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3S47 Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 3S47-3S60 Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 3S47-3S60 © 2006 SPLF, tous droits réservés Doi : 10.1019/200530198 Série « Évaluation des soins » Coordonnée par C. Chouaid et A. Vergnenègre Les outils de l’évaluation des soins A. Vergnenègre Résumé Contexte L’évaluation de la qualité des soins est devenue incontournable dans le monde médical. Certaines dispositions réglementaires comme l’Evaluation des Pratiques Profession- nelles (EPP) nécessitent une bonne connaissance des métho- des. État des connaissances Les différentes techniques utilisables pour réaliser l’évaluation des soins sont présentées après avoir été replacées dans leur contexte. On différencie deux grands types d’outils. Le premier groupe comprend les techniques de synthèse de l’information : conférences de consensus, recom- mandations de pratiques cliniques (RPC), consensus formalisé d’experts. Le deuxième groupe porte sur les outils de comparai- son à un référentiel : l’audit clinique, l’audit clinique ciblé, la revue de pertinence des soins. D’autres techniques moins usi- tées sont également présentées, comme l’approche par proces- sus, le chemin clinique, les méthodes spécifiques de la gestion des risques par indicateur, les méthodes de résolution de pro- blèmes (revue mortalité-morbidité), les méthodes d’analyse des événements indésirables et le suivi des indicateurs. Perspectives Ces méthodes doivent se généraliser car le caractère réglementaire en France de l’EPP va favoriser leur développement. Conclusion La bonne connaissance des différents outils de l’évaluation de la qualité est indispensable pour tous ceux qui veulent développer ces techniques. Mots-clés : Évaluation de la qualité Méthodes • Évaluation des pratiques professionnelles. Réception version princeps à la Revue : 14.09.2005. Retour aux auteurs pour révision : 05.10.2005. Réception 1 ère version revisée : 14.10.2005. Acceptation définitive : 24.10.2005. Correspondance : A. Vergnenègre Service de l’Information Médicale et de l’Évaluation, Hôpital du Cluzeau, CHU de Limoges, 51, avenue Dominique Larrey, 87042 Limoges Cedex. Service de l’Information Médicale et de l’Évaluation, Service de Pathologie Respiratoire et d’Allergologie, Hôpital du Cluzeau, CHU de Limoges, Limoges, France. [email protected]

Les outils de l'évaluation des soins

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Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 3S47-3S60 © 2006 SPLF, tous droits réservésDoi : 10.1019/200530198

Série « Évaluation des soins »Coordonnée par C. Chouaid et A. Vergnenègre

Les outils de l’évaluation des soins

A. Vergnenègre

Résumé

Contexte L’évaluation de la qualité des soins est devenueincontournable dans le monde médical. Certaines dispositionsréglementaires comme l’Evaluation des Pratiques Profession-nelles (EPP) nécessitent une bonne connaissance des métho-des.

État des connaissances Les différentes techniques utilisablespour réaliser l’évaluation des soins sont présentées après avoirété replacées dans leur contexte. On différencie deux grandstypes d’outils. Le premier groupe comprend les techniques desynthèse de l’information : conférences de consensus, recom-mandations de pratiques cliniques (RPC), consensus formaliséd’experts. Le deuxième groupe porte sur les outils de comparai-son à un référentiel : l’audit clinique, l’audit clinique ciblé, larevue de pertinence des soins. D’autres techniques moins usi-tées sont également présentées, comme l’approche par proces-sus, le chemin clinique, les méthodes spécifiques de la gestiondes risques par indicateur, les méthodes de résolution de pro-blèmes (revue mortalité-morbidité), les méthodes d’analyse desévénements indésirables et le suivi des indicateurs.

Perspectives Ces méthodes doivent se généraliser car lecaractère réglementaire en France de l’EPP va favoriser leurdéveloppement.

Conclusion La bonne connaissance des différents outils del’évaluation de la qualité est indispensable pour tous ceux quiveulent développer ces techniques.

Mots-clés : Évaluation de la qualité • Méthodes • Évaluation des pratiques professionnelles.

Réception version princeps à la Revue : 14.09.2005. Retour aux auteurs pour révision : 05.10.2005. Réception 1ère version revisée : 14.10.2005. Acceptation définitive : 24.10.2005.

Correspondance : A. Vergnenègre Service de l’Information Médicale et de l’Évaluation, Hôpital du Cluzeau, CHU de Limoges, 51, avenue Dominique Larrey, 87042 Limoges Cedex.

Service de l’Information Médicale et de l’Évaluation, Service de Pathologie Respiratoire et d’Allergologie, Hôpital du Cluzeau, CHU de Limoges, Limoges, France.

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Summary

Introduction Assessing the quality of care has become anessential part of the medical process. In France, the Profes-sional Practice Evaluation requires a sound knowledge of thesetechniques.

Background The different tools that can be used to carry outquality assessment are presented, with their specific applica-tions. Two main categories can be used. The first are informationsynthesis techniques such as consensus conferences, practiceguidelines, and panellist’s appropriateness rating. The secondcategory is based on comparison to a reference: clinical audit,targeted clinical audit, or appropriateness evaluation protocols.Other, less commonly employed approaches include a problemsolving approach, which is often included in total qualitymanagement, clinical care pathway, risk management, mortalitymorbidity conference, adverse event monitoring, and statisticalprocess control charts.

Viewpoint These tools will be widely used in the next fewyears, because the recent changes in French law couldincrease their use.

Conclusion A good knowledge of these techniques is needed inorder to improve quality assessment.

Key-words: Quality assessment • Methods • Professionalpractice evaluation.

Tools for assessing healthcare deliveryA. Vergnenègre

Introduction

L’évaluation médicale est sortie progressivement d’unecertaine confidentialité dans les deux dernières décennies. Leconcept d’évaluation de la qualité des soins était apparu auxÉtats-Unis en 1920, mais c’est surtout après la seconde guerremondiale qu’il s’est développé dans ce pays et au Canada,ainsi qu’au Royaume-Uni. Les Pays-Bas l’ont développé à par-tir des années 1970.

En France, en 1985, un Comité National pour l’évalua-tion a été créé. Ce n’est que par la création de l’Agence Natio-nale pour le Développement de l’Évaluation en Médecine(ANDEM), que l’évaluation médicale et ses outils se sontvraiment développés dans notre pays [1].

Pendant de nombreuses années, et malgré les référencesréglementaires comme la loi hospitalière du 31 juillet 1991,l’évaluation médicale est restée quasiment confidentielle. Lepersonnel de l’ANDEM et les experts impliqués faisaient plu-tôt penser à des « croisés » répandant une nouvelle parole etles réunions ne rassemblaient qu’un nombre limité de partici-pants. Progressivement, grâce aux actions de l’Agence, les pre-miers outils d’évaluation ont été développés : audits cliniques,conférences de consensus et recommandations de pratiqueclinique [1].

Les ordonnances d’avril 96 ont renforcé la place de l’éva-luation en créant une nouvelle structure : l’Agence Nationaled’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES) qui aconstitué la deuxième étape fondamentale de développementdu concept. Le travail entrepris par cette Agence a été consi-dérable en terme d’organisation et de production, notammentpar l’intermédiaire de son Conseil Scientifique. Des dévelop-pements récents, législatifs, ont modifié la structure gestion-naire de l’évaluation médicale en France, en créant la HauteAutorité de Santé (HAS) qui a des missions élargies, recen-trées sur l’Évaluation des Pratiques Professionnelles (EPP)transversale à toutes ses commissions de travail, ainsi qu’à sesstructures administratives [2].

Ceci ne change pas ou peu les méthodes et outils utilisés.Du plus ancien (l’audit clinique) aux plus compliqués commeles plans d’assurance qualité, les outils utilisables dans l’éva-luation médicale nous viennent pour la plupart des expérien-ces étrangères. Il est important de les connaître dans leurglobalité pour pouvoir les utiliser à bon escient.

Ils doivent cependant être replacés dans le contexte fran-çais, centré sur l’EPP [2] et qui a donné à cette évaluation unenouvelle légitimité.

Présenter les outils de l’évaluation médicale ne doit passe traduire par une simple énumération, mais essayer de repla-cer chaque technique dans son indication. Dans cet article,nous présenterons successivement :– les objectifs de l’évaluation des soins ;– les concepts de l’évaluation des soins ;– le choix et l’utilisation des méthodes ;– les outils d’évaluation dans le contexte réglementaire.

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Les outils de l’évaluation des soins

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• L’Agence Nationale pour le Développement de l’Évaluation en Médecine (ANDEM), créée en 1985, évalue la qualité des soins.• En 1996 a été créée l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES), puis récemment en 2005 la Haute Autorité de Santé (HAS).

Les objectifs de l’évaluation des soins

Comme toutes les définitions, la qualité des soins a étésystématisée par l’Organisation Mondiale de la Santé. Celle-ci écrit textuellement que « chaque patient doit recevoir lacombinaison d’actes diagnostiques et thérapeutiques qui luiassurera le meilleur résultat en terme de santé, conformé-ment à l’état actuel de la science médicale, au meilleur coûtpour un même résultat, au moindre risque iatrogène et poursa plus grande satisfaction en terme de procédures, de résul-tats et de contacts humains, à l’intérieur du système desoins ». Cette définition est ambitieuse, d’autant plus que leprocessus du soin est complexe, associant à la fois la présen-tation du malade, la pratique du médecin, mais également lerésultat d’une prise en charge ou d’une thérapeutique. Lecontexte du soin est également particulier : la mise à jourdes connaissances, les nouvelles technologies, la maîtrise desrisques et les variations des dépenses de santé expliquent lesdifficultés pour atteindre l’objectif défini par l’OMS [3]. Lefondement de l’évaluation médicale a été décrit par Dona-bedian [4]. Celui-ci a séparé le soin en trois grandes catégo-ries : les structures, les procédures et les résultats. Comme iln’est pas possible de systématiser la présentation clinique desmalades, ni éventuellement les résultats des thérapeutiques,seule la systématisation des procédures de prise en chargepeut permettre d’obtenir une certaine stabilisation des résul-tats.

Trois points forts méritent d’être soulignés dans cettedémarche :– le constat de l’écart n’est pas le terme final de l’évaluationmédicale. Par rapport à d’autres études qui sont réalisées, l’éva-luation sous-tend l’application de mesures correctives lors-qu’un écart a été visualisé ;– l’évaluation est une dynamique qui doit souvent être inté-grée dans une approche plus large d’amélioration globale dusoin et dans une politique d’amélioration de la qualité ;– l’évaluation n’a aucune connotation négative et doit êtrebien différenciée d’une sanction.

Les objectifs de l’évaluation des soins peuvent cependantdifférer selon la perspective qui a conduit à la réalisation decette évaluation. Cette perspective va influer sur le résultatd’une évaluation en terme clinique, en terme de qualité devie, en terme d’économie. Le jugement sera bien sûr différentselon que l’on se place du point de vue du système de santé (legouvernant), le payeur, un établissement de santé, un servicehospitalier, un soignant, un patient ou si, dans un objectif

plus général, on envisage cette évaluation dans le champ de lasanté publique. Cette perspective pourra influer sur uneapproche collective de l’évaluation ou une approche indivi-duelle, notions que l’on retrouve dans l’évaluation des prati-ques professionnelles (EPP).

Les concepts de l’évaluation des soins

Les concepts issus du monde de la santé

La médecine fondée sur les preuves

La médecine fondée sur les preuves ou Evidence BasedMedicine (EBM) se définit comme l’intégration des meilleuresdonnées de la recherche, des préférences des patients et de lacompétence clinique du soignant [5].

Il est cependant difficile d’utiliser l’EBM de façon quoti-dienne et les intervenants dans le monde de la santé sont aidéspar les différentes méthodes de synthèse de l’information.

Les méthodes de synthèse de l’information

Le nombre de publications, les progrès de la connais-sance et de la technologie médicale nécessitent que les diffé-rents professionnels de santé impliqués dans le soin puissentdisposer de synthèses critiques de l’information disponible. Latechnique la plus connue est basée sur les recommandationsprofessionnelles ou recommandations de bonne pratique. Cesont des propositions développées selon une méthode expli-cite pour aider le professionnel de santé et le patient à recher-cher les soins les plus appropriés dans des circonstancescliniques données.

Plusieurs méthodes sont utilisables pour établir desrecommandations professionnelles :– les conférences de consensus ;– les consensus formalisés d’experts ;– les recommandations pour la pratique clinique (RPC).

De nombreuses études ont montré que l’utilisation desRPC améliorait le service médical rendu au patient [6].Cependant, un document publié par l’ANAES [7] a confirméqu’il était difficile pour les professionnels de s’approprier cesrecommandations, même s’ils les ont lus et s’ils en ont prisconnaissance.

Les méthodes d’évaluation de la qualité des soins

Les méthodes de type « revue de dossiers par des pairs »Elles reposent sur le jugement des évaluateurs, les critè-

res de jugement n’étant pas formulés explicitement.

Les méthodes de type « audit clinique »Elles consistent à définir des critères de qualité sur une

pratique donnée, mesurer les pratiques réelles et mettre enœuvre des actions correctives s’il y a des écarts constatés.

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C’est la technique qui a été le plus développée en Francepour favoriser l’émergence du concept d’évaluation de laqualité [1].

D’autres méthodes sont complémentaires de ce type dedémarche :– le chemin clinique consiste à regarder quel est le parcours desoins des patients et comment ils sont pris en charge dans unesituation donnée ;– la revue de pertinence des soins est basée sur l’appréciationde la justification de l’admission en secteur hospitalier ou desjournées d’hospitalisation ;– la revue mortalité-morbidité consiste, sans aucun jugementde valeur, à essayer de rechercher les causes de survenue de cer-tains événements pathologiques graves et à analyser les raisonspour lesquelles les patients sont décédés.

Les concepts nés dans le monde industriel

La gestion des risques

Initialement développée en secteur industriel et notam-ment dans les industries à haut risque technologique commel’aviation civile, l’énergie nucléaire ou la chimie, elle a étéintroduite en santé dès les années 1980 aux États-Unis, sousla pression juridique et les différents procès développés à par-tir de la iatrogenèse. Les différentes techniques d’analyse decette gestion des risques reposent :– sur le suivi longitudinal d’indicateurs qui est la technique laplus couramment utilisée ;– sur l’analyse des modes de défaillance, de leurs effets et deleur criticité (AMDEC) : cette méthode a comme objectifd’optimiser la fiabilité d’un produit et d’un processus en pré-venant l’apparition des risques, c’est-à-dire détecter les défautsà un stade précoce, recenser les risques et les hiérarchiser, met-tre en œuvre des actions préventives pour les risques dépassantun seuil de criticité ;– sur la maîtrise statistique des processus de santé : c’est uneméthode qui permet de contrôler et d’améliorer la qualité d’unproduit ou d’un processus grâce à une analyse statistique.

L’amélioration continue de la qualité

Alors que très souvent (comme dans l’audit clinique), onmet en évidence un écart en essayant de le corriger, l’améliora-tion continue de la qualité se fonde sur l’amélioration systéma-tique des processus et l’élimination des dysfonctionnements.La démarche est pragmatique et agit par priorité. Ce conceptest issu de l’expérience industrielle de management de la qua-lité. Cette approche a été utilisée en France, sous l’impulsionde l’ANDEM, sous l’appellation « Programme d’Améliorationde la Qualité » (PAQ) [8]. Ces PAQ s’apparentent aux techni-ques plus connues dites « méthodes de la qualité totale » (rouede Deming). Elles nécessitent d’associer méthodologie et ges-tion (fig. 1).

Le terme ultime de cette démarche, largement employéedans certains pays, est la Gestion Totale de la Qualité (GTQ)

qui se caractérise par la mise en commun des indicateurs etdes démarches des professionnels avec les besoins et le pointde vue des patients (fig. 2).

Les concepts de recherche en évaluation

de la qualité

Ils reposent à la fois sur des techniques épidémiologiquesoù l’on va apprécier l’impact d’une maladie, l’efficacité del’action, la surveillance et la réévaluation des méthodes misesen place. D’autres techniques comme les analyses économi-ques [9] ou les analyses basées sur la décision médicale peu-vent être employées.

• On peut séparer le soin en trois grandes catégories : les structures, les procédures et les résultats.• Seule la systématisation des procédures permet d’obtenir une stabilisation des résultats• Les objectifs sont différents selon les intervenants : système de santé, payeur, établissement de soins, etc.• Synthèse de l’information et recommandations pro-fessionnelles fondées sur : conférences de consen-sus, consensus formalisés d’experts, recommandations pour la pratique clinique.• Méthodes d’évaluation de la qualité des soins : revue de dossiers par des pairs, audit clinique.• Gestion Totale de la Qualité : mise en commun des indicateurs et des démarches des professionnels avec les besoins et le point de vue des patients.

P : Plan : planifier

D : Do : réaliser

C : check : mesurer

A : Act : verrouiller

A P

C D

Fig. 1.

Le principe d’amélioration de la qualité selon la revue deDeming (d’après 20).

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Le choix et l’utilisation des méthodes

Il s’agit bien sûr d’adapter la méthode la plus appropriée àla question posée. En terme d’évaluation de la qualité des soins,les questions posées peuvent être multiples : élaborer un réfé-rentiel utile pour les professionnels de santé, résoudre une diffi-culté en cas d’hésitation de la littérature, obtenir un état despratiques professionnelles dans une situation donnée, résoudre

un dysfonctionnement, comparer une pratique par rapport àune référence, améliorer la prise en charge d’une pathologie.

Le tableau I, qui ne se veut pas exhaustif, reprend defaçon synthétique quelques problématiques posées dans lecadre de l’évaluation de la qualité des soins, ainsi que lestechniques qui peuvent être utilisées. L’identification du typed’approche permet d’orienter le choix de la méthode pourinitier le projet d’amélioration de la qualité. Les ressources,humaines ou financières, sont bien sûr très différentes, selonque l’on réalise un audit clinique sur 50 dossiers ou que l’onmet en place une conférence de consensus en cas d’hétérogé-néité de la littérature. Le choix du sujet influence le choix dela méthode. L’HAS ou une société savante auront plus defacilités pour réaliser une conférence de consensus. Un éta-blissement de soins utilisera les données existantes pour bâtirdes critères d’évaluation des pratiques professionnelles. Il esttrès important de ne pas perdre du temps à recréer des infor-mations existantes. C’est la raison pour laquelle l’HAS a misen place une Banque Française d’Evaluation en Santé(BFES), reprenant l’ensemble des recommandations de prati-que clinique de langue française et anglaise. Une banqued’évaluation des pratiques sera également rapidement miseen place pour permettre d’avoir accès à ces référentiels.

Point de vuedes patients

Point de vuedes professionnelsEcart de conception

Ecart de perception

Qualité attendue Qualité voulue

Qualité délivréeQualité vécue

Ecart dedélivrance

Ecart desatisfaction

Fig. 2.

Principe d’une démarche de gestion totale de la qualité.

Tableau I.

Orientation sur les méthodes utilisables dans le cadre de l’évaluation de la qualité des soins.

Objectifs Approches Méthodes Utilisables

–Fournir des références de pratiques aux professionnels de santé

– Approche par synthèse de l’information existante

– Conférence de consensus

– Fournir des guides pour le choix des critères de l’évaluation des pratiques

– État des pratiques des professionnels – Recommandation de Pratique Clinique

– Consensus formalisé d’experts

– Réaliser le bilan d’une pratique au regard de l’état de l’art

– Approche par comparaison à un référentiel

– Audit clinique

– Audit clinique ciblé

– Revue de pertinence

– Enquête de pratique

– Optimiser ou améliorer une prise en charge ou un processus donné

– Approche par processus – Analyse de processus

– Maîtriser les risques d’un secteur ou d’une activité

– Chemin clinique

– AMDEC (1)

– Traiter un dysfonctionnement – Approche par problème – Méthode de résolution de problème

– Analyser et traiter des événements indésirables – Analyse des processus

– Revue de mortalité-morbidité

– Méthodes d’analyse des causes

– Surveiller un phénomène important et agir en fonction du résultat

– Approche par indicateur – Mise en place et analyse d’indicateurs

– Maîtrise statistique des processus de santé

– Implanter une démarche d’évaluation et mesurer son efficacité

– Recherche évaluative – Méthodes spécifiques

(1) Analyse des Modes de défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité.

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Les techniques de synthèse

de l’information

Les conférences de consensus

C’est un des premiers thèmes qui a été développé parl’ANDEM dans les années 1990 [1], qui avait mis à la dispo-sition des professionnels un guide de réalisation de ces techni-ques. Ce guide a été réactualisé en janvier 1999 [10]. Lesdifficultés et limites de cette méthode sont maintenant bienconnues. La méthode « conférence de consensus » trouve saplace quand :– le thème à traiter est limité et peut se décliner en 4 à 6 ques-tions précises. Il est alors possible que le jury puisse, dans undélai très limité, rédiger les conclusions ;– le thème à traiter donne lieu à controverse avec débat publicsur les divergences et prises de position de la communauté pro-fessionnelle.

Les conférences de consensus sont compliquées à organiseret coûteuses. Elles nécessitent de disposer d’un promoteur quiva assurer le financement et confier la responsabilité de la confé-rence au comité d’organisation, après en avoir choisi le thème.Ce comité d’organisation va constituer un groupe bibliographi-que qui va extraire de la littérature les données disponibles, dési-gner les experts, le jury et inviter le public à la conférencepublique. À l’issue de celle-ci et de la présentation des positionscontradictoires, le jury, à huis clos, va délibérer pour rédiger lesrecommandations avant leur diffusion. La réalisation d’uneconférence de consensus peut prendre plus d’une année. La dif-fusion des recommandations, ainsi que la mesure de l’impactdoivent être prévues dès la mise en place de la conférence.

La principale difficulté des conférences de consensusrepose sur leur actualisation, car le promoteur doit faire évo-luer les recommandations en fonction de l’actualisation desdonnées de la science.

Dans le domaine pneumologique, l’une des plus récen-tes est la conférence de consensus « tabagisme et grossesse ».Elle a permis de répondre à 6 questions concrètes concernantce facteur de risque [11].

Les recommandations de pratique clinique

(RPC)

Les recommandations médicales et professionnelles sontdéfinies dans le domaine de la santé, comme « des propositionsdéveloppées méthodiquement pour aider le praticien et lepatient à rechercher les soins les plus appropriés dans des cir-constances cliniques données ». Par opposition aux conféren-ces de consensus [12], la méthode RPC trouve sa place quand :– le thème à traiter est vaste et se décline en de nombreusesquestions et sous-questions ;– le travail consiste à faire une synthèse des données multipleset dispersées et qui n’ont pas à résoudre une controverse.

La méthode RPC permet l’analyse d’une littératureabondante par le groupe de travail qui rédige les recomman-dations et la prise en compte de l’avis des experts. Le promo-teur peut développer lui-même la RPC ou travailler enpartenariat avec l’HAS.

L’organisation d’une RPC est la suivante :– le promoteur prend l’initiative du processus et en assure le fi-nancement. En France, pendant de nombreuses années,l’ANAES a assuré la réalisation d’un certain nombre de RPCtant sur le plan du financement que de la méthodologie ;– le comité d’organisation limite le thème, définit les ques-tions, choisit les participants ;– le groupe de travail réalise la synthèse des connaissances etrédige les recommandations ;– la partie importante d’une RPC porte sur le groupe de lectu-re qui valide les informations données, apporte des informa-tions complémentaires et des avis d’experts.

Le contenu d’une RPC est en général séparé en trois parties :– un bref résumé, qui est souvent destiné à la médecine géné-rale, sauf lorsque la RPC porte sur une activité spécifique decette discipline ;– un texte court, qui permet d’avoir une information rapidesur le thème étudié, d’environ 10 à 20 pages ;– et enfin un texte long qui amène toute l’information disponi-ble et qui a servi aux différents groupes participants.

La SPLF a élaboré de nombreuses RPC, soit seule, soit enpartenariat avec l’ANAES. Celles-ci seront détaillées tout au longde cette série. On peut citer comme exemple la RPC sur la priseen charge des BPCO [13] qui a permis de réactualiser les don-nées sur ces pathologies, réaffirmer leur importance en terme desanté publique et s’intégrer dans un plan national de prévention.

Les différentes recommandations sont gradées en fonctiondes niveaux de preuve de la littérature scientifique, selon ledocument préconisé par l’ANAES [14]. Même si elles sont plussimples à organiser que les conférences de consensus, les RPCdemandent un temps de réalisation important, de l’ordre de 6 à9 mois. Face à la complexité de l’appréciation des recommanda-tions, a été développée une grille d’analyse de ces recommanda-tions, la grille AGREE [15]. Cette grille, développée au départpar l’union européenne et la fédération des centres de lutte con-tre le cancer a ensuite fait l’objet d’un partenariat avec l’ANAES.Elle permet en une quarantaine de questions de porter un juge-ment sur la qualité des recommandations. C’est cette grille quiest utilisée par le groupe de travail de l’HAS pour introduire lesRPC dans la BFES. Cette banque est importante car elle met àla disposition des professionnels les recommandations de languefrançaise, mais aussi de langue anglaise, par l’intermédiaire deliens informatiques.

Le Consensus Formalisé d’Experts (CFE) [16]

La méthode CFE répond, par sa formalisation, à lanécessité d’objectiver l’obtention des accords professionnels,de rendre compte avec transparence du processus qui a guidéleur élaboration. Cette méthode est à envisager lorsque :

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– les données de la littérature concernant le thème choisi sontrares ou de faible niveau de preuve, voire contradictoires ;– l’organisation d’un débat public ne paraît pas justifiée, ce quiévite d’avoir à réaliser une conférence de consensus.

Un CFE est particulièrement utile pour définir des listesd’indications lorsqu’il s’agit de définir ou d’ordonner desinterventions.

Le CFE se déroule en cinq phases :– une phase préparatoire, visant à produire une analyse criti-que de la littérature ;– une phase de cotation, qui se décompose en trois temps :– une première cotation individuelle des propositions de re-commandations par chaque membre du groupe,– une réunion du groupe de cotation qui permet de discuterdes résultats,

– une deuxième cotation individuelle pour chaque mem-bre du groupe de cotation ;– une phase de lecture par un groupe externe ;– une phase de finalisation du texte des recommandationslors d’une réunion conjointe des groupes préparatoires etde cotation ;– une phase de diffusion et de mesure d’impacts.Elle nécessite de disposer d’un promoteur qui prend l’ini-

tiative du travail, d’un groupe préparatoire qui va synthétiser lesdonnées de la littérature, d’un groupe de cotation et d’ungroupe de lecture. Le temps nécessaire à sa réalisation est del’ordre de six à neuf mois. Le CFE est une technique plus sou-ple qui, dans le respect de ces indications, permet de produireassez rapidement des recommandations. Par rapport aux tech-niques développées à l’étranger, comme la méthode Delphi oula méthode des groupes nominaux, seules l’ANAES et l’HASont introduit l’existence d’un groupe de lecture externe. Cegroupe de lecture est important car il permet d’éviter de décon-necter les recommandations des professionnels.

• La conférence de consensus est gérée par un comité d’organisation.• Coûteuse et difficile à organiser.• Les recommandations de pratique clinique visent à optimiser les soins dans des circonstances clini-ques données.• Elles sont élaborées par un groupe de travail, en tenant compte de l’avis d’experts.• Le consensus formalisé d’experts s’applique à des domaines où la littérature est faible et permet de produire des recommandations rapidement.

Les techniques comparatives

à un référentiel

L’objectif de ces techniques est de comparer la pratiqueréelle à un référentiel, celui-ci étant établi à partir de recom-

mandations professionnelles, de consensus d’experts ou de laréglementation. Ces méthodes nécessitent un référentiel exis-tant ou sa construction. C’est la raison pour laquelle, avant dese lancer dans telle ou telle technique, il est bon de regarderquelles sont les sources de données disponibles, notammentdans la BFES.

L’audit clinique [17]

C’est la méthode la plus utilisée parmi les méthodes decomparaison dans le domaine de la santé. Elle a été dévelop-pée par l’ANDEM [1] avec comme objectif d’implanter l’éva-luation de la qualité en France.

Il s’agit d’une méthode centrée sur les pratiques de soinsqui permet de les évaluer, à la fois en tant que pratiques pro-fessionnelles ou organisationnelles. Son champ est très large ettouche l’ensemble des domaines médicaux et paramédicaux.La méthode permet d’évaluer un service, un groupe de ser-vice, un établissement, un médecin, une pathologie, un actede soins, une prise en charge. Elle nécessite simplement l’éla-boration du référentiel.

La méthode se déroule en six étapes comme le montre lafigure 3 :– le choix du thème, en fonction de sa fréquence, du risque en-couru, de l’impact de santé publique ;– le choix des critères qui doivent être élaborés à partir d’un ré-férentiel, d’où l’intérêt de disposer d’une analyse de la littéra-ture, comme les conférences de consensus ou les RPC ;– le choix de la méthode de mesure, étude rétrospective ou leplus souvent prospective, avec détermination de la source d’in-formation, de la taille de l’échantillon et de la feuille de recueilde données (qui doit toujours être testée avant sa réalisation) ;– le recueil propre des données qui nécessite la mise en placed’une méthode d’organisation pour ce recueil ;– l’analyse des résultats, traitement des informations re-cueillies, calcul de l’écart entre les pratiques attendues et les

1. Choix du sujet

2. Choix des critères

3. Choix de la méthodede mesure

4. Recueil des donnéeset mesures

5. Analyse des résultats

6. Élaboration desrecommandations et suivi

Fig. 3.

Réalisation en pratique d’un audit clinique.

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pratiques constatées, recherche éventuelle des causes desécarts ;– enfin, plan d’action d’amélioration et de réévaluation, ce quiest la caractéristique de l’audit clinique et qui en fait toutel’importance.

Certains audits peuvent être répétés dans le temps, defaçon à vérifier que la correction des écarts a bien été suivied’un effet positif. Ces audits cliniques ont surtout été déve-loppés par le personnel infirmier, comme par exemple sur lapose de sonde urinaire, le lavage des mains, la pose des cathé-ters veineux courts. Ils ont fait l’objet d’appels d’offre réguliersde l’ANAES. Ils se développent maintenant dans le cadre del’EPP. Par exemple, dans le cadre du contrat de bon usage desmédicaments en secteur hospitalier, les prescriptions devrontêtre vérifiées par des audits cliniques.

On peut prendre comme autre exemple l’antibiopro-phylaxie en chirurgie propre, appliquée à la prothèse totalede hanche. Les résultats montrent que les procédures d’anti-bioprophylaxie sont insuffisamment définies, mal connues,notamment par les nouveaux arrivants dans les services, que ledélai entre la 1re et la 2e injection, lorsqu’elle est réalisée enpost-opératoire, n’est pas conforme aux recommandations. Ilest alors assez facile de proposer des actions d’amélioration,comme la révision des procédures, les actions d’information,notamment pour les nouveaux arrivants.

L’audit clinique est peu adapté à l’analyse d’une organi-sation et nécessite parfois d’avoir recours à des outils complé-mentaires pour conduire la phase d’amélioration.

L’audit clinique ciblé [18]

Il s’agit en fait d’une méthode d’audit simplifiée. Cetteméthode permet à l’aide d’un nombre limité de critères de con-duire une démarche d’amélioration des pratiques dans desdélais brefs. Elle porte souvent sur une seule partie d’un thèmeclinique qui a été évalué par ailleurs. Si l’on prend l’exemple duguide d’évaluation et du traitement des pneumopathies com-munautaires [19], il est possible de réaliser un audit sur la priseen charge globale des pneumopathies depuis le diagnosticjusqu’à la thérapeutique ou, si l’on veut surtout s’intéresser àl’antibiothérapie, de ne prendre en compte que la partie théra-peutique de ces pneumopathies et de regarder si les prescrip-tions sont bien conformes aux recommandations. Il est assezfacile de sélectionner dans les critères proposés un nombre decritères plus faible permettant un recueil rapide de l’informa-tion [20]. L’HAS met en œuvre, depuis la fin 2004, un pro-gramme d’audit clinique ciblé. Vingt-sept audits directementutilisables par les équipes ont été développés sur huit thèmes. Leprojet est conduit dans 195 établissements de santé français.L’audit clinique ciblé est beaucoup plus facile à réaliser et amènedes résultats rapides. Il est souple et nécessite peu de moyens.

La revue de pertinence des soins [21]

Il s’agit d’une méthode permettant d’évaluer l’adéqua-tion des soins aux besoins du patient. Elle s’applique à un pro-

gramme de soins, peut porter sur l’indication, l’initiation etla poursuite des soins. Cette méthode a été plus particuli-èrement développée dans le cadre de l’hospitalisation pourvérifier la pertinence des admissions ou des journées d’hospi-talisation dans un établissement de santé. Elle est dérivée d’unoutil, l’Appropriateness Evaluation Protocol (AEP) qui pourraitêtre traduit en français par Protocole d’Évaluation de la Perti-nence (AEPf : AEP France).

La pertinence est évaluée par une méthode d’audit à par-tir d’une grille de critères spécifiques. La particularité de cetaudit est que l’évaluation pour chaque patient s’arrête dès quela séquence de soins est considérée pertinente. L’analyse ne sepoursuit que si elle ne l’est pas.

C-1 AEPf des admissions

Elle comprend 16 critères divisés en deux parties : 10 cri-tères liés à l’état de sévérité clinique du patient, 6 critères liés àla délivrance des soins. L’admission est jugée pertinente si l’undes critères de la grille AEPf est présent.

C-2 AEPf des journées d’hospitalisation

Cet outil AEPf comporte deux parties : une grille de critè-res explicites et une série de questions. Lors de l’évaluation desjournées d’hospitalisation, la réponse OUI à l’un des critèresexplicites de la grille indique que la journée est techniquementpertinente, autrement dit, elle est expliquée soit par la fourni-ture de prescription médicale de haut niveau technique, soitpar l’état clinique du patient. Cette grille comprend 24 critè-res divisés en 3 parties : 10 items se réfèrent aux soins médi-caux, 6 aux soins infirmiers, 8 items à l’état clinique du patient.

Applications

Les grilles d’AEPf s’inscrivent dans une démarche d’auto-évaluation, dont l’objectif est de rechercher les causes des jour-nées non pertinentes. Leur analyse est donc primordiale. Unefois la ou les causes identifiées, les professionnels de l’hôpitalpeuvent mettre en place des mesures correctives, en particuliersur les causes internes. Un travail réalisé au CHU de Limoges,[22] a montré que le service de neurologie de l’hôpital pouvaitperdre jusqu’à 4 lits/jour d’accueil des patients, dans l’attented’examens complémentaires ou de résultats de scanner. La cor-rection de ces dysfonctionnements a permis un meilleuraccueil des patients neurologiques dans ce service.

L’AEPf a cependant un certain nombre de limites :– il ne peut pas s’appliquer à toutes les spécialités ;– il ne doit pas servir à classer des services en fonction de lanon-pertinence des journées ou des admissions ;– il ne faut pas décrire les causes de dysfonctionnement sansmettre en place de plan d’action ;– on ne doit pas utiliser cette méthode pour mettre en avantles déficits structurels sans traiter les déficits organisationnels.

Les différentes grilles d’AEPf sont en annexe du docu-ment produit par l’HAS [21]. Elles permettent de bien analy-ser les besoins du patient, d’identifier les lieux d’hébergement

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les plus adaptés et de rechercher la cause principale del’admission de la présence du patient dans le service ce jourdonné. L’intérêt de son enregistrement, notamment dans leservice des urgences, permet d’avoir une idée sur le nombre depatients qui ont été adressés à tort à ce service.

L’AEPf est une méthode de qualité de seconde intention,qui vient souvent après l’audit ou le suivi d’indicateurs. Elledoit être intégrée dans une démarche qualité plus globale, elleamène des informations pertinentes aux établissements desoins.

• Les techniques comparatives à un référentiel met-tent en parallèle la pratique réelle et les données issues des recommandations.• L’audit clinique évalue la qualité des soins.• L’audit clinique ciblé évalue la qualité des soins sur un nombre limité de critères.• La revue de pertinence des soins permet d’évaluer l’adéquation des soins aux besoins du patient. Elle s’inscrit dans une démarche d’auto-évaluation.

L’approche par processus

Celle-ci est au centre de la démarche d’amélioration de laqualité [23]. Cette approche permet d’identifier et de com-prendre les problèmes de qualité de manière directe. Elle per-met de travailler sur des prises en charge en étudiant le circuitdu patient ou sur des processus transversaux (circuit du médi-cament, transfusion sanguine). L’étape initiale nécessite cepen-dant la description du processus souvent à l’aide d’unlogigramme [23]. Si l’on prend l’exemple d’une patiente sus-pecte d’une lésion mammaire, le processus de prise en chargecomporte la prise de rendez-vous, la consultation avec le chi-rurgien et, en fonction de l’indication chirurgicale, la consulta-tion pré-anesthésie, les examens complémentaires, l’accueildans l’unité de soins, la préparation opératoire et l’intervention.

Les méthodes d’analyse et d’amélioration

d’un processus : les programmes d’assurance

qualité (PAQ)

C’est l’ANAES qui a développé ce type de démarche [23].Si l’on prend l’exemple d’un PAQ appliqué à la transfusion san-guine, le groupe de travail a d’abord décrit l’ensemble des pro-cessus transfusionnels. Une enquête de pratique a été réaliséesur la prescription des concentrés de globules rouges, la doubledétermination du groupe sanguin et le contrôle pré-transfu-sionnel. Cette démarche a abouti à un diagnostic de situationmontrant la nécessité d’améliorer la procédure d’approvisionne-ment, l’hétérogénéité des indications de transfusion, l’écart parrapport aux bonnes pratiques concernant la détermination dugroupe sanguin et le contrôle pré-transfusionnel. Des actionsd’amélioration ont été engagées. Un suivi a ensuite été institué :

suivi des délais d’approvisionnement, des taux de destructiondes produits, des quantités de culots prescrits, nouvelle évalua-tion un an plus tard avec les mêmes indicateurs.

Ces méthodes de programme d’amélioration de la qua-lité sont une approche globale d’une prise en charge, permet-tant d’en améliorer les différentes étapes et notamment toutce qui touche au caractère transversal des organisations. Ellessont plutôt développées dans des établissements qui ont déjàl’habitude de ces techniques et qui ont déjà utilisé d’autresactions d’évaluation plus simples.

Le chemin clinique [24]

Le chemin clinique reprend toutes les étapes de ladémarche d’analyse et d’amélioration du processus. Sonchamp est celui d’une prise en charge d’un patient spécifique ;il est très utilisé en Amérique du Nord [25]. Il favorise la con-tinuité de la délivrance des soins de qualité, la coordination etla communication entre les acteurs, la rationalisation dessoins et la gestion des risques. On identifie 4 composantes auchemin clinique : le calendrier, les catégories de soins ou acti-vités et leurs interventions, les résultats attendus, l’enregistre-ment des écarts. Cette étape d’analyse est importante car il estnécessaire d’identifier le besoin d’un réajustement, de l’analy-ser, pour délivrer au patient les soins appropriés à son état. Ils’agit cependant d’une méthode plus longue et plus complexeà mettre en place que les audits cliniques. L’exemple déjà évo-qué concerne un centre de lutte contre le cancer qui a mis enplace un chemin clinique sur la prise en charge chirurgicaledes lésions mammaires. L’objectif était de standardiser cetteprise en charge, qui était assez consensuelle dans l’établisse-ment. La mise en place d’un chemin clinique a permis à cha-que professionnel intervenant dans la prise en charge, des’assurer qu’une patiente a reçu les soins appropriés aumoment où elle devait les recevoir. La première partie du tra-vail a consisté à élaborer le chemin clinique ; elle a porté surtoute la prise en charge, depuis la demande de rendez-vousavec le chirurgien pour la patiente jusqu’à sa sortie, aprèsl’intervention chirurgicale. Le chemin clinique s’est intégrédans le dossier du patient et reprend des fiches déjàexistantes ; la fiche d’anesthésie, la fiche de bloc ont été inté-grées sans modification.

Parmi les patients relevant de cette prise en charge par cecentre, 70 % des patientes entrent dans le chemin clinique.Les limites de la méthode sont les suivantes : le chemin clini-que se décline pour une pathologie spécifique, sa mise enœuvre nécessite une modification du dossier du patient, laméthode n’est pas adaptée pour des pathologies prises encharge trop rarement dans un établissement.

Les méthodes spécifiques de la gestion

des risques

Elle vise à fiabiliser les systèmes reposant sur l’analysedes processus. De nombreuses méthodes sont disponibles[23]. La plus connue est l’analyse des modes de défaillance,

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de leurs effets et de leur criticité (AMDEC), qui a déjà étéprésentée.

• L’approche par processus aborde directement la qualité des soins.• Elle se réfère à un logigramme qui précise toutes les étapes des soins.• Les programmes d’assurance qualité passent par plusieurs étapes : diagnostic, mise en œuvre d’actions, suivi.• Le chemin clinique reprend les étapes de la démar-che d’analyse et d’amélioration du processus de soins.

L’approche par problème

L’objectif de ces techniques est d’analyser un problèmeou un dysfonctionnement afin d’éviter sa réapparition.

Méthode de résolution de problèmes

Il s’agit là encore d’une technique issue de l’industrie,développée dans un premier temps au Japon. Elle repose surune suite logique d’étapes concernant à lister les problèmes,puis à choisir un problème prioritaire pour l’établissement,identifier les causes, déterminer le poids de chaque cause, rete-nir les causes essentielles, choisir la solution et mettre en placela correction. Pour l’analyse du problème, de nombreux outilssont disponibles et l’on peut faire référence au document del’ANAES [23]. Nous ne les détaillerons pas, mais l’on peut uti-liser une feuille de relevés des données, des histogrammes clas-sant les problèmes par ordre décroissant (diagramme dePareto), le diagramme causes-effets, qui est largement utilisédans le domaine de la santé, le QQOQCP (quoi ? qui ? où ?quand ? comment ? pourquoi ?), les logigrammes.

Le choix de l’outil utilisé sera fonction de l’expérience despersonnes impliquées et du temps et des moyens disponibles.Les exemples de résolution de problèmes sont multiples. Dansun domaine relativement simple concernant l’accueil despatients, un établissement a mis en place une résolution de pro-blèmes pour améliorer la qualité de la prise en charge : l’identi-fication des causes d’attente à l’arrivée des patients dans leservice de soins a permis de sélectionner trois causesprincipales : le départ tardif du patient précédent, la mauvaiseplanification des entrées, le départ simultané des patientsentraînant les difficultés de préparation des chambres. L’attentedes patients qui était de l’ordre de 30 minutes a été diminuée de80 % après la mise en place des actions correctrices.

Les revues de mortalité-morbidité [26]

Elles sont très employées en milieu anglo-saxon, alorsqu’en France elles sont pour l’instant encore peu développées.

Il ne s’agit en aucun cas d’un jugement de valeur sur les inci-dents survenus, et l’objectif est d’identifier et d’analyser lesévénements graves ayant eu ce type de conséquences. Ellespeuvent être mises en place dans un service, un départementou un établissement. L’objectif est d’identifier les événementsévitables, de mettre en place les solutions pour éviter qu’ils sereproduisent. Elles se font dans le cadre de réunions spéciale-ment dédiées au cours desquelles le médecin ayant analysé ledossier le présente. Celui-ci est discuté par l’équipe. Le grouperecherche alors, en cas d’événement évitable, les actions àmettre en place pour que celui-ci ne se reproduise pas.

Sur le plan juridique, les objectifs de ces réunions étantclairement définis, leur existence ne modifie en rien les princi-pes généraux de la responsabilité civile, pénale ou administra-tive ou disciplinaire. Les comptes rendus sont clairementdistincts du dossier patient. Ces documents, anonymisés, nondiscriminants, non-identifiants, respectent les dispositions enrelevant du secret professionnel. Il faut donc rassurer les pro-fessionnels de santé quant à leur utilisation.

L’intérêt de la méthode est :– d’assurer un retour d’expérience essentiel et de tirer les ensei-gnements des erreurs et situations particulières ;– d’assurer la transparence et la cohésion de l’équipe ;– d’améliorer la sécurité des soins.

Une organisation précise est nécessaire, de façon à éviterles mises en causes individuelles.

• La méthode de résolution de problèmes détermine le problème prioritaire et choisit une solution.• Les revues de mortalité-morbidité ont pour objectif d’identifier et d’analyser les événements graves et de proposer des solutions.

Méthode d’analyse des causes

d’un événement indésirable

Tous les outils que nous avons déjà évoqués pour la réso-lution de problèmes peuvent être appliqués à l’analyse struc-turée d’un événement indésirable pour en identifier les causesimmédiates et les causes plus profondes. Les diagrammes cau-ses-effets sont particulièrement utiles.

Il existe un lien entre les revues mortalité-morbidité etles analyses des événements indésirables, tels qu’ils sont étu-diés en gestion des risques. Les revues de mortalité-morbiditédoivent faire l’objet d’une politique institutionnelle inscriteau Projet d’Etablissement et décrite dans le règlement inté-rieur. Une grande liberté doit être laissée au service pourdéterminer leurs modalités de fonctionnement.

La figure 4 montre la relation pouvant exister entre lesdeux thèmes. La revue mortalité-morbidité n’a pas commeobjectif de réduire les déclarations de risques. C’est un dispo-sitif complémentaire de l’analyse de la gestion des risques.

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Les outils de l’évaluation des soins

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Les indicateurs

Les indicateurs sont maintenant largement utilisés dans lesdémarches d’évaluation. Ils sont également très largement utili-sés dans la gestion des risques, dans le processus d’accréditationdes établissements. Ceux-ci mettent en place des suivis longitu-dinaux d’indicateurs pour répondre à certains thèmes du for-mulaire d’accréditation. On peut citer de nombreux exemplesoù ces indicateurs sont maintenant largement utilisés :– les comités de lutte contre les infections nosocomiales sur-veillent de nombreuses pathologies par des mesures répétées deprévalence. Le principe est celui des tendances séculaires, c’est-à-dire que l’on surveille au fil du temps la survenue d’un inci-dent et que le dépassement d’un seuil préalablement fixé va dé-clencher une enquête d’analyse d’écarts et des mécanismes decorrection ;– parallèlement, un grand projet national, coordonné parl’INSERM et l’ANAES, le projet COMPAQH (coordinationpour la mesure de la performance et l’amélioration de la qua-lité hospitalière) [27], a permis de sélectionner un certainnombre d’indicateurs adaptés à chaque type de structure deprise en charge (Médecine Chirurgie Obstétrique, centre delutte contre le cancer, psychiatrie, soins de suites et de réadap-tation). Ces indicateurs peuvent être facilement utilisés dans lecadre des établissements de soins et de l’évaluation des prati-ques professionnelles en établissement. Les thèmes couvertscorrespondent à des pathologies fréquentes en santé publique,comme les accidents vasculaires cérébraux, les césariennes,l’infarctus du myocarde. L’ensemble des expériences interna-tionales indique que le nombre moyen d’indicateurs utilisableset applicables est de l’ordre de 5 à 20. En contrepartie, ces in-dicateurs doivent avoir un fort pouvoir de dépistage de phéno-mènes relatifs à la qualité des soins ;– d’autres indicateurs peuvent avoir comme référence des va-leurs internes à un établissement. L’exemple du suivi d’un tauxde chutes est présenté sur la figure 5. L’indicateur doit être me-

suré de la même façon pour autoriser le suivi dans le temps[28]. Des analyses statistiques plus poussées peuvent être asso-ciées à ce type de démarche. Utiliser un indicateur nécessite deconnaître et de comprendre les variations obtenues.

Les indicateurs sont facilement compréhensibles par lesprofessionnels car ils s’intègrent à l’exercice médical. Ils peu-vent également faciliter l’EPP et sont donc facilement com-préhensibles par l’ensemble des intervenants.

Les limites de l’utilisation de ces indicateurs reposent surleur qualité (en terme de validité), sur la lourdeur éventuelledu recueil (si les données ne sont pas disponibles dans le sys-tème d’information). C’est la raison pour laquelle il vautmieux essayer de limiter leur nombre lorsque l’on démarrecette approche et toujours essayer de valider le systèmed’information permettant le recueil.

La recherche évaluative

La recherche évaluative, telle que nous l’avons définieplus haut, porte sur plusieurs thèmes :– l’utilisation de l’épidémiologie ;– les techniques économiques ;– les mesures d’évaluation des interventions ; comme les étu-des « ici-ailleurs » ou « avant-après » ;– la maîtrise statistique des processus de santé (MSPS) [28].

Elle est issue de l’industrie est adaptée au suivi en con-tinu d’indicateurs pour une amélioration dynamique de laqualité d’un processus. Son objectif est de comprendre lavariation des valeurs recueillies (notamment pour les indica-teurs) et d’appliquer cette variation à une nouvelle forme depilotage des institutions. Elle repose sur une mesure spécifi-que (la capabilité) qui établit un rapport entre la performanceréelle d’un procédé et la performance demandée. Les disper-sions d’un processus peuvent être dues à deux grandes causes :

Fig. 4.

Relation entre les revues mortalité-morbidité et la gestion desrisques. RMM : Revue Mortalité-Morbidité.

Fig. 5.

Suivi longitudinal du taux de chutes dans un établissementpour personnes âgées.

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– les causes communes, les plus nombreuses, qui sont dues auhasard et qui sont utilisées par les statistiques ;– les causes spéciales qui sont les causes identifiables, irréguliè-res, instables et difficiles à prévoir. L’apparition d’une causespéciale nécessite une intervention sur le procédé. La MSPSprévient l’apparition de ces causes spéciales car la dispersionsera visualisée en temps réel sur une carte de contrôle.

Plusieurs outils sont utilisables dans cette technique :– les cartes de contrôle ou de suivi, tel que le taux de chute pré-senté dans la figure 4 ;– le journal de bord ou de suivi : c’est un document sur lequelsont consignées les interventions et les modifications effec-tuées sur les processus et les anomalies rencontrées. Il est asso-cié en fait à la carte de suivi de l’indicateur ;– les indicateurs dits de « capabilité ». Ils permettent de déter-miner si un processus d’étape doit obtenir des résultats confor-mes à des spécifications formulées par ailleurs. Ces indicateurssont spécifiques à chaque indicateur choisi.

Les principaux domaines d’application de la MSPS sontle suivi chronologique d’un indicateur sur un thème précis et,au niveau institutionnel, l’évaluation de la qualité des établis-sements. Il s’agit alors d’une démarche s’intéressant à une bat-terie de l’indicateur prédéfini.

Ces techniques ont essentiellement été développées auniveau des hôpitaux nord-américains De nombreux exemplesd’application de la MSPS sont donnés dans le document del’HAS [28]. Il touche le plus souvent le domaine de l’infectio-logie et des pathologies nosocomiales, mais on peut égale-ment l’utiliser pour analyser un programme de formation à laqualité des soins aux urgences, l’insatisfaction des patients enconsultation, la variabilité d’un examen paraclinique (commela mesure du débit de pointe chez l’asthmatique). Ces techni-ques demandent des compétences statistiques particulières etne sont en tout cas pas applicables directement lorsque l’onmet en place des actions d’évaluation de la qualité des soins.

• La recherche évaluative, issue de l’industrie, suit en continu des indicateurs pour une amélioration dynamique de la qualité d’un processus.

Les outils d’évaluation de la qualité

des soins dans le contexte réglementaire

sur la qualité

Trois grands domaines sont concernés en médecine parl’évaluation de la qualité des soins.

L’accréditation des médecins

et des équipes médicales

Depuis la mise en place de l’accréditation en 1997, denombreux établissements ont eu leur visite d’accréditation.

Ceci a eu comme conséquence de développer une dynamiqued’évaluation dans les établissements et des programmesd’amélioration de la qualité. La nouvelle version du manueld’accréditation [29] concerne, dans son chapitre IV, l’évalua-tion des pratiques professionnelles. Il est clairement écrit quedes pathologies, des indicateurs, doivent être utilisés dans unobjectif qualité à l’intérieur des établissements et que ceux-cidoivent préciser la nature exacte des actions entreprises.L’intérêt est que la participation à ces actions collectives impli-que, pour les médecins, l’évaluation individuelle des pratiquesprofessionnelles. Le développement de l’accréditation estdonc très important pour suivre la dynamique mise en place.

L’obligation individuelle d’EPP

pour les médecins

Alors que les décrets en 1999 avaient insisté sur l’impor-tance de cette évaluation en médecine ambulatoire, quelle soitindividuelle ou collective, la loi du 13 août 2004 a de nou-veau souligné l’obligation pour tout médecin de participer àdes EPP. Des commissions se sont mises en place au niveau del’HAS et ces actions vont être entreprises à grande échelle àpartir de 2006 [2].

L’obligation de Formation Médicale Continue

Celle-ci est prévue par la loi de santé publique du 9 août2004 et par le décret du 14 avril 2005. Une forme recom-mandée de Formation Médicale Continue est la participationà des actions d’évaluation et notamment d’EPP [2].

On voit que ces différentes obligations réglementairesreplacent l’évaluation des pratiques au centre du système. Lapertinence des soins réalisés, la gestion des risques, les actionsd’évaluation et d’amélioration, que ce soit en médecineambulatoire ou en établissement, sont donc devenus plusfamilières aux différents professionnels de santé, notammentmédicaux [2]. Le développement d’une banque de référentielsd’EPP, l’utilisation de méthodes simples dans un premiertemps, comme l’audit clinique, l’analyse de processus, le che-min clinique et les indicateurs doivent permettre de gardercette dynamique. La difficulté est la pérennité de la démarchecomme cela a été montré au CHU de Grenoble [30]. Cinqans après le début du PAQ, seuls 20 % des services restaientactifs. Il reste encore du chemin à parcourir pour que ce con-cept soit complètement adopté dans notre pays.

• L’accréditation, mise en place en 1997, a permis de développer une dynamique d’évaluation dans les éta-blissements et des programmes d’amélioration de la qualité.• La participation à ces actions collectives permet l’éva-luation individuelle des pratiques professionnelles.• La formation continue est obligatoire depuis 2004. Elle englobe la participation obligatoire à des actions d’EEP.

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Les outils de l’évaluation des soins

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Conclusion

Ce texte a permis de décrire de nombreux outils, desplus simples aux plus complexes, notamment sur le plan sta-tistique. Il doit permettre au lecteur d’apprécier les différentestechniques auxquelles il sera un jour ou l’autre confronté,dans sa pratique comme dans ses lectures.

La France a souvent besoin de catalyseurs et l’EPP en estun très bon exemple. Sa situation transversale entre l’évaluationdes pratiques des soins ambulatoires, l’évaluation des pratiqueshospitalières, l’évaluation des réseaux doit permettre de pro-mouvoir l’évaluation de la qualité des soins à l’échelle nationale.

Références

1 Matillon Y, Durieux P : L’évaluation médicale. Du concept à la prati-que. Masson ed., Paris 2000, 161 p.

2 Haute Autorité de Santé : L’évaluation des pratiques professionnellesdans le cadre de l’accréditation des établissements de santé. HAS2005 ; 1 vol : 56 p.

3 Contandriopoulos AP, Champagne F, Denis JL, Pineault R : L’évalua-tion dans le domaine de la santé : concepts et méthodes. In l’évalua-tion en matière de santé : des concepts à la pratique. Lebrun T,Sailly JC, Amouretti ed., 1991 ; 1 vol : 14-32.

4 Donabedian A : Explorations in quality assessement and monitoring :volume 1. The definition of quality and approaches to its assessment.Ann Arbor : Health Administration Press ; 1980, 163 p.

5 Haynes RB, Devereaux PJ, Guyatt GH : La compétence du clinicienà l’ère de la médecine fondée sur les niveaux de preuve et de la déci-sion partagée avec les patients. EBM J 2003 ; 34 :5-8.

6 Renders CM, Valk GD, Griffin S, Wagner EH, Van Eijk THM,Assendelft WJJ. Interventions to improve the management of diabe-tes mellitus in primary care, outpatient and community setting(Cochrane review). The Cochrane Library 2004 ; Issue 4.

7 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Efficacitédes méthodes de mise en œuvre des recommandations médicales.Paris ANAES ; 2000, 1 vol : 48 p.

8 Agence Nationale pour le Développement de l’Evaluation Médicale :Mise en place d’un programme d’amélioration de la qualité dans unétablissement de santé : principes méthodologiques. Paris :ANDEM ; 1996, 1 vol : 66 p.

9 Vergnenègre A : L’analyse coût-efficacité : un guide de lecture. RevMal Respir 2003 ; 20 : 166-75.

10 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Les con-férences de consensus : Bases méthodologiques pour leur réalisationen France. ANAES 1999 ;1vol : 42 p

11 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Conférencede consensus : Grossesse et Tabac. Rev Mal Respir 2005 ; 22 : 185-8.

12 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Lesrecommandations pour la pratique clinique : Base méthodologiquepour leur réalisation en France. ANAES 1999 ; 1vol : 48 p

13 Société de Pneumologie de Langue Française : Actualisation desrecommandations pour la prise en charge de la BPCO – argumen-taire. Rev Mal Respir 2003 ; 20 : 4S5-4S68.

14 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Guide delecture : Analyse de la littérature et gradation des recommandations.ANAES 2000 ; 1 vol : 64 p.

15 Grille d’Evaluation de la Qualité des Recommandations pour la prati-que clinique. The AGREE Collaboration. ANAES 2002 ; 1 vol : 22 p.

16 Haute Autorité de Santé : Guide méthodologique : consensus forma-lisé d’experts. 2005, 1 vol à paraître.

17 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Auditclinique : bases méthodologiques de l’évaluation des pratiques profes-sionnelles. ANAES 1999 ;1 vol : 31 p

18 Haute Autorité de Santé : Une méthode d’amélioration de la qualité :Audit clinique ciblé : Evaluation des pratiques par comparaison à unréférentiel. HAS 2005 ; 1 vol ; 4 p.

19 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Evalua-tion des pratiques professionnelles dans les établissements de santé :les pneumonies aigues communautaires. ANAES 2001 ; 1 vol : 55 p.

20 Gazaille V, Phan C, Vergnenègre A, Melloni B, Bonnaud F : Recom-mandations de la Société de Pneumologie de Langue Française pourla prise en charge des pneumopathies aiguës communautaires : Eva-luation au CHU de Limoges. Rev Mal Respir 2005 ; 22 : 1S69.

21 Haute Autorité de Santé : Revue de pertinence des soins : applicationaux admissions et aux journées d’hospitalisation. HAS 2005 ; 1 vol : 91 p

22 Preux PM, Anani T, Anglade C, Druet-Cabanac M, Debrock C,Couratier P, Vergnenègre A, Boutros-Toni F, Vallat JM and Dumas M :Inadéquations des hospitalisations dans le service de neurologie duCHU de Limoges. J Econ Med 2000 ; 18 : 363-74.

À R E T E N I R

• La création de l’Agence Nationale pour le Développement de l’Évaluation en Médecine (ANDEM) a permis de mettre en place l’évaluation médicale en France.

• L’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES) a effectué un travail considérable en termes d’organisation et de production, notamment par l’intermédiaire de son Conseil Scientifique.

• La Haute Autorité de Santé (HAS) a des missions élargies, recentrées sur l’Évaluation des Pratiques Professionnelles.

• Les méthodes utilisables pour l’évaluation de la qualité des soins sont résumées dans le tableau I.

• L’évaluation de la qualité des soins peut porter sur plusieurs points, comme élaborer un référentiel utile pour les professionnels de santé, résoudre une difficulté en cas d’hésitation de la littérature, obtenir un état des pratiques professionnelles dans une situation donnée, résoudre un dysfonctionnement, comparer une pratique par rapport à une référence, améliorer la prise en charge d’une pathologie.

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A. Vergnenègre

Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 3S47-3S60 3S60

23 Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé : Métho-des et Outils des démarches qualité pour les établissements de santé.ANAES 2000 ; 1 vol : 136 p

24 Haute Autorité de Santé : Chemin Clinique : une méthode d’amélio-ration de la qualité. HAS juin 2005 ; 1 vol : 44 p

25 Pearson SD, Goulart-Fischer D, Lee TH : Critical pathways as a stra-tegy for improving care : problems and potentia. Ann Intern Med1995 ; 123 : 941-8

26 Haute Autorité de Santé : Une méthode d’amélioration de la qualité :Revue de mortalité – morbidité. HAS 2005 ; 1 vol : 63 p.

27 Minvielle E, Grenier-Sennelier C, Corriol C, Michel P, Daucourt V :COMPAQH : rapport d’étape. INSERM ed . 2003 ; 1 vol : 115 p.

28 Haute Autorité de Santé. Maîtrise statistique des processus en santé :comprendre et expérimenter. HAS 2004 ; 1 vol : 92 p.

29 Agence Nationale d’Accréditation des Etablissements de Santé :Manuel d’accréditation des établissements de santé : deuxième procé-dure d’accréditation. ANAES 2004 ; 1 vol : 131 p

30 François P, Pascal C, Marin-Pache S, Peyrin JC : Pérennité de ladémarche qualité dans les services médicaux d’un hôpital universi-taire. Gestions Hospitalières 2004 ; 188 : 815-9.

Annexe 1 : Glossaire des termes employés

ANDEM : Agence Nationale pour le Développe-ment de l’Evaluation en MédecineANAES : Agence Nationale pour l’Accréditation etl’Evaluation en SantéHAS : Haute Autorité de SantéEPP : Evaluation des Pratiques ProfessionnellesEBM : Evidence Based MedicineCdC : Conférence de ConsensusRPC : Recommandations de Pratique CliniqueCFE : Consensus Formalisé d’ExpertsAC : Audit CliniqueACC : Audit Clinique CibléRMM : Revue Mortalité MorbiditéAEP : Appropriateness Evaluation ProtocoleAMDEC : Analyse des Modes de Défaillance, deleurs Effets, de leur CriticitéPAQ : Programme d’Assistance QualitéGTQ : Gestion Totale de la QualitéMSPS : Maîtrise Statistique des Processus de SantéBFES : Banque Française d’Evaluation en SantéCOMPAQH : Coordination pour la Mesure de laPerformance et l’Amélioration de la Qualité Hospi-talière

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