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Estampes japonaises Images d’un monde éphémère En partenariat avec

L'Estampe japonaise (exposition) - Dossier de presse

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En partenariat avec

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Dossier de presse

Sommaire Communiqué de presse 3 Informations pratiques 4 Présentation de l’exposition 5 Galerie Mazarine 6 La technique de l’estampe Le théâtre et le sumo Les beautés féminines et la vie quotidienne Estampes parodiques, poèmes et surimono Les estampes érotiques La Crypte 16 Hokusai Hiroshige Plans de l’exposition 22

Publications 24

Estampes japonaises. Une exposition virtuelle sur bnf.fr 26

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Estampes japonaises Images d’un monde éphémère

La Bibliothèque nationale de France présente du 18 novembre 2008 au 15 février 2009 une exposition exceptionnelle consacrée aux estampes japonaises appartenant à l’Ukiyo-e - qui signifie « images d’un monde flottant » ou « éphémère », par opposition aux images du monde sacré et immuable -, depuis leur apparition à la fin du XVIIe siècle jusqu’au milieu du XIXe siècle. Pour Bruno Racine, président de la BnF, « cette exposition permet de découvrir l’un des plus importants fonds européens, constitué à partir du milieu du XIXe siècle et conservé au département des Estampes et de la photographie de la Bibliothèque. »Choisies parmi un ensemble de plus de six mille estampes et livres illustrés, cent cinquante œuvres rarissimes ou uniques seront présentées dans la galerie Mazarine et la Crypte du site Richelieu. L’Ukiyo-e est née du bouleversement socioculturel survenu lors de la prise de pouvoir par la dynastie des shoguns Tokugawa au début du XVIIe siècle, dynastie qui installa sa capitale à Edo (Tôkyô) et assura au pays la paix intérieure et la prospérité jusqu’à sa chute en 1868. A cette époque, la bourgeoisie citadine fortunée était exclue de la culture traditionnelle et des divertissements réservés aux seigneurs. Elle créa donc sa propre culture, avec ses héros, ses idéaux, ses loisirs et ses spectacles. L’estampe fut l’expression privilégiée de cet art de vivre, notamment celui du quartier des théâtres et du quartier de plaisir de Yoshiwara à Edo (Tôkyô). Elle atteignit un raffinement extrême à travers des couleurs chatoyantes, les fonds micacés ou marbrés, le gaufrage, l’usage de la poudre d’or et d’argent... Conçue de façon thématique, l’exposition débute en galerie Mazarine par une présentation didactique de la technique : outils de graveur sur bois à la manière japonaise, planches de bois gravées, impressions. Les estampes exposées sont regroupées autour de six grands domaines traditionnels de cet art qui sont le théâtre, les beautés féminines, la parodie, l’érotisme, la faune et la flore, le paysage. Quelques livres illustrés s’y ajoutent ainsi qu’un album de surimono (cartes de circonstances) collectionnés par une personnalité japonaise du XVIIIe siècle, véritable trésor de la Bibliothèque. Monochrome à ses débuts, l’estampe devient polychrome à son apogée. Elle est d’ailleurs nommée « image de brocart ». Les plus grands maîtres sont représentés : Moronobu, Masanobu, Bunchô, Shunshô, Harunobu, Koryûsai, Kiyonaga, Shunchô, Utamaro, Sharaku, Eishi, Toyokuni, Shunman, Hokusai, Hiroshige… Support médiatique du théâtre kabuki, l’estampe offre au public les portraits de ses acteurs préférés, saisis dans les scènes les plus intenses des drames ; il en est de même des portraits des courtisanes des « maisons vertes », de haut rang, des beautés en vue, des danseuses, des chanteuses et musiciennes, des hôtesses des maisons de thé, des sumôtori. Les images de printemps (shunga) ou estampes érotiques, sont un autre aspect très prisé de cette production. Les femmes anonymes dans leur univers quotidien exercent une même fascination (mère à l’enfant, activités féminines). Une autre approche, plus subtile, est celle que livrent les images de parodie ou mitate, allégories en quelque sorte, qui nécessitent une double lecture : allusion à la culture classique ou historique à travers un thème contemporain. Au XIXe siècle, alors que l’ukiyo-e, confrontée notamment à une série d’édits de censure, commence à s’essouffler, deux artistes hors normes, Hokusai (1760-1849) et Hiroshige (1797-1858), en renouvellent les thèmes traditionnels et donnent une vigoureuse impulsion à cet art en fondant un genre nouveau, l’estampe de paysage. L’engouement est immédiat. Les paysages, qui servaient jusqu’alors de cadre ou de décor en arrière-plan, sont désormais traités pour eux-mêmes comme des sujets à part entière. Répondant aux aspirations de la société japonaise de l’époque, où le sentiment de la nature est très fort, où les voyages et les pèlerinages à travers l’archipel se multiplient, les éditeurs commandent aux artistes des séries d’estampes sur les sites pittoresques ou spectaculaires, les lieux célèbres évoqués dans la littérature et les vues fameuses des villes et des provinces du Japon (meishoe). Partant tous deux d’une observation réaliste, Hokusai et Hiroshige puisent dans la nature, la faune et la flore, les instantanés d’une beauté éphémère et fragile, et restituent avec une sensibilité poétique, mystique ou mélancolique les impressions fugitives et changeantes d’un « monde flottant et mouvant ». Utilisant un nouveau pigment, le bleu de Prusse, ils représentent la montagne et la mer, constantes du paysage japonais, sous des lumières et des atmosphères variées. On pourra découvrir leurs œuvres dans la Crypte qui leur est complètement dédiée.

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Estampes japonaises Images d’un monde éphémère

Dates 18 novembre 2008 - 15 février 2009

Lieu Bibliothèque nationale de France – site Richelieu

Galerie Mazarine et Crypte - 58 rue de Richelieu – Paris IIe

Métro : Bourse, Palais Royal, Pyramides - Bus : 20,21,27,85,74,39

Horaires Du mardi au samedi, de 10h à 19h, le dimanche, de 12h à 19h Fermeture lundi et jours fériés Entrée 7€ - TR : 5€

Commissariat Gisèle Lambert, conservateur en chef honoraire, BnF Jocelyn Bouquillard, conservateur au département des Estampes et de la photographie, BnF

Coordination Annie Gay-Waver, service des expositions, BnF

Scénographie Graphisme

Pylone architectes Les inventeurs du réel

Publications

Estampes japonaises Images d’un monde éphémère Coédition BnF/ Seuil Catalogue de l’exposition sous la direction de Gisèle Lambert Broché, 26,5 x 23,5 cm 340 pages et 200 illustrations couleurs 39€

Estampes japonaises. Mémoires & merveilles de la BnF Coédition BnF/France Loisirs Gisèle Lambert 21 x 27 cm, relié sous jaquette 176 pages et 125 illustrations couleurs 18,95€

Manga - Hokusai Jocelyn Bouquillard et Christophe Marquet coédition BnF/Seuil 160 pages - 57 illustrations couleurs - 15,5 x 24 cm 25€

Les Trente-six vues du mont Fuji Jocelyn Bouquillard coédition BnF/Seuil 120 pages - 47 illustrations couleurs - 27 x 21 cm 29€

Visites guidées Visite individuelle : informations et réservation obligatoire au 01 53 79 40 43 Pour les groupes : informations et réservation obligatoire même pour les visites libres au 01 53 79 49 49

Renseignements 01 53 79 59 59, bnf.fr

Contacts presse

Claudine Hermabessière, chef du service de presse Tel : 01 53 79 41 18 - [email protected] Jean-Noël Orengo, chargé de communication Tel : 01 53 79 41 14 Fax : 01 53 79 47 80 - [email protected]

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Présentation Une citation dans un ouvrage d’Asai Ryôi, Contes du monde flottant, vers 1665, livre en partie, l’origine de l’appellation de l’estampe japonaise, ukiyo-e, apparue à la fin du XVIIe siècle, durant l’époque d’Edo (1603-1868). : «…vivre uniquement le moment présent, se livrer tout entier à la contemplation de la lune, de la neige, de la fleur de cerisier et de la feuille d’érable…, ne pas se laisser abattre par la pauvreté et ne pas la laisser transparaître sur son visage, mais dériver comme une calebasse sur la rivière, c’est ce qui s’appelle ukiyo ». Le suffixe « e », image, associé au concept ukiyo dans des ouvrages au début des années 1680, composa le terme ukiyo-e qui signifie littéralement image d’un monde flottant (uki, flottant, yo,monde). Le caractère uki, imprégné de connotations bouddhiques, évoquait cependant la tristesse du monde terrestre, misérable, celui des apparences, opposé au monde sacré et immuable. Par homophonie, il évoquait aussi un monde de plaisirs. Or, le monde du temps qui passe, le monde contemporain, celui des plaisirs de la société galante et libertine de l’époque d’Edo (1603-1868) et de sa culture ludique, fut le thème essentiel de cet art de l’estampe, qui connut son apogée au XVIIIe et dans la première moitié du XIXe siècle. Le contexte Vers la fin du XVIIe siècle, lorsque l’estampe japonaise apparaît, Tôkyô s’appelle encore Edo. La naissance de l’ukiyo-e et son évolution surprenante s’expliquent par un contexte particulier, le bouleversement politique, économique, social et culturel du pays. Après une longue période de luttes de clans rivaux et d’instabilité politique, le shogun Tokugawa Ieyasu s’installa à Edo et instaura un gouvernement militaire. L’empereur qui ne conservait qu’un rôle de prestige, résidait à Kyôtô. Durant deux siècles et demi, le pays s’isola du monde extérieur. Il connut la paix et la prospérité. Une nouvelle classe bourgeoise marchande, de plus en plus aisée, éloignée de la culture et des spectacles de la cour, créa sa propre culture, ses valeurs, ses héros, ses beautés idéales, ses divertissements. A Edo, deux pôles d’attraction, le quartier des théâtres et le quartier de plaisir de Yoshiwara, fournirent alors des modèles à des artistes. L’effervescence qui y régnait, fut le creuset d’un art nouveau, concrétisé principalement par l’estampe gravée sur bois. Cette image multiple, facile à diffuser, servit d’abord de support publicitaire aux spectacles, aux modes, aux produits et accessoires de luxe, aux lieux de plaisir. Mais ces œuvres de commande, réalisées par des créateurs de génie, s’imposèrent bientôt comme un art à part entière. L’art de l’estampe ukiyo-e Ces grands maîtres, non conventionnels, libérés des principes de l’art de cour, créèrent un style nouveau en adaptant leurs œuvres à une technique. Soulignons que les artistes dessinaient et dirigeaient la réalisation de la gravure mais ne gravaient pas eux-mêmes la planche. Ce travail incombait à des artisans. La gravure sur bois privilégie le trait et les aplats. Ce fut donc un art stylisé qui en découla, entraînant une simplification des formes inspirées de l’idéogramme. De même, la ligne ondulante, expressive, incisive, en pleins et déliés, dérivait de la calligraphie. Dans cet art sans ombre, sans perspective occidentale, le rôle des aplats de couleurs est essentiel. Ils structurent l’espace, créent le rythme, accentuent le mouvement. La composition contribue au dynamisme de l’ensemble. Décentrée, fragmentée, asymétrique, jouant de ruptures d’échelle, de plans contrariés, elle bouleverse la conception de l’espace. Cet art d’avant-garde, d’un modernisme étonnant provoqua un engouement inattendu en Occident et se ramifia dans deux courants, l’art nouveau et le japonisme.

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Galerie Mazarine

Parcours de l’exposition L’exposition débute dans la galerie Mazarine consacrée principalement aux thèmes essentiels du XVIIIe siècle et du début du XIXe siècle, et se poursuit dans la Crypte réservée entièrement au paysage, à la faune et à la flore, sujets développés au XIXe siècle par Hokusai et Hiroshige. A la fois thématique et chronologique, le parcours présente un panorama complet de l’art de l’estampe ukiyo-e, depuis sa naissance à la fin du XVIIe siècle, jusqu’au milieu du XIXe siècle, à travers une scénographie s’inspirant des panneaux coulissant des maisons traditionnelles japonaises.

La technique de l’estampe A l’entrée, un aperçu sur la technique de la gravure sur bois, à l’aide de planches gravées d’Utamaro et d’Hiroshige, accompagnées d’outils de graveur et des tirages des planches de trait, témoigne de l’importance du tracé et des aplats dans ce procédé, et de leur incidence sur le style. Sur une planche de bois dur encollée, de cerisier par exemple, taillée dans le sens des fibres, le graveur applique le dessin de l’artiste réalisé au pinceau et à l’encre de Chine, sur un papier transparent. A l’aide d’un couteau, il taille le bois, en dégageant le tracé du dessin et des aplats qui apparaissent en relief, et qui seront imprimés. Il évide les surfaces avec des gouges et des ciseaux. Le dessin original est détruit. Puis l’imprimeur encre les contours et les aplats à l’aide d’une brosse et y appose une feuille qu’il presse sur le bois à l’aide d’un tampon circulaire, le baren.

Les premières gravures sont monochromes, puis coloriées à la main. Dans les années 1740, Masanobu expérimente les impressions en couleurs. L’évolution de la technique connaît son apogée vers 1760, avec les luxueuses gravures en couleurs, nishiki-e ou « estampes de brocart », agrémentées de poudre d’or ou d’argent, de gaufrages, de dégradés, de fonds micacés, marbrés. Ces œuvres nécessitent autant de planches gravées que de couleurs souhaitées. Chaque planche reproduit les fragments d’une même couleur. Le nombre de planches s’élève parfois à une quinzaine. L’impression se fait par superposition des planches encrées, sur une même feuille. Le tirage est variable selon la qualité de l’impression et du papier utilisé. Les couleurs sont à base de pigments d’origine végétale ou minérale. Le bleu de Prusse utilisé pour les paysages, sera importé d’Europe au XIXe siècle. Les variétés de papier le plus souvent utilisées sont le masa et le hôsho de qualité supérieure. Les composants principaux sont la mœlle de mûrier, kôsô, et la colle végétale. La variété des formats est une caractéristique de l’estampe japonaise, notamment les formats verticaux, ô-ôban et hashira-e, réminiscences du kakemono, et les formats horizontaux, triptyques et polyptyques, réminiscences des paravents et makimono.

Kitagawa Utamaro 1753 - 1806 Bois de trait d’un portrait de jeune femme en plan rapproché Cerisier - 39 x 25,7 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Le théâtre et le sumô Dans cet espace se côtoient les différentes écoles de dessinateurs d’estampes d’acteurs.

Le théâtre suivi par le roman de mœurs et la poésie (waka, kyôka, haikai) devint l’expression privilégiée de la culture profane citadine. Trois formes de théâtre existaient : le nô - exaltant le spirituel et le sacré - le bunraku - théâtre de marionnette - et le kabuki, théâtre « profane », parlé, dansé et chanté, créé au début du XVIIe siècle qui connut son âge d’or en 1740. Les acteurs de kabuki furent l’un des principaux thèmes de l’estampe. Ce spectacle anticonformiste proposait une action dramatique intense, une sensualité modérée. Au masque du théâtre nô, il opposa le visage découvert et maquillé, selon les sentiments et les passions du héros. Les mouvements lents, décomposés, les déplacements effectués à un rythme étudié, les expressions figées se doublant d’un strabisme, d’une torsion de la tête captivaient le public. Le drame était soutenu par des instruments de musique, la flûte, le shamisen, guitare à trois cordes au son mélancolique, les instruments de percussion suggérant les intempéries. La machinerie était très perfectionnée. Les intrigues s’inspiraient de récits historiques (exploits des guerriers et de l’aristocratie de l’époque antérieure à Edo) ou de faits divers contemporains (meurtre sensationnel, adultère, suicide d’amants illégitimes). La tradition littéraire se mêla à une inspiration populaire. La violence, le crime et le suicide, constantes de ce théâtre, se justifiaient par le sentiment de l’honneur. La classe bourgeoise qui avait réclamé d’abord des idoles, s’identifia aux héros proposés par les dramaturges et les écrivains.

Utagawa Toyokuni 1769-1825Bandô Mitsugorô II dans le rôle d’un rônin Sous ce nom de 1785-1799 - 38,7 x 26,2 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Utagawa Toyokuni L’acteur Sawamura Sôjûrô III dans le rôle de Gengobei - 1798 - 35,3 x 24 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Ippitsusai Bunchô actif 1756 - 1790 L’acteur Segawa Kikunojô II interprétant la danse Shakkyô - Vers 1769 - 29,3 x 13,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Okumura Masanobu - 1686 - 1764 Jeune homme tenant un parapluie fermé Années 1740 ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Pour préserver la morale, la scène fut interdite aux femmes ; tous les rôles furent alors joués par des acteurs hommes de grand talent, les onnagata. Les propriétaires de salle commandaient des affiches, des programmes, des estampes pour faire connaître les spectacles et les amateurs regroupés souvent en clubs privés, étaient désireux de contempler chez eux le portrait de leur acteur favori ou la scène la plus spectaculaire de la pièce. Les principales écoles de dessinateurs de portraits d’acteurs portent le nom de leur fondateur et de véritables lignées d’artistes se distinguent. Les premiers portraits d’acteurs apparaissent vers la fin du XVIIe

siècle. L’école Torii dans la première moitié du XVIIIe siècle, vise le grand public. Elle se caractérise le plus souvent par la représentation du personnage d’un rôle, isolé dans un espace vide, lors d’une scène impressionnante du drame ou dans une pose spectaculaire. Puis l’école Katsukawa fondée par Shunshô, étudie la personnalité et le jeu théâtral de l’acteur avec subtilité. Apparaissent alors de véritables portraits d’acteurs, notamment ceux très subtils, compte tenu de l’ambiguïté de leur personnalité, des plus célèbres onnagata de l’époque. Les estampes polychromes d’une grande qualité plaisent à une clientèle fortunée, souvent regroupée en club autour d’un acteur.

Katsugawa Shunshô - 1726 - 1792 L’acteur Segawa Kikunjô III Vers 1781 - 29,2 x 12,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Sharaku, un génie, impose le portrait psychologique, en gros plan, caractérisé par son étrangeté. Enfin l’école Utagawa, que Toyokuni illustre avec ampleur, privilégie l’intensité de l’expression, la pose outrée, la gestuelle, les portraits en plan rapproché. Les estampes contribuèrent largement à la connaissance du kabuki en Occident. Ce théâtre inspira des metteurs en scène, des chorégraphes occidentaux et autres au XXe

siècle tels Maurice Béjart, Peter Brook, Ariane Mnouchkine. Quelques rarissimes ouvrages d’époque (encyclopédie du théâtre, programme, drame illustré) attestent de l’intérêt que suscitait le kabuki. Une évocation rapide de la production d’estampes de sumô (arbitre, lutteurs avant, pendant et après le tournoi) réalisées par de grands maîtres, tels Shunshô à l’origine du genre, Shunei et Kunisada, clôt l’espace des spectacles. Les estampes de sumôtori, images publicitaires mais aussi souvenir d’un lutteur favori, d’un instant d’émotions, de sensations fortes, connurent une grande vogue, d’autant plus que dans le dernier tiers du XVIIIe siècle, ce sport vécut son âge d’or. Les lutteurs très célèbres étaient même sponsorisés par les daimyô, les seigneurs. Les estampes érotiques s’inspirèrent parfois des prises de sumô.

Katsukawa Shunei - Vers 1762 - 1819 Les lutteurs de sumô, kaminari à droite et Narutaki à gauche 32,7 x 23,7 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Tôshûsai Sharaku - actif (1794-1795)Le présentateur de Théâtre Miyako-za 1794 - 36,9 x 24,2 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Kitagawa Utamaro - 1753-1806 Fidélité des sentiments comparés aux sources de l’amour Vers 1798-1799 - 37,5 x 25 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Les beautés féminines et la vie quotidienne L’espace est introduit par quelques ouvrages de Harunobu, Utamaro, Shigemasa et Shunshô, qui illustrent les occupations variées des courtisanes au rythme des quatre saisons dans les maisons vertes (musique, poésie, jeu de cartes…).

A Edo, le quartier de plaisir de Yoshiwara, quartier réservé entouré d’une enceinte, accueillait un public essentiellement masculin dans ses maisons de plaisirs appelées « maisons vertes », ses maisons de thé, ses restaurants, ses magasins de soieries, de produits de luxe, ses boutiques de saké, ses jardins, ses établissements de bains…L’estampe fut le support médiatique de toute cette activité. Des hommes d’affaire, des samouraïs, des dandys, une jeunesse dorée côtoyaient des musiciens, des poètes, des écrivains, des peintres, d’ailleurs considérés comme des marginaux. Dans ce quartier, les distinctions sociales s’effaçaient. Des guides du Yoshiwara destinés aux clients furent publiés, décrivant les qualités des courtisanes et distillant aux clients un code raffiné de l’amour, véritable esthétique du plaisir. Les courtisanes recevaient une éducation raffinée (musique, danse, poésie, cérémonie du thé, culture littéraire, peinture, calligraphie). Les bourgeois aspiraient au charme et à la culture de l’aristocratie. Les hôtesses des maisons de thé, les geishas, avaient un rôle différent. Jeunes filles tout autant cultivées, honorables, distinguées, elles pouvaient être retenue pour tenir compagnie à des artistes dans leurs ateliers.

Suzuki HarunobuVers 1725 - 1770 Beauté sautant dans le vide depuis le balcon du temple Kiyomizu - 1765 - 26 x 18,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Kitagawa Utamaro Les dix types d’études physiognomoniques de femmes. Femme inconstante vers 1792 - 38,4 x 25,4 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Suzuki HarunobuCrabe plein d’espiéglerie Vers 1765 - 1770 - 27,5 x 21,3 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Suzuki HarunobuL’averse 1765 - 28 x 20,7 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Torii Kiyonaga1752 - 1815 Les douze mois du quartier sud. Douzième mois 1783 - 24,7 x 17,6 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Les romans et les pièces de théâtre prirent parfois pour héroïne des courtisanes ou des hôtesses. Toutes ces beautés renommées, lançaient les modes. Les estampes révèlent l’importance du vêtement, son rôle dans l’expression du mouvement, du rythme, des formes, du volume. La chronologie, l’évolution de la technique, la diversité des formats, les diptyques, triptyques et polyptyques très nombreux font de cet ensemble le sommet de l’exposition. Les variations de l’idéal féminin au cours du siècle sont évidentes.

La personnalité d’Utamaro, figure centrale de l’ukiyo-e, qui mène cet art à son apogée, est mise en valeur par un nombre d’œuvres important de grande qualité. Les premières gravures représentant les beautés féminines diffusées à la fin du XVIIe siècle, se caractérisent par la monochromie et un style issu de la calligraphie. Les femmes dessinées par Moronobu, considéré comme l’une des personnalités fondatrices de l’ukiyo-e, évoquent parfois encore les dames de cour de l’époque médiévale, poupées à la longue chevelure soutenues par des soieries. L’atelier Kaigetsudô, « atelier languissant pour la lune », diffuse les premières figures de courtisanes en estampe isolée. Le type féminin est alors celui d’une beauté altière, hautaine, à la silhouette cambrée se déplaçant sur un fond neutre.

Kitagawa Utamaro - 1753 1806 Douze activités manuelles féminines La coiffeuse. Vers 1798-99 37,8 x 25,1cm ©BnF, département des Estampes et de la photographie

Kitagawa UtamaroTakashima Ohisa 1793 - 37,5 x 24,5 cm ©BnF, département des Estampes et de la photographie

Kitagawa UtamaroSix poèmes élégamment illustrés Okita de la maison Naniwaya 39 x 25,7cm ©BnF, département des Estampes et de la photographie

Kitagawa UtamaroMère allaitant son enfant 38,5 x 25,5 cm ©BnF, département des Estampes et de la photographie

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Une nouvelle esthétique de la femme apparaît avec l’ingénue gracile de Harunobu, suivie de la femme épanouie, sûre d’elle, de Koryûsai, et de l’élégante souvent longiligne de Kiyonaga, qui se plaît à suggérer des impressions, à rendre l’atmosphère du moment. Enfin, Utamaro crée une beauté universelle, épouse, mère de famille, geisha, amante, courtisane, prostituée. Tous les types de femmes défilent, de l’élégante précieuse, mystérieuse, séductrice, à la femme active ou à la femme sauvage de légende. Il inaugure le portrait individuel en gros plan, recherchant la psychologie de ses modèles. Quant à Eishi et Eiri, ils s’illustrent par l’extrême raffinement de leurs modèles, des beautés féminines d’une distinction toute aristocratique, dans une atmosphère feutrée.

Kitagawa Utamaro - Yamauba et Kintarô Kitagawa Utamaro - Coup d’œil furtif Rekisentei Eiri - Actif entre 1789-1801 Vers 1801-1804 - 37,5 x 25 cm Vers 1799-1800 - 38,2 x 25,4 cm Jeune fille préparant un jeu de Nouvel an ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie 1799 - 36,1 x 24,2 cm

©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Exposition / Estampes japonaises. Images d’un monde éphémère 13

Estampe parodique, poèmes et surimono La culture ludique des quartiers de plaisirs se refléta également dans les estampes parodiques : symboles, blasons, rébus, jeux d’esprit, poèmes (haikai, kyôka), allusion, métaphore, homonymie. Ces subtilités apparues dès le début de l’estampe sont parfois difficiles à interpréter, notamment pour les occidentaux. Des cercles privés d’esthètes, de lettrés, commanditaient des images au sens caché, qu’il fallait décrypter. Des œuvres classiques, le Dit du Genji, roman composé par une dame de la cour, Murazaki, au début du XIe siècle, les Contes d’Ise, premier roman d’amour japonais, du IXe siècle, relatant les aventures amoureuses du courtisan Ariwara no Narihira, les poèmes et les épisodes de la vie d’Ono no Komachi, poétesse du IXe siècle, à la beauté légendaire, des thèmes historiques, des légendes, des récits du répertoire chinois, étaient transposés dans le monde contemporain. Les personnages actualisés, travestis, empruntaient les traits de courtisanes, d’acteurs célèbres ou évoluaient dans un lieu connu, célébré dans la littérature. Quelques éléments (fleur, éventail, symbole, poème) livraient aux amateurs éclairés les sources de la scène représentée.

Suzuki Harunobu - vers 1725-1770 Kanzan et Jittoku Vers 1765 - 1770 35,6 x 21 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Isoda Koryûsai Actif entre 1766-1788 Parodie de Genji. La belle du soir Années 1770 - 26,2 x 19,7 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Une autre expression de ces jeux d’esprit se manifesta dans les surimono, apparus en 1765, dont on distingue trois catégories : les cartes de circonstances ou cartes événementielles (jour de l’an, anniversaire, commémoration) ; les images accompagnées d’un poème, kyôka (poème burlesque) ou haikai, foisonnant de jeux de mots, d’allusions, de messages à décrypter ; les images de calendriers (egoyomi) qui dissimulent les chiffres des mois longs et des mois courts dans les motifs décoratifs des kimonos, chiffres indispensables pour les calculs calendaires dans le calendrier lunaire. Diffusées en très petit nombre auprès de membres de clubs privés, leurs commanditaires, lors de réunion, ces estampes luxueuses occupèrent une place prépondérante dans l’estampe jusqu’à leur disparition en 1840. Les surimono, cartes événementielles, où la nature morte apparut, sont l’une des caractéristiques de ces jeux d’esprit. Un album, trésor du département des Estampes et de la photographie, en contient 439 de 30 artistes célèbres, avec les textes accompagnant l’image. Il regroupe une partie de la collection d’un lettré du XVIIIe siècle, Kizan. De la reliure en accordéon, quelques pages ont été dépliées. Trois albums, chef-d’œuvres d’Utamaro, traitant d’oiseaux, d’insectes, de coquillages accompagnés de poèmes kyôka à double sens, agrémentent cette section.

Album de Surimono - Volume III - L’HommeImpression polychrome Vers 1796 - 1812 - 40,5 - 29,8 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Suzuki Harunobu - vers 1725-1770 Belle chevauchant un phénix 19,8 x 25,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Les estampes érotiques Dimension essentielle de l’ukiyo-e depuis les années 1670, les diverses appellations de l’estampe érotique témoignent de l’attrait qu’elles suscitaient : « image d’oreiller », « image galante », « image pour rire », « image secrète », « image de printemps » ou shunga…C’est ce dernier terme qui fut retenu par les occidentaux.

Expression populaire des rouleaux et des peintures érotiques destinés à l’aristocratie depuis le Moyen Âge, elles ajoutent aux œuvres des artistes une dimension fondamentale par la singularité du traitement de ce thème, leur nombre et leur qualité. La plupart des grands maîtres s’adonnèrent à la réalisation de ce genre. Elles représenteraient jusqu’à un tiers de la production de certains artistes. Souvent imprégnées d’humour, ces estampes distrayaient par leur fougue, mais dispensaient aussi une éducation raffinée du plaisir. Les dessinateurs y développèrent l’étude du nu sous les aspects les plus divers, et les figures étranges qu’il engendre, seul ou mêlé, avec une inventivité frôlant souvent la fiction. Cette production, bien que clandestine, bénéficiait d’une certaine complaisance du gouvernement. Une trentaine d’estampes et trois livres illustrés clôturent l’exposition dans la galerie Mazarine. Elles retracent l’évolution stylistique du genre avec Masanobu, Harunobu, Utamaro entre autres. Parmi celles-ci, deux séries de douze estampes de format hashira-e horizontal, ensemble unique de Shûsui et de Kiyonaga, chefs-d’œuvre de la gravure érotiques sont exposées pour la première fois. Extraits de douze gravures sans titre

Sans signature à l’époque Shimokôbe Shûsui Vers 1771 - environ 71-75 x 52 -52,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Suzuki HarunobuLa femme jalouse à la boule de neige Vers 1768 - 20,9 x 28,4 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Katsukawa ShunshôL’album érotique du coucou comique 1788 - 23,4 x 36,4 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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La Crypte

L’avènement de l’estampe de paysage au XIXe siècle Alors qu’au tournant du siècle, l’estampe polychrome ukiyo-e a atteint son apogée, tout entière consacrée aux quartiers réservés et au théâtre kabuki, monde éphémère des plaisirs chers à la bourgeoisie marchande, elle n’en marque pas moins le pas, la culture d’Edo déclinant peu à peu. Les autorités Tokugawa, qui ont cristallisé un ordre politique et social suranné, se raidissent et exercent sur l’édition une censure de plus en plus sévère. Ces restrictions obligent les artistes à se remettre en question et à se tourner vers des estampes à sujets historiques, héroïques, légendaires ou satiriques. Hokusai (1760-1849) et Hiroshige (1797-1858) fondent quant à eux un genre nouveau, l’estampe de paysage, renouvelant les thèmes traditionnels et le style de l’estampe japonaise. La Crypte leur est entièrement dédiée.

Katsushika Hokusai (1760 - 1849) Hokusai, né en 1760 dans un faubourg campagnard d’Edo, développe des aptitudes précoces pour le dessin. Servi par une extraordinaire capacité de travail et une carrière prolifique, longue de soixante-dix ans, il pratique tous les genres et laisse des milliers d’œuvres remarquables tant par leur qualité esthétique que par leur variété stylistique, mais c’est dans ses grandes séries de paysages qu’il donne toute la mesure de son génie. Tout au long de sa vie, mouvementée et difficile, il déménage constamment et change perpétuellement de nom et de signature - pas moins de cent vingt pseudonymes -, selon les étapes de son travail et l’évolution de son style.

Parmi les œuvres exposées d’Hokusai, on trouve quelques unes des Trente-six vues du mont Fuji, série emblématique de l’estampe de paysage, entreprise vers 1830, terminée trois ans après et qui marque l’apogée de l’art d’Hokusai. Cette suite, luxueusement imprimée, en largeur et en grand format, utilisant abondamment le bleu de Prusse, constitue un événement éditorial nouveau : le mont Fuji et les paysages environnants forment le sujet principal de chacune des quarante-six planches qu’elle comporte. Aux trente-six estampes initialement prévues, sont venues s’ajouter, dans une seconde étape, en raison du succès remporté par la série, dix planches supplémentaires.

3e vue du mont FujiL’orage sous le sommet de la montagne Vers 1829-1833 - 24,4 x 36,2 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Dans cette série, Hokusai réalise une synthèse entre son acquis oriental et l’assimilation des influences occidentales. Certaines vues présentent une conception purement japonaise, notamment celles qui donnent une vision frontale du mont Fuji dans sa magnificence, sa sérénité et son dépouillement. Point de vue assez haut, absence de ligne d’horizon, insertion de nuages et de nappes de brouillard, telles étaient les caractéristiques de la perspective japonaise et la méthode classique pour rendre la profondeur. Dans d’autres vues, Hokusai utilise avec habileté les techniques européennes pour rendre l’illusion spatiale ;il y introduit de manière assez naturelle les principes de la perspective occidentale, incorporant des plans successifs pour donner une impression de profondeur de champ.

Rendant un hommage vibrant à la montagne sacrée, Hokusai la représente sous une infinie variété de points de vue, de près comme de loin, avec un sens génial des cadrages ; il la saisit dans toutes les situations possibles, dans des conditions climatiques différentes, sous des lumières changeantes, en toutes saisons et par tous les temps : sous la neige ou l’orage, environnée de brumes ou dans un ciel limpide, à l’aube ou au crépuscule, variant ainsi les atmosphères et les éclairages. Il figure parfois le mont Fuji en gros plan, vierge de toute présence humaine, dressant majestueusement dans le ciel sa cime blanchie par les neiges éternelles ; mais plus souvent il le représente à l’horizon, laissant se dérouler au premier plan des scènes de la vie quotidienne. Il prête d’ailleurs une attention particulière aux gens du peuple, artisans et paysans. Dans une vision cosmique, conjuguant shintoïsme et humanisme, il dépeint l’homme dans ses activités ordinaires, en harmonie avec la nature. C’est ainsi qu’il réussit à atteindre l’universel, sans doute la clef pour expliquer la profonde fascination que cette œuvre exerce aujourd’hui encore.

15e vue du mont Fuji Kajikazawa dans la province de Kai Vers 1829-1833 - 25,5 x 37,4 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

14e vue du mont Fuji Les champs du hameau de Umezawa dans la province de Sagami Vers 1829-1833 - 25,5 x 37,4 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

32e vue du mont Fuji - Le village de Sekiya au bord du fleuve SumidaVers 1829-1833 - 24,8 x 37 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Hokusaï est également l’auteur de Manga, une encyclopédie illustrée du Japon, répertoire inépuisable de modèles sur tous les sujets pour les artistes. C’est à juste titre que l’on considère Hokusai comme l’un des plus grands artistes japonais, autant par la richesse et l’originalité de son œuvre que par la force et la singularité de son génie. Saisissant quelques-uns des traits les plus saillants de la spiritualité et de l’âme japonaise, il laisse une production monumentale, d’une infinie variété. Bouddhiste et shintoïste fervent, il cherche tout au long de sa vie à pénétrer les mystères de la nature et de la création. Suivant une démarche à la fois réaliste et spirituelle, observateur minutieux du monde qui l’entoure, il s’émancipe progressivement de la tradition pour suivre sa voie. Son œuvre apparaît comme un long cheminement vers la connaissance.

Feux d’artifices dans la fraîcheur du soir au pont de Ryôgoku à Edo - Vers 1830 - 23 x 35 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Faucon et prunier en fleurs Vers 1832-1833 50 x 22 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

La Manga, Eléphant avec un groupe d’aveugles 1812 - 1878 - 22,7 x 15,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Volubilis et rainette Vers 1830-1834 - 26,8 x 38,2 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Andô Hiroshige (1797 - 1858)

Issu d’une famille de samouraïs, Andô Hiroshige s’oriente très jeune vers le dessin, entre à l’âge de quatorze ans dans l’atelier de Toyohiro Utagawa (1773-1828), et joint dès 1812 le caractère hiro (du nom du maître) à son nom d’artiste. Vers les années 1830, après une période de formation durant laquelle il pratique une estampe proche de ses ainés autour du thème des courtisanes, des acteurs et des guerriers, il se tourne vers le paysage. C’est au retour d’une mission officielle, où il accompagne en 1832 le cortège du shôgun sur la route du Tôkaidô, qu’il réalise sa fameuse série des Cinquante-trois relais du Tôkaidô (1833-1834), qui remporte un succès considérable et fait sa renommée ; il consacre alors à cette route d’autres séries, de formats différents. Sa production énorme, comprenant plus de huit mille œuvres, le conduit à parcourir sans cesse le Japon, qu’il transfigure dans son art, où il conjugue réalisme et poésie. Parmi ses célèbres suites d’estampes, on peut citer les Soixante-neuf relais du Kisôkaidô (1839), les Vues des sites célèbres des soixante et quelques provinces du Japon (1853-1856), les Cent Vues d’Edo (1856-1858), ainsi que des gravures de poissons, de fleurs et d’oiseaux (kachô-ga).

La série des Cinquante-trois relais du Tôkaidô est publiée en 1833-1834 par l’éditeur Takenouchi Magohachi de la maison Hoeidô. Elle immortalise les étapes de cette route très ancienne et très fréquentée, reliant Edo, la capitale shôgunale, siège du gouvernement, à Kyôto, la capitale impériale.

Les 53 relais du Tôkaidô10e relais : Hakone. Vue du lac vers 1835 - 25 x 38 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Les 53 relais du Tôkaidô11e relais : Mishima. La brume matinale vers 1835 - 25 x 38 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Hiroshige est le premier à réaliser une grande série de cinquante-cinq planches représentant l’ensemble des relais, avec les villes de départ et d’arrivée (Edo et Kyôto), l’accroissement du public et l’abaissement du coût de l’édition lui permettant ce tour de force. Il utilise pour cela les nombreux croquis et esquisses qu’il a exécutés en 1832, au cours du convoi conduisant à Kyôto les chevaux offerts par le shôgun à l’empereur. Séduit par la beauté des sites, il représente l’animation trépidante de cette route et de ses différents relais de poste, tout en dépeignant les superbes panoramas qu’elle offre. Bien qu’il ait effectué le voyage vers le mois de septembre, il se fie à son imagination et à son sens poétique pour figurer ses vues aux différentes saisons de l’année et à divers moments de la journée. La série connaît un succès sans précédent et des tirages très importants, avec des dégradés et des coloris très soignés pour les premiers tirages.

Lune d’automne à SebaVers 1839 - 22,5x32,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Les 53 relais du Tôkaidô48e relais : Sakanoshita. Le sommet d’où l’on jette son pinceau vers 1835 - 25 x 38 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

LangousteVers 1832 - 26 x 37 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Les 53 relais du Tôkaidô 39e relais : Chiryû. Foire aux chevaux vers 1835 - 25 x 38 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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L’art d’Hiroshige se caractérise par son approche poétique de la nature. Privilégiant les effets d’atmosphère, les phénomènes climatiques, la lumière, il suggère avec lyrisme la saison, figure avec un art consommé les intempéries – pluie de printemps, orage, vent, neige, brouillard… – ou encore les moments de la journée : aube dans la brume, lever de soleil, crépuscule du soir, clair de lune, obscurité de la nuit. A travers les caprices du temps, la floraison des cerisiers ou la chute soudaine des fleurs, il évoque avec nostalgie la brièveté de la vie et les plaisirs fugitifs. Attentif aux manifestations de la permanence et de l’éphémère, observateur enthousiaste et parfois mélancolique de la nature, sensible à sa beauté, à sa fragilité et à ses variations, il cherche à en saisir les impressions instantanées et changeantes, précurseur en ce sens des impressionnistes sur lesquels il exercera une influence très nette. Ses estampes sont une merveille de réalisme poétique : le maître parvient à représenter un site réel de façon identifiable, tout en le baignant de cette aura poétique et mystérieuse inhérente à la nature.

Dans les dernières années de son existence, très productives, Hiroshige réalise plusieurs séries admirables, notamment de grandes suites topographiques, d’une ampleur inégalée. Il publie ainsi, de 1853 à 1856, une suite de soixante-dix planches, les Vues des sites célèbres des soixante et quelques provinces du Japon, et, de 1856 à 1859, un ambitieux recueil de cent dix-neuf planches, les Cent vues célèbres d’Edo, rendant hommage à sa ville natale et couronnant sa carrière. Dans ces deux suites, il utilise de façon systématique le format vertical : cette contrainte l’amène à adopter des compositions originales et variées, avec des vues plongeantes, des perspectives ascendantes, des points de vue multiples, des détails en gros plan, des cadrages audacieux, de subtils dégradés de couleurs… Aussi ces vues exercèrent-elles une forte influence au Japon comme à l’étranger.

Les rizières d’Asakusa et la fête de Torinomachi Tiré de : Cent vues d’Edo,1856-1859 - 33,5 x 22,5 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

Les tourbillons de Naruto à Awa Tiré de : Vues des Soixante et quelques provinces célèbres du Japon 1853-1856 - 32,4 x 21,1 cm ©BnF, dépt des Estampes et de la photographie

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Plans de l’exposition

Galerie Mazarine

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La Crypte

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Publications

Avec des textes de Gisèle Lambert, Jocelyn Bouquillard, Christophe Marquet,professeur à l’Institut national des langues et civilisations orientales de Paris et Keiko Kosugi, spécialiste des collections japonaises à la division orientale du département des Manuscrits de la BnF.

Le catalogue de l’exposition propose une vision d’ensemble de l’estampe japonaise, depuis son apparition, à la fin du XVIIe siècle, jusqu’au milieu du XIXe siècle. Deux cents reproductions d’œuvres d’une qualité exceptionnelle, souvent rarissimes ou uniques, ont été sélectionnées dans le fonds prodigieux du département des Estampes et de la photographie de la BnF. L’estampe japonaise, ou ukiyo-e, révèle l’art de vivre et la nouvelle culture de la société urbaine et marchande de l’ère Edo. Cette bourgeoisie citadine fortunée, exclue de la culture traditionnelle et des divertissements réservés aux seigneurs, créa sa propre culture, ses héros, ses idéaux, ses loisirs et spectacles. Ainsi les estampes sont-elles à la fois le reflet et le support médiatique de l’univers ludique des quartiers de théâtres et de plaisirs. C’est dans ces lieux de divertissements privilégiés, que les grands maîtres choisirent leurs modèles : acteurs du théâtre de kabuki, courtisanes des « maisons vertes », hôtesses des maisons de thé… Interprète d’un rôle ou silhouette anonyme évoluèrent vers le portrait réel, psychologique ; de même l’estampe monochrome sumi-e devint de plus en plus élaborée, s’anima de couleurs subtiles, rehaussées de gaufrage, de poudre d’or et d’argent, de fonds marbrés, micacés offrant à une clientèle exigeante, un raffinement extrême. Le modernisme de ces œuvres, l’audace des compositions, des formats, surprennent : ligne souple, fluide, en arabesque, graphisme inspiré de la calligraphie, synthèse de la forme, aplats de couleurs, asymétrie des constructions souvent fragmentées….. A travers le style transparaît ainsi la vision hédoniste de cette société, son mode de vie, ses aspirations, sa culture, jusqu’à ses fantasmes dans les estampes érotiques ou « images de printemps ». Les auteurs de ce catalogue apportent leur concours à la recherche en se penchant sur les provenances des œuvres, et sur les diverses inscriptions dont la calligraphie ornementale prolonge le tracé du dessin, révélant un peu plus la créativité d’avant-garde des dessinateurs de l’époque d’Edo.

Estampes japonaisesImages d’un monde éphémère

Sous la direction de Gisèle Lambert

26,5 x 23,5 cm 340 pages et 200 illustrations couleurs

39€

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Véritable encyclopédie du Japon par l’image, la Manga de Hokusai représente un ensemble étonnant de plus de huit cents pages, de près de 4 000 motifs réunis en quinze volumes, publiés entre 1814 et 1878. Une sélection d'une soixantaine de planches est ici reproduite, à partir d’un exemplaire de la Manga conservé au département des Estampes et de la photographie de la Bibliothèque nationale de France. Elles donnent un aperçu de la variété extraordinaire de ce recueil de modèles pour les artistes. Manga-Hokusai Coédition BnF/Seuil Jocelyn Bouquillard et Christophe Marquet 15,5 x 24 cm - 160 pages et 57 illustrations couleurs - 25€

La cloche du soir à Dôjôji, la vague au large de Tanagawa, pruniers dans la nuit sans lune, promenade parmi les iris, pêcheuses d’abalones, prélude au désir, la belle Kisegawa chez Matsubaya…, l’art de l’ukiyo-e – image du « monde flottant » – qui s’épanouit dans le Japon des XVIIIe et XIXe siècles, reflète le style de vie et la culture de la nouvelle bourgeoisie aisée des cités urbaines, à l’ère d’Edo (Tokyo), la capitale shogunale. Une esthétique du plaisir qui engendre un art d’un raffinement extrême, que l’on découvre ici à travers une centaine d’œuvres des plus grands maîtres parmi lesquels Harunobu, Hiroshige, Hokusai, Sharaku, Toyokuni, Utamaro… Estampes japonaises. Mémoires & merveilles de la BnF Coédition BnF / France Loisirs Gisèle Lambert 21 X 27 cm - 176 pages et 125 illustrations couleurs - 18,95€

Les planches des Trente-six Vues du mont Fuji reproduites ici sont conservées au département des Estampes et de la photographie de la BnF. Elles proviennent de trois collections datant de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, à la grande époque du japonisme. Reproduisant les meilleurs tirages de ces trois collections, l’ouvrage reconstitue une très belle série complète des vues du mont Fuji. Cette œuvre exceptionnelle de la culture japonaise trouve dans cette édition un appareil de notes et de commentaires à sa mesure.

Les Trente-six vues du mont Fuji - Hokusai Coédition BnF/Seuil Jocelyn Bouquillard 27 x 21 cm - 120 pages et 47 illustrations couleurs - 29€

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Estampes japonaises une exposition virtuelle sur bnf.fr

Conçue en écho à l’exposition qui se déroule sur le site Richelieu de la BnF, l’exposition virtuelle Estampes japonaises. Images d’un monde éphémère, permet de retrouver en ligne les œuvres et les principaux artistes de cet âge d’or de l’art graphique japonais qu’est l’ukiyo-e.

L'exposition et son dossier reprennent les grandes thématiques de l’estampe japonaise : scènes de spectacles, portraits de femmes, parodies et poèmes, paysages. Le site ayant une vocation pédagogique, l'estampe érotique est juste évoquée. Gros plans sur Hokusai et Hiroshige Deux œuvres intégrales sont proposées :

Les Trente-six vues du mont Fuji d’Hokusai au sommet de son art. Les Cinquante-trois relais du Tôkaidô qui font de Hiroshige un des artistes les plus en vogue de son époque. Pour ces deux œuvres, un album permet de feuilleter chacune d’elle dans leurs moindres détails. Visite guidée Pour la première fois, une visite guidée par la commissaire de l'exposition est proposée en téléchargement. Le public retrouvera une numérotation des pièces dans l'exposition correspondant à la succession des commentaires sonores téléchargés sur son MP3. Sur le site, ces commentaires peuvent s'écouter tout en explorant à la loupe les œuvres exposées. Enfin, une histoire de la collection d’estampes japonaises conservée à la BnF, des repères sur les techniques de l'estampe, un regard contemporain du photographe Thierry Girard qui a refait le chemin des cinquante-trois relais du Tôkaidô, complètent ce site riche de plus de trois cents œuvres reproduites en ligne.

expositions.bnf.fr/japonaises/index.htm