agrave nier ou au moins agrave minimiser le pheacutenomegravene que les personnes concerneacutees rapportent pourtant de maniegravere reacutecurrente Le deacuteficit drsquoeacutetudes officielles ne permet pas drsquoen objectiver la nature et lrsquoampleur En France seules quelques enquecirctes meneacutees par des associations et des institutions documentent ces pheacutenomegravenes mais essentiel-lement cibleacutees sur des motivations drsquoordre social Il srsquoagit drsquoeacutetudes concernant des beacuteneacuteficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) de la CMU compleacutementaire (CMU-C) de lrsquoaide meacutedicale drsquoEacutetat (AME) et de lrsquoaide agrave lrsquoacquisition drsquoune compleacute-mentaire santeacute (ACS) 11 Les discriminations dans le champ meacutedical agrave lrsquoencontre des PVVIH sont notamment documenteacutees par Sida Info Service qui a meneacute cinq enquecirctes agrave ce sujet et agrave travers les enquecirctes ANRS-VespaPourtant des cas reacutecurrents de refus de soins ou de discriminations sont rappor-teacutes par des PVVIH Ils concernent principalement lrsquoaccegraves agrave des soins dentaires ou gyneacutecologiques dans un contexte ougrave les mesures de preacutecaution standard drsquohygiegravene ont eacuteteacute maintes fois rappeleacutees par diverses instances publiques scientifiques et professionnellesAfin drsquoobjectiver ces refus trop souvent minimiseacutes AIDES a meneacute un testing en avril 2015 agrave lrsquooccasion de deacutebats autour du projet de loi de modernisation de notre sys-tegraveme de santeacute susceptible de renforcer les moyens de lutte contre les refus de soins Cette enquecircte vise agrave saisir lrsquoampleur et documenter les refus de soins laquo sur le vif raquo agrave lrsquoencontre des PVVIH

11 MEacuteThODOLOGIE

111 qursquoest-ce qursquoun testing Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de com-parer toutes choses eacutegales par ailleurs les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique Si lrsquoune des personnes est traiteacutee diffeacuteremment de lrsquoautre alors cette diffeacuterence est imputeacutee agrave lrsquounique caracteacuteristique qui les distingue

112 Le protocole drsquoenquecircteAfin de parvenir agrave eacutetablir lrsquoexistence de traitements discriminatoires dans lrsquoaccegraves aux soins dentaires ou gyneacutecologiques des PVVIH AIDES a recouru agrave une opeacuteration de tes-ting srsquoappuyant sur lrsquoobservation de prises de rendez-vous teacuteleacutephoniques

Les testeur-se-sLes appels teacuteleacutephoniques sont reacutealiseacutes par 44 testeur-se-s tous militant-e-s de AIDES Chaque testeur-se doit jouer un personnage en srsquoappuyant sur une identiteacute fictive qui se reacutepartit selon quatre profils

Hommefemme Seacuteropositif-ve au VIH ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH

Les diffeacuterentes lois sur la santeacute rarement remises en causes se sont depuis inscrites dans la continuiteacute Elles positionnent le droit agrave la santeacute pour tous et toutes comme une finaliteacute des politiques de santeacute jusqursquoau dernier projet de loi preacutesenteacute par Marisol Touraine ministre des Affaires sociales de la Santeacute et des Droits des femmes qui rap-pelle dans la version initiale de lrsquoarticle 1er laquo Elle [la politique de santeacute] tend agrave assurer la promotion de conditions de vie favorables agrave la santeacute lrsquoameacutelioration de lrsquoeacutetat de santeacute de la population la reacuteduction des ineacutegaliteacutes sociales et territoriales de santeacute et agrave garantir la meilleure seacutecuriteacute sanitaire possible et lrsquoaccegraves effectif de la population agrave la preacutevention et aux soins raquo 9

Les dispositions speacutecifiques aux refus de soinsLe droit agrave la santeacute est un eacuteleacutement fondamental des droits de lrsquohomme Si les textes qui rappellent ce principe sont nombreux il reste que ce droit nrsquoest pas acquis pour tous et toutes en particulier pour les personnes en situation de vulneacuterabiliteacute Au-delagrave des dif-ficulteacutes drsquoaccegraves aux soins les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) peuvent ecirctre expo-seacutees agrave des pratiques illeacutegales de refus de soins qui portent atteinte au droit agrave la santeacute Mecircme si les refus de soins ne sont pas geacuteneacuteraliseacutes les reacutesultats de nombreux testing montrent leur reacutecurrence Le droit actuel permet-il de lutter efficacement contre ces pratiques illeacutegales les reacuteponses juridiques sont-elles suffisantes Lrsquoencadrement juri-dique des refus de soins est eacuteclateacute entre Code peacutenal Code de la santeacute publique Code de la consommation et Code de deacuteontologie meacutedicale ce qui ne rend pas visible cet enjeuLe rapport du Deacutefenseur des droits remis au Premier Ministre en mars 2014 sur laquo Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME raquo a permis de montrer lrsquoinefficaciteacute de lrsquoencadrement juridique actuel La loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (HPST) a mis en place une proceacutedure particuliegravere de signalement des refus de soins complexe et peu effective instances compeacutetentes et modaliteacutes de saisines multiples difficulteacutes des usager-e-s agrave faire valoir leurs droits rareteacute des signalements et manque de mobilisation des ins-tances en charge du traitement des signalements Crsquoest pourquoi il est neacutecessaire de renforcer les droits des patient-e-s pour une meilleure connaissance des lois et voies de recours existants de mettre en œuvre un accompagnement des victimes dans le cadre des proceacutedures de conciliation ou les recours en justice et de mieux qualifier les refus de soins illeacutegaux pour en faciliter lrsquoidentification

Exemple de deacutecision du Deacutefenseur des droits Le Deacutefenseur a eacuteteacute saisi drsquoune reacuteclamation relative au refus de proceacuteder agrave lrsquoextraction de dents de sagesse en raison de la seacuteropositiviteacute de la patiente Celle-ci pensant que le chirurgien accegravederait agrave son dossier informatique de suivi au sein du mecircme hocircpital nrsquoa pas indiqueacute sa maladie lors de la consultation preacuteopeacuteratoire Apregraves avoir appris la seacuteropositiviteacute de la reacuteclamante le mis en cause a annuleacute lrsquoopeacuteration preacutevue en propo-sant une date trois mois plus tard inacceptable pour cette derniegravere Afin de justifier le refus des soins le mis en cause a invoqueacute lrsquoapplication drsquoun protocole speacutecifique pour la prise en charge drsquoun patient seacuteropositif Lrsquohocircpital dans lequel exerccedilait le mis en cause a deacutementi lrsquoexistence drsquoun tel protocole Dans le cadre de cette deacutecision le Deacutefenseur des droits a donc recommandeacute la mise en œuvre de sanctions disciplinaires agrave lrsquoeacutegard du meacutedecin et a informeacute de sa deacutecision le ministegravere de la Santeacute le conseil national de lrsquoordre des chirurgiens-dentistes ainsi que le conseil deacutepartemental de lrsquoordre des meacutedecinsDeacutecision MLD-2011-94 du 13 janvier 2012 10

1 UN TESTINg PoUr objEcTIVEr  

LES rEFUS dE SoINS mdash

9 Au moment de la reacutedaction de ce rapport la reacutedaction deacutefinitive de lrsquoarticle 1er nrsquoest pas connue 10 httpwwwdefenseurdesdroitsfrfractionsprotection-des-droits-libertesdecisiondecision-mld-2011-94-du-13-janvier-2012-

relative-un

11 MEacuteDECINS DU MONDE Testing sur les refus de soins des meacutedecins geacuteneacuteralistes pour les beacuteneacuteficiaires de la Couverture Maladie Universelle ou de lrsquoAide Meacutedicale Eacutetat dans 10 villes de France 2006 DEacuteFENSEUR DES DROITS Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME 2014 FONDS CMU-DIES Analyse des attitudes de meacutedecins et de dentistes agrave lrsquoeacutegard des patients beacuteneacuteficiant de la CMUC dans 6 villes du Val-de-Marne 2006 FONDS CMU-IRDES Les refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMUC agrave Paris 2009 FONDS CMU-IRDES Analyse territoriale des obstacles agrave lrsquoaccegraves aux soins des beacuteneacuteficiaires de la CMUC dans les deacutepartements de lrsquoOrne et de la Niegravevre 2012 CISS Droits des malades Refus de soins aux beacuteneacuteficiaires de la CMUC de lrsquoAME et de lrsquoACS 2015

26 27PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Rouen

Evreux

Pontoise

Chacircteauroux

ParisStrasbourg

Auxerre

Dijon

Lyon

Marseille

Gap

Clermont-ferrandPuy-en-Velay

Toulouse

Niort

Angoulegraveme

Cahors

Bourg-en-Bresse

Tours

Colmar

Lrsquoeacutechantillon repreacutesentatif de lrsquoeacutetude comprend 100766810076680 cabinets dentaires et 100766510076691007668 cabinets de gyneacutecologie

Le sceacutenarioUn mecircme cabinet dentaire ou de gyneacutecologie est appeleacute deux fois pour une prise de rendez-vous par deux testeur-se-s diffeacuterent-e-s qui ont des caracteacuteristiques sociodeacute-mographiques similaires Les prises de rendez-vous gyneacutecologiques sont effectueacutees uniquement par des femmes Dans le premier cas le-la testeur-se annonce sa seacutero-positiviteacute au VIH dans le second cas lrsquoautre testeur-se ne dit rien Seule la mention du statut seacuterologique diffeacuterencie ces deux personnes Un script eacutetabli en concertation avec des militant-e-s des PVVIH et des professionnel-le-s de santeacute (meacutedecins speacutecia-listes en chirurgie dentaire en gyneacutecologie et de santeacute publique) reacuteuni-e-s au sein drsquoun groupe de pilotage a permis drsquoeacutetablir

Une feuille de route pour chaque testeur-se proposant des reacuteponses concregravetes aux eacuteventuelles questions que pourrait susciter la demande de rendez-vous (iden-titeacute motifs de la demande orientations adresse teacuteleacutephone numeacutero de seacutecuriteacute sociale etc)

La conduite agrave tenir en cas de mise en attente ou drsquoheacutesitations agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute

Le choix du motif de la consultation deacutetartrage ou frottis Il est important de choisir un acte meacutedical susceptible de provoquer des saignements mais simple ne justifiant pas une orientation vers un-e meacutedecin speacutecialiste ou vers un service drsquourgences et ou un plateau technique particulier

Les eacutechanges teacuteleacutephoniques sont enregistreacutes leur contenu est retranscrit dans une base de donneacutees pour recueillir de faccedilon standardiseacutee les reacuteponses apporteacutees par les praticien-ne-s Des seacuteances de deacutebriefing ainsi qursquoun guide meacutethodologique sont mis agrave disposition des testeur-se-s

Remarque lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute au VIH drsquoembleacutee lors de la prise de ren-dez-vous est justifieacutee par les teacutemoignages de certaines PVVIH qui trop souvent expo-seacutees agrave la stigmatisation et la discrimination de la part de professionnel-le-s de santeacute preacutefegraverent eacuteviter un refus frontal de la ou du meacutedecin dans son cabinet Elle est eacutegale-ment approuveacutee par les professionnel-le-s de santeacute du groupe de pilotage au regard de leur expeacuterience

Constitution de lrsquoeacutechantillon geacuteographiqueLa meacutethodologie de lrsquoenquecircte srsquoappuie sur une technique drsquoeacutechantillonnage aleacuteatoire de maniegravere agrave garantir une seacutelection repreacutesentative des chirurgiens-dentistes et des gyneacutecologues en France Afin de deacutefinir les villes dans lesquelles est reacutealiseacutee lrsquoeacutetude plusieurs eacutetapes sont retenues

Un classement des reacutegions en fonction de leur incidence au VIH (faible moyenne eacuteleveacutee)

Une seacutelection de trois reacutegions par niveau drsquoincidence Une identification pour chaque reacutegion seacutelectionneacutee drsquoun deacutepartement agrave haute densiteacute meacutedicale et drsquoun deacutepartement agrave faible densiteacute meacutedicale pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Un choix des chefs-lieux de chacun de ces deacutepartements comme ville pour effectuer lrsquoenquecircte

Pour les trois plus grandes villes de France (Paris Lyon Marseille) un deacutecoupage par arrondissement selon le niveau de richesse (eacuteleveacute moyen faible) est reacutealiseacute Au total 20 villes sont seacutelectionneacutees La base de sondage est reacutealiseacutee agrave partir de plusieurs sources de donneacutees lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques (Insee) pour le nombre drsquohabi-tants lrsquoInstitut de veille sanitaire (InVS) pour lrsquoincidence du VIH lrsquoObservatoire natio-nal de la deacutemographie des professions de santeacute et lrsquoAtlas de la deacutemographie meacutedicale en France pour la densiteacute meacutedicale deacutepartementale respectivement pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Constitution de lrsquoeacutechantillon meacutedicalLe testing vise les seul-e-s speacutecialistes secteurs 1 et 2 chirurgiens-dentistes et gyneacuteco-logues Ainsi deux bases de sondage sont reacutealiseacutees

Lrsquoune agrave partir de lrsquoensemble des chirurgiens-dentistes conventionneacute-e-s pour les soins dentaires classiques preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Lrsquoautre agrave partir de lrsquoensemble des gyneacutecologues conventionneacute-e-s avec les speacuteciali-teacutes meacutedicale etou obsteacutetrique preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Pour lrsquoensemble des secteurs geacuteographiques 2 297 chirurgiens-dentistes et 290 gyneacute-cologues sont recenseacute-e-s Afin de creacuteer un eacutechantillon repreacutesentatif de ces professions 30 des chirurgiens-dentistes et 60 des gyneacutecologues sont tireacute-e-s au sort agrave lrsquoaide drsquoun programme de tri aleacuteatoire

Moins de 45 000 habitants

45 000 agrave 200 000 habitants

Plus de 200 000 habitants

les 20 villes selectionneacutees

pour le testing aupregraves des cabinets

dentaires et gyneacutecologiques

29PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 1

laquo Pour vous ce sera 21h raquo laquo Je ne prends pas de nouveaux patients raquo

laquo Eh bien on mettra deux paires de gants raquo

laquo Vous me remplirez un questionnaire meacutedical avant le rdv raquo

laquo Je le note dans le carnet de rdv raquo

laquo Les gens comme voushellip raquo

laquo Je nrsquoai pas le mateacuteriel adapteacute raquo

laquo Ok mais vous viendrez avec toutes vos analyses raquo

laquo Je ne pratique pas le deacutetartrage raquo

laquo Le deacutetartrage crsquoest 150 euros raquo

laquo Vous serez mieux soigneacute agrave lrsquohocircpital raquo

laquo Je nrsquoai pas eacuteteacute formeacute au vih raquo

laquo Heuhellip veuillez patienter raquo

Bonjour je souhaite un rendez-vous

pour un deacutetartrage et je suis seacuteropo

la face cacheacutee des refus

de soins chez les dentistes

envers les personnes vih+

Florilegravege des verbatims des cabinets dentaires agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute par ordre de citation

Le motif le plus souvent invoqueacute par les cabinets dentaires est celui des ameacutenagements ou des horaires speacutecifiques requis pour les personnes seacuteropositives Vient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute

Peacuteriode drsquoenquecircteLe testing est reacutealiseacute sur une peacuteriode courte du 7 au 10 avril 2015 pour garantir la confi-dentialiteacute de lrsquoopeacuteration et assurer un environnement comparable entre les diffeacuterents appels (actualiteacute meacutediatique et politique etc) Une fois la semaine de testing passeacutee les rendez-vous pris sont annuleacutes afin de ne pas peacutenaliser les laquo vrais raquo malades et les meacutedecins dans la gestion des rendez-vous meacutedicaux

Eacutechantillon finalParmi les 570 cabinets dentaires et les 154 cabinets de gyneacutecologie contacteacutes par teacuteleacute-phone durant la peacuteriode drsquoenquecircte pour une prise de rendez-vous un certain nombre sont exclus en raison de non-reacuteponses aux appels de non-conformiteacute de la speacutecialiteacute de fermeture ou de congeacutes Lrsquoeffectif final des praticien-ne-s retenu-e-s srsquoeacutelegraveve agrave 440 pour les chirurgiens-dentistes et 116 pour les gyneacutecologues Lors des appels il est pos-sible de relever la fonction des reacutepondant-e-s dans la majoriteacute des cas (praticien-ne-s ou secreacutetaires meacutedicaux-ales) Ainsi les interlocuteur-trice-s dans les cabinets dentaires sont des secreacutetaires meacutedicaux-les dans 764 des cas (n=336) et des chirurgiens-den-tistes dans 193 des cas (n=85) Pour les cabinets de gyneacutecologie la reacutepartition eacutetait de 802 de secreacutetaires meacutedicaux-les (n=93) et 78 de gyneacutecologues (n=9)

113 Limites de lrsquoeacutetudeCette opeacuteration de testing comporte des limites qui sont autant de pistes pour ameacutelio-rer encore ce type drsquoenquecirctes et leur donner un cadre leacutegalLa premiegravere limite tient agrave la classification a posteriori des motifs des refus de soins En effet la liste exhaustive des motifs de refus ainsi que la combinaison de plusieurs motifs eacutetaient difficiles agrave anticiper La deuxiegraveme limite concerne la perception des testeur-se-s quant aux reacuteponses four-nies par les dentistesgyneacutecologues Ainsi la notion de subjectiviteacute permise par la non-cateacutegorisation a priori des reacuteponses a probablement induit une sous-deacuteclaration de certains refus Les retours drsquoexpeacuteriences des PVVIH qui pointent des refus frontaux dans les cabinets des praticien-ne-s apregraves un rendez-vous fixeacute preacutealablement au teacuteleacute-phone laissent augurer eacutegalement drsquoune sous-eacutevaluation de ces pratiquesLa troisiegraveme limite est celle du champ de lrsquoenquecircte Seule la seacuteropositiviteacute au VIH a eacuteteacute testeacutee il est pourtant neacutecessaire drsquoeacutetendre aux personnes vivant avec une heacutepatite virale chronique ou co-infecteacutees par le VIH et les heacutepatites virales De plus les repreacutesen-tations sociales eacuteconomiques et morales associeacutees agrave la pathologie VIH (CMU ou AME preacutecariteacute pratiques sexuelles usages de drogues etc) peuvent geacuteneacuterer des cumuls de motifs de refusEt enfin la taille de lrsquoeacutechantillon des professionnel-le-s ne permet pas de reacutealiser des analyses statistiques pousseacutees notamment par ville et de conclure agrave drsquoeacuteventuelles dynamiques locales de discrimination

12 DES REacuteSULTATS ACCABLANTS

Parmi les reacuteponses des chirurgiens-dentistes et de leur secreacutetariat meacutedical agrave lrsquoan-nonce de la seacuteropositiviteacute le motif le plus souvent invoqueacute est celui des ameacutena-gements ou des horaires speacutecifiques qui seraient requis soit eacutenonceacutes comme tels soit mis en eacutevidence par comparaison des reacuteponses faites aux personnes supposeacutees seacuteroneacutegatives Il est important de rappeler que le Haut conseil de la santeacute publique a publieacute en 2007 un avis laquo ne recommandant pas lrsquoinstauration drsquoun ordre de pas-sage pour tout patient porteur des virus VHC VHB ou VIH lors drsquoactes invasifs meacutedico-chirurgicaux En revanche il considegravere comme une prioriteacute lrsquoapplication des preacutecautions standard et le respect des mesures de preacutevention (hellip) raquo LrsquoOrdre natio-nal des chirurgiens-dentistes a drsquoailleurs redit lors de la parution de ce testing que laquo les patients doivent tous beacuteneacuteficier drsquoune mecircme chaicircne de deacutecontamination et de steacuterilisation raquoVient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute surcharge de travail pas de nou-veaux-elles patient-e-s deacutelais de rendez-vous trop importants etc non eacutevoqueacutee pour les testeur-se-s nrsquoannonccedilant pas de seacuteropositiviteacute au VIHPour les gyneacutecologues ou leur secreacutetariat meacutedical les testeuses seacuteropositives sont accepteacutees sous reacuteserve de la preacutesentation de leur dossier meacutedical et du rappel de la pathologie au moment de la consultation Lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute est aussi avanceacute agrave plusieurs reprises Tous ces motifs sont ensuite cateacutegoriseacutes

Figure 2

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS30

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 3: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de comparer les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique

Bien que lrsquoaccegraves aux soins sans discrimination soit garanti par des dispositions leacutegales sans ambiguiumlteacute dans les faits des entraves existent Lrsquoexistence mecircme des refus de soins ne fait pas consensus la plupart des professionnel-le-s de santeacute tendant agrave nier ou au moins agrave minimiser le pheacutenomegravene que les personnes concerneacutees rapportent pourtant de maniegravere reacutecurrente Le deacuteficit drsquoeacutetudes officielles ne permet pas drsquoen objectiver la nature et lrsquoampleur En France seules quelques enquecirctes meneacutees par des associations et des institutions documentent ces pheacutenomegravenes mais essentiel-lement cibleacutees sur des motivations drsquoordre social Il srsquoagit drsquoeacutetudes concernant des beacuteneacuteficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) de la CMU compleacutementaire (CMU-C) de lrsquoaide meacutedicale drsquoEacutetat (AME) et de lrsquoaide agrave lrsquoacquisition drsquoune compleacute-mentaire santeacute (ACS) 11 Les discriminations dans le champ meacutedical agrave lrsquoencontre des PVVIH sont notamment documenteacutees par Sida Info Service qui a meneacute cinq enquecirctes agrave ce sujet et agrave travers les enquecirctes ANRS-VespaPourtant des cas reacutecurrents de refus de soins ou de discriminations sont rappor-teacutes par des PVVIH Ils concernent principalement lrsquoaccegraves agrave des soins dentaires ou gyneacutecologiques dans un contexte ougrave les mesures de preacutecaution standard drsquohygiegravene ont eacuteteacute maintes fois rappeleacutees par diverses instances publiques scientifiques et professionnellesAfin drsquoobjectiver ces refus trop souvent minimiseacutes AIDES a meneacute un testing en avril 2015 agrave lrsquooccasion de deacutebats autour du projet de loi de modernisation de notre sys-tegraveme de santeacute susceptible de renforcer les moyens de lutte contre les refus de soins Cette enquecircte vise agrave saisir lrsquoampleur et documenter les refus de soins laquo sur le vif raquo agrave lrsquoencontre des PVVIH

11 MEacuteThODOLOGIE

111 qursquoest-ce qursquoun testing Le testing est un moyen drsquoinvestigation en situation reacuteelle destineacute agrave prouver de maniegravere efficace et objective des situations de discrimination Il srsquoagit drsquoobserver et de com-parer toutes choses eacutegales par ailleurs les traitements dispenseacutes agrave lrsquoeacutegard de deux personnes placeacutees dans des situations similaires et qui ne diffegraverent que par une seule caracteacuteristique Si lrsquoune des personnes est traiteacutee diffeacuteremment de lrsquoautre alors cette diffeacuterence est imputeacutee agrave lrsquounique caracteacuteristique qui les distingue

112 Le protocole drsquoenquecircteAfin de parvenir agrave eacutetablir lrsquoexistence de traitements discriminatoires dans lrsquoaccegraves aux soins dentaires ou gyneacutecologiques des PVVIH AIDES a recouru agrave une opeacuteration de tes-ting srsquoappuyant sur lrsquoobservation de prises de rendez-vous teacuteleacutephoniques

Les testeur-se-sLes appels teacuteleacutephoniques sont reacutealiseacutes par 44 testeur-se-s tous militant-e-s de AIDES Chaque testeur-se doit jouer un personnage en srsquoappuyant sur une identiteacute fictive qui se reacutepartit selon quatre profils

Hommefemme Seacuteropositif-ve au VIH ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH

Les diffeacuterentes lois sur la santeacute rarement remises en causes se sont depuis inscrites dans la continuiteacute Elles positionnent le droit agrave la santeacute pour tous et toutes comme une finaliteacute des politiques de santeacute jusqursquoau dernier projet de loi preacutesenteacute par Marisol Touraine ministre des Affaires sociales de la Santeacute et des Droits des femmes qui rap-pelle dans la version initiale de lrsquoarticle 1er laquo Elle [la politique de santeacute] tend agrave assurer la promotion de conditions de vie favorables agrave la santeacute lrsquoameacutelioration de lrsquoeacutetat de santeacute de la population la reacuteduction des ineacutegaliteacutes sociales et territoriales de santeacute et agrave garantir la meilleure seacutecuriteacute sanitaire possible et lrsquoaccegraves effectif de la population agrave la preacutevention et aux soins raquo 9

Les dispositions speacutecifiques aux refus de soinsLe droit agrave la santeacute est un eacuteleacutement fondamental des droits de lrsquohomme Si les textes qui rappellent ce principe sont nombreux il reste que ce droit nrsquoest pas acquis pour tous et toutes en particulier pour les personnes en situation de vulneacuterabiliteacute Au-delagrave des dif-ficulteacutes drsquoaccegraves aux soins les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) peuvent ecirctre expo-seacutees agrave des pratiques illeacutegales de refus de soins qui portent atteinte au droit agrave la santeacute Mecircme si les refus de soins ne sont pas geacuteneacuteraliseacutes les reacutesultats de nombreux testing montrent leur reacutecurrence Le droit actuel permet-il de lutter efficacement contre ces pratiques illeacutegales les reacuteponses juridiques sont-elles suffisantes Lrsquoencadrement juri-dique des refus de soins est eacuteclateacute entre Code peacutenal Code de la santeacute publique Code de la consommation et Code de deacuteontologie meacutedicale ce qui ne rend pas visible cet enjeuLe rapport du Deacutefenseur des droits remis au Premier Ministre en mars 2014 sur laquo Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME raquo a permis de montrer lrsquoinefficaciteacute de lrsquoencadrement juridique actuel La loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (HPST) a mis en place une proceacutedure particuliegravere de signalement des refus de soins complexe et peu effective instances compeacutetentes et modaliteacutes de saisines multiples difficulteacutes des usager-e-s agrave faire valoir leurs droits rareteacute des signalements et manque de mobilisation des ins-tances en charge du traitement des signalements Crsquoest pourquoi il est neacutecessaire de renforcer les droits des patient-e-s pour une meilleure connaissance des lois et voies de recours existants de mettre en œuvre un accompagnement des victimes dans le cadre des proceacutedures de conciliation ou les recours en justice et de mieux qualifier les refus de soins illeacutegaux pour en faciliter lrsquoidentification

Exemple de deacutecision du Deacutefenseur des droits Le Deacutefenseur a eacuteteacute saisi drsquoune reacuteclamation relative au refus de proceacuteder agrave lrsquoextraction de dents de sagesse en raison de la seacuteropositiviteacute de la patiente Celle-ci pensant que le chirurgien accegravederait agrave son dossier informatique de suivi au sein du mecircme hocircpital nrsquoa pas indiqueacute sa maladie lors de la consultation preacuteopeacuteratoire Apregraves avoir appris la seacuteropositiviteacute de la reacuteclamante le mis en cause a annuleacute lrsquoopeacuteration preacutevue en propo-sant une date trois mois plus tard inacceptable pour cette derniegravere Afin de justifier le refus des soins le mis en cause a invoqueacute lrsquoapplication drsquoun protocole speacutecifique pour la prise en charge drsquoun patient seacuteropositif Lrsquohocircpital dans lequel exerccedilait le mis en cause a deacutementi lrsquoexistence drsquoun tel protocole Dans le cadre de cette deacutecision le Deacutefenseur des droits a donc recommandeacute la mise en œuvre de sanctions disciplinaires agrave lrsquoeacutegard du meacutedecin et a informeacute de sa deacutecision le ministegravere de la Santeacute le conseil national de lrsquoordre des chirurgiens-dentistes ainsi que le conseil deacutepartemental de lrsquoordre des meacutedecinsDeacutecision MLD-2011-94 du 13 janvier 2012 10

1 UN TESTINg PoUr objEcTIVEr  

LES rEFUS dE SoINS mdash

9 Au moment de la reacutedaction de ce rapport la reacutedaction deacutefinitive de lrsquoarticle 1er nrsquoest pas connue 10 httpwwwdefenseurdesdroitsfrfractionsprotection-des-droits-libertesdecisiondecision-mld-2011-94-du-13-janvier-2012-

relative-un

11 MEacuteDECINS DU MONDE Testing sur les refus de soins des meacutedecins geacuteneacuteralistes pour les beacuteneacuteficiaires de la Couverture Maladie Universelle ou de lrsquoAide Meacutedicale Eacutetat dans 10 villes de France 2006 DEacuteFENSEUR DES DROITS Les refus de soins opposeacutes aux beacuteneacuteficiaires de la CMU-C de lrsquoACS et de lrsquoAME 2014 FONDS CMU-DIES Analyse des attitudes de meacutedecins et de dentistes agrave lrsquoeacutegard des patients beacuteneacuteficiant de la CMUC dans 6 villes du Val-de-Marne 2006 FONDS CMU-IRDES Les refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMUC agrave Paris 2009 FONDS CMU-IRDES Analyse territoriale des obstacles agrave lrsquoaccegraves aux soins des beacuteneacuteficiaires de la CMUC dans les deacutepartements de lrsquoOrne et de la Niegravevre 2012 CISS Droits des malades Refus de soins aux beacuteneacuteficiaires de la CMUC de lrsquoAME et de lrsquoACS 2015

26 27PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Rouen

Evreux

Pontoise

Chacircteauroux

ParisStrasbourg

Auxerre

Dijon

Lyon

Marseille

Gap

Clermont-ferrandPuy-en-Velay

Toulouse

Niort

Angoulegraveme

Cahors

Bourg-en-Bresse

Tours

Colmar

Lrsquoeacutechantillon repreacutesentatif de lrsquoeacutetude comprend 100766810076680 cabinets dentaires et 100766510076691007668 cabinets de gyneacutecologie

Le sceacutenarioUn mecircme cabinet dentaire ou de gyneacutecologie est appeleacute deux fois pour une prise de rendez-vous par deux testeur-se-s diffeacuterent-e-s qui ont des caracteacuteristiques sociodeacute-mographiques similaires Les prises de rendez-vous gyneacutecologiques sont effectueacutees uniquement par des femmes Dans le premier cas le-la testeur-se annonce sa seacutero-positiviteacute au VIH dans le second cas lrsquoautre testeur-se ne dit rien Seule la mention du statut seacuterologique diffeacuterencie ces deux personnes Un script eacutetabli en concertation avec des militant-e-s des PVVIH et des professionnel-le-s de santeacute (meacutedecins speacutecia-listes en chirurgie dentaire en gyneacutecologie et de santeacute publique) reacuteuni-e-s au sein drsquoun groupe de pilotage a permis drsquoeacutetablir

Une feuille de route pour chaque testeur-se proposant des reacuteponses concregravetes aux eacuteventuelles questions que pourrait susciter la demande de rendez-vous (iden-titeacute motifs de la demande orientations adresse teacuteleacutephone numeacutero de seacutecuriteacute sociale etc)

La conduite agrave tenir en cas de mise en attente ou drsquoheacutesitations agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute

Le choix du motif de la consultation deacutetartrage ou frottis Il est important de choisir un acte meacutedical susceptible de provoquer des saignements mais simple ne justifiant pas une orientation vers un-e meacutedecin speacutecialiste ou vers un service drsquourgences et ou un plateau technique particulier

Les eacutechanges teacuteleacutephoniques sont enregistreacutes leur contenu est retranscrit dans une base de donneacutees pour recueillir de faccedilon standardiseacutee les reacuteponses apporteacutees par les praticien-ne-s Des seacuteances de deacutebriefing ainsi qursquoun guide meacutethodologique sont mis agrave disposition des testeur-se-s

Remarque lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute au VIH drsquoembleacutee lors de la prise de ren-dez-vous est justifieacutee par les teacutemoignages de certaines PVVIH qui trop souvent expo-seacutees agrave la stigmatisation et la discrimination de la part de professionnel-le-s de santeacute preacutefegraverent eacuteviter un refus frontal de la ou du meacutedecin dans son cabinet Elle est eacutegale-ment approuveacutee par les professionnel-le-s de santeacute du groupe de pilotage au regard de leur expeacuterience

Constitution de lrsquoeacutechantillon geacuteographiqueLa meacutethodologie de lrsquoenquecircte srsquoappuie sur une technique drsquoeacutechantillonnage aleacuteatoire de maniegravere agrave garantir une seacutelection repreacutesentative des chirurgiens-dentistes et des gyneacutecologues en France Afin de deacutefinir les villes dans lesquelles est reacutealiseacutee lrsquoeacutetude plusieurs eacutetapes sont retenues

Un classement des reacutegions en fonction de leur incidence au VIH (faible moyenne eacuteleveacutee)

Une seacutelection de trois reacutegions par niveau drsquoincidence Une identification pour chaque reacutegion seacutelectionneacutee drsquoun deacutepartement agrave haute densiteacute meacutedicale et drsquoun deacutepartement agrave faible densiteacute meacutedicale pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Un choix des chefs-lieux de chacun de ces deacutepartements comme ville pour effectuer lrsquoenquecircte

Pour les trois plus grandes villes de France (Paris Lyon Marseille) un deacutecoupage par arrondissement selon le niveau de richesse (eacuteleveacute moyen faible) est reacutealiseacute Au total 20 villes sont seacutelectionneacutees La base de sondage est reacutealiseacutee agrave partir de plusieurs sources de donneacutees lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques (Insee) pour le nombre drsquohabi-tants lrsquoInstitut de veille sanitaire (InVS) pour lrsquoincidence du VIH lrsquoObservatoire natio-nal de la deacutemographie des professions de santeacute et lrsquoAtlas de la deacutemographie meacutedicale en France pour la densiteacute meacutedicale deacutepartementale respectivement pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Constitution de lrsquoeacutechantillon meacutedicalLe testing vise les seul-e-s speacutecialistes secteurs 1 et 2 chirurgiens-dentistes et gyneacuteco-logues Ainsi deux bases de sondage sont reacutealiseacutees

Lrsquoune agrave partir de lrsquoensemble des chirurgiens-dentistes conventionneacute-e-s pour les soins dentaires classiques preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Lrsquoautre agrave partir de lrsquoensemble des gyneacutecologues conventionneacute-e-s avec les speacuteciali-teacutes meacutedicale etou obsteacutetrique preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Pour lrsquoensemble des secteurs geacuteographiques 2 297 chirurgiens-dentistes et 290 gyneacute-cologues sont recenseacute-e-s Afin de creacuteer un eacutechantillon repreacutesentatif de ces professions 30 des chirurgiens-dentistes et 60 des gyneacutecologues sont tireacute-e-s au sort agrave lrsquoaide drsquoun programme de tri aleacuteatoire

Moins de 45 000 habitants

45 000 agrave 200 000 habitants

Plus de 200 000 habitants

les 20 villes selectionneacutees

pour le testing aupregraves des cabinets

dentaires et gyneacutecologiques

29PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 1

laquo Pour vous ce sera 21h raquo laquo Je ne prends pas de nouveaux patients raquo

laquo Eh bien on mettra deux paires de gants raquo

laquo Vous me remplirez un questionnaire meacutedical avant le rdv raquo

laquo Je le note dans le carnet de rdv raquo

laquo Les gens comme voushellip raquo

laquo Je nrsquoai pas le mateacuteriel adapteacute raquo

laquo Ok mais vous viendrez avec toutes vos analyses raquo

laquo Je ne pratique pas le deacutetartrage raquo

laquo Le deacutetartrage crsquoest 150 euros raquo

laquo Vous serez mieux soigneacute agrave lrsquohocircpital raquo

laquo Je nrsquoai pas eacuteteacute formeacute au vih raquo

laquo Heuhellip veuillez patienter raquo

Bonjour je souhaite un rendez-vous

pour un deacutetartrage et je suis seacuteropo

la face cacheacutee des refus

de soins chez les dentistes

envers les personnes vih+

Florilegravege des verbatims des cabinets dentaires agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute par ordre de citation

Le motif le plus souvent invoqueacute par les cabinets dentaires est celui des ameacutenagements ou des horaires speacutecifiques requis pour les personnes seacuteropositives Vient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute

Peacuteriode drsquoenquecircteLe testing est reacutealiseacute sur une peacuteriode courte du 7 au 10 avril 2015 pour garantir la confi-dentialiteacute de lrsquoopeacuteration et assurer un environnement comparable entre les diffeacuterents appels (actualiteacute meacutediatique et politique etc) Une fois la semaine de testing passeacutee les rendez-vous pris sont annuleacutes afin de ne pas peacutenaliser les laquo vrais raquo malades et les meacutedecins dans la gestion des rendez-vous meacutedicaux

Eacutechantillon finalParmi les 570 cabinets dentaires et les 154 cabinets de gyneacutecologie contacteacutes par teacuteleacute-phone durant la peacuteriode drsquoenquecircte pour une prise de rendez-vous un certain nombre sont exclus en raison de non-reacuteponses aux appels de non-conformiteacute de la speacutecialiteacute de fermeture ou de congeacutes Lrsquoeffectif final des praticien-ne-s retenu-e-s srsquoeacutelegraveve agrave 440 pour les chirurgiens-dentistes et 116 pour les gyneacutecologues Lors des appels il est pos-sible de relever la fonction des reacutepondant-e-s dans la majoriteacute des cas (praticien-ne-s ou secreacutetaires meacutedicaux-ales) Ainsi les interlocuteur-trice-s dans les cabinets dentaires sont des secreacutetaires meacutedicaux-les dans 764 des cas (n=336) et des chirurgiens-den-tistes dans 193 des cas (n=85) Pour les cabinets de gyneacutecologie la reacutepartition eacutetait de 802 de secreacutetaires meacutedicaux-les (n=93) et 78 de gyneacutecologues (n=9)

113 Limites de lrsquoeacutetudeCette opeacuteration de testing comporte des limites qui sont autant de pistes pour ameacutelio-rer encore ce type drsquoenquecirctes et leur donner un cadre leacutegalLa premiegravere limite tient agrave la classification a posteriori des motifs des refus de soins En effet la liste exhaustive des motifs de refus ainsi que la combinaison de plusieurs motifs eacutetaient difficiles agrave anticiper La deuxiegraveme limite concerne la perception des testeur-se-s quant aux reacuteponses four-nies par les dentistesgyneacutecologues Ainsi la notion de subjectiviteacute permise par la non-cateacutegorisation a priori des reacuteponses a probablement induit une sous-deacuteclaration de certains refus Les retours drsquoexpeacuteriences des PVVIH qui pointent des refus frontaux dans les cabinets des praticien-ne-s apregraves un rendez-vous fixeacute preacutealablement au teacuteleacute-phone laissent augurer eacutegalement drsquoune sous-eacutevaluation de ces pratiquesLa troisiegraveme limite est celle du champ de lrsquoenquecircte Seule la seacuteropositiviteacute au VIH a eacuteteacute testeacutee il est pourtant neacutecessaire drsquoeacutetendre aux personnes vivant avec une heacutepatite virale chronique ou co-infecteacutees par le VIH et les heacutepatites virales De plus les repreacutesen-tations sociales eacuteconomiques et morales associeacutees agrave la pathologie VIH (CMU ou AME preacutecariteacute pratiques sexuelles usages de drogues etc) peuvent geacuteneacuterer des cumuls de motifs de refusEt enfin la taille de lrsquoeacutechantillon des professionnel-le-s ne permet pas de reacutealiser des analyses statistiques pousseacutees notamment par ville et de conclure agrave drsquoeacuteventuelles dynamiques locales de discrimination

12 DES REacuteSULTATS ACCABLANTS

Parmi les reacuteponses des chirurgiens-dentistes et de leur secreacutetariat meacutedical agrave lrsquoan-nonce de la seacuteropositiviteacute le motif le plus souvent invoqueacute est celui des ameacutena-gements ou des horaires speacutecifiques qui seraient requis soit eacutenonceacutes comme tels soit mis en eacutevidence par comparaison des reacuteponses faites aux personnes supposeacutees seacuteroneacutegatives Il est important de rappeler que le Haut conseil de la santeacute publique a publieacute en 2007 un avis laquo ne recommandant pas lrsquoinstauration drsquoun ordre de pas-sage pour tout patient porteur des virus VHC VHB ou VIH lors drsquoactes invasifs meacutedico-chirurgicaux En revanche il considegravere comme une prioriteacute lrsquoapplication des preacutecautions standard et le respect des mesures de preacutevention (hellip) raquo LrsquoOrdre natio-nal des chirurgiens-dentistes a drsquoailleurs redit lors de la parution de ce testing que laquo les patients doivent tous beacuteneacuteficier drsquoune mecircme chaicircne de deacutecontamination et de steacuterilisation raquoVient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute surcharge de travail pas de nou-veaux-elles patient-e-s deacutelais de rendez-vous trop importants etc non eacutevoqueacutee pour les testeur-se-s nrsquoannonccedilant pas de seacuteropositiviteacute au VIHPour les gyneacutecologues ou leur secreacutetariat meacutedical les testeuses seacuteropositives sont accepteacutees sous reacuteserve de la preacutesentation de leur dossier meacutedical et du rappel de la pathologie au moment de la consultation Lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute est aussi avanceacute agrave plusieurs reprises Tous ces motifs sont ensuite cateacutegoriseacutes

Figure 2

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS30

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 4: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

Rouen

Evreux

Pontoise

Chacircteauroux

ParisStrasbourg

Auxerre

Dijon

Lyon

Marseille

Gap

Clermont-ferrandPuy-en-Velay

Toulouse

Niort

Angoulegraveme

Cahors

Bourg-en-Bresse

Tours

Colmar

Lrsquoeacutechantillon repreacutesentatif de lrsquoeacutetude comprend 100766810076680 cabinets dentaires et 100766510076691007668 cabinets de gyneacutecologie

Le sceacutenarioUn mecircme cabinet dentaire ou de gyneacutecologie est appeleacute deux fois pour une prise de rendez-vous par deux testeur-se-s diffeacuterent-e-s qui ont des caracteacuteristiques sociodeacute-mographiques similaires Les prises de rendez-vous gyneacutecologiques sont effectueacutees uniquement par des femmes Dans le premier cas le-la testeur-se annonce sa seacutero-positiviteacute au VIH dans le second cas lrsquoautre testeur-se ne dit rien Seule la mention du statut seacuterologique diffeacuterencie ces deux personnes Un script eacutetabli en concertation avec des militant-e-s des PVVIH et des professionnel-le-s de santeacute (meacutedecins speacutecia-listes en chirurgie dentaire en gyneacutecologie et de santeacute publique) reacuteuni-e-s au sein drsquoun groupe de pilotage a permis drsquoeacutetablir

Une feuille de route pour chaque testeur-se proposant des reacuteponses concregravetes aux eacuteventuelles questions que pourrait susciter la demande de rendez-vous (iden-titeacute motifs de la demande orientations adresse teacuteleacutephone numeacutero de seacutecuriteacute sociale etc)

La conduite agrave tenir en cas de mise en attente ou drsquoheacutesitations agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute

Le choix du motif de la consultation deacutetartrage ou frottis Il est important de choisir un acte meacutedical susceptible de provoquer des saignements mais simple ne justifiant pas une orientation vers un-e meacutedecin speacutecialiste ou vers un service drsquourgences et ou un plateau technique particulier

Les eacutechanges teacuteleacutephoniques sont enregistreacutes leur contenu est retranscrit dans une base de donneacutees pour recueillir de faccedilon standardiseacutee les reacuteponses apporteacutees par les praticien-ne-s Des seacuteances de deacutebriefing ainsi qursquoun guide meacutethodologique sont mis agrave disposition des testeur-se-s

Remarque lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute au VIH drsquoembleacutee lors de la prise de ren-dez-vous est justifieacutee par les teacutemoignages de certaines PVVIH qui trop souvent expo-seacutees agrave la stigmatisation et la discrimination de la part de professionnel-le-s de santeacute preacutefegraverent eacuteviter un refus frontal de la ou du meacutedecin dans son cabinet Elle est eacutegale-ment approuveacutee par les professionnel-le-s de santeacute du groupe de pilotage au regard de leur expeacuterience

Constitution de lrsquoeacutechantillon geacuteographiqueLa meacutethodologie de lrsquoenquecircte srsquoappuie sur une technique drsquoeacutechantillonnage aleacuteatoire de maniegravere agrave garantir une seacutelection repreacutesentative des chirurgiens-dentistes et des gyneacutecologues en France Afin de deacutefinir les villes dans lesquelles est reacutealiseacutee lrsquoeacutetude plusieurs eacutetapes sont retenues

Un classement des reacutegions en fonction de leur incidence au VIH (faible moyenne eacuteleveacutee)

Une seacutelection de trois reacutegions par niveau drsquoincidence Une identification pour chaque reacutegion seacutelectionneacutee drsquoun deacutepartement agrave haute densiteacute meacutedicale et drsquoun deacutepartement agrave faible densiteacute meacutedicale pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Un choix des chefs-lieux de chacun de ces deacutepartements comme ville pour effectuer lrsquoenquecircte

Pour les trois plus grandes villes de France (Paris Lyon Marseille) un deacutecoupage par arrondissement selon le niveau de richesse (eacuteleveacute moyen faible) est reacutealiseacute Au total 20 villes sont seacutelectionneacutees La base de sondage est reacutealiseacutee agrave partir de plusieurs sources de donneacutees lrsquoInstitut national de la statistique et des eacutetudes eacuteconomiques (Insee) pour le nombre drsquohabi-tants lrsquoInstitut de veille sanitaire (InVS) pour lrsquoincidence du VIH lrsquoObservatoire natio-nal de la deacutemographie des professions de santeacute et lrsquoAtlas de la deacutemographie meacutedicale en France pour la densiteacute meacutedicale deacutepartementale respectivement pour la chirurgie dentaire et la gyneacutecologie meacutedicale et obsteacutetrique

Constitution de lrsquoeacutechantillon meacutedicalLe testing vise les seul-e-s speacutecialistes secteurs 1 et 2 chirurgiens-dentistes et gyneacuteco-logues Ainsi deux bases de sondage sont reacutealiseacutees

Lrsquoune agrave partir de lrsquoensemble des chirurgiens-dentistes conventionneacute-e-s pour les soins dentaires classiques preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Lrsquoautre agrave partir de lrsquoensemble des gyneacutecologues conventionneacute-e-s avec les speacuteciali-teacutes meacutedicale etou obsteacutetrique preacutesents dans les villes seacutelectionneacutees

Pour lrsquoensemble des secteurs geacuteographiques 2 297 chirurgiens-dentistes et 290 gyneacute-cologues sont recenseacute-e-s Afin de creacuteer un eacutechantillon repreacutesentatif de ces professions 30 des chirurgiens-dentistes et 60 des gyneacutecologues sont tireacute-e-s au sort agrave lrsquoaide drsquoun programme de tri aleacuteatoire

Moins de 45 000 habitants

45 000 agrave 200 000 habitants

Plus de 200 000 habitants

les 20 villes selectionneacutees

pour le testing aupregraves des cabinets

dentaires et gyneacutecologiques

29PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 1

laquo Pour vous ce sera 21h raquo laquo Je ne prends pas de nouveaux patients raquo

laquo Eh bien on mettra deux paires de gants raquo

laquo Vous me remplirez un questionnaire meacutedical avant le rdv raquo

laquo Je le note dans le carnet de rdv raquo

laquo Les gens comme voushellip raquo

laquo Je nrsquoai pas le mateacuteriel adapteacute raquo

laquo Ok mais vous viendrez avec toutes vos analyses raquo

laquo Je ne pratique pas le deacutetartrage raquo

laquo Le deacutetartrage crsquoest 150 euros raquo

laquo Vous serez mieux soigneacute agrave lrsquohocircpital raquo

laquo Je nrsquoai pas eacuteteacute formeacute au vih raquo

laquo Heuhellip veuillez patienter raquo

Bonjour je souhaite un rendez-vous

pour un deacutetartrage et je suis seacuteropo

la face cacheacutee des refus

de soins chez les dentistes

envers les personnes vih+

Florilegravege des verbatims des cabinets dentaires agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute par ordre de citation

Le motif le plus souvent invoqueacute par les cabinets dentaires est celui des ameacutenagements ou des horaires speacutecifiques requis pour les personnes seacuteropositives Vient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute

Peacuteriode drsquoenquecircteLe testing est reacutealiseacute sur une peacuteriode courte du 7 au 10 avril 2015 pour garantir la confi-dentialiteacute de lrsquoopeacuteration et assurer un environnement comparable entre les diffeacuterents appels (actualiteacute meacutediatique et politique etc) Une fois la semaine de testing passeacutee les rendez-vous pris sont annuleacutes afin de ne pas peacutenaliser les laquo vrais raquo malades et les meacutedecins dans la gestion des rendez-vous meacutedicaux

Eacutechantillon finalParmi les 570 cabinets dentaires et les 154 cabinets de gyneacutecologie contacteacutes par teacuteleacute-phone durant la peacuteriode drsquoenquecircte pour une prise de rendez-vous un certain nombre sont exclus en raison de non-reacuteponses aux appels de non-conformiteacute de la speacutecialiteacute de fermeture ou de congeacutes Lrsquoeffectif final des praticien-ne-s retenu-e-s srsquoeacutelegraveve agrave 440 pour les chirurgiens-dentistes et 116 pour les gyneacutecologues Lors des appels il est pos-sible de relever la fonction des reacutepondant-e-s dans la majoriteacute des cas (praticien-ne-s ou secreacutetaires meacutedicaux-ales) Ainsi les interlocuteur-trice-s dans les cabinets dentaires sont des secreacutetaires meacutedicaux-les dans 764 des cas (n=336) et des chirurgiens-den-tistes dans 193 des cas (n=85) Pour les cabinets de gyneacutecologie la reacutepartition eacutetait de 802 de secreacutetaires meacutedicaux-les (n=93) et 78 de gyneacutecologues (n=9)

113 Limites de lrsquoeacutetudeCette opeacuteration de testing comporte des limites qui sont autant de pistes pour ameacutelio-rer encore ce type drsquoenquecirctes et leur donner un cadre leacutegalLa premiegravere limite tient agrave la classification a posteriori des motifs des refus de soins En effet la liste exhaustive des motifs de refus ainsi que la combinaison de plusieurs motifs eacutetaient difficiles agrave anticiper La deuxiegraveme limite concerne la perception des testeur-se-s quant aux reacuteponses four-nies par les dentistesgyneacutecologues Ainsi la notion de subjectiviteacute permise par la non-cateacutegorisation a priori des reacuteponses a probablement induit une sous-deacuteclaration de certains refus Les retours drsquoexpeacuteriences des PVVIH qui pointent des refus frontaux dans les cabinets des praticien-ne-s apregraves un rendez-vous fixeacute preacutealablement au teacuteleacute-phone laissent augurer eacutegalement drsquoune sous-eacutevaluation de ces pratiquesLa troisiegraveme limite est celle du champ de lrsquoenquecircte Seule la seacuteropositiviteacute au VIH a eacuteteacute testeacutee il est pourtant neacutecessaire drsquoeacutetendre aux personnes vivant avec une heacutepatite virale chronique ou co-infecteacutees par le VIH et les heacutepatites virales De plus les repreacutesen-tations sociales eacuteconomiques et morales associeacutees agrave la pathologie VIH (CMU ou AME preacutecariteacute pratiques sexuelles usages de drogues etc) peuvent geacuteneacuterer des cumuls de motifs de refusEt enfin la taille de lrsquoeacutechantillon des professionnel-le-s ne permet pas de reacutealiser des analyses statistiques pousseacutees notamment par ville et de conclure agrave drsquoeacuteventuelles dynamiques locales de discrimination

12 DES REacuteSULTATS ACCABLANTS

Parmi les reacuteponses des chirurgiens-dentistes et de leur secreacutetariat meacutedical agrave lrsquoan-nonce de la seacuteropositiviteacute le motif le plus souvent invoqueacute est celui des ameacutena-gements ou des horaires speacutecifiques qui seraient requis soit eacutenonceacutes comme tels soit mis en eacutevidence par comparaison des reacuteponses faites aux personnes supposeacutees seacuteroneacutegatives Il est important de rappeler que le Haut conseil de la santeacute publique a publieacute en 2007 un avis laquo ne recommandant pas lrsquoinstauration drsquoun ordre de pas-sage pour tout patient porteur des virus VHC VHB ou VIH lors drsquoactes invasifs meacutedico-chirurgicaux En revanche il considegravere comme une prioriteacute lrsquoapplication des preacutecautions standard et le respect des mesures de preacutevention (hellip) raquo LrsquoOrdre natio-nal des chirurgiens-dentistes a drsquoailleurs redit lors de la parution de ce testing que laquo les patients doivent tous beacuteneacuteficier drsquoune mecircme chaicircne de deacutecontamination et de steacuterilisation raquoVient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute surcharge de travail pas de nou-veaux-elles patient-e-s deacutelais de rendez-vous trop importants etc non eacutevoqueacutee pour les testeur-se-s nrsquoannonccedilant pas de seacuteropositiviteacute au VIHPour les gyneacutecologues ou leur secreacutetariat meacutedical les testeuses seacuteropositives sont accepteacutees sous reacuteserve de la preacutesentation de leur dossier meacutedical et du rappel de la pathologie au moment de la consultation Lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute est aussi avanceacute agrave plusieurs reprises Tous ces motifs sont ensuite cateacutegoriseacutes

Figure 2

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS30

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 5: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

laquo Pour vous ce sera 21h raquo laquo Je ne prends pas de nouveaux patients raquo

laquo Eh bien on mettra deux paires de gants raquo

laquo Vous me remplirez un questionnaire meacutedical avant le rdv raquo

laquo Je le note dans le carnet de rdv raquo

laquo Les gens comme voushellip raquo

laquo Je nrsquoai pas le mateacuteriel adapteacute raquo

laquo Ok mais vous viendrez avec toutes vos analyses raquo

laquo Je ne pratique pas le deacutetartrage raquo

laquo Le deacutetartrage crsquoest 150 euros raquo

laquo Vous serez mieux soigneacute agrave lrsquohocircpital raquo

laquo Je nrsquoai pas eacuteteacute formeacute au vih raquo

laquo Heuhellip veuillez patienter raquo

Bonjour je souhaite un rendez-vous

pour un deacutetartrage et je suis seacuteropo

la face cacheacutee des refus

de soins chez les dentistes

envers les personnes vih+

Florilegravege des verbatims des cabinets dentaires agrave lrsquoannonce de la seacuteropositiviteacute par ordre de citation

Le motif le plus souvent invoqueacute par les cabinets dentaires est celui des ameacutenagements ou des horaires speacutecifiques requis pour les personnes seacuteropositives Vient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute

Peacuteriode drsquoenquecircteLe testing est reacutealiseacute sur une peacuteriode courte du 7 au 10 avril 2015 pour garantir la confi-dentialiteacute de lrsquoopeacuteration et assurer un environnement comparable entre les diffeacuterents appels (actualiteacute meacutediatique et politique etc) Une fois la semaine de testing passeacutee les rendez-vous pris sont annuleacutes afin de ne pas peacutenaliser les laquo vrais raquo malades et les meacutedecins dans la gestion des rendez-vous meacutedicaux

Eacutechantillon finalParmi les 570 cabinets dentaires et les 154 cabinets de gyneacutecologie contacteacutes par teacuteleacute-phone durant la peacuteriode drsquoenquecircte pour une prise de rendez-vous un certain nombre sont exclus en raison de non-reacuteponses aux appels de non-conformiteacute de la speacutecialiteacute de fermeture ou de congeacutes Lrsquoeffectif final des praticien-ne-s retenu-e-s srsquoeacutelegraveve agrave 440 pour les chirurgiens-dentistes et 116 pour les gyneacutecologues Lors des appels il est pos-sible de relever la fonction des reacutepondant-e-s dans la majoriteacute des cas (praticien-ne-s ou secreacutetaires meacutedicaux-ales) Ainsi les interlocuteur-trice-s dans les cabinets dentaires sont des secreacutetaires meacutedicaux-les dans 764 des cas (n=336) et des chirurgiens-den-tistes dans 193 des cas (n=85) Pour les cabinets de gyneacutecologie la reacutepartition eacutetait de 802 de secreacutetaires meacutedicaux-les (n=93) et 78 de gyneacutecologues (n=9)

113 Limites de lrsquoeacutetudeCette opeacuteration de testing comporte des limites qui sont autant de pistes pour ameacutelio-rer encore ce type drsquoenquecirctes et leur donner un cadre leacutegalLa premiegravere limite tient agrave la classification a posteriori des motifs des refus de soins En effet la liste exhaustive des motifs de refus ainsi que la combinaison de plusieurs motifs eacutetaient difficiles agrave anticiper La deuxiegraveme limite concerne la perception des testeur-se-s quant aux reacuteponses four-nies par les dentistesgyneacutecologues Ainsi la notion de subjectiviteacute permise par la non-cateacutegorisation a priori des reacuteponses a probablement induit une sous-deacuteclaration de certains refus Les retours drsquoexpeacuteriences des PVVIH qui pointent des refus frontaux dans les cabinets des praticien-ne-s apregraves un rendez-vous fixeacute preacutealablement au teacuteleacute-phone laissent augurer eacutegalement drsquoune sous-eacutevaluation de ces pratiquesLa troisiegraveme limite est celle du champ de lrsquoenquecircte Seule la seacuteropositiviteacute au VIH a eacuteteacute testeacutee il est pourtant neacutecessaire drsquoeacutetendre aux personnes vivant avec une heacutepatite virale chronique ou co-infecteacutees par le VIH et les heacutepatites virales De plus les repreacutesen-tations sociales eacuteconomiques et morales associeacutees agrave la pathologie VIH (CMU ou AME preacutecariteacute pratiques sexuelles usages de drogues etc) peuvent geacuteneacuterer des cumuls de motifs de refusEt enfin la taille de lrsquoeacutechantillon des professionnel-le-s ne permet pas de reacutealiser des analyses statistiques pousseacutees notamment par ville et de conclure agrave drsquoeacuteventuelles dynamiques locales de discrimination

12 DES REacuteSULTATS ACCABLANTS

Parmi les reacuteponses des chirurgiens-dentistes et de leur secreacutetariat meacutedical agrave lrsquoan-nonce de la seacuteropositiviteacute le motif le plus souvent invoqueacute est celui des ameacutena-gements ou des horaires speacutecifiques qui seraient requis soit eacutenonceacutes comme tels soit mis en eacutevidence par comparaison des reacuteponses faites aux personnes supposeacutees seacuteroneacutegatives Il est important de rappeler que le Haut conseil de la santeacute publique a publieacute en 2007 un avis laquo ne recommandant pas lrsquoinstauration drsquoun ordre de pas-sage pour tout patient porteur des virus VHC VHB ou VIH lors drsquoactes invasifs meacutedico-chirurgicaux En revanche il considegravere comme une prioriteacute lrsquoapplication des preacutecautions standard et le respect des mesures de preacutevention (hellip) raquo LrsquoOrdre natio-nal des chirurgiens-dentistes a drsquoailleurs redit lors de la parution de ce testing que laquo les patients doivent tous beacuteneacuteficier drsquoune mecircme chaicircne de deacutecontamination et de steacuterilisation raquoVient ensuite lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute surcharge de travail pas de nou-veaux-elles patient-e-s deacutelais de rendez-vous trop importants etc non eacutevoqueacutee pour les testeur-se-s nrsquoannonccedilant pas de seacuteropositiviteacute au VIHPour les gyneacutecologues ou leur secreacutetariat meacutedical les testeuses seacuteropositives sont accepteacutees sous reacuteserve de la preacutesentation de leur dossier meacutedical et du rappel de la pathologie au moment de la consultation Lrsquoargument de lrsquoindisponibiliteacute est aussi avanceacute agrave plusieurs reprises Tous ces motifs sont ensuite cateacutegoriseacutes

Figure 2

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS30

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 6: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins

121 Cateacutegorisation des motifs de refus de soins ou de discriminationsUne cateacutegorisation est opeacutereacutee en fonction des dispositions juridiques existantes Les dispositions leacutegales eacutetant tregraves geacuteneacuterales et impreacutecises crsquoest la reacutefeacuterence agrave la circu-laire CNAMTS CIR-332008 relative aux refus de soins agrave lrsquoeacutegard des beacuteneacuteficiaires de la CMU-C qui a eacuteteacute retenue Ce texte donne une deacutefinition concregravete des refus de soins incluant laquo la fixation tardive inhabituelle et abusive drsquoun rendez-vous lrsquoorien-tation reacutepeacuteteacutee et abusive vers un autre confregravere lrsquoattitude et le comportement dis-criminatoire du professionnel de santeacute etc raquo Certains praticien-ne-s ont pu eacutevoquer plusieurs motifsAinsi des refus de soins directs ou deacuteguiseacutes et des traitements diffeacuterentiels non fon-deacutes sont constateacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH lors drsquoune demande de rendez-vous pour un deacutetartrage ou un frottisParmi les refus de soins on distingue deux cateacutegories Les refus directs Il srsquoagit de refus directement imputables au VIH annonceacutes comme tels ou sous couvert drsquoune autre raison non formuleacutee aupregraves de la personne supposeacutee seacuteroneacutegative Les refus deacuteguiseacutes Il srsquoagit de refus dont les preacutetextes avanceacutes sont douteux et contraires au Code de deacuteontologie meacutedicale Ils peuvent ecirctre cateacutegoriseacutes en deux types de refus

Les strateacutegies de deacutecouragement horaires contraignants deacutepassements drsquohono-raires assurance de la solvabiliteacute financiegravere etc

Les reacuteorientations vers des confregraveres ou des services hospitaliers sous preacutetexte drsquoun manque de connaissance de la pathologie et de sa prise en charge de mateacute-riel non adapteacute ou la dangerositeacute des soins qui suggegraverent une meilleure prise en charge laquo ailleurs raquo

Les pratiques discriminatoires ou traitements diffeacuterentiels non fondeacutes agrave lrsquoeacutegard des PVVIH sont moralement eacutethiquement et peacutenalement tout aussi condamnables que les refus de soins (voir page 25) Ces dispariteacutes de traitement sont soit annonceacutees de maniegravere explicite lors de la prise de rendez-vous soit mises en eacutevidence par la confrontation des reacuteponses faites au-agrave la testeur-se seacuteropositif-ve au VIH et agrave son binocircme ne deacuteclarant pas de seacuterologie au VIH On distingue trois cateacutegories

La meacuteconnaissance de la pathologie qui aboutit agrave de mauvaises pratiques dans la relation avec le ou la patiente

La divulgation du statut seacuterologique en dehors drsquoun dossier meacutedical ce qui est une atteinte au secret meacutedical

Lrsquoexistence de protocoles speacutecifiques drsquohygiegravene pour les PVVIH (steacuterilisation dureacutee des soins etc) agrave lrsquoencontre des mesures de preacutecautions standard recommandeacutees qui teacutemoignent drsquoun manque de connaissance ou drsquoapplication des regravegles fonda-mentales drsquohygiegravene et de steacuterilisation mais aussi une meacuteconnaissance des modes de contamination Ces mesures doivent ecirctre garanties systeacutematiquement et sans compromis quel que soit le statut seacuterologique des personnes et ce drsquoautant qursquoon estime entre 30 000 et 50 000 le nombre de personnes contamineacutees par le VIH en France qui lrsquoignorent (pour 150 000 PVVIH soit 20 agrave 30 )

32 33

30 refus de soins

deacuteguiseacutes

36 refus de soins

directs

168 pratiques

discriminatoires

cabinet dentaire

ViH SrsquoabStenir

17 refus de soins

directs

43 refus de soins

deacuteguiseacutes

172 pratiques

discriminatoires

cabinet de gyneacutecologie

ViH SrsquoabStenir

122 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des speacutecialiteacutes

Figure 3 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 4 ndash Reacutepartition des refus de soins (directs ou deacuteguiseacutes) et des discriminations de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

336 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

168 de pratiques discriminatoires

6 de refus de soins directs ou deacuteguiseacutes

172 de pratiques discriminatoires

Cabinets de gyneacutecologie

Cabinets dentaires

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 7: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

Dans le cadre du projet de loi Santeacute AIDES a construit plusieurs amendements afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutealiteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits

Les reacutesultats de ce testing prouvent qursquoil existe une veacuteritable meacuteconnaissance du VIH et de ses modes de transmission aboutissant agrave des attitudes neacutegatives et discrimi-natoires Ces comportements trahissent les repreacutesentations des professionnel-le-s vis-agrave-vis de cette maladieinfection et sur le respect des fondements deacuteontologiques des professions du soin

13 PERSPECTIVES LA NEacuteCESSITEacute DE RENfORCER LrsquoARSENAL jURIDIqUE

Les constats de AIDES confirment la neacutecessiteacute drsquoaller plus loin contre les refus de soins que la seule disposition initialement envisageacutee dans le projet de loi Santeacute Actuelle-ment ce sont aux ordres professionnels des soignant-e-s de mesurer lrsquoimportance et la nature des pratiques de ces refus En conseacutequence plusieurs amendements ont eacuteteacute construits avec Meacutedecins du Monde (MdM) afin de faire entrer dans la loi un ensemble de mesures qui permettrait de mieux qualifier les refus de soins drsquoen observer la reacutea-liteacute et lrsquoampleur de faire en sorte que les personnes qui en sont victimes puissent mieux se deacutefendre et faire valoir leurs droits Les amendements formulent cinq propo-sitions visant agrave

Eacutelargir la deacutefinition leacutegale des refus de soins agrave toute pratique discriminante ou strateacutegie de dissuasion menant in fine au renoncement aux soins des patient-e-s

Donner une base leacutegale au testing autour drsquoun cahier des charges preacutecis et y inclure les associations de malades

Impliquer lrsquoensemble des acteurs-trices de santeacute dans le pilotage de lrsquoObserva-toire deacutedieacute aux refus de soins preacutevu par le projet de loi Santeacute agrave commencer par les associations de malades mais aussi les ordres professionnels et les organismes drsquoassurance maladie

Ameacutenager la charge de la preuve de sorte que comme dans lrsquoensemble du droit de la non-discrimination ce soit au-agrave la professionnel-le de santeacute de prouver qursquoil nrsquoy a pas eu de traitement discriminatoire lorsqursquoune personne exprime des eacuteleacutements de fait laissant supposer lrsquoexistence drsquoune discrimination

Permettre aux patient-e-s drsquoecirctre accompagneacute-e-s etou repreacutesenteacute-e-s par des associations durant les recours en justice ou les proceacutedures de conciliation lors-qursquoils-elles sont confronteacute-e-s agrave des refus de soins

Ces amendements srsquoappuient sur divers rapports institutionnels et parlementaires ils srsquoinspirent aussi de lrsquoarticle initial sur les refus de soins de la loi portant reacuteforme de lrsquohocircpital et relative aux patients agrave la santeacute et aux territoires (Loi HPST) preacutesenteacutee par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santeacute en 2008 Ces propositions ont cependant eacuteteacute escamoteacutees au fil des lectures agrave lrsquoAssembleacutee nationale et au SeacutenatAinsi gracircce agrave ce testing agrave ses retombeacutees meacutediatiques et agrave la mobilisation des mili-tant-e-s de AIDES les lignes ont commenceacute agrave bouger Drsquoune part lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes a vivement reacuteagi et drsquoautre part un amendement agrave lrsquoarticle 19 du projet de loi Santeacute a eacuteteacute voteacute au Seacutenat proposant que lrsquoeacutevaluation de lrsquoexistence des refus de soins soit confieacutee au Deacutefenseur des droits Au moment de la reacutedaction de ce rapport la formulation finale de lrsquoattribution de cette eacutevaluation au Deacutefenseur des droits ou aux diffeacuterents Ordres nrsquoest pas connue

Concernant lrsquoOrdre national des chirurgiens-dentistes un rapprochement avec AIDES srsquoest opeacutereacute rapidement afin drsquoeacutetudier les moyens agrave mettre en œuvre pour lutter effica-cement contre les refus de soins Degraves lrsquoannonce des reacutesultats lrsquoOrdre a immeacutediatement reacuteagi et condamneacute ce type de comportement laquo Nul ne peut faire lrsquoobjet de discrimina-tions dans lrsquoaccegraves agrave la preacutevention et aux soins raquo rappelant que laquo les chirurgiens-den-tistes qui ne respectent pas ce principe fondamental leacutegal et deacuteontologique srsquoexposent agrave des poursuites tant devant les juridictions disciplinaires que peacutenales raquo

123 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction de lrsquointerlocuteur-trice

Les refus de soins ou les pratiques discriminatoires sont plus souvent pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les que par les praticien-ne-s voire inexistants srsquoagissant des gyneacutecologuesDans les cabinets dentaires une majoriteacute de secreacutetaires meacutedicaux-les opposent des refus de soins directs aux PVVIH ils-elles sont 78 agrave opposer des refus indirects versus 22 des chirurgiens-dentistes Srsquoagissant de traitements diffeacuterentieacutes entre les PVVIH et leur binocircme supposeacute seacuteroneacutegatif 824 sont eacutemis par des secreacutetaires meacutedicaux-les versus 186 par des dentistesLes refus de soins ou discriminations sont majoritairement pratiqueacutes par les secreacutetaires meacutedicaux-les Ce constat reacutevegravele soit un manque de formation et de connaissance du VIH qui aboutit agrave des mauvaises pratiques avec le ou la patiente soit lrsquoexistence de directives donneacutees par des praticien-ne-s quant agrave la prise en charge de certain-e-s patient-e-s dont les PVVIH En teacutemoignent les mises en attente majoritairement du fait des secreacutetaires meacutedicaux-les Il est probablement plus facile de donner des ins-tructions agrave son secreacutetariat que drsquoassumer individuellement la responsabiliteacute drsquoun refus

124 Reacutepartition des refus de soins et des discriminations en fonction des villesMalgreacute des effectifs parfois limiteacutes de chirurgiens-dentistes et de gyneacutecologues par ville les reacutesultats de ce testing preacutesentent une dispariteacute des pheacutenomegravenes de refus de soins et de discriminations sur le territoire national Il nrsquoy a a priori pas de lien entre le lieu drsquoinstallation et lrsquoineacutegaliteacute des pratiques Lrsquoattitude neacutegative des professionnel-le-s agrave lrsquoencontre des PVVIH paraicirct davantage reposer sur des logiques individuelles que sur la deacutemographie meacutedicale ou lrsquoincidence locale du VIH Les reacutesultats du testing ne suggegraverent pas drsquoinfluence de lrsquoenvironnement sur les pratiques des professionnel-le-s On relegraveve que Bourg-en-Bresse Chacircteauroux et le seiziegraveme arrondissement de Paris trois lieux qui preacutesentent une deacutemographie meacutedicale quantitativement contras-teacutee se deacutetachent en matiegravere de proportion de refus de soins ou de pratiques discri-minatoires avec plus de 70 des chirurgiens-dentistes contacteacute-e-s concerneacute-e-s Agrave lrsquoinverse les speacutecialistes du treiziegraveme arrondissement de Marseille et de la ville de Pontoise nrsquoopposent aucun comportement discriminatoirePour les gyneacutecologues dont le nombre est insuffisant en France avec de veacuteritables ineacute-galiteacutes drsquoaccegraves sur le territoire 12 lrsquoeffet des villes semblent jouer un rocircle a minima Pour certaines villes dont la densiteacute meacutedicale pour cette speacutecialiteacute est tregraves faible un nombre limiteacute de professionnel-le-s a eacuteteacute contacteacute empecircchant toute conclusion Cependant il est important de noter que des PVVIH ont pu ecirctre confronteacutees agrave 100 de refus de rendez-vous dans certaines villes

125 Des laquo bonnes pratiques raquo agrave soulignerDe nombreux-ses praticien-ne-s et leur secreacutetariat meacutedical attribuent des rendez-vous aux PVVIH sans eacutevoquer aucun des motifs jugeacutes discriminatoires Pour pregraves de la moitieacute des cabinets dentaires (496 ) et plus de 4 cabinets de gyneacutecologie sur 5 (768 ) les pratiques de soins lrsquoaccueil et la communication sont en tout point conformes agrave la deacuteontologie meacutedicale (figures 5 et 6) Certains ont aussi fait preuve de bienveillance avec une approche globale de la prise en charge meacutedicale de la personne

126 Des regravegles drsquohygiegravene pour tous et toutesLes logiques de preacutecaution occupent une place eacutevidente dans les arguments opposeacutes aux PVVIH au meacutepris de la loi de la deacuteontologie meacutedicale et des recommandations drsquohygiegravene De nos jours les refus de soins ou discriminations agrave leur eacutegard sont drsquoautant plus inacceptables que les mesures de preacutecaution standard ont eacuteteacute maintes fois rappe-leacutees par diverses instances publiques et scientifiques Ces mesures sont conccedilues pour preacutevenir le risque de transmission du VIH du ou de la patiente au personnel meacutedical et inversement et drsquoun ou drsquoune patiente agrave lrsquoautre Ceci est drsquoautant plus important qursquoen-viron un quart des PVVIH ignorent qursquoelles en sont atteintes et peuvent en toute bonne foi ne pas informer le ou la professionnel-le de santeacute de leur seacuterologie Les mesures de preacutecaution standard doivent ecirctre garanties systeacutematiquement dans tous les cabinets meacutedicaux et pour chaque patient-e quel que soit son eacutetat de santeacute

12 Conseil national de lrsquoOrdre des meacutedecins Atlas de la deacutemographie meacutedicale en France situation au 1er janvier 2014

768

34 35PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT REfUS DE SOINS

Figure 5 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets dentaires (N=440)

Figure 6 ndash Pourcentage des bonnes pratiques de la part des cabinets de gyneacutecologie (N=116)

496

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 8: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

41 000 euroLe prix facial sur le marcheacute franccedilais du premier des traitements hautement actifs contre le VHC pour trois mois Sa combinaison avec drsquoautres meacutedicaments peut coucircter plus de 100766500 000 euro selon la dureacutee du traitement

12 VhC qUI SOIGNER

Crsquoest dans ce contexte que le principe drsquoune mise sous traitement seacutelective est acteacute par le ministegravere de la Santeacute Des critegraveres sont eacutetablis pour deacutefinir qui doit acceacuteder prioritai-rement aux nouveaux traitements innovants contre le VHC Ce choix et ses traductions opeacuterationnelles sont supposeacutes concilier le droit agrave la protection de la santeacute la santeacute publique et des populations mais aussi lrsquoeacutequilibre des finances publiques et la peacuteren-niteacute du systegraveme de protection sociale franccedilais Des recommandations drsquoexpert-e-s pour la mise sous traitement ont eacuteteacute fixeacutees courant 2014 mais finalement restreintes par un avis de la HAS ensuite en 2015 Ceci alors que la socieacuteteacute franccedilaise drsquoheacutepatologie a elle-mecircme confirmeacute en juin de la mecircme anneacutee les recommandations drsquoaccegraves eacutelargies de 2014

101048110104821010481 Les recommandations issues drsquoun consensus drsquoexpertsDes recommandations ont drsquoabord eacuteteacute proposeacutees en mai 2014 dans un Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C dit rapport Dhumeaux Ce rapport a eacuteteacute commandeacute par la ministre de la Santeacute en janvier 2013 agrave lrsquoAgence nationale de recherche sur le sida et les heacutepatites (ANRS) et lrsquoAssociation franccedilaise pour lrsquoeacutetude du foie (AFEF) De nombreux-ses praticien-ne-s universitaires et des repreacutesentant-e-s drsquoassociations drsquousager-e-s du systegraveme de santeacute sous la direction du professeur Daniel Dhumeaux ont participeacute agrave son eacutelaboration Ainsi pour les personnes vivant avec une heacutepatite C les recommandations de mise sous trai-tement reposent notamment sur lrsquoavancement de la maladie crsquoest-agrave-dire les stades de fibrose supeacuterieurs ou eacutegaux agrave 2 13 qui indiquent lrsquoeacutetat drsquoavancement de lrsquoimpact du virus sur le foie Les experts ont par ailleurs distingueacute certaines populations pour lesquelles la mise sous traitement est preacuteconiseacutee quel que soit le stade de fibrose

Les patient-e-s ayant des manifestations extra-heacutepatiques seacutevegraveres Les patient-e-s en attente de transplantation heacutepatique ou reacutenale (pour tenter drsquoeacuteradiquer le virus avant la transplantation)

Au cas par cas les femmes ayant un deacutesir de grossesse Les personnes co-infecteacutees VIH-VHC Les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse Les personnes deacutetenues (avec lrsquoobjectif dans ces deux derniegraveres populations drsquoune reacuteduction du risque de transmission) 14

Si le rapport Dhumeaux propose une seacutelection des patient-e-s notamment au regard du prix il inscrit ces recommandations dans une perspective de ralentissement de lrsquoeacutepi-deacutemie et se distingue en ce sens de la HAS

101048110104821010482 Les recommandations restrictives de la hASLa HAS contribue laquo agrave la reacutegulation du systegraveme de santeacute raquo et a donc comme mission drsquolaquo assurer agrave tous les patients et usagers un accegraves peacuterenne et eacutequitable agrave des soins aussi efficaces sucircrs et efficients que possible raquo 15 Les recommandations eacutetablies par la HAS srsquoimposent aux professionnel-le-s meacutedicaux-cales Contrairement agrave la perspective du rapport Dhumeaux la HAS ne considegravere pas que laquo les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC [soient] reacuteunies raquo Elle en tire les conseacutequences et ne recommande qursquolaquo une strateacutegie de traitement des patients dans lrsquoobjectif drsquoune gueacute-rison virologique individuelle raquo avec des recommandations de stade de fibrose plus restrictives que celles du rapport Dhumeaux Ainsi la HAS limite lrsquoaccegraves aux traitements innovants aux stades de fibrose du foie F2 seulement sous certaines conditions drsquoeacutevolution F3 et F4 ainsi qursquoagrave tous les stades pour certaines populations personnes co-infecteacutees VIH et VHC personnes atteintes de cryoglobulineacutemie mixte systeacutemique et symptomatique personnes atteintes de lym-phome B associeacute au VHC 16 La HAS eacutecarte en revanche des populations cibleacutees par le rapport drsquoexperts Dhumeaux notamment les usager-e-s de drogues et les personnes deacutetenues qui relegraveveraient drsquoune approche non speacutecifique et donc du cadre geacuteneacuteral La France est assez isoleacutee en Europe sur des recommandations de traitement et de non traitement arrecircteacutees sur les stades de fibrose

11 DES TRAITEMENTS INNOVANTS Agrave PRIX TREgraveS EacuteLEVEacuteS

Les limites eacuteconomiques agrave la prescription notamment sur la base de recommandations deacutefinies par la Haute autoriteacute de santeacute (HAS) sont notamment mises en lumiegravere par les prix des nouveaux traitements contre le VHC Aujourdrsquohui diffeacuterents traitements inno-vants contre le VHC les antiviraux agrave action directe sont sur le marcheacute Ils repreacutesentent des avanceacutees theacuterapeutiques majeures offrant un taux de gueacuterison virologique tregraves eacuteleveacute avec des dureacutees de traitements courtes et des effets indeacutesirables limiteacutes Si les associations investies dans le champ de la lutte contre les heacutepatites virales ndash Collectif Heacutepatites Virales (CHV) SOS heacutepatites TRT-5 Comegravede Meacutedecins du Monde (MdM) Collectif inter-associatif sur la santeacute (CISS) AIDES ndash saluent lrsquoespoir drsquoune fin proche de lrsquoeacutepideacutemie de VHC elles se sont rapidement alarmeacutees sur le prix de ces nouveaux traitements Sur le marcheacute franccedilais le prix facial du premier de ces traitements hautement actifs contre le VHC (Sovaldisofosbuvir) a eacuteteacute fixeacute agrave 41 000 euro pour trois mois de traitement Ce traitement ne srsquoutilise jamais seul mais en association avec drsquoautres Certaines combinaisons peuvent coucircter plus de 100 000 euro selon la dureacutee (des traitements de six mois sont parfois neacutecessaires)Alors que la France meacutetropolitaine compte plus de 200 000 personnes vivant avec le VHC de tels prix constituent clairement un deacutefi pour les finances publiques et la peacuterenniteacute drsquoun systegraveme de santeacute solidaire En conseacutequence et pour la premiegravere fois en France ce prix participe agrave ce que lrsquoon peut consideacuterer comme un rationnement avec des mises sous traitement sur la base drsquoavis et de dispositions restrictifs

Meacutedicaments quels prix Le prix du meacutedicament nrsquoest pas libre il est fixeacute par convention entre le laboratoire lrsquoexploitant et le Comiteacute eacuteconomique des produits de santeacute (CEPS) sur la base de cri-tegraveres deacutefinis agrave lrsquoarticle L162-16-4 du Code de santeacute publique laquo La fixation de ce prix tient compte principalement de lrsquoameacutelioration du service meacutedical rendu (SMR) appor-teacutee par le meacutedicament le cas eacutecheacuteant des reacutesultats de lrsquoeacutevaluation meacutedico-eacutecono-mique des prix des meacutedicaments agrave mecircme viseacutee theacuterapeutique des volumes de vente preacutevus ou constateacutes ainsi que des conditions preacutevisibles et reacuteelles drsquoutilisation du meacutedi-cament raquo Agrave cela srsquoajoute aussi la coheacuterence avec les conditions de commercialisation preacutevues dans les grands Eacutetats europeacuteens Seul le prix facial est public crsquoest-agrave-dire le prix rembourseacute par lrsquoassurance maladie Le CEPS et les laboratoires peuvent neacutegocier des dispositifs de remises drsquoougrave un prix reacuteel diffeacuterent (voire tregraves diffeacuterent) de ce prix facial Les dispositifs de remises et le prix reacuteel nrsquoeacutetant pas publics les prescripteurs et usager-e-s nrsquoont connaissance que du prix facial

Le droit agrave la protection de la santeacute interdit toute forme de discriminations dans lrsquoaccegraves aux soins Cependant si les discriminations sont interdites lrsquouniversaliteacute de lrsquoaccegraves agrave certains soins et traitements nrsquoest pas pour autant garantie Crsquoest le cas des nouveaux traitements contre le virus de lrsquoheacutepatite C (VHC) dont le prix exorbitant a forceacute agrave deacutefinir des critegraveres de seacutelection des patient-e-s et agrave renoncer agrave lrsquoaccegraves universel

Bien que fondamental le droit agrave la protec-tion de la santeacute sans discrimination (voir page 25) peut connaicirctre certaines limites agrave son effectiviteacute en particulier sur le plan financier Il deacutepend en effet des choix opeacutereacutes au regard des deacutepenses publiques de lrsquoEacutetat et de la seacutecuriteacute sociale et notamment par rapport aux prix des meacutedicaments et des produits de santeacute Lrsquoarticle 8 du Code de deacuteontologie meacutedi-cale (R4127-8 du Code de santeacute publique) preacutecise que laquo Dans les limites fixeacutees par la loi le meacutedecin est libre de ses pres-criptions qui seront celles qursquoil estime les plus approprieacutees en la circonstance Il doit sans neacutegliger son devoir drsquoassistance morale limiter ses prescriptions et ses actes agrave ce qui est neacutecessaire agrave la qualiteacute agrave la seacutecuriteacute et agrave lrsquoefficaciteacute des soins Il doit tenir compte des avantages des incon-veacutenients et des conseacutequences des diffeacute-rentes investigations et theacuterapeutiques possibles raquo Si la liberteacute de prescription est ici recon-nue elle connaicirct donc certaines limites leacutegales dont celle imposeacutee par lrsquoarticle L162-2-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale laquo Les meacutedecins sont tenus dans tous leurs actes et prescriptions drsquoobserver dans le cadre de la leacutegislation et de la reacuteglementation en vigueur la plus stricte eacuteconomie compatible avec la qualiteacute la seacutecuriteacute et lrsquoefficaciteacute des soins raquo ce notamment sur la base des laquo recomman-dations ou avis meacutedico-eacuteconomiques de la Haute autoriteacute de santeacute raquo

13 Stades de fibrose F0 pas de fibrose F1 fibrose leacutegegravere F2 fibrose modeacutereacutee F3 fibrose seacutevegravere F4 cirrhose14 Rapport de recommandations sur la prise en charge des personnes infecteacutees par les virus de lrsquoheacutepatite B ou de lrsquoheacutepatite C 2014 p 25015 httpwwwhas-santefrportailjcmsfc_1249599frla-has16 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf

36 37

DROIT APPLICABLE

1  LE cAS dES TrAITEmENTS INNoVANTS 

coNTrE LrsquoHEacutePATITE c mdash

dIFFIcULTEacuteS drsquoAccEgraveS  AUx TrAITEmENTS

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 9: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes (hellip) Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo Extrait de lrsquoavis de la HAS

Ainsi srsquoil nrsquoy a pas de modeacutelisation indiquant que lrsquoaccegraves aux traitements antireacutetrovi-raux agrave action directe permettrait drsquoaller vers la fin de lrsquoeacutepideacutemie de VHC des recomman-dations incluant ces deux populations pourraient tregraves concregravetement permettre drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie et de reacutepondre au moins partiellement agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute

101048110104821010484 Le prix comme barriegravere symbolique dans les pratiques meacutedicalesLe prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles Il creacutee aussi des barriegraveres symboliques pour les prescripteur-trice-s susceptibles de renoncer ou de reporter la mise sous traitement de personnes qui y seraient eacuteligibles en contradiction directe avec leur droit agrave la santeacute Diffeacuterentes associations investies dans le champ de lrsquoaccegraves agrave la santeacute notamment aupregraves des personnes confronteacutees agrave des ineacutegaliteacutes de santeacute (migrant-e-s usager-e-s de drogues trans hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes etc) recensent ponctuellement des situations ougrave la prescription des traitements ne srsquoest pas faite alors que les inteacuteresseacute-e-s remplissent les critegraveres meacutedicaux drsquoeacuteligibiliteacute Cela concerne notamment des personnes migrantes en situation preacutecaire avec des stades de fibrose avanceacutes Au moment de lrsquoeacutecriture de ce rapport un Observatoire inter-associatif se met en place afin drsquoidentifier clairement les situations et de disposer de donneacutees objectives sur les personnes exclues leur profil les motivations avanceacutees

21 LES ENjEUX EN CAUSE

Le prix du meacutedicament et lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes constituent des enjeux qui existent depuis plusieurs anneacutees dans la lutte contre le VIHsida et notamment au Sud Crsquoest la premiegravere fois que cette probleacutematique se pose veacuteritablement dans les pays du Nord et avec une telle ampleur Si des prix aussi eacuteleveacutes voire plus encore ont deacutejagrave eacuteteacute fixeacutes pour des traitements par le passeacute il srsquoagissait essentiellement de meacutedicaments de niche concernant des maladies rares affectant un nombre tregraves restreint de personnes et repreacutesentant donc des investissements eacuteconomiques faibles Aux Eacutetats-Unis le coucirct du traitement contre le VHC atteint 94 500 $ pour les patient-e-s les plus typiques traiteacute-e-s pendant 12 semaines Jamais auparavant des meacutedicaments ont afficheacute des prix si eacuteleveacutes pour traiter une population aussi importante (tableau 1)

Avec les nouveaux traitements contre le VHC crsquoest un nombre tregraves important de per-sonnes qui se trouvent concerneacutees et crsquoest un tout nouveau deacutefi pour la peacuterenniteacute de notre systegraveme de santeacute solidaire De tels prix pour plusieurs meacutedicaments avec plu-sieurs combinaisons ne peuvent induire que des laquo renoncements raquo des politiques de rationnement qui se retourneront notamment (et crsquoest deacutejagrave le cas sur le VHC) contre les personnes sujettes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute Pour mettre fin aux eacutepideacutemies de VIHsida et drsquoheacutepatites virales de faccedilon geacuteneacuterale AIDES est attacheacutee agrave un systegraveme de santeacute solidaire Lrsquoaccegraves agrave la santeacute pour tous et toutes est une condition neacutecessaire mais pas suffisante pour en finir avec ces eacutepideacute-mies Crsquoest pourquoi lrsquoassociation srsquoest mobiliseacutee pour proposer des reacuteponses adapteacutees aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments Cette mobilisation srsquoarticule avec drsquoautres approches certaines visant la proprieacuteteacute intellectuelle agrave lrsquoimage du recours juridique que MdM a deacuteposeacute en opposition au brevet sur le Sofosbuvir en Europe 20

La HAS conclut cependant son avis par une alerte quant aux prix par rapport agrave la sou-tenabiliteacute financiegravere par la solidariteacute nationale et agrave la peacuterenniteacute du systegraveme de santeacute laquo Le Collegravege de la HAS est fortement preacuteoccupeacute par lrsquoimpact que pourraient avoir de tels prix a fortiori pour des produits dont on a actuellement la certitude qursquoils srsquoassocieront dans des combinaisons theacuterapeutiques se partageant ainsi le meacuterite de lrsquoefficaciteacute alors que les populations cibles sont importantes La deacutetermination de lrsquoefficience des produits par la preacutesentation drsquoun ratio diffeacuterentiel coucirct-reacutesultat jugeacute raisonnable doit ecirctre une condition neacutecessaire agrave leur inscription sur la liste des meacutedicaments pris en charge par la solidariteacute nationale Cette eacutevaluation nrsquoest cependant pas la condition suffisante agrave lrsquoacceptation drsquoun prix sans avoir consideacutereacute la recevabiliteacute des autres deacuteter-minants Ces deacuteterminants sont les arguments justifiant le prix revendiqueacute et lrsquoimpact de la mise en œuvre du traitement sur lrsquoeacutequilibre de lrsquoensemble de la prise en charge des produits de santeacute y compris les neacutecessaires renoncements que ce prix pourrait induire dans drsquoautres champs Lrsquoobjectif de preacuteservation drsquoun systegraveme de santeacute solidaire et eacutequitable impose une extrecircme vigilance et une approche reacutesolument critique vis-agrave-vis des argumentaires de revendication de prix raquo 17

101048110104821010483 Rationnement et exclusion les justifications discutables avanceacutees par la hASLa HAS laquo considegravere que les conditions drsquoune strateacutegie drsquoeacuteradication collective du VHC ne sont pas reacuteunies raquo laquo Cet objectif devrait ecirctre envisageacute raquo selon la HAS laquo seulement dans une strateacutegie globale de santeacute publique qui neacutecessiterait drsquoassurer le deacutepistage de tous les patients un accegraves faciliteacute au traitement pour tous les malades et lrsquoabsence de reacuteinfection entre malades et drsquoenvisager une modification des infrastructures de prise en charge des patients raquo Elle ne ferme pas deacutefinitivement le sujet pour autant en proposant drsquoeacutevaluer agrave terme lrsquointeacuterecirct et la faisabiliteacute drsquoune telle strateacutegie

Une carence de donneacutees Au regard du droit agrave la protection de la santeacute et face aux risques de pertes de chances reacutesultant de la non mise sous traitement il aurait pourtant eacuteteacute justifieacute de porter une attention particuliegravere aux usager-e-s de drogues par voie intraveineuse et aux per-sonnes deacutetenues et de recommander leur mise sous traitement sur la base de critegraveres sociaux Dans ces deux groupes une forte preacutevalence au VHC est constateacutee Lrsquoenquecircte Prevacar de lrsquoInVS a permis drsquoidentifier que les personnes deacutetenues dans les prisons franccedilaises sont 6 fois plus porteuses du VHC avec une preacutevalence agrave 48 contre 08 en population geacuteneacuterale 18 Chez les usager-e-s de drogues par voie intraveineuse la preacutevalence au VHC atteint 44 19 Ces deux groupes ont par ailleurs en commun drsquoecirctre confronteacutes agrave des ineacutegaliteacutes sociales de santeacute dans leurs parcours de vie et agrave des formes drsquoeacuteloignement de lrsquoaccegraves et du maintien dans le parcours de santeacute De ce point de vue leur mise sous traitement degraves qursquoils et elles sont en contact avec le systegraveme de santeacute est justifieacutee

Neacutecessiteacute drsquoagir sur la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie dans certaines populationsLrsquoaccegraves aux traitements innovants contre le VHC et la perspective de gueacuterison virolo-gique permettent drsquoeacuteviter de nouvelles contaminations dans des contextes ougrave lrsquoeacutepi-deacutemie est particuliegraverement active Il srsquoagit drsquoun enjeu de protection de la santeacute sur le plan individuel pour limiter lrsquoattrition en renforccedilant le linkage to care et le continuum de soins mais aussi sur un plan collectif pour freiner la dynamique de lrsquoeacutepideacutemie En outre les ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves agrave lrsquooffre de santeacute contribuent agrave lrsquoeacutevolution du VHC et des comorbiditeacutes associeacutees Du fait de lrsquoeacuteloignement du systegraveme de santeacute une mise sous traitement conformeacutement aux recommandations srsquoavegravere tregraves aleacuteatoire Elle peut srsquoen trouver retardeacutee aboutissant agrave une deacutegradation continue et grave de lrsquoeacutetat de santeacute qui aurait pu ecirctre preacutevenue avant qursquoelle nrsquoadvienne Les usager-e-s de drogues en milieu libre beacuteneacuteficient drsquoun accegraves aux actions de reacuteduc-tion des risques (RdR) et agrave du mateacuteriel drsquoinjection steacuterile proposeacute par les associations Ce nrsquoest en revanche pas le cas en prison ougrave les conditions drsquohygiegravene insuffisantes lors de lrsquoinjection exposent au risque de nouvelles contaminations La loi de moder-nisation de notre systegraveme de santeacute se propose certes drsquoy reacutepondre en renforccedilant lrsquoaccegraves agrave la RdR en prison Mais il convient drsquoagir aussi sur la gueacuterison par les traite-ments afin de reacuteduire le nombre de personnes vivant avec le VHC dans les lieux de deacutetention et donc drsquoeacuteviter certaines transmissions Aussi sans preacutesager de la prise en charge meacutedicale qursquoelles auront en milieu libre la peacuteriode drsquoincarceacuteration doit ecirctre mise agrave profit pour des mises sous traitement dans des conditions favorables au suivi et agrave une meilleure observance Cela permettrait drsquoeacuteviter une eacutevolution de la maladie et une deacutegradation de lrsquoeacutetat de santeacute non controcircleacutee

2  PLAIdoyEr  

PoUr UN laquo jUSTE PrIx raquo mdash

17 httpwwwhas-santefrportailuploaddocsapplicationpdf2014-07hepatite_c_prise_en_charge_anti_viraux_aadpdf18 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html 19 httpwwwinvssantefrbeh201339-402013_39-40_2html20 httpwwwmedecinsdumondeorgPour-la-premiere-fois-en-Europe-une-organisation-medicale-conteste-la-

validite-d-un-brevet-pour-ameliorer-l-acces-des-patients-au-traitement

38 39

Le prix des nouveaux traitements contre le VHC force agrave la mise en place de critegraveres de rationnement et agrave lrsquoexclusion de certains groupes pourtant cibles

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 10: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

DROIT APPLICABLELe principeLrsquoarticle 16-3 du Code civil preacutevoit que tout acte meacutedical exige hors cas drsquour-gence le consentement de la personne Les personnes mineures non eacutemancipeacutees sont reacuteputeacutees incapables de donner vala-blement leur consentement agrave un acte meacutedical lequel doit ecirctre recueilli aupregraves de leurs repreacutesentants leacutegaux selon le principe de lrsquoautoriteacute parentale preacutevu aux articles 371-1 et 371-2 du Code civil Tou-tefois selon lrsquoarticle L1111-2 du Code de santeacute publique (CSP) elles laquo ont le droit de recevoir [elles]-mecircmes une informa-tion et de participer agrave la prise de deacutecision les concernant drsquoune maniegravere adap-teacutee soit agrave leur degreacute de maturiteacute srsquoagis-sant des mineurs soit agrave leurs faculteacutes de discernement srsquoagissant des majeurs sous tutelle raquo Cette regravegle concerne a priori tous les actes meacutedicaux (consultation examen mise sous traitement vaccina-tion deacutepistage etc) Bien que le deacutepistage par test rapide drsquoorientation diagnostique (Trod) ne soit pas un examen de biologie meacutedicale et donc pas un acte meacutedical (tel que deacutefini par lrsquoarticle L6211-3 du CSP) il est soumis aux laquo recommandations de bonnes pratiques raquo les principes en matiegravere drsquoinformation et de consente-ment des personnes malades et des usa-ger-e-s du systegraveme de santeacute lui sont aussi applicables 22

Les exceptions preacutevues par la loiPar deacuterogation pour certains actes meacutedicaux la loi a supprimeacute lrsquoexigence de consentement des titulaires de lrsquoau-toriteacute parentale et introduit un droit au secret ou agrave lrsquoanonymat au beacuteneacutefice des personnes mineures sans reacutefeacuterence agrave un acircge civil 23

Reacutealisation drsquoune interruption volontaire de grossesse (IVG)Selon la loi ndeg 2001-588 du 4 juillet 2001 si la femme mineure non eacutemancipeacutee ne veut ou ne peut pas recueillir le consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale pour recourir agrave une IVG elle est dispenseacutee de lrsquoobtention du consentement de ses parents tout en ayant la garantie que le secret meacutedical est respecteacute Il en est de mecircme pour les actes meacutedicaux et les soins

qui lui sont lieacutes Pour lrsquoIVG elle doit tou-tefois ecirctre accompagneacutee drsquoune personne majeure de son choix pour les consul-tations et les actes meacutedicaux Lrsquoidentiteacute et la qualiteacute de cet-te accompagnant-e majeur-e sont enregistreacutees dans le dos-sier meacutedical La gratuiteacute et lrsquoanonymat de cette prise en charge sont dans ce cas preacutevus 24

Prescription deacutelivrance et administration de contraceptifsDepuis 1974 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale sont autoriseacutes agrave deacutelivrer agrave titre gratuit des meacutedica-ments produits ou objets contraceptifs sur prescription meacutedicale aux mineur-e-s deacutesirant garder le secret 25 Selon la loi du 4 juillet 2001 preacuteciteacutee le consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale nrsquoest pas requis pour la prescription la deacuteli-vrance ou lrsquoadministration de contracep-tifs aux personnes mineures La circulaire CNAMTS CIR-162002 relative agrave la prise en charge de la contraception drsquourgence aux mineures garantit lrsquoanonymisation de la prise en charge pour la partie financiegravere

Deacutepistage et traitement des infections sexuellement transmissibles (IST)Depuis 1990 les centres de planification ou drsquoeacuteducation familiale agreacuteeacutes peuvent dans le cadre de leurs activiteacutes de pres-cription contraceptive et sous la respon-sabiliteacute drsquoun meacutedecin assurer de faccedilon anonyme le deacutepistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle 26 agrave lrsquoexception notamment du VIH Les acti-viteacutes de preacutevention de deacutepistage de dia-gnostic et de traitement ambulatoire des IST sont gratuites et anonymes degraves lors qursquoelles sont exerceacutees par des eacutetablisse-ments ou organismes habiliteacutes ou par un organisme relevant drsquoune collectiviteacute ter-ritoriale ayant conclu une convention 27

Prise en charge des usager-e-s de produits stupeacutefiants en eacutetablissementEn vertu de la loi du 31 deacutecembre 1970 28 les personnes usagegraveres de drogues y com-pris mineures qui se preacutesentent spon-taneacutement dans un dispensaire ou dans un eacutetablissement de santeacute afin drsquoy ecirctre traiteacutees peuvent si elles le demandent

expresseacutement beacuteneacuteficier de lrsquoanonymat au moment de lrsquoadmission Cet anony-mat ne peut ecirctre leveacute que pour des causes autres que la reacutepression de lrsquousage illicite de stupeacutefiants

Le droit drsquooppositionDrsquoune maniegravere plus geacuteneacuterale en cas drsquourgence quand la laquo sauvegarde de la santeacute raquo de la personne mineure est en jeu celle-ci peut srsquoopposer agrave la consultation par les professionnel-le-s de santeacute des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale sur les prises de deacutecisions meacutedicales afin de gar-der le secret sur son eacutetat de santeacute 29 Le ou la meacutedecin doit toutefois srsquoefforcer preacutea-lablement drsquoinciter la personne mineure agrave consulter les titulaires de lrsquoautoriteacute paren-tale Agrave deacutefaut il-elle se fait accompagner par une personne majeure de son choix Dans ces conditions le ou la meacutedecin est alors dispenseacute-e drsquoobtenir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale et peut mettre en œuvre le traitement ou lrsquointer-vention Il-elle doit faire mention eacutecrite de lrsquoopposition de la personne mineure selon lrsquoarticle R1111-6 du CSP La deacuterogation au principe de lrsquoautoriteacute parentale concerne uniquement le ou la meacutedecin Il convient de souligner que dans ce cas de figure contrairement agrave lrsquoIVG ou la contraception la personne mineure ne beacuteneacuteficie pas de la garantie du droit au secret puisque les articles L322-3 et D322-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale stipulent que la prise en charge finan-ciegravere des soins engageacutes peut ecirctre reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Au moment de la reacutedaction de ce rapport le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute preacutevoit une exception en la matiegravere pour le VIH

Sanction du deacutefaut de consentement parentalAgrave deacutefaut de consentement des parents et hors les deacuterogations leacutegales la pratique drsquoun acte meacutedical constitue une violation de lrsquoarticle 372-2 du Code civil relatif agrave lrsquoautoriteacute parentale Cette meacuteconnais-sance des preacuterogatives drsquoautoriteacute paren-tale peut constituer un preacutejudice moral donnant lieu agrave dommages et inteacuterecircts

22 LES OBjECTIfS

En lien avec de nombreux partenaires associatifs (MdM SOS heacutepatites le Comede le TRT-5 et le CHV) AIDES travaille agrave enrichir ce deacutebat dans lrsquoespace public et politique autour drsquoimpeacuteratifs clairs

Accegraves aux traitements pour tous et toutes Eacutevaluation des produits de santeacute et en particulier de ce qui constitue ou pas un traitement innovant

Renforcement de la transparence de lrsquoensemble du systegraveme meacutedico-pharmaceu-tique et des relations entre lrsquoindustrie et les institutions publiques

Renforcement du controcircle deacutemocratique et citoyen du processus de la fixation des prix

Repreacutesentation et participation des usager-e-s du systegraveme de santeacute et des orga-nisations œuvrant contre les ineacutegaliteacutes de santeacute dans le processus de fixation des prix

Neacutecessaires deacutebats sur la recherche la proprieacuteteacute intellectuelle les monopoles et les modaliteacutes de reacutemuneacuteration de lrsquoinnovation theacuterapeutique

Soutenabiliteacute du prix des traitements par le systegraveme de santeacute franccedilais 21Ces associations profitent notamment des deacutebats sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute pour proposer une seacuterie drsquoamendements reacutepondant aux objectifs identifieacutes Bien que le prix du meacutedicament nrsquoait initialement pas fait lrsquoobjet drsquoarticles dans ce texte les deacutebats et eacutechanges avec le ministegravere de la Santeacute et les parlementaires permettent notamment drsquoobtenir une repreacutesentation accrue des asso-ciations des usager-e-s du systegraveme de santeacute dans le processus de fixation des prix ainsi qursquoune transparence renforceacutee Cependant ces avanceacutees ne sont pas suffisantes et ne reacutepondent pas aux deacutefis que repreacutesentent les prix des meacutedicaments aujourdrsquohui et notamment le laquo juste prix raquo de lrsquoinnovation meacutedicale Elles posent neacuteanmoins les premiegraveres bases drsquoun deacutebat public indispensable susceptible drsquoaboutir agrave des eacutevolutions prochaines

Tableau 1 ndash Comparaison du prix de certains meacutedicaments des maladies rares et de Harvoni (combinaison de Sofosbuvir Ledipasvir) aux Eacutetats-Unis

21 Contribution inter-associative pour le groupe de travail sur lrsquoeacutevaluation des produits de santeacute 20 mai 2015

40

22 Arrecircteacute du 9 novembre 2010 art3 et annexe III 23 Voir eacutegalement Avis suivi de recommandations sur la garantie du droit au secret des personnes mineures dans le cadre de leur prise en charge meacutedicale 24 Loi ndeg 2002-1487 du 20 deacutecembre 2002 de financement de la seacutecuriteacute sociale pour 2003 art L132-1 et D131-1 du Code de la seacutecuriteacute sociale 25 Loi ndeg 74-1026 du 4 deacutecembre 1974 portant diverses dispositions relatives agrave la reacutegulation des naissances art L5134-1 du CSP 26 Loi ndeg 90-86 du 23 janvier 1990 portant diverses dispositions relatives agrave la seacutecuriteacute sociale et agrave la santeacute 27 Loi ndeg 2004-809 du 13 aoucirct 2004 relative aux liberteacutes et responsabiliteacutes locales 28 Loi ndeg 70-1320 du 31 deacutecembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et agrave la reacutepression du trafic et de lrsquousage illicite des substances veacuteneacuteneuses 29 Loi ndeg2002-203 du 4 mars 2002 sur les droits des malades art L1111-5 du CSP

OBLIGATION DE CONSENTEMENT ET DrsquoINFORMATION DES PARENTS

Prices Climb The cost of drugs is rising especially for rare disordersA selection of some of the most expensive drugs annual cost in the US

Drug (compagny)

Soliris (Alexion)

Naglazyme (BioMarin)

Elaprase (ShireSanofi)

Cinaryza (Shireacute)

Gattex (NPS)

Harvoni (Gilead)

Treats

Type of blood disease and also a kidney disorder

Rare enzyme disorder

Rare enzyme disorder

Hereditary Angioedema

Short Bowel Syndrome

Hepatitits C

Target patient population

10000-12000 world-wide

1100 in developped countries

2000 world-wide

6000 in US

3000-5000 in US

32 million in US

Typical Annual Cost

1007652 440000

1007652 400000

1007652 375000

1007652 350000

1007652 295000

1007652 94500

Source Sector amp Sovereign Research (price changes) Needham amp Co (drugs patient population) Centers for Disease Control and Prevention (patient population)

41

SEcrET mEacutedIcAL AU ProFIT  dES PErSoNNES mINEUrES

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT DIffICULTEacuteS DrsquoACCEgraveS AUX TRAITEMENTS

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 11: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

11 LA laquo MAjORITEacute SEXUELLE raquo UN CONCEPT SANS VALEUR jURIDIqUE

Il est communeacutement admis que la laquo majoriteacute sexuelle raquo est fixeacutee agrave lrsquoacircge de 15 ans cela ne repose pourtant sur aucune reacutealiteacute juridique Cette confusion srsquoexplique par la pro-tection des mineur-e-s de relations non consenties la loi a exclusivement deacutetermineacute un acircge agrave partir duquel le-la jeune est consideacutereacute-e comme capable drsquoavoir un laquo consen-tement eacuteclaireacute raquo Ainsi il est peacutenalement interdit agrave un adulte drsquoavoir des relations sexuelles avec un-e mineur-e de moins de 15 ans 30 Apregraves 15 ans srsquoil-elle est drsquoaccord un-e adolescent-e peut avoir des relations sexuelles avec un-e majeur-e sauf si ce-tte dernier-e a auto-riteacute sur lui-elle Enfin entre personnes mineures les relations sexuelles ne sont pas interdites

12 LrsquoacircGE Agrave LrsquoENTREacuteE DANS LA VIE SEXUELLE UNE REacuteALITEacute CONTRASTEacuteE

101048110104821010481 Donneacutees concernant la population geacuteneacuteraleSelon le baromegravetre Santeacute de lrsquoInstitut national de preacutevention et drsquoeacuteducation pour la santeacute (Inpes) laquo En 2010 lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel crsquoest-agrave-dire lrsquoacircge auquel la moitieacute des adolescent-e-s ont deacutejagrave eu une relation sexuelle est de 174 ans pour les garccedilons et de 176 ans pour les filles chez les 18-24 ans raquo 31 Moins de trois mois seacuteparent les femmes et les hommes aujourdrsquohui lrsquoeacutecart eacutetait de quatre ans dans les anneacutees 1940 raquo Lrsquoavancement de lrsquoacircge du premier rapport sexuel reflegravete lrsquoeacutevolution de la socieacuteteacute comme le deacutemontre le graphique ci-dessous qui met en parallegravele les eacutevegravene-ments socio-politiques avec lrsquoacircge du premier rapport (figure 1)

30 Selon lrsquoarticle 227-25 du Code peacutenal et crsquoest drsquoailleurs constitutif de circonstance aggravante selon les articles 222-29 et 222-24 du mecircme code

31 Voir eacutegalement Enquecircte Contexte de la sexualiteacute en France (CSF) meneacutee en 2006 par lrsquoIned et de lrsquoInserm aupregraves drsquoun eacutechantillon aleacuteatoire de 12 364 personnes acircgeacutees de 18 agrave 69 ans interrogeacutees par teacuteleacutephone Enquecircte Fecond 2010 reacutealiseacutee par lrsquoIned et lrsquoInserm notamment aupregraves drsquoeacutechantillons aleacuteatoires de 5 275 femmes acircgeacutees de 15 agrave 49 ans et 3 373 hommes du mecircme acircge

122 Le cas de la Guyane preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelleSelon lrsquoenquecircte CAP VIH meneacutee en Guyane aupregraves des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni lrsquoacircge des premiegraveres relations sexuelles est plus preacutecoce qursquoen meacutetropole il est de 146 ans pour les garccedilons et de 153 ans pour les filles De plus le taux de grossesses preacutecoces crsquoest-agrave-dire touchant des femmes mineures est particuliegraverement important 32 De nombreux-ses mineur-e-s de 1617 ans sont deacutejagrave parents et de fait eacutemancipeacute-e-s dans leur vie quotidienne (autonomie financiegravere loge-ment etc) Les filles deacuteclarent plus de premiegravere expeacuterience forceacutee que les garccedilons 66 versus 05 (tableau 1)

Selon la mecircme eacutetude tant chez les hommes que les femmes la sexualiteacute est de plus en plus preacutecoce En ce qui concerne les plus preacutecoces les adultes de moins de 40 ans au moment de lrsquoenquecircte deacuteclarent avoir eu leur premiegravere relation sexuelle degraves lrsquoacircge de 7-8 ans alors que pour ceux de plus de 40 ans lrsquoacircge du premier rapport se situe aux alentours de 10-11 ans Plus de 70 des hommes et pregraves de 80 des femmes acircgeacute-e-s de moins de 40 ans ont eu leur premier rapport vers 15 ans (versus 60 des hommes et des femmes de plus de 40 ans)

Tableau 1 ndash Entreacutee dans la vie sexuelle des personnes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2014

Figure 2 ndash Acircge agrave lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle des hommes et femmes reacutesidant dans les communes isoleacutees du fleuve Maroni Guyane Enquecircte CAP VIH 2013

32 Insee ndash Antiane Les grossesses preacutecoces pregraves de 7 des femmes enceintes de Guyane sont mineures Politique de la ville

42 43

Figure 1 ndash Eacutevolution de lrsquoacircge meacutedian au premier rapport sexuel en France enquecircte CSF 2006

23

19391943

19441948

19491953

19541958

19591963

19641968

19691973

19741978

19791983

19841988

19891993

19941998

19992003

20042010

22

21

20

19

18

17

16

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Hommes)

Acircge de lrsquoentreacutee de la vie sexuelle (Femmes)

100 100

90 90

80 80

70 70

60 60

50 50

40 40

30 30

20 20

10 10

0 0

Hommes acircgeacutes de moins de 40 ans Femmes acircgeacutees de moins de 40 ans

Hommes acircgeacutes de plus de 40 ans Femmes acircgeacutees de plus de 40 ans

7 8 89 910 1011 1112 1213 1314 1415 1516 1617 1718 1819 1920 2021 2122 22 23 24

1945 fin de la Seconde Guerre

mondiale

1967 leacutegalisation de la contraception

1974 remboursement de la contraception

par la Seacutecuriteacute sociale

1975 leacutegalisation de lrsquoavortement

1982 remboursement de lrsquoavortement

1987 premiegravere campagne anti-VIH

Sources CSF 2006 Baromegravetre santeacute 2010Anneacutee des 18 ans

FEMMES

HOMMES

1  SExUALITEacute ET SANTEacute SExUELLE  

dES mINEUr-E-S mdash

hommes femmes

Acircge au premier rapport sexuelAvant 10104815 ans 49 10104831010486

Apregraves 10104815 ans 51010481 10104864

Acircge moyen au premier rapport sexuel 101048141010486 ans 101048153 ans

Situation lors du premier rapport

Souhaiteacute 101048921010489 10104881010480 1010481

Accepteacute mais non souhaiteacute 10104862 101048121010488

Forceacute 1010480 5 10104861010486

Non reacuteponse 1010480 5 1010480 5

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Pourcentages cumuleacutes

AcircgeAcircge

Pourcentages cumuleacutes

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES

Page 12: LE droIT À LA SANT É ET LE P rINcIPE d’ÉgALITÉ dE ......Le droit à la protection de la santé La loi relative aux droits des personnes malades et à la qualité du système

du Conseil national du sida (CNS) qui a fait valoir dans son avis du 15 janvier 2015 les arguments suivants laquo Une garantie du secret devrait permettre (hellip) drsquoameacuteliorer la preacutevention et le deacutepistage du VIH qui reposent sur des dispositifs en permanente eacutevo-lution et dont lrsquoaccessibiliteacute doit ecirctre rechercheacutee au beacuteneacutefice des personnes mineures Plus speacutecifiquement les tests rapides drsquoorientation diagnostique (Trod) communau-taires ne sont pas accessibles aux personnes mineures car ils sont reacutealiseacutes par des non professionels meacutedicaux qui ne peuvent se dispenser du recueil du consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale cette offre de deacutepistage qui srsquoadresse aux populations les plus exposeacutees au risque de transmission du VIH est appeleacutee agrave se peacuterenniser celle-ci propose un accompagnement adapteacute et constitue un outil pertinent de lutte contre le VIH raquoLa commission des Affaires sociales du Seacutenat en juillet 2015 a suivi ces recommanda-tions et eacutecarteacute toute condition drsquoacircge ou de territoire soulevant au surplus lrsquoinconstitu-tionnaliteacute de la restriction geacuteographique par rapport agrave la rupture drsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi Cette eacutevolution a eacuteteacute confirmeacutee en seacuteance au Seacutenat La formulation de lrsquoarticle 7 au moment de la reacutedaction de ce rapport rejoint donc les propositions de AIDES et du CNS

22 LA NEacuteCESSITEacute DrsquoANONYMISER LA PRISE EN ChARGE

Lrsquoaccegraves au deacutepistage des mineur-e-s sans accord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale implique aussi de garantir lrsquoanonymat pour celles et ceux qui seraient deacutepisteacute-e-s posi-tif-ve-s Certain-e-s mineur-e-s peuvent en effet ecirctre confronteacute-e-s agrave des difficulteacutes de confidentialiteacute agrave lrsquoeacutegard de leur-s parent-s quant agrave leur prise en charge meacutedicale et agrave leur parcours de santeacute Une telle situation a eacuteteacute signaleacutee par le Comiteacute de coordination reacutegionale de la lutte contre le VIH (Corevih) du Languedoc-Roussillon qui a saisi le CNS ainsi que le Deacutefenseur des droits en mai 2014 Des cas similaires ont eacuteteacute eacutegalement identifieacutes en ce qui concerne lrsquoaccegraves aux traitements post-expositionLe CNS dans son avis du 15 janvier 2015 note ainsi que laquo Lrsquoabsence de garantie effec-tive du droit au secret constitue donc un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale de personnes mineures diagnostiqueacutees seacuteropositives au VIH Ces derniegraveres peuvent expri-mer le choix de ne pas beacuteneacuteficier drsquoactes et de prestations notamment la deacutelivrance de traitements antireacutetroviraux (ARV) plutocirct que de risquer de voir leur prise en charge reacuteveacuteleacutee aux titulaires de lrsquoautoriteacute parentale raquo Cette consideacuteration est partageacutee par le Deacutefenseur des droits qui dans un avis sur le projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute en date du 26 mai 2015 preacutecise que lrsquoinstitution laquo avait identifieacute agrave lrsquoinstar du CNS des difficulteacutes lieacutees aux modaliteacutes pratiques de mise en œuvre du secret meacutedical du cocircteacute de lrsquoAssurance maladie qui nrsquoeacutetait pas en mesure de garantir lrsquoanony-mat sur une affection de type ALD (affection longue dureacutee) pour un ayant droit rattacheacute sous la couverture sociale de ses parents raquo Ainsi le CNS recommande dans son avis la garantie du secret meacutedical pour les per-sonnes le souhaitant laquo Lrsquoabsence de garantie du droit au secret est susceptible de constituer un frein majeur agrave la prise en charge meacutedicale du VIH et drsquoentraicircner des conseacutequences dommageables pour les inteacuteresseacutes pour les professionnels de lrsquoaccom-pagnement et du soin ainsi qursquoen termes de santeacute publique raquo Cette recommandation a eacuteteacute reprise par Olivier Veran deacuteputeacute et rapporteur du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute sur le titre I portant sur la preacuteven-tion et la promotion de la santeacute Celui-ci a proposeacute un amendement agrave lrsquoarticle 7 sur le deacutepistage visant laquo agrave instituer une mesure de secret (hellip) pour les mineurs qui srsquoop-posent agrave la connaissance de leur eacutetat de santeacute par les titulaires de lrsquoautoriteacute parentale ainsi que pour les autres ayant droit drsquoun assureacute social raquo Une telle formulation permet que lrsquoarticle ne concerne pas que le VIH mais puisse inclure drsquoautres affections et actes meacutedicauxAu moment de la reacutedaction de ce rapport cette eacutevolution est maintenue dans les dif-feacuterentes versions du texte AIDES soutient cette reformulation et sera vigilante agrave ce qursquoelle figure dans la version deacutefinitive du projet de loi

44 45

21 PERMETTRE DE DEacutePISTER LES MINEUR-E-S AVEC OU SANS LrsquoACCORD DES PARENTS

La preacutecociteacute de lrsquoentreacutee dans la vie sexuelle en Guyane a reacuteveacuteleacute au travers des actions de deacutepistage de AIDES les difficulteacutes lieacutees agrave lrsquoimpossibiliteacute de proposer des Trod agrave des mineur-e-s sans consentement des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee (crsquoest-agrave-dire qursquoelle touche plus de 1 de la population) au sein drsquoune population jeune (en 2007 443 de la population avait moins de 20 ans) Le deacutepar-tement fait lrsquoobjet drsquoune attention particuliegravere en matiegravere de lutte contre le VIH et des ameacuteliorations sont confirmeacutees sur lrsquousage du preacuteservatif degraves le premier rapport sexuel ou le recours au deacutepistage (pour plus drsquoinformations sur la santeacute en Guyane voir page 49) AIDES y participe et organise reacuteguliegraverement des actions sur le fleuve Maroni pour rejoindre des populations isoleacutees et eacuteloigneacutees de lrsquooffre de preacutevention et de soins Lors de ces actions plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale (en raison de lrsquoautonomie de fait plus preacutecoce en Guyane qursquoen meacutetropole de la structuration familiale distincte etc) Cette impossibiliteacute est regrettable Drsquoabord sur un plan collectif parce que le deacutepistage constitue une eacutetape deacuteterminante dans lrsquoeacuteradication du VIH Ensuite agrave titre individuel parce que le deacutepistage peut contribuer agrave lrsquoinscription dans un parcours de santeacute adapteacute Agrave deacutefaut crsquoest toute une frange de la population exposeacutee au VIH qui en est exclue

Au regard de ces enjeux AIDES a fait part de ces constats sur le terrain au ministegravere de la Santeacute et agrave la Direction geacuteneacuterale de la Santeacute Lrsquoassociation a formuleacute des amen-dements agrave lrsquoarticle 7 du projet de loi de modernisation de notre systegraveme de santeacute agrave un double titre Drsquoune part cette disposition donne une base leacutegale au deacutepistage rapide AIDES entend qursquoil soit permis aux mineur-e-s drsquoacceacuteder au deacutepistage sans consente-ment des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale Drsquoautre part cet article preacutevoit une base leacutegale aux autotests du VIH lrsquoassociation souhaitant eacuteviter une situation paradoxale ougrave il serait possible pour des personnes mineures drsquoutiliser elles-mecircmes des autotests alors qursquoelles ne peuvent pas acceacuteder agrave un deacutepistage rapide (pourtant pratiqueacute selon un cahier des charges plus protecteur que les autotests incluant un entretien sur les pratiques et les risques)LrsquoAssembleacutee nationale a adopteacute ces amendements sur lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide des mineur-e-s sans accord parental mais avec une double restriction seulement agrave partir de lrsquoacircge de 15 ans et sur un nombre limiteacute de territoires apregraves avis du Haut conseil pour la santeacute publique lagrave ougrave lrsquoeacutepideacutemie le justifierait AIDES a plaideacute agrave lrsquooccasion de la lecture au Seacutenat pour supprimer ces deux restrictions afin de ne pas complexifier de maniegravere excessive les conditions drsquoaccegraves au deacutepistage mais aussi pour ne pas creacuteer de nouvelles exclusions pour des personnes mineures pour lesquelles lrsquoaccegraves au deacutepistage rapide reste justifieacute Cette position converge avec celle

La Guyane est le deacutepartement franccedilais ougrave lrsquoeacutepideacutemie de VIH est la plus active et dite geacuteneacuteraliseacutee au sein drsquoune population jeune

Lors des actions de AIDES sur le fleuve Maroni plusieurs personnes mineures sexuellement actives ont demandeacute agrave ecirctre deacutepisteacutees sans que les militant-e-s puissent y reacutepondre favorablement faute drsquoavoir lrsquoaccord des titulaires de lrsquoautoriteacute parentale

2  dEacutePISTAgE SoINS EacutemANcIPATIoN  

dE LrsquoAUTorITEacute PArENTALE   dU coNSTAT dE TErrAIN  

Agrave LA modIFIcATIoN dE LA LoImdash

PARTIE II LE DROIT Agrave LA SANTEacute ET LE PRINCIPE DrsquoEacuteGALITEacute DE TRAITEMENT SECRET MEacuteDICAL AU PROfIT DES PERSONNES MINEURES