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LA PORTEE EDUCATIVE DES ECOMUSEES: 1 LE CAS HAUTE-BEt \UCE par MAUDE CERE

Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

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En 1984, Maude Céré remet son mémoire de maîtrise à l'UQÀM qui s'intitule: La portée éducative des écomusées - Le cas Haute-Beauce. Il s'agit d'un mémoire qui est aussi un compte-rendu de son implication dans ce projet.Pour communiquer avec Maude Céré: [email protected]

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LA PORTEE EDUCATIVE DES ECOMUSEES: • 1

LE CAS HAUTE-BEt\UCE

par

MAUDE CERE

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UNIVERSITE DU QUEBEC

liJIE!VIOIRE

PRESENTE A

L'UNIVERSITE DU QUEBEC A MONTREAL

GOMME EXIGENCE PARTIELLE

DE LA MAITRISE EN ETUDE DES ARTS

par

MAUDE CERE

LA PORTEE EDUCATIVE DES ECOMUSEES:

LE CAS HAUTE-BEAUCE

DECEMBRE 1984

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AVANT-PROPOS

Le présent mémoire constitué de parties écrites et

audio-visuelles est le résultat de six années d'expéri­

mentation en Haute-Beauce où s'est déroulé la première

expérience écomuséale en Amérique du Nord, de 1978 à 1984.

A titre de pédagogue, d'intervenante sociale et de

créatrice, je possédais la préparation adéquate pour

orienter cette expérience dans le sens d'un projet d'édu­

cation populaire à l'échelle régionale.

Ma formation d'historienne de l'art a facilité l'uti­

lisation de l'institution muséale et de la muséologie

comme outils privilégiés au cours de cette démarche.

Grâce à la collaboration éclairée de plusieurs spé­

cialistes du Québec et du monde dans le domaine de la

nouvelle muséologie, notamment de Georges-Henri Rivière,

liù.gues de Varine Bohan, René Rivard et Pierre Mayrand,

j'ai pu nourrir constamment, de nouveaux apports criti­

ques et disciplinaires, ma réflexion sur mes pratiques

écomuséologiques.

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De multiples stages à l'étranger; aux Etats-Unis et

en France, m'ont permis de vérifier in situ la validité

des h ypothèses et des pratiques appliquées à la Haute­

Beauce.

II

Sans la coopération enthousiaste des travailleurs et

usagers de l'Ecomusée de la Haute-Beauce, je n'aurais pu

mener cette expérience à bien et en tirer les conclusions

qu'il m'est possible de livrer aujourd'hui dans ce mémoire.

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RESUME

Cette recherche a pour but de décrire les étapes à franchir dans le temps et dans l'espace, par un organisme muséologique à vocation d'éducation populaire, pour sus­citer chez une population donnée,un sentiment d'apparte­nance à son territoire, favoriser la prise en charge par cette même population de son développement global et lui permettre d'utiliser l'exposition comme mode d'expression.

La partie écrite et la partie audio-visuelle du mé­moire portent sur le même sujet, à savoir les différents processus éducatifs essentiels à l'éducation populaire, tant au point de vue de son insertion dans le milieu sco­laire, qu'au point de vue de son organisation. Il va de soi que le projet éducatif global sera mis en évidence. Afin de mieux en saisir la portée éducative mon sujet principal sera précédé d'une description des expériences écomuséologiques dans le monde et des conditions d'implan­tation de l'écomusée québécois.

Le vidéogramme fera voir les experlences concrètes tandis que le mémoire écrit fera comprendre les supports théoriques.

La conclusion établira qu'une action systématique d'éducation populaire, à l'intérieur d'une région donnée et par l'intermédiaire d'une institution muséologique, permet effectivement la prise en charge progressive par la population de ses éléments actifs (les animateurs naturels) grâce à des moyens d'expression visant au dé­veloppement concret de l'environnement.

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TABLE DES MATIÈRES

Page AVANT-PROPOS . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . • . . . . . • . . . . I

RES lJIVIE • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • -. • • • • • • I I I

TABLE DES MATIÈRES v

INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . 1

PARTIE I. MISE EN SITUATION . . . . .. . . .. .. .. .. . ... J CHAPITRE I. HISTOIRE DES ECOMUSEE DANS LE MONDE. 4

A. Histoire et concepts des écomusées .....•.• 4 B. L'interprétation comme mode de restitution. 10

C. Un outil de développement................. 10

D. Mouvement et créativité .•. . .. . . . ... .. . . ... 11

CHAPITRE II. CONDITIONS D'IMPLANTATION DE L'ECO­MUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE.......... 1J

PARTIE II. DIFFERENTES APPLICATIONS . .. ......... 24

CHAPITRE I. MILIEU SCOLAIRE.................... 25 A. Analyse psychanalytique de la création chez

l'enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 B. Taxonomie des objectifs ..................... J2

CHAPITRE II. EDUCATION POPULAIRE . .. ... . .. .. . .. . J4

A. Processus de création....................... J4 B. Mémoire collective.......................... 42 C. Ouverture sur l' exté.ri eur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

CHAPITRE III. ORGANISATION ET CONCERTATION .. . . . 55

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v Page

PARTIE III. FONDEMENTS PEDAGOGIQUES DE L'ECO-MUSEE ......•...................... 59

CHAPITRE I. LE PROJET EDUCATIF ............... . 60 A. Pourquoi se mettre en situation d'apprentis-

sage ...................................... . 6o B. La recherche-action par l'intervention ..... 62 C. L'organisateur, l'intervenant, l'animateur

le facilitateur, ou le catalyseur .. ~ ...... . 64

CONCLUSION .................................... . 69

BIBLIOGRAPHIE ................................. . 70

APPENDICES ....................................• 74

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INTRODUCTION

L'idée principale de ce mémoire consistera à présen­

ter l'écomuséologie comme un outil privilégié d'éducation

populaire.

Un objectif d'éducation populaire ne s'atteint pas

par l'imposition de formules toutes faites. Il est plu­

tôt basé sur des démarches qui suivent l'évolution d'un

milieu par l'évaluation constante des résultats et des

moyens, sous forme d'auto-évaluation. Ces processus peu­

vent se dérouler sur des périodes très longues qui échap-

pent parfois à la durée des programmes, à la planifica­

tion et aux contenus pré-établis. L'écomusée se définis­

sant lui-même comme un processus en évolution par son

caractère d'expérimentation sociale, il devient donc lui

aussi partie prenante de cette problématique.

Les objectifs spéèifiques seront élaborés en fonction

des trois grandes catégories d'action éducative sur les­

quelles s'est penché le Laboratoire d'expérimentation

didactique en milieu rural de l'écomusée, dans sa phase

initiale d'implantation, de 1979 à 1982. Ces catégories

sont: le milieu scolaire, l'éducation populaire et

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l'organisation. Il s'agira également d'établir de quelle

façon ces objectifs spécifiques ont contribué à la réali-

sation de l'objectif global de l'écomusée tel qu'exprimé

par le modèle théorique (1982-198.5).

_/ Interprétation

Retro- t• ac lon

/ Ecomusée ......::,....--------·

~ sensibi- 1 . t· lSa lon

~ Création------ Territoire

Pour la rédaction de ce mémoire, il a fallu faire ap­

pel à différentes disciplines; la muséologie, la psy cholo-

gie, la psychanalyse, la sociologie et la pédagogie.

La présentation audio-visuelle illustre les expérien-

ces concrètes de l'écomusée alors que la partie écrite dé-

gage les concepts théoriques à la base du projet éducatif.

2

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PREMI:E:RE PARTIE

MISE EN SITUATION

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CHAPITRE I

HISTOIRE DES ECOMUSEES DANS LE MONDE

Le présent chapitre portera sur l'histoire des éco­

musées et les concepts sous-jacents à l'interprétation

comme mode de restitution; il traitera également de l'éco-

musée comme outil de développement de même que du mouvement

et de la créativité qui contribuent à sa dynamique.

A) Histoire et concepts des écomusées

Création d'un âge pré-industriel conservé par les tics des littérateurs et les inhibitions des snobs, le musée est théoriquement et prati­quement lié à un monde (le monde européen), à une classe (la classe bourgeoise cultivée), à une certaine vision de la culture (nos ancêtres les Gaulois et leurs cousins tous grands doli­chocéphales blonds aux yeux bleus~) 1.

1 Stanislas S. Adotevi, Le musée au service des hommes aujourd'hui et demain, Paris, Maison de l'Unesco, 1972, "Le musée dans les systèmes éducatifs et culturels contemporains'; p. 21.

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5

Cette critique sévère du musée n'est pas le propre

d'un contestataire isolé, elle est partagée par plusieurs

praticiens de la muséologie et par ceux qui ne fréquentent

pas les musées, faute de pouvoir s'y retrouver.

Depuis une trentaine d'années, des efforts sincères

ont été tenués systématiquement pour rejoindre un public

plus large. Cours, conférences, tables rondes, rencontres

complétant les expositions, organisation du bénévolat ap-

pelé - "les amis du musée", expositions itinérantes et

trousses éducatives, voilà autant de moyens pour tendre

vers la démocratisation de l'institution muséale.

Mais il est particulièrement intéressant de constater les changements qui s'opèrent un peu partout, tendant à accorder une importance accrue aux différentes formes de participation du public; et il importe de bien comprendre comment le musée adapte des fonctions tradi­tionnelles à des méthodes d'éducation actives, dans son enceinte et à l'extérieur, de manière à s'intégrer plus profondément à la vie cou­rante, celle de l'enfant comme celle de l'adul­te 1.

L'implantation des musées de plein-air vers la fin

du XIXe siècle en Suède et dans les autres pays scandi-

naves et celle en France des musées de terroir et des

musées d'identité de même que la formule originale des

1 Renée Marcousé, Musées, imagination et éducation, Paris, Unesco, 1973, "La transformation des musées dans un monde en transformation", p. 24

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musées de voisinage aux Etats-Unis, constituent des exemples

concrets d'une recherche active pour obtenir la participa-

tion du public. Ces expériences, d'ailleurs concluantes,

sont considérées comme des parents des écomusées.

Le concept d'écomuséologie fait son apparition en

France à la fin des années soixante, avec la création des

Parcs Naturels Régionaux; il se concrétise officiellement

par l'ouverture en 1973 de l'Ecomusée de la Communauté

Urbaine Le Creusot-Montceau-les-mines, lequel mettra au

point une politique de développement culturel et économi-

que.

C'est Jean-Pierre Gestin du Parc Naturel Régional

d ' Âmorique qui fera, le p r emier, le li en entre la mu sée-

graphie et l'écologie.

Ces éléments d'un équipement pédagogique et culturel ne sont pas des émanations issues de deux cerveaux limités par la spécificité même du cadre qu'ils se sont forgés: nature d'une part, culture d'autre part. Chacun au con­traire est intimement lié à l'autre et procède d'un même con texte "é comusé ographiq ue" po ur­rait- on dire 1,

Vient ensuite, Hugues de Varine Bohan, secrétaire du

Conseil international des musées, qui proposera et in-

ventera en 1971 le terme "écomusée", pour un discours

1 François Hubert, Hervé Joubeaux, Jean-Yves Veillard, Découvrir les écomusées, Rennes, 1984, p. 18

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7

du ministre de l'Environnement, alors M. Robert Poujade.

C'est à ce moment que la définition commence à s'ar-

ticuler, s'animer; on assiste à de nombreux débats et on

propose des pratiques variées. Georges-Henri Rivière ré-

dige sa définition évolutive de l'écomusée, laquelle tient

compte de~ fonctions traditionnelles du musée (laboratoire,

conservatoire, école), mais les délègue aux populations

usagères (voir cette définition en annexe). Pour sa part,

Hugues de Varine va plus loin en proposant presque la

rupture avec l'institution élitaire traditionnelle, dans

le but de provoquer un mouvement socialisant; il désire

créer un outil pour l'identification des peuples, la prise

en charge et le pouvoir "des cultures", plutôt que de

"la Cul ture".

François Hubert, rédacteur principal du catalogue de

l'exposition "Découvrir les Ecomusées", nous donne une dé-

finition qui rallie peut-être les différentes pratiques

écomuséologiques dans le monde.

Outil d'interprétation d'un territoire dans le temps, l'écomusée propose une définition élargie du domaine d'intervention muséogra­phique, non plus tel type d'objet étudié avec les méthodes de telle discipline, mais l'en­semble des phénomènes naturels et culturels d'un territoire, et leurs relations étudiées

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conjointement par la totalité des disciplines. L'écomusée se situe donc au lieu de conver­gence des

1sciences naturelles et des sciences

humaines

Le musée doit donc s'ouvrir, éclater hors les murs

pour pouvoir conserver dans leur contexte réel (in situ)

les patrimoines du temps et de l'espace, c'est-à-dire les

objets et la mémoire des savoirs et des savoir-faire.

La méthode traditionnelle utilise la chronologie,

tant dans la présentation de ses expos.i tions que dans

l'ordre d'entrée en jeu des spécialités afférentes à la

pratique muséologique: le conservateur détermine le conte-

nu, le chercheur étoffe la matière, le designeur la met en

forme et l'animateur après coup en assume la diffusion.

La muséologie: linéaire, à sens unique

8

bâtiment ... collection,.. documentation~ recherche-=- diffusion

conservation v le public la société ~----------~---------/

les experts

La pratique écomuséale est bien différente, puisqu'elle

adopte une méthode interdisciplinaire et qu'elle traite

l'exposition de façon systémique.

1 François Hubert, op. cit., p. 14

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L'écomuséologie: communication en tous sens

recherche patrimoine

territoire conservation documentation

interaction au niveau de la communauté

animation population

Le Comité de muséologie de l'ICOM adoptait en 1982 à

Paris cette proposition:

L'interdisciplinarité est à la base même de l'écomusée parce que:

-1-

le processus de muséalisation traditionnelle se donne à travers les différentes activités qui vont de la recherche, conservation à la communication, diffusion et documentation en passant par la présentation; activités à tra­vers lesquelles on peut en détacher les sciences qui participent (sc. de l'art de l'homme, de la nature, de l'univers et des techniques avancées).

-2-

1' action interdisciplinaire s.e produit par­ticulièrement dans le rapport et les acti­vités ou actions organiques des différentes sciences qui font la thématique· même de la pratique muséographique, l'architecture elle-même s'intégrant dans le même système.

9

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-3-

l'adhésion de la population, du territoire déterminé ~ à la conception, la réalisation et la gestion implique l'interaction de l'en­semble des disciplines de base de même que 1' apport des "SavoirS" et "Savoir-faire" popu­laires. Tout cet ensemble constitue les ca­ractéristiques essentielles de l'écomusée.

B) L'interprétation comme mode de restitution

Le milieu privilégié est interprété par et pour les

10

gens qui le composent, en utilisant toutes les techniques

interprétatives permettant à cette population d'exprimer

ce qu'elle est, de participer collectivement à la conser­

vation et à la mise en valeur de son patrimoine naturel et

historique, de communiquer sa vision personnelle sur son

développement futur et de manifester son ouverture sur le

monde.

C) Un outil de développement

Le développement, comme le souligne Hugues de Varine,

prend sa source dans la conscientisation, s'engage ensuite

dans une étape d'étude et d'identification des problèmes et

enfin aboutit au choix des solutions et à leurs applica-

tions, par un processus naturel de décision.

Les conséquences de ce développement sont le rejet des inhibitions et des contraintes qui permet à la personne d ' .ê t re elle-même, d'avoir un comportement fécond, de ne pas vivre la

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répitition du passé, mais plutôt de laisser s'exprimer sa personnalité profonde. Le comportement de ceux qui sont engagés dans cette réalisation d'eux-mêmes n'est pas appris mais inventé, libéré plutôt qu'ac­quis, exprimé plutôt que copié 1,

D) Mouvement et créativité

J.:=t réalisation collective d'une exposition apporte

une satisfaction sans borne. Déterminer les thèmes, les

11

sous-thèmes, le fil conducteur, les formes, les couleurs,

la circulation, étoffer les contenus; puiser dans la mé­

moire collective; utiliser des obje±s témoins; voilà tous

des éléments de parcours qu'on peut qualifier de mouvement

en collégialité permettant d'adhérer en consensus à la

notion d ~identité originelle.

La créativité est à la fois l'origine et le principe moteur de la synergie qui croît avec chaque mouvement et qui en assure le dévelop­pement avec enthousiasme et satisfaction de bien-faire 2.

1 Abraham H. Maslow, Vers une psychologie de l'être, Paris, Unesco, 1979, p. 45

2 René Rivard, Que le musée s'ouvre, Québec, 1984, texte inédit, p. 41

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Le triangle de la créativité de l'écomusée de la Haute-Beauce

Interprétation

Rétro- / action

~ Sensibili-

sation

~ / Ec omusé e .... -<-=:::.------ Création------ Territoire

Le processus de création de l'écomusée a commencé par

une démarche d'interprétation mise au point par des spé­

cialistes. Son pouvoir de diffusion a permis de sensibi-

liser la population aux notions d'identité et d'appropria-

tion du patrimoine-action, pour en arriver à dégager

clairement le sens de la territorialisation. Grâce à des

techniques de créativité, d'auto-apprentissage et de réa-

lisations collectives, on a obtenu l'écomusée. Par un

phénomène de rétroaction, cette population peut maintenant

interpréter elle-même ce qu'elle est et déterminer les

orientations de son développement.

Il faut souligner que la créativité dans la réalisation de soi est à situer davantage au niveau de l'expression et de l'existence qu'à celui de la résolution dis problèmes ou de la réalisation des oeuvres .

1 Maslow, op. cit., p. 164

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CHAPITRE II

LES CONDITIONS D'IMPLANTATION DE L'ECOMUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE

C'est le géographe Louis-Edmond Hamelin qui le pre­

mier, en 1957, nomme Haute-Beauce les côteaux, entourant

sur les trois côtés, tel un fer à cheval, la vallée de la

rivière Chaudière. Il faut attendre en 1978 pour que ce

nom soit donné à notre région, grâce à l'inspiration de

Pierre Mayrand lors de la création du Musée et Centre

régional d'interprétation de la Haute-Beauce. Depuis 1983,

ce centre est devenu Ecomusée, et comme Musée Territoire,

il réunit aujourd'hui 13 collectivités rurales divisées en

16 municipalités (trois d'entre elles ayant une corporation ,

municipale pour la paroisse et une pour le village). Au

total, seize mille personnes habitent l'arrière-pays de

Beauceville et de Saint-Georges, ce plateau aux larges

horizons généralement balayés par des vents d'ouest.

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Situé d'une part entre le sillon de la Chaudière et

les Cantons de l'est, et d'autre part entre la région de

l'Amiante au nord et celle du Lac-Mégantic au s"'r, le

plateau de la Haute-Beauce est un corridor de vents, parce

qu'entièrement compris entre deux grands plis appalachiens.

Il semble que l'orogénèse ou la formation des Appalaches

remonte à l'Ordovicien moyen, quand les plaques ou conti­

nents nord-américain et européen entrèrent en collision

il y a environ 470 millions d'années.

Hier encore, il y a 12 800 ans, les glaciers quittaient

pour de bon (?) notre plateau, permettant ainsi à la toundra,

à la taiga et aux premiers Hommes Rouges de s'installer. Ils

fréquentent assidûment la Haute-Beauce, particulièrement

le lac Saint-François et la rivière Le Bras, où l'histoire

retrace certains de leurs campements. Il faut peut-être "'

voir un reflet de l'âme indienne dans la mentalité pion­

nière du Haut-Beauceron, dans son besoin vital de vastes

horizons, dans le rut annuel de la chasse ou encore dans

la frénésie irrésistible du temps des sucres.

La colonisation tardive de la Haute-Beauce s'explique

par une foule de facteurs. Après l'Acte constitutionnel

de 1791, l'administration britannique divise en cantons

les terres qui n'avaient pas déjà été concédées en seigneu­

ries par les Français. Aussitôt qu'un nouveau Township,

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15

généralement un carré de 10 milles de côté, est officielle­

ment proclamé, de riches marchands anglais s'approprient

l a majorité des terres. Ainsi, le canton de Dorset (1799)

est, le jour même de sa proclamation entièrement concédé

à un dénommé John Blake. Il en va de même pour les town­

ships de Tring (1804) et de Shenley (1810). Les cantons

sont soumis à la loi anglaise et à la spéculation foncière

et, comme les Canadiens-français sont habitués de recevoir

gratuitement la terre de leur seigneur en échange d'une

rente annuelle minime, il faudra un malaise agricole pro­

fond pour les pousser à aller s'établir dans ces régions.

Après 1832, la situation agricole du Québec est criti­

que. Les famines et les mauvaises récoltes se succèdent,

à cause de l'appauvrissement des sols dÛ à la monoculture

du blé destiné à l'exportation et à l'usage routinier de

techniques traditionnelles inappropriées: pas de rotation

de culture, pas de jachère, pas de fumier. La baisse des

prix causée par l'ouverture du marché impérial à la concur­

rence étrangère aggrave encore l'endettement des fermiers.

~e surpeuplement des vieilles seigneuries de la région de

Québec et même de la Nouvelle-Beauce se traduit par un

morcellement des terres, par l'encombrement des petits

métiers de village et par le refoulement de la jeunesse

rurale vers le prolétariat des chantiers. Aussi, quand,

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16

en 1854, le gouvernement s'entend avec la Chambre des dé­

putés pour abolir tant le système seigneurial que celui

des townships, qui seront remplacés par l'institution

municipale, la colonisation de la Haute-Beauce débute avec

ardeur.

La forêt du plateau est restée vierge, méconnue. Of­

ficiellement, ce n'est qu'en 1837 que le premier homme

blanc, un chasseur, "découvre" la petite mer intérieure

qu'est le lac Saint-François. Comme il arrive souvent,

les premiers explorateurs ont joué le rôle d'arpenteurs et

ont préétablis le tracé géométrique des routes et des rangs.

Puis, accourant des vieilles paroisses de Bellechasse, de

Dorchester et de Beauce, les défricheurs sont suivis de

peu par leurs familles. Le pays est difficile. L'alti­

tude du plateau (400 mètres en moyenne) réduit la saison

végétative à une centaine de jours et prGlonge à six mois

la durée d'un hiver blanc et neigeux. Le sol argile­

sableux est truffé de blocs morainiques qui éventrent à

chaque labour la terre nourricière. Le piteux état des

routes rend presque impossible le commerce avec la seule

"ville-marché" d'alors: Québec. Aussi, on doit se résou­

dre à brûler le bois qui ne peut~être utilisé sur place

dans la construction de la maison de colonisation ou des

bâtiments de ferme. Enfin, l'isolement favorise l'im­

plantation de nouvelles cultures comme les haricots, la

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pomme de terre et le navet. La subsistance s'organise. Un

nouveau coin de pays vient de naître; ce sera la Haute­

Beauce.

La paroisse se fonde autour de l'église, que l'on

construit sur une crête marquée à la hache par le curé­

missionnaire de Beauceville. Les rentiers s'y installent

et bientôt les "villages-sommets :•, de Saint-Victor, Saint­

Ephrem et Saint Evariste pointent à l'horizon. Enfin,

la construction en 1894 du chemin de fer du Québec-Central,

grâce à l'acharnement du député-sénateur Bolduc de Saint­

Victor, provoque le développement de l'élevage laitier, la

multiplication des beurreries et des fromageries, la coupe

systématique des oois de Dorset, l'exploitation des car­

rières de granit des monts Saint-Sébastien, le développe­

ment général du commerce et de l'industrie. La population

double, car c'est l'époque des grosses familles. Dans les

années 40, grâce au sens de l'invention et de l'initiative

de la population, on assiste à la création d'industries

dans les domaines de la mécanique, de la métallurgie, du

meuble, du cuir, du vêtement et du textile. Après la

prospérité qui a suivi la dernière guerre et malgré l'es­

prit de débrouillardise traditionnel, la région ne peut

ralentir le mouvement migratoire des jeunes vers les villes.

Enfin, avec la Révolution tranquille et le transport sco­

laire de tous les étudiants vers les polyvalentes, les

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différences sociales entre les rangs et les villages, entre

la campagne et les petites villes s'amenuisent. Une nouvel­

le mentalité de banlieusard réformiste appa __ ît.

Mais sous le vernis moderniste, même le chevalier de

l'industrie cache son attachement profond au milieu et aux

valeurs traditionnelles.

La relative absence de mobilité fait que la vie se déroule toute entière dans le même espace, ce qui comporte un attachement au terroir et aux groupes naturels, d'où la cohésion des groupes, la régulation socio­morale acceptée, le mélange des "classes sociales", la polyvalence des leaders, le primat du pr~jet collectif sur les choix indiv iduels .

Certaines caractéristiques de la société rurale tra-

ditionnelle disparaissent, comme l'identification de la

famille aux unités de production et de consommation; d'au-

tres s'estompent, telle la structure hiérarchique de l'au-

torité du député, du curé et du père de famille. Les

femmes, longtemps confinées aux organisations féminines,

commencent à jouer un rôle social. Généralement instrui­

tes et cul t i v ées , elles règnent toujours sur les affair es

domestiques. Enfin, le zonage agricole a prouvé une fois

de plus que le vrai pouvoir est entre les mains des fonc-

tionnaires.

1 Roger lflucchielli, Psycho-sociologie d'une commune rurale, Paris, ESF, 1976, p. 9

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Pourtant malgré une mécanisation poussée, le monde

rural demeure en lutte contre la Nature.

Le rural lutte contre les conditions météo­rologiques, contre la végération spontanée, contre les animaux dévastateurs ou préda­teurs, contre les maladies des végétaux et des animaux, etc... Il "attend" pour ainsi dire ses frustrations, ses échecs et ses réussites, ... de la Nature alors que le ci­tadin les "attend" de la Société" 1.

19

Il semble que la faible densité de population favori-

se encore l'entraide et les relations interpersonnelles

franches et joviales. On accourt à la moindre occasion

de se rencontrer, de se tenir coude à coude. Les lieux

de rencontres, magasin général (quincaillerie), épicerie,

bureau de poste, restaurant et hÔtel, salon funéraire,

cercle de fermières, club de l'âge d'or, encans, sont

toujours aussi animés. Mimiques et force gestes ponc-

tuant la parole. Les conflits de générations sont moins

criants, puisque souvent le père et le fils travaillent

ensemble au bois ou au champs. Enfin, on accueille les

étrangers avec une chaleur qui ne se dément pas. "On

aime encore la visite et quand elle vient, c'est la fête".

* Diaporama Paysmage 1983.

1 Roger Mucchielli, Op. cit., p. 8

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20

Pour conclure cette description de la Haute-Beauce,

nous avons fait parler les statistiques. De 1976 à 1981, la

population s'est accrue de JOO personnes, ~e qui constitue

la première hausse depuis trente ans. Curieusement, le

groupe des jeunes et celui des g~ns âgés sont plus nom­

breux chez nous que dans l'ensemble de la Province. Les

pyramides des âges de toutes les municipalités concordent:

la bande la plus large va au 15-24 ans, puis la base se

rétrécit. Par contre, on assiste depuis 76 à une reprise

de la natalité. Fait troublant, il y a 507 femmes de moins

que d'hommes. Seul La Guadeloupe fait exception avec un

surplus de 84 femmes. En étandant nos recherches aux MRC

voisines, nous avons découvert que toutes les municipalités

rurales, sans exception, connaissent le même déficit, e t

que dans les villes les femmes se retrouvent en grosse

majorité. Il semble que les filles poursuivent leurs étu­

des plus longtemps que les garçons, mais que, par contre,

plus elles sont instruites, plus il est difficile pour

elles de se trouver un emploi dans la région. En 1976, la

moitié de la population n'avait pas complété une 9e année

d'étude. Le taux de scolarité des paroisses et des rangs

était plus élevé que celui des villages, probablement à

cause du poids démographique des rentiers. La même année,

45% des femmes étaient considérées comme étant sur le mar­

ché du travail et le taux de chômage n'atteignait pas 5%.

Page 28: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

21

La contribution du secteur manufacturier à l'économie de

la région est de 13% plus importante que dans le reste du

Québec. L'industrie textile, celle du vêtement et celle

qui se rapporte à la transformation du bois occupent cha­

cune 40% de la main d'oeuvre. La prospérité du secteur du

granit est telle que malgré la crise économique, le chÔ­

mage est nul à Lac-Drolet. Parce que fréquemment nos gens

vont faire leurs achats hors de la région, parce que le

socio-culturel est encore jugé non économique et parce

que nous avons toujours été mal desservis par l'adminis­

tration publique, les fonctions commerciales, socio-cultu­

relles et administratives ont peu d'importance en Haute­

Beauce.

Comme nous venons de le laisser sous-entendre, la

Haute-Beauce a été négligée par les gouvernements et sa

situation géographique, son éloignement, en sont peut-

être l'explication. Jusqu'en 1912, toute la région fait

partie du comté fédéral de Beauce. Mais depuis, nos 16

municipalités sont continuellement écartelées entre les

régions administratives de Québec et celle de l'Estrie,

entre les bassins d'influence de Saint-Georges, de Thetford­

les-Mines et de Lac-Mégantic, entre les MRC Beauce-Sar­

tignan, Robert Cliche, de l'Amiante et du Granit. Bref,

nous sommes toujours marginaux, en périphérie, sur la

Page 29: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

22

frontière; donc oubliés. Peut-être un peu aussi pour cet­

te raison, notre région n'a jamais été assaillie par tous

les prétendus experts du développement régional que sont

les animateurs sociaux, les ethnologues, les sociologues,

les géographes et les économistes de tout acabit. C'est

donc dans un pays vierge et encore accueillant que

l'Ecomusée est né.

Apres un an d'animation, en 1978-1979, le CRIHB enr.

(Centre régional d'interprétation de la Haute-Beauce)

tente de sensibiliser la population et les élus, par l'in­

termédiaire des média et de rencontres officielles, sur

la possibilité d'uni~ les intérêts culturels de la région

et la sauvegarde de la collection Napoléon Bolduc dans

un Musée et centre régional d'interprétation de la Haute­

Beauce. Six personnalités de la région forment le pre­

mier conseil d'administration. L'entreprise obtient sa

charte en octobre 1979 et un mois plus tard, nous avions

recueilli 27 000 $ auprès de la population pour faire le

premier versement sur la collection. Celle-ci sera en­

tièrement payée par la population (60 ooo$), et le der­

nier chèque a été remis en décembre l98J.

Jamais dans l'histoire des musées, on n'avait vu

un phénomène pareil. Cette collection de mille six cent

objets ethnographiques devient donc l'élément déclencheur

ou prétexte permettant à la population haute-~eauceronne

Page 30: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

23

d'exprimer son sentiment d'appartenance et de fierté et ce,

grâce à la créativité démontrée par un de ses membres, le

collectionneur Napoléon Bolduc.

Nous verrons dans les chapitres qui suivent les évé­

nements marquants de l'aventure muséologique haute-beau­

ceronne, mais nous fournirons les renseignements d'ordre

chronologique en annexe.

Page 31: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

DEUXI~E PARTIE

DIFFERENTES APPLICATIONS

Page 32: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

CHAPITRE I

MILIEU SCOLAIRE

Généralement, dans les musées traditionnels, le ser­

vice éducatif, lorsqu'il existe, s'adresse presque exclu­

sivement au milieu scolaire. En effet, dans l'esprit de

plusieurs, éducation égale enfants, comme si le principe

d'auto-apprentissage ne devait pas se prolonger tout au

long de notre vie. Malgré que nous nous attacherons sur­

tout ici au programme des trousses éducatives lancé dans

les écoles de notre région, il demeure que cet exemple

d'action éducative s'inscrit dans un continuum qui inclue

l'âge adulte. Nous avons intitulé notre programme "Musée,

école de liberté" en nous inspirant du spécialiste polo­

nais de l'éducation muséale, André Spakowski.

Page 33: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

L'exposition est le langage du musée. L'ex­position doit être ·faite de manière telle que le codage du spécialiste n'en empêche pas le décodage par le public et en évitant d'impo­ser à ce dernier une sorte d a conditionnement culturel, non moins néfaste que l'ignorance. Le musée doit être facteur d'esprit critique, école de liberté1.

Pour illustrer cette pensée, nous avons fabriqué une

affiche montrant un enfant seul devant ses interrogations

et essayant d'y répondre. Comme l'image de l'école et du

musée n'y apparaît pas, c'est vraiment l'enfant qui trou-

vera sa vérité et ce, sans béquilles institutionnelles.

Cette affiche a été distribué généreusement à tra­

vers les écoles de la région et a connu un bon succès.

Serait-ce à cause de son titre subversif ou du besoin

d'apporter un complément d'activités à l'école? Nous ne

saurions vraiment le dire, mais nous supposons qu'il y a

un peu des deux. Grâce à la curiosité et à l'attrait

qu'elle a suscités, cette affiche a fait son chemin auprès

de la grande commission scolaire régionale de la Chaudière.

La présentation de ce programme au corps professoral

a eu pour effet de flatter l'autorité des enseignants,

1 André Spakowski, Musées, imagination et éducation, Paris, Unesco, 1973, "La collaboration entre le musée et l'école", p. 157

26

Page 34: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

puisque le processus commence par l'utilisation d'une

trousse-musée dans le giron même de l'instituteur, dans

1' environnement quotidien de 1' élève: la classe.

27

C'est l'instituteur qui détermine le rythme et choi­

sit la terminologie adéquate pour faire passer le contenu

de la trousse. Cette trousse a été conçue de façon théâ­

trale. Elle s'ouvre comme un tryptique aux volets colorés

selon les teintes chaudes et vives de l'Ecomusée: jaune,

rouge et vert.

Des notions clés sur le musée contenues dans le pre­

mier volet, on passe au thème récursif "la main", inspiré

de la présence de l'homme à travers les objets de la col­

lection permanente Napoléon Bolduc, on finit par des sug­

gestions de travaux à réaliser dans le troisième volet.

Le proccessus s'étant engagé autour de l'enseignant et de

la trousse, l'enfant détermine maintenant l'objectif qu'il

désire atteindre. Chaque enfant détermine son projet en

fonction de ses connaissances, de son milieu, de ses habi­

lités et de la satisfaction qu'il éprouvera à créer l'oeu­

vre de son choix.

La deuxième étape consiste à visualiser les objets et

les concepts du musée. Les enfants sont reçus dans la

salle à dîner des curés, lieu impressionnant, mais tout

de suite démystifié par l'accueil de l'animateur (triee).

Page 35: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

On vérifie les objectifs qu'ils se sont eux-mêmes fixés,

on complète l'information donnée en classe tout en tes-

tant les connaissances acquises. On explique alors le

processus du jeu "apprendre à voir" et puis c'est la

visite de la collection permanente où chacun va libre­

ment, à son rythme. Ensuite, c'est la période de ques­

tions où les enfants, en faisant l'effort de bien décrire

l'objet de leur interrogation, se rendent compte qu'ils

connaissent déjà la réponse. Enfin, on termine par une

séance de dessin, où l'enfant choisit un objet à dessiner

parmi les pièces de la collection permanente. Ceci nous

permettra par la suite d'analyser la perception et les

goûts des enfants selon le sexe, l'âge et le milieu (ru-

ral ou urbain), a f in de déterminer l'approprioception de

l'enfant de la Haute-Beauce par rapport à son univers et

ainsi améliorer les expositions et les programmes éduca-

tifs.

Le processus prend fin avec la réalisation de l'ob-

jectif de l'enfant, qu'il s'agisse de sculpter du bois,

' de faire du tissage, de rédiger un article ou un poeme,

de faire tout simplement une recherche, ou encore de fa-

briquer une petite maquette avec des matériaux de récupé­

ration, etc .•. Le musée suggère fortement de monter une

exposition avec tous ces travaux pour aller jusqu'au bout

de l'objectif affectif du programme, qui est finalement

28

Page 36: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

29

d'apprendre à aimer le musée et à y trouver satisfaction

et plaisir.

Avant d'aborder la taxonomie des objectifs, il faut

comprendre que le programme éducatif est ouvert en ce sens

qu'il est axé sur le développement de l'enfant, lequel

doit apprendre à déterminer ses propres désirs, à décou­

vrir la façon d'y répondre, à se donner les outils qui

conviennent et à prendre plaisir à exécuter jusqu'au bout

un travail, une oeuvre.

A) L'analyse psychanalytique de la création chez l'enfant

Une grille psychanalytique nous dirait qu'il faut

retenir le "fantasme" dans l'activité symbolique de l'en­

fant comme un élément primordial. Pour l'enfant, la créa­

tion artistique est la scène où il se joue et où il assou-

vit inconsciemment ses désirs par une restitution du réel.

Le fantasme peut manifester la satisfaction du désir ou

sa frustration.

Le fantasme n'est pas statique. Il implique un mou­

vement parallèle aux pulsions instinctuelles vers la pour-

suite de leur objet.

L'oeuvre d'art est un substitut de substitut. Il n'y a donc pas trois moments mais deux: 1) un évènement passé d'ordre affectif, 2) la décharge dans une oeuvre; l'étape intermé­diaire, celle du fantasme est inconsciente;

Page 37: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

le fantasme est toujours déjà donné, déformé dans le jeu même de l'oeuvre. Le fantasme est inconscient supposé à la source de l'oeu­vre comme postulat de la méthode analytique qui cherche à la constivuer à partir de l'oeuyre, n'en est qu'une construction après coup .

En termesfreudiens, il est important de constater

.30

que l'oeuvre d'art étant en qus:que sorte un camouflage,

il s'exerce par le fantasme une activité de compromis en-

tre la satisfaction de la pulsion du CA et les forces de

contrôle ou de défense du MOI et du SURMOI.

De plus, le fantasme possède un rôle structurant par

ses qualités adaptatrices et un rôle de "socialisation"

par "l'expression imaginaire acceptable des forces ins-

tinctuelles" (Laplanche et Pontalis).

Ce que nous atteignons par l'oeuvre d'art, c'est le

produit du fantasme et non le fantasme même. En outre

pour l'analyse de toute oeuvre d'art, il convient d'isoler

les éléments qui font partie du bagage universel (séduc-

tion, castration, oedipe, etc •.. ), qu'on appelle fantas-

mes originaires.

Par ailleurs, il faut tenir compte du développement

de l'enfant, de son âge et des capacités naturelles à cet

1 Sarah Kofman, L'enfance de l'art, Paris, Payot, 1970 p. 108

Page 38: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

31

âge, comme conditions à l'élaboration et à l'expression

du fantasme. C'est la fonction de modification du MOI

qui agit en même temps dans la forme et le contenu de

l'expression du fantasme.

La sublimation permet cette différenciation du MOI

et la formation du caractère par la transformation des

impulsions primaires. Le passage graduel du CA au MOI

se produit par l'énergie primaire des pulsions instinc-

tuelles.

L'enfant élaborera, pour se projeter et se dynamiser,

une série d'avenues nouvelles d'expression comme autant

de formes de langages de ses émotions et de ses expérien-

ces vécues et intégrées.

L'imagination fait partie de l'économie de la vie: grâce à elle l'homme fait des réserves d'énergie, dépense moins qu'en luttant contre la réalité pour la transformer; grâce à l'ima­ginaire le désir se satisfÎit par un accom­plissement hallucinatoire .

Il ne faudra jamais oublier que de toute façon, mal-

gré l'uniformité des motifs utilisés, chaque enfant in-

consciemment chargera ses symboles de valeurs qui lui sont

propres, compte tenu des expériences vécues qui se cons-

truisent en fantasmes et se dédramatisent en sublimations.

1 Sarah Kofman, op. cit., p. 181

Page 39: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

32

B) Taxonomie des objectifs

Après avoir compris le mécanisme de la création ar­

tistique, nous nous sommes fixés des objectifs en utili­

sant la méthode de la Taxonomie des objectifs élaborée

par Bloom et remaniée par Hélène Lamarche du Musée des

Beaux-Arts de Montréal. De n0tre côté, nous avons ajouté

pour chacun des domaines cognitif, affectif et psychomo­

teur, l'objectif communautaire de notre programme à cause

de l'ouverture de l'écomusée sur le milieu.

Sans décrire en détails tous les objectifs retenus

et dans quelle étape du programme ils s'insèrent (décrits

dans "Les trousses éducatives, séminaire de la Société

des Musées Québécois 1981), il convient de voir au moins

ceux qui relèvent du domaine communautaire.

Au niveau cognitif, l'objectif communautaire est de

faire en sorte que l'enfant transmette ses connaissances

à son milieu, car comme l'adulte, il joue un rôle de

multiplicateur.

Sur le plan affectif, nous avons dégagé quatre objec­

tifs communautaires. Premièrement, le respect du patri­

moine, deuxièmement, l'acceptation de formes et de cultu­

res nouvelles dans l'esprit d'ouverture et de développe­

ment des mentalités, troisièmement, la sensibilisation

Page 40: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

des gens à l'histoire pour retracer ses sources et per-

mettre ainsi à une population de retrouver et de s'ap­

proprier son identité, enfin quatrièmement, l'apprécia-

tion du musée comme outil agréable d'auto-apprentissage.

Au niveau psychomoteur, l'objectif est d'utiliser

des outils pour entrer en contact avec les parents et

avec d'autres spécialistes des savoirs et des savoir-

faire, comme les menuisiers, artisans, etc ...

En conclusion, nous pouvons faire une évaluation

positive des objectifs atteint par le Programme auprès

de plus de 3 000 élèves qui ont participé à ce projet

éducatif de l'écomusée entre 1980 et 1983.

Nous avons vu le musée pénétrer dans le milieu seo-

laire de façon à développer un élève-maître, multiplica-

teur et créateur, grâce à des programmes adaptés aux

objectifs de l'école et du musée, mais aussi et surtout

adaptés au développement de l'enfant dans son contexte.

Nous sommes convaincusqu'il n'y a pas d'édu­cation véritable sans une ouverture de l'es­prit aux beautés de la nature et aux beautés que les hommes de toutes les époques et de toutes les civilisations ont créées et qu'ils conservent dans leurs musées- ce qui n'est nullement en opposition avec une ouverture la plus large possible sur le monde modernel.

33

1 : Marie-Thérèse Gazeau, L'enfant et le musée, Paris, les éditions ouvrières, 1974, p.137

Page 41: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

CHAPITRE II

EDUCATION POPULAIRE

A) Processus de création

A l'Ecomusée de la Haute-Beauce, nous avons mis au

point un mécanisme permettant à la population de partici­

per à la réalisation de nos expositions. Nous verrons

les principaux éléments de ce cheminement: l'assemblée

publique et l'utilisation des techniques de créativité,

le cours en muséologie populaire et l'utilisation de l'in-

terprétation comme mode de restitution.

1) Les assemblées publiques

Depuis le printemps 1981, nous avons créé nos expo-

sitions:

La femme à travers les trousseaux de baptême, L'érable a coeur ouvert, L'appropriation par le Haut-Beauceron de son environnement vécu,

Page 42: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Le village sommet, .Le rang, Les chef-d' oeuvreux de la Haute-Beauce, Granit-Haute-Beauce-Coglais, Le moulin tourne avec entrain dans le fourgon de queue de train a Courcelles et nos exihibits de plein-air Du paysage au folklore à Sainte­Clothilde, Les vallons du progrès à Saint-Ephre~ Le plateau de l'érable à Saint-Benoit, Le pla­teau de l'agriculture à Saint-Honoré, Le vent dans les voiles à Lambton, Pierre angulaire de la Haute-Beauce à Saint-Sébastien, Au pied du Morne a Lac Drolet et Saint-Hilaire je t'aime a Saint-Hilaire de Dorset.

Dans chacun des treize villages du territoire de la

Haute-Beauce, nous avons d'abord convoqué une assemblée

35

publique. En moyenne, il y vient entre vingt et soixante-

dix personnes. Lors de cette soirée, nous expliquons

l'objectif de la rencontre et la technique que nous utili-

serons pour arriver à dégager les thèmes, les sous-thèmes,

le fil conducteur, les formes, les couleurs et le site de

l'exposition ou de l'exhibit. Après ~ trois heures de

brainstorming, l'assemblée choisit les deux personnes qui

viendront suivre au Centre le cours de muséologie popu-

laire, Ces personnes deviendront le lien concret avec

la population, et ce lien permettra de compléter la re-

cherche au niveau des contenus, de trouver les personnes

qui travailleront en corvée pour monter les supports d'ex-

position, de trouver également les gens qui s'exprimeront

par le graphisme, l'animation et ceux qui iront négocier

les sites, les matériaux, etc ... avec les municipalités,

caisses populaires, entreprises de scieri:e, de granit,

Page 43: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

d'usines de métal ou encore auprès de groupes sociaux.

Essayer de démonter des systèmes symboliques sociaux, naturels à travers différents objets dont la familiarité pose de nouvelles ques­tions à nos interlocuteurs et chercher à mul­tiplier les réflexions juste après la décou­verte de ces systèmes, telle est la démarche pédagogique •.. 1.

2) Les techniques de créativité

Cette partie est directement inspirée du guide pra-

tique du Brainstorming de Paul Cusson. Les éléments dé-

clencheurs en créativité sont principalement "l'imagina-

tion libérée, le jugement différé, l'absence d'auto-cen-

sure, la construction sur les idées déjà émises".

36

La première étape du brainstorming consiste à cerner

la situation de la façon la plus globale possible: "corn-

ment faire en sorte ... ". On choisit l'"expert", à savoir

celui qui situe la question et qui sera le responsable.

L'animateur (triee) agira comme "leader".

La deuxième étape s'appelle la recherche des faits;

il s'agit d'inventorier les faits qui sont essentiels à

la compréhension de la situation globale et de les ins­

crire systématiquement sur des tableaux ou papiers grand-

format collés au mur.

1 Marcel Evrard, Mathilde Scalbert-Bellaigue, Les cahiers de l'animation, Paris, 1980, numéro 27, p. 39

Page 44: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

37

La troigième étape consiste à fixer les objectifs et

les défis. Pour ce faire, on les écrit et on les numé-

rote. Le leader les relit à haute voix, même si certains

peuvent sembler curieux; l'expert choisit l'objectif de

base sur lequel portera le travail du groupe. Généralement

dans une exposition, la question est de savoir: qu'est-ce

qu'on veut que le visiteur retienne?

Quatrièmement, on procède à la recherche des idées.

Cette étape consiste à recueillir toute idée susceptible

d'aider à la réalisation de l'objectif de base: 1) par

l'inventaire des idées, 2) par la formulation des idées

casse-cou (le farfelu) J) par le choix d'une idée (partie)

casse-cou 4) par l'examen de l'idée (partie) casse-cou 5)

par la visualisation des phénomènes 6) par le force-fit . ...

Dans le cas de nos expositions, il s'agit de l'étape ou

l'on détermine les sous-thèmes et où l'on prévoit la façon

d'illustrer chacun de ceux-ci. Il faut également choisir

l'ordre de circulation dans lequel ils apparaîtront en

dégagea~t l'entrée en matière (les hors-d'oeuvre) et le

grand thème (le plat principal); suivront les autres mets,

salade, fromage, dessert, boissons, digestifs, comme pour

un grand repas. Cette idée de comparer une bonne exposi­

tion à un repas nous vient de Jacques André, concepteur

d'exposition invité par la Société des Musées Québécois en

1981 et 1982.

Page 45: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Finalement la dernière étape consiste à faire l'im­

plantation. Le défi consiste ici à respecter toutes les

conditions matérielle~ impliquées dans la création des

38

idées, thèmes et sous-thèmes retenus: échéancier, ressour-

ces humaines et financières, ententes politiques, etc .••

Les techniques de créativité font appel à la fluidité,

à la flexibilité, à l'originalité et à l'élaboration corn-

me mécanisme de la pensée latérale.

3) Le cours en muséologie populaire

Pour permettre de réaliser nos expositions et d'in-

tervenir avec les gens dans l'auto-formation préconisée

par l'écomusée, nous avons conçu un cours en muséologie

populaire qui fait référence à la muséographie tradition-

nelle, mais qui par son application concrète dans un musée

communautaire prouve qu'une population peut devenir muséo-

graphe de son histoire, de son vécu, dans des formes, des

couleurs et des mots qui lui ressemblent.

L'apprentissage de l'interprétation et de la construction des signes revêt un intérêt di­dactique tout particulier, en raison de leur contenu technologique et de leurs multiples applicatio~s pratiques dans tout processus éducatifs .

1 Edgar Faure, Apprendre à être, Paris, Fayard-Unesco, 1973, p. 131

Page 46: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

J9

Ce cours réflète les différentes rencontres organi-

sées par les gens eux-même selon leur rythme, de même que

les opérations concrètes menées entre chaque séance. Le

processus même permet aux gens des différents villages de

se voir, de créer et surtout de prendre conscience de leur

appartenance au territoire de la Haute-Beauce. Les dif-

férents thèmes du cours sont: un musée c'est quoi?, prépa-

ration d'une exposition collective, c'est quoi le patri-

moine?, les techniques d'exposition, les techniques d'ani-

mation et d'éducation.

On ne peut séparer la formation ... de la rencon­naissance et de la réappropriation d'une iden­tité, ni de sa visualisation (expositions et antennes) •.. la recherche est la formation et celle-ci consiste à mettre une personne en si­tuation de recherche 1,

4) L'interprétation

Dans ce processus de création, l'effet de dynamisme

des exhibits et des expositions ne se fait pas uniquement

sentir dans l'environnement, mais aussi dans la participa-

tion des gens. Le parti que nous avons adopté comme mode

de restitution est l'interprétation. Généralement, on

reconnaît . la représentation comme mode de restitution de

l'artiste, et la reconstitution comme celui du musée

1 Marcel Evrard, op. cit., p. J?

Page 47: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

40

traditionnel. L'interprétation permet de faire des choix

sur les éléments de l'histoire, du patrimoine, des savoirs

et de la mémoire de.. gens pour dresser un portrait du

thème ainsi élaboré.

Pour chacun des thèmes et des sous-thèmes, nous dé-

terminons la façon èP l'illustrer, soit par la photogra-

phie, la maquette, la reconstitution partielle, les car-

tes, les graphiques, etc ... Nous utilisons généralement

deux ou trois niveaux de langage: le visuel étant· déjà un

premier niveau, on utilise ensuite un titre soit évoca-

teur, soit issu de la parole des gens comme en témoigne

la mémoire collective; finalement on peut ajouter sous

forme de catalogue ou documents en annexes les contenus

de la recherche formelle (on peut même les intégrer à

l'exposition). Ensuite on détermine le fil conducteur,

les liaisons et les abstractions colorées qui en accen-

tuent le pouvoir de communication

Nul doute que l'appréhensibilité des formes et des couleurs varie en question de l'espèce, du groupe culture!, du degré d'entraînement de l'observateur .

L'exposition en soi est une iconographie narrative

par le cheminement imposé au spectateur. Le parcours

1 Rudolfe Arnheim, La pensée visuelle, Paris, Flam­marion, 1976, p. 39

Page 48: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

41

lecture de l'exposition donne lui-même un sens à l'oeuvre.

Pour corroborer cette hypothèse, il serait intéressant de

voir comment la symbolique de l'espace donne des indica­

tions pour essayer de trouver un sens aux expositions.

Il n'y a pas d'unité de temps, nous devons faire le tour

de toute l'exposition avant de la structurer. L'oeuvre

décrit le monde, l'univers des auteurs, comme les auteurs

le savent (maïeutique socratique) ou le sentent, mais non

comme dans un univers euclidien.

Les différents éléments rendent l'exposition inter­

prétative, dynamique, lui imposent une fonction narrative

qui, en l'occurrence, jouerait le rôle de fonction phati­

que, de contact entre les créateurs et les spectateurs.

Le caractère dénominatif de la couleur se retrouve

dans son pouvoir descriptif de représentation des éléments

et des fonds colorés. De plus, la valeur symbolique de la

couleur est une thématique importante, de même que son

caractère rhétorique. Par la symbolisation déjà donnée,

les créateurs inconsciemment veulent nous convaincre et

nous plaire en donnant dans l'oeuvre le manque à satis­

faire.

Page 49: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

En d'autres termes, l'interprétation pictu­rale accentue les qualités génériques qui con­cernent toute pensée, créant ainsi une sor­te d'irréclité extrêmement différente de celle des contes et légendes surnaturels, généralement illustrés avec une fidelité toute réaliste. Ces derniers dotent de corps matériels des forces inexistantes, cependant que l'expression picturale ex-trait de la substanie physique les forces qui la constituent •

Pour coordonner ce processus le rôle de l'animateur

42

est capital en ce qu'il sert de catalyseur à la population.

Nous élaborerons toutefois ce sujet dans le chapitre sur

le projet éducatif de l'écomusée. Cependant à titre in-

dicatif, écoutons René Rivard nous dire que:

L'interprète n'est donc plus un maître qui enseigne mais quelqu'un qui permet à d'autres

::'1 "'...L '..J... 1 ,. ae connalGre a Gravers eurs exper1ences personnelles les dimension patrimoniales qui peuvent être u~iles dans leur quotidien et pour le futur .

B) Mémoire collective

•'!Nous venons de voir le processus de création instauré

par l'écomusée pour permettre à la population de la Haute­

Beauce d'appréhender son environnement. A Saint-Hilaire

de Dorset, on a procédé à la cueillette de la mémoire

collective et à sa restitution dans la Maison des Gens

1 Rudolf Arnheim, op. cit., p. 145 2 René Rivard, Que le musée s'ouvre, Québec, 1984,

texte inédit, p. 21

Page 50: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

4J

de Saint-Hilaire, qui constitue un centre d'interprétation

sur la vie des gens de ce village.

Eloigné de toute autre agglomération de quinze kilo­

mètres au moins, ce petit village est situé à l 600 pieds

d'altitude et est entouré ·d'une immense forêt: le bois de

Dorset. Ce caractère d'isolement et ce lien prégnant avec

la forêt a modelé des personnalités humaines d'une inten­

sité frappante.

Mystère de l'isolement, de l'éloignement du mari qui

devait partir plusieurs mois au chantier, inquiétude des

femmes, force de travail pour maintenir dans le temps une

économie familiale au rythme séquentiel des saisons: cueil­

lette de l'eau d'érable, labours, dépierrage de la terre,

train quotidien à l'étable, semailles, fenaison, engran­

gement, brayage du lin, tonte de la laine des moutons,

réparation des outils, conservation des aliments, réclu­

sion de l'hiver. Mais aussi vivre, aimer, faire naître,

craindre la maladie et la mort, s'unir, s'entraider, se

serrer les coudes, fêter, prendre des responsabilités au

municipal, à la fabrique, dans les syndicats de producteurs

de sirop d'érable, les cercles de fermières. Aussi rêver,

voir autour de soi la montagne, le ciel bleu, les champs

cultivés, les animaux aux pâturages, sentir le vent vio­

lent s'infiltrer par les fenêtres, le voir pencher les

Page 51: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

44

arbres et former des. lames de neige .•. et craindre le

feu ...

Toutes ces sensations, émotions, savoirs, savoir-

faire et savoir-vivre n'apparaissent pas dans les livres

d'histoire officielle ni dans les musées traditionnels.

On a toujours l~issé aux spécialistes le soin de traiter

de l'histoire des civilisations, des grands hommes qui

ont marqué la politique, la science et l'art.

Cette habitude de laisser les historiens, comme les

fonctionnaires et les curés, dire la vérité ne permet pas

aux gens de prendre en charge leur devenir. Il est plus

facile de faire comprendre et de se taire. Alors se per­

pétue l'oeuvre des bien-- ,pensants qui continuent pour le

bien des gens à vulgaris er en vue d'une démocratisation

des savoirs officiels au détriment de la masse de gens

qui n'est pas en mesure de raconter.

Ou dans chacun des domaines essentiels de la vie chaque être humain, chaque groupe, chaque culture ou sous-culture possède déjà un autre savoir 1.

C'est parce que nous croyions à l'importance d'enten­

dre cette anamnèse collective, pouvant seule redonner

1 P. Thielen, M. Hotal, Revue Internationale d'action communautaire, Montréal, Educatlon populaire culture et savo1r, 1979, 2/42 "Boutiques de science et troc de savoirs"

Page 52: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

45

confiance aux gens en leur pouvoir de sagesse qui a faci-

lité leur installation sur des terres difficiles, qui leur

a permis de maintenir une qualité de vie et de s'ajuster

à la vie contemporaine avec sérénité, que nous avons pen-

sé mettre en place notre programme de cueillette de la

mémoire collective en janvier 1981. A~ec une subvention

du Conseil des arts du Canada, nous avons commencé ce

délicat travail, qui d'ailleurs donne un trac fou, du fait

qu'il faut pénétrér dans l'antre le plus intime de la fa-

mille, la cuisine.

Bien sûr, nous bâtissons un scénario de questions pour

permettre de rendre utilisable cette mémoire vivante, quoi­

que nous nous permettons d'en déroger à l'occasion pour

laisser toute liberté au conteur de faits étranges ou

originaux.

Quand les rendez-vous sont fixés, l'animateur(trice)

pénètre dans la maison où torte la famille est réunie y

compris les enfants, ceux-ci aussi possèdent une mémoire,

d'ailleurs marquée par celle des parents. On fixe avec

les gens les règles du jeu et on commence. Evidemment,

au cours des premières minutes, tout le monde est intimidé.

L'animateur (triee) doit faire en sorte, par sa façon d'en­

trer en congruité, de détendre l'atmosphère et de réchauf­

fer la communication.

Page 53: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

46

A la fin de l'entrevue, qui est enregistrée sur cas­

sette, on demande aux gens s'ils ont des documents icono­

graphiques e~ des objets témoins qui pourraient éventuel­

lement servir aux futures expositions. S'il y a lieu,

on remplit les fiches signalitiques nécessaires.

De reto~~ au centre, on s'applique à la transposi­

tion écrite. En moyenne, la transcription demande une

ving.taine d'heures et correspond habituellement à une

trentaine de pages dactylographiées. Il est bien enten­

du que cette transcription se fait au son, pour ne pas

censurer l'idée émise. Ensuite, une copie du texte est

transmise à la famille pour correction ou retrait de cer­

tains passages. Ce n'est qu'après autorisation de la

famille que nous pouvons faire une utilisation respec­

tueuse de la parole des gens.

Il est evident que la mémoire met en lumière les

éléments forts de la vie des gens. On sait qu'avec le

temps, les événements sont souvent racontées avec force

détails visant à les enjoliver ou les dramatiser. C'est

justement à cause de cela que nous pouvons dégager claire­

ment dans nos expositions interprétatives les points sail­

lants du vécu collectif d'une population.

Page 54: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Les caractéristiques distinctives seront de même préservées, voire exagérées lorsqu'elles suscitent des réactions de crainte, d'éton­nement, de mépris, d'amusement, d'admiration, etc .•. Dans le souvenir, les choses parais­sent plus grandes, plus rapides, plus laides, plus pénibles qu'elles ne l'étaient dans la réalité des faits 1.

47

Après cette étape, le travail consiste à codifier les

fragments, à les regrouper sous des symboles visuels qui-

permettront de retrouver facilement dans tous les textes

les thèmes dégagés. Pour chacun des trente-deux sujets

retenus, on fait un résumé. Ces résumés ou synthèses

deviendront les éléments déclencheurs des expositions.

Utiliser la mémoire qui nous constitue, aigui­ser le regard, appréhender globalement l'or­ganisation des éléments, apprendre la communi­cation, maîtriser l'expression des niveaux de la parole et de l'écrit, tels sont les objec­tifs inséparables auxquels veut prétendre cet­te formation. Le programme pourrait paraître ambitieux s'il n'avait pour base solide le terra~n matériel de l'histoire et du vécu des gens .

En assemblée publique, on détermine au fil des années

les thèmes qui seront traités dans la Maison des Gens de

Saint-Hilaire. Pour monter ces expositions, on complète

la recherche auprès de la population, on choisit parmi les

histoires issues de la parole des gens celles, qui ..

1 marion,

2 cahiers

Rudolf Arnheim, La pensée visuelle, Paris, Flam-1976, p. 90 Marcel Evrard, Mathilde Scalbert-Bellaigue, Les de l'animation, Paris, 1980, numéro 27, p. 4r--

Page 55: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

48

illustreront le mieux le sujet choisi, ainsi que les pho-

tographies et les objets témoins, Les expositions ainsi

montées er+ièrement par et avec la population conservent

un caractère évocateur d'une grande intensité.

Depuis bientôt quatre ans, le processus se poursuit

à Saint-Hilaire. La corporation municipale a fourni gra-

tuitement un local au Comité d'action touristique et cul-

turelle, où l'on peut travailler consciencieusement et

emmaganiser les archives.

Elle entraînera de gré ou de force, la muséo­graphie à se manifester dans la fonction cri­tique de culture, sa fonction véritable de savoir par adéquation à la réalité quotidien­ne, l'adhésion à une histoire expérimentale. Le musée doit céder la place aux centres de formation et de recyclage historique 1.

C) Ouverture sur l'extérieur

1) L'échange avec la population elle-même

A l'origLne, les objectifs que s'étaient fixés

quelques spécialistes consistaient à sauver la collee-

tion Napoléon Bolduc et à interpréter la région sous

différents aspects, à savoir sa géographie humaine et

sociale, sa nature environnementale et ses industries

1 Stanislas S. Adotevi, Le musée au service des hommes aujourd'hui et demain, Paris, Unesco, 1972, "Le musee dans les systemes éducatifs et culturels contemporains", p. 27

Page 56: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

du passé, du présent et du futur. Si ces éléments déclen­

cheurs ont tout de suite soulevé l'enthousiasme de la po­

pulation, ce n'est qu'à partir de 1982 que l'écomusée

est devenu, peut-on considérer, une réalité vivante, re­

présentative des quatre coins du territoire.

L'exposition "Haute-Beauce créatrice musée territoire"

a suscité une prise de conscience à l'échelle locale des

caractéristiques propres à la dynamique des paroisses ou

villages considérés gr~ce à la création d'un exhibit de

plein air, bloc créatif illustrant symboliquement les for­

ces en interaction (dates, faits historiques, personnages,

industries, nature, etc ••• ). Mais ce qui a permis à la

notion de territoire de prendre tout son sens, c'est l'ex­

position synthèse "l'appFopriation par le haut-beauceron

de son environnement vécu".

Comme nous l'avons vu précédemment lors d'assemblées

publiques, deux personnes par village étaient choisies

pour suivre un cours en muséologie populaire. Ce cours,

outre qu'il permettait d'acquérir des connaissances théo­

riques est devenu le lieu et le prétexte de rencontres et

d'échanges, où tous les actants élaboraient ce qui allait

devenir une fresque complexe illustrant les rapports de

l'homme avec son milieu. Tranquillement des liens d'ami­

tié se sont tissés parmi ces gens qui depuis plus d'un

Page 57: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

50

siècle se livraient à une bataille de clochers alimentant

la rivalité entre les villages.

Les dialogues et les échanges portant sur les diffé­

rences et ressemblances culturelles ont contribué petit à

petit à faire naître un sentiment d'identité par rapport

au territoire de la Haute-Beauce. L'engagement de ces

gens est bientôt devenu le canevas sur lequel s'est gref-

féela vie culturelle de l'écomusée.

Le bénévolat n'est donc pas conçu comme une forme d'action charitable réalisée au profit de la collectivité; il est la reconnaissance du droit de chacun à étudier son passé,à par­ticiper aux décisions concernant son avenir. C'est en ce sens que l'on peut définir l'éco­musée comme une "école mutuelle" 1.

2) ExRérience d'un jumelage

Dans un rapport produit à la suite d'un stage en Fran-

ce, l'écomusée de la Maison du Fier Monde à Montréal, a

mentionné qu'il y aurait intérêt à jumeler notre écomusée

à celui du Coglais en Bretagne. Une correspondance s'est

engagée à ce propos, et lors de l'inauguration de tous nos

exhibits et expositions en juin 1982, deux personnes de là-

bas sont venues en éclaireurs vérifier si ce jumelage pou-

vait être possible. Le déclic a été instantané . A leur

retour, ils ont fait adopter par leur conseil d'administra­

tion le principe du jemelage et nous ont organisé une

1 François Hubert, Hervé Joubeaux, Jean-Yves Veillard, Découvrir les écomusées, Rennes, 1984, p. 38

Page 58: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

51

visite chez eux pour le mois d'octobre de la même année.

C'est dans la frénésie la plus totale que nous nous

sommes alors attaqués aux préparatifs; il fallait cho1sir

les participants pour chaque village, établir le mode de

financement du voyage et voir ~ tous les détails matériels.

La fièvre n'a fait que s'accentuer lorsque trente-six

d'entre nous se sont retrouvés en France. A Paris d'abord,

pour constater que nos muséographes amateurs (formés par

le cours en muséologie populaire) jetaient un regard cri­

tique sur les grands musées, les modes de restitution, les

niveaux de langage, etc ... Et en Bretagne ensuite, où

nous avons été reçus comme des parents qui ne sont pas

venus depuis déjà un an.

Le jumelage a été des plus profitables à tous points

de vue: l'écomusée permettait d'observer les habitudes de

vie, les rapports au sein de la famille, la gastronomie,

l'architecture, l'organisation sociale et politique,

l'école etc •.. tant de sujets qui touchent quotidienne­

ment les gens de tous les pays du monde.

Habitués qu'ils étaient de se regarder en vase clos

au sein de la famille ou du village, les Hauts-Beaucerons

se sont ouverts au monde. L'accueil des Bretons rejoi­

gnant celui de nos gens en qualité, nous avons décidé de

leur rendre la pareille.

Page 59: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

52

En juillet 1983, c'est au tour des coglésiens de ve­

nir voir comment ça se passe au Québec. Une organisation

gigan~esque est mise en place. Les municipalités rivali­

sent en politesses. Il ne faut pas oublier de souligner

la présence des piliers de notre écomusée, qui ont orches­

tré cet événement de fraternité sans précédent.

A notre grande surprise l'échange n'a pas eu qu'un

effet immédiat. Au contraire, il cimentait à jamais la

structure de notre écomusée, du fait que les liens unis­

sant les gens de la Haute-Beauce étaient désormais solides.

Pour eux maintenant, tout prétexte est bon pour se revoir

et participer à la réalisation d'une oeuvre commune.

3) Les stages

Afin de se maintenir à la fine pointe de l'informa­

tion et afin que celle-ci circule, nous _voyons à ce que

le plus grand nombre de personnes participent à des stages,

au Québec ou à l'étranger. Jusqu'à présent, plus de soi­

xante personnes ont fait des stages en France, sur des

thèmes aussi variés que la scénographie, l'évaluation, le

musée comme outil de développement régional, le tourisme

social et culturel ...

Au Québec, nous participons régulièrement aux sémi­

naires de formation de la Société des musées québécois:

Page 60: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

53

qui portent sur des sujets comme les trousses éducatives,

les techniques d'expositions, le marketing, les techniques

et' philosophie de la muséologie populaire •..

4) Accueil de spécialistes

Une autre façon d'apprendre et de s'ouvrir au monde

consiste à échanger avec la multitude de spécialistes qui

viennent chaque année à l'écomusée et qui travaillent dans

des domaines aussi variés que la muséologie, l'ethnologie,

l'anthropologie, le tourisme, l'aménagement du territoire,

l'action culturelle, le journalisme .•.

A chaque occasion nous organisons des sessions à l'in­

tention de petits groupes, où non seulement nous transmet~

tons le résultat de notre expérience, mais aussi où nous

acquérons de nouvelles connaissances et de nouvelles pra­

tiques grâce à nos visiteurs des différents pays.

5) Tenue de colloques

Parmi les événements majeurs que nous organisons, les

colioques constituent une autre façon d'entrer en contact

et de partager. En 1981, nous recevions le colloque iti­

nérant du Conseil des monuments et des sites du Québec,

en 1983, l'Association québécoise d'interprétation du

patrimoine, et cette anné1 en 1984, nous organisons le

premier atelier international sur les écomusées et la

Page 61: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

54

nouvelle muséologie. Cette dernière rencontre a laissé sur

une note d'espoir les soixante participants des dix pays

repré - ~ntés et la population de la Haute-Beauce qui les

hébergeait et qui participait sous forme d'ateliers inté­

grés.

6) Les effets

Les échanges à l'intérieur de la population elle-

même, ou entre la population et d'autres régions du Québec

ou d'autres pays, ou entre gens simples et spécialistes,ont

des effets des plus intéressants à observer.

Une telle ouverture sur l'extérieur permet de lever la

crainte des gens face aux experts, donne de l'assurance (on

est capable.), développe le sens du travail en collégialité;

par ailleurs, le sens du collectif permet de recueillir d'au-

tres exemples et provoque ainsi de nouveaux projets, accen­

tue l'imagination, la fraternité et l'autogestion.

L'autogestion est, avant tout, une autoges­tion personnelle. C'est pourquoi la pédago­gie non directive héritée de Rogers va deve­nir un instrument priviligié pour cette li­bération. L'autogestion pédagogique est éducative, elle conduit à une autogestion sociale 1.

1 Jacques Ardoino, Education et politique, Paris, Gauthier- Villars, 1977, p. 161

Page 62: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

CHAPITRE III

ORGANISATION ET CONCERTATION

Nous verrons ici comment les gens apprennent à travail-

ler ensemble, à travailler dans le cadre de réunions démo-

cratiques et à découvrir la globalité des projets sur l'en-

semble du territoire et en interaction avec d'autres orga-

nismes.

Les instances administratives de l'écomusée proviennent

de la population où il y a formation des groupes associés

à l'écomusée, lesquels forment le comité des usagers. Ce

comité d'usagers nomme les cinq responsables de zone qui

siègeront au conseil d'administration .

... l'écomusée doit être appréhendé comme une expérience constamment créative pouvant se cou­ler dans les statuts les plus divers, échap­pant aux règles administratives traditionnelles mais entretenant avec un grand nombre de parte­naires, administration comprise, une relation

Page 63: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

génératrice de connivence et bénéficiant d'un soutien financier, administratif et technique qui respecte son originalité 1.

Vous pourrez voir en appendice les mandats des différentes instances de l'organisation de l'écomusée.

Cette structure de participation du comité des usa-

gers favorise d'abord la concertation entre les groupes

à la fois au niveau de la recherche des modèles mis en

place, des réalisations collectives, de l'accueil des vi-

sitBurs de marque et de la répartition des demandes de

subventions, en établissant une rotation à travers les

programmes et les zones ..

56

Au conseil d'administration, la responsabilité de la ·

gestion de l'entreprise est évidemment primordiale; les

membres se sentent également responsables des besoins de

l'équipe des travailleurs et des désirs du comité des

usagers et doivent projeter pour l'avenir des programmes

d'intervention. Ceux-ci auront un rôle de mobilisateurs

pour les membres et de concertation régionale avec les élus

locaux, les municipalités régionales de comtés, les corn-

missions scolaires, les caisses populaires, les associa-

tions syndicales et les groupes sociaux et religieux.

1 François Hubert, Hervé Joubeaux, Jean-Yves Veillard, op. ci t. , p. 44

Page 64: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Les gouvernements régionaux •.• ils doivent constamment être sensibilisés aux actions entreprises, être mis au courant des pro­grammations culturelles ou autres et dev~­nir partie prenante des orientations et des actions concrètes de développement du territoire dont ils ont en partie la charge 1,

Même si l'écomusée est un organisme communautaire

(nous l'avons vu par l'autofinancement de la collection

permanente, l'installation du centre dans l'ancien pres-

57

bytère de Saint-Evariste, acheté par la Municipalité dans

cet optique et la création de nos équipements permanents,

exhibits de plein air et centres d'interprétation financés

par le milieu), nous devons malgré tout, entrer en con-

tact avec les gouvernements provincial et fédéral pour

les demandes d ' octrois, d'aide à l'emploi ou tout autre

programme susceptible de nous aider. Cette ouverture vers

l'extérieur est indispensable pour le bon fonctionnement

de l'entreprise.

Nous avons donc reçu de l'aide financière et de mul­

tiples services de la part des ministères des Affaires

Culturelles, de l'Environnement, de l'Education, des

Sciences et Technologie, Energie et Ressources, Tourisme,

etc ...

1 René Rivard, Que le musée s'ouvre, Québec, 1984, texte inédit, p. 60

Page 65: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Lors de nos inauguration~, les ministres, hauts­

fonctionnaires, conseillers consultatifs, sont conviés.

l ns rencontres permetteht à nos usagers de visualiser et

de comprendre les programmes offerts et surtout de voir

comment nous pouvons influencer ces représentants gouver-

58

nementaux pour l'établissement de programmes mieux adaptés

aux objectifs d'un organisme autogestionnaire et écomuséal

comme le nôtre.

Une autre forme d'ouverture vers l'extérieur est le

maintien d'un lien constant avec les universitaires, cher-

cheurs, communicateurs et associations comme la Société des

musées québécois, l'Association québécoise d'interprétation

du patrimoine, le Conseil des monument et sites du Québec,

la Société du patrimoine des beaucerons •..

Les usagers siègent à tour de rôle sur ces différents

comités, assistent aux conférences, participent aux tables

ronde~ etc •.. Voilà encore autant de façons de se former

dans l'action, d'évaluer sa performance et de faire recon­

naître la diversité et la qualité d'une expérience aussi

originale.

Cette multiplicité des tâches exige à la fois diversité et spécificité des formations par rapport à celle des musées traditionnels 1

1 François Hubert, Hervé Joubeaux, Jean-Yves Veillard, op. cit., p. J8

Page 66: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

TROISitME PARTIE

FONDEMENTS PEDAGOGIQUES DE L'ECOMUSEE

Page 67: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

CHAPITRE I

LE PROJET EDUCATIF

Nous allons maintenant porter notre attention sur les

concepts théoriques qui constituent le fondement de l'éco­

musée. Premièrement nous poserons franchement la question:

Pourquoi permettre à une population de se mettre en situa­

tion d'apprentissage et ce, dans des domaines d'activités

humaines qui ont toujours été l'apanage d'un petit nombre

de spécialistes comme les muséologues, les historiens, les

graphistes, etc ••• ? Nous verrons ensuite le concept de

recherche-action se matérialiser par l'intervention, avant

de terminer par le rôle crucial de l'anim~teur-catalyseur

dans le processus d'auto-apprentissage.

A) Pourquoi se mettre en situation d'apprentissage?

Comme nous venons, croyons-nous, de le décrire dans

les chapitres précédents, il y a portée éducative

Page 68: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

61

à chaque étape de la réalisation de l'écomusée: acquisition

d'une collection permanente, plans d'auto-financement, mé­

canisme d'auto-gestion, trousses éducatives, cueillette de

la mémoire collective, jumelage et échanges avec les visi­

teurs québécois ou étrangers et avec les milieux institution­

nels, ... Dans tout ce cheminement, l'écomusée a pris le

parti de 1 'auto-apprentissage plutôt que celui de 1' édu­

cation à sens unique propre aux musées spécialisés, qui ont

le souci de démocratiser la Connaissance, de répandre la

bonne parole de la Culture. Nous avons plutôt opté pour

le défi exigeant de travailler en osmose avec une popula­

tion de façon à mettre en valeur ses savoirs et ses cul­

tures dans une optique de développement régional.

Les êtres humains ont un désir et une capacité innés

d'apprendre, l'apprentissage peut avoir cours lorsque l'ob­

jectif est en rapport avec les projets personnels de quel­

qu'un et il est moins menaçant s'il est lié à la perception

du "moi" de l'apprenti. La quantité et la qualité de l'ap­

prentissage sont meilleures dans l'action, surtout quand le

participant détient une bonne part de responsabilités dans

la méthodologie à suivre. Plus l'actant exprime ses senti­

ments et son intelligence en s'engageant en entier dans

l'auto-apprentissage, plus ses connaissances seront pro­

fondément acquises et ce, pour plus longtemps.

Page 69: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

62

Dans un tel cheminement, l'auto-évaluation est fonda-

mentale pour permettre l'indépendance d'esprit, la créati-

vité et la confiance en soi. Dans l'auto-apprentissage,

le plus important, c'est d'apprendre à apprendre, de déve- ~·

lopper une attitude d'ouverture vers le changement.

Par son ouverture sensible au monde, par sa confiance dans sa propre aptitude à former de nouvelles relations avec son environnement, elle serait le type de personne dont jailli­raient les productions nouvelles et la vie créatrice 1,

De plus . en plus, les perspectives d'ouverture de l'édu-

cation sont porteuses du pouvoir créateur inhérent aux éner-

gies populaires libérées. Que l'on parle d'école-active,

d'auto-éducation, de travail en équipes, d'écoles de tra-

vail, de méthode: active, d'école nouvelle ou d'écol-e libre,

ces dénominations soulèvent le facteur de libération.

Désormais, l'éducation ne se définit plus par rapport à un contenu déterminé qu'il s'agit d'assimiler, mais se conçoit en sa vérité, comme un processus de l'être qui à travers la diversité de ses expériences apprend à s'ex­primer, à communiquer, à interroger le mo2de et à devenir toujours davantage lui-même

B) La recherche-action par l'intervention

Dès l'automne 1980, nous me-ttions en place le

1 Carl R. Rogers, Liberté pour apprendre, Paris, Dunod, 1976, p. 290

2 Edgar Faure, Apprendre à être, Paris, Fayard-Unesco, 1973, p. 163

Page 70: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

63

laboratoire d'expérimentation didactique en milieu rural.

En mars 1981, dans le cadre de la semaine culturelle à

l'UQAM, nous montions une exposition ayant pour titre:

"Le musée-territoire libre de la Haute-Beauce•: Nous y

présentions le travail des usagers, de l'équipe de tra-

vailleurs du musée et des universitaires collaborateurs ,

avec comme but ultime l'enrichissement et l'autonomisa-

tion de la région. L'exhibit proposait les grandes li-

gnes de cette action-distance, action-recherche, action-

collective et action-libre.

Pierre Mayrand, universitaire et conseiller techni-

que de tou$ les instants dans la réalisation de l'écomusée,

nous dira de ce travail qu'il établit le lien entre les

traits caractéristiques des Beaucerons, leur évolution

récente et les transformations à venir". Il puise dans

la tradition beauceronne, faite de dynamisme et d'imagi-

nation, de fierté et de créativité, de vie collective, les

éléments propres à servir le développement culturel de la

région. Le sens de la liberté se traduit par une cons­

cience aigÜe de la territorialité et de la "différence"

du haut-Beauceron .

. .. la notion d'intervention est maintenant d'8mploi courant dans les sciences humaines, notamment en psychologie sociale et en socio­logie. L'intervention est en effet le lieu privilégié entre la théorie et la pratique,

Page 71: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

la réflexion et l'action, le laboratoire expérimental et le terrain, qui est requis par la concrption lewinienne de la recher­che-action .

La première étape de la recherche-action est d'in-

ventorier les moyens disponibles, d'évaluer les forces

64

et les ressourc_es qui peuvent être utiles. Il faut sys­

tématiquement sélectionner, disséquer les multiples facet-

tes que constituent chaque situation (méthode systémique).

Finalement, il faut s'adapter à la perception, à l'en­

vironnement et à l'usage populaire· . .

C) L'organisateur, l'intervenant, l'animat'eur, le faci­litateur ou le catalyseur

Pour coordonner cette recherche-action tout en per-

mettant à la population de se mettre en situation d'appren-

tissage, le rôle de l'animateur est très important de même

que ses qualités. Tout en agissant avec beaucoup d'humi-

lité, l'animateur doit posséder un haut niveau de connais-

sances et d'autonomie pour dégager un climat de confiance

et éviter que la population se sente exploitée et/ou ma-

nipulée; au contraire, il doit l'amener à croire qu'ensem-

ble et sur un pied d'égalité, on peut concevoir, créer et

réaliser.

1 Jacques Ardoino, Education et politique, Paris, Gauthiers-Villars, 1977, p. 215, citation de Mendel.

Page 72: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Selon Carl Rogers, la qualité essentielle et fonda-

mentale chez une personne responsable de faciliter l'appren-

tissage est la congruence ou l'authenticité. L~ facilita­

teur ne doit pas se renier lui-même. Il doit éprouver

de la considération envers l'apprenti ou le milieu de son

action. Il doit dégager une attitude d'acceptation et de

confiance. Enfin sa dernière qualité serait:

La compréhension empathique est un autre facteur qui favorise l'instauration d'un climat d'ensei­gnement autodéterminé (self-directed) expérien­tiel 1.

De son côté, Saul Alinsky, animateur social qui préco-

nise une action directe non violente et qui a travaillé

dans des milieux difficiles énumère les qualités plus vi-

vantes de l'intervenant:

Curiosité, irrévérence, imagination, sens de l'humour, pressentiment d'un monde meilleur, une personnalité organisée, un schizophrène politique bien intégré, égo, esprit libre et ouvert, une relativité politique.

Plus il a d'expérience, plus l'organisateur peut vrai-

ment entrer en communication avec le public. Cette quali-

té de communicateur est également fondamentale, mais doit

se manifester sans brutalité.

1 Carl R. Rogers, op. cit., p. llO

Page 73: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Ainsi la fonction pratique de l'interprétation n'est pas nécessairement de forcer la prise de conscience brutale de ce qui se voulait caché, dérobé, mais de proposer aux partenaires, à leur rythme, et selon leur temps, la matiè.re d'une réélaboration de leur économie psychi­que et relationnelle; sa fonction théorique restant l'intelligibilité de ce qui se passe à travers les processus pris pour objets de connaissances 1.

Il nous semble que l'ensemble de ces qualités sont

loin de correspondre à la muséologie traditionnelle, qui !. -continue à engranger des objets et qui confie aux spécia-

listes ou aux experts les rôles de conservation, d.':anima-

tion et de diffusion. Cependant, si l'on croit que la

nouvelle muséologie tient compte davantage de l'humain que

de l'objet, des cultures que le la Culture, des savoirs

que de la Connaissance, alors il faut faire place à un

type nouveau de muséoloque. Ce qui implique universelle-

ment pour tous les muséographes:

1) L'acquisition de solides connaissances en: anthropologie culturelle et sociale, socio­logie, psychologie, économie, histoire.

2) Des bases solides dans l'étude de la métho­dologie: du travail multidisciplinaire, des communications de masse, de la pédagogie, des enquêtes d'évaluation.

3) Des connaissances importantes dans l'éla­boration des techniques de développement 2.

1 Jacques Ardoino, op. cit., p. 51 2 Stanislas S. Adotevi, Le musée au service des hom­

mes aujourd'hui et demain, Paris, Unesco, 1972, p. 28

66

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CONCLUSION

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CONCLUSION

Nous avons tenté à l'aide du présent mémoire et du

vidéogramme qui l'accompagne, de montrer comment l'aspect

éducatif de l'écomusée a pu contribuer à la création d'un

sentiment d'appartenance au territoire, à la prise en char-

ge par la population de son développement global et à l'uti­

lisation de l'exposition comme outil d'expression populaire.

Par une description des processus éducatifs utilisés

en milieu scolaire, nous avons démontré les fondements psy-

chanalytiques de la cBéation enfantine libérée, grâce au

programme: Musée, école de liberté.

L'exposé sur l'éducation populaire et ses applications

de techniques de créativité, le cours en muséologie popu-

laire, les expositions interprétatives, la cueillette de la

mémoire collective et l'ouverture vers l'extérieur nous a

permis de constater que l'auto-apprentissage est la métho-

dologie de base du projet éducatif de l'écomusée.

Enfin l'autogestion de l'entreprise liée à l'appren-

tissage de la liberté en fonction du principe d'autonomie

prouve à son tour la p:ortée éducative de l'écomusée.

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L'être humain doit être préparé, dès sa pl us tendre

enfance, à développer ses possibilités sensorielles, in­

tellectuelles et morales, afin de ~~~enir un être autonome

capable de surmonter avec créativité toutes les situations

de la vie, tout en participant socialement au mieux-être

de ses semblables et à la démocratie. L'écomusée en serait­

il un outil privilégié ?

Page 77: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

BIBLIOGRAPHIE

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BIBLIOGRAPHIE

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APPENDICES

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APPENDICE A

Définition évolutive de l'écomusée

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DEFINITION EVOLUTIVE DE L'ECOMUSEE

Un écomusée est un instrument qu'un pouvoir et une

population conçoivent, fabriquent et exploitent ensemble.

Ce pouvoir, avec les experts, les facilités, les ressour­

ces qu'il fournit. Cette population, selon ses aspirations,

ses savoirs, ses facultés d'approche.

Un miroir où cette population se regarde, pour s'y

reconnaître, où elle recherche l'explication du territoire

auquel elle est attachée, jointe à celle des populations

qui l'ont précédée, dans la discontinuité ou la continuité

des générations. Un miroir que cette population tend à

ses hôtes, pour s'en faire mieux comprendre, dans le res­

pect de son travail, de ses comportements, de son intimité.

Une expression de l'homme et de la nature. L'homme y

est interprété dans son milieu naturel. La nature l'est

dans sa sauvagerie, mais telle que la société tradition­

nelle et la société industrielle l'ont adaptée à leur

image.

Une expression du temps, quand l'explication remonte

en deçà du temps où l'homme est apparu, s'étage à travers

les temps préhistoriques et historiques qu'il a vécus,

débouche sur le temps qu'il vit. Avec une ouverture sur

les temps de demain, sans que, pour autant, l'écomusée se

Page 84: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

77

pose en décideur, mais en l'occurrence, JOUe un rôle d'in­

formation et d'analyse critique.

Une interprétation de l'espace. D'espaces privilégiés,

où s'arrêter, où cheminer.

Un laboratoire, dans 1 ~. mesure où . il contribue à l' étu­

de historique et contemporaine de cette population et de

son milieu et favorise la formation de spécialistes dans

ces domaines, en coopération avec les organisations exté­

rieures de recherche.

Un conservatoire, dans la mesure où il aide à la pré­

servation et à la mise en valeur du patrimoine naturel et

culturel de cette. population.

Une école, dans la mesure où il associe cette popu­

lation à ses actions d'études et de protection, où il l'in­

cite à mieux appréhender les problèmes de son propre ave­

nir.

Ce laboratoire, ce conservatoire, cette école s'ins­

pirent de principes communs. La culture dont ils se ré­

clament est à entendre en son sens le plus large, et ils

s'attachent à en faire connaître la dignité et l'expres­

sion artistique, de quelque couche de la population qu'en

Page 85: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

émanent les manifestations. La diversité en est sans li-

mite,, tant les données diffèrent d'un échantillon à l'au-

tre. Ils ne s'enferment pas en eux-mêmes, ils reçoivent

et donnent.

Georges -Henri Rivière 22 janvier 1980

78

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APPENDICE B L'écomusée

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THÉORIE DE L'ÉCOMUSÉE COMMUNAUTAIRE L'écomusée, dans sa variété communautaireS, c'est d'abord une communauté et un objectif: le développement de cette communauté. C'est ensuite une pédagogie globale s'appuyant sur un patrimoine et sur des acteurs, appartenant tous deux à cette même communauté. C'est enfin un modèle d'organisa­tion coopérative en vue du développement et un processus critique d'évaluation et de correction continue.

Si donc, dans le mot lui-même, le facteur "musée" se rapporte exclusivement au langage des choses réelles, le préfixe "éco(logique)" se réfère à une notion d'écologie humaine et aux relations dynamiques que l'homme et la société établissent avec leur tradition, leur environnement et les processus de transformation de ces éléments,lorsqu'ilsênt atteint un certain stade de conscience de leur responsabilité de créateurs. 1

1 Hugues de Varine,"l'écomusée", Gazette, Ottawa, Association des musées canadiens, volume II, numéro 2, 1978, p • .31

80

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Une pédagogie globale

Ce patrimoine qui reproduit, en deux ou trois dimensions lorsqu'il s'agit de choses et, pour les biens non tangibles, par tous les moyens d'expression et de représenta­tion, la communauté sous tous ses aspects, sert de mê:. ' "au et de vocabulaire, dans le cadre de l'écomusée, à une pédagogie globale. Celle-ci prend en compte tous les problèmes de la communauté actuelle et toutes les questions que pose son devenir, pour les traiter de manière analytique et critique en faisant appel à la conscience et à l'initiative créatrices de la population elle-même.

Ëtant donné que c'est à cette population que revient la tâche de construire son propre avenir, l'écomusée prét~:::nd lui donner à la fois les éléments d'information nécessaire~ à l'appréhension du problème posé et la volonté efficace de dégager une solution originale par la combinaison d'éléments et de facteurs retirés du passé, du présent, du répertoire des moyens techniques disponibles et de la possibilité d'innova­tion.

L'écomusée, pour en arriver à cet état de conscience et d'initiative favorable au développement communautaire, doit franchir plusieurs étapes:

- la connaissance de l'identité communautaire par l'éducation du regard. Par définition, le patrimoine est intérieur à la communauté et sa perception est devenu~ automatique. Soit cette dernière est affaiblie dans son acuité par l'habitude (on voit un objet, on subit une tradition devenue routine ... ), soit elle est orientée et parcellisée par l'imposition d'un code (l'église-maison communautaire - symbole de l'unité du village devient ainsi dans de nombreux cas un monument historique -attraction touristique). n faut donc, par un processus répété d'explicitation et de réflexion collêctive, que l'inventaire et l'étude du patrimoine soient l'objet de l'activité de l'ensemble de la population;

- la découverte de la complexité de la problématique communautaire, au-delà des questions relevant exclusivement des intérêts personnels. L'avenir de tous étant conditionné par la manière dont chacun saura poser les problèmes collectifs, il est essentiel que cette problèmatique ne reste pas le domaine réservé de fonctionnaires délégués par l'autorité centrale ou d'élus mis en situation de notables détenteurs du savoir et du pouvoir. L'écomusée agira notamment en organisant des contacts répétés entre groupes de population (associations ou cellules naturel­les de voisinage ou de catégories socio-professionnelles) sur des sujets tels que l'habitat, l'école, la con· sommation, les relations interculturelles dans la communauté, la santé, les loisirs, etc;

81

- l'ouverture aux indispensables apports ex· térieurs soit à titre d'éclairages complémentaires, soit comme participation technique à la recherche de solutions. Ble se fait par la multiplication des références extra-communautaires au sein des activités de l'éco­musée afin d'habituer la population aux parallèlismes des situations et aux convergences des problèmes. Elle se fait aussi par l'introduction d'activités thématiques reflétant des situations autres, voire radicalement différentes, toujours en vue d'éduquer le regard et le sens critique, cette fois par opposition ou prise de conscience de la différence. L'étude des problèmes urbains, par exemple, peut être éclairante pour les membres d'une micro-communauté villageoise, pour remettre en perspective à la fois les dimensions des problèmes spécifiques de leur présent et les risques inhérents à un développement tr.op ambitieux pour l'avenir;

- la prise en charge, d'une façon expéri· mentale, par la communauté elle-même ou par un de ses sous-ensembles, de quelques problèmes exemplaires par lesquels le processus complet de développement sera appliqué: repérage, étude, recherche et choix de solutions, mise en oeuvre, critique et évaluation. Les projets-pilotes, pour lesquels le patrimoine, les moyens d'expression, le potentiel humain seront mobilisés de façon exceptionnelle, ont pour but de tester l'état de préparation de la population, la qualité de ses réactions, ia vaieur des résultats obtenus. n n'est pas impossible qu'à l'issue de ces diverses

étapes, l'écomusée devienne inutile, le degré de conscience et d'initiative de la communauté étant devenu suffisant pour permettre un développement spontané. Dans ce cas, il est probable que l'on reviendrait à la formule du musée plus traditionnel, a la fois banque de données (sous la forme surtout d'objets) et université populaire (s'exprimant toujours par le langage des objets).

Une autre hypothèse est que l'écomusée devienne l'instrument normal du développement. n n'est alors plus possible d'en préjuger la forme, le type d'activités, la méthode de travail, qui sont forgées par la communauté elle-même. Car la pédagogie de l'écomusée, à l'issue du stade de formation, est essentiellement évolutive, en création et adaptation continue. 2

2 Hugues de Varine, op. cit., p. JJ

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APPENDICE C Bloc diagr~e de la Haute-Beauce

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ESTRIE

LAC­

MEOANTIC

mètres

400

eoo 0

REOION DE l!AM IANTE

~ Paysmag~

BLOC DIAGRAMME DE LA HAUTE-BEAUCE

BEAUCE

mètre• eoo 0

/~nord

r -, -----. 0 B 10 krn

<Xl lvJ

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APPENDICE D Rappel historique

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ŒAPPEL HISTORIQUE

DE LA CREATION DE L'ENTREPRISE A NOS JOURS

1979: Naissance d'une entreprise culturelle de dévelop­pement régional

. Incorporation de MUSEE ET CENTRE REGIONAL D'IN­TERPRETATION DE LA HAUTE-BEAUCE

. Acquisition au coût de 60 000 00 $ de la Collec­tion ethno:raphique (1 600 objets) de Monsieur Napoléon Bolduc, un citoyen de La Guadeloupe

85

• Bail à long terme avec la Corporation municipale de Saint-Evariste de Forsyth qui s'est portée acquéreur de l'ancien presbytère de Saint-Evariste

. Aménagement du presbytère à différentes fins (salles d'exposition, d'animation touristique, de cours, comptoir d'artisanat .•. )

• Localisation de la Collection Bolduc

1980: Première année d'opération

. Ouverture au public du MUSEE ET CENTRE REGIONAL D'INTERPRETATION DE LA HAUTE-BEAUCE

. Présentation de façon thématique de la Collection permanente Napoléon Bolduc

. Première exposition d'interprétation de la région avec pour thème "Le passé au rendez-vous du présent" suivie en décembre de "La Tradition du Temps des Fêtes dans nos familles"

. Inauguration à Saint-Hilaire de Dorset de la pre­mière antenne écomuséale: réalisation d'un exhibit de plein air et création de Comité d'action tou­ristique et culturel de Saint-Hilaire de Dorset

1981: Deuxième année d'opération

• Recrutement de 2 000 membres . Première exposition collective "La femme à

travers les trousseaux de baptême" et accueil de 8 000 visiteurs

. Exposition itinérante "L'Erable à coeur ouvert"

. Ouverture d'un kiosque d'information touristique

Page 93: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

Lancement du premier "Festival des foins" à Saint-Evariste

. Accueil du 6e colloque itinérant du Conseil des monuments et sites du Québec

86

. Structuration de services d'éducation et d'anima­tion suivie du lancement du programme des trousses éducatives en milieu scolaire et des cours en muséologie populaire

• Accueil de 1 500 élèves dans le cadre d'un proces­sus pédagogique conçu et présenté par le personnel d'animation .

. Inauguration des portes d'entrée de l'écomusée à Saint-Romain et Saint-Victor

. Stage en France intitulé "L'écomusée, outil de développement"

1982: Troisième année d'opération

. Ex:position collective des 13 villages sous le theme "L'appropriation par le haut-beauceron de son environnement vécu" dans le cadre du projet "Haute-Beauce créatrice, Musée Territoire"

. Inauguration de 7 nouveaux exhibits de plein air permanents en Haute-Beauce représentant un inves­tissement du milieu d'environ 40 000 $

. Echange culturel: Voyage en France (Bretagne, Co­glais) de 35 hauta~eaucerons

• Prix du Mérite, décerné par l'Association des musées canadiens pour l'intégration de la popu­lation aux activités, la reconnaissance du patri­moine collectif et le travail d'animation et d'éducation

. Mention d'honneur de l'Association Touristique du Pays de 1 'Erable et de la Société des musées québécois

1983: Quatrième année d'opération

. Exposition sous le thème "Les chefs-d'oeuvreux de la Haute-Beauce

. Adoption du sigle de la Haute-Beauce suite à un concours populaire et lancement de la Semaine de la Haute-Beauce

Page 94: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

87

Participation aux Etats généraux de l.a culture en Beauce

. Accueil de la délégation bretonne (23 personnes) de l'écomusée du Coglais en France

. Exposition "Granit, Haute-Beauce-Coglais" à Lac­Drolet ·

. Amendements aux statuts et règlements généraux de la CORPORATION: MUSEE ET CENTRE REGIONAL D'INTER­PRETATION DE LA HAUTE-BEAUCE INC. devient ECOMUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE, MUSEE TERRITOIRE INC., le nom­bre de membres du conseil d'administration passe de 7 à 12, les 5 zones (Vallons, Versant bleu, Crêtes, Plateau, Coeur) sont officiellement repré­senté es

• Exposition permanente à Courcelles dans un fourgon de queue de train sous le thème "Le train tourne avec entrain"

. Reconnaissance du presbytère de Saint-Evariste com­me monument historique

. Visite officielle en Haute-Beauce du ministre des Affaires Culturelles du Québec, monsieur Clément Richard

. pose d'une plaque commémorative pour marquer la reconnaissance du presbytère comme monument historique

. inauguration de "La Maison des gens de Saint-Hilaire"

. Intégration au projet de système-réseau des musées de la Beauce

• Présence de l'Ecomusée de la Haute-Beauce au Sommet économique de la région de Québec: consensus des participants face à l'Ecomusée, outil de dévelop­pement

1984: Cinquième année d'opération

• Accréditation de l'écomusée par le Ministère des Affaires Culturelles

. Réaménagement de la collection permanente

. Restauration de l'édifice

. Symposium sur l'art animalier

Page 95: Maude Céré Écomusée Haute Beauce, Québec 1984

88

. Accueil de jeunes bretons dans le cadre du jumelage avec l'écomusée du Coglais

. Accueil de 80 jeunes marins dans le cadre des fes­tivités "Québec 1.534-1984" Tenue du premier atelier international sur les écomusées et la nouvelle muséologie

. Présentation du projet dè. la "Maison du Granit" dans le cadre du sommet économique de l'Estrie

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APPENDICE E Buts et objectifs de la Corporation

de l'Ecomus~e de la Haute-Beauce

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BUTS ET OBJECTIFS DE LA CORPORATION DE L'ECOMUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE

RESOLUTION DES MEMBRES

Sur proposition de Robert Poulin appuyée par Blandine

Bureau, il est résolu à l'unanimité d'autoriser les admi­

nistrateurs de la corporation à demander des lettres pa­

tentes supplémentaires qui modifient la dénomination so­

ciale, le nombre d'administrateurs et les objets de la

Corporation de la façon suivante:

DENOMINATION SOCIALE

La dénomination sociale de la Corporation MUSEE ET

CENTRE REGIONAL D'INTERPRETATION DE LA HAUTE BEAUCE INC.

est changée en celle de ECOMUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE, MUSEE

TERRITOIRE INC ..

NOMBRE D'ADMINISTRATEURS

Le nombre des administrateurs de la Corporation MUSEE

ET CENTRE REGIONAL D'INTERPRETATION DE LA HAUTE BEAUCE INC.

est changé pour celui de 12 (douze).

OBJET

Les objets sont remplacés par les suivants:

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1. Mettre en valeur la collection Napoléon Bolduc et le

patrimoine de la Haute-Beauce.

91

2. Gérer le Musée et centre régional d'interprétation de la

Haute-Beauce situé dans l'édifice du presbytère de Saint­

Evariste de Forsyth, reconnu monument historique, con­

sidéré cç ~me un équipement central et comme un centre

de services.

J, Contribuer à la gestion des équipements collectifs locaux

mis en place par les populations usagères de l'écomusée.

4. Encourager la participation de la population à la con­

ception et à la réalisation des expositions et autres

activités créatrices.

5. Mettre en place les structures de recherche, d'animation,

d'éducation populaire, de planification et d'organisation

utiles au développement culturel de la région.

6. Agir comme outil de connaissance et de recherche sur

l'identité de la Haute-Beauce.

?. Assurer une liaison permanente avec les organismes cul­

turels, touristiques, éducatifs et de loisirs de la

région.

8. Assurer une liaison permanente avec les instances ad­

ministratives et économiques de la région en particulier

avec les municipalités régionales de comté et les minis­

tères responsables du développement de la région agro­

forestière.

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9. S'inspirer d'objectifs coopératifs tant dans son fonc­

tionnement que dans les services rendus.

10. Agir en collaboration avec le réseau des musées de la

Beauce, conformément à sa structure.

92

11. De façon générale, contribuer au mieux~êire · èt au mieux~

vivre de la région correspondant au territoire de la

Haute-Beauce, notamment par le maintien de la qualité

de l'environnement visuel.

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APPENDICE F Les instances décisionnelles de

l'Ecomusée de la Haute-Beauce

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LES INSTANCES DECISIONNELLES DE

L'ECOMUSEE DE LA HAUTE-BEAUCE

ARTICLE 17. COMPOSITION

Les affaires de la Corporation seront adminis­trées par un 6onseil d'administration composé de (12) douze membres dont les (5) cinq repré­sentant(e)s de zones et (1) représentant 1e la Municipalité de Saint-Evariste de Forsyth

ARTICLE 38. COMITE DES USAGERS

Le ~omité des usagers est formé des représen­tants, un (1) par village, des treize comités de villages (antennes) et de la directrice de l'Ecomusée. Il joue le rôle d'orientation et d'animation de la structure de base. Il se réunit au moins une fois l'an, préférablement avant l'assemblée générale, et élit son pro­pre président.

ARTICLE 39. GROUPES ASSOCIES

Les groupes associés ou antennes, remplissent les conditions suivantes: constituent un groupe représentatif d'une communauté de base terri­toriale et humaine (village, rang .•. ).

ARTICLE 40. CENTRE DE RECHERCHE EN ECOMUSEOLOGIE APPLIQUEE

Le centre de recherche en écomuséologie ap­~liquée réunit le personnel cadre qui déter­mine les sujets de recherche. Il intègre le Laboratoire d'expérimentation didactique en milieu rural, fait appel à toute autre person­ne utile aux expertises nécessaires. Il joue le rôle de formation permanente à la recher­che en intégrant dans sa structure et dans ses programmes les usagers. Les buts du cen­tre sont la recherche de solutions en vue de l'aménagement social et physique de la région.

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APPENDICE G Extraits du Rapport Jean, Apprendre: une action volontaire et responsable

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Le musée <( traditionnel » prend souvent en charge l'histoire « officielle » au détriment de la petite histoire. Un musée ouvert sur le milieu et s'intéressant davantage à la participation du public devrait mettre l'accent sur l'aspect éducatif et sur la valorisation du milieu ambiant. En ce sens, il devrait s'appuyer davantage sur les citoyens que sur l'État. Quelques expériences intéressantes, reliées à ces préoccupations. ont actuellement cours au Qué­bec. Il s'agit du Centre régional d'interprétatio.n de la Haute-Beauce. du projet de musée du voisinage dans le quartier Centre-sud à Montréal (la Maison du Fier-monde). du Musée-pilote à La Pocatière. ou encore de l'écomusée de Pointe-du-Moulin. qui intègre la conservation d'objets à une dynamique de réappropriation du passé et du patrimoine par des moyens tels que l'animation. la fête. la pratique d'activités sur place. etc. Ces expérien­ces récentes, qui s'inspirent des " neighbourhood museums » aux États-Unis et des écomusées en France (parc d'Armorique. projet du Cogles et musée de Bretagne) témoignent d'une volonté de la population de s'impliquer à tous les niveaux importants de la gestion d'un musée: cueillette d'informa­tions, dons et orientation du musée. Évidemment. cette ûrÎentaiiûii appelle une revalorisation des fonctions d'animation, de recherche. d'éducation. d'interprétation et de diffusion du musée par rapport à ses fonctions traditionnelles. et toujours essentielles. de conserver et de collectionner: Cette insistance sur la participation. la décou\·erte personnelle. /'activité créatrice (musique. danse. art dramatique. ainsi que certains domaines connexes comme /'archéologie. /' histoir~ et la géologie) est typique de /'approche " ou\·ene ... c'est-à-dire des méthodes acti\"i!S. qu'on préconise maimenam pour /'éducation. au musé comme à /'école. ( p • 2 67 )

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Les musées

147. Que. dans une perspective de complémentarité et d'utilisa­tion des ressources. l'on reconnaisse la fonction éducative du musée et l'importance de son appr ="" dans la formation des adultes.

148. Que, dans une perspective d'accès, les musées modifient leurs horaires pour accommoder le plus grand nombre possible d'utilisateurs.

149. Que, dans une perspective de complémentarité et d'utilisa­tion des ressources, les institutions muséologiques reçoivent l'appui financier nécessaire à la formation d'un personnel quali­fié et permanent et à la poursuite d'une fonction éducative pertinente leur permettant un engagement dans la vie éducative et culturelle de leur milieu.

150. Que la recherche muséologique. indispensable à une inter­vention adaptée aux différentes catégories d'adultes québécois, soit stimulée afin de trouver les outils nécessaires à une inter­vention de qualité.

151. Que l'action muséologique, en matière de science et de technologie, repose sur les éléments suivants:

a) la reconnaissance du fait que la culture scientifique et techni­que s ·insère dans la culture générale:

b) l'extension de l'action muséologique à l'étendue du territoire québécois, dans un contexte de souplesse et d'accès:

c) J'utilisation maximale des équipements déjà existants:

d) une approche systémique et ouverte dans la préparation et la présentation des « exhibits ».

152. Que soient créés, à la demande des régions, des centres régionaux de science et de technologie ;

a) que les régions décident de la forme. de J'emplacement et des fonctions de ces centres. et que J'on mene J'accent sur Je recyclage de bâtiments anciens:

b) que J'on obtienne. pour ce faire. la collaboration des organis­mes et des institutions qui oeuvrent déjà. dans la région. en muséologie scientifique et dans les domaines connexes:

c) que J'on procède à J'inventaire du patrimoine industriel et technique de la région afin d'en exploiter les virtualités muséo­graphiques. (p. 2 81)

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Le musée et centre ,régional d'interprétation de la Haute-Beauce s'est également signalé comme le premier écomusée au Québec*. Fondé depuis trois ans, il couvre un territoire de 25 municipalités et est essentiellement soutenu par la participation des quelque 2 200 familles qui en sont membres. À partir des trois principes de base de décentralisation. de participation et de cohésion régionale. la structure organisationnelle de l'écom :..~ée est formée de cinq comités de village qui voient à la mise c:n oeuvre c:t à la gestion de nombreux projets. (( Miroir à travc:rs lc:quel une population se contemple »;

l'écomusée vise une action culturelle globale et, par le fait même, une valorisation régionale. Son travail d'animation et. d'éducation comporte plusieurs volets. Dans le domaine des rapports entre le musée et le milieu scolaire, il fait tïgure d'innovateur: 1 500 élèves provenant de six commis­sions scolaires environnantes ont été rejoints durant une première année d'opération. L'éducation populaire tient également une place de choix. Des comités d'usagers existent dans les villages: on y dispense des cours de muséologie et la population est incitée à bâtir ses propres expositions. Des expos~tions ont ainsi suscité l'organisation de colloques et de panels tou­chant des problèmes de développement de la région. L'action sociale et éducative du musée de la Haute-Beauce peut à plusieurs égards l!tre considérée comme exemplaire.

L'expérience du musée de la Haute-Be:lUce fait l'objc:t. depuis près de deux ans. d'un projet de transfert c:n milic:u urbain. Un comité d'une quinzaine de citoyens. assisté de personnes-ressources et de recherchistes de I'U.Q.A.M .. mûrit le projet de créer un musée à la dimension d'un quartier. le centre-sud. de l'installer éventuellement dans une école ou une usinedésaffectée. de lui donner le plus beau des noms, la (( Maison du fier monde >), résumant ainsi le rôle qu'il entend jouer sur son territoire. Car c'est de ça qu'il s'agit: faire de la préservation du patrimoine un instrument d'éducation et d'action collective! (p. 39 8)

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