244
Source gallica.bnf.fr / BibliothĂšque nationale de France Les joyeuses nouvelles. Tome 1 / de Marc de Montifaud,...

Les joyeuses nouvelles / de Marc de Montifaud,

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Source gallica.bnf.fr / BibliothĂšque nationale de France

Les joyeuses nouvelles. Tome1 / de Marc de Montifaud,...

Montifaud, Marc de (1849-1912). Auteur du texte. Les joyeusesnouvelles. Tome 1 / de Marc de Montifaud,.... 1890-1891.

1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numĂ©riques d'oeuvres tombĂ©esdans le domaine public provenant des collections de la BnF. Leur rĂ©utilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : - La rĂ©utilisation non commerciale de ces contenus ou dans le cadre d’une publication acadĂ©mique ou scientifiqueest libre et gratuite dans le respect de la lĂ©gislation en vigueur et notamment du maintien de la mention de sourcedes contenus telle que prĂ©cisĂ©e ci-aprĂšs : « Source gallica.bnf.fr / BibliothĂšque nationale de France » ou « Sourcegallica.bnf.fr / BnF ». - La rĂ©utilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par rĂ©utilisationcommerciale la revente de contenus sous forme de produits Ă©laborĂ©s ou de fourniture de service ou toute autrerĂ©utilisation des contenus gĂ©nĂ©rant directement des revenus : publication vendue (Ă  l’exception des ouvragesacadĂ©miques ou scientifiques), une exposition, une production audiovisuelle, un service ou un produit payant, unsupport Ă  vocation promotionnelle etc.

CLIQUER ICI POUR ACCÉDER AUX TARIFS ET À LA LICENCE

2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriétédes personnes publiques.

3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit :

 - des reproductions de documents protĂ©gĂ©s par un droit d'auteur appartenant Ă  un tiers. Ces documents ne peuventĂȘtre rĂ©utilisĂ©s, sauf dans le cadre de la copie privĂ©e, sans l'autorisation prĂ©alable du titulaire des droits. - des reproductions de documents conservĂ©s dans les bibliothĂšques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sontsignalĂ©s par la mention Source gallica.BnF.fr / BibliothĂšque municipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur estinvitĂ© Ă  s'informer auprĂšs de ces bibliothĂšques de leurs conditions de rĂ©utilisation.

4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 etsuivants du code de la propriété intellectuelle.

5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas deréutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateur de vérifier la conformité de son projet avecle droit de ce pays.

6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur,notamment en matiÚre de propriété intellectuelle. En cas de non respect de ces dispositions, il est notammentpassible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978.

7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute dĂ©finition, [email protected].

Couverture inférieure manquanteRELIURE SERREE

Absence de margesintérieures

VALABLE POUR TOUT OU PARTIEDU DO CUBA ENt REPRCDU! T

Od~tnai <M cou!wur

Nr Z 43-1ÏO-9

< ~L~C(~

L.OU~TRIE~EEOI-nON (rLLUST<RI~ f s~'

!t1t1

Yu';

Maucle Il 1 » au Pitum

B. SIMON & C'UBRAIRES-EPITBJRS

:5. RUB SAiNT-BBNOrf. :5

PARIS<~t~r1

/?~ f$p~ Î

11,

B. SIMON & C'UBRAtRES-ËOtTBU&S

15. R.UB §AÏNT-BBNOÏT, 1~

PARIS~F1

LE MARIAGE D'UNE MOMIE

OMMENT, c'est toi, Jacques?. àcette époque de l'année, à Pans?s'

Que signifie ta bizarre présence?Je te cMyais enpleines nançames

Ah bien, oui Mes nançailles ? re-fusé, mon cher Bonardel, et sans espoirde retour.

–~Ss~cecroyable?M°* Letourneur quiparaissait ne voulour, ne comprendre,n'attendre, n'admettre que toL..

Ce n'est pas elle, la chëre enfant,mais son gredin de pÚre.

Alors, rien de perdu.Tout, au contraire, mon ami;

M. Letourneur ne revient jamais sur sesdécisions. Il y a deux heures que. ;*a~

été éconduit fort poliment.Deux heures alors tu reviens.De Versailles, mon Dieu, oui. Et,

Berthe. non, je ne m'en remettrai ja-mais si ce n'est qu'elle m'a juré.

De ne jamais se marier?Non,de n'ĂȘtre qu'a moi; maispour

cela il faut que je consente. Ă  ce qu'elleexige.

Alors, je né te comprends guÚre.C'est que, ce qu'elle me demande

est si scabreux.Si scabreux?Explique-toi.Elle veut que je la compromette,

afin que son pĂšre ne puisse pas se refuserĂ  notre mariage.

Diable! En effet, c'est difficile. Et,pourtant, c'est une preuve d'amourqu'elle

te donne; en t'offrant un moyen si ra-dical.

C'est justement parce que je l'aime

que j'ai refusé. Et si ta avais vu ses lar-

mes elle me suppliait:–K Oh compro-mettez-moi, monsieur Jacques, compro-mettez-moi,je vousen prie de cette façon

papa sera obligé de consentir. »Sapristi! il taut qu'elle t'aime bigre-

ment, en effet. Et de quelle façon Mlle Le-tourneur entend-elle que tu la compro-mettes ?

Elle n'en sait rien. Elle s'est creusĂ©latĂȘtesans trouverune idĂ©e,et, finalement,elle m'a criĂ© Ă  traversses larmes: –« TĂą-chez donc de vous informer de ce quicompromet une femme; moi, je l'ignore.Si vous l'ignorez, de votre cĂŽtĂ©, deman-dez Ă  vos camarades; ils ne refuserontpas de vous en instruire. Mais, je le rĂ©-pĂšte, comproi~ettez-moi sans cela, noussommes perdus l'un pour l'autre. N

Voilà ce qui s'appelle de la bonnevolonté. Et qu'as-tu répondu ?

Que j'allais aviser, chercher; seule-

ment, tu comprends que je ne peux abu-

ser de sa confiance en moi pour lui obéireEh, sans doute Mais, si on désho'

norait le papa Letourneur au lieu desa fille-?

Comment, diantre, veux-tu que jedéshonore Letourneur ? Est-ce que jel'aime, ce vieux Papayoine 1

Avec cela que l'on n'agit ainsi qu'a-vec les gens qu'on aime Vrai, si tu n'a-vais la tĂȘte Ă  l'envers, je rirais de toi.

R!s quand mĂȘme, et donne-moi unmoyen. Eh bien, tu restes tranquille. tues muet? Si c'est lĂ  ce que tu prĂ©tendsm'enseigner.

Mais, sacrebleu accorde-moi letemps de la rénexion. Voyons, si on écri-vait une tragédie en cinq actes et qu'onfasse courir le bruit qu'elle est de Letour-neur ? Lui. un des quarante: c'est çaqui le monterait.

–H est joli, ton moyen. J'exaspĂ©-rerais mon beau-pĂšre, ni moins, ni plus.

Au moment oĂč il atteindrait le dia-pason de la rage, tu lui Ă©crirais « Mariez-

nous, et je me déclare l'auteur de la ?&-gcdM en questionï a

–Et tu crois que je m'en vais rimercomme cela cinq actes. d'ici Ă  demain ?Non, on n'a jamais vu proposer a unhomme prĂȘt a se noyer de composerune tragĂ©die en cinq actes. Bonsoir 1

En ce moment un lourd camion rasa letrottoir, et celui qu'on a entendu nom-mer Jacques fut atteint par une Ă©normecaisse.

n allait presque s'en prendre au con-ducteur, lorsqu'il lut sur le couvercle ducolis l'inscription suivante « Marseille,dépÎt d'objets égyptiens. »

Tiens, tiens, tiens répéta-t-ilen sefrappant le iront.

Qu'est-ce qu'il y a ? lui demandaBonardelétonné.

Il y a, mon ami, que j'ai trouvé.Quoi? le moyen de compromettre

M'~ Berthe?Non, M. Letourneur.Bah!I avec l'inscription de cet<:@

caisse ?

Juste. Crois-tĂč qu'un homme tien-drait la-dedans?

Ah ça, mon garçon, est-ce que te

contenu que tu supposes t'aurait rendu.Fou ? nullement; inventif, voila

tout.Alors, j'Ă©coute.Tu sais que moi beau-pĂšre e&t un

égyptologue. distingué?Egyptologue, je le sais; mais, dis-

tingué.commentpourrions-nousenavcirla certitude, puisque ni toi, ni moi, n'en-tendons la langue dont il se sert?

Çane fait rien, Bonardel, du momentqu'il est Ă©gyptologue, il doit ĂȘtre distin-guĂ©. C'est toujours ce qu'on dit d'unhomme.

Dont on ne comprend pas les tra-vaux. On lui applique l'épithete de dis-tingué, justement parce que l'on estincapable de juger ce qu'il écrit.

Mais, satanébavard, permets-moiaumoins d'achever.

Dis donc, si je rappelais la caissequi

~a rendu a l'espérance, et qui est en traindenier?

Non, ĂŻa!sse!& caisse aller a sa des-tination et Ă©coute-moi t'expliquer monplan il est trĂšs simple. Pourrais-tu metranstormer en momie, me farder me

colorier, me plĂątrer, si tu veux, en unmot, me donner toutes les apparencesd'un ĂȘtre ayant dormi une dizaine de siĂš-cles sous les pyramides ?

Jacques d'Hargeville aurait pu parkrtrĂšs longtemps cette fois, sans ĂȘtre inter-

rompu, car Bonardd, le croyant positi-

vement dérangé du cerveau, commençaità regarder vaguement de quel cÎté il luiserait possible de s'esquiver. Voyantcela,Jacques le retint.

Mon ami, commen~a-t-Henriant, neme crois pas aliéné. Sije teparleainsi,c'est

que je rĂȘve au moyen de m'introduire de

nouveau chez mon futur beau pĂšre, d'une&çon assez detoumee,pour qu'en accueil-~ĂŻĂŻt ce qu'il croira ĂȘtre une moĂŻme,~fasse dĂ©voyetauiRs~~Ăąt sdenee ar"

chéologique; quand H aura exalté bienhaut le don précieuxqui lui viendra d'unesociétéd'orientalistes, quand il aura con-voqué une commission afin de l'étudier,~'apparaßtraialors. et il se trouvera si ri-dicule, que, sous peine devoir éventer sonhistoire, il.

J'entends, interrompit Bonardelenthousiasmé, ßl faudra qu'il t'accordeM~ Berthe? Sa grùce sera le prix de votreunion. C'est miraculeux,c'est superbetonprojet ah mon ami, viens que je te serrela main Tiens, je dois te l'avouer, tum'ascausé une fiÚre peur tout a l'heure.

Si tu t'imagines que je ne m'en suispas aperçu.0-Une seule chose me sembledifficile,

pourtant. Comment arriverai-je a te don-

ner l'apparence d'une momie?

-<- D s'agira d'abord de me faire moulet

un masque en cire je respirerai en-des-

sous.Pour le corps. tu me mettras une tu-nique enjeuxdamas vert~palmes. NoM

tĂŻ~M~eas @M8abĂŻa. j~ ? paĂŻie que

j'en déniche une qui paraßtra exhumée du

temps de SĂ©miramis ? Quant Ă  mes mem-bres tu les ligoteras avec des bandelettes

Tu arranges ça facilement. Mais laréussite dépend de la dose de bonnevolonté dont M. Letourneur disposera

pour accueillir une momie.Oh je te réponds qu'il me croira

authentique; d'ailleurs, tu lui diras que jetombe positivement en poussiÚre, et quele voyage m'a si éprouvé qu'il doit se gar-der de me toucher.

Bon, bon, je vois ça d'ici. Je lui in-sinuerai, si tu veux, que tu remontes aumoins jusqu'à Dagobert.

Mais, malheureux, ne va pas con-fondre les roJs de France et les Pha-raons dis-lui plutÎt, par exemple, queje dois dater oe l'origine. d'Aménophis.

Ohmon Dieu. Aménophis, Da-gobert ou un autre. tu sais? moi, je lelaisserais décider, cet homme; ça seraitplus poli. Ce quenous oublionsc'est unecaisseoblocgue. ùne espÚce de eefeucii

JOYEUSES NOUVEU.E&

enfin, qu'il est absolument nécessaire dedécouvrir.

Je te garantis que d'ici à quelquesjours on m'en aura confectionné uneauthentique qui excitera la pùmoison dela société Letourneur. Une seule recom-mandation, Bonardel pas un mot à tafemme.

H n'y a pas de. danger, elle connaßtM"" Letourneur. Je ne commettrai jamaisla bévue de l'instruire de notre projet.

Ainsi, Bonardel, je peux comptersur toi?

Parbleu tu as réponse a tout. Et,d'ailleurs, qui est-ce qui aurait l'idée de

soupçonner jamais la vérité ? Donc, il y avraiment des chances à peu prÚs certaines

que nous rĂ©ussirons.–"En ce cas, je te prends demain chez

toi à neuf heures et, de ce pas, je vaism'occuper des achats nécessaires. Toi,rédige une lettre que nous enverrons aFun de tes correspondants du Caire; il larenverra ensuite à Letourneur, comme

Ă©crite par l'un de ses confrĂšres en inscrip-tions.

Si cela va Jusqu'au bout le doute

que Letourneur s'en relĂšve de sitĂŽt.Adieu t

Adieu, et merci ĂŻCette conversation, qui se tenait Ă  neuf

heures du soir devant la gare St-Lazare,explique suinsammentractivit&que durentdéployer Bonardel et d'Hargeville pourarriver à leurs fins. Le huitiÚme jour aprÚscette rencontre, Bonardel montrait entriomphe à Jacques une lettre de Letour-

neur qui lui revenait par l'entremise deson correspondant du Caire, lettre pleinede congratulations. Letoarneur acceptaitle don de la soi-disant Société archéologi-

que il attendait la momie en question,lui promettait une réception à laquelle elle

ne pourrait malheureusement pas se trou-ver sensible, et projetait de convier à sonexhibition plusieurs membres de diversesSociétéspréhistoriques.

De plus, M. Letourneurs"enquéraitdu

nom du correspondant chez qui ceprécieux dépÎt serait opéré en France.

Ce fut M. Bonardelqui s'empressa delui annoncer qu'il était l'heureux mortelchoisi pour servir d'intermédiaireau dondes archéologues étrangers.

Jacques, on le suppose,passait ses joursĂ  s'essayer dans son rĂŽle de momie. Cequi le gĂȘnait c'Ă©tait la tunique de bro-cart dont il devait se revĂȘtir et qui pou-vait faire douter de son authenticitĂ© chezM. Letourneur; mais il finit par se fami-liariser avec le pĂ©ril et les dimcuitĂ©s, aupoint qu'il ressentait une jubilationextrĂȘme Ă  tntrer dans son prĂ©tendu cer-cueil et qu'il conjura Bonardel de neplus retarder le moment de l'exĂ©cutionde leur projet.

Ajoutons que, malgré les répugnancesde d~HargcviIle, il avait été forcé d'ache-ter la complicité de quatre rouliers de lamaison Bonardel, à raison de .mille francschacun. Mais ce n'était pas trop de quatrehommes pour porter un fardeau du poids

de deux cents livres comme celui que re-présentaient Jacques et son conre.

Du reste, rappelons encore une fois,

que le plap arrĂȘtĂ© se rĂ©sumait Ă  ceciintroduire sous forme d'un cadavre Ă©gyp-

f

tienou autre, Jacquesd'HargevillechĂšz l'a-cadĂ©micien Letourneur,dans sa maison, aVersailles et, au moment oĂč M. Le-

tourneur aurait prononcé devant M. Bo-nardel et quelques intimes les paroles dela consécration qui signifieraientque le

personnage qu'on lui amenait ainsi em-baumé devait appartenir à la 3" ou a la

i~ dynastie, la soi-disant momie se levaitde son sarcophage en s'Ă©criant d'unevoix creuse

M. Letourneur, la main de votrefille, cu le ridicule à perpétuité 1

Et tout portait à conjecturer que Le-tourneur préférerait accorder la main de

sa fille.La veille du jour fixé, Boaardcl ac-

courut chez Jacques, rue Taitoout.Devine qui j'ai vu?. ?. Le-

tourneur en personne u sort de chezmoi.

D'HargeviIle devint'inquiet.'–Aurait-il soupçonnĂ©.

Rien, je te l'amrmc. Hest accouruenrecevant une lettre d'avertissement, per-suadé que le présent qu'on lui destine setrouvaitdé)&dans mes magasins.Je l'ai as-suré que je l'attendaisd'un instant à l'au-tre par le train rapide de Marseille, mais

que je tenais Ă  honneur de lui conduiremoi-mĂȘme sa momie.

Qu'a-t-il répliqué ?Ilm'a compris,en ajoutant « Ce

sera un jour mĂ©morable que celui oĂč jevous recevrai. Quand pensez-vous quecela aura lieu ? a J'airĂ©pondu « Atten-dez-moi au plus tard aprĂšs-demain. »

Pourvuqu'il nes'avisepas de reveniràParis chercher sa.propriété!Ces hom-mes-la sont intraitables.

H n'y a pas de danger. Je l'ai assuréqu'elle était emballée par un procédé

connu de moi et de mon correspondant,

et qu'il ne pourrait faire sauter le couver-cle lui-mĂȘme sans l'endommager. M. Le-tdumeur m'a cru sur parole, mais enm'assurant qu'il m'attendrait aprĂšs-de-main. Seulement, il a ajoutĂ© une clausequi.

AchĂšve, tu me donnes le trac.Eh bien, il a retenu une voiture des

Pompes funÚbres, celle dont on se sertpour conduire les corps au chemin de fer;et il désire que )e mette la momie dans

cette voiture-la. if

D'HargcviMcfit un soubresaut.Saperlotte, il ne me convient nulle-

ment, une fois emballé, que tu me con-duises chez M. Letourneur dans une voi-ture des Pompes funÚbres.

C'est ce que j'ai pensé mais je n'aipas osé lui refuser positivement. Je comp-tais simplement prendre une de mesvoitures de roulage. Juge de mes per-plexités.

Je ne l'entendspas autrement, s'ex*clama Jacques. Je ne consentirai jamais~

passer une heure déguisé enmomie dans lecoffre noir d'une de ces berlines infectes.

Ne te fùche pas. Ecoute.Sapristi, je voudrais t'y voir.Attends que je m'explique.Sacré mille tonnerres, puisque je te

répÚte que je ne veux pas

Te tairas-tu, bourreau ? tonna Bo-nardel en le secouant pour l'obliger Ă l'entendre; puisque je te jure qu'il n'enest pas question.

A la bonne heure comme cela je

me rends.C'est bien heureux.Comment espĂšres-tu tourner la

difficulté ?

D y a une heure que tu le saurais si:u ne m'empĂȘchais de parler. Voici toutsimplement ce que j'ai imaginĂ©.

Jacques le regarda plein d'anxiété.M"~ Bonardel est invitée. Tu sais

qu'elle connaßt Mlle Berthe Letourneurde-puis le couvent? Elle achevait sa derniÚreannée quand Mlle Berthe y est entrée.

M MAM&GE D'UNB MOMtE

Au fait, mon ami, je t'en conjure.Or, M. Letourneur qui tenait Ă 

m'ĂȘtre agrĂ©able, l'a gracieusementinvitĂ©eĂ  se joindre Ă  moi pour assister Ă  la rĂ©-union de savants qu'il a convoquĂ©s afind'assister Ă  ton dĂ©ballage. Enhardi parson amĂ©nitĂ©, j'ai usĂ© de finesse, je lui aidemandĂ© sa protection pour notre jeunecousin, le normalien Octave RĂ©gis.Pourquoi me regardes-tud'un drĂŽle d'air?

Pour rien.Si, je veux savoir. Tu prétendsqu'il

en conte Ă  ma femme, n'est-ce pas ?

Moi, grand Dieu!Oui, tu le prétends. Et c'est juste-

ment parce qu'on l'a pensé que je tiens àdonner le change aux mauvaiseslangues

en le protégeant officiellement. Un mari

ne protĂšge pas un parent qu'il redoute-rait.

Mais, qui est-ce qui te dit le con-traire, encore une fois ?

Tu ne le dis pas, mais tu le penses.Sache-le encore, je te le répÚte, qa'ca

JOYEUSES NOUVEUJM

priant M. Letourneur de recevoir moncousin, je te servais sans que tu t'endoutes.

Elle est. forte, celle-lĂ !1Eh! certainement, je te servais.

Quand j'ai déclaré à M. Letourneur >

« Monsieur, j'ai une grande faveur aréclamer de vous, » comme il sait que jesuis trÚs lié avec toi, il a de suite songé

que j'allais le prier, le supplier de renouerlonmsfiage rompu. Aussi, lorsque j'aiparlé de l'avenirde mon jeune cousin, ils'est de suite rasséréné. Voyant que je nevenais pas chez lui dans l'intention del'implorer pour toi, toute sa méuance~disparu. Il riait presque quand il estparti.

Je comprends mieux. Mais cela nem'explique pas comment tu m'Ă©viterasd'ĂȘtre emballĂ© dans la susdite voiture desPompes funĂšbres.

Parbleu, Octave et ma femme ymonteront aprĂšs-demain matin, pour serendre chez M.. Letoumeuf; ce semun

moyen de l'utiliser, et j'expliqueraià notrehomme que j'ai tenu à te conduire, toi,momie, dans ma propre voiture de rou-lage, afin que le colis fut dirigé à ma fan-taisie, par un cheval dont j'ai l'habitudede me servir pour certains transports.

Cette fois, Jacques contempla Bonar-del, la bouche béante, sans trouver uneparole.

Est-ce que mon projet ne te souritpas ?

Si; mais, ta &mme. ton cousin.Parbleu ça épargnera des frais de

voyage. Du reste, je dois ajouterque c'estOctave qui en a eu l'idĂ©e il a prĂ©fĂ©rĂ©cela au chemin de fer. C'est une fĂȘte pourlui de voyager ainsi avec sa cousine.

Ah! fort bien!1Et comme, de mon cĂŽte, je me

suis gardé d'avertir M. Letourneur que je

ne me servirais pas de ce moyen de loco-motion, dans la crainte de eontfayMf unhomme qui a ses mamcs.

J*ent~nd§, ton eoHsm et ta ~mme,

en arrivant, lui expliqueront qu'au der-nier moment tu as choisi un autre sys-tÚme d'expédition pour la momie.

Justement. Tu commences a com-prendre ce n'est pas malheureux!

–Ah! 1 Bonardel. tu es un ami.prĂ©cieux. autant qu'un Ă©poux modĂšle.

Eh! eh! un époux modÚle. Emi-lie. me soupçonne tous les jours de latrahif. Elle prétend que je suis un scélé-

rat. Au fond, elle n'a pas tort.Jacques toussa fortement afin de Fintef-

rompreAinsi, c'est pour aprĂšs-demain ?Pour aprĂšs demain, aSirma Bo-

nardel. Nous déjeunerons et je t'emballeensuite dans ton coffre. C'~st égal, il faut

un fier aplomb pour jouer cette partie-la,et tu me devras une belle chandelle.

H prit un air important en enicnçantd'un coup son chapeau sur sa tĂȘte, etquitta Jacques parfaitementradieux.

Le ~ndi, Ă  onzse heures du matin,M. H~ĂŻm Bonardel et M. Jacques d'~ay-

geville sortaient l'un et l'autre d'un co-pieux dĂ©jeuner et, le dĂ©guisement opĂ©rĂ©,Jacques apparaissait dans le sarcophage,les bras collĂ©s au corps, ficelĂ©s de bande-lettes, tout prĂȘt pour le dĂ©part. Seulement,il rĂ©pĂ©tait Ă  chaque instant

Pourvu que Letourneur, en s'apercevantque je n'ai rien qui ressemble auxmomies du musée égyptien, puisque

mon travestissementconsiste en unevieilletunique de brocart, n'aille pas soup-çonner une tromperie

Mais, rappelle-toiles expressionsde

la lettre que nous lui avons adressée

« Cette momie, trÚs illustre maitre, estextraordinaire, parce qu'elle n'est pascomme les autres momies, »

Oui, oui, je me souviens.Nous avons ajouté « L'étoSe de

la robe a Ă©tĂ© prĂ©servĂ©e, sans doute, aumoyen d'une merveilleuse prĂ©parationchimique; on a dĂ» seulement restaurer latĂȘte du personnage avec un masque encire, car le visage tombait en poussiĂšre

1. fiEn enet. il a assez gentimentgobé

h chose.Parbleu t H en goberait bien d'au-

tres. Enfin, nous avons ajouté qae tuétais entortillé de bandelettes de lin pardessus la tunique. Tout nous sert donc asouhait. Je ne sais pas ce que tu réclames.

Jacques s'immobilisa le mieux possible,dans sa nouvelle position on couvrit lecoffre d'une mince draperie, ne voulant

pas encore y assujettir un couvercle, etles quatre hommes de confiance de lamaison Bonardel et Q" enlevĂšrent d'Har~gevillc et le portĂšrent dans la voiture deroulage.

Il faut diablement aimer une~etnme

pour se décider a pareille chose, se ré-pétaient les quatre rouliers pendant queles chevauxprenaient le o'ot.

La conversation allait son train, laM-

que Jacques, qui avait retiré son masque,? ?1 subitement et devint d'une pùleurmortelle. OepuM un quart-d'heur$ e~r~!<

0& sommes-nous? demanda-t-ilBonardd.

–Un peu plus loin que la gare Saint-Lazare. Pourquoi? Tu parais incommodĂ©.

Sapristi, on le serait a moins c'est

ce sacré melon.Ah 1 s'exclamaBonardel, lui jetant

un regard enaré. Nousn'avions pas prévu

que tu pourrais avoir à descendre. Si, aumoins, nous étions en pleins champs oudans un chemin désert.

Impossibled'attendre jusque là. Fai-sons un détour, mÚne-moi vite chez Cé<-

lestine tu sais oĂč elle demeure ?En pareil costume ?Et comment veux-tu que j'entre

dans un Ă©tablissement. ainsi accoutrĂ©?On s'attrouperait. on me prendrait pourun fou. et puis, je ne ne peux pas mar-cher ni changer de vĂȘtements en pleinair. on me prendrait pour un voleur quicherche Ă  dĂ©pister les agents. Tel je suis,tel il faut que je reste. Ah ce sacrĂ© melon,

ce sacré melon 1

–Rue de MiromĂ©nil cria Bonardel

aux quatre employés assis devant la voi-ture.

Et, revenant Ă  JacquesVois-tu, nous te monterons chez

CĂ©lestine dans ta caisse; ce sera infini.

ment plus commode pour toi que d'en,sortir.

Parbleu &aucun prix je n'en sorti-rais. Mais quel attirail, mes enfantsquelle déveine 1

Bonardel aussi envoyait la partie audiable.

Jacques recommença à se tortillerdans

son sarcophage. On toucha le 25 de la

rue de MiromĂ©nil.*–Allons, mes entants, enlevons ça et

vivement, dit le patron aux quatre em-ployĂ©s qui chargĂšrent immĂ©diatement lacaisse sur leurs Ă©paules, aprĂšs avoir ra-justĂ© le couvercle sous lequel se dĂ©robaitla tĂȘte ded'Hargeville.

Ils passĂšrent devant la loge du con-cierge qui ouvrit son carreau.

C'est une caisse de dattes pour M"'Célestine, déclara Bonardel, répondantà l'interrogation muette du bonhomme,tandis que les porteurs grimpaient péni-blement les quatre étages.

On sonna; une jeune fille apparut.Ne vous effrayez pas, c'est Jacques,

annonça le commerçant d'un air aimable,

en saluant gracieusement CĂ©lestine.Jacques! s'exclama-t-elle. Dans

cette caisse?C'est Jacques, répétÚrent les quatre

hommes, déposant péniblement leur far-deau et faisant glisser le couvercle de sesrainures.

-Jacques Ă  demi-mort? s'exclama de

nouveau CĂ©lestine, croyant Ă  une farcefunĂšbre.

Le commerçant débarrassait son ami de

ses bandelettesd'Ă©tone,de son masque encire, sans s'occuper davantage de la dame.

La clef s~écriaJacques,qui, rendu àla liberté sautait du sarcophage, montrantses mains plùtreuses.

-La clef insista Bonardel. Vousn'entendez donc pas?. la clef de votreinodore, n.d.D!i

-Elle est aprĂšs la porte, fit ennn CĂ©-lestine, qui, comprenant tout Ă  coup, setenait les cĂŽtes, prĂȘte Ă  dĂ©faillir, tant elleriait.

Jacques s'élançade l'antichambre au pa-lier, ouvrit le cabinet à gauche, et poussaun juron.

Une femmes'y trouvait dans une situa-tion périlleuse a décrire. Il l'arracha bru-talement de sa retraite, la jeta dehors ets'installa à sa place. Cela s'accomplit enmoins de secondes qu'il n'en faut pourl'écrire. Mais la victime de cet acte ar-bitraire, dérangée dans une minute aussicritique, n'avait pas eu le temps de se re-connaßtre, et se montra dans l'escalier,jupes en l'air et jambesau vent. A ce coupde théùtre, le commerçant, ses rouliers etCélestine faillirent tomber a la renverse,épuisés par le rire qui les renversait les unscontre les autfes.Unc sorte de trépidation

M MAUtAGB D'UNB MOMtE

nerveuse les empĂȘchaitde s'arrĂȘter.CĂ©les-tine la premiĂšre, alla se jeter sur un ca-napĂ©.

Ah t J'en mourra!, s'écria-t-elle, sesentant la rate et l'estomac absolumentépuises.

Quelques instants aprÚs, la locatairesurprise par Jacques s'était réfugiée chezellcy et d'Hargeville,se soutenant à peine,sortait de sa retraite a son tour.

L'explication tut nette et brÚve. Maisl'imprévu de la situation avait tellementdésarçonne les complices de cette scÚnequ'ils ne savaient de quel bout reprendrel'aventure. Bonardel ne tarda pas, cepen-dant a ressaisir son sang-troid.

En route, etplus vite que ça, s'écria-t-il en se mettant en devoir de rajuster lesbandeletteset le masque de la prétenduemomie.

Admirable!1 s'exclama CĂ©lestinequand elle vit Jacques Ă©tendu a nouveaudans son sarcophage. Tu me rendrasunevisitede accĂšs, hem, ma vi~B@ ?

Affaireconvenue. Mais n'oublie pasdedéclarer au conciergÚque tu as refusé la

caisse de dattes envoyée du bureau desmessageriesici, parce que l'on te réclamai:

trop cher de port.Sois tranquille, rien ne transpirera.

Vogue avec connance vers la rive conjugale.

Lesporteursreprirentleurtaisseet la re-portÚrent envoiture. Une fois d'HargeviIIeinstallé, Bonardel fit glisser le couvercleàjour-ce qui permit au patient de respirer

plus largement et l'on se retrouva sĂ©-rieusement en route cette fois jusqu'Ă Versailles,oĂč l'on arriva vers trois heures,Ă  la villa de M. Letourneur.

Je désespérais, s'écria l'académicien

en accourant les recevoir Ă  la grille. Ah I

vous avez renoncé à vous servir de lavoiture des Pompes funÚbres ?

–J'aurais craint les regards des cu-rieux; j'ai prĂ©ierĂ© mon camion. Mais unede nos mues s'est accrochĂ©e Ă  une voi-ture; on en-MMnbremests'enest suivi; de

là une heure de perdue, répliqua paisible-

ment Bonardelen plongeant lesyeux dansles profondeurs de la route oĂč il espĂ©raitvoir, surgir un autre vĂ©hicule.

Vous cherchez quelqu'un? lui de-manda Letourneur, Ă  qui l'explicationpa-rut suffisante.

Mais. ma femme et mon cousin.Bah 1 un retard, sans doute. Il est Ă©crit

que tout le monde le sera aujourd'hui.Allons, enlevez-moiça, mes gaillards! LĂ ,hop! vous y ĂȘtes?

Les quatre employésgrimpÚrentle per-ron, et, laissant à gauche une salle à

manger, entrÚrent au salon et déposÚrentla caisse au milieu.

Faites sauter le couvercle et sortez lesarcophage, ordonna résolument Bonar-deL

-Permettez, observaLetourneur,j'au-rais voulu attendre que mes confrÚressoient présents, pour commencer ie dé-ballage

Ma foi, autant débarrasser ma caisse

de suite, dit le commerçant, qui adressa

un signe imperceptible à ses hommes.Bonardel voulait, on le conçoit, ren-

dre la situation tolérable a d'Hargevillequi devait étouffer; pensait-il, malgré lecouvercle percé à jour, ainsi qu'on doit

se le rappeler.Les employés lui obéirent, et, enquel-

ques minutes, le sarcophage était exhumésolennellement.

Quelle singuliĂšre chose!1 s'Ă©criaLetourneur en voyant apparaĂźtre la/mo-mie ligottĂ©e dans ses vĂȘtements, la tĂȘtecouverte d'un masque.

–Vous devez savoir que cette mo-mie-la n'a rien de semblable aux autres,observa prĂ©cipitamment Bonairdel. Onla dĂ» l'envelopper ainsi d'une tunique

parce qu'elle tombait en poussiĂšre, et si

vous touchiez au masque.Et bien? interrompitLetourneur un

peu inquiet.Dame, si vous touchiez au masque

ia tĂȘte viendrait avec; aengez donc, une

momie qui a peut-ĂȘtre quinze cents ansd'existence1

C'est juste, rĂ©pondit Letourneur.Il faut que les restaurateurs d'objets ar-chĂ©ologiques aient acquis une habiletĂ©Ă©tonnante au Caire pour avoir ainsi-maintenu les parties d'un corps prĂȘtes Ă tomber en poussiĂšre.

j'te crois 1 murmura Bonardel.–Hein?–Rien. Je disais Ça se voit.ï-tetourneur prit son canif.

Voyons un peu, commcnça-t-il al-lÚgrement.

Sacrebleu est-ce que vous allez dé-pioter l'objet ?

Nullement. je voudrais gratter unpeu une parcelle de ses membres pourvoir quelle dureté ils ont acquis.

Et il approcha l'instrument de la mainde Jaeques, main plùtrée immobiliséeparles bandelettes qm la forçaient d'adhérerM corps.

Allez-vous finir ? s'Ă©cria Bonardeltremblant.

Qu'est-ce que cela vous fait ? Lamomiem'appartient.

Une si belle. piĂšce, M. Letour-neur, vous n'y songez pas? Et, d~iUears.

9D'ailleurs, quoi ?Ce serait un sacrilĂšge.Un sacrilĂšge Est-ce que vous vous

moquez ?Un domestique effaré ouvrit !a porte

avec fracas. 1

Monsieur, s'exclama-t-il, v'h unmort qui s'arrĂȘte a la porte1

Qu'est-ce que vous me racontez-lĂ  ?P

gronda Letourneurs'avançant Ă  la fenĂȘtresuivi de Bonardel.

Ils aperçurent, en effet, la voiture desPompes funĂšbres d'oĂč descendaient unefemme ~t un jeune homme.

1Ah Ennn s'exclama le commer-

çant radieux. C'est M"" Bonardel et moncousin qui se décideM amvef.

Comment, dans cette votmfe ?

Oui, répliqua Bonardel avec bon-homie. J'ai songé aTutiliser puisque vousl'aviez louée, et, ne m'en servant paspour la momie, je me suis dit que ça nevous contrarierait pas que j'en use poutM"~ Bonardel et pour Octave.

Fort bien repartit l'académicien

un peu interloqué de l'explication.En v*la desoriginaux, observamen-

talement le valet de chambre, faire servir

une machine pareille pour un voyaged'agrément.

Et il suivit son maßtre assez intri-gué.

Vous pouvez vous retirer, signifiaalors Bonardel à ses employés qui sou-riaient avec malice. Allez m'attendre auCheval- Blanc, et ne vous laissez manquerde rien.

C'est bon, dit l'un des routiers, suf-fit, patron.

Et ils sortirent.Ah ça, demanda précipitamment le

commerçante voix basse, cpufaat à Jac-

ques, tu nous diras quand tu voudras quela plaisanterie cesse.

Laisse donc, Fanairemarche parfaite-

tement, articula Jacques du mĂȘme ton.Seulement, tĂąche qu'il ne lui prenne pasia fantaisie de me chatouiller. Cela, parexemple, m'embarrasseraitfort.

Voici ma femme et Octave.chut!1

Je suis désolé. Madame, que Berthe

ne soit pas encore de retour, disait ~alors

Letourneur en amenant Ă  son brasMrae Bonardel suivie du cousin RĂ©gis.Veuillez vous reposer ici pendant que je

vous ferai servir quelques rafralchisse-

ments.Il s'empressad'aller donner ses ordres.

Iniormez-vous donc de quel cÎtés'est dirigée Berthe, fit M"~ Bonardel à

son mari. Nous irions la rejoindre, Octave

et moi, au lieu de rester ici.Le commerçant courut sur les p&9 de

M. Letourneur.Encore un baiser, un seet et ~e ne

LB MAMAGB D'UNE MOMÏB

demander plus rien, insistait RĂ©gis, enpressant la taille d'Émilie Bonardel.

Vous en avez pris vingt dans la voi"ture, s'Ă©cria-t-elle en reculant.

Avec cela que c'Ă©tait commode 1

vous prétendiez que l'endroit n'était pasconvenable.

'–Oui, mais à la fin. il me semble

que nous avions mis un cadavre. entrevous et moi.

Ma foi, observa Octave en riant.des voitures semblables traĂźnent toujoursdes cadavres.

Nom de nom, de nom d'un petitbonhomme songeaitJacques en essayantde se retourner dans la boĂźte.

On croirait entendre la respirationde.quelqu'un, murmura M"*° Bonardel enregardant craintivement le sarcophage.

Êtes-vous assez poltronne fit Oc-tave, la lutinant, l'Ă©tes-vous assez!1

Il avait réussi à l'acculer entre le coffreet la croisée.

–"Octave, mon cousin. M. RĂ©gis.

voilà ce que c'est que de vous avoir cédé

une fois. Ah! pourvu que je n'aie pointà me repentir. s'il m'arrivait un enfantqui ne fût pas de Henri.

Le grand malheur. il l'endosse-rait.

–InfortunĂ© Bonardel, se disait Jac-ques en Ă©touffant sa respiration. Com

ment, vrai, aprĂšs cinq ans de mariage

cette femme est grosse. d'imprévu..Vo3 ons, Emilie. Embrassez-moic:

je vous tiens quitte.Et mon mari qui est Ă  deux

pas.Laissez-moi donc tranquille avec

votre mari, un homme qui passe sa vie Ă emballer des potiches et des momies.

Farceur, va balbutia Jacques sous

son masque si tu te doutais de ce quiestici.

Non, vrai. Octave, vous n'avez pasde bon sens. Octave, lĂąchez ma robe.

Seigneur va- t-il falloir les avertir

que je suis la? réfléchit d'Hargeville assez

perplexe. Oui, mais si ptĂŽ~nc~ u~mot, ils crieront comme <~s b~ M~foi, tant pis pourBonar<J~.

Ah voilĂ  Berthe ~c~m~tHee~apercevant une jeune 6~~~~an eOt

courant suivie d'une petite tP~d~hom?mes~s,

On croirai vo~r Suz~naje ~tes vĂźei~t

!ar(}s, remarqua le nûf~aR~Stupide anim~U qn~~eaxpa~

du c<9t~ de la boĂźte;Octave n'enten~t pas e~ re}oĂźgnt<

M'pnardel!<~e BeEthe accuei~t cha~leureusement aa) bas ~con.

BonardelBentra, et ~Ba~ sotj~euae-ment la porte du salon,.

VoilĂ  une nunute de d~t-iiJacques. Ils commencer uat~Md~~s~dia, j~ vais te dĂ©batrasser de to~masque.J'avais peuc que tuae te~quves~commode aussi, je me su~ em~tĂȘ ~N1aacon de. XĂ©rĂšs que j'SN~~buffet de la saUe maĂŻ!

~t, joiga~otl'acti~t&~ parole ?

délivrait d'HargeviIle, qui retira son brasdroit de la bandelette, eh remuant sesdoigts engourdis.

Sats-tu que je suis un fier hommeetqae me voilà certain a présent d'épou-serBerth~ ?C'est égal,quellepositionpourun futur 1

Dis donc, il me semble que je pour-rais avoir une part d*ms les Ă©loges que tut'adresses, et que, moi aussi, je suis un-fierhomme ?a

<–Ça, tu peux en ĂȘtre. convaincu.A

propos, si nous mettions ta femme dansla conndence ?

Emilie ? jamaisde la vie je la con-nais, elle serait trop enthousiasméede

mon adresse; car, enfin, j'ai déployé, tuen conviendras, une adresse.

Surprenante. Maisqu'est-ceque celaprouve?

–Eh mon cher, elle en serait si Ă©mue,si pĂ©nĂ©trĂ©e qu'elle le crierait par-dessus lestoits..< car Ă©lis m'adore, ma femme; ellem'adore, tuas du t'en apercevoir.

–Certainement,certainement.Elle ne laisse jamais perdre l'occa-

sion de prononcerĂ  mon sujetdes Ă©loges Ă 

perte devue. qui me fontrougir.Oui, je comprends. tu redouterais

qu'en ce moment,elle ne te témoignùt un

surcroßt d'affection inattendue.Précisément, je redouterais. tu

saisis trĂšs bien. Comment,tu as bu toutle flacon ?

ParMeu l

Mais pour qui vais-je passer en le

rapportantvide ?

Est-ce que tu n'es pas. chez monfutur beau-peré ? Je t'autorise, mon ami,je t'autorise a m'apporter tous les flacons

que tu trouveras.Dans dix minutes on sera Ă  table,

et, aussitÎtle diner, tu entendras ton futurbeau-pÚre entamer l'éloge de ta personneembauméeen termesauxquels tu n'espasaccoutumé.

C'est le moment oĂč je. compte lu:demander la main ~e sa fille.

Je t'avoue que je donnerais beau-

coup pour ĂȘtre prĂšs de la porte en cemoment, et me soustraire. au premiermouvement de M. Letourneur qui, encette circonstance, apparaĂźtra flamboyant

comme le glaive de la justice.–Je les entends, s'Ă©cria Jacques.

vite, remets-moi mon masque et tachede les iaire patienter Ă  mon sujet.

Bonardel s'empressa d'obéir, et courutrejoindrelereste de lasociété dansle jardin.

M°" Bonardel et Berthe entraient alorsdans le salon enlacées l'une à l'autre.

Depuis cinq ans que je ne t'ai vue,fépétait M""Bonardel, quel changement,

ma petite Berthe Mais j'avais déjà en-tenduparler de toi au sujet d'une personnequi t'intéresse.

Ah1 oui. M. Jacques d'HargeviUe.HĂ©las! notre mariage est rompu. pourPinstant.

Comment, pour l'instant ?. tu es-presque cela se renouera?

Sacs doute. Je compte qu'il trou-

vera moyen de me compromettre assezaux yeux du monde pour qu'il n'y aitp~usd'autre mari possible pour moi.

ChĂšre Ăąme, soupirait Jacques. en-tendrecelaet avoirles membresattaches.quel supplice 1

MisĂ©ricorde Ï comme tu y vas re-prit M" Bonardel, te compromettre auxyeux du monde..?

Puisqu'il n'y a que ce moyen-ia del'Ă©pouser..

Mais il existe d'autres maris, machĂšre. tiens, mon cousin Octave pafexemple?.. il est charmant!t

'–A-t-on jamais vu? s'exclamait toutbas d'Hargeville exaspĂ©rĂ©. Oh elle mele paiera t

Merci, rĂ©pliqua Berthe, }'a!memteux ĂȘtre compromise*

<*M. Folle, s'Ă©cria Ëtailie, M. JacquetmĂ©rite~t-11 autant d'amour? Mais, e'est o&viveur queMt d'Hargeville.

Traitresse !t.. murmufa Jacquet*Vo~ teprĂŻt Benhe~ €'eM pfĂ©d*

sĂšmentparce que c'est un viveur, au lieud'un homme comme papa, que je l'aime.Et puis, il y a du plaisir Ă  voir enragerles autres femmes en leur prenant unhomme qu'elles mouraient d'envie degarder pour elles.

Bon petit cƓur, va se dit Jacques.Un homme comme papa, personne

ti@ me lé disputetait, tu comprends ?Parbleu! interrompit d'Hargeville,

ens'oubliant.C'est trop fort s'Ă©cria la jeune fille

~n se levant; croirais-tu que j'ai tellementta voix de Jacques dans les oreilles que~Ă l cru Fentendre

L'amoureuxretint sa respiration.BertheSe rassit et ajouta

MĂȘme quand je serai mariĂ©e, j'au-rai l'air parfaitement dĂ©tachĂ©e. Je feraicelle a qui aucune femme n'est suspecte.D'ailleurs, a ne te rien cacher, il ne medĂ©plairait pas qu'on me le disputĂąt unpeu, mon mari. Ça met du piment sur lesfadeurs du lien conjugal.

A-t-on jamais vu ? se répétait d'Har<geville. Ces petites filles qu'on croit en-dormies le nez dans leurs livres. C'estconfondre1

Mesdames, interrompit Régis, enpoussant la porte, je suis chargé de vousavertir que l'on va se mettre à table.

Allons, viens, repartitBerthe, en en-traĂźnant son amie. Viens, je suis maĂźtressede maison aujourd'hui, je dois ĂȘtre Ă  monposte.

Etelle sortit, suivied'Octave etd'initié.Ah fit Jacques, en envoyant un

baiser dans le vide, comme ça dilate le

cƓur d'entendre cela Je n'y tiens plus. Ilfaut que je parle bientît.

On discernait au bout d'un instant unbruit de vaisselle et d'argenterie. La con-versation semblait animée dans la salle acÎté.

Ah ça, mais je crÚve de faim, moi,songeait d'Hargeville. Ce satané animalviendra-t-il me tirer de la?

De nouveaula porte s'ouvritet se ferma.

Jacques Jacques appelait en sour-dine la voix du fidĂšle Bonardel, me voici 1

Une main Îta son masque.Nom d'un petit pétard }e tombe

d'inanition. Qu'est-ceque tu m'apportes ?du pain et une sardine. dans ton mou-choir. Te fiches-tu de moiTu sais queje suis,affamé ?.

Je ne peux pourtant pas t'offrir

un couvert complet. Si tu crois que c'estfacile d'escamoter les morceaux dans mama poche? Je ressemble Ă  un voleur.

Puisque tu es chez mon beau-pĂšre,animal!I

Ton beau-pĂšre, ton beau-pĂšre, c'estbel et bon. Mais, il n'est pas le mien.Comment, tu te lĂšves ?

Mon cher, quelque chose de nonmoins. impérieux que chez Célestinem'yoblige. Je ne saurais attendre.Du reste,ils en ont bien encore pour un quart-d'héure.

Oui, mais guĂšre plus.DĂ©RcĂšle mes jambes, prends ma m"

nique de brocart et donne-moi ton pale-tot. M ~aut que je coûte a l'autrebout dûjardin, aprÚs certain endroit. Tu com-prends .t, )e né peux y aller en caleçon, etil ne faudraitpas laisser le sarcophage videSi quelqu'un s'avisait de venif.Pr~hd§sia place un instant.

Soit. Nous sommes de la mĂȘmetaille, heureusementt

~a métamorphose s'opéra. Jacques~ëHIa avec sollicitude à ce que son amt

ne trahit aucun désordre dans les arapë-'

riëS tHOrtuaifes, et ùss~ettit le masque àla figure de Bonardel et les bandelettes &

a@s membres, ainsi qu~n l'avait opĂ©rĂ©pourÏuh

Tume remplacesavantageusementHM1; tie bouge paĂą. Les domestiquessontoccupes et he verront point. D'ailleurs,

saute par la ~nĂȘtre.C'est Seulenient!, ne tarde

pas.Il venait de ~elo!gh~ depuis six ou

sept minutes ĂźoysqueM'~ Bourde!, sm-

vie d'Octave' RĂ©gis, entra au salon..Mon cousin, s'Ă©cria-t-elÏe, je vous

en prie, finissons-en. Vous n'avez cesséde me prendre les pieds sous la table.vous achÚverezde me compromettre.

Voyons~ Emilie, au point oĂč nousen sommes. vos scrupules sont Ă©ton"nants.

Un coup de timbre retentit dans lĂ pi~ce voisine.

On sonne rétévation, ma cousine.y

Vous N'sHez pas vous dérober au Dieuqui descend sur l'autel?.

J'ai assez d'une messe.« basse par~oar, mon cousin.

Elle a assez d'une messe basse, son*

gea Bonarde~ stupéfié dans son sarco-phaget.. Est-ce que je suis iou?Est-cequ~c'est ma femme? Qu'est-ce qu'eue entendavec sa messe basse ?

Pendant qu'Us sont en train d'ava-ler le café, insista Régis. « un instant debonheur, c'est si vite accordé Ah m~ëou~ae~. soy@z boBM comme ~atÎt~

Ă 

tenez, asseyez-vous ici, poursuivit-il, endésignant la momie, on y est commodé-

ment. `

Morbleu! songeait le mari, quiétouSaitsous le poids. Est-ce que c'estpossible une position pareille ? Comment,

Jils se sont assis sur moi ils ne parlentplus. ils se taisent. mille tonnerres deBrest Mes pieds sont liés si j'exécute

un mouvement, je découvre le pot auxroses.

Et, oubliantque son masque n'Ă©tait paspercĂ© aux yeux, il dressa sa tĂȘte si brus-

quement que M" Bonardel, qui avaiten ce moment l'expression, la pose d'uneLĂ©da oĂč le cygne est prĂȘt a passer ailesdĂ©ployĂ©es, tut prise d'une terreur fulle etse sauva en criant.

Il y eut comme une mĂȘlĂ©e gĂ©nĂ©rale; onaccourut.

Ce n'est rien, messieurs, dit Oc"tave, resté là, et qui, tournant le dos `

à la -prétendue momie n'avait pu voirma cousine a eu un moment de panique,

parce que le salon était mal éclairé, etqu'elle s'est imaginé que quelqu'un bou-geait dans le sarcophage. Je vais la rassu-rer.

#Et il se prĂ©cipita du cĂŽtĂ© oĂč la jeunefemme venait de disparaĂźtre.

Pure hallucination, observa en sou-riant M. Letourneur, se tournant vers sesinvités Ma fille est plus brave que cela etn'auraitpas tremblé.

Papa. dit Berthe, je voudrais bien

que vous grattiez la peau de cette momie,pour savoir si elle a la dureté de lapierre.

Encore? articula Bonardel, qui setrouva mal à l'aise. Ils sont enragés dans

cette famille. Et Jacques qui n'est paslà pour me délivrer.

Je ferais mieux que cela, si je neredoutais pas de dĂ©tĂ©riorerun sujet prĂ©cieux, rĂ©pondit LetourneurĂ  la questionde sa fille. Je fendrais cette partie ducrĂąne oĂč la cervelle a dĂ» ĂȘtre vidĂ©e parles embaumeurs.

Bonardel se sentaft de plus en p!us mat&Faise.

Cher contrĂšre, observa un des ho'norables, je vous prie de remarquer quela cervelle n'a peut-ĂȘtre pas Ă©tĂ© vidĂ©e ?

Pardon, interrompit dédaigneuse.

-ment Letourneur, vous me donnez un dé<

menti, cher confrĂšre 1-

Par exemple je connais les pfoc~dĂ©s d'embaumements des anciens Ëgyp<tiens.

Je crois les connaßtre aussi bien quevous, et il est impossible qu'ils aient con-servé le cervelet.

Impossible, monsieurLetourneur~Du temps de Sésostris on possédait, jecrois, des secrets pour solidifier les liqui.des.

Rien ne prouve que ma momievienne du temps de Sé&ostris, déclarasÚchement Letourneur, je la croirais plu-tÎt du rÚgne d'Aménophis.

1Messieurs, fit un troisiĂšme iaxHĂŽF-

tel voulant apaiser les deux-iMustres~ vayez

donc- s! les cheveux s'arrachentfacilementde l'ossature crùnienne, s'i!s cÚdent sanseffort. Il y aurait une déduction a en tirer.

Miséricorde! gémit Bonardel, c'estfini de moi. Les bourreauxvont m'enlevé!la peau.

Je soutiens que les cheveux neviendront pas avec la racine, prononçasentencieusement M. Letourneurt

Je demande Ă  tenter une incision

sur les membres, repartit aigrement l'ad,versaire du maitre de la maison.

A l'autre balbutia Bonardel. Ils

vont m'Ă©gorger. Je me meurs

Mettons-nous donc d'accord, repritcelui des savants qui paraissait vouloir pa-cifier la querelle. Arrachons un cheveu;si nous amenons sa racine, c'est qu'il yaura encore des parties molles dans l'indi"vidu.

–C'est juste, conclut M. Letourneur,c'est fort juste, mon cher confrĂšre! Mais,.je vous demaudede constater que le corpsest dans un Ă©tat de conservation par-

faite. C~estia premiĂšre momie que j'aie

vue dans des conditions d'embaumementaussi merveilleuses. Je tiens là, voyez-vous, un fait exceptionnel, qui me four-nira un document inouï. Mais, d'abord,puisque vous y tenez, arrachonscettelégÚre poignée de fibres capillaires.

Et, d~ sa main sÚche, l'académicientira violemmentune petite mÚche de che-

veux a la soi-disant momie.Au secours s'Ă©cria Bonardel d'une

voix de tonnerre. Au secours au meur-tre on m'assassine 1Ă  bas l'Institut Ă  moid'Hargeville i

Et, furieux, cette fois, persuadé qu'ildevait se trouver là sous les yeux d'unevingtaine d'individus armés d'instrumentstranchants, déterminésà lacérer les diversendroits de son corps, l'infortuné com-merçant se redressa et, du bras qu'ilretirades ban delettes, arracha son masque. Une mbaumement datant de quarante siÚclesn'eût pas immobilisé davantage les per-sonnages de cette scÚne, lorsqu'ils se vL

rent en présence de l'un des invités aveclequel ils dßnaient l'instant d'avant. Leplus rebelle à accepter ce qu'il voyait iutLetourneur,qui, persuadé qu'onvenaitdésoustraire un vérttable cadavre égyptiendu sarcophage qui était là, dans1e but dele mystiner, regardait partout, espérantdécouvrir son sujet disparu.

OĂč donc est la momie qu'on m'aapportĂ©e? Qui s'est permis de l'enlever?OĂč l'a-t-on p!acĂ©e ? Je dĂ©couvrirai le ra-visseur. On ne vole pas un hothme

comme moi. Je vous jure, messieurs,qu'il y avait ce matin a cette place,

une véritable momie qu'on m'a subtilisée.H n'yen a jamaiseu interrompitun

personnage trĂšs connude Letourneur et deBerthe. TI n'y a dans toute cette affaired'autremomie que moi qui, dĂ©sespĂ©rĂ© dem'ĂȘtre vu refuser la main de votre fille,

me suis introduit chez vous grĂące Ă  un~Bbt€rh~e..Mon ami Bonardelme rem-uĂ©e un instant, pour me permet-

t'<& §a~atr@ ceftain.~ besoin. Vous

LE MARIAGE D'UNEMOMtE

m'aviez mis a la porte, j'y suis rentré parun sarcophage. voilà le cadavre. Cetteleçon vaut bien un mariage, sans doute.

Et Jacques se montra audacieusement

en chemise et en caleçon de toile.Cette fois il était impossible de nier fé"

vidence. L'académicien se trouvait réelle-

ment la proie de celui auquel il jouait untour impardonnable, dix jours avant. Maissa confusion augmenta lorsque M~ Le-touraeur s'avançantles yeux humideset les

mains tremblantes, dit au vieillard entĂȘtĂ© tPĂšre, il n'y a pas Ă  lui en vouloir, je

lui avais positivement demandĂ© de mecompromettrepour que tu ne puissespluslui refuser ma main.-–Aussi, dĂ©clara intrĂ©pidem ent d'Harge-ville,n'est-cepas vousque jai compromise,mademoiselle, mais Monsieur votre pĂšre,envers.-lequel je me montre assez gĂ©nĂ©reuxcependant pour me dĂ©masquer Ă  temps.

-Comment, vous démasquer à temps t.

s'Ă©cria le savant, bleu de rage.Sans doute, cher Monsieur n'alliez~

vous pas écrire un mémoireconcernant lasoi-disant momie dont vous étiez l'heu''

t,reux possesseur ?.TrĂȘve de plaisanterie. Croyez-vous

que je n'aurais pas découvert votre gros-sier subterfuge ?

Allons, allons, mon cher ami, ou-bliez cette mésaventure, ou nous croirons

que vous ĂȘtes furieux d'avoir conferenciĂ©devant nous sur les procĂšdesd'embaume-

ment des peuplades orientales,repartit1'cadénucienqui, un instant auparavant, lecontredisait.

Riez, messieurs, répéta Letourneur,riez à votre aise. Je suis ridicule, mainte-

nant.Il regardait d'un Ɠil terrible sa fille à la

fois tremblante et radieuse, et Jacques unpeu agite.

–j'espĂ©rais pourtant, remarqua Jac-

ques, que Bonardelferaitun sacrifice à l'a-mitié en s& laissant arracher les cheveux

sans motdire.MaissoĂŻĂźanecHonpourmoĂŻn'a pas mĂȘme eu l'Ă©paisseur d'un cheveu.

Un rire gĂ©nĂ©ralaccueillit cette rĂ©ponse.On Ă©tait ravi du piĂšge oĂč venait de tomberLetourneur.

Au fait, rénéchit le malheureux sa-vant, si je refuse la main de ma fille, il estcertain que les brocarts n'en pleuvrontpasmoins autour-de mon nom; tandis que sije l'accorde, je paraßtrai n'attacher aucuneimportance à ce qui ~'est passé et jemontrerai plus d'esprit qu'on ne m'encroit.

Papa, demandaBerthe, en secouantsa jolie tÚte, es-tu toujours fùché? Pensedonc à ce qu'a dû souffrir ce pauvre Jac-

ques dans ce cercueil, oĂč il a passĂ© sajournĂ©e.

1Elle a raison, s'Ă©cria-t-onen chƓur;

elle a raison, Letourneur. Allons, oubliez

tout et dites oui.Moitié turieux, moitié apaisé par les

supplications, le membre de l'Institut finit

par rire et tendre la main Ă  Jacques, quin'en montrait pas moins une assez in-quiĂšte ngure.

-–II Ă©tait mieux dĂ©guisĂ© en momie,murmura l'acadĂ©micien

C'est plutÎt son ami, qui le remp!~çait si dignement, auquel ce rÎle conve-.nait, reprit Berthe.

-Vous en parlez Ă  votre aise, made-moiselle, riposta amĂšrement Bonardeldont la figurerestaitterrible. Cesmessieurs

ont voulu me déchiqueter, grùce à lui.Ah je sais ce qui te rend soucieux,

fit Jacques en s'approchant et en baissantla voix. Ecoute, Bonardel, sache unechose. En sortant du salon, il y a unquart-d'heure, j'ai rencontré ta ~emme.lia bien &llu lui raconter la vérité, et,'voulant rire jusqu'au bout, je' rai enga-gée à te jouer une farce de mon in-vention. Pendant que tu t'installais à maplace dans le sarcophage, elle et Oc-

tave ont imaginécette comédie de l'adul-tÚre que tu as failli prendre au sérieux,

Allons donc s'exclamar BonardeÏ,redevenant radieux, t'imagmes-tu parhasardque je les ai crus une mmMte ? Bs~

M MAMA<~5 D'UNE MOMÏE

ce que ~e ne connais pas ma femme, de-puis cinq ans de mariage? Imbécile, va 1

Ma foi, tu comprends. je m'imagi-nais. que tu étais. vexé, dans le fonds.

Jacques, interrompitLetourneur ens'approchant, si vous jugez utile d'endos-

ser, un pantalon sur votre caleçon, moncabinet de toilette est au premier étage.

Grand merci~ `

Et d'HargevUle se hĂąta d'accepter l'of-fre gĂ©nĂ©reuse de son beau-pĂšre futur.Cinq annuler aprĂšs il reparaissaitdans desvĂȘtements trop larges, et trouvait le com-merçant en train de regarder sa femmetendrement.

Ah ça, demanda Letourneur, à quiquelques mots échappés avaient appris lavémé, et s'approchant de l'oreille de sonfutur gendre, vous croyez donc que ce.pauvre Bonardel est.

Je fa!s plus que de croire, rĂ©pliquaJacques du mĂȘme ton, j'en suis sĂ»r.

Sûr de quoi ? interrogea Berthe. r

–Que nous gĂ©rons mariĂ©s dans trois

semùmes, répondit Jacques en lui baisantla main.

Ma. foi, songea l'académicien, il y aici un homme encore plus ridicule quemoi:; cela me console.

On entendit alors la voix de Bonardel,qui parlait a sa femme et Ă  son cousin

Avouez, s'Ă©criait-il, que quand je

me mĂȘle des choses, elles vont joliment.Hein vous ne pensiez guĂšre oĂč je vousmenais ce matin, quand vous voyagiezdans le coffre des Pompes funĂšbres? C'estpourtant Ă  moi qu~on doit le couronne-ment de cette journĂ©e. Jacques, avec toutson esprit, n'en serait jamaisvenu Ă  bout.

Et il ajoutait, en embrassant M" Bo-nardĂȘl:

–Voyez-vous, Messieurs, pour moncompte, j[e suis content t

LES. CHEVALIERS DU BIDET

pous empruntons ses expressions propreslorsqu'il préside à la XXI" Chambre. Cegrotesque gueux de Bazanville, dont il

est facile au lecteur de rétablir le véritable

nom, cet inamovible coulait des jours

assez bĂȘtes dans son cocuage. Ce quil'horripilait, c'est qu'il ne pouvait en ac-quĂ©rir de preuves plausibles. Aussi, Ă©tait-il chaque jour plus ventripotent, plushargneux, plus plat et plus vil, n'osant

ous connaissez déjà la femmeBrioux de Bazanville, la « dame »

au magistrat fameux, auquel

dire un mot des amours adultĂšres de ta

femme Brioux, la plus sale moitiĂ© de lui-mĂȘme dont la sociĂ©tĂ© ait jamais Ă©tĂ© in-fectĂ©e.

En ce temps-là, les condamnationspleuvaient dru sur les gens de lettres, etle Gil .8/<M ne fut pas épargné de ce goujatà binocle. M"~ Brioux de Bazanville avaitdepuis longtemps dirigé ses convoitises

vers le substitut de la MariniÚre, ancienattaché au cabinet du duc de Broglie.Ce la MariniÚre, quoique madé, redou-tait de ne pas se montrer galant envers. lafemme de son chef, car, s'il l'eût repous-s~c, elle l'aurait sans nul doute noirci prÚsde son auguste époux. w

La donzelle s'imagina se l'attacherjamais en l'avertissant qu'elle lui feraitdon, prochainement, d'une chose pré-cieuse.

Ah! disait la MariniĂšre, un peubĂšgue, vous avez un eu. cu. cu.curieux objet a me donner ?.

Oui, mon cher substitut; un objet

qui, je l'espÚre~vous montrera a quel pointj'ai placé en vous. mes espérances.

El la vieille se rengorgea.Votre con. con. con. con"

fiance m'honore.Jamais je n'en ai ressenti une pa-

feille pour aucun homme. TI faut que cesoit vous pour que je me sois abandonnée

aimer comme ~'aime. Croyez queC'est la premiĂšre et la derniĂšre fois quej'ai fait un accroc Ă  ma robe. d'Ă©pouse

sans tache.Et la matrone levait au ciel ses yeux de

colombeexpirante.Votre pi. pi. pi. pi. pieuse

conduite m'en est garant, Madame la pré-sidente.

Ne me remerciez pas avant de sa-voir en quoi consiste la chose en question.

Qu'aide donc, en vérité, accomplide si mexveiltcuxpour que vous daigniez

me faire ca. ca. ca. ça. cadeau d'unobjetque )e ~<;deviner. et qui doitĂȘtre sans prix?

Vous m'avez aidée à supportÚr lesbrutalitésde mon mari, voilà tout.

C'est un tu. tu. tu. turbulentépoux que vous avez en lui.

Oh non, murmura-t-elle, avec unsoupir; il n'est pas turbulent avec moi, iln'est que hargneux.

La MariniÚre n'osa souffler mot, dansla crainte de dire du mal de son supé-rieur.

Voyez-vous, mon cher substitut, il

ne comprend pas mes aspirations. éle-vées. Nous n'étions pas créés l'un pourl'autre. °

Je saisis, Madame la présidente. Iln'aime que le so. so.. so. solide ils'englue dans le po. po po. po.positif.

Justement. Vous avez parfaitementdeviné. Envieux, bouffi d'importance, cemasque gras, à faciÚs de sanglier, a°t-iljamais pu exhaler l'amour ?Voyons, qu'en

pensez-vous, La MariniÚre P Avec moi"n'ayez crainte d'exprimer votre pensée.

Je lui en veux bienunpeu des cou..cou. cou. cou. courbettes que je luiai adressées.

Vous voyez que vous ĂȘtes de monavis.

Et puis, acheva le substitut, il estplein de pou. pou. pou. pou. pou-voir sur moi; il en a. a. abuse. Et il nerĂȘve tou. tou. tou. toujoursqu'Ă  faire

pen. pen. pen. pendre les gens delettres.

Enfin croyez-vous qu'il ira plushaut que la XXle ?

–-Je crois qu'il a atteint son ba. bĂą.ba. bĂąton de marĂ©chal maintenant.D'ailleurs.

Chut! Monsieurde la MariniÚre,je l'entends qui arrive prenez votre aircérémonieux et quittez-moi.

Madame la présidente, je suis, pourla vie, votre dévoué co. co. co. cor-véable.

Et le substitut, courbé en deux, salua lacheffesse judiciaire dont il devait rester

'ramant forcé pendant quelque temps, s'ilvoulait que rien de pénible ne surgit dans

ses affaires au palais.Deux jours aprĂšs, M~" Brioux de. Ba<

zanville envoyait au sieur de la Mari-niÚre une caisse en bois de Santal avecpriÚre de ne désemballer l'objet que lors-qn'il serait seul.

La MariniÚre, on le conçoit, avait con-servé, quoique marié, un logement se-cret de g~rçon~ ~5 du Cercle cathodique

de la rue Mndam~,d~nt il se vant. it d'ĂȘtre

un des membres fervents. Il reçut com-ponctieusement la caisse qu'on lui adres-sait. Mais il s'empressa,dÚs qu'il fut seul,d'enlever rapidement le couvercle, seservant de ses pincettes en guise de levier.Seulement, quand il vit la nature del'envoi, il se crut le iouet d'une mystifica-tion. Pnnn il se décida a retirer dela boite,un petit meuble en forme de guitare. unbidet, pour nous servir du terme consacré,dont les parois en boule contenaientune cuvette a peinture sur porcelaine.

Stupéfait, il enleva la cuvette au fondde laquelle il reconnut en un merveilleuxtravail céramique le portrait empilé dela présidente, de l'auguste M°"~ Brioux deB:.zanvi!Ie, dont la ressemblance attestaitl'oeuvre d'un de nos plus fameux artistes.

Cette fois, songeait la MariniÚre, ilm'est impossible de croire à une plaisan-terie; car si cette femme voulait se moquerde moi, elle n'aurait pas agrémenté lebidet de son. portriit.

Un second objet accompagnait le pre-mier c'était un « indispensable » égale-

ment en argent.Le substitut rompit alors le cachetd'une

lettre qui servait de préface à l'introduc-tion de ces deux meubles

« J'ai voulu, disait l'amante transie,

vous donner deux choses qui entrentdans la pratique journaliĂšre de la vie,afin qu'aux heures intimes de votre exis"

tence vous soyez ramené à penser amoi. Généraletneut, l'emploi des deuxmeubles quej~~us adresse exige le corn*

plet isolement de la société; donc, aucunedistraction ne subsistera alors pour écarter

mon souvenir de votre esprit; il se .mĂȘlera

aux rafraßchissementsémollientsquev otreprécieusepersonne, échaunéeparlesréqui-sitoires de la XXP chambre,demandera à

ces instruments d'un usage délectable, »La MariniÚre, en vrai magistrat de la

XXI', absorbait plusieurs fois par jour desclystÚres d'eau tiÚde. Il se livrait à cettepratique aimée des dévots, a l'exemplede son.chef. Ce n'est un mystÚre pour per-

sonne que le grosprésidentde la XXI" pos-sÚde dans un petit cabinet attenant à sonprétoire, des instruments de premiÚre né-cessité, destinés à combattre la constipa-tion qu'amÚne chez lui l'éjaculation labo-rieuse de ses sentences contre les gens delettres.

Aussi le substitut, un instant Ă©bahi,finit-il par regarder de sang-froid le bidet

et r~J~MM~ lorsque son concierge,frappa nt violemment, lui remit une noH"vellelettre.

ËLe '.i'et. te trop joyeux bidet, a.-ait Ă©tĂ© exhumĂ© de la caisse et trĂŽnait en guise

Ë de soupiùre au mUieu d.~ la table. (Page ':9 )nt!M ~e

La MariniĂšre ouvrit brusquement.

& Cher, disait la missive, dĂ©fie-toi; tafemme et ta belle*mĂšre sont Ă  la piste deton logement de garçon. EnlĂšve tout cequi pourrait ĂȘtre suspect; car, d'un jour Ă 

Fautre, sous un prĂ©texte qufÏcoat~ tuSeras en butte Ă  une perquisition }udi*ciaire. Ton ami, Gaston. »

La situation s'accusait critique.–D'un instant & l'autre soageait le

substitut; cela signine~ a prĂ©sent,main, peut-ĂȘtre ce soir, on ne~ait. Ë)a ~a,

vĂ©ritĂ©, c'est a en perdre la tĂȘte Ï Mespiers sont facues & transporteratU~tit~Mais ce bidet? En admettant que je )dsa6le vase chez moi. je ne peux y M§sĂ«raus~ <Ke malheureuse piscine.

Ë~ €oaimeMarius sur les ruines de ~ar*<hag@, it ratait a cheval en travers duo~~M~j mĂ©ditaisvr l'Ă©croulement de sa t!MQ<'

a

q,D s'y à pas & rénécMr plus !<~

~n~ songea-t-i!. Je vais broies Ïe§

tes de la pr~sideate~et ~e~po~

JOYBCSM NOOVEltBS

deux objets avec moi dans une voiturede place, jusqu'à ce que j'aie trouvaUn ami sérieux chez qui les caser.

Sa détermination s'exécuta vite, et unedemi-heure aprÚs il roulait dans un fiacre,

emportant la caisse en bois de Santal.Ma femme peut entrer maintenant

dans mon logement, se rĂ©pĂ©tait-il; cequ'elle y trouvera ne sera pas lourd. Seu-lement, j'ai beau me creuser la tĂȘte, je neme soucie guĂšre de mettre en ma confi-dence mes amis du Cercle catholique; j'aipeur qu~ils ne rient de moi en devinant lanature de l'objet que la forme de cettebotte autorise trop a soupçonner.

L'heure marchait, cependant; il fallait

se rendre a l'audience pour quatre heures.Au fait, songea La MariniĂšre, en se

frappant le front, si j'allais voir CĂ©safine ?aElle est bonne fille.

Et il donna au cocher l'adresse de la

personne en question rue de Douai,Mlle CĂ©sarine, qui rentrait alors, sauta

au €6u de son ancien protecteur.

-J'accours te demander un service,fitLa MariniĂšre en riant.

Il est a remarquer que le substitut nebégayaitque lorsqu'il était ému. En gé-néral, le contentement lui rendait la libertéde sa parole.

A titre de revanche, répondit C~-sarine, quand je m'assiérai sur les bancsde la Correctionnelle, tu me recomman-deras chaudement.

Tu n'en es pas. pas là..Enfin, que désires-tu de moi?

–Que tu me ga. ga. gardes cettecaisse jusqu'à ce soir seulement. Je vien-drai la reprendre.

Soit. Mais alors promets-moi unechose?

Tout ce que tu voudras.Au lieu de ne passer que la soirée

avec moi, dinons ensemble; j'ai quelqu'unque je veux te présenter.

S'il ne s'agit que de cela pour terendre heureuse, j'accepte MĂ is cache-moi cet objet.

Ennn, qu'est-ce que c'estque ce pré-deux dépÎt ?

Je n'ai pas le temps de te l'expliquer.Sache seulement que ma femme su. su.suspectant ma con. con. conduite, esten train de faire cou. cou. courir aprÚsmoi dans mon petit appartement de gar-çon.

Sumt, ma vieille branche tu en asenlevé diverses chosesqui t'auraient com-promis et tu me les apportes ?a

–Tu as devinĂ©. Maintenant, adieu!iAinsi on a pensĂ© Ă  sa Niniche, pour

lui demander un petit service mignon?c'est gentil, ça, mon gros. Allons, sauve-toi, et reviens vite.

Adieu, ma poule 1

Adieu, mon chien t

Et le substitut se précipita dans l'esca-lier. Un quart d'heure aprÚs, il descen-dait au Palais de Justice.

Son réquisitoire ùnonné, il se retirait,persuadé de l'impression causée par sa pa-role, ayant obtenu une condamnation à

quelques mois pour un w~leut de son'nettes, lorsqu'Ă  la porte du Palais, il s'en~.tendit appeler. Citait le sieur Brioux deBazanville,qui l'attendait dansune voiturede place.

D s'empressa d'obéir, monta prÚs de

son chef, qui lui dit en riantJe vous emmĂšne avec moi, ce soir.

–OĂč~ ou. oĂč donc, monsieur leprĂ©sident?

Vous le verrez. C'est une surprise.Quoique déconcerté. La MariniÚre

n'osa souffler mot.Dieu medamne songeait-il~ le

cocher prend le chemin de a rue deDouai.

Ne cherchez plus oĂč nous allons, fit

en riant le sanglier judiciaire, vous netrouverezpas; c'est chez une amie Ă  moi.

Comment, monsieur le président?u. u. une amie a vous?

Eh ĂŻ de temps en temps, je lĂ  vois.Vous comprenez, on n'est p~s sans insp!-rer quelque attachement.

Et le président se caressa les favoris, etrassujettit son pince-nez.

Vous m'incul. cul. culquez deschoses Ă©tranges.

Allons donc, La MariniĂšre vous neme convaincrez jamais que vous aussi.

Mon Dieu si c'était un piÚge de cerhinocéros de malheur?se dit l'amoureuxmalgré lui.

11 essaya de sourire.Dieu de Thémis! que ce garçon

paraßt idiot! songea Brioux, ému' depitié.

Ainsi, reprit le président, vousn'avez jamais fait la cour à aucune autrefemme que la vÎtre ?a

Oh! si. si. si.A la bonne heure 1

–Si on peut dire! acheva La Mari-niĂšre, dont la langue s'empĂȘtrait.

Mais alors, mon garçon, vous ĂȘtes

un ange, et. je ne sais comment je vousprésenterai a Césanne.

Juste ciel! songea le malheureux

La MariniÚre, en voici bien d'une autre:présent!

La voiture touchait au 34 de la ruede Douai. Le président paya et entraßnale substitut. Une sueur froide coulaitdans le dos du subordonne qui se décidaà un aveu spontané.

Je co..co..co..connais cette dame,balbutia-t-il en essayant un sourire.

Ah bah! s'écria Brioux, le regar-dant en face, cette fois, et stupéfait de hconfidence.

En mĂȘme temps il souriait et poussaitLa MariniĂšre devant lui.

Comment, ensemble s'exclamait

une voix de femme.C'Ă©tait CĂ©sarine qui entr'ouvrait la

porte de son boudoir.Je crois superflu de vous présenter

l'un à l'autre, observa le président avecun petit rire stc.

C'est chose faite interrompit ladonzelle en voyant ces deux singuliersvisages. Seulement je vous ai préparé une

surprise. Oh mais, la, une surprise!Vous ne savez pas dans quoi vous allezĂȘtre servie messeigneurs ?

Dans du SĂšvres ? demanda Brioux.Mieux que cela.De la vaisselle plate ?

Pas tout Ă  fait.Allons, La MariniĂšre, Ă©gayez-vous,

que diable Vous ĂȘtes en pays de con-naissance.

A table cria la dame en prenant lebras du président.

On entra dans la salle Ă  manger, et deuxexclamations formidables sortirent de lapoitrine de chacun des deux hommes.

Le bidet, le trop fameux bidet avaitété exhumé de la caisse et trÎnait en guisede soupiÚre au milieu de la table, exhalantl'arome d'un potage succulent.

Mi. mi. misérable cria La Ma-riniÚre, que la colÚre suRbquatt. Je t'a"vais conné cela en dépÎt.

Pas possible 1 interrompitBazanville

interloqué. C'est de vous qu'elle tient cemeuble ?

En dépÎt, monsieur le président.En dépÎt commentPC'est. c'est. un ca. cadeau

qu'on.qu'on. m'a fait.

Et, ajouta CĂ©sarine sans penser Ă  cequ'elle disaif, il y a aussi un joli portraitde dame sur Ă©mail, au fond.

Eh eh monsieur le substitut, pour-suivit d'un ton goguenard le magistrat,

on va bien au Cercle catholique.Votre ca. ça. ça. caprice est

Ă©tonnant, CĂ©sanne i

–La, lĂ , calmez-vous, rĂ©pliqua-t-elle.Vous savez que ce bidet n'a pas encoreservi. C'est pourquoi il m'a paru plaisantde vous offrir la soupe dedans.

Elle plongea la cuillÚre dans le récipient

en pùte transparente et présenta uneassiette pleine à chacun des deux magis-

trats.Depuis quelques secondes, La Mavi-

niere ne réfléchissait qu'à une chose

empĂȘcherBrioux. de Bazanville de voir leportrait de la dame peint dans la cuvette.Et, depuis le mĂȘme nombre de secondes,Brioux ne songeait qu'au moyen de dis-tinguer le susdit portrait.–PĂŽ. po.po. portez cela ailleurs 1

répétait La MariniÚre.Quand le bidet sera vide, déclara

solennellement le président, qui jouissaitde h confusion de son subordonné.

Si je me sauve, se disait La Mari-niĂšre, i.Ăź fera jeter le reste du potage, etreconnaĂźtra encore plus vite la physiono-mie de sa femme.

CĂ©sarine, elle, se tenait les cĂŽtes, heu-

reuse de sa petite vengeance sur le grosLa MariniÚre, qui l'avait plantée là dans

un moment de dÚche. Elle s'eSbrçait de

se détourner de son suppliant regard, etluttait, à l'instardu président, à qui, d'elle

ou de lui, mangerait le plus de soupe.Hnnn, le moment fatal arrivait. Le bidet

se vidait, se vidait. Le président se levabrusquement, saisit le meuble et plongea

un Ɠil ardent au fond. La MariniĂšre'pris de frayeur, gagna la porte et se sauva.Mais, pendant qu'il enfilait l'escalier, leprĂ©sident considĂ©rait vainement la figureengluĂ©e de vermicelle. Il ne reconnut pasM" Brioux de Bazanville et rĂ©solut d'a-chever de dĂźner tranquillement.

Le surlendemain, le substitut fut des-tituĂ© mais on eut l'obligeance auParquetde propager le bruit que c'Ă©tait parcequ'il avait refusĂ© de se prĂȘter Ă  Fexpalsiondes JĂ©suites.

–Je l'ai Ă©chappĂ© belle, se rĂ©pĂ©tait quel-

ques jours aprÚs La MariniÚre en appre-nant, par un petitbillet de Césanne que lemagistrat aprÚs avoir examiné l'objet, nes'était douté de rien.

Seulement, Césarine ajoutait: Jegardele pot de chambre en argent, je te re-tourne la piscine. Tu me devais un dé-dommagement de l'abandon dans lequel

M m'as laissée, il est juste que je soisrétribuée. Si cela te contrarie, adresse-moi

tes réclamationspar voie judiciaire »

–J'ai euaSaire a une friponne, pen-sait le substitut. J'ai encore de la chancede m'en tirer ainsi.

H reprit son courage et son bidet, etretourna chez la présidente. Là, il lui ex-pliqua de son mieux sa crainte d'une per-quisition dans ses appartements, ce qui leforçait à lui confier momentanément ledon précieux qu'il tenait d'elle.

Je suis di. di. digne de votrecon. con. confiance, acheva-t-ilen luibaisant les mains.

Le bidet n'était pas plûtot jeté parM* Brioux dans une armoire, que sonmari entra.

Vous ici? fit-il en tendant la main aLa MariniĂšre.

J'expliquais à notre cher substitut,dit précipitamment M" de Bazanville, quenotre loten des orphelins se tirera le huitde ce mois, et je lui demandais un con-cours qu'il m'accordait généreusement.

Oui, répondit La MariniÚre en selevant pour partir, rapporterai a madame,

monsieur le prĂ©. prĂ©. prĂ©sident, mapetite que. que.quĂȘte.

C'est entendu; au revoir! dit Briouxde Bazanvilleen le saluant d'ungeste pro-tecteur.

Votre cha. cha. charitĂ© m'Ă©meut,madame, acheva La MariniĂšre en saluant,la main sur son cƓur.

Et il sortit.Deux ou trois jours aprÚs ces événe-

ments, on tirait une autre loterie & unlouis le billet chez CĂ©sarine. Le chiffrede cette loterie s'Ă©levait Ă  prĂšs de Ăź.yoofrancs.

Le groslot,que l'on adjugea à dessein auprésident, parce qu'il s'était fendu d'aumoins trente billets, ce gros lot se trouvaitprécisément représenté par le vase noc-turne en argent repoussé, que La Mari-niÚre pensait reprendre un jour ou l'autre.

Mme Brioux de Bazanville ce soir-hvenait de se coucher, lorsque son mari

entra dans sa chambre. Or, il y avait"des années qu'il ne 8"y moR~ait:pas. A

sa trÚs grande surprise, elle ~e vit déposer

un objet assez lourd sur sa table de

nuit,-–O~est-ce? demanda la prĂ©sidente,

trÚs étonnée.Une surprise, ma louloute, répondit

le.gros homme en essayant de prendre unton aimable.

Une surprise. à moi?Tu verras ça demain quand il fera

jour, bobonne.Enfin, je veux savoir en quoi con-

siste votre cadeau.-–ümagine-toi que j'ai gagnĂ© le gros

lot a une loterie de bienfaisance.Vou!.?.. le gros lot! Comment

s'appelait cette loterie ?

Attends donc. C'Ă©tait une. loterie

pour le rachat des Ăąmes du Purgatoire.Ah Et chez qui se tirait-elle ?

Chez madame. madame IrĂšne deVa!pĂčis.

Je n'ai jamais entendu ce nom,feMMt~u~ la pfésK~ate d'une voix aigre-

douce. Mais, je vous remercie; demainje regarderai l'objet.

Le président qui s'attendait à des re-proches au sujet de sa prodigalité pour desloteries non paroissiales, sortit assez con-tent. M"~ de Bazanville n'eut rien de pluspressé a'ors que de chercher à se .rendre

compte de la nature du lot que son marilui apportait.

Elle frotta une allumette, alluma sabougie et poussa un cri rauque.

Elle venait de reconnaßtre le vase, lefameux vase donné par elle à La Mari-niÚre. Il y avait là quelque abominable

manƓuvre. Elle Ă©tait perdue. Son maridevait tout savoir, quoique, cependant,son allure n'eĂ»t marquĂ© aucun courroux,aucun semblant de vengeance. Oh! elleallait voir cela. Il lui fallait la vĂ©ritĂ©.

Dix minutes ne s'étaientpas écoulées

que le président de Bazanville entenditgratter à sa porte.

MonsieurBrionx monsieur Bdoux i

Qu'est-ce que vous me voulez? dit"il en grognant.

C'est moi. Joséphine, ne m'en-tends-tu pas, mon ami?a

Aptes? fit-il, distinguant la voix de

sa femme.Monsieur Brioux! !os!sta-t-eUe

d'une voix caressante, j'ai mon oreiller.Allez au diable avecvotreoreiller1.Vous ne voulez pas?..Non, je ne veux pas, cette nuit.Bonsoir, mon ami.BQnsoir, ma bobonae.

Et le magistrat se replongea dans sescouvertures.

Si elle croit, parce que je lui ai of-fert un prĂ©sent, que c'Ă©tait pour obtenirautre chose, elle se trompe, grommelait leloup-cervier. Est-elle assez embĂȘtante

avec son oreiller?Comment faire, saints du Paradis ?

songeait de son cĂŽtĂ© l'Ă©pouse repoussĂ©e icomment ce vase peut-il ĂȘtre en sonpouvoir? Qpe se passera-t-il demain

Suis-je oui ou non perdue? Ce scélérat deLa MariniÚreaurait-il donné à d'autres ceque j'ai eu la folie-de lui envoyer pour sonusage particulier? Qui m'éclairera? Com-ment m'y prendre ?a

Le déjeuner la trouva en face du pré-sident, qui crut la dérider en lui deman-dant

As-tu étrenné mon cadeau. José-phine?

En lançant cette question, il dt d'ungros rire, de ce rire qui lui parut drÎle

–épais,vulgaire, que connaissentlesgensde lettres qui passent en jugement Ă  laXXIe chambre.

Au fait, demanda rĂȘveusement M°"Briouxde Bazanville,pourquoi donc M. dela MariniĂšre a-t-il donnĂ© sa dĂ©mission?

On l'a forcé de prendre cette déter-mination.

Vraiment? artßcula-t-elle, jouant Fé-tonnement. Et, pourquoi a-t-on usé en-vers lui d'un semhlable rigueur?

Il a des mƓurs dĂ©plorables.

Lui? que j'ai vu si correct, si froid,si positif ?

Oui,ma chĂ«re lui-mĂȘme. Et, tiens,ajouta finement le fonctionnaire, vou-lant rendre sa femme aimable en ayantl'air de lui faire une confidence, je vais

te raconter une chose Ă©pouvantable delui.

Vous m'effrayez.Dame, il y a de quoi. Figure-toi

qu'il a donnĂ© Ă  une fille, –tum~entends ?Ă  une fille je t'offre en mille. Non, il

vaut mieux que je te le dise. Il lui adonnéun bidet d'au moins. dix-huit cents àdeux mille francs.

Est-ce possible ?

Les agents de police m'ont adressé

un fidĂšle rapport. Et, dans ce bidet,devine ce qu'il y avait?.. le portrait d'unefemme du monde, qui honorait ce mons-tre de ses faveurs!

Mais, comment le savez-vous?murmura la malheureuse en pĂąlissuM

atrocement.

Est-ce que nous ne savons pas tout?Il ne me manque qu'un renseignementje donnerais beaucoup pour l'avoir.

Qu'est-ce qui vous manque ?Le nom de la dame qui s'est laissée

peindre au fond de cette fameuse et iné-narrable cuvette émaillée, aprÚs y avoirtrempé ses. charmes postérieurs.

La présidente respira. Son mari coßfnaissait tort. excepté le fin mot.

J'ai pourtant usé de ruse, continuale président. J'ai menacé la donzelle à qui

ce drĂŽle avait offert le bidet de la flanquer

en prison elle ne consentait pas Ă  mefaire revoir le portrait en question ma~sces filles-lĂ , ma parole, ont des pointsd'honneur Ă©tonnants.

Eh bien continua la présidente, enessayant de manger.

Eh bien elle s'y est refusée, et jen'ai pas ose user de rigueur. Mais, je re-trouverai ce bidet, je te le le jure.

Le présider se leva de table, prit h

serviette oĂč il renfermait ses dossiers, etsortit.

A deux heures, M"~ Brioux de Bazan-ville entrait dans un des confessionnauxde l'Ă©glise de Passy; en quelquesminuteselle achevait sa confessionet implorait unconseil urgent.

Oui, mon pÚre. le hasard m'a re-mise en possession de l'objet fatal que jelui avais donné, et je ne sais commentm'en débarrasser. i.

De quelle nature est cet objet ?a

Oh! si c'est un objet suspect parlesintentions qu'ilreprésente.il est trÚsutile

en ce quiconcerne les servicesqu'ilrend.Je n'ose pourtant vous le nommer.

Quelle forme a-t-il ?

La forme d'une. guitare.Eh mais, dit le prĂȘtre, qui ne com-

prenait pas, je ne vois rien là qui soit mé-prisable cependant, j'ai beau chercherje ne découvreaucun objet. voluptueux,ressetnblant à celui dont vous me parlez.

Oh t mon pĂšre, s'il ressemble cet

instrument, il n'en a que l'apparence jedéfierais qu'on puisse jouer dessus un airqui onensùt l'oreille.

Mais, enfin, reprit le confesseur, enessayant une voix séyëre, cela rentredoncdans les choses indispensables d~un mo-bilier. profane ?

Hélas! tous les dons de l'amourdécernés aux hommes ne sont-ils pas cri-minels ?

De pareilles offrandes ne devraients'adresser qu'à Jésus et à la Vierge, Ma-dame la présidente. Et quelle en est lamatiÚre?

La porcelaine, le boule, l'émail.Cela me coûte deux mille francs.

Une derniĂšre fois, quel est le nomde cet objet. terrible ?

Eh bien, mon pĂšre, c'est. unepiscine.

Une piscine. c'est trĂšs simple. En

ce cas, faites-en hommage a une Ă©glisepour les fonts baptismaux.

Quoi, mon pĂšre~ĂŻe~ftttM~Bnoo~

en souriant, malgré la gravitéde l'endroit,vous voulez que.

Ce qui a Ă©tĂ© profanĂ© par l'amourterrestre soit purifiĂ© par l'amour divin,articula sentencieusement le prĂȘtre.

Mais, je vous avouerai.4Il le faut, ma fille; autrement, je

me verrai dans la pénible obligation de

vous refuser l'absolution.

Jésus, mon sauveur 1 que devien-drais-je ? s'écria la dévote en joignant lesmains et trÚs effrayée.

D'ailleurs, poursuivit l'abbé d'unton plus doux, il y a une Société pourl'entretien des églises pauvres; ainsi,

vous n'avez pas Ă  craindre que jamais on J

reconnaisse ici, a Pari: un meuble vousayant appartenu.

Enfin, mon pÚre, si vous le voulezabsolument, je vous obéirai.

Revenez dans quelques jours. DĂšs

que votre offrande sera accomplie, je vousdon9eM;y~sohHOB.

Et le prĂȘtre poussa le petit volet duconfessionnal.

La dévote présidente fut alors bien for-cée de, se retirer.

Elle passa dix jours en proie à decruelles perplexités, écrivant et recevantmaintes réponses de urés de campagne,qui luiparaissaientencore trop intelligentspour accepter, sans méfiance, le don dubidet, et lui assigner une place au trésord'une paroisse.

Enfin, un jour fortuné entre tous, elle

reçut la lettre suivante du Berry.M'ame la Présidente, moi Joseph

Bouton, maire de Sainte-Amarante, j'vous octroie les remerciements les plusefficaces pour l'of&e gracieuse qu\ousavé fai à la commune dont pour l'instantj'suis l'maire susnommé; et j'vous informe

que Fcuré attend avec impatience les ma*gnificences qu'v'otpiété a fait reluire pour

sa paroisse, Jeudi prochain, m'ame la pré'sidente, nous aurons 1' plaisir d* célébrer

une messe solennelle en introduisantvot

cuvette d'honneur dans les fonts baptis-

maux qui n'ont encore qu'une terrine enterre rouge pour le savonnage origineld'uos enfants, et j'espĂšre qu'vousvoudrĂ©ben assister Ă  c'te cĂ©rĂ©monie ousque nospaysans prieront pour la bienfaitriced'leuparoisse. Veuillez donc, m*ame la prĂ©si-dente, nous adresserla chose en questionet recevoir nos vƓux pour elle et pourvous qu'ĂȘtes assurĂ©ment confite en sain-tetĂ©. ?

~JOSEPH BOUTOM,

<t Caltivateur, maire de la communedeSainte-Amarante.»

En6n se dit M"" Brioux de Bazan-ville, le ciel a eu pitié de mes angoisses.

Et elle se précipita non pas à genoux,mais sur H~M~M~, quelle emportaafin d'y faire adapter une anse d'argentqui le transformùt en un récipient eaabénite.

En quarante-huit heures, les deux ob*

jets expĂ©diĂ©s grande vitesse arrivaient Ă l'Ă©glise provinciale oĂč on les dĂ©ballaitprĂ©cipitamment.

Ni le curé ni le maire ne connaissaientla forme d'aucun bidet, les paysannes quele curé avait mariées et extrémonciées nese servaient pas de ces sortes de choses;ils crurentbénévolement que telle était laforme des piscines baptismales actuelle-ment en vente chez les marchands pa-risiens.

–C'est Ă©tonnant, disait le curĂ©, le riteromain a tout transtorme, jusqu'aux objetsdu culte. Voyez donc ce vase merveil-leux, c'est vraiment dommage d'y dĂ©bar-bouiller la tĂȘte de nos mioches du pĂ©chĂ©originel.

–Bah! rĂ©pondait le maire tout enor-gueilli, nous valons ben les biaux mes-sieurs qui s'en servent dans leux capitales,

et nos pompiers n' rénéchiront pas sul'ordonnance d* la messe c' jour-là.

Pendant que les paysans se réjouissaientde la cérémonie rcli~e~e fallait iUuSf

trer la paroisse, Mme la présidente se déci-dait à une demi-confidence envers le trÚsillustre cocu Brioux de Bazanville.

Mon ami, lui annonça-t-elle, sachez

que j'ai reçu un aveu de M. de La Mari-niÚre concernant la récente aventure quilui serait survenue avec une femme dumonde.

En vérité 1 s'exclama le présidentstupéfait, il vous a confié-le nom de la

personne qui lui a offert comme preuved'amour un.. bidet ?

Il me l'a confié, dit-elle avec em-phase, sachant partaitemcnt que je lui gar-derais le secret, et encore il m'a chargéde le débarrasser du cadeau en ques-tion.

Et comment vousy ĂȘtes vous prise ?insista le prĂ©sident qui n'Ă©tait pas Ă©loignĂ©de trouver du gĂ©nie Ă  sa femme.

Par le conseil de l'abbé Planel, monconfesseur, j'ai offert le bidet en questionà une pauvre paroisse du Berry qui chan-

gera la nature de l'objet et l'installera Ă  la

porte de son Ă©glise comme une piscine

pour les fonts baptismaux.Ah ça, vous voulez m'en imposer ?Nullement; j'ai, de plus, joint le

vase que vous avez gagné à cette. loteriede bienfaisance j'y ai fait mettre uneanse, et il servira à la grand'messe pourles aspersions.

Brioux de: Bazanville regarda sa femmeĂ  deux fois. Il se demanda si elle le nar-guait, si elle devenait folle.

Voulez-vous, lui demanda-t-elle,assister l'inauguration que l'on prépare

pour le bidet de La MariniĂšre dans l'Ă©glisede Sainte-Amarante?s'

Et elle lui montra la lettre du maire..11 n'y avait aucun moyen de douter,

c'était réel, c'était sérieux. Elle n'attendaitque son adhésion, et il dut répondre qu'ill'accompagnerait, non sans une secrÚteangoisse.

Quelle complicité songeait-il avecaccablement si on vient à découvrir que

j'ai été pour quelque chose dans un

pareil événement, je suisbafoué au Palais.En proie à de sombres pensées, il

partit avec sa femme le mercredi et lejeudi matin on recevait solennellement lecouple présidentiel, qu'os escortait ban-niÚres au vent et au son bruyant destrombones jusqu'au banc-d'oeuvre.

Or, au moment oĂč le prĂȘtre prononçales paroles de purification a Aspergesme a, il eut soin de tremper assez large-

ment son goupillon dans le fameux vasede nuit et de gratifier d'abord d'~ne co-pieuse immersion la face de sanglier dugrosBriouxdeBazanville.

Celui-ci garda la meilleure contenancepossible et se signa dĂ©votement, n'osants'essuyer le visage dans la peur de com-mettre une irrĂ©vĂ©rence, se rappelant sou-dain que sa digne femme s'Ă©tait peut-ĂȘtreservie du vase nocturne.

A l'évangile, le curé monta en chaire,et, dans un prÎne bien senti, racontal'histoire de sainte Amarante. Par une

allusion délicate, il eompapascs'~rtas.à

celles de M* de Bazanville. D parla deslargesses de ce couple judiciaire, qui pre-nait la défense du pauvre et consolaitl'orphelin. Il analysa la délicatesse detravail de la piscine sacrée.

–a Allez tous, s'Ă©cria-t-ildans un accĂšsde lyrisme, allez tous, mes frĂšres, vousretremperpar vos priĂšres Ă  cette sourceauguste; qu'elle rappelle Ă  vos souvenirsla fontaine de SiloĂ©, qui faisait marcherles paralytiques quand leurs membres yavaient trempĂ© un seul instant. Maisl'Ă©vangile nous assure qu'un ange en re-muait l'eau pour qu'elle devint efficace

sur les lépreux; cet ange aura eu pourvous un précurseur Madame Brioux deBazanville escortée de son respecta-blé époux, qui nous honore de sa pré-sence. »

L'assistance entiĂšre parut enthousias-mĂ©e et jeta un coup d'Ɠil admiratit ducĂŽtĂ© de l'augusteprĂ©sident.

« Oui, mes frÚres, poursuivit l'ora-teur, trop Mea hneé~ pÎur~à~~tef,~ nos

nouveaux fonts baptismaux ont la formed'une guitare,vous l'avez remarqué, n'est-ce ~pas ? C'est pour vous faire songer que

tous, devant le Seigneur, vous devezvibrer d'amour comme des lyres vi-

vantes.

« De plus, vous verrez pe~te dans la

cuvette la figure divine de sainte Amarante,

patronne de cette église; c'est une déli-cate attention de M. le. président, quenous ne saurions trop remercier ni tropbénir. Allons donc processionnellëmentaux~bntsbaptismaux et renouvelons dans

nos coeĂčrs les vƓux qu'un parrain et unemarraine catholiques ont profĂ©rĂ©e pournous le jour oĂč nous avons Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©sdu pĂ©chĂ© originel. Ainsi soit-il. »

Le curé descendit de chaire l'orgue

entonna le cantique

QjnĂąnt l'eau ~aĂŻnte du baptĂȘmeCoul~ sur nos fronts naissaMts.

t: "~<M. Br;o~de.Bazanyi!yecu~4mcierge

'? apporta des nouvt~u'x.'n~s et on tour sdminisu'~ le bdpK;m< dans le ~~Me0'

en quostton. (Pa~etOt)

et se vit contraint de marcher Ă  la tĂȘte desndĂȘles jusqu'Ă  cet endroit de-l'Ă©glise oĂč.dans une chapelle des bas cĂŽtĂ©s, se trou-vait~acĂ© le bidet de sa iemme, devant

~equeÏH~e pos~ sans distinguer en aa-sainte Amarante,4*'e$U) qoeÏe prĂȘ-:lt ~~Bd~~B~.al~~~a~s "<o~e~.adĂŻmt~~4~d~HĂ«~.~M~ ~n~M~

~~Ke. ~r~s~sse s'approchad'~$&

~ourse velours oĂč' ~it~i~'ndre d'une vingtaine-i~c~~mi~isait encorepayera ~'j~~s.

~6n, la cérémonie term~ée, p~is~tr~re avec. sa &:mm~-aux'i'

'les ..attendaient. Il reprit ïe '1M~'en~rommelant et' atriva. ~s~L~Ë~

i6 Ïendewain pour condamner un Qa

Pourvu que cela ne se sache pas

repétait-il fou de terreur.La chose transpira, cependant, car

BazanvUte dut réclamer l'appui d'un de

ses accolytes du tiers-ordre, Francis Tei-'gnard, rédacteur en chef du journal le~f~; Teignard, qu'il avait sauvé deplusieurs embarras judiciaires, lui renditle service de calomnier quelques libres-

penseurs, dont les révélations pouvaientnuire à Brioux. Du reste, le taux de la

conscience de Francis Teignard, montanten raison de rénormitéde calomniesqu'iléditait, le journal encaissa de grossessommes.

La MariniÚre tenta de se justifier au-prÚs de la présidente mais elle ne voulutrien entendre, ef, par une exquise atten-tion, durant une semaine elle ne manquaMs d'offrir à son mari les dragées de bap-'~me qui lui étaient expédiées de Sainte-Amarante. Toutefois, le président n'é-chappa pas au ridicule, car l'un des jour"aaux les plus francs de collier dans l'em-

t ,t~_u)ti~-)–frm-Tr-rrn))– 1" _-i. ~TU~ iJ~-irrmj–L.

plot des termes, n'a pas cramt, par ror-gane de son rédacteur en chef, de dési-

gner les deux héros principauxde l'histoire

sous cette mbnquc JL~ c~aF~

CHASTE ET PURE

BUT-ETRE 'e, vous jusqu'Ă  cejour que, dans uu hĂŽtel du quar-defde la Madeleine, oĂčdescen-

dent les dĂ©putas rouges un certainM. BrumĂšre, trop inconnu pour ĂȘtre re-doutĂ© de ses collĂšgues, a Ă©tabli son quar-tier gĂ©nĂ©ral ? Comme il porte le moinsmal possible le bois de ceri traditionneldont il s'est vu gratifier par sa moitiĂ© il ya quelques annĂ©es, dans le midi, il prĂȘtrese loger lĂ  oĂč son infortune est connue,afin d'Ă©viter de nouvelles enquĂȘtes. Cebrave cocu combat le divorce, s'il vous

plaßt, une petite façon de donner le change.à ceux qui but appris son aventure etde faire dire Tiens, ce n'est donc pasce que l'on croyait!1

Voulant se ménager les bonnes grùcesde la maßtresse de l'hÎtel, il lui a, donné lapermission de se servir de sa chambrequand il n'est pas à Paris.

Quoique je l'aie à l'année, lui dé-clara-t-il une bonne fois, faites-y coucherqui vous voudrez en mon absence, cesera toujours autant de gagné pour vous.

Monsieur le député nous comble 1

rĂ©pliqua la maĂźtresse de l'hĂŽtel en posantla main sur son cƓur. Du reste, c'estl'habitude de Monsieur le dĂ©putĂ© de semontrergalant pour les dames.

Sans distinctionde sexe, répliqua enriant M. Bruinera.

Sans distinction de sexe?i répétal'hÎtesse. H y a donc différents sexes chezles femmes?

Oui. Ïiy a Ïes femmes qui travaillent

et ceHes qui ne travaillent pas. a'@s~e

.rrrw~u.nrmpas, docteur ? ajouta le député en se re-tournant du cÎté d'un nouveau venu,M. Sonor, médecin militaire, arrrivé de-puis peu du camp de Chalons.

MaĂŻs je loge des femmes qui tra-vaillent,mtetfOmpit h maĂźtresse de l'Ă©ta-blissement. Je loge M" de Monroy, uneartiste peiotfe.

Est-il possible t s'éctia ië docteurSonoft vous logez cette espÚce?a

Ç~St uae &mmetrùs honorable.Quand on illustre, comme elle 1'~

fait, d'utl~Myon infĂąme, les 60~ ~0~-~w~de SaĂźzac, on n'est pas honorable.

–Est-ce que vous acheter ses ouvra*ges? demanda la dame interdite. v

Oui, Madame, je les achÚte pourvoir jusqu'au peut aller la démoralisationd'une femme.

Demain je donnerai ~congĂ© aMme Stephen de Monroy, s'Ă©cria M~Agreste trĂšs impressionnĂ©e. Une aqua-fortiste, en elfet, ne peut pas ĂȘtre unehonnĂȘte &mate.

Oh mon Dieu, 6t M; BrumĂšrc~~

est possible, aprĂšs tout, qu'on putssc ĂȘtreaqua-fortisteet honnĂȘte.

Pas quand on &it courir sa pou&e àtravers les CcM~ ~Aï~~ de Balzac,interrompitle médednSonof.

En tous cas, Madauûe, confirma ßedéputé, ne criez pas trop haut que vous laconnaissez; 'si votre 6!le la &equentC).qu'elle s'en cache le mieux qu'e!le pourra;en un mot, sauvez tes apparencesausujet de cette liaison et gardez la fannUe

de Monroy si ce sont de bons locataires.La malheureusehĂŽtesse restaspngeuse;

elle ne voulait pas déplaire au député niau médecin militaire, et de vives anxiétésFétreignirent. `

Le député partit trois jours aprÚs en

vacances pour la Dordogne, et le mĂ©decins'absen,taterhĂŽtelpresqueen mĂȘme temps.AprĂšs longues rĂ©nexions, Mme Agreste sedĂ©cida & ne prendrede rĂ©solution,enversles Monroy qu'a laSn du tnoi~

Le jeudi de la semaine suivante, oo

jeune employé du Printemps vint deman-der, un lit. Comme on ne possédait delibre pour l'instantque celui du député, onusa de la permission donnée et on l'ins-talla dans cette chambre dont il laissait laclef chaque matin dans la case en se ren-dant à son magasin.

Or, par hasard, trois semaines aprĂšs,M""BnunĂ©re arriva de Bergerac,prĂ©cĂ©dantM.BrmnĂ©rede vingt-quatreheures. Il Ă©taittroisheuresenviron.M°"Agrestela condui-sit en grande cĂ©rĂ©monie dans la chambrede son mari, fit naturellementenlever le~draps du lit oĂč le commis avait pris sesĂ©bats, et donnaFordre au garçon, lorsquel'employĂ© reviendrait vers une heure dumatin, de lui indiquer une autre chambre

pour coucher.J'attends monsieur d'un instant a

l'autre, dit M"~ BrumĂšre a la directrice del'hĂŽtel. cela m'Ă©tonnerait qu'il arrivĂątcette nuit, mais enfin il n'y aurait riend'impossible.

M°~ Agrestese trouvaitdonc prévenue.

Il est bon de rapporter ici un fait aussi

rare qu'important c'estque le gendre de

<'ette mĂ©gĂšre de maĂźtressed'hĂŽtel ne d~-~tandait qu'une chose se rapprocher desa jeune femme; que sa beite-'mĂšre lu!avait enlevĂ©e, et dont elle circonvenaitl'esprit en l'amenantpeu Ă  peu Ă  croire queson mari ne t'aimait pas, au point deravoir contrainte Ă  quitter le domicileconjugal, et a la suivre dans cette mai-son meublĂ©e oĂč Ïa pauvrette se voyait te-

nue prisonniĂšre chez une mĂšre acariĂątre.BonnĂš et gracieuse, autant que M""

Agreste se montraitsëche,méchantcet {a-

louse de toute notoriĂ©tĂ©, de toute supĂ©rio-ritĂ©, M"~ Dunoyer subissait cette terribletyrannie. Mais ses heures les meilleuresn'en restaient pas moins celles oĂč ellepouvaitrĂȘverĂ son mari. et & une futurerĂ©conciliation.

De son cÎté, M. Dunoyer qui savait

que sa &mme n'Ă©tait coupable que de~ai'-Messe, cherchait par tousiesmoyens~p~n~trer jusque eUe. H Ă©tait convaincuque

s'il arrivait lui parler, il ~arracherait a

ce joug détesté. Jeune et intelligent, ilvoulut essayer de la persuasion avant queleur séparation devint définitive. Il prit leparti décisif d'entrer dans l'hÎtel furtive-

ment.Ce jour donc oĂč Mme BrumĂšre reposait

vertueusementdans le lit de son Ă©poux, le

garçon de l'hĂŽtel, accablĂ© de fatigue, s'en-dormitvers dix heures. Le commis duPrintemps arriva en chancelant, un peugris, ne trouva ni sa clef, ni son chande-lier, et monta quand mĂȘme Ă  la chambrequ'il avait l'habitude d'occuper.

C'est toi? fit une voix endormie,partie de l'alcĂŽve.

-Tiens, Phémie est venue coucher

avec moi, se dit le commis un peuaviné.

Et tout haut:-~Hein!r tum~attendais avec impa-

tience, ma biche ?.Certainementque ~e t'attendais, re-

pĂ©ta la mĂȘme voix endormie, mais pas si

tĂŽt cependant. Tu dois ĂȘtre pampresque en mĂȘme temps que moi. car t'Ă©taisiciĂ sixheures.

Peste! tu es restĂ©e longtemps.seulealorsAh ça, oĂč diable sont cachĂ©esles allumettes?.

Le commis, dont la tĂȘte s'alourdissaijt

encore dans l'obscurité,se dirigeaatùtt as

vers la cheminĂ©e oĂč il ne rencontra Jta

trace d'aucun bougeoir. Pendant cetemps Mme Brumcrecontinuaitson somme

interrompu.-Faut. que tu aies joliment sommeil

pour ne pas m'aider A trouver le moindreluminaire. Bah qu'est-ce que ça fait? Jen'en ai pas besoin. Je me coucherai sanscela.Et, tant bien que mal, il se désha-

oiUa.

Au mĂȘme instant plusieurs coups de

sonnette retentĂźrent en bas, Ă  Ïa ported'entrĂ©e. Deux voyageurs se prĂ©sentateuret le gardon, comp~t€meNtre~~Ă©,ce~Ms, s~em~ressait de se Ïeverpour caset ies

Nouveaux venus un certain voyageur envinsetM.Brumëre.

–N est inutile de rĂ©veiller ma femme,fit le dĂ©putĂ©. Donnez-moin'importe quellechambrepour cette nuit. Demain vous lui

annoncerez mon arrivée.Soit, Monsieur, montez au n" 8, le

fit estprĂȘt.M.IBrumĂšremonta et entra au n" 8.–Vous, Monsieur, continua le gar-

çon, s'adressant au soi-disant voyageurenvinsse vais vousdisposerun matelas dansla s~tle Ă  manger. Nous n'avons plus deplace..Àmoins que je ne rĂ©veilleM~ Du~noyer pourvous donnersa chambrĂ©.

Madame loge donc au rez-de-chaus-sée ?

–Oai, Monsieur: là, laporte à droite.Si vous voulez attendre, levais.

Non, non, je ne supporterai pasqu'on ladérange. Mettez-moidans la salleà manger demain, nous verrons.

Pendant que le susdit commis-voya-geur prenait possession de la salle à man°

~cr, M. BrumÚre se déshabiHait, soudait

s:i bougie sur la cheminĂ©e et entrait dai~son Ïït. Un'petitcri Ă©touc~rĂ©pondit Ă  soninsinuation entre les draps.Une petite, trĂšspetite personne, jouait i'Ă©tonnement, -la

frayeur et. l'amabi!itc.Comment se fait-i!?. Mon Dieu,

Madame, pardonnez-moi, je.Un Ă©clat de rire lui coupa la parole

Gros bĂȘta, va! Est-ce que j'aipeur d'un homme?a `'

Mais, Madame. Mademoiselle.Ah! vous ĂȘtes. trĂšs. gentille. Je vousremercie de votre bon aceuei!

Tu n'as pas froid aux pieds.j..Ernest?a

Oh non Mon Dieu, pensa Jedéputé, ma temme qui est & rét~ge supé-rieur, si elle venait a savoir!Made-moiseïte, je crois inutile d'ins~stef. sur.mon indiscrétion.~ép!oraMe~

A!!o~ Gustave, ~on~ )[non

con, du momentqu~ tu es e!Mfé d~ ~pn!avpite ajo ven~ j'tmagt~~~~va;s

ce que tu demandais. C'est la. patronnequi t'a envoyé?s~

Oh pouvez-vous penser? une pef<sonne aussi chaste, aussi pure!

Écoute, Anatole, si ça ne nmt pas,~e me lùve et je te flanque dehors.

Au nom du ciel, ne criez pas, Made-moiselle ma ~cmme n'est pas loin.ĂšlleesUci. =

–-Ta femme est ici, et tu es entrĂ©chez moi~ Voyons, Arthur, ça n'est passĂ©rieux.,a~s si', mais si. Tenez, je vaisvp~,facpnter~.~u~ue~ me fĂ©cule, Georges,~~i~scrppcha~d??: 'Mais non, )e n'ai ~as ch~ ~g-suismĂȘme transi. car, songea ~nc~ s~~n pĂ©aĂ©~aKdans c~e chambra! t y

u~j~~Bh~Ă«St-cc'que'~~'y~s ''pa&'

~ĂŻ~Ă©! ~Ës~ q~c~Ăą~r a~~b~s'~@lq~M~~~ai4~i~~M~m~t~Ëe~~

l'autred'avant-Mer. Dans tons les cas, tudois ĂȘtre Emile, moins que tu ne rap-pelles Paul.

Bon Dieu, que m'apprenez-vous lĂ ?

une maisonsi chaste, si pure

Ah ça, mais tout le monde est doncchaste et pur ici ? la maßtresse, la de-meure,.la cuisine, la chatte. Et la nour-riture Fest-elle. dis, la nourriture?. etles draps ? et le reste ?.

Le malheureux députe étourdi, ahuri,ne savait quelle contenance adopter.Heureusement ,que ,cette contenance s'im-posa à lui trÚs naturellement, au bout dequelquesminutes, et il eûtété fort a plaindre siM"* Laure, ainsi que se nommait

son aimable camarade de lit, s'Ă©tait, Ă  sontour, pus en tĂȘte de ne pas savoir cequ'ilvoulait.Pendant que cet incident se passait au

a" 8, le n" 1$, séjourde la digne épouse du

non moins digne M. Brumérc, était lethéùtred'~tnescÚne a peu prÚs iden~qa~daa~ un Qfdre renversé. Le epmm~s d~

1e

'.<.

En toucha au p.Ucr du u' 8, ~M~te mĂŽme costume que 'u'- <&&"

Ê%n

Pf~~M~ se couchait en6n aux cÎt~ dela femme du député et lui tùtait les tc~ns

avec un sans façon remarquable.J'ai sommeil, murmura-t-eûe.tt <?

dormant a moitié, laisse-moi.Pourquoi es-tu couchée ici, aïofs~

demunda-t-H trĂšs bas.On peut se rendre compte de cecĂŻ @'eM

que la voix de l'employé arrivant aiïaïMie à

l'oreille de M~ BrumÚre, moitié endor-mie, la confusion devenait par~ite~nentpossible le son connude leur voix ne pou-vait les avertir de leur commune méprise;etße. jeu du personnage inattendu rap-pelait sans doute, à faire illusion, celui del'épouxabsent, puisque sa vertueuse com*

pagne laissait le nouveau venu complĂšte-

ment libre. A un certain moment il finitmĂȘme par la rĂ©veiller assez pour qu'ellesouhaitĂąt ennn, ~elle-mĂȘme, ce qu'elleavait repoussĂ© dĂšs l'abord. EIIe~ou]Fa~~ondĂ©meMce baiser, qui lui. e&rappelait

as Ăątt&c~datant de sei~e ans eĂŻt priĂšre, ettieh moins que con~ugĂ ĂŻt CĂŽmm~ elle se

retournait du cÎté du mur, il lui de-manda, toujours a l'oreille

On .n'a donc pas élevé de difficultés

pour te donner la clef de ma chambre?Il n'aurait plus manqué que ça

Mais,mon chien, tu sais, c'était ris-qué de monter chez moi comme tu y esvenue!

Risqué 1 il me semble que c'estmon droit. On n'a pas douté de ma pa-role d'abord, et je suppose que je porteCe que je suis sur ma physionomie.

–j'te crois. C'est puur cela que.Ëmm, tu comprends, ma biche, faudrait

pas que case renouvelle. C'est une mai-son honnĂȘte ici. c'est des clĂ©ricaux.

Cette fois, Mme Brumere furieuse seretourna vivement en se mordant leslĂšvres.

–Tu comprends, ma 6~e, que cen'est pas pour te reprocher.

Oui, oui, n'as pas oublie ïe.passé. a

Eh t Je mei. pas mal de Ă«eux

qui m'ont précédé. Quand ily en aurai.

eu dix, quand il y en aurait eu trente, tuconçois. peu m'importe.

Tu sais bien dit-elle bas a sonoreille, tu sais bien qu'il n'y en a jamais

eu qu'un. dans une circonstance uni-que, une circonstance oĂč j'avais perdu latĂȘte. oĂč j'Ă©tais folle?

–Es-tu bĂȘte! es-tu bĂȘte! Qui est-cequi t'adresse des reproches ?

Mais pourquoi as-tu l'air de croire

que cela s'est présente. plusieurs fois?.Dame, écoute, bichette je te rap-

pellerai que tu me l'as avouĂ© en m'assĂ»-rant mĂȘme que jusqu'Ă  prĂ©sent je valaismieux qu'eux tous.

Ciel! s'écria M" Brumére quasi af-folée. je cessais pas ce que j'ai. je nereconnais pas ta voix. j'ai peur.

'–Allons, bon! pensa l'employĂ©, j'aiĂ©tĂ© trop loin, je l'ai houspillĂ©e, la voilĂ qui va avoir une attaque de nerfs. Al-lons, PhĂ©mie, poursuivit-il~ voix h ~te,aUons, embrassevite~tonpetttZidore.

Cette fois Mme BrumĂšre poussa un crienrayant:

1–Grand Dieu ce n'est pas mon man 1

Au secours Ă  moiEt elle retomba pĂąmĂ©e. MĂȘme sur l'o-

reiller, pendant que le commis du PnM-~M~, non moins enrayĂ©, sauçait a toutevitessehccs <ht !i~ et sans mĂȘme revĂȘtirun pantahM, dĂ©gringolait l'escalier.

En toucnant au palier du n° 8, il se

trouva face Ă  &ce~ ĂŻ~cc M. BrumĂ«rc dansle mĂȘme costume que lui.

Monsieur,' fit le député, n'auriez-'

yous pas entendu un cri ?

Si, Monsieur, j'ai bien entendu uncri. c'est pourcela que je descends.

Et moi. Monsieur, c'est pour cela

que je.montais. Venez avec moi, je vousjure que c'est en haut qu'on a crié.

Je vous affirme, au contraire, Mon<sieur, que. c'est en bas.

Voyons. sapristi, il me semble

que deux hommescommenous ne fuirontpas devant un danger ?

Eh mon Dieu, }e ne fuis pas~ puis

que je courais au secours de !a victime.–Dans mon emprĂ«ssonent, poursui-

vit M. BrumĂšre, je n~a! pa&.mĂȘme pris letemps de revĂȘttf un pantalon `

Ni moi un caleçon.:Je vam~as expliquer mon inquié-

tude, commença le députe en s'accou-dant à la rampe son bougeoir à la main.C'est que ma femme est arrivée d'hier,

me prĂ©cĂ©dant seulement de, quelquesheures moi, jĂȘ ne suis arrivĂ© que cettenutt et n'ai pas voulu 1~ rĂ©veiller. j'aidemandĂ© qu'on me mit n'importe oĂč.lorsqu'il y a un instant. -"vous ledirai-je ? Vous n'ĂȘtes pas mariĂ©. Mon-sieur ?. `

Non, ~onsieur~ Dieu merci, fit !ecommis défaillant, et prÚnant le parti de

se cramponner Ă  son tour Ă  l'escalier.Alors~ Monsieur~ yous ne pouvez

comprendre. ce cri m'a Ă©mu, au pointque ('ai cru reconnaĂźtre la voix d& matemme. '1j

Et quelle chambre occupe Ma-dame ?

La chambre n" ĂŻ$.Bigre, pensa le commis, je suis

propre; c'est te mari Et mes affaires quisont lĂ -haut! Ecoutez, Monsieur, pour-suivit-il avec une effusion Ă©tonnante, ceque nous avons de mieux Ă  faire, je crois,c'est de regagner nos domiciles respectifs.

Oh pas avant que je me sois as-sure que ce cri ne partait pas de la cham-bre de ma femme.

–Flair de mari trompĂ©, songea lejeune homme. On a beau dire, il y a unedestinĂ©e.

Tenez, Monsieur, reprit le commu-nicatif député. tenez, je n'ai pas l'avan-tage de vous connaßtre. mais puisque lehasard nous met. nous conduit en facel'un de l'autre. sous l'empire d'un com-mun sentiment de courage car enfin,c'est pour courir au secoursd'une victime

que nous nous sommes arrachés tousdcux aux douceurs de la nuit.

–Oui. oui. Monsieur, c'est pourune victime que. nous avons criĂ©,c'est-Ă -dire, non, c'est la victime qui

nous a appelés.Eh bien, Monsieur, je vous prie de

me permettre de vous la serrer cordiale

ment.Et M. BrumĂšre, tenant son bougeoit̀

d'une main, présentait l'autre au commis,pendant que le jeune Isidore qui n'avaitpasde bougeoir et qui serrait le pluspos-sible son pan de chemise de devant etcelui de derriÚre en tùchant de les rappro-cher, était obligé d'abandonnersa'doublebanniÚre à la main gauche afin de répon-dre la politesse de son interlocuteur enlui offrant la droite.

Je me nomme BrumÚre, député deTarn-et-Garonne. Je parlerai demain'contre le divorce. Venez donc m'enten-dre je serai charmé d'avoir un auditeur

comme vous.Monsieur,croyez quede moncĂŽte.

Ah! vous parlerez contre le divorce ?

–Oui, Monsieur, et je me flatte quej'Ă©tonneraibien des gens.

Oh!1 je vou~ en réponds, affirma lecommisen passant devant lui, cette fois,

sans cérémonie. Je vous en réponds 1 En

ce cas, cher Monsieur, a un de ces jours,n'est-ce pas? Je vais rĂ©veiller le garçonpour lui commander de me servir mondĂ©jeuner avaat huit heures. A l'avantagede vous revoir.Et Isidore descendit, la tĂȘte absolument

chavirĂ©e,et alla s'enfermerdansun certainendroitdu premierĂ©tageoĂč il severrouilla:?,11 s'assit. sur. le siĂšge. prĂȘt Ă  rĂ©-pondre ainsi a la moindre Ă©ventualitĂ© quipourrait se manifester dans sa personne.

A ce mĂȘme instant, au numĂ©ro 15,l'Ă©pouse BrumĂšre se voyait affectueuse-

ment secourue par son Ă©poux qui ne re-marqua pas la prĂ©sence des vĂȘtementsmasculins Ă©pars dans la piĂšce, et s'Ă©criait,dans un transport:

Quand~ je disais tout a l'heure quec'Ă©tait toi! Ah Fon a beau se moquer

de l'instinct, je savais Mon que ta voixm'avait appelé dans mon sommeil. ïma-gine-toi que je suis ta depuis un quartd'heure, causantavecun jeune homme quivoulait me soutenir que les cris partaientd'en bas. Mais, moi, certainde mon fait,je te l'ai rabroué d'une belle façon. Im-bécile, va 1

Deux heures restaient avant le lever dujour, et pendant que M. BrumÚre se 'cou-lait dans les draps conjugaux, qu'Isidoreattendait philosophiquement l'ins~mt desortirde sa prison, un autre personnage.muni d'unpasse-partoutouvrait une porterdu rez-de-chaussée. C'était le commis-

voyageur en vins qui,on l'a dé~ supposé,

ne cachait d'autre individualité que cellede M. Dunoyer, cherchant à s'introduirechez sa femme.

Il marcha a petits pas jusqu'au -lit.tata le corps étendu/évitade toucherngurc,et~un peu tremblant, entra sans s~déshabillef prÚs de celle dont M se savaitaimé. Aucun mouvesa~n~as hi~diQ~~

JOYEUSES KOUVEU.E5r-qu'elle l'avait sentie il se décida à l'en-tourer de ses bras, Un grognementrépon-dit à son étreinte.

Co~mme 'ma femme est changée sedit-il. Autrefois elle m'aurait reçu avecempressement. On voit qu'ellea l'habi-tude de toucher seule maintenant.

Etvoulant lui causer une doucesurprise,H!a souleva.

'–Diable, qu'elle est lourde remar*qua-t-il.

C couh sa bouche a $on oreille.–yoyo~, ttl m'asreeppnu, tu sais

qoec~estoM~ putsque~e t'ai avertie avant-hier qu'aujourd'huitu me recevrais.

Un nouveau grognement lui prouvaqu'on l'entendait..

EUe ne veut pas se compromettre,rénécMt-il. Bah nous nous expliquerons

au )our et~ d~aiHeurs, la meilleure expli-cation est celle que je lui appotte.

Et sans y m~tre pjtus de cérémonie, ils'empara résolument de celle qu'il venaitréclamerau nomd~~sdroitsnpnrépudiés.

Mais, a sa vive surprise, Ă  sa terreurmĂȘme, une voix dont l'accent le renversasoudain lui cria:

Va-t'en dans' ,ton litva-~en, en-tends-tu ?

Le malheureux poussa un cri eNrayant

il venait de reconnaßtre la voix de sabelle-mëre!1

Ouvrir la porte de la chambre et cellede la rue ne fut pour lui que l'affaire d'unedemi-seconde.

Mme Agreste n'avait pas eu le tempsde prendre une autre position, et des'allonger de son mieux, qu'il atteignaitdéjà réglisc de la Madeleine en proie à

une espÚce de démence dans laquelle su-naient a son oreille les derniers mots dela mÚre de sa' femme, croyant s'adresserà M. Agreste:

–Va-t'en dans ton lit! va-t'en, en-tends-tu ?

Le jour qui suivit cette nuit mémorableMme BrumÚre, qui s'était levée dÚs l'aube

pour faire disparaĂźtre les vĂȘtements acsu"

satcurs et les donner au garçon de l'hÎte!,Mme BrumÚre, disons-nous, recevait lestendres soins de son mari. Assise a table &

cote de M* Agreste et de sa fille, du doc-teur 5onbr et d'autres locataires de rhĂŽ-tel, elle entamait une conversation sur la&mille, Ă  laquelle la voix de M"~ AgrestemĂȘlait sa note approbative

<– A bas lesartistes Vivent les hon-nĂȘtes gens! beugla le sieur Sonor, vou-lant parler des Monroy et en Ă©levant sonverre a la.hauteur d'un principe. Si vousm'en croyez. Madame, vous cesserez delogercette engeance.

Ils paient bien, cependant, observatimidement la jeune M"" Dunoyer.

Ça gagne donc quelque chose? de-manda le dĂ©putĂ© surpris.

–Je ne sais pas si ça gagne, mais çapaie largement.

0Si vous n'y prenez garde, dit tout

bas le sieur Sonor a la maltresse dePhÎtcl, votre nlle sera bientÎt gangrenée

au contact de cette racaille.

Soyez tranqmûe, je ne la per~s pas

devuéunmstànt. r

-j~bots Ma vertu! s~écot~ le députéetis*inclinant du cÎté de §a &mtne~~ar

.une DĂ©licate ĂąaKede.par

Et comme il vouĂźatt eu" mĂȘme temp!.complaire & Agreste, il entonna d*QB's.

voix ayant le charme d'un son de casse-role, comme s'il eût apostrophé les mursde la salle a manger

° ° Salut, demeure chaste et pure 1

L'EXPULSÉ

DE LA RUE DES POSTES

u~ mossieu le capucin, ce Ă©tait

moa qui remplaçait médemequand medÚmeU était au village;

et je pense pas que mossieu le capucin iltrouvera mauvaise que je rende mes soinsĂ  Jouit.. Y a-t-il longtemps que mossieuil connaĂźtmedeme ?s~

Parbleu! s'Ă©cria le no.uveau venus'oubliant, ~t'ai connue ~TrouviUcquandeueprenaM ses Ă©~a~ dans l'onde, je l'aiHtteraleMeĂŻitcuei~e sein d'Anuphi-trite.

Au sda d'AĂŻ~M-~

–Trite.Aoh 1 je comprends percement.

MĂ©dĂ©me tĂ©tait Amphitrite.–Comment elle tĂ©tait Amphitrite ?-Mais, puisque mossieu le rĂ©vĂ©rend

il prĂ©tendait avoir cueilli mĂ©deme au seind'une nommĂ©e Amphitrite, c*e3t doncqu'il a vu mĂ©deme quand elle Ă©tait unebaby encore en nourrice; je entendaisle français, peut ĂȘtre i

Oh supérieurement.Alors, je 'importiounais pas mos-

sieu ?Comment donc, madame!1 mais

charmé, au contraire.Moa, pas médeme encore, mossieu

le capucin. moa, demoiseUe -moa, pasconnaßtre ce saleté que vo appelez conçu.conçu.

oConcupiscence,nuss Jackson.con-

cupiscence,si vous permettez –ah vousn'ĂȘtes pas encore. C'est-dire vous neconnaM~ez pas. –'la peste soit de la

vt~m~oMe. Excu&ez un pauvre capu-

cin qui ne sait rien de la vie, trĂšs excel-lente, miss Jackson.

Oh je excusais tojours quand onétait poli avec moa. Je étais pleine d'in-dioulgënce. je demandaisqu'amstr~u~emoa des vérités de le sdïa~ feïtguM.

Oh yes AUons bon, voila que )epa~e comme elle.–Tleas,vouscherchez

comme ça avous instruite.~àconnaßt.ce qui se passe?..

–Oh! ce est le pieu fetvcnt dĂ©sit

que je noufdssais. ~e attendais depuislongtemps le mystĂ«t~ du rĂ©demption.mĂ©dĂšme doit tenir moa aux fonds de bap-tĂȘme. dĂšs que l'instruction quĂ©tholi-que il aura Ă©clairĂ© le e<&utde moa.

~gre de big~e~t qu'est-ce que ~en-tends.

i.Hein plaĂźt-il~ mossieu le capucin ?

–ÏUen, miss Jackson; c'est une ex-~s~ion. ~a~ae qui signiñe c Ïñ paix'soit avec vous. a

Vefy ~1. MmeKtais ~Recoup.-Ce~b~g~~41est-<4ansmoa,pa~

ce que moa avais l'ùme pure; je ai vécuconstamment avec le « bigre », et je es-pérais mourir avec loui.

Ainsi soit-il. Savez vou~ si madametardera Ă  rentrer ?

No. C'est-Ă -dire, si mossieu le

comte il rentre, médÚme tardera baocoup.Mais, si mossieu le comte il reste long.

temps, médÚme sera vite ici.En voilà une situation entortillée

J'avais averti cependant M. de Jussacde mon arrivée. N'a-t-il pas reçu unelettre ce matin? une lettre lui annon-çant la visite du révérend Pépin d'Hé-ristal ?

Aoh Very well, je me souviens,maintenant; mossieu il a commandé mai-

gre tout le temps du séjour de mossieu lecapucin.

Bien obligĂ©.–Oh! mossieu Ïe rĂ©vĂ©rend il p~ut

ĂȘtre tranquille. Je empĂȘcherai le beurredans le lĂ©Rume et dans le soupe; je mettrail'huile~ et je fricassetai ploutĂŽt moa le

cuisine, que laisser le gras entrer dans le

corps à mossieu le capucin.Que le diable les emporte 1 Ça

promet, grommela le visiteur en s'as-

seyant d'un air résigné. MÚrci, missJackson, merci; je reconnaßtrai votrezÚle.

–Je travaillai pour le salut de moaajouta sentencieusement miss Jackson,

car je volais mourir dans le « ~igre a duseigneur.

Et elle ajoutaJe vais chercher mon bible pour

mossieu le révérend, afin de l'aider à

se distraire de l'absence de médéme le

comtesse.Et elle sortit apres une révérence.

Est-ce que cette vieille toquĂ©e sefiche de moi? se demanda le soi-disantprĂȘtre en arpentant le salon a grands

pas. Y a-t-il moyen de comprendre

un mot Ă  ce qui se passe? Le comte <~st

absent; la comtessene me marque aucunempressement.Ah! nt-ilavec un souL

dain ravissement dans'la voix, c'est elle,enfin1

La porte vitrée du jardin s'ouvrit rapi-dement. Une jeune femme se jetta dansles bras du moine.

Toi ici, Fernand ? Quelle folie dans

ce costume!1Que veux-tu ? AprĂšs l'algarade que

j'ai eue au cercle avec ton mari, impossi-ble de revenir chez toi autrement que sousce déguisement.

Commentt'y es-tu pris pourte mas-quer ainsi ? interrompit-elle, riant de toutesses forces de la singularité du travestis-sement.

Parbleu j'ai profité de l'expulsiondes jésuites pour faire écrire à M. deJussac, par l'intermédiaire de l'abbé Félix,qu'il eût à préparer un appartenant destinéau pÚre Pépin. C'est le nom sous lequelj'ai été rue des Postesréclamerl'assistancedu supérieur,auquel j'ai persuadé que desraisonsmajeures m'obligeaient a conserverl'incognito prÚs des autres pÚres. On me

croit, rue desPostes, chargéd'unemissionparticuliÚre de la cour de Rome, et l'onn'a pas trop osé m'adresse! dé questionsdans la crainte de désobéir aux ordres dugénéral des jésuites, duquel on est con<vaincu, je te le répÚte~ que j'ai reçudes or-dres secrets.

Mathilde écoutait avec ravissement, nedoutantpas que son ami n'eût inventé undélicieux stratagÚme, lorsque la porte serouvrit de nouveau, et miss Jackson ap-parut souriante, une bible énorme entreses bras.

Je venais prévenir le révérend quele chambre il était préparée.

C'est bien, miss Jackson. Nem'jccompagnez-vous pas, madame lacomtesse ?

Je suis Ă  vos ordres, mon pĂšre. MissJackson, veuillezpresser-le dinef.

Mme de Jussac sortit, suivie du reli-

gieux.Ah ça! oĂč as-tu rencontrĂ© cette

vieille diablesse?demanda -Ferhand en re'

levant sa fausse barbe et en se jetant sur ledivan de la chambre.

N'en dis pas de mal; elle noussert.–'Eue nous sert, oui, des plats mai-

gres.Comment ?C'est-elle qui m'a averti qu'elle

empĂȘcheraitun atome de beurre de m'en-

trer dans le corps attendu que M. deJussac n'avait commandé qu'une cuisineentiÚrement à l'huile, en vue de mon sé-jour chez lui.

–Rassure-toi, Fernand; demain je luiraconterai que tu as une dispense tu nemangeras maigre que ce soir.

En attendant, il y a assez longtemps

que je jeûne d'autre chose, et cette dis-pense-là, il n'y a que toi qui me la puisseoctroyer.

-–Plu~ tard, se dĂ©fendit-elle en le fe"poussant.

–Non~~t de suite.Et elle voulut s'enfuir,mais lui, entr'ou~

vrant sa robe de moine, trouva moyen del'envelopper dans un pan de l'Ă©tonc debure. Ainsi Ă©troitement eniroquec, elledut subir le baiser monastique.

–C'est singulier comme aujourd'hui

tes caresses ont une saveur imprévue!

murmura la comtesse impressionnĂ©e.C'est qu'elles empruntent du vĂȘte-

ment dans lequel elles sont données uncaractÚre plus ardentque sous mon désha-billé mondain.

Et il l'enveloppa encore une ibis.Beau pénitent, il ne te manque que

la tonsure, dit-elle en luicoulant ses doigtseffilés dans les cheveux. °

–TonsurĂ© ou pas, rĂ©pliqua-tU, jeprends le pain des forts, non des mainsd'un prĂȘtre, mais a mĂȘme l'autel.

Au momentpsychologiquede ce nouvelenserrement, un coup sec résonnant a laporte les rejeta a distance.

Que veut-on?demanda la Comtesse,pendant que Fernand rajustaitpfécïpttam-ment sa fausse barbe.

°

Qu'en tout temps, Ă  toute heure,JĂ©sus-ChrĂźst soit dans mon cƓur!1

Et miss Jackson inaugura ainsi son en-trée en baissant les yeux.

On ne peut donc pas donner l'abso-lution tranquillement ?s*~cnale faux moine

en feignant de se mettre en colĂšre.

–Ah! ce Ă©tait le absoluchionne quemĂ©dĂšme Ă©tait en train de recevoir il y aun instant ?Je demandaipardon mĂ©dĂšme.Je me retirai.

L'cSet de l'absolution est nul quand

on a remue, riposta Fernand.

Oh! moi, je jiourai Ă  mossieu queje remuerai pas quand loui il donnerale absoluchionnequĂštholique.

–Mai& vous n'aurez pas Ă  recevoir l'ab'solution, s'Ă©cria la comtesse avec dĂ©pit,puisque ce sera le baptĂȘme qu'on vousdonnera, et que ie baptĂȘme en~ce tout.

Je priai mĂ©dĂšme d'excuser mĂŽa, siprĂ©fĂ©rai le absoluchionne Ă  le baptĂȘme.Et miss Jackson fit briller un regard

qui prouvait aux deux amantsqu'elle avait

pu les voir a travers la serrage.Vous n'avez pas le choix, ~exclama

le capucinexaspĂ©rĂ©.–Mon ami. mon pĂšre, se reprit ~a

comtesse avec une inflexion de priĂšre quisignifiait :prenezgarde, elle est capablede nous livrer.

Vous n'avez pas le choix, poursuĂŻvitFernand qui comprit §oudam; c'est pour-quoi, miss Jackson, je vous Ă©crirait d'a-bord le baptĂȘme et.

Aoh very weU, et l'absoĂźucbionae

en mĂȘme temps? interrogea l'anglaise ras-sĂ©rcrĂ©e.Non, l'un aprĂšs l'autre. si vous le

permettez, chĂšre miss.–Oh. je allai prĂ©parer moa Ă  ĂȘtre

absolument quétholique, ail right! Je re-merciai baocoup, mossieu le révérend.Je promettai le abjuréchionne quand ilvoudra.

Enfef eteau bĂȘnĂŻte mar<nur~nand.

Ope disai mossieu?–Mon Dieu,miss Jackson,vous n'igno-

rez pas qu'il y aura plus de joie au ciel

pour un pĂȘcheur qui se repend que pourquatre-vingt-dix-neuf)ustes.

YeS) je avais vu ça dans mon Bible.–-Eh bien, chùre miss, permettez-nous

d'ĂȘtreentiĂšrement Ă  la joie en fĂȘtant votre

<t abjuréchionne,~etcommandezun dßner

g~s ce soir au lieu d'un dĂźner mais~e.Aoh je comprenais. je Ă©tais char-

mée; ceétait pour moa que mossieu le ca~pucin il réclamait le gras?

Pour vous~ miss Jackson, en votrehonneur car M"~ la comtesse est ca-tholique depuis longtemps.

Je demeurai confouse, very con-fouse. Je courais prévenir de souite mas'ter couisinier.

Et allez donc! cria Fernand quandil la vit enfin partie.

Et il recommença avec M~ de Jussacla formule d'une nouvelle absolution.

Trois heures aprÚs, et le dmer achevé,

comme Fernand, dĂ©boutons son trĂȘvestissement, rĂ©citait les grĂąces, afin de don-

ner le change aux gens, le comte arrivait.Oh! mon pĂšre, quel honneur pour

notre maison! Croyez que si j'avais pudevinervotr&présence si prompte.

Plus prompte, en effet, que je ne lecroyais moi-mĂȘme, rĂ©pliqua le moine engrossissant sa voix pour ne pas se tra-hir. On ne nousa pas laissĂ© le temps de

nous reconnaĂźtre l'expulsionnous a prise

en pantoufles. je veux dire en sandales.Quelles Ă©preuves pour l'Église, mon

révérend1Et, commelacomtesse,se levant, s'em-

pressait de sortirOĂč allez-vous donc, chĂšre amie? de-~

manda M. de Jussac.Jevous abandonne Ă votre entretien,

répliqua-t-elle en affectant un dédainsubit

envers l'homme de Dieu.Et elle se retira.–Excusez-la,mon pùre. M"" de Jussac

n'aime pas la conn'érie de Jésus. Elle a été

élevée d'une façon déplorable, quoiquereligieuse,cependant.

J'ai cru remarquer, en effet, dansM" la comtesse, certain éloignementà régard de. notre ordre.Vous aurait-on manqué, chez moi ?

Oh grand Dieu, non! L'Ă©ducationde M~ de Jussaj est de celle qui se plie

aux moindres exigences mondaines.J'espĂšre que, dans quelques jours,

vous cesserez d'ĂȘtre un Ă©trangerpour elle,

mon pÚre.Vous l'espérez. je veux le croire;

mais, si ma présence l'importunait, jem'empresseraisd'aller frapperailleurs.

Je n'y consentirais jamais s'Ă©criaM. de Jussac d'une voix Ă©clatante.

De grùce, monsieur, modérez cespieux transports, dont la vivacité peut vousentraßner à des paroles. regrettables.

Il n'est que trop vrai, je suis trÚsimpétueux; aussi, mon pÚre, je réclameraide vous une faveur.

Laquelle? monsieur le comte.

Celle de m'entendre en concessiondans quelquesinstants.

Ne voulez-vouspas diner avant ?Merci, je sors de table.Ouais! songea Fernand, tu savais.

qu'on ferait maigre chez toi.Que dois-je augurer de votre si-

lence, mon pĂšre ? que vous consentez arecevoir mes aveux?s'

Sur-le-champ, répliqua le moine,dont les yeux parurent s'animer du zÚlede la charité. Je vous suis, monsieur lecomte.

e

Cinq minutes aprÚs, Fernand, installédans un fauteuil, sa joue dans son mou-choir, pour mieux masquer son profil,recevait les confidences de son hÎte,agenouilléprÚs de lui.

Et quelle est votre situation avecM" la comtesse ? demanda le confes-seur aupénitent, lorsqu'il eut entendu cer-tains récits assez piquants qui n'apptïfeatrien de nouveau l'abbé.

HĂ©Ăas J je suis obligĂ© de !a violenter

JOYEUSES NOUVELLES

pour. vousm'entendezde reste, n'est-ce

pas, mon pùre ?Partaitement. Ëh bien, ne la vio-

lentez pas, laissez-la revenir tranquille-ment Ă  vous.

Alors. je suis sûr que ce ne serapas de sitÎt.

Vous l'avez donc blessée d'une ia-çon profonde.

Bah vous connaissez les temmes.c'est-Ă -dire. pardon, vous ne les con-naissezpas.

Faites comme si je les connaissais.Achevez.

Voyez-vous, j'ai peut-ĂȘtre Ă©tĂ© unpeu tracassier. un peu jaloux. surtoutd'un de mes amis intimes, Feruaud dePampelune, un bellĂątre dont elle me pa-raissait impressionnĂ©e.

Ah ah Et aviez-vous des raisonsde croire que M" de Jussac?.

–Ça, jamais, par exemple. monp~re. Ma femmepeut ĂȘtre lĂ©gĂšre, mcon"sidĂ©rĂ©e., mais sa vertu est aussi intacte que.

le jour oĂč je l'ai reçue des mains de samĂ«re. D'ailleurs, le vicomte de Pampe-lune ne reviendra pas chez moi; je l'ai

vertement prié de terminer ses relations

avec nous.C'est une faute grave, mon 61s.

C'est m~me une faute qui vous rendral'absolution difficile obtenir. car vousavez porté préjudice à la réputation d'ungalant homme en lui refusant le droit de

se présenter dans une maison honorable.Mais, permettez. il faisait la cotir

Ă  ma femme,Puisque vous ĂȘtes certain qu'elle n'a

pas failli.Je suis certain. je suis certain.

mais c'est en prévision des piÚges de cetanimal de Pampelune que j'ai pris mesprécautions.

–Ecoutez, mon frĂšre, il vous faut Ă©crire

une lettre d'excuses a votre ennemi et leprier de revenir chez vous. L'Eglise, dont

vous ĂȘtes un des soutiens, n'admet pas leshaines entre gens du mĂȘme monde.

Ai.rs, t~ut en se déshabUtsmt, cette nouvelle C&diÚre. (Page t57.)

Ça, jamais par exemple.L'absolution est à ce prix.

Sacré mille diables!AprÚs ça, si vous préférez ne pas

avoir l'absolution. et rester en état depéché mortel. seulement, vous devezcomprendre que, dans ce cas, M" lacomtesse ne pourrait plus cohaMter avec

vous.C'est une fichue corvée que je em-

plirai lĂ , convenez-en ?

Le vicomte de Pampelune n'est pasrancuneux, il vous pardonnera. et, te-nez, poursuivit imperturbablement le faux

pÚre, je me chargeraide la commission,si vous le désirez. Votre amour-propresera ainsi sauvegardé.

-Commecela, ça me coĂ»tera moins.mais, €'<est ma femme qui n'y compren-dra fieo.

Je regrette que M" de Jussac m'aittémoigné autant d'éloignement, car jel'aurais pu eno'etenir quelques testants et

la détourner d'une liaison coupable avecM. de Pampelune.

Ciel s'Ă©cria l'Ă©poux transportĂ©, etprĂȘtaexĂ©cuterunbonddejoie;quoi! vousconnaissez sur le compte de Fernand deschoses qui Ă©carteraient ma femmede lui ?

<– Oui. mais comment m'y prendre,puisqu'elle Ă©prouve pour moi. une.rĂ©pugnance invincible.

J'en fais mon affaire. et je t'obli-gerai bien Ă  vous Ă©couter.

Pour cela, je vous permets d'userĂ  son Ă©gard de vos droits de mari, et del'y contraĂźndfe par toutes les voies.

J'en userai, je vous le jure, afin del'amener ici Ă  vos p~eds. et elle y vien-dra, ou, ma foi, c'est que je cesserai dem'appeler de Jussac.

Et soyez convaincu que vos répri-mandes ne seraient rien à cÎté des me<naces de feux étemels que j'évoquerai auxyeux de M" de Jussac; et si, par hasardaelle se trouvait tentée d'enn~indre lesleis du mariage.

Les feux Ă©ternels. Je ne vous rĂ©-pondrai pas que la comtesse gobera lachose. et je ne sais si elle redoute lessupplices de l'Ă©ternitĂ©. Ennn, allez-yquand mĂȘme des feux de l'enfer. mais

croyez que les siens nambent dans unautre endroit que celui dont vous luionrirez la peinture.

Nous verrons, dit le capucin; je nesuis que le plus humble des oints du Sei-

gneur, mais j'ai remporté des victoiresjugées perdues.

Dieu de Dieu de quelle paix vousme remplissez, car si je peux a présent,dignité mise de cÎté, vous avouer mestranses. mes perplexités.

-Avouez. avouez.En ce cas, sachez que je redoute

davantage d'ĂȘtrecocu que d'ĂȘtre damnĂ©.vous ne pouvez pas comprendre cela,

vous, la sainteté, l'austérité en personne.Je ne comprends pas, mon frÚje,

mais je partage vos craintes au sujet de.De mon cocuage.

Allons, dites c'est ma faute, que je

vous donne l'absolution.A~M culpa, mea cul pa, w~

culpa.Et le comte,ayant récité dévotement

fin du Confileor, le capucin lui demanda–Voyons, pour votre pĂ©nitence, vou-

lez-vous rĂ©citer cinq Pater et cinq ~?–Peuh. je ne sais pas si j'irai jus

qu'au bout.Voulez-vous faire maigre tout un

~our?. mercredi prochain, par exemple?–Je me connais, voyez-vous; je ferai

bien maigreau déjeuner; mais au dßner jnquerellerai la cuisiniÚre.

Eh bien, je verrai, je réfléchirai;

nous en reparlerons dans quelques jours,quand vous aurez signé la paix avec M. dePampelune. En attendant, envoyez-moimadame aussitÎt que possible, et allez enpaix. /? nomine Patri et H/M ~n~~M~. ~M~.

Quelques secondes aprÚs, le comte at-taquait résolument sa femme pour qu'elle

vint s'agenouiller au pied de pÚre Pq~n.Je vous déclare, répétait-elle ~n fei-

gnant une grande irritation, que je ne mesoucie pas de causer avec ce prétre-1~.

Vous .le trouvez trop austĂšre,n'est-ce pas, madame ? Vous n'aimez quevos damoiseauxde la Madeleine..

Et quand cela. serait ? J'ai le droit dechoisir un confesseur, peut-ĂȘtre ?

Ecoutez,Mathilde, si vous ne voulez

pas vous confesser a ce digne homme,accordez-hii au moins un instant d'entre-tien.

Cela, dit-elle en affectant de se cal-

mer, estmoins difficile que de m'agenouil-ler sespieds. Si vous le désirez. monDieu. je l'entendrai.

Ah machÚre amie, vous ne sauriezimaginer combien cette preuve de défé-

rence de votre part me touche.Quand désirez-vousque j'aille trou"

ver le pÚre Pépin ?Verriez-vous un inconvénient à y

aller de suitel

Soit, répliqua-t-elle en dissimulantmal son envie de rire et en acceptant lebras de son mari.

Mon pÚre, annonça M. de Jussac

en entrant' d'un air triomphant chez Fer"nand, voici M~ de Jussac qui se rend Ă votre exhortation.

Le religieuxsalua froidement, et fit si-gne Ă  la jeune femme de s'asseoir.

–Ne soyez pas trop sĂ©vĂšre, murmurale comte Ă  l'oreille de Fernand; elle estimpressionnĂ©e a votre vue.

Et, saluant sa femme et le capucin, il seretira discrĂštement.

Non, s'exclama le vicomte en ver-rouillant sa porte, non, je ne l'aurais pasencore supposé d'une aussi jolie force.

Et s'adressant à M"~ de Jussac qui serenversait sur le canapé sans chercher à seretenir de rire.

-Venez, lui ajouta-t-il,chÚre et augustepécheresse, venez m'avouer votre péché.

Alors, tout en déshabillant cette nou-velle CadiÚre, ce non moins nouveau

pĂšre Girard lui raconta ce qui venait de sepasser entre lui et le comte.

Mais tu es donc le diable? s'Ă©cria lajeune femme.

Puisque je suis devenu ermite, ré-pliqua-t-il en emportant sa proie au fondde l'enfer, c'est-à-dire dans son Ht.

<~

Eh bien il me paraĂźt que vous avezrĂ©ussi dans vos petites affaires, reprenaitle mĂȘme soir le comte de Jussac en sepromenant, escortĂ©du faux frĂšre, le longde la terrasse de son habitation.

Dame 1 observa modestement Fer-nand, je suis un capucin d'attaque.

Et si vous n'aviez pas réussi, soyezpersuadé, mon révérend, que j'aurais prisla suite de vos anahes auprÚs de mafemme.

J'en doute.Si, si, je vous l'affime, mon pĂšre, et

revenant Ă  la charge aprĂšs vous, je l'auraisconvaincue.

Elle ne vous aurait pas permis derevenir Ă  la charge aprĂšs moi.

Vous croyez ?j'en suis certain.j'ose espérer que vous consentirez,

mon révérend, à célébrer la messe de de-main dans la chapelle du chùteau. Ce seraun honneur pour nous.

Quoi! ne put s'empĂȘcher de rĂ©cla-

mer le religieux, vous voulez que.Ne me refusez pas cette insigne fa-

veur. Nos paysans sont convaincus qu'unprĂȘtre de Paris les conduit plus directe-ment au salut qu'un curĂ© de campagne.

–j'ai prononcĂ© un vƓu d'humilitĂ©, etc'est un honneur qui reviendrait de droit

au desservantde ce village.–Que je soispendu si je sais jamais dire une messe,songea Fernand.

-TrĂȘve de modestie. Acceptez deprendre pour demain la place de notrecurĂ© et a~ baptisermiss Jakson.

Puisque vous l'exigez. je suis Ă 

vos ordres. Oui, comptes-y Demain

}e me serai donné une entorse je n'ai

que cette seule ressource pour m'en tirer.Passe encore de confesser. mais, sacre-bleu célébrer la messe. en voilà unebonne!1

Comme le comte allait rentrer, il aper-çut dans une allĂ©e. quelque chose qui.au lieu de le faire rebrousser chemin, l'ar-rĂȘta subitement.

Ah ça!t s'écria-t-il, perdant toutemesure, a qui appartient ce paroissien-la ?

Et il s'avança à pas de loup sur le dé-linquant qui s'était dévoilé dans sa nu-dité coupable au clair de la lune.

Ce paroissien-là, riposta l'abbé, quioublia son rÎle un instant, parbleu c'estcelui de votre jardinier.

DrĂŽle cria M. de Jussac, que jet'y reprenne dans mes plates-bandes 1

Et il alla droit au rustre qui sesauva en oubliant de relever sa culotte,pendant sur ses talons, sans remarquerque miss Jakson se promenait Ă  l'Ă©cart.

fureur de M. de Jussac avait eu des

témoins. Les gens de l'omce arrivÚrentpendant que lui et l'abbé rentraient ausalon.

Qu'y a-t-il donc? demanda le co°cher à la dame de compagnie. en nai-rant l'endroit du sinistre.

Oh ce était mossieu qui avait criéaprÚs le. paroissien de Jean.

Bon, bon, fit le cocher. J'com-prends,, saufvot' respect, mademoiselle.C'est, en effet un drĂŽle de paroissien, quece pistolet-lĂ . Il ne se gĂȘne guĂšre.venir se soulager sous les fenĂȘtres dusalon!

–Verywell! Je savais pas, en France,il Ă©tait d'usage de donner des noms delivres d'Ă©glise Ă  des endroits. cachĂ©s.

0Mais je oublierai pas. maester Henri,je oublierai pas le renseignement.

Et elle vint au salon oĂč l'on causait dela messe du lendemain, et oĂč Fernand es-sayait en vain de persuader au comte qu'ilĂ©tait Indigne de l'honneur qu'on lui of'frait, en lui demandant une messe. Les

yeux de la comtesse lui disaient cepcn.dant cédez.

Voyez-vous, concluait M. de Jus-

sac, vous n'imaginez pas comme je tiensa ce quevous célébriez la messe demainmatin pour mes paysans.

Mais, mon ami, objectait timide-

ment sa femme, nos paysans sont si niaisqu'ils n'entendront rien Ă  ce que M. l'abbĂ©leur prĂȘchera. Ce sont des gens qu'il &utlaisser faire leur salut sans les' catĂ©chiser.

C'est trĂšs juste, riposta M. de Jus-

sac. Je vous concĂ©derai mĂȘme qu'ils sont

ignorants au point de ne pas savoir leurCredo. Leurs femmes viennent aux vĂȘpres

avec de vieux paroissiens crasseux, dontl'odeur vous suffoque, et dans lesquelselles ont promené des doigts suintant lagraisse.

Aoh! goddam! s'exclama missJackson, ce était répougnant Comment, il

est possible que l'odeur du paroissien aelles produise le pĂąmoison de vA?

HĂ©las 1 ma chĂšre miss, lorsque ao~

tre chapelle aura été inaugurée par ledigne pÚre Pépin, vous pourrez, si vousle voulez, toucher du doigt la vérité d~certains détails.

No, no, je refusai positivement,mossieu le comte. Je volais pas toucherle. paroissien de eux.Je trouvaisinconve-nante le plaisanterie.

Mon Dieu, vous n'en mourrez pas,interrompit la comtesseimpatientée,votreparoissien, à vous, aprÚs aprÚs avoir éténeuf deviendra vieux.

Je remerciai médëme, je savaisfort bien que je étais plous jeune, ni depremiergrùce. Yes, je savais; mais jetenais pas à ce que médÚme dise des cho-

ses pareilles de moa.Mon Dieu, miss Jackson, je ne

parle pas de vous, ni de ce qui se voit chez

vous, et qui est encore trÚs agréable, repritM" de Jussac en se pinçant les lÚvres; jeparle de votre paroissien.

Je ferai remarquer que le paroissiende moa il est aussi ùgé que le reste de

moa, puisqu'il a pas quitté moa,et ja-mais ce paroissien il a incommodé mé-dÚme de son odeur?

Non, certes, miss Jackson, jamais.D'ailleurs, je ne sais seulement si je l'ai

vu, en admettant que je l'aie fleuré, ré.pliqua naïvement M"* de Jussac.

A ces paroles, miss Jackson se levamajestueuse, terrible 1

Je déclarai, médÚme, je déclarai à

vo que je ai jamais montré te paroissiende moa à personne, et quand a neuretloui. je pensai pas avoir importiouné de

son exhalaison le nez de médÚme ?Bon Dieu, ma chÚre miss, laissons

décote ces susceptibilités; puisque je vousai déj~ affirmé que tout vieux qu'était

mon paroissien, à moi, il me serait im-possible de m'en séparer.

–Yes. je comprenais.Et commej'ignores'il exhale le moisi

ou non, la critique que je fais d'un vieuxparoissien s'adresse aussi bien au mienqu'au vÎtre. il est inhérent aux anciens

objets de sentir le moisi. Jugez ce quec'est lorsque nos paysans en exhibentdans notre chapelle qui ont trame dansles endroits les plus sales?. C'est pour-quoi j'affirme a M. l'abbé qu'il sera in-commodé de ce grouillement de ndÚles ala messe de huit heures.

Miss Jackson, suffoquĂ©e, prit le parti debaisser la tĂȘte sur son ouvrage et de tra-vailler avec acharnement; mais au boutde quelques minutes elle le pliait pourrentrer dans sa chambre

-Ecoutez,chĂšremiss, ajoutagracieuse-mentla comtesse, avant de vous coucher,

venez et je vous donnerai deux goussesde vanille, que vous insinuerez dans l'Ă©tuide votre paroissien.

Cette fois, miss Jackson, absolumentinterdite, sortit en fermant la porte avecfracas.

Femand, Fernand,ouvre, c'estmoi 1

disait Ă  voix basse, quelques minutesaprĂšs, Mne de Jussac.

Le vicomte de Pampelune se mon:rademi déshabillé.

J~ai cru que tu n'arriverais jamaispour nous concerter ensemble. Ah ~a!comment vais-je me débarrasser de cettemesse, demain ?

Tu n'as qu'a étudiermon Manuel duchrétien.

–TrĂȘve de manuel, mon ange; j'aimemieux lire dans un paroissiencomplet,qui sera ton adorable petit corps.

Et ils se couchÚrent; mais Fernanden était a~ peine a~ l'introït que la portegrinça.

-Ciel! fit la comtessepiquant une tĂȘtedans les draps et se coulant aux pieds dulit.

Qui est lĂ  demanda le vicomte.

Le bigre du seigneur il soit avecmossieu le capucin.

-Que voulez-vous ? gronda le fauxprĂȘtre prisde iureur.

Aoh 1 je avais desscrupioules. bao-

coup. MédÚme il avait donné à moa de lavanille.

AprÚs. mille noms de noms!Et je avais commencé à placer le va-

nille oĂč. je devais; mais, pas moyen dele conserver dans. l'endroit de moa oĂčmĂ©dĂšme a ordonnĂ© Ă  moa de le placer.

En vĂ©ritĂ©, miss Jackson ? et oĂč doncmadame vous a-t-elle engagĂ©e a placer vo-tre sacrĂ©e vanille?

Dans l'étui du paroissien de moa,mossieu le révérend mais, impossible.DÚs le premiÚre tentÚtive, le gousse devanille a quitté l'endroitou je avais déposéloui.

Mon Dieu, c'est un petit malheuf.Oh yes, répéta ~Anglaise ensanglot-

tant, ce était au contraire un grand mél-heuï.

Mais pourquoi? s'écriaFérnand, quimalgré lui, piétinait la comtesse au fonddu lit, et qui tremblait que la ter-rible camériste ne s'aperçût de quelquechose.

Pourquoi ? mossieu le cap' ;In ildemande pourquoi, à moa? Mais parceque mon paroissien il sentira le moisi, etil incommodera médÚme, qui m'a faitjourer de parfumer loui.

Cette fille est folle, songea levicomte, qui reprit d'un ton résigné

Ecoutez, miss Jackson, apportez-moidemain votre paroissien; j'y mettrai de lavanille de mes propres mains, et je vousaffirme, oui, je vous affirme, que ça tien-dra.

Miss Jackson sortit en levant les bras

au ciel.Mais oĂč es-tu donc, toi ? demandait

le vicomte en se mettant Ă  la pĂȘche deM"~ de Jussac, qu'il ramenait par unejambe Ă  la surface du monde habitĂ©.

Vers trois heures du matin, ils s'endor-

maient; lorsque sept heures un nouveaucoup Ă  h porte leur causa un sursaute-ment.

Sapristi grommela le vicomte, onne peut pas ĂȘtre tranquille ici. Va vite aufond; encore. encore. mais, ma chĂ©rie,plonge donc, encore une fois.

Vains efforts, la partie la plus char-de la personne deM" de jussac setrémoussait sous les draps, ce que voyant,Fernand, d'un effort désespéré, tenta del'aplatir en se jetant dessus.

Dieu d'Israël et de Jacob, songeait-!1, on est toujours puni d'avoir convoitéla femme de son voisin.

Au mĂȘme instant, M. de Jussac entrait.Qu'est-ce que vous faites donc lĂ  ?

demanda-t-il, stupéfait de voir le jeunehomme les bras étendus et crispés sur la

couverture.Ne m'en parlez pas, mon cher

comte, j'ai une dent qui me cause de pro-digieusessouffrances. je me cramponne Ă monlit pour ne pas criera

Criez, criez, insista le comte avecbonhomie, cela soulage toujours,

Ah ah ah ouf! Oh! ahaan 1

ahaan

TrĂšs bien. ça va se passser. Maisquelle dure position. vous vous met-trez le sang Ă  la tĂȘte.

–Voyez-vous, ajouta le jeune homme,qui affecta de se prendre le menton d'unemain, pendant que, de l'autre, il tenaittoujours. le. iondde M~ dejussac,

j'ai failli cette nuit m'envoyer une balledans le crĂąne.

< Un suicide! chez moi Monsieurl'abbé, oubliez-vousque c'est contraire a

notre sainte religion ?

<– Je n'oublie rien, mais je souffre àen mourir.

<=–Peu importe; dĂšs Ă  prĂ©sent je me

constitue votre garde-malade, et je sau-=rai, certes, vous empĂȘcherd'attenter Ă  vosjours, prĂ©cieuxpour l'Eglise. Voyons,montrez-moi votre boucha mon fev~rend.

Fernand se ~it alors contraint d'aban-donner ce qu'il tenait en se retournant etd'ouvrir la bouche.

Je ne vois rien de rien, assurait le

comteen inspectant lamĂąchoiredu fauxre"ligieux; vous avez les dents saines commeun jeune loup.

Je vous jure que j'ai une mollaire.Ah! bon. une mollaire. Attendez

moi un instant, je vais vous l'enlever;j'ai pratiqué sur mes paysans quand ilsn'avaientpas de quoi payer un médecin.

Et M. de Jussac courut & son cabinet.Ah mais non ah mais non! s'Ă©-

cria* Fernand. non, jamais je n'y con-sen~ai. c'est trop iort

Monstre, murmura Mathilde, enpleurant sous les draps, vous ne m'ai-mez plus. vous ne m'avez jamais aimée 1

Ma chĂšre amie, je vous adore; seu"-lement, permettez-moi de garder mesdents Intactes.

Si vous m'aimiez comme vous l'as~suteg, que vous importerait la souffrance?P

Bigre! me laisser arracher unedent!

M. de Jussac rentrait.Monsieur l'abbé commença-t-H

onctueusement,au nom de l'Evangile, pré

parez-vous à bien souÔrir.Au nom de l'Evangile, au nom de

tous les dentistes, je vous enjoins de

ine.0La bossuosité onduleuse que Fernand

i <ne perdait pas de vue un instant parutexécuter une fluctuation désespérée.

Non, fit le jeune homme, qui secalma; tenez, je sens que ça va déjàmieux.

Vrai ? s'écria M. de Jussac. Eh bien,je préfÚre cela, voyez-vous. parce quel'opération dentaire aurait produit chez

vous une hémorragie qui vous aurait em"péché de dire la messe.

En effet. Permettez donc que je meprépare à célébrer le saint sacrince parune méditation qui m'est habituelle.

Que je ne vous trouble pas, mon

révérend, agissez comme chez vous; je meretire et vous ne me reverrez qu'à lachapelle.

Et M. de Jussac se retira en saluant areculons.

Le Ciel a eu pitié de nous s~ex-

clama la comtesse en se décidant à mon-trer son nez rose hors des draps.

Fernand s'habillait d'un air sombre. Lacomtesse le regardait, en chemise, perduedans ses réflexions.

Ecoute, lui dit-il en prenant un tondécisif, je n'ai qu'un moyen d'échapper à

cette messe que je ne peux pas offrir.c'est de filer ce matin sous mes habitsdereligieux, et de revenir aprÚs-demain,avecma-figure de Fernand de Pampelune, rap-pelé par les, excuses de M. de Jussac etm'oppressant de répondre à son appel,

C'est peut-ĂȘtre le meilleur moyen,cria-t-elle avec enthousiasme; tu nous tiresainsi d'embarras. Sois tranquille, j'expli"querai ta brĂšve disparition.

Le timbre de la porte d'entrée annota

çait un visiteur. L'un et l'autre couru-rent Ă  la fenĂȘtre et virent non sans stu-peur l'abbĂ© FĂ©lix descendre de voiture etsaluer le comte qui s'avançait a sa ren-contre.

–Vite, monFernand, sauve-to~suppliala comtesse, tu n'es pas capable de soute*nir ton rĂŽle en face de ce prĂȘtre-lĂ . C'enest un pour de bon, celui-ci. Sauve-toi!

AussitĂŽt vĂȘtu et grimĂ©, Fernand em-brassa M~ de Jussac qui, enfilant un pei-gnoir, se sauva dans &a chambre. Le vi-

comte rencontra au bout du corridormissJackson qu'il aborda résolument.

Mon confrÚre, l'abbé Félix, visitera

votre paroissien et vous expliquera s'il estorthodoxe ou non, lui déclara-t-ilà brûle-pourpoint, afin d'éviter une interpellation.S'il n'est pas orthodoxe, il est inutile dele conserver; par conséquent, d'y intro-duire de la vanille.

Et il gagna la porte de sortie a toutespmbes, se dérobant sous une allée cou-verte.

Miss Jakson le regarda courir, toujoursstupéfaite.

Oh ce étaitwerydimcultueuxpourmoa d'apporter my poor bottom à cet'igne révérend M. l'abbé Félix; je savaisplous m'y reconnaßtre, et mon paroissien

comme ils appellent my bottom, il n'aurajamais son vanille; je étais désolée.

Et, se lamentant, elle alla dans sachambre.

Ma chĂšre amie, disait alors le comtesa femme, je vous annonce un nouvel

hÎte, M. l'abbé Félix.Qu'il soit le bien venu, fépondit"

elle avec calme.Je vais prévenir le pÚre Pépin que

son digne collĂšgue l'attend.C'est inutile, le pĂšre PĂ©pin vient de

me faire ses adieux.De vous faire ses adieuxl. L'au-

riez-vous blessé, madame ? vous étiez siprévenuecontre lui.

Je ne sais si je l'ai blessé En toutcas, il m'a assuréque, s'étant mis dansune

violente colÚre ce matin, il se sentait in-digne de célébrer la messe.

C'est un saint! s'exclama M. deJussac enthousiasmé; on n'a jamais vu unpareil exemple d'humilité.

Que s'est-il donc passé ? demanda-t-elle trÚs innocemment.

Imaginez-vous qu'il a violemmentsouffert d'une crise de dents pendant cettenuit.

AprĂšs ? 1

AprÚs, madame, il s'est impatientéil a proiéré des paroles. peu en rapportavec l'habit qu'il porte.

Eh bienPEh bien, c'est en souvenir de ce mo-

ment de colÚre qu'il s'est privé de direla sainte messe. Avouez qu'il agit d'unefaçon scrupuleuse. Ne pas oser exercerson ministÚre parce qu'il lui est échappé

un mouvement trop vif!1Enfin, conclut-elle en levant les

Ă©paules, je suis heureuse d'en ĂȘtre dĂ©b<u~

rassée. Il me déplaisait.

Il vous déplaisait, parce que, je lerépÚte, ce n'était pas un freluquet de vi-caire. Mais nous le reverrons, prochaine-ment, je l'espÚre, et vous lui ferez bonaccueil, entendez-vous, madame ?. ou je

me fĂącherai.Elle lui tourna le dos, et le comte se

vit obligé de sortir en maugréant.Dix minutes aprÚs, M" de Jussac opé-

rait son apparition Ă  la chapelle, oĂč le pre-mier coup de sonnette annonçait la messede l'abbĂ© FĂ©lix. Mais elle resta pĂ©trinĂ©e desurpriseen voyantson mari rentrer, escortĂ©de Femand qu'il avait rĂ©ussi a rattraper.

Nous sommes perdus, réfléchit Ma-thilde. Deux augures ne peuvent se re-garder sans rire; Fernand va commettrequelque imprudence.

DeuxheuresaprÚs, la petite sociétéétaitréunie dans le salon de M. de JussacFernand résolutde se tirer de sa situation

par un coup d'Ă©clat.Le scandale est dans l'Église, cria-

t-il subitement d'une voix de tonnerre,

parce que ses membres ont perdu la chas"tĂȘte.

Je le croirais assez, afnrma naĂŻve-ment M. de Jussac.

Que sont devenues les antiques rĂš-gles de la pĂ©nitence oĂč l'on domptaitla chair par le fouet de la discipline,poursuivit encore le vicomte en roulantdes yeux terribles. Que sont-elles deve-nues, je vous le demande ?

L'abbĂ© FĂ©lix suait a grosses gouttes; ilĂ©tait convaincu que le pĂšre PĂ©pin devaitĂȘtre un envoyĂ© secret du pĂšre gĂ©nĂ©ra!chargĂ© de le renseigner sur ce qui se pas-sait rue des Postes.

Pour mon compte, je suis prĂȘt, s'Ă©-cria-t-il, je suis prĂȘt Ă  offrir mon corps enpĂąture au trere charitable qui aura l'ex-trĂȘme bontĂ© de m'administrer une flagel-iaiion mĂ©ritĂ©e que je n'ai pas eu le cou-rage de me donner. trĂšs rĂ©guliĂšrement,

je l'avoue.Ni moi, repartit M. de Jussac. Je

déclare que je suis un peu douillet,et que,

sous ce rapport, je n'ai guÚre pratiqué lamortification.

La comtesse prit le parti de sortir pourne pas Ă©clater d'un rire fou.

Oh s'exclama M. de Jussac, voilĂ 

mon chagrin ma femme n'est pas uniede foi et d'intention avec moi. Elle neconsentira jamais Ă  se laisser fouetter.

En lui assurant qu'elle perdra sapart du paradis ? demanda le fameux pĂšrePĂ©pin.

Oh 1 j'ai dans l'idée que ça ne luiferait absolument rien. Elle est si douille tte.

Le pĂšre FĂ©lix ne songeait nullement Ă 

sa stalle au paradis; mais il se répétait quecet envoyé secret possédait sans doute

un mandat enrayant, pour parler avecune telle assurance, et il avait grande-ment peur du rapport qui serait Ă©crit surlui. Aussi s'empressa-t-il de paraĂźtre Ă©mud'un grand zĂšle.

–Âh! mon pùte, balbutia-t-il, remplis-

sez auprĂšs de nous, qui sommes indignes

de votre sainteté, l'Îmce de pÚre correc-teur et donnez-nous la discipline. Aumoins, aucune faiblesse ne causera detremblement à vos mains.

–Jevous en rĂ©ponds, mon frĂšre.–HolĂ ! cria M. de Junsac, appelant un

domestique, qu'on apporte le martinet abattre les meubles.

Le martinet apportĂ©, on ~erma les por-tes, on baissa les rideaux, M. de Jussacetl'abbĂ© FĂ©lix se dĂ©pouillĂšrent de tout vĂȘte-ment, et se mirent en posture de rece-voir le fouet, en prĂ©sentant chacun auxcoups leur « francis magnard », c'est-Ă -dire ce qui reprĂ©sente la physionomieprincipale de l'individu de ce nom, puis-qu'on ne l'a jamais vu que de dos.

Ah! tu as voulu me iorcer Ă  rester,songeait Fernand, en s'emparant du mar-tiret, attends un peu.

Et, retroussant sa manche, il com-mença

–Au nom du Pùre, du Fils ec duSaint-Esprit 1

~tt,)p''t~a'~)~i''t''tr.tnsp;tt\')))' ~.u~mennf cheminet;)t4c~t!ntiMf't.;h.(u'(;ui-,)~ctnn)!'t'C.oh')

–Amen rĂ©pliquĂšrent les deux autresen lui offrant consciencieusement cha-cun sa contre-figure.

Les coups tombaient avec mesure; Fer-nand y apportait une telle impartialitéqu'aucun des deux pénitents ne put seplaindre d'avoir été négligé. Le comte eutbientÎt les fesses en sang, et il implora dupÚre Pépin un instant de répit, que celui-ci s'empressa de lui accorder.

–Jeme retireen mĂ©ditationdans la cha-pelle, ajouta solennellement le religieux,et aprĂšs je reprendrai le chemin de Paris

pour acquĂ©rir par moi-mĂȘme des preuve"que nos malheureux frĂšres ont trouvĂ© deiasiles en quelques maisons bien&isant~comme celle-ci.

Et il marcha lentementvers la porte enjetant des yeux courrouces sur les deuxhommes.

PourĂȘtre sincĂšre, nous affirmerons que,cette fois, le comte de Jussac ne tentapas de c( ~r aprĂšs lui.

Il est dévoré du zÚle des saints, son*geait-il en se frictionnant la peau.

Je t'assure, disait quelque tempsaprÚs Fernande qui avait retrouve la coin"tesse, que je leur ai offert des preuvescuisantes de .non apostolat. Maintenant,je pars, et je reviens, comme nousen étions convenu, en reprenant monidentité de Fernand de Pampelune.

Le jeune homme la quitta, pourde bon

cette fois.

fAprÚs le départ du moine, la comtesse

feignit d'ignorer les événements du ma-tin elle~ affecta une grande tranquillité ie

reMe de la journĂ©e et donna mĂȘme unepreuve d'austĂ©ritĂ© de langage qui charma

son mari.Une douzaine de verres mousselines'Ă©-

tant brisés, miss Jakson s'emporta aprÚsle domestiquequi prétendit que c'était lechat qui avait causé cet accident enmuant sa queue.

On ne doit pas prononcer cemot de ~< interrompit sévÚrementM°~ de Jussac, s'adressant, devant missJackson, au valet réprimandé dites, si

vous voulez, la a suite du chat a, ou bien

e la suite du chien a, ou encore « la suitedu cheval, de l'ùne, du perroquet », etc.,mais n'empruntez jamais l'expression de

c queue s, c'est indécent.Le comte regarda l'abbé Félix comme

pour lui demanderHein trouvez-vous qu'il y a pro-

grÚs chez ma femme ? Je me plais à con-stater que le passage du pÚre Pépin aadouci en elle certaines locutions vi°cieuses.

L'abbĂ© FĂ©lix se contenta d'incliner latĂȘte en signe d'adhĂ©sion, car il se sentaitatteint d'une grosse fiĂšvre depuis la fessĂ©ecatholique du matin. Il demanda mĂȘme Ă aller se coucher.

Comme il menaçait d'ĂȘtre fort malade,le comte envoya chercher un mĂ©decin,qui, en entrant dans la chambre du prĂȘtre,

pria M. de Jussac de le laisser seul avec~'ecclésiastique.

Le comte ne demandait pas mieux, etalla Ă©galement se mettre au lit, ce dontil avait grand besoin.

Cinq minutes aprÚs, le docteur appe-lait miss Jakson et la chargeait de l'exé-cution de l'ordonnance,

Il s'agit d'un refroidissement, luidit-il; vousadministrerezcette potion des-tinée à amener une transpiration chezM. l'abbé,et vous lui poserezdes sangsuesà la suite.

-Aoh! s'exclamadouloureusementmissJakson lorsqu'elle demeura seule avec le

prĂȘtre, ce Ă©tait prodigieux, indead!1 lecommissionne dont on chargeai moa.

Une demi-heure aprÚs les remÚdes ap-portés, elle fit boire tant bien que mal auprélat la fiole calmante,et la comtesse s'é"

tant rctitĂ©e dans s.t chambre, elle s'ap-prĂȘta a achever le reste du traitement etenleva avec rĂ©solution la couverture souslaquelle gisait le corps du jĂ©suite.

Elle posa d'abord trois sangsues, puissix, puis douze.

Les damnĂ©es petites bĂȘtes posĂ©es ainsiĂ  la. suite mordirent Ă  belles dents.Le prĂȘtre poussa un rugissement, voulut

sauter sur miss Jakson qui se sauvaépouvantée. Un domestique accourut et<·trouva l'abbé en chemise,gigotantcommeun forcené.

Il fallut longtemps pour arracher lesvo"

races animaux qui se repaissaient sansvergogne aprĂšs la viande humaine.

Qpelle maison gĂ©missait le prĂȘtre

en se retournantdans ses draps; on y re-çoit une drÎled'hospitalité des coups, le

matin au verso, et autre chose. aurecto.En vérité, j'aime mieux fuir.

H se rendormit toujours enfiévré.

Mais mis Jakson se rappelait les pa-roles du pĂšre PĂ©pin dans le corridor

« Mon confrÚre, l'abbé Félix, visi"

« tera votre paroissien et vous déclarera

« s'il est orthodoxe ou non. S'il n'est pas

a orthodoxe, inutile de le conserver, para conséquent d'y mettre de la va-e nille. »

Je préférai choisir le ténÚbre pourmontrer à ce saint homme qui vit dans le

« bigre du Seigneur N je préférai ce mo-ment pour montrerà loui le paroissien de

moa.Qu'avez-vous donc, miss Jakson ?

lui demanda M"~ de Jussac qui l'enten-dait soupirer.

Je craignai baocoup, médéme, quemon paroissien il était pas orthodoxe.

Qu'importe, répartit distraitement lacomtesse,vousen accomplirezle sacrifice,voilà tout.

Oh no. jamais je pourrai.Cependant vous voulez ĂȘtre catho-

lique ?

Yes, je volais, c'est-à-dire je ferai lepossible. Je communiquerai le paroissiende moa l'abbé Félix, comme le pcrc Pé-pin il m'avait engagé.

En effet, c'est un bon conseil; mais,enfin, il se peut que notre digne abbé letrouve trop ancien pour vous. et qu'il

vous ordonne de le jeter au feu; vous de-

vez une entiĂšre obĂ©issance.–Aoh.mĂ©dĂšmc, je avoue. que je

serai very désolée de pas exécuterl'ordre,mds comme le disé un auteur à vo. lenommé MoliÚre, je croyais «Guenille si

vo volez, le gcenille de moa, il était cheràmoa(i). »

Eh bon Dieu gardez votre gue-nille. non, votre paroissien, s'Ă©cria la

comtesse exaspérée.Et elle alla se coucher en congédiant sa

dame de compagnie.Miss Jakson, persuadée que la coutume

du rite catholique exigeait l'exhibition del'endroit le plus secret de sa personne,avant la rĂ©ception du baptĂȘme, miss Jack-

son, qui voulait ĂȘtre catholique Ă  toutprix, rĂ©solut d'aller jusqu'au bout.

(t) Guenille si l'on veut, ma guenille m'est chĂšre.

Yes s'ëcna't-elleémue d'un superbe

mouvement, je ne placerai de vanille dansle paroissien de moa que quand on m"auradéclaré qu'il est orthodoxe. c'est-à-direquand on aura reconnu. quand on aurajugé que. mon paroissien il est comme

au jour de mon naissance, et que per-sonne n'a lu loui. il me faut ce dé-claréchionne. je porterai pas de vanille

avant.Trois heures sonnaient au cougou de la

digne catĂ©chumĂšne, lorsque, vĂȘtue d'unpeignoipde mousselinetransparente, sansaucune chemise en dessous, elle se renditdans la chambre oĂč l'abbĂ© assoupine l'en-tendit pas entrer.

Quel ne fut pas l'effarement de l'hommede Dieu, tiré brusquement de son som-meil, lorsque, en ouvrant les yeux, il

aperçut non pas une tĂȘte sĂ©raphique, mais

une de ces apparitions qui, d'aprÚs les lé-gendes, étaient familiÚres à saint An-toine.

Seigneur 1 si cette vision ne peut

passer, que votre volonté s'accomplisse etnon la mienne, murmura-t-il en se si-gnant.

Miss Jackson continua en silenceàmontrer son séant au brave homme quis'assit sur le sien.

Ayez ~itiĂ© de moi continua le reli-gieux, vous qui avez consenti Ă  ĂȘtre tentĂ©,je sens que ça mord;c'est-Ă -direnon.ce sont les piqĂ»res de sangsues qui melancilleot.

HĂ©carquillait les yeux; pas moyen dedouter; ce qu'il voyait Ă©tait vraiment na-ture.

Miss Jackson offrait de mieux en mieuxà l'abbé Félix, en y apportant une sin-cérité indéniable, ce qui passe, nous l'a-

vons dĂ©jĂ  Ă©crit, pour ĂȘtre la partie nobledu sieur Magnard, ou du moins le cĂŽtĂ©qu'il a l'habitude de prĂ©senter dans uneaffaire d'honneur.

MonDieu priait-elle mentalement,faites qu'il reconnaisse le paroissien de

moa orthodoxe. car ~1 l'est! il n'a )a*mais servi Ă  personne.

Va-t'en aux nammes Ă©temelles 1

balbutia le prĂȘtre va-t'en figure sortie del'enfer!1

Grùce mon révérend, implora l'An-glaise jamais je consentirai jeter louidans un brasier. Le corps de moa il ne ré-vélait aucune impioureté.

J'ai des hallucinations de l'ouie ouc'est quelqu'un de la maison s'écria l'ec-clésiastique qui regarda de trÚs prÚs cettetois les deux hémisphÚres de la nlle d'Al-bion.

Eh oui je souis le dame de com-pégnie de médÚme le comtesse.

Ah ah et qui vous a engagée àvenir me relancer ainsi?

Ce Ă©tait le pĂšre. le pĂšre. le vieuxparaplouie.

Comment le vieux parapluie?Le pÚre Pépin, mon révérend, le

pÚre Pépin. Mais comme en parlant d'unparaplouie on dit. toujours un pépin, je

pensai avoir souffisammentdésigné mos-sicu le capucin Pépin.

Tout s'explique, songea subitementl'abbé Félix. Il s'est servi de cette femme

comme d'un agent provocateur pour m'Ă©-

prouver et savoir si je gardais mon vƓude chastetĂ©. Ouf! observa-t-il, je l'aiĂ©chappĂ© belle.

Et sautant sur une cruche d'eau, placéea cÎté de sa toilette, il en lança le contenuau derriÚre de miss Jackson, qui bondit à

travers la chambre.

Tiens glapissaitl'abbéen lapoursui-

vant,'tu vois comme je te reçois, tenta-trice tiens, encore cette potée d'eau,païenne!1 et encore ça, huguenote!et encore celle-ci. et encore celle-là.Ah tu ne crois pas à la vertu des hom-mes de la rue des Postes. Voilapourt'apprendre.

Le peignoir de mousseline collé auxflancs de l'Anglaise dessinait si exacte-ment ses formes qu'elle paraissait nue..

GrĂące!1 cria-t-elle en se sauvant;grĂące., mossieu le prĂȘtre Ï Je jiourat Ă  voque je avais agi de la sorte que par ordrede ce pĂšre PĂ©pin.

Et elle quitta enfin la chambre del'abbé Félix.

Je le sais bien, répétait mentalementle jésuite je le sais bien, que c'est d'a-prÚs ses ordres qu'elle agissait, la pécore 1

Aussi j'étais crais, si je m'étais laisséaller a la tentation, comme cela m'est a~-rivé avec la femme de chambre de laduchesse d'Olmûtz. Oui, je l'ai échappé'belle en démasquant le plan de l'envoyésecret du pÚre général.

Et il se recoucha presque heureux d'a~voir pu donner des preuves palpables de

sa continence.` ß~e lendemain, sans explication, ilprenait cérémonieusemenf congé du

comte et de la comtesse, qui, pour toutehospitalité, ne lui avaient oSerc que le~buet, des sangsues <et a~ue jta

chasteté~ aa~.

Que se passa-t-il entre M~ de Jussacet miss Jackson? Ce qu'il y a de certain,c'est que Fon constata vite qu'aprÚs luiavoir donné a subir un interrogatoire enrÚgle, au sujet de son refus d'abjuration,la comtesse était souvent prise d'accÚsd'hilarité dont elle refusait de donner l'ex-plication à son mari.

Fernand de Pampelune fit annoncerson arrivée par un courrier; M. de Jussacalla au devant de lui et le ramena triom-phalement de la gare.

Ah mon ami, soupira le comte,encore endolori, en lui pressant la main,que n'étiez vous ici il y a vingt-quatreheures Vous y auriez entendu un jeunepÚre de la Compagnie de Jésus, qui nousa positivement remués, la comtesse etmoi.

Parlez pour vous, mon ami, observamalicieusement M~ de. Jussac en offrant

sa main Ă  Fernand, parlez pour vous;quant a moi, je ne puis sou~rir cette Ă©lo-

quence Apre et farouche.

Ne sauriez-vous l'inviter a passerquelques jours ici, demanda Femand, trÚssérieusement, à M. de Jussac.

Non, oh non, Pampelune H estbon, certes, d'eniretenir de temps à au-tre ces messieurs. mais, la grande aus-térité qui les anime leur inspirant dÚs pré-ventions, au sujet de'nos innocents divef-tissements, je préfÚre, voyez-vous, quenous ayons la latitude de vous recevoir a

notre aise et de faire trĂȘve a certainespra-tiques pieuses qui, je le crois, ne plaisent

pas Ă  ma femme. Et, comme je ne veuxpas la contrarier.

La comtesse affecta de baisser les yeux.Allons, allons, je ne vous l'impute

pas Ă  crime, et je vais me mettre au lit,ajouta de Jussac en marchant d'un pasallourdi vers la porte. Ne m'en voulezpasde vous quitter, n'est-ce pas?

Comment donc ? Si vous vous gĂȘ-nez, je me retire.-= Ce brave Fernand, poursuivit de

Jussac en lui donnant une vigoureuse

poignée de màm. me rëûd )~eu~ d<:

m'ĂȘtre rĂ©cW~~ĂȘ avec M. Maibi, moaexcellent bon, vous me croirez s! vouavoulez, mais, ea dĂ©pit de nos dissensions,

)e vous at toujooirS regardé comme é)Mntde la <MïuUe.

AUQUEL DES DEUX?

L Ă©tait dix heures du soir. La belleM"~ de Saint-Prix venait d'onrir

une derniĂšre tasse de thĂ© Ă  cinqde ses ~nus trĂšs intimes qui ne se jalou-saient pas, tout en se sachant du derniermieux, les uns aprĂšs les autres ouplutĂŽt en mĂȘme temps les uns que les

autres avec la maßtresse de la maison.Un coup de sonnette ayant retenti, lafemme de chambre entra eiïarée.

C'est monsieur qui revient de Cou-ÏommieM, €na<t-eUe, sous le coup d'uneĂ©pouvante ~ustmee.

Les cinq jeunes gens se levÚrent uripenvexés.

-Du sang-froid, messieurs, du sang-froid, fit Julie de Saint-Prix en s'apprĂȘ-

tant, le sourire aux lÚvres, à recevoir lemari bien et dûment. cocufié.

Mais, qu'allez-vous répondre ? de-manda le capitaine Jurasson.

Oui, qu'allez-vous faire? insista Ă 

son tour un ingénieur des ponts etchaussées, Gaston FugÚre.

Mon avis est de filer par ici, re-marqua le petit Ernest, .employé aucadastre.

Qui a parlé de filer? interrompit lecapitaine en roulant sa moustache.

Sur quoi, chacun se tut.Un instant, supplia Julie. Je ne

vous prierai que d'une chose c'est de nepas me démentir dans ce que je vais direa mon mari.

M. de Saint-Prix entrait.Ah mon ami, quelle surprise 1

~exclama sa femme en lui sautant ~u eau.

aSuffoqué à la vue denouveaux visages,

M. de Saint-Prix restait bouche béante.Que regardez-vous ainsi? recom-

mença-t-ëlle en le cùlinant. Parions quevousnesavez pas quels sont ces messieurs ?

Les cinq hommes se tenaient cois, auport d'armes, prĂȘts Ă  entamer un feu depeloton traduction libre Ă  enlever labelle entre leurs dix bras.

Répondrez-vous ? continua la jeunefemme en caressant la barbe de sonmari. Qui supposez-vous, je le réitÚre,

recevoir ici, chez vous?Mais, riposta M. de Saint-Prix,

dont la confianceconjugale manquait unpeu de force, il me semble que ce serait Ă 

vous, ma chÚre, de m'expliquer la singu-larité de la présence de ces personnes-la,à cette heure ?

–La! j'en Ă©tais sĂ»re qu'il ne devi-nerait pas, s'Ă©cria-t-elle sans se troubleret en se retournant vers ses complices.Est-ce qu~ je ne pariais pas avec vous, il

y a une heure « Aristide n'est pas ça-

pable de deviner la vérité. ? L'aide dit,oui ou non?

Elle t'a dit criĂšrent les cinq jeunes

gens ensemble.Mais parlez donc tonnaM.de Saint-

Prix. Qu'est-ce que j'avais Ă  deviner?'Est-ce que vous me croyez assez sotpour ne pas comprendre?. RĂ©pondrez-vous a la fin. ?

Vous serez vexé, je vous en avertis,répliqua Mme de Saint-Prix mais tantpis pour vous, cela vous apprendra àmanquer de politesse quand vous saurezà qui vous avez eu l'honneur d'offrirl'hospitalité ce soir.

Et désignant le groupe des galants,massés en tas dans un coin du salon

Je vous présente mes cinq frÚres,prononça-t-elle lentement et avec ma-}esté.

1 Vos frÚres! répéta à son tourM. de Saint-Prixstupéfait, dont la fureurtomba. Vos frÚres 1>

Et maintenant, renouvelons nos

adieux repritM"~de Saint-Prix,en allant,

sans embarras aucun,vers les jeunes gens,et en leur onrant sa tĂȘte blonde.

–Adieu, ma chùre Julie! 1fit le ca-pitaine en l'embrassant sur les deuxjoues.

Adieu, Sophie appuya Ernest.–-Adieu, EuphĂ©mie! ajouta un troi-

siĂšme.Au revoir, Coralie continua le qua.

triĂšme.-A bientĂŽt, FĂ©licie conclut le der-

nier en la serrant dans ses bras.LĂ -dessus, la troupe des cinq emboĂźta

la marche, au pas de charge, dans l'an-tichambre, et de lĂ  dans l'escalier,d'oĂč l'on entendit la voix du capitaine,qui chantait

Un Ă©picier, c'est une rose.–Vos irĂštes, c'Ă©taient vos frĂšres 1

s'Ă©criait pendant ce temps M. de Saint"Prix.

Et qu'y trouvez-vousd'Ă©tonnant,s'il

vous plaĂźt?

Mais vous Ă©tiez fille unique. Je ne

vous ai jamais connu une parenté sem-rblable.. &

Qui vous dit que. ce soient mes frÚ-res. légitimes?

Ah bah fit Saint-Prix, dont la co-JĂšrc s'Ă©teignit encore une fois. VotrepĂšreaurait.

Eh oui, gros bĂȘta appuya-t-elle enhaussant les Ă©paules; tout ça c'est du passĂ©de papa, et tu t'imagines bonnement.ettut'en vas chercher mi~i quatorzeheures.

Mais voyons, maNinie, interrompit-il Ă  son tour en l'attirantcontre sa poitrine,conviens aussi que c'est un peu fort, etqu'en rencontrantchez moi quatre ou cinqsolides gaillards, je ne pouvais pourtantpas supposer qu'il me tombait ainsi subi-

tement une famille inconnue.Non, vous aimez mieux croire votre

pauvre femme coupable.-Mais non, mais non. seulement,

j'étais étonné.Oui, et vous m'avez presque battue.

Battue, moi! envola une idée!J'ai fait un geste comme ceci. et puis çaa été tout.

Et vous ne leur avez seulement pasoffért la main. vcus les avez regardés

en ayant l'air de vouloir les dévorer.Dame, la surprise écoute donc.

ton pÚre t'avait donnée à moi commefille unique.

–Vouliez-vous pas qu'il entamñt saconfession, le pauvre homme.

Je ne le prétends pas. mais pour-tant il aurait pu m'avouer a l'oreille.

Oui, pour que vous alliez raconterla chose Ă  maman

Sapristi, en voilà une aventure quis'en serait douté? Dis donc, il allait bien,ton pÚre. cinq garçons! et rùblés! Etl'on m'avait assuré que tu étais venue aumonde aprÚs quinze ans de mariage etqu'on désespérait de t'avoir.

–'Tiens, cette bĂȘtise 1 si je ne suis pasnĂ©e plus tĂŽt, qui vous prouve que ce soit

la faute de papa au lieu de celle de ma-man ?

Le fait est que c'a m'en a l'apparence.Et puis, quand on a eu ainsi cinq enfantsde cette corpulence-lĂ , onestpeut-ĂȘtre unpeu.

Un peu quoi ?Enfin on Ă©prouve le besoin de. se

reposer avant de bĂątir sur nouveauxplans.

Ce qu'il y a de certain, c'est quevous avez été d'une impolitesse, d'unegrossiÚreté dont mon frÚre le capitaineemportera le souvenir.

Je lui adresseraimes excuses quand

nous le reverrons. car il reviendra,n'est-ce pas?

–J'en doute, ayant reçu un accueilpareil. Vous comprenez qu'il n'attend pasaprùs nous.

–H en a une chance, ton pùre Met-

tre six enfants au monde et les voir les

uns et les autres dans de jolies positions.Ma parole, il y a un dieu pour I@s bĂątards.

-AussimetĂ©moignent-ilsune affectiondont vous auriez dĂ» ĂȘtre touchĂ©.

Oui, oui, ils se sont emparés de toià tour de rÎle! Ils t'ont embrassée à t'é-touffer.

Dame! s'il faut se gĂȘner avec ses pa-rents.

Par exemple, remarquaM. de Saint-Prix, il n'existe pas le moindre air de fa-mille entrevous, paslemoindre. Mais, sar-pejeu, elle est fameuse celle-là c'est moiqui ne me serais pas douté que j'étais lebeau-frÚre d'un capitaine.

Le,bien vient en dormant, rĂ©pondit-elle en allumant une bougie pour passerdans sa chambre, etrien ne vous empĂȘched'en tenter l'expĂ©rience.

A propos, demandait quelques in-stants aprÚs M. de Saint-Prix en achevantde se déshabiller, explique-moi doncpourquoi tes frÚres t'ont donné chacun

un nom diSerent en t'adressant leursadieux?

C'est que ornais papa a~ voulu

qu'ils m'appelassent de mon véritable

nom, dans la crainte qu'on ne devinĂąt lavĂ©ritĂ©en les entendant parler de leurjeunesƓur.

–Ah! ah 1fit le mari en îtant unejambe de son caleçon.

-En sorte que, ajouta-t-elle ef&onté-

ment, pour l'un fĂȘtais Sophie, pour l'au-tre Julie, pour le troisiĂšme Coralie, ouencore EuphĂ©mie, etc.

Ah 1 ah répétaencore Saint-Prixquirestait devant sa femme son caleçon à lamain, ne trouvant rien à répondre, et pre-nant le parti de se coucher sans chercherà causer davantage.

Gredin de beau-pÚre! songeait lelendcmam M. de Saint-Prix en allant re-trouver au café du Helder le pÚre de safemme et ça veut imposerde la moraleà son gendre.

Sous l'empire de je ne sais quelle in-quiétude, il but deux absinthes de suite,et se sentit légÚrement monté lorsque

M. Montgolfier arriva pour sa partie dedominos habituelle.

Ah vous voilà! commença Mont-golfier ma foi je ne suis pas fùché devotreretour, ma fille se plaignait de sa soli-tude il n'est pas bon qu'une femme resteseule. Tel que vous me voyez, jamais jen'ai quitté la mienne.

–Tiens, tiens, tiens l

Que voulez-vous dire avec votre

« Tiens, tiens, tiens ? »Je veux dire que vous ne m'en im-

poserez jamais.Parbleu je ne prétends pas avoir

été un saint.C'est heureux.Mais jamais )e n'ai fait des absences

aussi prolongées que les vÎtres.J'entends c'était prÚs de votre

femme que vous. consommiez certainspetits rapts.

–Euh, euh! dertains petits rapts.j'ai eu plus souvent affaire a des iemmesmariĂ©esqu'a d'autres.

Ah, ah trÚs roublard le be&u-pÚrc,de cette façon le mari endossait.

Endossait quoi ?L'enfant, parbleu 1

Mais, sacré nom d'un sort. ~e nepense pas avoir été jusque-ta.

Oh je ne tiens pas Ă  vous arracher

vos secrets; à tout péché miséricorde.Je veuxl'espérer.Mes intrigues n'ont

pas duré, l'une dans l'autre. neufmois.

Farceur, ~a trÚs fort le beau-pÚre,excessivement fort. Ah pas neuf mois,l'une dans l'autre ? en sorte qu'un champn'était pas plutÎt ensemencé que vouspassiez à un autre ?.

Mais vous parlez par Ă©nigmes de

mes folies d'autrefois il n'a pas résulté.<~ue je sache, aucun témoin compromet~tant.

Rassurez-vous, M. Montgolner si

~r hasard cela Ă©tait, ce n'est pas moi qui

v~a§ imputerais a crime, ~ous ne voûter

pas vousfier à ma discré~on @t me ~àeo~'

ter vos petites anaires du passé. à votreaise.

Mongendre, il y a quelque chosequevousnem'avouezpas. est-ce que parhasard vous me croyez coupable?.

Rassurez-vous, beau-pĂšre, il n'y aque ma femme et moi qui le sachions. Aquoi bon ruser pour nous ? Nous avonsvu, vu vous dis-je, ce qui s'appellevu.

Que vous ayez soupçonné, je l'ad-mets encore; comme je vous le répétaisje ne suis pas un saint. Mais vu unepreuve de ma culpabilité, ça dépasse l'en-tendement, le sens le plus carabiné.

Avec cela qu'ilest possible de cacherquelque chose aux femmes 1

<–Vousme donnezle trac!Lamiennedoit ĂȘtre informĂ©e Ă  l'heurequ'il est.

Espérons que Julie n~a pas parlé f

En tout cas, je cours la prévenir si vousvoulez.

Oui, courez, c'est-Ă -dire ~y vais

en mĂȘme temps que vous< Et penserquedes Ă©vĂ©nements datant de vingt-cinq du

trente ans au moins se dévoilent subite-

ment. et l'on assure qu'il est des choses

que la justice ne déterre jamais.Il est certain que je ne m'en serais

guÚre douté. C'est hier, quand je suisrentré de Coulommiersque.

Achevez, mon gendre.C'est dur Ă  vous expliquer, beau-

pĂšre mais aussi vous ĂȘtes par tropcachot-tier.

Mais, mon pauvre garçon, le passeappartenaitsibien àl'histoireanciennepourmoi que je n'aurais pas soupçonné qu'Upût vous arriver d'en déterrer une par-celle.

Ma femme me l'avait toujoursca-ché mais hier, j'ai en quelquesorte mis ledoig': sur une de vos intrigues. Sapristi!comment lui raconter.? ne lui nommonsqu'un de ses enfants, ça l'épouvanteramoins, et nous l'amÚneronsdoucement àdes aveux.

Sur une de mes intrigues?.Si vous calmez mieux sur votre nĂŻs

~hvit couchëe, la paume de I& main appuyée sur une brosse à habits. (Page %M.)

le capitaine. Oui c'est dur & lachefquand mĂȘme.

Ah ça, mais je rĂȘve. Vous &tes

fou! c'est de l'idiotisme, dncfé~nisme 1.

Oh Ï pas de gros mots, beau-p&M 1

Vous avez avoué il y a un instant, ne fe-prenez pas ce que vous avezdit.

Saperlotte, j'en conviens, j'ai avouédes fredaines, des liaisons passagÚresmais je n'ai pas voulu prétendre qu'il $osoit rien sort!. 1

Puisque je vous répÚte que votre fils,le capitaine, était hier chez moi, ou pourmieuxparler, chez ma femme, qui l'appe-lait mon frÚre.

-Mais, nom de Dieu, le capitainequi? le capitaine quoi?

Je ne lui ai pas demandé son nom,;'aitrop de délicatesse dans l~me. Mais isait qu'il est votre fils.

H sait qu'il est mon fils, et H ne mel'a jamais dévoUé ?

',IIIi

C'est ce qui vous prouve la noblessede son caractĂšre.

Je vous jure, mon gendre, que j'aibeau chercher, je ne vois pas a qui j'au-rais pu. onrir un pareil souvenir de

mes Ɠuvres. Encore faudrait-il que jesache à quelle date ça remonte ?

Rassemblez vos souvenirs.Ma foi, il y avait d'abord la femme

du notaire de Quimperlé. Mais je l'ai si

peu. touchée, et encore ça n'a eu lieu

que deux fois.C'est plus que suffisant. Et les

autres?Je me souviens aussi de la femme

du receveur. Mais, si j'ai bonne mémoi-

re, elle m'a oUigĂš Ă  poser trois matinĂ©espour. rien. Ça ne peut pas ĂȘtre celle-lĂ .

Evidemment. Si vous ĂȘtes sĂ»r d'yĂȘtre allĂ© pour rien.

SĂ»r comme je vous vois; mĂȘmeelle voulait se tuer aprĂšs. elle avait desremords.

Elle avait dés remords ? Elle n'était

donc pas si innocente; on n'a pas de re~mords quand on n'a commis aucunefaute.

Si. C'était une imagination trÚs ti-morée; elle voulait se confesser chaquefois qu'elle m'avait serré la main.

Passons, passons. Ne voyez-vousaucun incident qui vous conduise Ă  unepiste?

A moins que ce ne soit ma pre-miÚre maßtresse-d'hÎtel.Ah unegaillarde,celle-là qui prenait ses précautions, etrépétait toujours c A moi prudence, aElte m'eût réclamé une pension alimen-taire. en cas d'accident.

Bah! qui sait ? Si elle vous a rem-placé avec avantage ?. ça se voit, deshistoires pareilles; elle pouvait se déclarer

veuve, mÚre d'un jeune fils; ça pose trÚsjoliment une femme, ces choses-là.

A moitiĂ© hĂ©bĂ©tĂ©, Ă  moitiĂ© convaincu,M. Montgolfieret M. de Saint-Prix arri-vĂšrent rue Castiglione, oĂč Mme Montgol-ner sonnait chez sa fille.

Pourvu que ce diable de capitaine'

ne paraisse pas pendant que ma femmeestici, songeait M. Moritgolfier, saisi d'untremblement nerveux.

Au mĂȘme instant un coup de timbreretentit, et la bonne annonça

M. le capitaine Jurasson.Bonjour, ma sƓur, fit le capitaine

en entrant.H n'avaitcru lancer qu'une plaisanterie,

mais il recula, un peu embarrassé, enrencontrant la tamille au complet.

Bonjour, mon frĂšre, riposta Julie enempruntant le mĂȘme ton de gaietĂ©.

Quedit-il donc ? demandaM°"' Mont-golfier à son mari.

Ne vous Ă©tonnez pas, belle-maman,interrompit Saint-Prix, venant gĂ©nĂ©reu-sement au secours de son beau-pĂšre,j'aime le capitaine comme un frĂšre, et,c'estpour cela qu'il appelle Julie :< masƓuf a.

Monsieur est le bienvenu dans no-tre famille, reprit avec Ă©motion Montgol-6ef, en allant au capitaine et lui saisissant

la. main. J'espÚre que, désormais, il re-gardera notre maison comme la sienne.

Mille fois trop bon, répéta le capi-taine en relevant sa moustache .et en jre-gardant le singulier groupe on profiterade la permission.

Je pars, murmura Montgolfier Ă son gendre, prĂ©venez ma femme.; l'aipeur d'une lettre anonyme dans la soirĂ©e.Ça ne rate jamais, ces choses-la.

Et il sortit, Ă©touSĂ© par l'Ă©motion.Vous permettez, n'est-ce pas, mon-

sieur, que je cause un instant avec mabelle mĂšre et que je m'absente quelquesminutes,demanda Saint-Prixau capitained'un air aimable.

Comment donc. Monsieur, maisj'allais vous en prier, répliqua le capi<taine, ne sachant plus ce qu'il répondait.

Il allait m'en prier L.. Il est un peufamilier. C'est vrai qu'il est d& la famille1–Vpule~vous venir dans mon cabinet,belle-maman?

Desselle impoĂŻtsacc e~eacTeĂŻ~

treden que nous devons avoir? interrogeaM~ Montgolfier, un peu étonnée de l'ar-rivée inattendue du beau capitaine,~et nesachant ce que signifiait l'air solennel de

son gendre.Ecoutez-moi, poursuivit celui-ci en

attachant sur, elle un regard pénétrant,écoutez-moi; l'indulgence est la premiÚrede toutes les vertus.

Certainement. Qui est-ce qui vousprĂȘchera le contraire ?

Vousavez eu une jeunesse, n'est-cepas?. Vous savez ce que c'est pour unefemme de se laisser séduire par unhomme ?.

–AhĂŻ mon Dieu! ah 1 mon Dieu!1s'Ă©cria M"" Montgolfier, qui pĂąlit subi-

tement. Mon mari est sorti il y a un in-stant sans me regarder.

Je vous le rĂ©itĂšre, poursuivit imper-turbablement Saint-Prix en continuant Ă la regarder avec un air qui la fit sursauter,je vous le rĂ©itĂšre, une femme peut ĂȘtretentĂ©e, SMce~mbef.etalors.

M"' Montgolfier devenait de plus enplus rigide..

-–C'est fini de mon bonheur, n'est-ce pas? c'est nnĂŻ! Je n'ai dĂ©sormais qu'Ă mourir, murmura-t-elle d'une voixbrisĂ©e.

Qui vous rĂ©pond cela ? reprit M. deSaint-Prix. Vous voilĂ  bien, poussantles choses Ă  l'extrĂȘme. Voyons, belle-maman, il est des faiblesses qu'il faut sa-voirpardonner. Çelle dont je veux parler

est du nombre.Ah monsieur 1 gémit encore

Mme Montgolfier,on a découvert la vérité.Monmari connaßt le passé je" suis per-due

Et elle roula évanouie au bas du ca-napé.

Allons en voici d'une autrercnéchit alors Saint-Prix en tapant dansles mains de sa belle-mÚre. Jusqu'à ellequi a~M~, qui aeu sa petite aventure,son petit badinage. Mais nous roulonsdans le crime l Et, j'y songe, ce beau

capitaine! Julie l'a mis sur le dos de sonpÚre. si c'était plutÎt le fruit coupablede M"~ Montgolfier ? Oui, par amourpour sa mÚre, elle n'aura pasvoulum'avouer. Sapristi! sapristi! quis'en serait douté ? Oui, mais motus, pourïe coup.C'estça qui amÚneraitun scandaledans la maison. Laissons le beau-pÚrecroire que le capitaine est son fils. Si parhasard c'est celui de sa femme. ma foi

tant pis il l'ignorera, et il en a assez fait& M"* Montgolfier pour qu'elle lui aitrendu la pareille dans son temps. Auqueldes deux est-il? A ma belle-mĂšre ou Ă mon beau-pĂšre?. Quelle famille! bonDieu, quelle famille

Et il donna un coup de sonnette quifit accourir la bonne, Julie et le capitaine.Chacun s'empressa autour de la malade,qui rouvrit les yeux.

Ou suis-je? murmura-t-elle, fai-blement.

Chez vos enfants, parbleu ripostale capitaine qui ny entendait pas malice.

Ça doit ĂȘtre le nls de ma belle-mĂšre, songea alors M. de Saint-Prix.Elle n'a rien rĂ©pondu,parce qu'elle a peurde se vendre, mais, pour sĂ»r, l'ai devine!lDe quel ton il a dit « Chez vos enfants a

Allons, belle-maman, du courage!11 n'y a pas un seul Ă©tranger pour vousici, souligna-t-il noti sans intention.

Non, pas un seul, répéta le capitamequi crevait d'envie de s'en aller.

Elle n'a, pas spuinĂ© mot; assurĂ©pient,remarqua Saint-Prix, c'est Ă  elle. Et moiqui l'ai fait reconnaĂźtre au mari tout Ă l'heure; il est vraimenttrop bĂȘte, le beau-pĂ«re. –Colonel, reprit-il a voix haute etla main dans son gtlet, colonel car si

vous ne l'ĂȘtes pas encore, vous n'en ĂȘtes

pas moins digne de l'ĂȘtre l'espĂšre quevous testerez Ă  dmer ici ce soir?

Avec plaisir répliqua le capitaine,

que Julie venait de regarder amoureuse-meut.

Et H a~ttta à p~t ÏM M enveloppanttabeUe-m~reetïegendfe d'un coup d'oe~:

Tas de pékins, va1 `

D n'y avait pas eu d'autres explications

entre M. de Saint-Prix, sa femme etsa beUe-mÚre.Saint-Prix cessa d'agiterdes questions aussi orageuses; il se di-sait que Julie n'ayant pas voulu charger samÚre forçait M. Montgolfierd'endosser lapaternité du capitaine. Quant aux quatreautres soi-disant bùtards, il pensait queson beau-pÚre en arriverait peu a peu àles avouer, mais qu'il était inutile de lequestionner.

--lia encore quatre aveux anous divul-guer, rénéchissait-il; cela lui donneraquatre fois l'occasion de nous payer du ~`

Champagne. Je m'arrangerai pour rendretes politesses que je dois, les jours oĂč

mon beau-pÚre nous déclarera ses fredai-

oes. Si seulement je prĂ©voyais le soir oĂčarrivera j'adresserais mes invitadons

a l'avance.Fort de ces rénexions, il résolut d'aller

en parler -sa femme- quoiqu'il iût onzeheures du soir. Comme il amvait sans

lumiĂšre, il lai seĂŻnbla entendre dbiueho*

ter. ËtODB~ il ouvrit doucement et entrachez Julie. Il marcha en tñtonnant, posaune main au bord du- lit et, de Vautre,

caressa un. crin assez signi6ça!~L–PakemMeuĂŻcria-t-ii en ĂȘcoĂŻmnt;

cette fois, je ne me trompe pas il y

a du mondej. Madame, vous. a~ez unamant

Et furie d'ĂȘtre sans ĂŻumi&rc, H ~rutdans rappartement, sonnant les doaMat~-quesatourdebraSt.

Pendant ce temps, le.. capi~nc avaiteu le temps de se couler entre ië$ deux

matelas, et Julie jetait dans une <am~:M,dont elle enlevait la cle~lesveteMnBQ~ `'

accusaMurs.Lorsque ~em~fe~tM,muntd'uR~ott-

geoĂźr, il la vĂźt ceuehĂ©~ Ïa paume

main appayée sur uae ~fosse a habïss.

–(~t-ee qne ça sïgmSe? ctis.~n'en cfc~anc~asses y~ox. FAur~-vo~ 4@ <f

comme cela Priposta-t-cllesans se trou-bler.

Mais enfin, qu'est-ce que cettebrosse? poursuivit-il interloqué, oubliant

sa fureur, oubliant de chercher sous lestables et dans les coins en présence del'objet placé au milieu de l'oreiller.

Cela signifie que, comme j'ai l'habi-tudede m'endormir les doigts passés dansta barbe, lorsque tu n'es pas la, je prendsùne brosse pour m'imaginer que c'est toi;~ans cette précaution, je ne parviendrais

pas au sommeil, l'habitude Ă©tant chezmoĂŻune seconde nature.

Comment s'exclama-il radieux,c'est un~e brosse que je viens de toucherU~ instant?

'Queveux-tu que ce soit?Mais j'ai cependant senti une peau

humaine.–S'Ă©tait le dos de ma main qui Ă©tait

a cÎté. naturellement.Hn'y avait rien redire. Il prit le parti

de se.coucherprÚs de sa femme qui espé-rait vainement le voir se retirer.

Or, le capitaine serrĂ© sous les deuxmatelas Ă©tou~an et voulut opĂšre? unediversion du cĂŽtĂ©" oĂč le poids se trouvaitmoins lourd, c'est-~dire du cĂŽtĂ© deMme de Saint-Prix.

–Mai~ ce lit est bĂątitenmontagne,s'Ă©~

cria le mari en.donnant un coup de poing~dans le matelas.

SacrĂ© miU~ bombes Ï )ura Ie~ capt-'taine qui nageait en plein sommier.

Saint-Prix essaya d'enlacer sa femme.Au moment oĂč ils allaient ne plus ~airequ'un, il reçut une secousse qui le ren-versa sur le dos.

–'Qu'est-ce que ça signi6e?cr!a-t-'H,enragĂ©; on croirait que quelqu'unse pro-mĂšne sousle matelas.

t,e capitaine soufflait comme un pho-~quë~

<–Je n'ai pas la berlue; )'ai entendK

respirer, observa. Saint-Prix.C'est vous qui cherchez des prĂȘtĂȘx'-

tes pour expliquer votre froideur à mescÎtés, répliqua-t-elle, feignant la colÚre.

–Mais je te jure, chĂšre amie, quec'est toi-mĂȘme. qui. tu le sais bien.voyons

Qu'est-ce que le sais ? Vous m'avezsubitement lùchée.

–LĂąchĂ©e, par exemple C'est toi qui,

en te rejetantviolemment. hors de moi,m'as coupé la. respiration.

Allons, vous-m'insultez, maintenant.Je ne vous ai pas priĂ© de venir; c'estvous qui ĂȘtes arrivĂ© troubler mon som-meil.

Notre sommeil, remarqua l'amanten son for intérieur et recommençant sesévoluions. Cramponne-toi, ça recom-mence.

Et il rejeta JuUe sur son mari.

xMa chĂšre amie, si tu dens a ma-

nƓuvrercomme ça tout le temps, J'aime

autant m'en aller.H se releva pourse servird'un perivier.

Sauvé, mon Dieu murmufù !*ia~&-

cier. Mais tùchez qu'il en ait au moinspour dix minutés.

Positivement, Marianne mériteraitqu'onl'oMigeùtà se relever pour nous ar~ranger des lits en pente comme ça.

C'est moi qui le lui ai. demande.J'aime Ă  avoir la tĂȘte haute.

–Bon voilà que tu te secouescommesi tu avais le feu au corps.

€'<'<? votre faute. Vous venez merĂ©veillerpour. rien.

Vexé, Saint-Prix se décida a reprendre

son bougeoir Ă©teint et retourna chez lui.Quant au capitaine, il sortit de dessousles matelas, aplati comme une galette, serhabilla comme il put, et, jurant et sa-crant, parvint enfin Ă  sortir sans bruit.

C'es~égal, songeait-il, installer sonnid dans celui dés autres, c'est souvent.tindigeste.

En sSet, il eut l'estomac serré aumoins vingt-quatre heures. Mais, pat unsetMMnens d'~mouf-pfop~, il 'tenait bon/

& cause des quatre soi-disant frÚres deJulie, qui lui avaient cédéla place.

L'Ă©veil Ă©tant donnĂ©. Saint-Prix sur-veilla attentivement sa femme. Elle re-marqua qu'il jetait surtout des coupsd'Ɠil interrogateurs dans l'alcĂŽve. Aussis'arrangea-t-elle pour dĂ©tourner les soup-çons.

Mon ami, lui dit la rusée coquetteun jour qu'ellele voyait prendre sa mined'Othello, je m'aperçoisque vous ne m'a-vezpas pardonnémon lit en pente.

Il paraßtque c'est votre goût, répli-qua-t-il avec aigreur. Car, en ce moment,on croirait qu'il recÚle pour le moins unou deux étrangers.

Soulevez le matelas, je vous ledemande.

n le souleva, et sa main rencontra unecaisse, un panier, diHĂ©rents objets qu'ilattira un un.

Qu'est-ce que cela? interrogea M.de

§aic<-Pr!x étonné.Ouvrez, vous le s&~rez.

Il ouvrit et tira successivement de lacaisse et du panier, des fruits, du gibier,

Jdu vin.Ah, ah 1 fit-il en se passant la lan-

gue entre les lĂšvres. un cadeau de votrepĂšre.

Non, de mon frÚre le capitaine, etcomme je ne voulais pas que vous ensachiez rien, je les avais placés là, atten-dant le moment de les déballer, vilainjaloux! et je me résignais a dormir dessusjusqu'au jour de la surprise que je vousdestinais.

Saint-Prixembrassa sa femme, soula-gé d'une terreur énorme.

Voilà donc pourquoi nous étionssi mal couchés l'autrenuit ?

Sans doute, je craignais en remuantd'écraser un légume ou un faisan.

Si tu veux, ma biche, nous donne-ronsun dßner de réconciliation a la iamillep

y compns ton frĂšre?J'allais vous y engager.

C't.'st Ă©gal, lorsque je pense que tou~

tes ces viandes-la, ont été tassées parnous je tremble qu'elles ne soient gù-tées.

A peu prĂšs rassurĂ©, Saint-Prix cessad'espionner.Pourtant, le soir quisuivit cetentretien, il Ă©prouva le dĂ©sir d'aller direquelques mots Ă  Julie. Le capitaine, enl'entendant, n'eut que le temps de piquerune tĂȘte dans les draps.

.Pour Mme de Saint-Prix; elle se glissa

entre le mur et le matelas.Julie, Julie, appela le mari.

Pas de réponse,Saint-Prix, ainsi que nous l'avons vu,

était archi-myope. Il avança les mains, ettrouva la contre-figure du capitaine, prÚsde laquelle il approcha son nez.

-Allons,bon! songea-t-il, voilĂ  encorequ'oncache des provisionsdansles draps.C'est insupportable de coucher avec cesmachines-lĂ . Ceci, pour le moins, doitĂȘtre un chapon, et il est diablement &i-~ndĂ© 1

Cette idée l'ayant débarrassé de toute

velléité amoureuse, il prit le parti de s'enretourner.

Marianne, annonça-t-il le lendemainà la cuisiniÚre, je crois que vous nous pré-parez un chapon pour ce soir.

Tiens! comment monsieur sait- ilça?a

Mais oui, ajouta-t-il en jetant uncoup d'Ɠil significatif Ă  sa femme. Maisoui, je le sais pour l'avoir neurĂ© cettenuit dans la cachette ordinaire de ma-dame. Hein tu ne t'attendais pas Ă celle-lĂ  Mais j'ai idĂ©e qu'on a tardĂ© troplongtemps pour le manger.

Explique-toi, mon ami, demanda-t-elle en rougissant.

Je sais ce que je dis, et, je t'en prie,ordonne Ă  Mariannede l'assaisonner d'une~auce trĂšs relevĂ©e, parce que, vois-tu, çane sera pas mangeable et mĂȘme tu de-vrais le faire mariner, ton chapon.

Le soir, lorsqu'on apporta le fameuxchapon, que madame était allée dans lajournée acheteraux halles, le capitaine ne

put s'empĂȘcherde regarder M" de Saint-Prix, dont la figure parcourait la gammeentiĂšre des couleurs du prisme. Bien en-tendu, M. et Mme Montgolfier assistaient

tu dßner.On découpa la volaille, et, lorsque

chacun eut mangé quelques bouchées

Ma foi, s'Ă©criaSaint-Prix,il estmeil-leurque je ne croyais. Imaginez-vous,capi-taine, que le hasardm'ayantamenĂ© Ă met-tre la main sur le dos de la bĂȘte, je lasupposai d'abord fort coriace. De plus,monodorats'Ă©tanttrouvĂ©dĂ©sagrĂ©ablementtfrappĂ© par sa suffocante exhalaison, jamaisie n'aurais cru Ă  unmorceau aussi dĂ©licat.

Et il offrit de nouveau une aile au capi-taine, qui la dévora silencieusement.

M. Montgolfier regarda son soi-disantfils et, poussant un soupir

Capitame, faites-moi un plaisir.

Deux, si vous voulez, répliqua l'of-ficier, la bouche pleine.

Puisque mon gendre vous aime

comme un frĂšre, appelez-moiaussi monpĂšre.

Si ça peut vous ĂȘtre agrĂ©able, ontĂąchera.

Et, ajouta M"" Montgolfier qui,tremblant que son passé n'eût été décou-

vert grĂące a son gendre, cherchait Ă  flatterle penchantde son mari, appelez-moi demĂȘme ma mĂšre.

Ah ça, ils veulent m'obliger à direPapa, maman, comme a un animal defoire, songea le capitaine, qui entassait les

morceauxdans son assiette sans rĂ©pondre.Quant Ă  Saint-Prix, son Ɠil investiga-

teur allait de M. à Mme Montgolfier, et ilrénéchissait

Est-ce a lui ? Tout le fait présumer.Et, cependant, son émotion, à elle, sesparoles précédentes prouvent que ce se-rait plutÎt le sien. Mais, nom d'unpetitcaporal, & qui ressemble-t-il, ce trou-pier-la ? Ni à l'un ni à l'autre. Alors,auquel des deux?.

Le Mariaged'aaeMoĂŻ)a!e. jLes ChevaHe~duBMet. 63

Chaste etpure. i07L'ExpuisédeIaraedesPostes. <33

Auque! desdeux! 2<Ji

F!N OS LA TABLE DES MATtÈKES DO TOME P<t'!MEB.

TABLE DES MATIÈRES

TOME 1