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LE MALADE IMAGINAIRE OU LE SILENCE DE MOLIERE d’après Giovanni MACCHIA CONFERENCE IUTL donnée par Nadine SORET le janvier 2006 1 ère partie : LES BIOGRAPHIES DE MOLIERE, NOMBREUSES ET CONTROVERSEES Au XVIIIème s. La Vie de Molière de Grimarest est la première biographie paraît dans les premiers mois de 1705, soit une trentaine d’années après la mort de Molière. L’ouvrage a un succès certain, comme en témoignent deux contrefaçons lyonnaises, une contrefaçon hollandaise, deux traductions, hollandaise et allemande ! Pendant un demi-siècle, il servira de préface naturelle à plusieurs éditions des œuvres de Molière, avant d’être remplacé par la Vie de Molière de Voltaire, qui n’en est d’ailleurs qu’un raccourci. Comment Grimarest a-t-il travaillé ? Georges Mongrédien, à l’initiative de la réédition de ce texte en 1955, constate que Grimarest a d’abord lu tout ce qui avait, avant lui, été écrit sur Molière depuis sa mort. Première édition des Œuvres de Molière, 1663

Le Malade imaginaire ou Le Silence de Molière

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LE MALADE IMAGINAIRE OU LE SILENCE DE MOLIEREd’après Giovanni MACCHIA

CONFERENCE IUTLdonnée par Nadine SORET

le janvier 2006

1 ère partie   :

LES BIOGRAPHIES DE MOLIERE, NOMBREUSES ET CONTROVERSEES

Au XVIIIème s.

La Vie de Molière de Grimarest est la première biographie paraît dans les premiers mois de 1705, soit une trentaine d’années après la mort de Molière.L’ouvrage a un succès certain, comme en témoignent deux contrefaçons lyonnaises, une contrefaçon hollandaise, deux traductions, hollandaise et allemande !Pendant un demi-siècle, il servira de préface naturelle à plusieurs éditions des œuvres de Molière, avant d’être remplacé par la Vie de Molière de Voltaire, qui n’en est d’ailleurs qu’un raccourci.Comment Grimarest a-t-il travaillé ? Georges Mongrédien, à l’initiative de la réédition de ce texte en 1955, constate que Grimarest a d’abord lu tout ce qui avait, avant lui, été écrit sur Molière depuis sa mort.

Première édition des Œuvres de Molière, 1663

La première de ses sources a sans doute été la préface de l’édition des Œuvres de Molière écrite par La Grange et Vivot (amis de Molière), qu’il a largement utilisée. Il a lu et cite L’Art poétique de Boileau, Les Caractères de La Bruyère, les Hommes illustres de Perrault, le Dictionnaire de Bayle et même des recueils comme le Menagiana ou le Furetirana. Il a donc fait le tour des sources imprimées en 1705, et il n’était évidemment pas question pour lui de fouiller les archives.Par ailleurs, Grimarest a formellement récusé le témoignage de la Fausse comédienne, ce pamphlet fort suspect et rempli de calomnies contre la femme de Molière. S’il cite dédaigneusement l’Elomire hypocondre de Le Boulanger de Chalussay, il se garde d’utiliser cette comédie satirique, systématiquement hostile à Molière, en dépit des renseignements précieux qu’elle contient sur sa biographie.

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Mais Grimarest n’a pas limité sa documentation aux sources imprimées. Ecrivant trente ans après la mort de Molière, il a recueilli le témoignage de gens qui avaient connu Molière et qui avaient vécu près de lui. Ceci est d’un prix inestimable, car seule la biographie de Grimarest permet d’éclairer Molière du regard de ceux qui l’ont connu.Il n’a pas pu consulter La Grange, mort en 1692, ni Armande Béjart, morte en 1700 (il aurait d’ailleurs eu sans doute des scrupules à le faire étant donné le jugement modéré mais sévère qu’il porte sur elle).Il a négligé, pour des raisons que nous ignorons, d’interroger Boileau, qui avait pourtant été l’un des amis les plus fidèles du dramaturge..

Boileau, par François Chéreau

Il a interrogé Racine, c’est lui qui nous le dit, en dépit de sa brouille avec Molière, mais il a surtout questionné Baron qui, après un premier passage dans la troupe, y est revenu à Pâques 1670 et a vécu, travaillé et joué avec Molière pendant les trois dernières années de la vie de ce dernier. Baron, après la mort de Molière, a joué quotidiennement sur scène avec sa veuve à la Comédie Française de 1680 à 1691. Il est visible que Baron a été son principal informateur et un cinquième environ de sa biographie lui est d’ailleurs consacré, ce qui est tout à fait considérable.Si le travail de Grimarest fut documenté et approfondi, il n’en résulte pas moins qu’il sembla assez tôt très contestable. L’un des premiers, Boileau donne son avis sur l’ouvrage dans une lettre à Brossette, datée du 12 mars 1706 : « Pour ce qui est de la Vie de Molière, franchement, ce n’est pas un ouvrage qui mérite qu’on en parle. Il est fait par un homme qui ne savait rien de la vie de Molière, et il se trompe sur tout, ne sachant pas même les faits que tout le monde sait. » Boileau ayant été à la fois l’ami de Molière et son défenseur, tous les détracteurs de Grimarest se réfèrent à ce jugement.Avec le recul, il semblerait plutôt que l’un des torts de Grimarest fut de ne pas interroger Boileau qui, jugeant de certaines lacunes importantes de l’ouvrage, mais sans doute aussi froissé de ne pas avoir été consulté, se permit d’émettre ce sévère avis.Pour Brossette, autre contemporain de Boileau, c’est l’importance exagérée du témoignage de Baron dans l’enquête menée par Grimarest qui engage la biographie vers des dérives dangereuses : « L’auteur de la prétendue Vie de Molière a trop consulté notre ami (i.e.Baron) et trop peu sa raison ».Quant à J. B. Rousseau, qui prévoyait avec son ami Brossette une édition annotée des œuvres de Molière (édition qui, comme un certain nombre d’autres biographies de Molière, ne vit jamais le jour), il se montra encore plus sévère, refusant de tenir compte dans sa future édition de « cette misérable Vie de Molière qu’on (avait) mise à la tête des éditions précédentes, et où on ne (voyait) ni vérité, ni style , ni sens commun, ouvrage plus propre à rendre méprisable et ridicule cet illustre acteur qu’à donner la moindre lumière sur ses écrits ou sa personne. »Tous les biographes de Molière au XVIIIème s. restèrent tributaires de Grimarest qui fut leur unique source.

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Au XIX ème

Statue de Molière ,

Au XIX ème s., les chercheurs et fouilleurs d’archives, de Beffara à Soulié, de Bazin aux collaborateurs du Moliériste, apportèrent les documents nouveaux qui sont aujourd’hui la base de toute biographie de Molière. On s’aperçut qu’ils contredisaient, en un certain nombre de points, le récit de Grimarest. Ils prirent aussi l’habitude de dénigrer systématiquement son travail. Bazin résume ainsi leur position générale à l’égard du biographe, dans la Revue des Deux Mondes de juillet 1847 :« Un homme sans nom, sans autorité, sans goût, sans style, sans amour au moins du vrai(…) »Mais peu à peu on prit l’habitude de juger un peu moins sommairement la Vie de Molière de Grimarest. En réimprimant le texte en 1877, Poulet-Malassis écrivait : « Sans doute peut-on rêver (de Molière) une plus haute, mais non plus touchante et plus vive image. C’est dans Grimarest que Molière reste le plus présent, le plus familier. »

Au XX ème s.

Au début du XXème s., en confrontant le récit de Grimarest aux autres sources recueillies, on s’aperçut de la valeur du travail accompli. M. Abel Lefranc note ainsi, dans son livre intitulé La Vie et les ouvrages de Molière, revue des cours et conférences daté d’avril 1906 (p. 262) :« Grimarest s’est livré, au sujet de Molière, à une enquête longue, suivie, minutieuse. Il a consulté les gens et surtout les acteurs qui avaient pu le connaître particulièrement. Baron a été son guide principal. Fontenelle s’est intéressé à son œuvre. Sans doute, il a commis des erreurs ou des exagérations, mais il n’a jamais menti de propos délibéré. (C’est moi qui souligne. Le mensonge par omission existe-t-il ?) Il tient compte scrupuleusement du nombre et de la qualité des témoignages… Il n’a pas commis tant d’erreurs qu’on l’a dit ; il a été confirmé sur beaucoup de points ; sur d’autres nous sentons bien qu’il a su et dit la vérité. »On n’en continua pas moins à relever, non sans sévérité, les erreurs de Grimarest. Mais les historiens de Molière avaient toujours recours à lui. En 1930, M. Léon Chancerel , en rééditant son ouvrage, signalait d’ailleurs le goût de comédiens éclairés comme Charles Dullin ou Copeau pour cette « biographie naïve, puérilement colorée et non sans bavures. »Cependant, en 1932, de nouveau, Gustave Michaut repousse dédaigneusement les « anecdotes puériles et invraisemblables » du « biographe marron de Molière », en dénombrant vingt-cinq erreurs relevées dans le texte de Grimarest. Il en oublie d’ailleurs quelques-unes.

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Enfin, la biographie à mon sens la plus marquante, mais aussi la plus choquante sans doute et, ce n’est pas la moindre de ses qualités, la mieux écrite, nous vient de l’écrivain russe Mikhaël Boulgakov. Elle fut écrite en 1932 à la demande de Gorki qui lançait, sous le titre Vie des hommes remarquables une collection de biographies destinées au grand public et plus particulièrement à la jeunesse. Le travail de Boulgakov, extrêmement documenté, replace chaque œuvre de Molière dans son contexte, en lien avec l’actualité sociale, politique et religieuse qui l’a vue naître. Il reprend minutieusement tous les témoignages antérieurs qui étaient à sa disposition en les intériorisant, « avec le souci, écrit Laure Troubetzkoy,1 non pas de se plonger dans des recherches érudites, mais dans l’esprit d’époque, dans l’atmosphère d’une France d’Antan, rêvée depuis l’enfance à travers les romans d’Alexandre Dumas et le Cyrano de Rostand ».Parmi cette bibliographie imposante comportant pas moins de 47 ouvrages rédigés dans plusieurs langues la Vie de Molière de Grimarest n’est, pour Boulgakov, qu’un outil parmi d’autres, même si l’alimentation à la source de Grimarest reste importante. Les recherches bibliographiques menées par Boulgakov sont presque exhaustives, exception faite des trois volumes fondamentaux de Gustave Michaut parus entre 1922 et 1925 sous les titres respectifs de Jeunesse de Molière, Débuts de Molière et Luttes de Molière. Boulgakov voulait joindre les références des 47 ouvrages qui avaient servi de base à son travail mais, pour d’obscures raisons, cette annexe bibliographique resta inédite jusqu’en 1990. En effet la biographie de Boulgakov sur Molière ne devait pas voir le jour du vivant de son auteur, car la censure soviétique y vit non seulement « des histoires d’alcôve » racontées par un narrateur qui semblait éprouver une nostalgie totalement condamnable du royalisme, mais elle y devina aussi des « allusions quasi transparentes à notre système soviétique2 ». Le livre connut deux publications sous des formes expurgées après la mort de son auteur, en 1957 et en 1966. L’oeuvre fut enfin éditée dans sa quasi-intégralité en 1988, puis dans sa totale intégralité en 1990. « Etaient ainsi rétablies, note Laure Troubetzkoy, les interventions les plus directes du narrateur, les digressions « choquantes » sur Madeleine Béjart et sur le mariage de Molière, sur les mœurs de l’époque, bref, sur tout ce qui avait été susceptible de ternir l’image du grand classique (notamment les accusations de plagiat lancées de son vivant) ou de suggérer une appréciation trop flatteuse du rôle de Louis XIV. Il fallut attendre la fin du XXème siècle pour qu’un autre spécialiste de la littérature française, italien cette fois, ose se pencher de nouveau longuement sur ces questions. Le professeur Giovanni Macchia, auquel l’Académie Française décerna en 2000 une récompense méritée pour ses travaux sur Molière.

Le dernier des biographes de Molière – et non le moindre - s’est éteint depuis peu. D’origine italienne, cet éminent professeur de littérature à l’Université de Rome a consacré une partie de sa vie à la littérature française, et notamment à celle du XVIIème siècle. Ses travaux de recherche sur Molière, regroupés et traduits dans notre langue sous le titre Le Silence de Molière 3 lui ont d’ailleurs valu en 2000 un prix de la Francophonie décerné par l’Académie Française.

1Mikhaël Boulgakoc,La Vie de Monsieur de Molière (et autre titres), Collection Bouquins, Ed. Robert Laffont, 1993.2 Lettre du censeur à Pavel Popov, datée du 13 avril 19333 Le Silence de Molière, Giovanni Macchia, Ed. Desjonquères, janvier 2004.

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Giovanni Macchia

2 ème partie   :

LE MALADE IMAGINAIRE OU LE SILENCE DE MOLIEREd’après Giovanni Macchia

Il reste encore aujourd’hui d’importantes zones d’ombre autour de la vie du plus célèbre dramaturge français. Les différents biographes qui, depuis le XVIIIème siècle, ont travaillé à cerner cette personnalité complexe se sont heurtés à plusieurs écueils dont le premier, sans doute, tient à l’idée même que nous nous faisons dans notre pays de ce qu’est un grand homme. Et même en 2006, cette image idéale qui nous est renvoyée des gens « célèbres »( c’est-à-dire de ceux qui appartiennent ou ont appartenu à la sphère politique, médiatique, artistique ou intellectuelle ) répugne encore souvent à envisager objectivement leurs côtés déplaisants ou fâcheux. Il s’agit sans doute là d’un trait caractéristique de notre société française, où il est de bon ton de taire dans ce domaine tout ce qui pourrait heurter l’opinion. Il est vrai que, pour fonctionner correctement, toute société a besoin de croire à la valeur de ses modèles. Et ce n’est sans doute pas un hasard si les deux plus grands biographes de Molière, ceux qui ont précisément choisi de faire la lumière sur le mythe généré par l’illustre dramaturge que fut Molière, sont deux étrangers : le premier était russe et s’appelait Boulgakov, tandis que le second, italien, avait pour nom Giovanni Macchia.

Ombres et lumières

Cette idée d’opposition entre, d’une part, les lumières solaires qui ont éclairé les premières pièces de Molière représentées à la cour de Louis XIV entre 1665 et 1673 et, d’autre part, « les tons sales et noirâtres, à la Daumier »,

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Tableau d’Honoré Daumier (1808 – 1879) : Le Malade imaginaire, Courtauld Institute Galleries, Londres

qui servent de toile de fond à la dernière pièce jouée par Molière, Le Malade imaginaire, est la première constatation que fait Giovanni Macchia dans son essai sur Molière intitulé Biographie d’un malade 4  : « Les costumes qui glorifiaient dans les ballets la splendeur de la lumière, costumes d’argent, de velours, de satin, chargés de broderies, d’ornements, de pierres précieuses aux vives couleurs avec de grands turbans ornés de panaches et de fleurs sont remplacés à présent par les très humbles et lugubres objets qui peuplent la chambre d’un malade, les vêtements usés par la fréquentation de la maladie et ses remèdes immondes » écrit-il.Après l’extraordinaire succès de Psyché, jouée devant le roi dans le faste de la cour, puis reprise ensuite au théâtre du Palais Royal, suivi du succès médiocre des Fourberies de Scapin (1671) et de celui encore plus médiocre des Femmes Savantes(1672), données au Palais Royal, le roi sembla bouder le théâtre de Molière auquel il préférait l’opéra. Molière tenta alors, en écrivant le prologue du Malade imaginaire de reconquérir les faveurs royales.

Nymphes, gravure du XVIIème, Paris, Bibliothèque des Arts Décoratifs

Il était prévu que des divinités mythologiques, Flore, Pan ainsi que des faunes participent au prologue. Un chœur final devait même chanter :

« Et faisons aux échos redire mille fois :Louis est le plus grand des roisHeureux, heureux qui peut lui consacrer sa vie ! »

En fait, la pièce n’eut pas l’honneur d’être inaugurée à la cour. On la joua au Palais Royal, et à la place des divinités mythologiques, une bergère chantait un nouveau prologue :« Votre plus haut savoir n’est que pure chimère,Vains et peu sages médecins ;4 Biographie d’un malade, in Le Silence de Molière, Giovanni Macchia, Ed. Desjonquères, Mayenne, janvier 2004

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Vous ne pouvez guérir par vos grands mots latinsLa douleur qui me désespère.Votre plus haut savoir n’est que pure chimère. »

Revanche posthume ? Un an plus tard, Le Malade imaginaire fut enfin présenté officiellement au roi en 1674 dans le Jardin de Versailles, devant la grotte. Gravure de Jean Lepautre, 1676 (BNF)(la gravure distingue trois plans : le théâtre adossé à la grotte de verdure, l’orchestre dirigé par Marc-Antoine Charpentier, et le public dominé par le roi).

Néanmoins, même si cet événement n’eut pas lieu à la cour comme il l’avait été initialement prévu, on présenta au Palais Royal, le vendredi 10 février 1673, la première du Malade imaginaire qui obtint un grand succès. Il en fut de même aux deuxième et troisième représentations. La quatrième était fixée au 17 février. Mais avant d’évoquer cette fatale représentation du 17 février 1673, attardons-nous un peu sur ce que nous dit la dernière oeuvre de Molière de la société de son époque, et notamment de ceux et celles qui traversent les affres de maladie.

Une époque de grands malades

Selon G. Macchia, Argan, le personnage principal du Malade imaginaire, sent qu’il vit dans une époque de grands malades : « Il sent dans l’air que la douleur le fait l’ami des ducs, des marquis, des beautés titrées et peut-être même du roi sans plus aucune division de rang, de noblesse, de fortune, dans une égalité pleine et absolue. Ses médecins lui ont certainement rapporté que lorsque le roi tomba malade à Calais, on fit avaler une bonne potion de vin émétique à cette bouche divine, sacrée. Les duchesses n’abusent-elles pas de clystères ? La marquise de Sablé n’éprouve-t-elle pas ces mêmes maux, cette même certitude d’être livrée à une maladie dont elle ne sait pas clairement évaluer la nature, mais dont les symptômes existent ? c’est elle aussi une malade imaginaire (…) Mme de La Fayette, dès cette époque, alors qu’elle ne dépassait pourtant pas encore la quarantaine, avait commencé à se plaindre d’être comme suspendue entre ciel et terre, de n’avoir pas la force de dire bonjour ni bonsoir, de se sentir tous les jours fiévreuse ; on disait déjà d’elle, comme disaient d’Argan son frère et les autres membres de la famille qu’il y avait quelque folie dans ce désir de ne jamais sortir de la maison ».

Mais outre la souffrance liée à la maladie, il est une autre épreuve bien plus redoutable encore qu’Argan éprouve, à l’égal des grands personnages de son époque : il redoute de mourir.

La peur de la mort

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Tombe de Molière, cimetière du Père Lachaise, Paris

C’est à quatre reprises dans la pièce que nous assistons à une scène de « fausse mort ». La première est celle de Louison qui, devant les menaces terrifiantes de son père, tombe en catalepsie au moment où son père s’apprête à la fouetter. Le père tyrannique sent bien qu’il a poussé ses investigations un peu trop loin, aussi tente-t-il de rattraper les choses en jouant, comme si la perte de connaissance de sa fillette faisait partie d’un jeu convenu et peut-être habituel entre eux deux. Effectivement, Louison finit par reprendre connaissance devant les larmes feintes de son père. La deuxième fausse mort, celle d’Argan, se produit, elle, à deux reprises et de façon symétrique : la première fois devant Béline, qui laisse découvrir alors la noirceur de ses intentions et la seconde devant Angélique, qui révèle tout l’amour qu’elle porte à son père. Argan redoute la mort, qu’il s’agisse de celle des autres ou de la sienne. Aussi, lorsqu’on lui propose un travestissement hasardeux, demande-t-il, circonspect :« N’y a-t-il point quelque danger à contrefaire le mort ? »5. La dernière mise à mort, tout à fait symbolique, s’effectue à travers la malédiction de M. Purgon à l’encontre des velléités d’indépendance de son malade :

Monsieur Purgon :« J’ai à vous dire que je vous abandonne à votremauvaise constitution, à l’intempérie de

vos entrailles, à la corruption de votre sang, à l’âcreté de votre bile et à la féculence de vos humeurs(…) Et je veux qu’avant qu’il soit quatre jours vous deveniez dans un état incurable (…) Que vous tombiez dans la bradypepsie(…)De la bradypepsie dans la dyspepsie (…) De la dyspepsie dans l’apepsie(…) De l’apepsie dans la lienterie(…) De la lienterie dans la dysenterie(…) de la dysenterie dans l’hydropisie(…) Et de l’hydropisie dans la privation de la vie, où vous aura conduit votre folie. »

Argan :Ah, mon Dieu ! Je suis mort. »

(Acte III, scènes 5 et 6)

« Le siècle (de Molière) a la terreur de la mort , note encore Giovanni Macchia, et il la célèbre dans les grandes églises en apparât de deuil, avec de pompeux offices funèbres et des oraisons aux vibrantes envolées. Le pauvre Argan a dû trouver cette pompe glaçante et même absurde, parce qu’on ne peut célébrer dans la vie ce qui est l’opposé de la vie en même temps que la défaite la plus éclatante et nauséabonde de la science, cette force des vivants. « Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement » avait écrit La Rochefoucauld.

Nous savons que Molière, se sachant très malade, refusa de laisser le rôle d’Argan et de compromettre par là le succès de sa pièce. Au cours de la quatrième représentation du Malade

5 Giovanni Macchia, op. cit.

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imaginaire, le vendredi 17 février 1673, il fut pris d’un hoquet de sang qu’il dissimula en rire, et mourut chez lui quelques heures plus tard.

Acte de décès de Molière, registre de La Grange, 17 février 1673, Bibliothèque de la Comédie Française, Paris

Cette mort plus que prévisible (Molière était gravement malade depuis décembre 1665, date où il jouait L’Amour médecin, et cette première atteinte donna lieu à la fermeture du théâtre du Palais Royal jusqu’en février 1666), Molière l’attendait de pied ferme.

La forme de la comédie-ballet

Décor pour une comédie-ballet, aquarelle du XVIIème s., BNF

A première vue, la forme de la « comédie-ballet » choisie par Molière pour y jouer Le Malade imaginaire peut sembler étrange, voire même incongrue. Le contraste est en effet saisissant entre le thème abordé : la maladie (et la mort qui lui est sous-jacente) et le rire qui naît à plusieurs endroits comme dans le burlesque de la scène finale, par exemple. Toutefois les inquiétudes d’Argan ne peuvent réellement alarmer le spectateur, car elles sont interrompues, à la fin de chaque acte, par un intermède musical et chorégraphique. Dans le troisième divertissement, le port de l’habit qui symbolise le travestissement d’Argan en médecin, le libère de ses angoisses, et la pièce se clôt par la danse, la musique et les chansons, loin des préoccupations pessimistes du début. Ainsi, à l’image de Carnaval qui inverse les valeurs positives en valeurs négatives et vice-versa, le personnage d’Argan peut-il être vu comme un véritable exutoire libérant toutes les angoisses du dramaturge.

Car derrière le rire, se cache et se révèle à la fois un combat terrible : celui de Molière, luttant non seulement contre l’angoisse de la mort, mais aussi contre les douleurs liées à un état physique qui ne cesse de se dégrader. Dans cette perspective, Argan serait alors

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un double de l’auteur, mais un double en quelque sorte inversé, décalé et risible. Car finalement, le meilleur moyen de conjurer le sort n’est-il pas d’en rire ?

.Le combat contre la maladie

Fauteuil dans lequel Molière joua Le Malade imaginaire, Comédie Française

Le portrait édifiant que dresse Béline de son mari laisse à imaginer la haute estime qu’elle éprouve à son égard : « Un homme incommode à tout le monde, malpropre, dégoûtant, sans cesse un lavement ou une médecine dans le ventre, mouchant, tousssant, crachant toujours, sans esprit, ennuyeux, de mauvaise humeur, fatiguant sans cesse les gens, et grondant jour et nuit servantes et valets. » Il est fort possible que derrière le portrait d’Argan se profile ici, en filigrane, celui d’un autre malade, atteint lui aussi précisément de cette redoutable hypocondrie.

A l’écoute incessante de son corps, Argan va engager une lutte de tous les instants contre les maux dont il est l’objet, lutte que Macchia évoque en une magnifique métaphore : « On assiste tous les jours dans sa chambre entre les victoires et les défaites, au déroulement d’une campagne constante et interminable, digne de Turenne et du Grand Condé, menée contre les clystères détergeants, le julep hépatique soporifique et les médicaments purgatifs et fortifiants. » A cette différence près que si Argan est un faux malade qui vénère les médecins, Molière, lui, est un vrai malade qui les méprise. Si Argan se sent entouré, protégé par tous ces gens qui gravitent autour de lui et dont il se sent l’unique préoccupation (son M. Purgon, son M. Fleurant) Molière, lui, est seul face à sa maladie, « sans le réconfort de qui que ce soit, ni de sa famille, ni de ses guérisseurs présumés. »6 « Le corps, écrit Giovanni Macchia, après avoir donné à l’homme les plaisirs et la jouissance, se transforme un beau jour d’hôte en geôlier, en tortionnaire, en bourreau ».

Dans son méchant épigramme intitulé Elomire hypocondre, Chalussay ne se prive pas de peindre l’objet de ses sarcasmes ( Molière, derrière la forme anagrammatique d’Elomire) sous les traits effrayants de la maladie :

« Et sans exagérer, je puis vous dire aussiQu’homme n’a plus que moi de peine et de souci.Vous voyez l’effet de cette peine extrême,En ces yeux enfoncés, en ce visage blême,En ce corps qui n’a plus presque rien de vivant,Et qui n’est presque plus qu’un squelette mouvant. »

6 Giovanni Macchia, op. cit.

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A en croire Chalussay, l’apparence de Molière, durant les derniers mois de son existence, avait beaucoup changé.

Selon les médecins qui l’avaient examiné, Molière était donc atteint, lui aussi, de « mélancolie hypocondriaque », maladie décrite comme une inflammation et une corruption de la bile (jaune ou noire) dans les régions basses de l’organisme (le bas-ventre ou les « hypocondres ») et notamment dans la rate et le foie, inflammation qui remontait au cerveau et occasionnait chez le malade une espèce de délire sans fièvre.

Cette maladie qui détruisait peu à peu son corps et le minait de l’intérieur, Molière la défie littéralement dans cette ultime pièce qui les met en scène tous les deux, lui et elle.

Des médecins pour quoi faire ? 

Dans cette lutte de tous les instants contre le mal qui le broie (la toux chronique de Molière devient pour l’acteur un véritable jeu de scène, à partir de 1668), de quelle utilité sont les médecins ? Giovanni Macchia remarque qu’ « après la représentation de L’Amour médecin (pièce remaniée après l’arrêt brutal occasionné par la première offensive de la maladie) qui marquait l’attaque de front contre la médecine, le thème des médecins, poursuivi et repris, du Médecin malgré lui à M. de Pourceaugnac et au Malade imaginaire, commence à se fixer en une sorte de pathologie burlesque qui, dans son insistance, révèle des accents quasiment maniaques(…) C’est comme un lent cheminement vers la névrose d’un homme fasciné par la science médicale (qu’il avait peut-être apprise à travers son ami Mauvillain), curieux de tout ce qui concerne la médecine, d’un malade qui, semble-t-il, veut connaître les remèdes pour les repousser. Après le travestissement du personnage en médecin (Sganarelle, dans Le Médecin malgré lui), après le personnage que les médecins déclarent fou et qui est en bonne santé (dans M. de Pourceaugnac), il y a le personnage-fou (Argan, dans Le Malade imaginaire) qui vit désormais dans le cauchemar d’être malade. »

Molière s’est beaucoup documenté sur le mal dont il souffrait, cherchant autant dans les livres qu’auprès de personnes savantes les réponses aux questions qu’il se posait. « Il a suivi les cours des médecins de son temps, curieux avant que d’être un patient » note G. Macchia, et toutes ses recherches l’ont peu à peu convaincu de l’inefficacité de la science médicale de son époque, voire même de ses dangers. Depuis l’écriture de Don Juan, fait remarquer G. Macchia7, Molière lance ses attaques aux médecins avec un acharnement sans répit qui révèle quelque chose de beaucoup plus profond : le thème n’est plus seulement un thème littéraire, mais devient le lieu d’un épanchement personnel qui intéresse au plus haut point sa propre vie et « les attaques contre les médecin augmentaient d’intensité au fur et à mesure que se creusait en lui une certitude : la certitude d’être condamné. »

Gravure de Daumier

7 G. Macchia , op. Cit., p. 103

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L’image des médecins livrée au public dans Le Malade imaginaire les présente comme des charlatans s’entourant d’un orgueilleux charabia. C’est évidemment le cas des deux Diafoirus :

« Monsieur Diafoirus :Allons, Thomas, prenez l’autre bras de Monsieur, pour voir si vous saurez porter un bon jugement de son pouls. Quid dicis ?

Thomas Diafoirus :Dico que le pouls de Monsieur est le pouls d’un homme qui ne se porte point bien.

Monsieur Diafoirus :Bon.

Thomas Diafoirus :Qu’il est duriuscule, pour ne pas dire dur.

Monsieur Diafoirus :Fort bien.

Thomas Diafoirus :Repoussant.

Monsieur Diafoirus :Bene.

Thomas Diafoirus :Et même un peu caprisant.

Monsieur Diafoirus :Optime.

Thomas Diafoirus :Ce qui marque une intempérie dans le parenchyme splénique, c’est-à-dire la rate.

Monsieur Diafoirus :Fort bien.

Argan :Non : Monsieur Purgon dit que c’est mon foie qui est malade.

Monsieur Diafoirus :Eh ! Oui : qui dit parenchyme dit l’un et l’autre, à cause de l’étroite sympathie qu’ils ont ensemble, par le moyen du vas breve du pylore, et souvent des méats cholidoques. »

(Acte II, scène 6) 

Dans ses toutes dernières pièces, Molière voit les médecins comme de véritables démons qui s’acharnent sur les malades, d’odieux scélérats plus préoccupés de leur prestige personnel que

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de la guérison de leurs malades, des alchimistes qui suivent des méthodes plus qu’empiriques. Le dernier intermède du Médecin malgré lui préconise le même remède pour toutes les affections qui se présentent : « Clysterium donare, Postea seignare, Ensuitta purgare ». Ils ont d’ailleurs le mot de la fin en souhaitant au nouveau docteur de bien manger, bien boire, bien saigner et bien tuer. Mais c’est à travers la bouche de Béralde que Molière fait apparaître nombre de vérités bien senties à leur sujet : « Ils (les médecins) savent parler en beau latin, savent nommer en grec toutes les maladies, les définir et les diviser ; mais pour ce qui est de les guérir, c’est ce qu’ils ne savent point du tout » (Acte II, scène 3). On pourrait dire que Molière va un peu loin.

Or les traités de médecine contemporains montrent à l’évidence que Molière ne transforme pas beaucoup les propos qu’il fait tenir à ses personnages-médecins et qu’il n’exagère pas grand-chose. G. Macchia a ainsi comparé le compte-rendu de Rivière, doyen de la Faculté de Médecine de Montpellier concernant les symptômes de la « mélancolie hypocondriaque » à ce que déclare le Premier Médecin dans M. de Pourceaugnac. Il en révèle les sidérantes ressemblances : Ainsi, pour le docteur Rivière, la cause de cette mélancolie « qui par sa crassitie, épaisseur et couleur noire » infecte les esprits animaux et les rend ténébreux, vient d’une inflammation ou « phlogose des hypocondres » dans la mesure où le « sang mélancolique, retenu plus longtemps dans la rate » croît en chaleur « par l’obstruction d’où s’élèvent beaucoup de vapeurs au cerveau » !

Béralde, qui semble exprimer tout à fait le point de vue de l’auteur sur ce sujet, est persuadé que la médecine est « une des plus grandes folies qui soit parmi les hommes ». A la question que lui pose son frère : « Que faut-il donc faire quand on est malade ? », Béralde répond ainsi : « Rien » car la seule attitude à adopter face à la souffrance, selon le stoïcisme des grands moralistes et de Montaigne, est précisément de ne rien faire, en la regardant avec courage et lucidité. Molière en sait quelque chose.

Les autres sources de la pièce

Outre la présence non négligeable du thème de la maladie et de son effroyable escorte dans l’écriture du Malade imaginaire, il est d’autres aspects de l’oeuvre au moins aussi importants qui se laissent apercevoir aujourd’hui, à la lumière de nouveaux éléments biographiques dont nous disposons depuis de récentes recherches.

Pour le professeur G. Macchia, il ne fait aucun doute que les sources authentiques de la pièce soient à rechercher « uniquement dans l’histoire de Molière, dans son passé et dans ces quelques lueurs que, de son vivant, les interprétations satiriques avaient jetées sur sa personne, en même temps que dans la réalité sociale qui accueillait ou repoussait ces modèles. »

a) Des accusations d’homosexualité

Comme l’ont très tôt remarqué plusieurs observateurs, l’importance de la place accordée à Baron dans la Vie de Molière de Grimarest est suspecte. Mais qui est cet homme  et comment est-il entré dans la vie du dramaturge ?

Orphelin né de parents comédiens, le petit Baron est confié très tôt à une troupe composée de très jeunes comédiens (âgés d’une dizaine d’années) sous la direction des époux Raisin. La troupe ayant sollicité de Molière l’autorisation de jouer dans son théâtre, le jeune Baron se fit remarquer par une diction exceptionnelle pour un enfant de cet âge. Le gazetier Robinet confirme dans sa lettre du 22 février 1666 ces représentations de la troupe enfantine au Palais-Royal ainsi que le succès de Baron :

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« Cependant au palais-Royal,Avec un plaisir sans égal,On peut voir la troupe enfantineQu’on nomme la troupe dauphineDont les acteurs à peine éclosDes plus vieux méritent le los.Sur tous le fils de la belle BaronneActrice si belle et si bonneDont la Parque a fait son butin,A comme elle le beau destinDe charmer chacun sur scène,Quoiqu’il n’ait que douze ans à peine,Et certe il sera quelque jourFort propre aux rôles de l’amour. »

Charmeur, cabotin, le jeune garçon, à douze ans, gagna les faveurs de Molière qui l’éduqua et le soigna « comme son propre fils » écrit Grimarets. Molière lui composa même un rôle spécialement à son intention : le rôle de Myrtil, dans Mélicerte. Un pamphlet intitulé De la Fameuse comédienne accusa Molière d’avoir eu des relations suspectes avec Baron. Cependant ces éléments ne sont développés ni par Boulgakov ni par G. Macchia. Qui plus est, le thème de l’homosexualité n’apparaît pas dans Le Malade imaginaire. Je ne développerai donc pas ce point aujourd’hui.

Il est en revanche un autre sujet d’une extrême importance ayant trait à la vie privée du dramaturge sur lequel je vais m’attarder ici beaucoup plus longuement.

b) Le « conflit conjugal »

Nous voyons, dans le Médecin malgré lui, des relations familiales empoisonnées par la maladie du père. Il semble bien que, dans la maison d’Argan, le seul moyen d’échapper à la tyrannie du malade soit de recourir à la dissimulation et au mensonge. Or si les biographes français ont depuis longtemps décrit dans quelle ambiance familiale vécurent les proches de Molière, nous ne sommes que depuis peu au fait des mensonges sur lesquels reposait le mariage d’Armande et de Molière.

En 1923, M. G. Michaut, dans son ouvrage intitulé Les Débuts de Molière à Paris( p. 146-148), s’efforçait encore de démontrer qu’Armande était la sœur cadette de Madeleine, mais sa démonstration ne parvint cependant pas à convaincre un autre grand spécialiste de la question : Georges Mongrédien, qui notait en 1953 qu’ « en l’état actuel des connaissances il est impossible de conclure avec certitude. » Grimarest, comme tous ses contemporains, crut qu’Armande était la fille de Madeleine Béjart et l’identifia avec la petite Françoise qu’elle avait eue en 1638 du comte de Modène.

Toutefois certaines zones d’ombre apparaissaient déjà dans le travail fourni par Grimarest. Ainsi, une phrase aimable à l’adresse de la fille de Molière8, qui vécut jusqu’en 1723, semble indiquer que Grimarest l’avait tout de même consultée pour effectuer ses recherches, tandis qu’un témoin de Grimarest, Thomas Simon Gueullette, amateur de théâtre éclairé, affirme dans sa Vie de Molière « avoir vu de nombreuses fois la fille de Molière chez (Grimarest) » :

8 “Il n’a laissé qu’une fille : Mademoiselle Poquelin fait connaître par l’arrangement de sa conduite et par la solidité et l’agrément de sa conversation qu’elle a moins hérité des biens de son père que de ses bonnes qualités » in Vie de Molière de Grimarest, cité par G. Macchia en exergue de sa Conversation imaginaire avec la fille de Molière

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« c’était elle, poursuit-il, qui avait fourni une partie des mémoires qui avaient servi à écrire la Vie de Molière et je ne sais pas pourquoi M. de Grimarest ne l’a pas dit : il fallait qu’il eût des raisons pour cela. »

Par ailleurs la Préface des Œuvres de Molière rédigée en 1682, fort étrangement, ne mentionnait même pas Armande Béjart. Voici en l’occurrence ce qu’écrivait Grimarest au sujet des rapports de Molière et sa femme :

« (Molière) avoit cru que son bonheur seroit plus vif et plus sensible s’il le partageoit avec une femme ; il voulut remplir la passion que les charmes naissans de la fille de la Béjart avoient nourrie dans son cœur, à mesure qu’elle avoit cru. Cette jeune fille avoit tous les agrémens qui peuvent engager un homme, et tout l’esprit nécessaire pour le fixer. Molière avoit passé des amusemens qure l’on se fait avec un enfans, à l’amour le plus violent qu’une maîtresse puisse inspirer. Mais il savoit que la mere avoit d’autres vues, qu’il auroit de la peine à déranger. C’étoit une femme altiere et peu raisonnable, lorsqu’on n’adheroit pas à ses sentimens : elle aimoit mieux être l’amie de Molière que sa belle-mère : ainsi il auroit tout gâté de lui déclarer le dessein qu’il avoit d’épouser sa fille. Il prit de parti de la faire sans en rien dire à cette femme. Mais comme elle l’observoit de fort près, il ne put consommer son mariage pendant plus de neuf mois, c’eût été risquer un éclat qu’il vouloit éviter sur toutes choses ; d’autant plus que la Béjart, qui le soupçonnait de quelque dessein sur sa fille, le menaçoit souvent en femme violente et extravagante de le perdre, lui, sa fille et elle-même , si jamais il pensoit à l’épouser. Cependant la jeune fille ne s’accommodoit point de l’emportement de sa mère, qui la tourmentoit continuellement, et qui lui fesoit essuyer tous les désagréments qu’elle pouvoit inventer ; de sorte que cette jeune femme, plus lasse peut-être d’atendre le plaisir d’être femme que de souffrir les duretés de sa mère, se détermina un matin de s’aller jetter dans l’apartement de Molière, fortement résolue de n’en point sortir qu’il ne l’eût reconnue pour sa femme ; ce qu’il fut contraint de faire. Mais cet éclaircissement causa un vacarme terrible. La mère donna des marques de fureur et de désespoir, comme si Molière avoit épousé sa rivale, ou comme si sa fille étoit tombée entre les mains d’un malheureux. Néanmoins, il fallut bien s’apaiser, il n’y avoit point de remède, et la raison fit entendre à la Béjart que le plus grand bonheur qui pût arriver à sa fille étoit d’avoir épousé Molière, qui perdit par ce mariage tout l’agrément que son mérite et sa fortune pouvoient lui procurer s’il avoit été assez Philosophe pour se passer d’une femme.

Armande Béjart, anonyme, musée des Arts Déco, ParisCelle-ci ne fut pas plutôt Mademoiselle de Molière, qu’elle crut être au rang d’une

Duchesse, et elle ne se fut pas donnée en spectacle à la Comédie (dans L’Ecole des femmes), que le courtisan désocupé lui en conta. Il est bien difficile à une Comédienne, belle et soignée de sa personne, d’observer si bien sa conduite que l’on ne puisse l’attaquer. Qu’une Comédienne rende à un grand Seigneur les devoirs de politesse qui lui sont dus, il n’y a point de miséricorde : c’est son amant ! Molière s’imagina que toute la Cour, toute la Ville en vouloit à son épouse. Elle négligea de l’en désabuser. Au contraire, les soins qu’elle prenoit à

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sa parure, à ce qu’il lui sembloit, pour tout autre que lui, qui ne demandoit point tant d’arangement, ne firent qu’augmenter ses soupçons et sa jalousie. Il avoit beau représenter à sa femme la manière dont elle devoit se conduire, pour passer heureusement la vie ensemble : elle ne profitoit point de ses leçons, qui lui paroissoient trop sévères pour une jeune personne, qui d’ailleurs n’avoit rien à se reprocher. Ainsi Molière, après avoir essuyé beaucoup de froideurs et de dissentions domestiques, fit son possible pour se renfermer dans son travail et dans ses amis, sans se mettre en peine de la conduite de sa femme. »

Georges Mongrédien a constaté que Grimarest revient à plusieurs reprises dans sa biographie sur ce sujet, pour réaffirmer la fidélité d’Armande à Molière en dépit de sa coquetterie. Il remarque également le nombre important d’allusions aux malheurs conjugaux de Molière à son époque. Ainsi Montfleury fils, dans L’Impromptu de l’hôtel de Condé, répliquant à L’Impromptu de Versailles de Molière, évoque-t-il ce « fléau des cocus » :

« Dont pour peindre les mœurs la veine est si savanteQu’il paraît tout semblable à ceux qu’il représente. »

D’autres allusions perfides à ce sujet se retrouvent dans l’Elomire hypocondre de Le Boulanger de Chalussay (1670). Georges Mongrédien fait observer que si les infidélités d’Armande restent indémontrables, sa coquetterie est en revanche certaine et suffit à expliquer pour le biographe de Molière les chagrins du dramaturge qui était extrêmement jaloux. Sans aller plus loin, Georges Mongrédien considère que Grimarest, renseigné par Baron pour ce qu’il nomme « cette  délicate affaire », semble « avoir percé la véritable psychologie du comédien ». Pendant plusieurs siècles, les biographes ont donc considéré qu’Armande Béjart, se comportant en coquette effrontée, était à l’origine des problèmes du ménage.

Or le passionnant travail d’enquête mené par Boulgakov, procédant par recoupements de dates et par vérifications successives, amène en revanche à la preuve quasi-irréfutable qu’Armande - dont les circonstances de la naissance ont été entourées du plus grand secret par la famille Béjart – qu’Armande donc, est bien la fille et non la sœur de Madeleine. Mais Boulgakov va encore plus loin : non seulement il est convaincu qu’Armande est la fille de Madeleine, mais il soupçonne en outre qu’elle ait pu être aussi la fille de Molière. Il s’appuie pour étayer sa démonstration sur les propos de Brossette qu’il retransmet : « Despréaux m’a dit que Molière avait été amoureux premièrement de la comédienne Béjart dont il avait épousé la fille. »Mais laissons la parole à Boulgakov lui-même pour démontrer le cheminement de ses déductions : « L’auteur anonyme d’un pamphlet intitulé La Fameuse Comédienne (il s’agit d’Armande Béjart) rapporte : « Elle est la fille de la défunte Béjart, comédienne de campagne, qui faisait la bonne fortune de jeunes gens du Languedoc, dans le temps de l’heureuse naissance de sa fille ».

Bref, tout le monde disait du vivant de Molière qu’Armande était la fille de Madeleine et, après sa mort, nombreux furent ceux qui l’écrivirent.

En dehors de ces témoignages écrits et oraux, il existe tout un ensemble de preuves pertinentes quoique indirectes :

Selon le contrat, quand Molière épouse Armande, il reçoit 10.000 livres de Marie Hervé, en manière de dot pour sa fille. (Boulgakov a montré auparavant que Marie Hervé, mère de Madeleine Béjart, n’avait pas donné naissance à cette enfant mais l’avait pour ainsi dire « adoptée ») Mais après que Marie Hervé a officiellement fait passer pour mineurs ses enfants majeurs et s’est attribuée de mystérieux bébés non encore baptisés, nous sommes en droit de ne pas la croire. Et nous ne la croyons pas. Marie Hervé ne pouvait pas avoir 10.000 livres tournois. L’argent, comme on l’a dit par la suite, a été donné par Madeleine B2jart, seule personne aisée de la famille.

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Il est vrai que Madeleine aurait très bien pu se montrer généreuse vis-à-vis de sa sœur. Seulement voilà, ses largesses ne sont rien moins qu’équitables !Quand deux ans plus tard Geneviève se maria, elle ne reçut que 500 livres en liquide et 3.000 livres de linge et de meubles. A sa mort, Madeleine laissa à Geneviève et à Louis le boiteux une petite rente, et à Armande 30.000 livres.

Lorsque, dans le midi de la France, surgit comme tombée du ciel la petite Menou (Boulgakov a expliqué comment, lors d’une tournée en province, Madeleine présenta soudainement à la troupe de comédiens une fillette qu’elle prétendait être sa sœur.), Madeleine l’entoura de tels soins que personne parmi ses proches n’y vit la sollicitude d’une sœur. Seule une mère pouvait s’occuper si bien de son rejeton. Signalons qu’il ne fait pas de doute que Menou et Armande ne sont qu’une seule et même personne. Dans le cas contraire, nous aurions eu vent de la mort de Menou et, d’autre part, l’apparition d’Armande à Paris eût été parfaitement inexplicable. Quelle conclusion tirer de tout cela ?

En 1662, Molière a épousé la fille de Madeleine Béjart – sa première femme illégitime- et il s’agit bien de cette même Armande qui, dans les actes, est mensongèrement désignée comme la fille de Marie Hervé. D’abord les soupçons se portèrent sur un personnage que nous connaissons déjà – Esprit Rémond de Mormoiron, comte de Modène- premier amant de Madeleine et père de sa fille aînée Françoise. Mais, bien vite, on établit l’inanité de l’hypothèse. Les preuves ne manquent pas que Madeleine, un moment, souhaitait vivement que Modène régularisât leur union. Non seulement elle ne s’efforçait pas de dissimuler la naissance de Françoise, fruit de leur liaison, mais, comme nous l’avons vu, elle consacra l’événement par un acte officiel (…) La venue d’un deuxième héritier l’aurait encore plus liée à lui et aurait parfaitement secondé ses vues de mariage. Il n’y avait pas lieu de le dissimuler, ni de l’attribuer à Marie Hervé. Pourtant, force est de constater que les choses se passèrent tout différemment : il n’était pas de Modène, cet enfant que Madeleine avait mis au monde en secret, sans doute dans les environs de Paris, dont elle avait dissimulé la venue avec la complicité de sa mère et qu’elle avait ensuite envoyé en province sous le nom de Mlle Menou. Bien au contraire, elle le lui avait caché.

Le chevalier de Modène de connivence avec Louis de Bourbon, le comte de Soissons et le duc de Guise, avait pris part en 1641 à une conspiration contre Richelieu. Il avait été blessé, le 6 juillet 1641, dans le combat au bois de La Marfée. Le parlement de Paris, en septembre de la même année, l’avait condamné. Il se cacha d’abord en Belgique puis en France, évitant de se montrer à Paris. La situation se prolongea jusqu’en 1643, année où, à la suite de la mort de Richelieu et de Louis XIII, il fut amnistié et put revenir dans la capitale.

Notons d’autre part que la famille Béjart, craignant sans doute des persécutions pour les liens étroits qu’elle entretenait avec le conjuré, quitta également la capitale. Mais leurs chemins ne se croisèrent pas. Ainsi, après deux années d’absence, Modène aurait retrouvé Madeleine avec un enfant étranger sur les bras, ce qui n’aurait certainement pas contribué à consolider leur liaison.

Le comte ne pouvait en aucun cas être le père d’Armande.Ce dernier était donc un autre cavalier avec lequel Madeleine s’était liée…à quelle

époque au juste ? Cela est facile à calculer. Si Armande figure dans l’acte du 10 mars 1643 comme non encore baptisée, c’est qu’elle est née en février ou mars de la même année. Son père était donc quelqu’un que Madeleine avait connu durant l’été 1642, dans le Sud de la France. A l’époque, elle était en relation avec un grand nombre de personnes mais in en est un qu’il nous faut bien mentionner, d’autant plus que nous savons où ils se sont rencontrés. C’était aux eaux de Montfrin, où le roi Louis XIII faisait une cure, et cela se passait dans la deuxième moitié de juin 1642. Ce cavalier était déjà intime avec Madeleine, ou le devint

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alors. Il faisait partie de la suite du roi en qualité de valet de chambre et tapissier et il s’appelait…Jean-Baptiste Poquelin, en attendant de devenir Molière.

Ainsi Boulgakov ose-t-il, pour la première fois, rétablir et prouver de façon « scientifique » la vérité au sujet de Molière et de son épouse. Derrière le « conflit conjugal » du ménage de Molière se dissimulait en réalité tout autre chose. Nous comprenons mieux de ce fait les raisons du silence qui régna sur ce sujet pendant si longtemps, et la nécessité qu’il pouvait y avoir à cacher ce mariage incestueux pour des biographes soucieux de respecter l’image d’un écrivain appartenant à notre Panthéon littéraire français. La « mélancolie hypocondriaque » n’était donc pas, loin s’en faut, la seule cause de l’ambiance détestable qui régnait chez les Molière.

c) Une image désastreuse de la paternité

Pour pousser la réflexion plus loin que Giovanni Macchia ne l’a fait, je dirai ici qu’il n’est pas anodin qu’à l’heure où Molière sent qu’il écrit et joue sa dernière pièce, il ait représenté sur scène deux pères( Argan et M. Diafoirus) qui renvoient une image désastreuse de la paternité. Et il n’est pas impossible, sur ce point aussi, qu’Argan, père inconstant, imprévisible, tyrannique et aveugle, soit là encore un véritable double de Molière. Dans un autre article intitulé Rire et mélancolie du dernier Molière, l’éminent critique italien, s’appuyant sur le pamphlet de Le Boulanger de Chalussay, paru en 1670 sous le titre d’Elomire hypocondre prouve que Molière s’était enfin décidé à parler de lui dans son ultime pièce. Voici en effet ce que Chalussay écrit sur le ton ironique qui lui est habituel :

« Car il est constant que tous ces portraits qu’il a exposés en vue à toute la France, n’ayant pas eu une approbation générale(…) il a donc fait son portrait, cet illustre peintre, et il a même promis de l’exposer plusieurs fois en vue, et sur le même théâtre où il avait exposé les autres ; car il y a longtemps qu’il a dit en particulier et en public qu’il s’allait jouer lui-même et que ce serait là que l’on verrait un coup de maître de sa façon. »

S’il est certain que Chalussay confond à dessein la vie privée et la vie publique de son adversaire, il n’en est pas moins vrai que certaines paroles prononcées par Molière témoignent dans quel enfer domestique il vivait. Nous savons qu’il confia ainsi à son ami Rouhaut, avec fatigue et résignation : « Je suis le plus malheureux de tous les hommes(…) et je n’ai que ce que je mérite. »Grimarest rapporte9 également qu’au cours de la troisième représentation du Malade imaginaire Molière avait tenu à sa femme les propos suivants, en présence de Baron :

« Tant que ma vie a été mêlée également de douleur et de plaisir, je me suis cru heureux ; mais aujourd’hui que je suis accablé de peines, sans pouvoir compter sur aucun moment de satisfaction et de douceur, je vois bien qu’il me faut quitter la partie ; je ne puis plus tenir contre les douleurs et les déplaisirs qui ne me donnent pas un instant de relâche. »

Nous ignorons comment et à quel moment de sa vie Armande apprit la vérité au sujet de ses parents. Toutefois nous pouvons supposer quel drame ce fut pour elle de mettre des enfants au monde dans ces circonstances et comprenons mieux l’apparent désintérêt qu’elle montra à éduquer la seule fillette qui survécut. Cette dernière fut prénommée Esprit en hommage au comte de Modène et Madeleine comme sa grand-mère maternelle.

Dans l’un des écrits qui font partie du recueil intitulé Le Silence de Molière, Giovanni Macchia s’est plu à rédiger l’interview imaginaire de la fille d’Armande et de Molière. C’est précisément pour sa fille Esprit-Madeleine que le grand dramaturge avait composé le rôle « sur mesure » de Louison qu’elle ne voulut d’ailleurs jamais jouer.

9 G. Macchia, op. Cit., p. 91

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Tapisserie de Beauvais tissée en 1732, d’après un caton de Jean-Baptiste Oudry, représentant Louison et Argan

Esprit-Madeleine décida d’ailleurs de s’écarter pour toujours de ce milieu théâtral dans lequel baignaient tous les membres de sa famille. Ce refus catégorique est beaucoup plus compréhensible au regard des éléments que nous venons de soulever. Cependant le bouleversant « faux témoignage »rédigé par G. Macchia, tout en pudeur et retenue, loin d’éclaircir les choses, contribue au contraire à renforcer l’aura de mystère qui continue à entourer la vie de Molière, 350 ans plus tard.

S’inspirant des travaux du professeur Macchia, le metteur en scène Arthur Nauzyciel a associé en un même spectacle des passages de ce discours d’Esprit-Madeleine à des extraits du Malade imaginaire. En effet, non sans une certaine finesse, Arthur Nauzyciel a discerné dans la dernière pièce de Molière des éléments pouvant s’apparenter à des confessions secrètes de l’auteur, la faisant ainsi apparaître comme une véritable œuvre testamentaire.

CONCLUSION

Le Malade imaginaire est l’œuvre d’un homme malade, qui se sait condamné et essaie, dans un ultime sursaut, de repousser la mort qui l’attend en la conjurant au moyen d’un rire parfois grinçant. Cela n’est pas nouveau et a déjà été dit maintes fois. Mais la dernière pièce du dramaturge se fait aussi l’écho du climat familial détestable qui entoure les dernières années de l’auteur, en butte aux critiques de ses proches et aux pamphlets satiriques dont il ne connaît que trop les fondements. L’auteur du Malade imaginaire se sent atteint à la fois physiquement et moralement. Ne pouvant guère compter sur son entourage pour le soutenir, c’est sur la scène qu’il choisit de transposer ses malheurs, dans une comédie-ballet aux accents arcadiens.

BIOGRAPHIE

Michel Baron, de Young, Paris, 1905

Libelles et pamphlets contre Molière, de Van Vree, 1933

Vie de Molière de Grimarest, édition critique par Georges Mongrédien, 1955, réédité en 1973 aux Ed. Slatkine, Genève

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Vie de M. de Molière, Mikhaël Boulgakov, édition établie par Laure Troubetzkoy et Marianne Gourg, Ed. Robert Laffont, collection Bouquins, 1993

Le Silence de Molière, Giovanni Macchia, Ed. Desjonquères, janvier 2004

Image à trouver :- Frontispice de l’Elomire Hypocondre montrant Molière, un miroir à la main, imitant

les contorsions de son « maître » Scaramouche (Molière fut souvent accusé d’imiter le jeu de Scaramouche et de se faire le même visage que lui).