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DOSTOÏEVSKI LES FRÈRES KARAMAZOV VOLUME 1 ROMAN TRADUIT DU RUSSE PAR ANDRÉ MARKOWICZ ACTES SUD

Les Frères Karamazov 1

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LES FRÈRES KARAMAZOV

Il y a le père, Fiodor Pavlovich, riche, malhonnêteet débauché, et ses trois fils légitimes : Mitia, impul-sif, orgueilleux, sauvage ; Yvan, intellectuel, raffiné,intransigeant ; Aliocha, sincère, pieux, naïf. Et puisil y a le fils illégitime, Smerdiakov, libertin cyniquevivant en serviteur chez son père. L’un d’eux seraparricide.

Roman complet et flamboyant, Les Frères Kara-mazov rassemble une intrigue policière, plusieurshistoires d’amour, des exposés théologiques et méta-physiques éblouissants et des personnages inou-bliables déchirés par leurs conflits intérieurs. Sansdoute le chef-d’œuvre de Dostoïevski.

Avec cette publication se conclut également l’immenseentreprise de retraduction des romans de Dostoïevskientamée il y a plus de dix ans par André Markowicz.

Né à Moscou le 30 octobre 1821, Fédor Mikhaïlovitch Dos-toïevski est entré en littérature en janvier 1846 avec Les Pau-vres Gens. Il est mort à Saint-Pétersbourg le 28 janvier 1881.

DIFFUSION :Québec : LEMÉAC ISBN 2-7609-2270-7Suisse : SERVIDISFrance et autres pays : UD (F7 8310)Dép. lég. : mars 2002 (France)ISBN 978-2-7427-3703- 1

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BEL DOSTOÏEVSKI

LES FRÈRES KARAMAZOVVOLUME 1

ROMAN TRADUIT DU RUSSE PAR ANDRÉ MARKOWICZ

BABEL, UNE COLLECTION DE LIVRES DE POCHE

Babel les frères kara t1 BAT 20/01/06 11:12 Page 1

ACTES SUD

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LES FRÈRES KARAMAZOV

Il y a le père, Fiodor Pavlovich, riche, malhonnête et débauché, et ses trois fils légitimes : Mitia, impul-sif, orgueilleux, sauvage ; Yvan, intellectuel, raffiné, intransigeant ; Aliocha, sincère, pieux, naïf. Et puis il y a le fils illégitime, Smerdiakov, libertin cynique vivant en serviteur chez son père. L’un d’eux sera parricide.

Roman complet et flamboyant, Les Frères Kara-mazov rassemble une intrigue policière, plusieurs histoires d’amour, des exposés théologiques et méta-physiques éblouissants et des personnages inou-bliables déchirés par leurs conflits intérieurs. Sans doute le chef-d’œuvre de Dostoïevski.

Avec cette publication se conclut également l’immense entreprise de retraduction des romans de Dostoïevski entamée il y a plus de dix ans par André Markowicz.

Né à Moscou le 30 octobre 1821, Fédor Mikhaïlovitch Dos-toïevski est entré en littérature en janvier 1846 avec Les Pau-vres Gens. Il est mort à Saint-Pétersbourg le 28 janvier 1881.

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CHRONOLOGIEDES ŒUVRES DE DOSTOÏEVSKI

Les Pauvres Gens, 1846.Le Double, 1845-1846.Un roman en neuf lettres, 1846.Monsieur Prokhartchine, 1846.La Logeuse, 1847.Les Annales de Pétersbourg, 1847.Polzounkov, 1848.Un cœur faible, 1848.La Femme d’un autre et le Mari sous le lit, 1848.Le Voleur honnête, 1848.Un sapin de Noël et un mariage, 1848.Les Nuits blanches, 1848.Nétotchka Nezvanova, 1848-1849.Le Petit Héros, 1849.Le Rêve de l’oncle, 1855-1859.Le Bourg de Stépantchikovo et sa population, 1859.Humiliés et Offensés, 1861.Les Carnets de la maison morte, 1860-1862.Une sale histoire, 1862.Notes d’hiver sur impressions d’été, 1863.Les Carnets du sous-sol, 1864.Le Crocodile, 1864.Crime et châtiment, 1866.Le Joueur, 1866.L’Idiot, 1868.L’Éternel Mari, 1870.Les Démons, 1871.Journal de l’écrivain 1873 (récits inclus) : I. “Bobok” ; II. “Petites images” ; III. “Le Quémandeur”.Petites images (En voyage), 1874.L’Adolescent, 1874-1875.Journal de l’écrivain 1876 (récits inclus) : I. “Le Garçon «à la menotte»” ; II. “Le Moujik Maréï ” ; III. “La Douce” ;IV. “La Centenaire”.Journal de l’écrivain 1877 (récit inclus) :

“Le Rêve d’un homme ridicule”.Le Triton, 1878.Les Frères Karamazov, 1880.Discours sur Pouchkine, 1880.

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Ouvrage traduit avec le concoursdu Centre national du livre

Titre original :Bratia Karamazovy

© ACTES SUD, 2002pour la traduction françaiseISBN 978-2-7427-3703-1978-2-330-08341-0

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FÉDOR DOSTOÏEVSKI

LES FRÈRES KARAMAZOV

Volume I

roman traduit du russe par André Markowicz

ACTES SUD

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REMERCIEMENTS

La publication des Frères Karamazov met un terme à l’en-treprise de retraduction intégrale des œuvres de fiction deDostoïevski dans la collection “Babel” des éditions Actes Sudinaugurée, en septembre 1991, par celle du Joueur.

Ce travail n’aurait pas été envisageable sans l’aide et lesoutien constants de Françoise Morvan et de ma mère.

Ma mère, Daredjan Markowicz, a relu chacune de mestraductions en les confrontant avec le texte russe, notant lesécarts, les interprétations douteuses, des oublis toujours pos-sibles.

Françoise Morvan a relu, quant à elle, chacune de mestraductions en ne partant que du texte français. Chaque fois,je n’ai pu que rester saisi devant l’acuité de ses remarques,de ses questions et de ses propositions.

Pour ce soutien, pour leur patience infatigable, je voudraisleur exprimer ici publiquement, à toutes les deux, ma pro-fonde gratitude.

Et je dédie ce travail à la mémoire de ma grand-mère etde ma grand-tante, Raïssa et Maria Mikhaïlovna Lévis.

A. MARKOWICZ,Rennes, 15 décembre 2001.

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à Anna Grigorievna Dostoïevskaïa

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En vérité, en vérité, je vous le dis : si le

grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il

demeure seul ; mais, s’il meurt, il porte beau -

coup de fruits.

Evangile selon saint Jean, XII, 24.

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NOTE DE L’AUTEUR

Commençant l’histoire de la vie de mon héros, AlexéïFiodorovitch Karamazov, je me trouve dans une certaineperplexité. Je veux dire : je déclare, certes, qu’AlexéïFiodorovitch est mon héros, mais, néanmoins, je suisbien placé pour savoir que cet homme-là est tout saufun grand homme, ce qui m’amène à prévoir les inévi-tables questions du genre : qu’a-t-il donc, votre AlexéïFiodorovitch, de si remarquable, que vous l’ayez choisipour être votre héros ? Qu’a-t-il fait de particulier ? Dequi et pour quoi est-il connu ? Pourquoi, moi, lecteur,dois-je perdre du temps à étudier les faits de sa vie ?

La dernière question est la plus fatale, car je ne peuxy apporter qu’une seule réponse : “Vous le verrez peut-être dans le roman.” Mais si on lit le roman et qu’on nele voit pas, si on reste en désaccord avec moi quant aucaractère remarquable d’Alexéï Fiodorovitch ? Je ledis, parce que, le deuil au cœur, je le pressens. Pour moi,c’est un homme remar quable, mais, réellement, je doutede réussir à le démontrer au lecteur. Le fait est que c’estun grand homme, certes, mais encore indéterminé, nonparvenu à la pleine clarté. Du reste, il est étrange, dansune époque comme la nôtre, d’exiger des gens de laclarté. Une chose, est, je crois, plus ou moins hors dedoute : c’est un homme étrange, voire un original.

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Mais le fait d’être étrange ou original nuirait plutôt quede donner un droit à l’attention, surtout quand tout lemonde s’efforce d’unifier les particularismes et de trou-ver ne serait-ce qu’un soupçon de langue commune àcette bêtise collective. L’original, lui, dans la plupartdes cas, c’est un cas particulier, une mise à part. Vousne pensez pas ?

Eh bien, c’est si vous n’êtes pas d’accord avec cettedernière thèse et si vous me répondez : “Non”, ou “Pastoujours”, que, peut-être, je me sentirai reprendre cou-rage au sujet de l’importance de mon héros Alexéï Fio-dorovitch. Car non seulement un original n’est “pastoujours” un cas particulier et une mise à part, mais, aucontraire, il arrive que ce soit lui, j’ai l’impression, quiporte en lui cette espèce de noyau du grand tout, et queles autres gens de son époque – tous, par une espèce desouffle de vent qui passe, allez savoir pourquoi, pourun temps, ce grand tout, ils s’en sont détachés…

Je ne me serais jamais lancé, au demeurant, dans cesexplications si vagues et si peu intéressantes, et j’auraiscommencé tout simplement sans préface : ça plaît – on lirade toute façon ; or le malheur veut que, d’histoire d’unevie, j’en ai une seule, mais, de romans, j’en ai deux. Leroman essentiel, c’est le second – l’activité de mon héros,cette fois, dans notre temps, je veux dire au moment pré-cis, contemporain, que nous vivons. Le premier roman,quant à lui, s’est déroulé il y a treize ans, et ce n’est mêmepresque pas un roman, c’est juste un moment de la pre-mière jeunesse de mon héros. Me passer de ce roman estimpossible, parce qu’il y a trop de choses du secondroman qu’on ne comprendrait pas. Mais, de cette façon,mes difficultés premières se compliquent encore : si, moi,n’est-ce pas, c’est-à-dire le biographe lui-même, je pensequ’un seul roman, si ça se trouve, pour un héros aussi

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modeste et indéterminé, pourrait être superflu, de quoi ai-je l’air quand je me présente avec deux, et comment expli-quer une telle prétention de ma part ?

Puisque je me perds à essayer de résoudre ces ques-tions, je me décide à les laisser de côté sans les résoudredu tout. Il va de soi que le lecteur perspicace a déjà devinédepuis longtemps que je tendais à cela depuis le toutdébut, et qu’il ne faisait que s’énerver contre moi en sedemandant pourquoi je dépensais pour rien des mots sté-riles et un temps précieux. Mais, à cela, je peux faire uneréponse précise : j’ai dépensé des paroles stériles et dutemps précieux, d’abord, par politesse, et, ensuite, parruse : on a beau dire, enfin, je vous aurai quand mêmeprévenu de telle ou telle chose. Remarquez, je suis mêmecontent que mon roman se soit divisé de lui-même endeux récits “dans l’unité fondamentale de l’ensemble” :après avoir pris connaissance du premier récit, le lecteurpourra juger de lui-même si cela vaut la peine, de sonpoint de vue, d’entamer le second. Bien sûr, personnen’est obligé à rien ; on peut aussi laisser tomber le livreaprès les deux premières pages du premier récit, pour neplus jamais le rouvrir. Mais il existe tout de même deslecteurs assez scrupuleux qui souhaiteront coûte quecoûte lire jusqu’au bout, pour ne pas se tromper dans leurjugement impartial : je pense, par exemple, à tous les cri-tiques russes. Et donc, mettons, devant ces gens-là, je mesens quand même le cœur un peu plus léger : malgré toutleur soin et leur honnêteté, je leur donne, quoi qu’on dise,un prétexte des plus légitime pour laisser tomber le récitdès le premier épisode du roman. Bon, voilà toute l’intro-duction. J’en conviens parfaitement, elle ne sert à rien dutout, mais, puisqu’elle est écrite, qu’elle reste.

Sur ce, au fait.

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PREMIÈRE PARTIE

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Livre premier

HISTOIRE D’UNE PETITE FAMILLE

I

FIODOR PAVLOVITCH KARAMAZOV

Alexéï Fiodorovitch Karamazov était le troisième filsde Fiodor Pavlovitch Karamazov, propriétaire foncierde notre district, qui fut si connu en son temps (et qui,aujourd’hui encore, ne s’est pas entièrement effacé denos mémoires) en raison de son décès tragique et mys-térieux, survenu voici exactement treize ans, décès dontje parlerai en lieu et place. Pour l’instant, je me contente-rai de ne dire de ce “propriétaire foncier” (comme onl’appe lait chez nous, même si, de toute sa vie, il n’apresque jamais vécu dans sa propriété) qu’une chose, àsavoir qu’il appartenait à ce type étrange, et qu’onretrouve, pourtant, assez souvent, je veux dire ce typed’hommes non seulement nuls et débauchés, mais, enmême temps, bons à rien, qui savent généralementgérer leurs petites affaires de patrimoine, et seulementces affaires, j’ai l’impression. Fiodor Pavlovitch, parexemple, partit de presque rien, c’était un propriétairefoncier des plus petit, il courait manger chez tel ou tel,rêvait de se faire entretenir, et, néanmoins, au moment

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