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University of Calgary Press Canadian Association of Latin American and Caribbean Studies LES ATTENTES DES PARTISANS DE L'UNITÉ POPULAIRE CHILIENNE: UNE VISION PROSPECTIVE ET RÉTROSPECTIVE, 1970-1989 Author(s): José del Pozo Source: Canadian Journal of Latin American and Caribbean Studies / Revue canadienne des études latino-américaines et caraïbes, Vol. 15, No. 30 (1990), pp. 265-322 Published by: University of Calgary Press on behalf of Canadian Association of Latin American and Caribbean Studies Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41799742 . Accessed: 12/06/2014 23:46 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . University of Calgary Press and Canadian Association of Latin American and Caribbean Studies are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Canadian Journal of Latin American and Caribbean Studies / Revue canadienne des études latino-américaines et caraïbes. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.44.77.191 on Thu, 12 Jun 2014 23:46:27 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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University of Calgary PressCanadian Association of Latin American and Caribbean Studies

LES ATTENTES DES PARTISANS DE L'UNITÉ POPULAIRE CHILIENNE: UNE VISION PROSPECTIVEET RÉTROSPECTIVE, 1970-1989Author(s): José del PozoSource: Canadian Journal of Latin American and Caribbean Studies / Revue canadienne desétudes latino-américaines et caraïbes, Vol. 15, No. 30 (1990), pp. 265-322Published by: University of Calgary Press on behalf of Canadian Association of Latin American andCaribbean StudiesStable URL: http://www.jstor.org/stable/41799742 .

Accessed: 12/06/2014 23:46

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Notes de recherche - Research Note

LES ATTENTES DES PARTISANS DE L'UNITÉ

POPULAIRE CHILIENNE: UNE VISION

PROSPECTIVE ET RÉTROSPECTIVE, 1970-1989

José del Pozo, Université du Québec à Montréal

Problématique, sources et méthodologie La victoire du candidat marxiste Salvador Allende lors de l'élection

présidentielle de 1970 au Chili créa une situation sans précèdent, qui donna lieu à toutes sortes d'interprétation. Le gouvernement chercherait-il à modifier les structures sociales et économiques du pays tout en respectant le système institutionnel, ou bien s'achemine- rait-il vers la destruction de ce système et son remplacement par un régime semblable à celui de Cuba? Dans la première des hypothèses, jusqu'où le nouveau président pensait-il aller: viserait-on esentielle- ment des modifications touchant à la fois les grandes entreprises étrangères et les firmes nationales? Dans les deux cas, l'Unité populaire disposait-elle de moyens suffisants pour mener à bien ses objectifs? Si on procédait à des changements modérés, pouvait-elle compter sur l'appui ou au moins sur la neutralité des forces qui ne faisaient pas partie du nouveau gouvernement, y compris les militaires? Si on choisissait le changement révolutionnaire, pouvait- elle faire face aux classes dominantes et aux forces armées?

Ces questions étaient débattues par les dirigeants des partis qui composaient l'Unité populaire. Elles l'étaient aussi par les militants de la base et par les simples supporteurs de la gauche, à l'intérieur des syndicats, des organisations des femmes ou des comités des quar- tiers. C'est ce dernier aspect qui constitue le sujet central de cet article. L'Unité populaire était un mouvement de masses et l'étude des opinion des militants de base peut constituer une contribution significative pour la compréhension de l'expérience du gouvernement Allende, particulièrment pour mieux saisir l'étape où celui-ci allait commencer sa présidence. L'analyse des opinions exprimées par ces mêmes personnes sur la situation actuelle du Chili permettra, dans la

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conclusion, de comparer l'évolution qui a pu avoir lieu entre ce qu'elles pensaient en 1970 et la fin des années 1980.

Pour ce faire, je procédérai dans ce texte à l'analyse des opinions exprimées par un groupe de Chiliens, pour la plupart établis au Cana- da1. Ces personnes apportèrent leurs témoignages dans le cadre d'une entrevue individuelle, semi-dirigée, dont la durée moyenne fut d'environ deux heures2. Le choix des informateurs se fit selon une méthodologie consistant à répérer des personnes pouvant illustrer certains types d'opinion, qui répondaient à cinq critères de base: a) le sexe; b) la tendance politique; c) l'occupation sur le marché du travail; d) le groupe d'âge; e) l'origine géographique3. Dans l'ensemble, le principe-guide dans le choix des informateurs ne fut pas de nature quantitative, mais bien qualitative . Pour le chercheur, l'essentiel n'était pas d'atteindre un nombre déterminé de personnes, mais bien de trouver des témoignages suffisamment clairs pour comprendre les diverses positions de l'ensemble des supporteurs de l'Unité populaire. L'analyse de ces récits se fit selon la technique des "récits croisés"4.

Ce texte constitue avant tout une étude exploratoire. Elle devrait être complétée par d'autres recherches, qui permettraient d'arriver à des conclusions plus définitives, surtout en ce qui a trait à l'opinion des Chiliens résidents dans leur pays de naissance sur la situation actuelle. Il faut aussi considérer que les personnes venues au Canada, qui ont fourni le grande majorité des témoignages, ne sont pas du même type que celles qui partirent vers d'autres pays, tel que l'Ar- gentine, par exemple5. Ainsi, l'objectif de ce texte est d'identifier des tendances et de contribuer à générer des hypothèses.

Pour l'analyse des opinions, j'ai eu recours à une méthodologie spécifique qui s'inspire en partie des idées proposées par Alain Touraine6. D'après cet auteur, si un mouvement social ou politique veut avoir du succès en Amérique latine, il doit tenir compte d'une triple orientation: a) les besoins de classe; b) la lutte contre la dépen- dance et c) l'intégration de la nation. Si par exemple un parti vise uni-

quement à défendre les intérêts de la classe ouvrière, en oubliant de se doter d'un projet de développement national et en omettant d'in- tégrer les secteurs marginalisés de la société, il ne pourra atteindre ses objectifs. Dans le cas du Chili, Touraine pense que ces trois dimensions étaient présentes dans le programme de l'Unité populaire en 1970, mais de façon inégale, puisque le courant de lutte antiimpé- rialiste (objectif b) était faible. Cette dernière remarque devait être confirmée par mon enquête.

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En me basant sur ces idées, j'ai formulé un cadre d'analyse quelque peu modifié, où les catégories d'analyse pour les revendications recueillies restent au nombre de trois, mais de la façon suivante:

a) Le groupe des "classistes", qui exprimaient esentiellement les espoirs d'une amélioration sociale : le droit au travail, à l'éducation, au logement, à la santé.

b) Les "développementistes", dont la préoccupation première était le progrès du pays sous l'angle économique : planifier la production, procéder à l'étatisation des entreprises privées jugées inefficaces, augmenter la richesse.

c) Les "politiques", ceux qui avaient des préoccupations visant avant tout la participation du peuple et la conquête du pouvoir .

Parallèlement, j'ai cherché à identifier les orientations tactiques de ces personnes, afin de savoir quels étaient les moyens avec lesquels ces différents objectifs pouvaient être atteints. Cet autre niveau d'analyse nous permettra d'établir le degré de radicalisation des personnes inter- viewées.

Les "Classistes": les aspirations reliées à l'amélioration du niveau de vie

Numériquement, ce groupe est le plus important. Il regroupe en effet plus de la moitié (soixante) des informateurs. Ces personnes étaient majoritairement d'origine modeste: des ouvriers urbains et agricoles, des employés non qualifiés, des étudiants qui provenaient de familles ouvrières, des menagères mariées à des travailleurs manuels et quelques commerçants indépendants. On y trouvait aussi un petit groupe appartenant à la classe moyenne professionnelle, dont le principal trait était que la plupart d'entre eux oeuvraient dans des milieux reliés à l'éducation et aux services sociaux, ce qui aide à comprendre leur convergence d'intérêts avec les réprésentants de la classe travailleuse. Au niveau politique, ce groupe était composé par des supporteurs de tous les partis, y compris deux du MIR. Cependant, la grande majorité était formée par des partisans du parti communiste et par des sans parti. Il y avait aussi un bon nombre de socialistes et la plupart des membres du parti radical qui participèrent dans cette enquête. Enfin, au niveau des groupes d'âge, on y trouvait de personnes de toutes les catégories, parmi elles un bon nombre de jeunes (les deux tiers du total) fait qui peut surprendre: habituellement, en effet, on attribue aux jeunes des opinions plus radicales que celles qui prédominent chez leurs aînés.

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Tableau 1. Données de base du groupe des "classistes"

Tend. politique Occupation Groupe d'âge (en 1970) P. Communiste 21 Professionnels 5 24 ans et moins 19 P. Socialiste 14 Cols-blancs 7 entre 25 et 34 ans 17 P. Radical 5 Trav.auton.urb. 5 entre 35 et 44 ans 15 P.Social-démocr. 0 Ouvriers ind. 17 45 ans et plus 9 MAPU 3 Ouvriers mineurs 3 Gauche chrét. 0 Ouvriers agricoles 4 MIR 2 Pet.propr. agrie. 2 Indépendants 15 Etudiants 6

Menagères 9 Autres(militaires) 2

Totaux 60 60 60

Les objectifs: l'égalité et la sécurité Ces deux derniers mots résument l'essentiel des revendications des

personnes de ce groupe, qui laissaient ainsi surgir directement leurs motivations, reliées en grande partie à leur condition de classe. Le premier exprime le projet d'accéder aux mêmes droits que les mieux nantis: à l'éducation, à la santé, au logement. Il est important de signaler que dans la formulation de ces attentes, la place des aspirations reliées spécifiquement à la condition féminine était minime, même dans les témoignages des femmes7.

Parmi ces revendications, le droit à l'éducation était perçu comme étant le plus important de tous, parce qu'il ouvrait directement la porte à la mobilité sociale que tous désiraient. Le témoignage de l'ou- vrier d'origine paysanne, Miguel8, du PC, résume bien la force de cette aspiration:

Mon plus fervent désir était en premier lieu que le gouvernement Allende pût sortir le peuple et mes frères de classe de la situation de misère et d'ignorance dans laquelle nous nous trouvions. Car en 1970, j'étais en train de briser les chaînes de l'ignorance, et je rêvais du moment où dans mon pays il y aurait partout des centres de travail, mais aussi des écoles et des centres d'art. Le Chili devait se remplir partout de livres , et une grande flamme devait s ' allumer pour illuminer toutes les consciences obscures qui n'étaient pas capables de comprendre beaucoup de choses. J'y croyais avec énormément de force La possibilité de posséder une maison constituait aussi une aspira-

tion très chère pour les personnes d'origine ouvrière, particulièrement pour ceux qui avaient grandi entassés dans des logements trop petits pour les familles nombreuses ou bien qui avaient vécu dans les bidon- villes qui entouraient les grands centres urbains. Ainsi pour Hernán, ouvrier dans les mines de charbon, les travailleurs avaient le droit de vivre "dans une maison et pas dans une ruca"9.

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La recherche de l'égalité allait de pair avec celle de la sécurité: c'était le désir de compter sur les moyens suffisants pour pouvoir nourrir et éduquer convenablement les enfants et non pas de vivre dans l'incertitude et l'angoisse que beaucoup de familles avaient con- nu. Tel avait été le cas de Mauro, ouvrier communiste, marqué par une enfance difficile, dont le cas avait été aggravé par le grand nombre de bouches que son père avait à nourrir:

Je m'attendais à ce que tous eussent les mêmes droits, à l'alimentation, au loge- ment, à la santé... Au moins pour avoir quelque chose, être assuré de manger à sa faim et de ne plus être condamné à la lutte de tous les jours pour pouvoir acheter de quoi manger pour les enfants. . . Nous étions douze frères et soeurs et je savais donc ce que c'était la misère. Je ne voulais pas que mes enfants eussent à subir le même sort, c'est pour cela que j'eus seulement deux enfants, je me suis moi-même mis au régime... Ainsi, le désir d'avoir "du travail assuré", "pour tout le monde" et

de plus, "avec une bonne paye" étaient des expressions qui revenaient fréquemment dans les témoignages. Elles reflètent l'insta- bilité dans laquelle les travailleurs se sentaient plongés, même si les années 1960 n'avaient pas été particulièrement difficiles en ce qui con- cerne le taux de chômage ou celui de l'inflation. A cet égard, les con- ditions de vie avaient été plus dures dans les décénnies précédantes10.

Cette revendication était aussi liée à la notion de justice : pour plu- sieurs, et pas seulement pour les personnes d'origine ouvrière, les moins bien nantis avaient un droit à l'amélioration dans leurs conditions de vie, parfois pour des raisons historiques. Parmi ceux qui pensaient de la sorte, il est intéressant de mentionner le cas de deux fonctionnaires publics, membres du parti radical, et bénéficiant d'un niveau de vie moyen mais qui étaient très sensibilisés à la cause des démunis. Ceci venait peut-être du fait que, de par les postes qu'ils détenaient et parce que tous les deux travaillaient dans de petites villes de province, ils connaissaient bien les gens ordinaires et étaient au courant de leurs problèmes. Pour Mario Rodríguez, la victoire d'Allende était une exigence de l'Histoire: il devait triompher et venir en aide aux paysans pauvres de la localité, dont les malheurs remon- taient à l'époque de la tuerie de Ranquil11.

La stratégie à utiliser: les moyens pacifiques Les membres de ce groupe faisaient preuve d'une remarquable

unanimité de vues lorsqu'il s'agissait de discuter des moyens pour obtenir les objectifs qu'ils poursuivaient. Ils faisaient tous confiance au recours à la voie institutionnelle, et rejetaient en général l'emploi de la violence. La plupart avaient une opinion bonne, parfois excel-

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lente, des forces armées. Très peu parmi eux croyaient, en effet, que celles-ci pussent constituer une menace pour le nouveau gouvernement.

Ceci reflète l'attitude de respect que ces gens montraient envers le système institutionnel chilien. Une telle attitude s'explique parce que, malgré les inégalités socio-économiques, pour la plupart de ces per- sonnes, la démocratie existait au Chili. Pour plusieurs, la preuve de ceci était "le fait qu'on avait pu élire le compañero Allende", comme le disait May, militante du MAPU et résidente dans un bidonville de Santiago. Cet argument était de poids :1e fonctionnement stable du système électoral, à l'intérieur duquel presque tous avaient grandi, semblait constituer un fondement inébranlable de la culture et de l'histoire chilienne, qui conférait à ce pays un trait unique dans l'Amérique latine de cette période.

Mais pour certains, la démocratie existait aussi au niveau social. Selon eux, le mérite en revenait au gouvernement de la Démocratie- chrétienne, qui avait mis en place un meilleur climat pour les organi- sations des travailleurs12. D'après Ramón, ouvrier socialiste, sous Frei "il y eut davantage de liberté pour les activités syndicales". Et ce sen- timent était encore plus évident chez les paysans, pour qui le déclen- chement de la réforme agraire avait constitué un tournant dans leur situation : pour l'inquilino 13 Arnaldo Vásquez, du PC, sous Frei les paysans "avaient gagné des droits jamais acquis auparavant"; pour Juan, du PS, ce gouvernement avait réalisé "une réforme agraire pro- gressiste, même si je m'apercevais que les démocrate-chrétiens faisaient partie des riches".

Cette dernière phrase nous permet d'introduire certaines nuances dans les jugements sur l'oeuvre du gouvernement Frei. Le point est important, car si plusieurs pensaient qu'il pouvait y avoir un certain lien de continuité entre la Démocratie-Chrétienne et l'Unité populaire14 il reste que d'autres hésitaient à se prononcer. Le témoignage d'Es- peranza, militante communiste et étudiante au lycée, résume bien cette attitude:

J'avais une bonne perception du gouvernement démocrate-chrétien, sur le plan de l'éducation. Je voyais que ce gouvernement faisait son possible pour que tous puissent aller à l'école et terminer leur secondaire. Ce fut très positif. Mais je m'apercevais aussi du sentiment anticommuniste qui prévalait chez les démo- crate-chrétiens, ce qui me faisait penser qu'ils étaient nos véritables ennemis. Je ressentai donc face à eux des sentiments contradictoires...

D'autres avaient une conception beaucoup plus critique quant à la nature de la démocratie chilienne. Pour Luis, ouvrier communiste, la démocratie chilienne en était une de nature bourgeoise, donc limitée.

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Elle n'était pas venue du ciel, mais avait été "le fruit des luttes des travailleurs, de Recabarren, de la CUT15". Cette attitude restait très minoritaire dans ce groupe.

Un élément d'une grande importance pour mesurer la foi des per- sonnes interviewées dans la démocratie chilienne était leur attitude à l'égard des Forces armées. A ce niveau, l'immense majorité avait une confiance quasi totale dans le comportement que les militaires auraient face au nouveau gouvernement: on les voyait comme des patriotes et des hommes respectueux de la loi.

Cette très bonne image avait des racines anciennes, surtout chez les plus âgés, comme dans le cas d'Enrique Valenzuela et de Kilade, mili- tants du parti radical, nés au début du XXe siècle: tous les deux gar- daient vivant le souvenir de leurs parents, qui s'étaient battus dans la Guerre du Pacifique contre les Péruviens. Mais cette image se perpé- tuait aussi chez les plus jeunes et particulièrement chez les simples travailleurs à la campagne . Selon Arnaldo Vásquez, "écouter la des- cription du défilé des troupes à la radio lors du 19 septembre16 consti- tuait pour nous une habitude sacrée".

En fait, les réserves que les personnes de ce groupe avaient face aux hommes armés se manifestaient plutôt à l'endroit des carabineros , c'est-à-dire de la police, parce que ceux-ci incarnaient la répression dans les bidonvilles ou dans les régions rurales. Certains militants s'apercevaient que la société de classes se manifestait aussi chez les militaires. Pour l'ouvrier communiste Miguel il était clair que "la classe ouvrière n'avait jamais pu accèder aux postes de commandement dans l'armée". Il constatait que les généraux et les amiraux provenaient majoritairement de la bourgeoisie, ce qui pouvait constituer une menace pour le gouvernement Allende. Mais "avec l'appui du peuple et une direction intelligente de la part de nos leaders, nous pensions naïvement que s'il y avait un danger à l'inté- rieur des forces armées il y aurait aussi une force capable d'arrêter le secteur réactionnaire." Cette analyse de classe, appliquée de façon très mécanique, servait aussi à tirer des conclusions très optimistes, comme celles de Gregorio, ouvrier sans parti: son raisonnement con- sistait à penser que "si les soldats étaient des fils du peuple, ils seraient avec le gouvernement populaire le jour où celui-ci en aurait besoin".

Le corollaire de ces arguments était de refuser toute possibilité d'envisager la voie armée au Chili. Cette conclusion revêtait une importance particulière, puisque la quasi totalité des personnes mani-

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festaient leur admiration et leur adhésion aux acquis de la révolution cubaine, tout en se refusant d'admettre que la stratégie employée pour conquérir le pouvoir dans ce pays pût s'appliquer au Chili17.

Les "développementistes": les attentes fondées sur la croissance économique

Dans cette section il sera question de ceux qui pensaient que l'objectif principal du nouveau gouvernement était d'organiser l'éco- nomie sur des bases plus rationnelles, afin d'obtenir le degré d'effica- cité que le capitalisme local n'avait jamais atteint et ainsi rompre avec la dépendance.

Ce groupe était le plus réduit du point de vue du nombre: quinze personnes, dont toutes, sauf deux étaient des professionels et des techniciens. Politiquement, leur orientation était semblable à celle du groupe des "classistes": encore une fois, on y trouve une prédomi- nance de communistes et de sans parti, les supporteurs du MIR demeurant absents. Cependant, sur le plan générationnel, il y a quel- ques différences: contrairement au groupe précédent, composé par des gens de tous les âges, ici l'on remarque une nette majorité appar- tenant aux groupes 2 et 3, c'est-à-dire des jeunes adultes, qui avaient entre 30 et 40 ans en 1970.

Tableau 2. Données de base du groupe des "développementistes''

Tend. politique Occupation Groupe d'âge (en 1970) P. Communiste 4 Professionnels 13 24 ans et moins 1 P. Socialiste 2 Cols-blancs 2 entre 25 et 34 ans 7 P. Radical 2 entre 35 et 44 ans 3 P.Social-démocr. 1 Toutes les autres 0 45 ans et plus 4 MAPU 2 Gauche ehret. 0 MIR 0 Indépendants 4

Totaux 15 15 15

Les objectifs: les transformations au régime de

propriété et ses limites Pour ces personnes, les attentes principales se situaient au niveau

de la modification du système capitaliste qui prévalait au Chili. Dans ce sens, leurs conceptions suivaient fidèlement celles du programme de l'Unité populaire, qui portaient sur la nationalisations des

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richesses naturelles du pays, telles que le cuivre, et des principales entreprises monopolistiques.

Il importe de signaler aussitôt que pour ces professionels et techni- ciens cette politique avait des limites assez nettes, ce qui constituerait l'originalité du socialisme à la chilienne. A cet égard, le communiste Daniel Garcia rappelait la phrase de Salvador Allende, selon laquelle "notre socialisme ne serait pas du type russe ni cubain, mais bien à nous, comme nos empanadas et notre vin rouge". Dans cette optique, il affirmait que certains secteurs de l'entreprise privée, ceux qui n'étaient pas de nature monopolistique, "continueraient à exister pendant des années, peut-être pour toujours... le socialisme chilien en aurait besoin".

Cette approche s'appliquait au secteur agraire, avec cependant une certaine nuance. Si les grandes entreprises urbaines et minières devaient être étatisées à cause de leur nature et de leur importance pour l'économie du pays, le grand domaine agraire devait l'être à cause de son inefficacité. Gladys, du PC, résumait bien cette vision des choses: pour elle, la réforme agraire se justifiait parce que "les pro- priétaires fonciers travaillaient mal leurs terres et ils n'étaient même pas de véritables entrepreneurs capitalistes; ils laissaient beaucoup trop de terres sans les mettre en valeur"18. Comme dans le cas précé- dent, Gladys acceptait les limites de ce processus: les patrons dont les terres seraient expropriées pourraient conserver leur réserve de 80 hectares, tel que la loi le stipulait. A son avis, cette disposition, votée par le gouvernement Frei, était une "sage mesure".

D'autres envisageaient les transformations en mettant l'accent sur la productivité . Arturo, militant du MAPU, se référait à cet aspect dans les termes suivants:

Il me semblait que la création des richesses occupait une place trop restreinte dans nos discussions; Ton parlait beaucoup trop de distribuer des choses qui souvent n'existaient même pas. On parlait de justice et de donner aux gens ce à quoi ils avaient droit, mais je ne voyais nulle part où nous allions trouver ce que nous voulions leur donner C'est donc dire que pour certains, il était important d'identifier les

moyens avec lesquels on allait réaliser les transformations promises. Nationaliser les richesses principales était un pas, mais il fallait par la suite s'assurer que le rendement de ces entreprises sous la dirección de l'Etat fusse suffisant, sans quoi les promesses faites au peuple pourraient difficilement être respectées. Dans ce sens, les "dévelop- pementistes", contrairement aux "classistes" avaient une approche beaucoup plus graduelle des transformations à faire. A cet égard la démarcation entre les deux groupes était importante.

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Les moyens: des nouvelles fomulations pour les mêmes arguments en faveur de la "voie pacifique"

Pour ce groupe, la "voie institutionnelle" représentait aussi la stra- tégie à employer pour prendre le pouvoir et gouverner le pays. Le seul changement par rapport au groupe précédent se trouve au niveau du raisonnement employé pour défendre cette option. Prove- nant de personnes plus scolarisées, il était normal de retrouver une analyse plus raffinée. Mais les arguments principaux demeuraient les mêmes.

L'existence de la démocratie au Chili constituait aussi pour ces per- sonnes un élément décisif dans leur choix stratégique. L'une des argumentations les plus élaborées à ce sujet était celle de Victor

Araya, sans-parti en 1970, ancien membre du PC, qui avait quitté cette formation plusieurs années auparavant. Pour lui, la démocratie existait au Chili depuis les années 1920 à partir du moment où les sec- teurs moyens avaient fait irruption sur la scène politique, ce qui avait amené la bourgeoisie à diriger le pays de façon "respectable", avec une gestion "moderne" de l'Etat. Cette tendance avait abouti, sous le

gouvernement Frei, à la utilisation de la notion de planification que la Démocratie-chrétienne avait appliquée de façon "honnête". Ceci avait crée au Chili, selon lui un contexte de "rationnalité" unique en

Amérique latine, grâce à quoi l'Unité populaire pouvait espérer que ses adversaires agiraient de façon démocratique:

Je savais que la droite allait s'opposer au gouvernement Allende, mais par défor- mation intellectuelle je croyais que ces gens utiliseraient les mêmes mécanismes dont nous nous étions servis alors que c' étais nous qui étions dans l'opposition . . . J'avoue que c'était là une position réformiste de ma part... je pensais qu'il serait possible de maintenir un dialogue entre les deux parties, sans se tirer de pierres ou des balles

Par rapport aux Forces armées, on trouve à nouveau des

témoignages qui laissaient entendre qu'elles pourraient collaborer avec le nouveau gouvernement. Alfonso, militant du MAPU, pensait qu'"il n'y avait aucune raison de regarder les militaires comme une force répressive, et il ne fallait pas non plus les considérer comme des

agents au service de la classe dominante", parce que, selon lui, "la droite les méprisait

" au niveau social et intellectuel. De plus, les mili- taires étaient plus proches de la gauche que de la droite, du point de vue social. L'existence au Pérou du régime dirigé par Velasco Alvarado dans ces mêmes années19 constituait pour lui la preuve du fait que les militaires pouvaient constituer une force progressiste.

Il est vrai que certains dans ce groupe faisaient preuve d'une certaine méfiance; Antonio, du parti radical, considérait que les mili-

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taires constituaient un secteur "en marge de la société, renfermés sur eux-mêmes"; Camilo Jordán, vieux militant socialiste, se rappellait des interventions militaires qu'il avait vécues dans sa jeunesse: la dic- tature du général Ibáñez à la fin des années 1920 et la tentative de coup d'état du général Herrera en 1939; de plus, il n'oubliait pas l'in- cident provoqué par le général Viaux contre Frei en 196920. Mais ces souvenirs n'arrivaient pas à susciter chez lui la crainte d'une intervention contre Allende. En 1970, se rappele-t-il, "je ne me suis pas posé cette question" . De cette façon, l'ensemble des "dévéloppementis- tes" gardait la même attitude optimiste que celle des "classistes": Allende pourrait gouverner le pays et mettre en application le programme annoncé sans dévier de la route empruntée et qui s'était averée la voie juste jusque-là.

Les "politiques": ceux qui pensaient à la conquête du pouvoir et qui envisageaient la possibilité d'un affrontement

Ce troisième groupe réprésente un courant bien différent de ceux que l'on a analysé jusqu'à présent. La préoccupation majeure de ses membres était celle de renforcer le pouvoir que l'Unité populaire venait de gagner, et ils envisagaient la possibilité d'une lutte frontale avec les adversaires du nouveau gouvernement. Ceci les amenait aussi à favoriser une stratégie qui ne suivait pas exactement celle qui était proclamée par Allende; dans certains cas, le choix favorisé était exactement le contraire.

Tableu 3. Données de base du groupe des "politiciens"

Tend. politique Occupation Groupe d'âge (en 1970) P. Communiste 5 Professionnels 6 24 ans et moins 7 P. Socialiste 8 Cols-blancs* 5 entre 25 et 34 ans 10 P. Radical 0 Trav.auton. urbains 3 entre 35 et 44 ans 7 P.Social-démocr. 0 Ouvriers ind. 4 45 ans et plus 1 MAPU 4 Ouvriers mineurs 0 Gauche chrét. 2 Ouvriers agrie. 1 MIR 5 Pet. propr. agrie. 0 Indépendants 1 Etudiants 4

Menagères 1 Autres (curés) 1

Totaux 25 25 25 * dont un était chômeur en 1970, le seul parmi tous les interviewés

Ce groupe est plus nombreux que le deuxième: il était composé par 25 personnes. Politiquement, le parti socialiste avait la plus forte

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réprésentation, et il était suivi de près par les militants du MIR. Il y avait aussi quelques membres du PC, du MAPU et de la Gauche chré- tienne. Par contre, il n'y avait pas de militants du PR et l'on y trouvait à peine une seule personne parmi les sans parti. Au niveau social, toutes les catégories selon leur occupation y faisaient partie, quoique la prédominance des personnes plus scolarisées par rapport aux sim-

ples travailleurs est un aspect à souligner. Enfin, au niveau des

groupes d'âge, il y avait surtout des personnes appartenant aux trois

premières générations; les personnes plus âgées (45 ans et plus en 1970) comptaient un seul réprésentant. Ainsi, on voit que les gens qui, de par leur âge ou leur activité -une seule menagère apparaît dans ce groupe- participaient de tendances plus conservatrices, ne font qu'une apparition marginale ici. Ce raisonnement s'applique dans une certaine mesure aux tendances politiques. Ce point sera éla- boré davantage plus loin.

Les objectifs: les transformations profondes du système de

production et la participation populaire Ces personnes visaient deux objectifs spécifiques. Le premier

d'entre eux, la transformation du système capitaliste de production était proche de celui du groupe précédent. Mais la manière dont ils formulaient cette attente était beaucoup plus radicale et elle

comportait la volonté plus ou moins avouée d'en finir avec Y ensemble du système capitaliste. Le second était de faire participer activement les masses dans les instances décisionnelles, ce qui impliquait la nécessité de modifier la structure institutionnelle du pays. Ce dernier élément était tout à fait nouveau par rapport aux groupes précédents.

Le secteur agraire et celui des poblaciones , les quartiers pauvres de

Santiago, étaient des lieux propices pour le développement de ces attitudes. A la campagne, les techniciens chargés d'appliquer la réforme agraire, étaient souvent portés à exiger un processus rapide et global de la part du nouveau gouvernement. Ruperto et Patricio, deux militants du MAPU, illustrent cette attitude; tous les deux exi-

gaient que la totalité des domaines dépassant la limite légale de 80 hectares de surface fusse expropriée; le premier ajoutait que "toute la terre devait passer aux mains de l'Etat"; et le deuxième disait que "il fallait agir vite dès le départ; pendant les deux premières années nous devions porter des coups décisifs ". Et l'ouvrier d'origine paysanne, Antonio Sánchez, qui avait passé toute sa jeunesse à la campagne, déclare qu'il ne croyait pas que les transformations annoncées par le

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nouveau gouvernement pussent se faire de façon pacifique, parce que "je me souvenais que les propriétaires fonciers étaient des personnages très puissants et je savais qu'ils ne permettraient pas de se laisser dépouiller sans rien faire". A Santiago, l'ouvrier socialiste Afuerino, dont le travail politique se déroulait dans une bidonville de la périphérie, s'exprimait dans des termes semblables. Son témoignage apporte aussi une dimension nationaliste à ses revendica- tions:

Je pensais que le capitalisme devait être déraciné complètement du pays, afin que nous puissions récupérer notre identité, notre honneur national. Nos relations internationales devaient se développer avec les pays socialistes et avec d'autres pays, d'égal à égal...21 Une autre manifestation de la volonté de procéder à des

changements profonds était celle qui visait la transformation du sys- tème d'éducation, perçu comme la base des inégalités sociales. Telle était la position d'Ernesto, prêtre supporteur du MIR, pour qui "il fal- lait passer du système élitiste que nous avions connu et qui favorisait les riches à un autre axé sur l'éducation populaire". Cette attente était d'une extrême importance: avec elle, on touchait à un point très sen- sible du système institutionnel et idéologique dominant au Chili22.

Le deuxième élément, celui de la participation, comportait aussi une signification importante. Dans les autres groupes, particulièrement chez les "classistes" lorsque des individus exprimaient leurs aspira- tions de justice, ils semblaient être en attente d'une décision qui devait venir d'en haut, en laissant l'initiative au gouvernement. Ici, c'est plutôt la capacité des travailleurs eux-mêmes de faire valoir leurs droits qui est mise en valeur. Il est intéressant de constater que l'un des témoins qui exprimait le mieux cette attitude était une personne qui, comme dans les deux cas cités plus haut, s'était radicalisée à tra- vers le contact avec les dures conditions de vie des travailleurs agrico- les. Il s'agit de Libertad, ménagère, devenue militante de la Gauche chrétienne au début 1971:

Pour moi, socialisme signifiait faire changer les structures de la société, des chan- gements qui permettraient la participation de cette classe travailleuse exploitée, marginalisée. Avec le socialisme ils auraient une place dans la société, ils seraient les maîtres de leur propre destin Cette approche suscitait chez d'autres l'idée de changer le système

institutionnel. Aída Valencia, militante communiste, envisageait des réformes: au lieu du parlement traditionnel, avec deux chambres, elle proposait "un congrès unicameral, avec la participation des syndicats, des travailleurs, des peuples indigènes et avec droit de vote pour les soldats et les sous-officiers"23. De plus, elle voulait

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réformer le Pouvoir judiciaire "en créant des Tribunaux populaires avec des pouvoirs limités, afin de rendre plus expéditif l'administration de la justice, qui était très lente; de plus ceci consti- tuerait une forme de participation populaire".

C'était déjà un pas audacieux. D'autres voulaient aller encore plus loin, en ouvrant la porte à un pouvoir populaire qui serait exercé de façon directe. Ceci faisait partie du programme du MIR, mais l'idée était aussi partagée par des membres du parti socialiste. L'un d'eux, Gerardo, employé dans la fonction publique, l'envisageait ainsi:

Je voulais éliminer le système institutionnel, y compris les institutions traditionnelles... Je cherchais une formule de pouvoir direct, un système qui aurait donné le pouvoir aux organisations populaires, dans les municipalités et dans lequel les travailleurs auraient eu le contrôle de la production... Pour plusieurs, la portée et l'ampleur des changements proposés se

résumaient à la phrase de Valentina, étudiante et membre du PS: pour elle, il s'agissait d'établir "un modèle de socialisme total en suivant le modèle cubain... en dernière analyse, je m'attendais à ce que l'on arrive au parti unique de la révolution"24.

La stratégie: le vote et le fusil?

L'analyse stratégique se revèle plus complexe ici. La concordance entre les attentes mises de l'avant et les moyens proposés pour les concrétiser n'est pas toujours évidente. En effet, comme on l'a vu, plusieurs exprimaient des attentes qui à la longue pouvaient entraîner une possibilité certaine de rupture avec l'ordre institutionnel. Mais ces mêmes personnes n'envisagaeient pas toujours la nécessité de se doter d'une stratégie pour faire face à cette éventualité. D'autres, par contre, se posaient cette question et affirmaient leur sympathie plus ou moins ouverte envers la voie armée. L'influence de la révolution cubaine se faisait sentir ici à des degrés divers, donnant lieu à des interprétations différentes. Elle permit de départager les deux

positions prédominantes. Ce qu'il y a en commun à la grande majorité des personnes de ce

groupe c'est l'admiration envers les acquis de Cuba depuis sa révolu- tion. Pour certains, cependant, la stratégie utilisée par les Cubains pour conquérir le pouvoir n'était pas applicable au Chili. L'argument le plus fréquemment cité à cet égard était celui de Marcos, commerçant et militant communiste: il voyait le Chili comme un pays "différent", qui était en train d'appliquer correctement sa propre voie vers la conquête du pouvoir. Ainsi, même si l'on pouvait être d'accord avec la stratégie cubaine sur un plan théorique, il croyait que

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celle-ci ne pouvait pas être essayée au Chili, parce que "le Chili n'était pas preparé pour ce genre d'expérience". La conscience politi- que de la masse n'était pas assez mûre, selon lui; mais il déclara en même temps qu'il ne se demandait pas, à l'époque, si son parti et la gauche étaient en train de "préparer" suffisamment le pays pour un éventuel recours à cette option25.

La prise de position en faveur d'une stratégie qui s'éloignait de celle de l'Unité populaire reposait sur plusieurs arguments. Le premier d'entre eux était le sentiment de désillusion envers les possi- bilités de la gauche d'accéder au pouvoir un jour à travers les élections. Ce facteur se fit sentir chez les militants d'un certain âge qui avaient vécu les défaites d'Allende lors des élections présidentielles de 1952, 1958 et 1964. Cette dernière avait été particulièrement mal reçue par ces personnes, qui avaient alors commencé à penser à la voie armée utilisée à Cuba. Un deuxième facteur de rejet de la voie institutionnelle provenait de l'animosité que plusieurs avaient ressentie à l'endroit du gouvernement démocrate-chrétien. En partie, cette attitude venait du fait que la D-C était une force qui rivalisait avec la gauche au niveau des masses, ce qui n'était pas du tout prisé par certains. Le socialiste Gerardo exprime cette attitude:

J'étais parmi ceux qui soutenaient qu'il fallait mener une dure bataille contre la D-C au niveau idéologique, parce qu'elle était un parti de la bourgeoisie, mais qui réussissait à gagner l'appui de pas mal de paysans, d'ouvriers et de pobladores. Je pensais qu'il fallait démasquer les agissements trompeurs de la D- C, en dénonçant Frei comme un traître à la cause du peuple26 Le troisième et probablement le plus important parmi les éléments

de critique de la voie institutionnelle était la question des militaires, qui était perçue ici d'une manière bien différente de celle qu'on a vue plus haut. Sur le plan théorique, cette position se fondait sur la lecture de "L'Etat et la révolution", et inspirait la réflexion du militant socialiste Juan Rojas, professione!, pour qui la conclusion était nette: "en autant qu'il y eût un état bourgeois et une armée bourgeoise il n'y aurait aucune chance de faire la révolution". Et sur le plan de l'expérience historique, quelques-uns, comme l'étudiant León, du MIR, tenaient compte du coup d'état militaire contre le pré- sident Goulart au Brésil en 1964 pour arriver à la conclusion qu'il n'y avait aucune raison de penser que la même chose ne se produirait au Chili contre Allende.

Ainsi, pour une majorité de ce groupe, l'Unité populaire devait se preparer à défendre sa victoire, même par la force. Cependant, cette option s'exprimait à travers de plusieurs nuances. Pour certains le

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danger d'une intervention des militaires contre le gouvernement exis- tait, mais ce n'était pas quelque chose qui devait forcément se produire. Dans cette perspective, on pensait qu'un travail à moyen ou même à long terme était possible, et que la stratégie correcte était celle d'éviter une confrontation car les Forces armées étaient trop fortes pour risquer une lutte ouverte. Une telle lutte ne serait possible qu'"en rapprochant les Forces armées du gouvernement et du peuple et en élargissant la base sociale et politique du gouvernement". Telle était la position de la communiste Aida Valencia.

Une attitude un peu différente était celle de certains socialistes et du MIR. Pour eux, la confrontation avec l'opposition et les militaires était inévitable . Dans ce sens, la voie électorale n'avait fait que retarder l'écheance de la lutte qui devait avoir lieu et il fallait se préparer très rapidement, dès le début, à cette éventualité. Mais à l'intérieur de cette position il y avait deux options: la plus radicale était répresentée par le socialiste Gerardo, lequel proposait "la préparation d'une insurrection populaire générale", ce qui équivalait à prendre l'initiative devant les militaires. Par contre, l'étudiant León, du MIR, pensait qu'il fallait "joindre les forces du MIR et celles de l'Unité populaire" afin de " dissuader l'ennemi ou au moins réunir suffisamment des forces pour venir à bout de l'Armée"; dans son schéma, il prévoyait la possibilité d 'inßtrer les Forces armées, ce qui ne figurait pas dans les options précédentes. Cette deuxième alternative comportait un travail à plus long terme et elle incluait la possibilité d'éviter la lutte armée27.

Les membres de ce groupe se trouvaient devant le difficile choix de coordonner la lutte menée au niveau électoral avec une autre qui devrait selon plusieurs, se livrer au niveau armé. Concilier les deux

équivalait à se servir "du vote et du fusil", selon le titre évocateur d'un polémique film chilien qui avait pris l'affiche peu après la victoire ď Allende28.

Les attentes d'aujourd'hui Avant de procéder à analyser les idées recueillies dans cette section

il est utile de commenter brièvement la situation actuelle des interviewés. Il est évident que les personnes changent avec les années et pas seulement en fonction de l'âge. Ce dernier n'est de toute façon pas un facteur très important puisque la majorité des personnes étaient assez jeunes en 1970; comme on le voit, le nombre de retraités en 1988-1989 n'est pas très grand. Il en va autrement au niveau de

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l'occupation et des tendences politiques, comme il est facile de cons- tater à l'aide des tableaux 4 et 5.

Tableau 4. Evolution générale des tendances politiques

Tendance En 1970 En 1988-1989 Parti communiste (PC) 30 23 Parti socialiste (PS) 24 13 Parti radical (PR) 7 6 Parti social-démocrate 1 1 MAPU* 9 1 Gauche chrétienne* *(IC) 2 1 MIR*** 7 2 Sans parti 20 53 Total 100 100 * un des militants de ce parti y adhéra en 1971, après avoir appuyé à la Démocratie-

chrétienne (D-C) lors de l'élection présidentielle de 1970

** ce parti fut crée en 1971; les deux personnes qui figurent ici étaient des anciens supporteurs de la Démocratie-chrétienne, comme dans le cas précédant.

*** ce parti, la gauche révolutionnaire fut consideré dans cette étude même si il ne faisait pas partie de l'Unité populaire

Tableau 5. Evolution générale des occupations

Occupation En 1970 En 1988-1989 Professionnels et techniciens 23 23 Employés sans qualification 14 19 Travailleurs autonomes (urbains) 8 14 Ouvriers d'industrie 21 19 Ouvriers dans les mines 3 1 Ouvriers agricoles 5 2 Agriculteurs indépendants 2 0 Sous-officiers des forces armées 2 0 Prêtres 1 0 Etudiants 10 2 Menagères 10 6 Chômeurs ou vivant du BS 1 7 A la retraite 0 7 Total 100 100

Par rapport à l'activité de chacun, certaines catégories ont pris plus d'importance par rapport à 1970. Tel est le cas des travailleurs autono- mes urbains, des gens à la retraite et des gens en chômage ou vivant du bien-être social. D'autres ont vu leur nombre diminuer, comme dans le cas des menagères, des étudiants et des ouvriers agricoles. Ce

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qui importe de souligner cependant, c'est que d'une manière générale les gens n'ont pas beaucoup changé depuis 1970. La plupart continuent à oeuvrer dans les mêmes champs d'activité, que ce soit au Canada ou au Chili. Cependant, il y a des différences dans les niveaux de vie: tandis que les personnes interviewées au Canada se portaient bien ou assez bien du point de vue matériel, celles rencon- trées au Chili se trouvaient dans une situation plus précaire.

La modification la plus importante toutefois est celle qui a eu lieu au niveau politique, et qui a touché toutes les personnes, que ce soit celles rencontrées au Canada ou au Chili: c'est la baisse très marquée du militantisme 29 et l'augmentation très forte du groupe des sans parti, aujourd'hui majoritaires. Ce phénomène est explicable, que ce soit à cause de l'éloignement géographique du pays ou de la répression exercée par la dictature. De tous les facteurs de changement, c'est sans doute celui qui peut avoir influencé le plus les réponses sur les attentes d'aujourd'hui.

La méthodologie utilisée dans cette dernière section consista à véri- fier si les attentes de 1970 étaient encore valables ou bien si elles avaient été modifiées suite aux nouveaux facteurs apparus depuis 1973. Ces trois facteurs sont: l'expérience de la vie au Canada, l'influence des événements internationaux et enfin, la perception du régime mili- taire de Pinochet 30 . Les gens étaient invités à s'exprimer sur ces trois aspects et ensuite à faire connaître leurs attentes par rapport à un éventuel changement de régime au Chili. Mais un éclaircissement s'impose ici: il faut comprendre que le contenu des "attentes d'au- jourd'hui" ne pouvait pas être exprimé de la même façon que lorsque les gens parlaient sur ce qu'ils pensaient en 1970, et ce pour deux rai- sons. La première relève des aléas de l'enquête: les personnes ayant été interviewées pendant un laps de temps assez long -de janvier 1988 à novembre 1989 - ne pouvaient évidemment pas répondre de façon homogène à cette question, vu que le contexte politique du Chili avait

beaucoup évolué entre ces deux dates 31 . La deuxième est d'ordre

conjoncturel: compte tenu que la gauche d'aujourd'hui se trouve dans une position plus faible que celle de 1970, ses supporteurs don- naient des réponses très générales lorsqu'il était question de définir leurs attentes: la plupart du temps, ils se bornaient à exprimer le désir de rétablir la démocratie. De cette façon, l'analyse qui suit porte davantage sur la fidélité à certaines principes généraux que sur l'expres- sion de mesures concrètes. Pour cette même raison, il ne sera pas possible de donner des chiffres précis pour chaque groupe.

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Les orthodoxes: ceux qui gardent les attentes de 1970

Un premier groupe a gardé avec peu ou pas de révisions les mêmes attentes que celles que l'Unité populaire avait en 1970. La grande majorité de ceux (peut-être un tiers du total) qui se retrouvent ici faisaient partie des "classistes", particulièrement les ouvriers. Ils se déclarèrent peu ou pas du tout influencées par les changements opérés au Chili ou dans le monde depuis 1973.

En ce qui a trait à l'influence de la vie au Canada, un élément res- sortait de façon nette: le sentiment de se retrouver dans un pays qu'ils n'avaient pas choisi volontairement , mais auquel ils étaient arrivés par la force des circonstances. Dans ce sens, leur réaction ne peut pas être interpretée comme celle d'un groupe d'immigrants, mais comme celle de réfugiés , ce qui a été bien expliqué dans l'étude de Llambias 32. Le fait que le Canada ait été perçu comme un pays capitaliste, sembla- ble aux Etats-Unis était déterminant: pour plusieurs, le nouveau pays apparaissait comme un milieu hostil, face auquel il fallait rester sur sa défensive, sans faire de concessions idéologiques.

Les critiques visaient les différentes composantes de la société capi- taliste. Au chapitre des conditions matérielles de vie, même en admettant les bénéfices d'institutions telles que l' assurance-maladie, on n'était pas prêt à dire que le Canada offrait les meilleures garanties aux travailleurs. Pamela, ouvrière communiste, dénonçait les bas salaires payés dans la manufacture où elle travaillait et le prix élevé des garderies pour ses enfants, en rappelant que "ici, ce service coûte très cher, tandis que dans les pays socialistes c'est gratuit . . .Je gagne $4,75 de l'heure et je dois payer $22 par jour pour la garderie de ma fille, alors je ne peux pas faire beaucoup d'économies...".

Plusieurs dénoncèrent l'ignorance des Canadiens et leur peu d'in- térêt pour s'impliquer dans les activités politiques. Selon Pablo, ouvrier communiste, à Montréal les gens s'intéressaient davantage à des spectacles comme le dynamitage de l'ancienne usine Miron qu'à la défense de la langue française 33 . Et de cela découlait un autre important reproche, celui qui visait les valeurs véhiculées par l'idéologie capitaliste dans la société canadienne, qui orientaient l'être humain vers la consommation et l'éloignaient de la famille. Pour beaucoup de gens, ceci créait chez eux le besoin de développer une stratégie défensive, afin d'empêcher que leurs enfants ne succombent à cette mentalité jugée perverse et ainsi préserver les autres valeurs: la simplicité et la solidarité, concepts-clés qui reprenaient le projet socialiste de 1970.

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Les seuls dans ce groupe à trouver des aspects favorables furent les femmes, qui ont apprécié aussi la plus grande liberté dont disposent les personnes de leur sexe. Laura, menagère au Chili, actuellement sur le marché du travail, était catégorique sur ce point: "pour moi, le fait de sortir du Chili m'a permis de rompre avec la tyrannie de la

famille . . . c'est pour cela que je ne pense pas que je reviendrais un jour là-bas, j'y perdrais la liberté que j'ai gagnée ici"

Au niveau de l'influence possible des événements en Europe de l'Est et dans les autres pays dits socialistes, les "classistes" eurent tendence à rester fermes dans leurs convictions politiques. Même en admettant l'existence de problèmes ou d'erreurs, la réaction la plus répandue fut celle de justifier ces situations. Dans cette optique, deux

arguments furent invoqués: celui de l'intervention étrangère et celui de la durée trop courte des expériences de la nouvelle société. Le pre- mier fut utilisé pour expliquer l'origine des problèmes en Pologne: l'ouvrière communiste Pamela dit que toutes les difficultés commen- cèrent dans ce pays avec les agissements du Pape Jean-Paul II, "qui se rendit là-bas pour enncourager "Solidarité" tandis que lorsque il alla au Nicaragua, il s'en prit aux curés qui sont en faveur du socialisme". Et le deuxième fut brandi par Sebastián, travailleur autonome, du MIR, pour expliquer l'affaire Ochoa à Cuba, "où la corruption existait avant la révolution, et cela n'est pas quelque chose qui va disparaître dans deux générations seulement". Toutes ces personnes déclarèrent ne pas avoir été affectées dans leurs idéaux politiques. Elles affirmèrent d'ailleurs être d'accord avec les réformes de Gorbatchev en URSS, avec qui "les problèmes vont être résolus".

Enfin, l'oeuvre des militaires au Chili ne suscita aucun changement véritable dans les opinions. Les progrès dans la production agricole et les exportations des fruits, évoqués souvent comme le meilleur acquis du modèle économique par les partisans du régime, furent dénoncés comme ayant été réussis à un coût social trop élevé. Pour le reste, tous soulignèrent, comme il fallait s'y attendre, les aspects répressifs du régime depuis 1973. En fait, les seuls côtés jugés favorables furent ceux qui étaient un résultat indirect du régime: "avoir appris à être

plus solidaires parmi les pauvres" comme le rappella Alicia, habitante d'un bidonville; ou bien "avoir appris à haïr l'ennemi... nous ne sommes plus aussi naïfs qu'en 1970", selon le témoignage d'Esperanza, militante du PC.

Ainsi, la tendance générale fut celle de se déclarer d'accord avec la

ligne centrale de leurs attentes de 1970. Ils le firent cependant avec

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prudence, en soulignant souvent les difficultés que la gauche devra vraisemblablement rencontrer au Chili pour réaliser son projet. L'une d'elles fut soulevée par Humberto, ouvrier ex-MAPU, qui se disait que, après tant d'années de dictature, beaucoup de gens ne seraient pas favorables à la gauche, car "la jeunesse d'aujourd'hui n'a pas vécu la période de 1970-1973 et beaucoup de ceux qui l'ont connu sont trop vieux". Et Enrique Valenzuela, travailleur autonome, appuyait le programme de 1970 à la baisse: d'après lui, postuler à nouveau la réforme agraire n'a plus sa raison d'être, puisque le latifundia n'existe plus aujourd'hui au Chili 34.

Les "critiques": les attentes de 1970 reformulées

Une deuxième attitude fut celle de continuer à se réclamer des reven- dications de 1970 mais en exprimant certaines critiques envers leur mise en application. La plupart des gens faisant partie de ce groupe provenaient des politiciens, mais on y trouve aussi un certain nombre des "classistes". En tout, c'est probablement l'attitude la plus répandue.

Au sujet de l'influence de vivre au Canada, ces personnes se décla- rèrent aussi peu impresionnés que les "orthodoxes". Ernesto, le prêtre du MIR (du groupe des "politiciens") s'insurgait contre les conditions de vie des milliers de personnes qui doivent vivre du Bien- être social, en affirmant que "la pauvreté qui se vit dans un pays d'abondance comme celui-ci est beaucoup plus inhumaine que celle qui existe au Chili".

Contrairement à la section précédente, les réactions face aux événe- ments internationaux constitua une source d'intenses réflexions sur le bien-fondé de l'idéologie socialiste. Les "critiques" reconnurent la gravité des faits qui se déroulaient en Chine, à Cuba ou en Europe de l'Est; cependant, ils déclarèrent garder leur conviction générale dans le projet socialiste. Par exemple, l'ouvrier, anciennement militant du MAPU Marcelino déclara que pour lui "la tuerie de la place Tiananmen en Chine est aussi inacceptable que celle que Pinochet a fait au Chili; cependant, il affirma aussitôt que

demander si ces événements me font douter dans mes idéaux socialistes c'est comme si on me demandait en tant que croyant si ma foi risque de disparaître à cause des erreurs que l'Eglise ait pu commetre. Ma foi ne dépend pas de l'Eglise, et mes convictions politiques ne dépendent pas d'un régime en particulier, que ce soit celui de la Chine ou de l'URSS "

Ce raisonnement revenait à dire que les erreurs seraient toujours possibles à cause du fait que le socialisme est l'oeuvre d'êtres humains, qui peuvent "se tromper".

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Parmi les révisions postulées, l'une qui entraîne une dose critique importante pour la gauche, c'est celle qui consistait à réclamer un plus fort degré de participation des gens de la base dans la formulation des programmes. Marina, ex communiste, aujourd'hui sans parti, se prononçait en faveur d'incorporer davantage les femmes et les marginaux urbains à la prise de décisions, "pour que ainsi la masse ne se retrouve pas coupée des dirigeants"35. Un son de cloche semblable, mais qui implique une certaine concession idéologi- que envers le capitalisme est celle exprimée par l'ouvrier Marcelino, qui a lui aussi abandonné toute militance partisane: en se référant au programme de nationalisation d'entreprises de 1970, il se déclarait favorable à son maintien, mais "en laissant de côté l'emprise des bureaucrates dans l'administration et en décidant les expropriations sur une base économique, en prenant en considération la réalité du marché" .

Quelques-uns à l'intérieur de ce groupe se démarquaient de l'en- semble des interviewés au niveau stratégique parce que ils étaient les seuls à concevoir la possibilité d'employer la voie armée pour imposer un jour le projet socialiste. La plupart d'entre eux étaient, bien sûr, les rares militants du MIR qui sont restés dans ce parti. Mais ils entre- voyaient ceci comme une tâche à long terme, bien conscients de la nécessité de regrouper leurs forces, décimées pendant la dictature.

Les "révisionnistes": ceux qui doutent de la validité du socialisme

Enfin, une dernière attitude fut celle de manifester un état de pro- fond criticisme face à la validité du projet de la gauche. Ce groupe est le moins important au niveau du nombre; sa composition est très variée, puisque on y trouve des "classistes", des "développementis- tes" et des "politiques". Tous ses membres sont aujourd'hui sans- parti; de plus, on y trouve ici seulement des personnes résidant au Canada et tous sauf un sont des professionnels36.

Deux tendances apparaissent dans ce groupe. La première -et la plus nombreuse- est composée par des personnes qui se trouvent dans une situation contradictoire: elles défendent les idées de la gauche dans la mesure où elles ne sont pas plus emballées que les autres de vivre au Canada et parce qu'elles rejettent l'ensemble de l'oeuvre de Pinochet au Chili; cependant, elles ont été tellement tou- chées par les faits internationaux qu'elles arrivent à douter du bien- fondé du projet socialiste. Pour Cecilia, ancienne supportrice du MIR, du groupe "politique", les événements en Chine lui faisaient dire

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que "aujourd'hui je ne crois pas en la polarisation entre le socialisme et le capitalisme"; et chez les "classistes" Rosa, sans-parti dans les deux époques, était rendue au point de se demander "où est-ce que le socialisme existe? Il n'y a que des régimes basés sur la force militaire dans les deux camps". Enfin, Juan Rojas, ancien "politique" s'expri- mait dans les termes suivants:

Avant, la réponse à tous les problèmes était simple: la révolution. A l'heure actuelle, Ton peut dire que la solution passe peut-être par là, mais il est clair que celle-ci ne suffit pas. Il y a un problème moral grave. Le capitalisme fonctionne bien parce que il se base sur les instincts les plus bas de l'être humain. Le socia- lisme tel que nous le voulons n'est pas compatible avec cette approche. Mais malheureusement, la nature humaine est ainsi faite, et construire "l'homme nou- veau" dont Guevara parlait, c'est bien plus difficile qu'on ne le croyait L'autre tendance à l'intérieur de ce groupe -répresentée par seule-

ment deux personnes- fut celle de se déclarer en faveur de projets de société qui ne trouvent plus leur source dans la gauche, mais qui s'inspirent des acquis démocratiques du capitalisme. Pour les person- nes dans cette attitude l'expérience de vie au Canada constituait le principal facteur; ils avaient trouvé que la société capitaliste tant decriée avait aussi ses mérites. L'un d'eux, Alfonso, professionnel, du groupe "développementiste" s'éloignait nettement du projet socialiste en disant envisager aujourd'hui un type de société "sociale- démocrate, avec alternance des partis au pouvoir, un peu comme au Canada...". De plus, il se disait bien impressionné par l'essor des exportations agricoles du Chili. Selon lui, ceci pouvait faire en sorte que le Chili devéloppât une économie capitaliste comparable à celles de Hong-Kong ou la Corée du Sud, et devenir un nouveau dragon du Pacifique; tout en reconnaissant que ces pays-là ne constituent pas un modèle de société juste, il pensait que ceci pouvait ouvrir la voie vers un certain progrès matériel.

Pour l'ouvrier Víctor Pérez, ancien militant du PC, ce qui compte, c'est que "le Canada nous a acueilli, mes enfants ont pu aller à l'Uni- versité... il y en a beaucoup qui dénoncent cette société mais souvent ces gens-là sont justement ceux qui en profitent le plus ici"; de plus, il disait que à son âge (50 ans au moment de l'entrevue) "ce n'est plus à moi d'aller faire la révolution; ce sera l'affaire d'une autre génération. Moi, j'ai déjà fait ma contribution"37.

Conclusion Cet article a permis de préciser, dans un premier temps, la grande

diversité des attentes de ceux et de celles qui avaient contribué à la victoire d'Allende. On retrouvait cette même situation, à un degré un

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peu moindre, au niveau des choix stratégiques mis de l'avant par les

personnes interviewées.

L'interprétation de cette problématique peut se faire à plusieurs niveaux. Celui qui permet d'en tirer les conclusions les plus directes, et qui apparaît comme le facteur le plus influent c'est celui basé sur la tendance politique des informateurs, selon le cadre proposé par Arturo Valenzuela38. D'après cet auteur, les divers partis de l'Unité

populaire avaient des positions très différenciées par rapport au

degré des transformations que l'on voulait implanter au Chili et au

degré du respect qu'ils ressentaient à l'endroit du système institutionnel du pays. Il classait le PR et l'aile de droite du PS dans le

camp des modérés; l'aile gauche du PS, un secteur du MAPU et le MIR dans celui des plus radicalisés; enfin le PC et l'autre fraction du MAPU se classaient dans une position intermédiaire. L'on peut ajouter que les sans-partis -dont Valenzuela ne parle pas- tendaient à suivre les positions du PR et/ou du PC, mais presque jamais celles du secteur radicalisé. Les témoignanges recueillis confirment le bien fondé de cette analyse; ils nous ont permis de constater des aspects dont on parle peu dans les analyses, comme par exemple l'image rela- tivement bonne du gouvernement démocrate-chrétien chez un bon nombre d'informateurs.

Au niveau social, l'analyse est plus complexe, puisqu'il n'y a pas un rapport très direct entre le type d'occupation et les attentes des

personnes. Le groupe des "développementistes" était le seul à avoir une composition sociale précise. "Classistes" et "politiciens" étaient très heterogènes à cet égard. Ceci veut dire que ce deuxième facteur n'a pas le même poids que le premier; il est dépendant de l'autre. Il est néanmoins intéressant de rappeller que le groupe des

"politiciens" était formé majoritairement par des gens scolarisés et

que les "classistes" comptaient beaaucoup d'ouvriers dans leurs rangs. Faute d'espace dans cet article il n'est pas possible de risquer des

commentaires sur le comportement de chacun des groupes selon leur

occupation39. Vue leur importance politique et idéologigue, la classe ouvrière mérite cependant quelques mots. A cet égard, mon étude contredit, du moins en partie, les affirmations de Peppe40. Cet auteur tirait des conclusions trop catégoriques sur le degré de radicalisation des travailleurs chiliens, en affirmant que "la stratégie basée sur l'action des syndicats peut coexister avec des objectifs révolution- naires". Comme il a été démontré, une telle conclusion est trop hâtive; le respect que beaucoup d'ouvriers (urbains et agricoles) inter-

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viewés montraient à l'égard des militaires et des institutions chiliennes prouve l'on peut douter de la volonté concrète, du moins en 1970, d'exiger la réalisation des modifications allant vers une rupture avec le capitalisme41. Et le degré de radicalisation apparaît aussi

grand, sinon davantage, chez les cols-blancs que chez les profession- nels ou les étudiants.

L'appartenence à un groupe d'âge determiné peut contribuer à éclaircir certaines tendences. Par exemple, beaucoup d'étudiants et de travailleurs avaient des attentes de type sociale et ne semblaient

pas se soucier des questions relatives au pouvoir et à la défense du gouvernement. Cette attitude peut s'expliquer par la jeunesse de ces

personnes, habituées à vivre à l'intérieur d'un système politique qui semblait très stable; ils pensaient spontanément que leurs adversaires politiques respecteraient les réalisations de l'Unité populaire. Par contre, ceux qui avaient vécu la répression de González Videla à la fin des années 1940, même si leur âge dépassait la quarantaine en 1970, démontraient un préoccupation plus marquée par les questions politi- ques et leur degré de radicalisation était un peu plus élevé42. Enfin, un autre critère d'analyse qui semble émerger, mais qui nécessitérait davantage de recherches, c'est celui de l'influence de la répartition socio-géographique: en effet, les cas de personnes d'origine urbaine

qui connurent de près la misère paysanne, en plus de quelques-uns des témoins de travailleurs ruraux -ou d'ouvriers d'origine paysanne- pourrait indiquer que ce facteur amenait un degré de radicalisation dans les attentes et dans la voie à suivre qui était, en moyenne, supé- rieur à celui des gens de la ville.

L'analyse des opinions exprimées en 1988-1989 vient confirmer la diversité des attentes de 1970. Ceci est compréhensible, puisque en plus des facteurs de divergence qui opéraient lors de l'élection d'Al- lende, d'autres éléments très influents étaient venus s'ajouter après 1973. Ainsi, si en 1970 la filiation partisane semblait être le facteur pri- mordial, dans la deuxième époque l'appartenence à une classe sociale spécifique joue un rôle plus déterminant: en effet, la plupart des orthodoxes sont membres de la classe ouvrière (urbaine ou agricole) tandis que les "critiques" et les "révisionnistes" se recrutent très majoritairement chez les professionnels. Le lieu de résidence est un fac- teur à considérer mais dont l'impact n'est pas facile à mesurer, vu que les informateurs interviewés au Chili appartenaient tous aux groupes les moins scolarisés. Même en laissant de côté les opinions des pro- fessionnels, on a trouvé certaines différences avec ceux qui restaient

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au Canada: les résidents au Chili continuaient à appuyer, en général, les mots d'ordre en faveur du socialisme, tandis que les résidents au Canada avaient des opinions beaucoup plus nuancées sur le sujet. Ces différences ont cependant des origines diverses: la position des uns s'explique par le rejet unanime de l'oeuvre des militaires; celle des autres, par l'impact des événements internationaux.

L'effet de cette évolution c'est que il y a eu des réaménagements individuels à l'intérieur des groupes; ainsi, il y a une correspondace partielle entre les groupes de 1970 et ceux de 1988-1989: si la plupart des "classistes" se regroupent aujourd'hui chez les "orthodoxes", quelques-uns sont allés rejoindre les "révisionnistes", par exemple.

A partir de cette nouvelle situation il est possible de penser que les partisans de la gauche chilienne devront faire face, du moins dans le court terme, à deux types de divisions internes: d'une part, celle for- mée entre les travailleurs manuels et les professionnels; de l'autre, celle créée entre les groupes ayant résidé à l'étranger43 et ceux qui res- tèrent au Chili. A plus long terme, l'on peut imaginer que le degré de militance dans les partis reprendra son rythme à mesure que la démo- cratie se rétablit et que les exilés rentrent au Chili. Vraisemblablement, les partis redeviendront le facteur principal dans les prises de position de chacun, comme en 1970. Mais il restera à voir si ces partis vont demeurer ce qu'ils étaient auparavant et si la gauche chilienne sera capable de maintenir un projet socialiste cohérent au milieu des pres- sions internationales qui, de toutes parts, remettent en question les postulats qui en 1970 semblaient solides.

NOTES

1. 80 des entrevues furent réalisées au Canada -la plupart au Québec- et 20 au Chili. Ces dernières incluèrent surtout des paysans, des habitants de bidonvilles et des travailleurs autonomes. 71 hommes et 29 femmes partici- pèrent à l'enquête.

2. Le thème de cet article touche à une partie seulement de l'entrevue; celle- ci incluait l'ensemble de l'expérience politique des personnes, depuis le moment où celles-ci étaient devenues de gauche jusqu'en 1973.

3. La recherche des personnes se fit par des divers réseaux d'information, les plus variés possibles quant à leur composition sociale et à leur tendance partisane. L'origine géographique des personnes ne fut pas considérée un facteur primordial dans l'analyse de cet article, car à l'époque c'était le pro- gramme national de l'Unité populaire qui prédominait. De toute façon, on réussit à ce niveau une distribution assez équitable des personnes: 9 venaient

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des provinces du nord, 10 de la région de Valparaíso, 43 de celle de Santiago, 14 de la région centrale, 18 de celle de Concepción, 5 de la région des lacs et une de l'extrême sud. Au niveau social, la principale lacune fut celle des ouvriers agricoles et des mineurs; quant aux partis politiques, ils sont tous bien réprésentés, sauf peut-être le parti radical. J'aurais souhaité interviewer un plus grand nombre de femmes; 29 personnes peut sembler peu, mais il faut considérer que les femmes étaient plus difficiles à réperer. Ceci reflète cependant ce qu'était leur degré de participation en 1970.

4. Jean Poirier, Les récits de vie . Théorie et pratique. Paris, PUF, Coll. Le Socio- logue n.52, 1983

5. L'immigration chilienne au Canada était, en moyenne, composée par des gens plus scolarisés; ceci était dû en partie aux mécanismes de sélection utili- séspar le Canada pour l'octroi de visa et aussi par le fait que partir vers l'Amé- rique du nord signifiait un dépaysement qui n'était pas à la portée de gens de la campagne ou de petites villes de province; ces derniers optèrent pour partir vers des pays comme l'Argentine, qui n'exigeait pas un passeport pour y être admis et où l'on parlait la même langue qu'au Chili.

6. Alain Touraine, Les sociétés dépendantes. Paris-Gembloux, Duculot, 1976. Voir spécialement les pages 253 et suivantes.

7. En 1970, manifestement, la femme était perçue (et elle même se voyait ainsi) en tant que mère. Les choses commencèrent à changer après 1973 seule- ment, en partie par l'influence qui venait de l'extérieur.

8. Tous les noms des interviewés ce sont des pseudonymes. Les soulignés sont de moi.

9. Le mot "ruca", d'origine indigène, est utilisé péjorativement pour désigner une demeure pauvre. A noter que le vocabulaire des gens de gauche n'était pas dépourvu d'un certain racisme inconscient.

10. Le taux d'inflation le plus élevé dans les années 1960 fut de 32%, en 1967; dans les années 1950, sous Ibáñez, il avait atteint 84% en 1955.

11. Tuerie de paysans dans le sud du pays, en juillet 1934

12. Alan Angelí, Partidos políticos y movimiento obrero en Chile, México, Edicio- nes Era, 1974, chapitre 8, offre un tableau plus critique. Peter Winn, Weavers of Revolution. The Yarur Workers and Chile's road to socialism, N.York, Oxford Uni- versity Press, 1986, offre un récit passionant sur les difficultés énormes que les travailleurs de cette usine textile rencontrèrent dans leur effort en vue d'organiser un syndicat liberé de l'influence de leurs patrons, particulièrement pendant les années 1960.

13. le mot "inquilino" désignait un travailleur rural qui vivait à l'intérieur d'un domaine et qui, en échange de sa main d'oeuvre, avait le droit de cultiver un lopin de terre et touchait un salaire.

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14. Deux personnes interviewées, toutes les deux professionnels sans parti déclarèrent avoir failli voter pour Tomic, le candidat de la D-C en 1970, qui était perçu comme un politicien progressiste; ils pensaient que ceci préparerait mieux le terrain pour Allende en 1976.

15. Luis E. Recabarren: leader historique ouvrier, fondateur du PC (1876-1924); CUT: Centrale Unique des Travailleurs, fondée en 1953.

16. Le 19 septembre est au Chili un jour ferié, consacré à honorer les Forces armées; il suit la fête de l'indépendance, le 18 septembre.

17. Sur ce point, le paysan socialiste, Juan sin Tierra, fut catégorique: il déclara ne pas avoir appuyé l'idée d'une voie armée " parce que je croyais fer- mement en la loyauté des Forces armées chiliennes"

18. Ce témoignage évoque le célèbre débat sur l'existence de la féodalité ou du capitalisme en A. Latine des années 1960; sur le Chili voir Cristóbal Kay, El sistema señorial europeo y la hacienda latinoamericana, México, Ediciones Era, 1980.

19. Juan Velasco Alvarado, le général qui gouverna le Pérou entre 1968-1975.

20. Roberto Viaux fut le général qui dirigea un mouvement contre le président Frei supposément pour des raisons "professionnelles"; en 1970, il participa au complot visant à empêcher la prise du pouvoir par Allende, et qui provoqua la mort du général Schneider, connu par sa loyauté à la Consti- tution

21. Les allusions au nationalisme furent en général rares et elles se retrou- vèrent la plupart du temps chez les socialistes. Ici, le facteur géographique peut se faire sentir: il y eut peu d'interviewés originaires du Grand nord, qui sont le plus sensibles au thème de l' anti-impérialisme, à cause de la domination historique du capital étranger sur les mines.

22. A propos du projet de réforme de l'éducation, qui incluait la nouvelle "école nationale unifiée" (ENU) et de son importance pour le gouvernement Allende, lire Joseph Farrell, The National Unified School in Allende' s Chile. The Role of the Education in the Destruction of a Revolution, Vancouver, U.of British Columbia Press-CERLAC, 1986.

23. Les sous-officiers et les soldats n'avaient pas le droit de vote, selon la Constitution de 1925; ceci a changé sous Pinochet.

24. Ceci est un exemple clair de la contradiction de plusieurs personnes, qui postulaient des changements radicaux en croyant en même temps que les militaires n'interviendraient pas en politique. Ils pensaient que la lutte se ferait uniquement entre civiles, au niveau des partis.

25. Ce témoin ajouta que à l'époque son attention était concentrée "sur la croissance de mon parti et de la gauche". On voit ici le poids exercé par les

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thèses sur la "voie légale" du PC. A cet effet, lire Luis Corvalán, Les commu- nistes dans la marche vers le socialisme , Paris, Eds. Sociales, 1972.

26. La dénonciation violente du régime Frei était basée aussi sur les sanglantes répressions de son gouvernement contre les grévistes de la mine de El Salvador (1966) et contre les sans-logis de Puerto Montt (1969).

27. C'est sans doute pour cette raison que le MIR cessa d'effectuer des actions armées qu'il avait mené sous Frei depuis l'élection d'Allende.

28. Film tourné par le réalisateur Hélvio Soto, et dont les personnages dis- cutaient des mérites de la "voie pacifique" et de la "voie armée"

29. Ce processus n'a pas affecté tous les partis de la même façon. Le PC a été le moins touché par les désertions, comme on le voit au tableau 4.

30. Evidemment, toutes les personnes ne pouvaient subir les mêmes influences; tout dépendait de leur lieu de résidence.

31. A cet égard, il suffit de penser à la signification du plébiscite du 5 octobre 1988, épisode qui fit changer beaucoup la perspective

32. Jaime Llambias, Notre exil pour parler: les Chiliens au Québec. Montréal, Fides, 1988

33. Ce témoignage fait référence à ce qui arriva à Montréal, en août 1988, où le même jour et à la même heure 50,000 personnes se rassemblèrent pour assister au dynamitage d'une ancienne usine (Miron) tandis que un défilé pour défendre le statut de la langue française au Québec attirait 25,000 seulement.

34. Ceci est un point discutable. En effet, sous Pinochet plusieurs lots de terre furent attribués à titre individuel à de petits paysans, les parceleros, mais un bon nombre d'entre eux, faute de capitaux, ont dû vendre leurs terres à de propriétaires plus riches, qui seraient en train de reconstituer les anciens latifundia ou d'en créer d'autres.

35. Le mot en espagnol pour désigner les sphères dirigeantes, cúpulas , a un sens très péjoratif.

36. Le fait que il n'y ait ici que des résidents au Canada s'explique peut-être parce que il n'y eut pas d'entrevues à des professionnels au Chili.

37. Cet argument, basé sur l'âge est rare; à peu près personne d'autre n'en parla dans ces termes, même chez des personnes plus âgées.

38. Arturo Valenzuela, The Breakdown of Democratic Regimes. Chile. Baltimore, The John Hopkins University Press, 1978

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39. Il faut souligner l'absence d'études théoriques ou empiriques sur le comportement politique des groupes tels que les employés non-qualifiés.

40. Patrick Peppe, "Parliamentary Socialism and Worker's Consciousness in Chile" in June Nash et alii: Ideology and Social Change in Latin America . New York, Gordon and Breach, 1977, p. 92-109.

41. Peppe admet cette possibilité, in loc. cit, p. 106

42. La répression anticommuniste de Gabriel González V.en 1948 suscita un courant en faveur de la lutte armée, dirigé par un certain Reinoso, plus tard expulsé du parti; lire sur cet épisode peu connu Carmelo Furei, The Chilean Communist Party and the Road to Socialism, London, Zed Books, 1984, chap. 3. L'étude de Maurice Zeitlin, "Political Generations in Cuba" in James Petras- Maurice Zeitlin (éds.) Latin America: Reform or Revolution?, Greenwich, Con- necticut, Fawcett Publications, 1968, p. 264-288, présente un phénomène sem- blable: étudiant le degré de radicalisation des ouvriers en fonction de leur âge, il découvrit que parmi les travailleurs les plus favorables à la révolution étaient ceux qui avaient vécu la lutte contre la dictature de Machado dans les années 1930.

43. Il faudrait examiner l'influence de l'expérience de vie à l'étranger de façon différenciée: le niveau de vie que les Chiliens ont connu dans des pays tels que le Canada est supérieur à celui de ceux qui vécurent au Mexique ou ailleurs en Amérique latine.

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APPENDICES

THE EXECUTIVE PRESIDENT Patricio Aylwin Azocar (PDC)

THE CABINET Interior Enrique Krauss Rusque (PDC) Foreign Affairs Enrique Silva Cimma (PR) Defense Patricio Rojas Saavedra (PDC) Economy Carlos Ominami Pascual (PS) Education Ricardo Lagos Escobar (PS) Finance Alejandro Foxley Rioseco (PDC) Justice Francisco Cumplido Cereceda (PDC) Public Works Carlos Hurtado Ruiz-Tagle (PAC) National Patrimony Luis Alvarado Constela (PS) Labor René Cortázar Sanz (PDC) Health Jorge Jiménez de la Jara (PDC) Agriculture Agustín Figueroa Yáñez (PR) Mining Juan Hamilton Depassier (PDC) Housing Alberto Etchegaray Aubry (PDC) Transportation Germán Correa Díaz (PS) Secretary General of Government Edgardo Boeninger Kausel (PDC) National Planning Office Sergio Molina Silva (PDC) Development Corporation René Abeliuk Manasevich(PSD) National Energy Commission Jaime Tohá González (PS)

THE MILITARY HIGH COMMAND Army General Augusto Pinochet Ugarte

**

Navy Admiral Jorge Martinez Busch *

Air Force General Fernando Matthei Aubel *

Carabineros Police General Rodolfo Stange Oelckers * Civil Police General (r) Horacio Toro Iturra

THE NATIONAL SECURITY COUNCIL President of the Republic Patricio Aylwin Azocar President of the Senate Gabriel Valdês Subercaseaux President of the Supreme Court Luis Maldonado *

Commander-in-Chief of the Army . . . .Augusto Pinochet Ugarte **

Commander-in-Chief of the Navy Jorge Martinez Busch *

Commander-in-Chief of Air Force Fernando Matthei Aubel * General Director of Carabineros Rodolfo Stange Oelckers *

Comptroller General of the Republic Osvaldo Iturriaga *

** Self-appointed * Appointed by and/or served under military regime.

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THE SUPREME COURT PRESIDENT: Luis Maldonado Boggiano

*

JUSTICES: Osvaldo Faúndez Vallejos Rafael Retamal

Enrique Correa Labra Emilio Ulloa Muñoz

Sergio Mery Bravo *

Marcos Aburto Ochoa *

Hernán Cereceda Bravo *

Enrique Zurita Camps *

Roberto Dávila *

Leonel Beraud Poblete *

Arnaldo Toro Leiva *

Efrén Araya Vergara *

Marco Aurelio Perales *

Germán Valenzuela Erazo *

Servando Jordán López *

Hernán Alvarez García *

NB. According to Article 77 of the 1980 Constitution, Supreme Court judges remain in their jobs until they reach 77 years of age and, therefore, they are to remain in their tenured positions until long after the formal end of the dictatorship. The majority of the judges were hand-picked by Pinochet due to their ideological proximity to his regime. The Supreme Court played a crucial role in legitimating de-facto rule and systematically turning a blind eye to both the arbitrary and unconstitutional nature of Pinochet's reign and, most importantly, its persistent and gross violations of human rights.

THE CONSTITUTIONAL TRIBUNAL President of the Supreme Court Luis Maldonado*

Supreme Court Justice Eduardo Urzúa Merino*

Supreme Court Justice Hernán Cereceda Bravo*

Supreme Court Justice Ricardo García Bravo*

Attorney Juan Colombo Campbell* NB: This special tribunal is charged with the task of interpreting the

constitution and deciding on the constitutionality of both, the Executive's "co-legislative" powers and that of the bills in Con- gress. Likewise, it is to arbitrate in case of conflicts among and between the Legislative, the Executive and the Judiciary.

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THE COMPTROLLER GENERAL (CONTRALOR GENERAL DE LA REPUBLICA)

Comptroller Osvaldo Iturriaga Diaz* NB: This is "watchdog" autonomous agency to determine the

legality and constitutionality of all Executive's decrees (executive orders). Its jurisdiction goes well beyond auditing accounts and approving financial matters (as in the US), blending adjudicative functions similar to those of French Council of State.

THE CONGRESS PARTY DEPUTIES SENATORS GOVERNMENT COALITION Christian Democracy (PDC) 39 13 Party for Democracy (PPD) 16 4 Radical Party (PR) 5 2 Concertación 63 20 Social Democratic Party (PSD) 1 1 Humanist Party (PH) 1 Alliance of Centre Party (PAC) 1 Others 9 2 Christian Left (IC) 2 Socialist Party (PS) 7 1 72 22 Radical Socialist Democratic (RSD) 1_ (60%) (47%) TOTAL 72 22

OPPOSITION COALITION National Renewal (RN) 30 5 Independent Democratic Union (UDI) 11 2 Independent-Right 7 9

48 16 Elected to Congress 48 16 (40%) (34%)

Senators appointed by the military regime 9 25

(53%) GRAND TOTAL (both Chambers) 120 47

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THE SENATE (members): GOVERNMENT Humberto Palza Corvacho (PDC)

Carmen Ruiz-Tagle (PDC) Ricardo Núñez Muñoz (PPD) Ricardo Hormazábal Sánchez (PDC) Carlos González Márquez (PR) Laura Soto González (PPD) Andrés Zaldivar Larraín (PDC) Eduardo Frei Ruiz-Tagle (PDC) Nicolás Díaz Sánchez (PDC) Anselmo Sule Candía (PR) Jaime Gazmuri Mujica (PPD) Máximo Pacheco Gómez (PDC) Arturo Frei Bolívar (PDC) Mariano Ruiz-Esquide Jara (PDC) Ricardo Navarrete Betanzo (PR) Jorge Lavandero Illanes (PDC) Gabriel Valdés Subercaseaux (PDC) President of the Senate Sergio Páez Verdugo (PDC) Hernán Vodánovic Schnake (PPD) Rolando Calderón Aránguiz (PS) José Ruiz di Giorgio (PDC) Mario Papic Bayer (PSD) N= 22

OPPOSITION Julio Lagos Cosgrove (Independent) Arturo Alessandri Besa (Independent) Ignacio Pérez Walker (RN) Alberto Cooper Valencia (RN) Sergio Romero Pizarro (Independent) Beltrán Urenda Zegers (Independent) Jaime Guzmán Errázuriz (UDI) Sebastian Piñera Echeñique (Independent) Sergio Onofre Jarpa (RN) Eugenio Cantuarias Larrondo (UDI) Mario Ríos Santander (RN) Francisco Prat Alemparte (RN) Sergio Diez Urzúa (Independent) Enrique Larra Asenjo (Independent) Bruno Siebert Held (Independent) Hugo Ortiz de Filippi (RN) N= 16

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SENATORS APPOINTED BY THE OUTGOING MILITARY REGIME

Former Minister of the Interior . . Sergio Fernández Larraín* Former University Rector William Thayer Arteaga* Former Vice-Commander-in-Chief of Army . Santiago Sinclair* Former Vice-Admiral of Navy Ronald Mclntyre* Former Commander-in-Chief of Air Force . César Ruiz Danyau* Former Director-General of Carabineros .Vicente Huerta Celis* Former official at the Comptroller's Office Olga Feliú* Former Supreme Court Justice Ricardo Martin Diaz* Former Supreme Court Justice .... Carlos Letelier Bobadilla* N = 9

25 CHAMBER OF DEPUTIES (Members) GOVERNMENT Luis Le Blanc Valenzuela (PDC)

Vladislav Kusmicic Calderon (PPD) Nicanor Araya (Independent) Felipe Valenzuela Herrera (PPD) Rubén Gajardo Chacon (PDC) Sergio Pizarro MacKay (PDC) Armando Arancibia Calderon (PPD) Joaquin Palma Irrarázabal (PDC) Jorge Pizarro Soto (PDC) Victor Rebolledo González (PPD) Julio Rojas Astorga (PDC) Eduardo Cerda Garcia (PDC) Sergio Jara Catalán (PDC) Jorge Molina Valdivieso (PPD) Aldo Cornejo González (PDC) Gustavo Cardemil Alfaro (PDC) Akin Soto Morales (PPD) Sergio Velasco de la Cerda (PDC) Adriana Muñoz Dalbara (PPD) Ramón Helizalde Hevia (PDC) Maria Maluenda Campos (PPD) Hernán Bosselin Correa (PDC) Mario Hamuy Barr (PDC) Carlos Dupré Silva (PDC) Gutenberg Martínez Ocamica (PDC) Jorge Schaulsohn Brodsky (PPD) Eliana Caraball (PDC)

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Laura Rodríguez Roccomini (PH) Andrés Palma Irrarázabal (PDC) Carlos Montes Cisternas (PDC) Camilo Escalona Medina (PS) Hernán Rojo Avendaño (PDC) Rodolfo Seguei Molina (PDC) Mario Palestro Rojas (PS) Guillermo Yunge Bustamante (PDC) Jaime Estéves Valencia (PPD) Andrés Aylwin Azocar (PDC) Vicente Sota Barros (PPD) Héctor Olivares Solís (PS) Juan Pablo Letelier Morel (PAIS) Hugo Rodriguez Guerrero (PDC) Juan Carlos Latorre Carmona (PDC) Gustavo Ramirez Vergara (PDC) Eugenio Ortega Riquelme (PDC) Sergio Aguilo Melo (Independent) Jaime Campos Quiroga (PR) Jaime Naranjo Ortiz (PS) Manuel Matta Aragay (PDC) Isidoro Tohá González (Independent) Víctor Jeame Barrueto (PPD) José Miguel Ortiz Novoa (PDC) José Antonio Viera-Gallo (PPD) Edmundo Salas de la Fuente (PDC) Juan Martínez Sepúlveda (PAIS) Claudio Huepe García (PDC) Jaime Rocha Martínez (PR) Octavio Jara Wolff (PPD) Edmundo Villouta Concha (PDC) Roberto Muñoz Barra (Independent) Francisco Huenchumilla Jaramillo (PDC) José Peña Meza (PR) Mario Acuña Cisternas (PDC) Juan Concha Urbina (PDC) Mario Devaud Ojeda (PR) Sergio Ojeda Uribe (PDC) Víctor Reyes Alvarado (PDC) Sergio Elgueta Barrientos (PDC)

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Dionisio Fauleaun Mallorga (PR) Baldemar Carrasco Muñoz (PDC) Milenko Vilicic Karnincic (Independent) Carlos Smok Ubeda (PPD) Hossain Sabag Castillo (PDC) N= 72

OPPOSITION Carlos Valcarce Medina (RN) Ramón Pérez Opazo (Independent) Carlos Cantero Ojeda (RN) Carlos Vilches Guzmán (NR) Baldo Prokurika Prokurika (RN) Eugenio Munizaga Rodríguez (RN) Jorge Morales Adriazola (RN) Federico Ringeling Hunger (RN) Claudio Rodríguez Cataldo (RN) Arturo Longton Guerrero (RN) Francisco Bartolucci Johnson (UDI) Raúl Urrutia Avila (RN) Andrés Sotomayor Mardones (RN) Cristián Leay Morán (UDI) Angel Fantuzzi Hernández (RN) Alberto Espina Otero (RN) Carlos Bombai Otaegui (Independent) Evelyn Matthei Fornet (RN) Maria Angélica Cristi (Independent) Jaime Orpis Bouchon (UDÌ) Gustavo Alessandri Balmaceda (Indep.) Pablo Longueira Montes (UDÌ) Juan Antonio Coloma Correa (UDÌ) Federico Mekis Martines (RN) Andrés Chadwick Piñera (UDÌ) Juan Masferrer Pellizzari (Independent) José Hurtado Ruiz-Tagle (RN) Sergio Correa de la Cerda (UDÌ) Pedro Alvarez-Salamanca (RN) Luis Navarrete Carvacho (Independent) Alfonso Rodríguez del Río (RN) Pedro Guzmán Alvarez (UDI) Hugo Alamos Vásquez (RN) Jorge Ulloa Aguillos (UDI) Víctor Pérez Varela (Independent)

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Franciso Bayo Beloso (RN) José Antonio Galilea Vidaurre (RN) José Garcia Ruminot (RN) Teodoro Ribera Neumann (RN) René García García (RN) Juan Taladríz García (RN) Carlos Caminondo Sáez (RN) Marina Prochelle Aguilar (RN) Carlos Recondo Lavanderos (UDI) Carlos Kuschel Silva (RN) Juan Alberto Pérez Muñoz (RN) Antonio Horvath Kiss (Independent) N= 48

FEMALE REPRESENTATION IN CONGRESS

Although female voters comprised 51.5% of the electorate, only nine women won a congressional seat. Two out of six women candidates were elected to the Senate (or 4.2 %), and 7 (or 5.8 %) out of 29 women candidates were chosen to the Chamber of Deputies. Thus, women only make 5.38 % of the total number of MPs in the 1990 con- gress. This situation is in sharp contrast with the configuration of the 1973 Congress, which was typical of the pre-coup period in terms of female representation. In 1973 women made 48.5 percent of the elec- torate and took 11.5 % of all congressional seats. In the Chamber of Deputies they occupied 12.7 % of the seats and in the Senate 8 percent. LABOR REPRESENTATION IN CONGRESS

Only eight trade union leaders competed for a seat in the new con- gress. Of these, six were elected: (1) Rodolfo Seguei, a Christian De- mocrat from the Confederation of Copper Workers; (2) Nicanor Araya, a Socialist, also from the Confederation of Copper Workers; (3) Héctor Olivares, a Socialist, from the same confederation; (4) José Ruiz di Giorgio, a Christian Democrat, from the Confederation of Oil Workers; (5) Ricardo Hormazábal, a Christian Democrat, President of the Banks' Employees Association (a white-collar union); and (6) Rolando Calderón, a Socialist, a peasant union leader and former minister of agriculture in the Allende government. This makes 3.6 % of the seats. GRASSROOTS-BASE COMMUNITIES REPRESENTATION IN CONGRESS None INDIAN-NATIVE-MAPUCHE REPRESENTATION IN CONGRESS None

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PROFESSIONS REPRESENTED IN THE NEW CONGRESS 59 lawyers 35.3 % 17 economists 10.2 % 15 engineers 9.0 % 5 medical doctors 3.0 % Professionals: 59.5 % HOLDOVERS OF THE PINOCHET REGIME IN THE NEWLY ELECTED CONGRESS In the new Senate, there are 11 senators (or 23 % of the seats) who, during the dictatorship officiated as mayors, intendents, provincial governors, cabinet ministers, ambassadors, and/or members of the dictatorship's Social and Economic Council. Hard-line Pinochet sup- porters make 68.8 percent of the elected right wing opposition in the Senate. If the 9 Pinochet appointed Senators (19% of the seats) are ad- ded, 20 out of 25 opposition Senators-or 80 percent of the opposition Senators-turn out to be longtime supporters of the old regime. These include prominent figures such as corporatist ideologue Jaime Guz- mán, the architect of Pinochet's Authoritarian Republic. In total, the right-wing opposition makes a majority of 53 % of the upper Chamber. This gives the Chilean right a controlling interest or veto power to curb or stalemate any attempt at altering the rules of the game as laid down by the 1980 constitution for the foreseeable future. The figure for the Chamber of Deputies is 31, or 23.8 percent of the members. In total, former Pinochet officials occupy 52 seats out of a grand total of 167 seats, or 31.1 percent of both houses.

SOCIO-ECONOMIC STATISTICS 1970 1980 1985 1990

Population (in millions) 9.4 11.1 12.1 12. 91 % living in Santiago 31.8 34.4 39. 22 39.2 % urban population 75.2 81.1 83.6 85.6 % literacy 89.0 92.1 94.4 95.2 (est) % urban unemployment 4.1 11.7 17.0 10. 23 % agricultural exports 3.3 8.0 13.7 16. 04 Inflation rate 34.9 38.95 30.7 21.4 GDP per capita6 2,120.4 2,342.1 2,101.1 2,376.6 GDP annual increase 1.4 6.5 2.0 9.0 % debt service/% exports 24.5 19.3 46.5 19. V External debt (billions) 2.1 12.1 20.4 19.6

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1970-80 1980-85 1987-88

% Growth of Real

Disposable GDP per year 1.6 -3.2 12.3

1970-75 1980-85 1985-90

Life expectancy (years) 63.6 71.0 71.5 Infant mortality (p. 1000) 69.9 23.7 18.1

ANNUAL GROWTH OF GNP BY SECTORS

Average 1965-80 Average 1980-88

% Agriculture 1.6 3.8 % All Industry 0.8 2.2 % Manufacture 0.6 2.0 % Services 2.7 1.3 % Composite Growth 1.2 1.9

POPULATION PER REGION 1989 REGION N % REGION N %

I Tarapacá 332 2.6 VI O'Higgins 647 5.0 II Antofagasta 383 3.0 VII Maule 830 6.6 III Atacama 202 1.6 VIII Bio-Bio 1676 13.0 IV Coquimbo 474 3.4 IX La Araucanía 778 6.0 V Valparaíso 1378 10.7 X Los Lagos 931 7.2

Metro-Santiago 5066 39.3 XI Aisén 77 0.6 XII Antàrtica &

Magallanes 149 1.2

ECONOMICALLY ACTIVE POPULATION (1988-89) Primary sector 864.6 19.0

Mining 87.4 1.9 Manufacture 669.8 14.7 Utilities 29.4 0.6 Construction 275.7 6.1 Trade, tourism, transport, storage 731.2 16.1 Communications 274.4 6.0

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ANNUAL PERCENTAGE CHANGES IN CONSUMER PRICES AND WAGES

Consumer Prices Wages Variation A B (B/A)xl00

1979 33.4 47.8 143 1980 35.1 39.5 113 1981 19.7 9.1 46 1982 9.9 7.2 73 1983 27.3 13.7 50 1984 19.9 20.3 102 1985 30.7 25.1 82 1986 19.5 22.0 116 1987 19.8 19.2 97 1988 14.7 17.5 119 1989 17.0 19.1 123

Average 22.5 21.9 97

POLITICAL STATISTICS POLITICAL PARTIES (c.1990)

RIGHT CENTRE LEFT8 Unión Democrática Partido Demócrata- Partido Socialista Independiente (UDI) Cristiano (PDC) Unificado (PSU)

Partido Renovación Partido Radical (PR) Partido Comunista (PC) Nacional (RN)

Partido Social Movimiento de Izquierda Demócrata (PSD) Revolucionaria (MIR)

Partido por la Democracia (PPD)

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1957 1965 1969 1973 1988 1989 % population registered 18.0 34.8 44.5 61.0 59.0

% registered voters participating 35.9 69.5 81.2 92.1 94.5

Voting turnout as % of population 12.3 27.4 20.9 36.3 57.7 55.8

% of Rightist Vote 33.0 12.9 20.9 23.6 43.0 40.7

% PDC vote 9.4 43.6 31.3 29.1 26.1

% PR vote 22.1 17.7 13.4 5.5 3.8

% Centre Vote: (PDC + PR) 31.5 61.3 44.7 34.6 51.4'

% Leftist Vote 10.7 23.3 29.4 38.9 5.2

TURNOUT AND GENDER IN THE 1989 PRESIDENTIAL AND CONGRESSIONAL ELECTIONS

Number Percentage

Registered voters 7,557,537 Female voters 3,892,685 51.5 Male voters 3,664,852 48.5 Valid ballots counted 7,142,080 94.5 Blank 103,334 1.4 Abstention (legally excused) 227,527 3.2

VOTERS ACCORDING TO AGE BRACKET

65 and older 716,527 6.9 55 to 64 years of age 799,135 10.6 45 to 54 years of age 1,050,022 13.9 35 to 44 years of age 1,479,736 19.6 25 to 34 years of age 2,131,834 28.2 18 to 24 years of age 1,380,283 18.3

FIRST TIME VOTERS 3,412,117 46.5

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VOTERS ACCORDING TO REGION ABC D Chamber Senate Representation seats seats Index:

TOTAL % % N % N [(B/A)100] Regioni 187,859 2.5 3.3 4 5.3 2 132 Region II 232,705 3.1 3.3 4 5.3 2 106 Region III 123,594 1.6 3.3 4 5.3 2 206 Region IV 269,543 3.6 5.0 6 5.3 2 139 Region V 817,504 10.8 10.0 12 10.6 4 93 Region VI 393,061 5.2 6.6 8 5.3 2 127 Region VII 475,544 6.3 8.3 10 10.6 4 132 Region VIII 972,951 12.9 11.7 14 10.6 4 92 Region IX 437,725 5.8 8.3 10 10.6 4 143 Region X 524,233 6.9 10.0 12 10.6 4 144 Region XI 43,565 0.6 1.7 2 5.3 2 283 Region XII 94,544 1.3 1.2 2 5.3 2 92 Metropolitan Region 2,984,654 39.5 26.7 32 21.2 8 68 TOTAL 100 100 120 100 38

NB: Representation Index: over 100= over-representation; under 100= under-representation. Eg. Regions III and XI are clearly over-represented, while Regions IV, VII, and especially Santiago are under-represented.

1989 ELECTION: PRESIDENTIAL RACE10 % all % Valid votes votes

Patricio Aylwin (PDC) 53.8 55.2 55.2 Hernán Büchi (RN) 28.7 29.4 Francisco Javier Errázuriz (Ind. Right) 15.0 15.4 44.8 Blank ballots 1.4 Spoiled ballots 1.1

PERCENTAGE OF VOTES RECEIVED BY PARTIES IN 1989 CONGRESSIONAL RACE

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AGREEMENT FOR DEMOCRACY (Concertation por la Democracia) CENTRE-LEFT

1. Christian Democratic Party (PDC) 26.14% 2. Party for Democracy (PPD) 10.98% 3. Radical Party (PR) 3.82% 4. Green Party ( Partido Ecologista) 0.21% 5. Humanist Party 0.75% 6. Independents (mainly Socialists) 9.47% 51.37

UNITY FOR DEMOCRACY ( Unidad por k Democracia )

7. Broad Leftist Socialist party (PAIS) 4.3% 8. Social Democracy Radical Party (PRSD) 0.002% 9. Independents (centre-left) 0.86% 5.16 56.63

DEMOCRACY AND PROGRESS ( Democracia y Progreso) RIGHT-WING

10. National Renewal (RN) 18.22% 11. Democratic Independent Union (UDI) 9.17% 12. Independents (right) 5.%% 33.35

13. PARTY OF THE SOUTH (Partido del Sur) 0.68% 0.68

CENTER ALLIANCE ( Alianza de Centro)

14. National Vanguard (Avanzada Nacional) 0.86% 15. Radical Democracy (Democracia Radical) 0.40% 16. Independents (centre-right) 1.33% 2.59

17. NATIONAL PARTY (Partido Nacional) 2.19% 2.19

LIBERAL-SOCIALIST CHILEAN PARTY (Partido Liberal Socialista Chileno) RIGHT

18. Liberal Party 0.68% 19. Socialist Party of Chile 0.20% 20. Independents (centre-right) 1.83% 2.71

INDEPENDENTS (right) 1.84% 1.84 43.36

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COALITION A B C D E

Voting Strength Rep. Chamber Rep. Senate Residue Average Centre-Left 56.5 60.0 47.0 106 83 94.5

Right 43.4 40.0 53.0a 92 122 107

a I Counting the 9 appointed Senators. The Right controls only 34% of the elected senatorial seats. Without these externalities the electoral system would be leaning towards a majority more than a proportional one.

NB: Many of these alliances and parties were purely instrumental and designed to contest the 1989 election under the loaded rules laid down by the military regime. They were by-and-large also short-lived. According to these rules, parties receiving less than 5 percent of the votes cease to exist as such. At present neither the Communist Party, nor the Movement of the Revolutionary Left (MIR) have legal existence.

MAJOR INTEREST GROUPS Labour: Blue-collar labour organizations have been significantly

weakened and fragmented since the military takeover. Both in numbers and in organizational strength, they have declined from the hey-days of unionism in the late 1960s and early 1970s. There are at present 9 Centrals, encompas- sing 34 confederations and 25 federations.

1) United Workers' Confederation (Central Unitaria de Trabaja- dores , CUT) According to estimates, it represents about 17 percent of organized labour and only 4 percent of the total labour force.11 It includes 2 associations, 27 confederations and 49 federations with an estimated membership of 411,000. President: Manuel Bustos (PDC). The most important of the aforementioned confederations belonging to CUT is the Copper Workers' Confederation (Confederación de Trabajadores del Cobre). President: Carlos Ogalde.

2) Workers' Democratic Confederation (Central Democrática de Trabajadores, CTD), affiliated to an AFL-CIO controlled interamerican confederation. Strongly anti-communist and pro-U.S.. It has 27 affiliated organizations. President: Edu- ardo Ríos Arias (ex-PDC) The most important nucleus controlled by the CTD is Con- federación Marítima de Chile , COMACH (Maritime Confeder-

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ation), which played an important role in the downfall of Allende in the 1970s. Its membership is about 5,000 and it is lead also by Eduardo Ríos.

3) As of 1989 there was also a small, pro-Pinochet Central General de Trabajadores , CGT (General Workers' Central) and a Frente Nacional de Organizaciones Autónomas , under the leadership of Manuel Contreras Loyola.

Business: Confederation of Production and Commerce ( Confederación de la Producción y del comercio , COPROCO, established in 1932) Major umbrella organization including, 1, 2, 3, 4, 5, 6 and 7 below. Neo-conservative and corporatist orienta- tion. President: Manuel Feliú (Former President of SONAMI). 1. National Society of Agriculture ( Sociedad Nacional de

Agriculture , SNA, established in 1838). It is a landowners' association, representing mainly large-scale, commercial agriculture. It controls 6 radio stations. Historically linked with traditional Conservatism.

President: Jorge Prado.

2. Society for Industrial Development ( Sociedad de Fomento Fabril SOFOFA, established in 1883). Represents those manufacturing establishments which control in total over 80% of industrial capital. It is the largest employers' organization with about 2,000 members. Historically linked to Liberalism.

President: Fernando Agüero. 3. National Society of Mining ( Sociedad Nacional de

Minería , SONAMI) Represents most large and medi- um-sized national mining concept. Controls one major radio network. Founded in 1883, it is linked to both Liberalism and the emergence of the Radical Party in XIX th century. President: Hernán Guiloff.

4. National chamber of Commerce (Cámara Nacional de Comercio, CNC, formerly Confederación de Cámaras de Comercio de Chile , CCC, established in 1857). From be- ing a relatively large and diverse organization in the 9160s, its 120 member organizations represent

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nowadays practically all large-scale commercial conglomerates. President: Daniel Platovsky.

5. Chilean Chamber of Construction ( Cámara Chilena de la Construcción). 1,300 members. Represents most large-scale construction companies. Established in 1951, it was linked in the 1960s to the right-wing of the Christian Democratic Party. President: José Antonio Guzmán

6. Association of Banks and Financial Institutions ( Aso- ciación de Bancos e Instituciones Financieras , ABIF). Re- presents most finance capital in the country. Relatively new association linked to neo-liberalism, the "economic clans" and the "Chicago-boys"-type policies of the Pinochet regime. President: Adolfo Rojas.

7. Santiago Stock Exchange ( Bolsa de Comercio de Santiago ). The main stock-trading organization. President: Pablo Yrarrázabal

In addition there are a number of autonomous employers' organization, equally with a right-wing and corporatist orientation. These include the Confederación de Asociaciones Gremiales y Federaciones de Agricultores de Chile (Confederation of Guilds and and Federations of Chilean Farmers), presided by Domingo Durán Neumann; the Confederación del Comercio Detallista de Chile (Confederation of Retailers), presided by Rafael Cumsille Zapapa and Elias Brugére, The Confederación Nacional de Dueños de Ca- miones (the Truck-owners' National Confederation), presided by Fernando Nelson Radice and the Confederación Nacional Unida de la Mediana y Pequeña Industria , Servicios y Artesanado , CONUPIA (National United Confederation of Small and Mid-Sized Industry, Services and Artisans), presided by Roberto Parragué Bonet and Roberto Izquierdo.

White-collar and professional organizations:

There are 28 Colegios Profesionales (Professional Associations), including the Bar Association ( Colegio de

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Abogados ), Engineers' Association (Colegio de Ingenieros ), the College of Physicians ( Colegio Médico) and others. Though they are formally integrated into an umbrella or- ganization, the Federación de Colegios Profesionales de Chile (Federation of Professional Associations of Chile), their influence has radically diminished from the one they pos- sessed in pre-coup Chile. For instance, now membership is voluntary and affiliation is not a requisite for professional certification. In addition to professional groups, there are 118 white-collar employees' confedera- tions, federations and associations with an essentially middle-class, constituency. Some of these employees' or- ganizations-such as the Confederación de Empleados Particulares , CEPCH (Private-sector Employees' Confed- eration)~are also members of CUT. Many of these were also subject to severe persecution during the military regime.

PUBLIC ADMINISTRATION COMPARATIVE EXPENDITURES BY SECTOR

1972 1988 Variation % % Index

Defence 6.1 10.4 +70 Education 14.3 12.0 -16 Health 8.2 6.3 -23 Housing, Social Security and Welfare 39.8 39.2 - 3 Economic Services 15.3 11.2 -27 Other 16.3 20.9 +28 Total Government Expenditure as % of GNP 43.7 33.4 -24

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1990 BUDGET IN MILLIONS OF US DOLLARS Total %

Presidency 15.8 0.44 Legislature 12.2 0.34 Judiciary 28.8 0.80 Comptroller General 8.4 0.23 Interior 81.5 2.27 Foreign Relations 73.6 2.05 Economy 11.2 0.31 Finance 40.2 1.12 Education 669.8 18.65 Justice 64.6 1.80 Defence 642.0 17.88 Public Works 183.9 5.12 Agriculture 21.8 0.60 Labour & Social Security 1391.9 38.77 Health 198.3 5.52 Mining 9.5 0.26 Housing 127.7 3.56 Transport 3.7 0.10 National Patrimony n/a n/a TOTAL CENTRAL GOVERNMENT 3589.9 66.19 TOTAL GOVERNMENT EXPENDITURE 5423.512

THE DECENTRALIZED SECTOR Despite the policies of denationalization and privatization since the coup, Chile still possesses the largest public sector in Latin America outside of Cuba. This corresponds to a long tradition of state involve- ment in the economy and in welfarism. In addition to central regulatory bodies (which are autonomous corporations), and the 300 municipalities in which the country is divided, there are over eighty functionally decentralized, "semi-fiscal" agencies and para-statals. These connect with the specific ministries through ministerial partici- pation in their boards of directors.

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MINISTRY AGENCIES (Autonomous Entities, Semi-fiscal Institutions and State Enterprises) Interior 300 Municipalidades (municipalities). These are theoreti-

cally autonomous and based upon popular suffrage and a local taxation base. However, in practice the military regime appointed all mayors (alcaldes), while elections were suspended for council-members ( regidores ) and the revenue base came mostly from the central government. Before leaving office, Pinochet confirmed-through "en- trenchment decree-laws (leyes de amarre)- the appointment of his designated mayors for a period of four years. The Aylwin administration could only exercise its executive privilege to appoint the Mayors of main cities such as Santiago, Valparaiso and Concepción. A bill to alter this situation is presently before Congress.

TOTAL: 300 Municipalities

Economy 1. Corporación de Fomento de la Producción , CORFO (Na- tional Development Corporation, established in 1939). It is a holding company for a core group of state-run or semi-publicly financed corporations: 1.1. Compañía Chilena de Electricidad , CHILECTRA

(Chilean Power Company), services to consumers.

1.2. Compañía de Aceros del Pacífico , CAP (Pacific Steelworks)

1.3. Compañía de Teléfonos de Chile , CTC (Chilean Telephone Co.), 50.2% privately-owned

1.4. Complejo Forestal y Maderero Panguipulli (Forestry and Wood Complex of Panguipulli), wood processing.

1.5. Empresa Minera de Aysén (Aysén Mining Enter- prise)

1.6. Empresa Nacional del Carbon , ENACAR (National Coal Company)

1.7. Empresa Nacional de Computación e Información , ECOM (National Computing and Information Company)

1.8. Empresa Nacional de Electricidad , ENDESA (National Electricity Corporation), hydro power generating corporation.

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1.9. Empresa Nacional de Explosivos , ENAEX (National Explosives Enterprise)

1.10. Industria Azucarera Nacional, 1ANSA (National Sugar Industry), refining and sugar-beet processing.

1.11. Sociedad Química y Minera de Chile , SOQUIMICH (Mining and Chemical Corporation)

2. Fiscalía Nacional Económica (Economic Regulatory Agency)

3. Comisión Nacional de Riego (National Irrigation Commission)

4. Instituto Nacional de Estadísticas (Institute of National Statistics)

5. Empresa de Comercio Agrícola (Agricultural Commerci- alization Enterprise)

6. Servicio Nacional de Turismo (National Tourism Service) 7. Superintendencia de Electricidad y Combustibles

(Regularory Agency for Fuels and Electricity) TOTAL: 18 decentralized agencies

Finance 1. Superintendencia de Valores y Seguros (Stocks and Insurance Regulatory Agency)

2. Superintendencia de Bancos e Instituciones Financieras (Banks and Financial Institutions Regulatory Agency)

3. Servicio Nacional de Aduanas (Customs and Excise) 4. Servicio de Impuestos Internos (Internal Revenue Service) 5. Banco del Estado de Chile (State Commercial Bank of

Chile) 6. Instituto de Seguros del Estado (State Insurance Institute) 7. Caja Central de Ahorro y Préstamos (Central Fund for

Savings and Loans Associations) 8. Polla Chilena de Beneficencia (State Lotery)

TOTAL: 8 decentralized agencies

Education 1. Consejo de Rectores de Universidades Chilenas (Council of University Presidents)

2. Universidad de Chile (University of Chile) which in turn, controls the Television Corporation of the University of Chile.

3. Comisión de Investigaciones Científicas y Tecnológicas , CONICYT (Commission on Scientific and Technolog- ical Research)

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4. Consejo Nacional de Televisión (National Television Council)

5. Junta Nacional De Auxilio Escolar y Becas (National Board of Social Assistance to Students and Scholar- ships)

6. Junta Nacional de Jardines Infantiles (National Board of preschool Education)

7. Servicio de Bienestar del Magisterio y de los Funcionarios dependientes del MINEDUC (Welfare Services for Teachers and Staff at the Education Ministry) 10 Regional Universities: Santiago, Tarapacá, Antof agasta, , Atacama, La Serena, Valparaiso, Talca, Bío-Bío, La Frontera, and Magallanes; 2 University institutions in Education Sciences; 7 Pro- fessional Institutes (Santiago, Arturo Prat, Chillán, Osorno, and Valdivia)

TOTAL: 26 decentralized agencies

Justice 1. Fiscalía Nacional de Quiebras (National Bankruptcy and Receivership Office)

2. Corporación de Asistencia Judicial de la Región Metropoli- tana de Santiago (Legal Aid Corporation for the Santia- go Region)

3. Corporación de Asistencia Judicial de la Región de Valparaíso (Legal Aid Corporation for the Valparaíso Region)

4. Corporación de Asistencia Judicial de la Región de Bío-Bío (Legal Aid Corporation for the Bío-Bío Region)

TOTAL: 4 decentralized agencies

Defence 1. Fábrica y Maestranzas del Ejército , FAMAE (Army's Manufactures and Factory-works)

2. Defensa Civil de Chile (Civil Defence) 3. Caja de Previsión de la Defensa Nacional (Pension Fund

of National Defence) 4. Astilleros y Maestranzas de la Armada , ASMAR (Naval

Shipbuilding and Manufactures) 5. Empresa Aeronáutica de Chile (Aeronautic Enterprise)

TOTAL: 5 decentralized agencies

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Public Works 1. Instituto de Hidráulica (Institute of Hydraulics)

2. Servicio Nacional de Obras Sanitarias (National Sewers and Sanitation Services)

3. Empresa Metropolitana de Obras Sanitarias (Metropolitan Sewers and Sanitation Works)

4. Empresa de Obras Sanitarias de la V Región (Sewers and Sanitation Works for the V Region)

TOTAL: 4 decentralized agencies

Agriculture 1. Corporación Nacional Forestal y de Recursos Naturales Renovables, CONAF (National Forestry and Renewable Resources Corporation)

2. Servicio Agrícola y Ganadero , SAG (Agricultural and Livestock Service)

3. Instituto de Desarrollo Agropecuario , INDAP (Agriculture and Livestock Development Institute)

TOTAL: 3 decentralized agencies

Labour and Social Security

1. Dirección del Trabajo (Directorate of Labour) 2. Servicio Nacional de Capacitación y Empleo (Manpower

Training and Employment Service) 3. Superintendencia de Administradoras de Fondos de

Pensiones (Regulatory Agency for the Administrations of Pension Funds)

4. Superintendencia de Seguridad Social (Social Security Regulatory Agency) In addition, there are 12 autonomous Social Security, Retirement and Pension Funds ( Cajas de Prevision ): Public Employees and Journalists; Private-sector Em- ployees; Social Security Service (for blue-collar work- ers); Merchant Marine; Municipal Employees; Muni- cipal Employees of Santiago; Municipal workers (blue-collar); Municipal Employees of Valparaiso; State Bank Employees; Mill and Bakeries' Workers; State Railways Employees; and Race-track Employees.

TOTAL: 16 decentralized agencies

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Health 1. Central de Abastecimiento del Sistema Nacional de Servicios de Salud (Central Supplier of the National Health System)

2. Servicios de Salud del Ambiente de la Region Metropolitana (Environmental Health for the Santiago Region)

3. Instituto de Salud Pública de Chile (Public Health Insti- tute)

4. Fondo Nacional de Salud (National Health Fund) In addition, there are 26 semi-autonomous regional and local Servicios de Salud (Health Services), comprising the National Health System.

TOTAL: 30 decentralized agencies

Mining 1. Comisión Nacional de Energía (National Energy Commission)

2. Empresa Nacional de Minería , ENAMI (National Mining Enterprise)

3. Empresa Nacional de Petróleo , ENAP (National Petroleum Company)

4. Corporación Nacional del Cobre de Chile , CODELCO (Na- tional Copper Corporation), largest enterprise in Chile.

5. Comisión Chilena del Cobre (Copper Commission) 6. Servicio Nacional de Geología y Minería (National Geol-

ogy and Mining Service) TOTAL: 6 decentralized agencies

Housing and Urbanization

1. Servicio Metropolitano de Vivienda y Urbanismo (Metro- politan Housing and Urbanization Service) In addition, there are 12 territorially decentralized and semi-autonomous Servicios Regionales de Vivienda y Urbanismo (Regional Housing and Urbanization Services)

TOTAL: 13 decentralized agencies

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Transport and Communications

1. Línea Aérea Nacional , LAN (National Air Lines, 51% privately owned), Chile's main national and interna- tional carrier.

2. Empresa de los Ferrocarriles del Estado (State Railways), over 90% of all railway lines.

3. Empresa Portuaria de Chile , EMPORCHl (Docks and Ports Enterprise)

4. Empresa Marítima del Estado (State Maritime Enterprise) 5. Empresa de Correos de Chile (Chile Post Corporation)

TOTAL: 5 decentralized agencies

Secretariat General of Government

1. Televisión Nacional (National Television Network) 2. Radio Nacional de Chile (National Radio-stations)

TOTAL: 2 decentralized agencies

TOTAL DECENTRALIZED AGENCIES: 140 MUNICIPALITIES 300 GRAND TOTAL: 440

ARMED FORCES13 Defence expenditures (1988-89) $ 670,270,00 (US) Defence budget (1988-89) $ 640,120,00 "

196514 1973 1981 1988-89 Military forces15 46,000 60,000 92,000 101, 00016 % annual growth 3.6 6.3 1.4

Militarized national police (1988-89) 27,000

Over-all defence & security establishment (1988-89) 128,000

Military expenditures p/c (1984)17 $ 79.00 Expenses per soldier (1984) $ 9292.00 Soldiers per 1000 population (1984) 8.20 Defence & security per 1000 (1989) 10.00

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NB: by law, 9% of all proceeds from copper exports goes directly to financing the armed forces (the estimate for 1988 was $ 200 million US).

Army: 57,000 (inc. 30,000 conscripts): 6 divisions and 1 brigade organized into 50 various regiments (infantry, motorized infantry, mountaineers, artillery, motorized cavalry, special forces, engineers, etc.) Materiel: 171 MBTs, 157 light tanks (M-24s, M-41s and AMX 13s), 30 EE9s "Cascavel", 20 AIFVs "Piranha" with 90 mm gun and 330 APCs; 108 105 mm. guns, 12 MK F3 155 mm, and SAM "Blowpipe"-type. Aircraft in- clude 10 transport planes (C 212s and 4 PA-31s), 16 Cessnas R-172 (trainers) and 26 helicopters of several makes.

Navy: 29,000 (inc. 3000 conscripts): Fleet, Naval Air, Marines and Coast Guard, distributed in 3 naval zones.

Materiel: Vessels include 4 submarines (UK "Oberon" and FRG T 209 1300), 1 cruiser, 8 destroyers, 2 frigates, 4 missile crafts, 4 torpedo crafts, 3 patrol boats, 3 amphibi- ous and 6 supply and miscellaneous. Naval Air Force (500 personnel) includes 6 reconnaissance, 7 liaison and 10 trainer planes in addition to 10 various helicpters. The Infantería de Marina (Marines) is 5200 strong and in- cludes sixteen 105 mm, thirty five 155 mm and 16 coast- guns (155mm), in addition to some 100 mortars and "Blowpipe" SAMs.

Air Force

(FACH): 15,000 organized into 5 air brigades (4 wings)

Materiel: Aircraft includes 2 fighter squadrons with 38 Hawker "Hunters" and 16 F-5s; one fighter/reconnais- sance squadron with 15 "Miràge" 50s, 2 COIN squadrons with 27 A-37 B anti-personnel attack planes, 5 reconnaissance planes (2 Camberras, 1 King Air, 2 Learjets); 1 transport squadron with 24 units of several makes (Boeing 727s, 707s, C 130s, etc.); 130 T-37 Cessna

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trainers and several units of anti-aircraft artillery (20 and 40 mm) and including "Blowpipe" and "Cactus" ("Crotale") SAMs.

Carabineros (Police): 27,000 spread throughout the territory. Its number has

in fact declined in both in relative and absolute terms (from about 31,000 in 1966-67) and its historical role as a "counter-balancer" to the military has been considerably reduced. It has anti-riot equipment, numerous small ar- moured vehicles and 12 helicopters of various makes.

NOTES

1. Last figure is for 1989, see The Economist Intelligence Unit, Chile, Country Report , Annual Survey of Political and Economic Background , (London: EIU, 1990), p. 8.

2. World Almanac 1990, the figure is an estimate for 1986-87.

3. Last figure is for 1988

4. Last figure is for 1987

5. The figure is for 1979

6. At constant market prices of 1980, CEP AL, Anuario Estadístico de América Latina y el Caribe, (Santiago: Publicationes de la Naciones Unidas, 1990), pp. 489-490. Last (1990) figure is in fact for 1988.

7. The World Bank, World Development Report, (New York: Oxford University Press, 1990), p. 223.

8. Neither the Communist, nor the Movement of the Revolutionary Left (MIR) have representation in Congress or are formally constituted political parties according to the terms of reference of the 1989 Electoral Decree-Law.

9. Figure includes the "instrumentar' PPD ( Partido por la Democracia) made fo moderate ex socialists and generally of social democratic orientation.

10. Hoy, No. 648, (18-24 December, 1989), p. 37.

11. According to PPD's M.P. J. P. Letelier, October 12, 1990.

12. This includes U.S. $ 4198.23 in pesos (300 per U.S. dollar) and U.S. $ 1226.3 in foreign currencies.

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13. Unless otherwise indicated data and estimates on armed forces comes from the international Institute for Strategic Studies, The Military Balance 1989-1990 , (London: IISS, 1989), pp. 186-188.

14. Figure for 1965 was obtained from the U.S. Arms Control and Disarma- ment Agency, World Military Expenditures , 1969 , (Washington: ACDA, 1969)

15. Figures for 1973 and 1981 come from US Department of the Army, Chile, A Country Study , 2nd. Edition, (Washington: US Department of the Army, 1982), pp. 151.

16. Figure for 1988-89 includes 33,000 conscripts on 2-year compulsory duty. Length of conscription was increased from one to two years after the 1973 coup.

17. These figures come from Ruth Leger Sivard, World Military and Social Ex- penditures 1987-88, (Washington: World Priorities, 1987), p. 46.

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