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Ecole d'administration des affaires maritimes ECOLE NATIONALE DE LA SECURITE ET DE L'ADMINISTRATION DE LA MER MEMOIRE DE FIN D'ETUDES Année scolaire 2013 – 2014 A3AM Olivier DELTEIL 15 juillet 2014 1/45 Les enjeux diplomatiques, juridiques et économiques des entreprises privées de protection des navires :

Les enjeux diplomatiques, juridiques et économiques des ... · privées et de la puissance publique doit sortir une marine capable de protéger et d’étendre le commerce (…)

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ECOLE NATIONALE DE LA SECURITE ET DE L'ADMINISTRATION DE LA MER

MEMOIRE DE FIN D'ETUDES

Année scolaire 2013 – 2014

A3AM Olivier DELTEIL

15 juillet 2014

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Les enjeux diplomatiques, juridiques et économiques des

entreprises privées de protection des navires :

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Avertissement :

Ce document est réalisé dans le cadre d'un cycle de formation des administrateurs des affaires maritimes à l'Ecole nationale de la sécurité et de l'administration de la mer.

L'auteur décline toute responsabilité quant à une mauvaise utilisation du contenu de ce document.

Ce document ne définit pas une méthode officielle et ne peut en aucune façon être considéré comme étant une critique des méthodes existantes.

Les informations qu'il comporte : – sont exclusivement de nature générale et ne visent pas la situation particulière d'une personne

physique ou morale ;– ne sont pas nécessairement complètes, exhaustives, exactes ou à jour ;– ne constituent pas un avis professionnel ou juridique.

Il n'est pas possible de garantir qu'un document de cette sorte reproduise exactement un texte adopté officiellement, car il ne constitue pas une publication officielle.

Le contenu de ce mémoire n'engage en rien l'administration de tutelle de l'auteur.

La reproduction de son contenu est autorisée sans l'accord écrit de l'auteur. Cette autorisation est soumise à la condition que la source soit indiquée sous la forme « Delteil – Les enjeux diplomatiques, juridiques et économiques des entreprises privées de protection des navires – ENSAM 2014 » et que la reproduction et la diffusion soient effectuées à titre gratuit.

La reproduction totale du document peut se faire sans autorisation et sans frais, exclusivement pour tout usage éducationnel ou autre but non commercial à condition de joindre à toutes reproductions la mention « Delteil, © ENSAM, 2014 ».

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Résumé :

Face au phénomène de la piraterie, les armateurs français ont fait pression sur les pouvoirs publics depuis décembre 2011 pour que ces derniers autorisent les entreprises privées de protection des navires (EPPN) à bord des navires battant pavillon français. Ces EPPN viendraient en complément des équipes de protection embarquée (EPE) fournies par la Marine nationale, qui ne peut répondre à toutes les demandes de protection de navires considérés comme vulnérables et dont les moyens sont en réduction.

L'autorisation d'EPPN à bord de navires battant pavillon français est au carrefour d'enjeux multiples. Diplomatiques et stratégiques, car les prérogatives de l'Etat côtier ou de l'Etat du pavillon dépendent de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Face à la piraterie, les Etats ont pu privilégier des réponses classiques, dans le cadre de résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies par exemple, avant d'être tentés par une externalisation vers des EPPN.Juridiques, car l'employeur peut voir sa responsabilité civile et/ou pénale engagée en cas de manquement à l'obligation de sécurité sur un lieu de travail si particulier que constitue le navire d'une part, et en cas d'usage de la force en méconnaissance de la légitime défense d'autre part. Economiques enfin, car la piraterie coûte cher. La protection privée des navires constitue aujourd'hui un élément essentiel à la compétitivité du pavillon d'un pays et la France ne pouvait pas ignorer les évolutions réglementaires de ses voisins européens.

Pour les pouvoirs publics, il s'agit de veiller à ce que les entreprises respectent un dispositif proche de celui encadrant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds et que les agents soient en nombre suffisant et disposent d'une formation conforme aux standards internationaux afin de dissiper tout soupçon de mercenariat.

Mots clés :

Piraterie, Marine nationale, EPE, EPPN, réglementation, agrément, contrôle, compétitivité du pavillon, responsabilité, légitime défense

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Abstract :

French shipowners have prompted the Government for three years to legalize the use of privately contracted armed security personnel (PCASP) on board. Such measure would boost France's competitiveness without undermining French navy's action and deter Africain pirates from hijacking French boats.

Nevertheless, allowing PCASP on French ships has a threefold issue :– firstly diplomatic as the use of inappropriate force may trigger political row between countries ;– secondly legal as an employer's liability may be questionned in case of injured crew members

wounded by pirates or by PCASP ; – thirdly economic as a fierce competition between Flag States urged France to tread in its

European neigbours'footstep by legalizing private maritime security companies (PMSC).

Key words :

Piracy, French navy, PCASP, PMSC, legal framework, authorisation, control, Flag competitiveness, liability, self-defence

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Liste des abréviations :

Afcan Association française des capitaines de naviresBIMCO Baltic and International Maritime CouncilBM Banque mondialeBMI Bureau maritime internationalBMP Best management practices : meilleures pratiques BV Bureau VeritasCEDH Cour européenne des droits de l'homme CENTCOOPNAV Centre de coopération navaleCESE Comité économique et social européenCFBS Certificat de formation de base à la sécuritéCMA-CGM Compagnie maritime d’affrètement - compagnie générale maritime CMP Commission mixte paritaireCNAPS Comité national des activités privées de surveillanceCNDS Commission nationale de déontologie de la sécuritéCNUDM Convention des Nations Unies sur le droit de la merCROSS Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetageCSNU Conseil de sécurité des Nations UniesDISP Délégation interministérielle à la sécurité privéeEPPN Entreprises privées de protection des naviresEEE Espace économique européen EPE Equipe de protection embarquéeEMSP Entreprise militaire et de sécurité privéeESSD Entreprise de services de sécurité et de défenseFNSM CGT Fédération nationale des syndicats maritimes Confédération générale du travailFOMM CGT Fédération des officiers de la Marine marchande Confédération générale du travail IAMPS International Association of Maritime Security ProfessionnalsICoC International Code of ConductICS International chamber of shippingISM Code international de gestion de la sécurité (ISM)ISPS Code international pour la sûreté des navires et des installations portuairesISO Organisation internationale de normalisationLOPPSI 2 Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure MLC Maritime labour convention : convention du travail maritimeOIT Organisation internationale du travailOMI Organisation maritime internationaleONU Organisation des Nations UniesOTAN Organisation du traité Atlantique NordPSC 1 Attestation de prévention et secours civiques de niveau 1RoE Rules of engagement : règles d'engagementRIF Registre international françaisRUF Rules for the use of force : règles d'emploi de la forceSG Mer Secrétariat général de la merSGDSN Secrétariat général à la défense et à la sécurité nationaleSMP Société militaire privée

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SSO Ship security officer : agent de sûreté du navire SSP Société de sécurité privéeSTCW Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veilleUMS Universal measurement system : unité de mesure du tonnage pour les navires de longueur supérieure à 24 mètres effectuant une navigation internationale TAAF Terres australes et antarctiques françaisesZEE Zone économique exclusive

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Sommaire :

Propos liminaires :

Introduction :

I. Les enjeux stratégiques et diplomatiques des EPPN :

A. Les réponses apportées par les Etats face à la piraterie :

B. Les EPPN, une solution réellement complémentaire aux EPE ?

II. Les enjeux juridiques des EPPN :

A.. Les EPPN : un vide juridique posant des questions en terme d'agrément et de responsabilités :

B. Un nécessaire contrôle des EPPN, des agents et de leur activité :

III. Les enjeux économiques des EPPN :

A. Les externalités positives des EPPN sur l'emploi et les coûts induits par la piraterie :

B. Un projet tardif et a minima :

Conclusion :

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« Les larmes de nos souverains ont le goût salé de la mer qu’ils ont ignorée. De l’union des ressources privées et de la puissance publique doit sortir une marine capable de protéger et d’étendre le commerce (…) et de faire respecter de près ou de loin le nom de la France. »

Cardinal de Richelieu1

Introduction :

1. Eléments de contexte :

Couvrant 71 % de la surface de la Terre, la mer et les océans constituent un espace économique, où s'effectuent 70 % des échanges mondiaux de marchandises et 90 % des échanges d'hydrocarbures. Depuis les années 70, le trafic de marchandises par mer s'est accru de 470 %. De ce fait, la sûreté et la sécurité maritimes constituent une enjeu de taille pour la France, deuxième territoire maritime au monde et 28e flotte mondiale (301 navires de plus de 100 UMS sous pavillon français, dont 111 de services et 190 navires de la flotte de transport stricto sensu au 1er janvier 20142). Au sens du règlement (CE) n° 725/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif à l'amélioration de la sûreté des navires et des installations portuaires, la sûreté résulte de la « combinaison des mesures préventives visant à protéger le transport maritime et les installations portuaires contre les menaces d’actions illicites intentionnelles », entendues comme les « actes qui par leur nature ou par leur contexte peuvent porter atteinte aux navires, à leurs passagers ou à leurs cargaisons (…) ». La sécurité maritime vise le champ accidentel et se comprend comme « la combinaison de mesures préventives ayant pour but de protéger le transport maritime contre les risques d’événements de mer ».

Société militaire privée (SMP), société de sécurité privée (SSP), entreprises militaires et de sécurité privées (EMSP), entreprises de services de sécurité et de défense (ESSD) et désormais entreprises privées de protection des navires (EPPN), les acronymes sont nombreux pour désigner les prestataires de sécurité privée. Si la terminologie utilisée est loin d'être anodine, au vu du régime juridique autorisant ou non la constitution de ces sociétés d'une part et de leurs capacités d'action sur ou hors du territoire français d'autre part, force est de constater que le débat à propos de la future autorisation d'EPPN sur les navires battant pavillon français a pu faire l'objet de raccourcis, de crispations même, en qualifiant les agents de telles sociétés de « mercenaires » ou de « marchands de peur », y compris au sein de la principale organisation professionnelle des entreprises françaises de transport et de services maritimes, Armateurs de France. Cette dernière a radicalement changé de point de vue à compter de la fin 2011, le virage à 180 degrés ayant été rendu public lors des 7e Assises de l’économie maritime à Dunkerque en décembre 2011, lorsque le général Pierre de Saqui de Sannes, conseiller de la CMA-CGM, a explicitement demandé la possibilité de recourir à des agents.

Fidèles à une conception « weberienne » de l'Etat - ce dernier disposant du « monopole de la contrainte physique légitime3 » -, les pouvoirs publics français se sont montrés réticents à autoriser des entreprises privées à disposer d'un pouvoir de coercition sur les individus. Les sociétés de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds et les sociétés se livrant à l'activité de mercenariat ont respectivement été encadrées et prohibées par des lois du 12 juillet 1983 modifiée et du 14 avril 2003. Quant aux SMP, elles n'ont pas lieu d'être en France. Pour l'ancien porte-parole du ministère de la

1 GALLAIS, O. (2012). La protection des navires marchands face aux actes de piraterie. Mémoire sous la direction du Professeur C. SCAPEL, Master professionnel Droit Maritime et des Transports, Centre de Droit Maritime et des Transports, Université Aix-Marseille.

2 Flotte de commerce sous pavillon français au 1e janvier 2014. Consulté le 17 avril, 2014 sur : http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Flotte_de_commerce_au_1er_janvier_2014_liste_armateur.pdf3 WEBER, M. (2003) Le savant et le politique, La Découverte.

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Défense, Gérard Gachet, il « ne peut y avoir de SMP en France » puisque cela est « du ressort exclusif de l'Etat ». Dans un contexte d'évolution de la piraterie4 et de réduction du format des armées, les risques pesant sur les armateurs tant d'un point de vue juridique (engagement de la responsabilité de l'employeur) qu'économique (primes versées à l'équipage, assurances, rançons) ont incité ces derniers à demander une autorisation des EPPN, qui viendraient en complément des équipes de protection embarquée. Les principales organisations syndicales (FOMM et FNSM CGT), si elles n'étaient pas opposées à cette ouverture, ont rappelé que « la protection des personnels embarqués sur tout navire battant pavillon français (relevait) de la responsabilité de l'Etat» et qu'elle devait rester une exception, comme le soulignaient l'organisation maritime internationale (OMI) dans ses « best management practices » (BMP) issues de la circulaire MSC 1332 du 16 juin 20095, la Commission européenne et le comité économique et social européen (CESE)6.

Certaines de ces entreprises, bien que françaises (Gallice), ne peuvent proposer leurs services du fait de l'absence de régime juridique autorisant leur embarquement à bord de navires battant pavillon français et doivent recourir à des filiales régies par un autre droit (irlandais en l'espèce) pour pouvoir travailler sur des navires battant pavillon d'un Etat membre de l'Union européenne (UE). Dans d'autres cas, faute de pouvoir disposer d'EPE à temps, des navires battant pavillon français ont pu embarquer des ESSD étrangères, en toute illégalité et à plusieurs reprises7. Pour Francis Vallat, le président du Cluster maritime français, un encadrement juridique de telles activités était indispensable pour éviter que l'embarquement d'agents privés par des navires battant pavillon français n'engendre une « situation catastrophique8 » en cas d'usage de la force et des tensions diplomatiques à l'image de celles existantes entre l'Inde et l'Italie par exemple. Devant le développement d’agents d’ESSD en mer sur des navires battant pavillon communautaire - certains étant contrôlés par des entreprises françaises, c'est tout le paradoxe - et le risque de dépavillonnement (34 navires ont été retirés des registres du pavillon français en 20129), des réflexions ont été engagées par les pouvoirs publics français, que ce soit sur les SMP 10 et la lutte contre la piraterie11. Ces rapports estimaient que la France était « désormais prête à autoriser l’embarquement de personnels privés armés à bord des navires commerciaux traversant des zones dangereuses » et préconisaient une ouverture maîtrisée du marché, sous contrôle de l'Etat, dans le respect du droit international humanitaire, des droits de l'homme et des règles en matière d'utilisation d'armes. Pour Alain Bauer, « le moment est venu de définir une véritable doctrine d'emploi des forces de sécurité non étatiques. (…) Le débat doit désormais porter sur la définition précise des territoires, des missions et des efforts de répartition.»

4 Rapport annuel sur la piraterie du Bureau Maritime International. Consulté le 16 janvier, 2014 sur : http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/auto-transport/actu/0203245570919-la-piraterie-a-recule-sur-les-mers-en-2013-643299.php

5 Peut aussi être mentionnée la circulaire MSC 1334 du 23 juin 2009 énonçant des « Principes directeurs destinés aux propriétaires, aux exploitants, aux capitaines et aux équipages des navires, concernant la prévention et la répression des actes de piraterie et des vols à main armée à l’encontre des navires ».

6 Dans son avis du 16 janvier 2013, « le CESE invite les Etats membres qui envisagent d’autoriser l'utilisation de gardes armés privés dûment qualifiés pour protéger les bâtiments vulnérables à se conformer aux directives en la matière de l'Organisation maritime internationale et à définir un encadrement juridique strict qui fixe entre autres les conditions de la responsabilité du commandant du navire, notamment en cas d’ouverture de feu. Le recours à ces vigiles privés en armes ne constitue pas une solution en soi, ni ne devrait devenir la norme mais représente une mesure qui complète les meilleures pratiques. »

7 Voir annexe 1, p. 25.8 VALLAT, F. La piraterie maritime, Ecole militaire, Paris, novembre 2012.9 Etude d'impact du projet de loi du 3 janvier 2014 relatif aux activités privées de protection des navires. Consulté le 10 janvier, 2014 sur : HTPP10 MENARD, C., & VIOLLET, J.-C. (2012). Rapport d’information déposé par la Commission de la défense nationale et des forces armées sur les sociétés militaires privées, n°4350, Assemblée nationale.11 PEYRONNET, J.-C., & TRUCY, F. (2012). Rapport au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, n°499, Sénat.

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Dans une logique similaire, l'ancien ministre de l'Intérieur avait demandé à la délégation interministérielle à la sécurité privée (DISP), au conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) et à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques de lui faire des propositions relatives à l'évolution de la profession visant à trouver un « équilibre entre, d'une part la nécessité de professionnaliser et de conférer un statut rjuridique clair à certaines activités, d'autre part, le principe de proportionnalité en matière de respect des libertés publiques.12 » Une rencontre entre le ministre de la Défense et le ministre délégué aux transports, à la mer et à la pêche le 17 octobre 2012 a permis de relancer le dossier. Un avant-projet de loi visant à autoriser par agrément l'embarquement d'EPPN à bord de navires battant pavillon français et naviguant dans des zones à risque a été rédigé en avril 2013. Des échanges entre le secrétariat général de la mer (SG Mer) et le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) ont permis d'élaborer un texte consensuel examiné par le Premier ministre le 4 juillet 2013. A la suite du « rapport Leroy », et conformément à sa sixième recommandation13, le Premier ministre a annoncé lors des neuvièmes assises de la mer l'autorisation d'EPPN, avant que le ministre délégué aux transports, à la mer et à la pêche ne présente un projet de loi le 3 janvier dernier. En raison du calendrier électoral de 2014, le projet de loi ne pouvait pas être examiné par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale avant le 8 avril. Voté à l'unanimité ce même jour, le projet de loi a fait l'objet d'une procédure accélérée, d'un examen devant le Sénat où des divergences ont pu être constatées entre le texte proposé par le Gouvernement et les amendements déposés au Sénat puis d'une commission mixte paritaire (CMP). Les points de désaccord portaient notamment sur le nombre minimum d’agents, la mention de leurs anciennes fonctions, le zonage, l’autorisation des services internes d’armateurs importants tels CMA-CGM et le régime applicable aux EPPN. Voté le 19 juin dernier, la loi a été promulguée le 1e juillet et il ne manque plus que les décrets d'application pour que le texte soit pleinement opérationnel. Satisfait de ce « très large consensus », le délégué général d'Armateurs de France, Eric Banel, a rappelé que l'examen de ce texte a déjà pris « deux à trois mois de retard », retardant sa mise en œuvre opérationnelle difficile avant l'été.

Il est essentiel de préciser la notion de piraterie pour comprendre que les Etats qui entendent participer à la lutte contre ce phénomène et notamment à la répression de celui-ci ne peuvent se contenter de s'en remettre aux seules dispositions du droit international public.

2. Définitions de la piraterie :

Du grec peiraô (tenter sa chance à l'aventure) et du latin pirata (celui qui tente la fortune)14, la piraterie, au sens commun du terme, désigne tout acte de déprédation ou de violence commis en mer contre un navire, son équipage, ses passagers ou sa cargaison. Dans son ouvrage Géopolitique des océans, Cyrille Coutansais évoque le caractère multiple15 de ce phénomène aux modus operandi variés16, présent aussi bien dans les récits d'Homère17 que dans n'importe quelle mer du globe, dès lors qu'une civilisation (Phéniciens, Vikings, empire du Milieu) possède une marine.

12 Extrait de l'allocution de Manuel Valls, alors ministre de l'Intérieur, lors de la rencontre avec les acteurs de la sécurité privée et les membres du CNAPS, prononcée le 26 octobre 2012.

13 LEROY, A. (2013). Rapport sur la compétitivité des transports et services maritimes français.14 MONTAS, A. (2012). Droit maritime, Vuibert. 15 Pour l'auteur, la piraterie est une diversification des activités criminelles en Asie et dans les Caraïbes ou une aventure

entrepreneuriale en Somalie. Elle répond à une logique de prédation en Asie du Sud-Est ou est la conséquence d'une recomposition des forces au niveau local dans le golfe de Guinée.

16 Dans son mémoire intitulé La criminalité organisée dans le golfe de Guinée : Enjeux et perspectives, Mathilde Gemon distingue plusieurs modes opératoires : l'attaque à quai ou au mouillage ; l'attaque dans une navigation en eaux resserrées ; la prise du navire et de son équipage en otage, le navire pouvant même servir de bateau mère pour de futures attaques et le siphonnage de navires.

17 Ainsi, l'on apprend qu'Achille, le héros de la guerre de Troie, et le sage Nestor « erraient avec leurs vaisseaux sur la mer brumeuse pour y ramasser du butin [Iliade, IX, 668.-XIX, 326 . ».

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La définition contemporaine de l'acte de piraterie a été donnée par l'article 15 de la convention de Genève sur la haute mer du 29 avril 1958 : il s'agit de « tout acte illégitime de violence, de détention ou de prédation commis pour des buts personnels par l'équipage ou les passagers d'un navire privé ou d'un aéronef privé, et dirigés en haute mer contre un autre navire ou aéronef ou contre des personnes ou des biens à leur bord », la haute mer devant être entendue comme l'ensemble de l'aire marine dans laquelle prévaut un principe général de liberté de navigation de tous les pavillons. Elle comprend donc la haute mer et la zone économique exclusive (ZEE) au sens de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (CNUDM). Dans son article 101, la CNUDM définit l 'acte de piraterie comme un acte illicite de violence commis à des fins privées, en haute mer, par un navire privé contre un autre navire.

La définition de la piraterie par le bureau maritime international (BMI) a quant à elle reposé sur une conception géographique décloisonnée des actes constitutifs d'attaques contre les navires dans le but de prendre en compte l'intégralité des actes de violence commis en mer à titre privé et d'obtenir une vision globale du phénomène en mer. Division interne de la chambre de commerce internationale (CCI), le BMI doit permettre à cette dernière de donner des informations fiables aux armateurs et de donner aux assureurs maritimes les moyens d'estimer leur risque-assureur lié à certaines routes maritimes et d'adapter leur tarification en conséquence. S'il distingue « acte de piraterie » et « actes de vol à main armée en mer », le BMI les utilise de manière globale et les applique à « tout acte criminel perpétré contre un navire avec l'intention ou la capacité d'utiliser la force ». L'acte peut donc être commis sans violence mais les pirates doivent être armés et disposés à utiliser leurs armes. Le BMI inclut également dans sa définition les actes commis dans les eaux territoriales et dans les ports, c'est-à-dire le brigandage18, qui échappe à la répression internationale et relève de la juridiction des Etats côtiers. Le BMI justifie lui-même cette définition parce que « la majorité des attaques contre les navires ont lieu à l'intérieur des zones de juridiction des Etats.19»

L'acte de piraterie se distingue également de l'acte de terrorisme, qui est réprimé dans la convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime du 10 mars 1988 dite « convention de Rome ». Clairement orientée vers les détournements de navires et les actes de terrorisme maritime20, cette convention concerne les actes de violence commis à bord des navires par des personnes qui sont déjà à bord et crée, à l'image de la CNUDM, une compétence universelle dès lors que l'auteur de l'infraction est présent sur le territoire ou dans les eaux de souveraineté de l'Etat côtier.

L'OMI propose une définition conforme au droit international en proposant dans son code de conduite une distinction entre l'acte de vol à main armée en mer et l'acte de piraterie, défini dans des termes identiques à ceux prévus dans l'article 101 de la CNUDM.

3. La piraterie, un phénomène en hausse ou particulièrement médiatique ?

L’autorisation des EPPN est intimement lié à la piraterie et aux risques pesant sur les armateurs. Pour Cyrille Coutansais, la résurgence de ce phénomène est due à de nombreux facteurs. En premier lieu, la territorialisation des mers issue de la CNUDM offre aux pirates la possibilité de mener des attaques en haute mer avant de se réfugier dans des eaux territoriales d'un Etat - souvent « failli » - en toute impunité. C'était le cas notamment dans l'archipel indonésien il y a encore quelques années. Ces attaques sont aussi facilitées par la fin de la guerre froide, qui s'est traduite par une prolifération d'armes à bon marché et par une réduction progressive des marines américaines et russes. En second lieu, les navires aujourd'hui sont plus vulnérables, du fait des progrès technologiques se traduisant par une

18 FILLON J.-L. L'ampleur des enjeux juridiques, Centre d'études supérieurs de la marine, Paris, 19 mars 2009.19 ICC-IMB, « Piracy and Armed Robbery Against Ships Report » - rapport annuel 2008, janvier 2009, p. 3.20 La convention de Rome a été conçue après le détournement du paquebot italien Achille Lauro en 1985 par un groupe

terroriste palestinien.

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réduction du nombre d'équipage, des produits transportés rendant le navire bas sur l'eau et d'une faible vitesse dans des zones fréquentées.

Reste à recenser la survenance de tels actes. Dans leur rapport rendu public le 15 janvier 2014 dernier, le BMI et la CCI estiment que la piraterie a reculé en 2013 et connaît une double évolution21. D’une part, le nombre d’incidents impliquant des pirates diminue sensiblement depuis quelques années. En effet, en 2011, 445 incidents impliquant des pirates avaient été recensés. En 2013, ce chiffre était tombé à 264, soit une diminution de 41%. Les pavillons les plus fréquemment attaqués sont ceux du Liberia, de Singapour, du Panama et des Iles Marshall Si l’on prend en compte la nationalité de l’armateur, Singapour, l’Allemagne, la Grèce et Hong Kong sont les pays les plus attaqués. En comparaison, la France est épargnée : en 2013, un navire battant pavillon français a été attaqué (contre 6 en 2011) et trois navires contrôlés par la France mais battant un autre pavillon ont été attaqués. D’autre part, la proportion de Somaliens dans la réalisation de tels actes tend à se réduire également22. En 2011, 237 incidents étaient attribués aux pirates Somaliens, contre 15 incidents « seulement » pour l'année 2013. Le BMI attribue cette baisse à une combinaison de facteurs mêlant l'action des patrouilles internationales (force européenne Atalante de l'Union européenne, Ocean Shield de l'OTAN, présence de la Ve flotte de l'US Navy), l’application des BMP par les navires conformément aux recommandations de l'OMI, l’embarquement d'EPE et de gardes privés et l'influence positive du gouvernement central somalien. Si la piraterie somalienne est en recul (116 attaques en 2011 au large du golfe d'Aden, 28 en 2012 et 4 en 2013), les actes commis par les pirates sont en revanche en hausse dans le golfe de Guinée, au large du Nigeria, où 31 incidents ont été recensés en 2013, contre 10 en 201123. Cette recrudescence de la piraterie concerne également l'Asie du Sud-Est, où 106 incidents ont été recensés en 2013, contre 46 en 2011. « La plupart des attaques dans les mouillages et eaux indonésiens restent des vols opportunistes de faible niveau, sans comparaison avec les incidents plus sérieux constatés en Afrique », tempère toutefois le rapport.

Plusieurs limites doivent être apportées à ces chiffres. La première tient au fait qu'un acte de piraterie n'est recensé que s'il est déclaré, lapalissade non négligeable si l'on songe que l'une des conséquences peut être l'immobilisation du navire à un coût supérieur à l'agression subie. Un autre élément à prendre en considération tient au signalement de la victime auprès de l'autorité compétente, le pays où s'est déroulée l'attaque si elle a eu lieu dans les eaux territoriales, celui d'enregistrement du navire si elle a eu pour cadre la haute mer, chose complexe dans le cadre d'un pavillon de complaisance. Enfin, sans minimiser les actes de piraterie et de prise d'otages, Philippe Chapleau et Jean-Paul Pancracio développent l'idée d'une fabrication d'une menace majeure24 non dépourvue de tout lien avec le terrorisme25, au vu de l'attention particulière de la communauté internationale pour la piraterie au large de la Somalie - au détriment de celle rencontrée dans le golfe de Guinée ou en Asie du Sud-Est - et d'une surmédiatisation depuis 2008 alors que ce phénomène n'affecte qu'une partie des gens de mer et des entreprises. En 2009, une enquête du club des directeurs de sécurité des entreprises montrait que si 2,66 % des sociétés sondées avaient été touchées par la piraterie, la grande majorité l'avait été par des vols (73,3 %) ou par la piraterie routière (25,3 %).

Dans un contexte d'évolution de la piraterie, les Etats ont privilégié les réponses étatiques avant de s'intéresser aux ESSD, lesquelles ont vocation à compléter l'action des EPE (I). A l'image de l'encadrement des entreprises privées de sécurité, une telle activité doit faire l'objet d'un contrôle de la

21 Voir annexe 2, p. 26.22 Voir annexe 3, p. 27.23 Voir annexe 4, p. 28.24 PANCRACIO, J.-P., & CHAPLEAU P. (2014). La piraterie maritime : Droit, pratiques et enjeux. Vuibert.25 L'USS Cole et le pétrolier français Limburg ont respectivement été attaqués le 12 octobre 2000 et le 6 octobre 2002, au

large du Yémen.

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part des pouvoirs publics français, sous l’œil attentif des armateurs dont la responsabilité civile et/ou pénale peut être engagée (II). Enfin, une telle mesure, dont la finalité est de réduire les coûts supportés par les Etats et les sociétés en matière de lutte contre la piraterie, vise à autoriser des sociétés à bord de navires battant pavillon français et contribuer ainsi à sa promotion (III).

I. Les enjeux stratégiques et diplomatiques des EPPN :

A. Les réponses apportées par les Etats face à la piraterie :

« Problème classique dévolu aux marines de guerre, la piraterie se voit traitée par un éventail de moyens allant de la sous-traitance de prérogatives de souveraineté à la privatisation des fonctions de défense voire au retour des corsaires », selon Cyrille Coutansais.

1. Les réponses « classiques » :

Si l'article 110 de la CNUDM prévoit les conditions dans lesquelles un Etat, ayant de sérieuses raisons de soupçonner qu'un navire se livre à la piraterie, peut l'arraisonner en haute mer sans l'accord de l'Etat du pavillon26, par dérogation au droit commun de la compétence de l'Etat du pavillon prévue dans l'article 92 de cette même convention, les dispositions de la CNUDM relatives à la définition du crime de piraterie ne sont pas self executing et impliquent pour les Etats d'insérer dans leur droit interne une incrimination. Pour certains Etats, il était impossible de juger des pirates capturés par leurs propres navires ou de confier le jugement à des Etats riverains n'ayant pas participé à leur capture. En conséquence, le Secrétaire Général des Nations Unies avait confié une mission à Jack Lang avant que le Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU), dans une recommandation du 27 avril 2010 suivie d'une résolution 1976 du 11 avril 2011 n'enjoigne les Etats membres à « ériger la piraterie en infraction pénale dans leur droit interne et à envisager favorablement de poursuivre les personnes soupçonnées de piraterie qui ont été appréhendées au large des côtes somaliennes et d'incarcérer celles qui ont été reconnues coupables, dans le respect du droit international des droits de l'homme applicable.»

Les Etats concernés par la piraterie peuvent, en plus de se conformer aux dispositions internationales et aux résolutions du CSNU, décider d'agir à un niveau régional. C'est le cas des pays riverains de l'océan Indien tous signataires du code de conduite de Djibouti du 29 janvier 200927 ou de l'UE, signataire d'accords avec des pays riverains portant sur le transfert de pirates capturés par la force navale européenne de l'opération « Atalante ».

Enfin, la réponse apportée par la communauté internationale pour combattre la piraterie au large de la Somalie peut prendre la forme de dispositifs coercitifs. Ne se limitant pas à la création de couloirs de navigation28, le CSNU a dans une résolution 1838 du 7 octobre 2008 autorisé le déploiement d'unités pour protéger les navires du programme alimentaire mondial (PAM). Le 8 décembre 2008, l'UE a lancé une opération aéronavale de dissuasion, de prévention et de répression des actes de piraterie (opération « Atalante ») qui se prolongera au moins jusqu'en décembre 2014. L'organisation du traité Atlantique Nord (OTAN), après avoir lancé plusieurs opérations de circonstances (« Allied Provider » ou « Allied Protector ») a lancé le 17 août 2009 l'opération « Ocean Shield ». Si le recours à des personnels de sécurité armés est possible en accord avec les réglementations de l'Etat du pavillon, de l'Etat côtier et de

26 Article 110 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982.27 En plus de définir le crime de piraterie, le vol à main armée, la complicité, ce code prévoit un principe de coopération,

d'échange d'informations et d'officiers embarqués et la répression de tels actes. 28 On peut citer l'International Recommended Transit Corridor, composé de deux lignes de navigation où les navires étaient

groupés en fonction de leur vitesse.

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l'Etat du port, l'OMI ne souhaite pas une institutionnalisation de ces derniers et privilégie le déploiement de bâtiments militaires, au sens des dispositions 8.15 des BMP29.

2. Des Etats tentés par l'externalisation de la défense :

Pour Eric Delbecque, si les difficultés budgétaires des Etats expliquent l'émergence et le recours à des prestataires privés en matière de sécurité en mer, c'est surtout « un appétit généralisé pour la sécurité dans un monde vécu comme incertain et dangereux qui crée et développe le marché de la sécurité privée30», dont l'efficacité a été reconnue par le CSNU dans une résolution 2077 du 21 novembre 201231.

Pour Cyrille Coutansais, une telle réponse apportée par les Etats constitue une forme de « privatisation des fonctions de défense » dont la forme la plus originale est la délivrance de lettres de marque32, prévues par la Constitution américaine du 3 septembre 1787 et ce en dépit de la Déclaration de Paris du 16 avril 1856 « réglant divers points du droit maritime » par laquelle le Royaume-Uni et la France comptaient contraindre les autres Nations à renoncer solennellement aux corsaires. A l'époque, les Etats-Unis figurèrent parmi les rares pays à ne pas signer une telle déclaration, de peur de laisser la voie libre à ces deux grandes puissances maritimes. Aujourd'hui donc, le Congrès des Etats-Unis possède le droit constitutionnel « d'accorder des lettres de marque et de représailles, et d'établir des règlements concernant les prises sur terre et sur mer. » La décision de recourir à cette formule ancienne a été prise en novembre 2007 par le Président des Etats-Unis sur le fondement du September 11th Marque and Repraisil Act, qui autorise le Département d'Etat à délivrer de telles lettres sans l'accord préalable du Congrès. C'est la société militaire américaine Pristris Incorporated qui en a bénéficié, armant deux bâtiments dans l'océan Indien pour participer aux opérations de sécurité maritime.

L'externalisation de la sécurité maritime se caractérise également par la création de sociétés spécialisées dans la protection des biens et des personnes, et ce, dès les années 200033, pour répondre au développement de la piraterie au large de la Somalie, compenser le retrait progressif des Etats et proposer une alternative aux forces de sécurité locale. C'est en quelque sorte un retour d'une pratique ancienne remontant aux temps anciens de la marine à voile34. Ces entreprises proposent leurs services dans certains points chauds du globe : dans le détroit de Malacca, où une quinzaine de compagnies de transport maritime ont opté pour la présence d'anciens Gurkhas majoritairement recrutés par l'Anglo Marine Overseas Services afin de former des équipes d'intervention ; au Nigeria, où les plates-formes pétrolières sont sous la garde de navires armés par des équipages locaux financés par les sociétés pétrolières. Le recours à des SMP peut aller plus loin comme le montre la signature par la société Secopex d'un contrat couvrant la sécurité de la mer territoriale somalienne, la création d'une unité de garde-côtes et la formation des personnels somaliens.

29 « This advice does not constitute a recommendation or an endorsement of the general use of armed Private Maritime Security Contractors.Subject to risk analysis, careful planning and agreements the provision of Military Vessel Protection Detachments (VPDs) deployed to protect vulnerable shipping is the recommended option when considering armed guards. »

30 PANCRACIO, J.-P., & CHAPLEAU P. (2014). op. cit.31 Selon les termes de la résolution, le Conseil « engage les Etats du pavillon et les Etats du port à étudier plus en avant la

mise au point de mesures de sûreté et de sécurité à bord des navires, y compris, s'il y a lieu, l'établissement de règles applicables au déploiement de personnel de sécurité armé sous contrat privé à bord des navires. »

32 CHAPLEAU, P. , Washington lâche des corsaires dans l'océan Indien, Ouest-France, 3-4 novembre 2007.33 Au départ limitées à la formation d'agents, ces compagnies, essentiellement anglo-saxonnes, ont développé des

compétences en matière de sûreté portuaire, de protection et d'escorte de navires. 34 On rappelle que le verbe « armer » un navire signifie constituer un équipage, dont la première fonction au Moyen Age était

de défendre le navire contre les attaques de pirates.

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B. Les EPPN, une solution réellement complémentaire aux EPE ?

Porteur du projet, le secrétaire d'Etat aux transports, à la mer et à la pêche Frédéric Cuvillier rappelait le 29 avril dernier que la contribution des EPE n'était « pas appelée à baisser, les sociétés privées n'intervenant qu'en complément de l'action régalienne de la Marine. » Toujours est-il que le projet actuel ne satisfait pas complètement Armateurs de France.

1. Un dispositif français partiellement satisfaisant :

Qu'en est-il du côté français ? La protection des personnes et des biens relevant en premier lieu de l'Etat dans son rôle de protecteur des libertés fondamentales35, de garant de la sécurité en mer36 et de l'exercice de la liberté de navigation37, l'Etat français lutte contre la piraterie en ayant recours à plusieurs outils, lesquels restent néanmoins limités dans un contexte de réduction des moyens étatiques.

En premier lieu, conformément à la recommandation 1976 du CSNU, la France est venue clarifier un arsenal normatif peu adapté aux exigences de la communauté internationale. Par l'intermédiaire de la loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l'exercice des pouvoirs de police de l'Etat en mer, qui vient modifier les dispositions de la loi n° 94-589 du 15 juillet 1994 relative à la lutte contre la piraterie et aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de police en mer, le chef d'incrimination de piraterie supprimé par une loi de modernisation du droit en 2007 est réintroduit38 et, à la suite de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) du 10 juillet 2008 Medvedyev et autres c/ France, un nouveau système de garanties judiciaires relatives aux conditions de rétention à bord des navires de guerre français est institué.

En deuxième lieu, le contrôle naval volontaire résulte d'un accord librement négocié entre la Marine nationale et la marine marchande, matérialisé par une instruction interministérielle n° 1094 SGDN/PSE du 27 juin 2001. Le dispositif initialement prévu dans l'océan Indien s'est étendu dans le golfe de Guinée le 1er juillet 2008 et a concerné 280 navires dont les thoniers senneurs de l'océan Indien considérés comme particulièrement vulnérables39. Les échanges entre les armateurs ayant signé le protocole et les forces navales sont facilités par le centre de coopération navale (CENTCOOPNAV) de Brest, joignable 7j/7 et 24h/24. Ils portent sur les mouvements et les intentions des capitaines de navire pour permettre un meilleur suivi des positions ou sur la diffusion d'informations relatives à la situation nautique et militaire dans la zone traversée ou de directives quant aux routes à suivre et au comportement à adopter.

Enfin, la dernière mesure concerne le déploiement d'EPE, autorisé par arrêté du 22 mars 2007 établissant la liste des missions en mer incombant à l'Etat dans les zones maritimes de la Manche-mer du Nord, de l'Atlantique, de la Méditerranée, des Antilles, de Guyane, du Sud de l'océan Indien et dans les eaux bordant les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). La Marine nationale décide de l'affectation des 152 commandos marine ou fusiliers-marins en étudiant les critères d'attribution suivants : pavillon français, présence de citoyens français à bord, nationalité française du propriétaire, transport d'une cargaison ou activité d'intérêt stratégique pour la France. Le remboursement des frais est fondé sur le décret n° 86-366 du 11 mars 1986 relatif à la rémunération de certains services rendus par le ministère de la Défense, qui pose la règle d’une rémunération des services rendus par les armées

35 Article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen des 20-26 août 1789.36 Article 94 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982.37 Article 90 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982.38 La loi renvoie à des infractions préexistantes et susceptibles d'être qualifiées d'actes de piraterie au sens de la CNUDM : le

détournement de navire (articles 224-6 et suivants du code pénal) ; enlèvement et séquestration précédant, accompagnant ou suivant un détournement de navire (articles 224-1 et suivants du même code) et participation à une association de malfaiteurs destinée à préparer les actes précités (article 450-1 et suivants du même code).

39 MENARD, C., & VIOLLET, J.-C. (2012). op. cit., p. 23.

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dans la mesure où ils bénéficient à des tiers. La totalité des dépenses supplémentaires entraînées par le déploiement de l’EPE est à la charge de l’armateur : transport de l’équipe et du matériel, hébergement et alimentation, suppléments de rémunération (majorations de solde ou d’indemnités prévues par la réglementation) et frais d’utilisation par l’équipe des moyens de communication du bord dans le cadre de la mission de protection. De plus, l’armateur est tenu d’assurer le personnel et le matériel de l’Etat ainsi que d’assurer l’Etat pour les dommages qui pourraient être causés par l’EPE aux tiers. Ces dépenses sont alors directement réglées par l’armateur ou remboursées par celui-ci à l’Etat en fonction des dépenses réellement effectuées. Au final, cela représente un coût moyen évalué à 2 000 euros par jour. Cela est bien moins cher que les prestations proposées par une EPE hollandaise (80 000 euros) ou que le prix à payer pour une prestation privée (entre 3 000 et 4 000 euros par jour). Qu'elle soit privée ou militaire, la protection coûte un milliard de dollars par an selon Eric Banel.

Si le dispositif français a longtemps suffi40, la réduction du format de la Marine nationale (23 500 suppressions d'effectifs annoncées dans la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale [LPM] 2014 – 2019) combinée à un besoin de sécurité des armateurs et des exigences commerciales peu compatibles avec la réactivité de la Marine nationale, notamment en cas d'affrètement au spot41, font qu'un tiers des demandes des armateurs ne seraient pas satisfaites (24 demandes pour 6 refus en 2011, 19 demandes pour 8 refus en 2012, 30 demandes pour 8 refus) à l'heure actuelle.

En effet, si certaines EPE peuvent être basées dans un pays étranger, comme les Seychelles pour la protection des thoniers senneurs par exemple, la principale difficulté rencontrée concerne les délais de déploiement : l’arrivée d’une équipe, de ses armes et munitions est liée à l’obtention de l’accord de l’Etat des ports concernés. Certains Etats refusent le principe d’une protection armée de navires de commerce dans leurs ports et leur mer territoriale – ou imposent des délais qui peuvent atteindre plusieurs semaines. En outre, les critères de vulnérabilité (navires lents, bas sur l'eau) que la Marine nationale a adoptés pour l'embarquement d'EPE ne recouvrent pas ceux fixés par les assureurs ou les clients, notamment pour le transport de produits énergétiques. Enfin, l'élargissement des zones à risques et l'apparition d'une nouvelle zone de piraterie dans le golfe de Guinée nécessite d'embarquer ou de débarquer les équipes en différents points d'entrée occasionnant des problèmes logistiques pour la Marine nationale, alors que les sociétés privées sont plus réactives et disponibles. Face à ces insuffisances, certains armateurs ont pu embarquer des ESSD en toute illégalité ou bien procéder à un « gel du pavillon »

Si l'externalisation de la sécurité maritime permettra de compléter l'action des pouvoirs publics français, les EPPN verront leur champ d'action restreint.

2. Un champ d'action limité pour les futures EPPN :

L'article 13 de la loi du 1e juillet 2014 renvoie au décret le soin de fixer les types de navires non éligibles ainsi que les circonstances dérogatoires dans lesquelles ceux-ci peuvent embarquer des agents de protection et à un arrêté pour les zones à haut risque de piraterie. La condition d'exclusivité de l'activité est atténuée, les EPPN étant autorisées à pratiquer des activités de conseil et de formation en matière de sûreté maritime42. Si les navires à passagers et les navires de plaisance n'étaient pas expressément exclus du projet de loi, les réflexions lors des débats parlementaires les ont écartés, notamment après le premier échec de la protection privée survenu le 30 avril 2014 à bord du SP Brussels, un navire battant pavillon des îles

40 Depuis 2009, 93 EPE ont été déployées, 15 attaques ont été repoussées, sans perte ni blessé. 41 FORISSIER, P. Pour une légalisation réfléchie des gardes armés privés, DSI, n°89, février 2013.42 Article 8 de la loi n° 2014-742 du 1er juillet 2014 relative aux activités privées de protection des navires.

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Marshall. Cet événement a posé également la question du nombre minimal de gardes armés43. Pour ces navires, navires à utilisation commerciale (NUC) compris, qui n'ont subi aucune attaque en 2012 et 2013, il s'agit de les dissuader de fréquenter les zones à risque et de ne pas exclure l'autorisation d'EPPN en cas de navigation dans de telles zones dès lors qu'il n'y a pas de passagers. Pour Stéphane Papillon, principal actionnaire de la société Yachting & Cruises basée en Irlande, cela revient à nier le risque d'attaque des paquebots, comme celle du Achille Lauro en octobre 1985. La définition de navires susceptibles d'accueillir à bord des agents d'EPPN risque de faire des mécontents et exclut dans tous les cas une escorte, les agents ne pouvant protéger un navire à partir d'un navire tiers.

Si les zones maritimes concernées sont celles où sont recensés des actes de piraterie (golfe d'Aden et golfe de Guinée), qu'en est-il des zones où la piraterie réapparaît (Asie du Sud-Est) et de celles où la piraterie diminue (golfe d'Aden), à tel point que la zone n'est plus considérée à « haut risque » ? Lors des débats au Sénat, des amendements ont notamment proposé une définition souple de ces zones par arrêté44, une extension de leur périmètre à une étendue couvrant l'équivalent de quelques jours de navigation supplémentaires ainsi que la création d'un comité composé des représentants des armateurs et des ministres intéressés permettant davantage de réactivité dans la redéfinition des zones et une meilleure protection des principales entreprises françaises opérant à l'international (Bourbon, Louis-Dreyfus Armateurs, Seatankers, CMA-CGM, Marfret, V-Ships). De plus, en retenant la terminologie de « menaces extérieures », les activités de protection des navires couvriront à la fois la protection contre les pirates et les bandes armées agissant à des fins non lucratives, notamment terroristes. Le projet de loi génère toutefois des difficultés pour Alain Richard, co-rapporteur du projet de loi au Sénat : « en cas d'incident grave en dehors de ces zones, (le) discernement (de l'Etat) pourra être mis en cause (et) en cas d'agression d'un navire pour lequel le décret a exclu la possibilité d'avoir recours à des gardes armés privés, l'Etat pourrait voir sa responsabilité mise en cause. »

La facilité du transit et du stockage des armes dépend des possibilités logistiques d'une part et de la réglementation de l'Etat côtier d'autre part. En premier lieu, certains pays, comme l'Egypte, le Sri Lanka ou le Soudan, sont bien structurés pour permettre les embarquements / débarquements et le stockage des armes. Ainsi, les agents des entreprises de protection des navires embarquent et débarquent dans ces ports, avec ou sans leurs armes selon les législations locales. Dans le cas où les voies empruntées ne permettent pas de débarquer les armes, celles-ci restent à bord des navires. Cela dépend aussi du type de routes : pour les navires qui font des rotations entre des zones de risques, les armes restent à bord. La situation est moins structurée dans le golfe de Guinée car le phénomène de piraterie étant plus récent, tous les Etats n’ont pas adapté leur législation concernant le transit et le stockage d’armes.

En deuxième lieu, l'Etat côtier exerce ses pleines compétences à l'intérieur de ses eaux territoriales et peut ainsi parfaitement interdire que des hommes armés y transitent et obliger les équipages et les membres de l'équipe de protection à enfermer les armes dans un local dédié. C'est le cas de la Malaisie, qui considère que le recours à des gardes armés sur des navires entrave le passage inoffensif et peut décider d'interdire au navire concerné de pénétrer dans la mer territoriale45. L'Inde tient une position similaire. Le 12 octobre 2013, la marine indienne a arraisonné le MV Seaman Guard Ohio, un navire américain battant pavillon du Sierra Leone. Dix marins et 25 gardes armés sont actuellement détenus pour possession illégale d'armes, preuve du caractère sensible de l'utilisation d'ESSD (AdvanFort en l'espèce) à proximité d'un Etat côtier.

43 Si l’attaque a pu être repoussée par deux gardes armés à bord, un marin est décédé. La norme ISO 28007 relative à la protection privée des navires recommande un effectif de 4 agents, tout comme le BIMCO. L'article 14 de la loi du 1er juillet 2014 relative aux activités privées de protection des navires fixe un seuil minimum à trois agents.

44 Voir annexe 5, p. 29.45 Article 17 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982.

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D'autres Etats ayant des revendications extensives dans leur ZEE au regard du droit de la mer tel que prévu par la CNUDM sont réticents au développement d’activités par des Etats tiers dans leur ZEE. Cette attitude participe d’une lecture atypique de la CNUDM puisque les navires protégés qui assurent des transports entre des ports n’exercent pas une activité liée à l’exploitation des ressources de l’Etat côtier. C'est le cas du Nigeria, qui interdit aux armateurs de recourir à des équipes de protection de leur choix ou même des EPE du pays dont leurs navires battent pavillon et impose ses hommes en mer territoriale ou dans la ZEE. Ces pratiques sont considérées comme une forme de racket pour certains armateurs européens. Par ailleurs, certains Etats (Afrique du Sud, Sénégal) estiment que l’activité de protection des navires devrait demeurer une prérogative des Etats. Ils craignent en effet que la similitude entre le comportement des navires de pêche et des pirates dans les zones de piraterie, notamment dans le Golfe de Guinée, constitue un risque élevé d’incident pour des entreprises privées.

Il conviendra donc de de négocier des accords bilatéraux ou multilatéraux pour permettre aux EPPN de continuer à assurer la protection dans les eaux territoriales et éviter que des difficultés opérationnelles ne voient le jour, notamment à propos du stockage et du transport d'armes. A ce propos, l'étude d'impact du projet de loi rappelle que le stockage et le transport des armes relève de la responsabilité de l'armateur qui assure le transit à terre dans la zone portuaire jusqu'à l'installation à bord et informe les autorités du port et l'exploitant de l'installation portuaire le cas échéant, conformément aux dispositions du code ISPS, du règlement (CE) n° 725/2004 et au décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif. Ce décret prévoit notamment une déclaration au préfet et aux services de police et de gendarmerie des départements de départ et d'arrivée ainsi qu'un démontage des armes pour ne pas les rendre immédiatement utilisables.

L'autorisation des EPPN à bord des navires battant pavillon français permettra de compléter l'action des EPE, dans des zones et sur des navires prochainement définis. Dispositif aux conséquences diplomatiques évidentes, le recours à des agents d'EPPN pose des questions juridiques, notamment en cas d'usage de la force.

II. Les enjeux juridiques des EPPN :

A. Les EPPN : un vide juridique posant des questions en terme d'agrément et de responsabilités :

Si les pouvoirs publics français ont pu se montrer réticents à autoriser des entreprises privées pouvant faire usage de la force dans certaines conditions, les employeurs, dont la responsabilité civile et / ou pénale peut être engagée en cas de méconnaissance de l'obligation d'assurer la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail, ont souligné les enjeux juridiques résultant de l'autorisation des EPPN.

1. Le cadre juridique et institutionnel français actuel :

Deux lois apportent des précisions sémantiques et juridiques sur les entreprises exerçant des missions de sécurité sur ou hors du territoire de la République. La première est la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 modifiée réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds. Dans sa version originelle, l'article 7 dispose qu'une entreprise de surveillance, de gardiennage ou de transports de fonds « ne peut exercer ses activités qu'après avoir obtenu une autorisation administrative » délivrée par la préfecture du département où l'entreprise est inscrite à titre principal ou secondaire sur le registre du commerce et des sociétés. La seconde est la loi n° 2003-340 du 14 avril 2003 relative à la répression de l'activité de mercenaire. Elle définit le mercenariat dans les

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articles 436-1 et suivants du code pénal et incrimine les activités de mercenaire et le fait de diriger ou d'organiser un groupement ayant pour objet le recrutement de mercenaires, respectivement punies de cinq et sept ans d'emprisonnement et de 75 000 et de 100 000 euros d'amende.

Ne relevant ni des entreprises prévues dans les dispositions de la loi du 12 juillet 1983 modifiée ni des activités réprimées par la loi du 14 avril 2003, les équipes de protection privée posent un certain nombre de questions d'ordre juridique. Pour l'amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des armées à l'époque, si les SMP à terre « posent des problèmes de droit international », la situation est nettement moins compliquée pour des équipes de protection privées susceptibles d’être embarquées à bord de navires commerciaux. « Le droit à la mer est simple, dès lors que vous êtes sorti des eaux territoriales, le droit applicable est celui du pavillon, quelle que soit la nationalité de l’équipage, de l’affréteur, ou du propriétaire de la cargaison » a-t-il ajouté. Estimant que le navire devrait être une extension du territoire national, les armateurs ont plaidé pour l'application des dispositions des articles L.611-1 et suivants du code de la sécurité intérieure au secteur des transports maritimes. Or le Conseil constitutionnel, dans une décision du 28 avril 2005 relative à loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français (RIF), a décidé qu'il « résulte des règles actuelles du droit de la mer qu'un navire battant pavillon français ne peut être regardé comme constituant une portion du territoire français ». Présentée autrement, la question des EPPN illustre d'une certaine manière la réticence des pouvoirs publics français à autoriser des entreprises privées à faire usage de la force sur le territoire français ou dans les eaux non soumises à la juridiction française. Pour Jocelyne Caballero, ambassadrice chargée de la coordination de la lutte internationale contre la piraterie maritime Quai d'Orsay, « Il faut prendre garde dans ce domaine, aux transferts du public vers le privé. »

Dans une conception « weberienne » de l'Etat, les pouvoirs publics français ont souhaité encadrer les activités de sécurité, en créant des autorités chargées de les encadrer. La loi n° 2000-494 du 6 juin 2000 a créé la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), autorité administrative indépendante, dont la mission est de veiller au respect de la déontologie par les fonctionnaires et par les professionnels exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République. L'article 71-1 de la Constitution, issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, a programmé la disparition de la CNDS, dont les missions ont été transférées au Défenseur des droits à la suite de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits et qui sont exercées effectivement par ce dernier depuis le 1er mai 2011. Issu de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure dite « LOPPSI 2 », le CNAPS est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l'Intérieur. Organisme de contrôle et de régulation, il est chargé de l'agrément des professions régies par la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 modifiée réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds et des EPPN.

2. Les obligations de l'employeur en matière de sécurité et de conditions de travail :

Au-delà de ces considérations institutionnelles, l'enjeu porte sur l'obligation pesant sur l'employeur d'assurer la sécurité de l'équipage et des conditions de travail respectueuses des standards internationaux. Considérés comme des gens de mer non marins, les agents armés sont protégés par la MLC 2006 et se voient offrir des garanties diverses (rapatriement, habitabilité, restauration) qui feront l’objet de contrôles. De plus, l'armateur peut voir sa responsabilité engagée en cas d'incident, aussi bien au civil qu'au pénal.

Au civil, une obligation de sécurité découle des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail et de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale. Dans un arrêt du 24 octobre 2007 dite « affaire de Karachi », la Cour d'appel de Rennes a décidé, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, qu'il « appartenait à l'employeur (...) des salariés concernés, qui ne pouvait ignorer les dangers qu'ils

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courraient en raison des menaces d'attentats existant à Karachi en 2002, de veiller à ce que les mesures édictées soient strictement appliquées, au besoin renforcées, ceci en application des dispositions de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui impose à l'employeur, lié à son salarié par un contrat de travail, une obligation de sécurité de résultat envers celui-ci.» En cas de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, le travailleur peut se retirer et l'employeur ne peut lui demander de reprendre son activité, conformément aux dispositions de l'article L. 4131-1 du code des transports. Reste à savoir si le décret en Conseil d'Etat mentionné dans l'article L. 5545-4 fonde le capitaine à exercer son autorité sur les gardes armés embarqués et voulant éventuellement utiliser leur droit de retrait.

Au-delà de la faute inexcusable, la sécurité du personnel apparaît susceptible d'être pénalement sanctionnée. Ainsi, en cas de décès ou de blessure d'un membre du personnel suite à un acte de piraterie, la responsabilité pénale de la société qui l'emploie pourrait être recherchée sur le fondement de l'article L. 121-3 du code pénal qui dispose qu'un délit est constitué « lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer. »

Le défaut de sécurité face à une menace criminelle ayant été reconnu comme constitutif d'une faute inexcusable par la juridiction civile, il est réaliste de penser que le juge pénal le considère comme fautif également. Ainsi, dans le cas d'actes de piraterie dont serait victime un membre d'équipage, rien ne semblerait s'opposer à engager la responsabilité pénale de l'armateur s'il est démontré qu'il n'a pas correctement assuré la sécurité du bord. L'armateur devra prouver qu'il n'a commis aucune faute de nature à mettre l'équipage en danger. Une faute pourrait consister en un refus, en connaissance des risques, de recourir à un service d'accompagnement par des bâtiments d'Etat par exemple. Les agents d'EPPN étant considérés comme des gens de mer et donc en principe dotés d'une pièce d'identité des gens de mer telle que prévue dans la convention n° 185 de l'organisation internationale du travail (OIT), l'absence d'un tel document - dans le cas où un agent serait ressortissant d'un pays non signataire de la convention - empêchant l'embarquement de gardes pourrait-elle potentiellement engager la responsabilité de l'employeur ?

Pour les armateurs désireux d'embarquer des EPPN, il convient de privilégier le recours à des agents ressortissants de pays signataires de la convention n° 185, qui permet de fluidifier les relèves, de réduire le coût de présence à bord et de faciliter la descente à terre sans visas, par exemple pour recevoir des instructions éventuelles. Pour l'Etat du pavillon, il s'agit de contrôler une telle activité, notamment par l'intermédiaire d'un contrôle documentaire.

B. Un nécessaire contrôle des EPPN, des agents et de leur activité :

Organisme central dans l'agrément et le contrôle des EPPN, le CNAPS veillera entre autre à ce que leurs agents disposent de connaissances relatives aux dispositions du code pénal relatives à la légitime défense et à l'état de nécessité et aux conditions d'usage des armes, lesquelles peuvent être à l'origine d'imbroglios diplomatiques.

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1. La problématique de l'usage des armes :

L'affaire de l'Enrica Lexie, bien qu'elle ne concerne que des EPE, doit rappeler les pouvoirs publics français, les armateurs et les EPPN à faire preuve de prudence en cas d'usage de la force.

Le 15 février 2012, deux fusiliers marins italiens embarqués à bord du pétrolier Enrica Lexie ont fait feu sur un navire de pêche indien, le St Antony, croyant qu'il s'agissait d'une embarcation de pirates. Au-delà du désaccord portant sur la zone dans laquelle se situait le navire lorsque les EPE ont fait feu, et donc de la compétence de l'Etat du pavillon ou de l'Etat côtier en fonction de la zone retenue, l'affaire a pris une tournure diplomatique lorsque l'Italie a fait savoir à l'Inde que les soldats ne retourneraient pas en Inde, et ce en dépit d'un engagement diplomatique du gouvernement italien. En représailles, l'Inde a interdit à l'ambassadeur italien de quitter son ambassade, ce qui constitue une violation de l'immunité diplomatique pourtant protégée par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961. Plus de deux ans après les faits, les Italiens ne sont toujours pas inculpés et l'incrimination de terrorisme a été abandonnée.

Dans le cas d'un embarquement d'une EPPN à bord, les difficultés sont d'une autre nature. Si la présence d'hommes armés à bord est tolérée à condition que l'usage des armes ne puisse s'exercer qu'en situation de légitime défense – laquelle peut être étendue au sens de l'article L. 5531-6 du code des transports46-, comme l'intègrent d'ailleurs les dirigeants des diverses sociétés privées qui présentent leur action comme essentiellement dissuasive, reste une question : qui portera la responsabilité d'un bien endommagé, d'une blessure ou plus gravement d'un décès d'une personne n'ayant pas présenté de menace en cas d'ouverture de feu par un garde armé ? L'agent, la société qui l’emploie, l'armateur, le capitaine du navire attaqué, l'Etat du pavillon du navire attaqué ou l'Etat d'où vient la société privée de sécurité ? L'agent et son employeur pourraient être poursuivis respectivement pour un crime ou du fait de la responsabilité pour son préposé. L’armateur pourrait être poursuivi pour avoir eu recours à une entreprise qui n'est pas dûment agrée ou pour y avoir eu recours en dehors des zones autorisées. Le capitaine ayant autorité sur toute personne à bord au sens de l'article L. 5331-1 du code des transports47, et a fortiori sur les membres de l'équipe de sécurité - sous réserve de deux limites48-, peut avoir une vision différente de celle du chef d'équipe et donner l'ordre d'ouvrir le feu. Il serait dans ce cas coresponsable des éventuelles conséquences, notamment en cas d'atteintes à la vie ou à l'intégrité des personnes non justifiée par la légitime défense, au sens de l'article 122-7 du code pénal49. L’Etat du pavillon du navire attaqué pourrait être jugé responsable des activités de la société qui exerce sur son

46 Celle-ci pouvant être entendue, au sens de l'article L. 5531-6 du code des transports comme la résistance par le capitaine et aux personnes qui lui sont restées fidèles aux actes de violence commises par des personnes embarquées autres que des officiers ou des maîtres visant à se soulever contre l'autorité du capitaine et à refuser après sommation de rentrer dans l'ordre.

47 L'article en question dispose que : « Le capitaine a sur toutes les personnes, de quelque nationalité qu'elles soient, présentes à bord pour quelque cause que ce soit, l'autorité que justifient le maintien de l'ordre, la sûreté et la sécurité du navire et des personnes embarquées, la sécurité de la cargaison et la bonne exécution de l'expédition entreprise.Dépositaire de l'autorité publique, il peut employer à ces fins tout moyen de coercition nécessité par les circonstances et proportionné au but poursuivi. Il peut également requérir les personnes embarquées de lui prêter main-forte. »

48 L’autorité du capitaine sur les gardes armés trouve deux sortes de limites. D'une part, les gardes armés ne peuvent lui prêter main-forte que pour protéger le navire, l'équipage, les passagers et les biens embarqués à bord. D'autre part, l'appréciation de la légitime défense ou de l'état de nécessité étant personnelle, le garde armé serait fondé à ne pas appliquer un ordre d'usage ou de non usage de la force n'entrant pas dans ce cadre.

49 L'article visé dispose que : « N'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace. »

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territoire. L’Etat d’où vient l'ESSD pourrait être poursuivi pour avoir autorisé les activités de la société privée.

Pour l'association française des capitaines de navires (Afcan), il apparaît « nécessaire que l'administration du pavillon clarifie les responsabilités respectives du capitaine et du chef de l'équipe de protection embarquée dans la conduite de la protection du navire, et en particulier dans la prise de décision de l'ouverture de tirs d'avertissement». Au vu des éléments apportés par la commission des lois de l'Assemblée nationale, « hormis des circonstances très spécifiques qui devront être in fine appréciées par le juge comme celles qui découleraient de procédures générales définies par l'armateur, ou une pression particulière sur le capitaine ou la société de protection au moment d'une attaque, et dès lors que le contrat avec l'entreprise de protection ne prévoirait pas des procédures de recours à la force manifestement contraires à la loi, il ne semble pas que la responsabilité de l'armateur puisse être directement engagée en cas d'incident. »

En définitive, les responsabilités de chacun dépendront de la législation applicable. En effet, si l'article 27 de la CNUDM pose le principe de l'incompétence de l'Etat côtier pour connaître d'une infraction commise lors du passage d'un navire battant pavillon d'un autre Etat dans ses eaux territoriales, l'Etat côtier est par exception compétent pour exercer sa juridiction pénale si les conséquences de l'infraction s'étendent sur son territoire ou si l'infraction est de nature à troubler la paix du pays ou l'ordre dans la mer territoriale. En haute mer, il peut exister une concurrence des compétences des Etats50. En effet, si au cours d'une attaque, un membre d'équipage tue un pirate, ce dernier est susceptible de faire l'objet de poursuites judiciaires par l'Etat dont la victime avait la nationalité et ce en dépit de l'allégation de légitime défense et de la conduite répréhensible de la victime51. Reste à savoir si un agent d'EPPN peut être considéré comme un membre d'équipage à part entière.

Pour cette raison peut-être, si les BMP52 et la Commission européenne53 autorisent les compagnies à faire appel à des agents de sécurité supplémentaires, le recours à du personnel armé ne doit pas se substituer aux BMP et l'usage de la force par ces derniers est susceptible d'engendrer des difficultés juridiques. En conséquence, si un procès devait avoir lieu et aboutir à une ou plusieurs condamnations, il conviendrait de déterminer quel impact aurait ce précédent sur l’emploi de sociétés privées.

2. : Le CNAPS, au cœur du dispositif de contrôle et d'agrément :

Institué par la loi du 12 juillet 1983 modifiée, le CNAPS est désormais l'organisme en charge de la délivrance d'une autorisation d'exercice, de l'agrément des dirigeants, gérants ou associés d'une EPPN ainsi que des cartes professionnelles nécessaires aux agents pour travailler dans ces entreprises. Il est également compétent pour prononcer les sanctions disciplinaires54 dans des conditions légèrement différentes des entreprises prévues aux 1° à 3° de l’article L. 611-1 du code de sécurité intérieure.

Pour pouvoir obtenir un agrément, les entreprises, dont les dirigeants seront ressortissants français, d’un pays de l’UE ou de l’espace économique européen (EEE), devront être assurées,

50 Arrêt de la Cour permanente de justice internationale du 7 septembre 1927, dite « affaire du Lotus »51 Circulaire MSC 623 du 29 mai 2002 édictant des « lignes de conduite à l'usage des propriétaires, capitaines et équipages

des navires pour prévenir ou lutter contre les actes de piraterie ou de brigandage »52 « If armed Private Maritime Security Contractors are to be used they must be as an additional layer of protection and not as

an alternative to BMP. »53 Recommandation de la Commission européenne du 11 mars 2010 relative aux mesures d'autoprotection et de prévention

des actes de piraterie et des attaques à main armée contre les navires. Consulté le 18 janvier, 2014 sur : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-10-267_fr.htm

54 Ainsi, aux termes de l'article 30 de la loi du 1er juillet 2014, un armateur recourant à une EPPN non-titulaire de l'autorisation d'exercice encourt une peine de trois ans d'emprisonnement et une amende de 45 000 euros.

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immatriculées au registre des commerces et des sociétés (RCS) et titulaires d'une certification obligatoire. De plus, la commission veillera à ce que les dirigeants et les agents des EPPN aient suivi une formation conforme aux principaux standards internationaux et dont le référentiel est en cours d'élaboration55 et disposent de connaissances relatives aux conditions de moralité requises pour l'accès à la profession, aux conditions d'armement et d'usage des armes, aux dispositions du code pénal relatives à la légitime défense et à l'état de nécessité, à la législation applicable au transport et au stockage d'armes et aux dispositions pertinentes du code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires (ISPS) et du code international de gestion de la sécurité (ISM). Elles s'assureront de l'exercice en toute transparence de cette activité, en procédant à des contrôles administratifs (obligations de déclaration, tenue de registres au sein de l'entreprise et à bord) similaires à ceux effectués pour les activités de sécurité privées soumises au livre VI du code de la sécurité intérieure.

On peut noter que le Législateur a prévu un certain nombre d'obligations destinées à responsabiliser l'entreprise privée et l'armateur, de la constitution d'une équipe à son utilisation à bord des navires. Ainsi, l’EPPN, en accord avec l'armateur et le capitaine, devra définir des règles d'engagement (RoE) ou des règles d'emploi de la force (RUF) conformes aux recommandations de l'OMI. De même, l'armateur pourra également être sanctionné pour avoir eu recours à une entreprise qui n'est pas dûment agréée ou dans une zone autre que celle mentionnée dans le décret.

Dans un contexte économique maritime délicat (la flotte de commerce française a perdu 34 navires en 2012) et en raison d'une concurrence accrue, l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault a confié une mission au député Arnaud Leroy sur la compétitivité des transports et des services maritimes français le 23 avril 2013. L'autorisation d'agents armés, à la demande des professionnels, permettra de réduire les coûts liés à la piraterie pesant sur les armateurs et les Etats, de créer de l'emploi et contribuer à la promotion du pavillon français.

III. Les enjeux économiques des EPPN :

A. Les externalités positives des EPPN sur l'emploi et les coûts induits par la piraterie :

L'autorisation des EPPN à bord des navires battant pavillon français permettra non seulement de réduire les coûts pesant sur les armateurs dont les navires croisent près des zones à haut risque mais aussi de favoriser le développement de sociétés françaises et corrélativement de l'emploi.

1. La recherche d'une réduction des impacts financiers de la piraterie :

Dans un rapport de 2013, la Banque mondiale (BM) évaluait le coût total annuel de la piraterie à 18 milliards de dollars56. Naviguer dans des zones à risques représente un coût aussi bien pour les armateurs que pour les Etats.

Les premiers évaluent à 5,1 et 8,7 milliards d'euros par an les conséquences économiques de cette activité, qui peuvent être déclinées de plusieurs façons. La première consiste à envisager le gain des pirates, qui porte sur le pillage du navire et le vol de la cargaison d'une part et sur les rançons obtenues par les pirates pour la libération d'otages d'autre part57.

55 Voir annexe 6, p. 30.56 Rapport de la Banque mondiale, The pirates of Somalia : ending the threat, rebuilding a nation. Consulté le 18 janvier,

2014 sur : http://siteresources.worldbank.org/INTAFRICA/Resources/pirates-of-somalia-main-report-web.pdf57 Si les pirates, les armateurs et les Etats restent discrets sur le versement de ces sommes, le montant des rançons aurait

connu une hausse, passant de 130 millions de dollars soit 4,5 millions de dollars par navire capturé en 2011, contre une centaine de millions de dollars soit 2,5 millions de dollars par navire capturé en 2009.

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La seconde consiste à envisager les surcoûts induits par le risque de piraterie et pesant sur les armateurs, qui supportent environ 80 % des coûts directs. La moitié de ces surcoûts concerne les dépenses de carburant dues à l’accélération de la vitesse de transit dans les zones à risques conformément aux BMP. Pour la CMA-CGM, cela entraîne une consommation supplémentaire de fioul de 60 tonnes par voyage, soit 20 millions de dollars annuels. Les coûts de déroutements pour éviter les zones dangereuses s’élèvent à environ 600 millions de dollars. Pour la CMA-CGM, cela représente un surcoût de 5 millions de dollars par an. Un milliard de dollars concernerait les dépenses de sécurité (formation des équipages, équipes de protection). En outre, les primes de risque versées aux équipages sont augmentées (3 500 dollars par voyage, soit 300 millions de dollars de primes chaque année). Enfin, les coûts d’assurances s’élèvent à 630 millions de dollars chaque année et dépendent de la valeur du navire (de 0,125 % à 0,2 % pour chaque passage dans une zone classée en « risque de guerre », soit un coût supplémentaire de 20 à 30 000 dollars par jour de traversée, reporté sur les clients et in fine sur les consommateurs)58. Pour les assureurs, la piraterie permet le développement des contrats spécialement adaptés aux risques59, comme une assurance K&P (Kidnap and Ramsom Insurance) qui s'ajoute aux couvertures « ordinaires » corps (navires), facultés (marchandises) et à la couverture « risques de guerre. » Au total, les armateurs font rapidement leurs comptes : plutôt payer, comme l'estimait le think tank Stratfor, autour de 60 000 $ pour une rotation d'une dizaine de jours que de devoir dérouter un navire, rallonger la durée de navigation, verser des primes aux équipages voire une rançon aux pirates.

Quant aux pays concernés par cette problématique, une étude de la Banque Mondiale évalue le coût annuel de la piraterie somalienne à 13,8 milliards d'euros. Doivent être ajoutées les rançons payées - lesquelles ont été évaluées à 131 millions de dollars en 2011 (en hausse de 6% par rapport à 2010, où les rançons représentaient un total de 80 millions de dollars) - et l'impact négatif de ce phénomène sur les activités économiques des pays voisins, comme le tourisme (dont le chiffre d'affaires progresse 25% moins vite en Afrique de l'Est que dans les autres pays de l'Afrique subsaharienne) ou l'exportation de produits de la pêche (en diminution de 23,8 % depuis 2006 du fait de la chute de la production).

2. Un secteur en plein essor :

L'autorisation des EPPN aurait également des conséquences positives sur l'emploi. Le rapport d'information sur les SMP déposé le 14 février 2010 à l'Assemblée nationale estimait à 300 le nombre de personnes nécessaires pour sécuriser les navires battant pavillon français menacés par la piraterie. Pour les auteurs de l'étude d'impact du projet de loi du 3 janvier 2014, ce chiffre « constitue l'hypothèse basse60» et devrait varier entre 250, pour couvrir les besoins de navires exploités par des sociétés françaises mais battant pavillon étranger, et 500. Les « anciens des forces spéciales, notamment des commandos de marine », constituent un vivier important et compétent, selon Gilles Lacaze, président du groupe Gallice. Cependant, ces derniers, conformément à l'article L. 612-15 du code de la sécurité intérieure n'ont pas le droit de faire état de leur éventuel passé de militaire ou de policier. Pour les avocats du GIE Asterias, Franck Dolffus, Christian Hübner et Benoît Le Goaziou, « la possibilité de s'en prévaloir pourrait permettre aux armateurs de discriminer entre des professionnels de la sécurité et des amateurs. D'ailleurs, on se demande comment la loi ose obliger d'anciens agents de l'Etat à mentir à leurs clients, au minimum par omission, sur leur passé professionnel ! »

Pour les sociétés françaises (Surtymar, Risk & Co, Geos, Prorisk-KSI, Neptune Overseas, Securymind, So-Global, Simar) désireuses d'exister dans un marché dominé par des sociétés anglo-saxonnes (Triskel, APMSS, Solace, AdvanFort, G4S) réunies au sein de l'International Association of

58 MENARD, C., & VIOLLET, J.-C. (2012). op. cit., p. 22.59 ROCHE, M. La piraterie fait exploser les primes d'assurances, Le Monde, 16 avril 2009. 60 Etude d'impact du projet de loi du 3 janvier 2014 relatif aux activités privées de protection des navires, p. 18.

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Maritime Security Professionnals (IAMSP)61, l'autorisation des EPPN aurait plusieurs conséquences. Economiques d'abord, puisque leur légalisation permettrait un développement de formations professionnalisantes telles que celles proposées par IFS2I par exemple et parce que dans un contexte budgétaire difficile qui voit une réduction des pouvoirs de la puissance publique, il est préférable de se reposer sur des EESD nationales pour protéger les intérêts nationaux. Politiques ensuite, parce que les ESSD font partie du paysage géostratégique et qu'elles sont intrinsèquement liées à leur Etat d'origine. Elles peuvent donc être des vecteurs d'influence et de diffusion du modèle français, mais aussi des capteurs participant au recueil du renseignement.

B. Un projet tardif et a minima :

Ambitieux au départ et souhaité par les armateurs et les professionnels de la sécurité maritime, le projet d'autorisation a pris du retard, ce qui pourrait porter préjudice à des entreprises de petite taille face à des géants anglo-saxons déjà bien implantés.

1. Un secteur dominé par les entreprises anglo-saxonnes :

Sept années se sont écoulées entre la mise en place des premières EPE et la constatation que l'Etat n'est plus en mesure de répondre pleinement aux attentes du monde maritime. Plusieurs facteurs expliquent la lenteur de ce processus : une structuration progressive de la réflexion internationale, l’OMI appelant à encadrer le recours aux gardes armés ; une confusion ESSD – mercenariat impliquant un encadrement strict et une prudence des armateurs soucieux de ne pas détériorer les relations avec la Marine nationale. En conséquence, l’avance prise par les ESSD anglo-saxonnes est particulièrement notable. Cela se vérifie en particulier dans la taille62 et dans les normes en vigueur (GUARDCON63, International Code of Conduct ou IcoC), clairement d'inspiration anglo-saxonne mais dont les dispositions « ne sont pas directement applicables aux gardes armés embarqués à bord de navires de commerce 64 ». En collaboration avec l'organisation internationale de normalisation (ISO), l'OMI souhaite établir des normes applicables aux ESSD et aux gardes armés privés (norme ISO/PAS 28007). Les ESSD britanniques bénéficient également d'un réseau logistique établi facilitant le transit des armes sur terre et dans les eaux territoriales de pays tiers (la mise en place d'armureries flottantes dans les eaux internationales en est un exemple) et un effet de masse limitant les temps d'inactivité des équipes entre deux contrats de protection. En outre, l'arrivée d'une offre low cost, principalement originaire des pays asiatiques, les a obligées à gagner davantage en compétitivité en intégrant dans leurs équipes du personnel provenant majoritairement d'Inde ou du Pakistan. Pour les EEPN françaises, le niveau de rémunération des gardes armés dépendra de deux facteurs : la composition de l'équipe (franco-française ou mixte d'une part et le registre d'autre part). En cas de pavillon premier registre (cas des thoniers senneurs), c'est la réglementation française en matière de salaire minimum qui s'appliquera, même en présence d'un contrat international. En cas de pavillon RIF, le contrat d'engagement maritime des gens de mer résidant hors de France est soumis à la loi choisie des parties, dans le respect des dispositions de la convention du travail maritime (MLC) du 23 février 2006.

Pour toutes ces raisons, il semble difficile selon le capitaine de corvette Guilhem Desvignes de créer 500 emplois dans un secteur ultra-concurrentiel, de capter une partie d'un marché estimé à 400

61 MENARD, C., & VIOLLET, J.-C. (2012). op. cit., p. 26.62 Geos, la plus grosse entreprise française, pèse 40 millions d'euros, contre 9 milliards pour G4S.63 Voir annexe 7, p. 33.64 Circulaire MSC 1443 du 25 mai 2012 sur les directives intérimaires à l'intention des sociétés privées de sûreté maritime qui

fournissent du personnel de sûreté armé sous contrat privé à bord des navires dans la zone à hauts risques.

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milliards de dollars en 202065 en pleine expansion - qui a vu la création de 170 sociétés spécialisées au Royaume-Uni entre le 1e janvier et le 30 septembre 201166 - et d'envisager un rapatriement des entreprises ou filiales françaises offshore67 régies par un autre droit pour pouvoir proposer des prestations de sécurité (cas de la société Gallice notamment, qui a recours à une filiale régie par le droit irlandais).

Loin de créer un modèle d'entreprise dont l'éthique serait garantie par l'Etat au moyen d'un dispositif d'agrément et de contrôle, la loi autorisant les EPPN est moins ambitieuse et semble exclusivement motivée par la faible attractivité du pavillon national et par l'exemple de nos voisins européens.

2. Une mesure pour renforcer l'attractivité du pavillon français :

Selon le rapport semestriel de la mission flotte de commerce, le pavillon français « est internationalement reconnu pour être l'un des plus sûrs du monde (…). L'International Chamber of Shipping (ICS) l'a identifié en 2012 parmi les meilleurs pavillons, tant sur la qualité de la flotte, la qualité du contrôle par l'Etat du port que sur le nombre de conventions internationales ratifiées.68 » Malgré ces atouts, la marine marchande française occupe le 28e rang mondial. La dégradation de la conjoncture économique, le recul de l'industrie de raffinage et les derniers financements par groupement d'intérêt économique fiscal font fait craindre aux pouvoirs publics une réduction supplémentaire de la flotte française, d'où la mission confiée au député Arnaud Leroy sur la compétitivité des transports et des services maritimes français.

Au regard des menaces présentées par la piraterie, et dans un marché du transport mondialisé et donc concurrentiel, la protection est devenue un élément à part entière de la compétitivité du pavillon. Si elle n'est pas assurée en continue ou si elle n'est pas susceptible de l'être, le client risque de faire appel à un pavillon étranger. Pour Anne-Yvonne Le Dain, rapporteur à la commission des lois de l'Assemblée nationale, « 40 % des navires des armateurs français naviguent sous pavillon étranger faute d’être autorisés à recourir à une protection armée à bord. » L'autorisation des EPPN n'a pas seulement vocation à créer de l'emploi : elle entend ramener ces navires sous le pavillon français. L'absence d'autorisation d'embarquement des EPPN peut aussi avoir des conséquences économiques importantes de deux façons. D'une part, l'assureur peut ne pas vouloir couvrir la cargaison et empêcher la transaction. D'autre part, une société-mère, comme Maersk Danemark, peut impacter le chiffre d'affaires de sa filiale française en interdisant certains « trades » du fait de l’aléa que représente l’absence de protection des navires battant pavillon français. Pour Maersk France, cela représente une perte équivalente à 15 % des rotations.

Au sein de l'UE et de l'EEE, de nombreux Etats se sont dotés ou sont en train (les Pays-Bas par exemple) en de se doter d'un dispositif législatif et réglementaire permettant le recours à de tels services69. Si la délivrance d'une autorisation de détention et de port d'armes reste la prérogative de la puissance publique dans des pays voisins de la France (Italie, Espagne, Allemagne, Royaume-Uni), des différences existent quant à l'agrément des entreprises70, au nombre minimal d'agents ou à la légitime

65 Estimation du ministère des affaires étrangères et du développement international. 66 Au 1er décembre 2012, les entreprises signataires de l'International Code of Conduct étaient au nombre de 592, de 70 pays

différents.67 DESVIGNES, G. La vacance législative française du marché de la protection, Le marin, 4 avril 201468 Etat de la flotte de commerce sous pavillon français, MFC, janvier 2014, p. 11. 69 Voir annexe 8, p. 35.70 S'il est pratiqué en Allemagne (office fédéral pour l'économie et le contrôle des exportations), en Espagne (ministère de

l'Intérieur) ou en Italie (services préfectoraux), le Royaume-Uni favorise l'autorégulation des marchés en responsabilisant les entreprises privées et les armateurs ayant recours à celles-ci.

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défense71. La France ne pouvait pas rester à l'écart et risquer de voir sa flotte de transport se réduire davantage après une année 2012 marquée par le retrait de 34 navires.

Conclusion :

Depuis 2011, le nombre d’attaques contre des navires battant pavillon français ou contrôlés par une entreprise française a sensiblement diminué. Les succès enregistrés dans l'océan Indien sont à mettre au crédit des forces navales internationales et des EPE / ESSD embarquées.

Pour autant, la persistance du phénomène de piraterie est la preuve de l'échec des politiques de développement puisque aucune solution « terrienne » n'a encore eu de succès rapide pour extirper les racines sociales et économiques de la piraterie, que ce soit au large de la Somalie, dans le golfe de Guinée ou dans le détroit de Malacca. La lutte contre la piraterie, qu'elle soit assurée par des Etats agissant en coalition ou par des prestataires privés, sera véritablement efficace quand les habitants de ces Etats côtiers arriveront à se détourner de cette activité.

Les contraintes budgétaires qui pèsent sur les forces armées occidentales risquent de réduire la présence européenne au profit d'autres marines de pays émergents tels que la Chine, l'Inde ou le Pakistan. En outre, les armateurs pourront être tentés de faire appel à des ESSD aux tarifs plus attractifs. Moins de navires en mer, des ESSD peut-être moins efficaces : le risque de captures pourrait augmenter et le contrôle des espaces maritimes serait plus difficile à assurer, alors que la libre circulation des approvisionnements stratégiques et de l'exploitation des richesses maritimes constituent l’un des enjeux majeurs du XXIe siècle.

71 Au Royaume-Uni, la légitime défense est envisagée contre un acte mais aussi contre une intention hostile. En Espagne, le recours à la force est admis afin « d'éviter et de repousser les attaques ».

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Table des annexes :

Annexe 1 : Courrier du 28 mai 2013 du Security manager de V.Ships France au CSN Finistère Sud :

Annexe 2 : La piraterie en quelques chiffres :

Annexe 3 : Carte indiquant l'évolution de la piraterie au large de la Somalie :

Annexe 4 : Carte indiquant la localisation des actes de piraterie dans le golfe de Guinée en 2013 :

Annexe 5 : Projet de zones à haut risque :

Annexe 6 : Extrait du référentiel pédagogique des EPPN en cours d'élaboration :

Annexe 7 : BIMCO GUARDCON : Un contrat type pour le recrutement et l'emploi de gardes armés privés sur les navires :

Annexe 8 : Extrait de l'étude d'impact du projet de loi comparant les législations des Etats de l'Union européenne et de l'espace économique européen :

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Annexe 1 : Courrier du 28 mai 2013 du Security manager de V.Ships France au CSN Finistère Sud :

Bonjour à tous,

Nous vous informons que le SAMCO AMAZON est actuellement dans le Golfe Persique pour chargement de pétrole brut, cargaison qui sera déchargée en France.

Lors de ce voyage, le navire transitera par le Golfe d'Aden et le Nord de l'Océan Indien, et d'après la dernière évaluation sécuritaire éditée par le CNV (Contrôle Naval Volontaire), le risque d'acte de piraterie est toujours considéré comme élevé dans le Golfe d'Aden, et modéré à élevé dans le Bassin Somalien.

Compte-tenu des risques encourus dans ces zones, l'équipage a formellement demandé le 23 mai 2013 une protection armée, en plus de l'application stricte des mesures anti-pirates du type BMP 4.

Le voyage a été confirmé tardivement - le 21 mai 2013 -, et en conséquence, nous ne pouvions bénéficier de la protection « EPE » fournie par la Marine nationale, en raison du délai trop court pour obtenir les autorisations des autorités émiriennes (EAU). En effet, l'EPE doit rejoindre les navires depuis la base française d'Abu Dhabi (EAU) et il est requis un préavis de 3 semaines minimum.

Devant l'impossibilité d'avoir une EPE à bord, et face au risque réel dans cette zone et à la demande de l'équipage, nous avons organisé l'embarquement d'une équipe de 4 gardes privés armés (nationalité GB), de la société AMBREY (UK), à partir du 31 mai au large de Fujairah (EAU), jusqu'au 6 juin dans la partie Sud de la Mer Rouge. Cette société a été évaluée et approuvée par le Groupe V.Ships, en accord avec la MSC.1405, et par les assureurs du navire, et a déjà fourni des prestations similaires en 2012 à bord de navires du Groupe V.Ships.

Nous restons à votre entière disposition pour toute information complémentaire,

Sincères salutations,

XX

MS&Q Superintendent – DPA/CSOSecurity ManagerV.Ships France SAS130 – 136 rue Victor Hugo92300 Levallois-Perret – France

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Annexe 2 : La piraterie en quelques chiffres :

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Annexe 3 : Carte indiquant l'évolution de la piraterie au large de la Somalie :

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Annexe 4 : Carte indiquant la localisation des actes de piraterie dans le golfe de Guinée en 2013 :

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Annexe 5 : Projet de zones à haut risque :

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CNVSEA

CNVOICNVGG

ZONES GLOBALES

ZONE HRA

ZONE PROPOSEE PAR EMM

ZONE CHYPRE

ZONE NORVEGE (sans ISPS)

ZONE ASSURANCES

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Annexe 6 : Extrait du référentiel pédagogique des EPPN en cours d'élaboration :

Le référentiel est établi conformément : _aux dispositions de l'arrêté du 3 août 2007 pris en application de la loi du 12 juillet 1983 ;_ aux dispositions de la convention STCW.

En matière de sécurité et de sûreté maritimes, la formation est susceptible d'être sanctionnée par :_ une familiarisation ou un certificat de formation de base à la sécurité (CFBS) ;_ une attestation de prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC 1) ou d'un Médical 1 de l'enseignement maritime ;_ un certificat de formation spécifique à la sûreté ou d'un certificat d'aptitude aux fonctions d'agents de sûreté maritime du navire (SSO).

Module Partie Objectifs pédagogiques généraux

Objectifs pédagogiquesspécifiques

Juridique Environnement juridique de la protection privée des navires

Connaître la loi relative à la protection des navires ainsi que ses décrets et arrêtés d’application

Maîtriser les conditions d'acquisition, de transport et de port, de stockage et d'utilisation des armes à feux, des munitions, des armes non létales et des matériels de sûreté

Droit pénal français Connaître les dispositions pertinentes du code pénal et du code des transports

Avoir au minimum suivi la Formation de familiarisation en matière de sécurité et de sûreté

Droit international de la mer Connaître les dispositions essentielles de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer

Connaissances générales relatives :- aux différents types de navire, à leurs performances et conditions d’exploitation ;- à l’organisation du bord, à la chaîne de commandement ainsi qu’aux fonctions et responsabilités associées,- à la conduite à tenir à bord.

Armes Connaître la législation française relative aux armes à feu, aux armes non létales et au matériel de sûreté

Connaître les principes du code ISM et les conditions d’application à bord; identifier les possibles conflits entre la sécurité du navire et les préoccupations de sûreté.

Gens de mer Sécurité maritime Compréhension des enjeux essentiels de sécurité maritime

Détenir au minimum le Certificat de formation spécifique à la sûreté.

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Environnement maritime Familiarisation à l’environnement maritime

Connaissances essentielles de l’environnement maritime et des règles de conduite à bord

– Connaissance des procédures proposées par les BMP

– Identifier les vulnérabilités potentielles et proposer les améliorations en termes de protection

Sécurité maritime Code international de gestion de la sécurité (Code ISM)

Connaître :- le programme du PSC1 et détenir une attestation PSC1 à jour.- les premiers secours à apporter en cas de blessure par balle.

Sûreté maritime Connaître les dispositions du Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires (Code ISPS).

- Caractéristiques générales des armes et munitions

- Gestion du matériel : stockage, transport, inventaire et suivi comptable

- Manipulation de l’arme : montage, démontage, entretien, réglages, réaction face aux incidents de tir

- Fondamentaux du tir : mesures de sécurité, positions stables

- Tir en situation : tirs de semonce, d’avertissement et au but, en déplacement, en situation de défense et de détresse.

Mise en œuvre des Meilleures pratiques de gestion (BMP) de l’Organisation maritime internationale.

Etre à même de comprendre le fonctionnement et d’utiliser:- les matériels de veille :

radar, AIS (relever une position et identifier)

- les équipements de radiocommunication du bord et de l’équipe de protection

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Capacité à utiliser le vocabulaire maritime en anglais : phrases normalisées de l’OMI (IMO-SMPC)Capacité à effectuer une veille de sûretéCapacité à rendre compte

Technique Gestion des premiers secours Savoir mettre en œuvre les gestes élémentaires de premier secours

Capacité à identifier les menaces : identifier et classer un mobile

Emploi de l’armement et dotation

Maîtrise du fonctionnement et du maniement des armes en service

Coordination au sein de l’équipe

Connaissance des procédures successives de tir de semonce, d’avertissement et d’arrêt.

Opérationnel Veille et prévention Maîtrise des moyens et procédures de veille à bord d’un navire

Maîtriser les conditions d’acquisition, de transport et de port, de stockage et d’utilisation des armes à feux, des munitions, des armes non létales et des matériels de sûreté

Connaissance des procédures de vigilance

Avoir au minimum suivi la Formation de familiarisation en matière de sécurité et de sûreté

Défense et réaction Maîtrise des règles d’engagement

Connaissances générales relatives :- aux différents types de navire, à leurs performances et conditions d’exploitation ;- à l’organisation du bord, à la chaîne de commandement ainsi qu’aux fonctions et responsabilités associées,- à la conduite à tenir à bord.

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Annexe 7 : BIMCO GUARDCON : Un contrat type pour le recrutement et l'emploi de gardes armés privés sur les navires :

L’association internationale de Shipping Baltic and International Maritime Council (BIMCO) est un puissant groupement de transporteurs maritimes dont les membres représentent 65% du tonnage mondial de commerce et des armateurs de 120 pays différents. L’un de ses buts principaux est de promouvoir le développement d’instruments de régulation internationale relatifs au transport maritime.GUARDCON est la contraction anglaise de Guard Contract. BIMCO a élaboré un contrat-type pour servir de référence aux armateurs lorsqu’ils souhaitent traiter avec une société privée de sécurité maritime en vue de positionner des gardes armés ou non armés sur leurs navires dans le but de les protéger contre des attaques de pirates.Dans ce premier post, nous ferons une présentation générale du but que poursuit le GUARDCON.

Pour des questions de longueur, nous présenterons dans un second post, à venir, les principales dispositions de ce standard contract ou contrat-type particulièrement intéressant.

ObjetBIMCO GUARDCON a pour objet de proposer “a clearly worded and comprehensive standard contract on which they (the ship owners) can conclude agreements for security services.”L’élaboration de ce standard a été actée comme une urgente priorité en novembre 2011, lors de la réunion du Documentary Commitee qui s’est tenue à Copenhague.Pour cela, le sous-comité rédactionnel de BIMCO s’est appuyé sur les clauses les plus communément admises dans les contrats existants entre armateurs et compagnies de sécurité maritime privées les mieux reconnues. Mais BIMCO prévient les armateurs qu’il ne s’agit pas pour autant de clauses destinées à être « gravées dans le marbre » (cast in stone) ! Ils demeurent évidemment libres dans leur champ de négociation contractuelle. Néanmoins, BIMCO recommande aux armateurs de ne pas toucher aux dispositions-clés du GUARDCON, spécialement celles relatives à l’assurance, à l’exercice de l’autorité de commandement envers les gardes, aux permis et licences concernant les armes.BIMCO entend par ce moyen faciliter la tâche aux armateurs et à leurs conseils juridiques, considérant qu’il existe un nombre croissant de compagnies de sécurité maritime privées qui entrent dans le marché de l’assistance contre la piraterie, nombre actuellement évalué à plus de 200. Or chacune de ces compagnies a établi ses propres clauses et conditions d’emploi. Les armateurs se trouvent donc confrontés à une très grande diversité d’offre contractuelle dont la qualité professionnelle, opérationnelle, juridique est très disparate. Le contrat standard établi par BIMCO pourra leur servir de base de négociation dans un contexte où n’existe encore qu’une « très faible régulation des activités de ces compagnies et aucun système d’accréditation formelle reconnu. »

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PrésentationAu regard de ce contexte particulier et des risques juridiques encourus par les armateurs, la présentation que fait BIMCO de son contrat-type est particulièrement claire.

« While there are a number of well-established, professional and highly reputable maritime security firms in operation, there are also many that are less-founded and who may be operating with inadequate insurance cover and without the necessary permits and licences.”

“The use of GUARDCON is not in any way intended to be a substitute for the proper exercise of due diligence by ship owners as part of pre-contractual process when selecting a security company to provide unarmed or armed guards for a ship. While there is no substitute for due diligence, GUARDCON aims to raise the bar in terms of the standards of which security companies must reach in terms of insurance cover for their risk, and permits and licences to allow them to lawfully transport and carry weapons.”

“The insurance requirements alone are set as such a level as will potentially exclude smaller companies from being able to offer their services using GUARDCON if they lack the necessary financial resources. This is deliberate and is intended, along with the permits and licences provisions, to weed out operators who may potentially place ship owners and their crews at risk.”

“Of equal importance is that ship owners employ guards as a supplement to existing piracy and BMP measures and not as an alternative. In this respect, GUARDCON emphasizes that ship owners should not seek to reduce costs by employing less than the number of guards recommended. Risk analysis has shown that in the majority of cases the recommended minimum number will be four guards. This number has been proved to give the best protection against attack because all quarters of the ship can be covered and a proper round the clock watch system can be maintained.”

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Annexe 8 : Extrait de l'étude d'impact du projet de loi comparant les législations des Etats de l'Union européenne et de l'espace économique européen :

Pays Position nationale sur la présence d'équipes des marines nationales ou étrangères à bord des navires sous

pavillon national

Position nationale sur la présence d'entreprises privées armées à bord des navires sous pavillon national

Allemagne Autorisée Autorisée

Belgique Autorisée Autorisée

Chypre Autorisée Autorisée

Danemark Autorisée Autorisée

Espagne Non autorisée Autorisée

Finlande Pas de base légale Pas de base légale mais réflexion en cours

France Autorisée Pas de base légale

Grèce Non autorisée Autorisée

Italie Autorisée Autorisée

Luxembourg Non autorisée Autorisée

Malte Autorisée Pas de base légale mais autorisations au cas par cas

Norvège Pas de base légale mais réflexion en cours

Autorisée

Pays-Bas Autorisée Non autorisée à ce jour mais projet de loi en cours de rédaction

Pologne Non autorisée Autorisée

Royaume-Uni Non autorisée Autorisée

Suède Non autorisée Autorisée

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Bibliographie :

OUVRAGES GENERAUX : – COUTANSAIS, C. (2012) . Géopolitique des océans : L'eldorado maritime, Ellipses– WEBER, M. (2003). Le savant et le politique, La Découverte

OUVRAGES SPECIALISES :– MONTAS, A. (2012). Droit maritime, Vuibert– PANCRACIO, J.-P., & CHAPLEAU P. (2014). La piraterie maritime : Droit, pratiques et enjeux, Vuibert

RAPPORTS PUBLICS : – ICC- BMI, Piracy and Armed Robbery Against Ships Report - rapport annuel 2008, janvier 2009– PEYRONNET, J.-C., & TRUCY, F. (2012). Rapport au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, n°499, Sénat– MENARD, C., & VIOLLET, J.-C. (2012). Rapport d’information déposé par la Commission de la défense nationale et des forces armées sur les sociétés militaires privées, n°4350, Assemblée nationale– LEROY, A. (2013). Rapport sur la compétitivité des transports et services maritimes français– Rapport de la Banque mondiale, The pirates of Somalia : Ending the threat, rebuilding a nation, janvier 2013

MEMOIRES :– BOUDONG, N. (2009). La piraterie maritime moderne. Mémoire sous la direction du Professeur C. SCAPEL, Master professionnel Droit Maritime et des Transports, Centre de Droit Maritime et des Transports, Université Aix-Marseille– GALLAIS, O. (2012). La protection des navires marchands face aux actes de piraterie. Mémoire sous la direction du Professeur C. SCAPEL, Master professionnel Droit Maritime et des Transports, Centre de Droit Maritime et des Transports, Université Aix-Marseille– GEMON, M. (2013). La criminalité organisée dans le golfe de Guinée : Enjeux et perspectives. Mémoire sous la direction du Professeur A. Salmon, Diplôme d'Etudes Supérieures de la Marine Marchande, Ecole nationale supérieure maritime, Nantes

DIVERS : – BIMCO, Guardcon, mars 2012– Ministère de l'Intérieur, allocution de Manuel Valls lors de la rencontre avec les acteurs de la sécurité privée et les membres du CNAPS prononcée le 26 octobre 2012– Comité économique et social européen, avis du 16 janvier 2013– FORISSIER, P. Pour une légalisation réfléchie des gardes armés privés, DSI, n° 89, février 2013.– Etude d'impact du projet de loi du 3 janvier 2014 relatif aux activités privées de protection des navires – Direction des affaires maritimes - Mission flotte de commerce, Etat de la flotte de commerce sous pavillon français, 17 avril 2014

COLLOQUES :– VALLAT, F. La piraterie maritime, Ecole militaire, Paris, novembre 2012

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– FILLON J.-L. L'ampleur des enjeux juridiques, Centre d'études supérieurs de la marine, Paris, 19 mars 2009

ENTRETIENS : – Avec Monsieur Georges Tourret, administrateur général de 2e classe des Affaires maritimes (2e section), le 9 février 2014– Avec Monsieur François Lambert, conseiller mer, outre-mer, ports et transport fluvial du secrétaire d'Etat chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, le 11 mai 2014 – Avec Monsieur Eric Banel, délégué général d'Armateurs de France Eric Banel, le 13 mai 2014

REGLEMENTATION :

Réglementation internationale : – Convention de Genève sur la haute mer du 29 avril 1958– Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961– Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982– Convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime du 10 mars 1988– Convention (n° 185) sur les pièces d'identité des gens de mer (révisée 19 juin 2003) – Convention du travail maritime du 23 février 2006

– Résolution 1838 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 7 octobre 2008– Résolution 1976 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 11 avril 2011 – Résolution 2077 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 21 novembre 2012

– Circulaire MSC 1332 du 16 juin 2009 reprenant les mesures dites «meilleures pratiques de gestion» pour éviter, dissuader ou ralentir les actes de piraterie– Circulaire MSC 1334 du 23 juin 2009 énonçant des principes directeurs destinés aux propriétaires, aux exploitants, aux capitaines et aux équipages des navires, concernant la prévention et la répression des actes de piraterie et des vols à main armée à l’encontre des navires– Circulaire MSC 1443 du 25 mai 2012 sur les directives intérimaires à l'intention des sociétés privées de sûreté maritime qui fournissent du personnel de sûreté armé sous contrat privé à bord des navires dans la zone à hauts risques

Réglementation européenne :– Règlement (CE) n° 725/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif à l'amélioration de la sûreté des navires et des installations portuaires

– Recommandation du 11 mars 2010 relative aux mesures d'autoprotection et de prévention des actes de piraterie et des attaques à main armée contre les navires

Réglementation nationale : – Code disciplinaire et pénal de la marine marchande – Code pénal– Code de la sécurité intérieure– Code de la sécurité sociale

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– Code des transports – Code du travail

– Loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits – Loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 modifiée réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds– Loi n° 94-589 du 15 juillet 1994 relative à la lutte contre la piraterie et aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de police en mer– Loi n° 2000-494 du 6 juin 2000 a créé la Commission nationale de déontologie de la sécurité – Loi n° 2003-340 du 14 avril 2003 relative à la répression de l'activité de mercenaire– Loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français – Loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l'exercice des pouvoirs de police de l'Etat en mer– Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure– Loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif– Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale – Loi n° 2014-742 du 1er juillet 2014 relative aux activités privées de protection des navires

– Décret n° 86-366 du 11 mars 1986 relatif à la rémunération de certains services rendus par le ministère de la Défense– Décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif

– Arrêté du 22 mars 2007 établissant la liste des missions en mer incombant à l'Etat dans les zones maritimes de la Manche-mer du Nord, de l'Atlantique, de la Méditerranée, des Antilles, de Guyane, du Sud de l'océan Indien et dans les eaux bordant les Terres australes et antarctiques françaises

JURISPRUDENCE : – Arrêt de la Cour permanente de justice internationale du 7 septembre 1927, dite « affaire du Lotus » – Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 10 juillet 2008 Medvedyev et autres c/ France– Arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 24 octobre 2007, dite « affaire de Karachi »

JOURNAUX : – Les Echos – Le Marin– Le Monde– Ouest France

SITES INTERNET :– http://stratfor.com/weekly/expensive-diminishing-threat-somali-piracy

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– http://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20130506trib000763384/somalie- la-piraterie-saborde-un-peu-l-economie-mondiale.html– http://www.ifs2i-formation-securite.com/-CONTRE-PIRATERIE-MARITIME-STCW-

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Table des matières :

Liste des abréviations : 5

Propos liminaires : 7

Introduction : 8

I. Les enjeux stratégiques et diplomatiques des EPPN : 13

A. Les réponses apportées par les Etats face à la piraterie : 13

B. Les EPPN, une solution réellement complémentaire aux EPE ? 15

II. Les enjeux juridiques des EPPN : 18

A.. Les EPPN : un vide juridique posant des questions en terme d'agrément et de responsabilités : 18

B. Un nécessaire contrôle des EPPN, des agents et de leur activité : 20

III. Les enjeux économiques des EPPN : 23

A. Les externalités positives des EPPN sur l'emploi et les coûts induits par la piraterie : 23

B. Un projet tardif et a minima : 25

Conclusion : 27

Table des annexes : 28Annexe 1 : Courrier du 28 mai 2013 du Security manager de V. Ships France au CSN Finistère Sud : 29Annexe 2 : La piraterie en quelques chiffres : 30Annexe 3 : Carte indiquant l'évolution de la piraterie au large de la Somalie : 31Annexe 4 : Carte indiquant la localisation des actes de piraterie dans le golfe de Guinée en 2013 : 32Annexe 5 : Projet de zones à haut risque : 33Annexe 6 : Extrait du référentiel pédagogique des EPPN en cours d'élaboration : 34Annexe 7 : BIMCO GUARDCON : Un contrat type pour le recrutement et l'emploi de gardes armés privés sur les navires : 37Annexe 8 : Extrait de l'étude d'impact du projet de loi comparant les législations des Etats de l'Union européenne et de l'espace économique européen : 39

Bibliographie : 40

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