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UNIVERSITÉ DE GENÈVE ANNE-CLAUDE GERBER Faculté des sciences Travail de mémoire économiques et sociales Master en démographie Sous la direction du Prof. P. Wanner
L’INTÉGRATION PROFESSIONNELLE DES RÉFUGIÉS EN SUISSE
Situation en 2000
Mai 2008
Echelettes 2, 1004 Lausanne
E-mail : [email protected]
TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION ………………………………………………………………………... 3 1. INTÉGRATION ET PARADIGME DE PARTICIPATION ……………………….... 4
1. 1. Différentes formes d’intégration …………………………………………..…. 4
1. 2. Politique d’intégration en Suisse ………………………………………..…… 8
1. 3. Modèles de politique d’intégration suisse et européen …………………... 10
2. INTÉGRATION ET RÉFUGIÉS ……………………………………..…………….. 12
3. INSERTION PROFESSIONNELLE DES RÉFUGIÉS …………………………... 15
4. INSERTION PROFESSIONNELLE DES RÉFUGIÉS EN SUISSE (2000) …… 19
4. 1. Profils démographiques …………………………………………………….... 20
4. 2. Profils socioprofessionnels …………………………………………………… 28
4. 3. Insertion professionnelle ……………………………………………..………. 31
4. 4. Déqualification professionnelle ……………………………………………… 33
5. DISCUSSION ………………………………………………………………………... 51
ANNEXES ……………………………………………………………………………...… 54
BIBLIOGRAPHIE ………………………………………………………………………… 58
INTRODUCTION En Suisse comme en Europe, l’intégration des migrants est au cœur des débats sur
l’immigration. Dans l’accès au marché du travail, les migrants font face à un certain
nombre de discriminations et de difficultés. Elles peuvent être liées notamment à des
problèmes de compréhension de la langue du pays d’accueil, de discrimination
raciale, ou de reconnaissance des qualifications.
Alors que des programmes sont mis en place au niveau européen pour favoriser
l’insertion professionnelle des migrants, voire spécifiquement des réfugiés, nous
nous intéressons dans ce travail, à l’intégration des réfugiés reconnus sur le marché
du travail en Suisse. Nous cherchons en particulier à répertorier les qualifications
apportées par une population amenée à s’intégrer à long terme, et également à
savoir dans quelle mesure ces qualifications sont reconnues, et donc aussi utilisées.
Ces questions se situent dans un contexte où les migrants non européens ont un
moins bon accès au marché du travail, et dans lequel les migrants hautement
qualifiés, principalement en provenance des pays de l’Union Européenne, sont en
augmentation depuis les années 19901.
Avant d’aborder ces questionnements par une approche statistique, nous
développons une réflexion plus large autour de la notion d’intégration des migrants,
en nous référant principalement à la sociologie de l’exil élaborée par C. Bolzman.
Pour ce spécialiste, l’intégration d’individus dans une société passe par leur
participation à la structure tant économique et que sociopolitique de cette société.
Nous questionnons à ce sujet les politiques d’intégration mises en place en Suisse et
en Europe et voyons l’importance d’une activité professionnelle dans le processus
d’intégration.
1 Pecoraro, M. (2005)
1. INTÉGRATION ET PARADIGME DE PARTICIPATION
Le mode d‘incorporation des migrants aux sociétés de résidence résulte de trois
facteurs : 1) les trajectoires socio-économiques des migrants (notamment les
qualifications dont ceux-ci disposent), 2) la situation liée à la présence ou à l’absence
d’une communauté « ethnique » dans la société de résidence et 3) l’accueil qui leur
est réservé par l’Etat et la population résidante. Les Etats ont une influence majeure
sur le processus en question, à travers la définition de politiques migratoires, dont les
deux volets, parfois en contradiction, sont : 1) les politiques d’immigration, centrées
sur les intérêts de l’Etat receveur, et 2) les politiques d’intégration, en principe
d’avantage orientées sur les besoins des migrants2.
Nous référant à la définition de l’intégration du sociologue C. Bolzman, nous
interrogeons la dimension participative des politiques existantes en Suisse.
1. 1. Différentes formes d’intégration
Assimilation
La notion d’assimilation, dernier stade du processus d’acculturation3, désigne
l’incorporation de migrants qui se « fondent » dans la société d’accueil, par un
processus graduel où les différences culturelles (pratiques, modes de vie, valeurs,
normes et comportements) tendent à disparaître. L’assimilation aboutit lorsque le
groupe migrant a véritablement fusionné dans la société d’installation. Dans ce
modèle, le migrant est amené, pour s’intégrer, à renoncer à sa culture d’origine. Il
s’agit d’un processus à sens unique, avec une perte d’identité au passage, et
impliquant une identification forte à la culture d’accueil, ainsi qu’un processus
d’intériorisation de cette culture. Certains auteurs (Gordon, Eisenstadt) cités par
Bolzman (1992) ont travaillé à définir les différents stades du processus
d’assimilation.
On trouve ce modèle d’intégration dans le contexte étasunien du temps où prévalait
une idéologie « anglo-conformiste ». Il y a évolué sous l’influence de l’idéologie du
« melting-pot » qui voyait le contact entre deux groupes aboutir à la production d’une
2 Bolzman, C. et Boucher, M. (2006). 3 Acculturation : acquisition, par des individus déjà socialisés de manières de penser, de sentir et d’agir, partagées par des groupes sociaux dans le cadre d’un contexte social nouveau.
nouvelle culture, plus riche. La notion d’assimilation a encore évolué sous l’influence
de l’idéologie du pluralisme culturel qui attend du migrant qu’il assimile certains
aspects clés du modèle culturel dominant (travail, politique, éducation), tout en
conservant une partie de sa culture d’origine (liée notamment à la vie
communautaire). Dans tous les cas de figure, l’assimilation renvoie
fondamentalement à un processus unidirectionnel.
La notion d’adaptation qui fait partie intégrante du concept d’assimilation renvoie
pour sa part à une assimilation minimale, de type comportemental, des normes en
vigueur dans la société d’accueil : elle implique pour le migrant de percevoir et
d’interpréter les valeurs culturelles nouvelles indépendamment de ses propres
références culturelles, et de les accepter (malgré d’éventuelles contradictions avec
les valeurs de son groupe d’origine), pour être à même d’assurer un fonctionnement
acceptable au sein de la société. A nouveau, cette notion révèle le point de vue de la
société d’accueil, qui considère l’étranger comme étant plus ou moins dysfonctionnel.
Selon Bolzman, il s’agit de l’approche à laquelle on se réfère généralement dans les
études empiriques sur les réfugiés (sans que la notion ne soit nécessairement
définie).
L’assimilation a souvent été vue comme le seul modèle d’intégration possible pour
éviter les inégalités sociales. Elle est également favorisée du fait que l’urbanisation et
l’industrialisation, créant des valeurs universelles, tendraient à éliminer les
particularismes culturels. Pour Bolzman (1992) : « Cette position est intenable du
point de vue empirique : en effet, le processus de modernisation est loin d’avoir
conduit à la disparition des communautés ethniques. » L’auteur reprend ici la position
de Safran (1987) selon laquelle la présence de communautés distinctes n’exclut ni
des relations fonctionnelles qui traversent les groupes ethniques, ni la modernité, ni
la démocratie.
Intégration
Le terme d’intégration a souvent été compris comme synonyme d’assimilation, alors
qu’il ne désigne (dans le cas d’individus) que le processus par lequel un individu
s’incorpore à une collectivité, à un milieu. Dans la discussion sur l’intégration des
migrants dans la société d’installation, Bolzman propose de considérer leur
participation (en tant que membres d’un groupe social) dans la société, sur les plans
économique, social et politique. A notre sens, Bolzman sort ainsi d’une logique qui lie
l’intégration avec le degré d’intensité des liens que les migrants maintiennent ou pas,
ou par période puis plus, avec leur groupe et culture d’origine, laissant cette question
ouverte. Ce que l’auteur considère pour évaluer l’intégration, c’est l’intensité de
l’accès aux différents secteurs de la vie sociale. Dans cette optique, on pourrait dire
qu’une intégration optimale correspondrait à la situation d’une société qui donnerait
aux migrants la possibilité de participer à tous les secteurs de la vie sociale, et dans
laquelle on trouverait effectivement des migrants dans ces différents secteurs.
Dans cette compréhension de l’intégration, la réussite de celle-ci ou son échec
résultent de deux types de facteurs : ceux qui sont propres au pays d’accueil
(politique du pays d’accueil en matière d’intégration, attitude des membres de la
société envers les nouveaux arrivés et image qu’ils s’en font, situation sur le marché
du travail, statut juridique des migrants, présence d’une communauté ethnique, etc.),
et les facteurs propres aux migrants (particularités culturelles, niveau d’instruction,
connaissances linguistiques, âge, profession, etc.). Ainsi, des acteurs sociaux
peuvent connaître une forte acculturation à une société donnée sans pour autant y
être intégrés et inversement. De même l’intégration peut être partielle, exister dans
un domaine, et pas dans d’autres. Il ne s’agit pas d’un processus linéaire. Son
évolution peut être plus ou moins conflictuelle et discontinue, en proie à une
multitude de facteurs, dont les politiques mises en œuvre par les autorités du pays
de résidence. « Une politique qui favorise l’intégration progressive dans les différents
domaines de la structure sociale (y compris sur le plan politique) est généralement
bien acceptée par tous les types d’exilés, surtout si elle n’est pas assimilationniste
sur le plan culturel. » (Bolzman, 1992)
Bolzman met en avant le fait que les migrants assument collectivement et
individuellement leur double condition d’exilés pour la société d’origine et d’immigrés
(de différents types) pour la société de résidence. Les recherches menées dans une
optique transnationaliste ont commencé à démontrer l’importance de l’appartenance
plurielle des migrants, non seulement en tant que membres d’une société d’accueil et
d’une société d’origine, mais également en tant que membres de divers réseaux
sociaux transnationaux (politiques, économiques, culturels), se développant
actuellement avec l’intensification des migrations internationales. A cet égard, on
peut penser que l’intégration au sein de la société de résidence, traditionnellement
vue comme nécessaire, en sera transformée. Elle ne représentera éventuellement
plus qu’une des facettes possibles de l’intégration plus large des migrants, qui
pourront choisir de participer à d’autres espaces sociaux, au sein desquels ils
pourront éventuellement jouir d’une plus grande reconnaissance. On peut penser
que la nécessité qui accompagne encore actuellement l’intégration, pourrait se faire
moins pressante à l’avenir, pour les migrants eux-mêmes. En effet, leur
appartenance à des réseaux sociaux indépendamment de leur lieu de résidence,
pourrait favoriser une plus grande mobilité, sans installation permanente, des séjours
plus courts, et donc un moindre besoin de s’intégrer à la société dans laquelle ils
résident. A l’époque de la globalisation et de la migration circulaire, l’expérience de
migration ne relie plus simplement deux extrémités d’un processus linéaire, à savoir
le déracinement du pays d’origine et l’installation dans un cadre nouveau. A moyen
et long terme, on peut supposer que les attentes des sociétés d’accueil en ce qui
concerne l’intégration des migrants devront également être adaptées aux nouvelles
réalités des migrations internationales. L’intégration renverra d’autant à la capacité
des acteurs impliqués dans une société donnée, à vivre une diversité croissante
dans la composante de ses membres.
Pour Hugo (2005) qui adopte une approche globale des migrations, les systèmes
législatifs devraient davantage s’adapter aux tendances migratoires pour les faciliter.
On se situe ici dans la promotion de la mobilité. Au niveau du pays d’accueil, l’auteur
voit sept éléments indispensables au processus d’intégration :
1. Le niveau national des politiques et programme d’intégration, opérationnalisé
par les institutions locales.
2. Le processus d’intégration, qui se joue sur la durée, puisqu’il n’est jamais
immédiat.
3. L’importance d’une structure institutionnelle pour faciliter le processus
d’intégration.
4. L’importance d’intégrer d’avantage de données relatives aux migrants dans
les statistiques officielles existantes dans tous les domaines, pour ajuster les
politiques.
5. L’importance pour les gouvernements d’impliquer tous les acteurs concernés
dans la définition des politiques d’intégration.
6. L’importance de la langue pour l’intégration.
7. L’importance des attitudes officielles (autorités, médias, etc.) par rapport à
l’immigration, pour une meilleure compréhension des phénomènes de la part
du public, par exemple en ce qui concerne la reconnaissance des apports de
l’immigration.
1. 2. Politique d’intégration en Suisse La Suisse n’a cessé d’être un pays d’immigration depuis la première guerre
mondiale. D’après Wanner cité par Bolzman (2002), la Suisse sans immigration
n’aurait compté en 2001 que 5.2 millions de personnes au lieu des 7.2 millions
qu’elle atteignait cette année-là. En 1960, 87% des étrangers résidant en Suisse
proviennent des pays voisins que sont l’Allemagne, l’Autriche, la France et l’Italie. Au
cours des années 1960 et 1970, le recrutement touche l’Espagne, avant de s’élargir
à la Yougoslavie, à la Turquie et au Portugal dans les années 1980. En ce qui
concerne les réfugiés, leur nombre est en augmentation depuis les années 1980. En
2001, le tableau s’est donc modifié, les représentants des pays voisins ne
représentant plus que 37% des étrangers. Selon l’OFS4, en 2006, les Italiens dont la
deuxième génération a moyennement accédé à la nationalité suisse, représentent
toujours la communauté étrangère la plus nombreuse (17,9 %,). Viennent ensuite les
ressortissants de la Serbie-et-Monténégro (12 %), les Allemands (12 %) et les
Portugais (11,2 %).
La législation relative au séjour des étrangers et à l’asile est en constant
remaniement. La volonté de restreindre l’accès à la Suisse, dans le domaine de
l’asile et en ce qui concerne l’immigration des non-Européens, observée depuis la fin
des années 1980 a provoqué, entre autres effets, une diminution du nombre de
requérants d’asile et un accroissement du nombre de résidents non documentés. La
main-d’œuvre étrangère est divisée en une fraction précaire et une autre stabilisée,
la première servant de « soupape » pour répondre de manière souple aux besoins
de l’économie. Deux nouvelles lois sur le séjour des étrangers et sur l’asile ont été
votées par le peuple en 2006, orientées sur les aspects de contrôle et des coûts.
Elles sont entrées en vigueur en 2008, apportant toute une série de nouvelles
restrictions en matière de droits des étrangers, notamment en défaveur des migrants
4 Office Fédéral de la Statistique.
peu ou pas qualifiés originaires des pays autres que ceux de l’UE et de l’AELE. A
propos de la Suisse, Bolzman (2002) explique que la politique migratoire est
traditionnellement dominée par la politique d’immigration avec, en toile de fond, la
notion d’Überfremdung5 introduite par la Police des étrangers au début du XXe
siècle, et actuellement utilisée dans la loi fédérale sur le séjour des étrangers6. Ainsi
institutionnalisée, cette notion exprime le fait que les étrangers sont perçus comme
une menace pour la stabilité du pays. Différents organes consultatifs, tels la
Commission fédérale des étrangers (CFE), constituée pour moitié d’étrangers et
consultée pour toutes les questions (y compris juridiques) relatives à la présence des
étrangers, dénoncent régulièrement le dangereux climat de méfiance et d'hostilité qui
est créé dans la politique interne, encourageant les tendances xénophobes.
En matière d’intégration, la législation fédérale donne la priorité à trois secteurs : la
langue, la formation et le marché du travail. Des mesures peuvent être prises
également en rapport avec le logement ou les droits politiques. C’est ainsi que
plusieurs communes et cantons7 ont d’ores et déjà accordé le droit de vote aux
ressortissants de nationalités étrangères. La loi prévoit qu’associations et
organismes locaux présentent librement des projets favorables à l’intégration. C’est
la CFE qui opérait jusqu’à aujourd’hui une sélection en vue de la répartition du
financement disponible. Un système qui a occasionné des situations très différentes
entre les régions, les cantons et les villes. Avec la nouvelle loi (2008), la Commission
perd son rôle opérationnel dans la sélection des projets d’intégration pour l’obtention
de financements.
La nouvelle loi sur les étrangers (LEtr) qui est entrée en vigueur le 1.1. 2008, fixe
pour la première fois les principes d‘une politique d’intégration à l’échelle fédérale.
Elle prévoit un dialogue entre tous les acteurs collectifs concernés par l’intégration et
se donne comme objectif « l’égalité des chances entre Suisses et étrangers dans la
société suisse »8. L’acquisition de la langue locale apparaît dorénavant comme
l’unique priorité dans la loi relative à l’intégration. La dimension de réciprocité
disparaît de la définition de l’intégration dans la nouvelle législation. Alors que
5 Terme allemand signifiant « surpopulation étrangère ». 6 LSEE art. 16. 7 Les cantons de Neuchâtel et du Jura accordent le droit de votre aux ressortissants étrangers au niveau cantonal 8 Ordonnance fédérale sur l’intégration des étrangers du 24 octobre 2007.
l’ancienne loi servait à encourager l’intégration dans toute une liste de domaines, la
nouvelle abandonne cet aspect et renforce désormais sa visée contraignante,
permettant aux autorités locales : 1) de rendre les cours de langues ou d’intégration
obligatoires, 2) d’octroyer les permis de résidence (également en ce qui concerne le
regroupement familial) et l’assistance sociale en fonction du degré d’intégration du
requérant tel qu’il est apprécié par ces mêmes autorités (laissant la porte ouverte à
de nouvelles disparités de situations), et 3) de conclure des conventions d’intégration
contraignantes avec les étrangers. L’octroi d’une autorisation de séjour stable sera
conditionné à une intégration réussie, définie par un emploi stable et la maîtrise
d’une langue nationale9. La CFE s’inquiète à ce propos de l’effet discriminant et
arbitraire que de telles conventions pourront avoir, et recommande de les utiliser
comme instruments d’incitation, et non en tant qu’instruments de sanction. Par
ailleurs, un lourd dispositif administratif est mis sur pied pour la gestion de « centres
de compétences en matière d’intégration » (désignant les organismes actuels d’aide
sociale pour les étrangers au niveau local) : définition d’objectifs, critères de qualités,
etc. L’intégration apparaît donc de plus en plus comme définie par les autorités elles-
mêmes. On est loin de la définition qu’en fait le vice-président de la Commission
fédérale des étrangers W. Schmid sur le site de la Commission en proclamant : « Est
intégré quiconque se sent accepté. »10, rappelant par là aussi que l’intégration se
réfère à des réalités personnelles et à des besoins divers.
1. 3. Modèles de politique d’intégration suisse et europé en La Suisse est prise dans les mêmes tendances migratoires que ses pays voisins :
fermeture vis-à-vis des ressortissants non européens, besoin de main-d’œuvre,
vieillissement de la population. Le pays participe à la polarisation qu’on observe dans
la mobilité internationale. Celle-ci, bien que moins sélective que par le passé (la
mobilité concerne de plus en plus de gens de toutes les conditions), voit se multiplier
les obstacles à la migration pour les groupes les plus désavantagés (favorisant la
migration illégale), y compris en ce qui concerne les possibilités d’intégration, alors
que la mobilité des migrants présentant des profils hautement qualifiés du point de
vue professionnel est facilitée. La fermeture vis-à-vis des ressortissants non 9 Bolzman, C. (2002). 10 Schmid, W. (2006). Integriert ist, wer sich akzeptiert fühlt, terra cognita 9/2006. (http://www.terra-cognita.ch/9/schmid.pdf)
européens va de pair avec un développement de la politique d’intégration pour les
migrants acceptés. Dans ce domaine, la politique suisse est proche de celle de son
pays voisin, l’Allemagne, lui-même un exemple de mise en place avancée de la
politique européenne. Les deux pays travaillent activement au remaniement de leurs
politiques respectives, chacun se dotant d’un nouveau cadre législatif au niveau
national.
Le cadre suisse en matière d’intégration s’inspire largement des principes édictés
actuellement par l’Union Européenne, même si la Suisse ne se reconnaît que peu,
ou pas, comme un pays d’immigration, et que l’idée de contrôle ne cesse d’orienter le
modèle suisse. En remplaçant la notion d’intégration par celle d’égalité des chances,
le cadre officiel d’intégration édicté en Suisse implique que les étrangers assimilent
les valeurs et comportements locaux.
Le fait que la loi donne plein pouvoir aux autorités pour juger du degré d’intégration
des migrants, présente également l’intégration comme une affaire de volonté du
migrant. Cette conception est en contradiction avec le processus de réciprocité que
la notion d’intégration est sensée représenter. Avec ses exigences unilatérales
(doublée de pénalisation), l’orientation de la loi est détournée vers un autre but que
celui qu’elle énonce. Le processus est dépourvu de toute possibilité d’implication
libre de la part des migrants. Nous voyons là la plus importante contradiction interne
de ce cadre de lois, et le plus grand frein à une intégration pensée en termes de
participation. Dans le cas de l’Allemagne, les tensions dans l’application de la loi et
les résistances pour aboutir à une complète participation concernent les mêmes
questions qu’en Suisse : participation civique, naturalisation, place dans la société
des minorités religieuses, non reconnaissance des compétences professionnelles,
etc.). La participation des étrangers aux niveaux économique et politique semble
particulièrement difficile à atteindre11.
Comme l’explique Bolzman, les politiques d’intégration délimitent les domaines dans
lesquels l’Etat envisage l’incorporation des migrants comme légitime, de ceux où elle
n’est pas admise. L’évolution des lois et pratiques dans un domaine donné est
fortement liée à la tradition politique, et les contradictions internes semblent
inévitables déjà au niveau de l’établissement même du cadre juridique. Le législateur
11 Leise, E. (2007)
étant soumis à de fortes pressions d’intérêts opposés, il est contraint de définir des
lois empruntes de contradictions difficiles à gérer au niveau de leur application.
2. INTEGRATION ET REFUGIES Lorsque l’Etat d’accueil n’envisage qu’un niveau minimal d’intégration et
d’acculturation, les exilés peuvent s’en accommoder s’ils perçoivent leur séjour
comme provisoire. « Par contre, si un groupe veut, ou doit demeurer définitivement
dans la société d’accueil, cette politique représente une discrimination
insupportable. » Bolzman (2002).
Deux aspects doivent rester en mémoire dans les discussions concernant les
réfugiés statutaires. En premier lieu, certains auteurs dont Malkki (1995) ont mis en
évidence la nécessité de ne pas « enfermer » les personnes ayant reçu l’asile dans
une catégorie à part, et de considérer la diversité de situations les concernant, que
ce soit au niveau des raisons ayant motivé la fuite du pays d’origine, des conditions
dans lesquelles celle-ci s’est déroulée, ou des ressources propres aux individus pour
s’orienter dans le pays d’arrivée. Effectivement, les migrants font face à nombre de
discriminations dans la société d’installation, indépendamment de leur statut de
séjour. Cela est d’autant plus vrai dans des climats de montée de la xénophobie. Il
n’est donc pas inutile, avant de s’intéresser à la situation des réfugiés, de rappeler
que les difficultés d’intégration sont communes, bien qu’à des degrés divers, à toutes
les personnes provenant d’autres pays et issues d’autres contextes culturels.
Deuxièmement, et bien que Bolzman n’identifie qu’une seule dimension spécifique
aux réfugiés (la situation de violence qui a entouré leur départ), nous aimerions
souligner une autre particularité propre aux réfugiés, qui vient complexifier leur
processus d’intégration en se greffant sur les difficultés que rencontrent tous les
migrants. Les réfugiés reconnus reçoivent un permis de séjour à long terme, alors
même qu’ils ont en général quitté leur pays contre leur volonté, en urgence, et donc
parfois sans avoir élaboré de projet de migration. Il n’est pas rare de voir l’espoir d’un
retour, même improbable, continuer de les animer après de nombreuses années de
vie à l’extérieur de leur pays d’origine. En Suisse, le permis de réfugié est celui qui
octroie les droits les plus proches de ceux dont jouissent les nationaux. De plus, on
peut qualifier le statut de réfugié de quasi « définitif », puisque celui-ci est
s’accompagne de l’impossibilité formelle de retourner dans le pays des persécutions.
Par définition, réfugiés statutaires et société d’accueil se voient donc contraints à
envisager un processus mutuel d’intégration, malgré des résistances inévitables de
part et d’autre.12 Mais, à lui seul, le caractère « définitif » du statut octroyé par les
autorités aux réfugiés, justifie de s’intéresser à la politique d’intégration menée
envers ce groupe d’immigrés en particulier.
D’après Bolzman, c’est l’approche en termes d’adaptation qui est dominante dans les
études empiriques actuelles sur les réfugiés, réalisées dans les sociétés
industrialisées. L’adaptation évoque le plus souvent une « réponse positive aux
attentes des institutions de la société d’accueil ». Bien qu’elle concerne évidemment
les domaines du logement, de l’école, de la santé, etc., l’auteur pose l’adaptation
économique à travers l’accès au travail comme le critère central de l’adaptation des
réfugiés. La capacité du réfugié à être financièrement autonome, ainsi que sa
capacité à transférer ses qualifications professionnelles a une grande influence sur
les autres niveaux d’adaptation. Les principaux indicateurs utilisés pour mesurer
l’adaptation économique sont : le taux d’activité, le taux de chômage, le niveau des
revenus, le recours à l’aide sociale et le degré de « transférabilité » des qualifications
d’une société à l’autre – en d’autres termes la déqualification que nous allons
analyser dans la suite de cette étude.
L’auteur relève également les notions d’adaptation sociale (relations formelles et
informelles avec les membres de la société d’accueil), d’adaptation psychosociale
(capacité à surmonter les problèmes de santé psychiques et physiques liés au
déracinement) et d’adaptation culturelle (capacité à comprendre et adopter les
normes et valeurs du pays d’accueil).
La majorité des pays industriels (à notre connaissance sauf le Canada et l’Australie)
ont tous donné la priorité à l’insertion économique des réfugiés, au détriment de leur
intégration culturelle13. Le réfugié est donc poussé à prendre en charge ses besoins
de base le plus rapidement possible, en acceptant des emplois souvent peu
rémunérés et ne demandant que peu de qualifications (linguistiques et
professionnelles). C’est ce qu’on observe en Suisse, où les autorités visent une 12 Définition de l’exil par Bolzman dans sa sociologie de l’exil: « Situation définie par l’obligation de quitter son pays suite à un contexte de violence politique, et de chercher refuge dans un autre Etat pendant une période dont on ne peut prévoir la durée. » Bolzman (1992). 13 Bolzman, C. (2002).
insertion rapide sur le marché du travail, afin que les réfugiés deviennent autonomes
financièrement en un minimum de temps. Il est admis que l’intégration culturelle fait
suite, grâce à la socialisation qu’offre le cadre du travail. Cela paraît pourtant bien
incertain, en particulier dans les contextes professionnels où les employés sont en
majorité des immigrés. Quoi qu’il en soit, cette approche néglige la question de
l’adéquation entre les emplois proposés aux réfugiés et les qualifications de ces
derniers. En cas de déqualification avérée – ce qui devra être vérifié dans cette
étude – cela voudrait suggérer que l’approche suisse ne permettrait pas de prendre
en compte l’apport des réfugiés en termes de qualifications professionnelles et de
savoir-faire, ce qui peut aussi conduire à des difficultés psychosociales que peut
occasionner une non-reconnaissance des qualifications (en termes d’expérience et
de formation professionnelle).
Bolzman identifie plusieurs raisons expliquant l’importance que les agences
gouvernementales et privées qui travaillent à l’insertion des réfugiés, ainsi que les
recherches sur l’intégration des réfugiés, accordent à l’adaptation économique :
• Le travail est une des valeurs centrales des sociétés industrielles, la preuve de
la participation de l’individu à la vie sociale.
• L’autonomie financière qui en découle est assimilée à un type d’autonomie
individuelle plus large, également valorisée dans ce type de sociétés.
• Craignant la réaction de la population, les autorités cherchent à limiter les
coûts d’assistance dévolus aux réfugiés. (Vision à court terme qui ne tient pas
compte des coûts futurs occasionnés par des situations insatisfaisantes pour
les réfugiés, des expériences de travail négatives qui peuvent mener au
chômage, voir à des prises en charges médicales et psychologiques).
• La pénurie de main-d’œuvre non qualifiée sur le marché du travail.
• Il est plus facile d’identifier et de mesurer l’adaptation socio-économiques que
pour d’autres plans de l’adaptation (par ex. sociale).
3. INSERTION PROFESSIONNELLE DES REFUGIES
La situation des réfugiés « dépend largement des possibilités qui leur sont offertes
de transférer leurs connaissances et expériences professionnelles du pays d’origine
au pays d’accueil. » (Bolzman, 1992).
De nombreux demandeurs d’asile possèdent déjà des qualifications reconnues, des
compétences démontrées et une expérience professionnelle parfois notable
(médecine, droit, journalisme, finance, enseignement, etc.) en arrivant dans un pays
d’installation. Pour ces personnes, l’absence d’emploi rémunéré crée une situation
de dépendance, les obligeant à dépendre de l’Etat providence ou de l’aide d’autrui,
et engendre donc des coûts élevés pour le pays d’accueil. Une prédominance de
cette situation risque également de générer dans l’opinion publique des sentiments
de rejet envers les réfugiés et d’augmenter la discrimination à leur égard sur le
marché de l’emploi. Au niveau personnel, la non intégration professionnelle a
également un coût. Un emploi en rapport avec leurs compétences ne facilite pas
simplement leur insertion, mais accroît également leurs motivations et leurs
capacités à s’assumer eux-mêmes. Il paraît donc essentiel et dans l’intérêt de tous
d’identifier les travailleurs qualifiés, dont les qualifications pourraient générer des
bénéfices économiques et sociaux, voire même répondre aux pénuries de
qualifications existantes.
Au niveau européen, la politique communautaire met en lumière l’exclusion
croissante à laquelle sont confrontés les immigrés en général et exhorte les états à
redoubler d’efforts pour promouvoir leur intégration sociale14. On assiste depuis les
années 2000, à une convergence des efforts déployés par les autorités européennes
et par les Etats dans ce domaine. Au niveau communautaire, il existe des
programmes visant spécifiquement l’intégration des réfugiés (par ex. le European
Refugee Fund15). D’autres programmes, visant plus largement à réduire les
inégalités sur le marché du travail (par ex. le European Social Fund ou le programme
EQUAL16), ont également identifié les réfugiés comme une catégorie de personnes
14 Initiative EQUAL : http://ec.europa.eu/employment_social/equal/index_fr.cfm 15 European Refugee Fund: http://ec.europa.eu/justice_home/funding/refugee/funding_refugee_en.htm 16 EQUAL s'inscrit dans le cadre de la stratégie adoptée par l'Union européenne afin de créer des emplois plus nombreux et meilleurs et de faire en sorte que personne ne soit privé de l'accès à ces emplois. Financée par le Fonds social européen, cette initiative permet depuis 2001 d'expérimenter de
discriminées à soutenir en particulier17. Les Etats renforcent leurs politiques
d’intégration et certains développent également des stratégies nationales pour
améliorer l’accès à l’emploi des réfugiés (Grande-Bretagne). Plusieurs études et
dossiers concernant la Grande-Bretagne et la France convergent en effet vers le
même constat d’une perte de compétences conséquente pour la société18. Les
études les plus détaillées disponibles en ligne, concernent la Grande-Bretagne.
Elles identifient les obstacles suivants dans l’accès à l’emploi des réfugiés :
• Interdictions et de restrictions légales d’accès au marché du travail.
• Discriminations à l’embauche en raison de l’origine.
• Manque de compétences linguistiques.
• Manque de reconnaissance des diplômes.
• Compétences non transférables directement sur le marché du travail.
• Manque d’information sur le marché du travail.
• Absence de réseau social à activer pour la recherche d’un emploi.
• Manque d’engagement de la part des employeurs, a priori négatifs envers le
statut de réfugié, manque d’information (confusion entre les termes de
« réfugié » et « requérant d’asile »).
• Manque d’expérience de travail dans le pays d’installation.
• Environnements et standards professionnels antérieurs et actuels différents.
• Manque d’informations sur les processus de reconnaissance des diplômes et
compétences.
En Grande-Bretagne principalement, plusieurs initiatives portées par divers
partenaires sont développées avec des résultats encourageants depuis plusieurs
années, dans le but de diminuer les barrières pour l’accès à l’emploi des réfugiés, et
tirer le meilleur profit des ressources existantes. Ces initiatives portent sur les quatre
axes suivants :
nouveaux moyens de lutte contre les discriminations et inégalités dont peuvent être victimes tant les personnes à l'emploi que celles qui cherchent un emploi. (Site Web : www.equal.ecotec.co.uk) 17 Projets financés en France, Italie, Allemagne, Grande-Bretagne. 18 Department for Work and Pensions (UK), Employability Forum et London Refugee Economic Action (UK), Greater London Authority et Refugee Women’s Association (UK), Home Office et National Refugee Integration Forum (UK), Centre for Urban and Regional Studies, University of Birmingham (UK), PROASILE, Mlati, F. (2001).
Enquêtes, études :
• Identification de bonnes pratiques dans le domaine de l’aide à l’emploi pour
les réfugiés et échanges d’expériences.
• Enquêtes sur les qualifications des réfugiés.
• Identification des obstacles pour l’accès à l’emploi aux réfugiés et de leurs
besoins spécifiques.
• Systèmes de monitoring concernant l’emploi des réfugiés : collecte et mise à
jour de données afin de pouvoir mesurer l’évolution de la situation.
Voici les initiatives développées spécifiquement à l’intention des réfugiés, que nous
avons répertoriées à partir d’études et de rapports existants19 :
Mesures d’aide à l’emploi :
1. Services d’orientation et de conseil pour l’emploi (évaluation des compétences
rapidement après l’arrivée dans le pays, plan de carrière).
2. Développement de :
- bases de données en ligne enregistrant les profils professionnels et les
centres d’intérêts des réfugiés,
- d’outils informatiques servant de plateformes pour promouvoir les
compétences existantes auprès des employeurs et les mettre en relation avec
les opportunités d’emploi offertes, permettant le travail en réseau et la
diffusion d’informations sur services proposés.
3. Mise en place de systèmes de reconnaissance des diplômes.
4. Mise en place de systèmes validation des acquis.
5. Développement de cours de langues intensifs (jusqu’à 6 mois).
6. Développement d’une offre de cours de langues introduisant au vocabulaire
professionnel spécifique à certaines branches.
7. Publication de guides pour l’accès à l’emploi.
8. Accompagnement individualisé, notamment avec des programmes de
mentoring individuel par des professionnels pour faciliter la transition vers le
monde du travail (mise en place de formation pour les mentors).
19 Department for Work and Pensions (UK), Employability Forum et London Refugee Economic Action (UK), Greater London Authority et Refugee Women’s Association (UK), Home Office et National Refugee Integration Forum (UK), Centre for Urban and Regional Studies, University of Birmingham (UK).
9. Octroi de financements pour les frais occasionnés par la formation
complémentaire (coûts de la formation, transports, garde enfants).
Partenariats :
1. Développement de partenariats avec les corporations de métiers (professions
réglementées : santé, enseignement, etc. et non réglementées : ingénieurs,
etc.) en vue de valider des qualifications et d’actualiser des compétences
(programmes de requalification et d’insertion dans le marché du travail,
formations en entreprise).
2. Information et sensibilisation des employeurs quant aux potentiels des
réfugiés et aux procédures légales d’embauche, et encouragement à engager
des réfugiés (séances d’information, rencontres avec des entrepreneurs
majeurs, organisation de placements en emploi, mise en avant des bénéfices
pour l’entreprise en termes d’échanges interculturels et d’apprentissage
mutuel, promotion de la diversité comme atout pour les entreprises).
3. Développement de partenariats avec les acteurs locaux concernés:
agences de placement (services adaptés aux besoins des réfugiés), ONGs,
services publiques (sensibilisation, engagement d’interprètes), organismes de
formation (requalification, stages), entreprises.
Politiques :
1. Définition de stratégies nationales et coordination interrégionale (importance
d’impliquer des réfugiés dans ces processus).
2. Attribution de fonds assurant la viabilité et la continuité des projets.
A elles seules, les forces actuellement déployées autour de cette thématique dans
certains pays européens (notamment la Grande-Bretagne pour laquelle nous avons
trouvé les rapports les plus intéressants20) démontrent le rôle central de l’emploi
dans l’intégration des réfugiés, et traduisent une réelle volonté d’améliorer la
situation de l’emploi pour les migrants du domaine de l’asile. Elles contribuent à
20 Department for Work and Pensions (UK), Employability Forum et London Refugee Economic Action (UK), Greater London Authority et Refugee Women’s Association (UK), Home Office et National Refugee Integration Forum (UK), Centre for Urban and Regional Studies, University of Birmingham (UK).
mettre en évidence la nécessité, pour la cohésion sociale, d’une meilleure
participation des réfugiés à la société dans laquelle ils vivent et d’une prise en charge
adaptée à leurs besoins, dans le cadre d’une démarche globale (importance des
partenariats et de la participation des différents acteurs sociaux concernés). Certains
rapports mentionnent que les activités ci-dessus ont également permis aux
employeurs et aux dispensateurs de services de mieux comprendre les avantages et
les atouts que cette catégorie de travailleurs peut apporter aux entreprises, de même
qu’à l’ensemble de la communauté. Au niveau financier, il est dit que les
investissements supplémentaires nécessaires dans un premier temps, s’avèrent
payants à moyen et long termes.
En Suisse, les réfugiés reconnus ont le droit (contrairement aux requérants d’asile21)
de travailler, de changer d’emploi ou de profession, et ont en principe accès à toutes
les professions22. Aucun motif lié au marché du travail ne permet de refuser à des
réfugiés reconnus le droit de commencer une activité indépendante.
4. INSERTION PROFESSIONNELLE DES REFUGIES EN SUISSE (2000)
A l’instar d’autres pays européens, il n’existe pas en Suisse de statistiques
spécifiques relatives à la population réfugiée dans ce pays. Au moment de l’obtention
du statut de réfugié, cette population est assimilée aux groupes d’étrangers arrivés
pour d’autres motifs que l’asile. Pour dégager des informations quantitatives sur les
réfugiés, il est donc nécessaire d’utiliser des données issues de différents registres et
fichiers administratifs, eux-mêmes rarement harmonisés.
Nous avions accès, de par un contrat de protection des données signé avec l’OFS,
aux informations du dernier recensement (2000). Dans une précédente étude sur
l’intégration des personnes arrivées en Suisse, le Laboratoire de démographie et
d’études familiales de l’Université de Genève23 avait préalablement imputé à ces
21 Interdiction de travail pour les requérants d’asile durant les 3 premiers mois de séjour, interdiction qui peut être prolongée de 3 mois par les cantons. Suite à cela, ils n’accèdent à des postes mis au concours que si aucun indigène (Suisse ou étranger doté d’un permis B ou C) ne s’est annoncé dans un délai de 30 jours (priorité des travailleurs indigènes). De plus, les cantons peuvent limiter le permis de travail des requérants d’asile à certaines branches. 22 Art. 61 de la Loi sur l’asile, OSAR. 23 Wanner, P. (2006).
données le statut d’asile et la date d’arrivée en Suisse. C’est cette base de données
reconstituée que nous avons utilisée pour mesurer l’intégration professionnelle des
réfugiés statutaires.
Pour rendre compte des observations qui suivent, nous avons constitué deux fichiers
distincts : un fichier de 40 390 personnes comprenant les réfugiés statutaires en
2000 âgés entre 20 et 64 ans (le groupe « réfugiés »), et un autre fichier avec les
ressortissants extra européens de la même tranche d’âges, et dont il est certain qu’ils
étaient au bénéfice d’autres types de permis de séjour (le groupe « hors asile »). Ce
deuxième fichier totalise 296 247 personnes. (Voir annexes, tableaux 20 et 21). Ces
données permettront dans une première étape de décrire le profil démographique et
économique des ressortissants extra-européens, puis de mesurer l’insertion
professionnelle et la déqualification.
4. 1. Profils démographiques
La population réfugiée est décrite principalement en comparaison au groupe des
migrants venus en Suisse pour des raisons ne relevant pas de l’asile.
Genre
► Population masculine
63% des réfugiés en 2000 sont des hommes, alors le groupe « hors asile » présente
un meilleur équilibre entre les genres, avec à peine plus de femmes (51,3%).
Etat civil
► Prédominance du mariage
Réfugiés ou non, les étrangers hors U.E. sont majoritairement mariés (80% réfugiés
mariés, 81% « hors asile » mariés). De légères différences apparaissent en termes
de genre au sein de chacun des groupes. Le veuvage concerne d’avantage les
femmes (1,2% veufs/-ves réfugié(e)s, 1% veufs/-ves « hors asile »), le célibat plutôt
les hommes, et le divorce plutôt les hommes réfugiés et les femmes « hors asile ».
Permis
► Permis B et C
Au niveau des autorisations de séjour, l’ensemble des réfugiés bénéficie de permis B
(séjour annuel) ou C (établissement). Réfugiés : 44% permis C et 57% permis B,
hors asile : 57% permis C et 42% permis B. (Annexes, tableaux 19 et 20.)
Date d’arrivée
► Situation conjoncturelle
Alors que les personnes hors asile sont entrées en Suisse principalement dans les
années précédant le recensement, l’arrivée des réfugiés fluctue en relation directe
avec les événements qui ont donné naissance aux flux de réfugiés. Par exemple, les
Ex-Yougoslaves ont observé une vague d’arrivées entre 1988 et 1993, période de
guerre dans les Balkans, avec un premier pic d’augmentation en 1989-90 dû aux
réfugiés bosniaques, et un autre en 1993, au moment de l’arrivée de Kosovars. On
observe également une nette diminution des arrivées de réfugiés de toutes
provenances à partir de 1994, en raison des restrictions introduites par la politique
d’asile.
Origine
► Balkans, Turquie, Sri Lanka, Vietnam, Irak, Iran, Chili, Congo-Kinshasa, Angola
Le nombre des pays d’origine des réfugiés (111) est plus bas que celui des
personnes arrivées pour d’autres motifs (169), l’appartenance des premiers étant
d’avantage concentrée sur certains pays en crise, et dix-neuf pays n’étant
représentés que par un seul individu dans ce groupe.
Graphique 1
Origine - Réfugiés, Suisse (2000)
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000 Graphique 2
Origine - Hors asile, Suisse (2000)
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
La population en provenance des Balkans, bien que majoritaire dans les deux
groupes, l’est plus fortement dans le groupe hors asile, où elle représente plus de la
moitié des individus (57%), alors qu’elle ne représente que 27% des réfugiés. Les
ressortissants d’Afrique centrale et de l’Est sont plus représentés au sein de la
population réfugiée que parmi la population « hors asile ». Il en est de même pour les
personnes en provenance d’Asie du Sud (forte présence sri lankaise : 21,3%
réfugiés, 0,7% « hors asile »), et pour celles originaires du Proche Orient (3,7%
réfugiés, 0,7%« hors asile »). La population des Latino-américaine est moins
importante parmi les réfugiés (3%) que dans le dans le groupe « hors asile » (4,4%).
Les pays les plus représentés en 2000 parmi les réfugiés sont : la Turquie (21%), le
Sri Lanka (21%), l’Ex-Yougoslavie (15%), la Bosnie (12%), le Vietnam (5%), l’Iran
(2%), l’Iraq (2%, chiffre qui doit avoir passablement évolué entre temps avec l’arrivée
de nombreux Irakiens depuis 2000, 2007 : 9% des demandes d’asile24), le Chili (2%),
le Congo-Kinshasa (2%) et l’Angola (2%).
Les nationalités principalement représentées dans le groupe des réfugiés (hormis la
population des Balkans) apparaissent dans une faible mesure dans le groupe « hors
asile » : Turquie 12% (réfugiés 21 %), Afghanistan 0% (réfugiés 1%), BiH 7%
(réfugiés 12%), Angola 0% (réfugiés 2%) Congo-Kinshasa 0% (réfugiés 2%), Chili
0% (réfugiés 2%), Sri Lanka 1% (réfugiés 21%), Iraq 0% (réfugiés 2%) Iran 0%
(réfugiés 2%), Cambodge 0% (réfugiés 1%), et Vietnam 0% (réfugiés 5%).
Trois pays sont nettement majoritaires au sein de la population « hors asile » : la
République de Yougoslavie (32%, aucune précision sur la proportion de Kosovars et
de Serbes), la Turquie (12%, mais on ne sait pas comment sont représentés Kurdes
et Turcs), et la Macédoine (10%). Les autres pays les plus représentées bien que
dans des proportions nettement plus faibles, sont : les Etats-Unis (3%), le Brésil
(2%), le Maroc (1%), la Thaïlande (1%), la Russie (1%), le Canada (1%), la Chine
(1%) et l’Inde (1%). Malgré le fait connu que la population sud-américaine compte un
grand nombre de personnes sans autorisation de séjour (« sans-papiers »), il est
intéressant de noter que cette population reste plus nombreuse en chiffres absolus et
en proportion, au sein du groupe « hors asile » (4,4%), que la population nord-
américaine (3,5%). (Annexes, tableaux 21 et 22.)
La prédominance des hommes parmi les réfugiés pris dans leur ensemble, se
retrouve au niveau des groupes de pays. La population réfugiée des autres pays
candidats à l’UE est majoritairement masculine (Bulgarie, Roumanie, Turquie)
(H 5603/F 3 353), de même que celle des Balkans (H 6837/F 4092) et de l’Afrique
centrale (H 934/F 556). Elle est très fortement masculine dans le cas des réfugiés de
l’Afrique du Nord (H 547/F 185), de l’Afrique de l’Ouest (H 268/F 95), de l’Asie du
Sud (H 7342/F 3538) et du Proche Orient (H 1010/F 486). (Annexes, tableau 23.)
Dans le groupe « hors asile », on observe : 1) une migration féminine pour les quatre
pays du groupe de l’Ex-URSS : Moldavie, Russie, Ukraine, Biélorussie (F 3094/
24 ODM, Statistique en matière d’asile 2007.
H 891), ainsi que pour l’Amérique du Sud (F 9077/H 3922) et centrale (F 3629/
H 1383) et pour l’Asie du Sud-Est (Brunei, Myanmar, Indonésie, Cambodge, Laos,
Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam) (F 6814/H 2128), et 2) une
migration masculine pour l’Afrique de l’Ouest (H 1406/F 1023), les Balkans
(H 88414/F 81176), et l’Afrique du Nord (H 5126/F 3598). (Annexes, tableau 24.)
Religion
► Présence des Musulmans
Les Musulmans sont représentés dans les mêmes proportions dans les deux
groupes hors asile (39%) et réfugiés (41%), alors que les Chrétiens représentent
largement moins de gens parmi les réfugiés (17%) que parmi les hors asile (42%).
Les Juifs, bien que très minoritaires dans les deux groupes, sont trois fois plus
nombreux parmi les hors asile (0,3%).
Graphique 3
Religion - Réfugiés, Suisse (2000)
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Graphique 4
Religion - Hors asile, Suisse (2000)
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Chrétiens Juifs Musulmans Autresreligions
Aucunereligion
Sansindication
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Langue
► Français, turc, arabe
Le français est la langue la mieux maîtrisée25 de 14% des réfugiés statutaires. La
part de francophones parmi eux est plus importante que parmi les autres étrangers
(8%). Avec le turc et l’arabe, le français fait partie des langues qui sont
proportionnellement d’avantage parlées parmi les réfugiés (turc 10%, arabe 3%) que
parmi les personnes hors asile (turc 7%, arabe 2%). C’est l’inverse pour l’anglais,
d’avantage parlé parmi la population hors asile (5%) que réfugiée (1%), ainsi que
pour l’espagnol, lui aussi légèrement plus parlé parmi la population non réfugiée
(3%) que parmi les réfugiés (2%).
25 Le recensement interrogeait sur la langue que l’on maîtrisait le mieux.
Graphique 5
Langue - Réfugiés, Suisse (2000)
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Graphique 6
Langue - Hors asile, Suisse (2000)
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tion
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Source : Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Catégories d’âge
► 30-39 ans majoritaires
Rappelons que les données ne comprennent que les personnes entre 20 et 64 ans.
Les catégories d’âge sont représentées similairement dans les deux groupes
« réfugiés » et « hors asile », les âges entre 30 et 39 ans étant les plus représentés.
On compte une proportion légèrement supérieure de jeunes entre 20 et 24 ans parmi
les « hors asile » (présence des étudiants) et, en conséquence, légèrement moins de
personnes entre 40 et 44 ans. Les âges entre 50 et 54 ans se retrouvent également
un peu plus parmi les personnes « hors asile » (6%) que parmi les réfugiés (4%).
Graphique 7
Catégories d'âges - Réfugiés, Suisse (2000)
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Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Graphique 8
Catégories d'âges - Hors asile, Suisse (2000)
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Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Remarques
Globalement, les deux groupes présentent des profils démographiques assez
similaires. Des différences s’observent au niveau de l’appartenance religieuse
(d’avantage de Musulmans parmi les réfugiés) et de la prédominance des hommes
parmi les réfugiés. Soulignons l’importance de la langue française parmi les réfugiés
et le nombre moins élevé de pays d’origine dans ce groupe.
4. 2. Profils socioprofessionnels Niveau de formation initiale
► Profils similaires
Relevons que le taux de non-réponse à la question de la profession apprise est
relativement haut dans les deux groupes (63% réfugiés, 55%hors asile). Dès lors, les
résultats ne peuvent être compris que comme des indications. Les pourcentages
donnés ci-dessous se réfèrent à l’ensemble des réfugiés d’un pays donné (y compris
les non-réponses).
Le niveau de formation initiale au sein de la population réfugiée dans son ensemble
est légèrement moins élevé que celui des autres étrangers. Néanmoins, des profils
très proches ressortent de l’analyse entre les deux groupes. Des différences
apparaissent lorsque l’on compare les niveaux de formation initiale entre les
ressortissants des différents pays.
Universitaires
► Variations inter-pays, 11 pays avec plus de 30% d’universitaires
Le Soudan (37% d’universitaires parmi les réfugiés), la Lybie (33% d’universitaires.)
et le Burundi (31% d’universitaires) sont les pays d’origine africains avec les taux
d’universitaires les plus élevés. Pour les pays européens, ce sont la Roumanie (38%
d’universitaires) et la Slovaquie (32% d’universitaires) qui présentent les taux les plus
élevés d’universitaires au sein de la population réfugiée. La Chine est le pays
asiatique (34%), et Cuba (34%) et la Colombie (32%) les pays d’Amérique latine où
l’on trouve le plus d’universitaires. L’Egypte (43% d’universitaires), la Russie (40%
d’universitaires) et la Jordanie (40% d’universitaires) ont un pourcentage plus élevé,
mais le total des ressortissants pris en compte est très bas. Tous les pays présentant
les taux d’universitaires les plus forts (au-dessus de 30%), ont des taux inférieurs
d’individus ayant suivi des écoles supérieures. Cela est vrai également pour la
plupart des pays présentant un taux d’universitaires « intermédiaire » (entre 20% et
29%). Cela pourrait refléter le fait que dans ces pays, les écoles supérieures sont
peu fréquentes et il n’existe pas de réelle alternative à l’université.
Formation supérieure
► Proportions élevées d’individus hautement qualifiés parmi les réfugiés
Tableau 1 : proportion de réfugiés avec une formation supéri eure pour les pays fortemen t représentés dans le groupe des réfugiés
Pays fortement Ecole sup % représentés (+ 500 individus) et uni%
1 Roumanie 55,77 2 Pologne 42,15 3 Tunisie 30,55 4 Irak 29,68 5 Afghanistan 29,38 6 Hongrie 25,60 7 Iran 24,61 8 Algérie 23,01 9 Congo (Kinshasa) 21,59
10 Angola 12,74 11 Yougoslavie 11,96 12 Chili 9,90 13 BiH 8,23 14 Vietnam 5,35 15 Turquie 4,23 16 Cambodge 3,25 17 Sri Lanka 2,59
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Le fait d’additionner, pour chaque pays, le pourcentage de réfugiés ayant suivi une
école supérieure à celui de ceux ayant terminé une formation universitaire, donne à
voir la proportion de ressortissants au bénéfice d’une formation que l’on peut
qualifiée de supérieure (académique ou professionnelle en haute école). Parmi les
pays fortement représentés (+ 500 personnes), on trouve : l’Irak (30% de réfugiés
avec une formation supérieure), l’Afghanistan (29%), l’Iran (25%), et le Congo
(Kinshasa) (22%). Les pays moins représentés (entre 200 et 500 individus) mais
présentant également une importante proportion de réfugiés avec une haute
formation sont : la Roumanie (56% avec une haute formation), la Pologne (42%), la
Tunisie (31%), la Hongrie (26%) et l’Algérie (23%). Notons que ces pays
appartiennent à des zones géographiques communes, ce pourrait indiquer soit
l’existence de systèmes d’éducation similaires dans ces régions (par ex. régimes
communistes), soit révéler une dynamique migratoire de nature similaire
(phénomènes de sélection, stratégies migratoires).
D’autres pays également fortement représentés (+ 500 personnes) comptent une
plus faible proportion de réfugiés ayant suivi une haute formation : l’Angola (13%), la
République Yougoslave (12%), le Chili (10%), la Bosnie (8%) et le Vietnam (5%). On
compte par ailleurs moins de 5% d’individus avec une haute formation parmi les
réfugiés de Turquie (4%), du Cambodge (3%) et du Sri Lanka (3%). Les disparités
sont donc importantes entre pays.
Profession apprise (secteurs)
► Similarité réfugiés et « hors asile »
► Santé, construction, technique/informatique
La similitude observée entre les deux groupes en ce qui concerne les niveaux de
formation initiale se retrouve au niveau des professions apprises déclarées à
l’occasion du recensement. Signalons cependant qu’il manque, sur cette question,
une grande quantité de réponses (réfugiés : 63% de non réponses et « hors asile » :
55% de non réponses), ce qui fait émettre un doute sur l’exacte représentativité de
nos données.
Les deux secteurs « arts et métiers » et « services » sont fortement représentés. Ces
secteurs recouvrent cependant quantité de professions différentes. La santé et la
construction sont représentées dans la même proportion dans les deux groupes,
avec 3,5% pour les étrangers « hors asile » et 2,7% pour les réfugiés. Ces deux
secteurs rassemblent un nombre de personnes important, suivis de près par celui de
la technique/informatique, et également le secteur commercial mais uniquement pour
les étrangers hors asile.
Une proportion relativement importante de réponses concerne des professions « qui
ne s’apprennent pas » (7% pour les deux groupes).
Agriculture, transports et médias sont les seuls domaines pour lesquels le groupe
des réfugiés donne des valeurs à peine supérieures à celles de l’autre groupe.
4. 3. Insertion professionnelle
Profession exercée
► Services, arts et métiers, construction, commercial
A part les secteurs de la construction et de la technique/informatique dans lesquels
les réfugiés sont moins employés que les non réfugiés, on trouve des proportions
pratiquement identiques des deux groupes dans les autres secteurs, les services
(réfugiés 12%, hors asile 11%) ainsi que les arts et métiers (réfugiés 8%, hors asile
7%) étant les secteurs où la majorité des gens sont employés. Viennent ensuite la
construction (réfugiés 3%, hors asile 4%) et le commercial (réfugiés 2%, hors asile
3%).
Les hommes réfugiés sont plus présents dans l’industrie, la construction, les
transports et le placement de personnel, alors que les femmes réfugiées sont
d’avantage actives dans les secteurs de la santé, du social et des autres services.
Statut professionnel
► Valeurs similaires pour les réfugiés et les « non asile »
► Disparités de genre
La part de chômeurs est légèrement plus élevée parmi les réfugiés (13%) que parmi
les « hors asile » (9%), mais la proportion d’actifs à 100% est à peine plus élevée
parmi les réfugiés (53%) que parmi les autres étrangers (52%). Les valeurs dans leur
ensemble sont tout de même très similaires.
Les réfugiés ayant bénéficié d’un haut niveau d’études sont davantage touchés par
le chômage. Ils sont aussi moins fréquemment actifs à plein temps. On en déduit
qu’ils ont plus de difficultés à s’insérer sur le marché de l’emploi.
Les personnes issues des secteurs suivants sont plus touchées par le chômage :
médias (20%), enseignement (19%), sciences humaines (18%), ingénierie (16%) et
sciences (15%). Les professionnels des métiers de la santé (10%) ne sont pas plus
touchées par le chômage que celles de l’agriculture (11%), des arts et métiers (10%),
de la technique/informatique (11%), de l’assistance sociale et spirituelle (11%) et de
la construction (10%).
Les femmes (18%) sont plus touchées que les hommes (10%) par le chômage, et
plus (18%) à être non actives (hommes 3%). (La variable « catégorie
socioprofessionnelle donne 23% de femmes et 7% d’hommes non actifs). Lorsqu’on
considère le statut d’emploi en fonction du genre, il apparaît clairement que les
femmes sont très différemment employées que les hommes, puisqu’elles ne sont que
29% à travailler à plein temps, tous domaines confondus. De même, elles sont
largement plus employées à temps partiel (femmes 20%, hommes 4%). Les chiffres
montrent logiquement que le taux d’activité est plus directement lié au genre qu’au
secteur d’emploi.
Catégorie socioprofessionnelle
► Profils similaires entre les deux groupes
► Absence des réfugiés et « hors asile » en haut de la hiérarchie
► Prédominance des femmes parmi les employées qualifiées
L’analyse de la catégorie socioprofessionnelle pour les deux groupes montre
clairement que les réfugiés sont très peu présents, et un peu moins que les migrants
« hors asile », aux niveaux les plus qualifiés d’emploi : dirigeants (1%), professions
libérales (0,2%), autres indépendants (1,9%), professions intermédiaires (4,6%),
employés qualifiés (6,4%) ouvriers qualifiés (4,8%). Ils sont nettement moins
présents au niveau des professions intellectuelles et d’encadrement (1%) que les
non réfugiés (3%).
Les femmes réfugiées sont moins représentées que les hommes réfugiés dans
toutes les catégories socioprofessionnelles, sauf parmi les employé(e)s qualifié(e)s
(F 8%/H 6%).
Remarques
Les profils en termes de formation et de statut professionnel apparaissent très
similaires entre réfugiés et étrangers « hors asile ». Les conclusions d’une étude26
portant sur l’intégration structurelle en Suisse des personnes arrivées dans le cadre
de l’asile (réfugiés statutaires et requérants d’asile), a mis en évidence une moins
forte intégration sur le marché du travail, pour un même pays, des ressortissants
26 Wanner, P. (2006).
ayant un statut d’anciens requérants d’asile27. De fait, les données considérées ici
prennent en compte les ressortissants de pays principalement hors européens et
candidats à l’Europe, c’est-à-dire d’avantage de pays dits du « 3e cercle ». Le pays
d’origine semble donc exercer une plus grande influence sur leur profil professionnel
et leur situation sur le marché de l’emploi que de leur permis de résidence
(« réfugié » ou non).
4. 4. Déqualification professionnelle
Le phénomène de déqualification renvoie à une insertion professionnelle sans
concordance avec les qualifications de la personne employée. Cela signifie
généralement que la personne soit n’a pas d’emploi, soit est surqualifiée pour le
poste occupé, soit exerce une activité sans rapport avec la formation professionnelle
acquise. La déqualification peut également, dans certains cas, résulter d’un choix
individuel, d’où la difficulté de mesurer exactement la nature du phénomène. Dans
les analyses que nous effectuons ci-dessous, nous ne sommes pas en mesure de
déterminer les motifs de la déqualification. Elle peut correspondre, parfois, à une
nouvelle orientation professionnelle, une promotion sociale ou au choix de ne pas
exercer une activité trop pénible (par exemple pour les maçons). Mais elle peut aussi
être le résultat de barrières à l’emploi. L’interprétation que l’on peut donner est dès
lors limitée.
Dans le cas des étrangers, et notamment des réfugiés, les multiples raisons
expliquant la déqualification vont du problème de la maîtrise de la langue aux
difficultés psychologiques à se projeter dans un avenir incertain, en passant par une
méconnaissance des standards et du milieu professionnel local, une absence de
réseau personnel, et la pression subie à prendre rapidement un emploi.28
Dans ce chapitre, nous vérifierons dans quelle mesure les réfugiés vivant en Suisse
parviennent à faire reconnaître leurs qualifications professionnelles. Pour certaines
professions choisies, nous analysons quelle est la proportion d’individus ayant
obtenu un emploi correspondant à leurs qualifications. Nous considérons donc la
formation apprise, pour la mettre en relation avec la profession exercée en Suisse, 27 L’étude porte sur cinq nationalités : Turquie, Serbie-et-Montenegro, BiH, Sri Lanka et Vietnam. Phénomène plus marqué pour les migrations d’asile récentes (ex-Yougoslavie). 28 Bolzman, C. (2002).
telles que déclarées dans le dernier recensement (2000). Pour certaines professions
nécessitant une formation supérieure, nous cherchons également à savoir si une
insertion professionnelle dans le domaine correspondant à la formation
professionnelle, mais avec un statut inférieur, était observable. Par ailleurs, nous
avons obtenus les chiffres analogues pour la population suisse et pour celle des
ressortissants de l’E.U.29, données qui permettent également quelques
comparaisons.
La principale difficulté rencontrée pour cette analyse réside dans les effectifs pouvant
être pris en compte. En effet, le taux de non-réponses par rapport à la profession
exercée en Suisse atteint 40,1% parmi les réfugiés statutaires et 33,9% dans le
groupe « hors asile ». Il en résulte une perte d’information conséquente, réduisant
presque de moitié les effectifs : un total de 24 187 personnes sur 40 390 réfugiés
(59,9%), et de 195 864 personnes sur 296 247 « hors asile » (66,1%). Les effectifs
disponibles lorsque l’on analyse des professions précises en sont réduits à des
échantillons dont certains ne permettent que des observations sans aucune valeur
statistique. Nous avons donc sélectionné quinze professions pour lesquelles nous
pouvons mesurer le phénomène de déqualification. Davantage que les données
brutes, ce sont les différences éventuelles entre groupes qui peuvent être
significatives.
En utilisant un modèle d’analyse par une régression logistique, nous cherchons à
connaître l’influence de quatre facteurs différents sur la probabilité d’être déqualifiés,
pour l’ensemble des réfugiés et « hors asile », dans certaines professions données.
L’objectif de la régression est de dégager l’effet du statut de réfugié après contrôle
de certaines variables intervenant dans la problématique, variables qui sont liées à la
trajectoire migratoire. Notre modèle analyse l’effet sur la déqualification des
variables suivantes :
1. Facteur asile : réfugié (0), hors asile (1).
2. Facteur année d’arrivée : 1995-2000 (1), 1990-1994 (2), 1985-1989 (3), 1980-
1984 (4), → 1979 (5).
3. Facteur langue : autre langue (0), langues nationales ou anglais (1).
4. Facteur âge : 20-29 ans (1), 30-39 ans (2), 40-49 ans (3), 50+ ans (4).
29 Prof. P. Wanner, LaboDémo, Université de Genève.
Le facteur asile est le facteur central de cette étude. Par ailleurs, ce choix de
variables est lié à l’hypothèse que l’insertion professionnelle, bien que probablement
favorisée par la maîtrise d’une langue locale ou l’anglais, est un processus
correspondant à diverses démarches (pour dépasser les obstacles déjà mentionnés)
et étapes se déroulant sur une période pouvant aller jusqu’à plusieurs années. De
même, une formation récente nous apparaît comme un élément favorable à
l’insertion professionnelle.
Résultats généraux
► Similarité « réfugiés » et « hors asile »
► Réfugiés : bonne insertion professionnelle des médecins, des professionnels du social, des informaticiens, et des peintres en bâtiment En ce qui concerne le phénomène de déqualification professionnelle (comprise
comme une non correspondance de la profession exercée avec la profession
apprise), on constate en 2000 une similarité entre les étrangers avec le statut de
réfugiés et les étrangers non européens, cela même si les réfugiés apparaissent, de
manière systématique, comme légèrement plus touchés par les difficultés à s’intégrer
dans leur secteur professionnel. Cette observation est valable pour les deux groupes
pris dans leur ensemble, de même que pour les différentes professions prises
séparément.
Globalement, 90% des réfugiés ayant répondu à la question sur la profession
exercée en Suisse, ne pratiquent pas la profession qu’ils ont apprise. Ils sont
également 87% de la catégorie « hors asile » à être dans cette situation. Ces chiffres
doivent être commentés avec prudence, et c’est pourquoi il convient de vérifier la
situation au sein des différentes professions.
Tableau 2 : déqualification observée (%)
Profession Réfugiés Hors asile Européens Suisses
Toutes 90 87
Ingénieurs 87 79 69 62
Cadres supérieurs 86 63 47 46
Professions des médias 84 78 58 47
Médecins 53 55 33 20
Assistance sociale 41 65 45 47
Infirmiers 61 37 30 50
Informaticiens 54 50 55 48
Agriculture 87 68 51 42
Electroniciens 82 80 76 78
Mécaniciens automobile 81 73 66 70
Menuisiers-ébén.-charp. 76 68 55 52
Maçons 67 55 46 65
Boulangers 64 64 59 67
Installateurs-électriciens 61 61 58 65
Peintres-tapissiers 46 42 41 49
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Professions nécessitant une formation supérieure
► Déqualification importante des ingénieurs
► Bonne insertion des médecins
► Meilleure insertion professionnelle des réfugiés que des Suisses dans le social
Ingénieurs (effectifs : 406/4179)30, cadres supérieurs (effectifs : 62/890), professions
des médias (effectifs : 113/794), assistance sociale (effectifs : 61/425) et médecins
(effectifs : 113/915).
Les deux groupes présentent des proportions identiques ou très similaires d’individus
actifs dans leur profession apprise.
Dans toutes ces professions dites « supérieures » (hormis une exception), la
déqualification professionnelle concerne largement plus les réfugiés et les « hors
asile » que les Suisses et les ressortissants européens.
Parmi les cadres supérieurs (déqualifiés : 86%/63%) et les professionnels des
médias (84%/78%), le taux de déqualification est passablement haut parmi les
30 Nous indiquons entre parenthèses les valeurs sous forme de totaux ou de pourcentages selon l’ordre suivant : (valeur « réfugiés » / valeur « hors asile »).
réfugiés, alors que le phénomène parmi les Suisses n’est observé que dans un peu
moins de la moitié des cas (cadres supérieurs : 46%, médias : 47%).
Dans la profession de cadre et selon les résultats de la régression logistique31, le fait
d’être réfugié fait plus que triplé la probabilité d’être déqualifié. Les plus jeunes ont la
probabilité la plus élevée d’être déqualifiés. Cela reflète probablement le fait qu’ils
ont en général besoin de plus de temps pour accumuler de l’expérience avant
d’obtenir des postes de cadres. Le risque de déqualification est 1,9 fois plus élevé
pour ceux qui ne pas parlent pas une langue nationale ou l’anglais. L’année d’arrivée
n’est par contre pas significative (valeurs ne respectant pas le seuil de 0,05).
(Tableau 3)
Tableau 3 : facteurs d’influence sur la déqualification des cadres réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,622 ,146 18,151 1 ,000 1,863 1,399 2,481
27,606 3 ,000
1,104 ,250 19,569 1 ,000 3,017 1,850 4,922
,388 ,226 2,948 1 ,086 1,474 ,947 2,294
,120 ,231 ,269 1 ,604 1,127 ,717 1,773
5,589 4 ,232
-,040 ,281 ,020 1 ,886 ,961 ,554 1,667
-,436 ,311 1,971 1 ,160 ,647 ,352 1,189
-,360 ,349 1,069 1 ,301 ,697 ,352 1,381
-,351 ,403 ,759 1 ,384 ,704 ,320 1,550
1,498 ,383 15,276 1 ,000 4,472 2,110 9,477
-,069 ,284 ,059 1 ,808 ,933
langue_util(1)
age_groupe
age_groupe(1)
age_groupe(2)
age_groupe(3)
arrivee
arrivee(1)
arrivee(2)
arrivee(3)
arrivee(4)
cadres_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, age_groupe, arrivee, cadres_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Parmi les professionnels des médias, on observe une augmentation significative du
risque de déqualification (x 95%) durant les premières années de séjour, par rapport
au risque qu’on les personnes arrivées plus de vingt ans en arrière. Les 30-39 ans
ont un risque deux fois plus élevé que les plus âgés. Le facteur « asile » ne joue pas
de rôle dans cette profession. Quant à la langue utilisée, elle fait plus que doubler le
risque de déqualification lorsqu’elle n’est pas une langue nationale ou l’anglais.
(Tableau 4)
31 Interprétation des paramètres: pour que l’effet d’une variable soit significatif, la valeur (Signif.) doit respecter le seuil de 0,05. L’exponentielle de Beta (Exp(B) ) donne un effet de diminution du risque de déqualification observé si la valeur est en-dessous de 1, un effet d’augmentation du risque si elle se situe au-dessus de 1 et un risque égal à celui du groupe de référence si la valeur est égale à 1 (calcul en % : [Exp(B) - 1] x 100).
Tableau 4 : facteurs d’influence sur la déqualification des professionnels des médias réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,814 ,173 22,251 1 ,000 2,257 1,609 3,165
8,876 3 ,031
,607 ,332 3,340 1 ,068 1,834 ,957 3,515
,714 ,281 6,458 1 ,011 2,042 1,177 3,541
,207 ,280 ,545 1 ,460 1,230 ,710 2,131
8,435 4 ,077
,668 ,306 4,752 1 ,029 1,950 1,070 3,553
,484 ,326 2,202 1 ,138 1,623 ,856 3,076
,586 ,381 2,365 1 ,124 1,796 ,851 3,789
-,023 ,348 ,004 1 ,948 ,978 ,494 1,933
,458 ,295 2,417 1 ,120 1,582 ,887 2,819
-,091 ,259 ,123 1 ,726 ,913
langue_util(1)
age_groupe
age_groupe(1)
age_groupe(2)
age_groupe(3)
annee_arrivee
annee_arrivee(1)
annee_arrivee(2)
annee_arrivee(3)
annee_arrivee(4)
medias_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, age_groupe, annee_arrivee, medias_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
La différence existant entre Suisses et réfugiés est moins nette pour les ingénieurs.
En effet, les Suisses de ce groupe sont 62% à déclarer ne pas travailler dans leur
profession. Les réfugiés sont touchés à 87% et les « hors asile » à 79%. Les hors
asile âgés de 25 ans ou moins sont légèrement moins touchés par la déqualification
(75%), tandis que quatre cinquième des réfugiés de 25 ans ou moins le sont. Les
ingénieurs réfugiés et « hors asile » sont les professionnels les plus nombreux des
deux groupes à occuper un statut hiérarchiquement inférieur à leur profession, dans
leur secteur professionnel (13%/15%). Il est intéressant de noter que ce secteur très
masculin au niveau des Suisses (6% de femmes), l’est beaucoup moins du côté des
réfugiés (13% de femmes) et des ressortissants de l’UE (12% de femmes), et qu’il
l’est encore moins parmi les « hors asile » (28% de femmes).
L’analyse par régression logistique effectuée confirme que le risque d’être déqualifié
pour un ingénieur est plus élevé chez les réfugiés par rapport aux « hors asile »
(risque multiplié par 1, 7). Les personnes ne parlant pas une langue nationale ou
l’anglais voient leur risque de déqualification multiplié par 39,7% par rapport à celles
parlant la langue locale. Les ingénieurs les plus jeunes (20-29 ans) ont un risque
diminué de 29% d’être dans une situation de déqualification, par rapport aux plus
âgés. Quant à l’année d’arrivée, elle ne semble pas jouer de rôle dans cette
profession. (Tableau 5)
Tableau 5 : facteurs d’influence sur la déqualification des ingénieurs réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,246 2 ,884
,321 1,066 ,090 1 ,764 1,378 ,170 11,140
-,317 ,819 ,150 1 ,699 ,729 ,146 3,624
,335 ,074 20,236 1 ,000 1,397 1,208 1,617
7,420 3 ,060
-,342 ,130 6,956 1 ,008 ,711 ,551 ,916
-,149 ,115 1,676 1 ,195 ,861 ,687 1,080
-,153 ,124 1,535 1 ,215 ,858 ,673 1,093
,514 ,155 11,011 1 ,001 1,672 1,234 2,265
1,279 ,106 144,701 1 ,000 3,591
arrivee
arrivee(1)
arrivee(2)
langue_CH(1)
tranches_age
tranches_age(1)
tranches_age(2)
tranches_age(3)
ingenieurs_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : arrivee, langue_CH, tranches_age, ingenieurs_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
La situation des médecins réfugiés se distingue de celle des autres professions
supérieures, en ce sens qu’on constate chez eux une insertion professionnelle
nettement meilleure. 47% d’entre eux avec un permis de réfugiés travaillent
effectivement en tant que médecins en Suisse. Les médecins « hors asile » sont à
peine moins à exercer leur profession (45%). Il faut savoir que le taux de
déqualification (tel que nous l’avons défini) des médecins suisses, est également le
plus bas, avec celui des dentistes, parmi les professions considérées ici. Pour
compléter ce profil affichant une bonne insertion des médecins réfugiés et « hors
asile », notons qu’un pourcentage assez élevé d’entre eux travaillent à un niveau
inférieur de la hiérarchie médicale (10% réfugiés/9% « hors asile »). Comme pour les
ingénieurs, la proportion de femmes médecins est plus élevée parmi les réfugiés
(38%) et les « hors asile » (54%) que parmi les médecins suisses (34%).
Au niveau des facteurs pouvant influencer la déqualification professionnelle des
médecins, le fait d’être arrivés récemment (jusqu’à cinq ans) multiplie de 116% le
risque d’être déqualifiés. Cela peut traduire le fait qu’une période d’adaptation soit
nécessaire pour faire reconnaître ses qualifications et s’insérer dans sa profession.
Le risque de déqualification est diminué de 38% pour les 30-39 ans par rapport aux
médecins plus âgés. C’est donc le groupe d’âge où les médecins ont la meilleure
probabilité d’insertion dans leur profession. Le fait de ne pas être plus âgés pourrait
leur permettre d’effectuer plus facilement des démarches d’équivalences de
compétences, des périodes de stage, également sur la base d’une certaine
expérience pratique à faire valoir. Selon cette analyse, le facteur « asile » ne semble
pas être décisif pour les chances des médecins réfugiés et « hors asile » de pouvoir
exercer leur profession. Et le fait de ne pas avoir pour langue principale une langue
nationale ou l’anglais augmente le risque de déqualification en le multipliant par 33%.
(Tableau 6)
Tableau 6 : facteurs d’influence sur la déqualification des médecins réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,292 ,144 4,104 1 ,043 1,339 1,010 1,776
5,537 3 ,136
-,121 ,298 ,166 1 ,684 ,886 ,494 1,588
-,464 ,229 4,126 1 ,042 ,629 ,402 ,984
-,223 ,227 ,969 1 ,325 ,800 ,513 1,248
19,219 4 ,001
,771 ,359 4,612 1 ,032 2,161 1,070 4,366
,056 ,363 ,023 1 ,878 1,057 ,519 2,155
,039 ,385 ,010 1 ,919 1,040 ,489 2,210
,150 ,436 ,118 1 ,731 1,161 ,494 2,728
,079 ,172 ,214 1 ,643 1,083 ,773 1,516
-,091 ,329 ,077 1 ,782 ,913
langue_util(1)
groupes_ages
groupes_ages(1)
groupes_ages(2)
groupes_ages(3)
annees_arrivees
annees_arrivees(1)
annees_arrivees(2)
annees_arrivees(3)
annees_arrivees(4)
medecins_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, groupes_ages, annees_arrivees, medecins_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Les dentistes, pour lesquels nous ne disposons que d’un échantillon très restreint (24
personnes réfugiées, mais 170 « hors asile »), affichent un profil d’insertion similaire
à celui des médecins (58%/59%), avec également une proportion importante d’actifs
à un niveau inférieur de la hiérarchie médicale (21%/12%). Les femmes sont très
nettement et identiquement majoritaires parmi les dentistes réfugiés (67%) et « hors
asile » (67%), alors qu’elles sont tout à fait minoritaires parmi les Suisses (28%).
Enfin, le profil d’insertion des professionnels de l’assistance sociale apparaît comme
tout à fait particulier pour les réfugiés. Il s’agit du seul secteur pour lequel les valeurs
des réfugiées (déqualification 41%) démontrent une meilleure insertion
professionnelle que celles des Suisses (déqualification 47%) et que celle des
ressortissants européens (45%), même si les valeurs sont proches. La majorité des
réfugiés de ce secteur est donc employée dans sa profession (59%), ce que l’on peut
expliquer par l’hypothèse qu’une partie de ces personnes est probablement active
dans les milieux de l’asile ou de l’aide à l’intégration pour les étrangers. Cette
observation de meilleure insertion des réfugiés que des Suisses dans le secteur
social, n’est pas valable pour les ressortissants étrangers « hors asile », qui sont
nettement plus déqualifiés (65%) que tous les autres groupes, y compris que les
Européens (45%).
Dans cette profession, les plus jeunes (20-29 ans) ont un risque de déqualification
réduit de 73%, par rapport à celui des plus de cinquante ans. Le risque reste diminué
pour le groupe d’âge suivant, mais un peu moins (30-39, 63% de moins que les plus
âgés). Les personnes récemment arrivées ont une probabilité très fortement
augmentée (plus de dix fois) par rapport aux anciennement arrivés de ne pas avoir
d’emploi dans leur profession. Comme dans le cas des médecins, cela peut être mis
en lien avec la nécessité d’une période d’adaptation pour créer des contacts,
travailler bénévolement durant une période, etc. Il est encore multiplié par près de
trois pour les personnes arrivées 6 à 10 ans avant le recensement. L’analyse montre
que le risque de déqualification est divisé par deux pour les réfugiés. Quant au fait de
ne pas parler une langue nationale ou l’anglais, il augmente légèrement le risque
(x 1,6). (Tableau 7)
Tableau 7 : facteurs d’influence sur la déqualification des réfugiés et « hors asile » dans les professions de l’assistance soc iale
Variables dans l'équation
,452 ,210 4,633 1 ,031 1,572 1,041 2,373
11,823 3 ,008
-1,275 ,422 9,115 1 ,003 ,279 ,122 ,639
-,976 ,373 6,854 1 ,009 ,377 ,182 ,783
-,374 ,366 1,047 1 ,306 ,688 ,336 1,409
48,336 4 ,000
2,392 ,405 34,910 1 ,000 10,939 4,947 24,188
1,058 ,383 7,634 1 ,006 2,881 1,360 6,102
,581 ,435 1,788 1 ,181 1,788 ,763 4,191
,526 ,463 1,292 1 ,256 1,692 ,683 4,192
-,712 ,325 4,799 1 ,028 ,491 ,259 ,928
-,221 ,363 ,371 1 ,543 ,802
langue_util(1)
age_groupes
age_groupes(1)
age_groupes(2)
age_groupes(3)
arrivee_annees
arrivee_annees(1)
arrivee_annees(2)
arrivee_annees(3)
arrivee_annees(4)
social_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, age_groupes, arrivee_annees, social_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Nous ne parlerons pas en détails des professeurs d’université (20/263) et des
professions judiciaires (16/194), dont la déqualification apparaît comme totale
(100%/81%), car leur nombre parmi les réfugiés est trop petit. Dans le domaine du
droit, le transfert direct des connaissances est en plus difficilement possible d’un
pays à l’autre. Nous laissons également de côté les professionnels des sciences
humaines (259/4126) et des sciences naturelles (112/1866), deux champs
professionnels très larges, comprenant de nombreux secteurs d’activité différents. La
très haute déqualification observée pour les réfugiés et le groupe « hors asile » dans
ces deux secteurs ne surprend pas, en regard de difficultés connues que rencontrent
également les Suisses formés dans ces secteurs pour s’insérer dans le marché de
l’emploi.
Professions nécessitant une formation en école prof essionnelle ► Valeurs proches de celles des Suisses pour les infirmiers
► Bonne insertion des infirmiers (secteur féminin) et informaticiens
(secteur masculin)
Les deux professions retenues pour lesquels nous disposons d’effectifs suffisants
pour notre analyse, sont les infirmiers (284/4277) et les informaticiens (149/1346).
Comme les médecins, les infirmiers de formation présentent, dans le groupe des
réfugiés, une relativement bonne insertion professionnelle, puisque 46% d’entre eux
exercent leur métier après leur arrivée en Suisse. L’insertion des « hors asile »
apparaît comme étant encore meilleure : ils sont 63% à être actif comme infirmiers.
Le secteur est majoritairement féminin dans les deux groupes (73%/84%). Par
contre, contrairement aux médecins, la proportion dans les deux groupes de ceux qui
travaillent à un échelon inférieur dans le secteur paramédical est très faible (6%/4%).
Les valeurs reflétant l’insertion professionnelle sont proches de celles des Suisses
(déqualification 50%). Les étrangers « hors asile » et européens sont ceux qui
présentent les meilleurs critères d’insertion tels que définis ici (déqualification « hors
asile » 37% / déqualification Européens 30%). Ces résultats ne sont peut-être pas
étrangers à la forte demande qui existe dans le domaine, et qui est partiellement
comblée par le recours à de la main-d’œuvre non européenne (canadienne par
exemple).
Le fait d’être réfugié augmente le risque de déqualification en le multipliant par 141%
par rapport aux autres infirmiers étrangers non européens. Durant les cinq premières
années après l’arrivée, la probabilité de ne pas être employé comme infirmier est
multipliée par plus de trois. Cela peut être lié à la période d’adaptation précédant
l’insertion professionnelle. Le risque diminue pour ceux qui sont arrivés 16-20 ans en
arrière (- 30%) par rapport à ceux arrivés plus de vingt ans en arrière, ce qui peut
traduire une bonne connaissance du secteur en Suisse. Le groupe d’âge ne joue pas
un rôle significatif dans cette profession, le risque diminuant de 40% pour les 20-29
ans, avant d’augmenter légèrement avec les années d’âge. Dans cette profession, le
fait de ne pas parler une langue nationale ou l’anglais accroît la probabilité de
déqualification (x 1,6). (Tableau 8)
Tableau 8 : facteurs d’influence sur la déqualification des infirmiers réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,493 ,066 56,166 1 ,000 1,637 1,439 1,862
15,512 3 ,001
-,505 ,139 13,152 1 ,000 ,603 ,459 ,793
-,492 ,129 14,427 1 ,000 ,612 ,474 ,788
-,381 ,125 9,264 1 ,002 ,683 ,535 ,873
286,482 4 ,000
1,209 ,147 67,997 1 ,000 3,349 2,513 4,464
,065 ,143 ,208 1 ,649 1,068 ,806 1,414
-,352 ,149 5,589 1 ,018 ,703 ,525 ,942
-,174 ,156 1,244 1 ,265 ,840 ,619 1,141
,881 ,132 44,337 1 ,000 2,413 1,862 3,127
-,721 ,116 38,891 1 ,000 ,486
langue_util(1)
groupe_age
groupe_age(1)
groupe_age(2)
groupe_age(3)
arrivee_annee
arrivee_annee(1)
arrivee_annee(2)
arrivee_annee(3)
arrivee_annee(4)
infirmiers_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, groupe_age, arrivee_annee, infirmiers_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
L’insertion professionnelle des informaticiens en 2000 est bonne pour les Suisses
(déqualification 48%) comme pour les étrangers. Ceux au bénéfice d’un statut de
réfugié (déqualification 61%) rencontrent toutefois plus de difficultés que les autres
étrangers (déqualification « hors asile 50%, déqualification Européens 55%). Si le
secteur est très majoritairement masculin dans tous les groupes, il l’est d’avantage
chez les Suisses (88%).
Le facteur asile augmente (x 1,6) la probabilité de déqualification par rapport aux
informaticiens étrangers non européens venus pour d’autres raisons. Le fait de ne
pas parler une langue nationale ou l’anglais augmente le risque (x 1,4). D’après cette
analyse, aucun autre facteur ne joue de rôle significatif. (Tableau 9)
Tableau 9 : facteurs d’influence sur la déqualification des informaticiens réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,329 ,107 9,415 1 ,002 1,389 1,126 1,714
2,792 3 ,425
-,424 ,275 2,372 1 ,124 ,654 ,381 1,123
-,426 ,270 2,487 1 ,115 ,653 ,384 1,109
-,456 ,280 2,639 1 ,104 ,634 ,366 1,099
4,626 4 ,328
,255 ,213 1,439 1 ,230 1,291 ,851 1,958
,348 ,227 2,366 1 ,124 1,417 ,909 2,209
,183 ,257 ,504 1 ,478 1,200 ,725 1,988
-,062 ,272 ,051 1 ,821 ,940 ,552 1,603
,488 ,187 6,778 1 ,009 1,629 1,128 2,352
,053 ,250 ,045 1 ,832 1,054
langue_util(1)
groupe_age
groupe_age(1)
groupe_age(2)
groupe_age(3)
annee_arrivee
annee_arrivee(1)
annee_arrivee(2)
annee_arrivee(3)
annee_arrivee(4)
informaticiens_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, groupe_age, annee_arrivee, informaticiens_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Professions nécessitant un apprentissage pratique ► Diversité de situations
Electroniciens (effectifs : 169/1035), mécaniciens automobiles (effectifs : 223/2197),
« menuisiers-ébénistes-charpentiers » (effectifs : 159/1308), maçons (effectifs :
123/1980), peintres-tapissiers (effectifs : 112/864), installateurs électriciens (effectifs :
228/1319), chauffeurs (effectifs : 127/884), agriculture (effectifs : 170/1049).
Ces professions donnent des résultats assez variables.
Au niveau des professions du bâtiment sélectionnées, les peintres-tapissiers réfugiés
présentent la meilleure insertion professionnelle (déqualification réfugiés 46%). Avec
les professionnels du social, les peintres-tapissiers font partie des deux professions
dans lesquels les réfugiés apparaissent comme le mieux insérés. Il s’agit également
des deux professions pour lesquelles les réfugiés présentent une déqualification
moins élevée que celle des Suisses (déqualification peintres-tapissiers suisses 49%).
Ni le facteur « langue » ni celui de l’ « asile » ne jouent de rôle dans cette profession.
Parmi ceux arrivés il y a 6 à 10 ans, le risque de déqualification est diminué de 39%
par rapport à ceux arrivés il y a plus de vingt ans en arrière. Quant aux plus jeunes
en âge, ils présentent un risque diminué de 53% par rapport aux plus de cinquante
ans. (Tableau 10)
Tableau 10 : facteurs d’influence sur la déqualification des pei ntres réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
-,143 ,143 ,997 1 ,318 ,867 ,655 1,148
11,830 3 ,008
-,750 ,224 11,241 1 ,001 ,472 ,305 ,732
-,343 ,218 2,469 1 ,116 ,710 ,463 1,088
-,319 ,201 2,518 1 ,113 ,727 ,490 1,078
16,470 4 ,002
,241 ,285 ,716 1 ,398 1,273 ,728 2,226
-,489 ,233 4,417 1 ,036 ,613 ,388 ,968
-,477 ,246 3,762 1 ,052 ,621 ,383 1,005
-,494 ,263 3,542 1 ,060 ,610 ,365 1,021
,284 ,213 1,772 1 ,183 1,328 ,874 2,018
,474 ,220 4,647 1 ,031 1,606
langue_util(1)
ages_groupe
ages_groupe(1)
ages_groupe(2)
ages_groupe(3)
arr
arr(1)
arr(2)
arr(3)
arr(4)
peintres_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, ages_groupe, arr, peintres_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Les maçons réfugiés et suisses sont clairement plus touchés par le phénomène de
déqualification que les étrangers « hors asile » (déqualification 55%) et les
européens (déqualification 46%). La présence étrangère est forte dans ce métier, et
le fait d’avoir un statut de réfugié semble être pénalisant.
Le modèle d’analyse logistique montre en effet que le fait d’être réfugié double la
probabilité d’être déqualifié par rapport aux étrangers hors asile. Au niveau de
l’année d’arrivée, la probabilité de déqualification est plus faible pour ceux arrivés
récemment, par rapport à ceux arrivés il y a plus de vingt ans. Elle l’est un peu moins
plus les années de présence augmentent. Les jeunes ont le risque le plus diminué de
ne pas être employés comme maçons, les langues ne jouant aucun rôle significatif.
(Tableau 11)
Tableau 11 : facteurs d’influence sur la déqualification des maç ons réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,796 ,207 14,751 1 ,000 2,217 1,477 3,327
-,088 ,108 ,658 1 ,417 ,916 ,741 1,132
12,677 3 ,005
-,602 ,179 11,352 1 ,001 ,548 ,386 ,777
-,181 ,146 1,533 1 ,216 ,834 ,627 1,111
-,254 ,111 5,228 1 ,022 ,776 ,624 ,964
53,041 4 ,000
-1,249 ,255 23,910 1 ,000 ,287 ,174 ,473
-1,232 ,204 36,652 1 ,000 ,292 ,196 ,435
-,918 ,210 19,022 1 ,000 ,399 ,264 ,603
-,542 ,221 6,034 1 ,014 ,582 ,377 ,896
1,419 ,206 47,559 1 ,000 4,134
macons_refugies(1)
langue_util(1)
age_groupe
age_groupe(1)
age_groupe(2)
age_groupe(3)
annee_arrivee
annee_arrivee(1)
annee_arrivee(2)
annee_arrivee(3)
annee_arrivee(4)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : macons_refugies, langue_util, age_groupe, annee_arrivee.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Le degré de déqualification des installateurs électriciens réfugiés est identique à celui
des étrangers « hors asile » (déqualification 61%) et proche de celui des Européens
et des Suisses (tout en étant légèrement inférieur à celui des Suisses).
Les plus jeunes électriciens présentent un risque de déqualification diminué de 49%
par rapport aux plus âgés. Aucun autre facteur ne joue de rôle significatif pour
l’insertion des étrangers considérés dans cette profession. (Tableau 12)
Tableau 12 : facteurs d’influence sur la déqualification des éle ctriciens réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,152 ,116 1,717 1 ,190 1,164 ,927 1,462
66,369 3 ,000
-,664 ,203 10,714 1 ,001 ,515 ,346 ,766
,307 ,212 2,097 1 ,148 1,360 ,897 2,061
,229 ,226 1,029 1 ,310 1,257 ,808 1,957
12,525 4 ,014
,316 ,200 2,500 1 ,114 1,372 ,927 2,031
-,140 ,170 ,674 1 ,412 ,869 ,623 1,214
-,259 ,177 2,135 1 ,144 ,772 ,546 1,092
-,286 ,205 1,953 1 ,162 ,751 ,503 1,122
-,118 ,158 ,562 1 ,454 ,889 ,652 1,210
,607 ,194 9,762 1 ,002 1,835
langue_util(1)
age_groupes
age_groupes(1)
age_groupes(2)
age_groupes(3)
arr
arr(1)
arr(2)
arr(3)
arr(4)
electr_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, age_groupes, arr, electr_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Les réfugiés menuisiers, ébénistes et charpentiers que nous avons regroupés en un
seul groupe professionnel, présentent le plus haut degré de déqualification parmi les
réfugiés professionnels du bâtiment (déqualification 76%). C’est un secteur ou près
de la moitié des Suisses et des Européens travaillent dans leur métier
(déqualification Suisses 52%, déqualification Européens 55%).
Le facteur « asile » aurait tendance à augmenter le risque de déqualification dans
cette profession, toutefois le modèle ne donne pas un résultat tout à fait significatif
pour cette variable. L’année d’arrivée récente (1-5 ans) vient augmenter le risque
d’être déqualifié de 110% par rapport à une arrivée plus ancienne (plus de vingt ans).
Le risque semble nettement réduit pour les plus jeunes menuisiers (-65%), et
diminué de 37% pour les 40-49 ans par rapport aux aînés. Le risque de
déqualification est multiplié par 1,3 lorsque la langue principale n’est pas une langue
nationale ou l’anglais. (Tableau 13)
Tableau 13 : facteurs d’influence sur la déqualification des men uisiers réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
,251 ,126 3,956 1 ,047 1,286 1,004 1,648
33,159 3 ,000
-1,050 ,199 27,878 1 ,000 ,350 ,237 ,517
-,339 ,197 2,950 1 ,086 ,713 ,484 1,049
-,450 ,184 5,968 1 ,015 ,638 ,444 ,915
18,294 4 ,001
,745 ,251 8,801 1 ,003 2,107 1,288 3,447
-,091 ,193 ,225 1 ,636 ,913 ,625 1,332
,199 ,212 ,882 1 ,348 1,220 ,805 1,849
,097 ,221 ,195 1 ,659 1,102 ,715 1,699
,386 ,201 3,669 1 ,055 1,471 ,991 2,183
,936 ,174 28,963 1 ,000 2,549
langue_util(1)
groupe_age
groupe_age(1)
groupe_age(2)
groupe_age(3)
annee_arrivee
annee_arrivee(1)
annee_arrivee(2)
annee_arrivee(3)
annee_arrivee(4)
menuisiers_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, groupe_age, annee_arrivee, menuisiers_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Chacune de ces professions du bâtiment est très fortement masculine, identiquement
dans tous les groupes d’étrangers et chez les Suisses.
La mécanique automobile (déqualification Suisses 70%) et l'électronique
(déqualification Suisses 78%) sont deux professions où les Suisses travaillent peu
dans leur profession. La déqualification y est également importante chez les
étrangers « hors asile » et surtout chez les réfugiés (déqualification réfugiés
mécanique auto 81% et électronique 82%).
Les plus jeunes mécaniciens ont un risque diminué de 66% d’être déqualifiés et ceux
arrivés il y a entre au plus 5 ans un risque triplé par rapport aux plus anciens arrivés.
La langue utilisée n’a pas d’influence, quant au fait d’être réfugié, il augmente le
risque de déqualification en le multipliant par 1,4. (Tableau 14)
Tableau 14 : facteurs d’influence sur la déqualification des mécaniciens autos réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
123,257 3 ,000
-1,068 ,254 17,631 1 ,000 ,344 ,209 ,566
-,129 ,268 ,233 1 ,629 ,879 ,520 1,485
,460 ,284 2,623 1 ,105 1,584 ,908 2,765
,151 ,104 2,095 1 ,148 1,163 ,948 1,427
53,279 4 ,000
1,129 ,228 24,561 1 ,000 3,093 1,979 4,834
-,112 ,164 ,467 1 ,494 ,894 ,648 1,233
-,248 ,170 2,121 1 ,145 ,781 ,559 1,089
,052 ,207 ,063 1 ,802 1,053 ,702 1,582
,393 ,191 4,224 1 ,040 1,482 1,018 2,156
1,486 ,253 34,536 1 ,000 4,419
ages_groupes
ages_groupes(1)
ages_groupes(2)
ages_groupes(3)
langue_util(1)
arr
arr(1)
arr(2)
arr(3)
arr(4)
mecano_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : ages_groupes, langue_util, arr, mecano_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Les facteurs « langue » et « asile » ne jouent aucun rôle dans l’insertion
professionnelle des électroniciens. Seuls ceux récemment arrivés (1-5 ans) ont un
risque accru de 212% d’être déqualifiés par rapport à ceux arrivés il y a plus de vingt
ans, et le groupe d’âge des 30-39 ans a un risque également augmenté (x 1,9) par
rapport aux plus anciens. (Tableau 15)
Tableau 15 : facteurs d’influence sur la déqualification des électroniciens réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
21,748 3 ,000
-,182 ,267 ,468 1 ,494 ,833 ,494 1,405
,669 ,274 5,957 1 ,015 1,952 1,141 3,340
,400 ,273 2,144 1 ,143 1,492 ,873 2,547
,052 ,160 ,107 1 ,743 1,054 ,770 1,441
26,793 4 ,000
1,138 ,290 15,411 1 ,000 3,122 1,768 5,512
,414 ,239 2,996 1 ,083 1,512 ,947 2,416
,105 ,256 ,169 1 ,681 1,111 ,673 1,833
-,325 ,263 1,521 1 ,217 ,723 ,431 1,211
,080 ,225 ,126 1 ,723 1,083 ,697 1,682
,803 ,233 11,859 1 ,001 2,233
groupe_age
groupe_age(1)
groupe_age(2)
groupe_age(3)
langue_util(1)
arr
arr(1)
arr(2)
arr(3)
arr(4)
elec_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : groupe_age, langue_util, arr, elec_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
La situation des boulangers réfugiés et « hors asile » est identique (déqualification
64%). Elle apparaît a priori plus favorable en termes d’insertion professionnelle que
celle des Suisses (déqualification 67%). Ils bénéficient peut-être du fait que les
Suisses formés comme boulangers ne recherchent pas tous à travailler dans leur
métier en raison de la pénibilité du travail.
Dans ce modèle, seul le groupe d’âge est déterminant dans le sens où les plus
jeunes (20-29 ans) ont un risque diminué de 80% par rapport aux plus anciens, et le
groupe des 30-39 ans un risque également diminué de 53%. (Tableau 16)
Tableau 16 : facteurs d’influence sur la déqualification des bou langers réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
12,716 4 ,013
,350 ,408 ,739 1 ,390 1,420 ,639 3,156
-,346 ,365 ,899 1 ,343 ,707 ,346 1,447
-,184 ,388 ,224 1 ,636 ,832 ,389 1,780
-,758 ,401 3,570 1 ,059 ,468 ,213 1,029
26,043 3 ,000
-1,579 ,369 18,265 1 ,000 ,206 ,100 ,425
-,746 ,377 3,925 1 ,048 ,474 ,227 ,992
-,801 ,364 4,840 1 ,028 ,449 ,220 ,916
,123 ,188 ,429 1 ,513 1,131 ,782 1,635
,032 ,256 ,015 1 ,902 1,032 ,624 1,706
1,684 ,366 21,171 1 ,000 5,386
annee_arr
annee_arr(1)
annee_arr(2)
annee_arr(3)
annee_arr(4)
age_groupe
age_groupe(1)
age_groupe(2)
age_groupe(3)
langue_util(1)
boulangers_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : annee_arr, age_groupe, langue_util, boulangers_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Les difficultés d’insertion professionnelle dans le secteur de l’agriculture augmentent
en fonction du statut de séjour : les Suisses ne sont que 42% à ne pas travailler dans
leur métier, les Européens 51%, les étrangers non Européens (« hors asile ») 68%,
et les réfugiés 87%.
Selon l’analyse effectuée ci-dessous, le fait d’être réfugié augmente fortement la
probabilité d’être déqualifié en la multipliant par 3,6 par rapport aux « hors asile ». De
même que l’arrivée 6-10 ans en arrière la diminue de 54% par rapport aux plus
anciens arrivés. Ni l’âge, ni la langue n’ont d’influence. (Tableau 17)
Tableau 17 : facteurs d’influence sur la déqualification des agr iculteurs réfugiés et « hors asile »
Variables dans l'équation
-,005 ,149 ,001 1 ,974 ,995 ,743 1,333
17,844 3 ,000
-,133 ,259 ,265 1 ,607 ,875 ,527 1,454
,266 ,226 1,390 1 ,238 1,305 ,838 2,031
-,447 ,232 3,710 1 ,054 ,640 ,406 1,008
14,133 3 ,003
-,318 ,306 1,079 1 ,299 ,728 ,400 1,325
-,773 ,287 7,279 1 ,007 ,461 ,263 ,809
-,329 ,313 1,104 1 ,293 ,720 ,390 1,329
1,307 ,252 26,818 1 ,000 3,695 2,253 6,061
1,218 ,329 13,690 1 ,000 3,380
langue_util(1)
age_groupe
age_groupe(1)
age_groupe(2)
age_groupe(3)
arr
arr(1)
arr(2)
arr(3)
agric_refugies(1)
Constante
Etape1
a
B E.S. Wald ddl Signif. Exp(B) Inférieur Supérieur
IC pour Exp(B) 95,0%
Variable(s) entrées à l'étape 1 : langue_util, age_groupe, arr, agric_refugies.a.
Source: Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population de l’année 2000
Remarques Quatre professions se dégagent de cette analyse : la médecine, l’informatique,
l’assistance sociale et la peinture en bâtiment. Les réfugiés au bénéfice d’une
formation dans ces professions apparaissent comme étant particulièrement bien
insérés dans le marché du travail. Cela ne nous ne permet pas d’avancer que
certains secteurs (santé, bâtiment, etc.) seraient plus ouverts à l’engagement des
personnes réfugiées. En effet, les chiffres à disposition pour les autres professions
des mêmes secteurs semblent ne pas le confirmer, même si ces chiffres ne
permettent pas de conclusions statistiques valables.
Le phénomène de qualification tel que nous l’avons défini se rencontre dans tous les
secteurs professionnels, également parmi les Suisses. Pour une partie, les emplois
ne correspondant pas à la formation initiale traduisent une déqualification
(notamment pour les étrangers), mais pas uniquement. D’autres raisons peuvent
amener les individus à ne pas travailler dans leur profession (femmes élevant
enfants, reconversions professionnelles, etc.).
Au niveau des facteurs susceptibles d’affecter le risque de déqualification des
migrants pris en compte (réfugiés et « hors asile »), notre analyse montre qu’une
arrivée récente a tendance à augmenter ce risque (temps d’adaptation), alors que
l’appartenance au groupe d’âge des jeunes est en général un facteur de diminution
du risque. Le facteur « asile » apparaît clairement comme un facteur d’augmentation
du risque de déqualification, même si les résultats entre les deux groupes au niveau
de la déqualification mesurée dans chaque profession, restent relativement proches.
Il est plus difficile de se prononcer sur la variable « langue » car les effets observés
ne concernent que huit professions sur quinze, mais dans tous ces cas, le fait de ne
pas déclarer une langue nationale ou l’anglais comme langue principale apparaît
comme un handicap pour l’insertion professionnelle des migrants. L’interprétation de
ce résultat est encore rendu plus difficile par le fait que le recensement informe sur la
langue principale, la mieux maîtrisée, mais ne donne aucune information de la
maîtrise des autres langues. Un étranger déclarant une langue non nationale comme
langue principale peut fort bien maîtriser également, parfaitement, l’allemand ou le
français.
Bien que cela ne soit aucunement mesuré ici, les réfugiés semblent pouvoir tirer un
certain profit, pour leur insertion professionnelle, d’une forte présence d’étrangers
dans leur profession. C’est en tous cas ce que laissent penser les résultats pour les
professions de médecin, d’infirmier, de peintre et de maçon. (Tableau 18)
Tableau 18 : facteurs d’influence sur la déqualification par profession pour les réfugiés et « hors asile »
Insertion professionnelle
des réfugiés
Professions Langue
autre Arrivée récente Jeunes Asile
+ Médecins + + (30-39 --) + Social + + - - + Infirmiers + + + + Peintres (6-10 --) - ≈ Informaticiens + + ≈ Electriciens - ≈ Boulangers - ≈ Maçons - - + - Cadres + + + - Médias + + (30-39 +) - Ingénieurs + - + - Menuisiers + + - (+) - Mécanos + - + - Agriculteurs (6-10 --) + -
Electroniciens + (30-39 +) 5. DISCUSSION Le degré de déqualification généralement un plus élevé chez les réfugiés, reflète
l’approche en termes d’adaptation économique rapide, généralement adoptée par les
pays industrialisés vis-à-vis des réfugiés, ainsi que l’a expliqué Bolzman. Néanmoins,
les résultats de ce travail convergent tous vers une même conclusion principale : une
similarité de situation des étrangers « hors asile » et des réfugiés statutaires, tant au
niveau des profils sociodémographiques que dans le domaine de l’insertion
professionnelle en Suisse, les deux groupes présentant un degré de déqualification
sensiblement plus important que les étrangers Européens. Nous pouvons en déduire
que l’origine commune des ressortissants de pays n’appartenant pas à l’Union
Européenne (notamment les pays dits du 3e cercle), est plus déterminante que le
permis de séjour sur les chances d’insertion professionnelle dans la profession
apprise. Le niveau de déqualification majeur observé pour les deux groupes va
également dans le sens d’un rapport de l’OFS32 qui indique un moins bon accès des
migrants non européens au marché du travail. Dès lors, des mesures visant une
diminution du phénomène de déqualification des migrants en Suisse, gagneraient en
efficacité à être développées non pas uniquement à l’intention des réfugiés
reconnus, mais à l‘intention des migrants en général. Différentes pistes ont été
dégagées des expériences européennes, mettant en avant la participation des
différents acteurs concernés (employeurs, autorités, migrants, corps de métiers,
institutions de formation, centres de conseil en emploi, etc.). L’acquisition de la
langue locale, aspect central de la politique d’intégration actuelle en Suisse, est
évidemment capitale. L’indicateur de la langue ne ressort toutefois pas de notre
analyse comme le facteur le plus déterminant pour l’insertion professionnelle des
migrants. En termes de mesures d’intégration, ce résultat parle en faveur d’autres
types de mesures pouvant s’avérer utiles dans l’identification des compétences des
professionnels d’origine étrangère séjournant en Suisse, pour favoriser leur
reconnaissance et finalement améliorer l’insertion professionnelle des migrants.
Comme le donnent également à voir ces résultats, le processus de transfert des
compétences nécessite une période d’acclimatation qui permette aux migrants, après
leur arrivée en Suisse, d’apprendre à s’orienter dans leur secteur professionnel. Les
mesures d’aide à l’insertion professionnelle répertoriées dans ce travail sur la base
d’expériences européennes se situent dans cette période du processus d’intégration
et relèvent d’une conception de l’intégration impliquant tous les acteurs concernés.
Dans cette vision, que nous pouvons qualifier de systémique, on ne désigne pas les
migrants comme étant ceux devant s’intégrer de manière unilatérale. L’intégration se
fait aussi bien de la part du système et de la totalité des acteurs concernés. Les
bénéfices de mesures visant une reconnaissance des compétences professionnelles
des migrants, se retrouvent au niveau d’une meilleure cohésion sociale à long terme
et c’est là, à notre sens, que se situe l’un de leurs principaux intérêts.
Un autre résultat se rapporte à l’ampleur du phénomène de déqualification au sein
des différentes professions retenues. Quatre professions ont été mises en évidence,
dans lesquelles les réfugiés sont particulièrement bien insérés en 2000 : les
médecins, les informaticiens, les professionnels du social et les peintres en bâtiment.
32 Haug, W. (2005).
En complément à ce travail, il pourrait être utile de s’intéresser aux parcours de ces
professionnels vers une reconnaissance de leurs qualifications professionnelles.
Les limites rencontrées dans ce travail sont liées d’une part aux données elles-
mêmes (indicateurs relativement « bruts », forte proportion de valeurs manquantes,
faibles effectifs), et d’autre part à l’imprécision des définitions utilisées pour les
professions et les variables retenues. Le manque de données relatives à l’asile limite
fortement les possibilités d’étudier la situation des migrants et son évolution. Lorsque
cette difficulté peut être dépassée par la reconstitution de fichiers, comme cela a été
le cas pour ce travail, la présence de non-réponses vient limiter les effectifs pouvant
être utilisés. Nous avons rencontré ce problème à propos de la question sur la
formation initiale et de celle sur la profession exercée. De plus, les données
finalement utilisées dans ce travail datent du dernier recensement et ne sont plus
d’actualité, par exemple en ce qui concerne le nombre de ressortissants par pays.
Quant aux professions analysées, nous avons tenté de nous intéresser qu’aux plus
précisément définies pour pouvoir dégager des résultats compréhensibles. Ce
problème de précision des définitions utilisées, qui concerne également la notion
même de déqualification, ne permet en aucun cas de dégager autre chose que des
tendances. Cela d’autant plus que les variables retenues n’expliquent que
partiellement le phénomène étudié. Malgré les limites de la démarche qui imposent
de considérer les résultats obtenus avec la précaution nécessaire, nous espérons
avoir pu dégager quelques contours de cette vaste problématique.
ANNEXES
Tableau 19 : Autorisation séjour – Réfugiés (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide Permis C (établissement) 17588 43,5 43,5 Permis B (séjour annuel) 22802 56,5 56,5 Total 40390 100,0 100,0
Tableau 20 : Autorisation de séjour - Hors asile certifié (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide Permis C (établissement) 167352 56,5 56,5 Permis B (séjour annuel) 125268 42,3 42,3 Permis A (saisonnier) 8 ,0 ,0 Permis L (séjour courte
durée) 3321 1,1 1,1
Autorisation DFAE 298 ,1 ,1 Total 296247 100,0 100,0
Tableau 21 : Origine – Réfugiés (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide candidats UE en 20041 589 1,5 1,5 Autres candidats UE 2 8956 22,2 22,2 Autres pays européens 81 ,2 ,2 Balkans 3 10929 27,1 27,1 Ex-URSS4 45 ,1 ,1 Afrique Ouest 363 ,9 ,9 Afrique Est 990 2,5 2,5 Afrique Nord 732 1,8 1,8 Afrique centrale 1490 3,7 3,7 Afrique Sud 2 ,0 ,0 Amérique Nord 2 ,0 ,0 Amérique Sud 1166 2,9 2,9 Amérique centrale et
Caraïbes 62 ,2 ,2
Asie Est 126 ,3 ,3 Asie Sud 5 10880 26,9 26,9 Asie Sud-Est 6 2481 6,1 6,1 Proche-Orient 1496 3,7 3,7 Total 40390 100,0 100,0
1 Malte, Pologne, Hongrie, Chypre, Slovaquie, Rép. tchèque, Slovénie, Estonie, Lettonie, Lituanie 2 Bulgarie, Roumanie, Turquie 3 Yougoslavie, Croatie, BiH, Macédoine 4 Moldavie, Russie, Ukraine, Biélorussie 5Afghanistan, Bhoutan, Sri Lanka, Inde, Iran, Maldives, Népal, Pakistan, Bengladesh, Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan, Ouzbékistan 6 Brunei, Myanmar, Indonésie, Cambodge, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam
Tableau 22 : Origine – « Hors Asile » Certifié (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide candidats UE en 2004 1 11157 3,8 3,8 Autres candidats UE 2 39171 13,2 13,2 Pays AELE 2053 ,7 ,7 Autres pays européens 561 ,2 ,2 Balkans 3 169590 57,2 57,2 Ex-URSS4 3985 1,3 1,3 Afrique Ouest 2429 ,8 ,8 Afrique Est 2204 ,7 ,7 Afrique Nord 8724 2,9 2,9 Afrique centrale 1940 ,7 ,7 Afrique Sud 667 ,2 ,2 Amérique Nord 10391 3,5 3,5 Amérique Sud 12999 4,4 4,4 Amérique centrale et
Caraïbes 5012 1,7 1,7
Asie Est 5641 1,9 1,9 Asie Sud5 6933 2,3 2,3 Asie Sud-Est 6 8942 3,0 3,0 Proche-Orient 2192 ,7 ,7 Australie/Nouvelle-
Zélande 1632 ,6 ,6
Océanie (autres) 24 ,0 ,0 Total 296247 100,0 100,0
1 Malte, Pologne, Hongrie, Chypre, Slovaquie, Rép. tchèque, Slovénie, Estonie, Lettonie, Lituanie 2 Bulgarie, Roumanie, Turquie 3 Yougoslavie, Croatie, BiH, Macédoine 4 Moldavie, Russie, Ukraine, Biélorussie 5Afghanistan, Bhoutan, Sri Lanka, Inde, Iran, Maldives, Népal, Pakistan, Bengladesh, Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan, Ouzbékistan 6 Brunei, Myanmar, Indonésie, Cambodge, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam
Tableau 23 : Origine et genre – Réfugiés (20-64 ans)
Genre
Homme Femme Total
candidats UE en 2004 333 256 589 Autres candidats UE 5603 3353 8956 Autres pays européens 47 34 81 Balkans 6837 4092 10929 Ex-URSS 24 21 45 Afrique Ouest 268 95 363 Afrique Est 516 474 990 Afrique Nord 547 185 732 Afrique centrale 934 556 1490 Afrique Sud 2 0 2 Amérique Nord 2 0 2 Amérique Sud 658 508 1166 Amérique centrale et Caraïbes 32 30 62
Asie Est 67 59 126 Asie Sud 7342 3538 10880 Asie Sud-Est 1363 1118 2481
Origine
Proche-Orient 1010 486 1496 Total 25585 14805 40390
Tableau 24 : Origine et genre - Hors Asile Certifié (20-64 ans)
Genre
Homme Femme Total
candidats UE en 2004 4596 6561 11157 Autres candidats UE 19802 19369 39171 Pays AELE 1100 953 2053 Autres pays européens 250 311 561 Balkans 88414 81176 169590 Ex-URSS 891 3094 3985 Afrique Ouest 1406 1023 2429 Afrique Est 939 1265 2204 Afrique Nord 5126 3598 8724 Afrique centrale 881 1059 1940 Afrique Sud 344 323 667 Amérique Nord 5296 5095 10391 Amérique Sud 3922 9077 12999 Amérique centrale et Caraïbes 1383 3629 5012
Asie Est 2105 3536 5641 Asie Sud 3380 3553 6933 Asie Sud-Est 2128 6814 8942 Proche-Orient 1401 791 2192 Australie/Nouvelle-Zélande 904 728 1632
Origine
Océanie (autres) 14 10 24 Total 144282 151965 296247
Tableau 25 : Profession apprise – Réfugiés (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide Agriculture 233 ,6 ,6 Arts et métiers 2877 7,1 7,1 Ingénieurs 481 1,2 1,2 Technique/informatique 954 2,4 2,4 Construction 1080 2,7 2,7 Commercial 657 1,6 1,6 Transports et poste 350 ,9 ,9 Services 2661 6,6 6,6 Médias 143 ,4 ,4 Artistes 133 ,3 ,3 Assistance sociale et spirit.
91 ,2 ,2
Enseignement 589 1,5 1,5 Sc. humaines 301 ,7 ,7 Sciences 156 ,4 ,4 Santé 1073 2,7 2,7 Sport et divertissement 7 ,0 ,0 Non classifiable 490 1,2 1,2 Ne s'apprend pas 2689 6,7 6,7 Sans indic. 25425 62,9 62,9 Total 40390 100,0 100,0
Tableau 26 : Profession apprise - Hors Asile Certifié (20-64 ans)
Effectifs Pourcentage Pourcentage
valide Valide Agriculture 1422 ,5 ,5 Arts et métiers 24195 8,2 8,2 Ingénieurs 4808 1,6 1,6 Technique/informatique 8049 2,7 2,7 Construction 10277 3,5 3,5 Commercial 7011 2,4 2,4 Transports et poste 2361 ,8 ,8 Services 22901 7,7 7,7 Médias 912 ,3 ,3 Artistes 2299 ,8 ,8 Assistance sociale et spirit.
858 ,3 ,3
Enseignement 4440 1,5 1,5 Sc. humaines 4661 1,6 1,6 Sciences 2281 ,8 ,8 Santé 10314 3,5 3,5 Sport et divertissement 133 ,0 ,0 Non classifiable 5565 1,9 1,9 Ne s'apprend pas 21057 7,1 7,1 Sans indic. 162703 54,9 54,9 Total 296247 100,0 100,0
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